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Couverture Hokus Pokus

© InterÉditions, 2019
InterÉditions est une marque de
Dunod Éditeur, 11 rue Paul Bert, 92240 Malakoff

ISBN : 978-2-7296-1945-9

www.dunod.com

Ce document numérique a été réalisé par PCA


À Hélène,
Robin,
Paul,
Matthieu,
et Cécile
Table
Couverture

Page de titre

Copyright

Dédicace

Introduction - Aider l’autre !

Première partie
Les dix étapes du cycle d’Hudson

1. Formuler une idée - 1re étape : Mettre en mots une idée ou un projet
Le rôle du coach dans l’étape 1
D’abord faire émerger les idées
Vérifier la pertinence et la faisabilité du projet
Bâtir un plan d’action réaliste
Les diablotins de l’échec, ou comment saboter l’étape 1

2. Le début de l’action - 2e étape : Lancer le projet


La parole est au coach
Le rôle du coach
Conseils au coaché
Les diablotins du sabotage

3. L’épanouissement du projet - 3e étape : Faire fructifier le projet, la primauté


de la matière
L’aide du coach à l’étape 3
Les obstacles de l’étape 3

4. Stop ! - 4e étape : L’arrêt du projet


Les raisons d’un arrêt
La lassitude et le désintérêt
L’arrêt brusque
Que faire dans un cas pareil ?
Manifester une attitude empathique
Pour aider le coaché à sortir du déni, lui montrer des éléments factuels de la réalité
S’abstenir de tout conseil
Freiner toute velléité d’action
Le coaching équanime

5. Traverser le deuil de l’ancienne situation - 5e étape : Quelques moments de


nostalgie
Le coach est-il prêt à accompagner la fin ?
Le deuil et l’attachement
L’attachement d’amitié
L’attachement passionnel
Que signifie faire son deuil ?
Les aspects subjectifs du deuil
Le piège de la substitution
Le rôle des proches et du coach
Faire circuler la parole bloquée
Le rôle de l’entourage
Le deuil et ses étapes
Dégel émotionnel et arrivé d’une dépression
Faire la paix avec soi et avec les autres
L’au revoir
Fêter la fin

6. Établir le bilan - 6e étape : Savoir raison reprendre


Préparer le bilan
Le protocole de débriefing
Les écueils à ce stade
7. Laisser reposer, diffuser - 7e étape : Se reposer, savourer, et laisser diffuser
les bienfaits de ce qui a été accompli
Se reposer
Laisser diffuser, savourer

8. La remise en question - 8e étape : Quand le doute s’installe…


Troubles et tourments
Un décalage et une perte de repères
Le travail du héros
Se faire aider, ne pas rester seul
Freiner toute idée d’action
S’exiler un temps et prendre un recul bénéfique
La posture du coach
Explorer activement et doucement les autres mondes
Revenir et témoigner
Effritement et résistances des anciens schémas
Les certitudes du héros vacillent mais résistent encore
L’inconfort émotionnel chez le coach et la coaché
L’ego blessé, frein au développement

9. Discernement et métamorphose - 9e étape : Maturation et découverte de


nouvelles valeurs
Une difficile métamorphose
Une problématique de réunification de la personne
Les rituels de passage ont disparu et nous manquent
L’esprit de la méthode
Se pencher avec bienveillance sur ce qui devient
Mettre de l’ordre dans ses priorités
La méthode et la manière
Le moment de la redécision
Un carrefour à trois voies
La situation n’a pas changé, c’est le regard qui change
Nous restons dans le même environnement mais nous changeons de rôle
Nous quittons notre environnement habituel
Quelques mouvements de balancier et autres freins potentiels
10. Vivre le renouveau - 10e étape : Chaque jour je deviens l’auteur
de ma vie
Ce qui était dedans jaillit dehors
La libération soudaine d’une énergie bloquée
La porte de la spiritualité incarnée
L’affirmation inconditionnelle de ce qui fait sens
La conscience de son pouvoir créateur
Une sensation d’alignement intérieur
S’armer le cœur pour un long voyage et prendre soin de son âme
Exercices spirituels au service de soi

11. Quand ça ne tourne pas rond


Quand plusieurs cycles se superposent
Refuser l’obstacle et prendre la tangente
L’évitement de l’étape 1
L’évitement de l’étape 2
L’évitement de l’étape 3
L’évitement de l’étape 4
L’évitement de l’étape 5
L’évitement de l’étape 6
L’évitement de l’étape 7
L’évitement de l’étape 8
L’évitement de l’étape 9
L’évitement de l’étape 10

12. Trois cas de coaching commentés


Le cas « Bernard »
Le cas « Yvan »
Le cas « Julie »

Deuxième partie
Aider : une compétence à développer

13. Les outils de base du coaching


Analyser et travailler la demande
Deux couples de demandes
Plusieurs formes de demandes
Rendre la personne « demandeur »
Observer, écouter, comprendre et sentir le client
Les signaux forts, faibles, et pertinents
Trois écoutes, un cerveau, deux oreilles et un cœur
Écouter et reformuler
Sensations, pensée, sentiments et intuition
La force du verbe : le bon mot au bon moment
Signal ou parole ?
Le mot, le verbe, l’outil et le sens
S’entraîner à coacher au quotidien
Décrire la réalité, identifier les symptômes, en déduire les problèmes
Les métaphores
Symptômes et problèmes

14. Le rôle et la posture du coach


Le poids de la confidentialité
Avant tout, ne pas nuire
Coacher ou conseiller : La différence
Aider n’est pas sauver
Être bienveillant, mais pas trop
Faut-il favoriser le rôle ou la personne ?
La notion de rôle
Les rôles et les enjeux sont liés
Les rôles sont relatifs et sélectionnés à partir d’indicateurs de statut
Les interactions sont en positions relatives
Les changements de rôles provoquent parfois des changements du Moi
Le décalage entre position relative et états du Moi
Humilité et travail : quel coach êtes-vous ?
L’éthique et le coach
Qu’est-ce que l’éthique ?
Accepter d’être observé
S’appuyer sur des théories

15. Le développement personnel et professionnel du coach


La supervision et la formation
Les groupes de pairs entre coachs
Le développement personnel du coach : pour ou contre ?
Transfert et contre-transfert : des phénomènes troublants
Prendre conscience du transfert
Utiliser le contre-transfert
Le coach en thérapie
Le processus parallèle
La patate chaude
L’expérience et la maturité du coach

Conclusion - Le cycle d’Hudson, une spirale qui nous emmène toujours


plus haut

Bibliographie

Remerciements
Introduction

Aider l’autre !

On peut oublier ce qu’on nous a dit, mais jamais les émotions fortes que nous
avons ressenties quand une personne bienveillante était à nos côtés pour
nous aider vraiment.
Pourtant, qui ne s’est pas heurté à un mur alors qu’il voulait soutenir un
ami, encourager un enfant à surmonter une difficulté ou réconforter un
proche dans la peine ? Aider l’autre est aussi naturel que boire ou manger,
parler ou aimer, et nous n’y parvenons pas toujours. Alors comment nous y
prendre ?
Depuis plusieurs années les coachs développent des méthodes pour aider
leurs clients à surmonter leurs difficultés, à se sentir mieux dans leur vie
personnelle ou professionnelle, et à agir en harmonie avec leurs valeurs et
leurs convictions. L’un de ces coachs, l’Américain Frederic Hudson, a
imaginé un modèle qui permet à une personne qui veut en aider une autre
d’identifier là elle doit mettre de l’énergie et là où elle doit la faire circuler,
et ensuite ce qu’il faut faire pour permettre à la personne aidée d’avancer
sur son chemin. En effet un changement véritable s’accompagne toujours de
son cortège d’émotions qui permettent d’ouvrir des portes dans
l’inconscient et favorisent ce mystérieux travail de résilience.
Le modèle d’Hudson a largement inspiré les pages que vous allez
découvrir. Ce petit traité de coaching à l’usage des honnêtes gens permet à
des coachs, ou toute personne qui désire en aider une autre, d’avoir un outil
pour structurer son accompagnement et son aide. Ce modèle se présente
sous la forme d’un cycle en dix étapes.

Le cycle d’Hudson

Les sept premières portent sur l’aide que le coach, ou l’aidant, peut
donner à quelqu’un qui se lance dans un projet ou dans un changement, que
ce soit un petit projet – partir en vacances par exemple – ou un grand
changement comme une réorientation professionnelle majeure.
La première étape du cycle consiste à trouver une idée ou formuler un
projet. La seconde étape à se lancer – mais pas n’importe comment ! La
troisième consiste à récolter les fruits de son projet. Vient ensuite l’arrêt.
Cette quatrième étape peut être l’aboutissement naturel du projet, ou un
arrêt prématuré dû à une cause extérieure. Vient alors la cinquième étape,
plus émotionnelle, celle du deuil. Il faut bien s’y faire, la roue du temps
tourne et rien ne revient en arrière. Dans la sixième étape, la raison reprend
le dessus et c’est l’heure de faire un bilan de la réalisation passée. Puis vient
la septième étape où il est bon de se reposer et de savourer avant de
reprendre le chemin pour un nouveau cycle. Ainsi de suite, la vie va et les
projets s’enchaînent les uns après les autres.
Mais quelquefois le doute s’installe : huitième étape. Suis-je sur le bon
chemin se demande le coaché ? Mes choix sont-ils toujours pertinents ? La
neuvième étape va permettre au coach d’identifier les nouvelles priorités
qui guideront désormais les choix de vie de son client. C’est une véritable
métamorphose. La personne apparaît transformée, avec une échelle de
priorités revisitée. Il ne suffit plus alors pour la coaché que d’incarner cette
personne, de vivre et agir avec ses nouvelles valeurs et ses nouveaux choix.
C’est la phase dix, la dernière avant de reprendre le chemin de l’étape 1 et
repartir pour un nouveau cycle.
La partie haute du cycle d’Hudson (étapes 1 à 7) porte sur les
changements d’activités, alors que la partie basse (étapes 8 à 10) concerne
les changements d’identité.
Mais peut-on faire sans être ? Peut-on être sans s’incarner dans une
réalisation matérielle ? C’est ce genre de questions qui amène la personne
qui veut aider une autre à se doter d’une solide méthode. Car le cœur et la
bonne volonté ne suffisent pas pour déjouer les pièges d’un bon
accompagnement et démêler les nœuds entre le faire et l’être.
Les dix premiers chapitres du livre correspondent aux dix étapes du cycle
d’Hudson. À chaque étape le lecteur trouvera des exemples pris dans la vie
courante et les façons d’intervenir en tant que coach ou aidant. Ce chemin
de résilience est passionnant.

Aider l’autre : tout un programme !


Partie I
LES DIX ÉTAPES DU CYCLE
D’HUDSON
1
FORMULER UNE IDÉE

« Au commencement, le verbe. »
Saint-Jean

1re étape : Mettre en mots une idée ou un projet

Pas d’idée
« J’ai pas d’idée ; je m’ennuiiie ! » se plaint Thomas (neuf ans).
« C’est pas vraiment un projet, jusque quelques idées qui me sont venues pendant les
vacances » nous raconte un client en séance de coaching.

Il nous arrive quelquefois dans la vie de ne pas savoir quoi faire, de ne pas
savoir par où commencer, ou de n’avoir aucune idée de l’avenir. Il nous
arrive aussi d’avoir mille idées, mille projets en tête. Mais tout
s’embrouille, se télescope et rien n’émerge.
Dans les deux cas, nous nous exprimons mal, nos phrases sont
décousues, parsemées d’onomatopées « heu, ben, enfin, pch’’’, c’t’à
dire,… ». Une sorte de langage inarticulé, de mots en devenir, de paroles à
faire naître. Tout s’entremêle, les pensées sont confuses, les sentiments
mélangés jouent aux montagnes russes, et les actions partent dans tous les
sens, voire dans aucun.
Loin de prendre ces comportements pour des défauts ou des déviances, il
vaut mieux les considérer comme les prémices d’une idée, à peine le début
d’un projet. Quand un cycle commence, la perception du futur est rarement
limpide, mais l’énergie fondamentale, dynamique, créatrice est déjà
présente pour rendre les choses tangibles. On a besoin alors de quelqu’un
pour nous aider à prendre de la hauteur, à élever notre point de vue afin de
changer notre niveau de conscience et de mettre de l’ordre dans nos idées.
L’absence de projet appelle souvent la présence d’un autre.

Formuler l’idée du projet

Selon les âges de la vie, les projets peuvent être de natures différentes.
Les enfants expriment assez facilement leurs rêves et leurs envies. À
l’adolescence ça se complique. Le projet adolescent pousse le jeune à
s’abstraire de l’enfance pour entrer par l’imaginaire dans le monde des
adultes. On peut parler ainsi de projet d’orientation. « Quel métier veux-tu
faire plus tard ? ». Le projet de vie, quant à lui, renvoie à un projet à plus
long terme. Il concerne un modèle de vie : célibat, vie conjugale, vie
maritale, militantisme, engagement caritatif, etc. Le projet scolaire, le projet
professionnel et le projet de vie constituent pour l’adolescent trois
perspectives possibles. L’adulte peut quelquefois se poser la question d’un
projet vocationnel qui est une façon par laquelle il entend se réaliser. Il
cherche à savoir quel type d’emploi il désire, quels genres de compétences
il souhaite développer au sein de son métier ou de sa profession, quel type
de mobilité lui convient maintenant. Non seulement l’adolescence et la vie
adulte sont soumises à l’impératif du projet, mais la retraite elle-même et
l’arrivée du troisième âge réclament que l’individu puisse prévoir et
aménager sa période d’inactivité professionnelle.
À tout âge, la vie nous projette vers l’avenir, nous amène à anticiper ce
que nous pourrions, devrions ou voudrions faire plus tard.

LE RÔLE DU COACH DANS L’ÉTAPE 1

D’abord faire émerger les idées


Le coach s’abstient de tout conseil, évite soigneusement toute critique ou
toute moquerie. À ce stade la personne aidée est comme un petit enfant et sa
pensée est confuse. Amenez-là plutôt à rêver, à imaginer, à parler de son
idée ou de son projet. Il s’agit d’éveiller en lui le désir, de susciter l’envie et
de l’encourager à exprimer sa vision de l’avenir. À ce stade la fantaisie est
la meilleure des attitudes : « Tu as le droit de rêver, de penser et de prendre
du temps pour formuler ton projet. Aie confiance en ton rêve ».
Nous avons tous besoin de parler et de nous exprimer. Nous avons besoin
d’être écouté et entendu dans nos rêves et notre projet par quelqu’un de
protecteur, de nourricier et qui sait jouer un rôle d’effet miroir et
structurant. Plus une personne parle, plus elle a de feed-back et plus elle
remplit ses mots de sens.

Quelques phrases, exercices ou conseils qui peuvent aider à formuler un projet


Si tu avais une baguette magique, une vraie baguette de magicien, et que d’un seul coup les
idées apparaissent comme par miracle, comme dans un conte de fée… Allez vas-y ! Laisse
parler ta baguette magique !

Ce petit exercice tout simple fait souvent émerger un grand nombre


d’idées nouvelles ou enfouies.
Voici d’autres phrases à tourner à votre façon. L’essentiel est que
l’écoute, la bienveillance et la chaleur se sentent dans vos propos.
Autres questions pour aider à formuler un projet
Dans le futur, quelles sont les couleurs que tu vois, les sons que tu entends, les sensations
que tu ressens ? Quelles sont les personnes qui t’entourent ?
Quel était ton rêve quand tu étais enfant ? (ou quand tu seras grand, si on s’adresse à un
enfant). De quoi as-tu envie au plus profond de toi ?

N’hésitez pas à travailler avec des outils métaphoriques : image, dessin,


sculpture, danse, etc. Rien d’étonnant à ce que la personne aidée ait des
difficultés à répondre à toutes ces questions et sollicitations. Si elle ne sait
pas rêver son avenir à ce moment-là, ou ne sait pas se projeter dans le futur,
c’est qu’elle a de bonnes raisons inconscientes de le faire. Voici quelques
phrases entendues lors de séances de coaching :
• J’ai rien à dire d’intéressant.
• Ça ne sert à rien de rêver, c’est du temps perdu.
• Je ne sais pas ce que je veux, ce dont j’ai envie.
• Les autres savent mieux que moi ce dont j’ai besoin.
• Je ne vais pas déranger les autres avec mes idées, mes rêves.
• De toute façon, ça n’intéressera personne, alors je ne vais pas en
parler.
Voici maintenant un exercice que le coach peut proposer au coaché.
Exercice de communication inconsciente
Recopiez la phrase suivante avec votre main dominante (MD), main droite pour un droitier,
et inversement pour un gaucher.

(MD) « Bonjour, comment t’appelles-tu ? » …………


1. Répondez maintenant avec votre main non dominante (MND) : « Je m’appelle (votre
prénom) » …………
2. Maintenant nous allons entamer un dialogue entre votre esprit conscient (MD) et votre
esprit inconscient (MND). Vous allez observer qu’une main ignore ce qu’écrit l’autre, et
qu’elles ont beaucoup de choses à se dire.
À chaque fois recopiez la question de votre MD avant d’écrire la réponse de votre MND :
MD : Comment vas-tu ?
MND : ……………
MD : Pourquoi te sens-tu comme ça ?
MND : ……………
MD : Que puis-je faire pour toi ?
MND : ……………
MD : Qu’aimerais-tu me dire encore ?
MND : ……………
MD : Merci !

Ce dialogue intérieur permet de libérer les tensions, d’harmoniser et de


pacifier les différentes parties de notre personnalité. Pendant l’exercice, le
coach garde une position neutre dépourvue de tout jugement. Gardez
présent à l’esprit que chaque part de nous-même possède sa raison d’être et
poursuit une intention positive.
Quand les idées commencent à venir, le coach conseille à la personne
aidée de saisir toutes les occasions possibles pour parler de son projet à
d’autres personnes dans son entourage privé. À force de raconter,
d’échanger et d’expliquer, les contours du projet se dessinent et prennent
forme. Le rêve se transforme en une parole audible et structurée. Quand la
personne est enfin capable d’exprimer son projet en une phrase simple sans
que l’autre ait besoin de poser des questions d’éclaircissement, c’est que
l’étape de verbalisation du projet est terminée.

Vérifier la pertinence et la faisabilité du projet


Avant de se lancer, il est salutaire de vérifier que le rêve ou le projet sont
réalistes. Le coach incite son client à aller voir ailleurs.
Il est sain d’explorer, de découvrir le monde, d’ouvrir les yeux, de faire
preuve de curiosité, d’aller vers les autres, d’apprendre d’eux, de les
solliciter, de demander des informations et de l’aide. En explorant le vaste
monde, la personne confronte ce qu’elle imaginait avec la réalité. Une
pensée claire, adulte et structurée est nécessaire avant de se lancer dans
l’action. Le coach incite le coaché à aller voir des personnes qui ont réussi
dans des projets de même nature ou similaires au sien. Il l’aide à dresser la
liste des personnes à rencontrer, les questions à leur poser.
L’idée dans cette démarche est d’aller entendre comment ceux qui ont
réussi ont fait, quels ont été leurs facteurs clés de succès, et quels sont les
mécanismes d’auto-sabotage qu’il faut identifier en amont pour ne pas se
faire piéger par la suite. Le coaché découvrira peut-être les limites de son
projet. Peut-être est-ce le moment de renoncer – en partie – à certains
aspects de son rêve. Ces prises de conscience progressives amènent le
coaché à se rendre compte qu’il lui manque peut-être quelques
compétences. On l’incite alors à se renseigner auprès de personnes, et à
trouver d’autres ressources. Le coach l’invite également à rencontrer des
acteurs clés de son projet : des gens influents, des financeurs (banquiers), de
futurs bénéficiaires du projet (clients potentiels), des fournisseurs, des
partenaires, etc.
Quand le coaché rencontrera ces personnes, le coach lui conseille de
sortir toutes ses antennes et ses radars pour sentir et éprouver ce qui se
passe quand il reçoit ces informations : « Que ressens-tu ? Que vois-tu ?
Qu’imagines-tu quand tu entends cela ? » On l’encourage ainsi à avoir un
avis, à penser par lui-même, à sentir, à relier ce qu’il sent avec ce qu’il
pense, à décider, et aussi à se tromper.
Le coach poursuit l’aide en demandant au coaché de débuter un cahier
des charges de son projet : les enjeux, les résultats attendus, les conditions
de succès, les critères de réussite, les mécanismes d’auto-sabotage, le sens
de son projet, etc. On l’aide à trier les informations et à les classer. Le coach
l’aide à croiser les informations recueillies avec les questions qu’ils se
posaient et les éléments de son rêve.
• Quels sont les inconvénients connus de tes solutions ?
• Quels éléments, quelles dimensions n’as-tu pas pris en compte ?
• Quelles conséquences vois-tu à court, moyen et long terme sur toi,
sur tes proches et sur ton environnement plus lointain ?
• Quels problèmes risquent d’apparaître à court et long terme ?
• Sur quels éléments ta proposition peut-elle avoir des conséquences
négatives ?
• Qui pourrait pâtir de ton projet ?
• Quels sont les aspects qualitatifs non évaluables de ton projet ?
• Quelles sont les croyances qui t’animent ?
À l’écoute de ces réponses de clarification, la personne aidée vérifie si ce
projet lui plaît toujours. C’est à ce moment qu’il est mûr pour décider d’y
aller ou pas : Go ou no go ?

Bâtir un plan d’action réaliste


Le coach propose au coaché de construire un planning des tâches à réaliser.
Pour ce faire, il s’aide des sept questions principales du journaliste : Qui,
Quoi, Où, Quand, Combien, Comment, Pourquoi. Si le projet comporte des
aspects financiers, le coach invite le coaché à bâtir un plan de trésorerie, un
budget des dépenses et des recettes prévisionnelles. Il lui demande
également de fixer un planning de rendez-vous pour jalonner l’avancée des
multiples tâches. Progressivement la formulation du projet devient SMART.

Un objectif SMART
Un objectif SMART est un objectif qui est formulé simplement (S), mesurable
(M), annoncé (A), réaliste (R) par rapport aux contraintes internes et externes,
et temporisé (T) c’est-à-dire avec une date butoir.

Le coach vérifie avec son client que l’objectif à atteindre préserve son
épanouissement et celui de ses proches. Autrement dit, que son projet est
écologique pour son environnement social.

L’écologie du projet
Que vas-tu gagner dans ce projet ? Que vas-tu perdre ? (Es-tu prêt à perdre cela ?)
Exemple : toi qui veux devenir manager, es-tu prêt à défendre auprès de tes collaborateurs un
projet auquel tu n’adhères pas complètement mais qui t’est imposé par la direction ?
Le coach poursuit son travail d’aide à l’anticipation : « Imagine un plan
de repli et ce que tu ferais si ton projet n’aboutissait pas. C’est ce qu’on
appelle la MESORE (MEilleure SOlution de Rechange en cas d’Échec), un
peu comme la roue de secours que l’on garde dans le coffre de sa voiture.
On n’a pas envie de se retrouver avec un pneu crevé, mais si ça arrive, on
peut encore faire quelques kilomètres jusqu’à la prochaine station-
service. »
Pendant tous ces échanges, le coach utilise principalement les questions
ouvertes (comment, pourquoi, c’est-à-dire…) et la reformulation.

La reformulation, le couteau suisse du coach


– Si je comprends bien ce que tu me dis…
– C’est :…………… (le coach répète ce qu’il a compris).
– C’est bien ça ? (le coach vérifie sa bonne compréhension des propos du coaché)

LES DIABLOTINS DE L’ÉCHEC, OU COMMENT


SABOTER L’ÉTAPE 1

La plupart d’entre nous craignent d’exprimer leurs propres désirs. Peut-être


cela nous renvoie-t-il à une période ancienne où nous nous faisions rabrouer
dès que nous exprimions ce que nous ressentions ou que nous faisions part
de ce que nous imaginions ? « Mais que racontes-tu là mon petit… Tu rêves
ou quoi ? ». Ces phrases entendues trop souvent ont fini par brider tout
désir d’exprimer notre spontanéité. Dès lors nous risquons de continuer à
entretenir la croyance que rien n’est possible ou, à l’inverse, que tout est
possible et perdre la notion de la réalité.
En tant qu’aidé, le plus simple serait de se dispenser de cette étape 1 et
croire qu’on arrivera à se débrouiller seul quand on sera dans l’action. Il est
tellement facile de refuser d’écouter l’avis des personnes rencontrées (de
toute façon, c’est moi qui ai raison). Mais le coach sait ce qu’il faut faire et
il reste vigilant pour progresser avec méthode et passer par chacune des
étapes du cycle d’Hudson. La résilience est à ce prix.
Une autre façon de s’y prendre pour ne pas avancer, et retarder la fin de
l’étape 1, consiste à exagérer les difficultés du projet. Les perfectionnistes
sont très forts à ce petit jeu-là. Ils attendent d’avoir toutes les informations
et repoussent au lendemain la décision qu’ils pressentaient comme
irréversible. On dit qu’ils procrastinent.
Les émotions mal gérées peuvent perturber également l’évolution de
l’étape 1. Certaines personnes, comme anesthésiées, ne ressentent plus les
signaux de leur corps. Elles n’ont pas conscience de ce léger stress, signe
d’une vigilance normale. Coupée d’une partie d’elles-mêmes, elles ne
peuvent plus se fier à leur intuition.
Quelquefois, ce n’est pas l’émotion mais l’action impulsive qui vient
perturber le cycle. Sans réfléchir le coaché se lance à fond dans l’action. Il
veut à tout prix que le projet se fasse. Il fonce sans tenir compte des
informations collectées, sans évaluer les risques ni faire les calculs de
faisabilité. D’ailleurs cette frénésie de l’action est largement encouragée
dans les entreprises marchandes où le temps c’est de l’argent. À l’étape 1,
le coaché s’entend dire : « Arrête de rêver. Reviens avec un projet clair et
simple. Nous, ce que l’on veut, c’est du résultat, pas des paroles ».
Le coach peut aussi être lui-même un frein à l’évolution du coaché. Peut-
être a-t-il des difficultés à respecter le fil conducteur de sa stratégie d’aide, à
tenir le cadre et les limites de son intervention, à dire « non » quand ça ne
va pas ? Peut-être veut-il aller vite, sortir rapidement de cette étape qui le
dérange plus ou moins inconsciemment ?
Pour éviter ces travers, le coach doit travailler sa posture. Il doit lui-
même se faire aider pour se sentir serein face à l’inaction ou la suractivité
du coaché. Le coach doit apprendre à se taire et surtout éviter de donner des
idées ou des conseils comme « Sois toi-même ! Sois spontané(e) ! Lâche
prise, tu verras ça ira mieux ! Tu devrais faire ceci, ou cela ! ».
Quelquefois, le sabotage peut venir d’un coach trop « psy » qui aime se
complaire dans quelque chose qui s’apparente à une séance de
psychothérapie. Il cherche plus ou moins inconsciemment à ralentir
l’étape 1 pour garder l’avantage d’une position basse sans mettre les
« mains dans le cambouis ». Aurait-il peur que le client lui échappe et que
lui, le coach, perde le contrôle de la relation ?
ÉTAPE 1
Les signes observables chez le coaché
Comportements
• Excitation. Il dit facilement « Nan ! » plutôt que « Non ». Il dit également
« Je ne veux pas ».
• Il prend au vol toutes les occasions de parler d’un nouveau projet. Il fait des
prévisions, des plannings.
• Il surdétaille, s’obstine de façon non appropriée.
• Il répond à côté de la question. On dit dans le jargon des analystes
transactionnels qu’il redéfinit la question.
Sentiments
• Il se sent démotivé pour les tâches actuelles. Il manifeste une alternance
de colère, de révolte, de joie ou de débordement d’enthousiasme.
Pensées
• Rêve, imagination.
Les besoins du coaché
• Affirmer son indépendance.
• Être entendu dans son projet (dans son rêve).
Les réponses du coach
Assurer la protection
• Éviter tout conseil.
• Pratiquer l’écoute passive et attentive.
• Mais aussi alterner la reformulation avec l’écoute active.
Donner la permission
• De penser, de prendre le temps de formuler le projet. Le coach fait
comprendre au coaché que « C’est permis que nous soyons là sans
objectif particulier ».
• De parler du projet : à force de discuter du projet, il prend forme. Plus on
parle et plus on a de feed-back qui vient des autres.
• D’avoir un projet personnel et/ou original.
• De faciliter la rencontre avec quelqu’un qui a réussi dans le même genre
de projet.
• De faire la différence entre les faits, les opinions et les croyances.
• D’encourager à découvrir les limites, à dire NON, à se séparer.
• D’encourager le coaché à réfléchir à ce qu’il ressent et à ressentir ce qu’il
pense.
• D’encourager à définir son projet en mode SMART.
• De prendre du temps pour élaborer son projet.
Trois sous-étapes à explorer
Sous-étape 1 : rêver et parler du projet (il s’agit d’éveiller le désir et susciter
l’envie)
• On invite la personne à appeler cette phase le « projet de projet » pour
bien le dissocier du projet lui-même qui arrivera ensuite.
• La personne va imaginer. Progressivement elle voit se dessiner
les contours de son projet.
• Elle a besoin de parler et d’être écoutée avec beaucoup de bienveillance.
Sous-étape 2 : explorer l’environnement extérieur pour confronter le rêve
à la réalité (travailler sur la volonté : tu veux ou tu veux pas ?)
Sous-étape 3 : analyser les résultats (explorer les possibilités)
Analyser les données pour vérifier les points suivants :
• Faisabilité : les données chiffrées sont là, le coaché peut objectivement se
lancer.
• Prendre le temps de se mettre en contact avec ses ressentis en reliant les
informations avec les émotions et les sensations que cela provoque chez
le coaché. « J’ai vérifié que je me sens bien avec ce projet, j’ai encore plus
envie de me lancer, je me vois le faire ». Ou bien « J’ai vérifié que ça ne
me convenait pas, je ne me vois pas vivre et faire vivre ce projet, ce n’est
pas ce que j’avais imaginé, je n’ai plus envie, ça ne me conviendra pas, ce
n’est pas pour moi ».
Planifier les actions à mener en établissant un retro planning.
Imaginer un plan de repli (MESORE).
Écrire le cahier des charges du projet (sens, finalité, enjeux, objectif, résultats
mesurables, critères de succès, moyens à mobiliser, planning des actions,
points de contrôle, mesures d’ajustement).
Décider de s’engager en validant que le coaché répond oui aux trois points
suivants :
• Je sais faire, j’ai les moyens et c’est réalisable.
• J’ai envie de faire et ça me motive.
• C’est important pour moi de réaliser ce projet.
2
LE DÉBUT DE L’ACTION

2e étape : Lancer le projet

« Point n’est besoin d’espérer pour entreprendre,


ni de réussir pour persévérer. »
Guillaume d’Orange

Allez, on y va ! On a assez réfléchi, pesé le pour et le contre, bâti un plan


d’action. Ce qui était imaginaire va devenir réalité. Maintenant : go !
Le coaché avance au grand jour. Il a fait imprimer ses nouvelles cartes de
visite. Il a des éléments concrets pour se faire connaître et reconnaître. Le
travailleur indépendant se lance en solo et crée son site internet, loue un
local en coworking. Il se met en avant malgré les difficultés. Il prend le
risque de commencer même si la lumière du dehors éblouit un peu ses
premiers pas.
Or les débuts ne sont pas toujours faciles. Les imprévus arrivent de
partout. Qui pourrait tout prévoir dans un monde complexe fait d’autant
d’incertitudes et d’ambiguïtés ? D’ailleurs, tout n’est pas contre notre
coaché. Déjà il remarque ici ou là des opportunités qu’il n’avait pas
imaginées. C’est comme si un élan exaltant l’entraînait malgré lui hors de
l’ordinaire.
Lancement du projet

Cette passion du début doit être alimentée, sans quoi elle risquerait de
s’épuiser. Les sentiments et les émotions du coaché alternent entre joie de la
réussite naissante, plaisir de créer, d’innover, et le sentiment de colère dû
aux difficultés qui apparaissent inévitablement sur son chemin. Ses pensées
sont focalisées sur le but et l’objectif. Sa capacité d’attention aux autres est
réduite. Il vit à cent pour cent pour son projet ! Il a du mal à trouver le bon
rythme, à équilibrer sa vie personnelle et sa vie professionnelle, à prendre
un peu de temps pour se ressourcer. Comme un enfant qui fait ses dents, il a
envie de toucher à tout, de tout essayer, de mettre les doigts dans la prise
électrique sans se rendre compte du danger. Ouïe ! ça pique. Alors il hésite,
oscille entre témérité et passivité. Mais c’est en forgeant qu’on devient
forgeron lui dit le coach.

LA PAROLE EST AU COACH

Le rôle du coach
Le coach vérifie avec le coaché que le plan d’action construit à l’étape
précédente donne des repères suffisants. Il manifeste de façon répétée sa
confiance dans la qualité du projet du coaché. L’Homme de l’art accueille
avec bienveillance les changements d’émotions, les sautes d’humeur de son
poulain. Il sait ce que signifie endurer, durer, et s’armer le cœur pour un
long et beau voyage. Il partage avec le coaché, mais de façon bien dosée,
l’exaltation de ce début de printemps. La joyeuse communication et la
persévérance ne sont-elles pas nécessaires pour gérer un projet qui prend de
l’ampleur ?
Le coaché a besoin d’être rassuré sur sa capacité à bien faire. Il a besoin
et envie de produire dans les règles de l’art et selon des normes établies. Il
est prêt à écouter les conseils de ses maîtres. Selon ses compétences, le
coach ou le maître donnera une formation sur comment faire tout en
encourageant le coaché à agir par lui-même, à faire des expériences
nouvelles et donc à prendre le risque de se tromper. C’est en faisant qu’on
apprend. Le bon geste s’acquiert avec la répétition.
Le coach entame un double mouvement, un peu comme le fait le coaché.
Chez ce dernier, c’est un mouvement d’élan et de stagnation. Le coach, lui,
alterne le lâcher-prise « J’ai confiance dans ce que tu construis » et le
maintien de la vigilance sur les points de contrôle nécessaires. Il est attentif
à ce que son client ne s’écarte pas trop du cap. Il sait que le planning doit
être flexible pour se garder de la marge, faire les réglages et les ajustements
nécessaires. Le coach en informe le coaché au bon moment.

Conseils au coaché
Le coaché a besoin de s’en tenir au planning d’activités prévues, de
respecter le cahier des charges et le timing du projet. Il accepte la rencontre
avec le coach lors des points de contrôle périodiques qui permettent
d’évaluer l’avancement des travaux (trop rapide ou trop lent ? faut-il
ajuster ?). Il accepte les mesures correctrices à mettre en place que lui
suggère le coach. Cela demande au coaché de réelles capacités d’adaptation
et de flexibilité. Mais c’est un bon apprentissage du dosage entre rigueur et
souplesse.
Cet exercice en grandeur réelle l’amène régulièrement à se repositionner
et à rectifier certains paramètres de son projet. L’action entraîne des erreurs
qui sont des sous-produits naturels de toute innovation. Le droit à l’erreur
est essentiel à cette étape. Le coaché sait qu’il est permis de se tromper et
de recommencer. Mais pour être suffisamment à l’aise avec ses bévues, il
faut qu’il sache solliciter des conseils, accepter des recommandations, et
demander de l’aide quand il sent que les ressources viennent à manquer.
Demander, Ah demander ! N’est-il pas plus facile de donner ou de garder
que de demander ? La demande nous met en position de faiblesse vis-à-vis
des autres et nous expose à un refus possible. Dans tous les cas, le coaché
apprend à assumer la responsabilité de ses actes et des conséquences sur les
autres. Il grandit.

