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Schizotypie et cognition sociale

Sarah Del Goleto, Milena Kostova


Dans PSN 2016/4 (Volume 14), pages 29 à 44
Éditions Éditions Matériologiques
ISSN 1639-8319
DOI 10.3917/psn.144.0029
© Éditions Matériologiques | Téléchargé le 27/10/2023 sur www.cairn.info (IP: 213.166.55.169)

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PSN volume 14, n° 4/2016
PSYCHOLOGIE ET NEUROPSYCHIATRIE COGNITIVES

Schizotypie et cognition sociale


Schizotypy and social cognition

Sarah Del Goleto et Milena Kostova. Laboratoire de Psychopathologie et


Neuropsychologie (EA 2027), Université Paris 8 Vincennes-Saint-Denis, France.
Correspondance : Sarah Del Goleto, Laboratoire de Psychopathologie et
Neuropsychologie (EA 2027), Université Paris 8 Vincennes-Saint Denis, 2 rue
de la Liberté, Saint-Denis, France. sarahdelgoleto@gmail.com

Résumé : La schizophrénie est associée à un handicap social grave dû, en grande partie, à un
déficit de cognition sociale. Un champ de recherche émergent consiste à étudier les capacités
cognitivo-sociales dans les stades pré-morbides de la schizophrénie, comme la schizotypie.
En effet, il existe un ensemble d’arguments qui indique une relation de continuité entre
la schizotypie et la schizophrénie. Dans le domaine de la cognition sociale, les travaux
indiquent que les difficultés dans le traitement de l’information sociale sont bien présentes
chez les sujets sains avec des traits de schizotypie. Ces difficultés pourraient être un facteur
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qui contribue à l’isolement progressif qui précède souvent le début des troubles et également
un facteur aggravant de l’évolution. En même temps, les rares études utilisant des indices de
l’activité cérébrale qui accompagnent les processus de traitement de l’information sociale
révèlent que les sujets schizotypiques possèdent des capacités de compensation efficaces
qui pourraient être utilisées non seulement dans le cadre d’interventions préventives mais
aussi dans la remédiation cognitive auprès des patients. En somme, la schizotypie constitue
un paradigme fructueux pour l’étude des mécanismes qui sous-tendent les troubles de la
cognition sociale observés dans la schizophrénie et qui constituent des déterminants essentiels
du handicap social associé à la maladie.
Mots-clés : schizotypie, cognition sociale, Théorie de l’Esprit, schizophrénie.
Abstract : Schizophrenia is associated with a severe social handicap largely due to a social
cognition deficit. An emerging area of research concerns social cognition skills in pre-morbid
stages of schizophrenia, like schizotypy. Indeed, there is a set of arguments that indicates
continuity between schizotypy and schizophrenia. In the field of social cognition, studies
show that difficulties in processing social information are present in healthy subjects with
schizotypy traits. These difficulties could be a factor that contributes to the progressive with-
drawal that often precedes the onset of disorders and could also be an aggravating factor of
evolution. At the same time, the few studies using indexes of brain activity accompanying
social information processing reveal that schizotypal subjects have effective compensation
capabilities that could be used not only as part of preventive interventions but also in co­gni­
tive remediation with patients. In sum, schizotypy is a fruitful paradigm for the study of the
mechanisms underlying social cognition disorders observed in schizophrenia and which are
key determinants of social disability associated with the disease.
Key-words : schizotypy, social cognition, Theory of Mind, schizophrenia.
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La schizophrénie, psychose la plus répandue chez l’adulte, est associée à un


