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MANAGEMENT II
SECTION B et C
Cours de A YASSINE
2019-2020
Thème
1. L’ECOLE CLASSIQUE
Une première approche de l’organisation et son management est élaborée au début du 20e siècle à
partir des travaux de trois auteurs : F. Taylor (américain), H. Ford (américain). H. Fayol (français) et M.
Weber (allemand). Leurs apports sont regroupés sous l’appellation « école classique » dans le sens où ils
sont les premiers fondements de la théorie des organisations. Ces auteurs apportent une première
réponse aux trois questions : (1) Existe-t-il une répartition du travail et un rôle des acteurs plus pertinents ?
(2) Quelle est la forme de pouvoir et de management à adopter ? (3) Existe-t-il une structure efficace ?
Aux yeux de ces auteurs, l’entreprise n’est qu’un lieu de production où on combine techniquement des
facteurs de production. Le propriétaire est un décideur rationnel alors que les acteurs de l’organisation ne
sont que des exécutants sans logique d’action propre, sans pouvoir.
Bonne lecture !
Source :
Œuvres de référence
– Théorie des sentiments moraux, 1759.
– Recherche sur la nature et les causes de la richesse des nations, 1776.
d’énergie possible tout en couvrant les distances les plus longues possibles. Son obsession se
traduira, plus tard, par la recherche de la productivité maximale dans le domaine industriel.
En 1903, ses recherches le conduisent à exprimer ses vues dans Shop Management (La gestion
des ateliers). En 1911, il publie un ouvrage célèbre, traduit en plusieurs langues, qui fera date et
qui aura un retentissement très important : The Principles of Scientific Management. En appliquant
les principes de l’OST, l’industrie américaine réalise un accroissement sans équivalent de sa
productivité et de ses profits. Frederick W. Taylor, qui ouvre la voie de la productivité à tous les
pays lancés dans la course industrielle, acquiert une renommée internationale. En France, c’est
Henry Le Chatelier (1850-1936) qui s’enthousiasme pour ces méthodes qu’il diffusera et fera
connaître.
Bien que Frederick W. Taylor ait recherché les conditions de compatibilité entre les dirigeants des
usines et les exécutants (réconcilier l’ouvrier et le patron), ses principes ne prenaient pas en
compte les facteurs psychologiques et sociaux du travail (si l’on se réfère à la célèbre pyramide
de Maslow, Frederick W. Taylor s’arrêta au second niveau). En 1911, les grèves de l’arsenal
de Watertown ternissent ses thèses. Georges Friedmann, en 1956, avec le livre Le travail en
miettes, mène une réflexion sur les conséquences morales et sociales de ces méthodes qui condui-
sent à la déshumanisation, à la déqualification et à l’aliénation des ouvriers. C’est à partir de la fin
des années 1960 que le système taylorien rencontre une grande désaffection et un rejet de la part
des salariés, dus à la monotonie du travail et à l’absence d’initiative personnelle, autant de
facteurs qui ont engendré de graves dysfonctionnements sociaux.
réaménager le poste de travail pour qu’il soit adapté à la personne et non adapter la personne au
poste de travail.
Il met en place une organisation représentée par des contremaîtres chargés de réaliser des
contrôles. L’efficacité passant par la spécialisation des tâches, un subordonné dépendra de
plusieurs chefs en fonction du problème posé. Il n’y a pas d’unicité de commandement (voir
Henry Fayol), mais une multiplicité de lignes hiérarchiques. L’ouvrier aura autant de chefs spécia-
lisés (hiérarchie fonctionnelle) qu’il y a de fonctions différentes nécessaires à l’exécution de son
travail. L’organisation prônée par Frederick W. Taylor est une organisation dans laquelle on
rajoute, à la ligne hiérarchique (commandement) « line », un « staff » (le corps des experts) pour
créer une organisation de type « staff and line » que l’on traduit par « hiérarchie linéaire et fonc-
tionnelle » ou encore « hiérarchico-fonctionnelle ».
