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à l’école aujourd’hui
© PUV, Université Paris 8, Saint-Denis, 2022
www.puv-editions.fr
ISBN : 978-2-37924-266-3
Sous la direction de
Laurence Gavarini, Dominique Ottavi, Ilaria Pirone
Le Normal et le Pathologique
à l’école aujourd’hui
Textes de
Doris Bühler-Niederberger, Marina D’Amato, Laurence Gavarini,
Edmondo Grassi, Mej Hilbold, Léandro de Lajonquière,
Pierre Macherey, Dominique Ottavi, Ilaria Pirone,
Giuseppe Rociola, Claudia Schuchart, Jean-Marie Weber
Dominique OTTAVI
Introduction. Un changement de paradigme 7
Pierre MACHEREY
À l’école des normes 15
Marina D’AMATO
L’invention de la norme 51
Edmondo GRASSI
Éducation, technologie et contrôle :
l’ère de l’intelligence artificielle 59
Léandro DE LAJONQUIÈRE
De l’éducation au temps de l’autisme :
un nouveau rapport à l’enfant 91
Ilaria PIRONE
Entre normes et connaissances : l’idéal inclusif
à l’épreuve des processus de normalisation 113
Giuseppe ROCIOLA
Le TDAH comme problème social 129
Jean-Marie WEBER
L’hypermodernité et ses défis éthiques pour les enseignants 155
Bibliographie 167
Introduction
Un changement de paradigme
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Introduction. Un changement de paradigme
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Le Normal et le Pathologique à l’école aujourd’hui
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Introduction. Un changement de paradigme
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Introduction. Un changement de paradigme
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Pierre Macherey
1. Que cette représentation continue plus que jamais à circuler, c’est ce que montre la
formule « L’école, socle des valeurs de la République » dont certains cercles de pouvoir se
gargarisent aujourd’hui, alors que la République « une et indivisible » s’est convertie aux
pratiques de la « start up nation » qui en diluent sensiblement les aspirations. Cette formule
serait imprononçable dans d’autres pays où on n’enseigne sans doute pas moins bien et où
on le fait peut-être même mieux qu’en France, en termes de performances s’entend. Elle
conserve d’autant plus facilement une actualité que le terme « valeur », qui lui communique
une sorte de parfum éthique, est suffisamment vague pour que la fermeté intransigible qu’il
affiche puisse s’accommoder, selon les circonstances, de toutes sortes d’opportunités : l’art de
gouverner et d’administrer réside dans de tels accommodements, tout étant en fin de compte
affaire de vocabulaire.
Le Normal et le Pathologique à l’école aujourd’hui
2. Michael J. Sandel, La Tyrannie du mérite, Paris, Albin Michel, 2021. Selon Sandel, la
tyrannie du mérite est l’une des raisons du développement des populismes à l’époque de la
mondialisation.
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À l’école des normes
3. Au sujet de cette singulière institution on peut lire, dans le volume commémoratif publié
chez Hachette en 1895, Le Centenaire de l’École normale, une étude de Paul Dupuy à laquelle
sont empruntés les textes cités ici en référence.
4. « Séminaire » est pris ici en son sens premier de lieu où on ensemence, opération
préparatoire d’une entreprise de culture.
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Le Normal et le Pathologique à l’école aujourd’hui
5. Cet ambitieux programme n’est pas resté à l’état de vœu pieux : ont effectivement enseigné
durant les quelques mois où cette première « école normale » a existé des personnalités
éminentes du monde intellectuel et savant de l’époque comme Laplace, Bernardin de Saint-
Pierre, etc.
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À l’école des normes
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À l’école des normes
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Le Normal et le Pathologique à l’école aujourd’hui
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À l’école des normes
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10. Cf. Louis Althusser, « Idéologies et appareils idéologiques d’État », Positions, Paris,
Éditions Sociales, 1976, p. 67-125.
11. Jacques Lacan, « Le symbolisme, l’imaginaire et le réel », Bulletin interne de l’Association
française de psychanalyse, 1953.
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À l’école des normes
12. Hegel, Encyclopédie des sciences philosophiques, t. 1 (La science de la logique), additif au
par. 209, Paris, Vrin, 1970, p. 614.
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Le Normal et le Pathologique à l’école aujourd’hui
13. C’est alors que le mot « pédagogie », ayant pris un sens qui n’aurait été compréhensible
ni pour Érasme, ni pour Rabelais, ni pour Montaigne, est devenu le terme générique sous
lequel ont été rassemblées les procédures techniques et sociales propres à une école de
normes.
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À l’école des normes
cumule au moins deux activités qu’il ne faut pas confondre. D’une part
c’est distribuer des éléments sur une échelle d’évaluation comparée,
qui en leur appliquant des principes communs d’appréciation les
qualifie à des degrés divers et leur assigne sur cette base la place
censée leur convenir à l’intérieur du champ qu’elle étalonne en
totalité, sans résidu, ce qui lui assure une sorte de continuité et le
rend autosuffisant, homogène et plein. Mais c’est aussi mettre au
rebut, donc éliminer, expulser d’autres éléments déclarés inaptes à
participer à cette opération de rangement dans laquelle il n’y a pour
eux aucune place, comme quand on prélève sur la masse d’un tas de
lentilles qu’on trie de petits cailloux impropres à la consommation. La
plénitude continue de la première opération a donc pour corrélat le
traçage d’une ligne de rupture qui crée dans les marges de l’espace
concerné, en une zone incertaine où son dedans et son dehors se
conjoignent, un creux qui signale une absence présente sous la forme
d’un vide. Ce vide, où toute possibilité de communication, d’échange
et de transfert est abolie, n’en est pas moins rempli au point souvent
de déborder : on peut parler à cet égard d’une irruption du négatif,
qui remet en question l’homogénéité du système en confrontant
celui-ci à ses limites. Parvenue à celles-ci, l’entreprise de mesure, sous
les deux formes d’une quantification et d’une qualification, finit par
produire de l’inquantifiable et de l’inqualifiable, et sombre dans une
sorte de démesure.
Si l’école telle que nous la connaissons, avec ses inconvénients
et ses failles qui sont devenus de plus en plus manifestes, répartit les
membres de la population dont elle s’occupe, celle des élèves, c’est
sur ces deux lignes dont la gestion obéit par la force des choses à
des logiques distinctes : en même temps qu’elle différencie, et par là
même distribue en les distinguant, donc classe ceux et celles des élèves
qu’elle oriente vers telle ou telle de ses filières qui n’est d’ailleurs pas
forcément celle pour laquelle ils ou elles auraient opté en fonction
de leurs préférences personnelles, elle en déclasse d’autres décrété.
es de fait hors jeu, à l’égard desquel.les elle remplit tant bien que
mal, péniblement et avec mauvaise conscience, un rôle fastidieux
de gardiennage qui permet d’occuper formellement la durée légale
de l’obligation scolaire, mais se trouve d’emblée déconnecté de
toute activité effective de formation. La notion de « sélection »,
relativement confusionnelle à cet égard, associe ces deux démarches
dont la première intègre en classant alors que la seconde rejette toute
une partie de la clientèle scolaire qu’elle sanctionne en la déclarant
à demi-mot, et pour ainsi dire honteusement, hors classe. Cette
dialectique tordue finit par déboucher sur une sorte de jugement
dernier qui renvoie dos à dos des sauvé.es, dignes d’être classé.es,
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Le Normal et le Pathologique à l’école aujourd’hui
15. Tous les confesseurs de Louis XIV ont été des Jésuites.
16. Il y aurait toute une étude à faire sur la mythologie et les rites solennels attachés à la
« rentrée scolaire ».
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À l’école des normes
17. On pourrait soutenir que Descartes, formé par les Jésuites auxquels il est resté fidèle
jusqu’à la fin de sa vie, a tiré de là l’idée que, pour réformer l’esprit, il faut le vider des idées
qui avaient pu l’habiter antérieurement, réputées n’être que « préjugés », dangereux du fait
d’être exposés à toutes sortes de mauvaises influences. Cette opération, menée sur un plan
intentionnel, ne peut déboucher que sur des effets fictifs : tout reprendre au point de départ
est irréalisable dans les faits, ce qui n’interdit pas d’y rêver.
18. C’est une façon de parler car, en réalité, il leur tourne le dos. D’ailleurs, lorsque, se
retournant, il s’adresse à eux pour « faire cours », il se met à parler lui-même comme un
livre, à rebours des usages ordinaires de la vie : s’il n’enseigne plus aujourd’hui en latin
de manière à implanter dans l’esprit des élèves la fiction d’un monde que son ancienneté
rendrait radicalement autre, sa parole est filtrée et contrôlée au point de n’être plus tout à
fait naturelle.
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Le Normal et le Pathologique à l’école aujourd’hui
19. Cette cohésion était réglée sur le modèle de l’organisation des légions romaines, ce qui
confortait l’illusion de vivre dans un monde à part tout en participant à un jeu collectif.
20. Par là même est inculquée à l’élève l’idée qu’il est propriétaire à titre personnel
du produit de son labeur, ce qui limite automatiquement les possibilités d’entraide que
pourraient s’apporter des camarades d’étude. N’apprendrait-on pas, d’une certaine manière,
en copiant ? Il n’est pas facile de répondre à cette question, mais ce n’est pas une raison
suffisante pour ne pas la poser. En tout état de cause, dans la classe ordonnée autour de l’idéal
du mérite personnel, des élèves sont rassemblés du fait d’être réunis en un même lieu, mais ils
ne sont pas préparés à travailler ensemble, ce qu’on ne les incite même pas à faire.
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À l’école des normes
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Le Normal et le Pathologique à l’école aujourd’hui
moi est haïssable » parce qu’il est porteur des pires dérives : s’il y
a péché originel, dans lequel tous les autres ont leur source, c’est
là qu’il se trouve. Et lorsqu’un protocole éducatif fait fond sur lui,
ce péché premier se trouve reproduit dans des conditions qui en
gonflent artificiellement les conséquences : sous couleur de prémunir
l’enfant contre des tentations auxquelles il n’a pas les moyens de
résister, on le soumet encore un peu plus à leur emprise, dont on
a fait un instrument pervers, relégitimé sous le prétexte qu’il est le
moyen le plus efficace de parvenir à l’excellence. Or rien n’autorise,
moralement et socialement, à assimiler la formation à une entreprise
promotionnelle dont certains, de plus en plus nombreux d’ailleurs,
doivent sortir brisés. Assigner comme finalité à l’école la production
d’excellence, c’est introduire en elle un principe corrupteur qui la
ronge en profondeur.
Il n’est pas interdit de voir dans le climat délétère dénoncé par
Pascal une cause, la principale peut-être, de l’exclusion scolaire sous
les formes constatées aujourd’hui. Cette exclusion est le résultat d’un
système conçu et organisé de façon à ce que les exclus s’excluent
d’eux-mêmes, se sachant dès le départ condamnés à l’échec : pour
ne pas subir totalement cet échec, pour reprendre leur sort en main,
pour rester autant qu’ils le peuvent actifs, ne leur reste d’autre
solution que de faire – en se plaçant systématiquement à contre-
courant de la résistance passive – ce qui les amène à renoncer à
participer au très inquiétant jeu de rôle qu’on leur propose où on n’a
de chance de se construire qu’en détruisant une part de soi-même
et où, généralement, la construction des uns implique la destruction
des autres. Si les parias de l’école des normes abandonnent, s’ils
abdiquent, c’est donc apparemment de leur plein gré. On veut se
débarrasser d’eux en les rendant encore plus inégaux que les autres ?
