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INTRODUCTION 9
Diversité des SOUrCES de COULEUSS.............2:.:ssseseesnenesnrsersereseseenterees 10
Pigments et colorants : deux notions a préciser............ chen as20
Qulest=ce qlieila COULSUr 2 eras aye me reat nee ce Mere meters rons Pal
Matériel et produits nécessaires pour produire ses encres............. 24
LE NOIR 27
Les encres noires : l'encre de Chine et l/encre européenne ............ 30
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Les galles de chéne, entre régne végétal et animal......................... 40
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PIGMENTS ET COLORANTS:
DEUX NOTIONS A PRECISER................... 20
L'IMPORTANCE DU PAPIER
SOURGES D'INFORMATION farceeee 154
DANS LE TRAVAIL
AVEC LES ENCRES VEGETALEG.................. 155
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Les conservateurs CONSEILLES ..............ecceeeeeeeeeeeeeeeees 146
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aire de l’encre avec des plantes, c’est conjuguer l’amour des plantes avec _ Ludovic de Valon, 2011.
celui du dessin ou de l’écriture, allier le plaisir de la cueillette et celui de Indigo (Indigofera), tanin
> . : Oe pew (noix de galle), Sophora
Pexpression, combiner la curiosité envers les colorants naturels et gale
japonica, garance (Rubia
des réactions chimiques parfois inattendues. oe ee SIeM estiane,
40 x 30 cm.
Cet ouvrage explore quelques possibilités de fabrication d’encres a partir
de végéraux de nos contrées, plantes trés communes de nos haies ou de
nos prairies. Au gré des chapitres, les espéces végétales sont présentées au
lecteur afin de lui permettre de mieux les connaitre et les apprécier. Pour
chaque famille, des recettes sont proposées. Certaines recettes permettent
un voyage dans l’histoire trés ancienne de la fabrication des encres: ce sont
des recettes médiévales, ou des recettes provenant de important corpus des
traités du xix siécle. D’autres recettes sont proposées au lecteur, inspirées
par les recettes anciennes mais reformulées aprés le passage par atelier, et
ses expérimentations parfois hasardeuses et toujours étonnantes. Les encres
obtenues, fluides, plus ou moins denses, noires ou colorées, sont essayées
4 la plume ou au calame, ou bien au pinceau comme des aquarelles. Les
premiéres encres propos¢es dans l’ouvrage sont des liquides extrémement
foncés, donc proches du noir profond, avec éventuellement des nuances de
brun, de bleu ou de violet. Ces encres peuvent étre utilisées pour écrire ou
calligraphier. Certaines plantes permettent d’autres couleurs que ces noirs,
ce sont des couleurs transparentes ou couvrantes, en fonction de la fagon
dont elles sont préparées. Elles sont merveilleuses pour peindre ou dessiner.
Lhistoire des couleurs nous apprend que nous avons su tres tot comment
les produire avec ce qui se présente dans la nature, que cela soit avec des
substances minérales comme les ocres, ou avec des racines ou des feuilles, et
parfois méme avec certaines matiéres animales. Les peintures rupestres du
Néolithique nous montrent des tableaux d’une richesse inouie. Les récentes
possibilités d’analyse révélent un usage tres ancien de la garance et du pastel,
mises
qui pourtant ne délivrent leurs couleurs rouges ou bleues que par des
en ceuvre que l’on aurait pu croire inaccessib les a ces premiers humains.
couleurs issues
Aujourd’hui, rares sont les peintres qui préferent utiliser des
de Ludovi c de Valon ont toutes les couleurs de la
des plantes. Les peintures
es et fabrique ses
nature. Ce peintre, né en 1967, utilise des gouaches naturell
les sont subtiles
couleurs avec des racines, des écorces, des feuilles. Ses aquarel
et profondes, elles sont aussi mystér ieuses et poétiq ues.
DIVERSITE
DES SOURCES DE GO URERins
Les matériaux naturels étaient 4 peu de chose prés les seuls dont nous dis-
posions jusqu’au XIX siécle. La nature est riche de couleurs, que les hommes
ont su trés tot exploiter. Pour peindre ou calligraphier, les couleurs naturelles
proviennent fréquemment du monde minéral, ou bien d’organismes vivants,
4 savoir de trés nombreuses plantes et de quelques animaux. Avant d’explorer
les matiéres issues du monde végétal, évoquons rapidement quelques-unes
des roches de couleur, dont chaque nom a un tel pouvoir évocateur.
10
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Orpiment
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Lapis-lazuli Vert-de-gris
LAPIS-LAZULI - BLEU
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Le lapis-lazuli est une pierre ornementale bleue dont le principal gisement
ement la
trouve en Afghanistan. Il est composé de divers minéraux, principal
t
lazurite qui contient des silicates de calcium et de sodium. II fut amplemen
La
utilisé par les civilisations sumériennes pour fabriquer différents objets.
pierre broyée en poudre fine permet d’obtenir un pigment bleu outremer
intense.
VERT-DE-GRIS - BLEU-VERT
ou par des
Le vert-de-gris est le résultat de Poxydation du cuivre par l’air
e ou acétate
acides, c’est ce que l’on appelle un sel de cuivre: sulfate, chlorur
un vert-de-gris.
de cuivre. La patine verdatre des sculptures en bronze est
acetique, principal
LVacétate de cuivre est issu de I’action corrosive de l’acide
cuivre. Ce pigment a
composant du vinaigre aprés l’eau, sur des plaques de
mais il a l’inconvé-
été utilisé pour réaliser les enluminures du Moyen-Age,
nient, outre sa toxicité, d’attaquer le papier.
Tous ces pigments sont conservés en poudre, pour étre ensuite mélangés a
des liants. Ils ont été largement utilisés pour réaliser les enluminures médié-
vales, ou les fresques, malgré leur toxicité pour certains d’entre eux, ou les
problémes d’altération a la lumiére.
OCRES
Citons enfin les ocres qui eux ne sont pas toxiques, donnant des rouges et
des jaunes d’une grande variété, grace a la présence de fer oxydé, et que l’on
retrouve abondamment dans les enduits de murs a la chaux.
LES PIGMENTS D'ORIGINE ANIMALE
Les couleurs obtenues a partir d’animaux sont peu nombreuses. La célébre
pourpre de l’Antiquité est issue d’un coquillage méditerranéen, le murex,
dont certaines espéces ont disparu a cause de leur exploitation intensive.
Quant au rouge tiré de la cochenille récoltée sur les agaves mexicains, c'est
lune des plus belles couleurs que l’on puisse produire. Citons également
lencre de seiche, appelée aussi sépia. C’est un liquide sécrété dans la poche
de certains céphalopodes qu ils expulsent quand ils se sentent en danger.
LES TANINS
LES FLAVONOIDES
LES ANTHOCYANES
14
LES ANTHOCYANES POUR OBTENIR
DES BLEUS ET DES ROUGES
Les anthocyanes forment un sous-groupe particulier dans la famille des fla-
vonoides. Ce sont des molécules qui associent un groupement d’atomes ap-
pelé anthocyanidine, et un autre groupement de type sucre. Ces molécules
sont extreémement répandues dans le monde végétal : elles donnent leur
couleur automnale aux feuilles des arbres. Les peaux des fruits noirs sont par-
ticuliérement riches en anthocyanes: le raisin noir, le phytolaque ou raisin
d’Amérique, le nerprun et la bourdaine, le troéne, le sureau yeble, le cassis.
Les fleurs des roses trémiéres trés foncées ou des pélargoniums sont riches
en anthocyanes. Malheureusement, les anthocyanes sont des molécules peu
stables dans le temps et sensibles a la lumiére, ce qui rend leur utilisation ma-
laisée en tant que colorants. De plus, elles changent de couleur en fonction
du pH: en milieu acide, les anthocyanes sont rouges, et elles virent vers le
bleu-gris quand elles se trouvent en milieu basique. Leur utilisation est dé-
conseillée pour des matériaux qui doivent étre savonnés, mais ces colorants
sont plus communément utilisés pour la cuisine ou la cosmétique.
LES QUINONES
Les quinones sont aussi des molécules aromatiques, 4 savoir qu elles pos-
sédent 1, 2 ou 3 noyaux benzéniques avec des électrons délocalisés. Elles
possédent deux fonctions cétone, cétone signifiant qu'un atome d’oxygéne
est lié 4 un carbone par une double liaison.
La famille des quinones:
- avec un seul noyau est appelée benzoquinone, famille peu représentée dans
le monde végétal
- avec 2 noyaux est appelée naphtoquinone
- avec 3 noyaux est appelée anthraquinone.
Les composés de base sont incolores, mais certains atomes ajoutés a ces
structures de base conférent de la couleur a la molécule.
Le rouge de bétanine
La molécule de bétanine est formée de l'association d’un sucre et d’un com-
posé appelé bétanidine. Crest le colorant principal de la betterave et du fi-
guier de Barbarie. Elle se dégrade rapidement, que cela soit en présence de
lumiére, d’oxygéne, ou de chaleur. Le jus de betterave crue centrifugée est
pourtant intéressant pour des activités avec des enfants car il permet d’ex-
pliquer de fagon ludique la notion de pH. En effet la bétanine change de
couleur en fonction du pH: de rouge en milieu acide elle devient bleue en
milieu basique. II est possible d’obtenir une gamme étendue de variantes
entre le rouge et le bleu en mélangeant le jus de betterave avec du citron,
du vinaigre, du savon, du bicarbonate de soude et toute substance pouvant
modifier le pH.
Le bleu de indigo
Le pigment bleu végétal est principalement l’indigo. En Europe, seul le pastel
(Isatis tinctoria) est une source indigo. Ailleurs, d’autres plantes fournissent
cet indigo, comme l’indigotier ou indigo des Indes (Indigofera tinctoria).
Toutes ces plantes font curieusement partie de familles botaniques distinctes,
réparties sur plusieurs continents.
16
Le vert de la chlorophylle
La chlorophylle est bien un pigment, du point de vue de la physiologie
végétale. C’est elle qui donne la couleur verte aux plantes, mais seulement
si elle est exposée a la lumiére. Nous savons bien qu'une plante gardée dans
un endroit sombre devient blanche, car sans lumiére, la chlorophylle dis-
parait. Ce pigment est si fragile qu’il ne peut pas étre utilisé pour donner
une couleur pérenne a une encre ou 4 un tissu, bien que cette couleur verte
soit si présente dans la nature. Toutefois, si le jus de la plante est appliqué
rapidement aprés son extraction sur une feuille de papier, la couleur verte se
maintient assez solidement.
La molécule de chlorophylle est au coeur du monde vivant puisqu’elle seule
est capable de transformer lénergie solaire en énergie chimique, sous forme
de sucre, indispensable pour tout le métabolisme de la plante. Le monde
animal en dépend aussi indirectement puisquil est incapable de bénéficier
de l’énergie lumineuse, et qu'il doit consommer les plantes pour se nourrir
en énergie.
LANILINE
Le xix‘ siécle est la grande période de découverte des molécules colorantes,
essentiellement en Allemagne. Dés lors, s ouvre une industrie florissante qui NH,
permet de produire une infinie variété de colorants synthétiques. Cette in-
dustrie est basée essentiellement sur la découverte d’une petite molécule trés
simple, l’aniline, fabriquée a partir d’un noyau benzénique, le benzéne a six
carbones, auquel est ajoutée une fonction amine NH. Formule delaniline.
La formule complete est donc Ca NEL: C’est un liquide huileux incolore,
trés toxique, avec une odeur trés désagréable. Cette molécule a été isolée
pour la premiére fois par un chimiste allemand a partir du colorant bleu
végétal: Pindigo. Cette molécule d’indigo naturel est extraite traditionnel-
lement du pastel européen satis tinctoria, ou aussi 4 partir d’autres plantes
asiatiques ou africaines produisant également du bleu. D’ailleurs ce nom
« aniline » provient du terme indien « anil » qui désigne cette plante 4 indigo
sur le sous-continent indien. Du fait de sa conformation chimique, avec des
électrons relativement mobiles, l’aniline est trés réactive et peut etre asso-
ciée avec de nombreuses fonctions chimiques pour donner lieu 4 d'autres
WILLIAM PERKIN
Dans lhistoire des premiers colorants synthétiques, on croise aussi en 1856
un jeune chimiste anglais, William Perkin. Ce scientifique fait, presque par
hasard, une découverte qui va bouleverser les traditions multiséculaires en
matiére de colorants. Alors qu'il essaye de synthétiser de la quinine, il effec-
tue une oxydation de l’aniline et obtient un colorant mauve, soluble dans
Peau et lalcool. Ce colorant, baptisé mauvéine, suscite immédiatement un
grand intérét auprés des « soyeux » de la région lyonnaise, séduits par sa
nuance trés vive et sa simplicité d’application. Pourtant son prix avoisine
encore celui du platine. Par la suite, des chercheurs soumettent I’aniline et
la mauvéine a l’action des réactifs les plus divers. Ils obtiennent par exemple
la fuchsine puis des centaines d’autres colorants. Ce qui nous parait invrai-
semblable aujourd’hui, cest qu’ |’époque, on travaillait sans connaitre la
formule chimique des produits.