LES DIABLOTINS DU SABOTAGE

Un sabotage fréquent a lieu lorsque le coaché fonce à l’étape 2 sans avoir


pris le temps de boucler l’étape 1. Cette compulsion dans l’action sans
réflexion, sans préparation suffisante, ni construction progressive, le
conduit droit à l’échec.
Un autre sabotage courant survient quand le coaché se lance dans
plusieurs projets à la fois « tous plus passionnants les uns que les autres »,
mais en oubliant de les prioriser. À courir plusieurs lièvres à la fois, il n’en
attrape aucun…
Mais inversement, le coaché peut repousser encore et encore le
démarrage de l’action par peur de l’engagement. Il procrastine, fait plus
d’efforts qu’il n’en faut. Comme si la quantité de sueur avait plus de valeur
que l’atteinte de l’objectif. Comme si la bataille était plus valeureuse que la
victoire.
Le coaché a-t-il pris le temps de valider avec le coach ses envies, ses
désirs, ses vrais besoins et ses propres objectifs ? Ne va-t-il pas se lancer
dans le projet d’un autre en s’oubliant lui-même ? N’est-il pas en train de
réaliser inconsciemment le rêve d’une figure d’autorité (papa ? maman ?)
pour être conforme, faire plaisir, être aimé, s’opposer ou parce qu’il a peur
d’être rejeté ?
Tel coaché pourra faire preuve d’une trop grande rigidité dans le
déroulement de son plan d’action, manquer de souplesse pendant cette
phase de démarrage. Inversement il sera trop flexible, ne respectera pas le
programme prévu, il s’éloignera et oubliera les objectifs initiaux…
En tout cas les embûches ne manquent pas à cette étape 2. L’aidant
comme l’aidé sont conscients de l’importance de ces premiers pas, ils
s’entraident et se réjouissent du développement du projet.
ÉTAPE 2
Les signes observables chez le coaché
Comportements du coaché
• Difficultés à fixer son attention. Problème de motivation. Désir d’explorer,
voir, entendre, toucher, sentir. Hésitation entre passivité et prise d’initiative.
• Le coaché fait des ajustements réalistes entre le planning prévisionnel et le
planning réel des activités. Il analyse les raisons du retard et des avances
par rapport au planning.
• Il élabore petit à petit un tableau de bord de ses activités.
Sentiments
• Joie due à la réussite.
• Colère, frustration, déception à cause des difficultés.
• Goût du plaisir et de l’innovation.
Pensées
• Il pense au but, à l’objectif.
• Sa capacité d’attention à autre chose est réduite.
Symptômes physiques
• Les maux de dents se réveillent. L’étape 2 correspond, chez le petit enfant,
à l’âge de six-douze mois, où les dents poussent pendant que le petit fait
la connaissance du monde tout en agissant.
Besoins du coaché
• De s’enraciner, ou de trouver une nouvelle démarche.
• D’élargir les frontières, d’aller circuler à travers le monde.
• D’apprendre en faisant.
• D’être encouragé à agir.
• D’acquérir et de développer des compétences.
Réponses à donner par le coach
Protection
• Donner une formation sur le « comment faire ».
Permission
• Encourager à explorer, à faire des expériences tout en respectant
les fondamentaux des anciens maîtres.
• Lui dire : « Tu peux agir et bénéficier d’une aide de temps en temps. »
• Développer sa puissance et affirmer son Je.
3
L’ÉPANOUISSEMENT DU PROJET

3e étape : Faire fructifier le projet, la primauté de la matière

– Pourquoi est-ce que je renonce si vite, même quand j’ai


commencé quelque chose avec un grand enthousiasme ?
– Ce n’est pas au début que le bon coureur court vite. Le
commencement est concentration, et non dispersion. Un trou
minuscule dans l’œuf, et le petit oiseau ne naît pas. Le
comprends-tu ?
– Comment pourrais-je reconnaître ce trou dans l’œuf ?
– Ce que tu demandes est difficile. Mais je t’y amènerai. Le
problème n’est pas le trou : c’est le temps. Le trou ne nuit qu’à
l’embryon qui n’est pas à terme.
(silence)…
– Sois attentive ! Le semeur sème le grain. Tu es « celle qui va ».
Tu ne peux pas couper le grain en deux. Enfouis-le profondément,
il va pousser en se multipliant, et alors tu pourras le partager !
Mais enfouis le grain profondément… profondément dans le sol,
et que la terre se referme sur lui longtemps… longtemps… Mais
toi, tu attends à peine pour le distribuer. C’est là ton erreur. Sois
patiente comme la terre, d’où tu es prise et tu vas porter de
nombreux fruits.
G. Mallash

La troisième étape est souvent la plus longue du cycle d’Hudson. Selon la nature du
projet, elle peut durer plusieurs jours ou quelques années. Coach et coaché
sentent que le projet s’enracine, que la progression est certaine même si elle
est lente, graduelle et non linéaire. Avec la patience, la constance et la
capacité à tenir dans la durée, le projet avance avec efficacité. Ce qui a été
mis en route à l’étape précédente commence à porter ses fruits. Le coaché
peut récolter et déguster les produits de sa réussite.

Épanouissement du projet

Exemple
De nouveaux clients se sont manifestés : « On m’a parlé de vous, alors je viens vous voir ».

Durant cette étape le coaché porte un intérêt croissant pour les systèmes
de valeurs et les principes moraux des autres. Il commence à nouer des
alliances nécessaires et fédératrices autour de son projet qui attire du
monde. Il ressent un véritable alignement intérieur : ses idées, ses valeurs,
ses croyances, ses actions et la réalisation sont en phase. C’est cohérent et
solide. Il se sent en parfaite adéquation avec la situation. L’expérience
acquise lui donne maintenant la capacité de réagir avec davantage de
spontanéité. Il se sent pousser des ailes !
Une sensation de félicité extrême
Certains grands sportifs parlent du flow, cette sensation de félicité extrême où
tout mouvement est facile, juste, efficace, où tout est harmonie entre l’intérieur
d’eux-mêmes et l’extérieur, entre le mental et le physique, entre l’Un et
l’Universel. C’est comme s’ils se glissaient sans effort dans un courant porteur,
comme s’ils acceptaient d’être modelés par la situation tout en prenant un recul
bénéfique.

Mais l’expérience a aussi enseigné la prudence. Et s’il faut reculer ou


renoncer momentanément parce que la situation est défavorable, le coaché
sait différer son action avec souplesse.
Il est temps maintenant d’affronter les autorités qui le gouvernaient
jusqu’à présent. Le coaché sent le besoin de contester, d’exprimer son
désaccord. Il remet en question les manières d’agir d’autrui, et fait
les choses différemment. Il dit « non » à ceux qui l’ont aidé à grandir et à
se développer. Cela va jusqu’à transgresser les conseils des maîtres. C’est le
temps de la dissidence d’avec ses mentors : la liberté de ton et de style est
une conquête. Ils sont loin les débuts de l’étape 2.
Tous les signes le prouvent : le professionnalisme du coaché est acquis. Il
peut commencer à déléguer et à transmettre. L’idée directrice de cette fin de
l’étape 3 est de passer d’une notion d’accumulation à une dynamique de
diffusion. Et pour diffuser, il faut pouvoir puiser dans un stock.

L’AIDE DU COACH À L’ÉTAPE 3

Le coaché est conscient qu’il devient performant. Son projet se développe


et porte ses fruits. Mais alors qu’il sent la maturité arriver, il lui arrive de ne
plus très bien voir comment continuer. « Je peux faire mieux et plus, je le
sais. Maintenant ce n’est plus la question de quoi faire, mais de comment
faire. »
Pour aider le coaché à voler de ses propres ailes, le coach l’invite à
mesurer ce qui est accompli, à se féliciter et à se remercier. Il l’amène à
examiner de près son propre travail, à chercher l’excellence dans sa
pratique par une meilleure compréhension de celle-ci. Il le pousse
également à rassembler ses idées sur le métier et sur les façons de faire. Il
l’incite à combiner la technique qu’il vient d’acquérir avec d’autres
techniques qu’il a vues ailleurs et qu’il continue de découvrir. Il le pousse à
échanger avec des partenaires différents. Il est temps également que le
coaché s’émancipe des conseils de son mentor. Ce dernier va le pousser
hors du nid, hors de sa zone de confort. « Sois en désaccord ! Agis comme
tu l’entends ! Vas-y, remets en question les techniques que je t’ai apprises
au début ! » Cette façon d’obliger le coaché à trouver lui-même des
solutions innovantes et originales ressemble au sevrage d’un enfant. C’est
douloureux et jamais volontaire de la part du sevré.
Le coaché apprend ainsi à développer son style, à se laisser guider par ses
émotions, sa compétence inconsciente et à son intuition. Le coach le laisse
développer des nouvelles démarches plus personnelles, moins académiques.
Ainsi l’apprenant peut développer sainement sa puissance et affirmer un Je
plus personnel, plus identifié. « Je réalise et je montre qui je suis ! Je me
différencie. J’ai une façon personnelle de faire ». Le coaché se fait alors
connaître et reconnaître par ses confrères et par le monde. La supervision et
les groupes de pairs sont d’excellents moyens pour développer son propre
style et prendre conscience de son originalité et de sa puissance.
Et c’est ainsi que les élèves dépassent leurs maîtres.

LES OBSTACLES DE L’ÉTAPE 3

Plusieurs risques guettent le coaché à cette étape où la réussite est


manifeste. L’un d’entre eux est qu’il croit tout savoir. Le coaché se
considère maintenant comme un individu excellent et n’écoute plus les
autres. Ce risque d’éblouissement peut conduire à une perte de la notion de
réalité, ce qui finalement n’est pas si éloigné d’un manque de confiance en
soi. Le coaché peut également devenir autoritaire, voire cassant. Il veut tout
contrôler mais finit inéluctablement par ralentir le déroulement de son
propre projet. Le risque majeur est alors le rejet et l’isolement.
Un autre risque à l’étape 3, paradoxalement, est la peur de réussir. C’est
le cas lorsque le coaché attribue davantage de gloire à la bataille qu’à la
victoire.

La procrastination à l’étape 3
Laurent est en huitième année de médecine. Il fait sa spécialisation dans le service de
rhumatologie, une discipline qu’il adore. Dans le grand hôpital où il poursuit ses études et ses
recherches, son Professeur le presse de soutenir sa thèse. Il est temps maintenant ! Mais rien
n’y fait. Laurent brûle de passion pour sa matière, multiplie les gardes de nuit, se plonge à
corps perdu dans la lecture d’articles scientifiques. Mais son doctorat stagne, la rédaction de
la thèse est au point mort. Autour de lui on se questionne, ses parents s’inquiètent… Pourquoi
ne boucle-t-il pas ses études alors qu’il a presque terminé ? Ce report dans la vie active ne
masque-t-il pas un manque de confiance en soi pour exercer le métier de Docteur en
rhumatologie à temps plein et sortir du confort – relatif – de la vie d’étudiant-chercheur ?

Le troisième écueil dans cette étape 3 est l’épuisement qui guette les
héros perfectionnistes. Tant que le coaché héroïque peut faire mieux et plus,
il ne s’arrête pas. Tant que tout n’est pas fini il ne sait pas se détendre. Il y a
encore tant de choses à faire avant d’atteindre la perfection.
À la fin de l’étape 3, heureusement tout est accompli. La saison des
moissons et des récoltes se termine, l’automne va arriver. Que deviendra le
projet maintenant qu’il est achevé ? Contient-il en germe sa propre
transformation ou un événement extérieur viendra-t-il semer le trouble dans
cette œuvre aboutie ?
ÉTAPE 3
Les signes observables chez le coaché
Comportements du coaché
• Des clients ou des personnes intéressés par le projet viennent le voir.
• Il a un début de retour sur investissement : il récolte les premiers fruits.
• Il remet en question la manière d’agir d’autrui, y compris celle de ses
maîtres, de son coach et de ses mentors.
• Il affronte les autorités qui le gouvernent. L’opposition au coach est un
symptôme typique de cette étape. Le coach doit considérer ces
contradictions de façon positive.
• Il apprend à développer un style personnel, bien à lui.
Pensées
• Le professionnalisme est acquis, alors il pense à une délégation possible, à
une transmission éventuelle.
• Il s’intéresse au système de valeurs des autres, aux principes moraux.
Symptômes physiques
• Problème de dos, surtout le haut du dos. « J’en ai plein le dos de ceux-là. »
Besoins du coaché
• Faire les choses différemment des autres.
• Discuter, contester, exprimer son désaccord.
• Apprendre une morale, des manières ou des valeurs nouvelles.
• Sa préoccupation principale : « Il faut que ça marche ! »
Réponses du coach
• Le coach travaille sur le processus, c’est-à-dire sur le « comment faire ». Il
est entraîneur ; ensemble ils répètent. Le coach travaille beaucoup sur la
compétence et la performance avec son client.
Permissions à donner au coaché :
• Encourager à penser avant d’agir.
• Encourager à faire confiance à ses sentiments pour se guider.
• Encourager à agir comme il l’entend.
• Encourager à être en désaccord.
• Encourager à se différencier, à avoir une façon personnelle de faire.
4
STOP !

4e étape : L’arrêt du projet

« Celui qui monte sans cesse finit par être arrêté. »


Yi King

Une promotion qui tombe mal


Antoine a été promu manager il y a un an. Mais un nouveau président de l’entreprise vient
d’être nommé par le conseil d’administration et l’organigramme est complétement
bouleversé. Le patron d’Antoine lui demande de prendre la direction de la région des Antilles.
C’est une promotion importante – il gravit deux échelons d’un seul coup – mais tout ça vient
chambouler son équilibre de vie : sa femme vient d’accoucher de jumeaux, l’aînée rentre à
l’école primaire, Antoine est maire adjoint de sa petite commune. Cette promotion n’était pas
prévue, et peut-être pas bienvenue cette année. Antoine sent qu’une période se termine, qu’il
doit renoncer à certaines choses et faire des choix. Il est un peu perdu et n’arrive plus à penser
clairement. Il a besoin d’en parler à quelqu’un pour l’aider à dépasser cette mauvaise période.
Arrêt du projet

LES RAISONS D’UN ARRÊT

La lassitude et le désintérêt
L’usure ou la dégradation lente de la situation engendre une fatigue du
corps et de l’esprit. La lassitude ou le désintérêt s’invitent en nous. Après
l’abondance et la profusion qui étaient l’aboutissement naturel et souvent
heureux d’une réalisation, il est juste de s’arrêter, même si la tristesse pince
un peu le cœur.
Cette sensation de lassitude, le sentiment d’usure, de perte de motivation
sont des symptômes courant chez les jeunes qui viennent de passer un
examen après des mois d’études.

En panne après l’examen


Pauline vient d’avoir son Baccalauréat. Du jour au lendemain elle se sent vide, ne sait plus
quoi faire ni où aller. Alors qu’hier encore elle travaillait d’arrache-pied à préparer son
examen, aujourd’hui tout ce qui structurait sa vie s’est envolé : les fiches de cours, le planning
des révisions, les répétitions avec les copains, tout a disparu. Elle a l’impression de ne plus
être comme avant, ne sait pas encore comment être après. En tout cas elle se sent mal.
Une consultante évoquait ce qui se passait pour elle ces derniers temps :
« Il y a des choses qui grenouillent en moi. Je ne suis pas sûre de continuer
comme ça. Ça fait une dizaine d’années que je suis sur la brèche et sept ans
sur ce métier-là. J’arrive à me remobiliser quand je suis chez un client,
mais… et encore, pas toujours. Je sens que je suis dans un changement de
phase, je sens que quelque chose est en train de se clôturer. J’arrive au bout
de la logique de faire cela tout seule. »

L’arrêt brusque
Quelquefois la fin du projet arrive tel un couperet : perte soudaine d’un
emploi, coupe budgétaire immédiate, événement imprévu qui signe le coup
d’arrêt du projet. Une situation hors norme ou imprévue vient tout
bouleverser. D’un seul coup la lumière s’obscurcit, on rentre dans une
période sombre dont on n’est pas responsable.

Tremblement de terre
Depuis de longs mois Julien préparait le trekking de ses rêves dans l’Himalaya. Le jour de
son départ un puissant tremblement de terre dévaste une partie du Népal. L’agence lui
annonce que le trek est annulé. Quelle déception !

QUE FAIRE DANS UN CAS PAREIL ?

Les ruptures, les arrêts ou les fins nous renvoient toujours à notre propre
fragilité. Que peut dire le coach à celui qui est dans la peine ? Pour bien
aider l’autre dans cette étape 4, il est souhaitable que le coach ait déjà connu
lui-même des frustrations et réussi à dépasser ses échecs.

Échec ?
Le journaliste – Vous n’avez jamais dû connaître l’échec, vous ?
Le ministre1 – Je pourrai vous en citer quinze ! Tous m’ont été très utiles.

Manifester une attitude empathique


Fondamentalement le frein principal dans cette étape 4 est le refus de voir la
réalité en face et d’accepter que c’est vraiment terminé. Ce refus, ce déni,
est une défense psychologique naturelle pour éviter une souffrance plus
grande encore. C’est pour cette raison que le déni doit être respecté par le
coach et validé en tant que tel. Valider, c’est reconnaître les émotions et les
sentiments d’une personne, c’est lui dire que ses sentiments sont vrais,
justes et légitimes. Pour cela, l’aidant doit se synchroniser sur le monde
intérieur de l’aidé avec empathie. C’est ainsi que le coach peut restaurer la
confiance qui ramènera la sécurité. La sécurité amènera la force qui
renouvellera la conscience de sa propre valeur et réduira le stress. Ne pas
reconnaître les émotions et leur force serait tout simplement nier l’humanité
de l’autre.
Mais souvent la validation n’est pas suffisante pour amener le coaché à
évacuer le trop-plein d’émotions qui l’envahit. Il a aussi besoin d’être
accepté et soutenu inconditionnellement par une personne qui compte à ses
yeux. Le coach peut l’aider à mettre des mots sur cet arrêt pour faire passer
la parole à l’extérieur. Car tout ce qui ne s’exprime pas s’imprime dans le
corps. Par des gestes, une attitude bienveillante et des paroles chaleureuses,
le coach va manifester tout le soutien humain dont il sait faire preuve. Il est
présent, il est là aux côtés du coaché, il écoute sans rien dire. Il reformule
en écoute active. « Si je comprends ce que tu dis, c’est que… (tu ne t’y
attendais pas), (tu ne pensais pas que c’était si grave), (tu croyais que la
belle aventure allait durer encore longtemps), c’est bien ça ? ». Cette
relation bienveillante permettra au coaché de redonner progressivement du
sens à sa vie.

Pour aider le coaché à sortir du déni, lui montrer des éléments


factuels de la réalité
Cette étape fait appel à la raison du coaché. L’aidant lui montre des
données, des chiffres, des témoignages qui prouvent que les choses ne sont
plus comme avant. Ce travail protecteur est une façon d’amener le coaché à
prendre conscience de la réalité de la fin. Cependant, selon la personnalité
de chacun, selon la façon d’appréhender le monde, il est parfois préférable
de commencer l’accompagnement de cette phase de déni par l’angle de la
raison avant d’aborder celui des émotions. Tout dépendra de la porte
d’entrée privilégiée du coaché (émotions, pensées ou action).

S’abstenir de tout conseil


Si le coach est lui-même mal à l’aise avec les ruptures parce qu’elles
réveillent en lui ses propres failles, il risque de projeter massivement sur le
coaché les émotions qui lui sont propres (colère, abattement, etc.). En se
mettant à la place du coaché et en lui donnant des conseils, c’est comme si
ces conseils s’adressaient à lui-même : « Il faut que tu réagisses ! Bouge-
toi ! ». « Tu viens de perdre ton boulot ? T’en fais pas, en langue chinoise le
mot crise s’écrit avec deux idéogrammes : danger et opportunité. Alors
saisis l’occasion et prends cette perte comme une opportunité pour trouver
un travail encore mieux rémunéré ! ». Le coach s’abstiendra vraiment de
tout conseil car il est inutile de mettre de l’énergie là où ce n’est pas payant.
Souffler sur les cendres n’a jamais rallumé un feu.

Freiner toute velléité d’action


Ce n’est pas le moment non plus de s’engager dans un nouveau projet qui
consommerait le peu d’énergie qu’il reste au coaché alors qu’il est
massivement envahi par le doute, les émotions et la perte de repères. Faire
preuve d’un excès d’optimisme de la part du coach serait une preuve
d’irréalisme.

Le coaching équanime
Le coach est là aussi pour éclairer et alerter fermement le coaché s’il estime
qu’il va dans une mauvaise direction. Cette faculté de passer de la
bienveillance à l’implacabilité, et réciproquement est le propre d’un coach
équanime. Cette qualité demande de la souplesse et de la fermeté. Le coach
équanime sait que la vie n’est qu’ondulations, impermanence et surprises.
Toute rupture, toute fin, toute perte d’un projet ou d’un espoir entraînent
un processus psychologique qui va permettre de dépasser la douleur de la
perte. C’est la fonction du deuil.
ÉTAPE 4
Les signes observables chez le coaché
Comportements du coaché
• Pratiquement aucun signe extérieur (phase intra psychique)
• En quelques mois, on peut voir une forte baisse forte de motivation.
• Le coaché rentre massivement dans ses comportements de stress.
• Retrait sur soi-même, dépression, apathie soudaine ou rapide.
Sentiments
• Surprise, voire effondrement si l’arrêt est subi et soudain.
• Désolation
Pensées
• Interrogation, doute, idées noires.
Les deux types de rupture :
• Rupture physique : « J’étais sur un projet. Le projet est terminé et
maintenant j’arrête. »
• Rupture psychologique : le coaché commence à s’ennuyer. Phénomène de
lassitude, de déprime, de perte et de démotivation.
Besoins du coaché
• Soutien inconditionnel dans l’ordre des choses.
• Être accepté et soutenu inconditionnellement.
Réponses du coach
• Protection : écoute passive (être là, à ses côtés) et écoute active
(reformulation).
• Permission : de changer, même brusquement.
• Aider à faire prendre conscience que c’est vraiment fini.
• Explorer la façon dont la personne vit la rupture : choisie, subie, anticipée,
décidée…
Remarque : la rupture peut arriver aux étapes 1, 2 ou 3 et, selon l’intensité de
l’étape 4, le deuil (étape 5) sera plus ou moins difficile.
5
TRAVERSER LE DEUIL DE L’ANCIENNE
SITUATION

5e étape : Quelques moments de nostalgie

« Les rites de deuil sont là pour fatiguer la douleur. Car perdre


un être cher est une douleur commune à tous les êtres humains.
Cette douleur, on ne peut pas la supprimer, mais on peut la
fatiguer. Et quand elle est fatiguée, elle est moins brûlante. »
Confucius

On ne devrait pas dire mon projet est mort car la disparition ne représente qu’un
instant, mais dire comme les enfants, il a mouru. Cette simplicité de
langage nous rappelle que la fin d’un projet ne dure qu’un instant. C’est la
suite qui est plus longue. Le terme « deuil » peut paraître parfois intellectuel
alors qu’il est avant tout émotionnel. Quand on perd un espoir ou une
personne chère, on ressent du désarroi. C’est pour cette raison que le coach
doit montrer un grand respect pour cette perte, et accepter de ne pas avoir
toutes les réponses aux questions que le coaché va se poser. Chaque deuil,
chaque fin d’histoire est une affaire personnelle. Il n’y en a pas deux qui se
ressemblent.
Le deuil

LE COACH EST-IL PRÊT À ACCOMPAGNER


LA FIN ?

La meilleure volonté du monde ne suffit pas. Si le coach ignore les rituels et


les processus qui accompagnent les deuils, il risquera d’être submergé par
les émotions du coaché (peur, colère, tristesse), et cherchera à les minimiser
ou à les nier. D’où l’importance de connaître les étapes et la façon de les
accompagner. Pour s’assurer de la qualité d’un coach à accompagner les
phases de deuil, la bonne question qu’on pourrait lui poser serait la
suivante : « Dans ces dernières années as-tu perdu un être cher, un projet
qui te tenait à cœur, ou encore un espoir ? Comment ça s’est passé pour
toi ? » Si le coach est mal à l’aise pour répondre, c’est que certaines phases
de ses propres deuils sont encore douloureuses. Il est alors probable qu’il
sera en difficulté pour accompagner celles des autres.
La plupart des névroses que nous rencontrons dans la vie sont dues à des
deuils mal faits ou mal accompagnés. Il n’y a que tout récemment qu’on se
préoccupe des questions de deuil. Autrefois, la communauté les prenait en
charge car la sagesse savait qu’un deuil n’appartenait ni à une personne ni à
son entourage proche, mais à la communauté toute entière. Aujourd’hui
nous sommes éloignés de ces rituels, si bien qu’on ne sait que dire ni que
faire quand on rencontre une personne qui a perdu un être cher ou un projet
important.

LE DEUIL ET L’ATTACHEMENT

Il est difficile de parler de deuil sans parler d’attachement. Que ce soit vis-
à-vis des personnes ou vis-à-vis des projets, cette notion d’attachement est
capitale à comprendre pour le coach. On peut distinguer deux sortes
d’attachements : l’attachement d’amitié et l’attachement passionnel.

L’attachement d’amitié
Si vous avez un grand ami, il y a des similitudes entre vous et lui. Vous avez
les mêmes intérêts, les mêmes valeurs, les mêmes points de vue ou les
mêmes perspectives sur la vie. Vous vous sentez à l’aise avec cet ami.
Cependant chacun reste autonome et la dépendance entre vous deux est
relativement faible. On cherche dans l’autre ce qui n’est pas en soi, ou on
cherche en l’autre ce qui est en potentiel dans sa personnalité. Dans
l’attachement d’amitié, l’autre personne fait partie de moi, devient une
expansion de moi-même. De même avec les projets, il y a des similitudes
entre moi et mon projet. J’ai investi une grande partie de mon temps et de
mes ressources dans mon projet. Mon projet c’est un peu de moi-même.

L’attachement passionnel
Lorsque deux personnes ont l’impression de devenir un, on peut parler
d’attachement passionnel. Alors on idéalise l’autre, on l’entoure de ses
rêves. L’amour passionnel est tellement fort qu’on dit souvent qu’on ne se
marie pas avec les personnes mais avec l’image qu’on se fait d’elles.
Quelquefois, le projet que nous avons réalisé ou la fonction que nous
avons occupée sont confondus avec ce que nous sommes. On est dans une
fusion totale, absolue avec le projet. « Je suis ce que je fais, ma réalisation
et moi ne faisons qu’un. »
L’attachement passionnel comporte un aspect de possession qui nous
pousse à nous investir. Car l’être humain a une grande capacité à s’attacher
aux choses, à leur donner du prix, et à leur attribuer une charge symbolique.
QUE SIGNIFIE FAIRE SON DEUIL ?

Le deuil n’est pas une maladie mais un événement de la vie. Quand nous
perdons quelque chose, quelqu’un ou un projet, nous sommes amputés de
l’investissement psychique que nous avions mis dans cet être ou ce projet.
L’intensité et la durée d’un deuil sont alors proportionnelles à cet
investissement.
Faire son deuil c’est arriver à se dégager de l’idéal qui s’attachait au
projet ou à l’objet perdu, et cette séparation – ce deuil – fait mal. « Pas de
gain sans chagrin » disait Jane Fonda. Faire son deuil signifie traverser et
dépasser le stade de la douleur. C’est pourquoi ce phénomène normal de la
vie doit être transitoire.

Les aspects subjectifs du deuil


Lorsque nous voyons quelqu’un qui perd un objet, un projet ou un être cher,
la question à lui poser c’est « Qu’est-ce que représentait cet objet, ce projet,
cet être pour toi ? »

Enzo a perdu son porte-clé


Pour ses cinq ans Enzo s’est vu offert une boussole porte-clé par sa marraine. Il montre son
cadeau à ses frères, ses sœurs et à tous ses copains. Comme il est fier !
Mais un jour, alors qu’il est en vacances chez ses grands-parents, il ne retrouve plus son
porte-clé boussole. Il le cherche partout – il est sûr qu’il ne l’a pas perdu ! – demande à sa
maman si elle ne l’a pas vu, interroge son frère, accuse sa sœur (c’est toujours elle qui lui fait
des sales tours), remue la maison de fond en comble. Rien. Il recommence – c’est tout de
même pas possible qu’il l’ait perdu – Mais non, rien.
Au bout d’une journée de vaines recherches, il doit se résoudre à la cruelle vérité : il a perdu
son porte-clé boussole. Il rentre alors dans la maison de vacances, prend son doudou, se cale
dans le canapé, suce son pouce et sanglote en silence. Mamie est là, elle le prend dans ses
bras, le caresse, lui fait des petits bisous. Papi est rentré du jardin. Il regarde son petit-fils et
d’un geste un peu bourru – on est pudique dans cette famille – le prend par la main et
l’emmène dans son atelier. Dans l’atelier de Papi, on trouve toute sorte d’outils. Enzo prend
un marteau, Papi lui ouvre la boîte à clous, et tous deux bricolent ensemble sans dire grand-
chose.
À midi ça va déjà mieux. Le doudou a été oublié près de l’établi, Enzo termine de passer du
papier de verre sur la petite boîte fabriqué avec son grand-père. « Ça aurait fait une belle
boîte pour ma boussole, hein Papi ? ». « Oui, ça aurait été une jolie boîte pour ta boussole
mon chéri. »
À une personne qui n’arrivait pas à se remettre d’un licenciement, le
coach posa cette question : « Que représentait pour vous ce travail ? » Et
elle lui répondit en sanglotant « C’était ma vie, mes amis, et tout le plaisir
de voir mes décisions prendre forme matériellement. Vous ne pouvez pas
savoir comme c’est excitant de décider et de voir se réaliser ses idées ! »
L’objet primaire du deuil dans ce cas était le travail. Mais là où ça faisait le
plus mal, c’était l’hémorragie des signes de reconnaissance nombreux et
puissants que cette personne recevait abondamment. C’était sous cet aspect
que le deuil était le plus douloureux. Le deuil est comme une petite mort. Il
y a une partie de soi-même qui meurt avec la disparition du projet.

La grand-mère et le smartphone
Un jour, une dame présente son fils de onze ans à un ami coach. Elle lui dit : « Il y a quelque
chose qui ne va pas avec mon fils. Quand il a perdu sa grand-mère l’an dernier, il n’a presque
pas pleuré. Et maintenant il a cassé son smartphone et il est inconsolable. Il doit y avoir
quelque chose qui ne tourne pas rond chez cet enfant-là ».
– Mais non ! La grand-mère, il l’aimait plus ou moins. Elle le taquinait souvent. Il n’avait pas
de relation très profonde avec elle. Mais son smartphone, c’était son lien avec le monde des
amis. Il se levait le matin avec. Son smartphone ne lui disait jamais de méchanceté, ne lui
faisait jamais de remontrance. C’est sûr qu’une grand-maman vaut plus qu’un téléphone.
Mais cet enfant de onze ans avait investi plus de lui-même dans cet objet que dans sa grand-
mère.

Un coach ne devrait jamais juger le deuil de quelqu’un en fonction de


l’objet perdu.

Le piège de la substitution
Lorsqu’après la fin d’un projet, la personne se précipite sur un autre projet
avant d’avoir digéré la fin du précédent, on parle de phénomène de
substitution. C’est dommageable car cette précipitation escamote les
phénomènes biologiques naturels qui prennent du temps pour réorganiser le
corps et l’esprit durant le deuil.

Problème d’impôts
Trois ans après la création de son entreprise, Hervé dépose le bilan. Brillant commercial, il est
piètre gestionnaire et a méconnu l’importance de payer ses impôts à temps. À peine la faillite
prononcée, il recrée une autre entreprise dans le même secteur d’activité, avec le même élan
commercial et les… mêmes lacunes en matière de gestion administrative.
Deux ans plus tard, il est condamné sévèrement par le tribunal de commerce pour une
deuxième faillite.
LE RÔLE DES PROCHES ET DU COACH

Faire circuler la parole bloquée


Une des principales conditions pour faire un deuil, c’est d’avoir
connaissance de la perte. Rien de plus terrible que l’incertitude ou
l’ignorance. La grande technique pour aider quelqu’un à faire son deuil,
c’est de l’aider à se raconter, à raconter ses rêves par exemple. Raconter,
c’est se raconter.

Raconter pour faire le deuil


Une jeune femme qui n’arrivait pas à faire le deuil de son divorce racontait son rêve :
« Je rentre dans une maison, il fait de plus en plus noir, j’avance de plus en plus difficilement.
J’ai les pieds qui pataugent dans la boue, cette boue est de plus en plus visqueuse, collante.
Le couloir se rétrécit, me presse des deux côtés. J’étouffe. »

Il n’est pas normal que les deuils se fassent si souvent dans les cabinets
des psychologues. Si la personne avait une oreille amie pour l’écouter,
quelqu’un qui l’entoure et lui tende une main amicale, elle n’aurait pas
besoin de payer un spécialiste. Mais comme les communautés sont de plus
en plus disloquées il faut faire appel à des professionnels. Les coachs sont
aussi là pour ça.

Le rôle de l’entourage
Une autre condition est d’avoir une communauté qui nous accueille, nous
reçoive, nous entoure, nous accompagne, sans nous envahir mais sur
laquelle nous pouvons compter, avec qui nous pouvons parler et nous
raconter. Si on surprotège les gens et on ne les aide pas à entrer dans leur
souffrance, le deuil va être beaucoup plus long. En ce qui concerne les
enfants, aidez-les à affronter la mort, celle du poisson rouge, de la souris
blanche ou des mouches sur le carreau. Bien sûr, il ne faut pas les forcer.
L’essentiel, c’est de faire comprendre que la mort et la perte de ce que l’on
aimait fait partie de la vie. Plus on cache la mort et plus on développe
l’anxiété.

Revenons à Enzo
Au déjeuner Papi et Mamie lui demandent :
– Ça va mieux mon chéri ?
– J’l’aimais bien ma boussole.
– Oui tu l’aimais bien ta boussole. (Silence…)
– (Silence d’Enzo). C’est toujours comme ça quand on perd quelque chose qu’on aime bien ?
On est toujours triste d’abord, et après ça va mieux ?
– C’est souvent comme ça mon trésor. Après les bisous et un tour à l’atelier de Papi, ça va
toujours mieux.
– C’est bien l’atelier de Papi !

LE DEUIL ET SES ÉTAPES

Dégel émotionnel et arrivé d’une dépression


Trois ou quatre semaines après le décès ou l’annonce de la fin du projet, les
drogues naturelles que le corps avait fabriquées pour survivre à la
séparation commencent à se dissiper et les émotions affluent. Le vide de la
perte se remplit par un flot d’émotions, d’anxiété et aussi de peur. Alors que
les proches et les amis croient la personne sereine après tous ces jours de
soutien, ils la quittent en douceur. Mais elle a vraiment besoin d’eux dans
ces moments. Ses résistances commencent à lâcher et elle se sent plus seule
que jamais.
La personne endeuillée s’étonne ou se culpabilise. « Trois semaines après
l’annonce de mon licenciement, comment ça se fait-il que je sois si peu
courageux ? ». Elle ressent un sentiment d’abandon qui s’exprime par un
mélange de tristesse, de pleurs, de colère et de haine. « Ils m’ont viré ! Ils
ont rayé mon projet d’un trait de plume alors qu’on avait travaillé
d’arrache-pied pendant trois mois ! ». Car on n’admet pas si facilement
d’avoir été abandonné. Cette colère légitime se déplace parfois contre les
employeurs ou les grandes puissances. Toutes les fois qu’on est frappé par
un deuil ou une perte, notre image de la puissance, et de la toute-puissance
est appelée à changer. Le rôle du coach est alors d’amener son coaché à
prendre conscience que ce ne sont pas les grands chefs (ou Dieu) qui ont
décidé de l’abandonner ou de lui faire mal.
Quelquefois, la personne endeuillée ressent un sentiment de libération
après la mort du projet. Aurait-elle trouvé un sens à cette perte ?
Faire la paix avec soi et avec les autres
La vraie question du deuil c’est de sortir de sa douleur. Quand on est
capable de penser avec joie et gratitude à la personne partie ou au projet
terminé, le deuil est en bonne voie de résolution. La paix peut trouver place
dans notre cœur. On a pris du recul et de la distance sur l’événement passé.

Un homme pressé
Touché par un accident vasculaire cérébral (AVC) en 2009, Christian Streiff, alors patron de
Peugeot Citroën, dirige deux cent mille personnes à travers le monde. Il voit sa vie basculer.
Son corps est intact, il l’a échappé belle, mais le fonctionnement de sa mémoire est touché, et
sa vie d’avant profondément remise en question.
Cet homme, l’un des plus puissants patrons de France à l’époque, raconte son expérience et la
reconquête de sa vie dans un beau livre, J’étais un homme pressé. Obligé de quitter son rôle
de capitaine d’industrie, l’homme continuera malgré tout à se projeter dans l’avenir et trouver
un sens différent à son existence : parcourir la France à pied, traverser le Pacifique à la voile,
redécouvrir la nature en solitaire, retrouver le temps de vivre avec les autres. Ce livre raconte
son retour vers des passions simples qui avaient été progressivement chassées de sa course
d’homme pressé. Ni tout à fait le même, ni tout à fait un autre, Christian Streiff a retrouvé la
souvenance des mots et recommence une carrière dans l’industrie, mais il protège désormais
un temps pour ces autres facettes de lui-même que l’AVC lui a donné la chance de
reconquérir.

Une fois qu’on a pris une certaine distance avec le deuil, le coach peut
demander au coaché : « Qu’est-ce que cette perte vient faire dans ta vie ?
Est-ce que tu peux lui donner un sens ? » Car le plus grand besoin d’une
personne, c’est de savoir quel est le sens de sa vie.
Cela peut paraître surprenant dans nos sociétés très compétitives, où
l’ambition, la motivation, le challenge et la réussite des gagnants sont
valorisés. Dépasser les rancœurs, aller de l’avant malgré les méchancetés de
la vie, est un travail de réconciliation et de pacification qui va à l’encontre
d’une certaine façon de vivre aujourd’hui. Pardonner est devenue une vertu
oubliée.
Mais à quoi sert de pardonner ? Pourquoi et à qui pardonner ?
Pardonner, au niveau d’un groupe ou d’une société, c’est donner à
l’individu, inlassablement, une occasion de croire en lui-même, de retisser
le lien de reconnaissance, de faire la paix avec soi, moteur de toute prise de
conscience et de tout changement. Edgar Morin écrit : « Pardonner, c’est
résister à la cruauté du monde. (…) Renoncer au cycle infernal vengeance-
punition est tout le problème de la civilisation ». La gratitude et le pardon
sont « le pari sur la possibilité de transformation et de conversion au bien
de celui qui a commis le mal ». Accorder le pardon et exprimer sa gratitude
enlèvent ce qui reste de colère dans le deuil. « Il faut aller plus loin que la
justice. Il faut arriver au pardon, car sans pardon il n’y a pas de futur »
disait Desmond Tutu, l’archevêque du Cap en Afrique du Sud, en parlant de
ce qu’il s’est passé dans son pays. Cette phrase nous montre le chemin et
donne son vrai sens à nos réconciliations. À condition bien sûr de ne pas se
résigner à la séparation et de vouloir continuer à avancer.
Mais le pardon n’est pas une œuvre simple. Il demande courage et
équilibre pour trouver l’attitude juste et qui ne soit pas faiblesse. Il est alors
compréhensible que les personnes qui ont subi un acte injuste – ou perçu
comme injuste – soient moins portées au pardon et à la gratitude.

