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La psychologie au-delà
des épistémologies
resume
La finalité de cet article est d’aborder la question de la multiplicité
radicale de la psychologie, qui se présente comme un réseau de
savoirs et de pratiques trop diverses et même contradictoires.
Pour accomplir cet objectif, sera tout d’abord présenté le débat
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LE DÉBAT ÉPISTÉMOLOGIQUE
SUR LA MULTIPLICITÉ
DE LA PSYCHOLOGIE
Dans les pays francophones1, le débat sur la pluralité du savoir psychologique
est mené depuis les années 1940, entre les défenseurs de l’unité comme Daniel
Lagache (1988/1949) et Robert Pagès (1958) et leurs opposants qui dénoncent
la pluralité de la psychologie, tels que Georges Canguilhem (1973/1956), Jacques
Gagey (1968) et Michel Bernard (1983). Les premiers soutiennent l’idée selon
laquelle l’unité est calquée tantôt sur un projet d’une science des « réponses
significatives dans lesquelles l’être vivant intègre les tensions qui menacent
l’intégrité et l’équilibre de l’organisme » (Lagache, 1988/1949), tantôt sur la
propre possibilité d’opérationnalité empirique des problèmes (Pagès, 1958).
D’un autre côté, les auteurs qui soutiennent la pluralité se caractérisent par le
fait de vouloir tenter de l’expliquer. C’est ainsi que Canguilhem et Gagey, inspirés
par le rationalisme appliqué de Gaston Bachelard, délèguent la pluralité à des
projets différenciés, inspirés par d’autres sciences, qui habiteraient le champ
psychologique. Canguilhem (1973/1956) présente cinq projets psychologiques
possibles, sans aucun entrelacement entre eux : a) comme science de l’aube
(d’inspiration aristotélicienne) ; b) comme science du sens interne (erronément
basée sur les méditations cartésiennes) ; c) comme physique du sens externe
(contrastant notre expérience avec la réalité indiquée par la physique) ; d)
comme science du sens intime (inspirée par des questions psychopathologiques) ;
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1 Ce débat épistémologique sur la multiplicité de la psychologie a été assez présent dans d’autres pays,
comme les États-Unis (par exemple, le débat autour de la proposition du positivisme unifié de Staats,
1991) et même au Brésil (voire l’excellent article de Garcia-Roza, 1977). Le choix du paysage français
s’est réalisé du fait de sa longévité et de ses positions bien marquées. Cependant, il est important de le
considérer dans le contexte de l’absorption de la psychanalyse dans le milieu académique français : soit
par la psychologie, soit en contraste avec celle-ci. Une bonne analyse, par exemple, des dédoublements
de l’article de Canguilhem (1973/1956) peut se trouver chez Roudinesco (1993).
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grand nombre de différences possibles – ainsi maximisant les articulations – © S.A.C. | Téléchargé le 08/01/2024 sur www.cairn.info (IP: 190.115.177.98)
et non une manière de diminuer le nombre de versions alternatives du même
phénomène ».
D’une manière similaire, Annemarie Mol et John Law conçoivent la
multiplicité dans un sens positif en l’envisageant comme agencement de
différents dispositifs scientifiques et techniques, à partir de leur conception
de politiques ontologiques. Pour ces auteurs, plus qu’elles ne représentent
une réalité pré-donnée de différentes perspectives, ces différentes pratiques
scientifiques produisent des mondes différents (multiples) sans aucune unité
ultime (singularité), mais pas complètement désarticulés (pluralité). C’est ici que
se réalise la spécificité du terme multiplicité : ce n’est ni une anomalie face à un
monde unique et singulier, tel que le conçoit la métaphysique euro-américaine
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(Law, 2004, 25), ni une pluralité d’événements sans attache : « Nous sommes
dans un monde dans lequel corps, organisations, ou machines sont plus qu’un et
moins que beaucoup. Quelque chose dans l’entre-deux » (Law, 2004, 62).
On trouve un exemple de cette multiplicité réalisée dans l’étude de Mol (2002)
sur l’artériosclérose. Celle-ci n’est pas comprise comme un état pathologique
inhérent au corps en vue d’être représenté à partir de différentes perspectives
(dans le laboratoire ou en examens cliniques). Chacune de ces pratiques
scientifiques réalise une forme d’artériosclérose, une réalité pathologique qui
n’est pas nécessairement identique, mais qui n’est pas absolument distincte.
D’où le terme politiques ontologiques, car chaque méthode, chaque pratique
scientifique réalise une réalité déterminée entre d’autres réalités possibles, qui
dans le jeu avec les autres pratiques scientifiques constitue un multivers : plus
qu’un, moins que beaucoup.