18
pra,
PIGMENTS ET COLORANTS:
DEUX NOTIONS A PRECISER
Dans le domaine des encres, le pigment est une substance insoluble dans
Peau, c’est une poudre qui reste en suspension dans le liquide, ou qui se
dépose au fond du récipient. Au contraire, un colorant est soluble. Dans
la plante, il se trouve d’ailleurs sous forme dissoute dans le milieu aqueux
cellulaire. Une encre ou une peinture sont destinées 4 étre déposées sur un
support, en général du papier. Leur fabrication peut étre réalisée soit avec
une substance dissoute dans |’eau, un colorant donc, soit avec une substance
en suspension dans un liquide, donc un pigment insoluble mais réparti uni-
formément dans le liquide, que ce liquide soit de l'eau ou de l’huile.
Il n’en est pas de méme dans le monde de la teinture sur tissu: la substance
destinée 4 transmettre la couleur au textile doit étre soluble dans |’eau, ce
doit donc étre un colorant, car le processus de teinture, en tout cas de
teinture naturelle, est effectué dans un bain a base d’eau. Le colorant dis-
sout dans l'eau doit pénétrer profondément a l’intérieur de la fibre, et réagir
chimiquement avec la fibre textile (laine, coton ou autre) pour y étre fixé.
Calames
et pinceaux.
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20
SweetCE QUE
LA COULEUR ?
C'est une question a laquelle on ne peut échapper lorsque I’on parle des
encres. La perception de la couleur est le résultat de trois facteurs:
- une source de lumiére, comme le soleil ou une lampe
- un objet éclairé
- un organe de perception, en particulier l’ceil, ou bien un autre instrument.
Que se passe-t-il dans la rétine au fond de notre globe oculaire quand des
photons y parviennent? Quand la lumiére est absorbée par la rétine, elle mo-
difie, par une série de réactions photochimiques, la structure des protéines
qui s’y trouvent. Cette information est transmise par le nerf optique jusqu'au
cerveau, ce qui conduit a la perception visuelle. Les cellules de la rétine,
qui tapisse le fond de notre ceil, sont donc sensibles a la lumiére: ce sont
des photorécepteurs. II existe deux catégories de cellules photoréceptrices :
les cones et les batonnets. La rétine humaine posséde trois types de cénes,
chaque type de céne étant sensible 4 une longueur d’onde particuliére, donc
4 une couleur spécifique. Linfinité des nuances colorées de notre conscience
visuelle est le résultat du mélange de ces trois couleurs. Chez d’autres ani-
maux, les récepteurs sont différents, ce qui les améne 4 avoir une perception
des couleurs distincte de la nétre.
La lumiére du soleil nous parait blanche mais un objet parait coloré quand
il absorbe une partie de la lumiére du soleil qu'il regoit, et seules certaines
longueurs d’onde non absorbées parviennent jusqu’a notre ceil. Notre rétine
ne recoit donc pas la totalité du spectre lumineux émis par la source, mais
seulement les longueurs d’onde qui n’ont pas été absorbées par l'objet. Si un
objet nous parait rouge, c’est qu’il absorbe les autres couleurs, qui sont dites
complémentaires.
AU NIVEAU MOLECULAIRE
Lobjet, comme la chaise ou la table, est fait de matiére, et cette matiére
est constituée d’un ensemble de molécules, chaque molécule étant un as-
semblage d’atomes. Chaque atome est composé d’un noyau et d’électrons
tournant autour. Chaque électron tournant autour d’un noyau posséde un
certain niveau d’énergie. Un électron a la faculté d’entrer en résonance avec
la lumiére qui lui parvient si la longueur d’onde de cette lumiére est adé-
quate, et dans ce cas il absorbe l’énergie correspondante.
Une liaison chimique entre deux atomes est une mise en commun d’élec-
trons qui leur confére une stabilité plus grande. Au sein d’une molécule or-
ganique (composée d’atomes de carbone), une alternance de liaisons simples
et de liaisons doubles forme ce que l’on appelle un chromophore, qui est
responsable de la couleur. Les électrons des doubles liaisons sont libres de
se mouvoir le long du chromophore. Ils sont délocalisés. Plus nombreuses
sont les doubles liaisons intercalées avec les simples liaisons dans la molécule,
plus la couleur de la substance est intense. La couleur fortement orangée
de la longue chaine moléculaire du &-caroténe provient de la succession de
11 doubles liaisons conjuguées. Cette molécule absorbe la lumiére verte qui
22
La lumiére blanche est
décomposée par un prisme
en plusieurs couleurs.
Dans une molécule, l’absorption des photons par les électrons d’un groupe-
ment chromophore est augmentée par certains groupements d’atomes entou-
rant le chromophore. Ces groupements sont appelés auxochromes. Ce sont
par exemple le groupement amine NH, ou le groupement hydroxyle OH.
Lauxochrome modifie la longueur d’onde et l’intensité de absorption. Les
électrons délocalisés des chromophores entrent en interaction avec les don-
neurs ou accepteurs d’électrons que sont les auxochromes.
Bars
Moulin a café électrique Plaque de cuisson Bassine en inox et petite casserole pour cuire
pour réduire en poudre
fine les galles de chéne
BS
Récipient pour filtrer Filtres fins en plastique Gros pinceau Ruban de ioiee pH
pour aider a filtrer pour mesurer le pH
24
Petit entonnoir Petites bouteilles Petits godets Chiffons
pour remplir les bouteilles pour conserver les encres
Récipient peu profond Papier aquarelle Pinceaux et brosses Calames & fabriquer
pour évaporer les laques de bonne qualité avec des bambous
27
NOMMER LES NUANGES IDE NOT:
Dans les langues européennes anciennes, il existait deux termes pour dési-
gner la couleur noire, car ces civilisations de l’Antiquité distinguaient da-
vantage la luminosité que la couleur proprement dite. En latin, le terme
ater désignait le noir mat, tandis que le terme niger était employé pour
signifier le noir brillant. Azer aurait peut-étre une origine étrusque, et le mot
« atroce » en proviendrait sans doute.
Le noir végétal recéle d’infinies nuances colorées, il est donc plus exact de
parler de couleurs sombres. Mais un brun profond n’est-il pas plus séduisant
et élégant quun noir pur et froid? C’est Pintensité de la couleur qui la rend
agréable, tant il est vrai qu'un noir peu dense semble sale. Un noir coloré,
quil ait des reflets bleutés, verdatres ou méme jaunatres, semble plus riche
qu'un noir sans nuance.
I] existe plusieurs dénominations pour les noirs, comme pour les autres cou-
leurs. Citons en deux parmi d’autres, le noir de jais, et le noir corbeau.
Le noir de jais concerne une roche sédimentaire composée de fossiles de
plantes. C’est une variété de lignite, dure et compacte, d’un aspect vitreux
et brillant. Cette pierre peut étre taillée pour orner des bijoux par exemple.
Cette couleur est donc un noir brillant 4 reflets bleu métallique. Parmi les
roches, il existe un oxyde de fer de couleur noire, que |’on trouve naturelle-
ment sur des météorites. C’est un oxyde ferreux, et non pas de l’oxyde fer-
rique, plus oxydé, que l’on obtient en faisant rouiller de la téle, évidemment
de couleur rouille.
Le noir corbeau désigne un noir bleuté: le plumage de ce Corvidé est stire-
ment le plus sombre des plumages d’oiseau. Deux corbeaux mythiques chez
les anciens Germains et Scandinaves, Huginn ou Muninn, accompagnent le
dieu Odin. Ils le renseignent sur l’état du monde en lui racontant a l’oreille
ce quils ont vu et entendu en parcourant la terre.
28
en transposant la technique traditionnelle pour une expression résolument
moderne, en réalisant de trés grands formats sur lesquels les traces de son
énorme pinceau gardent l’intensité de la calligraphie des plus grands maitres.
Le phare d'Eddystone,
Victor Hugo,1866.
Dessin a la plume
et au pinceau,
encre brune et sepia.
LE NOIR
29
les encres notres
LENCRE DE CHINE
ET LENCRE BEUROPEENNE
LE NOIR DE VIGNE
C’est un pigment noir aux reflets bleutés, qui résulte de la calcination
de
sarments de vigne récoltés au cours de la taille des vignes. II suffit de
placer,
au centre des braises d’un feu, une boite métallique fermée
contenant les
troncons de bois.
30
LE NOIR D’IVOIRE
C’est un noir de carbone provenant de la calcination d’os d’animaux. A l’ori-
gine, il était issu de la calcination d’ivoire, et ce pigment était utilisé depuis
l’Antiquité. Mais fort heureusement aujourd’hui il est obtenu par la calcina-
tion d’os d’animaux dégraissés.
Les noirs de carbone sont utilisés depuis la Préhistoire pour la création de
fresques ou pour la peinture. Les substances minérales subsistant apres la
calcination du matériau utilisé ajoutent des nuances ou des brillances au
pur noir du carbone.
Dans lEurope médiévale, il existait aussi des encres au carbone. Pour ces
encres, le pigment noir était dilué avec un liant comme la gomme issue de
certains arbres, avec du miel, du blanc d’ceuf, ou de la caséine du lait. Mais
Pencre de loin la plus utilisée en Europe, a cause de sa facilité de fabrication,
sa beauté et sa grande fiabilité, était lencre au fer, ou plus généralement
Pencre métallo-gallique.
Lencre au fer est la plus courante des encres noires. Durant des millénaires, et
jusquau xix‘ siécle, elle a été utilisée pour l’écriture mais aussi pour le dessin.
Cette encre est indélébile, d'un noir velouté. Apres les copistes médiévaux, ce
sont les dessinateurs de la Renaissance qui lutilisent couramment. Les Essais de
Montaigne par exemple sont écrits avec de l’encre au fer. De nombreux dessins
de Rembrandt sont exécutés a la plume d’oie ou de roseau et 4 l’encre au fer.
32 dey os
athe
SSeapn penASRS
TI ET TipeOEE PA
Le mélange entre une solution de sels de fer, qui contient des ions ferreux
Fe**, et une solution de tanins, qui contient des molécules d’acide gallique,
conduit a la formation de molécules de gallate de fer, sous forme d’un pré-
cipité noir.
Il est admis que l’encre de bonne qualité est 4 peine noire au moment de son
utilisation, et quelle noircit progressivement a cause de son oxydation lente
au contact de l’air. Elle peut montrer au départ des teintes bistre ou violacées.
TANINS
(dérivés de l'acide
gallique)
COOH
ENCRE
Précipité noir en suspension
dans l'eau
Fe2+
(sels de fer)
LIANT
(gomme arabique)
34
mec iremac hict
eee Nest ee BUNA NAN )) LP)
Il existe une pléthore de recettes d’encres, depuis Cette recette est issue d’un ouvrage intitulé
les traités manuscrits du Moyen-Age jusqu’a au- Recherches chimiques sur lencre, écrit par Charles-
jourd’hui, en passant par les ouvrages imprimés du Nicolas-Alexandre Haldat du Lys en 1805.
xIx* sicle. De nombreuses recettes se ressemblent, Comme tous les ouvrages anciens, il indique des
mais avec des variations dans les quantités et les unités de mesure qui nous sont maintenant diffi-
adjuvants. Au sein des documents anciens, il est ciles 4 interpréter. Une once est une unité de me-
fréquent de lire des recettes confuses ou erro- sure qui avait cours jusqu’a !’adoption du systéme
nées. Les secrets d’atelier sont souvent emprunts métrique en France ala Révolution francaise. En
de mystére comme si les techniques devaient étre 1805, toutes les publications ne comportaient pas
réservées aux seuls initiés. Sans nul doute, le sa- -encore ces nouvelles unités qui nous sont mainte-
voir-faire des artisans était traditionnellement nant familiéres. Une once correspond A un poids
transmis oralement de maitre a éléve, et n’était pas d environ 30 grammes.
forcément connus des copistes.