Qu’à cela ne tienne ! Pleinement convaincus que ce qu’on leur
propose n’est pas fait pour eux et à tous les sens du mot ne leur
« convient » pas, ils sont déjà partis, et même ils sont partis dedans,
au-dedans, en faisant sécession, ce qui rendrait extrêmement difficile
de les rattraper si toutefois on avait l’intention de le faire. Là se trouve
le point où le système parfaitement intégré des normes rencontre sa
limite, et se met à fonctionner à rebours de son programme déclaré.
Pour conclure cette esquisse, donnons la parole à l’un de ces
exclus intérieurs de l’école des normes dont le moins qu’on puisse
dire est qu’il n’est pas resté aveugle à la condition qui lui avait été
faite :
Je pense à l’instant que d’aller à l’école, bénéficier de ça qui est
réservé aux riches, doit être catastrophique pour le pauvre lorsqu’il
peut y aller quand même […] Ce qu’on les jalouse pourtant ceux qui
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À l’école des normes
peuvent ou ont pu faire des études alors que le privilège est plutôt de
n’en avoir pu faire23.
Gaston Chaissac, l’auteur de cette déclaration provocante
et désenchantée, était marié à une institutrice : les discussions à
table devaient être animées ! Il a traîné toute sa vie une réputation
d’innocent de village, que, en vrai faux naïf qu’il était, il s’est ingénié à
surjouer, endossant à l’occasion la défroque du « Gilles » qu’on exhibe
sur des tréteaux de foire24. Cela ne l’a pas empêché d’accéder à une
certaine notoriété : ses œuvres, exposées dans les meilleurs musées,
se négocient aujourd’hui à des prix élevés, ce dont il aurait bien aimé
profiter pour améliorer son ordinaire qui était des plus précaires. Les
« éliminés », dans la catégorie desquels il se rangeait naturellement,
il les appelle aussi dans son langage inimitable, celui de quelqu’un sur
lequel ont glissé toutes les entreprises de normalisation (et pour qui
Malherbe, quel bonheur !, quelle chance !, ne serait pas venu), « les
inadmissibles25 », comprenons : ceux qui s’insoumettent, ce qu’on leur
fait payer fort cher. En marge de l’évocation des diverses opérations
menées dans le cadre d’une gare de triage, on a tout à l’heure évoqué
celle qui, sans rapport avec le transport ferroviaire, consiste à écarter
d’un tas de lentilles de petits cailloux incomestibles. Dans le contexte
d’une école gérée comme une école de normes, l’inadmissible
Chaissac a été, à côté de bien d’autres, l’un de ces petits cailloux et
s’en est à sa façon, dans la peine, mais non sans un certain panache,
accommodé, pour le plus grand plaisir des personnes qui apprécient
à sa juste valeur son œuvre écrite, dessinée, peinte et sculptée.
23. Gaston Chaissac, Le Laisser-aller des éliminés, Bazas, Le temps qu’il fait, 2017, p. 81 et 88.
La formule « le laisser-aller des éliminés » est utilisée par Chaissac dans l’une de ses lettres
(p. 94).
24. Certaines de ses lettres sont signées « Gilles le fienterois ».
25. Id., p. 94.
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Doris Bühler-Niederberger,
Claudia Schuchart
1. Maggie MacLure, Liz Jones, Rachel Holmes, Christina MacRae, « Becoming a problem:
Behaviour and reputation in the early years classroom », British Educational Research Journal,
n° 3, 2012, p. 447-471.
Shlomo Romi, Mira Freund, « Teachers’, students’ and parents’ attitudes towards disruptive
behaviour problems in high school : A case study », Educational Psychology : An International
Journal of Experimental Educational Psychology, n° 19.1, 1999, p. 53-70.
Le Normal et le Pathologique à l’école aujourd’hui
2. Maija Lanas, Kriistina Brunila, « Bad behaviour in school : A discursive approach », British
Journal of Sociology of Education, n° 5, 2019, p. 695 (trad. auteurs).
3. Howard Becker, Outsiders. Études de sociologie de la déviance. Paris, Métailié, 1985, p. 33.
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L’ordre scolaire du point de vue des enfants
4. Philippe Perrenoud, Métier d’élève et sens du travail (6e édition), Paris, ESF, 2010.
5. Les modalités de cette enquête seront détaillées plus loin.
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Le Normal et le Pathologique à l’école aujourd’hui
40
L’ordre scolaire du point de vue des enfants
10. Stephen Waterhouse, « Deviant and non-deviant identities in the classroom : Patrolling
the boundaries of the normal social world », European Journal of Special Needs Education,
n° 19, 2004, p. 69-84.
11. Catherine Laws, Bronwyn Davies, (2000). « Poststructuralist theory in practice : Working
with ‘behaviourally disturbed’ children », International Journal of Qualitative Studies in
Education, n° 13.3, 2000, p. 205-221.
12. Maggie MacLure, Liz Jones, Rachel Holmes, Christina MacRae, « Becoming a problem :
Behaviour and reputation in the early years classroom », Art. cit., p. 447-471.
13. Val Gillies, Pushed to the edge. Inclusion and Behaviour support in Schools, Bristol, Policy
Press, 2016.
14. Maggie MacLure, Discourse in Educational and Social Research, Buckingham, Open
University Press, 2003.
15. Claudia Malacrida, « Medicalization, ambivalence and social control : mother’s
descriptions of educators and ADD/ADHD », Health, n° 8, 2004, p. 61-88.
16. Maggie MacLure, Liz Jones, Rachel Holmes, Christina MacRae, « Becoming a problem :
Behaviour and reputation in the early years classroom », Art. cit., p. 455.
17. Hugh Mehan, « Accomplishing classroom lessons » dans Aaron V. Cicourel et al. (dir.),
Language and School Performance, New York, Academic Press, 1974, p. 76-142.
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Le Normal et le Pathologique à l’école aujourd’hui
18. Frances Chaput Waksler, « Dancing when the music is over : a study of deviance in a
kindergarten classroom », Sociological Studies of Child Development, n° 1, 1987, p. 139-158.
19. Bronwyn Davies, « The role pupils play in the social construction of classroom order »,
British Journal of Sociology of Education, n° 4.1, 983, p. 55-69.
George, C. Payne, « Making a lesson happen. An ethnomethodological analysis », dans Martin
Hammersley, Peter Woods (dir.), The Process of Schooling, London, Routledge & Kegan, 1976,
p. 33-40.
Miriam Böttner, Doing Junior Uni. Evidente und heimliche Ordnung einer Kinderuniversität,
Wiesbaden, Springer VS, 2018.
20. Maggie MacLure, Liz Jones, Rachel Holmes, Christina MacRae, « Becoming a problem :
Behaviour and reputation in the early years classroom », British Educational Research Journal,
n° 3, 2012, p. 447-471.
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L’ordre scolaire du point de vue des enfants
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Le Normal et le Pathologique à l’école aujourd’hui
qu’il pensait nécessaire pour être un bon élève et dans quelle mesure
lui-même répondait à ces exigences.
La durée normale de l'école primaire en Allemagne n'est
que de quatre ans ; ensuite, les enfants fréquentent différents types
d'écoles secondaires en fonction de leurs performances (la décision
est prise sur la base d’une recommandation de l'enseignante). En
conséquence, les enfants du groupe d'étude fréquentent les classes 1
à 4 de l'école primaire : 2 enfants fréquentent la première année, 14
enfants les deuxième et troisième années et 4 enfants fréquentent
la quatrième année. Tous les enfants s'écartent de la norme dans
la perception de leurs professeurs, et c'est ainsi que le groupe a été
choisi. Pour les 5 filles du groupe, des faiblesses de performance
considérables sont mentionnées chez toutes, dans le cas de 2 filles
les enseignants mentionnent en plus un trouble socio-affectif. La
situation est différente pour les 15 garçons, pour 8 d'entre eux des
troubles de l'apprentissage sont nommés et pour 5 (de ces 8) en plus
un trouble socio-affectif ; pour 7 garçons seuls des problèmes socio-
affectifs sont mentionnés, avec des performances suffisantes, voire
même bonnes.
Dans ce qui suit, le matériel issu de ces entretiens est organisé
en fonction des questions posées au début. Certaines catégories
théoriques sont formulées dans un effort de résumer autant
d'informations empiriques que possible dans une catégorisation
précise et claire. Elles ont été élaborées au cours du va-et-vient entre
les prémisses théoriques et les données empiriques, caractéristique
de la recherche qualitative21. Ces catégories ont toutefois un
caractère essentiellement descriptif, puisque l'objectif de cette étude
est simplement d’exposer les connaissances que les enfants ont de
l'ordre scolaire et leur propre contribution à celui-ci. De fait, les voix et
les mots des enfants n'ont jusqu'à présent reçu que peu d'attention.
Les résultats
a) Les règles corporelles : « Faire attention et rester assis tranquillement,
écouter ... ne pas bouger les pieds ... rester tout tranquille. »
21. Leonard Schatzman, Anselm Strauss, Field Research : Strategies for a Natural Sociology,
New York, Prentice-Hall, 1973.
22. Ce nom et tous les autres noms ont été attribués aux enfants selon le principe suivant :
sexe du nom d'emprunt en fonction du sexe réel de l'enfant, sélection de noms dont la lettre
initiale est identique à la lettre initiale du nom de la ville dans laquelle se trouve l'école.
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L’ordre scolaire du point de vue des enfants
C'est ce que dit Maximus (4e année) et il ajoute : « Elle est sans
doute la plus gentille des enseignantes ici. » Les écoles connaissent
beaucoup de règles relatives à l’organisation du temps et celles-ci
ne correspondent pas toujours aux besoins et aux possibilités des
enfants. La récréation est limitée. Stefan (3e année) souhaite non
seulement qu'il « devienne plus intelligent », mais aussi que la
récréation soit plus longue. La pause peut être encore plus limitée si
l'enfant n'est pas allé assez loin avec ses tâches dans la leçon, ce qui
signifie aussi une pression de temps. C'est ce que raconte également
Maximus, à qui les enseignants attribuent un trouble socio-affectif,
tout en louant son intelligence et sa compréhension rapide. Maximus
fréquentera également le « Gymnasium » (collège) à la rentrée,
la branche la plus exigeante du système scolaire allemand qui est
segmenté dès la quatrième année scolaire. Il est l'un des deux élèves
qui expriment le plus de critiques à l'égard de l'école, notamment le
fait qu'il se sente sous pression à cause des contraintes de temps. Il
critique également le « plan de travail hebdomadaire », les directives
pour chaque enfant quant à ce qu'il doit faire dans une semaine :
C'est aussi stupide si vous devez vous dépêcher, parce que j'ai
un … un tel auxiliaire de vie scolaire et il dit que j'ai mal travaillé
et une minute avant la récréation il me dit que je devrais faire
ceci et cela et c'est juste vraiment stupide. [...] Et ce serait aussi
bien … on a ce plan de travail hebdomadaire, que ce plan
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Le Normal et le Pathologique à l’école aujourd’hui
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L’ordre scolaire du point de vue des enfants
Pour être bon, il faut bien apprendre ce que nous avons (il
énumère toutes les matières qui sont enseignées à l'école) …
tout ce que nous avons... et … aucune autre idée (Interviewer :
tu fais ça ?) moitié-moitié (Mikail, 2e année).
Je ne sais pas quoi faire ... parce que mon frère a aussi fréquenté
une école spéciale. Il était également dans la classe de Mme G.
(Interviewer : « Tes parents ou Mme G. ne t'ont- ils pas parlé et
dit : Écoute, si tu fais ceci et cela, alors ça va marcher ? ») Non
(Sandra, 3e année).
