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La Condition Ouvrière :

Auteur : Simone Weil (philosophe humaniste née le 3 février 1909 à Paris et


décédée le 24 août 1943 à Ashford).

Date de Publication : 1951 dans la collection « Espoir » dirigée par Albert


Camus.

Thème : Travail (Conditions de travail des ouvriers dans les usines).

Genre : Journal intime, monographie : étude exhaustive d’un sujet précis.

Mise en forme de l’œuvre (résumé par partie) : Ensemble de recueils de textes


qui décrit la condition ouvrière et qui ont été écrits pendant ou après
l’expérience à l’usine de Simone Weil (son ouvrage n’a pas été publié de son
vivant). On y retrouve notamment des lettres écrites destinées à ses proches : à
son ancienne élève Simone Gibert, ou à ses camarades militants Boris
Souvarine et Nicolas Lazarévitch auxquelles elle raconte son travail à l’usine et
les difficultés qu’elle rencontre au quotidien (pages 49 à 76 : l’Usine, le travail
et les machines). Elle va également destiner des lettres à des personnalités
(grands patrons, mouvements syndicalistes) afin qu’elle puisse publier ses
articles dans leurs revues, principalement militantes, et parfois sous
pseudonyme qui proposent d’analyser la condition ouvrière et la conjoncture
politique de l’époque (pages 205 à 351 : l’Usine, le travail et les machines).
Puis, elle va critiquer les conditions de vie des ouvriers en les comparant avec
celles des autres pays en disant notamment : « La condition matérielle et
morale des ouvriers français tendait cruellement à se rapprocher des pires
formes de salariat ». Tout en critiquant le patronat qui oppresse les ouvriers à
devoir suivre des cadences et des durées infernales afin d’arriver à faire le
maximum de résultats. (Pages 389 à 397 : La Condition Ouvrière). Enfin, elle
continue de développer ses propos dans lesquels elle dit ce qui est nécessaire
de mettre en œuvre afin de pouvoir travailler de manière libre dont le fait
d’améliorer l’enseignement scolaire pour pouvoir y travailler la formation de
l’attention (pages 418 à 434 : Condition première d’un travail non servile).

Contexte politico-économique : Crise économique et récession qui touchent la


France dans les années 30 à la suite du krach boursier de Wall Street qui a
touché les Etats-Unis en 1929. Dans La Condition Ouvrière de Simone Weil, les
lettres ont principalement été écrites entre 1934 et 1941, une époque où les
progrès envers les conditions de vie des ouvriers dans les usines vont
apparaître. Notamment en 1936 avec l’arrivée au pouvoir du Front Populaire
qui instaura les accords de Matignon qui contribueront à l’amélioration des
conditions de vie des travailleurs (2 semaines de congés payés et 40h de travail
par semaine sans réduction de salaire). Malgré cela, les conditions de vie des
ouvriers restent tout de même très précaires avec un travail à la chaine tels que
le fordisme* et le taylorisme* qui sont éprouvants à la fois physiquement et
mentalement et qui nécessite de travailler sans aucune pensée, en étant
comme une machine afin de pas souffrir de son travail.
Taylorisme* : méthode de rationalisation du travail industriel où les employés
sont spécialisés à l’extrême avec une étude des gestes nécessaire au travail
ainsi qu’une rémunération cherchant à les stimuler. Création dans les années
1880 par Frédéric Taylor, un ingénieur américain qui a imaginé l’OST
(Organisation scientifique du travail) basé sur :
- Une division verticale du travail (la hiérarchie entre les directeurs et les
ouvriers)
- Une division horizontale (tous les ouvriers sont mis sur le même plan
hiérarchique et ont chacun leurs tâches dans l’usine).
- Chronométrage (ils doivent avoir une certaine productivité en faisant une
tâche en un temps donnée pour éviter les temps morts ou les discussions avec
d’autres employés ainsi que la réduction des déplacements).
-Séparation exécution et conception du travail (ouvrier différent ingé).
- Travail décomposé, ouvrier spécialisé dans un domaine de tâches.
Bilan : Positif économiquement et productivité des ouvriers mais détérioration
des conditions de travail.
Fordisme* : Modèle d’organisation amélioré du taylorisme dans lequel les
employés sont cantonnés à faire des tâches bien précisent afin de diminuer les
coûts de fabrication. Innovation dans les années 1900 par Henri Ford,
industriel, américain et construction automobile, il reprend notamment les
principes du taylorisme en y ajoutant 3 innovations :
- travail à la chaîne, le convoyeur (fait disparaître le chronométrage).
- la standardisation des pièces (modèles uniques reproduits à grandes échelles,
exemple : la Ford T).
- La journée à 5 dollars. Ford a augmenté les salaires afin de fidéliser les
ouvriers et régler le problème du Turn Over (taux de départ des ouvriers).
Bilan : Positif au niveau économique, améliorations des rémunérations mais
encore des conditions de travail précaires et éprouvantes. Organisation qui a
encore des limites, toujours inadapté et inhumain.
Références :
Critiques de Charlie Chaplin contre le Fordisme dans sa comédie, Les Temps
Modernes (1936).