Sachant que:
1 once = 30g
Recette de Haldat du lys (1805) 1 gros = 1/8 once = 3,8 g
1 grain = 53 mg
pp. 40 et 41:
« - noix de galle............. Ponce O gros Les proportions de la recette deviennent:
- sulfate de fer ............... O once........ 5 gros 30 g de noix de galle réduites en poudre
- bois de campéche.......... Yo once....... 0 gros 19 g de sulfate de fer
EIU OMIUGE mine ee NUS) O once ir. 5 gros 19 g de gomme arabique
PROT ge aeNe een Oroneez cin: 1 gros 15 g de bois de campéche
PC ATEN eH Mum bia aN 12 onces..... O gros 19 g de sucre
Faire bouillir la noix de galle concassée et le bois de 360 g d'eau.
campéche pendant 1 heure dans le double du liquide
qui doit étre employé, et réduire a moitié, jeter dans Charles Haldat a été chirurgien militaire, bien
la liqueur encore tiede et passée au tamis de crin ou qu ayant fait préalablement des études de droit a
par un linge, le sulfate de fer, la gomme et le sucre Nancy, ce qui ne le préparait pas formidablement
pulvérisés et par petites parties. On agite le liquide a ce métier! Aprés avoir quitté l’armée napoléo-
pour faciliter la combinaison ; apres quoi, la liqueur nienne en 1797, il revient 4 Nancy pour y fonder
étant demeurée en repos pendant quelques jours, on une école de chirurgie out il y enseigne. Eclectique
la décante de dessus le dépét qui sest fait au fond du est un adjectif qui semble bien le définir!
vase et on la met en bouteilles. »
36
Apres cette incursion en 1805 et 1431, allons du Parmi les ouvrages qui contiennent des recettes
cété du xviii siécle. « Felix qui potuit rerum co- dencres de toutes sortes, le volume des manuels
gnoscere causas» ', « Heureux qui a pu pénétrer la Roret consacré aux encres est une mine d’or. La
raison des choses », telle est la belle devise d’un collection des 300 manuels Roret est due 4 un édi-
mémoire présenté au concours de |’Académie des teur parisien, Nicolas-Edme Roret (1797-1860).
sciences en 1775, portant sur l’analyse de l’indi- Cette collection constitue une encyclopédie des
go, et renfermant d’aprés le jury, des « expériences sciences et des arts, sous forme de petits ouvrages
ingénieuses et des vues utiles». Ce document pratiques destinés a la vulgarisation des sciences.
est l’ceuvre de Pierre de Ribaucourt, maitre-apo- Ces manuels sont trés divers, quil s'agisse d'un
thicaire 4 Abbeville. Ce savant, né en 1739 a manuel pour le travail du vitrail, d’un traité sur la
Abbeville dans la Somme, est membre de |’Aca- , fabrication des escaliers, ou A destination des sa-
démie des sciences, Arts et belles lettres de Rouen, peurs pompiers. Le manuel sur les encres est d’au-
il est également membre de la Société @histoire tant plus accessible pour nous que la Bibliothéque
naturelle de Paris. Il écrit de longues dissertations nationale de France l’a numérisé et mis en ligne
sur la fabrication des encres. En effet, alors qu’au- sur le Net (les références de cet ouvrage sur le site
paravant la fabrication des encres et des teintures gallica.bnf-fr sont citées en fin d’ouvrage).
était l'apanage des artisans, elle intéresse au cours
du xvumt siécle le monde des savants et des acadé- Dans les traités, l'ajout de noir de fumée est consi-
miciens. Au moment de la Révolution frangaise, déré comme inutile, car il rend l’encre plus épaisse
en 1793, Pierre de Ribaucourt fuit Paris et la ter- et moins coulante. Le fait est que le mélange noir
reur, et devient directeur de mines d’alun dans les de fumée et eau est extrémement difficile a réaliser,
Causses. Il meurt en 1806, agé de 67 ans. Certaines recettes conseillent d’autres véhicules
La recette de Pierre de Ribaucourt, présentée que l'eau: la biére, le vin, le vinaigre. Dans |’en-
ci-dessous, était réputée la meilleure dans les ma- cyclopédie Roret, cette alternative est considérée
nuels de l’encyclopédie Roret du xix‘ siécle. comme inutile. Effectivement l’acidité des com-
posants a une influence sur le résultat final, mais
le sucre contenu dans la biére peut apporter une
Encre de Ribaucourt (1775) certaine brillance, et la présence d’alcool une meil-
leure conservation.
Dela: Lajout d’alun est parfois préconisé pour fixer
« Prenez 250 g de galle d'Alep en poudre grossiére, lencre sur le papier, mais il est contesté par M. de
120 g de bois de campéche en menus morceaux, Ribaucourt. Comme nous le verrons plus loin,
autant de sulfate de fer, 90 g de gomme arabique en lalun permet de mieux fixer les colorants fragiles
poudre, 30 g de sulfate de cuivre, et autant de sucre sur le papier, mais ce nest pas utile pour les encres
cristallisé. a4 tanins.
Faites bouillir les noix de galle et le bois de campéche
ensemble dans 5 a 6 litres deau pendant une heure
ou jusquia ce que la moitié du liquide soit évaporée.
Passez la décoction dans un tamis de crin et ajou-
tez-y les autres ingrédients. Remuez cette mixtion 2 NOUVEAU MANUEL COMPLET a
jusquia ce que le tout soit dissous, et surtout la — b be
LA FABRICATION BS
gomme, et laissez la reposer pendant 24 heures.
Décantez ensuite l'encre et conservez-la dans des DES ENCRES
bouteilles de verre ou de grés exactement bouchées. » rege i FOUTE
TOUTE SORTE
is)
rena yrs
IKK, LEA TNCKES OF CRINE,
|) LK ENCAES 4 MARQUE LE LINGH,
MORES OMe SAION
ATHOORAPIIUEE RT AVTOGRAFIIONE,
Kk, LEE ENCKES STMPATHIGUBEy ETC
woied be ba
FABRICATION DU CIRAGE
TAR MeKCORY
Nous avons vu qu'une encre noire métallo-gal- * Ajouter la gomme arabique (chauffer le mélange,
lique nécessite ’emploi d'un matériau riche en ou attendre le lendemain).
tanins. Les recettes qui suivent utilisent des galles * Ajouter le sulfate defer.
de chéne, auxquelles un chapitre est consacré plus * Mélanger jusquia dissolution complete, le liquide
loin. Ces galles sont récoltées en été, sur l’arbre ou noircit quast immédiatement.
au sol lorsqu’elles sont tombées. Elles peuvent étre ° Mettre en bouteille.
séchées pour étre utilisées ultérieurement.
En soxydant a lair lors de lutilisation, l’encre
Cette premiére recette comporte uniquement les foncera encore. Le sulfate de fer ne doit pas étre
ingrédients essentiels: l'eau, les noix de galle, la mis en excés. Dés que la couleur noire est obtenue,
gomme arabique et le sulfate de fer. il est inutile d’en ajouter plus, car le fer est corrosif
4 la longue. Vutilisation du sulfate de cuivre a la
place du sulfate de fer est parfois intéressante car il
Recette de base de V’encre au fer réagit différemment avec les pigments des plantes,
mais la couleur vert jaunatre obtenue ne convient
Proportions pour environ 10 cl dencre: pas forcément 4 ce qui est attendu.
- 12g de noix de galle réduites en poudre fine
- 6 g de sulfate de fer
- 6 g de gomme arabique
- Y% litre d'eau (dont la plus grande partie sera
évaporeée).
38
Conservation La gomme arabique mest pas facile 4 dissoudre
Il arrive que l’encre en bouteille se couvre au bout rapidement. Pour pallier cet inconvénient, le mé-
dun certain temps d'une couche de moisissures. lange est chauffé, ou alors la gomme arabique est
Pour conserver l’encre et éviter le développement dissoute 4 l’avance. Dans ce cas, la proportion peut
de micro-organismes, il est utile d’ajouter l’une étre de 50 % de gomme dans 50 % d’eau. Cela
des diverses substances conservatrices. Lacide sa- donne un mélange trés épais. Il faut alors tenir
licylique est un conservateur courant, il est utilisé compte de cette quantité d’eau pour la recette.
4 raison de 1 ou 2 g par litre de liquide a conser- Un excés de fer est non seulement inutile mais
ver. Il est possible de le substituer par de l’aspirine dommageable: outre le fait quil est corrosif pour
dont la formule est proche. Ou bien on peut faire le papier, la quantité de liquide pour une bonne
infuser dans l’encre quelques clous de girofle, ou ‘concentration de l’encre est insuffisante pour une
ajouter une goutte d’essence de clou de girofle ou dissolution correcte du sel de fer. Celui-ci précipite
de lavande, ce qui conftre en plus une agréable au cours du refroidissement du liquide et décante
odeur 4 l’encre. Un paragraphe en fin de livre est au fond du récipient. De plus, les atomes de fer qui
consacré aux conservateurs. ne trouvent pas une molécule de tanin avec qui se
lier dans la solution sont inutiles pour la noirceur
Modifier la brillance ou la viscosité de l’encre.
D’autres ingrédients peuvent étre ajoutés pour Dans certaines recettes, comme celle qui suit, le
modifier la brillance de l’encre, ou sa viscosité: mélange eau et noix de galle n’est pas mis a chauf-
- Le noir de fumée donne 4 |’encre un aspect ve- fer, mais il est mis 4 macérer pendant un long
louté. Dans ce cas, l’encre obtenue est appelée moment a4 température ambiante, en étant agité
encre d’Orient. Mais comme nous !’avons vu fréquemment:
pour l’encre de Chine, il est extrémement difh-
cile d’obtenir un mélange homogéne eau et noir Recette avec lente macération
de fumée. des noix de galle
- Le sucre augmente la viscosité de l’encre et sa
brillance. Mais un excés de sucre rend l’encre Proportions pour environ 10 cl dencre:
Recette de l’encre noire ° Pulvériser les noix de galle et les faire tremper dans
au fer et au campéche l'eau de pluie pendant2mois, jusqua ce quune
couche de moisissure apparaisse a la surface.
Proportions pour environ 10 cl dencre: ° Faire chauffer le liquide a feu tres doux,
- 15 g de galles en poudre puis filtrer.
- 9 g de sulfate defer * Ajouter la gomme arabique puis le sulfate de fer.
- 9 g de gomme arabique Le liquide devient alors tres fonce.
° Laisser refroidir.
- 7 g de bois de campéche
- 2 clous de girofle
- 9 g de sucre Lencre est encore assez claire au moment de la fa-
- % litre d'eau brication, mais elle noircit au contact de V’air. La
fermentation, Cest-a-dire l’action des moisissures
sur le mélange de noix de galle dans l'eau, pro-
* Mélanger les galles, le bois de campéche et les clous
de girofle dans l'eau et laisser reposer 24 h. voque une hydrolyse des tanins grace 4 une en-
zyme contenue dans les levures. Cela libére ainsi
* Faire bouillir doucement pendant I h jusqua
évaporation des 4/5°. d'un cété des sucres et de l’autre cété des acides
tanniques. Mais il est douteux que la totalité des
° Filtrer.
tanins soient extraits par simple macération, « /es
* Ajouter la gomme arabique (chauffer le mélange,
encres faites de cette maniére coulent pales de la
ou attendre le lendemain).
plume ». Effectivement elles ne sont pas aussi fon-
+ Ajouter le sulfate de fer et le sucre.
cées que celles obtenues par forte ébullition.
° Mettre en bouteille.
Les recettes qui précédent, pour fabriquer de l’encre noire, comportent toutes
Putilisation de noix de galles, ou galles de chéne, ces petites excroissances que
lon pourrait confondre avec un fruit quand on oublie que le chéne produit
des glands! Ce tissu végétal est celui qui contient la plus grande densité de
tanins (environ 50 % du poids). Voyons ce que c'est.
Une galle est aussi appelée cécidie, le terme galle ayant une étymologie la-
tine, et cécidie une origine grecque. Outre les galles de chéne qui nous inté-
ressent ici, le terme galle désigne toute excroissance anormale produite par
une plante. Certaines galles apparaissent a la suite d’une piqiire d’insecte,
mais aussi 4 cause d’une bactérie, d’un champignon, ou d’un acarien. Dans
le cas d'une bactérie ou d’un virus, la galle peut étre une prolifération tis-
sulaire anarchique, ou nodule. Ce qu’on appelle un « balai de sorciére » sur
certaines plantes, que Pon reconnait au bouquet de rameaux surnuméraires
au niveau d’un noeud, avec un raccourcissement de la tige principale, est
aussi une sorte de galle.
Il existe de multiples types de galles, 1500 rien que dans nos contrées.
Chaque forme de galle est particuliére au parasite qui la provoque, mais aussi
a Pespéce végétale parasitée. Elle peut étre trouvée sur différents organes de la
plante, comme le bourgeon, la fleur ou la feuille, ow elle se présente sous la
forme d'une hypertrophie ou d’une déformation. II en est une extrémement
connue que I’on trouve sur les églantiers et que l’on appelle bédégar: elle a
l'aspect d’une petite touffe de poils hirsutes. Il y a une relation spécifique
entre le parasite et l’espéce végétale. Le parasite « reconnait » la plante. II sti-
mule la prolifération des cellules de la plante mais aussi la taille de chaque
cellule. Quand le parasite est un insecte, la galle est une structure hautement
organisée. Cette forme de parasitisme est trés élaborée, car la plante fait
en sorte de protéger et de nourrir le parasite, sans pour autant en tirer un
bénéfice. Une galle en formation peut également étre occupée par d’autres
insectes que celui qui en est 4 l’origine.