Lorsque les enfants jouent leur rôle d'élèves, ils le font devant deux
groupes de personnes : les enseignants et les camarades de classe. Ils
doivent tenir compte des règles des deux groupes afin d'être acceptés
et de réussir comme « élève normal ». Mais les deux types de règles
peuvent être contradictoires. Pavel, par exemple, sait qu'il faut poser
des questions quand on ne comprend pas quelque chose, mais la
situation sociale dans la classe rend cela difficile :
Il faut écouter attentivement, comprendre ce que dit le
professeur et poser des questions. Oui, je ne pose pas assez de
questions ... parce qu'alors un élève nommé hum … est-ce que
je peux dire le nom ? [...] Eh bien, oui, alors il réagit toujours
comme s'il savait tout et bien qu'il ne sache rien du tout (Pavel,
4e année).
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Le Normal et le Pathologique à l’école aujourd’hui
Marius pense qu'il sait ce qu'un bon élève doit faire et pense
qu'il s'y tiendra, mais ses camarades de classe ne suivent pas ces
règles :
Si tu apprends bien et que tu es gentil avec les autres (en réponse
à la question de savoir comment être un bon élève), mais oui,
... que les enfants soient plus gentils avec moi peut- être ..., qu'il
n'y ait plus de coups peut-être ..., ce serait mon souhait, qu'il n'y
ait pas tant de coups, je me prends toujours des coups (Marius,
2e année).
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L’ordre scolaire du point de vue des enfants
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Le Normal et le Pathologique à l’école aujourd’hui
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Marina D’Amato
L’invention de la norme
Avant-propos
Dans un monde où culture et changement sont devenus synonymes,
dans un contexte social où l'influence du relativisme d'une part
et de l'unicité de la personne d'autre part semblent définir le bon
ordre de l’individu social, pourquoi aspire-t-on compulsivement à
la normalité ? Qu'est-ce que le normal ? La norme statistique qui
identifie la normalité à la fréquence ? Celle qui est définie par la
distribution d'une caractéristique quelconque qui suit le mouvement
de la courbe en cloche de Gauss et qui conduit à considérer
comme « normaux » les cas qui occupent une position centrale et
« anormaux » ceux qui sont disposés aux extrémités ?
Évidemment, de ce point de vue, des actes de délinquance
ou des défauts sensoriels peuvent aussi bien être considérés comme
normaux, dès lors qu'ils apparaissent avec une fréquence suffisante
dans le groupe social ou dans celui des pairs du sujet étudié. La
norme statistique établit l'existence de différences purement
quantitatives, jamais qualitatives entre les phénomènes normaux
et anormaux, et ne prévoit la possibilité de sortir du périmètre de
la normalité que dans deux directions : vers le haut ou vers le bas.
Et les névroses, les psychoses, les formes déviantes, les troubles de
la personnalité, ne sont aujourd'hui envisagés comme écart à des
degrés divers du cas normal que dans un sens quantitatif. La norme
idéale implique-t-elle un état de perfection auquel aspirer ? Ou bien
de tendre vers le juste milieu, selon la conception aristotélicienne, qui
dans l'Éthique à Nicomaque était placée à égale distance entre l'excès
et le défaut ? Une position médiane vertueuse, dont il n'a cependant
pas été question, serait de se demander à quelle fréquence un tel état
se réalise…
Tout système social, indépendamment de son ordre de
grandeur, utilise des normes idéales pour réguler le comportement
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Le Normal et le Pathologique à l’école aujourd’hui
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L’invention de la norme
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Le Normal et le Pathologique à l’école aujourd’hui
Le cas italien
Sur le site web du MIUR (Ministère de l’Instruction, de l’Université
et de la Recherche)2, est disponible l'étude statistique portant sur les
élèves souffrant de troubles spécifiques de l'apprentissage (TSA) dans
les écoles publiques, et privées sous contrat et hors contrat. Les données
portent sur l'année scolaire 2017-2018, au cours de laquelle le nombre
d'élèves répertoriés comme souffrant de TSA sur le nombre total de
participants n'a cessé d'augmenter, passant de 0,7 % en 2010/2011
à 3,2 % en 2017-2018. L'augmentation du nombre de certifications
déclarées au cours des quatre dernières années est significative :
celles relatives à la dyslexie sont passées d'environ 94 000 à 177 000,
marquant un taux de croissance de 88,7 % ; les certifications de la
dysgraphie sont passées de 30 000 à 79 000, avec une croissance de
163,4 %. Le nombre d'élèves souffrant de dysorthographie certifiée
a également augmenté de manière significative, passant d'environ
37 000 à 92 000 (+149,3 %) ; les élèves souffrant de dyscalculie sont
passés de 33 000 à un peu moins de 87 000 (+160,5 %). En 2017-2018,
les élèves atteints de TSA fréquentant les écoles italiennes de tous
niveaux étaient 276 109, soit 3,2 % du total de la population scolaire.
Dans le primaire, le pourcentage était d'environ 2 %, au collège il était
de 5,6 % et au lycée de 4,7 %. Au jardin d'enfants, il était seulement
de 0,12 %. En moyenne, le pourcentage d'élèves relevant du TSA était
de 3,3 % du nombre total d'élèves dans les écoles publiques et de
2,3 % dans les écoles non publiques (3,2 % en moyenne de l'ensemble
des écoles). En ce qui concerne spécifiquement l'école privée, le
pourcentage d'élèves ayant un TSA était de 2,1 % sur le total.
La diffusion territoriale
Les certifications TSA ont été délivrées dans une plus large mesure
dans les régions du Nord-Ouest, où le pourcentage du total des
élèves répertoriés était de 4,8 %. Pourcentage élevé également dans
les régions du Centre (3,9 %) et du Nord-Est (3,6 %). Pourcentage
beaucoup plus faible dans le Sud (1,6 %). Parmi les régions singulières,
les valeurs les plus élevées ont été signalées par la Vallée d'Aoste et
la Ligurie, toutes deux avec 5,1 % d'élèves présentant des troubles
spécifiques d'apprentissage sur le total des élèves ; suivis par le
2. https://www.miur.gov.it/web/guest/-/scuola-pubblicati-i-dati-sugli-alunni-con-disturbi-
specifici-dell-apprendimento.
54
L’invention de la norme
55
Le Normal et le Pathologique à l’école aujourd’hui
4. Scott Baker, Sylvia Smith, « Starting Off on the Right Foot : The Influence of Four
Principles of Professional Development in Improving Literacy Instruction in Two
Kindergarten Programs », Learning Disabilities Research & Practice, n° 14.4, 1999, p. 239-253.
Jane B. Jackson, Jeanne R. Paratore, David J. Chard, Sheila Garnick, « An Early Intervention
Supporting the Literacy Learning of Children Experiencing Substantial Difficulty », Learning
Disabilities Research & Practice, op.cit., p. 254-267. Darrell Morris, Beverly Tyner, Jan Perney,
« Early Steps : Replicating the Effects of a First-Grade Reading Intervention Program »,
Journal of Educational Psychology, n° 92.4, 2000, p. 681-693. Wolfgang Schneider, Ellen Roth,
Marco Ennemoser, « Training Phonological Skills and Letter Knowledge in Children at Risk
for Dyslexia : A Comparison of Three Kindergarten Intervention Programs », Journal of
Educational Psychology, n° 92.2, 2000, p. 284-295. P. F. Vadasy, J. R., Jenkins, K. Pool, « Effects
of Tutoring in Phonological and Early Reading Skills on Students at Risk for Reading
Disabilities », Journal of Learning Disabilities, n° 33.4, 2000, p. 579-590.
5. Peter Bryant, Lynette Bradley, Children’s Reading Problems, Oxford, Blackwell, 1985.
Giuliana Pinto, Dal linguaggio orale alla lingua scritta : continuità e cambiamento, Scandicci,
La nuova Italia, 1993. L. Kozminsky, E. Kozminsky, « The effects of early phonological
awareness training on reading success », Learning and Instruction, n° 5, 1995, p. 187-201.
56
L’invention de la norme
57
Le Normal et le Pathologique à l’école aujourd’hui
Conclusion
En guise de conclusion je poserai quelques questions : pourquoi
notre société occidentale avancée a-t-elle ce besoin de caser tout ce
qui arrive aux siens ? Tout ce que philosophie, psychologie, socio-
logie ont essayé de comprendre selon différentes méthodes et
différents regards ? Pourquoi l’individu contemporain n’accepte-
t-il pas l’incertitude et l’évolution de l’unicité de l’humain ? Est-il
rassuré face à l’incertain par l’invention de la normalité, tout en
sachant qu’elle n’existe pas ? À moins qu’il soit convaincu que la
majorité a raison, voire satisfait de ne pas avoir de responsabilité
personnelle dans ses choix s’il respecte les codes. La norme devient-
elle désormais la preuve de la vérité ? Le règne de la mesure a occulté
la personnalité, triomphant au XXe siècle. À présent, n’assiste-t-on pas
à une nouvelle reconfiguration de l’individualité ? C’est à l’individu
unique et à son intériorité que la métacognition fait appel pour,
paradoxalement, rejoindre les normes comportementales et les
standards d’apprentissage.
58
Edmondo Grassi
Désubjectivation technologique
Dans le monde contemporain, certains systèmes sociaux, éducatifs
et politiques visent une désubjectivation de la personne, dans le
but de déstructurer l'appareil identitaire de l'individu et d'ouvrir
la possibilité d'une reprogrammation de type psychanalytique1,
dans laquelle la normalisation de l'individu reste centrale, vu qu’un
puissant système capillaire de contrôle s’étend aux désirs et à la vie2.
Le pouvoir de tout système ou structure d'observation ou
de contrôle s'exprime également à travers un exercice disciplinaire
agissant sur la personne et ses inclinations, ainsi qu’à travers
un exercice normatif qui devient l'unité de mesure nécessaire
à la régulation des actions collectives. Par ailleurs, dans une
société globalisée, le contrôle des savoirs dépasse les institutions
disciplinaires, atteignant de façon de plus en plus immédiate le
champ social et le corps de la personne3. Dans cette perspective,
l'utilisation des dispositifs numériques vise également, à travers des
pratiques, des discours, des savoirs, à la création de corps dociles,
mais, apparemment, libres, guidés dans des choix, qui élaborent leur
identité à travers le processus même d'assujettissement, voire de
désubjectivation4.
Les nouvelles technologies dessinent les changements
de la personne, de ses choix, ses rêves, ses espoirs et ses peurs5.
1. Julia Kristeva, Stranieri a noi stessi, Rome, Donzelli Editore, 2014 ; Étrangers à nous-mêmes,
Paris, Folio, Gallimard, 1991.
2. Agnes Heller, Il potere della vergogna. Saggi sulla razionalità, Roma, Castelvecchi, 2018.
3. Lorella Cedroni, Diritti umani diritti dei popoli, Roma, Aracne, 2003.
4. Rosi Braidotti, Posthuman Knowledge, Cambridge, Polity, 2019. Timothy Morton,
Iperoggetti, Roma, Nero, 2018. Antonio Carnevale, Tecno-vulnerabili. Per un’etica della
sostenibilità tecnologica, Napoli-Salerno, Orthotes, 2017.
5. Rebecca Lemov, Big data is people, https://aeon.co/essays/why-big-data-is-actually-small-
personal-and-very-human, 2017.
59
Le Normal et le Pathologique à l’école aujourd’hui
6. Luciano Floridi, The Fourth Revolution. How the Infosphere is reshaping Human Reality,
Oxford, Oxford University Press, 2014.
60
Éducation, technologie et contrôle : l’ère de l’intelligence artificielle
61
Le Normal et le Pathologique à l’école aujourd’hui
10. L’une des premières écoles à participer au projet d’expérimentation et de recherche a été
l’école élémentaire de Hangzhou, dans la province centrale du Zhejiang.