Pour Latour (2001-A), la connaissance scientifique se produit également
dans le cadre d’une performance plurielle dans l’articulation et le co-
attachement entre divers acteurs et dans la production inattendue d’effets. Pour
comprendre d’une façon plus détaillée les multiples modes d’articulation des
savoirs scientifiques, il est nécessaire de faire référence au modèle de système
circulatoire de Latour. Ici, chaque pratique scientifique est abordée à partir de
son vaste et dense système de réseaux et de capillarités, sans les oppositions
traditionnelles des historiens des sciences entre les approches internalistes et
externalistes. De la même façon qu’il n’est pas logique de se questionner si notre
système circulatoire est essentiellement un cœur ou des veines et des artères,
les pratiques scientifiques ne peuvent être prises seulement soit comme réseau
conceptuel (internalisme), soit comme contexte social (externalisme) (phrase
à reconstruire mais comment sans altérer l’idée des auteurs ?). En essayant de
dépasser cette ancienne opposition, Latour propose son système circulatoire,
composé par une série de circuits :
1. Mobilisation du monde, ou ensemble de médiations aptes à faire
circuler les entités humaines et non humaines à travers le discours
(instruments, relevés, questionnaires et expéditions).
2. Autonomisation, ou délimitation d’un champ de spécialistes
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En ce qui concerne l’autonomisation, il y a entre les psychologues quelque © S.A.C. | Téléchargé le 08/01/2024 sur www.cairn.info (IP: 190.115.177.98)
chose que Canguilhem (1973) a pu désigner comme un consensus plus pacifique
que logique, étant donné l’ensemble des orientations, projets et versions présents
dans notre champ d’étude. L’autonomie de la psychologie comme savoir et
pratique se produit en même temps que se génère une autonomisation de divers
groupes en des versions de la psychologie désarticulées et même antagonistes
entre elles (structuralisme, fonctionnalisme, behaviorisme, gestaltisme,
psychanalyse, etc.). Comme le souligne Foucault (1957), la psychologie se
constitue dans un processus de dénonciations réciproques d’illusion entre
les différents groupes de recherche : dénonciation de l’élémentarisme, du
mentalisme, de l’insuffisance de la conscience, etc. Toutefois, le problème ne
concerne pas seulement notre articulation interne, produisant une géopolitique
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fragmentée comme en Bosnie dans les années 1990 ; on peut dire également
que les frontières de la psychologie sont plutôt poreuses, s’ouvrant dans des
directions les plus diverses : psychiatrie, pédagogie, gestion et neuroscience,
créant plusieurs espaces indifférenciés avec des collaborations, mais également
des disputes de compétences. Ici, d’une manière plus claire que dans n’importe
lequel des composants du système circulatoire, s’exprime sa pluralité inarticulée ;
la psychologie serait plus articulée « externellement » qu’« internement ».
Il est possible d’affirmer que le préfixe psycho désigne ici plus un mode de
travail emprunté à divers domaines (psycho-métrie, psycho-physique, psycho-
physiologie, psycho-sociologie, etc.) qu’à un champ professionnel articulé de
forme singulière ou multiple.
Quant aux alliances, celles-ci ont été apparemment ambiguës car, si
l’investissement des gouvernements et du privé dans certains secteurs
scientifiques est bien plus important qu’en psychologie, d’un autre côté, nous
assistons à une diversification des intérêts en relation avec le savoir psychologique.
Si, initialement, cet intérêt se concentrait sur des fonctions bien délimitées
comme la sélection et l’ajustement dans des espaces spécifiques comme l’école
ou l’usine, aujourd’hui cet intérêt se répand sur toute une série de champs,
par exemple sur la bureaucratie gouvernementale, sur les forces armées et de
sécurité, et sur l’appareil judiciaire, entre autres. Cet intérêt se répand sous des
formes bien diverses : analyse organisationnelle et institutionnelle, diagnostic
sur les individus et les groupes, planning des activités, travaux communautaires,
etc. Selon Rose (1998), les psychologies deviennent d’importants vecteurs dans
les modes actuels de gestion des populations.
Néanmoins, c’est dans le champ des représentations publiques que l’on
possède un plus grand réseau d’articulations et d’intérêts autour de la psychologie,
même si l’on considère certaines méfiances de son public à son égard. Ces
articulations se produisent en particulier à travers une forte croyance en son
supposé savoir sur la nature humaine. Dans ce cas, il est clair que certaines
catégories comme celles d’Inconscient ou de Complexe d’Œdipe sont devenues
capitales dans la relation avec nous-même ou avec les autres. La différence par
rapport aux approches épistémologiques est que ces représentations publiques
ne sont pas prises comme des distorsions, des croyances ou des résidus culturels
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d’une opération scientifique ; elles sont des traductions ou des translations qui © S.A.C. | Téléchargé le 08/01/2024 sur www.cairn.info (IP: 190.115.177.98)
garantissent la densité et même la réalité d’un système circulatoire donné dans le
champ des psychologies.