L’au revoir
Pour pacifier son cœur et repartir serein vers de nouveaux projets, le coach
peut demander au coaché de procéder au rituel de la lettre. Dans quelques
jours, le coaché écrira une lettre à celui ou ceux qui sont la cause de l’arrêt
de son projet, même les destinataires les plus irréels, même les plus
fantasques ou les plus improbables. Le coach encouragera le coaché à
imaginer à qui il pourrait en vouloir, y compris lui-même ou une partie de
lui-même. C’est le cas par exemple quand les projets se sont arrêtés par
lassitude ou épuisement de motivation. La lettre commencera par tous les
griefs, reproches, rancœurs que le coaché a ressenti et ressent encore
aujourd’hui. Puis il termine sa lettre par une note positive. À lui de trouver
la tournure. Le coaché écrit sa lettre, la met sous enveloppe, indique
l’adresse si le destinataire est connu, et va la brûler quelque part dans la
nature. Les fumées emportent dans le vent les griefs ainsi que le
renouvellement dans la confiance en la vie. Si ce rituel est insuffisant, le
coach demandera au coaché de recommencer avec d’autres personnes avec
qui il a besoin de pacifier son cœur.
Quand ces actes symboliques sont réalisés, le coach, le coaché et son
entourage peuvent se retrouver pour fêter la fin de l’hiver. Une étape se
termine.

Fêter la fin
Par analogie avec les rites funéraires, la fin d’un projet mérite qu’on le fête,
même si le projet ne s’est pas terminé de façon heureuse. C’est le temps de
l’accompli, celui qui peut se transformer en rite, puis éventuellement en
mythe. Car pour terminer un deuil, on a besoin d’une manifestation sociale
qui indique aux autres que maintenant c’est terminé, la page est tournée, la
vie reprend le dessus. Dans toutes les cultures du monde, les rituels de fin
se terminent par un repas. À travers la nourriture, l’humain signifie qu’il est
temps maintenant de reprendre vie. C’est bon, joyeux, et ça passe par la
bouche ! Les pots, les fêtes sont des moments de retrouvailles – avec soi-
même en particulier. On invite les amis, on se réjouit. On évoque les bons
moments passés ensemble pendant le projet. Quand nous arrivons à cette
étape, nous pouvons nous remercier de tout ce qui a été accompli.
ÉTAPE 5
Les signes observables chez le coaché
• Nostalgie, rituels, passe-temps, retour sur les lieux.
• Déni, colère, dépression, peur, marchandage.
• Manifestation des sentiments parasites, de manifestation de stress.
Besoins du coaché
• Être entouré et soutenu par la présence d’un entourage bienveillant et
compatissant.
• Savoir que le processus de deuil est normal et demande du temps (d’où les
rituels).
Réponses du coach
Protection
• Ne pas griller les étapes et sortir trop vite du deuil. Le coach devrait parfois
freiner le coaché qui veut se remettre trop vite dans l’action d’un nouveau
projet.
• Ne pas « voler » le deuil à l’autre : « Mais non, t’en fais pas. Tu verras ça
passera ! »
• Pour le coach, c’est important d’avoir une grille d’accompagnement
des étapes du deuil.
Permission
• Respecter la phase de déni. Le coach ne fait pas comme s’il ne s’était rien
passé.
• Écouter et accepter la colère et sa libre expression.
• Compatir sincèrement et entendre avec le cœur.
• Rester serein devant l’ordre des choses, du cycle de la fin,
du recommencement.
• Ne pas redonner de faux espoirs.
• Prendre le temps nécessaire pour digérer la perte.
• Exprimer et explorer les sentiments associés à cette perte.
• Faire des rituels de deuil : pots de départ pour partir en bon terme, visite
une dernière fois du lieu que le coaché à longtemps occupé, etc.
• Orienter le travail de la perte. « Qu’est-ce que vous gardez, que vous
héritez de la situation passée ? »
6
ÉTABLIR LE BILAN

6e étape : Savoir raison reprendre

« Deux excès : exclure la raison, n’admettre que la raison. »


Blaise Pascal

Après l’examen
Estelle a eu son Bac avec mention très bien au mois de juin. Elle a retrouvé les copains et
pendant deux jours ils ont fait la fête. Quelle joie !
Après quelques jours d’errance, elle se réveille un matin et brusquement s’assoit à son bureau.
C’est ici, sur ce siège qu’elle a passé tant de jours à réviser. Elle prend une feuille de papier
blanc, tire un grand trait vertical. Dans la colonne de gauche : « Ce que je referais à
l’identique si je devais repasser le Bac », à droite « Ce que je ferais autrement ». Au dos de la
feuille, elle ajoute l’enseignement qu’elle tire de cette expérience.

Une personne qui arrive à cette étape peut changer brusquement


d’attitude. Elle retrouve une voix posée et un visage assuré. Les émotions
des étapes précédentes sont apaisées. La personne a maintenant besoin de
prendre du recul et de la hauteur afin d’élargir son champ de conscience.
Pour cela, le coach l’aide à s’évaluer et se comparer sainement, y compris
quand le projet s’est bien déroulé et bien terminé.
Faire le point

PRÉPARER LE BILAN

Dans les entreprises, le coach va encourager le salarié à faire un bilan de


compétence pour mesurer ce qu’il a réalisé et identifier les ressources qu’il
a utilisées. Tout cela pour mettre en perspective, donner du sens, et recenser
les actions à conduire dans les projets à venir en tenant compte des acquis et
des points à modifier. Revisiter le passé et mettre à jour les événements
vécus permet à l’individu une réappropriation et une reconquête de son
histoire. On renforce ainsi son sentiment d’identité tant personnelle que
professionnelle.

LE PROTOCOLE DE DÉBRIEFING

Le général Patrick Dutartre a été leader de la patrouille de France en 1987.


Aujourd’hui il est consultant en entreprises. Voilà ce qu’il nous dit de
l’histoire et de l’intérêt des briefings.

À quoi servent briefings et débriefings


« Les briefings et les débriefings remontent au début de l’aéronautique. Lorsque les pilotes
partaient en mission, ils n’avaient pas de radio. Ils devaient se mettre d’accord avant le vol, et
donc briefaient leur mission. Et le corollaire était le débriefing au retour.
Aujourd’hui le débriefing dans les organisations est sous-employé et sous-évalué. Il doit être
utilisé à tous les niveaux de la hiérarchie. Débriefing signifie progrès. Il s’agit de le déployer
dans toute l’entreprise, toujours dans un souci de progresser et non pas dans le but de
chercher une responsabilité. Il faut donc faire des débriefings même, et surtout quand ça va
bien. Il faut décortiquer pourquoi on a gagné un marché, pourquoi ça a bien fonctionné de
façon à le reproduire. »1

Le coach pourra s’inspirer de ce consultant en entreprise et utiliser


quelques questions utiles pour conduire un débriefing avec le coaché.

Exercice de débriefing
• Notez tous les événements liés à la situation passée, les expériences vécues comme
agréables, celles vécues comme désagréables.
• Notez tout ce que le projet vous a permis de réaliser (vos actions concrètes), de vivre et
de se ressentir (sur vous, sur les autres, sur le monde, votre métier, la vie).
• Notez les ressources et les aides que vous avez dues mobiliser pour traverser cette
situation.
• Quels points forts vous ont été utiles dans ce projet ? Quels points faibles sont apparus ?
• Notez ce qui pourra être reproductible dans ce que vous venez de réaliser.
• Notez ce qui ne pourra pas être pérenne dans ce que vous venez de faire.
• Notez les zones qui vous paraissent floues dans ce que vous avez accompli.

Le coach écoute attentivement. Il n’intervient que si c’est nécessaire :


approfondissement, précision, recentrage, etc. Il synthétise et reformule ce
que lui dit le coaché. Si le projet a été réussi, il valorise le coaché pour
renforcer la réussite. S’il y a eu échec ou réussite partielle, ils analysent
ensemble le pourquoi et surtout, ils retravaillent le comment, les actions
correctrices à mettre en place dans les prochains plans d’action. Quand la
séance de coaching se termine, le coach manifeste de façon empathique
toute sa confiance au coaché. La confiance est un élément instable. Elle doit
être renforcée fréquemment par des signes de reconnaissance.

LES ÉCUEILS À CE STADE

Le principal frein dans cette étape du bilan est l’impossibilité de sortir de


l’émotion. Le coaché n’arrive pas à penser sereinement. Son état interne
l’empêche de voir la situation passée avec recul et détachement. Faire le
bilan dans ces conditions a peu de sens et l’efficacité est limitée. C’est une
des problématiques rencontrées par les professionnels des bilans de
compétences qui ont des impératifs de délais et de coûts face à des
personnes à qui on demande de faire un bilan, alors qu’elles sont encore en
pleine phase de deuil.
L’autre écueil vient de la vision que le coaché a de lui-même et des
autres. Nous avons tous un système de croyances sur nous-même, sur les
autres et sur le monde. C’est pourquoi nous avons tendance – surtout en
période de stress – à nous dévaloriser, nous survaloriser, à dévaloriser
l’autre ou à le survaloriser. Ce concept de valorisation relative est appelé
positions de vie par les analystes transactionnels.
Si le coaché a tendance à se survaloriser et à dévaloriser l’autre, on dit
qu’il est position de vie (OK+/OK –). Il s’offusquera alors que le coach lui
demande de débriefer ou de se soumettre à une quelconque évaluation.
D’autres coachés considéreront leurs réalisations avec dédain. « C’est
banal, presqu’un travail de débutant. Il n’y a rien d’extraordinaire dans ce
que j’ai fait. J’ai piloté des projets autrement plus importants ! »
Si le coaché a tendance à se dévaloriser et à dévaloriser autrui on dit qu’il
est position de vie (OK–/OK –). Il ne bougera pas, ne fera rien, sabotera
tout, ou remettra sans cesse à plus tard ce travail de bilan. On appelle ce
phénomène, la procrastination.
Et si le coaché est en position de vie OK–/OK+ il méconnaîtra ses points
forts et ses qualités, il aura du mal à se réjouir et à célébrer la réussite.
« C’est si peu de chose par rapport à ce que les autres savent faire. »
Peu à peu la résilience fait son travail de réharmonisation silencieuse.
Bientôt le printemps reviendra et on assistera à la renaissance de la vie sous
forme de nouveaux projets. Mais avant de débuter un nouveau cycle, il
faudra que le coaché se libère définitivement des anciennes fatigues.
Rétablir l’harmonie demande une étape ultime : le repos.
ÉTAPE 6
Les signes observables chez le coaché
• Le coaché peut changer brusquement d’attitude : il retrouve une voix
posée, un visage assuré.
• Le coaché recherche de l’aide et du soutien.
Besoins du coaché
• D’avoir fait le deuil (étape 5) avant de passer à l’étape 6.
• D’informations sur comment faire un bilan.
• D’informations sur ce qui vient de se passer.
• De s’évaluer et de se comparer sainement aux autres.
Réponses du coach
• Faire un bilan des points forts et des points d’amélioration du coaché (ses
points faibles).
• Apprendre à faire le débriefing d’une action ou d’un projet.
7
LAISSER REPOSER, DIFFUSER

7e étape : Se reposer, savourer, et laisser diffuser les bienfaits


de ce qui a été accompli

« Par la vertu du non-agir, l’ordre se maintient, naturel. »


Lao Tseu

Le tambourin des émotions s’est tu. La raison a calmé le désordre. Le coaché peut
se reposer, laisser décanter et savourer le travail accompli. La mue se
prépare dans le calme, changement de forme sans modification de fond. Ce
qui a vieilli va être remplacé sans regret par le nouveau, on le sait et nous
nous en réjouissons d’avance. Ces moments de tranquillité sont propices
aux rêveries et aux errances. Nous nous intéressons à tout ce qui est
intérieur, invisible, inconnu, à venir. Un peu de mélancolie ? Un sentiment
d’égarement ou une incapacité à décider ? Bons signes !
Mais comment accueillir le neuf, le rêve, source de l’étape 1 quand tout
est rempli, qu’il n’y a plus de place dans notre vie ? Oh ! Que c’est difficile
pour certains d’entre nous. Notre société de la mobilité et de la vitesse
n’aime pas le non-agir, signe de paresse et de fainéantise. Le repos, c’est
juste le contraire de la performance. Or notre corps a sa propre temporalité
et l’intégration prend du temps. Apprendre à être cool, c’est tout un art. En
farniente c’est comme tout, il faut savoir doser l’effort ! À l’étape 7 nous
sommes confrontés à une situation sur laquelle nous avons peu de prise et
devons apprendre à attendre.

Laisser reposer, diffuser

SE REPOSER

Tant physiquement que moralement, l’Homme a besoin de dormir pour se


régénérer. Les neurologues nous le disent : la nuit, le cerveau procède à un
gros travail de réorganisation psychique. Une absence prolongée de
sommeil conduit inexorablement à la mort. Si on passe un tiers de sa vie à
dormir, c’est qu’il doit bien y avoir des vertus au repos. Le repos est donc
un devoir. Cette pause salutaire nous permet de nous calmer et remet en
harmonie le corps et l’esprit. Avant de passer à un autre projet, nous
prenons le temps de digérer le changement précédent. On se pose, on se
repose.
Peu de modèles ou de théories de l’accompagnement évoquent l’intérêt
du repos et de l’errance. Pourtant un nombre croissant de personnes – de
cadres d’entreprises en particulier – avouent pratiquer la méditation. Est-ce
le signe d’une prise de conscience actuelle de la nécessité de se reposer et
de se ressourcer ? D’autres personnes accordent une place importante à leur
cours de dessin du mardi soir, ou encore, avouent leur besoin impérieux de
randonner pendant quelques jours, seules. « C’est dans ces moments
d’errance et de solitude que j’ai trouvé les meilleures idées pour mon
entreprise ! » affirmait le créateur d’une start-up. Le bon repos est un acte
calme et créateur de ressources. C’est très différent de l’immobilisme. Un
repos qui n’est pas une préparation pour la suite n’est que mollesse.
Autrement dit, il nous épuise.

LAISSER DIFFUSER, SAVOURER

« Ressentez l’instant du vide médian ! ». En yoga, l’arrêt entre deux


mouvements est aussi important que le mouvement lui-même. Ce vide fait
place. Il est silence habité, temps de maturation. L’ouverture intérieure est
détente. Vide et repos déstressent, ils ouvrent les sens. Écoutez le son d’un
fin silence !
Par principe, ce qui est vide se remplit, ce qui est plein diffuse. Si on ne
sait pas déguster, on a tendance à vouloir recharger tout de suite. Le coach
apprendra au coaché à prendre le temps de savourer les bienfaits des phases
précédentes. Le coaché s’entraînera à sentir la diffusion des changements
dans tous les domaines de sa vie. Il apprendra à savourer les bienfaits des
six étapes passées. Il prendra conscience de l’importance que chacune des
étapes a eu dans sa transformation. Il laissera s’installer les bienfaits dans la
durée. C’est lent, ça prend du temps. C’est l’ultime étape du déchargement.
Conseils du coach au coaché
• S’autoriser à éprouver des besoins corporels, les verbaliser, identifier les
résistances à ne pas se reposer et à repartir tout de suite dans l’action.
• Être responsable de ses comportements, de ses sentiments et de
l’assouvissement de ses besoins.
• Dire au coaché qu’il doit prendre le temps de se reposer et de se faire
plaisir.
• Lui demander de programmer des plages de « moi » dans les « mois » de
son agenda. Il a besoin de laisser plus d’espace dans son emploi du
temps, plus de calme et de repos.
• L’inciter à méditer, à prendre des cours de yoga ou de qi-gong.
• L’inviter à savourer des œuvres d’art (poésie, peinture, musique, etc.). L’art
est un espace de transmission spirituelle.
• Lui demander de venir avec deux œuvres qui l’inspirent : textes, gravures,
peintures, poèmes, etc.
• Lui témoigner de la confiance, tout en l’incitant à prendre son temps.
• Freiner la personne à rentrer dans l’étape 1 pour débuter un nouveau
projet.
• Marquer une pause avant de passer à autre chose, contempler ce qui a été
réalisé. Et laisser diffuser ! Bien menée, cette étape 7 de ressourcement
est payante à long terme.

« Ne pas se faire du bien, c’est une manière de se faire du mal. »

Apprendre à se faire du bien

Le coach demande au coaché de répondre aux questions suivantes1 :


1. Que fais-tu pour te faire du bien, pour te reposer, te détendre ?

2. Ces comportements sont-ils écologiques (autrement dit, te font-ils vraiment du bien) ?


Ou bien sont-ils en réalité nocifs (fumer, boire, grignoter, manger ?)

3. Comment pourrais-tu te faire davantage de bien de manière saine (sport, détente, loisir)
et moins de manière nocive (fumer, boire, café, sucreries…) ?
Il faut redonner sa place à ces moments qui permettent la rencontre avec
l’imprévu. Les personnes qui ont une existence trop réglée par les habitudes
ont moins de chance de croiser les pistes de l’imprévu et les opportunités
qu’elles présentent.
Retour à la case départ ? À moins que…
Pour qu’une chose se termine, il faut qu’une autre chose commence – et
les commencements, c’est difficile à voir. L’ancien projet a vraiment
disparu et les nouveaux ne sont pas encore manifestés. C’est entre les deux.
Ce n’est ni un avant ni un après, ni un retour ni un aller mais un moment
suspendu : un réveil. Un nouveau cycle recommence et nous repartons en
étape 1.
Le chiffre 7 symbolise principalement l’achèvement d’un cycle et donc
intrinsèquement le début d’un autre. Cette notion d’achèvement, de
perfection et d’harmonie reste à la base des grands cycles humains. Le
rythme de pulsation de la vie humaine est de 7 ans : 7 ans est l’âge de
raison, de l’intégration dans la collectivité et l’accès à la socialisation. La
gamme de musique occidentale est composée de 7 notes de musique, l’arc
en ciel de 7 couleurs, les chakras orientaux sont au nombre de 7, la semaine
compte 7 jours.
Mais quelquefois, la grande roue du changement patine dans son ornière.
Le coaché a fait le tour de la question plusieurs fois, gravi les échelons de la
hiérarchie, obéi à Papa-Maman, et fait plaisir à son conjoint. Mais là, ça
coince vraiment. Le doute s’installe et, malgré tous ses efforts, il n’arrive
plus à s’investir dans un nouveau projet. Un cycle matériel s’achève et
ouvre sur une autre révolution d’ordre spirituel. Rien de plus normal que le
7 soit aussi considéré comme le signe du temps cosmique, celui qui décide
de l’évolution fondamentale de l’Être. Il est venu le temps du 8, celui de
l’apocalypse et du retournement.
ÉTAPE 7
Les signes observables chez le coaché
• Une envie de se reposer.
• Une envie de tourner la page et de recommencer autre chose.
Besoins du coaché
• De se poser, de se reposer.
• D’assimiler toutes les étapes précédentes.
• De laisser le temps faire son œuvre de transformation silencieuse.
Réponses du coach
Protection
• Il met en garde le coaché contre une reprise trop rapide d’un nouveau
projet.
Permission
• De prendre son temps car ce temps de repos est un investissement, pas
une perte de temps.
• D’errer sans objectif.
• De se laisser interpeller et pénétrer pour de nouvelles rencontres.
8
LA REMISE EN QUESTION

8e étape : Quand le doute s’installe…

« Lorsqu’un chemin arrive à son terme,


change de direction,
puis continue droit devant toi. »
Lao Tseu

Quelquefois, sans trop savoir pourquoi, le doute s’installe en nous. On est poussé
de l’intérieur à remettre en question les certitudes qui autrefois nous
animaient. Ces phases de doute sont fréquentes dans les moments de
bascule de la vie : l’adolescence, l’arrivée d’un enfant, les changements
professionnels majeurs, l’âge de la retraite, la perte d’un être proche, ou tout
accident grave.
Ces doutes et ces questionnements sur le sens de la vie sont de nature
intrapsychique. Cependant ils peuvent se manifester extérieurement de
diverses manières. Voici l’exemple d’une telle transformation relatée par un
formateur en entreprise.

Un changement de look radical


Quand on me dit que l’homme assis au fond de la salle était l’ancien directeur financier d’un
grand groupe industriel, je n’en crus pas mes yeux. Ce jour-là, dans cette salle, parmi d’autres
participants venus se former aux relations humaines, ce quadragénaire portait une longue
chevelure bouclée, la barbiche de Buffalo Bill, et trois bracelets de perles turquoise ornaient
ses poignets. Vraiment pas le genre du financier rigoureux et austère. Mais dans le groupe que
j’animais, l’homme n’intervenait pas et avait tendance à répondre aux questions de manière
distante voire agressive. Apparemment il semblait mal dans sa peau…
Le lendemain, une simple recherche sur Internet me montra une image très différente de cet
homme. Il avait les cheveux courts, était impeccablement rasé, portait un costume-cravate
classique et son sourire parfaitement maîtrisé était conforme à la fonction.
J’en conclus qu’il vivait aujourd’hui une transformation intérieure qui se manifestait dans le
changement de sa tenue. Cette mutation physique était-elle le signe d’un changement profond
de valeurs et de priorités, ou simplement une tentative impulsive d’être enfin soi-même ?

Le doute

TROUBLES ET TOURMENTS

Dans ces moments de doute, on a la sensation étrange que personne ne peut


nous comprendre et que notre parole ne trouve pas écho. Nous nous sentons
décalés, isolés, accablés. On est au creux de la vague. On souffre
moralement car l’énergie consacrée à lutter contre les assauts du doute
entrave tout nouveau projet. Comme la vague, nous ondulons entre les
moments de répit et les moments de tristesse, entre les jours clairs et les
nuits sombres. Pendant des semaines, des mois, voire des années, certaines
personnes se battent contre l’inéluctable. Le son du bourdon, inlassablement
sonne une octave plus bas donnant cette mélopée étrange, invariable,
mélancolique et démoralisante.
Cette étape est douloureuse. Le poids est lourd à porter seul. Qui pourrait
nous comprendre et nous aider à sortir de l’obscurité ? On a tendance à se
dévaloriser soi-même et à dévaloriser les autres. C’est le moment où on
peut remettre facilement en question, d’un bloc, tout le système auquel on
appartenait (famille, équipe, entreprise). C’est le moment où on est tenté de
tout plaquer, boulot, femme et enfants !
• C’est décidé : je vends tout, je pars faire le tour du Monde, je
m’installe aux îles Marquises.
• C’est décidé : j’en ai marre de cette bonne femme (de ce mec), je me
barre !
Cette remise en cause des anciens pourquoi fatigue aussi le corps, nous le
sentons bien, c’est épuisant.

UN DÉCALAGE ET UNE PERTE DE REPÈRES

Avant d’avancer plus avant dans l’étape 8, revenons un instant à l’étape 2


du cycle d’Hudson. Dans cette deuxième étape, l’individu est surtout centré
sur le quoi et le comment faire. Mais à l’étape 8, c’est plutôt les questions
qui suis-je ? et pourquoi ? qui deviennent essentielles. Beaucoup de
questions existentielles affluent. « Quelle est ma place dans ce monde ?
Quel est mon rôle ici et maintenant ? » La personne prise dans ce tourbillon
du doute ressent très légitimement une colère et une révolte qui vient de son
incapacité temporaire à concilier les valeurs qui étaient les siennes et les
valeurs qu’elle voit ailleurs dans son environnement familial, social, en
entreprise, et qui l’attirent aujourd’hui.
À notre époque, de plus en plus de personnes ressentent une perte
d’humanité dans leurs liens sociaux et se questionnent sur ce que valent ces
relations : « Mais qui suis-je vraiment pour lui, pour eux ? ». Cela peut
paraître paradoxal alors que nous sommes sans cesse sollicités pour nous
rejoindre sur les réseaux sociaux. Mais ces réseaux ne sont pas des liens
humains. Ce sont juste des échanges sophistiqués d’informations. Et quand
on se rend compte qu’il est plus facile d’avoir cinq cents amis sur Facebook
que cinq vraies personnes en chair et en os que l’on voit avec ses yeux, que
l’on touche avec ses mains et à qui on peut tout confier, le réveil est
douloureux. « Qui suis-je pour eux ? Qu’est-ce qui est important dans ma
vie ? »
S’ensuit une perte de repères, de la démotivation et un sentiment de vide
qui peuvent conduire à la dépression ou au burn-out. Car les doutes et les
questionnements sur le sens de la vie sont presque toujours associés à des
symptômes psychiques ou physiques. Le changement d’un des facteurs qui
influencent la vitalité (état physique, croyances, événements réels) a
toujours un effet sur les autres facteurs :
• Le chômage affecte souvent la santé physique ainsi que les croyances
sur soi, sur les autres et sur le monde.
• L’adolescence transforme le corps ainsi que les croyances sur les
adultes, les autres, la vie.
Dans ces moments de doute, derrière le rempart de ses habitudes, de ses
croyances et de ses valeurs, la personne devine un monde différent, plus
vaste, attirant et redouté en même temps. Mais avant de sortir de sa
forteresse intérieure et de faire l’expérience de la liberté, elle devra
traverser un certain nombre d’épreuves, réaliser un certain nombre
d’exploits courageux, et accepter de renaître à elle-même. Est-elle prête
pour ce parcours héroïque ?

LE TRAVAIL DU HÉROS

Pour tout héros, la première étape consiste à entrer dans les ténèbres de soi.
C’est le début de la traversée du désert décrite de multiples manières par
toutes les traditions initiatiques. Tout est à faire, on perd espoir, la lumière
s’obscurcit. C’est une situation où le désordre s’accroît et atteint son
maximum. On n’est pas responsable de ce qui nous arrive, mais il faut
apprendre à se protéger des dangers de cette période sombre. Il est alors
conseillé d’agir avec prudence sans forcer les choses.
Le psychanalyste Donald Winnicott parle des « agonies primitives » qui
sont des sensations terrifiantes que le petit bébé ou l’enfant ressent lorsqu’il
est en insécurité ou violenté. Lorsque quelqu’un a vécu un traumatisme, la
seule trace psychique qui reste est la peur de le revivre. Cette peur de
l’effondrement, comme l’appelle Winnicott, est redouté à tel point que nous
faisons tout pour l’éviter, y compris ce qui nous ferait le plus grand bien
aujourd’hui. Le travail de résilience consiste justement à traverser cette
frayeur en conscience et d’en sortir héroïquement. Le héros est celui qui
revient de son voyage avec la force d’avoir traversé sa peur.

Se faire aider, ne pas rester seul


Si les symptômes physiques sont présents et trop gênants dans la vie du
coaché, le coach lui conseillera d’aller voir un médecin ou de prendre
rendez-vous pour se faire masser avec grande douceur. En tout état de
cause, le coaché a besoin d’un autre pour prendre soin temporairement de
son corps. Si le coaché travaille en entreprise, le coach lui suggérera d’aller
voir la direction des ressources humaines pour envisager une adaptation de
son emploi en fonction de la situation. Le coach lui parlera également du
cycle du changement d’Hudson en 10 étapes. Il lui dira qu’il traverse une
phase normale et que tous les héros sont passés par ces épreuves. Le coach
l’informe que ce mal dont il souffre a sa place pour l’instant, même si son
sens échappe à toute logique et qu’il ne fait qu’apporter troubles et
inconforts. On l’encouragerait presque à apprivoiser ce mal en allant à sa
rencontre, car il est essentiel d’accepter cet état pour pouvoir le dépasser.
Plus nous voulons lutter contre lui, plus il s’installe. Apprendre à attendre,
c’est se confronter à une situation sur laquelle il y a peu de prises. Les
découvertes récentes en neurosciences montrent d’ailleurs que la méditation
est un excellent moyen pour notre cerveau d’opérer cette réorganisation et
d’en accélérer le rythme.

Freiner toute idée d’action


Ce n’est pas à ce stade-là qu’il faut compter sur le coaché pour intégrer une
nouvelle équipe ou un nouveau projet professionnel ou personnel. Une
protection essentielle que le coach doit garder en mémoire et annoncer à
son client est : « Ne te lance surtout pas dans un projet important et
engageant en ce moment. Ne prend aucune décision définitive, du genre : je
demande le divorce ! » Ou encore « Ne claque pas la porte en
démissionnant. Ce n’est pas le moment car une grande partie de ton
énergie est mobilisée en ton for intérieur pour réorganiser ta vision
du monde. »
Dans un beau texte, Michel Tournier1 parle du moment où Robinson, seul
sur son île déserte perdue au milieu de l’océan, doute de la pertinence de
son projet d’administrer son îlot comme il l’aurait fait d’une cité peuplée de
nombreux habitants.

« Certes ce n’était pas la première fois que l’achèvement d’une entreprise de longue haleine
le laissait vidé et épuisé, proie facile du doute et du désespoir. Mais il était certain que l’île
administrée lui apparaissait de plus en plus souvent comme une entreprise vaine et folle.
C’était alors que naissait en lui un homme nouveau, tout étranger à l’administrateur. Ces
deux hommes ne coexistaient pas encore en lui, ils se succédaient et s’excluaient, et le pire
danger eût été que le premier – l’administrateur – disparût pour toujours avant que l’homme
nouveau fût viable. »

S’exiler un temps et prendre un recul bénéfique


À ce stade la vie au ralenti est indispensable. Aussi le coach suggère-t-il au
coaché de n’entreprendre que des activités simples, saines et peu
engageantes : renouer avec une passion, un hobby, (dessin, peinture,
marche, voyage…). C’est aussi accepter de se retirer des affaires, cesser de
briller socialement pendant quelque temps pour laisser le travail de l’obscur
se faire sans chambouler toute la vie. La reprise des activités se fera plus
tard, progressivement. Car en entrant dans l’ombre, nous acceptons aussi de
rencontrer ce que l’on considérait jusqu’alors comme notre part obscure et
terrifiante.

La posture du coach
Le coach doit manifester une attitude profondément bienveillante et
accueillante. Il est conscient qu’il va à la rencontre des parties profondes du
coaché, même les plus étranges, même les moins propres. Il se prépare à
accueillir ce qui arrivera. Il manifeste toute son empathie et ses
encouragements. « C’est important que tu sois là, tel que tu es. Je
t’accueille comme tu es, avec tes joies et tes fardeaux. Fais ce que tu peux,
et si tu ne peux rien faire, réjouis toi simplement d’être avec nous. » Le
coach incite le coaché à se laisser modeler par le doux, à être façonné par la
situation. Les qualités de patience, souplesse et endurance rendent fertiles
ces moments. Ce faisant, le coaché peut commencer à prendre du recul sur
ce qui le traverse.
Explorer activement et doucement les autres mondes
Maintenant que le coaché a pris du recul, qu’il s’est éloigné de son
environnement habituel et rapproché de lui-même, il est temps qu’il amorce
le mouvement inverse : aller vers le monde. Le coach l’incite à sortir pour
explorer l’extérieur avec un regard neuf, observer ce qu’il voit et ce qu’il
ressent dans cette nouvelle expérience. S’exiler un temps est un excellent
moyen pour retrouver son regard d’enfant.

S’entraîner au décalage
Le coach proposera de choisir une ou plusieurs activités décalées par rapport au quotidien
du coaché pour lui apporter des temps de respiration et vivre de nouvelles expériences
enrichissantes :
• Qu’y a t il à voir, à écouter, à sentir ou à découvrir de nouveau ?
• Y a t il des personnes qui ont vécu les mêmes choses que moi et qui en font autre chose
que ce que j’en fais, moi ?
• Que puis-je apprendre de nouveau ?
Le coaché va rencontrer de nouvelles personnes, découvrir de nouvelles activités et
d’autres façons de voir le monde.
• Quels regards les autres ont-ils sur la vie ?
• Quelles sont leurs expériences ?

Le coaché va-t-il confirmer ses croyances ou développer un regard


différent et réorganiser sa vision du monde ?
Plus le coach donne au coaché les moyens de voir la réalité en face, plus
il l’aide à sortir de l’étape 8. C’est ainsi qu’il augmente ses chances de
réorganiser son ancien système de valeurs.

Revenir et témoigner
À ce stade, le coaché a encore du mal à changer. C’est pourquoi le coach
utilisera un style directif avec le coaché : il lui précisera ses missions, les
formalisera, l’informera des obligations qu’il devra respecter : « Tu pars, tu
observes, tu reviens, tu me fais un rapport d’étonnement de ce que tu as
appris chez les étrangers et tu restitues à ton retour. S’il y a des choses qui
t’ont surpris, tu nous dis pourquoi. S’il y des choses avec lesquelles tu es
d’accord ou pas, tu nous dis aussi pourquoi ! » Plus le coach aide le coaché
à faire fonctionner conjointement ses pensées, ses émotions et ses certitudes
non vérifiées, plus il l’aide à élargir son champ de conscience.

EFFRITEMENT ET RÉSISTANCES DES ANCIENS


SCHÉMAS

Les certitudes du héros vacillent mais résistent encore


En découvrant des mondes nouveaux, le héros explore les multiples façons
de sortir de l’obstruction dans laquelle il s’était enfermé, et dépasse ce qui
fait obstacle à sa liberté. Il prend conscience peu à peu de ce qui
l’empêchait de progresser. Bien que cet obstacle soit réel, il est souvent
surévalué par le coaché. Toujours est-il que l’étape 8 réveille puissamment
les défenses psychiques qui gardaient le donjon des certitudes et des
croyances d’antan. Or sous les coups de boutoir de la réalité observée par le
coaché, les défenses vacillent et laissent apparaître des prises de conscience
nouvelles.
Mais les croyances limitantes résistent vaillamment et entrent en action
de façon massive pour empêcher toute vision différente d’apparaître. Le
monde a changé depuis la construction de la forteresse. Le coaché est en
train de s’en rendre compte. Il voit une réalité qu’il ne percevait pas avant et
qui vient contredire ses anciennes croyances. Il perd sa naïveté d’enfant, et
comprend que ce que ses parents lui ont enseigné et transmis est
partiellement obsolète.

L’inconfort émotionnel chez le coach et la coaché


Le principal frein dans l’étape 8 est le refus de vivre l’inconfort émotionnel.
Ceci est vrai pour le coaché comme pour le coach.
Auraient-ils peur que leur image soit associée à de la faiblesse ? Un
coach qui est rarement atteint de doute peut considérer le doute du coaché
comme un défaut ou une insuffisance. Le risque est alors que le coach
pousse son client à réinvestir trop tôt dans un projet. « Tu ne vas pas te
laisser aller ! Remue-toi, tu vas voir, ça va passer ! ».
L’idée même de dépression est insupportable à certains. Elle vient de la
peur de s’installer dans un état dépressif sans pouvoir ensuite en sortir. Mais
il y a souvent confusion entre la dépression (maladie) et un état dépressif
(passage normal suite à un événement marquant dans notre vie).
Le coach mal formé ou mal informé peut confondre l’étape 8 avec une
phase de deuil qui se prolonge. Mais la différence avec l’étape 5 est que
l’étape 8 est une phase de dépression des valeurs. Le coach a-t-il
suffisamment mesuré l’importance de ce phénomène de remise en cause ?
Lui a-t-il porté toute la considération et l’attention qu’elle mérite ?