11. Wall Street Journal, « How China Is Using Artificial Intelligence in Classrooms », YouTube,
1er octobre 2019. [Dernière consultation le 2 octobre 2019.]
12. Suite aux données collectées par la machine, les élèves auront un mouchoir rouge s'ils
sont attentifs, bleu si non constants et blanc s'ils sont distraits et qualifiés de « hors ligne ».
13. BrainCo, FocusEDU, Enhancing Education Outcomes Through Real-Time Student
Engagement Feedback in the Classroom, [en ligne] https://www.brainco.tech/focusedu/.
[Dernière consultation le 2 octobre 2019.] Entreprise étasunienne qui collabore avec le
Harvard Innovation Lab, et développe des dispositifs numériques destinés à l'entraînement
cognitif de la personne dans les domaines de l'éducation, du bien-être et du fitness. Le premier
gros financement est venu du gouvernement chinois. Initialement, créé pour améliorer
les compétences pédagogiques de l'enseignant qui, par l'inattention des élèves, aurait dû
comprendre la nécessité de conduire la leçon de manière différente, il est devenu un système
de contrôle et d'évaluation des enfants. Un projet pilote a été mis en œuvre entre 2018 et 2019,
qui prévoyait le suivi, pendant trois semaines, d'une dizaine de milliers d'élèves âgés de 10 à
17 ans, dans les villes de Jinhua et Hangzhou.
62
Éducation, technologie et contrôle : l’ère de l’intelligence artificielle
63
Le Normal et le Pathologique à l’école aujourd’hui
64
Éducation, technologie et contrôle : l’ère de l’intelligence artificielle
65
Le Normal et le Pathologique à l’école aujourd’hui
Réflexions ouvertes
L'éducation culturelle a un impact fort, comme on le sait, dans la
diffusion et la valorisation des principes et normes éthiques liées à
la liberté et à la vie privée, pour mettre une limite à l’envahissement
de l'État et ainsi créer un espace secret, où l'étymologie même de
l'adjectif désigne un lieu à l’écart, séparé du reste et de l'ingérence
de la puissance publique. Dans l’optique de l’évolution de l’être
humain, il n’est pas concevable d’envisager l'identité de la personne
comme un élément programmable à l’aide des big data et au moyen
de corrélations numériques des actions réalisées dans l'infosphère,
renforcées par l'influence du machine learning, car « même s’il était
possible qu’à l’avenir on réussisse de cloner des êtres humains […] ils
seraient identiques seulement au moment de la naissance16 » et leurs
expériences de vie les rendraient différents. Même si un algorithme
était capable de reproduire la conscience humaine ou de réussir à
l’insérer dans un hardware en constante évolution, lui conférant une
nouvelle forme d'immortalité, cette identité changerait dès qu’elle
serait corrélée à de nouvelles expériences et de nouvelles altérités. De
plus, il faut comprendre que le corps humain est en soi naturellement
technologique, renforcé encore par l'utilisation de prothèses et par
16. Amin Maalouf, L’identità, Bompiani, Milano, 2016, p. 18. Traduction de l’écrivain :
« Même si demain il était possible […] de cloner des êtres humains, les mêmes clones […] ne
seraient identiques qu'au moment de leur naissance. »
66
Éducation, technologie et contrôle : l’ère de l’intelligence artificielle
67
Mej Hilbold et Laurence Gavarini
1. Anne Barrère, « Un nouvel âge du désordre scolaire : les enseignants face aux Incidents »,
Déviance et Société, volume 26, n° 1, 2002.
70
Ordre et désordres scolaires, les enseignants à l’heure des « incidents »
2. Ibid., p. 4.
3. Ibid., p. 6.
4. Ibid., p. 9.
5. Ibid., p. 4.
6. Ibid., p. 5.
7. Ibid.
8. Ibid.
71
Le Normal et le Pathologique à l’école aujourd’hui
72
Ordre et désordres scolaires, les enseignants à l’heure des « incidents »
73
Le Normal et le Pathologique à l’école aujourd’hui
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Ordre et désordres scolaires, les enseignants à l’heure des « incidents »
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Le Normal et le Pathologique à l’école aujourd’hui
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Ordre et désordres scolaires, les enseignants à l’heure des « incidents »
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Le Normal et le Pathologique à l’école aujourd’hui
78
Ordre et désordres scolaires, les enseignants à l’heure des « incidents »
19. Anne Barrère, « Un nouvel âge du désordre scolaire : les enseignants face aux Incidents »,
op. cit.
79
Le Normal et le Pathologique à l’école aujourd’hui
Les dialogues sont écrits, avec une alternance entre le style direct et
le style indirect ; on y trouve aussi l'usage du « je » par l'enseignant.
De très nombreux rapports, parmi les « administratifs »,
comme parmi les « narratifs », présentent des éléments d'emphase –
mots soulignés ou en capitales, points d'exclamation – et empruntent
par ailleurs au registre moral par l'emploi très fréquent des termes
« inadmissible » ou « inacceptable » :
Lorsque je demande à Aboubakar de me donner son carnet, car
il fait des bruits en classe pour perturber le cours, il refuse en
me répondant que ce n'est pas lui. Ce refus est inadmissible.
(professeure de français)
80
Ordre et désordres scolaires, les enseignants à l’heure des « incidents »
81
Le Normal et le Pathologique à l’école aujourd’hui
Le registre lexical qui est utilisé par les enseignants dans leurs rapports
d’incidents met en évidence certains types de comportements des
élèves ou l’effet de ces comportements sur leur personne :
des élèves qui dérangent beaucoup l’ordre de la classe : par les
bruits de tous ordres, par le mouvement, par les gestes, par les
propos, toujours déplacés ;
82
Ordre et désordres scolaires, les enseignants à l’heure des « incidents »
Une autre piste peut être explorée : les rapports d'incidents auraient,
en tous cas dans le collège où nous avons mené notre étude, une
fonction de « débarras » tel que René Roussillon utilise cette notion
du sens commun dans le champ de l’institutionnel20. Comme il l’écrit,
« certaines institutions de soins ou de rééducations sont capables
d’organiser en leur sein un espace pour “traiter” ou “contenir”
83
Le Normal et le Pathologique à l’école aujourd’hui
84
Ordre et désordres scolaires, les enseignants à l’heure des « incidents »
commises par des jeunes, qui renvoient les adultes à une solitude
angoissante, à l’impératif de tenir seul face à l’attaque.
En tout cas, ces rapports, désormais sous notre séquestre,
frappent par l’expression d’une pulsionnalité chez la plupart de leurs
auteurs et par la décharge d’un sadisme inconscient. Dans l'exercice
solitaire de l'acte de rédaction, et très vite après les faits, donc de
manière réactionnelle, ils y vident leur sac, sachant que le rapport
est aussi une pièce susceptible d’être versée au dossier de l’élève à
des fins disciplinaires. On peut les voir comme une sorte de surface
reflétant les atteintes au Moi de l’enseignant et la désidéalisation qui
en découle. Les rapports d’incidents disent aussi quelque chose d’une
excitation déchainée dans et hors de la classe, une excitation qui ne
pourrait plus être contenue par ce que Claudine Blanchard-Laville
nomme le holding didactique23 et viendrait donc s’évacuer ici dans
ces écrits de facture très personnelle. Par ce concept d’inspiration
winnicottienne, Blanchard-Laville rappelle « l’exigence de la place à
tenir » pour l’enseignant en situation pédagogique24, et cela malgré
son exposition, personne et corps, au regard de ses élèves, malgré
les mouvements inconscients qui l’habitent, malgré les affects qui
circulent.
Noter l'incident, c'est avouer le désordre dans la classe et
d'une certaine façon sa propre impuissance, même si le rapport
d'incidents prend parfois des accents de parade virile dans sa forme,
en affichant qu'on tient tête à l'élève.
Dans cette collection de faits et dans l’entrelacs d’énoncés
administratifs et d’énonciations subjectives, et très affectives, on peut
entendre un éprouvé d’intrusion et d’empiétement dans l’espace
physique et psychique de l’enseignant. Une hypothèse serait alors
que la libido, qui est censée se porter sur les savoirs, serait exacerbée
dans les relations amour/haine, attraction/répulsion entre élèves et
professeurs.
85
Le Normal et le Pathologique à l’école aujourd’hui
sont plutôt fondées sur l’arbitraire. Selon que l’incident est isolé ou
participe à une longue liste de transgressions, il peut n’avoir aucune
suite, ou au contraire servir à l’établissement comme pièce versée
au dossier à charge de l’élève, justifiant des sanctions, voire son
exclusion si les rapports se multiplient.
Ce caractère aléatoire permet à l’enseignant d’ignorer au
moment de la rédaction du rapport ses conséquences éventuelles,
d’où la tonalité de certains récits consignés, jamais secondarisés,
évoquant une sorte de décharge pulsionnelle sans filtre. L’incertitude
concernant l’usage futur du rapport, sa lecture attentive par un
tiers ou non, l’éventuelle sanction des faits, offrent à l’enseignant
la possibilité de minorer les conséquences de son action, mais
parfois le poussent sans doute également à user d’un style affecté
et dramatisant qui pourrait avoir pour but de provoquer des suites,
comme s’il plaidait pour une prise en compte de son récit à la hauteur
des atteintes qu’il a subies.
L’écrit en lui-même n’est pas une sanction, mais peut
constituer une étape vers la punition. Or, celle-ci comporte toujours
une face obscure, ou une « part maudite », pour reprendre
l’expression de Georges Bataille dont Didier Fassin, dans son livre
Punir, fait la paraphrase : « Même dans les formes réputées les plus
civilisées de l’administration de la justice il reste cette part d’ombre
de la jouissance d’une souffrance provoquée.
On peut ici […] parler de “part maudite” du châtiment pour
désigner ce qui est toujours en excès de ce qu’il est censé être.
C’est cette part maudite, souvent enfouie et niée, dont ni les
justifications ni les interprétations ne rendent entièrement
compte25.
25. Didier Fassin, Punir. Une passion contemporaine, Paris, Seuil, 2017, p. 113.
86
Ordre et désordres scolaires, les enseignants à l’heure des « incidents »
26. Michel Foucault, Histoire de la sexualité. 1, La volonté de savoir, Paris, Gallimard, 1976.
87
Le Normal et le Pathologique à l’école aujourd’hui
88
Ordre et désordres scolaires, les enseignants à l’heure des « incidents »
27. Ian Hacking, Neuf impératifs des sciences qui classifient les gens, leçon au Collège
de France, 22 février 2005. [En ligne] https://www.college-de-france.fr/site/ian-hacking/
course-2005-02-22.htm.
89
Le Normal et le Pathologique à l’école aujourd’hui
90
Léandro de Lajonquière
1. Philippe Ariès, L’Enfant et la Vie familiale sous l’Ancien Régime [1960], Paris, Seuil, 1973.
91
Le Normal et le Pathologique à l’école aujourd’hui
92
De l’éducation au temps de l’autisme : un nouveau rapport à l’enfant
93
Le Normal et le Pathologique à l’école aujourd’hui
5. On pourrait croire, puisque j’utilise le terme réel, que ces trois phases constituant
l’opérateur théorique Enfance triphasée soient en correspondance avec la trilogie lacanienne
Réel, Symbolique et Imaginaire, mais ce n’est pas le cas. Le temps de l’attente ou quarantaine
du monde adulte est le résultat d’une interdiction symbolique. Cependant, la réalité psychique
enfantine, effet du travail de conquête d’une place d’énonciation dans le champ de la parole et
du langage réalisée par un enfant est autant réelle, symbolique qu’imaginaire.
6. Giorgio Agamben, Enfance et histoire. Destruction de l’expérience et origine de l’histoire
[1978], Paris, Payot, 1989.
