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La psychologie au-delà des épistémologies

Un espace pluriel de production de subjectivités


Arthur Arruda Leal Ferreira, Eduardo Bazilio Gomes Correia,
Juliana de Moura Quaresma Magalhães, Patrícia Zornoff Gavazza,
Geovana de Azevedo Gomes, Natalia Barbosa Pereira, Paulo Santos Viola Coelho,
Rodrigo José Pires Madeira
Dans Revue d'anthropologie des connaissances 2012/2 (Vol. 6, n° 2), pages 331 à 355
Éditions S.A.C.
DOI 10.3917/rac.016.0087
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Anthropologie des connaissances
en Amérique latine

La psychologie au-delà
des épistémologies

Un espace pluriel de production


de subjectivités

Arthur Arruda LEAL FERREIRA


Eduardo Bazilio GOMES CORREIA
Juliana de Moura QUARESMA MAGALHÃES
Patrícia ZORNOFF GAVAZZA
Geovana DE AZEVEDO GOMES
Natalia BARBOSA PEREIRA
Paulo Santos VIOLA COELHO
Rodrigo José PIRES MADEIRA

resume
La finalité de cet article est d’aborder la question de la multiplicité
radicale de la psychologie, qui se présente comme un réseau de
savoirs et de pratiques trop diverses et même contradictoires.
Pour accomplir cet objectif, sera tout d’abord présenté le débat
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épistémologique relatif à cette pluralité radicale, en envisageant le
rapport de cette discussion avec la question de la scientificité de
la psychologie. Par la suite, il s’agira de mettre en scène une autre
façon de considérer cette multiplicité radicale : la Théorie de
l’Acteur-Réseau de Bruno Latour, Annemarie Mol et John Law et
l’épistémologie politique d’Isabelle Stengers et Vicianne Despret
qui considèrent les diverses psychologies comme des dispositifs
de production ontologique de subjectivités. Afin d’étudier ces
dispositifs théoriques, un ensemble de recherches sera présenté
pour évaluer l’existence (et les formes) des manières de
subjectivation psychologisée parmi des lycéens de la ville de Rio
de Janeiro. Finalement, les résultats de cette recherche seront mis

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en débat en considérant les politiques ontologiques présentées


dans les choix méthodologiques de recherche.

Mots clés : théorie de l’acteur-réseau, épistémologie politique,


production de subjectivité

LE DÉBAT ÉPISTÉMOLOGIQUE
SUR LA MULTIPLICITÉ
DE LA PSYCHOLOGIE
Dans les pays francophones1, le débat sur la pluralité du savoir psychologique
est mené depuis les années 1940, entre les défenseurs de l’unité comme Daniel
Lagache (1988/1949) et Robert Pagès (1958) et leurs opposants qui dénoncent
la pluralité de la psychologie, tels que Georges Canguilhem (1973/1956), Jacques
Gagey (1968) et Michel Bernard (1983). Les premiers soutiennent l’idée selon
laquelle l’unité est calquée tantôt sur un projet d’une science des « réponses
significatives dans lesquelles l’être vivant intègre les tensions qui menacent
l’intégrité et l’équilibre de l’organisme » (Lagache, 1988/1949), tantôt sur la
propre possibilité d’opérationnalité empirique des problèmes (Pagès, 1958).
D’un autre côté, les auteurs qui soutiennent la pluralité se caractérisent par le
fait de vouloir tenter de l’expliquer. C’est ainsi que Canguilhem et Gagey, inspirés
par le rationalisme appliqué de Gaston Bachelard, délèguent la pluralité à des
projets différenciés, inspirés par d’autres sciences, qui habiteraient le champ
psychologique. Canguilhem (1973/1956) présente cinq projets psychologiques
possibles, sans aucun entrelacement entre eux : a) comme science de l’aube
(d’inspiration aristotélicienne) ; b) comme science du sens interne (erronément
basée sur les méditations cartésiennes) ; c) comme physique du sens externe
(contrastant notre expérience avec la réalité indiquée par la physique) ; d)
comme science du sens intime (inspirée par des questions psychopathologiques) ;
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e) comme science des réactions (appuyée sur la biologie, mais aussi sur le
technicisme et l’égalitarisme méritocratique des sociétés contemporaines).
Gagey (1968, 30), quant à lui, comprend la psychologie comme étant constituée
par le fait d’« assimiler et accommoder les modèles scientifiques proposés
par d’autres disciplines », étant apte à refléter les plus diverses phases de la
« dialectique épistémique », conduisant vers six projets différents : a) savoir

1 Ce débat épistémologique sur la multiplicité de la psychologie a été assez présent dans d’autres pays,
comme les États-Unis (par exemple, le débat autour de la proposition du positivisme unifié de Staats,
1991) et même au Brésil (voire l’excellent article de Garcia-Roza, 1977). Le choix du paysage français
s’est réalisé du fait de sa longévité et de ses positions bien marquées. Cependant, il est important de le
considérer dans le contexte de l’absorption de la psychanalyse dans le milieu académique français : soit
par la psychologie, soit en contraste avec celle-ci. Une bonne analyse, par exemple, des dédoublements
de l’article de Canguilhem (1973/1956) peut se trouver chez Roudinesco (1993).
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classificateur (basé sur la taxonomie) ; b) inspirée par le cartésianisme ; c)


comme science basée sur la physique positiviste ; d) inspirée par le modèle
biologique ; e) comme pratique de pari (influencée par la statistique) ; f) en tant
que mit-sein (couronnée par la clinique psychanalytique).
Dans une analyse plus détaillée, Bernard (1983) montre que cette
pluralité épistémologique n’est pas suffisante pour comprendre la dispersion
psychologique. Pour cela, il faudrait prendre en compte un ensemble de
psychotechniques, ou des pratiques sociales sur lesquelles la psychologie
prendrait pied. De cette façon, nous pouvons comprendre la diversité du champ
psychologique comme un effet de l’assimilation de différents projets scientifiques
appartenant à d’autres savoirs, mais également comme des pratiques sociales ou
psychotechniques. Mais qu’est-ce qui soutiendrait cette diversité d’orientations
psychologiques, avec des fondements, des actions et des résultats si divers (et
même contradictoires) ? Bernard (1983) nous montre qu’une des principales
marques de la psychologie est la production d’une culture psychologique, comme
effet de sa diffusion. Dans ce sens, nous pouvons présumer que les multiples
orientations se renforcent par leurs effets sur le propre objet d’étude, à savoir
les sujets pris dans des processus de psychologisation.
Ces brèves remarques d’ordre épistémologique aident à réaliser une
certaine cartographie de la multiplicité de la psychologie. Néanmoins, ce détour
épistémologique implique l’adoption de certains présupposés asymétriques
dans la prise des savoirs en question, comme l’opposition entre la connaissance
scientifique (siège de la vérité), et la connaissance commune (refuge de l’erreur).
Dans cette asymétrie, le jugement de scientificité ou non d’un savoir articule la
question de l’unité et de la multiplicité. Dans ce cadre, la multiplicité radicale de la
psychologie est comprise comme marque de son a-scientificité et non comme une
caractéristique singulière de ce savoir. En effet, l’évolution de ce savoir scientifique
supposerait toujours une unité, une rationalité destinée à être dépassée par une
autre plus large, dans sa distance au sens commun. Si la psychologie ne se forme
pas en une unité, il est probable qu’elle ne possède pas la rationalité suffisante
qui caractérise le circuit sélectif des savoirs proprement scientifiques. Bien que
cette rationalité puisse être considérée sous une forme plurielle, comme l’indique
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Gagey (1968), ses effets de subjectivation ou de « culture psychologique » peuvent
également être vus comme quelque chose d’externe aux savoirs proprement
dits, passible de ce fait de purification et de correction.