Œuvre de référence
– Principles of Scientific Management, 1911. Édition française : Principes d’organisation scien-
tifique des usines, traduction de M. J. Royer, préface de Henry Le Chatelier, 1911, H. Dunod
et E. Pinat.
de Taylor avant de considérer Shop Management comme une « bible ». En 1930, « l’étude des
mouvements » de Gilbreth sera reconnue, aux États-Unis, comme une discipline à part entière et
distincte de « l’étude des temps » de Taylor. THERBLIGS est le nom donné à une liste et un
tableau d’unités de travail de base indiquant la totalité des mouvements auxquels pouvait être
réduit un travail industriel. On remarquera que THERBLIGS est l’anagramme des époux Gilbreth.
Œuvres de référence
– Motion Study, 1911.
– Fatigue Study, 1916.
Œuvres de référence
– Work, Wages, and profits, 1911.
– Organizing for Work, 1919.
■ La « re-taylorisation »
La « re-taylorisation » ou le « néo-taylorisme » est, de nouveau, un sujet d’actualité dans l’indus-
trie, les services (saisie informatique) et la restauration « rapide ». En effet, l’informatique et les
nouveaux moyens de communication ont permis de développer le télétravail, en particulier avec
l’utilisation de systèmes de type work flow, hotline, call center. Mais cette nouvelle forme de
travail, qui touche l’ensemble de la population d’employés et de cadres, a multiplié les tâches
répétitives et monotones, induisant de surcroît un stress associé aux objectifs exigés.
36 L’ESSENTIEL DE LA THÉORIE DES ORGANISATIONS
3 Henry Ford
■ L’homme
Henry Ford (1863-1947), aîné de 6 enfants, est né aux États-Unis à Dearborn au Michigan.
Passionné de mécanique, il construit dès l’âge de 15 ans son premier moteur à vapeur et découvre
avec enthousiasme le tout nouveau moteur à explosion. Après avoir été apprenti mécanicien à
Detroit, Henry Ford devient ingénieur-mécanicien et entre en 1891, à la société Edison Company
de Detroit. Nommé ingénieur en chef en 1893, il consacre son temps libre, cette même année, à
la construction d’une automobile bicylindre.
Henry Ford démissionne en 1899 de l’Edison Company et vouera quelques années de sa vie à la
conception et à la construction de plusieurs voitures de course. Le 16 juin 1903, il crée la Ford
Motor Company et commercialise sa première voiture le 15 juillet 1903.
Le 1er octobre 1908, il présente le célèbre modèle T destiné à un grand public. Celui-ci sera commer-
cialisé pendant 19 ans et diffusé à 15 millions d’exemplaires. Grâce à ses méthodes de travail, le
temps de production de ce modèle sera considérablement réduit. Il passera de 6 heures à 1 h 30.
La productivité est donc multipliée par 4. Henry Ford, considéré comme l’un des fondateurs de
l’industrie du XXe siècle, est l’un des premiers à appliquer et à développer les préceptes du Taylo-
risme. Ses méthodes, adoptées par toutes les grandes entreprises, représentent un mode d’organi-
sation du travail qui fera triompher la société industrielle du XXe siècle en créant une forte crois-
sance économique.
■ Le Fordisme
Le Fordisme est défini dans le Lexique de gestion Dalloz comme : « Doctrine et théorie écono-
mique inspirées des méthodes de Henry Ford suivant laquelle la production en grande série et à
la chaîne abaisse les coûts de production et les prix de vente, ce qui augmente la demande et
permet une nouvelle augmentation du niveau de production. »
Ce modèle industriel complétant l’œuvre de Taylor est fondé sur les trois grands principes
suivants :
fois, dans les abattoirs de Chicago et la visite de ces lieux aurait influencé Henry Ford. Il aurait alors
décidé d’appliquer ce principe dans ses usines. Le travail à la chaîne est caractérisé par une méca-
nisation de l’usine qui utilise des convoyeurs pour assurer la circulation des pièces leur permettant
de se déplacer automatiquement, à flux continu, devant des ouvriers. Ces derniers sont fixés à leur
poste de travail et répètent inlassablement les mêmes gestes tout au long de la journée. Cette
« parcellisation » du travail a engendré une déqualification du travail ouvrier. Le rythme du travail
n’est plus sous le contrôle de l’ouvrier, mais dicté par la machine.