Les galles les plus connues et les plus volumineuses apparaissent sur des
chénes et sont causées par des petites guépes de quelques millimétres.
40
Galles de chéne.
La nymphe se développe au sein de la galle et devient une _Les restes dun petit Cynips.
imago adulte qui creuse alors un petit tunnel vers la sortie.
ANDRICUS FOECUNDATRIX
Linsecte femelle fécondé provoque une grosse galle en forme de céne, munie
d’écailles souples, ressemblant 4 un cone de houblon. Cette galle apparait au
niveau d'un bourgeon, aprés que l’insecte l’ait piqué pour y déposer son ceuf,
La petite bille au centre de la galle tombe & terre et libére une petite guépe
femelle parthénogénétique. Cette dernigre a une durée de vie courte et vient
pondre, sans étre fécondée par un insecte male, un ceuf dans un bourgeon
floral (un chaton mile) et provoque une galle minuscule. Au printemps, un
42
CYCLE DE LA VIE DE ANDRICUS FOECUNDATRIX CYCLE DE LA VIE DE BIORRHIZA PALLIDA
? oy
\ Galle minuscule
sur fleur male
Q Petite galle
? sur la racine
Femelle aptere
CO
Génération \y Sel ee
sexuee
végétal et animal
LE NOIR - Les galles de chéne: entre regne
43
nouvel insecte apparait, male ou femelle. La femelle fécondée reprend le
cycle. Les chénes concernés sont Quercus petraea et Quercus robur.
BIORRHIZA PALLIDA
Rouges et lisses en avril, les galles provoquées par la femelle parthénogé-
nétique dans un bourgeon terminal ont une forme irréguliére et sont assez
grosses, on les appelle parfois pommes de chéne. Ensuite, les galles flétrissent
et brunissent durant |’été, elles ressemblent alors plutét 4 des pommes de
terre. Vinsecte femelle qui a pondu l’ceuf est appelé Biorrhiza aptera, car il
ne posséde pas d’ailes.
Linsecte issu de cette « pomme de chéne » appartient a la génération sexuée,
cest un male ou une femelle. Aprés accouplement, il s’enterre dans le sol et
pond un ceuf sur la racine de l’arbre, qui donnera en décembre la femelle
parthénogénétique.
CYNIPS QUERCUSFOLII
Pour cette espéce, la génération bisexuée donne lieu 4 des minuscules galles
violettes velues au bas des troncs. Par contre, la femelle parthénogénétique
produit une petite galle ronde d’environ 2 cm de diamétre, comme une ce-
rise, d’abord vert pale puis rose, attachée 4 une nervure de la face inférieure
dune feuille. A Pautomne, la feuille tombe et la galle avec. La galle est peu
dense et se ratatine en séchant. Ces galles en forme de cerise se développent
sur le chéne pubescent.
ANDRICUS QUERCUSTOZAE
Cet insecte provoque la formation de grosses galles sphériques, d’abord
vertes puis brunes et vernissées, surmontées d’une couronne de pointes qui
la font ressembler a des néfles. Ce sont les plus grosses galles du chéne que
l'on puisse observer. Elles se développent a la base des bourgeons. Elles sont
si solidement attachées a la branche qu’elles peuvent y rester longtemps aprés
la sortie de l’insecte. Si la périphérie de la galle est dure, l’intérieur est spon-
gieux et plus tendre.
ANDRICUS KOLLARI
Andricus kollari est 4 Yorigine de deux types de galles différentes. La galle la
plus volumineuse se développe sur les bourgeons des rameaux, notamment
des vieux chénes tétards. Elle ressemble & une petite bille de bois légére. Elle
est dure et parfaitement sphérique. Elle arrive 4 maturité en aoat. Alors que
ces galles sphériques sont provoquées par un ceuf fécondé, Cest-a-dire issu
d'un mile et d’une femelle, les insectes adultes qui en sortent sont exclusive-
ment des femelles dites parthénogénétiques.
Les chénes concernés sont de l’espéce Quercus robur.
ANDRICUS DENTIMITRATUS
Cette galle, appelée galle du gland, a une forme extravagante, et entoure
presque le gland auquel elle est accolée. Elle est rouge, collante et brillante
ce qui la rend encore plus remarquable. Cette galle est présente sur les
chénes méditerranéens.
Jeunes galles d’Andricus quercustozae.
| Se
UTRe
. Se al ,
a
Galles d’ Andricus dentimitratus.
Galles d’Andricus Kollari.
végétal et animal
LE NOIR - Les galles de chéne: entre regne
45
PROOMMERGE. = si@ ysMes
La « noix de galle », trés riche en tanins, est utilisée depuis fort longtemps,
non seulement pour la fabrication des encres et pour la teinture des tissus,
mais aussi pour les propriétés médicinales des tanins. Les galles contenant
encore l’insecte qui ne s’est pas encore échappé sont réputées contenir plus
de tanins que les autres.
Cynips quercusfolii et Andricus kollari nous fournissent les galles les plus
exploitées pour la production de tanins. D’ailleurs, ces deux espéces sont
parfois nommées Cynips tinctoria ou Andricus tinctoria.
Galles d’Alep
experimentation dans [n¢elier
Ree
deTadecoction dealles
- 12 g de poudre de noix de galles
- 480gdeau depluie
- 50 g de glycérine (facultatif)
Jeu d’encre
4 base de galles.
(© Héléne Dumont)
47
fi (MINS
HES (PENTAESy
48
Feuille d’aulne
et contre les diarrhées est connue depuis fort longtemps. Ils favorisent aussi
la cicatrisation, grace a leurs proprictés d imperméabilisation de la peau et
des muqueuses, et de vasoconstriction des petits vaisseaux. Mais il faut noter
que l’ingestion massive de certains tanins est extrémement toxique, et que la
dose absorbée est donc primordiale pour un effet bénéfique. Les tanins sont
utilisés en thérapeutique pour leurs propriétés antiseptiques, bactéricides,
et antidiarrhéiques. Ce sont des agents astringents et vasoconstricteurs qui
assurent une protection de la peau et des muqueuses en imperméabilisant
partiellement les couches superficielles.
Les biologistes se sont demandé dans quel dessein la cellule végétale synthé-
une
tise des molécules de tanins. Ces molécules seraient-elles pour la plante
forme de déchet? En biologie, il est parfois envisagé qu'une chose soit inutile
ont constaté
tant que son utilité n'est pas comprise! Depuis, les observateurs
de
que les tanins fabriqués par les plantes contribuent a protéger celles-ci
les attaques par des
certaines agressions, comme linfection par des bactéries,
insectes ou méme d’autres prédateurs comme les herbivores. Par exemple,
de tanins,
une plante infectée par une bactérie fabrique une grande quantité
de ces bactéries. De méme, l’astring ence et
ce qui inhibe le développement
plante.
le gotit amer des tanins nincitent pas lanimal 4 consommer la
ACIDE
GALLIQUE
ACIDE | ACIDE
GALLIQUE GALLIQUE
Sigel ee
GLUCOSE
uA \
/ os
fe a
ACIDE ACIDE
GALLIQUE GALLIQUE
50
ils sont assez largement présents dans le régne végétal, aussi bien chez les
Angiospermes que chez les Gymnospermes, et méme chez les fougéres. On
en trouve dans les écorces de pin ou de mimosa, les pépins de raisins, les
feuilles de thé.
Les tanins condensés ont des propriétés antioxydantes supérieures aux tanins
hydrolysables. Soumis 4 un chauffage en milieu acide, ils polymérisent pro-
gressivement et forment des pigments anthocyaniques, amorphes, de colo-
ration rouge, ou des produits brun jaune, insolubles, de poids moléculaire
élevé, appelés phlobaphénes. Lutilisation du millepertuis en usage interne
est due & la présence dans les sommités fleuries de phlobaphénes qui lui
conférent des vertus antihémorragiques.
) 0. UE i al a
Recette de fabrication de l’encre a partir
d’une solution tannique
Récolte
Ce sont les feuilles de ronce qui doivent étre récoltées pour la fabrication
de lencre. La récolte est plus facile au début du printemps quand de nom-
breuses pousses tendres se développent tout au long des grandes tiges de l’an-
née précédente. La cueillette, faite en se protégeant les mains évidemment
avec des gants de jardinier, est alors facile et rapide. Les feuilles peuvent étre
séchées pour un usage ultérieur ou utilisées immédiatement.
Nuances obtenues
Les feuilles de ronce contiennent des tanins qui donnent, en présence de
sels de fer, des gris « fumée », légérement bleutés, plus ou moins foncés et
tres délicats,
Composition
Les feuilles de ronce contiennent de grandes quantités de tanins « conden-
sés »: plus de 5 % de la matiére séche. D’ailleurs les tisanes de feuilles de
ronce sont utilisées en phytothérapie pour leurs propriétés anti-inflamma-
toires et cicatrisantes liées a leur astringence.
52
A Tae, ‘\SS.
Le fruit de la ronce : la mire.
Les chénes sont exploités dans ’hémisphére nord depuis fort longtemps, car
ils nous sont utiles 4 plein d’égards : outre les tanins récoltés pour le tan-
nage des peaux, la teinture des tissus et la fabrication des encres, les chénes
sont source de bois d’ceuvre de grande qualité, de glands pour nourrir les
animaux, de bois de chauffage, sans compter les foréts qui abritent une
faune variée.
Récolte
Ce sont les vieilles écorces du chéne qui nous intéressent particuligrement
pour les encres. Pour ceux qui possédent un poéle a bois ou une cheminée,
il est facile de récolter les écorces sous le tas de bois stocké pour le chauffage
de la maison.
Les écorces de chéne ont été commercialisées sous la forme d’une poudre,
qu’on appelle le « tan ». Autrefois, cette poudre était produite dans des
« moulins a tan », fréquents prés des foréts de chénes ou de chataigniers, et
vendue pour la teinture en noir de la soie.
Pour extraire les tanins des écorces, il faut réduire celles-ci en petits frag-
ments, puis les laisser macérer dans de l’eau pendant plusieurs jours, et enfin
faire bouillir le mélange pendant plusieurs heures.
Nuances obtenues
Au Japon, les costumes du théatre Né6 sont traditionnellement teints en
centaines de nuances de gris, obtenus grace aux tanins de chéne, de méme
que le fond brun noir des kimonos.
Composition
Les vieilles écorces de chéne sont si riches en tanins quelles sont sans doute
les plus anciennement utilisées pour le tannage des peaux. La matiére
séche
des écorces (contenant environ 12 % d'eau) renferme environ 10
% de ta-
nin, majoritairement un ellagitanin.
54
Chéne.
Feuille du chéne.
Ecorce du chéne.
Fruit du chéne : le gland.
Récolte
La plus grande concentration de tanin chez le chataignier se trouve dans
le bois des grosses branches, plus que dans les écorces. Le bois le plus riche
est celui du tronc et des grosses branches des arbres agés, quand ils sont
agés d’environ 50 a 70 ans. Les chataigniers du Sud de l'Europe sont plus
riches en tanins que ceux du Nord de Europe. Cela est vrai aussi pour les
arbres d’altitude. Les feuilles et les bogues en contiennent une bonne quan-
tité également.
I] est nécessaire de fractionner le bois en copeaux le plus petit possible
(5 mm). Il faut ensuite faire bouillir ces copeaux dans de l’eau pendant plu-
sieurs heures, puis concentrer la solution.
Composition
Le bois de chataignier contient des ellagitanins, comme la castaline ou la
castalagine. Les écorces du chataignier contiennent également des tanins
mais des « tanins condensés », plus rouges que ceux du bois.
56
ot
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a
h
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Ye
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A
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ui
* “4
ps an
a
Chataignier.
g
Les rameaux sont finement poilus comme du velours. Les feuilles sont com-
posées, avec de nombreuses folioles, chaque foliole étant lancéolée et lége-
rement dentée. Les petites fleurs verdatres sont regroupées en grappes, qui
donnent ensuite des fruits poilus et rouges dressés en fuseaux trés reconnais-
sables. On peut planter ce petit arbre dans des sols secs et pauvres, plutét
calcaires, mais toujours au soleil. Il est tres envahissant car des jeunes sujets
se développent a partir de son rhizome. La taille des rejets ne fait que les
renforcer, il est préférable de les fouler aux pieds si l'on veut maitriser son
expansion. Ce petit arbre est apprécié pour son feuillage flamboyant en au-
tomne et ses fruits décoratifs.
Récolte
Ce sont les feuilles et les jeunes rameaux que l’on récolte pour faire de
lencre. On peut les utiliser frais, mais ils sont plus faciles 4 réduire en petits
fragments une fois secs.
Composition
Les feuilles de sumac séchées contiennent en moyenne 25 % de tanins.
Ce sont des tanins hydrolysables, gallotanins, trés solubles méme dans
l'eau froide. Mais ces tanins s’hydrolysent trés facilement quand la tem-
perature augmente. Cela empéche de concentrer la solution en la faisant
bouillir longtemps.