L’ego blessé, frein au développement


Dans la phase d’exil momentané, le frein au développement serait que le
coaché revienne à ses anciennes habitudes ou centres d’intérêt et fasse plus
de la même chose. Par exemple, il va voir ailleurs tout en cherchant à
retrouver le même environnement, les mêmes personnes ou les mêmes
idées. Cherche-t-il inconsciemment à prouver que sa vision était la bonne et
qu’il continue à avoir raison ? Ou bien évite-t-il toute confrontation avec
l’altérité ? Si l’exil est trop difficile à supporter, il pourra se renfermer sur
lui-même ou procrastiner. Il pourra également avoir recours à des substituts
comme l’alcool, certains médicaments, drogues, ou toute autre forme
d’addiction.
Un autre écueil peut survenir quand le coach demande au coaché
d’analyser et de tirer de nouvelles conclusions sur soi, sur les autres et sur le
monde. Ce dernier peut refuser de penser et revenir à des conclusions toutes
faites, issues de son ancien schéma de fonctionnement.
Toutes ces attitudes de résistance parlent de l’ego. L’ego blessé est
un frein redoutable à notre développement. Que ce soit l’orgueil ou un
manque de confiance en soi, ce sont toujours les deux faces de la même
chose : un ego blessé. En effet, les croyances et les valeurs que l’on défend
sont toujours liées à notre identité dont l’ego fait partie. Or les étapes 8, 9,
10 sont les étapes de changement de l’identité, qu’elle soit professionnelle
ou personnelle. C’est pour cela qu’elles sont si difficiles à traverser. La
résilience de l’identité est beaucoup plus douloureuse à vivre que la
résilience des comportements.
ÉTAPE 8
Les signes observables chez le coaché
Comportements
• Alternance de moment d’euphorie et de dépression : comportement
cyclothymique.
• Le coaché se met en retrait ou fait des tâches inutiles, machinales, sans en
donner de sens.
Sentiments
• Alternance de joie et de tristesse.
• Le coaché se sent décalé, dévalorisé, isolé. C’est douloureux d’être seul et
incompris
• Il ressent un malaise car il y a un décalage entre son système de valeurs et
le système de valeur de l’entourage.
Pensées
• Alternance de pensées claires et confuses.
• Le coaché a l’impression que le monde va plus vite, qu’il y a décalage
entre lui et le monde.
Besoins du coaché
• Être reconnu dans ses doutes.
• Savoir qu’il est quand même quelqu’un d’estimable même s’il ne fait pas
grand-chose.
Réponses du coach
Protection
• Choisir un style directif pour protéger le coaché qui a du mal à changer
• Donner du temps au coaché pour que ses nouvelles valeurs mûrissent.
• Lui conseiller de se faire aider par d’autres personnes si nécessaire
(médecin, psychologue, conseillé spirituel, etc.).
Permission
• Parler du cycle d’Hudson pour que le coaché se repère dans les étapes du
changement.
• L’encourager à verbaliser ses valeurs et à parler de ses vraies priorités.
• L’encourager à aller voir ailleurs une autre réalité et revenir pour témoigner.
• Sortir et penser pour rester en lien avec la réalité. Plus on fait fonctionner
l’intellect, plus la conscience s’affine et décontamine les croyances non
aidantes et les anciennes certitudes.
9
DISCERNEMENT ET MÉTAMORPHOSE

9e étape : Maturation et découverte de nouvelles valeurs

« Ce n’est plus d’être heureux que je souhaite aujourd’hui,


mais seulement d’être conscient. »
Albert Camus

Quand les turbulences et les tourments de l’étape 8 commencent à se calmer,


l’étape suivante peut débuter. Le coaché sent qu’il a besoin de remettre ses
priorités et ses valeurs dans le bon ordre. Il va alors réunir les fragments
dispersés de sa personnalité pour réorganiser sa vie afin que ses actions et
ses valeurs soient en harmonie. L’étape 9 est celle du discernement et de la
métamorphose.

UNE DIFFICILE MÉTAMORPHOSE

Une problématique de réunification de la personne


La difficulté dans cette étape est le passage d’un état à un autre. Des
possibilités s’ouvrent, mais il faut canaliser l’énergie. La personne aidée a
besoin que quelqu’un lui fasse sentir qu’elle peut vivre selon ses désirs tout
en tenant compte de la réalité et des désirs des autres. Cette problématique
de réunification de la personne est une lente transformation, mais qui ne
s’appuie pas sur rien. La personne a déjà une histoire, elle a déjà vécu et
traversé un grand nombre d’aléas dans sa vie. L’étape 9 marque la fin d’une
situation qui arrive à son terme et qui demande de passer à un niveau
supérieur, plus subtil. Le changement en 9 se fait dans les profondeurs de
l’être, en partie hors de la conscience directe de la personne. C’est pour cela
qu’un tiers compétent est indispensable au coaché pour l’aider à traverser
l’ombre de lui-même. Dans ce travail délicat, le coach se place dans la
limite fine entre coaching et thérapie.

Discernement et métamorphose

Les rituels de passage ont disparu et nous manquent


De tout temps, les cultures humaines ont inventé des rites de passage pour
permettre aux individus de vivre ces moments de petite et de grande mort
comme des instants importants et significatifs de la vie. Dans ces rites, la
personne va laisser derrière elle un certain style de comportement, une
certaine façon d’être perçue ou une manière de se présenter socialement à
travers une étiquette ou un statut. Dans ces moments de transition, elle sent
comme une augmentation de pression interne qui ne dépend pas d’elle, mais
qu’elle subit. Durant ces rites de passage, le réaménagement profond qui
s’opère chez le coaché nécessite que l’accompagnateur soit lui-même une
personne capable d’une grande intelligence de cœur, d’une belle humanité
et d’un savoir-faire certain.
Selon l’ethnologue Arnold van Gennep, ces changements intérieurs
passent par trois étapes successives. La première est la séparation de
l’individu de son groupe d’appartenance. La deuxième, que van Gennep
appelle liminarité ou liminalité, est une période du rituel pendant laquelle
l’individu n’a plus son ancien statut mais pas encore son nouveau. Cette
liminarité est le moment crucial du rituel. C’est une étape transitionnelle
caractérisée par son indétermination. La personne se sent profondément
seule et comme dépossédée de tout ce qui la constituait. Elle erre, seule, à la
lisière d’elle-même, d’où le terme de lisièrement employé par van Gennep.
Après cette expérience d’anéantissement de sa personne – véritable
expérience initiatique – l’individu se sent libéré et développe une nouvelle
attitude face à la vie. Vient alors la troisième étape : la réincorporation. La
personne retourne parmi les siens avec un nouveau statut. Elle est accueillie
comme un Être nouveau. Elle est prête alors à faire jaillir dehors ce qui était
dedans.
Charles Rojzman est sociologue. Il a beaucoup vécu et étudié les
banlieues et autres lieux où les gens n’arrivent pas ou ont du mal à travailler
et vivre ensemble. Il retire de son expérience une réflexion sur l’errance
qu’il nous livre ici1.

« Dans une époque troublée par le scepticisme et l’inquiétude, la recherche du sens est
primordiale.
De quel apprentissage avons-nous besoin pour rassurer l’âme inquiète ? Dans mon travail,
je l’ai appelé « l’apprentissage de l’errance ». Qu’est-ce que cela veut dire ?
Ce mot, « errance » est généralement connoté négativement. « Errer » signifie être perdu,
sans repères ni but. Est-ce vraiment de cela dont nous avons besoin ? Notre époque, si lourde
d’incertitudes et de dangers, a-t-elle vraiment besoin de cette errance ? Paradoxalement, je
dirais que c’est précisément parce que beaucoup de repères ont disparu que nous devons
aujourd’hui apprendre à vivre avec l’incertitude. L’apprentissage de l’errance débouche sur
des repères. Il me vient à l’esprit une histoire que des habitants des bords de la Loire m’ont
raconté sur ces fameux remous du fleuve qui provoquent la noyade du baigneur imprudent. Il
arrive en effet que parfois un tourbillon emmène le nageur et l’emporte à jamais. Mais ce
qu’ils disent est surprenant : ils disent qu’il ne faut pas résister au courant et essayer
désespérément d’y réchapper au risque d’épuiser toutes ses forces et de couler. Au contraire,
il faut accepter d’être emporté tout au fond et inévitablement, on finit par remonter et revenir
à un endroit plus paisible du fleuve sans autre dommage.
Dans une époque troublée par le scepticisme et l’inquiétude, la recherche du sens est
primordiale. Accepter de ne pas savoir, de chercher avec les autres sans être sûr du résultat
de la recherche, nous donnera la chance de découvrir des vérités primordiales. Le sens est là,
nous n’avons pas toujours besoin de clercs doctrinaires pour nous le donner. Ensemble, en
acceptant de naviguer en suivant notre conscience, notre intuition et notre intelligence
commune, nous pourrons trouver des réponses adaptées et justes. Dans une époque
d’incertitudes et de dangers, la tentation est grande de se raccrocher à des sens anciens, mais
peut-être probablement, ce retour en arrière nous ramène à des époques où régnaient le
fanatisme et l’intolérance. Peut-être l’incertitude d’aujourd’hui, est une chance si nous
savons l’accepter et entrer dans un processus de découverte. Visiblement, notre destin
d’aujourd’hui, c’est d’être perdus. Or l’acceptation de cette « perdition » est peut-être la clé
de notre sauvegarde. »

Entrevoir et imaginer l’impact que notre nouvelle vision du monde peut


avoir sur notre vie, peut nous effrayer et nous amener à renoncer à aller
dans cette voie. Le risque est alors de refaire « plus de la même chose »
mais sans changement profond véritable. C’est pourquoi le coach doit être
très attentif à accompagner le coaché durant la phase de liminarité, et
particulièrement bienveillant et vigilant dans la phase de reconstruction. En
effet, si l’aidé place la barre du changement trop haut, il peut entraîner le
binôme aidant-aidé vers des peurs bloquantes ou vers des désillusions qui
ne manqueront pas d’arriver tôt ou tard.

L’ESPRIT DE LA MÉTHODE

Se pencher avec bienveillance sur ce qui devient


Le coach doit accepter d’en faire le moins possible car la situation est
modeste et limitée. Elle ne demande qu’à s’épanouir mais, pour l’instant, il
faut freiner l’aidé avec douceur et bienveillance. « C’est OK que tu prennes
le temps nécessaire pour chercher et trouver qui tu es. ». Dans les
entreprises par exemple, l’individu doit continuer à être intégré tout en lui
donnant du temps pour qu’il mâture ses nouvelles valeurs. Dans cette
période perturbée, le coaché a besoin de pouvoir parler de ce qui se passe en
lui et de ce qu’il vit. Sans trop en avoir conscience, il craint les
conséquences que son changement intérieur pourrait provoquer. Il a besoin
d’être rassuré. Comment sera-t-il accepté quand il aura changé de statut ?
Quel nouvel équilibre retrouvera-t-il quand la famille, les revenus, les
déplacements ou le regard des autres auront changé ? Cette phase du cycle
suit un processus de développement graduel, non linéaire vers un objectif
mal défini. Elle demande de la part du coach de la patience et de la
constance.
Mettre de l’ordre dans ses priorités
À l’étape 9 le coach explore ce qui est changé chez le coaché, pas ce qu’il y
a à changer (étape 1 et étape 2). À travers une série d’exercices
d’introspection et de questionnement, il aide la personne à verbaliser ses
valeurs – parler de ses vraies priorités – et à modifier son système de
croyances. Le coach aide le coaché à trouver une vision de sa vie inspirée
par ses valeurs. Et quand l’aidé découvre soudain qu’il n’est pas nécessaire
de remettre en cause tout son système de croyances mais seulement un ou
deux éléments, le soulagement est palpable. Mais au fait qu’est-ce qu’une
valeur ?
Une valeur est une opinion ancrée sur ce que nous considérons comme
estimable. Les valeurs proviennent de différentes sources : les parents,
l’école, les amis, la religion, ceux que nous admirons, la culture, etc.
Nombre d’entre elles remontent à l’enfance. Les valeurs ont plusieurs
fonctions. Elles nous aident à donner une finalité à nos actes et à répondre à
la question « Pour quoi faisons-nous cela ? ». Les valeurs nous permettent
de juger ce qui est beau, bien, vrai ou juste. De ce fait, nous les classons par
ordre d’importance et nous mettons l’énergie nécessaire pour défendre ce
que nous estimons important dans la vie. Et c’est ainsi que nous établissons
une hiérarchie, une échelle des valeurs qui constitue pour chacun d’entre
nous un standard issu de nos certitudes et de nos croyances. C’est cette
échelle qui guide nos actions au quotidien et qui régule nos relations. Les
valeurs sont fondamentales pour se sentir être. Elles sont le creuset de notre
identité.

LA MÉTHODE ET LA MANIÈRE

Pour travailler l’échelle des valeurs, le coach peut utiliser deux méthodes
différentes : « les douze priorités dans ma vie », ou « la chek-list des valeurs
personnelles ».
Les douze priorités dans ma vie
Le coach demande au coaché de noter sur une feuille douze idées qui correspondent à ce
qu’il veut accomplir durant sa vie (par exemple : être propriétaire de son logement, faire le
tour du monde, devenir expert, etc.) et/ou ce qu’il veut que soit son mode de vie (vivre en
province, dans une grande ville, à l’étranger, privilégier les contacts avec les amis, etc.), ou
les grands engagements qu’il veut soutenir. Si le coaché a des difficultés à remplir la liste,
il peut partir de ce qu’il ne veut plus, ne supporte plus, et écrire l’opposé en termes positifs.
Le coaché recommencera cet exercice chaque jour pendant sept à dix jours sur une feuille
séparée et sans jamais relire ce qu’il a écrit les jours précédents. Une fois terminé, il
reprend ces sept à dix listes et note tous les éléments qui ont été cités chaque fois ou le plus
fréquemment. Il les hiérarchise pour en tirer trois ou quatre points saillants. Ces priorités
constituent son échelle de valeurs actuelles.

Liste de quelques valeurs les plus communes

Accomplissement
Affection (amour et attention)
Aider la société
Aider les autres
Amitiés
Amour
Argent
Arts
Avancement, promotion
Aventure
Avoir une famille
Beauté
Bonheur
Célébrité
Changement et diversité
Collectivité
Combativité
Compassion
Compétence
Concurrence
Confiance
Connaissance
Conscience écologique
Contribution
Coopération
Courage
Créativité
Croissance
Décision
Défi physique
Démocratie
Développement personnel (utiliser la totalité de mon potentiel)
Diriger les autres
Écologie
Efficacité
Égalité
Engagement Estime de soi
Excellence
Expertise
Fidélité
Foi
Fortune
Fraternité
Gain financier
Générosité
Gloire
Harmonie intérieure
Honnêteté
Humilité
Indépendance
Influence sur les autres
Intégrité
Intérêt général
Intimité
Justice
Leadership
Liberté
Loyauté
Mérite
Nature
Ordre (tranquillité, stabilité, conformité)
Ouverture et honnêteté (pour son entourage)
Paix
Pays, Patriotisme
Plaisir
Position sur le marché
Pouvoir et autorité
Pratique et éthique morale
Problème et défis
Pureté
Qualité de ce à quoi je participe
Qualité des relations
Reconnaissance (respect des autres, statut)
Relations proches
Religion
Réputation
Respect
Responsabilité
Rythme de travail rapide
Sagesse
Santé
Sécurité
Sécurité de l’emploi
Sécurité économique
Sérénité
Service public
Simplicité
Situation géographique
Sophistication
Stabilité
Statut social
Statut intellectuel
Stimulation
Temps libre
Tolérance
Travail
Travailler avec les autres
Travailler seul
Travailler sous pression
Vérité
Victoire

La deuxième méthode consiste à établir la liste de ses valeurs.

Ma check-list des valeurs personnelles2


Étape 1 : « À quoi j’accorde le plus de prix… »
À partir de la liste de valeurs ci-dessus (à la fois personnelles et professionnelles), le coaché
choisit les dix valeurs qui lui paraissent les plus importantes – en tant qu’idées directrices
pour son comportement ou en tant qu’élément d’un mode de vie souhaité. Qu’il n’hésite pas à
rajouter ses propres valeurs à cette liste.
Étape 2 : l’élimination
Maintenant qu’il a choisi dix valeurs, le coaché imagine qu’il soit autorisé à n’en avoir que
cinq. Quelles sont ces cinq valeurs qu’il abandonnerait ? Il les raye.
Il imagine maintenant qu’il n’en a droit qu’à quatre. Laquelle abandonne-t-il ? Il la raye.
Le coach lui demande d’en rayer une autre pour ramener sa liste à trois valeurs.
Puis une autre pour que sa liste ne compte plus que deux valeurs.
Il raye enfin l’une des deux valeurs. Quelle est la valeur sur cette liste à laquelle le coaché
tient le plus ?
Étape 3 : la définition
Le coaché étudie à présent les trois valeurs les plus importantes de sa liste.
Que signifient-elles exactement ? Qu’attend-il de lui-même, notamment en période difficile ?
En quoi sa vie serait-elle différente si ces valeurs y étaient dominantes et mises en pratique ?
À quoi ressemblerait une organisation qui encouragerait les salariés à vivre selon ces
valeurs ?
La vision personnelle que le coaché a de sa vie et de son avenir reflète-t-elle ces valeurs ? Si
non, sa vision personnelle devrait-elle être développée pour les inclure ? Ou bien, est-il
disposé à réexaminer ses valeurs ?
Est-il disposé à opter pour une vie et une organisation dans lesquelles ces valeurs sont
primordiales ?
Étape 4 : le ressenti
Le coach demande alors au coaché : « Qu’as-tu ressenti lorsque je t’ai demandé
d’abandonner une valeur clé ? ». Puis : « As-tu déjà éprouvé ce sentiment auparavant, chez
toi ou au travail ? ». Et enfin : « Si cette situation se reproduit, comment souhaiterais-tu la
gérer à l’avenir ? ».

LE MOMENT DE LA REDÉCISION
Quand l’énergie fondamentale, dynamique et soudaine émerge en un élan
créatif, les résultats sont souvent spectaculaires. On observe alors un
changement radical. La personne a une vision du monde profondément
transformée qui donne un sens nouveau à sa vie.

Une autre vie après un burn-out


Suite à un burn-out, un homme a entamé un coaching qui l’a amené à revoir l’ordre de ses
priorités et de ses valeurs. Il a décidé que dorénavant la priorité de sa vie était de consacrer
plus de temps aux personnes qu’il aimait et qui l’aimaient. Cet homme s’est alors davantage
occupé de sa dernière fille de vingt ans, de ses deux petits-enfants et de son vieux père. À
cinquante-sept ans, il a pu enfin pacifier sa relation avec son ex-femme, la mère de ses
enfants. Cet homme nous disait : « Certes je peux regretter certains comportements passés
que j’ai eu avec des gens de ma famille. Mais si je n’avais pas été obligé de m’arrêter à cause
du surmenage, je n’aurais peut-être jamais connu la saveur de cette vie nouvelle. J’aurais
continué à être un cadre performant dans une entreprise rentable, mais j’aurais été coupé
d’une partie des réalités de la vie comme l’affection gratuite de mes proches, le libre partage
de mes émotions et la rencontre avec l’intime de l’intime. En quelque sorte je remercie la vie
d’avoir mis ce burn-out sur mon chemin. Aujourd’hui je me sens libre, libre de choisir où
investir mon temps dans ma Vie. »

Et c’est ainsi que ce cadre dirigeant a demandé à travailler à temps


partiel, ce que son employeur a accepté.

UN CARREFOUR À TROIS VOIES

À la fin de l’étape 9, le coaché a le choix entre trois possibilités :


• soit changer son regard sur une situation qui, elle, n’a pas changé,
• soit changer de rôle dans une situation inchangée,
• soit quitter son environnement habituel et partir ailleurs.

La situation n’a pas changé, c’est le regard qui change


Être ou faire ?
Raphaël venait d’avoir quarante ans. Brillant ingénieur, il se posait depuis plusieurs années
des questions sur le sens de la vie. Il avait participé à des retraites spirituelles dans des
monastères en France, parcouru les ashrams en Inde. Ces expériences l’avaient marqué.
Aujourd’hui une chose était certaine : il voulait surtout être et ne plus faire comme avant. Il
avait hésité : divorcer ? Partir sur les routes ? Entrer dans les ordres ? Il avait étudié et testé
toutes les possibilités. Mais peine perdue, il était bel et bien incarné et ne voulait pas se retirer
du monde. C’est auprès d’un coach qu’il découvre peu à peu qu’il peut faire et être en même
temps, que ce n’est pas incompatible, bien au contraire ! Raphaël se convertit alors, ou plutôt
convertit son regard et prend conscience qu’il est possible d’allier les contraires et de réunir le
faire et l’être en Un.

Le plus surprenant dans l’étape 9, c’est que souvent une seule valeur,
deux tout au plus ont changé de place dans l’échelle des valeurs du coaché.
Comme quoi de petits mouvements peuvent provoquer de grands
changements.
Nous pouvons abandonner nos conclusions archaïques et construire de
nouvelles convictions à partir d’une échelle de valeur revisitée. Nous
pouvons repartir de l’avant en harmonie avec notre environnement, en paix
avec nous, plein d’une énergie renouvelée. De nouveaux projets sont
possibles et nous sommes prêts à nous y engager.

Nous restons dans le même environnement mais nous changeons


de rôle
Quand approche la retraite
Annick a soixante-deux ans. Elle suit une formation au cycle du changement d’Hudson et
comprend soudain qu’elle est à l’étape 8. Quel soulagement de pouvoir nommer ce qui la
torturait de l’intérieur depuis des mois ! Elle décide alors de consacrer le reste de son temps
en entreprise à transmettre aux juniors tout son carnet d’adresses, de favoriser les rencontres
entre ses contacts professionnels et les plus jeunes. Cela fait trente ans qu’elle évolue dans la
profession, et elle connaît tout le monde. Annick se rend compte que sa vie prend un tout
autre sens, et que retraite ne signifie pas fin. Annick est fière de transmettre et partager
l’héritage.

Dans l’étape 9, il ne s’agit pas forcément de faire davantage, mais


de faire autrement.

Après un accident
Aurélie a subi un grave accident de moto. Quinze jours de coma, six mois d’hôpital et une
paralysie à vie de l’avant-bras. C’est pendant sa convalescence qu’elle a décidé de changer de
prénom. Elle se fait dorénavant appeler Claire.

Les changements d’identité, telle une métamorphose, émergent souvent à


l’étape 9.

Nous quittons notre environnement habituel


Alignement perdu
Jean-Michel a fait toute sa carrière dans les compagnies d’assurances. Il a connu et contribué
humainement à ce que les achats, les fusions, les rachats et les acquisitions se déroulent dans
un climat le plus humain possible. Il est reconnu par ses pairs comme un grand directeur des
ressources humaines. Mais aujourd’hui il rencontre une problématique d’alignement. Il n’a
plus les moyens matériels pour remplir sa mission. Il a annoncé son « divorce » de cette
prestigieuse entreprise. Son directeur n’a rien vu venir, n’a pas compris l’annonce de Jean-
Michel. Mais le mois prochain, il quittera l’entreprise pour créer son propre cabinet
de conseils.

Quand les valeurs sont suffisamment réorganisées, nous arrêtons de nous


remettre en question. Nous tenons ferme sur ces valeurs et nous ne nous
fourvoyons plus en hésitation et compromis. Nous confirmons notre
désaccord et décidons de partir car nous ne sommes plus en harmonie avec
notre entourage.
La démission du Ministre
Le 28 septembre 2018 à 8 h 30, Nicolas Hulot alors ministre d’État de la Transition
écologique et de la Solidarité du gouvernement français, annonce en direct à la radio sa
décision de quitter le gouvernement.
Il n’en a parlé à personne. Ni au chef de l’État, ni au Premier ministre, ni à ses plus proches
collaborateurs, ni même à sa femme. Il justifie son choix par les mots suivants : « Je vais
prendre pour la première fois la décision la plus difficile de ma vie : je ne veux plus me
mentir. »

Ces choix amèneront le coaché à jouer d’autres rôles, bien qu’ils


s’appuient souvent sur des motifs différents de ceux imaginés à l’étape 8.
Mais la vie ne réserve-t-elle pas quelques surprises ?

QUELQUES MOUVEMENTS DE BALANCIER


ET AUTRES FREINS POTENTIELS

Dans les étapes 9 et 8, l’individu fait souvent des allers-retours, hésite,


repart, s’arrête et revient. Le coach doit le savoir et ne pas se laisser
perturber par ces mouvements de balancier. Il doit s’interdire de demander à
son client de se stabiliser et d’arrêter de faire la girouette. Quand quelqu’un
vit des hésitations et des doutes profonds, ces mouvements alternatifs sont
sains et normaux. Ce sont d’excellents indicateurs psychologiques de
progression. À chaque fois qu’un individu rencontre une défense
psychologique, il bute, s’arrête, revient en arrière. Car l’équilibre d’un
système de valeurs ne se laisse pas ébranler aussi facilement. Il résiste pour
conserver un état stable, connu et rassurant. Le temps consacré au travail de
coaching permet de lever peu à peu les résistances. Ce n’est pas un travail à
allure constante. On fait quelques pas en avant, quelques pas en arrière. On
va et on vient, on avance et on recule un peu, un tout petit peu. Puis de
moins en moins.
Attention toutefois à ce que le coach ne projette pas sur son client sa
propre échelle de valeurs. Pour quelles raisons obscures croit-il que les
nouvelles valeurs du coaché ne seraient pas adaptées à sa vie actuelle ou
future ? Si le coach est en droit d’inviter le coaché à explorer d’autres
valeurs, il est surtout en devoir de se faire coacher lui-même pour éviter de
projeter sur l’autre sa propre échelle de valeurs et ses propres croyances.
ÉTAPE 9
Signes observables chez le coaché
• Mouvement de balancier entre les étapes 8 → 9, 9 → 8, ou 9 → 10, 10 →
9.
• Des doutes émergent sur la nouvelle échelle de valeurs.
Besoins du coaché
• De réunifier sa personne.
• De créer son propre système de soutien et d’aide.
• De changer son système de croyance et son échelle de valeurs.
Réponses du coach
Protection
• Il est protecteur de donner du style directif au coaché pour le rassurer.
• Le coach ne doit pas jouer les apprentis sorciers et s’improviser
psychothérapeute. À l’étape 9 le coach est à la limite fine entre coaching
et thérapie.
• L’individu doit continuer à être intégré dans son groupe (entreprise,
organisation, etc.), mais il faut lui donner du temps pour qu’il mûrisse ses
nouvelles valeurs.
• Le coach indique que remettre en cause une valeur n’est pas remettre en
cause tout le système de valeurs.
Permission
• Confiance dans les hésitations à changer.
• Hésitations normales, signe favorable d’évolution car montrant que l’ancien
système de valeurs est en train de se réorganiser : « C’est OK
de chercher et de trouver qui tu es ».
10
VIVRE LE RENOUVEAU

10e étape : chaque jour je deviens l’auteur de ma vie

« La grandeur de l’Homme n’est pas dans ses apparences (…)


mais dans le noble usage qu’il fait de sa liberté. »
Saint Augustin

CE QUI ÉTAIT DEDANS JAILLIT DEHORS

La libération soudaine d’une énergie bloquée


Les personnes qui arrivent à ce stade sont pleines de vie et de ressort. Ce
qui était figé retrouve brusquement sa liberté d’action dans un moment de
dénouement, d’une crue qui déborde, d’un fleuve qui sort de son lit et
envahit la plaine. Cette étape est souvent perçue par les gens qui la vivent
comme une expérience marquante. Il y a un avant et un après. Celui qui a
fait cette expérience de mort-naissance sait ce qu’est l’extase1. Il s’est vu
renaître à lui-même et sait qu’il va apprendre à vivre car la vie ne demeure
pas, elle devient.
Le renouveau

Une personne vivante est en perpétuelle transformation. Souffrance, mort


et renaissance sont les maîtres mots de toute initiation. La vie la pousse vers
le haut des cimes, et s’enracine, profondément. La progression est
graduelle, mais favorable. Il faudra juste de la persévérance pour maintenir
cette dynamique.

« Être jeune dans la vieillesse, et vieille dans la jeunesse. Quand une personne vit pleinement,
les autres en font autant. »2

La porte de la spiritualité incarnée


L’étape 10 est caractérisée par une plongée dans un monde où le temps et la
durée n’ont plus la même signification qu’avant. Cette sensation d’absence
d’espace-temps est difficile à décrire. Mais ceux qui l’ont vécu la sentent et
savent désormais que les limites ne sont que des limites physiques et que le
sens de leur vie est donné par un « ailleurs ».
Cette étape 10 est faite d’essais et d’errances fécondes. La personne
cherche qui elle est, et ce qui l’inspire de façon à faire ce pourquoi elle est.

L’affirmation inconditionnelle de ce qui fait sens


À l’étape 10 la personne prend le risque de déplaire et de déranger.
Qu’importe ! Elle sait maintenant la vacuité et l’impermanence des choses
de ce monde. Elle a trouvé un sens à ses actes, un sens qui renvoie toujours
son auteur vers un ailleurs, un sens qui la tire hors d’elle-même. Alors peu
importe qu’elle plaise ou déplaise. Elle ne craint pas de s’affirmer comme
hors-la-loi, au risque de sa vie, au péril de son confort et de son bien-être.
Elle trace la route pour une autre humanité : celle de la spiritualité. Ce qui
est important pour elle, c’est maintenant l’adéquation entre ce qui est dit et
ce qui est fait. En tant qu’auteur de sa vie, elle avance au grand jour malgré
les difficultés. Elle est sous le feu des projecteurs et prend le risque de
chanter en solo.

La conscience de son pouvoir créateur


La création délibérée commence par le choix. Elle passe par une prise de
conscience du libre arbitre et de la totale liberté créative dont nous
bénéficions au-delà des questions morales, des systèmes traditionnels de
croyances, du bien et du mal. Nous sommes des êtres libres et nous avons le
choix de créer intentionnellement ce que nous désirons créer, et personne
d’autre que nous-même ne pourra le faire à notre place. Cependant cette
mise à l’épreuve de la liberté est plus difficile à vivre qu’il n’y paraît.

Méditation
Une femme de quarante ans raconte ce qu’elle a perçu pendant une séance de méditation :
« Je me voyais sur une barque en pleine mer, sous le soleil face à de multiples horizons. Je
pouvais aller absolument dans n’importe quelle direction. Il n’y avait qu’un seul problème :
c’était à moi et à moi seule de décider, je vivais ma liberté comme une véritable épreuve
initiatique.
Je sais désormais que je ne pourrai plus accuser quiconque du désordre ou du chaos que
j’éprouve à l’intérieur de moi-même. C’est à la fois Joie et Tristesse, Liberté et
Responsabilité. »

Si l’intention de toute personne est d’atteindre le bien-être dans sa vie sur


terre, il faut que son intention parte de la source la plus profonde de son être
et vise les parties matérielles, psychologiques, sociales et spirituelles d’elle-
même. Ce travail d’harmonisation de nos multiples dimensions se renforce
les unes les autres dans des interactions permanentes.
N’ayez plus peur désormais du rivage qui vous entoure. Tout ce que vous voyez est une
manifestation de vous-même, et il est ridicule d’avoir peur de sa propre création.3

Une sensation d’alignement intérieur


Quand la liberté d’être et de faire sont réunis, les individus ressentent
l’interdépendance qui les lie aux autres et leur capacité à vivre en harmonie
malgré les différences. On retrouve cette liberté incarnée et cette conscience
de l’interdépendance chez les grands de ce monde : Nelson Mandela,
Malala Yousafzai (prix Nobel de la paix à dix-sept ans), l’abbé Pierre,
Gandhi.
La pleine confiance en soi en une certaine véracité intérieure nous donne
la sensation d’être à la place exacte. Il n’est pas nécessaire d’en rajouter,
d’en faire trop. La concentration et la limitation des actes justes se fait au
profit de la qualité pour un agencement nouveau. Dans ce nouveau rythme,
la bonne cadence se met en place pour être en harmonie avec son entourage.

« Que la mesure, chaque jour, soit ton jeûne. »4

S’ARMER LE CŒUR POUR UN LONG VOYAGE


ET PRENDRE SOIN DE SON ÂME

Un nouveau voyage s’annonce. Il faut nourrir le corps et l’esprit, entretenir


les besoins de la vie quotidienne, et ce périple n’aura pas de fin. Alors que
faire face à cette double problématique ? L’Honnête Homme sait qu’il lui
faut nourrir l’intérieur pour donner à l’extérieur. À ce stade, l’absorption et
la diffusion sont autant physiques que relationnelles et spirituelles. Il faut
apprendre à durer et endurer pour éviter la dispersion, l’éparpillement ou le
retour en arrière vers des scénarios de vie bien connus et obsolètes. Pour
entretenir cette nouvelle vie, nous devons nous toiletter régulièrement, nous
nettoyer, éliminer ce qui n’est plus à sa place, et nous ressourcer dans ce
qu’il y a de plus intime en nous-même.

« Puisque je crée tout, je fais attention à ce que je crée. Étant donné que ce que je crée est le
reflet de mon âme, je prends soin de mon âme. »5
EXERCICES SPIRITUELS AU SERVICE DE SOI

À l’étape 10 les changements ne sont plus d’ordre matériel mais d’ordre


existentiel. C’est pourquoi l’entretien de cette étape nécessite une pratique
particulière pour « muscler » l’existentiel. De tout temps les Hommes ont
expérimenté et acquis un savoir-faire indéniable en matière d’exercices
spirituels. Pas besoin d’être chrétien pour pratiquer les exercices mis au
point par Ignace de Loyola. Pas besoin d’être bouddhiste pour faire retraite
chez des moines tibétains. Pas besoin d’être musulman pour pratiquer les
exercices soufis. Pas besoin de croire en quoi que ce soit pour ressentir les
bienfaits de la méditation en pleine conscience. L’essentiel est de prendre
soin de son âme.

Prendre soin de son âme


Voici ce qu’un homme de cinquante-quatre ans a écrit lors d’une séance de méditation
accompagnée6. La méthode employée est celle proposée par Anne-Marguerite Vexiau mais
qui n’est pas à la portée du premier coach venu. Elle demande une solide formation.
« Alors je serai un homme libre ! Parce que au plus près de l’authentique !
Cette liberté intérieure qui n’est pas, jamais un aboutissement, mais un mouvement sans fin
de cheminement, toujours remis en question, car intemporel et adaptable à l’évolution !
Alors, des transformations se font pour élever la conscience. Je suis accompagné de failles, de
doutes, de blessures mais non plus abîmé, plus assassiné, juste touché !…
Je ressens cette légèreté possible. Ce n’est plus un potentiel que je désirerais atteindre, c’est
un état que je peux habiter !… »
Ce même homme, trois ans plus tard, continue son travail de soin d’âme.
« Tout est à sa place !?… Ou bien tout est à sa place et moi pas !?… Ou bien tout est en place
pour que je trouve ma place !?…
Je me sens dans le trop et le pas assez ! Incapable d’y voir clair !?…
Je suis abouti à une part de vie où je n’ai pas à prouver !… J’ai été au bout je crois de plaire,
de prouver, de… de… j’ai besoin d’autrement ! D’autre chose !!!
Il y a en moi des sortes de révélations qui attendent que je m’harmonise sur ces fréquences !
J’ai à donner, transmettre en savoir être, plus qu’en savoir-faire ! Prendre ma plume et poser
sur le papier ce que je sais, sens, vis, ai vécu qui peut être entendu, compris, utile, pour que
des réveils se fassent !… pour impulser du sens chez l’autre ! Poser les bases d’un
enseignement humain et humaniste, outils à aider à émerger en chacun pour passer à voir, à
vivre autrement la vie telle qu’elle se présente !?…
Sortir de l’impasse des consciences perdues, comme trouver l’issue dans un dédale de
consciences non révélées, car sclérosées de peurs et de sentiments de fin qui ne peut qu’être
dramatique !?… Est en lien, un désir de révéler un certain potentiel endormi qui ne se croit
pas utile, et même inutile. C’est l’amour au milieu d’un mental agité, apeuré, qui veut garder
le contrôle.
Alors j’interviens et ramène du sens à ces états manipulés par les émotions conditionnées, la
certitude d’harmoniser un alignement chez l’autre comme chez moi, l’équilibre du point zéro
où tout peut exister, cohabiter, où tout peut alors se créer !
Et pour cela, prendre conscience d’un mental métal qui veut le contrôle, reflet individuel d’un
état collectif qui va dans le mur s’il n’a pas conscience de l’amour !
Je suis à la hauteur de cette attente que je ressens, qui fait sens ! Ma place est là ! J’ai à
donner de ce sens là !
Laisser décanter ! Accueillir, car c’est bien accepté en moi ! Qu’importe ! Je suis prêt !
Qu’importe, je sais faire ! »

Le cycle est-il terminé ? Certainement pas ! La fin de l’étape 10 ne


signifie pas la fin du chemin. La roue de la vie entraînée par la Vie nous
invite en permanence dans la ronde des mouvements et des changements.
L’être humain n’est pas qu’un être. Il est incarné et il a besoin de faire.
N’est-il pas temps de repartir vers un nouveau cycle en recommençant à
l’étape 1 ? Mais ce qui est certain, c’est que ces projets ne seront plus
incarnés comme avant. Les étapes 8, 9, 10 sont passées par là. Elles vont
insuffler un autre état d’esprit, une autre façon de faire du coaché.
ÉTAPE 10
Les signes observables chez le coaché
• Le coaché a le sentiment d’être aligné : ses pensées, ses émotions et ses
actions sont en phase.
• Il a l’impression d’être vivant comme il ne l’a jamais été.
Besoins du coaché
• Harmoniser ses valeurs avec ses actions.
• Exprimer à l’extérieur ce qu’il ressent et croit à l’intérieur.
Réponses du coach
Protection
• Verbaliser, identifier les résistances à s’exposer à l’extérieur.
• Lui témoigner de la confiance tout en l’incitant à prendre son temps.
• Freiner la personne à rentrer trop vite dans l’étape 1 d’un nouveau projet.
Plus le coaché passe de temps à mûrir l’étape 10, plus il explore de
nouvelles idées, et plus il y a de chances que le processus de
changement se pérennise.
Permission
• De ne pas se presser, d’attendre encore un peu la maturité.
• De se lancer alors que tout n’est pas complétement prêt.
• De savoir que d’autres – le coach par exemple – peuvent encore s’occuper
de lui.
• De lui dire qu’on est fier(e) de lui (elle).
• D’être l’auteur de sa vie.
11
QUAND ÇA NE TOURNE PAS ROND

« Je suis la galette, la galette,


Je suis faite avec le blé
Ramassé dans le grenier.
On m’a mise à refroidir
Mais j’ai mieux aimé courir
Attrape-moi si tu peux ! »
N. Caputo et P. Belvès, Roule galette

QUAND PLUSIEURS CYCLES SE SUPERPOSENT

En lisant cet ouvrage, vous avez pu hésiter quelques fois à vous situer entre
telle ou telle étape du cycle. Vous avez pu vous sentir à la fois dans une
étape et en même temps dans une autre, avoir du mal à vous positionner ici
plus que là. Vous vous êtes peut-être même retrouvé simultanément dans
plusieurs cycles, et pas forcément à la même étape pour chacun de ces
cycles. Rien de grave à tout cela. C’est même normal. Notre vie est
constituée de tellement de projets simultanés. Notre temps est consacré à
mille tâches différentes qui sont reliées à mille autres tâches réalisées par
mille autres personnes. Dans ce maillage collectif, nous avons parfois
l’impression que notre temps se fragmente et se désagrège. Nous ne le
maîtrisons plus et nous subissons plus que nous choisissons tous nos
microprojets.
Exemple de la vie quotidienne avec ses différents épisodes reliés à différents projets
7 h 30 : Camille a neuf ans. Ce matin elle est réveillée par Maman.
→ Cycle court que l’on pourrait appeler le cycle « une bonne nuit ». Étape 4
En se brossant les dents Camille pense à Mateo dont elle est amoureuse. Enfin elle ne sait pas
très bien… Mais qu’est-ce qu’il lui plaît ce garçon, il est trop beau !
→ Cycle « Et lui, il m’aime ? ». Étape 1
Et en même temps elle entend sa Maman qui l’appelle pour partir à l’école.
→ Brusque arrêt (étape 4) du cycle « Et lui, il m’aime ? » et début d’un autre cycle « prendre
le bus scolaire ». Étape 2

La plupart du temps, ces situations multi-activités ne nous posent aucun


problème dans les méandres de notre vie quotidienne. Mais quelquefois,
nous hésitons. Des questions se posent, nous n’avons pas la réponse, les
émotions chahutent notre cœur et nous perdons la tête comme si nous ne
savions plus choisir nos actions dans la multitude de ces projets.