Œuvre de référence
– Ma vie et mon œuvre, 1925, Payot.
4 Henri Fayol
■ L’homme
Jules Henri Fayol (1841-1925), ingénieur français, né à Istanbul, est diplômé de l’école des Mines
de Saint-Étienne. Pendant trente années, de 1888 à 1918, il dirigea une société minière, la Société
de Commentrie-Fourchambault-Decazeville qui était, à son arrivée, au bord de la faillite. Il la redressera.
38 L’ESSENTIEL DE LA THÉORIE DES ORGANISATIONS
Son expérience le conduisit à constater que les dirigeants avaient une formation technique mais
aucune formation leur permettant d’administrer une entreprise. Il regretta que cette discipline ne
fût pas dispensée dans les écoles d’ingénieurs et milita pour un enseignement administratif.
Son apport considérable dans l’entreprise en fait le père du management moderne. Grâce à son expé-
rience de terrain, il établit des principes simples et efficaces d’organisation, d’administration et de gestion.
Le premier à se préoccuper du fonctionnement global de l’entreprise, il introduisit la
gestion comme une profession à part entière. Complémentaire de l’approche de Taylor, qui
invente une organisation fondée sur l’amélioration des aspects techniques de l’entreprise, la
pensée de Fayol est tournée vers les dirigeants et l’amélioration des aspects administratifs
de l’entreprise.
Fayol considérait que l’on pouvait appliquer les mêmes principes de management à n’importe
quelle organisation, quel que soit sa taille ou son type d’activité. Ses principes ont d’abord connu
un grand succès aux États-Unis avant qu’ils ne fussent réimportés en France, après la Seconde
Guerre mondiale, par des consultants américains.
7) La rémunération du personnel
« La rémunération du personnel est le prix du service rendu. Elle doit être équitable et, autant que
possible, donner satisfaction à la fois au personnel et à l’entreprise, à l’employeur et à l’employé. »
8) La centralisation
« Trouver la mesure qui donne le meilleur rendement total, tel est le problème de la centralisation
et de la décentralisation. Tout ce qui augmente l’importance du rôle des subordonnés est de la
décentralisation ; tout ce qui diminue l’importance de ce rôle est de la centralisation. »
9) La hiérarchie
« La hiérarchie est la série de chefs qui va de l’autorité supérieure aux agents inférieurs. »
10) L’ordre
Fayol distingue deux ordres : l’ordre matériel et l’ordre social.
Pour l’ordre matériel :
« Pour que l’ordre matériel règne, il faut qu’une place ait été réservée à chaque objet et que tout
objet soit à la place qui lui a été assignée. »
Pour l’ordre social :
« Pour que l’ordre social règne dans une entreprise, il faut, d’après la définition, qu’une place soit
réservée à chaque agent et que chaque agent soit à la place qui lui a été assignée » (The right
man in the right place).
11) L’équité
« Pour que le personnel soit encouragé à apporter dans l’exercice de ses fonctions toute la bonne
volonté et le dévouement dont il est capable, il faut qu’il soit traité avec bienveillance ; l’équité
résulte de la combinaison de la bienveillance avec la justice. »
12) La stabilité du personnel
« En général, le personnel dirigeant des entreprises prospères est stable ; celui des entreprises
malheureuses est instable. L’instabilité est à la fois cause et conséquence d’un mauvais
fonctionnement... ».