58
Buisson de sumac.
ais b
ada
y
Feuillage en automne. Rameaux broyés de sumac.
Récolte
Lécorce et les cones de l’aulne contiennent des tanins qui ont été utilisés
pour la tannerie et la teinture de chapeaux. L’écorce des arbres est plus riche
en tanins au printemps et surtout se détache plus facilement du bois frais. II
faut utiliser une plane, cette lame légerement courbée pourvue d’un manche
a chaque extrémité. autre solution consiste 4 broyer les jeunes rameaux avec
un broyeur de jardin. Cela peut étre fait au moment de la taille des haies.
Composition
Ce sont plutét des tanins ellagiques que l’on peut extraire de l’écorce et des
fruits de l’aulne.
60
: Sa,
ev Gait
Aulne commun au bord d’un étang.
Strobiles.
Récolte
Lécorce de l’aubépine, récoltée au mois d’avril, fournit une bonne quantité
de tanins. On préléve les branches fines lors des tailles des haies du début du
printemps, juste avant que la séve ne monte et que les feuilles apparaissent.
II est conseillé de séparer l’écorce du bois en tapant sur les branches avec
un maillet. I] est possible aussi de passer les branches dans un broyeur. Les
écorces sont mises 4 macé¢rer dans de l’eau de pluie pendant plusieurs jours.
.
Fruits de l’aubépin
> Te
e. —
Jeu d’encre d’aubépin
Eis
e.
62 a ms
Lécorce de l’aubépine figure dans les recettes d’en-
luminures du Moyen-Age, comme en atteste la re- _Recette
dumoine Théophile
(xusivele)
cette de l’encre du moine Théophile dans un traité « Pour faire de Vencre, coupez des bois dépine en
sur diverses techniques artistiques, Diversarum avril, en mai avant quils ne produisent des fleurs ou
artium schedula, « Essai sur divers arts ». Cette des feuilles, et les rassemblant en faisceaux, laissez
recette, écrite au tout début du xu siécle, encore reposer a lombre pendant deux, ou trois, ou quatre
célébre chez les calligraphes et enlumineurs de semaines, jusqua ce quils soient un peu secs.
notre époque, fut rédigée en latin. Elle fait men- Ayez de petits marteaux de bois, avec lesquels vous
tion de fagots de bois d’aubépine. Lauteur de écraserez les épines sur un autre bois dur, jusqua
ce « Essai sur divers arts », ouvrage consacré aux ce que vous ayez enlevé entiérement lécorce. Vous
savoirs techniques dans le domaine de l'art et de la mettrez aussitot dans un tonneau rempli d eau;
Partisanat, est un prétre allemand du nom de et quand vous aurez rempli d eau et d écorce deux,
Theophilus Presbyter (Théophile le moine) né trois, quatre ou cing tonneaux, laissez séjourner
vers 1070 en Rhénanie, et mort en 1125. Si peu ainsi pendant huit jours jusqua ce que leau se soit
de choses sont connues sur sa vie, il apparait 4 la emparée de tout le suc de l'écorce. Ensuite mettez
lecture de ses écrits que cet auteur possédait de cette eau dans une marmite tres propre ou dans
réelles connaissances techniques, et qu'il avait ex- un chaudron, mettez du feu dessous, faites cuire ;
périmenté les techniques qu'il décrivait. Ce point de temps en temps jetez aussi de l’écorce dans la
est remarquable car les textes médiévaux, y com- marmite, afin que sil est resté quelque peu de suc
pris les traités techniques, sont souvent recopiés il en sorte par la cuisson: quand vous aurez cust
par des auteurs qui n’ont rien a voir avec les per- celle-la, 6tez-la, et mettez-en d autre. Cela terminé,
sonnes qui possédent vraiment les connaissances faites cuire Veau qui reste jusqua réduction d'un
techniques décrites. tiers, puis passez de la premiere marmite dans une
Ce recueil est une sorte d’encyclopédie du savoir moindre, et faites cuire jusqua ce que cela noircisse
technique dans le domaine de l'art et de l’artisanat. et commence a devenir épais; prenant bien garde de
Il est écrit A une époque d’une exceptionnelle re- ne point ajouter d autre eau que celle qui est mélée
naissance en Allemagne, y compris du point de vue de suc. Quand vous la verrez épaissir, ajoutez un
artistique. Lart allemand est a cette période impré- tiers de vin pur, et mettant dans deux ou trois vases
gné des influences de l'art byzantin. Le texte est neufs, faites cuire jusqua ce que vous voyiez une
construit avec méthode et suivant un plan précis. espece de peau se former a la surface. Alors enlevant
Il eut une grande influence dés cette époque sur les vases du feu, placez au soleil jusquia ce que lencre
les artistes aussi bien en Allemagne qu’en France. se purifie de la lie rouge. Prenez de petits sacs de
On recense a ce jour cing manuscrits complets de parchemin cousus avec soin et des vessies; versez-y
ce traité. Celui de Dresde a été fort endommagé Lencre pure et suspendez au soleil pour quielle seche
a la fin de la Seconde Guerre mondiale. Le seul entierement. Apres cette opération, prenez-en quand
connu en France est 4 la Bibliothéque municipale vous voudrez, faites détremper dans du vin sur des
d’Amiens. A la Bibliothéque nationale se trouve un charbons; et, ajoutant un peu de noir, écrivez, Sil
ouvrage oti le texte est traduit du latin par Charles arrive par suite de négligence que lencre ne soit pas
de LEscalopier (1812-1861). Le chapitre XLV assez noire, prenez du noir la grosseur d'un doigt;
donne la recette de l’encre d’aubépine: puis, mettant au feu, laissez chauffer, et jetez ausst-
tot dans Vencre. »
FIN DU LIVRE PREMIER.
Récolte
La peau de grenade séchée constitue une excellente alternative a la noix de
galle pour la confection d’encres ferro-galliques. Les peaux sont récupérées
au fur et 4 mesure de la consommation des fruits et laissées 4 sécher. Si elles
sont fraiches, elles peuvent étre séchées au four. Les peaux séchées doivent
étre réduites en poudre fine dans un vieux moulin A café et tamisées.
Nuances obtenues
La peau de grenade donne aisément une encre gris foncé. Son utilisation
pour la teinture est connue également depuis fort longtemps en Asie cen-
trale, car grace 4 ces tanins, elle permet de teindre en plusieurs couleurs: on
obtient des jaunes fauves sans mordangage, et des noirs en présence de fer.
Composition
La couleur rouge de la peau de la grenade est due a des anthocyanes (del-
phinidol, cyanidol et pélargonidol). Elle est également trés riche en tanins
galliques ou ellagiques, dont un tanin hydrolysable spécifique & la grenade:
la punicalagine.
<s
Ecorce séchée de la grenade. Fleurs du grenadier.
‘) 3i on
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67
lencre de couleur ET AUTRES PREPARATIONS
Laquarelle est une peinture contenant des colorants solubles dans l’eau,
et liés par de la gomme arabique. Conditionnée souvent sous forme solide
dans des petits godets, elle est diluée au moment de l'utilisation dans l’eau a
l'aide d'un pinceau a poils souples, pour étre appliquée sur du papier épais.
Le résultat est transparent et lumineux grace 4 l'emploi maitrisé des zones
non peintes et des couleurs. La texture du papier présente des aspérités, les
colorants se déposent en majorité dans les creux, ce qui conftre & oeuvre
une vibration caractéristique. Cette technique est ancienne mais fut un peu
moins pratiquée 4 la Renaissance, et jusqu’au xvi siécle, au profit de la
peinture a l’huile. Laquarelle est un matériau fragile, et la technique qui
en découle est une technique exigeante, directe, sans possibilité de repentir.
La qualité du papier sur lequel est déposée l’aquarelle est primordiale, étant
donné la transparence du résultat obtenu.
Le lavis est une technique d’aquarelle: monochrome, cest une ceuvre tra-
vaillée avec une seule encre plus ou moins diluée. Le résultat est complété
avec de l’encre de Chine ou une autre couleur diluée a Peau. Le lavis est
parfois appliqué en larges aplats, mais c’est dans la spontanéité du trait que
68
réside la force de l’ceuvre. En effet pour le lavis comme pour la calligra-
phie, le repentir n’est pas possible. II existe des lavis gris, bistre, ou sépia,
comme ceux réalisés par Victor Hugo ou comme les célébres paysages
chinois, mais ils peuvent étre aussi rouges, ou de toute autre couleur.
LES ANTHOCYANES ET LE pH
Les anthocyanes changent de couleur en fonction du pH du milieu dans
lequel elles baignent. En milieu acide, elles sont rouges. Si on ajoute un
composé légérement basique, la couleur passe progressivement du rouge
au bleu. Lajout d’une trop grande quantité de base rend ces composés
gris ou incolores. Ces transformations sont réversibles et offrent une
large gamme de couleurs. Elles sont spectaculaires avec le jus de chou
rouge. En acidifiant progressivement la solution, on observe une série de
nuances entre le violet, le mauve et le rouge. En alcalinisant, on obtient
des nuances de turquoise, de vert, puis de jaune.
70
association de deux composés, colorés ou non, qui forment une fois associés
un composé coloré plus stable. Vobjectif des étudés qui sont menées dans
les laboratoires est donc de déterminer quels peuvent étre ces composés, les
copigments, 4 ajouter aux anthocyanes pour les stabiliser. Ils semblent étre
variés: une autre anthocyane, ou un tanin, un flavonol, ou encore l’acide
caféique, fréquent chez de nombreuses plantes et que l’on trouve entre autres
dans les pépins de raisin. La copigmentation serait également effective avec
les tanins ellagiques du bois de chéne, ou les catéchines du thé vert. Si le
ratio copigment/pigment est élevé, l'ensemble montre méme une stabilité
remarquable. Le phénoméne de copigmentation intermoléculaire peut dans
certains cas étre renforcé en présence de cations métalliques tels que le sel
de fer Fe** ou aluminium Al**. Pour stabiliser les anthocyanes par copig-
mentation, les études mentionnent non seulement les catéchines contenues
dans le thé vert, mais aussi la quercétine de Poignon ou l’extrait de romarin.
Le domaine des colorants alimentaires mobilise aussi les chercheurs. En ef-
fet, les industriels espérent diminuer les pertes de couleur qui adviennent
lors de la transformation, le stockage et la commercialisation des aliments,
pertes dues a la faible stabilité des pigments naturels par rapport aux colo-
rants synthétiques.
nes
LES COULEURS - Du roses avec les plantes a anthocya
71
Chou rouge
DEE@ OMG: b
Les feuilles de chou rouge sont juteuses, elles peuvent étre centrifugées
dans une centrifugeuse de cuisine, ou broyées dans un mortier, mais
c'est plus laborieux. Utilisé pur et cru sur du papier, le jus de chou rouge
frais offre de belles teintes fortes mais malheureusement trés instables.
Lexposition a la lumiére et aux ultraviolets provoque une décoloration
trés nette, en seulement quelques dizaines de jours. Si l’encre n’est pas
exposée a la lumiére, la décoloration est effective aussi, mais de facon
un peu moins rapide. Si Pencre déposée sur le papier est soumise a
Phumidité, la décoloration se produit rapidement, méme sans lumieére.
Néanmoins, le jus de chou rouge permet des activités avec les enfants, a
la fois ludiques et pédagogiques. En effet, il est trés aisé d’obtenir toute
une gamme de couleurs avec un seul jus, en ajoutant des composés
faciles 4 trouver. Cela permet d’expliquer non seulement la notion de
colorant mais aussi les concepts de pH acide et pH basique.
i
expenimen(rtion dans [n¢elier
Sur le papier, le jus est utilisé pur, mais s'il est mis
dans un récipient comme un tube 4 essai, il doit
étre dilué afin que les couleurs soient percues par
transparence. Voici le listes des produits ajoutés au
jus de chou rouge dilué, de gauche a droite:
- acide oxalique
- acide tartrique
- vinaigre (acide acétique)
- citron (acide citrique)
- jus de chou rouge pur
- bicarbonate de soude
- lessive
- potasse (eau de cendres)
- cristaux de soude (ou carbonate de soude)
- lessive de soude (ou soude caustique,
es variations de couleurs du chou rouge en fonction du pH. ou hydroxyde de soude NaOH).
a anthocyanes
LES COULEURS - Du roses avec les plantes
78
DES BAIS DURP TY ICRA) s
Le phytolaque n’est pas seulement une plante envahissante, il est caracte-
risé par les botanistes comme une espéce invasive dans certains milieux,
en particulier les sols sableux. Les vastes friches des rives de Adour par
exemple, au sud de |’Aquitaine, sont littéralement couvertes par le phyto-
laque, cette espéce laissant trés peu de place aux autres plantes. Appelée aussi
raisin d’Amérique, cette espéce fut introduite en Europe au xvii‘ siécle pour
diverses raisons. Etant dotée d’une forte dynamique d’expansion, elle per-
turbe les écosystémes qu'elle colonise. Elle n’a pas de grandes exigences en ce
qui concerne le sol, et elle se resséme trés facilement. En hiver, la plante dis-
parait complétement de la vue, mais au printemps, elle devient rapidement
imposante grace 4 une racine trés développée. Les grappes de baies noires et
charnues qui se forment a la fin de |’été sont toxiques.