94
De l’éducation au temps de l’autisme : un nouveau rapport à l’enfant
95
Le Normal et le Pathologique à l’école aujourd’hui
7. Voir José Sérgio Fonseca de Carvalho, Educação, uma herança sem testamento, São Paulo,
Perspetiva, 2017.
8. Voir Laurence Gavarini, La Passion de l’enfant, Paris, Hachette, 2001.
96
De l’éducation au temps de l’autisme : un nouveau rapport à l’enfant
9. Sigmund Freud, « Pour introduire le narcissisme » [1914] dans Œuvres Complètes – 1913-
1914, vol. 12, Paris, PUF, 2005, p. 213-245.
97
Le Normal et le Pathologique à l’école aujourd’hui
98
De l’éducation au temps de l’autisme : un nouveau rapport à l’enfant
10. Voir François Ansermet, Ariane Giacobino, Autisme. À chacun son génome, Paris,
Navarin, 2012.
11. Voir Léandro de Lajonquière, « Do interesse epistemológico dos estudos psicanalíticos
na educação », dans Marcelo Ricardo Pereira (dir.), Os sintomas na educação de hoje. Que
fazemos com isso ?, Belo Horizonte, Scriptum, 2017, p. 32-38.
99
Le Normal et le Pathologique à l’école aujourd’hui
100
De l’éducation au temps de l’autisme : un nouveau rapport à l’enfant
15. Friedrich Nietzsche, « El Anticristo » [1888] dans Obras Completas, vol. 4. Buenos Aires,
Aguilar, 1962, p. 475.
101
Le Normal et le Pathologique à l’école aujourd’hui
les petits Nicolas des années soixante. Il est devenu l’enfant idéal
dans nos rêves de ce nouveau siècle. Cet être de science-fiction n’est
pas censé éprouver de gêne d’être comme il est, car il n’y a pas de
décalage entre « être » et « se trouver dans un état (particulier) »16.
L’enfant « se trouve » alors, de fait, là où il « est », par conséquent,
il n’est jamais à la « mauvaise place » au regard des adultes. Bref,
ce personnage est tout simplement comme ça et point final ! Par
ailleurs, il est facile de constater autour de nous la différence entre
ces parents pour lesquels leurs enfants semblent hors focus et qui
cherchent toujours à les faire correspondre à l’idéal d’enfant, et les
autres pour qui leurs enfants apparaissent toujours bien centrés
sur la photo imaginaire. Ils acceptent leurs enfants tels qu’ils leur
apparaissent. Ils ne sont jamais surpris par rien. Par exemple, je me
souviens de l’histoire de deux cousins âgés de trois ou quatre ans.
L’un semble se bien porter, tandis que l’autre montre des signes
que quelque chose ne va pas : il ne parle pas, il pleure pour un oui
ou pour un non et ne montre jamais d’intérêt pour les jeux avec
d’autres enfants. Son cousin tente de lui prendre un de ses jouets,
ce qui déclenche une violente réaction de sa part. Sa tante qui est
présente au dîner décide d’intervenir en disant que les enfants
peuvent bien prêter leurs jouets pour qu’ils jouent ensemble, ce
qui entraîne la réaction suivante de la part du père du petit garçon
pleureur envers sa belle-sœur : « Hé, dis-moi, tu prêterais ton ordi à
un des tes collègues de travail ? » Ce père ne voit aucune différence
entre le monde professionnel des adultes et celui des enfants. Il va
sans dire que pour ce père et sa femme, à la surprise de la tante, il
n’y a pas de problème dans le fait que leur enfant de quatre ans ne
parle pas, pleure toute la journée et ne joue jamais avec personne.
Le fils apparaît sur la photo, là où ils l’attendent, c’est-à-dire l’enfant
« est » bien à la place où il « se trouve ». Il n’y a pas de décalage ou
différence entre le fait d’être et celui de simplement le paraître.
Par ailleurs, ce personnage fictif apprend seul, il ne demande
rien, et avec lui nous ne courons pas le risque de voir la maison
envahie par d’autres enfants qui viennent prendre le goûter à
la sortie de l’école ou après avoir joué dans le square du quartier.
Nous ne courons pas non plus le risque de devoir organiser des fêtes
d’anniversaire, et donc d’avoir à administrer l’amour, la jalousie
et l’inimitié lorsqu’il s’agit de choisir un petit groupe parmi les
nombreux invités potentiels. En conclusion, ce personnage dit autiste
16. Je fais ici référence à la distinction qui existe en espagnol et en portugais, mes langues
aussi courantes de travail et de pensée, entre deux verbes différents : « estar » qui signifie
se trouver dans un certain état ou une condition à un moment donné, et « ser » [être], qui
renvoie au caractère essentiel de quelque chose.
102
De l’éducation au temps de l’autisme : un nouveau rapport à l’enfant
est l’enfant qui, bien qu’il soit susceptible de nous occuper tout le
temps, ne nous inquiète pas au point de devoir nous donner la tâche
de soutenir notre « dire » injustifié de père ou de mère : « Hé, fais ce
que je te dis parce que je suis ton père/ta mère ! »
Tout comme il n’y a pas de rapport sexuel, comme le disait
Lacan, il n’y a pas de proportion entre les enfants et le monde. En
d’autres termes, il existe entre ces derniers une différence irréductible.
Cette affirmation est également valable en ce qui concerne les
adultes, car bien qu’il n’y ait pas d’opposition entre l’individu et le
social, pour la psychanalyse il y a une solution de continuité entre le
Sujet et l’Autre. Il est important de s’en souvenir, car nombreux sont
ceux qui, dans notre domaine, annoncent les apocalypses les plus
variées à chaque transformation sociétale. Pour ces auteurs, le sujet
est en fin de compte un appendice du social et, par conséquent, ils
confondent les rêves avec la réalité des liens sociaux et des positions
subjectives singulières. Le sujet est précisément cette différence à
l’intérieur même de l’Autre, qui installe la possibilité, jusqu’à preuve
du contraire, pour tout être humain de ne pas être le double de
l’Autre, son « répliquant » ou un simple appendice. En psychanalyse,
le sujet est donc une différence au sein du monde et, en ce sens, on
dit qu’il n’a pas un statut ontique, mais éthique.
Le fait de souligner le manque de proportion entre chaque
être parlant et le monde est important, car, bien que le lien social
actuellement dominant puisse être qualifié de pervers, selon la
réflexion devenue classique de Contardo Calligaris, cela ne fait pas de
chacun de nous – les adultes – des pervers, ni de tous les enfants, des
psychotiques. En fait, la plupart des gens ordinaires, quel que soit le
monde, sont toujours composés de névrosés, plus ou moins enclins à
se faire rouler dans la farine de la perversion ambiante17. Cependant,
qui dit majorité ne dit pas totalité des gens. Cette affirmation ne
nous dit rien non plus sur le prix qu’un homme ou une femme
en particulier a dû payer pour échapper à un destin funeste dans
la difficile conquête d’un lieu de parole singulière dans le monde.
En somme, bien que l’humanité ne réponde pas à un programme
tayloriste, la question éthique se pose toujours dans le social. C’est
précisément la raison pour laquelle, en matière d’éducation, même
lorsque la psychanalyse ne peut répondre à l’exigence pédagogique
névrotique habituelle de ce qui doit être fait en la matière, elle rappelle
bien ce qui ne doit précisément pas être fait au risque que l’éducation
d’un enfant ne puisse advenir difficilement18. Assujettir un enfant au
103
Le Normal et le Pathologique à l’école aujourd’hui
104
De l’éducation au temps de l’autisme : un nouveau rapport à l’enfant
105
Le Normal et le Pathologique à l’école aujourd’hui
23. Léandro de Lajonquière, « De ce que les experts et leurs savoirs ne veulent pas savoir sur
l’expérience scolaire », Cliniques Méditerranéennes, n° 102, 2020, p. 93 -107.
24. Léandro de Lajonquière, Infância e ilusão (psico)pedagógica, op. cit.
106
De l’éducation au temps de l’autisme : un nouveau rapport à l’enfant
25. Voir Léandro de Lajonquière, « De ce que les experts et leurs savoirs ne veulent pas
savoir sur l’expérience scolaire », op. cit.
26. Léandro de Lajonquière, « Pour que l’éducation soit au rendez-vous dans l’inclusion
scolaire », Psychologie Clinique, n° 50, 2020, p. 25-35.
27. Écrivain, militaire, ambassadeur, instituteur et idéologue argentin de la scolarisation
comme pièce maîtresse de l’invention d’une nation moderne qui permit à l’Argentine
d’atteindre, au début du XXe siècle, un taux d’alphabétisation comparable à celui de la Grande-
Bretagne et de la France. Il fut président entre 1868 et 1874.
28. Sigmund Freud, « L’avenir d’une illusion » [1927], dans Œuvres complètes – 1926-1930,
vol. 18, Paris, PUF, 1994, p. 141-197.
107
Le Normal et le Pathologique à l’école aujourd’hui
108
De l’éducation au temps de l’autisme : un nouveau rapport à l’enfant
31. Voir Sigmund Freud, « L’inquiétant » [1919], dans Œuvres complètes – 1916-1920, vol. 15,
Paris, PUF, 1996, p. 147-188.
32. Voir Maud Mannoni, Éducation impossible, Paris, Seuil, 1973.
109
Le Normal et le Pathologique à l’école aujourd’hui
110
De l’éducation au temps de l’autisme : un nouveau rapport à l’enfant
111
Ilaria Pirone
114
L’idéal inclusif à l’épreuve des processus de normalisation
7. Nous reprenons ici la distinction qu’Arendt fait entre le pouvoir d’agir de l’homme, ou
encore l’homo faber et troisièmement l’animal laborans, dans sa définition de la vita activa
théorisée dans la Condition de l’homme moderne (1958).
8. Ces entretiens se sont déroulés dans le cadre du projet de recherche Éducation, droits de
l’enfant et nouvelles normativités, financé par l’appel à projets de l’Université Paris Lumières
(2016-2018), et porté par Dominique Ottavi (Université Paris Ouest Nanterre) et Ilaria Pirone
(Université Paris 8).
115
Le Normal et le Pathologique à l’école aujourd’hui
116
L’idéal inclusif à l’épreuve des processus de normalisation
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Le Normal et le Pathologique à l’école aujourd’hui
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L’idéal inclusif à l’épreuve des processus de normalisation
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Le Normal et le Pathologique à l’école aujourd’hui
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L’idéal inclusif à l’épreuve des processus de normalisation
31. À ces huit impératifs Hacking en rajoute un qui ne nous semble pas nécessaire pour
notre argumentation : « prendre possession de son identité, c’est-à-dire revendiquer la
classification créée par les experts pour soi-même » (Hacking, ibid.).
32. Ilaria Pirone, Pascaline Tissot, « L’inclusion scolaire, un enjeu de langage ? », Psychologie
clinique, n° 50, 2020/2, p. 107-117.
33. Nous faisons références aux analyses présentés par le philosophe Byung-Chul Han :
« […] la société d’aujourd’hui est une société de la performance qui ne cesse de se débarrasser
de la négativité de l’interdit et de la règle et se voit comme une société de la liberté. Le verbe
qui caractérise la société de la performance n’est pas le freudien “devoir”, c’est “pouvoir”. »
(Byung-Chul Han, La Société de la fatigue, Belval, Circé, 2014, p. 9.)
121
Le Normal et le Pathologique à l’école aujourd’hui
34. Sigmund Freud, Malaise dans la civilisation [1930], Paris, Payot & Rivages, 2010.
35. B.O. hors série, n° 3 du 19 juin 2008.
Repéré sur le site : http://www.education.gouv.fr/bo/2008/hs3/programme_maternelle.htm.