Des situations parallèles et des cycles imbriqués


Pauline est ingénieure dans une grande entreprise. Elle vient d’être promue à Tokyo pour
diriger la filiale japonaise. (Cycle 1, étape no 2 : lancement). Cela faisait deux ans qu’elle
briguait le poste. Alors elle organise un pot de départ avec ses principaux collaborateurs
(Cycle 2, étape 4 : fin de mission).
Mais il y a quatre mois son père auquel elle était très attachée est décédé brusquement d’une
crise cardiaque. Le chagrin et les regrets de la perte sont encore vifs. (Cycle 3, étape 5 :
deuil).
Pauline, femme de conviction est profondément impliquée dans la vie citoyenne. Vice-
Présidente d’une association caritative importante, elle vit en ce moment un conflit de valeurs
avec son nouveau Président. Ses sentiments oscillent entre colère, envie de claquer la porte, et
se battre pour ses idées (Cycle 4, étape 4 : arrêt)
Pauline vit donc trois situations en parallèle. D’une part, la célébration, la joie et l’énergie du
succès pour son nouveau poste. D’autre part la peine, le chagrin et la tristesse de la perte de
son père. Enfin de la frustration et une perte de sens à l’endroit de son engagement associatif.
Il y a de quoi être perturbé. Comment s’y retrouver ? Comment vivre pleinement chaque
situation sans être parasité par les deux autres et garder le cap ?

Pour naviguer dans les méandres de tous ces projets, rappelons-nous que
le cycle d’Hudson comporte deux grandes parties distinctes. Les sept
premières étapes portent sur des questions opérationnelles. Elles cherchent
des réponses aux questions comment et quoi. À travers des réalisations
tangibles, nous obtenons des gratifications et des signes de reconnaissance.
Ces sept étapes se rejouent bien des fois dans la vie, ou même dans la
journée. Parfois un cycle dure quelques heures, d’autres fois quelques mois,
voire quelques années. Mais à chaque fois, nous développons un savoir-
faire nouveau et nous progressons. C’est ainsi que nous développons des
compétences, et notre identité se trouve renforcée par ces réalisations.
Dans la seconde partie du cycle d’Hudson, des étapes 8 à 10, nous
questionnons le sens de la vie et le sens de notre vie. La question pourquoi
ou pour quoi est au cœur de la dynamique. Les réponses s’enracinent
profondément dans la façon dont chacun s’évalue et évalue les autres. Ces
évaluations en termes de « ça c’est bien ; ça c’est mal », c’est-à-dire en
termes de valeurs, nous apportent un sentiment de sécurité et de
prévisibilité de l’avenir immédiat et donne un sens au monde qui nous
entoure.

Revenons au cas de Pauline


Cette femme est tiraillée entre plusieurs directions. Doit-elle suivre tout de suite sa voie
professionnelle au risque de souffrir de la séparation familiale et de regretter un jour d’avoir
laissé sa maman seule à gérer le deuil et la succession ?
Alors qu’elle sait qu’elle partira à Tokyo, doit-elle évoquer avec son Président ou avec les
administrateurs ses tourments à propos des agissements récents du Président ? Elle pourrait
très bien s’en aller sans rien dire, mais cette attitude ne lui ressemble pas. Attachée à ses
convictions et aux valeurs qui l’animent, elle ne se voit pas quitter cette association sans clore
dignement cet épisode de sa vie.

Tout comme Pauline, nous sommes parfois confrontés à des conflits


internes entre telle ou telle étape de tel ou tel cycle et nous devons faire des
choix. La plupart du temps, nous prenons la décision la moins coûteuse
psychologiquement. L’équilibre psychique que nous nous sommes
construits assez tôt dans la vie fonctionne en mode routine. C’est lui qui
pilote la plupart de nos décisions inconscientes. Mais si le scénario inventé
dans la petite enfance nous a aidé en son temps à trouver des réponses au
sens de la vie, il est probable qu’il soit maintenant passablement obsolète.
Car la vie a changé : nos partenaires ne sont plus les mêmes (papa, maman
et la fratrie ne vivent plus sur le même lieu), de nouveaux partenaires sont
entrés dans notre vie (nous avons un conjoint, ou en avons eu plusieurs ;
nous avons des enfants – biologiques ou adoptés, etc.), les activités ont
changé (le travail que nous exerçons aujourd’hui n’a rien à voir avec celui
que nous avions à six ans), bref tout notre environnement a bougé.
Cependant, notre monde intérieur est resté stable. La remise en cause de nos
convictions, de nos croyances et de nos modes habituels de communication
nécessiterait une réorganisation intérieure tellement profonde que nous ne
sommes pas prêts à changer ce qui a fait les fondations de notre existence et
de notre identité. D’où le dilemme du choix : dois-je continuer à répondre
de la même manière qu’avant, ou puis-je envisager une autre réponse
possible. Et si oui, laquelle ?
Tant qu’il s’agit de décisions opérationnelles qui concernent les étapes 1
à 7, le choix se fait dans l’ordre des priorités du possible. Mais quand les
questions que nous nous posons deviennent existentielles, c’est l’identité
toute entière qui est questionnée. Ce sont nos valeurs et nos convictions qui
sont touchées. C’est alors qu’il faut donner la priorité au traitement des
questions des étapes 8 à 10 et laisser tourner les autres cycles opérationnels
en mode routine (étape 1 à 7) en attendant que l’étape 10 vienne redonner
du sens aux premières étapes de tous les nouveaux cycles opérationnels.

Voici comment Pauline a procédé


Elle a d’abord pris le temps de dire « au revoir » à son papa avec un ami coach (Cycle
« papa », étape 5).
Ensuite elle est allée voir le Président de l’association pour lui signifier en tête à tête son
désaccord sur le fond. Elle lui a dit également qu’au discours de son pot de départ, elle
rappellerait les convictions qui l’animaient et qui l’animent toujours. Elle rappellerait
également les valeurs d’origine de l’association qui l’ont tant attirée et motivée pour
s’impliquer bénévolement, et qu’enfin elle se questionnait sur le positionnement et
l’orientation actuelle que prenait l’association. Se faisant, elle sous-entendrait une critique des
orientations du Président. Néanmoins elle souhaitera bonne chance et un réel plaisir à ses
successeurs dans la voie de cette belle association. (Cycle « association », étape 6).
Consciente des troubles que le télescopage de tous ces événements a provoqués en elle,
Pauline a décidé qu’une fois installée au Japon, elle entreprendrait un travail de coaching
approfondi pour explorer ce qui l’anime toujours d’une part, et ce qu’elle doit modifier dans
son regard sur le monde d’autre part. (Cycle « valeurs », étape 9).

REFUSER L’OBSTACLE ET PRENDRE


LA TANGENTE

Il arrive quelquefois que la personne aidée saute une ou plusieurs étapes du


cycle d’Hudson comme si elle voulait éviter l’obstacle. Par exemple, elle
s’arrête dès les premières difficultés de l’étape 2, et revient immédiatement
au début de l’étape 1, mais sur un tout autre projet. Ou bien dès l’arrivée à
terme d’un projet, elle ne prend pas le temps de faire le point, le bilan, de
savourer la réussite, et se projette immédiatement en début d’étape 1 ou
pire, de l’étape 2 d’un autre projet. Ou encore le coaché ne prend pas le
temps de savourer tout le chemin parcouru, de s’imprégner des bienfaits de
sa réussite et de prendre quelque temps de repos pour savourer et partager
sa joie.
Quand le coaché aborde les étapes 8, 9, 10, il est fréquent d’assister à des
aller-retours, à des hésitations, à des retours en arrière. C’est fréquent,
normal et bon signe. L’identité qui se déconstruit résiste, tandis que la
nouvelle identité peine à émerger. Nous ne renonçons pas si facilement à
nos croyances.
Le coach est vigilant à la succession des étapes. Si le coaché en saute
une, c’est qu’inconsciemment il butte sur une résistance. Le coach est alors
respectueux de cet obstacle. Il sait que chaque phase est nécessaire dans le
développement de la personne. Avec bienveillance et aussi avec une dose
appropriée de fermeté, il invite patiemment le coaché à explorer l’étape qui
le dérange. Cependant il arrive que la blessure qui a provoqué cet évitement
d’étape soit si profonde que la réveiller serait insupportable. Le coach doit
accepter qu’il ne pourra pas tout changer, pas tout le monde, et qu’aucune
méthode n’est garante à cent pour cent d’un accompagnement efficace.
L’humilité n’est pas la moindre des vertus de tout aidant. L’acceptation
d’une dose de non-puissance nécessite chez les coachs des deuils profonds.

L’évitement de l’étape 1
Cet évitement est fréquent chez les gens qui privilégient l’action à la
réflexion. Ce qu’ils aiment : foncer ! Ce qui leur fait peur : s’arrêter et
réfléchir. Or réfléchir, c’est écouter plus fort1. Le coach va forcer l’aidé à
écouter davantage sa petite voix intérieure et le monde qui l’entoure.

L’évitement de l’étape 2
La procrastination est un symptôme typique de cet évitement. La personne
aidée n’arrive pas à passer à l’action. Le coach devra alors creuser dans
l’étape 1 les raisons objectives, personnelles, subjectives, inconscientes
peut-être, qui empêchent le client d’agir. Attention ! Le coach n’est pas
psychothérapeute à moins qu’il soit formé et dûment diplômé. Le fait de
fouiller dans l’intimité d’une personne peut provoquer plus de dommage
que de bien.
S’arrêter aux limites de l’intimité
Sarah est la coach de Bruno.
Bruno a demandé un coaching sur un aspect particulier qui lui pourrit la vie dit-il. À chaque
fois qu’il se retrouve au pied du mur2, il se sent bloqué, et incapable de passer à l’action.
Alors que la relation entre Sarah et Bruno se fait dans un cadre strictement professionnel,
Bruno avoue à Sarah, qu’avec les femmes c’est pareil, il n’arrive pas à passer à l’action.
Pourtant Bruno est apprécié de ses chefs. C’est un très bon technicien qui a plein d’idées et
qui sait mener des projets. Mais parfois ça bloque.
Sarah a fait des études de psychologie avant de se reconvertir au coaching. Dans l’entreprise
où travaille Bruno, elle a pris le temps de faire alliance avec lui et d’aborder les sujets perçus
par Bruno comme les moins menaçants. Une certaine relation de confiance s’est alors établie
entre eux. D’ailleurs Bruno se livre plus facilement depuis la dernière séance, il parle
davantage de sa vie personnelle, de ses hobbies, de ses passions, et aussi de ses… troubles.
Alors Sarah tente une question : « Bruno, quand vous êtes au pied du mur, que vous sentez
que ça bloque, à quoi ça vous fait penser comme scène de votre passé ? ». Et tout d’un coup
Bruno blêmit. Il se revoit en train de réparer son premier vélo. Il a six ans, n’arrive pas à
défaire la chaîne qui est coincée dans la roue, il appelle son père qui lui dit de se débrouiller
tout seul. Bruno se sent abandonné.
Fort de la confiance qu’il a en Sarah, il lui raconte cette scène. « Merci Bruno pour la
confiance que vous me témoignez. Je suis touchée par ce que vous me dites et ce que vous
montrez de vous. ». La séance de coaching s’arrête là. Sarah sait qu’elle est arrivée aux
limites déontologiques de son métier de coach. Elle n’est pas mandatée pour être la psy de
Bruno dans cette entreprise.
Quelques jours plus tard, Bruno la rappelle. « Sarah, il faut que je vous dise : la dernière fois
quand je vous ai raconté la scène du vélo, je ne m’attendais pas à ce que ça provoque autant
d’émotions en moi. J’ai compris que ça pouvait être la raison de mon blocage. Et bien
figurez-vous qu’hier, comme par hasard, j’ai lancé un projet qui traînait depuis deux
semaines. J’ai contacté les collègues, on a pris rendez-vous, et voilà c’est parti ! Maintenant
ça roule tout seul ! »
Sarah le remercie pour ce beau témoignage. Cependant elle n’est pas dupe. La psychologue
qu’elle est sait que la révélation d’une seule scène traumatisante est souvent insuffisante pour
corriger des années d’habitudes répétées. Et bien qu’elle ait fait en son for intérieur une
analyse beaucoup plus approfondie de la dynamique intra-psychique de Bruno, elle s’est
abstenue de toute intrusion dans le scénario de vie de son client. Elle est coach avec Bruno,
seulement coach, pas psychothérapeute.
Mais sa pratique lui a montré depuis longtemps que la vie a une puissance de réparation qui
continue de l’étonner et de l’émerveiller comme au premier jour.

L’évitement de l’étape 3
À peine commencé, aussitôt terminé. La personne ne montre aucune
persévérance. Soit elle s’arrête et retourne immédiatement en début de
l’étape 1, ou pire, au début de l’étape 2 d’un autre projet. Le travail
spécifique de l’aidant sera d’accompagner l’aidé dans la persévérance.
En panne sur la caisse claire
Magda a six ans. Elle est fan d’un groupe de musique anglais. Elle veut absolument faire de la
batterie comme la fille qui joue, là !
Sa mère a fait de la danse quand elle était jeune, et connaît les contraintes d’une discipline
artistique. Elle sait qu’avant que Magda ne joue comme la fille, là ! il faudra quelques années
de pratique.
Pour accompagner en douceur son enfant dans cette discipline ingrate au début, la mère l’a
inscrite à l’école de musique. Elle sait que les premiers signes de découragement viendront
avec les difficultés techniques qui correspondent souvent au creux de l’hiver. Alors quand
Magda s’assoit devant sa caisse claire, maman s’installe à côté de sa fille. Elle est là, juste
présente, ne commente pas encore la pratique de l’enfant, mais l’encourage avec parcimonie
et retenue.
En décembre, Magda veut tout arrêter ! « C’est trop dur ! J’y arriverai jamais… »
Maman est là, lui demande de rejouer les morceaux que Magda avait bien réussi. Maman lui
sourit, ne la force pas. Maman lui montre qu’elle a confiance en elle, que Magda peut prendre
le temps qu’elle veut pour réussir, et qu’un instrument de musique est astreignant.
Alors pendant une semaine, Magda fait la grève de batterie. Mais le lundi suivant, sans
prévenir, on entend d’abord un léger roulement de caisse claire, tout doux. Lent d’abord, puis
de plus en plus rapide, et enfin Magda qui braille en anglais à tue-tête comme la rockstar, là !

L’évitement de l’étape 4
À bout de souffle
Olivier a créé son entreprise à dix-huit ans. Il en a soixante-douze aujourd’hui et tient toujours
les rênes de la boutique. Sa boîte, c’est sa vie !
Mais sa boîte va de mal en pis. Ils ont été jusqu’à cent-trente employés dans les meilleures
années. Aujourd’hui, il ne reste plus que dix derniers vétérans qui espèrent tous arriver à l’âge
de la retraite avant que ça ne s’écroule.
Pourtant le fils d’Olivier, avec le soutien de sa mère, a tenté plusieurs fois de persuader le
père de céder la direction de l’entreprise alors qu’il était encore temps. Mais Olivier est têtu, il
n’a rien voulu entendre.

Il est rare qu’une personne demande de l’aide quand l’étape 3 s’éternise


alors que le projet devrait être arrêté depuis longtemps. Car l’arrêt est
souvent perçu comme un arrêt de vie. Dès lors il est douloureux d’arrêter la
vie, même si le projet provoque souffrance et amertume.

L’évitement de l’étape 5
L’évitement de cette étape – comme les autres étapes – peut avoir une
origine culturelle.
Du temps improductif ?
Les entreprises marchandes dénient souvent l’intérêt de la phase de deuil dans les projets
industriels. Dès qu’un projet est terminé (étape 4), on demande aux équipes de s’atteler
immédiatement à un nouveau projet (étape 1 ou 2). Faire le deuil est considéré comme un
temps improductif, et il n’est pas question de mettre des moyens et des budgets là-dessus.

Cependant les organisations expertes en gouvernance des Hommes


connaissent l’importance des étapes 5, 6 et 7. Elles savent que ces étapes
qui apparaissent comme improductives à court terme sont pourtant capitales
pour la réussite des projets futurs.

Entretenir le moral des troupes


L’armée a plusieurs centaines d’années d’expérience dans le maniement des hommes. Les
militaires savent qu’après une opération de combat, le personnel a besoin de temps pour
récupérer et pour donner du sens à ce qui vient de se passer. Peut-être ces hommes ont-il
perdu des camarades ? Peut-être l’opération ne s’est-elle pas passée comme prévue ? En tout
cas la charge émotionnelle est là. Bien sûr, il ne s’agit pas de venir pleurnicher sur l’épaule de
son adjudant, mais les cellules de soutien psychologique sont maintenant des réalités qui
accompagnent les militaires en opération (étape 5). Les débriefings sont maintenant rentrés
dans les habitudes (étape 6), et le repos, les récompenses, les gratifications honorifiques sont
là pour dire à ces hommes qu’ils peuvent être fiers et que la Nation les remercie (étape 7).
C’est un des moyens pour entretenir le moral des troupes qui demain devront retourner au
combat (étape 1 et 2).

L’évitement de l’étape 6
Cet évitement a souvent les mêmes causes que l’évitement de l’étape 1 : la
personne aidée préfère l’action à la réflexion.

L’évitement de l’étape 7
Le sommeil, cette petite mort…
Voici quelques phrases entendues par des coachs pour justifier un
évitement de l’étape 7 :
• Pas de temps à perdre ! La vie est si courte.
• Le temps c’est de l’argent. Et moi, j’aime gagner !
• Passer du temps à ne rien faire, à réfléchir ? Non. Moi, je préfère
l’action.
• Si je commence une sieste, je ne peux plus me réveiller. Et après je
ne suis que mollesse.
• Je n’ai pas besoin de repos. Je suis jeune et en bonne santé, et j’ai
toujours été un petit dormeur.

L’évitement de l’étape 8
Cette étape étant souvent confondue avec un passage dépressif temporaire,
le coaché a tendance à repartir dans un nouveau cycle plutôt que d’affronter
le doute qui s’invite en lui. Il consultera son médecin qui lui prescrira peut-
être des antidépresseurs.
Évitant ainsi l’étape qui lui aurait permis d’entamer un chemin
d’individuation3, la personne bifurque vers l’étape 7, ou repasse
directement à l’étape 1 ou 2.

L’évitement de l’étape 9
Écoutons les propos de Jessica, quarante-cinq ans, avant son travail avec le
coach.

Douée pour tout et pourtant…


« Depuis la petite enfance j’ai su que je n’étais pas à ma place. À l’école je m’ennuyais. Les
cours n’allaient pas assez vite et je comprenais tout avant les autres. Quand j’ai commencé le
piano, je ne travaillais pas pendant la semaine, mais juste une heure ou deux avant la
rencontre avec le professeur. Ça ne m’a pas empêché d’arriver jusqu’au niveau supérieur.
J’aurai pu postuler au conservatoire mais, au fond de moi, je ne voulais pas être pianiste
professionnelle. Alors j’ai fait des études de sciences : un Master en chimie. Puis j’ai travaillé
comme manager dans une entreprise qui vendait des produits chimiques pour les particuliers.
Rapidement je me suis ennuyée, le travail était trop routinier.
À vingt ans, je me suis dit que je n’étais pas faite pour le monde de l’entreprise. Alors j’ai
commencé à danser professionnellement. Pendant dix ans je n’ai fait que ça. J’ai dansé avec
de prestigieuses compagnies. Mais ce métier est comme les autres : compétition,
survalorisation de l’ego. Alors j’ai arrêté la danse.
D’accord je suis plus douée que la moyenne des gens, mais ce n’est pas pour autant plus
confortable. Je ne sais toujours pas qui je suis, ce que je fais dans ce monde, et à quoi sert ma
vie. »

Le coach de Jessica a travaillé avec elle la priorisation de ses valeurs


profondes. Ça ne s’est pas fait en quelques semaines. Jessica a dû revisiter
son passé pour éclairer la vision de son avenir. Elle a dû explorer des zones
subtiles de son être pour découvrir des valeurs qu’elle ignorait. Elle a dû
faire preuve de modestie et de renoncement ce qui a été particulièrement
difficile pour elle, femme douée depuis son enfance. Mais cette humilité l’a
amenée à contacter des zones d’elle-même qui lui ont ouvert les portes de la
spiritualité. Aujourd’hui, elle n’a pas trouvé sa place, mais son chemin. « Et
c’est bien mieux ainsi ! » se réjouit-elle. Elle a changé de métier, s’est
inséré dans une activité sociale et commence à être célèbre dans sa
profession.

L’évitement de l’étape 10
Exposer, c’est s’exposer. L’inspiration ne suffit pas. Il faut qu’elle s’incarne
dans la matière. Ex-primer, faire sortir de, jeter au regard des autres, s’ex-
poser (sexe posé), voilà les risques de l’étape 10. Une identité
insuffisamment stabilisée ou la croyance qu’elle n’est pas suffisamment
stabilisée, et le coaché renonce, renâcle à s’exposer.
12
TROIS CAS DE COACHING COMMENTÉS

Voici trois cas commentés de coaching inspiré par la méthode du cycle d’Hudson.
Le premier est celui de Bernard. Ce cas montre comment un coach
professionnel qui a eu la chance d’accompagner son client sur la longue
durée, a utilisé le modèle d’Hudson. Le coach ne parcourt pas le cycle dans
sa totalité à chaque étape de progression de son client, mais il s’appuie
seulement sur certaines étapes qui s’avèrent pertinentes au moment des
rencontres.
Le second cas est celui de Julie. Ses parents, sans être des coachs
professionnels, sont néanmoins formés au modèle d’Hudson. En utilisant le
modèle, ils permettent d’accompagner leur fille de l’enfance jusqu’à l’âge
adulte. On imagine bien que, le reste du temps, les parents jouent un autre
rôle que celui de coach. En effet, cette compétence spécifique n’est utilisée
que pour accompagner leur fille dans certains moments importants de sa
vie.
Yvan illustre le troisième cas. Au cours de sa vie, cet homme est passé
par un grand nombre de phases. Ses accompagnateurs ont su utiliser les
bons leviers pour aider Yvan à parcourir son chemin. Non formés au modèle
d’Hudson, mais à d’autres méthodes d’interventions sociales, ils ont
néanmoins rendu un service précieux à Yvan.

LE CAS « BERNARD »
Bernard a toujours été passionné par l’écologie et les économies que chaque
foyer pouvait réaliser sur ses consommations courantes. Il aime le grand air,
le cyclisme, les raids en nature et le ski. Il est également attiré par l’eau, la
voile et aussi la natation qu’il pratique en compétition. Quand il entreprend
un projet, Bernard aime « performer » comme il le dit lui-même.
Son diplôme d’ingénieur en poche, il se fait embaucher à vingt-quatre
ans dans une entreprise multinationale de traitement des eaux usées. À
l’époque, les usines de traitements des eaux urbaines, ces eaux que nous
rejetons en grande quantité quand nous tirons la chasse d’eau et les pluies
collectées dans les caniveaux de nos rues, sont filtrées avant d’être purifiées
et réintroduites dans le circuit. Une grande quantité de boues et autres
matières organiques recueillies au filtrage sont autant de sous-produits dont
les usines cherchent à se débarrasser. Ces boues sont transportées par rail ou
camions, puis épandues dans les champs. Mais c’est coûteux et polluant.
Bernard a l’idée de récupérer les effluents et de les transformer en biogaz
pour alimenter toute l’usine. Double avantage : on économise le coût de
destruction et on produit sa propre énergie. Au bout de cinq ans le projet est
opérationnel et vaut à Bernard les félicitations de la direction générale. Il
devient alors responsable des projets de développement du traitement des
boues de toutes les stations d’épuration françaises. Il coordonne les projets
régionaux et anime la filière au sein de la multinationale.
À trente-quatre ans, il se voit confier une nouvelle promotion et une
nouvelle mission : développer les métiers émergents autour de
l’assainissement et des énergies renouvelables. Responsable d’une équipe
d’ingénieurs et de techniciens, il développe de nombreux partenariats
scientifiques et industriels avec des universités et des entreprises. Bernard a
trente-six ans quand il consulte un coach pour la première fois : « Je
commence à être un peu lassé de la technique. Je me rends compte
confusément que je dois passer par d’autres métiers pour faire évoluer ma
carrière ».

Jusqu’ici, Bernard a parcouru plusieurs fois les étapes 1 à 7 du cycle d’Hudson. Comme la
plupart des gens, il n’a pas fait appel à quelqu’un d’autre pour l’aider à réfléchir sur sa
carrière ou sur les petits aléas qui parsèment la vie. On ne se pose pas mille questions en
permanence, heureusement !

Mais Bernard, comme beaucoup d’entre nous à certains moments de


l’existence, ressent le besoin d’être accompagné sur son chemin personnel
et professionnel. À trente-six ans, âge de la maturité, il a conscience que
son futur ne s’écrira pas simplement comme la suite logique et continue de
sa carrière passée. Comme beaucoup de personnes de son âge, il se pose des
questions sur son orientation. Sachant que le coaching est une option pour
clarifier cette interrogation, il s’adresse à un professionnel en la matière.

Le coach s’aperçoit que Bernard est en phase 4. Une fois les étapes 5 et 6 terminées, la
question sera de savoir s’il s’orientera naturellement vers l’étape 7 ou bifurquera vers
l’étape 8. Le coach questionne son client sur ses aspirations, ses motivations et ses valeurs. Il
s’aperçoit rapidement que les valeurs de départs restent inchangées. Il s’agit donc d’une
question classique de gestion de carrière due à une lassitude normale après avoir travaillé dix
ans dans le même domaine.

Le coach se dit que Bernard est prêt à changer de domaine d’activité et


qu’il va entamer prochainement un nouveau cycle à l’étape 1. Il travaille
alors l’étape 5 avec Bernard en lui faisant exprimer ses sentiments, ses
doutes, ses envies et ses émotions par rapport à sa carrière passée. Puis ils
abordent l’étape 6 en prenant le temps de faire un bilan précis et complet.
Dans cette étape, le coach oriente le bilan en pensant déjà à la future étape 1
du cycle suivant qui sera une fonction business de haut niveau.
Ce travail de coaching amène Bernard à postuler pour une fonction
commerciale. Il prend alors la direction du business development et assure
la coordination des grands comptes. Il entame une série de prospections
pour développer l’installation des stations d’épuration sur le territoire
français. Pour le renouvellement des stations existantes, il définit la
stratégie de réponse aux appels d’offres publics en coordination avec les
équipes projets. Il assure le suivi commercial de toutes les grandes affaires.
C’est ainsi qu’il prend conscience de l’influence du facteur humain dans la
réussite de toute entreprise industrielle et de l’importance du
développement des compétences extra-techniques des équipes qu’il dirige.
Les soft skills, comme il les appelle, deviennent un axe majeur de son
engagement auprès des hommes et des femmes qu’il encadre.
Dans cette étape de sa carrière, Bernard élargit ses centres d’intérêt et
déborde du strict domaine de sa fonction. Il explore certains aspects
humains qu’il n’avait pas abordés dans ses études scientifiques et ses
fonctions techniques précédentes. Ces signes sont typiques de l’étape 3 du
cycle d’Hudson. Bernard s’intéresse aux principes d’autrui et aux valeurs
morales.
Parallèlement et depuis plusieurs années, il partage avec un groupe
d’hommes ses points de vue sur la vie et sur le monde. Ces discussions dans
ce groupe informel le nourrissent. On y aborde tous types de sujet, y
compris les plus farfelus. Bernard se dit inspiré par ce qui s’échange. Il
s’intéresse ainsi au monde de la spiritualité et découvre l’impact que ses
inspirations peuvent avoir sur son métier. Lui, le scientifique rationnel, est
quelque peu troublé par ces découvertes. Mais c’est son jardin secret et n’en
parle pas à ses collègues. Il les confie cependant au coach. « Ce trouble est-
il normal ? Ne suis-je pas en train de virer dans une espèce de délire
mystique ? »
Le cycle de son évolution personnelle commence à influencer les phases
du cycle professionnel. Alors qu’il est en phase 3 professionnellement,
Bernard est en phase 8 personnellement. Cette influence l’incite à se poser
des questions sur la normalité, sur les valeurs et sur ce qu’est sa vie.

En remettant peu à peu en cause ses valeurs passées, Bernard aborde un virage. Il ne
recommence pas de nouveau cycle opérationnel (étape 1 à 7) comme il l’a déjà fait de
nombreuses fois auparavant. Ce virage, ou plutôt ce carrefour, l’amène à s’orienter vers
l’étape 8. Le coach le sait, et il sait également qu’à ce stade il ne faut surtout pas conseiller
son client. Le coach écoute et reformule les doutes du coaché. Il s’abstient de tout conseil. Il
attend la suite…

Bernard a maintenant quarante-deux ans. La direction générale lui confie


la direction des programmes innovants. Il doit alors définir de nouveaux
axes d’innovation dans la continuité de ce qui se faisait jusqu’à présent, tout
en cherchant des solutions « disruptives » pour propulser l’innovation. Ce
poste se trouve au carrefour des directions commerciale, technique,
industrielle et financière. Bernard se confronte ainsi aux logiques d’acteurs
des sièges sociaux des grands groupes internationaux où chacun joue sa
carrière avant tout. Les alliances et les trahisons sont légions dans les
couloirs du pouvoir. Le principe directeur est de se faire repérer pour
monter dans la hiérarchie et obtenir l’écoute des directeurs généraux, tout
en protégeant ses arrières avec un jeu d’allégeance au cas où… Mais le
décalage entre ces logiques de siège et les valeurs de Bernard sont de plus
en plus difficiles à concilier. Il doute de plus en plus.

Au cours de l’étape 2 de ce nouveau cycle (professionnel), le doute (personnel) s’est invité et


empêche Bernard de passer en étape 3 (professionnel). Il n’arrive plus à concilier le cycle
professionnel et le cycle personnel. Malgré ce trouble persistant, Bernard poursuit vaille que
vaille sa carrière car « pendant les travaux la vente continue ». Un matin, tôt, il arrive au
quartier de la Défense à l’ouest de Paris. Le soleil levant illumine l’obélisque de la Concorde,
l’Arc de Triomphe et l’Arche de la Défense. Bernard ne peut se retenir, il écrit ces phrases :

Les rélexions de Bernard


À quarante-cinq minutes de la campagne normande, se trouve un endroit appelé « La
Défense » où l’homme a tenté d’incarner sa représentation consciente et inconsciente du
monde social et économique tel qu’il le conçoit aujourd’hui.
Tout d’abord, ce qui saute aux yeux :
– On y trouve la force du mental avec ces structures élevées, ces lignes droites symbolisant la
puissance, comme un défi que l’homme s’est lancé pour tenter de maîtriser la Nature, comme
pour oublier que ses activités doivent la respecter et que son développement dépend d’elle…
– On y trouve ces surfaces vitrées qui renvoient une froideur et l’abnégation des sentiments et
de l’Amour universel. Comme pour mieux impressionner les parties spoliées par leurs
modèles économiques irrespectueux de la notion de partage et d’élévation collective…
Puis, comme pour se faire pardonner d’autant de présomptions :
– Quelques œuvres d’art dispersées discrètement veulent témoigner de la capacité créatrice de
l’être humain. Comme si le grand business respectait les besoins essentiels des hommes alors
qu’il s’attache à créer des besoins artificiels et superflus…
– Quelques tâches végétales parsemées comme des touffes d’herbes intrusives dans de vastes
parkings qui ont pour épée de Damoclès le dernier désherbant qui polluera notre ressource en
eau pour quelques décennies comme pour faire illusion qu’ici, à « La Défense » les modèles
économiques respectent la Nature et l’Homme.
Espérons que dans cinquante ans, une nouvelle aire humaniste viendra, à l’occasion d’une
réhabilitation urbaine, remanier ce site avec de la végétation, de l’eau, des courbes comme
pour se faire pardonner notre passé économique omnipotent. Les êtres humains travailleront
tous à mi-temps de chez eux, chacun pouvant contribuer à une économie locale respectueuse
donnant l’égalité des chances à tous de trouver sa juste place et dans le respect incontournable
de l’environnement…
Quelques minutes avant neuf heures, les salariés marchent et se suivent comme des fourmis
depuis la bouche de métro jusqu’à leur tour respective. Certains, peut-être, cherchent du sens
à ce rituel quotidien, mais bien d’autres le font pour tenter de répondre à leurs propres besoins
parfois véritables mais trop souvent futiles.

Bernard envoie ce texte à son coach. Il doute de plus en plus du sens de


son engagement pour cette multinationale. Il sent qu’il ne pourra pas
continuer longtemps ce mensonge à lui-même. Mais que faire quand la
hiérarchie vous donne tant de signes de reconnaissance, à commencer par
un salaire et des avantages matériels plus que généreux ?
À quarante-cinq ans, Bernard reprend contact avec son coach pour l’aider
à trouver un sens à ses actions futures et lui envoie son texte sur la Défense.
Bernard a besoin d’un professionnel pour avancer à cette étape de sa vie. Le
coach lui propose un travail sur la priorisation des valeurs et l’élaboration
d’un plan d’action typiques des étapes 8 et 9. En quelques séances les
priorités émergent, l’axe du plan d’action se précise, et les rendez-vous de
jalons sont programmés dans l’agenda de Bernard. Voilà ce qu’il dit à son
coach : « Ça fait vingt-et-un ans que je travaille dans cette belle entreprise.
Aujourd’hui je sens que j’ai fermé une boucle dans ma vie de cadre
supérieur d’un grand groupe. Notre coaching m’a montré ce qui était
vraiment prioritaire dans ma vie. Alors j’ai négocié un plan de départ
volontaire avec mon entreprise et, avec ma compagne, nous allons ouvrir
un centre de ressourcement et de bien-être. »
Mais trois mois plus tard, Bernard doit arrêter toute activité. Un accident
de santé l’immobilise pendant plusieurs semaines. Heureusement pour lui,
sa condition physique de sportif fait qu’il récupère vite et bien. Mais sa
pugnacité et son envie de manager son projet de vie comme il a toujours
piloté ses grands projets industriels se heurtent à ses limites physiques.
Alors qu’il veut racheter un domaine magnifique au bord de la Seine pour le
transformer en salle de yoga, chambres d’hôtes, cuisine bio, le coach
l’exhorte à freiner ses velléités. Dans son déni, Bernard a du mal à entendre.
Alors sur un ton extrêmement directif, le coach lui démontre chiffres en
main que son projet n’est viable ni financièrement ni physiquement.
Bernard entend. Ces années de collaboration avec son coach ont scellé un
haut niveau de confiance. Bernard se demande alors quel emploi reprendre
car le marché du bien-être n’est pas suffisant pour financer tous ces coûteux
projets. Va-t-il être consultant ? Enseignant dans des écoles d’ingénieurs ?
Reprendre une activité dans le traitement des eaux mais du côté client cette
fois-ci ? La maturation est lente – pas longue, lente. Lente comme la
naissance du papillon. L’Être de Bernard tout entier est bouleversé. Son
cœur crie, ses pensées se fracassent les unes contre les autres brisant ainsi
toute certitude.