13) L’initiative
« Cette possibilité de concevoir et d’exécuter est ce que l’on appelle l’initiative. La liberté de proposer
et celle d’exécuter sont aussi, chacune de leur côté, de l’initiative... Aussi faut-il encourager et
CHAPITRE 2 – L’École classique des organisations 41
développer le plus possible cette faculté... Toutes choses égales par ailleurs, un chef qui sait donner
de l’initiative à son personnel est infiniment supérieur à un autre qui ne le sait pas. »
14) L’union du personnel
« L’union fait la force. Ce proverbe s’impose à la méditation des chefs d’entreprise. L’harmonie,
l’union dans le personnel d’une entreprise est une grande force dans cette entreprise. Il faut
donc s’efforcer de l’établir. »
On remarquera, parmi ces 14 recommandations, son souci de centraliser l’autorité et de
prôner l’unicité de commandement ; c’est l’un des principes fondateurs de sa pensée, en oppo-
sition, sur ce point, avec Frederick W. Taylor.
Œuvre de référence
– Administration industrielle et générale, 1916, Dunod.
5 Max Weber
■ L’homme
Max Weber (1864-1920), Allemand né à Erfurt, est issu d’une famille d’industriels protestants.
Considéré comme le père fondateur de la science sociologique et le maître de la sociologie
compréhensive, homme d’une érudition encyclopédique, difficilement classable, il est tout à la
fois juriste, sociologue, économiste, historien et philosophe. Max Weber fait ses études à Heidel-
berg, puis à Berlin, où il enseignera le droit à l’université, en 1894. Nommé professeur d’économie
à l’Université de Fribourg et de Heidelberg, il se tourne vers la philosophie et enseigne, en 1919, la
sociologie à l’Université de Munich.
Sa contribution, dans le cadre de la théorie des organisations, est essentielle et fondatrice.
Étudiant l’administration publique prussienne, il remettra en cause l’autorité dite traditionnelle et
charismatique, pour un modèle d’organisation fondé sur des principes de droit et de rationalité
(type idéal rationnel-légal) où la référence commune à un ensemble de travailleurs est la règle.
Pour Max Weber, la meilleure forme d’organisation humaine est donc le modèle « bureaucra-
tique » (gouvernement par les « bureaux »), qui allie la loi à la raison scientifique et qui n’est plus
fondée sur le sacré et la tradition. Le modèle weberien, en éliminant le népotisme et la faveur par
l’utilisation de règles, écarte de fait l’arbitraire pour un modèle efficace et égalitaire.
À l’époque, Max Weber n’imagine pas les effets négatifs de l’organisation bureaucratique et la
rigidité qui peut en découler. Le terme de bureaucratie a aujourd’hui un sens très préjoratif.
pouvoir de séduction hors du commun qui émane de sa personnalité et qui provoque un attache-
ment des foules. L’autorité charismatique comporte une connotation à caractère sacré. Le leader,
véritable héros, capitaine d’industrie, va développer une autorité à laquelle les hommes se soumet-
tent en reconnaissance de ses qualités. Témoins quelques exemples, dans le monde politique :
Mahatma Gandhi, John Fitzgerald Kennedy, Lech Walesa, Charles de Gaulle... ou, dans le
domaine de l’entreprise, Marcel Dassault, André Citroën, Marcel Bleustein-Blanchet... Cette orga-
nisation, qui fonctionne sur la soumission et le dévouement à un individu, ne peut pas se trans-
mettre et rend cette organisation « instable » car elle repose sur une personne.
MANAGEMENT II
SECTION B et C
Cours de A YASSINE
2019-2020
Thème
Bonne lecture !
Source :
Barabel, M., Meier, O., & Teboul, T. (2013). Les fondamentaux du management-2e édition. Dunod. Pages : 28-33.
Questions :
Section
2 L’écoLe deS reLationS humaineS
28
Les théories traditionnelles du management ■ Chapitre 1
1.1 Contexte
George Elton Mayo (18801949) est d’origine australienne. Après
avoir suivi des études de médecine à Edinburgh en Écosse et en psy
chologie en Australie, il devient professeur de psychologie et de philo
sophie. En 1922, il émigre aux ÉtatsUnis et se spécialise comme
chercheur en psychologie industrielle en étudiant notamment le com
portement au travail. Ses principales contributions sont le fruit de
recherches empiriques menées au sein de la Western Electric (Chicago,
ÉtatsUnis). Dans les faits, les recherches de Mayo ont été relatées
quelques années plus tard par deux chercheurs qui y ont participé,
F.J. Roethlisberger et W.J. Dickson, dans leur livre Management and
the worker (1939).