Récolte
La récolte des baies pour la couleur s’effectue en début d’automne, parfois
méme en novembre, car les fruits doivent étre parfaitement mars. Si on ne
peut pas utiliser les baies fraiches, seule la congélation permet de les conser-
ver, 4 moins d’un séchage rapide a l’air chaud.
sae
PTV
ea
Len
eb
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Pe
74
Phytolaque (Phytolacca americana). Grappe de baies du phytolaque.
° Filtrer.
* Ajouter la gomme arabique et le conservateur
et mélanger intimement.
anes
LES COULEURS - Du roses avec les plantes a anthocy
75
Sureau noir (Sambucus nigra). Sureau yéble (Sambucus ebulus).
- Le sureau noir est un arbuste a croissance trés rapide, préférant les en-
droits humides et pouvant atteindre 8 métres de hauteur. Les branches
souvent courbées lui donnent un port en boule. Ses feuilles sont com-
posées et caduques. Elles sont attachées par deux sur la tige, comme
pour toutes les plantes de cette famille des Caprifoliacées. Les tiges sont
remplies de moelle tendre, et servaient autrefois 4 confectionner des
flates. A l’automne, les fruits ne sont comestibles que cuits. Ils donnent
de bonnes confitures, rapides a faire. Et pour entretenir le potager, les
décoctions ou les purins de feuilles font merveille.
Encre de sureau yéble. Encre de sureau yéble Encre de sureau yéble sec
Encre de sureau noir.
sec macéré dans le macéré dans le vinaigre avec
vinaigre avec ajout de ajout de gomme arabique
gomme arabique. et d’alun.
77
Sto
Sew
of
Rose trémieére. Dahlia poupre.
La rose trémiére est une plante trés décorative, sauvage et vagabonde. Elle
aime les interstices. Elle s'échappe de la moindre anfractuosité d'un trottoir
ou le long d’un mur. Et malgré le peu de place dont elle dispose au sol, elle
s’élance comme un jet. Ses pétales sont faciles 4 récolter, quelques-uns par
jour, au fur et 4 mesure de la floraison. Chaque corolle est mise 4 sécher, en
attendant les suivantes.
Composition
Dans la famille des anthocyanes, les molécules ont souvent été nommées 4
partir du nom de la fleur dans laquelle a d’abord été détectée leur présence.
Le colorant de la rose trémiére est la malvidine, car le nom du genre de la
fleur selon Linné est Malva. Le nom de genre de cette fleur a donné le nom
de la famille botanique :Malvacées. Notons que la rose trémiére n’appartient
pas 4 la famille des Rosacées comme on aurait pu le croire. La rose trémiére
noire a été autrefois abondamment cultivée pour la teneur en anthocyanes
de ses pétales, particulitrement en Baviére, en Turquie et en Asie centrale.
La malvidine est également le principal colorant du vin. En vieillissant, la
couleur du vin a tendance a tendre vers le jaune, justement a cause de la
dégradation de la malvidine.
78
experinlentation dans lstelier
Red ere ee = SSE
79°
*
En seulement quelques secondes, cette encre rose de
pétales de dahlia devient grise au contact du papier.
du Ver AVEC LES NERPRUNS
ET LA BOURDAINE
LE NERPRUN PURGATIF
Cet arbuste a un joli port étalé et ne dépasse pas 6 métres de haut.
Le nom scientifique, en latin, du nerprun purgatif est: Rhamnus ca-
thartica, et logiquement en frangais: nerprun cathartique. Le mot grec
Karthartikos signifie « qui purge ». Larbuste est aussi appelé bourdaine
épineuse, ce qui se comprend aisément puisque lune des différences
entre bourdaine et nerprun est bien la petite épine située au bout des
rameaux chez le nerprun, dont est dépourvue la bourdaine. Le nerprun
est utilisé en phytothérapie. Les propriétés purgatives de l’arbuste sont
citées depuis le xvi‘ siécle. Sous la forme d’un sirop préparé avec les Les nervures sont
: cal bak i ‘ 3 ; 2 saillantes en dessous,
fruits, la médication parait bien violente: elle était parait-il conseillée Jes nervures WAS i po
« aux hommes robustes, difficiles a émouvoir »! sont légérement arquées.
Botanique
Alors que les feuilles du nerprun alaterne sont persistantes et coriaces,
les feuilles du nerprun purgatif sont, elles, caduques, et l’arbuste perd
donc ses feuilles en hiver. La feuille du nerprun est assez petite, en-
tiére, et bordée de petites dents. Le botaniste dit qu’elle posséde une
« marge finement denticulée ».
Les fleurs sont discrétes, car minuscules et de couleur vert pile.
Chez les Rhamnus dont le nerprun purgatif, le fruit noir et char-
nu a toute l’apparence d’une baie. En réalité ce fruit est une
« drupe » a 4 noyaux accolés, renfermant chacun une graine.
D’abord verdatre, la peau du fruit prend une couleur d’un noir
intense a maturité. D’ailleurs l’origine du mot « nerprun » se-
rait Prunus niger, « prunier noir ».
80
Nerprun
insertion des feuilles ainsi que des jeunes rameaux est quasiment opposée,
alors que celle des rameaux plus 4gés est nettement alterne.
Lécorce est ponctuée de lenticelles, ces petits orifices Larbuste devient épineux en vieillissant,
qui laissent passer l’air 4 travers ’écorce liégeuse. contrairement a la bourdaine.
Ecologie
Le nerprun purgatif est un arbuste de haies champétres qui attire de nom-
breux oiseaux, car ceux-ci apprécient ses fruits. Grace aux graines rejetées par
les oiseaux, le nerprun se reséme facilement et colonise de grands espaces.
Il accueille également le papillon citron dont la larve mange les feuilles.
Généralement, la présence de ce papillon dans un endroit indique que le
nerprun nest pas loin. Les caractéristiques du nerprun purgatif rendent par-
fois cet arbuste carrément envahissant: bonne tolérance a l’ombre, croissance
rapide, grande tolérance a lhumidité et a la moisissure, grande fécondité et
dispersion des graines par les oiseaux, taux élevé de germination. Larbuste
induirait également des modifications du sol et du biotope.
LA BOURDAINE
Lécorce de la bourdaine est lisse et grise et ponctuée sur les jeunes rameaux
de petites lenticelles plus claires. Les rameaux ne sont pas épineux comme
ceux du nerprun.
Ses feuilles sont caduques, arrondies, entiéres, lustrées, non dentées contrai-
rement a celles du nerprun. Les nervures sont bien visibles et saillantes sur
la face inférieure.
Comme le nom latin Pindique, Rhamnus frangula, de frangere qui signi-
fie « casser », le bois de la bourdaine est fragile. Contrairement au nerprun
dont on utilise les fruits pour préparer un sirop fortement purgatif, Cest
l’écorce desséchée de la bourdaine qui est utilisée pour ses propriétés égale-
ment purgatives. Le miel de bourdaine est un miel spécifique de l'Ouest de
la France, et il a la particularité de ne pas étre acide comme les autres miels,
ce qui le rend trés agréable a déguster. Il a aussi la qualité de se conserver
plus longtemps.
82
Les nervures secondaires sont p paralléles er
es entre elles et sont
elles 5 au aes
Les fleurs sont discrétes :
: petites ihe
et vert pale, aKiba moa
l’aisselle des feuilles.
nombre4y de 12te paires,
tee plus nombreuses < que celles
Paliaat dea la feuille
Ais Elles
= comportent 4-5
y sépales.
F Les pétales
2 sont souvent absents.
de nerprun.
Encre bleue
de nerprun.
Ge Vena! Be vVessis
Vert de vessie est le nom d’une préparation a base de fruits de nerprun,
dune belle couleur verte profonde avec une nuance de jaune. Cette
recette était utilisée autrefois pour l’aquarelle et pour confectionner des
enluminures. Aujourd’hui le terme « vert de vessie » désigne plutét dans
les catalogues et les nuanciers le nom d’une certaine couleur, obtenue
par un mélange de pigments artificiels. Autrefois la préparation était
conservée dans des vessies de porc. Les vessies étaient suspendues au
chaud, par exemple prés de la cheminée, jusqu’a dessiccation complete
de la préparation.
La couleur verte, aussi étonnant que cela Puisse paraitre, nest pas trés
facile a obtenir a partir des plantes, que cela soit pour la teinture des
tissus, que pour la peinture sur papier. La molécule de chlorophylle a
qui l’on doit la couleur majoritaire chez les végétaux est instable. Le
vert a plus souvent été obtenu par un mélange de colorants bleus et
84
~——
Les fruits du nerprun sont utilisés depuis fort de la peinture. A la recherche des origines de la
longtemps pour les colorants quils contiennent. peinture a lhuile, elle voyage en France et en Italie
Plusieurs recettes datant du Moyen-Age ont été du Nord accompagnée de ses fils pour redécou-
retrouvées qui mentionnent l'utilisation du ner- vrir les traités techniques anciens. En 1847, elle
prun. Voici une recette provenant d’un recueil devient membre honorifique de l’Académie des
dont le titre est Segreti per colori, « les secrets des Beaux-Arts de Bologne, oui elle est récompensée
couleurs », C’est un manuscrit sur papier datant pour ses recherches sur histoire de l’art italien.
du début du xv siécle, couramment appelé ma- Curieusement elle écrit ensuite sur la mode et
nuscrit de Bologne car il est conservé 4 Bologne a Part de la robe, théme quelle traite avec la plus
la librairie des chanoines. Ce recueil de « secrets » _ grande rigueur. Ensuite elle change
encore de re-
renferme 392 recettes rédigées en latin. gistre et écrit sur ’histoire de sa ville, Brighton, ot
elle vit avec sa famille. Puis elle se passionne pour
Recette traduite du manuscrit l'histoire naturelle et devient une des principales
de Bologne (xv* siécle) spécialistes des algues en Grande-Bretagne. Elle
collectionne des plantes et son herbier est conservé
« 333 - Prenez des baies de nerprun mites, met- jusqu’a aujourd’hui au Musée d’Histoire naturelle
tez-les dans une bouilloire, ajoutez du vinaigre, un de Londres. Jusqu’a sa mort elle écrit des articles
poids égal a celui des baies, laissez bouillir un peu, dans la célébre revue Nature. En hommage a son
filtrez a travers un tissu de lin, versez dans un vase. travail, une espéce d’algue porte son nom.
Quand vous voulez l'utiliser, étendez la couleur verte Pour ceux qui s'intéressent & la réalisation de cal-
avec un pinceau. Vous pouvez garder cette couleur ligraphies et d’enluminures médiévales, et plus
pendant une année entire, si gardé bien fermé. » généralement pour tous ceux qui étudient les
traités anciens sur les techniques artistiques, le
Le texte a été publié en Italie en 1887, et il est travail de Mary P. Merrifield est une référence
aussi connu aujourd’hui grace 4 un ensemble plus jusqua aujourd’hui. Ce travail, qui réunit plu-
vaste de documents anciens compilés et édités au sieurs textes anciens sur l’art de la peinture, a été
xix‘ siécle par l’Anglaise Mary P. Merrifield. publié 4 Londres en 1849 dans un ouvrage inti-
Mary P. Merrifield est une intellectuelle de tulé Medieval and Renaissance Treatises on the Arts
Pépoque victorienne, née a Londres en 1804, of Painting. Louvrage a été réédité 4 New York
a une période qui n’est pourtant pas réputée en 1999, puis de nombreuses fois depuis. Une
propice a l’épanouissement des femmes. Mary dizaine de textes importants y sont rassemblés,
P. Merrifield commence sa carriére universitaire dont certains proviennent du manuscrit de 1431
en traduisant un traité de techniques picturales, conservé 4 la Bibliothéque nationale de France.
le Livre de lart (Libro dell’Arte), ceuvre d'un Cette mine d’informations formidables est rendue
peintre italien du xv* siécle, Cennino Cennini. compréhensible grace a la traduction apportée par
Elle s'intéresse aux techniques et aux matériaux Mrs Merrifield.
de colorants jaunes, les pigments verts étant plutét rares si l’on excepte les
sels de cuivre. Les peintres et les enlumineurs mélangeaient dans leur mor-
tier deux sortes de pigments minéraux: azurite et jaune @étain, ou lapis et
orpiment par exemple. Cette méthode des mélanges a vraisemblablement
été expérimentée dés la fin du Moyen-Age (Michel Pastoureau). En ce qui
concerne la teinture des tissus, l’opération était rendue impossible par le
tabou médiéval lié aux mélanges, cette interdiction ayant été sans doute
imposée par l’église, a la suite d’une certaine interprétation de la Bible. Une
autre impossibilité, cette fois technique, était due ala séparation des métiers,
puisque les teinturiers en bleu métaient pas les teinturiers en jaune, et que les
bains de teintures n’étaient donc pas situés dans les mémes ateliers. Les tissus
Voici ce que l’on trouve dans le traité de chimie de ingénieurs, ilfournit des résultats tres satisfaisants.