Les allers retours entre l’étape 8 et l’étape 9 sont douloureuses. Le client ne voit pas le bout
du tunnel. Néanmoins ces itérations sont le signe que le processus de maturation avance. Le
coach le sait, il a confiance dans le modèle d’Hudson. Son calme, sa détermination et sa
sérénité rassurent le client.

À un moment Bernard a envie de jeter en vrac toute sa vie antérieure, de


plaquer le boulot, l’argent, la belle vie matérielle pour ne vivre que d’amour
et d’eau fraîche. Mais Bernard sait qu’il doit gagner sa vie. Il y a quatre
enfants à élever au foyer. Bernard et le coach reprennent alors la liste des
priorités de vie, ils explorent tous les possibles en les comparant à ces
nouvelles priorités. Il se dégage rapidement qu’un emploi dans une
communauté de communes pourrait lui convenir. En tant qu’ancien
fournisseur, Bernard connaît parfaitement le métier du traitement des eaux
et les méthodes commerciales qui sont utilisées. Il a également tout à fait
conscience que ses valeurs prioritaires sont désormais l’humain et que
gagner de l’argent ou un projet sont des nécessités mais plus des buts
comme autrefois. Fort d’un carnet d’adresses bien fourni, il prospecte.
L’opportunité se présente rapidement. Une agglomération recherche un
directeur des services techniques chargé des services des eaux, de
l’assainissement, et du patrimoine bâti. Et en plus, c’est tout à côté de son
nouveau domicile. On ne pouvait mieux rêver ! Il passe les entretiens, est
embauché. Il exerce maintenant un métier qu’il connaît bien au service de la
population cette fois-ci, et non plus au service d’un actionnaire avide de
dividendes. Il habite à dix minutes de son lieu de travail et non plus à
quatre-vingt kilomètres comme avant. Certes il a perdu en salaire. Mais la
qualité de vie et le sens donné à ses actions est pour lui incomparablement
supérieur à la baisse de rémunération.
Bernard a quarante-sept ans et sourit à la Vie.

LE CAS « YVAN »

Yvan est fils d’agriculteur. Mal à l’aise dans son milieu familial, il cherche à
échapper par tous les moyens à l’emprise de son entourage. À dix-sept ans
il se retrouve sans domicile fixe, erre ici ou là en quête d’un sens à la vie
qu’il ne trouve pas. Une assistante sociale lui parle d’Emmaüs. Cette
association fondée au sortir de la guerre par un prêtre, l’abbé Pierre,
accueille des personnes laissées sur le bas-côté par la société. Dans un
bâtiment appelé « communauté », ces hommes et ces femmes vivent
ensemble, récoltent les objets dont les gens ne veulent plus et les revendent.
Cet argent permet de faire vivre la communauté et de reverser une partie de
ces revenus à des personnes encore plus pauvres. « Pourquoi pas » se dit
Yvan après sa rencontre avec l’assistante sociale. Il prend alors le chemin de
la communauté Emmaüs la plus proche et sonne à la porte. Écoutons son
témoignage.
Alors je suis rentré chez Emmaüs et j’ai commencé par trier des cartons. Le boulot était dur,
mais la gamelle était sûre !

Étape 2 (débuter le projet). Les encadrants et les autres compagnons de la


communauté montrent à Yvan comment faire.

Et puis je me suis bien plu. Il y avait de la chaleur, on était logé. Il n’y avait pas que le
boulot, il y avait aussi l’ambiance et la solidarité. Après les cartons, je me suis proposé pour
faire un peu de réparation sur les machines à laver et les frigos. J’avais appris à bricoler
chez mes parents à la ferme, et je me débrouillais pas mal avec mes mains. En plus, ici on
m’a fait confiance. Je n’étais plus un moins que rien, j’étais quelqu’un qui existait et qui était
utile. Ça c’est enthousiasmant !

Étape 3 (faire fructifier le projet). Grâce aux signes de reconnaissances


abondants et spécifiques de la part de son entourage, la résilience se met en
œuvre.
Un jour en me levant – je m ‘en souviendrai toujours – je me suis dit soudain : « non, quand
même, je vais pas faire ça toute ma vie ! ».

Étape 4 (remise en question soudaine). Dans une communauté Emmaüs,


les responsables et les encadrants sont formés pour accueillir ce genre de
remise en question. Avec Yvan, ils prennent le temps de discuter, d’explorer
ensemble les raisons de cette lassitude. C’était la première fois de sa vie
qu’Yvan était écouté et entendu dans ses incertitudes, tout en continuant à
être accueilli inconditionnellement pour ce qu’il était, c’est-à-dire un
Homme.
J’étais triste et parfois en colère contre le responsable. D’autres fois je ne savais plus quoi
faire ni penser. J’avais l’impression qu’il n ‘y avait pas d’avenir pour un jeune ici.

Étape 5 (deuil). Ces sentiments mélangés qui se bousculent et alternent


brusquement sont accueillis sereinement par les responsables. Ils ne
cherchent pas à raisonner Yvan, ils continuent à l’accueillir tel qu’il est avec
ses côtés valeureux et ses côtés déplaisants.

À la communauté j’ai rencontré un bénévole. On a parlé, il m’a écouté. Il m’a aidé à faire le
point et voir ce que j’avais déjà réalisé dans ma vie. Je ne me rendais pas compte de tout ce
que j’avais déjà fait !
Étape 6 (faire le point). Sans émotions particulières, tout en gardant une
certaine distance émotionnelle avec Yvan, ce bénévole a su poser clairement
les choses. Ce bilan lucide et objectif a permis à Yvan de remobiliser sa
pensée.

Pendant quelques semaines, je me suis senti bien. J’étais calme. Je crois que la discussion
avec le bénévole m’a fait prendre conscience que j’étais un gars bien. Alors pour la première
fois de ma vie, j’y ai cru. Ça fait du bien de se sentir comme ça !

Étape 7 (se poser, savourer). Les encadrants savent qu’Yvan a besoin de


temps pour consolider sa propre estime. Ils savent aussi que la vie est
mouvement, et que dans quelque temps, Yvan aura besoin d’une nouvelle
activité, d’un nouveau projet.

C’est alors que j’ai commencé à m’investir davantage dans la communauté. Avant j’étais
plutôt consommateur, mais là, je me suis engagé davantage avec les autres gars. J’ai
organisé des sorties le week-end, j’ai fait partie de la commission qui s’impliquait sur le
projet de la communauté. Car on doit agrandir les locaux, bâtir une nouvelle salle des ventes.
Tout ça c’est excitant, surtout quand tu vois les travaux avancer !

Étape 1 et suivantes. Yvan se lance dans de nouveaux projets. La roue de


la vie tourne, celle des réalisations également.

Et puis un jour, je me suis dit que je ne pouvais plus vivre comme ça toute ma vie :
compagnon d’Emmaüs… Alors je me suis mis à douter de tout. Je crois que j’ai déprimé.
Mais au bout de six mois j’ai senti que quelque chose germait en moi. Je ne savais pas trop
dire quoi, mais je sentais bien que c’était important, et tout nouveau. J’en ai parlé au
responsable qui m’a écouté. Il m’a dit que j’étais normal, que je n’étais pas dépressif, et que
de temps en temps dans la vie, ça arrive ces moments-là. Ça m’a un peu rassuré, mais quand
même j’étais pas à l’aise.

Étape 8 (doute et maturation).

Ça a duré pas mal de temps. Parfois j’allais bien, parfois je replongeais et je doutais. Mais
petit à petit, j’ai pris conscience que ce qui était le plus important dans la vie, c’était de vivre.
ça paraît tout simple à dire, mais c’était fort en moi. Je sentais que ça venait du plus profond
de moi, que c’était Moi.

Étape 9 (changement de priorités). Le responsable de la communauté a


senti que le cas d’Yvan dépassait ses compétences. En tant que responsable
chez Emmaüs, il faut être très polyvalent : en gestion, en management, en
finance, en vente, en relations publiques, en social, etc. Ce responsable a eu
la sagesse de connaître les limites de ses compétences. Il a fait appel à un
coach professionnel qui a accompagné Yvan à revisiter ses priorités.

Pendant des mois et des mois, on a parlé avec mon coach et mon responsable. Il y a eu des
aller et retour, des périodes de doutes et des périodes d’espoir. Comme un aller et retour
permanent. Parfois, c’était deux pas en avant et un pas en arrière ; parfois, c’était l’inverse.
Et puis je me suis décidé, j’ai fait le pas. Et maintenant je suis en formation pour devenir
responsable de communauté Emmaüs. Je sais ce que « donner » veut dire. Je sais ce que
« recevoir » veut dire. Aujourd’hui, je veux vivre ces mots et contaminer de ma fureur de vivre
ceux que je croiserai sur mon chemin !

Étape 10 (réinventer son futur).

LE CAS « JULIE »

Quelquefois les parents peuvent aider leur enfant en utilisant le modèle


d’Hudson. Voici un exemple de coaching parental avec le cas de Julie.
Avec leurs trois enfants, deux garçons et une fille, les parents de Julie ont
beaucoup voyagé durant leurs vacances. Adeptes du « home exchange », la
famille partait chaque année pendant deux ou trois semaines dans un pays
du monde. Ils échangeaient leur maison, logeant dans l’habitation d’une
famille étrangère tandis que cette famille prenait possession de leur maison
en France. Ils ont ainsi découvert l’Allemagne, l’Italie, la Hollande, les
États-Unis et l’Irlande.
Julie, la dernière de la fratrie, a baigné dans ce milieu ouvert sur d’autres
horizons. Est-ce pour cette raison que vers treize ans elle parle d’un projet à
ses parents : passer un an aux États-Unis pour découvrir la vie d’une
adolescente américaine ? Treize ans, c’est un peu jeune pour laisser sa fille
partir aussi loin et aussi longtemps. Mais l’idée fait son chemin. On en parle
en famille, les deux frères aînés donnent également leur avis.
En famille, on parle du projet, on l’évoque, on le triture : étape 1 du cycle.

À quinze ans Julie entre au lycée. L’envie mûrit, le projet prend forme.
Ensemble, Julie et ses parents étudient la faisabilité. Ils l’invitent à se
renseigner auprès d’un organisme réputé qui organisent des programmes de
placements internationaux. Elle glane les informations, les transmet à ses
parents qui étudient avec attention – et un brin d’inquiétude – l’évolution du
projet. Julie en parle également à ses professeurs car elle va manquer une
année de lycée français, ce qui équivaut à un redoublement dans notre
système éducatif. À son grand étonnement, c’est sa professeure d’anglais
qui est la plus réticente. Pourtant elle-même originaire d’Irlande, elle
cherche à persuader Julie de rester en France. « Tu vas perdre un an ! Et
puis à ton âge c’est long une année entière loin de ses parents. » Bien sûr,
on en reparle en famille. Ses parents écoutent Julie, écoutent ses doutes, ses
questionnements et l’argumentation de sa professeure. « Tu sais que
l’association demande à ce que les parents ne visitent pas leur enfant sur
place. Tu sais également que tu devras faire des efforts pour t’insérer dans
une famille qui t’accueille, qui a ses propres modes de vie et qui ne sont pas
les nôtres ». On laisse mûrir quelques semaines.

L’étape 1 est bien mûrie dans son principe. Un peu d’étape 2 s’invite dans la réflexion avant
la décision finale. Le fait d’en parler à l’extérieur montre des aspects du projet qu’on
n’imaginait pas. Les parents-coachs ne donnent plus beaucoup de poisson à leur « cliente »,
mais lui fournissent une canne à pêche pour qu’elle trouve elle-même d’autres informations
précieuses. Les coachs ont conscience que l’autonomie d’un enfant est un processus et non un
état acquis et à conserver.

Même s’ils sont un peu inquiets, au fond d’eux-mêmes les parents sont
fiers de leur fille. Le délai ultime approche. Il faut maintenant se décider.
Julie veut-elle partir en septembre prochain ?
C’est oui ! Alors les parents entament les démarches qui leur incombent.
De son côté elle informe les copains et les copines que l’année prochaine,
elle ne sera pas dans leur classe, qu’elle sera loin et ne pourra plus faire
d’activités avec eux. Bref, qu’elle s’en va. Le dossier est expédié à
l’organisme d’échange, et chacun attend fébrilement de savoir où et chez
qui Julie passera sa prochaine année scolaire. Le 6 août un courriel est
envoyé à maman : Julie sera accueillie à Cheyenne dans le Wyoming, chez
Jessica et Alain qui ont trois filles (vingt-et-un, quinze et quatorze ans) ainsi
que quatre chiens et deux perroquets. Elle sera scolarisée à la High School
de Cheyenne. Aussitôt Julie et ses parents se précipitent sur Internet pour
prendre connaissance de ce nouveau centre du monde.
Il reste maintenant à organiser les formalités administratives et prendre
rendez-vous avec les autorités du pays pour obtenir le visa. Les cerbères de
l’ambassade américaine impressionnent Julie. Ses parents lui expliquent les
raisons culturelles de telles précautions. Elle a apporté les photos d’identité
qu’elle a pris soin de réaliser selon les normes exigées. Seule au guichet de
l’Ambassade, elle répond aux questions des fonctionnaires américains. Elle
veut son visa, elle veut les fameux formulaires DS-2019 et I-797C qui lui
ouvriront les portes des États-Unis, elle veut y aller !
Quelques jours plus tard elle reçoit une réponse positive de l’Ambassade
avec le visa et les formulaires sus-nommés qui seront impérativement à
présenter à l’aéroport de Roissy au moment de l’embarquement. En
attendant, les parents de Julie vaquent à leurs occupations habituelles
pendant qu’elle commence sa tournée des adieux.

L’étape 3 est centrée sur l’action. Plus ou moins conforme au plan conçu à l’étape 2, les
coachs et la cliente s’attendaient à procéder aux réajustements nécessaires et indispensables.
Les parents coachs n’en sont pas à leur première sortie extraterritoriale et savent qu’un certain
nombre d’aléas émaillent les voyages.

Cependant ils ne s’attendaient pas à la surprise suivante.


Le 25 août, la veille du départ, maman rassemble tous les documents à
présenter à l’aéroport. Mais le formulaire DS-2019 reste introuvable. La
mère s’inquiète, le père s’énerve. La fille est en pleurs. On retourne la
maison, on fouille partout : rien. Le stress est monté d’un cran. Le DS-2019
a disparu. Alors à 21 h 30 maman-coach téléphone au numéro d’urgence de
l’association pour connaître la démarche à suivre. Papa-coach rassure sa
fille (tout en actionnant puissamment sa respiration ventrale pour faire
baisser son propre niveau d’anxiété). Julie est paniquée et se décompose de
seconde en seconde. Le stress familial est à son comble. Mais le président
de l’association se montre rassurant. « Présentez-vous demain à l’aéroport,
j’y serai, je tacherai d’arranger les choses. » Quelle nouvelle bienvenue !
Tout le monde part se coucher sans trouver le sommeil.
Dans la nuit, maman se lève, cherche entre deux documents et retrouve le
fameux formulaire. Elle réveille sa fille, la famille est debout, en joie !
Le lendemain, papa (pas coach du tout) accompagne sa fille à Roissy, la
serre dans ses bras et la regarde s’envoler… Il la reverra dans dix mois,
c’est long, il ne retient pas ses larmes.

L’étape 4 scelle la fin d’un projet tout en permettant qu’un nouveau advienne.
Le coach – pardon, le père – entame l’étape 5. La composante « sensibilité » de sa personne
ne l’a jamais dérangé. Elle fait partie intégrante de sa masculinité au même titre que sa
composante « solidité ».
Après un rapide bilan, les parents et la fille se reposent des préparatifs (étape 7) avant
d’entamer le cycle « dix mois aux États-Unis ».

De retour en France, Julie poursuit ses études au lycée tout en se


questionnant sur son avenir. La carrière de journaliste la tente. Ses parents
l’aident à réfléchir à son plan d’action, à peser ses chances de réussite dans
telle ou telle voie.
Elle se décide à passer les concours pour des études de Sciences
Politiques. Ses parents l’amène aussi à considérer la « MEilleure SOlution
de Rechange en cas d’Échec », la MESORE. L’exploration n’est pas facile
car Julie n’envisage pas d’autres options que Sciences Po. Mais les parents-
coachs ne se laissent pas dévier par l’obstination de leur cliente. Ils
présentent les statistiques de réussite à leur fille qui finit par se rendre
compte que d’envisager une solution de rechange n’est pas synonyme
d’échec. Julie se renseigne. Non pas que les études de Droit l’enchantent,
mais l’Université de Manchester en Angleterre a noué un partenariat avec
l’Université de Droit de Cergy-Pontoise. Une double licence, française et
anglaise, assortie d’un Master français en Droit des affaires est à la clé. La
première et la troisième année se déroulent à Manchester, les deux autres à
Cergy-Pontoise.

Nouveau projet, nouvelle étape 1. Puis nouvelle étape 2. Julie est un peu plus âgée et surtout
beaucoup plus mûre. Même si les enjeux pour la cliente sont importants, les aspects
émotionnels ont déjà été travaillés lors du cycle précédent. Les coachs s’appuient sur le
niveau de maturité de leur cliente.

C’est hélas, la solution de rechange qui dut être adoptée. La première


année se déroule au mieux. Par Skype, les parents de Julie partagent avec
elle sa joie de découvrir la vie estudiantine. Bien qu’elle prenne rapidement
conscience qu’en Droit, légalité et légitimité ne sont pas synonymes, la vie
dans cette université cosmopolite et le bain de la langue anglaise lui
plaisent. La seconde année se révèle beaucoup plus compliquée. Alors que
l’enseignement outre-Manche est essentiellement basé sur des cas pratiques,
les cours ex cathedra des Maîtres du Droit français ne conviennent pas à
Julie. Vers le mois de novembre les premiers signes de découragements
apparaissent. Les parents endossent à nouveau leur costume de coach. Julie
veut tout arrêter et démissionner en cours de chemin. On explore alors les
raisons profondes de ce découragement. Julie se rend compte que la voie du
Droit est, et a toujours été un choix par défaut. D’autant qu’elle ne supporte
plus la condescendance de ces enseignants-juristes qui, pour la plupart,
n’ont jamais pratiqué et ne font que redire ce qu’ils ont lu dans les livres ou
les articles de leur spécialité. Julie est touchée dans ses valeurs que sont la
justice et l’intérêt général.
Fort de cette prise de conscience, soutenue mentalement par ses parents-
coachs, elle décide de poursuivre tout de même cette année difficile. De
retour en Angleterre pour la troisième année, Julie retrouve ses amis,
l’ambiance, et une ville qu’elle apprécie. Le Droit ne la passionne toujours
pas, mais le mercredi, jour où elle exerce dans un cabinet d’avocats, elle
apprend le métier et la façon de tenir compte des règles pour défendre un
dossier. De retour en France, elle se pose une question sur un autre
engagement. En effet elle anime depuis plusieurs années un groupe de
jeunes et cette activité lui demande du temps pour organiser les réunions,
informer les parents, prévoir les budgets et les lieux de camps pour l’été.
Va-t-elle continuer cette année ? Elle en parle à ses deux coachs préférés. Ils
l’aident à prioriser ses priorités. Elle se rend compte qu’au-delà de la charge
supplémentaire que lui demande cette activité, c’est surtout l’idéologie
véhiculée par les instances nationales qui la dérange. Elle est de moins en
moins en accord avec les principes et les valeurs qu’on lui demande de
transmettre à ces jeunes. La fin de l’année approche. Que va faire Julie l’an
prochain ? À vingt-deux ans, elle a bien envie de s’émanciper et de gagner
sa vie. Mais elle n’a aucune envie d’exercer dans le Droit. Que faire alors ?
On réfléchit en famille, on explore toutes les pistes, on revisite le passé et
les moments où Julie a eu plaisir à exercer telle ou telle activité. Une piste
se dessine. Julie reconnaît que la langue anglaise lui plaît, que l’animation
des jeunes (élever plus haut, comme elle dit) la stimule. Alors pourquoi pas
professeur d’anglais ? Cette idée crée la surprise dans son entourage. Celles
et ceux qui ont une mauvaise opinion du métier d’enseignant essayent de la
dissuader. Mais Julie a deux bons coachs. Ensemble ils explorent les
avantages et inconvénients du métier. Avec leur aide, elle élabore un plan
d’action pour préparer le concours. Julie découvre qu’il existe un Master
spécialisé dans la préparation au concours pour ceux qui n’ont pas suivi la
filière classique d’études de littérature anglaise. Lors de la journée porte
ouverte à la Sorbonne, la première question que la professeur responsable
du module pose à Julie est « Vous connaissez les jeunes ? ». Mais aucune
question sur ses compétences en langue anglaise. Julie est séduite par cette
approche et s’inscrit. Elle renonce alors à s’occuper du groupe de jeunes
pour se consacrer exclusivement à sa priorité : le concours pour devenir
professeur d’anglais. Elle passe une année passionnante à la Sorbonne. La
littérature et la pédagogie l’enchantent.
En juin elle passe le concours et est reçue brillamment. Toute la famille
est en joie ! Durant l’été qui suit, Julie se repose et prend du bon temps. Elle
savoure et laisse diffuser en elle une certaine félicité qu’elle n’a pas goûtée
depuis plusieurs années.
Julie a vingt-quatre ans quand elle fait sa première rentrée scolaire.
Partie II
AIDER : UNE COMPÉTENCE
À DÉVELOPPER
13
LES OUTILS DE BASE DU COACHING

ANALYSER ET TRAVAILLER LA DEMANDE

Le coach doit-il croire ce que le client lui rapporte ? Entre ce qu’on dit au
coach et ce qu’il constate lui-même, il y a autant de différence qu’entre une
photo et la réalité. La réalité nous est donnée par nos rencontres avec les
vraies personnes. La photo nous est rapportée d’un voyage que notre client
a fait lors de ses rencontres avec des personnes. Basons-nous sur nos
observations plutôt que sur les clichés, aussi bons soient-ils ! Par contre, ne
boudons jamais les informations que notre client nous donne sur son
environnement. Elles sont précieuses et nous procurent souvent de belles
explications sur les causes du dysfonctionnement.

Demander : « faire savoir que l’on souhaite quelque chose. »1

Deux couples de demandes


En coaching, la demande peut s’organiser autour du couple
contenu/processus ou du couple explicite/implicite2.

Contenu/Processus
Le contenu, est ce qu’une caméra peut enregistrer en son et en image. Le
processus, c’est ce qui se passe en nous. Quand on voit un film par
exemple, le contenu est ce que n’importe qui voit et entend de l’écran, mais
le processus est l’émotion provoquée par cette scène.
Deux questions méritent d’être posées par le coach pour discerner dans la
demande ce qui est de l’ordre du contenu et ce qui est de l’ordre du
processus :
• « Que veux-tu atteindre comme résultat de cet entretien ? » (question
sur le contenu) ;
• « Qu’attends-tu de moi ? » (question sur le processus).

Explicite/implicite
L’écart entre la demande explicite et la demande implicite – ou latente – est
constamment évolutif. Tout l’art de l’accompagnant consiste à repérer où
placer le levier de ses interventions dans l’espace ambigu entre ces deux
pôles. Le coach va-t-il se cantonner strictement à la demande explicite ou,
par son attitude ou ses questions, va-t-il faire émerger la demande latente
qu’il perçoit intuitivement ?

Plusieurs formes de demandes3


L’anti-demande
L’anti-demande est une demande contradictoire. Il peut s’agir de la
demande de quelqu’un qui vient faire un coaching contre sa volonté. Cette
personne fait appel à un coach sur ordre de son supérieur hiérarchique mais
au fond, désire inconsciemment que l’opération échoue.

La demande touriste
Il s’agit de la situation où la personne n’est « pas contre » la demande mais
n’a pas de réelle motivation. Par exemple : « J’ai fait appel à vous parce
qu’on m’a suggéré de le faire. Mais je ne suis pas très convaincu que cela
puisse me servir car je ne suis pas sûr qu’il y ait vraiment un problème.
Mais puisqu’on m’a dit de vous voir, je viens vous voir… »
La contre-demande, ou demande plaignante
Cette forme de problématique est subtile et particulièrement frustrante à
vivre pour le coach qui se trouve en face de quelqu’un qui n’arrive pas
à formuler sa demande, qui a du mal à élaborer sa propre pensée. La parole
du coach est nécessaire pour arriver à savoir ce que veut le client. En face
de chaque suggestion du coach, le coaché s’exprime en disant : « Non, ce
n’est pas tout à fait ça… ». Le coach doit discerner que ce processus, aussi
frustrant soit-il, reste nécessaire pour la personne aidée, et n’est pas dirigé
contre lui. Il s’agit seulement pour la personne coachée d’un mode
d’élaboration de sa propre demande, faite avec l’aide d’une personne
ressource.

La demande confuse
Elle est souvent le fait de quelqu’un qui est envahi par un problème et qui
n’arrive pas à le formuler, tout en étant dans un rapport psychologique avec
soi-même qui n’est pas clair.

La demande ambivalente ou paradoxale


Il s’agit d’une situation où la personne veut une chose et son contraire. Par
exemple : « Monsieur le coach, aidez-moi à me débrouiller tout seul. »

La demande explicite
Par opposition à la demande latente, la demande explicite est souvent la
première formule par laquelle le client s’adresse au coach. Mais très
souvent cette formulation explicite cache en fait d’autres niveaux de
demande qui ne peuvent émerger qu’après une description du réel bien
spécifique et bien contrôlée.

La demande latente
Il s’agit du niveau préconscient ou inconscient de la demande explicite.
Cette dernière ne pourra émerger qu’avec le temps. Une clarification
du contexte, du problème et du besoin de l’aidé par le coach permettra à ce
dernier de transformer sa demande latente en demande explicite.
Rendre la personne « demandeur »
Une bonne façon de « clientéliser » la demande et de rendre le coaché
demandeur est d’explorer avec lui les différentes facettes du problème. Pour
cela, on utilise la méthode SPBDN.
• S : Situation. C’est la description factuelle de la situation. Les
questions aidantes du coach sont les suivantes :
– De quoi s’agit-il ?
– Comment vois-tu la situation ?
– Qui, Quoi, Où, Quand, Comment, Combien ?
– Description factuelle, impersonnelle.
• P : Problème. C’est la difficulté que pose au coaché l’écart entre la
situation actuelle et la situation souhaitée. En effet, chacun est
propriétaire d’un problème : c’est mon, ton, son, notre, votre ou leur
problème.
• B : Besoin. Le besoin est un manque ou une prise de conscience d’un
manque.
• D : Demande. Vers qui va-t-on prendre le risque de demander, donc
le risque d’essuyer un refus, voire un rejet ?
• N : Négociation. Pour trouver un accord entre le coach et le coaché, il
faut engager des négociations. Ce sera « Oui, si… » et « Non, parce
que… ».

OBSERVER, ÉCOUTER, COMPRENDRE ET SENTIR


LE CLIENT

L’observation est la base de tout bon travail de coaching. Elle doit primer
sur la technique. Le talent du coach réside dans sa manière de collecter et
d’évaluer les données.

Les signaux forts, faibles, et pertinents


Le coach fait la différence entre trois types de signaux qui résultent de
l’observation : les signaux forts, les signaux faibles et les signaux
pertinents. Les signaux forts sont des symptômes flagrants d’un
dysfonctionnement. Ils sont facilement perçus par un grand nombre de
personnes.

Exemple
Une perte soudaine de motivation, une période de tristesse anormale sont des signaux forts de
l’étape 5 du cycle d’Hudson.

Il faut une écoute plus aiguisée pour percevoir les signaux faibles. Ce
sont des processus ténus, lisibles par des gens qui ont une grande pratique.
Ces signaux faibles concernent toute une série de sensations qui
proviennent du corps : elles sont fines et, la plupart du temps, on ne les
remarque pas.

Exemple
Un lapsus, une hésitation, un silence.

Les signaux pertinents sont ceux qui ont un lien avec la vie de la
personne aidée. Ils sont signifiants et concernent le sens. Le coach
expérimenté sait repérer ces signaux pertinents, qu’ils soient forts ou
faibles.

Exemple
Démarrer une activité avec enthousiasme et dynamisme est un signal fort et pertinent pour
l’étape 2.
Hésiter un peu, procrastiner légèrement, oublier ses rêves sont des signaux faibles et
pertinents de l’étape 1.

Le vrai talent du coach réside dans sa manière de collecter et


d’interpréter ces signaux. Il doit donc choisir un modèle ou une théorie qui
lui dira ce qu’il doit observer. L’expérience et la pratique le renforcent dans
son habitude. Il attribue alors de la pertinence à certains signaux, moins à
d’autres.

Trois écoutes, un cerveau, deux oreilles et un cœur


Notre façon d’écouter n’est jamais parfaite, elle laisse toujours à désirer.
Écouter se fait au moins à deux niveaux : le contenu, et la manière dont les
messages sont émis. Le coach écoute les propos de son client et la façon
dont il le dit. Écouter, c’est aussi repérer les écarts entre le contenu et le
processus, entre le fond et la forme.
D’un côté, les yeux du coach observent les comportements non verbaux,
comme dans un film muet. De l’autre, les oreilles du coach écoutent et
enregistrent les propos de la bande son. Le cœur du coach réagit
émotionnellement à ce qu’il voit et entend. Quelquefois, les mots et les
expressions sont en contradiction avec les gestes. Ou bien les mots et les
gestes sont en contradiction avec l’expression. Il est même possible que les
trois soient en contradiction.

Exemple
Le client prend inconsciemment le coach pour son père. Inconsciemment, il a peur que le
coach le gronde, comme le faisait son papa. Alors sans s’en rendre compte, tout en disant
« oui », le client tourne la tête de droite à gauche puis de gauche à droite, dans un signe qui
veut dire « non ». Cette incongruité est une manifestation de l’écart entre la façon (non) et les
propos (oui).

Écouter passe aussi par le silence du coach. L’écoute passive a toute son
utilité. Pourquoi le coach interviendrait-il sans cesse ? Il n’est pas là pour
« faire » ou « penser » à la place du client. Son rôle est d’aider à rétablir un
équilibre dans les énergies du client. Parfois il est souhaitable de ne rien
dire tout en montrant physiquement une grande attention. Savoir écouter
dépend davantage de ce que le coach a en tête que de ce qui se passe à
l’extérieur.
À d’autres moments le coach pose une question, mais son interlocuteur
répond à côté, comme s’il reprenait la question, la déformait, élaborait une
nouvelle question et… répondait à cette dernière. Un tel phénomène est
appelé redéfinition.

Exemple
Coach : Que feras-tu si le programme ne se passe pas comme prévu (question pour
l’étape 2) ?
Client : Oh ! Mais tout est prêt. Ne t’inquiète pas !

La question portait sur quoi, la réponse est donnée sur quand.


Incongruences et redéfinitions sont des signes précieux pour le coach.
Elles indiquent que la question dérange le cadre de référence du coaché et
touche ses résistances psychologiques. Or on ne peut s’appuyer que là où ça
résiste. Il est sain que le coach et le coaché recherchent les résistances pour
avancer.

Écouter et reformuler
Reformuler activement, c’est reprendre les propos, les idées ou les
sentiments apportés par le client.

Exemple
« Si je comprends bien ce que tu me dis, c’est que tu ne sais plus vers où aller en ce moment.
C’est bien cela ? » (Question du coach pour l’étape 8.)

Classiquement on distingue trois catégories de reformulation dont


chacune a un objectif différent.
• Dans la reformulation magnétophone le coach répète mot pour mot
ce qu’il a entendu. Cette reformulation est utile en cas d’étonnement
ou d’utilisation d’un jargon. Mais il n’est pas souhaitable de
l’employer trop souvent. Cela donne la désagréable impression d’un
interrogatoire policier.
• Quand le coach reprend l’idée générale de son interlocuteur, il
reformule synthétiquement. Le grand mérite de cette reformulation
est d’aider l’autre à nommer ce qui est difficile pour lui. Synthétiser,
c’est prendre le risque d’interpréter. Mais l’expérience montre que
cette reformulation fait avancer la prise de conscience. Pour cela, le
coach se concentre sur ce qu’il entend tout en laissant gambader son
intuition. Le mariage de la raison et du cœur permet alors aux bons
mots d’émerger.
• Quand le coach tente une reformulation sur les besoins pressentis :
« En fait, ce dont tu as besoin en ce moment, c’est… » et que son
interlocuteur valide ces besoins, le déclenchement de la prise de
conscience est puissant. Cette reformulation demande beaucoup
d’empathie et une grande connaissance de la nature humaine.

Sensations, pensée, sentiments et intuition


La nature a doté l’humain de quatre outils : les sensations, la pensée, les
sentiments et l’intuition. Pour nous orienter, nous avons une fonction qui
constate que quelque chose est : la sensation. Une seconde fonction qui fait
réfléchir sur ses sensations et établit ce que c’est : la pensée. Une troisième
fonction qui décide si cela nous convient ou non et si nous désirons
l’accepter : le sentiment. Enfin une quatrième fonction qui indique d’où
cela vient et où cela va : l’intuition.
Pour les coachs dotés d’un solide bagage théorique, faire circuler un peu
d’air dans cette psychologie à compartiments est une grande qualité. La
respiration est source de vie.

LA FORCE DU VERBE :
LE BON MOT AU BON MOMENT

La parole est l’outil principal du coach. Il exerce son influence par le choix
des mots. En utilisant l’espace de parole comme un lien sécurisant et
contenant, le coaché peut vivre une expérience de déconstruction-
reconstruction qui ouvre une voie de sortie aux répétitions névrotiques et
mortifères. C’est ce qu’on appelle la résilience.

Signal ou parole ?
Les linguistes font une distinction entre l’échange de signaux et l’usage des
paroles. En effet, l’utilisation d’un signal a pour objectif le déclenchement
d’un comportement chez un ou plusieurs individus.

Exemple
Le feu rouge et le feu vert déclenchent l’arrêt puis le démarrage des voitures. Le coup de
klaxon déclenche un sursaut de vigilance chez celui à qui on reproche sa lenteur. Le
destinataire est censé s’exécuter au plus vite.

C’est pourquoi une relation où la communication se ferait exclusivement


par signaux aurait obligatoirement un caractère de violence. L’univers des
paroles est tout autre. La première fonction des paroles est la prise de
contact et la mise en place d’un lien : « S’il vous plaît, monsieur, pardon,
madame… » En klaxonnant pour pouvoir doubler quelqu’un, nous
l’éliminons symboliquement de notre route. En prononçant les mots
« Madame, Monsieur, S’il vous plaît », nous lui signifions qu’il est plus
important pour nous d’être en bonne intelligence avec lui que de le
dépasser. Nous lui signifions que sa dignité équivaut à la nôtre, et que nous
cherchons à créer un lien. Ce qui ne m’empêche pas, ensuite, de le dépasser.
Or, naturellement, seules les personnes en chair et en os peuvent se
parler. Les voitures ne peuvent qu’émettre des signaux. Dès que nous
prenons le volant, nous perdons la parole. Quand nous entrons en rapport
avec autrui en produisant du signal, nous installons un univers de violence.
Pour nous retrouver l’un et l’autre, il faut que, tous les deux, nous nous
arrêtions.

Exemple
Le coach – Je te propose qu’on s’arrête un instant sur cette situation. Tu es d’accord ?
Le client – Mouais… Si tu y tiens.
Le coach – Si j’y tiens ? Que veux-tu dire par là ?

Le mot, le verbe, l’outil et le sens


La mise en mots n’empêche pas toujours les frictions. Celles-ci débutent
souvent par des écarts de définition. Aller vers l’autre, c’est comprendre le
sens de ses paroles et sa vision du monde. Définir c’est exercer un pouvoir
sur la pensée de l’autre. Les mots réclament de l’attention. Parler, c’est
donner un sens à une idée, faire que ce sens déclenche une action ou une
pensée chez l’autre. Quand le coach parle, quand il écoute les mots de son
client, il se demande quelle intention consciente ou non, expriment ces
sons. Les phrases du coach, ses questions, ses demandes, ses
reformulations, sont chargées de sens. Le coach tourne sept fois la langue
dans sa bouche avant de dire ses « bons mots ».
Le mot le plus important d’une phrase est le verbe. Quelquefois on
entend des phrases sans verbe, comme dans cet exemple d’un coaching en
étape 1 : « Les études après le Bac ». Or c’est le verbe qui donne vie, qui
donne sens à la phrase. « Quelles études dois-je faire après le Bac ? » ou
« Quelles études j’ai envie de faire après le Bac ? » sont deux phrases qui
n’ont pas le même verbe et n’ont donc pas le même sens.
Dans la plupart des cas, le choix des questions est guidé par la situation
présente et par l’objectif visé par le coach. Avec tact, il s’appuie sur les
phrases prononcées par le coaché, et s’intéresse particulièrement au verbe.
Exemple
Coaché – Comprenez-moi.
Coach – Que voulez-vous que je comprenne de vous ?
Coaché – Que j’ai des difficultés avec mes équipes.
Coach – Vous voulez que je comprenne que vous avez des difficultés. (Le coach reformule en
insistant sur le verbe « comprendre » plutôt que le nom « difficulté ».) De quelle façon
pouvez-vous m’aider à comprendre que vous avez des difficultés ?