Quant à la mobilisation du monde, Rose (1998) souligne que la grande
nouveauté des savoirs psychologiques serait la création de techniques
d’inscription aptes à quantifier et abréger notre subjectivité pour des dispositifs
de gouvernement dans des sociétés libérales-démocrates. Pourtant, comme
le rappelle Stengers (1989), ces techniques d’inscription dans la psychologie
sont rarement produites de manière innovante, étant généralement capturées
à partir de modèles consacrés dans d’autres sciences comme la physique, la
chimie ou la biologie. Un autre problème est que, dans le champ psychologique,
les techniques de mobilisation qui ont été forgées ne circulent pas librement ;
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elles se diffusent à peine dans un domaine donné où elles peuvent être façonnées.
Ce ne serait pas ce que Latour (2001-B, 350) désignerait comme « mobiles
immuables ». Dans les réseaux psychologiques, les dispositifs sont immobiles
car ils sont restreints à un certain projet ou version, et également muables
grâce à leur puissance de production de subjectivité dans l’articulation entre les
témoignages et le public consommateur.
Si quelque chose néanmoins unit les diverses psychologies, c’est bien leur
multiple capacité de fabriquer des sujets, des moi artificiels (Latour, 1998) soit
à travers la diffusion de leur savoir, soit à travers le traitement ou le diagnostic
et à travers leurs propres activités de recherche. Comme nous l’avons vu, cet
aspect productif, qu’il soit de mondes ou de subjectivités, n’est pas conçu par
la Théorie de l’Acteur-Réseau (et l’épistémologie politique) comme un reste
parasitaire, mais comme un aspect propre de la production de connaissances. Le
problème se trouve dans le fait que, de manière très fréquente, se présente un
mode de production basé sur l’extorsion de témoignages (Stengers, 1989) ; non
seulement par la façon dont les tâches sont demandées, mais particulièrement
par la façon dont ces témoignages s’expriment, présentant rarement des
problèmes ou des questions. Cette idée est en accord avec la distinction
opérée entre l’obéissance régulière et la docilité à l’autorité scientifique des
êtres humains en opposition à la récalcitrance des êtres non-humains :
« Au contraire des non-humains, les humains ont une grande tendance,
quand placés en présence d’une autorité scientifique, à abandonner toute
récalcitrance et à se comporter comme des objets obéissants offrant
aux chercheurs juste des déclarations redondantes, confortant alors
ces chercheurs dans la croyance qu’ils produisent des faits ‘scientifiques’
robustes et qu’ils imitent la grande solidité des sciences naturelles »
(Latour, 2004, 217).
témoignage des sujets, empêchant toute possibilité de récalcitrance. En peu de © S.A.C. | Téléchargé le 08/01/2024 sur www.cairn.info (IP: 190.115.177.98)
mots, nous pouvons dire que la psychologie est une puissante machine à multiples
captures (Ferreira, 2001), capturant et articulant des concepts scientifiques, des
stratégies de mobilisation, des intérêts de communautés scientifiques et une
série d’institutions et de groupes, répondant aux questions et aux exigences de
notre vie quotidienne. Elle conjugue, à travers des processus d’hybridation, ses
différents systèmes circulatoires désarticulés, mais ayant un important pouvoir
de production de subjectivités, grâce à son supposé « pouvoir d’être science »,
au poids de ses « visions scientifiques » qui empêchent toute une gamme
d’autres versions possibles. Ceci n’arrive pas sous une forme générique, mais à
travers des mécanismes bien spécifiques présents dans les psychotechniques et
les pratiques de recherche.
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EN AYANT RECOURS
AUX MÉTHODES CANONIQUES
En partant de la discussion antérieurement présentée, l’objectif de cet article
est d’étudier empiriquement la production de subjectivités formées par les
différents systèmes circulatoires de la psychologie. Toutefois, comment étudier
de tels processus ? Comme le souligne Law (2004, 10), les méthodes ne sont
pas de simples dispositifs, fiables, de représentation d’une réalité donnée, mais
ils englobent des formes politiques de production de réalités. Dans ce cas, un
certain nombre de choix en termes de stratégie de recherche deviennent alors
importants.
Tout d’abord, il est urgent de mettre en question la portée de cette étude.