29
Chapitre 1 ■ Les théories traditionnelles du management
30
Les théories traditionnelles du management ■ Chapitre 1
1. Alderfer (1972) propose de réduire les cinq besoins de Maslow en trois grandes catégo
ries : les besoins d’existence (physiologique et sécurité), de sociabilité (appartenance et
estime) et de croissance (réalisation et d’accomplissement personnel). Alderfer modère la
théorie de Maslow en considérant qu’une personne peut aussi bien progresser dans la hié
rarchie des besoins que régresser. De plus, il introduit l’idée que le manque de satisfaction de
certains besoins conduit les individus à opérer des déplacements vers d’autres besoins sans
que le type de besoin soit figé.
31
Chapitre 1 ■ Les théories traditionnelles du management
32
Les théories traditionnelles du management ■ Chapitre 1
33
UNIVERSITE SULTAN MOULAY SLIMANE
Faculté Polydisciplinaire Béni Mellal
MANAGEMENT II
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Thème
Bonne lecture !
Sources :
Questions :
LE MANAGEMENT
Voyage au centre des organisations
Deuxième édition
revue et corrigée
ISBN : 2-7081-3093-5
36 À PROPOS DU MANAGEMENT
RETOUR
À UNE DESCRIPTION FONDAMENTALE
DU TRAVAIL DE GESTIONNAIRE
Autorité
formalisée
et statut
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Thème
Bonne lecture !
Sources :
Questions :
2. Qui sont les auteurs à la base de ces styles de management. A quelle école de
pensée en management appartiennent les trois premiers auteurs ? Justifiez.
© Dunod, 2019
11, rue Paul Bert, 92240 Malakoff
www.dunod.com
ISBN 978-2-10-078878-1
Chapitre 2 ■ Le management des relations humaines
Section
3 L ty
up t
t n t
équ p
n nt
1. Cf. L. Cadin, F. Guérin, F. Pigeyre, Gestion des ressources humaines. Pratique et éléments de théorie, Dunod,
1997, 2e édition Dunod revue et augmentée 2002, 434 pages.
2. Pour une synthèse des travaux de Lewin, voir K. Lewin, Psychologie dynamique : les relations humaines, PUF,
1959, 3e édition 1967, 296 pages.
3. Cf. Florence Allard-Poesi, « Kurt Lewin, De la théorie du champ à une science du social », in Les grands auteurs
en management, S. Charreire, I. Huault, EMS, 2002, 463 pages, pp. 391-411.
70
Le management des relations humaines ■ Chapitre 2
fois le leader parti, continuaient le travail et faisaient preuve d’autonomie dans le travail.
Les expériences montrent les difficultés inhérentes à la mise en place de ce mode
d’exercice de l’autorité qui conduit à des résultats intéressants à moyen terme. Enfin, le
« laisser faire » semble constituer la pire des méthodes. Le groupe n’obtient pas de
résultats satisfaisants, reste paradoxalement très dépendant d’un leader peu impliqué et
demeure constamment en quête d’informations et de consignes.
En définitive, ces recherches montrent la supériorité d’un mode de management
démocratique, fondé sur des méthodes semi-directives, sur d’autres approches du
1. Cf. K. Lewin, R. Lippitt, R. White, « Patterns of Agressive Behavior in Experimentaly Created Social Climates »,
Journal of Social Psychology, n° 10, 1939, pp. 271-299. Pour une traduction de ces experiences, voir A. Levy,
Psychologie sociale. Textes fondamentaux anglais et américains, tome 1, Bordas, 1962, nouvelle édition Dunod,
2002, 316 pages, pp. 278-292.