122
L’idéal inclusif à l’épreuve des processus de normalisation
123
Le Normal et le Pathologique à l’école aujourd’hui
42. Roger Misès, et al., Classification française des troubles mentaux de l’enfant et de
l’adolescent. R-2012, op. cit., p. 106.
124
L’idéal inclusif à l’épreuve des processus de normalisation
125
Le Normal et le Pathologique à l’école aujourd’hui
45. Expression reprise à Hannah Arendt : « La crise de l’éducation », dans Crise de la culture.
Paris, Gallimard, 1972, p. 223- 252.
46. Ibid., p. 11.
47. Ibid., p. 17.
48. Sur ce point, nous renvoyons le lecteur à l’analyse très approfondie de Marie-Claude
Blais, Marcel Gauchet et Dominique Ottavi, Transmettre, apprendre, Paris, Stock, 2014.
49. Ilaria Pirone, « Nouvelles normativités et décrochage éthique de l’Autre : quelle place
pour la transmission de la culture à l’école ? », Cliniques méditerranéennes, n° 102, 2020,
p. 109-122.
126
L’idéal inclusif à l’épreuve des processus de normalisation
50. Charlotte Herfray, La Psychanalyse hors les murs, Paris, L’Harmattan, 2006.
51. Nous empruntons cette belle formule à Jean-Marie Weber, auteur entre autres de
l’ouvrage Le décrochage scolaire, un processus de construction et déconstruction, Nîmes, Champ
social éditions, 2021.
127
Giuseppe Rociola
1. Myron L. Belfer, « Child and adolescent mental disorders : the magnitude of the problem
across the globe », J Child Psychol Psychiatry, n° 49, 2008, p. 226-36.
2. Rio Bianchini, Valentina Postorino, Rita Grasso, Bartolo Santoro, Salvatore Migliore,
Corrado Burlò, Carmela Tata, Luigi Mazzone, « Prevalence of ADHD in a sample of Italian
students : a population-based study », Res Dev Disabil, n° 34.9, septembre 2013, p. 2543-2550.
3. Michel Foucault, Folie et déraison. Histoire de la folie à l'âge classique, Paris, Plon, 1961.
4. Sigmund Freud, Malaise dans la civilisation [1930], Paris, Payot & Rivages, 2010.
130
Les troubles de l’attention (TDAH) comme problème social
La médicalisation du comportement
Les neurosciences contribuent à biologiser le champ de la psychiatrie
contemporaine, réduisant drastiquement l'importance des expli-
cations psychodynamiques, sociales et environnementales. Cela a
pour conséquence de marginaliser des positions herméneutiques
humanistes, jugées trop abstraites par les neuroscientifique7 et perçues
comme culpabilisantes par les parents d'enfants hyperactifs, en
mettant en cause le premier environnement psychosocial de l'enfant.
Certaines contributions de la psychologie cognitive, en revanche,
ont trouvé une place dans ce nouveau paysage scientifique, dans la
mesure où elles sont alignées sur le paradigme positiviste soutenu
par les neurosciences. Le sujet, le contexte social et environnemental
5. Claudio Vio, Gian Marco Marzocchi, Francesca Offredi, Il bambino con deficit di attenzione/
iperattività, Trento, Erickson, 1999, p. 83.
6. Fabio Tognassi, Uberto Zuccardi Merli, Il bambino iperattivo, Milano, Franco Angeli, 2010.
7. Eric Kandel, Psichiatria, psicanalisi e nuova biologia della mente, Torino, Bollati Boringhieri,
2007.
131
Le Normal et le Pathologique à l’école aujourd’hui
8. Enrico Caniglia, Neurodiversità. Per una sociologia dell’autismo, dell’ADHD e dei disturbi
dell’apprendimento, Milano, Meltemi editore, 2018.
9. Peter Conrad, Deborah Potter, « From Hyperactive Children to ADHD Adults :
Observations on the Expansion of Medical Categories », Social Problems, volume 47, n° 4,
2000, p. 559-582.
10. Peter Conrad, « The Discovery of Hyperkinesis : Note on the Medicalization of Deviant
Behaviour », Social Problems, n° 23, 1975, p. 12-21.
11. Alok Sharma, Justin Couture, « A review of the pathophysiology, etiology, and treatment
of attention-deficit hyperactivity disorder (ADHD) », Annals of Pharmacotherapy, n° 48.2,
février 2014, p. 209-25.
12. Richard Border, Emma C. Johnson, Luke M. Evans, Andrew Smolen, Noah Berley, Patrick
F. Sullivan, Matthew C. Keller, « No Support for Historical Candidate Gene or Candidate
Gene-by-Interaction Hypotheses for Major Depression Across Multiple Large Samples », Am.
J. Psychiatry, n° 176.5, mai 1999, p. 376-387.
132
Les troubles de l’attention (TDAH) comme problème social
Biopolitique du TDAH
Le pouvoir informatif de la culture dominante fait en sorte que
même les personnes directement impliquées, en particulier les
parents, deviennent des protagonistes et des participants actifs
dans le processus de médicalisation. En fait, comme le soulignent
13. Peter Conrad, Joseph W. Schneider, Deviance and Medicalization. From Badness to
Sickness, Philadelphia, Temple University Press, 1992.
14. Manuel Vallée, « Resisting American Psychiatry : French Opposition to DSM-III,
Biological Reductionism, and the Pharmaceutical Ethos », dans PJ McGann, David J. Hutson
(dir.), The Sociology of Diagnosis, Dallas, Emerald Press, 2011.
15. Allan V. Horwitz, Jerome C. Wakefield, The Loss of Sadness. How psychiatry transformed
normal sorrow into depressive disorder, Oxford, Oxford University Press, 2007.
16. Allen Frances, Saving Normal. An Insider’s Revolt against Out-of-Control Psychiatric
Diagnosis, DSM-5, Big Pharma, and the Medicalization of Ordinary Life, New York, William
Morrow, 2013.
133
Le Normal et le Pathologique à l’école aujourd’hui
17. Stephen P. Hinshaw, Richard M. Scheffler, The ADHD Explosion : Myths, Medication,
Money, and Today's Push for Performance, Oxford, Oxford University Press, 2014.
18. Sami Timimi, « A Critique to International Consensus Statement on ADHD », Clinical
Child and Family Psychology Review, n° 7.1, 2004, p. 59-63.
19. Stuart Kirk, Herb Kutchins, Making us crazy. DSM, The psychiatric bible and the creation
of mental disorders, Michigan, Free Press, 1997.
20. Rick Mayes, Adam Rafalovich, « Suffer the restless children : the evolution of ADHD and
paediatric stimulant use, 1980-90 », History of Psichiatry, n° 18.4, 2007, p. 435-457.
134
Les troubles de l’attention (TDAH) comme problème social
135
Le Normal et le Pathologique à l’école aujourd’hui
25. Uta Frith, « Dyslexia : Can We Have a Shared a Theoretical Framework ? », Educational
and Child psychology, n° 12.6, 1995, p. 6-17.
26. Linda J. Graham, « From ABCs to ADHD : the role of schooling in the construction of
behaviour disorder and production of disorderly objects », article cité.
27. Ilina Singh, « ADHD, Culture and Education », Early Child Development and Care, article
cité.
28. Erving Goffman, Asiles. Études sur la condition sociale des malades mentaux, Paris, Minuit,
1968.
136
Les troubles de l’attention (TDAH) comme problème social
137
Le Normal et le Pathologique à l’école aujourd’hui
réagir pour une libération des corps. Le risque est plutôt celui de
nouvelles ségrégations, plus subtiles et déguisées, guidées par un
contrôle social diffus et agissant par capillarité, et par un modèle
de norme invalidante, déguisé en besoin d'assistance. Il n'est pas
nécessaire d'interner un sujet pour qu’il adhère à l'imaginaire du
patient selon les diktats de la société dans laquelle il vit, il suffit qu'il y
ait un diagnostic, un discours scientifique qui informe le sujet de son
identité et donc de son destin. Le sujet porteur d’une souffrance dont
il veut à juste titre se libérer s’en remet à la procédure diagnostique-
thérapeutique à partir de la première étape importante qui
consiste à reconnaître son état dans les termes de la nosographie
communiquée par le système de santé. Si, dans une maladie
physique, en se soumettant à ces devoirs, le patient accède à son droit
d'exemption de responsabilité, pour ce qui est de la maladie mentale,
se reconnaître comme non responsable de son propre mental, signifie
que le sujet ne peut même pas s’occuper de ses propres soins. Quand
j'ai une jambe cassée, je peux « l’amener » chez le médecin et en
attendant qu’elle soit soignée, je peux faire toutes les autres choses –
sauf ce que la jambe cassée m'empêche de faire. Il n'est pas possible
de faire la même chose avec l'anxiété, la dépression, le TDAH, je ne
peux pas amener ma souffrance psychique chez le spécialiste, je m’y
rends tout entier avec ma vie passée et présente. Ceci peut paraître
un discours poussé à l'extrême, mais, jusqu'à récemment, c'est cette
aporie qui justifiait l'internement et l'organisation asilaire. En milieu
hospitalier, la manière de faire face à la folie demeure ambiguë, la
pratique psychiatrique accorde une grande importance à l'aspect
pharmacologique, dans le but de contenir les symptômes des
pathologies non encore objectivement diagnostiquées, comme cela
se fait dans les autres services du même hôpital. Mais cela suffit pour
que ces patients, lorsqu’ils sont hospitalisés, se glissent dans la peau
du malade, peut-être avec plus de honte que les autres patients, mais
toujours fermement attachés aux attributs imaginaires du malade.
Basaglia a déclaré que la folie est une condition humaine29. La folie
est présente en nous comme la raison. La société, si elle se voulait
vraiment civile, devrait accepter autant la folie que la raison, plutôt
que de déléguer à une science, la psychiatrie, le soin de traduire la
folie en maladie dans le but de l'éliminer. Plus récemment, en 2010,
lors du Congrès mondial lacanien de psychanalyse tenu à Bruxelles,
intitulé « La santé mentale existe-t-elle ? », la réponse a été : « non ».
Cela ne veut pas dire qu'il n'y a pas de souffrance, de vulnérabilité,
voire même de maladie mentale, mais seulement que la santé comme
idéal de normalisation n’existe pas.
29. Franco Basaglia, Che cos’é la Psichiatria ?, Milano, Baldini Castoldi, 1967.
138
Les troubles de l’attention (TDAH) comme problème social
Normalisation et neuro-diversité
La perspective neuroscientifique a généré une vision forte de
l'homme, une vision qui se veut absolue et universelle, précisément
parce que scientifique30. En se fondant sur le principe de neutralité
de la science considérée comme un moyen par lequel il est possible
d'arriver à une connaissance « vraie » du monde, elle utilise des
méthodologies dérivées des sciences naturelles pour identifier
des schémas de phénomènes psychologiques qui ne sont pas
directement accessibles à la pure et simple observation. Ses outils
privilégiés sont le test psychologique et les méthodologies de vision
directe de l'activité cérébrale telles que les résonances magnétiques
fonctionnelles (IRMf). Ces méthodologies permettent d'observer,
de mesurer puis de définir la physiologie de la pensée humaine, par
exemple en mesurant la présence de compétences spécifiques chez
les individus chez qui un score faible dénote des déficits/déficiences
et par conséquent la présence de dysfonctionnements de ces
compétences. Il a ainsi été démontré que les sujets diagnostiqués
avec un TDAH ont des déficits des fonctions exécutives et constituent
pour cette raison un état pathologique31. Mais il apparaît évident
qu'en amont de ces définitions prévaut une conception implicite
et normative de l'homme comme hyper-rationnel, autonome/
autosuffisant et capable d’autoréalisation de soi : cela ressemble plus
à un Égo comme État totalitaire32 qu'à une description fidèle de nous-
mêmes et des autres. La mission plus générale que s’attribuent les
neurosciences consiste à ramener les phénomènes psychologiques à
des facteurs purement neurobiologiques. Elles voudraient ébranler le
pouvoir explicatif de la sociologie, de la psychologie et des théories
psychodynamiques concernant le comportement humain. En effet,
les neurosciences se caractérisent par une forte ambition explicative
puisque, ne se limitant pas à étudier des phénomènes physiologiques
simples – telles que l'attention ou la mémoire – et des compétences
strictement cognitives : elles étendent également leur domaine à des
phénomènes complexes tels que la personnalité, la cognition allant
jusqu'à la définition de phénomènes sociaux telles que la timidité, la
solidarité ou l'empathie.