Jules Lefort: II sert trés souvent pour la fabrication des pastels. »
pour en extraire le suc. 100 parties de baies donnent sible de Vemployer & Uhuile. Pour préparer le vert de
environ 30 & 35 pour cent d'un suc brun, presque vessie, dans le midi de la France ou dans les environs
notr, que les acides font passer au rouge clair et les de Nuremberg, on cueille les baies du nerprun EP
ee
FI
86
filtrées et soumises a l'évaporation jusqu’a consistance écrivain, il s'intéresse également a la botanique et
d extrait. Cette opération doit étre faite au bain-ma- 4 lagronomie.
rie, en ayant soin d agiter constamment. On ajoute Aprés avoir acclimaté la garance en Normandie, il
alors pour chaque kg d extrait, 65 g d'alun de présente a |’Académie de Rouen un Mémoire sur la
potasse dissous dans une quantité d'eau suffisante. culture de la garance, a une époque ott cette plante
Apres avoir bien mélé, ‘on termine Vévaporation au était la seule source de rouge en Europe pour les
bain-marie. Quand lextrait devient solide par le tissus, et quand cette culture était encore le mo-
refroidissement, on lintroduit dans des vessies de nopole de la Hollande. Il est nommé au poste
pore bien nettoyées, quion suspend dans un endroit dintendant du Jardin botanique de Rouen, ce
sec ott la dessiccation sachéve. qui lui permet d’expérimenter pour lindustrie
Ainsi préparé, le vert de vessie parait noir; mais .textile des plantes indigénes riches en colorants,
sous une faible épaisseur la couleur verte se montre pouvant remplacer les plantes exotiques importées
fort belle. » a grands frais. Durant cette période, il étudie les
colorants contenus dans les fruits de bourdaine et
Charles Ernest Théodat Guignet : en tire de nombreuses satisfactions. II obtient des
« un chimiste haut en couleur » teintes violettes sur la laine 4 partir de décoctions
de fruits m(irs, suivies de ringage dans un bain lé-
D’aprés un recueil Biographies et généalogies gerement acide. Il appelle cette couleur trés solide
haut-marnaises de 2010, Charles Ernest Théodat « prune d’Oissel ».
Guignet est né le 18 janvier 1829 prés de Langres. Il obtient également de magnifiques verts bril-
Aprés avoir été éléve de l’école Polytechnique, il lants quil nomme: « vert de prés naissant », « vert
devient directeur de la manufacture des Gobelins perroquet », « vert canard ». Cette découverte est
tout en entreprenant des recherches sur les cou- d’autant plus remarquable qu'il est trés rare d’ob-
leurs et ses applications dans la chimie industrielle. tenir une couleur verte en un seul bain et a partir
Il existe une couleur qui porte son nom: le vert d'une seule plante puisque traditionnellement de-
Guignet, a base d’oxyde de chrome. Intéressé éga- puis le Moyen-Age, le vert était obtenu par la suc-
lement par l’agriculture en région montagneuse, il cession de deux bains, d’abord un bain de pastel
crée dans son village natal un magnifique jardin pour le bleu puis un bain de gaude pour le jaune.
potager et deux belles fermes. Au moment de la On peut aussi lire dans son livre: « Cest de nos
débacle de 1870, puis de l’effondrement de I’em- ingrédients colorants indigenes, celui qui ma le plus
pire de Napoléon III, il participe a la restauration agréablement récompensé de mes soins. »
de sa ville de Langres, ow il est nommé provisoire-
ment sous-préfet. Aprés l’armistice, il retourne a la
vie civile pour poursuivre ses travaux sur la chimie.
Charles Ernest participe au développement de |’in-
dustrie des tissus imprimés et des papiers peints.
Parmi ses nombreux écrits, nous verrons plus loin:
Recherches sur la composition chimique du vert de
Chine (lokao) publié en 1872.
SUPPLEMENT
AU RECUEIL
DE PROCEDES ET D'EXPERIENCES
Et enfin, présentons pour l'utilisation de la bour- SUR LES TEINTURES SOLIDES
que nos Végéranx indigenes communiquent
daine, l'une des références les plus importantes du aux Laines & aux Loinages,
xvi’ siécle dans le domaine des pigments: Par ML, A. Daunovansy, Négoclane & Rowers
Membre de diverfes Académles & Socieeés.
{MPI GET PUDLIA PAR ORDRE DU GOUVERNEMENT)
tn Tanne M. DOG, LARKIN
rn)
- Louis-Alexandre Dambourney
68 oe & ST gudmovipt reddiad Mirs
Candidus Lmperei ff rons hiswere mec,
Hoxan
et
Les fruits immatures, encore rouges, ont été autrefois abondamment utili-
sés pour teindre des tissus en jaune, grace aux pigments flavoniques qu’ils
contiennent. Cette couleur, trés en vogue au xvii‘ siécle en France, est alors
réputée comme solide et lumineuse. autre nom du nerprun alaterne est
d'ailleurs « nerprun des teinturiers ». Avignon était un lieu important pour
la production des fruits de nerpruns dont était extrait le pigment jaune.
Les fruits étaient commercialisés sous le nom de « graines d’Avignon ».
Rappelons que depuis l’Antiquité, les plantes tinctoriales ont fait Pobjet
dimportants échanges commerciaux entre les civilisations, en tant que ma-
tire premiére pour la teinture des tissus et la fabrication de pigments. En
Provence a partir de la fin du xvii siécle, plusieurs autres plantes tinctoriales
ont été cultivées, en particulier la garance, ainsi que des plantes a indigo
comme le pastel et la renouée.
SR
Le,
CGS
PPR
2G
Srcioeseeramenery
Nerprun alaterne (Rhamnus alaternus),
Stil de grain selon la recette
de Guillaume Cuoco.
90
Les laques fabriquées a partir des graines d’Avignon étaient commercia-
lisées au xvu® siécle sous l’appellation « stil de grain ». Les fruits imma-
tures étaient séchés, puis broyés avec de l’eau et additionnés d’alun. Les
manuels du xvi‘ siécle appellent le nerprun alaterne Lycium gallicum
et mentionnent le stil de grain de Troyes, dans lequel la pate jaune est
mélangée avec du blanc de Troyes, une craie trés fine. La pate était alors
modelée en petits pains tortillés puis séchés pour la commercialisation.
Le stil de grain devait étre tendre et friable, de couleur jaune doré. Cette
laque était utilisée pour la peinture 4 l’huile ou pour les miniatures.
Cette appellation désigne aujourd’hui une couleur particuliére dans la
gamme des nuanciers, un jaune un peu orangé.
Les
—~
& a ae
NY LAI
Voici ce qu’on peut lire dans le traité d’Ernest Voici maintenant une recette moderne, exposée
Guignet, cité plus haut: dans une thése soutenue par Guillaume Cuoco:
Composition
Les écorces de Rhamnacées contiennent un pigment de la famille
des anthraquinones: le chrysophanol. Ce pigment est rouge orangé,
d’un roux flamboyant, et il est présent également dans les racines
de
Polygonacées comme le Rumex ou la rhubarbe.
Dans les fruits matures de plusieurs espéces du genre Rhamnus,
six an-
thraquinones sont présentes (franguline A, franguline B, aloeém
odine,
émodine, chrysophanol et parié¢tine),
Les fruits immatures appelés graines d’Avignon contiennent
des fla-
vonols jaunes (quercitrine, quercétine, kaempferol, rhamné
tine, Jus de baies de nerprun
isorhamnétine).
avec Ou sans potasse.
92
a —
Le parfum des fleurs de Piris est sans doute parmi les plus enivrants des
fragrances du jardin. Plantes vivaces de la famille des Iridacées, les iris ont
les caractéristiques des monocotylédones: feuilles non ramifiées partant de
la base et pourvues de nervures paralleéles.
Les fleurs, hermaphrodites, présentent une symétrie axiale, Cest-a-dire que la
moitié de la fleur est image reflétée dans un miroir de ’autre partie.
Rappelons que l’archétype d’une fleur est le suivant: une corolle avec ses pé-
tales colorés, et en dessous, un calice avec ses sépales verts. Regardons de plus
prés la fleur de iris: les sépales ressemblent a s’y méprendre a des pétales.
On parle alors de tépales. Il y en a 6, ce qui est une caractéristique supplé-
mentaire de la plupart des monocotylédones. Trois tépales sont courbés vers
le haut formant une espéce de voiite protégeant le pistil.
LIR|S DESJARDINS
Les leurs utilisées pour fabriquer une encre verte sont les iris de jardin aux
grandes fleurs d’un bleu violacé trés profond. Pour planter des iris dans le
jardin, rien de plus facile, dans un sol bien drainé et non acide. Mais il leur
faut une exposition bien ensoleillée toute la journée. On les multiplie aisé-
ment par division des rhizomes.
Les nombreuses variétés d’iris de jardin sont sélectionnées a partir de ’espéce
sauvage [ris germanica.
Certains iris sont cultivés pour la parfumerie. C’est le cas de la variété
‘Florentina’ de I’Iris germanica avec des fleurs blanches. Son rhizome séché,
pilé, puis tamisé, donne une poudre trés odorante. La culture de I’Iris pal-
lida & destination de la parfumerie a longtemps été |’apanage de la Toscane.
Le parfum obtenu par la transformation des rhizomes était fort apprécié
de Catherine de Médicis qui en langa la mode. Aujourd’hui, le grand pays
producteur de I’Iris germanica est le Maroc, ot il est cultivé dans l’Atlas, au
sud de Marrakech, sur les terrasses de villages de montagne.
Récolte
Pour faire de l’encre, il est préférable de choisir les fleurs de l’iris des jardins
de la couleur la plus foncée possible, car cela traduit une densité plus élevée
de colorants. La récolte des pétales est faite dés le printemps. Les pétales
d'iris frais peuvent étre congelés, s'ils ne peuvent étre utilisés dés la récolte.
94
Iris des jardins (Iris germanica).
Leur séchage est en effet assez difficile, et il doit étre trés rapide pour éviter
le pourrissement. Il est préférable de nutiliser que les pétales, et donc de se
débarrasser des étamines et du pistil qui pourrait gater la couleur.
Si le jus des pétales broyés est violet, ’'encre obtenue par ajout d’une base,
bicarbonate de soude par exemple, est verte.
Composition
e et la
Les molécules colorantes des fleurs d’iris sont, entre autres, la malvidin
petunidine, deux molécules de la famille des anthocyanidols, des colorants
est
végétaux trés courants. Le signe flagrant de la présence d’anthocyanes
, fait virer
que l’ajout d’acide, comme l’acide oxalique, ou l’acide tartrique
grande
immédiatement le bleu en rose tyrien. Cela explique également la
de sel de
variabilité des résultats en fonction des papiers. A contrario, Vajout
tanins dans les
fer ne provoque aucune réaction, cela montre l’absence de
pétales d’iris.
ées en thérapeu-
Les isoflavonoides des Iris germanica sont parfois employ
toxiques.
tique, alors que les composés des iris jaunes sont
96
Le « vert propre a la mignature » peut aussi approcher de I’ésotérisme pratiqué par
Voici un autre texte de la fin du xvii siécle dans les alchimistes, nomme les recettes: « secrets d’ate-
lequel la recette du vert @iris est mentionnée. liers », C’est pourquoi les informations concernant
A partir de cette époque, que l'on nomme com- par exemple la préparation des couleurs sont si
munément le siécle des Lumiéres, de nombreux rares, et quand elles nous parviennent nous pa-
ateliers privés sont créés afin que soit enseigné raissent si confuses.
Part de peindre. Ces cours sont dispensés parfois
chez des jeunes filles de la « bonne société » dont
les parents veulent parfaire l'éducation, concomi-
tamment a l’apprentissage de la broderie ou de la
musique. Un ouvrage, écrit par Claude Boutet en
1673, est trés connu a l’époque, il est d’ailleurs
ensuite de nombreuses fois réédité. Son titre est
LEcole de la mignature dans laquelle on peut aisé-
ment apprendre a peindre sans maitre. Il traite donc
de lapprentissage de l’art de peindre des minia-
tures. Le terme de miniature désigne les peintures
de petite taille, comme des portraits peints a la
gouache sur des planchettes d'ivoire, trés en vogue i RAL TE
4 la fin du xvur' siécle. DE
MIGNATVRE.