71
Chapitre 2 ■ Le management des relations humaines
c Focus
ne approche méthodologique originale :
la recherche-action de K. Lewin
Entre 1930 et 1947, Kurt Lewin développe d’expérimentateur, les changements qu’il
une approche méthodologique novatrice pilote s’inscrivent dans la vie réelle et non
en psychologie sociale qui repose sur la dans le cadre plus restreint d’un
recherche de formes de coopération entre laboratoire. C’est dans cette perspective
chercheur et organisation. Pour Lewin, les que Lewin a développé son analyse sur le
recherches sur la vie des groupes doivent changement qui repose sur le célèbre
devenir aussi fondamentales pour le cycle unfreeze-change-refreeze (dégel-
progrès des organisations, tout comme transformation-regel) qui peut être défini
l’est la chimie pour l’usine chimique. Il par l’idée qu’il est indispensable pour un
s’agit alors de construire une coopération chercheur-intervenant dans une
féconde entre chercheurs et praticiens ce organisation de créer des conditions
qui suppose un lien renforcé entre théorie préalables au changement. Cela suppose
et pratique. La démarche de recherche- aussi de fournir aux différents acteurs les
action proposée par K. Lewin se situe en moyens du changement tout en le
rupture épistémologique par rapport aux préparant collectivement.
autres approches méthodologiques. Le En résumé, la pensée de Lewin montre
rôle et la place du chercheur ainsi que les que théorie et pratique sont méthodo
effets de la recherche sur l’action sont logiquement liées dans un processus en
explicitement pris en compte en tant que grande partie commun de création de
principe même d’intervention et de connaissances. La recherche-action
génération de connaissances scientifiques. contribue ainsi au développement des
La recherche-action repose sur des connaissances fondamentales en sciences
expériences de changement sur des sociales mais aussi à l’action en société
problèmes réels au sein des systèmes dans la vie quotidienne.
sociaux. Le chercheur a ainsi un rôle
Source : D’après A. David, « La recherche-intervention, cadre général pour la recherche en manage-
ment ? », in A. David, A. Hatchuel, R. Laufer, Les nouvelles fondations des sciences de gestion. Eléments
d’épistémologie de la recherche en management, Vuibert, coll. F G , 2001, 215 pages, pp. 193-212.
Kurt Lewin est l’inventeur du terme dynamique de groupe (Dynamic Group) en 1944.
À partir de 1943, le gouvernement américain demande à l’équipe de recherche d’étudier
72
Le management des relations humaines ■ Chapitre 2
nagères sur le sujet qui les a conduit au passage à l’acte. Au total, cette célèbre expéri-
ence donne des résultats très spectaculaires puisque le second groupe est dix fois plus
efficace que le premier. En effet, l’augmentation de la consommation d’abats est de
30 % dans le second groupe alors qu’il n’est que de 3 % dans le premier. Finalement,
l’expérience montre l’importance de la vie d’un groupe, des échanges interperson-
nels, des remises en cause collectives qui peuvent favoriser un changement de con-
sommation. En outre, Lewin démontre la thèse suivant laquelle il est plus facile de
changer les habitudes d’un groupe que de personnes prises isolément.
1. Cf. K. Lewin, « Group Decision and Social Change, in T.M. Newcomb », E.L. Hartley, Reading in Social Psychology,
Holt Rinehart and Winston, 1947, pp. 269-288. Voir la nouvelle édition in M. Gold, The Complete Social Scientist. A Kurt
Lewin Reader, Washington, American Psychological Association, 1999, pp. 265-284. Pour une synthèse des travaux de
K. Lewin, voir C. Levy-Leboyer, Psychologie des organisations, PUF, 1974, 244 pages et J. Maisonneuve, La dynamique
des groupes, PUF, 1990, 127 pages. Voir également, K. Lewin, « Décision de groupe et changement social », in A. Lévy,
Psychologie sociale. Textes anglais et américains, Bordas, 1990, nouvelle édition Dunod, 2002, 565 pages, pp. 498-519.
73
Chapitre 2 ■ Le management des relations humaines
McGregor souligne que ces trois hypothèses de base reposent sur quatre postulats
implicites :
––L’individu moyen éprouve une aversion innée pour le travail qu’il fera tout pour
éviter.