AU-DELÀ DES ÉPISTÉMOLOGIES :


LA THÉORIE DE L’ACTEUR-RÉSEAU
ET L’ÉPISTÉMOLOGIE POLITIQUE
Les thèses épistémologiques lient l’asymétrie entre le savoir commun et le
savoir scientifique à un devenir historique évolutif, dans lequel la connaissance
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scientifique se présenterait comme une représentation progressivement


plus adéquate, rationnelle et unitaire de champs spécifiques de phénomènes.
Cependant, il est important de revoir la question de la multiplicité de la
psychologie dans un cadre « au-delà des épistémologies », en expérimentant
l’approche de la connaissance scientifique à partir d’autres présupposés. Il est
possible de trouver une alternative à la forme épistémologique dans la Théorie
de l’Acteur-Réseau de Bruno Latour, Annemarie Mol et John Law, et dans
l’épistémologie politique d’Isabelle Stengers et Vinciane Despret. De telles
approches refusent le rapport asymétrique entre connaissances scientifique et
non scientifique, mettant en question tout processus d’évolution ou de saut
épistémologique. Au contraire des thèses antérieures, la connaissance scientifique
est ici conçue comme l’articulation et le co-attachement entre entités, dans la
production inattendue d’effets, et non comme saut représentationnel donné
comme identité entre une sentence ou une hypothèse antérieure et un état des
choses destiné à être progressivement dévoilé. Comprise comme articulation,
la connaissance scientifique ne se distinguerait plus entre bonne et mauvaise
représentation, mais entre bonne et mauvaise articulation. Dans le premier cas,
il s’agit d’une situation dans laquelle l’articulation est extorquée ou conditionnée
à une réponse ponctuelle, menant les êtres étudiés à un lieu de « docilité ».
Dans le deuxième cas, il s’agit d’une articulation dans laquelle le témoignage va
au-delà d’une simple réponse, le chercheur s’exposant au risque d’invalidation
de ses questions et de ses propositions et s’ouvrant à de nouvelles questions
posées par les entités étudiées. Ce serait alors une relation de récalcitrance.
Dans cette perspective sur la connaissance scientifique, la multiplicité est
prise dans un sens positif. Dans les mots de Despret (1999), par exemple, la
psychologie est composée de versions qui deviennent plus fécondes dans la
mesure où elles se font référence entre elles. Le problème apparaît lorsque ces
versions cherchent à opérer d’une manière totalisante, produisant des visions
qui s’excluent les unes les autres. Ce raisonnement ne serait pas propre à la
psychologie ; celui-ci vaudrait pour les autres sciences et refléterait le sens
spécifique que l’épistémologie politique de Stengers et Despret attribue au
terme généralisation. Latour (2004, 220) met en évidence le sens spécifique du
terme : « la généralisation doit être un véhicule pour voyager à travers le plus
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grand nombre de différences possibles – ainsi maximisant les articulations – © S.A.C. | Téléchargé le 08/01/2024 sur www.cairn.info (IP: 190.115.177.98)
et non une manière de diminuer le nombre de versions alternatives du même
phénomène ».
D’une manière similaire, Annemarie Mol et John Law conçoivent la
multiplicité dans un sens positif en l’envisageant comme agencement de
différents dispositifs scientifiques et techniques, à partir de leur conception
de politiques ontologiques. Pour ces auteurs, plus qu’elles ne représentent
une réalité pré-donnée de différentes perspectives, ces différentes pratiques
scientifiques produisent des mondes différents (multiples) sans aucune unité
ultime (singularité), mais pas complètement désarticulés (pluralité). C’est ici que
se réalise la spécificité du terme multiplicité : ce n’est ni une anomalie face à un
monde unique et singulier, tel que le conçoit la métaphysique euro-américaine
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(Law, 2004, 25), ni une pluralité d’événements sans attache : « Nous sommes
dans un monde dans lequel corps, organisations, ou machines sont plus qu’un et
moins que beaucoup. Quelque chose dans l’entre-deux » (Law, 2004, 62).
On trouve un exemple de cette multiplicité réalisée dans l’étude de Mol (2002)
sur l’artériosclérose. Celle-ci n’est pas comprise comme un état pathologique
inhérent au corps en vue d’être représenté à partir de différentes perspectives
(dans le laboratoire ou en examens cliniques). Chacune de ces pratiques
scientifiques réalise une forme d’artériosclérose, une réalité pathologique qui
n’est pas nécessairement identique, mais qui n’est pas absolument distincte.
D’où le terme politiques ontologiques, car chaque méthode, chaque pratique
scientifique réalise une réalité déterminée entre d’autres réalités possibles, qui
dans le jeu avec les autres pratiques scientifiques constitue un multivers : plus
qu’un, moins que beaucoup.
Pour Latour (2001-A), la connaissance scientifique se produit également
dans le cadre d’une performance plurielle dans l’articulation et le co-
attachement entre divers acteurs et dans la production inattendue d’effets. Pour
comprendre d’une façon plus détaillée les multiples modes d’articulation des
savoirs scientifiques, il est nécessaire de faire référence au modèle de système
circulatoire de Latour. Ici, chaque pratique scientifique est abordée à partir de
son vaste et dense système de réseaux et de capillarités, sans les oppositions
traditionnelles des historiens des sciences entre les approches internalistes et
externalistes. De la même façon qu’il n’est pas logique de se questionner si notre
système circulatoire est essentiellement un cœur ou des veines et des artères,
les pratiques scientifiques ne peuvent être prises seulement soit comme réseau
conceptuel (internalisme), soit comme contexte social (externalisme) (phrase
à reconstruire mais comment sans altérer l’idée des auteurs ?). En essayant de
dépasser cette ancienne opposition, Latour propose son système circulatoire,
composé par une série de circuits :
1. Mobilisation du monde, ou ensemble de médiations aptes à faire
circuler les entités humaines et non humaines à travers le discours
(instruments, relevés, questionnaires et expéditions).
2. Autonomisation, ou délimitation d’un champ de spécialistes
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autour d’une discipline, capables d’être convaincus ou d’entrer en
controverse.
3. Alliances, ou recrutement de l’intérêt de groupes non scientifiques,
dans les secteurs militaires, gouvernementaux et industriels.
4. Représentation publique, ou un ensemble d’effets produits autour
du quotidien des individus.
5. Les liens et les nœuds, qui concernent le cœur conceptuel qui lie
tous les autres circuits.
Sans la circulation et la mobilisation de tous ces circuits, il n’est pas possible
de comprendre la production et le maintien d’un travail scientifique. L’exemple
fourni par Latour (2001-A) est le travail scientifique de Frédéric Joliot qui étudie
la tentative de montage d’une bombe à neutrons en France pendant la période
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précédant l’invasion allemande lors de la Seconde Guerre mondiale. Au cours