handicap social grave provoquant une réduction de l’autonomie, de l’accomplis-
sement professionnel et personnel et la perturbation des relations interperson-
nelles [3]. En outre, l’altération du fonctionnement social dans la schizophrénie
influence également la qualité de vie et prédit le taux de rechute et de chômage
[7]. Trouver les déterminants potentiellement traitables du fonctionnement
social est donc l’un des principaux objectifs de la recherche sur la schizophré-
nie. Dans ce contexte, l’étude du fonctionnement cognitif, et en particulier de
la cognition sociale, connaît un regain d’intérêt car il a été établi que celui-ci
constituait un prédicteur puissant du résultat fonctionnel des patients [14, 41].
Ainsi, le trouble de la cognition sociale dans la schizophrénie fait actuellement
l’objet d’un nombre croissant d’investigations qui visent à caractériser plus
finement les processus qui le sous-tendent, le but à terme étant de concevoir
des outils thérapeutiques adaptés pour y remédier.
Plusieurs recherches récentes réalisées dans ce cadre ont montré que les
anomalies de la cognition sociale étaient déjà présentes dans les stades prodro-
miques de la maladie (pour une revue de la littérature, voir [42]), c’est-à-dire
avant la décompensation franche et l’installation chronique des troubles, et
également chez les sujets présentant des traits de personnalité schizotypique [28,
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46]. La schizotypie désigne une organisation stable de la personnalité qui traduit
la prédisposition biologique à la schizophrénie sans manifestations cliniques
pathologiques. L’étude des capacités cognitivo-sociales chez ces sujets, qui se
situent encore plus en amont sur l’axe diachronique de l’évolution de la schi-
zophrénie, permet ainsi de mieux comprendre les mécanismes sous-jacents aux
troubles de la cognition sociale mais aussi d’identifier les éventuelles capacités
de compensation. En plus de leur intérêt fondamental, ces recherches peuvent
avoir des retombées cliniques importantes, notamment pour déterminer des
interventions précoces et des stratégies de prévention.
Après avoir défini le concept de schizotypie et montré sa pertinence comme
modèle d’étude de la schizophrénie, nous nous intéresserons plus par­ti­cu­liè­
rement aux apports de la schizotypie dans le domaine de recherche de la cogni-
tion sociale.

La schizotypie
Définitions
Située « quelque part » entre la personnalité normale et la schizophrénie
[32], la schizotypie désigne un ensemble de traits de personnalité considérés
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comme des manifestations atténuées des signes et symptômes schizophréniques


[5, 23, 26, 27]. Dans la littérature, on différencie deux grandes approches de la
schizotypie : l’approche dite quasi-dimensionnelle et l’approche dite pleinement
dimensionnelle.
L’approche quasi-dimensionnelle de la schizotypie est largement issue des
travaux de Paul Meehl. Dans sa théorie, un gène majeur, appelé « schizogène »,
exercerait une influence sur le développement cérébral en codant pour une
« aberration paramétrique fonctionnelle du système de contrôle synaptique »
dans le système nerveux central. Cette aberration, appelée « hypokrisia », serait
à l’origine d’un défaut d’intégration neurale. L’anomalie du système nerveux
central résultant de ce défaut d’intégration neurale est appelée « schizotaxie ».
Elle représente tout ce qui est hérité et constitue la prédisposition à la schizo-
phrénie. Mais pour l’auteur, la seule prédisposition biologique ne peut expliquer
l’émergence de la personnalité schizotypique : l’environnement socio-culturel
déterminant les apprentissages sociaux de la personne achève la structuration de
la schizotypie. Ainsi, sous l’influence de facteurs environnementaux et d’autres
facteurs génétiques (potentiateurs polygénétiques), la schizotaxie peut être à
l’origine d’une organisation schizotypique de la personnalité. Selon Meehl,
tous les sujets schizotaxiques, ou presque, développent une personnalité schi-
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zotypique même si, en théorie, il est envisageable que certains individus schi-
zotaxiques, protégés par un environnement suffisamment sain, ne développent
pas de schizotypie [27]. Ainsi, la théorie de Meehl conçoit les relations entre
les concepts de schizotaxie, schizotypie et schizophrénie comme inclusives.
La schizotaxie est la condition sine qua non de la maladie [27] et sa fréquence
dans la population générale est estimée à environ 10 %.
Cette approche dite quasi-dimensionnelle des troubles mentaux place le
continuum schizotypie-schizophrénie dans une logique de rupture qualitative
par rapport à une hypothétique « normalité ». Elle correspond au modèle médi-
cal de la schizotypie. L’entreprise de « dimensionnalisation » de la schizotypie
[32] a été poursuivie grâce aux travaux de Gordon Claridge [5] qui propose
d’abattre complètement cette frontière et prône une approche pleinement dimen-
sionnelle de la psychose. Cette approche alternative, issue des travaux dans le
domaine de la psychologie de la personnalité, considère la schizotypie comme
une variation normale de la personnalité, neutre sur le plan de la santé mentale
mais néanmoins associée à un risque accru de maladie mentale. L’approche
quasi-dimensionnelle, essentiellement Nord-Américaine, considère les traits
psychotiques rencontrés dans la population générale en l’absence de maladie
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mentale manifeste comme une forme atténuée de la symptomatologie clinique