À travers ses questions, le coach entraîne la flexibilité mentale du coaché.


Quand une idée nouvelle élargit l’esprit de l’Homme, il ne reprend jamais
sa dimension première. Il est alors plus facile pour le coaché de trouver lui-
même les solutions pour piloter son avenir.
Le substantif indique un contenu, le verbe un processus. Le coach a
plutôt intérêt à travailler les verbes. « Je pense que vous devriez apprendre
à dialoguer avec votre épouse » au lieu de « Je pense que votre couple a
besoin de dialogue ». Le coach ne doit pas dire à son client qu’il a besoin
d’un dialogue. Ce mot n’est qu’une étiquette sur un phénomène. Le coach
peut simplement suggérer à son client ce qu’il peut ou doit faire.
Face à son client, le coach est souvent amené à s’interroger. Quelle
question lui poser ? Comment la formuler pour l’aider à changer ? Il arrive
que le coach soit tellement frustré de ne pas comprendre qu’il n’ose même
plus poser de question. C’est dommage et fort rare, heureusement !

S’ENTRAÎNER À COACHER AU QUOTIDIEN

Un exercice assez facile d’apparence mais qui s’avère plus délicat qu’il n’y
paraît, est d’utiliser et de combiner habilement la reformulation et les
questions ouvertes.
Une question ouverte commence par comment ou pourquoi. Elle incite le
coaché à fournir des détails dans sa réponse. Le coach peut également
rebondir sur les propos du coaché en lui demandant : « C’est-à-dire ? ».
Toutes ces techniques de questionnement ouvert visent à ce que le coaché
ouvre son cœur et sa pensée.
Les questions ouvertes s’opposent aux questions fermées qui
commencent par « Qui, Où, Quand, Combien ». Les réponses à ces
questions sont pauvres et ne sont souvent que d’un faible apport pour le
coach. De même les questions interro-négatives : « Ne crois-tu pas que… ?
Ne pensez-vous pas plutôt que… ? » Ce type de questions est à bannir pour
un coach qui se considère comme tel.
Voici une série d’échanges de type coaching et qui n’utilise que les
questions ouvertes et la reformulation.

Faire surgir le problème à partir des questions ouvertes


Le coaché – J’aimerai te parler d’une chose qui me pèse sur le cœur en ce moment.
Le coach – C’est-à-dire ?
Le coaché – En fait j’hésite pour mes vacances entre partir trois semaines cet été ou
seulement deux semaines, et en garder une pour l’hiver.
Le coach – OK. En fait ce que tu me dis c’est que tu hésites entre deux possibilités.
Le coaché – Oui, c’est ça.
Le coach – Et alors ?
Le coaché – Alors j’aimerai avoir ton avis.
Le coach – Mon avis sur quoi précisément ?
Le coaché – (Silence). Le problème c’est que je rêve d’aller en Amérique du Sud, et quinze
jours c’est trop court.
Le coach – Oui sans doute. Et alors ?
Le coaché – Alors si je pars trois semaines cet été, je ne pourrai pas aller au ski une semaine
avec ma copine dans l’appartement de ses parents. Et elle tient vraiment à faire sa semaine
d’hiver dans ce trois-pièces où elle a ses habitudes.
Le coach – Donc tu te trouves dans un dilemme entre deux choix possibles et agréables. C’est
ça ?
Le coaché – Et bien, je suis partagé.
Le coach – Partagé ?
Le coaché – Oui. Partagé entre l’envie de lui faire découvrir l’Amérique et l’envie de faire du
ski avec elle.
Le coach – Si je reformule le fond de ce que tu me dis, c’est que ce n’est pas tellement un
dilemme entre trois semaines de vacances ou deux semaines plus une, mais plutôt entre deux
destinations. L’une où c’est toi qui proposes : l’Amérique du Sud. L’autre où c’est elle qui
prend le lead : les sports d’hiver.
Le coaché – Je ne l’avais pas vu comme ça. Ah ! ben ça alors ! Et c’est vrai ce que tu me dis.
En plus – je viens de m’en rendre compte à l’instant – on se chamaille souvent pour savoir ce
qu’on fera le week-end. ça tourne presque toujours autour de « on va là où je l’ai décidé » ou
« on va là où tu l’as décidé ». Merci mon coach pour cette révélation !
Le coach – De nada4.
DÉCRIRE LA RÉALITÉ, IDENTIFIER
LES SYMPTÔMES, EN DÉDUIRE LES PROBLÈMES

Si le client évoque une difficulté qu’il rencontre, il n’est pas certain que le
coach comprenne exactement ce qu’a voulu dire son client. Tous deux
peuvent avoir des représentations différentes d’un même mot car ils ont des
cadres de références distincts. Cependant, même s’ils ne se comprennent
pas en totalité, il est probable qu’ils s’entendent au moins partiellement.
Pour trouver un terrain d’entente encore plus large, il est nécessaire que les
deux protagonistes prennent de la distance et se placent en un point situé
hors du temps et de l’espace d’où l’on puisse communiquer. On transforme
alors la perception subjective des mots en réalité objective. C’est au coach
que revient la responsabilité de choisir telle ou telle définition de la réalité
qui soit compréhensible pour le client. Pour ce faire, l’usage des métaphores
est précieux.

Les métaphores

Les mots ne sont que des métaphores. Maison, house, , casa, domus
désignent une même réalité. Seule la forme métaphorique change. Le sens
reste le même. Quand le coach parle de projet, de deuil ou de valeur, il
n’évoque que des métaphores, pas des réalités ! Attention à ne pas tomber
dans le piège qui consiste à prendre une métaphore pour une réalité.
Attention à ne pas dire au coaché « Vous me parlez de valeurs ou de
croyances ? ». Car la réalité est beaucoup plus complexe que la simple
métaphore. Cependant, réfléchir aux questions suivantes peut aider le coach
à progresser dans l’accompagnement de ses clients : « À combien de
métaphores je me réfère quand mon coaché me dit « qu’il a un problème
avec son collègue » ?
On repère vite les bonnes métaphores. Elles sont plaisantes, illustratives,
bien construites et facilitent la prise de conscience.

Symptômes et problèmes
Le coach débutant se précipite souvent sur les propos du coaché en
confondant le symptôme et le problème : « Docteur coach, mon équipe va
mal, que faire ? » Le coach chevronné sait replacer le problème dans son
contexte : « De quoi s’agit- il précisément ? Qu’observe-t-on dans les
faits ? »

Transmission à revoir
Une association caritative héberge des personnes en difficulté. Les équipes de nuit succèdent
aux équipes de jour. La responsable du personnel dit au coach : « Les équipes de jour et de
nuit n’arrivent pas à s’entendre. Au moment de la passation des consignes, le soir et le matin,
l’équipe sortante ne donne qu’un minimum d’informations à l’équipe arrivante. Il s’en suit
des problèmes de transmission d’informations. »

Nous avons trop souvent la mauvaise habitude de prendre le symptôme


comme un défaut, et d’en accuser le client. Les symptômes ne sont que des
comportements, pas des défauts. Ils indiquent un problème. Le médecin
n’accuse pas son patient de tousser. Il cherche les causes de cette toux avec
des outils de diagnostic. Le symptôme est un comportement annoncé par le
client. Le coach interprète le symptôme avec une grille théorique, pour en
déduire le problème.
14
LE RÔLE ET LA POSTURE
DU COACH

« Demande conseil à qui se corrige soi-même. »


Léonard de Vinci

L’aidant, le coach, est une personne humaine significative pour la personne,


le coaché ou l’aidé. Le coach est une personne humaine qui permet au
coaché d’accomplir ce qu’il a à accomplir dans chacune des étapes du cycle
d’Hudson. Ainsi le coaché se pénètre-t-il des bienfaits et ressources à
chaque étape, avant de passer avec bonheur à l’étape suivante.
Pourtant, même si une partie de nous a envie de changer, une autre partie
peut en décider autrement et résister quand même. Cette résistance est un
désir non conscient de maintenir un équilibre chèrement acquis, qui a eu des
bienfaits autrefois, et que l’on n’est pas prêt à brader facilement. Le coach
devra être sensible à cette part d’affect. Il devra respecter la manière dont le
coaché fait face aux situations de la vie tout en l’encourageant dans son
propre désir de grandir. C’est l’une des raisons pour laquelle l’aidant ne
devra pas contraindre l’aidé à changer contre son gré. Cela ne ferait que
raviver et renforcer les résistances au changement du client.

LE POIDS DE LA CONFIDENTIALITÉ
Plus le coach avance dans son travail avec le coaché, plus il a connaissance
d’informations confidentielles. La question à se poser est la suivante. « À
qui la confidentialité est-elle utile ? ». Cette réflexion aide le coach à
discerner ce qui est protecteur pour lui-même et pour son client.
Ces informations confidentielles sont souvent entourées de secret. Or, le
secret est sacré ! La détention de telles informations confère à son
propriétaire un respect, voire une vénération.
Conscient du rôle sacré qu’on lui attribue, le coach détenteur
d’informations confidentielles est souvent la cible de stratagèmes
inconscients de la part du client : « Ah ! Vous qui savez tout sur moi, comme
vous êtes formidable ! » ou bien « Essayez toujours de me tirer les vers du
nez ! » ou encore « Ah quel malheur, cette famille ! ». À son corps
défendant, le coach devient un élément pivot de la dynamique
intrapsychique du client. Il est vu comme détenteur d’une partie du
mystérieux secret qui lui cause tant de malheur, et la tentation est forte d’en
faire un bouc émissaire.
Même si l’intervention est temporaire, le coach ne peut rester hors de la
sphère émotionnelle et affective du client, tel un observateur neutre et non
impliqué. Chacun sait qu’il est là pour accompagner le changement de la
personne, et les attentes sur lui sont fortes. Pour cette raison, il est important
de cerner très tôt les zones où le coach aura à garder la confidentialité, et les
zones qui pourront être partagées éventuellement avec des tiers. Ces
différentes clauses de confidentialité doivent figurer explicitement dans le
contrat commercial de coaching s’il y en a un.
La confidentialité est une preuve de respect pour les personnes.

AVANT TOUT, NE PAS NUIRE

La première préoccupation de tout soignant est de ne pas blesser, de


n’intervenir qu’au bon moment et à l’endroit nécessaire en coupant
proprement et avec une connaissance claire de ce qui risque d’être lésé à
l’intérieur. Le coach est conscient des risques possibles qu’il fait courir à
ses clients en révélant des espaces de dysfonctionnement sans préparation
appropriée. Il est préférable de ne pas fouiller avec insistance les zones
traumatiques avant qu’il ne soit prêt à aller au bout de ce qu’il engage et
qu’il soit certain que le coaché puisse survivre à cette démarche et en sorte
grandi.
Le bon coach a un profond respect pour les peurs conscientes et
inconscientes du coaché. Car si elles constituent aujourd’hui une résistance
qui l’empêche d’avancer dans sa transformation intérieure, ces peurs ont été
autrefois une façon de se protéger face à de réelles menaces. Comme tout
organisme vivant, l’individu a une tendance naturelle à la stabilité, à la
prospérité et à la santé. Le développement sain des relations ayant été
entravé, le premier devoir du coach est de retirer ces obstacles pour que la
personne se rééquilibre et progresse naturellement dans sa voie. Le second
devoir est de localiser les zones saines dans la dynamique du coaché, de les
nourrir et de renforcer leur potentiel.

COACHER OU CONSEILLER : LA DIFFÉRENCE

Ces deux rôles sont distincts bien qu’apportant de l’aide l’un et l’autre. De
façon imagée, on peut dire que le coach se tient juste derrière le client et
l’aide à trouver son chemin. Alors que le conseiller se place juste devant et
lui demande de suivre.
Le rôle essentiel du coach est de faciliter le changement en modifiant la
façon de faire de l’aidé et en l’aidant à prendre conscience des situations.
Le conseiller, quant à lui, est un expert compétent dans un domaine
particulier : il dit ce qu’il faut faire. Il conseille sur le contenu, alors que le
coach facilite les processus. Le conseiller est en position haute sur le
contenu et les processus relationnels, alors que le coach reste en position
basse sur le contenu et en position haute sur le processus. Le coach aide le
client à préciser ses intentions et à développer sa vision des choses.
Coachs débutants, prenez garde ! Dans votre vie, il vous est arrivé
souvent d’avoir de bonnes réponses à des situations complexes. Plus ou
moins consciemment, vous aurez tendance à vouloir appliquer à votre client
ce qui a bien fonctionné pour vous autrefois.

À chacun ses solutions


Amélie a quarante ans et une vie bien remplie de joies et de peines. Elle a perdu son père à
l’âge de dix-huit ans, s’est débrouillée pour mener ses études supérieures tout en travaillant
pour subvenir à ses besoins. Elle a connu le chômage et a su rebondir. Avec son compagnon,
ils ont deux enfants adolescents qui suivent leur chemin cahin-caha. La vie de couple n’a pas
été un long fleuve tranquille, mais les discussions facilitent la vie commune.
Aujourd’hui Amélie est coach. Elle sait qu’elle a tendance à trop conseiller ses clients en
fonction de ce qu’elle-même a vécu. En supervision elle s’est rendue compte de cette
inclination. Alors elle veille à laisser davantage de liberté à ses clients dans la recherche de
leur propre solution. Et quelquefois Amélie est surprise : elle n’aurait pas agi ainsi, mais la
solution apportée par son client fonctionne bien pour lui. Comme quoi, nous sommes
vraiment tous différents.

Aider n’est pas sauver


Paradoxalement le premier conseil à donner à un aidant c’est : ne donne pas
de conseil ! Mais ne pas donner de conseil ne veut pas dire ne rien faire.
C’est à travers les actions qu’il mènera que le coaché découvrira lui-même
les bénéfices de son changement. Le coach est là pour proposer des actions
transformatrices et chaque étape du cycle d’Hudson en possède.
Le second conseil serait de faire la différence entre aider et sauver.
L’aidant a tendance à jouer le rôle de sauveteur lorsqu’il est en relation avec
des gens affaiblis, désemparés, impuissants, ou incapables momentanément
de prendre eux-mêmes leur vie en charge. Le sauveteur peut croire qu’il
aide, alors qu’en réalité il renforce inconsciemment la faiblesse et
l’impuissance du coaché. Afin d’éviter ce piège du sauvetage, il est bon
d’explorer les quatre questions qui permettront au coach d’identifier une
telle situation :
1. Est-ce que je fais pour quelqu’un quelque chose que je n’ai pas
envie de faire, sans le lui dire clairement ?
2. Est-ce que je commence par aider quelqu’un et que je découvre
ensuite qu’il (elle) m’a laissé la plus grande partie de la tâche ?
3. Est-ce que je vole à son secours alors qu’il n’a vraiment rien
demandé, voire qu’il m’a demandé de ne pas l’aider ?
4. Est-ce que j’ai toute la compétence pour aider l’autre comme il le
faudrait ?
Si vous avez répondu oui à trois ou quatre de ces indices, vous courrez le
risque de sauver, mais pas d’aider. Alors gare aux conséquences et au retour
de flammes !
ÊTRE BIENVEILLANT, MAIS PAS TROP

La posture de coach exige une certaine bienveillance à l’égard du coaché.


Être bienveillant, c’est veiller au bien. Mais la bienveillance – ou plutôt son
usage excessif – peut causer plus de mal que de bien au coaché comme au
coach. Croire que la bienveillance suffit à protéger l’autre est
catastrophique. C’est oublier que l’ambivalence fait partie de nous, qu’elle
se cache, s’enfouit, se tapit au plus profond de notre personnalité. La
bienveillance sans un accord clair entre les deux parties manque
cruellement de protection. C’est risqué pour les deux, pour l’aidant comme
pour l’aidé.
Bien veiller, oui ! Mais pas que ça, car l’aidant doit aussi être capable
d’une grande fermeté, voire d’une implacabilité quand il propose à l’aidé de
faire telle ou telle action. Cette demande bienveillante peut, et doit être
également inflexible. Le coach sait pourquoi il demande cela à l’autre. Il a
conscience de ce qu’il demande et la volonté du coach ne doit pas être
détournée par les pièges inconscients que le coaché lui tend. Le coach doit
se doter d’une solidité intérieure qui s’appuie sur une formation rigoureuse,
une visite (douloureuse) de ses propres ambivalences, une clarification
permanente des questions philosophiques et spirituelles qui guident ses pas
et donnent du sens à ses actions. L’aidant non professionnel peut également
s’inspirer de cette pratique suivie par les coachs professionnels.
Alors méfions-nous d’un aidant qui n’aurait jamais connu de blessures,
qui n’aurait pas cicatrisé les plaies faites à son orgueil et à sa dignité. Il ne
pourrait accompagner honnêtement une personne dans toutes les étapes du
cycle. Un bon aidant doit faire un véritable travail de transformation
intérieure, poursuivre en permanence son chemin de réalignement psycho-
spirituel, et l’humilité ne sera pas la moindre de ses vertus.

FAUT-IL FAVORISER LE RÔLE OU LA PERSONNE ?

Il est toujours tentant pour un coach de penser que le coaché a besoin de


quelques séances de psychothérapie. Mais cela reviendrait à constater que
notre coach a brûlé toutes ses munitions en ce qui concerne
ses connaissances de la dynamique des personnes. Si c’est tout ce qu’il est à
même de proposer, il ferait mieux d’arrêter avant de commencer. Le bon
coach répond à son client : « Je pense que vous n’êtes pas du tout bizarre.
Ce n’est pas une question de comportement sain ou malsain de votre part,
mais une question de procédures qui fonctionnent, et de procédures qui ne
fonctionnent pas. »1

La notion de rôle
Le coach devra donc intervenir sur deux plans : celui de l’individu (le Moi)
et celui du rôle2. Le rôle est une attitude, un ensemble de comportements
que l’individu montre dans certaines circonstances de la vie sociale : rôle de
père, de mère, de patron, d’employé, d’automobiliste, de piéton, etc. Le rôle
et le Moi sont deux manifestations de la même personne. Le plus souvent,
elles sont confondues : « Je suis ce que je fais ; je suis ce que tu vois de
moi. ». Quelquefois elles sont décalées, et alors difficiles à réconcilier :
« Comment puis-je avoir tort puisque je suis diplômé de cette école
prestigieuse ! ». Or les relations entre personnes ne se produisent pas entre
des inconnus qui se rencontrent par hasard au milieu du désert. Elles se
développent dans des contextes sociologiques qui ont pour cadre des
institutions : la famille, l’entreprise, la commune, la nation, le clan, etc. Ces
relations sont ainsi très dépendantes de la culture particulière où elles
apparaissent. Dans telle famille, les gens se font la bise le matin. Dans telle
autre, on se sert la main. Dans cette commune, les passants se saluent en se
croisant. Dans la commune voisine, les piétons s’évitent du regard. Toutes
ces relations qui paraissent évidentes quand on baigne dans une culture
façonnent inconsciemment notre vision du monde et notre façon de parler
des relations. Et pour parler il faut une langue.
Ce qu’on appelle une langue est une façon institutionnelle de nommer les
choses, la vie et le monde. La langue des banlieues n’est pas celle des
quartiers d’affaires ; la langue des adolescents n’est pas celle de leurs
parents. Quant à la parole, elle est encore différente de la langue. La parole
est essentiellement un acte individuel qui puise ses racines dans notre Moi.
Quand le coach rencontre le coaché, il se retrouve face au couple
« rôle/Moi ». Il doit donc diagnostiquer et distinguer ce qui dans la parole
du coaché relève du rôle et ce que cette même parole révèle du Moi.
Les rôles et les enjeux sont liés
Les rôles apparaissent chaque fois que des partenaires sont impliqués dans
un projet dans lequel l’un est actif (patron, client, enseignant, parent…) et
l’autre réactif (employé, commerçant, élève, fils ou fille de…). Ce projet
contient des enjeux qui sont ce que les partenaires peuvent gagner ou perdre
dans cette entreprise. Le coach professionnel peut gagner de l’argent, de la
réputation ou l’estime de ses clients. Il peut aussi perdre tout cela. Le
coaché peut gagner ou perdre en efficacité, en progression de carrière, en
sérénité. Le coach personnel, un parent par exemple, peut gagner en
quiétude quand son enfant avance dans la vie. Il peut perdre aussi en
tranquillité s’il voit son enfant choisir une mauvaise voie. Le terme
« mauvais » se rapportant bien entendu à la dimension culturelle du parent.
Quant à l’enfant, il peut perdre ou gagner en confiance en lui, en autonomie
ou en sérénité.
Les enjeux portés par les rôles s’expriment sous la forme de réussite ou
d’échec du projet, ou sous la forme de gagner ou perdre contre quelqu’un
lors d’une performance. Quant aux enjeux portés par le Moi, ils sont
d’ordre existentiel et s’expriment en termes d’être accepté ou rejeté, dénié
ou préféré, soigné ou négligé. Mais souvent ces deux catégories d’enjeux
sont confondues comme nous le montre l’exemple suivant rapporté par une
petite fille de cinq ans : « La maîtresse ne m’aime plus, elle m’a mis une
mauvaise note. »
Cette confusion entre les enjeux opérationnels (réussir son devoir, un
examen) et les enjeux existentiels sont fréquents. Cette confusion remonte à
l’enfance, avant l’âge de raison quand nous ne faisions pas encore la
différence entre ce que nous faisions et qui nous étions.
Il est important pour un coach de bien faire la distinction entre ces deux
catégories d’enjeux, surtout quand l’aidant est une personne proche de
l’aidé, son père ou sa mère, son manager ou son directeur. Un coach
extérieur sera toujours moins lié au projet professionnel de son client, et les
enjeux personnels et professionnels seront de fait beaucoup plus distincts.

Les rôles sont relatifs et sélectionnés à partir d’indicateurs de statut


Les signaux extérieurs, les facteurs périphériques à la relation (la tenue
vestimentaire, l’adresse prestigieuse du cabinet du coach, la décoration de
la salle d’attente), c’est-à-dire le décor, en disent long sur le rôle que veut
tenir le coach. Ils sont autant de messages adressés au coaché sur la ligne à
conduire et sur le rôle que le coach entend que le coaché joue. Tous ces
éléments de décor sont des indicateurs de statut qui renvoient au pouvoir de
la parole et à l’image de l’autorité. Le coaché se situe alors
« spontanément » dans l’espace par rapport à ces indicateurs. Si nous
sommes attentifs, nous nous rendons compte qu’au cours d’une même
journée, nous décodons ces signaux qui sont autant d’indicateurs de statut.
Nous nous apercevons que nous nous situons à des moments différents avec
la même personne, dans des positions relatives différentes. Même dans la
vie courante, nos rôles évoluent. Voici un exemple de la vie quotidienne.

Cloé endosse plusieurs rôles dans la journée


Cloé est une mère attentive au soin de sa fille, Lina, huit ans. Le matin au réveil, elle prépare
le petit déjeuner de sa fille (rôle de « mère aux petits soins pour sa fille »). À 8 h 20 elle
conduit Lina à l’école (rôle de chauffeur), puis file au bureau (rôle de salariée).
À 19 h 00 Cloé aide sa fille à apprendre sa poésie (rôle d’enseignante). À 21 h 30 c’est dodo
et un bisou sur chaque joue (rôle de « maman câlin »).

Ces positions relatives qui dépendent des signaux externes peuvent


changer plusieurs fois au cours du même entretien. L’analyste
transactionnel Alain Crespelle3 distingue trois positions relatives : la
position supérieure, égale et inférieure. Ces positions relatives sont
marquées par des indicateurs de statut tels que :
• les insignes de pouvoir : fortune, titres, fonction, sexe, insignes,
grades, rang, etc. ;
• les privilèges (ou handicaps) individuels : force physique, santé,
beauté, intelligence, sexe, etc. ;
• les privilèges (ou handicaps) socioculturels : condition familiale
ou sociale, niveau d’études, type de profession, train de vie, sexe,
type de loisirs, etc. ;
• les marques de savoir ou de savoir-faire : âge, expérience,
ancienneté, titres, diplômes, renommée, montants des revenus, etc.
Remarquons au passage que les indicateurs de statut n’ont pas la même
signification d’une culture à l’autre. L’âge, par exemple, est valorisé chez
certains peuples, moins dans d’autres.
L’âge, avantage puis handicap
L’âge mûr du coach a été un élément favorable au début de leur relation, mais s’avère un
handicap aujourd’hui car la jeune cliente aborde des sujets de vie totalement décalés par
rapport au vécu et à l’âge du coach, comme l’addiction des jeunes pré-adolescents aux jeux en
ligne.

Les interactions sont en positions relatives


Les interactions entre le coaché et le coach sont influencées par les
positions relatives décrites précédemment. Tout comme les transactions en
Analyse Transactionnelle4, les interactions peuvent être :
• Complémentaires et égales. Ce sont celles qui prévalent dans les
rapports de coopération. Elles sont commandées par des positions
relatives égales.
• Complémentaires inégales. Ce sont celles qui prévalent dans les
rapports de type hiérarchique. Par rapport à un projet donné, elles
s’établissent à partir de positions relatives inégales. À un moment
donné de la relation, l’un des partenaires se situe en position relative
inférieure (le subordonné) tout en situant naturellement l’autre en
position relative supérieure (le hiérarchique).
• Croisées. Ces interactions croisées peuvent être soit antagonistes si
elles démarrent de positions relatives supérieures toutes les deux,
soit bloquées à partir de positions relatives inférieures. Dans les
deux cas, les deux partenaires attendent que l’un prenne l’initiative
et que l’autre se cantonne à un rôle réactif. Ce contrat tacite de non-
affrontement entretient le malaise et l’inhibition.
De toutes les interactions, ce sont les interactions complémentaires égales
qui sont les plus riches, aussi bien pour le nombre et la qualité des échanges
que pour les effets positifs entraînés chez les partenaires. Le coach est dans
un rôle actif lorsqu’il favorise l’autonomie et l’épanouissement du coaché.

Les changements de rôles provoquent parfois des changements


du Moi
Laissez-moi fouiller dans votre inconscient
Jean-Eudes est coach. Après des études de psychologie, il obtient un Master de coaching dans
une université prestigieuse. Il se forme également à l’hypnose aux États-Unis dans l’un des
meilleurs instituts. Il est également expert en EMDR5. Ses tarifs sont parmi les plus élevés de
la profession. Avec une adresse prestigieuse et une panoplie de diplômes longue comme le
bras, Jean-Eudes ne manque pas de client(e)s.
Michel a besoin d’y voir plus clair sur ce qui fait qu’il stagne dans son poste, qu’il n’arrive
pas à progresser alors que tous les clignotants objectifs de compétence sont au vert. Michel a
l’intuition que son handicap pourrait relever du psy. Il a pris rendez-vous chez Jean-Eudes. À
la quatrième séance, le coach propose à son client d’utiliser une technique d’hypnose très
« high level ». Le coach installe la relation, mais rien ne se passe comme prévu. Les
inductions hypnotiques restent vaines et le coach ne parvient pas à mettre son client en état de
transe. La séance doit s’arrêter, il est l’heure. Avant de partir, le client qui avait déjà quelques
doutes sur la compétence réelle du coach lui annonce que cette séance est la dernière. Le
coach prend alors une attitude offusquée, se cale dans son grand fauteuil en cuir noir, et lance
du haut de ses 1,85 m : « Cher Monsieur. Si vous ne me laissez pas accéder à votre
inconscient, comment voulez-vous que je travaille ! ».

En disant stop au coach, le client a croisé la relation, et le Moi du coach


est apparu sous sa facette dominatrice. Ce basculement de position relative
constitue un ressort dramatique puissant. Les dramaturges comme
Shakespeare ne se sont pas privés de l’utiliser.

Le décalage entre position relative et états du Moi


Il peut arriver cependant qu’il y ait décalage, et parfois même une impasse,
entre le statut indiqué par le « décor », et donc la position relative qui lui
correspond, et l’état du Moi activé6.
Conflit interne Parent/Enfant
Marie est une jeune coach de trente et un ans. Aujourd’hui, c’est sa première séance avec
Édouard, cinquante-huit ans, le regard bleu acier, et directeur industriel de quatre usines
d’armement. Marie se sent mal à l’aise. Elle n’arrive pas à donner le meilleur d’elle-même
dans ce premier entretien. Pourtant, malgré son jeune âge, cette pépite du coaching s’est
forgée en peu de temps une réputation hors pair. Le directeur lui, est étonné que la DRH lui
ait mis une gamine entre les pattes. Le coaching, c’est du sérieux !
Le fait d’être coach référencée dans cette entreprise indique clairement le niveau de
compétence de cette professionnelle. L’entreprise cliente lui a conféré le pouvoir d’orienter la
parole, et de guider ses séances de coaching comme elle l’entend à partir des méthodes
qu’elle maîtrise. Mais dans cette situation, face à un homme de l’âge de son père, travaillant
pour l’armement, Marie ne peut s’empêcher d’activer une partie de son Moi appelé Enfant
Adapté Soumis. Elle se place ainsi en totale incohérence avec son rôle institué.

Autre conflit interne Parent/Enfant


Sébastien est père de famille. Séparé de sa compagne, il garde leur fils un week-end sur deux
et la moitié des vacances scolaires. Mais à chaque fois, c’est l’enfer pour Sébastien. Kevin,
cinq ans, est un véritable tyran.
Cet exemple est l’illustration d’un décalage inverse à l’exemple précédent. L’enfant est
généralement en position relative inférieure et le père en position relative supérieure. Mais
quand Sébastien perçoit de la violence, il perd sa position relative supérieure face au petit roi,
et toute autorité disparaît.

Le coach doit être très attentif à l’articulation entre ces rôles et les états
du Moi pour aider à dépasser le point de blocage du coaché.

HUMILITÉ ET TRAVAIL : QUEL COACH ÊTES-


VOUS ?

Que l’on soit coach certifié, parent ou intervenant social, un certain nombre
de questions sont propres à la dimension de coaching. Le parent se
demande : « Que se passe-t-il chez mon enfant ? Qu’est-ce que j’ai à faire
de bien ou à éviter pour élever correctement mon enfant ? ». L’intervenant
social se pose d’autres questions que celles des parents, car le contexte,
l’environnement et les enjeux sont différents : « Que se passe-t-il chez la
personne que j’accompagne ? Qu’est-ce qu’exige mon rôle d’intervenant
social pour aider cette personne à s’insérer dans la société ? »
Un coach a besoin d’outils à la fois fins et puissants pour analyser tous
les détails de la personne de son client de façon à ne laisser aucune zone
d’ombre dans l’accompagnement de ce dernier. Mais au-delà de ces
considérations professionnelles, le coach ne peut pas éviter d’être amené à
se connaître davantage sur le plan humain. Chaque personne possède son
propre stratagème inconscient pour obtenir les signes de reconnaissance
dont il a vitalement besoin. Le coach amateur n’en a pas conscience alors
que le coach professionnel évite, dans la mesure du possible, de jouer au
persécuteur, à la victime ou au sauveteur. Pour cela il va régulièrement se
faire coacher pour prendre conscience des projections, et d’une manière
générale, de tout ce que son inconscient active lors des interventions avec
ses clients. Alors que le coach amateur ou débutant croit que son
inconscient est inactif, le coach professionnel sait que ses interventions sont
en grande partie pilotées par son inconscient.
Le coach n’est pas tout puissant et ne peut faire sortir tous les individus
de tous leurs aveuglements. La modestie, l’acceptation de ses propres
limites personnelles, des limites du métier de coach et des limites imposées
par le client forcent le coach à courber la tête devant l’implacable réalité des
faits. Ce métier de coach oblige à une certaine humilité. Tout acteur de
théâtre qui utiliserait n’importe quel procédé ou technique nécessaires pour
donner l’impression qu’il est Hamlet est un acteur authentique. Tout acteur
qui utilise n’importe quel procédé ou technique nécessaires pour donner
l’impression qu’il est un bon professionnel est dans le faux. De la même
manière, le coach qui utilise n’importe quelle technique nécessaire pour
aider ses clients est un coach authentique. Celui qui utilise une quelconque
technique dans le but de démontrer qu’il est un bon coach ou que sa théorie
est la meilleure est dans le faux. Dans la pratique, ceci distingue les coachs
qui privilégient la guérison des coachés des coachs qui se préoccupent avant
tout de leur réputation, des honneurs et de leur chiffre d’affaires.
Au-delà de la technique se trouve une notion qui peut aider le coach à se
repérer : l’éthique.

L’ÉTHIQUE ET LE COACH

Les forces à l’œuvre dans la psychologie d’une personne sont


moralement neutres. La dynamique de ces forces est étrangère au domaine
de la moralité. Elle est naturelle et sans morale. Par contre l’attitude du
coach se doit de respecter les règles de conduite admises et pratiquées dans
la culture de son client.

Qu’est-ce que l’éthique ?


L’éthique traite de la conduite morale. Elle se réfère aux valeurs alors que la
déontologie est un ensemble de règles, de pratiques et devoirs qui régissent
une profession et les rapports entre ces professionnels et leurs clients ou le
public.
L’éthique est une notion directement liée à la morale. Elle est complexe
et difficile à appréhender. Le coach peut retenir cependant que l’éthique doit
toujours prévaloir sur l’utilité et même sur le plaisir.

Éthique passe avant Utilité, qui passe avant Plaisir.