Il pourrait s’agir d’engager l’analyse d’un ensemble spécifique de dispositifs ou
de techniques psychologiques (tests, échelles d’attitude, sondages, courants
thérapeutiques ou de councelling, etc.), et de travaux de diffusion. Cependant,
dans cet article, l’option sera de rechercher en détail ces effets de subjectivation
sur une échelle plus large, sans faire attention aux dispositifs spécifiques qui
ont mené à sa production. À ce propos, ce que nous recherchons est non
seulement le fait de sonder sa force, mais aussi de la comparer avec celle
d’autres mécanismes de subjectivation, et enfin de mesurer la relation entre
certaines orientations et certains énoncés psychologiques.
Prenant en considération cette portée plus large, nous posons par la suite
la question de savoir quelle population pourrait être plus intéressante pour
cette étude. Le choix s’est porté sur une recherche auprès d’étudiants du
secondaire, ainsi considérés dans la mesure où ils portent, comme groupe, une
haute hétérogénéité en termes de quartiers d’origine, de niveau de revenu et
d’expériences culturelles. Malgré tout l’effort d’homogénéisation en termes de
contenus pédagogiques, il n’y a pas encore pour les étudiants de quelconque
spécialisation professionnelle, et dans le cas de la psychologie, aucun dispositif
spécifique, comme une discipline. En voulant soutenir une telle diversité, près de
290 élèves, originaires de quatre écoles publiques et privées de la ville de Rio de
Janeiro, ont été choisis pour participer à la présente recherche. Il s’agit d’écoles
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qui possèdent un public issu de différentes régions, avec différents pouvoirs © S.A.C. | Téléchargé le 08/01/2024 sur www.cairn.info (IP: 190.115.177.98)
d’achat (un élément qui, au Brésil, souligne encore d’énormes contrastes).
Cependant, le choix le plus délicat à faire concernait le propre design de la
recherche. Ici, nous avons cherché l’option la plus délicate de cette enquête.
La piste de base a été suggérée par Gergen (1976), qui affirme que même
les techniques de recherche psychologique les plus traditionnelles, comme les
échelles d’attitude, les questionnaires et les recherches expérimentales, offrent
des témoignages historiques d’une époque et jamais un radiographie ultime de
la nature humaine. Alors, comment de tels dispositifs de recherche supposément
marqués para la recherche de rigueur et de neutralité pourraient-ils mettre
en scène des éléments sur les processus de subjectivation psychologisée ?
Ne serions-nous pas ainsi en train de composer de telles méthodes avec
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Instruments et résultats
De manière plus spécifique, les instruments de cette recherche ont été élaborés
par une équipe formée d’étudiants du secondaire, d’assistants de recherche
en psychologie et des boursiers, disposant de la révision de psychologues de
diverses tendances et de professionnels de différents domaines (quand il y avait
des énoncés de leur domaine comparés à ceux de la psychologie). Une fois
élaborés, ces instruments ont été plusieurs fois pré-testés, cherchant l’équilibre
entre les alternatives présentées aux étudiants pour choisir. Comme cela est
de coutume au Brésil, ces instruments ont été soumis au comité d’éthique en
recherche de l’IESC/UFRJ, et dûment approuvés.
Afin de placer les personnes étudiées en position de « sujets ingénus », les
instruments ont été présentés comme étant ceux d’un sondage d’opinion sur
des thèmes généraux, produit par des chercheurs et des étudiants de différents
départements de l’UFRJ (mais pas de psychologie), en cachant également les
objectifs de la recherche. Ces derniers ne furent révélés qu’au moment où le
Terme de Consentement Éclairé à la participation à la recherche fut présenté,
suite à la réponse aux instruments. Les instruments et les résultats qui seront
présentés concernent la troisième visite de terrain. Nous ferons référence aux
applications antérieures, non seulement pour montrer des changements dans
les résultats, mais aussi des changements dans les transformations des propres
instruments.