i.e. le continuum est envisagé au sein de la maladie. L’approche pleinement
dimensionnelle, davantage européenne, considère quant à elle ces mêmes traits
comme une exagération de traits de personnalité normale. Elle distingue donc
les traits des symptômes et reconnaît que le passage vers la maladie implique
une forme de discontinuité reflétée dans la notion de spectre [5]. Ainsi, suivant
les lois de la dialectique, au-delà d’un certain seuil, les changements quantitatifs
(de l’état normal) entraînent des changements qualitatifs (état pathologique).
Le débat concernant la dimensionnalité de la schizotypie est toujours d’ac-
tualité, il apparaît même très clairement dans la cinquième et dernière ver-
sion du Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders de l’American
Psychiatric Association (DSM-5) [1]. Effectivement, le DSM-5 positionne le
trouble schizotypique à la fois dans les troubles du spectre de la schizophrénie
et autres troubles psychotiques, où il représente la forme la moins sévère d’un
spectre allant jusqu’au trouble schizo-affectif et la catatonie, et dans celui des
troubles de la personnalité. Les critères diagnostiques du trouble de la per-
sonnalité schizotypique restent inchangés par rapport au DSM-IV-TR. Ainsi,
au niveau symptomatologique, la schizotypie est définie comme un style de
personnalité caractérisé par un « mode général de déficit social et interpersonnel
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marqué par une gêne aiguë et des compétences réduites dans les relations
proches, par des distorsions cognitives et perceptuelles, et par des conduites
excentriques ». Les critères diagnostiques actuels comprennent des idées de
référence non délirantes, une pensée magique, une altération des perceptions
(perceptions étranges), un langage caractérisé par une syntaxe inhabituelle
ou idiosyncrasique, des idées de persécution, une mauvaise adaptation dans
les situations sociales, un maniérisme inhabituel ou une excentricité dans les
compor­te­ments ou une bizarrerie, peu d’amis proches, et une anxiété en situa-
tion sociale. Il est important de distinguer ici le trouble de la personnalité
schizotypique cliniquement diagnostiqué chez des sujets recrutés souvent en
milieu hospitalier, parfois sous traitement psychotrope, avec une comorbidité,
etc., des traits de schizotypie évalués avec des questionnaires chez des sujets
issus de la population générale. Il est globalement correct de considérer que
ces deux populations diffèrent en termes de sévérité de la psychopathologie
schizotypique et d’altération fonctionnelle.
De manière intéressante, dans un tout autre champ théorique, la psycha-
nalyse structurale française affirme depuis bien longtemps la nécessité d’une
approche dimensionnelle des troubles psychiques. Par exemple, Bergeret sou-
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tient l’idée que tout mode d’organisation de la personnalité peut fonctionner


soit sur un mode normal compensé (adapté à la réalité interne et externe du
sujet), soit sur un mode instable (se traduisant par des manifestations symp-
tomatiques), soit complètement décompensé (en cas de conflits internes et/
ou externes dépassant les ressources adaptatives et défensives du sujet) [32].
Ainsi, comme le remarquent judicieusement Prudent et ses collaborateurs, on
peut faire le parallèle entre le trouble de la personnalité schizotypique, tel que
défini dans le DSM 5, et le caractère schizophrénique, mode d’expression
normale ou compensée de la structure schizophrénique formalisée par Bergeret.
En ce sens, la nosographie psychiatrique du DSM 5 semble se rapprocher de
la nosographie psychanalytique structurale française, pourtant communément
considérée comme incompatible avec le modèle DSM [32].
Validité de la schizotypie comme
modèle d’étude de la schizophrénie
La validation du concept de schizotypie s’appuie sur un corpus de recherches
qui plaide en faveur d’un continuum allant du normal au pathologique (pour des
revues récentes, voir [10, 30]). Ainsi, que ce soit au niveau phénoménologique,
génétique, cérébral ou cognitif, des faisceaux d’arguments tendent à montrer la
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parenté entre la personnalité schizotypique et la schizophrénie.
Les traits schizotypiques sont habituellement évalués en population générale
à l’aide de questionnaires. Il en existe plus d’une vingtaine dont par exemple le
questionnaire de personnalité schizotypique (SPQ) de Raine [33]. Les études
factorielles ont montré que les traits schizotypiques s’organisent autour de trois
dimensions, positive (facteur cognitif-perceptif), négative (facteur interperson-
nel) et désorganisée, dont le contenu est proche des mêmes trois dimensions
de la schizophrénie. Les traits schizotypiques sont stables dans le temps et les
scores obtenus à l’aide d’auto-questionnaires (comme le SPQ) sont for­tement
corrélés aux résultats de l’évaluation clinique réalisée à l’aide d’entretiens
diagnostiques structurés (comme le Structured Interview for Schizotypy, SIS,
[19]). La phénoménologie et la structure psychométrique de la schizotypie
recoupent donc celles de la schizophrénie.
D’autre part, les traits schizotypiques sont reconnus comme des facteurs de
risque de la schizophrénie et de la psychose plus généralement. Par exemple,
dans une étude longitudinale sur 10 ans menée auprès de 508 sujets sélectionnés
dans la population étudiante en fonction de la présence avérée de traits schizo-
typiques, Kwapil et al. [20] ont montré que les dimensions positive et négative
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de la schizotypie étaient prédictives du développement ultérieur de troubles du