du travail de conception de cette bombe, il fut nécessaire non seulement un
réseau de concepts scientifiques à être épurés, mais également l’établissement
de laboratoires, le partenariat de spécialistes, et l’intérêt du gouvernement, de
l’industrie et des militaires, au-delà de l’appui de l’opinion publique mobilisée
par la course à l’armement précédant la guerre. La compréhension de ce
travail de conception de la bombe à neutrons ne peut se passer d’aucun de ces
composantes, sans lesquels toute lecture resterait partielle.

LES PSYCHOLOGIES ENTRE SYSTÈMES


CIRCULATOIRES PLURIELS
Comment se caractérisent les différents systèmes circulatoires présents dans
la psychologie ?
Premièrement, on peut dire que la psychologie opère avec un ensemble
de systèmes circulatoires sans articulation la possibilité de traduction ou de
translation entre soi. Selon Despret (1999), de tels systèmes circulatoires fermés
opéreraient de nombreuses fois comme des visions, sans relation aux autres
versions. Dans ce cas, la psychologie serait composée d’une série de nœuds
et de liens conceptuels partiels sans un nœud supérieur qui les articulerait. Ce
nœud serait lâche, même au sujet de la définition de ce que serait la psychologie
(science des conduites ? des phénomènes mentaux ? de l’expérience ? de
l’inconscient ?). Chacun de ces systèmes circulatoires et leurs liens conceptuels ne
se connecteraient qu’avec certains problèmes et certaines questions pratiques,
et qu’avec un réseau de pratiques scientifiques spécifiques. De plus en plus, ces
liens conceptuels dans la psychologie sont pour la plupart importés d’autres
sciences naturelles, afin d’appuyer la scientificité de ces savoirs : sensation de la
physiologie ; adaptation et conditionnement de la biologie ; équilibre et énergie
de la physique ; information et programme de l’informatique. Il s’agit de ce que
Stengers (1989) appelle une capture conceptuelle.
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En ce qui concerne l’autonomisation, il y a entre les psychologues quelque © S.A.C. | Téléchargé le 08/01/2024 sur www.cairn.info (IP: 190.115.177.98)
chose que Canguilhem (1973) a pu désigner comme un consensus plus pacifique
que logique, étant donné l’ensemble des orientations, projets et versions présents
dans notre champ d’étude. L’autonomie de la psychologie comme savoir et
pratique se produit en même temps que se génère une autonomisation de divers
groupes en des versions de la psychologie désarticulées et même antagonistes
entre elles (structuralisme, fonctionnalisme, behaviorisme, gestaltisme,
psychanalyse, etc.). Comme le souligne Foucault (1957), la psychologie se
constitue dans un processus de dénonciations réciproques d’illusion entre
les différents groupes de recherche : dénonciation de l’élémentarisme, du
mentalisme, de l’insuffisance de la conscience, etc. Toutefois, le problème ne
concerne pas seulement notre articulation interne, produisant une géopolitique
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fragmentée comme en Bosnie dans les années 1990 ; on peut dire également
que les frontières de la psychologie sont plutôt poreuses, s’ouvrant dans des
directions les plus diverses : psychiatrie, pédagogie, gestion et neuroscience,
créant plusieurs espaces indifférenciés avec des collaborations, mais également
des disputes de compétences. Ici, d’une manière plus claire que dans n’importe
lequel des composants du système circulatoire, s’exprime sa pluralité inarticulée ;
la psychologie serait plus articulée « externellement » qu’« internement ».
Il est possible d’affirmer que le préfixe psycho désigne ici plus un mode de
travail emprunté à divers domaines (psycho-métrie, psycho-physique, psycho-
physiologie, psycho-sociologie, etc.) qu’à un champ professionnel articulé de
forme singulière ou multiple.
Quant aux alliances, celles-ci ont été apparemment ambiguës car, si
l’investissement des gouvernements et du privé dans certains secteurs
scientifiques est bien plus important qu’en psychologie, d’un autre côté, nous
assistons à une diversification des intérêts en relation avec le savoir psychologique.
Si, initialement, cet intérêt se concentrait sur des fonctions bien délimitées
comme la sélection et l’ajustement dans des espaces spécifiques comme l’école
ou l’usine, aujourd’hui cet intérêt se répand sur toute une série de champs,
par exemple sur la bureaucratie gouvernementale, sur les forces armées et de
sécurité, et sur l’appareil judiciaire, entre autres. Cet intérêt se répand sous des
formes bien diverses : analyse organisationnelle et institutionnelle, diagnostic
sur les individus et les groupes, planning des activités, travaux communautaires,
etc. Selon Rose (1998), les psychologies deviennent d’importants vecteurs dans
les modes actuels de gestion des populations.
Néanmoins, c’est dans le champ des représentations publiques que l’on
possède un plus grand réseau d’articulations et d’intérêts autour de la psychologie,
même si l’on considère certaines méfiances de son public à son égard. Ces
articulations se produisent en particulier à travers une forte croyance en son
supposé savoir sur la nature humaine. Dans ce cas, il est clair que certaines
catégories comme celles d’Inconscient ou de Complexe d’Œdipe sont devenues
capitales dans la relation avec nous-même ou avec les autres. La différence par
rapport aux approches épistémologiques est que ces représentations publiques
ne sont pas prises comme des distorsions, des croyances ou des résidus culturels
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d’une opération scientifique ; elles sont des traductions ou des translations qui © S.A.C. | Téléchargé le 08/01/2024 sur www.cairn.info (IP: 190.115.177.98)
garantissent la densité et même la réalité d’un système circulatoire donné dans le
champ des psychologies.
Quant à la mobilisation du monde, Rose (1998) souligne que la grande
nouveauté des savoirs psychologiques serait la création de techniques
d’inscription aptes à quantifier et abréger notre subjectivité pour des dispositifs
de gouvernement dans des sociétés libérales-démocrates. Pourtant, comme
le rappelle Stengers (1989), ces techniques d’inscription dans la psychologie
sont rarement produites de manière innovante, étant généralement capturées
à partir de modèles consacrés dans d’autres sciences comme la physique, la
chimie ou la biologie. Un autre problème est que, dans le champ psychologique,
les techniques de mobilisation qui ont été forgées ne circulent pas librement ;
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elles se diffusent à peine dans un domaine donné où elles peuvent être façonnées.
Ce ne serait pas ce que Latour (2001-B, 350) désignerait comme « mobiles
immuables ». Dans les réseaux psychologiques, les dispositifs sont immobiles
car ils sont restreints à un certain projet ou version, et également muables
grâce à leur puissance de production de subjectivité dans l’articulation entre les
témoignages et le public consommateur.
Si quelque chose néanmoins unit les diverses psychologies, c’est bien leur
multiple capacité de fabriquer des sujets, des moi artificiels (Latour, 1998) soit
à travers la diffusion de leur savoir, soit à travers le traitement ou le diagnostic
et à travers leurs propres activités de recherche. Comme nous l’avons vu, cet
aspect productif, qu’il soit de mondes ou de subjectivités, n’est pas conçu par
la Théorie de l’Acteur-Réseau (et l’épistémologie politique) comme un reste
parasitaire, mais comme un aspect propre de la production de connaissances. Le
problème se trouve dans le fait que, de manière très fréquente, se présente un
mode de production basé sur l’extorsion de témoignages (Stengers, 1989) ; non
seulement par la façon dont les tâches sont demandées, mais particulièrement
par la façon dont ces témoignages s’expriment, présentant rarement des
problèmes ou des questions. Cette idée est en accord avec la distinction
opérée entre l’obéissance régulière et la docilité à l’autorité scientifique des
êtres humains en opposition à la récalcitrance des êtres non-humains :
« Au contraire des non-humains, les humains ont une grande tendance,
quand placés en présence d’une autorité scientifique, à abandonner toute
récalcitrance et à se comporter comme des objets obéissants offrant
aux chercheurs juste des déclarations redondantes, confortant alors
ces chercheurs dans la croyance qu’ils produisent des faits ‘scientifiques’
robustes et qu’ils imitent la grande solidité des sciences naturelles »
(Latour, 2004, 217).

