s’improviser diplomate et recevoir de quelques bijoux de Zebanissa
des ambassadeurs venus du Khotan dont la vente était censée couvrir les Note : les trois affaires posent chargés du tribut rituellement versé frais engendrés par ses études. de gros problèmes logis- à l’Empereur, qui s’évapore quelques C’est là qu’intervient le Sabao. tiques. L’enquête mène po- jours à peine après son arrivée à San- Longtemps aveuglé par l’amour qu’il tentiellement hors de la juri- gyuan. porte à sa fille, il a tout de même diction du Magistrat, voire remarqué qu’elle ne portait plus ses dans les royaumes vassaux. LA JEUNE FILLE ET LA bijoux préférés, des spinelles rouges Le Magistrat devra donc BLANCHE CAVALE du Pamir qu’il lui avait offerts pour s’assurer la collaboration de son dixième anniversaire, ainsi que ses collègues et de l’armée, Où deux jeunes gens rêvent de che- vauchées farouches. ses sautes d’humeur. Il a donc fait quitte à devoir une faveur, suivre sa fille par l’un de ses esclaves, se montrer rusé ou laisser Avant l’affaire un eunuque du Khorezm du nom de les Assistants faire justice de Sandjar. leur épée. Il n’est pas inutile Trois ans plus tôt, au cours d’une de de souffler aux joueurs que ses nombreuses promenades à che- Les jeunes gens sont allés se faire le palanquin d’un Magistrat val, Zebanissa faisait la connaissance leurs adieux dans les ruines du est une extension mobile de d’un jeune homme intriguant. Zhang temple taoïste, échangeant leurs pro- son district. s’exerçait à la calligraphie sur des messes en un simulacre de mariage. lattes de bambou, comme dans l’an- Alors qu’ils se déshabillaient pour cien temps, faute de meilleurs maté- faire l’amour (c’était leur première riaux, et le troupeau de ses parents, fois), Sandjar s’est couvert le visage laissé sans surveillance, s’était égayé. d’une plaque de bois, a cogné son L’incident amusa Zebanissa, qui ra- épée contre son poignard et imité mena le troupeau. En remerciement, une voie d’outre-tombe – profitant le jeune homme lui offrit une de ses de la pénombre, il pensait les ef- lattes. Elle revint quelques jours plus frayer grâce à la légende du démon. tard avec des pinceaux et du papier. La peur était bien là, mais plutôt que Le jeune homme se prit à rêver aux de fuir, les amants se sont rués sur examens littéraires et Zebanissa com- lui et l’ont roué de coups avec achar- mença à régulièrement sortir des nement. Zhang avait une canne en ouvrages de la bibliothèque familiale. pêcher, dont les branches sont utili- sés par les exorcistes, et c’est pour- Avec l’éveil des sens, leur ami- quoi ils étaient si sûrs de l’efficacité tié changea de nature. Les poèmes de la riposte. Au sang écoulé, ils ont devinrent plus équivoques, les lec- pris conscience qu’ils frappaient un tures plus intimes. Les jeunes gens homme et non un démon. Le croyant se prirent à rêver d’un mariage et mort, ils ont préféré s’enfuir. Zeba- d’une vie commune. Les examens nissa a reconnu l’esclave de son père littéraires leur semblèrent plus que et craint les conséquences pour son jamais la clé de la liberté. Le jeune amant. D’autre part, elle suppose – homme s’inscrivit à l’examen provin- à tort – que l’ambassade du Khotan cial, échoua de justesse et devint le est destinée à la négociation de son « candidat Zhang ». Dans le système mariage. chinois, un demi-échec garantit en effet un petit titre et un premier sta- Pour brouiller les pistes et faire tut, mais c’est encore bien insuffisant croire à un enlèvement surnaturel, pour espérer convaincre le Sabao. les amants ont maquillé la scène au noir de fumée, puis Zebanissa a lais- Les faits sé partir son cheval. Zhang devait partir pour la capitale Leurs plans ont changé. Ils comptent pour compléter son éducation, nanti se cacher quelque temps, quitter le