spectre schizophrénique et d’un déficit fonctionnel.
Au niveau génétique, plusieurs études familiales révèlent une prévalence
élevée de caractéristiques schizotypiques, en particulier des manifestations
négatives et de désorganisation, chez les apparentés de premier degré de patients
schizophrènes. Par exemple, Calkins et al. [4] ont utilisé le SPQ dans un groupe
de 135 apparentés de premier degré de patients schizophrènes et un groupe de
112 sujets de contrôle et ont trouvé que les apparentés avaient des scores de
schizotypie supérieurs aux contrôles, à la fois au niveau du score global au SPQ
et au niveau du facteur interpersonnel (dont notamment l’anxiété sociale, la
restriction des affects et l’absence d’amis proches). Ces résultats indiquent que
les troubles dans le domaine social et interpersonnel sont les caractéristiques
schizotypiques les plus fortement associées avec la vulnérabilité génétique de
la schizophrénie. Ils confirment plus généralement la validité des méthodes
psychométriques pour évaluer la schizotypie. En plus de la présence d’un taux
de schizotypie significativement plus élevé chez les apparentés de patients
atteints de schizophrénie qu’en population générale, des associations entre le
profil et la sévérité des symptômes cliniques des patients et les dimensions de
schizotypie de leurs proches ont été mises en évidence. Par exemple, il a été
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montré que la sévérité des symptômes positifs des patients psychotiques était
associée au score de schizotypie positive de leurs apparentés [12]. Ainsi, ces
données sont en faveur de l’existence de corrélations génétiques, ou du moins
familiales, entre schizotypie et schizophrénie. Les résultats en biologie molé-
culaire sont plus contrastés mais une étude GWAS (genome-wide association
study) portant sur 270 familles conclut à des concordances génétiques entre
malades et apparentés [13].
Concernant le niveau cérébral, de nombreuses anomalies anatomiques et
fonctionnelles ont été mises en évidence dans la schizophrénie par des études
post-mortem ou en imagerie cérébrale (pour une revue de la littérature, voir
[40]). Ces anomalies concernent plusieurs régions cérébrales et pourraient
être, pour un bon nombre d’entre elles, de nature neurodéveloppementale.
D’importance pour notre propos ici est la question de savoir si la schizotypie a
des bases neuroanatomiques communes avec la schizophrénie. Les données de
la littérature permettent de répondre clairement par l’affirmative. Effectivement,
des anomalies cérébrales similaires à celles observées chez les patients schi-
zophrènes ont été mises en évidence dans la schizotypie (pour une revue de la
littérature, voir [17]). Par exemple, on constate une augmentation du liquide
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cérébrospinal dans les sillons et une réduction de volume de la substance grise