Résumé global :

Le 20 juin 1934, Simone Weil se met en congé afin de pouvoir y étudier les
conditions de vie des ouvriers dans les usines. Elle dit dans l’œuvre : « Je
désirerais préparer une thèse de philosophie concernant le rapport de la
technique moderne, base de la grande industrie, avec les aspects essentiels de
notre civilisation, c’est-à-dire d’une part notre organisation sociale, d’autre part
notre culture »
Du 4 décembre 1934 au 23 août 1935, Simone Weil est ainsi en immersion dans
le monde ouvrier en travaillant comme ouvrière successivement chez Alsthom
à Paris, aux Forges de Basse-Indre à Boulogne-Billancourt puis chez Renault.
Pour elle, il ne s'agit pas de vivre une expérience, mais d’« entrer en contact
avec la vie réelle ». Titulaire d’une agrégation de philosophie, elle souhaite
vivre de l’intérieur la condition ouvrière. Elle y travaille jusqu’en avril, avec
plusieurs périodes de mise à pied ou de convalescence. En août 1935, elle cesse
de travailler à l’usine et enseigne à la rentrée au lycée de Bourges. Simone Weil
livre dans cet article un témoignage de la vie d’usine.
Chaque jour, elle formulait alors les instants vécus, « le sentiment d'être livrée
à une machine, de ne pas savoir à quoi répond le travail accompli, ce qu'il sera
demain, si les salaires seront diminués… » qui vont mettre en lumière en vivant
leur quotidien, les conditions épuisantes des ouvriers à l’usine. Elle va
également décrire la dureté des tâches physiques, l’impact du travail sur le
moral des ouvriers, les relations de pouvoirs existantes, un rapport maîtres-
esclaves. Son but : mettre au-devant de la scène leur voix face à l’ignorance car
ces ouvriers n’arrivent pas à réfléchir à leur propre condition et n’arrivent
encore moins à mettre des mots envers le travail qu’ils subissent. Comme elle
dit, en travaillant, « la pensée se rétracte » due aussi à une répétitivité
monocorde des tâches. Conséquences : souffrance + relations dures avec les
autres ouvriers qui ne parlent pas de leur souffrance aux autres, relations
fraternelles exceptionnelles, déshumanisation. Les ouvriers doivent prendre
conscience de l’utilité de leur travail selon elle, même s’ils font ça par dépit afin
de « gagner leur vie ». Ainsi, en cherchant à comprendre les fondements de la
brutalité ouvrière, Simone Weil inscrit sa réflexion dans la perspective du
syndicalisme révolutionnaire, anticapitaliste, qui prône l’auto-organisation des
travailleurs. Elle veut abandonner l’organisation tayloriste, au profit d’une
réorganisation complète du travail en introduisant notamment un nouveau
rapport aux machines. Ainsi, une société sans travail ne serait pas une société
véritablement émancipée : le travail, dans certaines conditions, est formateur,
il nous permet de nous épanouir. Certes, il contient toujours une part de
nécessité et de souffrance, mais il n’est pas déshumanisant par nature. Weil
met ainsi en avant dans ce texte la nécessité de :
- transformer les stimulants du travail,
- instaurer un nouveau rapport à la machine,
-intéresser l’ouvrier à la production,
Dans l’objectif de faire entrer une forme de joie à l’usine afin que la condition
ouvrière cesse d’être une condition d’esclave.
- La Condition Ouvrière est la somme du Journal d'usine et d'une « série de
lettres et d'articles écrits en fonction de son expérience quotidienne.
Ce qu’il faut en retenir : Pour Simone Weil, le but n’est pas d’émanciper les
hommes du travail, ou de refuser le travail manuel de l’usine mais plutôt
transformer radicalement l’organisation du travail, afin que les hommes
retrouvent leur dignité et quittent leur condition d’esclave.

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