Pour Latour (1997, 301), les sciences humaines ne deviendraient réellement


des sciences que si elles n’imitent pas l’objectivité des sciences naturelles, mais
suivent leur capacité à la récalcitrance. En résumé, nous pouvons dire que
le grand problème de la psychologie n’est pas sa capacité d’influencer ou de
produire des sujets, mais bien son mode de production quand elle extorque le
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témoignage des sujets, empêchant toute possibilité de récalcitrance. En peu de © S.A.C. | Téléchargé le 08/01/2024 sur www.cairn.info (IP: 190.115.177.98)
mots, nous pouvons dire que la psychologie est une puissante machine à multiples
captures (Ferreira, 2001), capturant et articulant des concepts scientifiques, des
stratégies de mobilisation, des intérêts de communautés scientifiques et une
série d’institutions et de groupes, répondant aux questions et aux exigences de
notre vie quotidienne. Elle conjugue, à travers des processus d’hybridation, ses
différents systèmes circulatoires désarticulés, mais ayant un important pouvoir
de production de subjectivités, grâce à son supposé « pouvoir d’être science »,
au poids de ses « visions scientifiques » qui empêchent toute une gamme
d’autres versions possibles. Ceci n’arrive pas sous une forme générique, mais à
travers des mécanismes bien spécifiques présents dans les psychotechniques et
les pratiques de recherche.
Revue d’anthropologie des connaissances – 2012/2 339

EN AYANT RECOURS
AUX MÉTHODES CANONIQUES
En partant de la discussion antérieurement présentée, l’objectif de cet article
est d’étudier empiriquement la production de subjectivités formées par les
différents systèmes circulatoires de la psychologie. Toutefois, comment étudier
de tels processus ? Comme le souligne Law (2004, 10), les méthodes ne sont
pas de simples dispositifs, fiables, de représentation d’une réalité donnée, mais
ils englobent des formes politiques de production de réalités. Dans ce cas, un
certain nombre de choix en termes de stratégie de recherche deviennent alors
importants.
Tout d’abord, il est urgent de mettre en question la portée de cette étude.
Il pourrait s’agir d’engager l’analyse d’un ensemble spécifique de dispositifs ou
de techniques psychologiques (tests, échelles d’attitude, sondages, courants
thérapeutiques ou de councelling, etc.), et de travaux de diffusion. Cependant,
dans cet article, l’option sera de rechercher en détail ces effets de subjectivation
sur une échelle plus large, sans faire attention aux dispositifs spécifiques qui
ont mené à sa production. À ce propos, ce que nous recherchons est non
seulement le fait de sonder sa force, mais aussi de la comparer avec celle
d’autres mécanismes de subjectivation, et enfin de mesurer la relation entre
certaines orientations et certains énoncés psychologiques.
Prenant en considération cette portée plus large, nous posons par la suite
la question de savoir quelle population pourrait être plus intéressante pour
cette étude. Le choix s’est porté sur une recherche auprès d’étudiants du
secondaire, ainsi considérés dans la mesure où ils portent, comme groupe, une
haute hétérogénéité en termes de quartiers d’origine, de niveau de revenu et
d’expériences culturelles. Malgré tout l’effort d’homogénéisation en termes de
contenus pédagogiques, il n’y a pas encore pour les étudiants de quelconque
spécialisation professionnelle, et dans le cas de la psychologie, aucun dispositif
spécifique, comme une discipline. En voulant soutenir une telle diversité, près de
290 élèves, originaires de quatre écoles publiques et privées de la ville de Rio de
Janeiro, ont été choisis pour participer à la présente recherche. Il s’agit d’écoles
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qui possèdent un public issu de différentes régions, avec différents pouvoirs © S.A.C. | Téléchargé le 08/01/2024 sur www.cairn.info (IP: 190.115.177.98)
d’achat (un élément qui, au Brésil, souligne encore d’énormes contrastes).
Cependant, le choix le plus délicat à faire concernait le propre design de la
recherche. Ici, nous avons cherché l’option la plus délicate de cette enquête.
La piste de base a été suggérée par Gergen (1976), qui affirme que même
les techniques de recherche psychologique les plus traditionnelles, comme les
échelles d’attitude, les questionnaires et les recherches expérimentales, offrent
des témoignages historiques d’une époque et jamais un radiographie ultime de
la nature humaine. Alors, comment de tels dispositifs de recherche supposément
marqués para la recherche de rigueur et de neutralité pourraient-ils mettre
en scène des éléments sur les processus de subjectivation psychologisée ?
Ne serions-nous pas ainsi en train de composer de telles méthodes avec
340 Revue d’anthropologie des connaissances – 2012/2

une ontologie et une conception de connaissances différentes de celles qui


orientèrent sa fabrication ?