corticale, pouvant être révélateurs d’un problème neurodéveloppemental. De
même, on observe une réduction de volume du gyrus temporal supérieur gauche,
souvent corrélée avec le trouble formel de la pensée. La réduction de volume
des noyaux du pulvinar (thalamus) a quant à elle été mise en rapport avec les
perturbations dans le traitement et l’intégration de l’information visuelle et
auditive (puisque le pulvinar est un relais des entrées sensorielles à destination
des cortex primaires visuel et auditif, du cortex associatif temporo-pariétal et du
cortex préfrontal). D’autres études ont montré des anomalies morphologiques
du corps calleux qui joue un rôle dans la communication interhémisphérique.
Comme nous l’avons souligné, toutes ces anomalies sans exception ont éga-
lement été retrouvées dans la schizophrénie mais leur étendue et importance
semblent supérieures [40]. L’ensemble de ces résultats est donc compatible
avec la notion de continuité (des anomalies cérébrales) entre la schizotypie et
la schizophrénie.
Enfin, sur le plan cognitif, des scores élevés de schizotypie ont été associés
à des déficits en mémoire de travail, à des troubles des fonctions exécutives et
à des troubles attentionnels. La schizotypie a en outre été corrélée à des déficits
perceptifs de discrimination auditive et olfactive, ainsi qu’à des signes neu-
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rologiques discrets, et à des troubles moteurs tels que la poursuite visuelle ou
l’antisaccade. Le pattern des troubles cognitifs est similaire à celui des patients
atteints de schizophrénie, bien que la sévérité des altérations soit globalement
moindre (pour des revues récentes, voir [10, 11]).
En somme, il existe un ensemble d’arguments tangibles qui indique une
relation de continuité entre la schizotypie et la schizophrénie. La schizotypie
constitue donc un modèle d’étude avantageux, qui évite les écueils dressés
par la psychose schizophrénique. En effet, l’étude de personnes ne relevant
pas des catégories diagnostiques établies élimine de facto les biais liés aux
symptômes hallucinatoires et délirants, aux hospitalisations répétées, aux trai-
tements pharmacologiques et au ralentissement psychomoteur. Plus encore, la
réalisation de procédures complexes, plus longues et donc plus sensibles semble
davantage envisageable avec des sujets sains ayant des traits de schizotypie
qu’avec des patients schizophrènes. Pour toutes les raisons évoquées ci-dessus,
l’étude de la personnalité schizotypique semble prometteuse, d’une part, pour
mieux comprendre les mécanismes neurocognitifs qui sous-tendent les troubles
schizophréniques et, d’autre part, pour développer des stratégies d’intervention
précoce et de prévention de la psychose.
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Apports de la schizotypie dans la


recherche sur la cognition sociale
Cognition sociale et schizophrénie
L’altération de la cognition sociale (i.e. l’ensemble des processus mentaux
qui sous-tendent les interactions sociales) constitue l’une des manifestations les
plus caractéristiques de la schizophrénie (pour une revue de la littérature, voir
[38]). Les difficultés des patients concernent, à différents degrés, les cinq grands
domaines de la cognition sociale [16] : (1) la théorie de l’esprit (ToM), soit la
capacité à attribuer des états mentaux à autrui, (2) le traitement des émotions, (3)
le style attributionnel, c’est-à-dire la manière d’interpréter les causes des évène-
ments négatifs et positifs de la vie, (4) la perception sociale, considérée comme
la capacité à identifier les règles et les rôles sociaux et à tenir compte du contexte,
et (5) les connaissances sociales, qui constituent le support des rôles, des règles et
des buts guidant les interactions. Parmi ces cinq grands domaines de la cognition
sociale, la théorie de l’esprit, encore appelée « mentalisation », est le domaine le
plus fortement relié au résultat fonctionnel dans la schizophrénie [7, 14].
Dans la littérature, on distingue généralement la ToM cognitive de la ToM
affective. La première renvoie aux raisonnements sur les pensées, les croyances,
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les intentions, tandis que la seconde désigne les inférences réalisées sur les
états émotionnels, ou sur tout état affectif chargé d’une certaine valence émo-
tionnelle. Une seconde distinction peut être réalisée en fonction du niveau de
représentation. De celle-ci découlent les notions de ToM de premier ordre,
renvoyant à la construction de représentations simples sur les états mentaux
d’autrui (i.e. capacité à se positionner dans la perspective d’une autre personne)
et de ToM de second ordre, renvoyant à la construction de représentations sur
les représentations d’autrui (i.e. capacité à adopter deux perspectives emboîtées
en se représentant l’état mental d’une personne qui se représente elle-même
l’état mental d’une autre personne). Au niveau de l’évaluation, les compétences
en théorie de l’esprit peuvent être mesurées au moyen d’une grande variété
d’épreuves. Parmi celles le plus souvent utilisées, on compte les tâches d’attri-
bution d’intentions, les tâches de fausse croyance ou de mensonge, les tâches de
compréhension de discours indirect ou ambigu (métaphore, ironie, plaisanterie),
les épreuves de détection du regard et les tâches d’attribution d’états mentaux à
des formes géométriques animées dont les mouvements évoquent une inter­ac­
tion sociale. Ces tâches peuvent également varier en fonction du support utilisé
(matériel verbal, bandes dessinées, séquences vidéo etc.).
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| Schizotypie et cognition sociale |