–– À cause de cette aversion à l’égard du travail, les individus doivent être contraints,
contrôlés, dirigés, menacés de sanction, si l’on veut qu’ils fournissent les efforts
nécessaires à la réalisation des objectifs organisationnels.
1. Cf. Douglas McGregor, La dimension humaine de l’entreprise, Gauthier-Villars, 2e édition 1971 (édition
originale, McGraw-Hill, 1960), 205 pages.
74
Le management des relations humaines ■ Chapitre 2
––L’individu moyen préfère être dirigé, désire éviter les responsabilités, a peu d’am-
bition et recherche la sécurité avant tout.
––Le salarié moyen est égoïste, égocentrique et indifférent quant à la stratégie de
l’organisation. Il est naturellement opposé au changement, intimement centré sur
lui-même mais facile à tromper.
75
Chapitre 2 ■ Le management des relations humaines
actuel des entreprises ne peut l’imaginer. Si la théorie X nie l’existence d’un tel
potentiel, la théorie Y donne la possibilité à l’encadrement d’innover, de découvrir de
nouveaux moyens d’organiser et de diriger l’effort humain.
1. Cf. R. Likert, News Patterns of Management, McGraw-Hill, 1961, traduction française : Le gouvernement
participatif de l’entreprise, Gauthier-Villars, 1974, 279 pages.
76
Le management des relations humaines ■ Chapitre 2
œuvre d’une organisation par groupe de travail au sein duquel les problèmes rencontrés
sont abordés et résolus collectivement.
Au total, R. Likert développe l’idée d’un mode de management participatif par groupe
de travail. Les enquêtes réalisées indiquent que ce mode d’organisation semble plus
efficace car il s’appuie sur des attitudes plus coopératives et sur des relations de confiance.
Pour autant, Likert note que ce mode de management est complexe à mettre en place car
il nécessite l’acquisition par les salariés de règles de fonctionnement subtiles ainsi qu’un
niveau de convergence suffisant entre les valeurs personnelles des membres du groupe.
Ce style de gestion est assez proche du précédent même si l’on peut considérer qu’il
existe des formes de confiance de type condescendante. Le commandement paterna
liste se distingue néanmoins du précédent par des relations de proximité entre le
dirigeant et ses subordonnés. Le contact et les relations hiérarchiques sont directs,
souvent francs et le système de motivation et de récompense, particulièrement arbi
traire. Pour autant, le dirigeant peut, dans certains cas et du fait de contacts directs,
consulter ses collaborateurs, prendre parfois en considération leurs suggestions et
leurs critiques. Dans une telle organisation, le niveau de performance de l’organisation
est singulièrement variable et dépend, pour l’essentiel, de la personnalité et de la
culture du propriétaire-dirigeant de l’entreprise. Finalement, l’influence du système
de valeurs s’avère souvent décisif sur le style de commandement adopté.
77
Chapitre 2 ■ Le management des relations humaines
■■ Le manager consultatif
■■ Le manager participatif
78
Le management des relations humaines ■ Chapitre 2
1. Pour une synthèse des travaux de Blake et Mouton, voir Robert R. Blake, Jane S. Mouton, The Managerial Grid
III : The Key to Leadership Excellence, Houston, Gulf Publishing Company, 1985, traduction française : La
3e dimension du management, Les éditions d’organisation, 1987, 283 pages.
79
Chapitre 2 ■ Le management des relations humaines
élevé
1,9 9,9
9
Le management « Country-club » Le management fondé sur
L’accent est mis sur les besoins des indi- le travail en équipe
vidus afin d’établir de bonnes relations, ce Les résultats sont obtenus par des mem-
8 qui crée une organisation dont l’ambiance bres se sentant tous engagés. L’interdépen-
est conviviale et le rythme de travail dance résultant de cet enjeu commun crée
confortable des relations de confiance et de respect
7
INTÉRÊT PORTÉ AUX HOMMES
5,5
6 Le management institutionnel
Il est possible, pour une organisation,
d’atteindre des performances correctes en
5 établissant un équilibre entre les nécessités
de production et le maintien du moral des
employés à un niveau satisfaisant.