Instruments et résultats
De manière plus spécifique, les instruments de cette recherche ont été élaborés
par une équipe formée d’étudiants du secondaire, d’assistants de recherche
en psychologie et des boursiers, disposant de la révision de psychologues de
diverses tendances et de professionnels de différents domaines (quand il y avait
des énoncés de leur domaine comparés à ceux de la psychologie). Une fois
élaborés, ces instruments ont été plusieurs fois pré-testés, cherchant l’équilibre
entre les alternatives présentées aux étudiants pour choisir. Comme cela est
de coutume au Brésil, ces instruments ont été soumis au comité d’éthique en
recherche de l’IESC/UFRJ, et dûment approuvés.
Afin de placer les personnes étudiées en position de « sujets ingénus », les
instruments ont été présentés comme étant ceux d’un sondage d’opinion sur
des thèmes généraux, produit par des chercheurs et des étudiants de différents
départements de l’UFRJ (mais pas de psychologie), en cachant également les
objectifs de la recherche. Ces derniers ne furent révélés qu’au moment où le
Terme de Consentement Éclairé à la participation à la recherche fut présenté,
suite à la réponse aux instruments. Les instruments et les résultats qui seront
présentés concernent la troisième visite de terrain. Nous ferons référence aux
applications antérieures, non seulement pour montrer des changements dans
les résultats, mais aussi des changements dans les transformations des propres
instruments.

Profil : identification d’autres dispositifs de psychologisation


Après avoir réalisé un questionnaire et établi les objectifs de la recherche,
simultanément à la présentation de l’Accord de Consentement Éclaire, il fut
demandé aux élèves de répondre à des questions sur leurs lectures, leurs
programmes favoris à la télévision, la profession souhaitée, la profession des
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parents et l’existence d’un contact avec des psychologues. Cela a été fait dans © S.A.C. | Téléchargé le 08/01/2024 sur www.cairn.info (IP: 190.115.177.98)
l’intention de détecter la présence d’un profil caractérisé par de possibles
agences de psychologisation. Pour cela, nous avons considéré trois degrés
possibles de présence de dispositifs psychologiques : 1) un profil psychologique
clair (contact avec des parents, des proches ou des amis psychologues, une
quelconque forme de soins psychologiques, l’accès à des livres, des revues,
des films sur des thèmes psychologiques, ou un intérêt dans la formation de
psychologue) ; 2) un profil clairement non psychologique (absence de tout
contact, soins ou intérêt) ; 3) un profil quasi psychologue (présence de cas
limites, comme l’influence de personnes exerçant une profession proche de
la psychologie telle que la pédagogie, la psychiatrie, la gestion, et des lectures
de revues ou de livres de développement personnel). La présence d’un certain
Revue d’anthropologie des connaissances – 2012/2 341

nombre d’indices quasi psychologiques dans un profil (plus de quatre) entraînait


la classification du profil étudié comme étant clairement psychologique.
Ces données de profil sont importantes pour être comparées aux résultats
de sondages, données qui signalent l’influence potentielle de dispositifs
producteurs de subjectivité et la conséquente possibilité d’adhésion préalable
aux discours psychologiques. Dans notre cas, nous avons constaté une claire
prédominance du profil non psychologique (voir graphique ci-dessous), malgré
le fait que, au sein des écoles de classe moyenne et supérieure, le profil se soit
montré nettement plus psychologique. À en juger par ces données initiales,
nous pouvons nous attendre à une faible adhésion aux dispositifs psychologiques
signalés dans les instruments de sondages. Ce n’est pourtant pas ce que nous
avons constaté, comme on le verra plus loin.

Figure 1. Sondage I - Le pouvoir de la parole du psychologue - Profil général


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Psychologique Quasi psychologique Non psychologique

CAP 38 22 7

Franco 27 12 15

C.M. 7 15 51

P.F. 14 13 45

Total 86 70 111 274

Fréquence (%) 31 26 43

Tableau 1. Sondage I - Le pouvoir de la parole du psychologue - Profil pour écoles


342 Revue d’anthropologie des connaissances – 2012/2

Avec ce premier sondage, nous voulions évaluer la concordance des


participants avec certains énoncés, en fonction de la position de l’énonciateur.
Pour le mettre en scène, nous avons présenté trois phrases sur la violence, de
nature cognitive, dynamique et comportementale. Ces phrases ont été attribuées
à différents énonciateurs (psychologue, chef religieux et homme politique),
variant sur un total de six combinaisons. Ce qui est attendu est que la majorité
des concordances devrait renvoyer au psychologue comme énonciateur, ou
comme supposé détenteur du capital de la vérité « scientifique ».
Les phrases présentées ont été formulées à partir de quelques pré-tests qui
cherchaient à établir un équilibre entre les choix :
1. La violence apparaît due aux exemples qu’une personne apprend
dans son milieu social.
2. La violence est le produit des frustrations dont certaines personnes
sont soumises constamment.
3. La violence apparaît à cause des résultats fructueux obtenus par les
personnes qui agissent de manière violente.
Les personnages fictifs auxquels ont été attribuées ces phrases de façon
combinatoire entre six possibilités ont été les suivantes:
William McGuire (psychologue).
Jonathan Benson (sénateur).
Peter Haraway (chef religieux).
Comme résultats, lors de la troisième application de ce sondage,
138 questionnaires ont été remplis. Dans cette application, comme dans les
deux études antérieures (Ferreira et al., 2004 et 2005), nous n’avons pas
constaté de différence significative dans le test du khi carré (au moins parmi les
bandes de signification pour les tests statistiques en psychologie) par rapport
au choix des énonciateurs. Également, dans toutes les applications, il y a eu
une majorité de choix envers les phrases attribuées au psychologue. La seule
nouveauté, par rapport à l’altération de position des autres énonciateurs, est le
passage du sénateur à la deuxième place. Il est possible de vérifier ces aspects
dans le tableau ci-dessous.
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Psychologue Religieux Sénateur

Phrase 1 11 8 7

Phrase 2 11 9 8

Phrase 3 6 5 4

Total 28 22 19

Fréquence (%) 40 32 28

Tableau 2. Sondage 1 – Troisième Application : Résultats pour phrase


Revue d’anthropologie des connaissances – 2012/2 343

Il y avait également dans ce sondage un espace pour que les sujets justifient
leurs choix, ce qui n’a pas été réalisé par la majorité ; le peu d’entre eux qui
l’ont fait ont pris le contenu de la phrase comme base, sans faire référence
aux caractéristiques des énonciateurs. Comment articuler la préférence des
psychologues pour l’absence de toute justification attachée à l’énonciateur ?
Notre hypothèse suggère que le psychologue, étant supposé représenter le
discours scientifique, peut se montrer plus confiant dans les choix des personnes
étudiées, au moins dans les situations de doute entre deux phrases.