Par exemple, dans la tâche dite « Sally & Anne » [48], le participant observe
une scène dans laquelle deux personnages, Sally et Anne, sont présents dans
une même pièce. Il y a aussi une boîte et un panier, et le participant voit Sally
ranger une bille dans le panier puis quitter la pièce. En l’absence de Sally, le
participant observe ensuite Anne retirer la bille du panier pour la placer dans la
boîte. Lorsque Sally revient, on demande au participant de dire à quel endroit
elle ira chercher sa bille : dans le panier ou dans la boîte ? Pour répondre cor-
rectement à cette question, le participant doit s’être représenté la réalité (où
est réellement la bille ?) ainsi que l’état mental de Sally (où est-ce que Sally
croit qu’est la bille ?). Cette simple tâche permet donc de tester la capacité à
inférer l’état mental (croyance) d’un personnage. Dans la Hinting Task [6], on
présente aux participants de courts paragraphes décrivant des dialogues entre
deux personnes. À la fin de chaque dialogue, un des personnages formule de
manière implicite une demande envers son interlocuteur. Par exemple : Vincent
va au supermarché avec sa mère. Ils arrivent dans l’allée des gâteaux. Vincent
dit « Wow ! Ces gâteaux ont l’air délicieux. ». On pose alors la question au
participant : Qu’est-ce que Vincent tente de dire exactement ? La tâche du par-
ticipant est alors d’expliciter ce que le personnage veut dire en réalité. Pour ce
faire il doit alors reconnaître l’aspect implicite du discours et décoder l’intention
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véritable du personnage.
Quel que soit le type d’états mentaux inférés ou la tâche utilisée, les auteurs
sont unanimes quant à l’existence d’une perturbation sévère de la ToM chez les
patients atteints de schizophrénie (pour une revue de la littérature, voir [41]).
D’intérêt ici est de savoir si ces déficits sont également présents dans les stades
prémorbides de la schizophrénie, comme la schizotypie. En effet, les études de
la ToM chez des individus ayant une prédisposition biologique sans déficience
fonctionnelle marquée peuvent fournir des indices précieux concernant les
mécanismes de production des symptômes schizophréniques. Elles pourraient
également permettre de savoir si les troubles de la sphère sociale constituent
une anomalie trait de la pathologie, ou encore un facteur de risque, ou bien une
conséquence fonctionnelle des symptômes psychotiques.
Cognition sociale et schizotypie
Malgré l’hétérogénéité des questionnaires utilisés pour mesurer la schi-
zotypie, et la diversité des tâches employées pour évaluer les capacités en
théorie de l’esprit, la plupart des études s’accorde sur la présence d’anomalies
de la ToM dans la schizotypie [2, 15, 18, 21, 22, 28, 29, 31, 36, 44, 45]. Par
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38 | Psychologie et neuropsychiatrie cognitives |