Alors que l’éthique se réfère aux valeurs, l’utilité se rapporte à l’objectif.
Quant au plaisir, il est en lien avec les signes de reconnaissance dont nous
sommes tous avides.
Prenons le cas d’un accompagnement et posons-nous ces questions :
• À quelle(s) valeur(s) je fais référence en tant que coach pour justifier
d’une intervention éthique ?
• Quelle(s) technique(s) vais-je utiliser ?
• Quel genre et quelle dose de signes de reconnaissance je cherche à
obtenir dans cette intervention de coaching ?
L’un des principes éthiques est d’affirmer que nous sommes toujours
responsables de ce que nous faisons et de ce que nous n’évitons pas. Pour
cette raison, il est utile que le coach partage son analyse et dévoile son point
de vue avec le coaché. Il évite ainsi de projeter sa solution sur le cadre de
référence du client. Même si le coach se sent compétent pour une
intervention, il a intérêt à se questionner sur ce qu’il doit faire, et pas
seulement sur ce qu’il peut faire.
Par manque de principe éthique, il risque de ne pas avoir conscience du
dommage qu’il peut causer. Il suffit qu’un acte soit perçu comme
dommageable par le coach pour éviter de le faire. Affirmer : « Je ne le fais
pas, parce que ça pourrait être dommageable », ou « Je ne le fais pas parce
que c’est mon principe » est une attitude éthique. Mais il est non éthique de
dire « Je ne le fais pas, parce que ça ne se fait pas ». S’abstenir d’avoir un
effet thérapeutique sur une personne humaine est finalement non éthique car
les interventions du coach se veulent correctrices et guérissantes. Cela
rappelle le principe d’obligation de porter secours à toute personne en
danger.
Quand un coach intervient, il peut se poser la question suivante : « Est-ce
que je dirai ce que je dis à mon client, devant mes pairs, devant mon propre
coach, ou devant le chef de mon client ? » Ces questions aident le coach à
garder une certaine réserve, à ne pas être trop spontané, et à maintenir une
posture de vigilance permanente.
Questions d’éthique à nos amis coachs :
• Au-delà de la technique, quand le coach sert son client, il sert un
projet politique. Êtes-vous toujours conscient de cela ? Vous arrive-
t-il de refuser une mission car le projet politique de l’organisation
n’est pas en accord avec vos valeurs personnelles ? Comment le
dites-vous ? Comment le communiquez-vous ? Comment
communiquez-vous vos valeurs, pour que le client fasse appel à
vous pour l’aider à développer un projet dont ses valeurs sont
proches des vôtres ?
• Ami coach, que décidez-vous si une organisation fait appel à vos
bons et loyaux services, alors qu’elle œuvre pour des causes que
vous réprouvez ?
• Que faites-vous quand vous savez qu’il serait nécessaire d’intervenir
au niveau personnel chez le client pour résoudre le problème de
l’organisation ?
« Agis comme si tes actions devaient être un principe universel »7.
Aujourd’hui malheureusement, force est de constater que le monde ne
manque pas tant de chartes éthiques que d’individus pour les faire respecter.
Code éthique de l’Association européenne d’Analyse Transactionnelle
(EATA)
Les directives déontologiques ci-dessous ont été établies sur la base des
codes éthiques et toutes autres déclarations pertinentes de l’EATA et de
l’ITAA (Association internationale d’Analyse Transactionnelle). Elles informent
les membres des associations affiliées des critères éthiques qu’ils sont tenus
de respecter dans la pratique de leur profession. En outre, elles informent le
public du comportement éthique attendu de la part des membres de l’EATA.
Le code éthique complet est disponible sur le site de l’EATA :
http://www.eatanews.org/eata-2/ethics/
Toute association affiliée peut suspendre la qualité de membre ou le contrat
de formation d’un de ses membres, dans le cas où son comportement ne
respecterait pas les principes fondamentaux énoncés dans les directives ci-
dessous et/ou s’il ne se montre pas disposé à changer ce comportement
après avoir été confronté par des collègues ou par l’association affiliée.
Les codes éthiques des associations affiliées et régionales peuvent comporter
des exigences supplémentaires. Si c’est le cas, leurs membres doivent
connaître toutes celles qui les concernent.
DIRECTIVES DÉONTOLOGIQUES DE L’EATA
A. Un membre de l’EATA reconnaît la dignité de tous les êtres humains. Il
est attendu des membres de l’EATA que leur conduite ne constitue jamais
ni un appui, ni une approbation passive, pour toute forme de discrimination
ou d’oppression.
B. Les membres de l’EATA s’abstiendront en public de toute déclaration ou
insinuation malveillante susceptible de porter atteinte au statut, à la
compétence ou à la personnalité d’autres membres. Par ailleurs, toute
critique objective et adressée directement à la personne est bienvenue.
C. C’est la responsabilité protectrice fondamentale de tout membre de
l’EATA d’offrir le meilleur des services possibles à son client et d’agir de
manière à ne lui causer aucun préjudice, ni intentionnellement ni par
négligence.
D. Les membres de l’EATA doivent s’efforcer de développer chez leurs
clients la conscience de leur dignité, de leur autonomie et de leur
responsabilité personnelle, ainsi qu’un fonctionnement reflétant cette
position.
E. L’exercice éthique de l’Analyse Transactionnelle implique d’établir avec le
client une relation contractuelle basée sur un consentement informé. Le
client et le membre de l’EATA doivent tous deux avoir la compétence
nécessaire au contrat et l’intention de l’accomplir. Si un client ne peut pas
ou ne veut pas agir de manière responsable dans le cadre de cette
relation contractuelle, le membre de l’EATA doit résoudre cette relation
d’une manière qui ne cause aucun préjudice au client.
F. Un membre de l’EATA n’exploitera sa relation professionnelle avec un
client en aucun domaine, et ce compris, mais non limitativement, les
domaines financiers et sexuels. Les relations sexuelles entre membres
de l’EATA et leurs clients, supervisés et/ou personnes en formation chez
eux, sont interdites.
G. Un membre de l’EATA s’abstiendra d’établir ou de maintenir un contrat
professionnel dans le cas où d’autres activités ou relations entre lui et ses
clients risquent de compromettre la bonne marche du contrat
professionnel.
H. La relation professionnelle entre un membre de l’EATA et un client est
définie par le contrat. Cette relation prend fin avec lui. Néanmoins,
certaines responsabilités professionnelles perdurent au-delà de la fin du
contrat, et notamment, mais non exclusivement :
• L’observation du secret professionnel selon l’accord antérieur,
• L’interdiction de toute forme d’exploitation de l’ancienne relation,
• La disponibilité à assurer un suivi si nécessaire.
I. Les membres de l’EATA exerceront leur activité et offriront leurs services
à leurs clients et/ou aux personnes en formation chez eux dans le cadre
des lois en vigueur dans I’État et/ou le pays où ils exercent. Ils sont tenus
de les connaître et d’assumer vis-à-vis d’elles leur pleine responsabilité.
J. En établissant un contrat professionnel, les membres de l’EATA
assument la responsabilité de fournir au client un environnement adéquat.
Ceci inclut, par exemple, de préciser la nature de la confidentialité qu’il
respecte, d’assurer comme il se doit la sécurité physique du client selon
l’activité concernée, et d’obtenir son consentement informé pour
d’éventuelles procédures à risque important.
K. Si un membre de l’EATA réalise que l’existence de conflits personnels ou
de problèmes d’ordre médicaux risquent de compromettre sa capacité de
mener à bien la relation contractuelle, il devra soit mettre un terme au
contrat d’une façon professionnellement responsable, soit veiller à ce que
le client dispose de toute l’information nécessaire pour décider de
maintenir ou non le contrat en toute connaissance de cause.
L. Les membres de l’EATA acceptent la responsabilité de confronter un
collègue dont ils ont de bonnes raisons de croire qu’il agit de manière non
éthique, et à défaut de solution, d’en référer à l’instance professionnelle
compétente.
M. Les membres de l’EATA qui appliquent l’Analyse Transactionnelle dans
l’exercice de leur profession feront montre d’un engagement actif pour se
maintenir à jour dans leur champ de spécialisation par des activités telles
que : assister à des conférences et à des séminaires, rédiger et lire dans
leur domaine professionnel, et se tenir continuellement informés en ce qui
concerne les intérêts des associations d’AT.

ACCEPTER D’ÊTRE OBSERVÉ


Le coaché va observer le coach en cherchant à se faire une opinion sur lui.
Ce dernier peut-il faciliter les choses en se comportant naturellement et
avec dignité au lieu de tenter de se cacher derrière un visage impassible ?
Dans les temps anciens, les guérisseurs ou chamanes portaient un
masque, signe reconnaissable de leur rôle. Actuellement, les coachs
n’utilisent pas d’objets-masques. Ils se présentent en tant que personnes
réelles ou en tant que persona. Toujours est-il qu’avec ou sans masque, le
coach n’est pas vu tel qu’il est, mais pour ce qu’il représente. C’est
pourquoi l’attitude du coach doit être guidée par la responsabilité et
l’engagement. Les critères esthétiques sont rarement évoqués en coaching.
Ils ont pourtant un fort pouvoir attractif sur de nombreux clients et ils
offrent une motivation intéressante pour changer les relations. Le coach a
tout intérêt à donner l’exemple en prenant soin de lui, en étant
convenablement habillé et élégant, sans se montrer pédant dans ses
manières et dans ses discours : une juste distance et une pleine
responsabilité
Pour le coach, s’engager signifie prendre des décisions et suivre certains
principes d’actions permettant d’atteindre un but. Le coach doit montrer à
ses clients l’exemple de quelqu’un qui a un travail à accomplir et qui ne se
laisse pas perturber par les aléas. Ceci peut parfois susciter consternation et
émerveillement auprès d’un bon nombre de coachés. Mais ont-ils déjà
rencontré quelqu’un qui sache ce qu’il faisait et qui l’accomplissait d’une
manière méthodique et constructive, ne se laissant pas perturber par les
nombreuses sollicitations et poursuivant sa marche implacable vers son
objectif ?

S’APPUYER SUR DES THÉORIES

Le monde est complexe. Complexité est un mot bouche-trou pour signifier


bien souvent qu’on n’entend rien au sujet8. Chacun fait de la complexité
comme Monsieur Jourdain faisait de la prose. Très vite, on se rend compte
que la connaissance des parties additionnées ne peut conduire à la
connaissance du tout. Pourquoi ? Parce qu’un système produit des
émergences et les émergences sont des propriétés qui naissent de
l’organisation du tout. La difficulté est donc de sortir d’un système de
pensée qui tend à disjoindre ce qui est associé. Et c’est cela qu’il faut
commencer à appeler complexe. La conscience de la complexité conduit le
coach à des actions qui tiennent compte du contexte. Autrement dit,
complexifier, c’est humaniser ses interventions.
Bien qu’il soit difficile, même pour les spécialistes en méthodologie
scientifique, de faire une distinction rigoureuse entre les modèles, les
concepts et les théories, une connaissance solide des dynamiques
intrapsychiques est aussi importante pour un coach que la connaissance de
la physiologie pour un médecin. Il y a bien longtemps déjà que l’Homme
invente des théories. Toutes ne sont pas d’égales valeurs. La numération
romaine et la numération arabe désignent la même chose. Pourtant, la
multiplication en chiffres arabes est beaucoup plus facile à faire (5 × 10
= 50) qu’en chiffres romains (V × X = L). La théorie est importante car elle
sert à interpréter et à prévoir. Elle codifie les faits observés. Elle permet de
comprendre la réalité et de prévoir un résultat. Elle donne sens aux actions.
Les modèles et les théories utiles répondent toutes aux six opérations
majeures que tout coach doit garder à l’esprit : observer, décrire,
comprendre, expliquer, prévoir et influencer. Tel est l’intérêt du modèle
d’Hudson.
Le coach ne se base pas seulement sur ses propres expériences d’homme
ou de femme, mais surtout sur sa connaissance théorique et son expérience
professionnelle. C’est toute la différence entre le bon sens et la compétence
professionnelle. La théorie est une source d’efficacité pour le coach. Il ne
faut pas s’en cacher devant le client. Celui-ci paye pour que le coach soit
puissant et efficace. Si le coaché remet en cause la théorie du coach, il lui
retire sa puissance. Alors affirmons-le : « Vous me payez pour que je sois
puissant, mais si vous remettez en cause mon cadre de références
théoriques, vous m’ôtez ce pour quoi vous venez me voir ». Quand le coach
fait un effort intellectuel, il traduit les faits par une théorie. Il passe du
niveau réel au niveau conceptuel.
Cependant, l’usage des théories et des modèles a ses limites. La seule
raison raisonnante est bien faible pour tout élucider. Quelle théorie pourrait
se vanter d’avoir la réponse définitive et absolue ? L’intellect est de toute
façon incapable de savoir quelque chose au-delà du modèle utilisé. Tout
vouloir dominer par la pensée est limitant. Cette domination vise un but
secret qui est de rassurer le coach quand celui-ci est dépassé par
l’entendement. L’intellectuel se réfugie derrière un nom, substitue le réel à
une formule. Il ne voit plus la réalité vivante, surprenante et unique de
chaque personne. La théorie le rassure mais l’éloigne de la vie.
La seule intellectualisation du phénomène par le coach n’aide pas les
personnes en difficulté. Elle doit être complétée par l’expérimentation,
c’est-à-dire la confrontation patiente avec le réel, et la mise en pratique des
soins à procurer. Ce deuxième degré n’est toujours pas l’ultime finalité. Car
il manque le cœur, c’est-à-dire le sentiment, qui donne à ce qui a été
compris valeur d’engagement. Le coach n’a pas à craindre ce monde bizarre
des sentiments. Bien au contraire, il doit en proclamer la nécessité comme
une ouverture vers un champ de transformation de la dynamique
intrapsychique du coaché. Cependant, la réalisation d’un coaching par la
voie du sentiment n’est pas un but en soi. Plus qu’une discipline, le métier
de coach relève de l’art !
15
LE DÉVELOPPEMENT PERSONNEL
ET PROFESSIONNEL DU COACH

Un coach consciencieux se prépare professionnellement et personnellement.


Professionnellement, il n’entreprend aucune mission sans être qualifié et
reconnu par des organismes de formation accrédités, à moins qu’il n’aille
régulièrement en supervision. Sur le plan personnel, il examine ses
motivations et se garde de céder à ses faiblesses ou d’exploiter celles des
autres.

LA SUPERVISION ET LA FORMATION

Le coach professionnel est formé et certifié par une école de formation


reconnue. Ce diplôme garantit aux clients un certain niveau de savoir et de
savoir-faire bien que la possession d’un diplôme n’exclue pas la formation
continue. Les théories qu’il aura abordées lui permettront d’élaborer un
diagnostic sûr et une stratégie d’intervention cohérente. Mais pour
développer sa compétence, il devra suivre régulièrement des supervisions.
La supervision est un temps de partage entre deux professionnels dont
l’un est plus avancé que l’autre. Le superviseur est un expert dans
l’accompagnement des coachs en exercice. Par des méthodes spécifiques et
dans une relation de relative égalité, il accompagne le supervisé dans sa
réflexion et l’aide à penser sur sa pratique. En supervision, on peut analyser
les raisons pour lesquelles on a des difficultés dans une mission de
coaching. On peut également exposer une mission qui a bien réussi. C’est
un excellent moyen de progresser car on modélise mieux quand on parle de
son excellence que de ses erreurs.
Les supervisions peuvent se faire en groupe entre un superviseur et
plusieurs coachs. On parle alors de supervisions collectives. Elles peuvent
aussi se dérouler individuellement entre le superviseur et le coach
supervisé. On dit alors qu’il s’agit de supervisions individuelles.
Ces séances de supervision sont l’occasion d’aborder plusieurs types de
sujets :
• revoir un point de théorie ;
• identifier une difficulté dans la mise en œuvre d’un point de théorie ;
• explorer l’éthique.
Le processus de supervision est un chemin d’individuation. Il aide la
personne à devenir un individu. Ce chemin se parcourt patiemment avec
persévérance et discipline. Mais le travail de différenciation est impossible
sans une relation avec un partenaire humain. Si le coach essaie de faire une
auto-analyse de ses fautes, cela reste sans effet. Car ce ne sont pas les fautes
elles-mêmes qui apparaissent, mais seulement la représentation qu’il s’en
fait. Au contraire, elles prennent un caractère de justesse lorsqu’elles
adviennent dans la relation à un autre être humain. C’est alors seulement
qu’elles peuvent être ressenties et reconnues dans leur véritable nature.

LES GROUPES DE PAIRS ENTRE COACHS

Un groupe de pairs est une réunion de plusieurs professionnels de même


niveau de compétences. En complète auto-organisation, sans leader désigné
de l’extérieur, le groupe partage ses expériences pendant quelques heures à
raison d’une fois par mois. Les coachs qui se réunissent en groupe de pairs
font tour à tour l’expérience des rôles de leader et de membres. Ces groupes
sont des espaces essentiels d’apprentissage. On y expérimente toutes sortes
de techniques. On peut tester une idée, une méthode. On peut se faire des
supervisions entre pairs, partager ses questionnements ses doutes, ses
expériences, et recevoir des signes de reconnaissance de collègues
bienveillants. Les groupes de pairs sont des moyens exceptionnels pour
toute personne qui veut développer ses compétences de coach.

LE DÉVELOPPEMENT PERSONNEL DU COACH :


POUR OU CONTRE ?
Confusion entre demande et besoin
Un coach débutant venait de décrocher son premier contrat ! Le diagnostic avait été posé et
partagé très chaleureusement avec le client. Celui-ci demanda au coach de l’aider à
« accompagner une phase de transition professionnelle ». Quelle aubaine se dit notre coach.
Voilà enfin ma compétence reconnue ! Et il se précipita sur ce chantier. Au bout de quelques
séances, l’ambiance changea, le ton du client se modifia. Des nuages s’amoncelèrent dans ce
beau ciel bleu.
C’est au cours d’une supervision que le coach comprit qu’il avait suivi son client sur sa
demande et pas sur son besoin. De telles erreurs sont fréquentes si on confond les demandes,
les besoins et les envies.

Dans le métier de coach où trônent les relations humaines, demandons-


nous pourquoi nous avons des atomes crochus avec certaines personnes et
pas avec d’autres. Pour cela les notions de transfert sont importantes à
connaître.

TRANSFERT ET CONTRE-TRANSFERT :
DES PHÉNOMÈNES TROUBLANTS

Le transfert est un terme issu de la psychanalyse. C’est un acte par lequel


une personne reporte sur le psychanalyste une affection (transfert positif) ou
une hostilité (transfert négatif) qu’il éprouvait primitivement, surtout dans
l’enfance, pour une autre personne : père, mère, etc. Le transfert n’est pas
une maladie. C’est un phénomène naturel en soi. Il se produit chaque fois
qu’un individu en rencontre un autre. En coaching, le transfert prendra la
forme de sympathie ou d’antipathie spontanées.
Le transfert est animé par des motivations conscientes et inconscientes.
Mais dans la mesure où l’élaboration d’un contrat entre le coach et le
coaché a été faite correctement, les circonstances de la relation sont mieux
délimitées. Inconsciemment pourtant, le client et le coach tenteront de
résoudre, dans leur relation présente, les résidus des conflits infantiles non
résolus qui sont à la source du transfert.
Lors de la rencontre entre le coach et son client, le fantasme le plus
fréquent du coaché est le suivant : « Il sait des choses sur moi que j’ignore
moi-même. » Toute relation de pouvoir réactive les phénomènes de transfert
qui sont déjà présents dans toute leur puissance avant même que le client ait
prononcé le premier mot.

Le transfert du client sur le coach

Prendre conscience du transfert


Pendant que le client transfère sur le coach, un autre transfert est à l’œuvre :
celui du coach sur le client. Pour élucider ce transfert, la tâche majeure du
coach est de s’embarquer dans la douloureuse recherche de ses propres
stratagèmes psychologiques qui freinent sa clairvoyance et le
développement de ses clients. Quiconque intervient sur la psyché de l’autre
doit avoir la modestie d’être accompagné pour explorer la sienne. Clients,
vérifiez que votre coach se fait lui-même coacher !
De façon aidante, le coach peut se poser la question suivante : « Quelle
anxiété, ou quel besoin je cherche à satisfaire à travers ma conduite avec ce
coaché ? »

Utiliser le contre-transfert
Le contre-transfert est la réponse émotionnelle du coach au transfert de son
client. Autrement dit, quand le coach se retient de répondre et prend sur lui,
il contre-transfère.

Le contre-transfert du coach sur le client

Le contre-transfert peut être aidant s’il est conscient et analysé car il


exprime des choses à propos du coaché. Si le coach est irrité, quoi qu’il
fasse, il aura tendance à persécuter. S’il se sent en difficulté, il tentera
probablement de sauver son client. Alors autant analyser le contre-transfert
pour éviter des désagréments au coaché.

Il répond… si bien qu’il en oublie la question


La jeune héritière d’une entreprise florissante craint de faire de mauvais choix stratégiques.
Elle choisit un beau et jeune coach pour l’aider à prendre les meilleures décisions. Elle voit en
lui un homme qui lui fait confiance. La cliente lui dit « Dites-moi, cher coach… ». Et Le
coach répond, répond… tant est si bien qu’il en oublie la question. Ce processus se répète
plusieurs fois au cours de leur première rencontre. Conscient de ce symptôme mais n’en
connaissant pas la cause, le coach en parle à son superviseur. Au cours de la séance, le coach
parvient à discerner ce qui était de l’ordre du transfert de sa cliente sur lui, de son contre-
transfert (la réponse émotionnelle qui lui faisait oublier la question), et même de son propre
transfert : cette femme lui rappelait sa mère qui devait faire des choix familiaux importants
lorsque son père partait en déplacements pendant de longues semaines.
En tant que coach, demandons-nous quel message nous apporte notre
client et ce qu’il signifie pour nous ? S’il ne signifie rien, nous n’avons pas
de point d’appui. Or, le coach ne peut agir que là où il est touché. Tout
coach tacticien saura ajuster ses interventions sur le moment, alors qu’un
coach dénué de sens tactique tombe dans les pièges de la relation. Il
confond la demande du client et les besoins du client. À l’inverse, un coach
tacticien repère les transferts et ses contre-transferts au moment où ils
surviennent. Il les utilise comme levier de changement en mettant en
évidence les processus parallèles.
Le coach est payé pour que son ressenti et son émotion soient aidants
pour le client. Ces relations transférentielles et contre-transférentielles
peuvent être enrichies si elles sont analysées avec un professionnel. D’où
l’importance d’avoir une démarche de supervision et de développement
personnel.

Le coach en thérapie
Du fait de la forte implication émotionnelle et intellectuelle que demande le
métier de coach, il est recommandé d’être régulièrement accompagné par
un psychothérapeute. Les avantages d’un suivi psychothérapeutique sont
considérables pour le coach et ses clients. Protégé par le garde-fou
thérapeutique, le coach projette de moins en moins sa propre vision du
monde. Il comprend et analyse beaucoup mieux les phénomènes du coaché,
améliore son efficacité de coach, et est reconnu comme tel par son
environnement.

LE PROCESSUS PARALLÈLE

Quand le coach arrive pour la première fois devant son client, il risque
d’être perçu comme celui qui va bouleverser l’équilibre. Si des précautions
ne sont pas prises, il se voit attribuer une place de « sachant » dans l’esprit
du coaché. Qu’il le veuille ou non, le coach ne peut modifier les fantasmes,
les expériences vécues, les croyances ou les opinions de ses clients. Du fait
de son accès involontaire à la position de « sachant », le coach risque de
vivre avec son client les mêmes phénomènes relationnels que ce dernier vit
avec ses tiers ou ses partenaires.
Le processus parallèle : l’effet miroir

Par un effet inconscient de jeux de miroirs, le client va alors recréer ou


tenter de recréer avec le coach ce qui se joue entre ses partenaires et lui-
même. Évidemment, ce ne seront pas les mêmes propos, mais la façon de
communiquer sera la même. Le processus parallèle est un phénomène
isomorphe.

À la peine pour obtenir des informations


Le manager d’une équipe demande au coach de l’aider à accompagner les changements de
son groupe. Le manager se plaint qu’il n’obtient pas assez d’informations de la part de ses
collaborateurs et qu’il a du mal à obtenir les chiffres de leur activité.
Au cours de cette première rencontre, tout en écoutant la plainte du client, le coach peine à
obtenir des données précises sur des informations minimales dont il a besoin pour avancer :
« combien, qui, où, quand… ». En observant ce qui se passe dans cette relation, le coach
prend alors conscience que se rejoue avec le coaché exactement ce dont le coaché se plaint :
personne n’arrive à obtenir de données précises de son(ses) collaborateur(s).
Inconsciemment, le client a reproduit avec le coach le processus qui le dérangeait avec les
membres de son équipe.

Un coach averti est attentif aux phénomènes de processus parallèles. En


analysant et en donnant du sens aux raisons de son contre-transfert
(agacement, enlisement, impuissance, euphorie excessive…), il peut
pressentir le problème sous-jacent de son client. Attentif aux différents
transferts qui se jouent dans les relations, le coach les utilise comme piste
de diagnostic.

La patate chaude
Le phénomène de processus parallèle est dérangeant pour celui qui le subit
et contagieux pour les autres. Le problème apporté par le client prend
souvent l’allure d’une « pomme de terre brûlante », ou « patate chaude ».
Elle chauffe les mains de celui qui s’en saisit. Le coaché essaye de s’en
débarrasser en la lançant à quelqu’un d’autre. N’arrivant pas à résoudre lui-
même le problème du groupe, il fait appel à un coach et lui lance la pomme
de terre brûlante. Le risque pour le coach non formé ou peu vigilant est de
se voir demander de résoudre à son tour les problèmes épineux de son
client. Ce processus parallèle est largement inconscient, ce qui le rend
particulièrement puissant pour orienter les actes, comme tout phénomène
inconscient.
Quand le coach se rend compte d’une difficulté passagère avec son client,
il prend rendez-vous avec son superviseur. « J’ai un souci avec un client. Je
ne comprends pas très bien ce qui se passe ». Toujours inconsciemment, le
coach tente de renvoyer la patate chaude à son superviseur. Mais le coach a
choisi un bon professionnel. Avant même que le coach ait débuté, le
superviseur fait l’hypothèse qu’un processus parallèle est à l’œuvre. Alors il
guette les signaux faibles et pertinents. Quand il les voit arriver, il amène
son client (le coach !) à prendre conscience de la nature spécifique de cette
pomme de terre brûlante qui rebondit d’un individu à l’autre. Toujours avec
beaucoup de professionnalisme, le superviseur montre au coach comment
s’y prendre pour qu’à son tour il aide son propre client à clarifier les
processus parallèles avec ses partenaires. Désireux de faire le bien, ce
superviseur sage et vigilant parvient à mettre en évidence l’épine du
problème qui contaminait les relations et rebondissait de personnes en
personnes depuis une origine lointaine.

Quelques exemples de processus parallèles


Confusion dans les demandes, et contamination du coaché vers le coach.
Le coaché – « Je viens vous voir parce que… en fait, c’est mon chef qui m’a demandé de
vous consulter. Et en même temps ça ne va pas très bien à la maison : mes enfants sont
adolescents et ma femme ne s’en sort pas avec eux. »
Le coach (lui-même a des enfants adolescents, et en même temps, la demande de ce client le
renvoie à des difficultés qu’il a eu avec un chef il y a de nombreuses années) – « Alors là, j’ai
besoin de vous demander… au fait : ils sont en quelles classes vos enfants ? »
Les rôles ne sont pas clairs, et le coach sort de son rôle de coach.
La séance de coaching se déroule à trois : la maman, le fils, et le coach. La maman est venue
consulter le coach pour son fils.
La coachée – Mon fils ne travaille plus à l’école. C’est vrai qu’il doit s’occuper de sa petite
sœur parce que son père revient tard le soir.
Le fils – À l’école mes copains m’appellent « Mama » parce que je m’occupe de ma sœur.
Mais pour moi c’est normal que je m’occupe de la famille !
Le coach s’adressant à la mère – Votre fils devrait davantage s’occuper de lui-même.
D’ailleurs, je vous conseillerai de lui faire consulter un psy. (Le coach sort de son rôle de
coach pour prendre celui de conseiller)
Les processus parallèles qui rebondissent de personnes en personnes ont parfois une origine
lointaine.
Le client – Enfin, je ne peux pas tout vous dire. Vous comprenez, c’est un peu délicat.
→ Le client ne dit pas tout = secret.
Le client – D’ailleurs – et c’est normal – mon patron ne me dit pas tout. Il a des informations
du comité de direction et c’est normal qu’il les garde. Cependant on en apprend beaucoup
dans les couloirs.
→ On dit sans dire dans cette entreprise = secret.
Le coach « apprend » par la suite que le fondateur de cette société avait bénéficié des
largesses d’un pouvoir politique qui avait pactisé avec l’ennemi lors d’un conflit remontant à
quatre-vingt ans en arrière.
→ C’est connu, mais on n’en parle pas = secret.
L’avantage stratégique octroyé à l’époque avait permis à l’entreprise de prendre un avantage
concurrentiel dans une technologie innovante. Depuis quatre-vingt ans, l’entreprise avait
réussi à conserver son avance en cultivant ses entrées dans les coulisses du pouvoir politique,
et toujours en communiquant le moins possible.

Le processus parallèle fonctionne dans les deux sens, aller et retour. Il


peut être désagréable comme une pomme de terre brûlante, ou agréable
comme des caresses dont on ne se lasse pas. Alors quand le coach adopte un
comportement bienveillant, il influence son client « en parallèle », dans le
bon sens.
Quelques questions pour clarifier son transfert de coach
Pour son propre développement personnel et professionnel, le coach peut se poser les
questions suivantes1 :
Pourquoi suis-je assis dans cette salle ? Pourquoi ne suis-je pas à la maison avec mes
enfants ou en train de faire du ski, d’être au théâtre, de lire un bon livre, ou tout autre
activité qui me ferait plaisir ? En quoi cette séance va-t-elle contribuer à mon
épanouissement ?
Du point de vue de son client et de ses motivations, il peut se demander :
Pourquoi est-il ici ? Pourquoi n’est-il pas à la maison avec ses enfants ou en train de faire
du ski, d’être au théâtre, de lire un bon livre, ou toute autre activité qui lui ferait plaisir ?
En quoi cette séance va-t-elle contribuer à son épanouissement ?
Puis, du point de vue de ses devoirs envers lui et de ce que le coaché attend de lui :
Pourquoi a-t-il choisi de s’adresser à moi plutôt qu’à un confrère de même niveau de
qualification ? Qu’imagine-il que je puisse faire qu’un autre ne saurait pas faire aussi bien
ou même mieux ? Pourquoi ai-je une certification de coach ? Dans ce contexte, quelle
valeur ont ici, les heures que j’ai passées à étudier la psychologie, à me payer des séances
de supervision, à comprendre l’organisation des entreprises, à apprendre le droit des
sociétés, l’Analyse Transactionnelle, à pratiquer le tai chi… ?
Enfin, confortablement assis, il se donne la réponse à la question suivante :
Qu’est-ce qu’un coach correctement formé a-t-il à proposer que d’autres coachs
ne proposent pas ? Ses facultés particulières d’observation ? Son consentement à se laisser
observer sans être affecté ? Sa capacité à aider autrui à se développer et à grandir ?
Écrire trois réponses sur une feuille à chacune de ces questions sera toujours un exercice
intéressant. Dans la plupart des cas, ces raisons seront appropriées, convaincantes et
témoigneront de l’aspect rationnel de la motivation du coach. Une fois ceci posé, il devra
noter une quatrième raison, puis une cinquième. Celles-ci seront sans doute plus
révélatrices de ce qui l’influence prioritairement et qui, sans les précédentes, ne pouvaient
émerger au grand jour.

L’EXPÉRIENCE ET LA MATURITÉ DU COACH

Le coach débutant dans l’usage du cycle d’Hudson respecte les procédures


de base. C’est bien utile pour éviter les principales erreurs. Mais le manuel
du bon coach n’est pas encore écrit. Un coach doit connaître un minimum
de méthodes et de théories. Mais il doit aussi éviter de se cantonner à ces
voies déterminées et routinières. Les hypothèses théoriques ne sont à
utiliser qu’avec une certaine prudence.
Un coach confirmé qui a su prendre du recul adopte intentionnellement
une attitude dénuée de tout systématisme. Pour cela, il développe son
expérience, poursuit son développement personnel sa vie durant, et
supervise ses collègues. Il ne considère comme jamais définitivement
acquis une méthode ou un concept. Il écoute avec intérêt et profit ses
confrères lui parler de théories qu’il croyait pourtant acquises.
Conclusion

Le cycle d’Hudson,
une spirale qui nous emmène toujours plus haut

En lisant ces lignes le lecteur peut se demander combien de temps dure chaque
étape du cycle d’Hudson.
La réponse est difficile à donner car tout dépend de l’individu, et surtout
de l’étape qui lui pose difficulté à l’instant où il a besoin d’aide. Les
blessures psychologiques normales que nous avons tous façonnent notre
caractère et nos traits de personnalité. Certains buteront souvent sur
l’étape 1. Ont-ils eu la permission de rêver tout haut quand ils étaient
petits ? Pour d’autres ce sera l’étape 2 qui posera souvent problème. N’ont-
ils pas été trop souvent bridés dès qu’ils voulaient se lancer dans l’action ?
Pour un troisième, la fin des projets lui rappelle trop de ruptures jamais
guéries, jamais cicatrisées, toujours à vif. Il en sera de même pour chaque
étape. Nous sommes tous identiques : blessés et résilients. Nous sommes
tous différents, mais les blessures ne sont pas aux mêmes endroits.
L’important pour le coach n’est pas de connaître les causes profondes qui
font qu’aujourd’hui tel individu est en difficulté fréquente avec telle étape.
L’important est de pouvoir repérer l’étape qui bloque pour aider celui qui a
besoin d’aide à prendre le chemin de la résilience. Le coach entre dans le
cycle par l’étape qui pose problème au coaché.
C’est donc pour aider le coach que nous avons indiqué les principaux
signes et symptômes de blocages des étapes. Et comme tous ces blocages et
ces résiliences sont extrêmement personnels, nous ne pouvons jamais savoir
combien dure un cycle ni même une étape. Tout dépend des individus. Par
contre la pratique vous montrera qu’en général, quand le coach à bien fait
son travail, c’est-à-dire qu’il a bien identifié l’étape de blocage, qu’il a
accompagné patiemment et avec cœur la personne aidée, les étapes
suivantes dans la partie 1 à 7 du cycle se dérouleront de façon fluide et
rapide.
Le seul risque qu’il y a à utiliser ce genre de modèle, c’est de croire qu’il
suffit d’appliquer la méthode pour que ça marche. La Vie est beaucoup plus
complexe et ne se laisse par encadrer par des théories. Il faut donc utiliser le
modèle d’Hudson avec humilité, mais aussi confiance, et se garder de
vouloir être psychothérapeute. Ce métier exige une autre formation.
Toujours est-il que prétendre pouvoir cartographier les mouvements de la
vie ne serait que vanité. Quel défi que de vouloir décrire simplement en
quelques lignes ou quelques phrases, ce qui nous pousse à faire et nous
pousse à être ! Il y a plusieurs milliers d’années, les philosophes chinois ont
résumé ces mouvements dans le concept circulaire de Yin et de Yang. Yin
est ce qui va devenir Yang ; Yang est ce qui va devenir Yin. L’hiver prépare
l’été qui rend possible l’hiver. De même pour l’aidant et l’aidé. Un jour je
suis l’aidant ; Aidé le lendemain. Nous alternons les rôles dans la vie.
Dans son approche circulaire et cyclique, Frederic Hudson nous a
proposé un modèle assez proche de la pensée chinoise. Mais à force de
tourner, tourner et encore tourner dans ce cycle, nous sommes emportés
vers une troisième dimension, qui prend une autre forme : celle de la
spirale. Axé en son centre, le colimaçon nous entraîne et nous entraîne
encore… Jamais au même endroit, toujours un pas plus loin, un rien plus
haut, légèrement ailleurs.
Bibliographie

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psychanalyse, no 11, 1975, p. 35-44.
Remerciements

Dans ce travail solitaire de rédaction, j’ai souvent été aidé et quelquefois inspiré.
Inspiré tout d’abord par Gilles Pellerin, analyste transactionnel, et
« importateur » du modèle d’Hudson en Europe. Les notes que j’ai prises
lors de ses séminaires m’ont été précieuses.
Patrick Fosset, quant à lui, analyste transactionnel également, a été l’un
des premiers à transcrire et publier le modèle d’Hudson tel que présenté par
G. Pellerin. Je me suis librement inspiré de son écrit pour produire le mien.
Murielle Nique, consultante en relations humaines, a été l’une des toutes
premières à m’encourager sur la voie de l’écriture. Me coachant sans
complaisance, accueillant mes projets avec enthousiasme, elle a été une
relectrice-coach particulièrement aidante. Ses retours m’ont donné la
permission d’écrire ce qui sommeillait au plus profond de moi.
Vanessa Mannavarayan, coach anglo-saxonne a la culture de l’action.
Elle a su me faire partager son expérience interculturelle et m’indiquer ce
qu’il y avait d’universel dans le cycle d’Hudson. Ses remarques subtiles et
pertinentes m’ont été précieuses pour rédiger les étapes 8, 9, 10.
Hélène ma femme, et Cécile ma fille, lectrices assidues, aimant la lecture
et l’écriture plus que moi. Toujours prêtes à me servir une formule choc ou
une tournure impactante. Merci à vous deux pour ces cadeaux lettrés.
1. Interview de Jean-Michel Blanquer, ministre de l’Éducation nationale (Le Point no 2372 du
15 février 2018).
1. Source : http://www.xerfi-precepta-strategiques-tv.com/emission/Patrick-Dutartre-_Les-lecons-de-
management-d-un-leader-de-la-patrouille-de-France_2529.html
1. Martin V. S Poupart M.G., 50 exercices de systémique, Eyrolles, 2016.
1. Tournier M., Vendredi ou les limbes du Pacifique, Gallimard, 1967.
1. Rojzman C., Une crise de sens., Actualité en Analyse Transactionnelle, no 112, 2004.
2. Senge P., La Cinquième discipline. Guide de terrain, First Editions, 2000.
1. Extase : État particulier dans lequel une personne, se trouvant comme transportée hors d’elle-
même, est soustraite aux modalités du monde sensible en découvrant par une sorte d’illumination
certaines révélations du monde intelligible, ou en participant à l’expérience d’une identification,
d’une union avec une réalité transcendante, essentielle (Centre national de ressources textuelles et
lexicales).
2. Pinkola Estes C., La danse des grand-mères, Essai Poche, 2009.
3. Kharitidi O., La chamane blanche, Pocket, 1998.
4. Mallasz G., Dialogues avec l’ange, Aubier, 1990.
5. Huguelit L., Les huit circuits de conscience : chamanisme cybernétique et pouvoir créateur,
Mamaeditions, 2012.
6. Ces propos sont publiés avec l’aimable autorisation de son auteur.
1. D’après Samuel Beckett.
2. Ces termes en italiques sont les propos tels que rapportés par Bruno.
3. L’individuation est un processus de prise de conscience de l’individualité profonde, décrit par Carl
Gustav Jung.
1. http ://www.cnrtl.fr/definition/demander
2. Inspiré par Vincent Lenhardt. Le responsable porteur de sens, et par Joël Brugalières
(communication personnelle).
3. Lenhardt V., Les responsables porteur de sens. Culture et pratiques du coaching et du team-
building, Paris, INSEP Consulting Éditions, 1992, nouv. éd. 2002.
4. De rien (en espagnol).
1. Berne E., Principes de traitement psychothérapeutique en groupe, Calluire, Éditions d’analyse
transactionnelle, 2006
2. Crespelle A., Le moi, le rôle et la personne : différences et interférences, Actualités en Analyse
Transactionnelle, no 52, 1989, p. 173-181.
3. Ibid.
4. Brécard F., Hawkes L., Le grand livre de l’analyse transactionnelle, Eyrolles, 2014.
5. L’EMDR (eye movement desensitization and reprocessing, c’est-à-dire désensibilisation et
retraitement par les mouvements oculaires) est une sorte d’hypnose qui permet de reprogrammer les
circuits de la mémoire. Cette méthode est très utilisée pour effacer les traumatismes.
6. Pour plus de détails sur les états du Moi, voir l’Analyse Transactionnelle qui les a
merveilleusement décrits.
7. D’après Emmanuel Kant.
8. Ce paragraphe est inspiré d’Edgar Morin, spécialiste de la complexité.
1. D’après Eric Berne (ibid).

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