Figure 2. Sondage 1 - Comparaison entre applications

Sondage 1 Sondage 2 Sondage 3

Psychologue 41 % 40 % 38 %

Religieux 33 % 32 % 27 %
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Sénateur 26 % 28 % 35 %

Tableau 3. Sondage 1 - Comparaison entre applications

Sondage 2 - Un instantané des psychologues


L’objectif de ce sondage fut d’examiner s’il existe une image du psychologue
préalablement établie par les étudiants interrogés et, si c’est le cas, de détecter
de quelle image il pourrait s’agir.
Nous avons demandé aux participants de choisir cinq caractéristiques faisant
référence à ces professionnels, à partir d’une liste de vingt attributs. Parallèlement,
les participants devaient chiffrer de un à cinq l’ordre de préférence de leurs choix.
Cette liste de vingt attributs provenait d’une première application dans laquelle
344 Revue d’anthropologie des connaissances – 2012/2

les interviewés écrivaient librement les attributs, mettant postérieurement en


évidence les plus fréquents. La liste finale fut la suivante :
Ami, Attentionné, Calculateur, Calme, Compétent, Convainquant,
Courageux, Créatif, Dynamique, Studieux, Excentrique, Honnête,
Intelligent, Manipulateur, Observateur, Obstiné, Précis, Serviable, Soigneux
et Talentueux.

Dans ce sondage, depuis la seconde application, il existait deux sous-catégories


basiques de présentation : la forme A, où l’on présente la liste simplement avec
les attributs à corréler avec chacune des quatre professions, et quatre autres
formes dans lesquelles la liste précédente est attachée à la photographie d’un
supposé professionnel : forme B (psychologue), forme C (médecin), forme D
(avocat) et forme E (ingénieur). La mise en place de la photo vise à évaluer si le
choix des caractéristiques du modèle de la photo pourrait être influencé par la
profession attribuée à celle-ci.
Près de 140 questionnaires ont été analysés. Pour résultats on obtient le fait
que certaines caractéristiques attachées aux psychologues se sont maintenues
significativement en évidence : observateur, soigneux et calme, avec une petite
variation de la forme 2A vers la forme 2B, ce qui pourrait s’expliquer par les
aspects singuliers de la photo utilisée. Ces caractéristiques se maintiennent
prédominantes depuis la première application (voir le graphique plus bas), ce
qui nous amène à penser qu’il y a une image fortement établie du psychologue
parmi les étudiants de secondaire (également produite au moment même du
test). Qu’est-ce que l’ensemble de ces caractéristiques implique ? La présence
du psychologue en tant que observateur serein, réceptif et affectueux, dans un
certain sens, le dote comme étant le plus apte à un certain type d’abord et à
mener la conduite des autres.
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Figure 3. Sondage 2 – Comparaison entre les applications


Revue d’anthropologie des connaissances – 2012/2 345

Sondage 3 : Le pouvoir des énoncés psychologiques


À travers le troisième sondage, nous avons essayé de détecter un contraste
dans l’évaluation par les personnes étudiées des énoncés de type psychologique,
organiciste et ésotérique. Pour qu’il y ait une certaine fiabilité, les énoncés ont
été proposés par des psychologues, des médecins et des personnes liées aux
pratiques ésotériques. Ces énoncés ont été proposés comme réponse à partir
de questions relatives à la causalité, au diagnostic et au traitement de douze
thèmes. Ces derniers étaient de nature psychologique (comme la dépression
et l’anxiété), organique (comme la gastrite et l’hypertension), ou ésotérique
(comme les visions et la transe). Face à ces thèmes généraux, six alternatives
furent présentées pour chaque question. Ces alternatives variaient également,
deux par deux, entre les formats psychologique, organiciste et ésotérique (il y
avait un espace pour d’autres alternatives).
Voici un exemple de question et ses alternatives :
La meilleure explication pour la cause de dépression est :
a. Une carence de substances chimiques dans le système nerveux
b. L’influence d’énergie négative
c. La prédisposition génétique de l’individu
d. L’occurrence de problèmes émotionnels
e. La présence de perturbation spirituelle
f. L’existence de conflits dans les relations sociales
g. Autres alternatives
Le format de ce sondage a également varié au long des diverses applications,
depuis le modèle des échelles d’attitude jusqu’aux formes actuelles avec trois
alternatives : choix exclusifs parmi les alternatives (forme A) ; le nivellement
par point d’alternatives (forme B) et l’ordonnance entre les alternatives
(forme C).
Les résultats ont été obtenus à partir de 129 questionnaires (42 dans la
forme A, 42 dans la forme B et 45 dans la forme C). Afin d’évaluer ces résultats,
nous avons utilisé le test t de Student (forme A) et l’analyse de variance
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(formes B et C). La prédilection fut maintenue, comme dans les applications
précédentes, par les énoncés psychologiques dans la forme A (choix libre) avec
48 % des préférences. Néanmoins, dans les formes B et C, il y eut une plus
grande prédilection envers les énoncés ésotériques (36 % dans les formes B
et C), à la différence des deux applications précédentes, où le choix pour des
énoncés psychologiques a clairement prédominé. Les graphiques et les tableaux
suivants illustrent les résultats du présent sondage :
346 Revue d’anthropologie des connaissances – 2012/2

4DJFOUJàRVF

Figure 4. Modèle 3A – Troisième application

Psychologique Ésotérique Scientifique

Total 223 138 109

Fréquence (%) 48 29 23

Tableau 4. Modèle 3A – Troisième application

4DJFOUJàRVF
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Figure 5. Modèle 3B – Troisième application

Psychologique Ésotérique Scientifique

Total 2996 3243 2629

Fréquence (%) 34 36 30

Tableau 5. Tableau 5. Modèle 3B – Troisième application


Revue d’anthropologie des connaissances – 2012/2 347

4DJFOUJàRVF

Figure 6. Modèle 3C – Troisième application

Psychologique Ésotérique Scientifique

Total 3623 4051 3470

Fréquence (%) 33 36 31

Tableau 6. Modèle 3C – Troisième application

Cette variation en faveur des énoncés ésotériques peut avoir eu lieu du


fait que ceux-ci ont été, dans la plupart des cas, avec un score (forme B) ou
un ordre (forme C) moyens, au contraire des énoncés psychologiques et
neuroscientifiques, qui oscillaient beaucoup dans leur score et leur ordre.
De toute manière, ce résultat montre que, lorsque le choix envers certains
discours peut être fait de manière plus libre, sans avoir besoin de faire des
choix excluant (comme dans les formes B et C), la différence d’adhérence entre
les énoncés tend à être moindre.
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Sondage 4 : équilibre entre diverses psychologies
À travers le quatrième sondage, nous avons cherché à évaluer la force des
énoncés des principales orientations psychologiques (psychanalyse, humanisme,
behaviorisme et cognitivisme) à partir de la considération de certains problèmes.
Pour cela, nous avons proposé neuf questions en rapport à la causalité, au
diagnostique et la forme de traitement de différents thèmes. De la même
manière qu’au troisième sondage, trois formes ont été proposées : dans la
première, il était demandé que les participants marquent la meilleure option
(forme A), dans la deuxième, le niveau de concordance (forme B) et dans la
troisième, qu’ils classent par ordre de préférence (forme C). Afin d‘évaluer les
instruments, nous avons consulté des psychologues appartenant à chacune des
tendances citées. Voici un exemple des types d’énoncés :
348 Revue d’anthropologie des connaissances – 2012/2