exemple, l’étude de Langdon et Coltheart [21] a montré que les individus ayant
un score élevé au SPQ avaient de moins bonnes performances dans une tâche
de bandes dessinées impliquant des fausses croyances par rapport aux indivi-
dus ayant un faible score au SPQ. De la même manière, les sujets considérés
comme « schizotypiques » d’après la version révisée de la Social Anhedonia
Scale (SAS) [9], avaient plus de difficultés que les contrôles lorsqu’ils devaient
inférer des intentions [29, 44] ou des fausses croyances [45] à autrui. De leur
côté, Barragan et al. [2] ont investigué les relations entre les performances de
ToM et la schizotypie dans une population d’adolescents. Dans cette étude, la
schizotypie était évaluée au moyen de l’auto-questionnaire Oxford-Liverpool
Inventory of Feelings and Experiences (O-LIFE) [24]. Les auteurs ont montré
que les traits de schizotypie positive étaient négativement associés aux perfor-
mances des adolescents à une tâche verbale impliquant l’inférence de pensées,
de sentiments et d’intentions. Ces résultats constituent autant d’arguments en
faveur du fait que les troubles de la ToM pourraient être une anomalie trait de
la schizophrénie.
Très récemment, quelques études ayant utilisé la technique de l’imagerie
cérébrale fonctionnelle (IRMf) associée à des tâches de ToM ont mis en évi-
dence des capacités de compensation dans la schizotypie. Contrairement aux
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mesures comportementales, l’IRMf permet d’étudier « le cerveau en action »
et donc d’identifier et de caractériser les systèmes cérébraux participant aux
divers traitements cognitifs. Par exemple, Wang et al. [47] ont étudié les corré-
lats cérébraux de la théorie de l’esprit et leurs liens avec la schizotypie à l’aide
d’une tâche de bandes dessinées. Ils ont montré que la dimension négative de la
schizotypie était associée à une activité accrue dans le cuneus, le gyrus temporal
médian et la jonction temporo-pariétale i.e. des régions cérébrales impliquées
dans la mentalisation. Les auteurs suggèrent que cette augmentation de l’activité
cérébrale pourrait traduire des mécanismes de compensation ou de protection
présents chez les individus à traits de schizotypie. De leur côté, Rapp et al. [34]
ont investigué les corrélats cérébraux de la compréhension de l’ironie dans la
schizotypie. L’ironie est considérée comme un exercice complexe­de menta-
lisation qui nécessite d’aller au-delà du sens littéral de l’énoncé et d’intégrer
le contexte (sémantique, social, mental) pour accéder à l’intention communi-
cative qui le sous-tend. Pendant la session, les sujets devaient lire de courtes
histoires dont la dernière phrase pouvait être interprétée de manière littérale
ou ironique en fonction du contexte. Les auteurs ont observé que l’activité
du gyrus frontal inférieur gauche, impliqué dans des processus d’intégration
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39
| Schizotypie et cognition sociale |

sémantique, était positivement corrélée au score de SPQ. En d’autres termes,


plus les sujets avaient un score élevé au SPQ, plus l’activité du gyrus frontal
gauche était élevée. Une fois encore, ce résultat pourrait refléter le recrutement
de ressources cognitives supplémentaires chez les sujets schizotypiques pour
compenser des difficultés de mentalisation.
Les recherches que nous menons au sein de notre laboratoire s’intéressent
moins aux structures cérébrales qui participent aux traitements cognitifs qu’au
décours temporel de ces traitements. Par exemple, dans une étude réalisée au
moyen de la méthode des potentiels évoqués, nous avons exploré les corré-
lats électrophysiologiques du traitement de l’ironie chez des personnes avec
des traits schizotypiques [8]. Du fait de sa haute résolution temporelle, cette
méthode est particulièrement adaptée pour suivre en temps réel les événements
neuronaux qui sous-tendent les opérations de traitement de l’information. La
tâche proposée, inspirée de l’étude de Rapp et al. [34] citée précédemment,
consistait en la lecture passive d’histoires qui se terminaient soit par un énoncé
littéral, soit par un énoncé ironique. Chez les sujets à faible score de schizoty-
pie, le traitement de l’ironie était associé à la présence d’une onde P600, une
composante positive tardive atteignant un pic maximum à environ 600 milli-
secondes. Cette composante est considérée comme le reflet de processus de
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réanalyse et de réinterprétation mis en œuvre en cas de violations syntaxiques
ou sémantiques [39]. Parce que la P600 apparaît aussi à chaque fois qu’il y a
une incohérence entre le sens littéral d’un énoncé et le message implicite qu’il
transmet, elle est également considérée comme le corrélat électrophysiologique
des processus inférentiels tardifs nécessaires à la compréhension de l’ironie
[35]. En revanche, cette activité P600 était absente chez les sujets à score élevé
de schizotypie, suggérant ainsi la présence de difficultés de mentalisation dans
cette population.
De manière intéressante, les sujets ayant un score élevé de schizotypie ne
présentaient aucune anomalie dans une tâche papier-crayon qui était proposée
après l’enregistrement EEG. Contrairement à la tâche électrophysiologique qui
évaluait le traitement spontané de l’ironie, la tâche papier-crayon était une tâche
explicite de compréhension verbale dans laquelle les traitements étaient guidés
pas à pas par la consigne. Dans cette tâche, les participants devaient répondre
à une série de questions visant à évaluer : (i) la reconnaissance de l’état mental
du personnage qui disait la phrase critique « Est-ce que X dit ce qu’il pense/
le contraire de ce qu’il pense », (ii) la détection de l’ironie « Est-ce que X est
ironique ? », et (iii) l’intensité et la fonction sociale de l’ironie (moquerie et
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40 | Psychologie et neuropsychiatrie cognitives |