parents et l’existence d’un contact avec des psychologues. Cela a été fait dans © S.A.C. | Téléchargé le 08/01/2024 sur www.cairn.info (IP: 190.115.177.98)
l’intention de détecter la présence d’un profil caractérisé par de possibles
agences de psychologisation. Pour cela, nous avons considéré trois degrés
possibles de présence de dispositifs psychologiques : 1) un profil psychologique
clair (contact avec des parents, des proches ou des amis psychologues, une
quelconque forme de soins psychologiques, l’accès à des livres, des revues,
des films sur des thèmes psychologiques, ou un intérêt dans la formation de
psychologue) ; 2) un profil clairement non psychologique (absence de tout
contact, soins ou intérêt) ; 3) un profil quasi psychologue (présence de cas
limites, comme l’influence de personnes exerçant une profession proche de
la psychologie telle que la pédagogie, la psychiatrie, la gestion, et des lectures
de revues ou de livres de développement personnel). La présence d’un certain
Revue d’anthropologie des connaissances – 2012/2 341
CAP 38 22 7
Franco 27 12 15
C.M. 7 15 51
P.F. 14 13 45
Fréquence (%) 31 26 43
Phrase 1 11 8 7
Phrase 2 11 9 8
Phrase 3 6 5 4
Total 28 22 19
Fréquence (%) 40 32 28
Il y avait également dans ce sondage un espace pour que les sujets justifient
leurs choix, ce qui n’a pas été réalisé par la majorité ; le peu d’entre eux qui
l’ont fait ont pris le contenu de la phrase comme base, sans faire référence
aux caractéristiques des énonciateurs. Comment articuler la préférence des
psychologues pour l’absence de toute justification attachée à l’énonciateur ?
Notre hypothèse suggère que le psychologue, étant supposé représenter le
discours scientifique, peut se montrer plus confiant dans les choix des personnes
étudiées, au moins dans les situations de doute entre deux phrases.
Psychologue 41 % 40 % 38 %
Religieux 33 % 32 % 27 %
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4DJFOUJàRVF
Fréquence (%) 48 29 23
4DJFOUJàRVF
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Fréquence (%) 34 36 30
4DJFOUJàRVF
Fréquence (%) 33 36 31
Fréquence (%) 14 33 21 32
Fréquence (%) 23 27 23 27
Fréquence (%) 22 26 25 27
CONCLUSION
Les résultats de cette étude ont démontré que les étudiants démontrent une
grande adhésion au discours psychologique face aux questions relatives à la façon
traditionnelle de faire de la recherche : ceux-ci tendent à être d’accord avec
des énoncés exprimés par des psychologues, au détriment de ceux proférés par
des hommes politiques ou des chefs religieux. Ils ont une image du psychologue
comme étant celui qui observe à distance, qui radiographie l’âme humaine. Ils ont
une plus grande prédilection pour des explications psychologiques plutôt que
pour des explications ésotériques ou scientifiques, et ils adhèrent fortement à la
compréhension des phénomènes humains des principaux courants théoriques
de la psychologie, surtout à la psychanalyse et au cognitivisme, les courants qui
actuellement ont le plus propagé au public leurs positions face aux thèmes les
plus variés. Nous pourrions conclure de manière simplifiée en disant que de
tels résultats soulignent clairement un haut degré de production de subjectivité
psychologisée parmi les élèves du secondaire.
Mais cela serait conclure d’une manière représentationnelle, même si cela
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sujet ingénu et indifférent (au contraire, assez psychologisé) ; b) soit la méthode © S.A.C. | Téléchargé le 08/01/2024 sur www.cairn.info (IP: 190.115.177.98)
ne fonctionne pas, même en essayant de préserver l’ingénuité des enquêtés, en
les influençant, en extorquant leur vérité d’une manière plus insidieuse. À partir
de cela, nous pouvons conclure que ces instruments psychologiques, bien que
les efforts soient rigoureux afin de prévenir quelque effet, n’arriveront jamais à
livrer la pureté d’un sujet, hors de toute forme d’influence, à la façon d’une table
rase. Malgré cela, et surtout parmi les propres milieux des recherches les plus
canoniques (comme ce qui est réalisé dans cette étude), il n’y a pas moyen de
se délivrer d’une certaine influence, du fait qu’elle est arrivée préalablement par
divers dispositifs répartis à travers les réseaux socio-techniques (bien que non
clairement établis comme aurait pu le démontrer le profil) ou postérieurement
par les modes d’articulation produits par la recherche.
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Remerciements
Au professeur Rodolfo Ribas de l’Institut de Psychologie de l’Université Fédérale
de Rio de Janeiro et à Estevão Oliveira de Paula (in memoriam)
pour l’aide apportée sur la partie statistique.
RÈFERENCES BIBLIOGRAFIQUES
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Ferreira A. A. L. (2001) Por que existem tantas psicologias? Revista do Departamento de
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Ferreira A. A. L., et al. (2004) A psicologia como instrumento de produção de subjetividades.
© S.A.C. | Téléchargé le 08/01/2024 sur www.cairn.info (IP: 190.115.177.98)
psychologue à l’IP/UFRJ et maître du programme de pós-graduação en © S.A.C. | Téléchargé le 08/01/2024 sur www.cairn.info (IP: 190.115.177.98)
Pychologie. Boursier scientifique débutant (PIBIC/UFRJ).