La meilleure manière de combattre l’anorexie nerveuse (peur de grossir)


est :
a. de modifier les pensées et les opinions de la personne sur
l’alimentation à travers une approche lente et réfléchie ;
b. de chercher à comprendre les conflits inconscients liés à l’acte de
s’alimenter ;
c. de comprendre la réalisation personnelle de l’individu ; celle-ci peut
être en complète dépendance de l’approbation des autres ;
d. de récompenser les formes d’alimentation adéquates.
Les résultats ont été extraits de 142 questionnaires, 52 faisant référence
au modèle A, 45 faisant référence au B, et 45 au modèle C. Des différences
significatives ont été obtenues dans les analyses statistiques (selon les patrons
de recherche en psychologie) du modèle A (test t de Student) et dans les
modèles B et C (analyse de la variance). Dans ce cas, nous avons constaté une
préférence générale par les énoncés psychanalytiques et cognitivistes, avec une
alternance de préférence entre les deux. Les énoncés cognitivistes ont eu une
plus grande préférence dans le format A (choix exclusif) et la psychanalyse dans
les formats B et C (respectivement niveau de points et ordonnance). Ceci peut
être observé dans les graphiques suivants :
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Figure 7. Modèle 4A – Troisième application

Behavioriste Cognitiviste Humaniste Psychanalytique

Total 63 151 98 148

Fréquence (%) 14 33 21 32

Tableau 7. Modèle 4A – Troisième application


Revue d’anthropologie des connaissances – 2012/2 349

Figure 8. Modèle 4B – Troisième application


Behavioriste Cognitiviste Humaniste Psychanalytique

Total 1281 1494 1302 1537

Fréquence (%) 23 27 23 27

Tableau 8. Modèle 4B – Troisième application


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Figure 9. Modèle 4C – Troisième application

Behavioriste Cognitiviste Humaniste Psychanalytique

Total 524 629 591 652

Fréquence (%) 22 26 25 27

Tableau 9. Modèle 4C – Troisième application


350 Revue d’anthropologie des connaissances – 2012/2

Ces résultats correspondent avec ceux de la deuxième application dans la


mesure où ils démontrent des niveaux de points assez élevés pour la psychanalyse
et le cognitivisme au détriment du faible nombre de choix envers l’humanisme
et le behaviorisme. Ces deux orientations se disputent le leadership au long des
années et des formats. Ce résultat s’articule au débat actuel entre deux courants
qui se déroule dans un cadre de conquête du plus haut statut de scientificité,
de financements de recherche et de mises en œuvre de politiques publiques.
Un exemple de ce phénomène est l’âpre débat public qui a lieu en France
entre ces deux courants2. Ce mouvement finit par polariser les discussions (ce
qui peut expliquer une préférence inférieure aux énoncés d’autres lignes), et
explique l’oscillation entre la prépondérance de l’énoncé de la psychanalyse et
du cognitivisme.

CONCLUSION
Les résultats de cette étude ont démontré que les étudiants démontrent une
grande adhésion au discours psychologique face aux questions relatives à la façon
traditionnelle de faire de la recherche : ceux-ci tendent à être d’accord avec
des énoncés exprimés par des psychologues, au détriment de ceux proférés par
des hommes politiques ou des chefs religieux. Ils ont une image du psychologue
comme étant celui qui observe à distance, qui radiographie l’âme humaine. Ils ont
une plus grande prédilection pour des explications psychologiques plutôt que
pour des explications ésotériques ou scientifiques, et ils adhèrent fortement à la
compréhension des phénomènes humains des principaux courants théoriques
de la psychologie, surtout à la psychanalyse et au cognitivisme, les courants qui
actuellement ont le plus propagé au public leurs positions face aux thèmes les
plus variés. Nous pourrions conclure de manière simplifiée en disant que de
tels résultats soulignent clairement un haut degré de production de subjectivité
psychologisée parmi les élèves du secondaire.
Mais cela serait conclure d’une manière représentationnelle, même si cela
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vient contredire en termes de résultat toute la perspective consistant à réfléchir
sur la réalité des personnes étudiées d’une manière purifiée. Il faut reprendre
la propre conception d’une connaissance produite comme une articulation
multiple entre entités, comme le font l’épistémologie politique et la théorie
acteur réseau. La connaissance étant articulation et attachement, l’influence
n’est jamais vue comme un problème. C’est ici que nous aurions la division
entre une bonne et une mauvaise articulation (docilité ou récalcitrance). Et
cette dernière serait rare dans la psychologie et dans les sciences humaines,
étant donnée la forte soumission à l’autorité des chercheurs.

2 Ici, le déclencheur ou le symptôme de ce conflit a été la publication de l’ouvrage Le Livre Noir


de la psychanalyse par Catherine Meyer (2005).
Revue d’anthropologie des connaissances – 2012/2 351

Comment ces modes d’articulation se manifestent-ils sous la forme de


recherche réalisée ? Despret (2004) avance l’idée que la possibilité de la
récalcitrance dans les témoignages psychologiques, assez rare, devienne plus
difficile aux côtés de dispositifs qui travaillent avec des participants placés
dans une position d’« ingénus ». Nous aurions ici une inversion par rapport
à un grand nombre de manuels d’histoire de la psychologie : le passage du
sujet entraîné vers le sujet ingénu n’est pas seulement un pas en avant de la
connaissance psychologique vers l’objectivité et le contrôle, mais bien un pas en
arrière vers la possibilité de récalcitrance, produisant des articulations dociles,
asymétriques et limitantes en fonction de leurs témoignages. Des sujets sans
l’excellence de l’expertise ne prennent pas le risque de prendre position dans
les recherches (Despret, 2002, 97). C’est dans ce pacte que se fonderaient
beaucoup de recherches psychologiques, et ainsi, d’autres possibilités d’échanges
entre enquêteurs et enquêtés (Depret, 2002, 100).
Cependant, ces dispositifs objectivants ne garantiraient pas une position
d’absolue ingénuité de la part les sujets psychologiques. Ils ne garantiraient
qu’une position ambivalente de ceux-ci, entre la confiance donnée à la crédibilité
des scientifiques et le soupçon que quelque chose se cacherait derrière, comme
cela peut être observé dans les entretiens avec les participants de l’expérience
classique de Stanley Milgram sur l’obéissance à l’autorité (Despret, 2002, 99).
L’effet de ceci serait une sorte de clivage dans la conscience, typique des
situations conjointes de confiance et méfiance : l’obéissance au scientifique,
mais avec un certain soupçon dans la tentative de comprendre ce qui se passe.
Dans le cas de la recherche présentée ici, certains des étudiants interviewés
postérieurement ont compris de manière claire qu’il s’agissait d’une recherche
de psychologie (associée à la médecine, la psychiatrie, le journalisme ou la mode),
visant à comprendre quelque élément sur « la pensée ou le comportement
des personnes ». Dans une interview, un étudiant affirma que le questionnaire
fonctionna comme un examen d’orientation, éveillant en lui le « choix pour la
psychologie ».
Par conséquent, dans le cas des résultats de la présente recherche, la
captation d’une subjectivité psychologisée nous conduit à un dilemme : a) soit la
méthode représente bien la réalité, mais il s’agirait d’une réalité où il n’y a pas de
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sujet ingénu et indifférent (au contraire, assez psychologisé) ; b) soit la méthode © S.A.C. | Téléchargé le 08/01/2024 sur www.cairn.info (IP: 190.115.177.98)
ne fonctionne pas, même en essayant de préserver l’ingénuité des enquêtés, en
les influençant, en extorquant leur vérité d’une manière plus insidieuse. À partir
de cela, nous pouvons conclure que ces instruments psychologiques, bien que
les efforts soient rigoureux afin de prévenir quelque effet, n’arriveront jamais à
livrer la pureté d’un sujet, hors de toute forme d’influence, à la façon d’une table
rase. Malgré cela, et surtout parmi les propres milieux des recherches les plus
canoniques (comme ce qui est réalisé dans cette étude), il n’y a pas moyen de
se délivrer d’une certaine influence, du fait qu’elle est arrivée préalablement par
divers dispositifs répartis à travers les réseaux socio-techniques (bien que non
clairement établis comme aurait pu le démontrer le profil) ou postérieurement
par les modes d’articulation produits par la recherche.
352 Revue d’anthropologie des connaissances – 2012/2