politesse). Ainsi, les états mentaux étaient clairement formulés et la possibilité


d’une opposition entre ce que le personnage dit et ce qu’il pense réellement (son
état mental) était soulignée et explicitement interrogée. Dans ces conditions,
les sujets schizotypiques n’avaient aucun mal à répondre correctement aux
questions et leurs évaluations ne se distinguaient pas de celles des sujets de
contrôle. En somme, conformément aux autres études ayant utilisé des mesures
de l’activité cérébrale associée aux processus de mentalisation, nos résultats
ont mis en évidence la présence d’anomalies subtiles dans la schizotypie, qui
peuvent cependant être compensées en fonction des conditions expérimentales.
En outre, les résultats de cette étude ont montré que les difficultés de menta-
lisation étaient associées au déficit interpersonnel dans la schizotypie (i.e. scores
élevés au sous-facteur interpersonnel du SPQ comprenant des items qui évaluent
la méfiance, l’anxiété sociale excessive, l’absence d’amis proches et la pauvreté
des affects). Ce résultat constitue un argument en faveur de l’impact négatif du
déficit de mentalisation sur le résultat fonctionnel dans la schizotypie-schizo-
phrénie. En d’autres termes, les difficultés des sujets schizotypiques à attribuer
les états mentaux pourraient entraîner un isolement social et interpersonnel qui
sont, à leur tour, des facteurs de risque et de mauvais pronostic. En effet, une
association entre l’altération du fonctionnement social et la décompensation
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psychotique a été rapportée par plusieurs auteurs [25, 49]. Le trouble de la cogni-
tion sociale apparaît donc comme une cible d’intérêt majeur dans le cadre des
interventions précoces et des stratégies de prévention de la psychose. En ce sens,
il pourrait être pertinent d’intégrer une évaluation de la cognition sociale aux
bilans neuropsychologiques adressés aux sujets à risque comme les personnes
présentant un trouble de la personnalité schizotypique cliniquement diagnostiqué
ou celles manifestant déjà des signes prodromiques de la schizophrénie.

Conclusion
Le nombre croissant de publications portant sur la schizotypie témoigne de
l’intérêt de la communauté scientifique pour cette forme non psychotique de
la schizophrénie. Les travaux réalisés dans le domaine de la cognition sociale
indiquent que les difficultés dans le traitement de l’information sociale sont bien
présentes chez les sujets sains avec des traits de schizotypie, c’est-à-dire avant
l’apparition des symptômes psychotiques francs. Ces difficultés pourraient être
un facteur qui contribue à l’isolement progressif qui précède souvent le début
des troubles et également un facteur aggravant de l’évolution. À ce titre, les
troubles neurocognitifs et de la cognition sociale apparaissent plus que jamais
| Sarah Del Goleto et Milena Kostova |
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| Schizotypie et cognition sociale |

comme une cible des interventions précoces. En même temps, les rares études
utilisant des indices de l’activité cérébrale qui accompagnent les processus de
mentalisation révèlent que les sujets schizotypiques possèdent des capacités
de compensation efficaces qui pourraient être utilisées non seulement dans le
cadre d’interventions préventives mais aussi dans la remédiation cognitive
auprès des patients. Par exemple, notre étude citée précédemment suggère
qu’un accompagnement explicite dans le traitement des états mentaux permet
aux personnes schizotypiques de compenser leurs difficultés et des résultats
allant dans le même sens ont également été rapportés chez les patients [37, 43].
Au total, la schizotypie apparaît comme un paradigme fructueux pour l’étude
des mécanismes qui sous-tendent les troubles neurocognitifs et de la cognition
sociale observés dans le spectre schizophrénique et qui constituent des déter-
minants essentiels du handicap social associé à la maladie.

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