30. Nikolas Rose, Joelle M. Abi-Rached, Neuro. The New Brain Sciences and the Management
of the Mind, Princeton, Princeton University Press, 2013.
31. Belinda Gargaro, Tamara May, Bruce Tonge, Dianne Sheppard, John Bradshaw, Nicole
Rinehart, « Attentional Mechanisms in Autism, ADHD, and Autism-ADHD Using a Local-
Global Paradigm », Journal of attention disorders, vol. 22.14, 2018, p. 1320-1332.
32. Dan Goodley, « “Learning Difficulties”, the Social Model of Disability and Impairment :
challenging epistemologies », Disability & Society, n° 16.2, 2001, p. 207-231.
139
Le Normal et le Pathologique à l’école aujourd’hui
33. Alain Ehrenberg, « The Social Brain : An Epistemological Chimera and a Sociological
Fact », dans Ortega F., Vidal F. (dir.), Neurocultures, Glimpses into as Expanding Universe, New
York, Peter Lang, 2010.
34. Antonio R. Damasio, L’Erreur de Descartes, Paris, Odile Jacob, 2010.
35. Giacomo Rizzolatti, Nella mente degli altri. Neuroni specchio e comportamento sociale,
Bologna, Zanichelli, 2007.
36. Massimo Blanco, Fondamenti di neurosociologia, Padova, Primiceri, 2016.
37. Bruce Cuthbert, « The RDoC Framework : Facilitating Transition From ICD/DSM to
Dimensional Approaches That Ingrate Neuroscience and Psychopatology », World Psichiatry,
n° 13.1, 2014, p. 28-35.
Mario Maj, « Keeping an open Attitude Towards the RDoC Project », World Psichiatry,
n° 13.1, 2014, p. 1-3.
38. Mitchell Wilson, « DSM-III and the Transformation of American Psychiatry », American
Journal of Psychiatry, n° 159, 1993, p. 399-410. Rick Mayes, Allan V. Horwitz, « DSM-III and
the Revolution in the Classification of mental Illness », Journal of History of the Behavioural
Sciences, n° 4.3, 2005, p. 249-267.
39. Josef Parnas, « RDoC Program : A Psychiatry without Psiche », World Psychiatry, n° 13.1,
2014, p. 46-47.
140
Les troubles de l’attention (TDAH) comme problème social
40. Darin Weinberg, Darin, On Others Inside, Philadelphia, Temple University Press, 2005.
41. Paul Rabinow, « Artificiality and enlightenment : from sociobiology to biosociality »,
dans Rabinow, Paul, Essays on the Anthropology of Reason, Princeton, Princeton University
Press, 1996. Joseph Dumit, « When Explanations Rest : “Good-enough” Brain Science and The
New Sociomedical Disorders », dans Lock M., Young S., Cambrosio A. (dir.), Cyborg & Citadels :
Anthropological Interventions in Emerging Sciences and Technologies, Santa Fe, School of
American Research Press, 2000.
141
Le Normal et le Pathologique à l’école aujourd’hui
42. Joseph Dumit, « When Explanations Rest : “Good-enough” Brain Science and The New
Sociomedical Disorders », Ibid.
43. Enrico Caniglia, Neurodiversità. Per una sociologia dell’autismo, dell’ADHD e dei disturbi
dell’apprendimento, op. cit.
44. Harvey Blume, « Neurodiversity », The Atlantic, septembre 1998, p. 30.
45. Judy Singer, « Why Can’t You Be Normal for Once in Your Life », dans Corker et French
(dir.), Disability Discourse, London, Open University Press, 1999.
46. Thomas Armstrong, Neurodiversity : Discovering the Extraordinary Gifts of Autism, ADHD,
Dyslexia, and Other Brain Differences, New York, Perseus Books Group, 2010.
142
Les troubles de l’attention (TDAH) comme problème social
47. Oliver Mike, « A New Model of the Social Work Role in Relation to disability » dans
J. Campling (dir.), The handicapped Person : A New Perspective for Social Workers, Londres,
RADAR, 1981.
48. Tom Shakespeare, « The Social Model of Disability », dans Davis L. (dir.), The Disability
Studies Reader, London, Routledge, 2006, p. 199.
49. Mike Oliver, « Capitalismo, disabilità e ideologia : una critica materialista del principio di
normalizzazione », dans Medeghini R. (dir.), Norma e Normalità nei Disability Studies, Trento,
Erickson, 2016.
50. Oliver, Mike, « Capitalismo, disabilità e ideologia : una critica materialista del principio
di normalizzazione“, Art. cit.
51. Sally French, John Swain, « Whose Tragedy ? Towards a personal non- tragedy view of
disability », dans Swain J., French S., Barnes and Thomas (dir.), Disabling Barriers. Enabling
Environments, London, Sage, 2004.
143
Le Normal et le Pathologique à l’école aujourd’hui
52. Tom Shakespeare, Nicholas Watson, « The Social Model of Disability : An Outdated
Ideologye », dans Barnartt S., Altman B. (dir.), Exploring Theories and Expanding Methodologies,
Amsterdam, JAL, 2002.
53. Tom Shakespeare, « The Social Model of Disability », Art. cit., p. 201.
54. Judith Butler, Trouble dans le genre. Le féminisme et la subversion de l'identité, Paris, La
Découverte, 2005.
55. Shelley Tremain, « Biopower, Styles of Reasoning and What’s Still Missing from the Stem
Cell Debates », Hypatia, n° 25.3, 2010, p. 579-609.
56. Humberto R. Maturana, Francisco J. Varela, Autopoiesis and Cognition. The Realization of
the Living, Dordrecht, Reidel, 1980.
144
Les troubles de l’attention (TDAH) comme problème social
57. Shelley Tremain, « On the Government of Disability. Foucault, Power and Subject of
Impairment », dans Davis L. (dir.), The Disability Studies Reader, London, Routledge, 2006,
p. 186.
58. Elizabeth Grosz, Volatile Bodies : Toward a Corporeal Feminism, Bloomington, Indiana
University Press, 1994.
145
Le Normal et le Pathologique à l’école aujourd’hui
146
Les troubles de l’attention (TDAH) comme problème social
62. Zigmunt Bauman, Homo consumens. Lo sciame inquieto dei consumatori e la miseria degli
esclusi, Trento, Erickson, 2007.
63. Max Weber, L'Éthique protestante et l'esprit du capitalisme [1905], Paris, Gallimard, 2004.
147
Le Normal et le Pathologique à l’école aujourd’hui
64. Massimo Recalcati, L’uomo senza inconscio, Raffaello, Milano, Cortina Editore, 2010.
65. Béatrice Han, Foucault's Critical Project, Stanford, Stanford University Press, 2002.
148
Les troubles de l’attention (TDAH) comme problème social
149
Le Normal et le Pathologique à l’école aujourd’hui
150
Les troubles de l’attention (TDAH) comme problème social
151
Le Normal et le Pathologique à l’école aujourd’hui
Conclusions
Un enfant naît dans l'esprit de ses parents, lorsque la mère et le père
commencent à penser à lui, à imaginer son visage, à choisir le nom
propre qui le désignera pour toujours, à préparer sa chambre. Puis
l'enfant vient au monde avec son corps réel qui est progressivement
pris de plus en plus sous l'emprise de l'Autre qui, à travers des pratiques
éducatives, l'humanise pour lui permettre d'entrer dans le circuit des
échanges sociaux. L'avantage du sujet pour la socialisation du corps
est d'apprendre à le gouverner, à gérer sa jouissance supplémentaire
qui se produit lorsque le langage écrase le programme instinctif.
Par l'Autre, l'enfant développera progressivement ses propres
structures pour canaliser cet extra, à travers lesquelles désirer à sa
manière irréductible et particulière. Extimité : l'intérieur et l'extérieur
coïncident ou, du moins, sont en continuité comme dans la bande de
Moebius, telle que reprise par Lacan dans sa topologie. Pour cette
raison, il n'est pas difficile de comprendre que – quelle qu'en soit
l'étiologie – un trouble mental se manifestera à partir de cet Autre
dont il portera inévitablement les signes, dont il sera l'interprète.
Les enfants hyperactifs sont les martyrs de l'esprit de notre époque,
agités par trop de jouissance, résultat de trop peu de castration.
Autant ces enfants sont insupportables dans les salles de classe de
nos écoles, autant ils sont le signe de combien d’insupportable il y
a chez l'enfant lui-même pour le discours éducatif contemporain,
qui évacue aussitôt – et donc élude – la question par habilitation
pharmaco-comportementale – protocoles de rééducation. Il nous
semble ainsi que le mot TDAH plus que le diagnostic d'un trouble
mental nomme l'impasse de l'adulte qui se tourne vers le discours
biomédical qui, à partir de la norme, identifie l'écart et les techniques
de normalisation correspondantes. L'Autre-éducateur cherche la
garantie de son acte éducatif dans des procédures de type scientifique,
mais cela correspond souvent à un manque de responsabilité et à un
manque d'acceptation de la subjectivité.
Il y a d’une part les rôles sociaux de « père » et de « mère »
et, d’autre part, les rôles symboliques. Les brouillages symboliques
s’appuient sur la tendance à l’indifférenciation des parents, dans
la société contemporaine italienne. Ce sont les enfants qui, sans
les frontières de la loi paternelle (à la fois du père réel et de la
symbolique sociale), absorbés dans le magma maternel, secouent le
corps et le monde pour tenter de se libérer de l'excès de jouissance
qui les habite ainsi – mais ce faisant, ils plongent la famille dans
une impasse encore plus profonde et dans la même frénésie. Une
jouissance que les thérapeutes, les éducateurs et les parents doivent
progressivement endiguer et canaliser. Freud a soutenu qu'il y avait
152
Les troubles de l’attention (TDAH) comme problème social
69. Jacques Lacan, Le Séminaire. Livre XI. Les quatre concepts fondamentaux de la psychanalyse,
Paris, Seuil, [1964] 1973.
153
Le Normal et le Pathologique à l’école aujourd’hui
154
Jean-Marie Weber
156
L’hypermodernité et ses défis éthiques pour les enseignants
Le défi éthique
« L’histoire de la libération est derrière nous ; l’histoire de la liberté
commence », affirme Marcel Gauchet8. Que ce soit dû à nos visées,
nos choix, les discours et expérimentations transhumanistes, le
vécu traumatique d’un élève, le sort des migrants en Grèce ou les
confrontations actuelles avec le réel sous forme d’un Coronavirus, les
questionnements éthique et moral fait partie de nous en tant que
« parlêtre » : Quel est notre devoir ?