En guise de conclusion, nous pouvons par conséquent dire que la finalité de


ce travail n’est pas celle de libérer la psychologie de cette ardeur purificatrice
au nom de la vérité scientifique, en même temps qu’elle est productrice de
subjectivités (ce qui serait également un processus de purification). Mais
précisément il s’agit de pouvoir capter quelques éléments de ce processus
à travers l’intermédiaire paradoxal de ses méthodes et stratégies les plus
purifiées, et d’ouvrir, ainsi, la possibilité à d’autres formes de produire le savoir
psychologique, en transformant celui-ci en un « endroit d’exploration et de
création de ce que les humains peuvent être capables quand on les traite avec
la confiance qui s’offre aux experts » (Despret, 2004, 102). Probablement, ce ne
doit pas être très différent de ce que nous réalisons aujourd’hui, sans aucune
prétention purificatrice, en ayant ces formes tissées au sein de la production
d’un « plurivers » de subjectivités.

Remerciements
Au professeur Rodolfo Ribas de l’Institut de Psychologie de l’Université Fédérale
de Rio de Janeiro et à Estevão Oliveira de Paula (in memoriam)
pour l’aide apportée sur la partie statistique.

RÈFERENCES BIBLIOGRAFIQUES
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Arthur Arruda LEAL FERREIRA est professeur adjoint à l’Instituto


de Psicologia de l’Université Fédérale de Rio de Janeiro et des Programas
de pós-graduação en histoire de la science, technologie et épistemologie
(HCTE) et de Psychologie. Chercheur financé par le CNPq (boursier de
productivité).

Adresse Rua do Riachuelo 169/405


Centro - Rio de Janeiro – RJ
CEP 20230-000
Courriel arleal@superig.com.br

Eduardo Bazilio GOMES CORREIA (FAPERJ) est psychologue à


l’IP/UFRJ. Boursier scientifique débutant (FAPERJ e PIBIC).

Juliana de Moura QUARESMA MAGALHÀES (PIBIC/ UFRJ) est


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psychologue à l’IP/UFRJ et maître du programme de pós-graduação en © S.A.C. | Téléchargé le 08/01/2024 sur www.cairn.info (IP: 190.115.177.98)
Pychologie. Boursier scientifique débutant (PIBIC/UFRJ).

Patícia ZORNOFF GAVAZZA est psychologue à l’IP/UFRJ et


stagiaire de recherche.

Geovana de AZEVEDO GOMES est étudiante en psychologie à l’IP/


UFRJ et stagiaire de recherche.
354 Revue d’anthropologie des connaissances – 2012/2

Natalia BARBOSA PEREIRA est boursière de recherche et étudiante


en psychologie à l’IP/UFRJ.

Paulo Santos VIOLA COELHO est étudiant en psychologie à l’IP/


UFRJ et stagiaire de recherche.

Rodrigo José PIRES MADEIRA est psychologue à l’IP/UFRJ et


stagiaire de recherche.

Abstract: The psychologies beyond epistemologies:


a plural space of subjectivity production
The aim of this article is to produce a general comprehension about
the radical multiplicity of psychology as a network of different and
even contradictory theories and practices. First, we will present
the epistemological discussion about this radical multiplicity,
enphasizing how this debate is attached to the question about
psychological scientificity. After that, this radical plurality will be
considered beyond the epistemological view, using Bruno Latour,
Annemarie Mol and Joh Law´s Actor-Network Theory and
Isabelle Stengers and Vinciane Despret´s Political Epistemology.
For these authors, not only is this multiplicity considered positive
for science, but the psychologies are considered as subjectivity
production devices. These suppositions oriented a group of
researches by high-school students in Rio the Janeiro, with the aim
of detecting the presencce of these psychologized subjectivities.
In the conclusion the results of these researches will be discussed,
considering the onthological policies involved in the choices of
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methods.

Keywords: multiplicity of psychology, actor-network theory,


political epistemology, subjectivity production

Resumen: la psicología más allá de las epistemologías:


un campo plural de producción de subjetividades
El objetivo general de este artículo es el de ofrecer una comprensión
sobre la multiplicidad radical presente en la psicología como una
red de teorías y prácticas diversas, y asimismo contradictorias
entre sí. Para ello, presentaremos inicialmente una discusión
epistemológica sobre la multiplicidad radical, destacando la forma
Revue d’anthropologie des connaissances – 2012/2 355

con que este debate está vinculado al de la cientificidad de la


psicología. A continuación, se planteará otro modo de considerar
esta multiplicidad radical, tomando como base la Teoría Actor-
Red de Bruno Latour, Annemarie Mol y John Law, así como la
Epistemología Política de Isabel le Stenges y Vicianne Despret.
Partiendo de la consideración de las diversas psicologías como
dispositivos de producción ontológica de subjetividades, se
mostrará finalmente un conjunto de trabajos de investigación
tratando de evaluar la presencia y las formas de subjetivación
psicologizadas entre estudiantes adolescentes de la ciudad de Rio
de Janeiro. En el apartado de conclusiones serán discutidos los
resultados de esta investigación, teniendo en cuenta las propias
políticas ontológicas presentes en la elección de los métodos
utilizados.

Palabras claves: multiplicidad de la psicología, teoría del actor-


red, epistemología política, producción de subjetividades
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