3 1,1 9,1
Le management appauvri Le management fondé
Le minimum d’effort est déployé pour sur l’autorité et l’obéissance
2 accomplir la tâche requise afin de se main- L’efficacité des opérations est d’autant plus
tenir dans l’organisation. grande que le travail est arrangé de façon à
ce que l’élément humain intervienne le
1 moins possible.
faible
faible 1 2 3 4 5 6 7 8 9 élevé
INTÉRÊT PORTÉ AUX TÂCHES
La grille managériale permet de formaliser cinq styles de management qui ont été
définis à partir des deux conceptions radicalement opposées du management :
l’importance accordée par la direction de l’entreprise aux tâches à exécuter et
l’importance accordée aux personnes de l’organisation.
80
Le management des relations humaines ■ Chapitre 2
Un tel mode de management repose avant tout sur une logique d’efficience.
L’objectif principal est de réaliser la production dans une perspective d’économie de
moyens et de maximisation de la productivité. Cette conception de la performance
humaine repose sur l’idée qu’il y a lieu d’éviter que le facteur humain interfère sur le
mode d’organisation adopté. Suivant cette logique, l’objectif des managers n’est
absolument pas de prendre en considération la subjectivité des personnes et leurs
attentes. Facteur de frustration et d’insatisfaction dans de nombreux cas, ce style de
direction présente de nombreuses limites et peut être source de dysfonctionnements
sociaux importants.
Cette approche repose avant tout sur la recherche de la satisfaction des besoins des
personnes qui travaillent et la prise en compte de leurs attentes. L’objectif principal
est de rechercher à entretenir des relations sociales durables, de bonne qualité et
d’éviter les conflits. La finalité de cette approche est de créer et de développer une
ambiance de travail conviviale à partir d’un rythme de travail accepté par tous. Cette
conception très feutrée du management peut se révéler, dans certains cas, parfaite
ment adaptée aux besoins d’une structure de type missionnaire au sein de laquelle
l’adhésion des membres aux objectifs, et surtout aux valeurs de l’organisation,
constitue un objectif prioritaire. Une telle approche présente également des risques de
dérives possibles telles que la démagogie ou l’évitement systématique du débat, de la
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confrontation d’idées.
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Chapitre 2 ■ Le management des relations humaines
Dès 1973, B. Tannenbaum et W. Schmidt dans un article publié par la très célèbre
Harvard Business Review intitulé How to choose a leadership pattern élaborent une
véritable théorie du leadership. Suivant ces auteurs, l’efficacité du management de
l’organisation dépend de trois éléments déterminants : le leadership, la qualité des
collaborateurs et le type de situation de gestion. Par ailleurs, Tannenbaum et Schmidt
notent qu’il existe des facteurs contribuant à révéler le comportement d’un leader. Il
s’agit, d’une part, de facteurs tels que la confiance en soi, en ses propres collaborateurs,
son système de valeurs et le style qu’il souhaite adopter. D’autre part, les
collaborateurs chercheront naturellement à influencer leur leader. Enfin, les relations
entre leader et subordonnés seront également influencées par la nature des problèmes
et des dysfonctionnements rencontrés, l’environnement et la concurrence, le style de
la direction de l’entreprise ainsi que la manière dont les collaborateurs du leader
réalisent les différentes activités. Au fond, les auteurs interrogent la relation de
pouvoir existante entre supérieur et subordonné à partir d’un continuum. Les
éléments de réponse apportés sont structurés autour de deux pôles opposés permettant
ainsi de formaliser différents types de management. Le premier pôle est constitué par
un style de direction centré sur le supérieur hiérarchique. Le second pôle, a contrario,
est structuré autour d’un style de direction centré sur le subordonné. En d’autres
termes, Tannenbaum et Schmidt opposent deux pôles extrêmes : l’autoritarisme et la
non directivité accordée aux collaborateurs comme l’indique le schéma qui suit.
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Le management des relations humaines ■ Chapitre 2
Autorité du
supérieur Liberté d’action
du subordonné
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