Déjà Aristote affirmait dans son Éthique à Nicomaque « qu’un
citoyen doit être capable d’exercer le pouvoir (arkhein, infinitif actif)
et en même temps d’être gouverné (arkhestai, infinitif passif). Nous
sommes donc toujours fondamentalement divisés entre l’autonomie,
5. Marcel Gauchet, L'Avènement de la démocratie IV. Le nouveau monde, op. cit., p. 742.
6. Jean-Pierre Lebrun, Les Risques d’une éducation sans peine, Bruxelles, Yapaka, Faber, 2016.
7. Michèle Lapeyre, « L'école inclusive : Le grand écart entre ambitions humanistes et
réalisations ? », Empan, n° 1, 2020, p. 44.
8. Marcel Gauchet, L'Avènement de la démocratie IV. Le nouveau monde, op. cit., p. 742.
157
Le Normal et le Pathologique à l’école aujourd’hui
9. Jean-Pierre Lebrun, Les Risques d’une éducation sans peine, op. cit., p. 6.
10. Marie-Jean Sauret, L'Effet révolutionnaire du symptôme, Toulouse, Érès, 2008.
11. Paul Ricoœur, « Avant la loi morale : l'éthique », Encyclopédie Universalis, Paris, 1985,
p. 42-45.
12. Jacques Lacan, Autres écrits, Paris, Seuil, 2001, p. 381.
158
L’hypermodernité et ses défis éthiques pour les enseignants
peut saisir son implication subjective dans le lien qui se noue ou non
avec l’élève.
En tenant compte du savoir non su, du manque et du
désir de savoir ou de grandir, des résistances et symptômes des
élèves, l’enseignant peut faire lien. Avec Jean-Pierre Lebrun13, nous
parlons aussi de « présence réelle », parce que l’enseignant n’est
plus tellement soutenu par l’imaginaire d’un ordre hiérarchique
et patriarcal. L’engagement de l’enseignant en tant que sujet est
nécessaire. Il favorise des rencontres, des échanges à travers lesquels
les protagonistes ne trouvent pas nécessairement, selon Lebrun, la
réponse adéquate ou l’intervention efficace qui devrait s’ensuivre.
Mais c’est ainsi que le jeune s’ose, prend le risque et prend le goût
d’apprendre et de se subjectiver. C’est un risque, parce que cette
rencontre met le sujet aussi bien en contact avec une part occultée,
mais reconnaissable, parfois aussi avec une altérité dérangeante. La
frustration ou l’angoisse qui peut en résulter peut mettre le jeune
mal à l’aise, et le faire régresser en vue de se protéger.
Voilà pourquoi importe la posture éthique de l’enseignant
pour que ces effets des transferts entre enseignants et élèves soient
travaillés. C’est ce que nous allons aborder à travers une vignette
clinique.
13. Jean-Pierre Lebrun, Alain Eraly, Réinventer l'autorité, Toulouse, Erès, 2021, p. 92.
14. Sigmund Freud, Das Unheimliche. GW, Bd. XII, Frankurt am Main, Fischer Taschenbuch-
Verlag, 1999.
159
Le Normal et le Pathologique à l’école aujourd’hui
L’éthique du réel
C’est Emmanuel Kant qui a pensé cet aspect de l’être humain. Il nous
invite à ne plus nous soumettre à n’importe quelle idée du Bien ou
du Mal, de nous laisser guider par l’imaginaire des discours externes,
mais de nous considérer responsables de nos actes. Nous considérer
15. Claude Allione, La Part du rêve dans les institutions. Régulations, supervision, analyse des
pratiques, Paris, Les Belles Lettres, 2010, p. 67-94.
16. Roland Gori, Marie-José Del Volgo, Exilés de l'intime. La médecine et la psychiatrie au
service du nouvel ordre économique, Paris, Denoël, 2008.
160
L’hypermodernité et ses défis éthiques pour les enseignants
17. Alenka Zupancic, Das Reale einer Illusion, Frankurt am Main, Suhrkamp, 2001, p. 31.
18. Jacques Lacan, Le Séminaire, Livre VII, L'éthique de la psychanalyse, Paris, Seuil, 1986,
p. 21.
19. Denis Vasse, La Vie et les Vivants. Conversation avec Françoise Muckensturm, Paris, Seuil,
2001, p. 217.
20. Jacques Lacan, Autres écrits, op. cit., p. 343.
21. Jean-Paul Resweber, Le Questionnement éthique, Paris, Cariscript, 1990, p. 128.
161
Le Normal et le Pathologique à l’école aujourd’hui
L’éthique de la rencontre
L’enseignant est quelqu’un qui se » laisse affecter, altérer par ce qui
parle dans la vie : le vivant25 ». C’est un acte de s’ouvrir à un au-delà
du voir ou des sentiments, donc de l’imaginaire. Il nous ouvre à
l’Autre comme énigme et en même temps il éveille notre désir26.
Revenant à notre vignette clinique. Les enseignants peuvent
être tentés de résoudre les conflits par des contraintes. Ils font alors
vite l’expérience d’un rejet fort de la part des élèves. Il incombe donc
aux enseignants d’élaborer avec la classe des règles et des rituels pour
pouvoir vivre avec une certaine sérénité en collectivité, sans exclure
quelqu’un. Ceci n’est guère possible sans une certaine perte de la
liberté de chacun. Voilà pourquoi un échange continu entre élèves et
régent de classe ou l’ensemble des enseignants doit être installé. Ceci
permet à ce que la « Pédagogie Institutionnelle » a pensé comme le
« Quoi de neuf ». Ce n’est pas la loi du plus fort ou de la masse qui y
règne, mais celle du symbolique. C’est la loi symbolique, le droit à la
parole et à l’écoute de tous qui aide les élèves à mettre leurs craintes
et maux en parole, à faire des distinctions, à dénouer des fusions et
des confusions. L’écoute réciproque et l’attention à la polysémie des
signifiants peut avoir des effets de libération. C’est un travail continu,
de longue haleine. Mais un tel échange peut ouvrir au désir27 si
l’enseignant ne cède pas sur son désir de laisser dire ses élèves. Dans
tel cas l’échange peut faire événement : les élèves font l’expérience
bénéfique du « dire ». La joie qui s’installe fait signe de l’effet.
Pour l’enseignant, il importe donc de se poser la question de
son propre rapport à la vie, au savoir et à la vérité qui ne parle que
162
L’hypermodernité et ses défis éthiques pour les enseignants
28. Paul Ricœur, « Avant la loi morale : l'éthique », Art. cit., p. 43.
29. Jean Oury, Il, donc, Vigneux, Matrice, 1998, p. 191.
30. Ilaria Pirone, Jean-Marie Weber, « Comment être juste dans l'acte éducatif ? Une
question pour le sujet au-delà d'une compétence professionnelle de l'enseignant », Spirale.
Revue de recherches en Éducation, n° 61, 2018, p. 53-68.
31. Michèle Lapeyre, « L'école inclusive : Le grand écart entre ambitions humanistes et
réalisations ? », Art. cit., p. 43.
163
Le Normal et le Pathologique à l’école aujourd’hui
Former à l’ouverture
À partir de toutes ces réflexions, il incombe donc à l’enseignant
de soutenir le jeune à s’ouvrir à l’Autre, au « Nebenmensch », au
langage, à différents discours, aux sciences aussi, ainsi qu’à sa propre
altérité. C’est une aventure, un défi qui peut faire vivre le jeune des
événements angoissant. À l’enseignant de l’accompagner, de lui offrir
un certain cadre, une certaine sécurité à l’instar de l’analyste ou de
« la mère suffisamment bonne » comme Winnicott l’a formulé33.
Les enseignants sont continuellement interpellés par le
rapport à la jouissance des jeunes. Un enseignant nous parle du
manque d’hygiène de vie, de consommation de drogues, d’alcool. Il
évoque leur « train de vie », leur manque de sommeil. Et c’est ainsi
qu’ils craquent. L’école est mise au défi aussi par l’indiscipline, le
manque de civilité, la violence des jeunes, donc par le réel. Un des
enseignants évoque le cas d’élèves qui ont de très bonnes notes,
des « notes bombastiques », mais ils sont d’une agressivité extrême.
L’école est quelquefois dépassée. Il est question d’impuissance et
d’impossible. Comment les faire sortir de leurs impasses, de leur
enfermement fantasmatique ?
Il s’agit de relancer la dynamique du désir. Il faut que les
jeunes puissent faire l’expérience que vivre demande toujours une
perte de jouissance. Mais la fonction formative comme la fonction
paternelle ne s’exprime pas simplement par un « non », mais aussi
par un « oui », c’est-à-dire un mot comme « c’est formidable ce que
tu vas là !34 ».
Le père lacanien est donc un père qui sait fermer les yeux au
moment où il faut, là où il faut, de la bonne façon. C’est aussi un père
qui sait faire des exceptions. Un père qui sait quelque part que la loi
n’est pas la règle, mais qu’elle est l’huile dans les rouages du désir.
Une loi qui rend possible la mobilisation du désir. Ce à quoi le père
32. Claude Allione, La Part du rêve dans les institutions. Régulations, supervision, analyse des
pratiques, op. cit., p. 88.
33. Donald Winnicott, « La préoccupation maternelle primaire », dans Winnicott, Donald,
De la pédiatrie à la psychanalyse, Paris, Payot, 1969, p. 168-174.
34. Alexandre Stevens, Désarroi et inventions dans la psychose. Le pont freudien : http://
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1er juillet 2019.
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L’hypermodernité et ses défis éthiques pour les enseignants
dit oui, c’est au désir. Le père lacanien est un père qui ouvre la voie
du désir. Il humanise la loi en rendant le désir possible35.
165
Le Normal et le Pathologique à l’école aujourd’hui
39. Dorothee Kimmich, Charlie Chaplin, Eine Ikone der Moderne, Frankfurt am Main,
Suhrkamp, 2003.
40. Siegfried Kracauer, « Charlie Chaplin », dans Kimmich, D. Charlie Chaplin, Eine Ikone der
Moderne, Frankfurt am Main, Suhrkamp, 2003, p. 130.
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Le Normal et le Pathologique à l’école aujourd’hui
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Bibliographie
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Les auteur.rices
Doris Bühler-Niederberger
Professeure émérite en sociologie et éducation, Bergische Universität
Wuppertal.
Marina D’Amato
Professeure en sociologie, éducation et communication, Università
Roma 3.
Laurence Gavarini
Professeure émérite en sciences de l’éducation et études de genre,
CIRCEFT, Université Paris 8 Vincennes Saint-Denis.
Edmondo Grassi
Chercheur associé en sociologie, département des Sciences de
l’éducation, Università Roma 3.
Mej Hilbold
Maîtresse de conférences en sciences de l’éducation et études de
genre, CIRCEFT, Université Paris 8 Vincennes Saint-Denis.
Leandro de Lajonquière
Professeur en sciences de l’éducation, CIRCEFT, Université Paris 8
Vincennes Saint-Denis.
Pierre Macherey
Professeur émérite en philosophie, Université Lille 3.
Dominique Ottavi
Professeure émérite en sciences de l’éducation, CREF, Université
Paris-Nanterre.
Ilaria Pirone
Maîtresse de conférences en sciences de l’éducation, CIRCEFT,
Université Paris 8 Vincennes Saint-Denis.
Le Normal et le Pathologique à l’école aujourd’hui
Giuseppe Rociola
Enseignant et clinicien, département des Neurosciences, Faculté de
médecine et de chirurgie, Università Roma 2.
Claudia Schuchart
Professeure en sociologie et éducation, Bergische Universität
Wuppertal.
Jean-Marie Weber
Maître de conférence en sciences de l’éducation et en sciences
sociales, Faculté des Sciences Humaines, Université du Luxembourg.
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Suivi d’édition Zoulikha Bendahmane
Maquette intérieure, mise en page et suivi de fabrication Valérie Guillou
Maquette de couverture Sandrine Javelle
Distribution DILISCO
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