Le passage traitant de la préparation des couleurs
POUR APPREN DRE
et en particulier de la préparation du vert d’iris est aifément a Peindre
celui-ci: fans Maiftre,
AVEC LE SECRET
Secret pour faire du vert propre de faire les plus belles Couleurs ,
Lor bruny , & For en Coquille.
a la mignature (1673) TROISIESME EDITION:
Reveui's corrigée G augmentee, : E :
par F Autheur, 3 Traité de mignature
« Prenez des Fleurs de lys bleués quon appelle autre- ceo Jy. pour apprendre
ment Iris. Séparez-en le dessus, qui est satiné & wen AW PAR LS, Ne aisément 4 peindre
gardez que cela car le reste nest pas bon. Otez-en Chez Cuxtsrorns BALLARD, sans maitre.
méme toute la petite nervure houppée. Pilez dans rut see erg dergiicn : Avec le secret de faire
un mortier ce que vous aurez choisi. Etant bien pilé, M. DC. LXXXXVI. les plus belles couleurs,
jetez dessus un peu d eau, trois ou quatre cuillerées, Aves Privilege du Rey, Vor brunny & Vor
en coquille.
plus ou moins selon la quantité de fleurs que vous
aurez. Ilfaut que vous ayez fait fondre, dans cette
eau, un peu dalun & de gomme d’Arabie, mais fort 156 Secrets
peu. Ensuite, broyez bien le tout ensemble, puis le LE VERD DIRIS.
passez dans un linge de toile forte. & mettez ce jus Prenez des Fleurs de Lys les plus
dans des coquilles, que vous ferez sécher a lair, non bleugs, qu’on appelle autrement Iris ow
Flammes ; feparez-en le deffus qui eft
pas au soleil. » fatiné, & n’en gardez que cela, car le
refte n’eft pas bon, oftez-cn mefine toute
ja petite Nexvdire jaune, Pilez dans un
Mortier ce que vous aurez choify, eftany
bien pilé jettez deflus un peu d'eau,
Ici encore, il n’est pas fait mention de l'emploi trois ou quatre cuillerées plus ou moins
dune base pour faire virer le bleu au vert. Il est felon la quantité des Fleurs que vous
aurez: Il faut que vous ayez fait fondre
courant que les recettes anciennes soient incom- dans cette Bau un peu d’Alun, & de
Gomme Arabie, mais fort peu, enfuite
plétes. Les corporations, communautés d’artisans broyez bien le rout enfemble, puis le
Filtrer la préparation.
Jeu dencre:
iris et bois de campéche. Jeux d’encre @iris.
99
Pétales d’iris bleu macérés dans l’eau pure. Ajout d’alun, Ajout de grains
de bicarbonate de soude d’acide tartrique.
et de gomme arabique.
Fleurs @iris bleu séchées Ajout de grains d’acide tartrique. Ajout de bicarbonate
et réhydratées. de soude.
100
Jeux d’encre a base de fleurs d’iris bleu.
102
Récolte de V’iris des marais.
Fleur et rhizomes de ’iris des marais.
Le noyer est planté isolément dans le jardin car il a besoin de beaucoup d’es-
pace pour se développer. De plus, les feuilles tombées au sol contiennent des
composes qui bloquent la germination des autres plantes, c’est pourquoi peu
de plantes se développent autour d’un noyer. Certaines sont moins sensibles
comme le muguet ou la violette. Sur l’arbre, les feuilles dégagent un parfum
délicieux et enivrant.
Ses fleurs sont sensibles au froid. Le noyer est une espéce monoique: les
fleurs males et femelles sont séparées, mais portées par le méme individu.
Les fleurs males forment de longs chatons pendants, isolés, assez denses, sur
les rameaux de l’année précédente. Les fleurs femelles sont petites, dressées,
et forment des groupes d'une a quatre fleurs sur les rameaux de l'année en
cours. Chacune comporte deux larges stigmates courbés vers l’extérieur.
Il existe plusieurs espéces de noyer mais le noyer commun (Juglans regia L.)
est le plus courant en France. Le noyer commun a un tronc court, recouvert
d'une écorce gris-blanc et lisse, fissurée en vieillissant. Le noyer est cultivé
depuis l’époque gallo-romaine pour son bois et ses fruits comestibles.
104
Fruits du noyer. Brou de noix séché.
LE BROU DE NOIX
Dans Veuvre des peintres
Le brou de noix est souvent utilisé pour les lavis. La teinte du brou de noix
est réputée parfois plus chaude que le bistre (fabriqué a partir de la suie).
Le peintre famand du xvi siécle Rembrandt van Rijn a donné de magni-
fiques exemples de lavis réalisés avec le brou de noix.
Sans doute moins utilisé par les artistes que l’encre de Chine, le brou de
noix offre cependant une force d’expression remarquable. Il est Pun des ma-
tériaux de prédilection du peintre contemporain Pierre Soulages et il est
méme considéré comme un marqueur de son ceuvre. Entre 1947 et 1949,
Soulages réalise une cinquantaine d’ceuvres sur papier avec des lavis de brou
de noix. Il affectionne ce médium pour sa couleur, allant du brun au noir,
son pouvoir teintant et sa texture trés fluide. Le peintre utilise des outils peu
conventionnels comme des brosses de peintre en batiment pour effectuer de
larges traces structurées.
Yann Hendgen‘
Récolte
Lenveloppe charnue des fruits, le brou, est récoltée a |’automne au moment
ot les fruits tombent de l’arbre. Si est possible, il est préférable de la récol-
ter quand elle est encore verte, avant l’oxydation qui la fait devenir noire.
Dans certaines recettes, il est préconisé de mettre le brou dans un bocal et
de le couvrir d’eau puis de le laisser fermenter pendant un an ou deux a une
température douce. Le brou de noix fermenté donne un jus épais et poisseux
assez difficile a filtrer.
Si les pigments sont trés concentrés dans le brou, ils sont aussi présents en
grande quantité dans les feuilles, l’écorce des branches et les racines. Aprés
décoction ou macération, on obtient des tons de brun et de fauve.
Le brou de noix est commercialisé sous forme de poudre, ou dilué dans l’eau
et conditionné en bouteilles. Il est trés utilisé en ébénisterie pour teindre les
bois clairs. Pourtant aujourd’hui, ce qui est vendu sous l’appellation « brou
de noix » est en fait de l’extrait de Cassel, une sorte de charbon. Pour fabri-
quer l’encre brune avec de la poudre de brou de noix du commerce, il suffit
de la diluer dans un peu d’eau puisqu’elle est soluble dans l'eau.
Composition
Le colorant spécifique du noyer est la juglone, colorant de la famille des
naphtoquinones. Les naphtoquinones se rencontrent aussi dans le régne ani-
mal, essentiellement chez les oursins. Chez les végétaux, la naphtoquinone
la plus simple est la lawsone des feuilles de henné (Lawsonia inermis). La
juglone du noyer est un isomére de la lawsone, c’est--dire que leurs formules
sont identiques mais que leurs formes dans lespace different.
3 Extrait du catalogue Collection art graphique - La collection du Centre Pompidou, Musée national
d art moderne, sous la direction de Agnés de la Beaumelle, Paris, Centre Pompidou, 2008
4 Historien de l'art. Assistant du peintre Zao Wou-Ki (en 2007)
5 Extrait du poéme Pan du recueil Les fewilles d’automne de Victor Hugo, 1831
106
experimentation dans [ntelier
Recette
de Vencre de brou de noix Le brou de noix, soluble dans l’eau, fournit une
couleur solide et durable. Cette couleur a d’ailleurs
Proportions pour environ 10 cl dencre: été rangée dans la catégorie des couleurs « grand
- 20 g de brou de noix sec teint » au xvil° siecle. A cette époque, le gouver-
- 50 cl d'eau nement de Colbert avait commandité une étude
- Conservateur pour déterminer quelles étaient les substances
. qui fournissaient des couleurs solides et celles qui
° Ramasser les enveloppes des fruits du noyer, quand fournissaient des couleurs moins solides. Ces der-
elles sont encore vertes, et les faire sécher. niéres étaient parfois tout de méme intéressantes,
° Passer le brou sec au moulin a café pour obtenir soit parce qu elles donnaient une couleur ou un
une poudre fine. éclat inédit, ou parce que leur prix était moins éle-
° Tamiser la poudre et la peser. vé. Le terme « grand teint » est donc réservé aux
° Mélanger la poudre avec un demi-litre substances fournissant des couleurs qui résistent 4
deau de pluie. la lumiére et au lavage.
° Faire bouillir doucement le mélange jusqua Le brou de noix est parfois utilisé comme teinture
évaporation des 4/5. pour les cheveux. Sur les cheveux blonds, il per-
¢ Filtrer. mettrait d’obtenir une trés jolie couleur « dorée
° Ajouter un conservateur. soleil », lumineuse et naturelle. Associé au henné
naturel, il est censé apporter un reflet auburn et
Lajout d’alun est a proscrire car il fait floculer le une touche dorée plus ou moins accentuée selon le
mélange qui devient moins couvrant. Lajout de dosage. Pour cela, il suffirait de mélanger un peu
gomme arabique l’épaissit mais sans lui donner d’eau a la poudre de brou de noix, jusqu’a obtenir
plus d’opacité. Pour foncer la teinte, il est utile de une pate qui ne coule pas, et de l’appliquer sur les
concentrer la solution. En revanche, |’ajout de sul- cheveux pendant 30 minutes, ou plus selon l’effet
fate de fer est sans effet. Lajout de potasse ne rend escompte. A tester!
pas la teinte plus lumineuse et ne fait pas ressortir
le jaune des flavonoides.
108
d'information provient du travail réalisé en 1552 par Martinus de la Cruz
et Johannes Badianus. Ce texte, appelé Codex Badianus fut d’abord rédigé
phonétiquement en nahuatl, la langue indigéne du Mexique, qui était la
langue des Aztéques. De la Cruz et Badianus étaient tous les deux des Indiens
aztéques. Ensemble, ils ont suivi les enseignements des moines franciscains
au collége de Santa Cruz de Tlatelolco, prés de Mexico. Johannes Badianus a
traduit ensuite le texte en latin. Ce manuscrit était abondamment illustré, ce
qui a permis plus tard d’identifier les nombreuses plantes qui y sont décrites.
Les plantes tinctoriales sont nombreuses mais ne fournissent pas toutes des
colorants d’une grande stabilité et d'une belle luminosité. C’est pourquoi
elles ont été classées au xvi‘ siécle en couleurs « grand teint » et « petit teint »
selon la solidité de la couleur obtenue. Selon l’article consacré a la teinture
dans I’Encyclopédie de Diderot, les jaunes répertoriés comme grand teint sont:
la gaude, la sarrette des teinturiers, les bois jaunes tinctoriaux (fustet, marier
des Antilles, ’écorce du chéne quercitron d’Amérique du Nord), et enfin la
génestrolle (ou genét des teinturiers). La gaude ou réséda des teinturiers était
la plante européenne la plus utilisée au xvit siecle pour le jaune: les parties
les plus riches en colorants étant la tige, les feuilles et l’enveloppe des graines.
Récolte
En ce qui concerne la gaude, ce sont les enveloppes des graines qui
contiennent le plus de colorants. Arracher la plante entiére juste aprés la
formation des graines, dter les racines, faire sécher la plante a l’air. Si l'on ne
dispose pas de la plante fraiche, il est possible de commander la gaude sous
forme de plante broyée chez un fournisseur de colorants. Pour les autres
plantes, ce sont les pétales jaunes qu'il faut récolter. Il est préférable d’utiliser
les fleurs fraiches; toutefois, il est possible de les récolter au fur et mesure
quand elles commencent a faner, et de les utiliser dés la fin de la récolte.
Une petite précision anatomique: ce que lon récolte sur les plantes de la fa-
mille des Astéracées pour fabriquer une couleur, ce sont les fleurs ligulées. En
effet pour ces plantes, les inflorescences sont composées de multiples fleurs
disposées sur un capitule: les fleurs ligulées (en forme de languette) en péri-
phérie (un peu, beaucoup, passionnément...) et les fleurs tubulées au centre.
Composition
Toutes les molécules de la vaste famille des flavonoides ne sont pas aussi
stables les unes que les autres. La lutéoline ou la quercitrine sont parmi les
plus solides. La lutéoline est le principe colorant étudié pour la premiére
fois par un chimiste au xix‘ siecle. Cette étude est due au célébre chimiste
francais Michel-Eugéne Chevreul (1786-1889). Le savant a baptisé cette
substance A partir du nom latin de la plante qui en contient une grande
quantité: la gaude ou Réséda luteola. La lutéoline est contenue également
dans les fleurs de sarrette, de camomile, d’achillée millefeuille, de tanaisie,
En
et les fleurs des genéts. La lutéoline est enti¢rement soluble dans l'eau.
elle donne
présence d’une base, potasse, soude, ammoniaque, chaux, baryte,
foncé trés belle. La quercitrine est contenue entre autres
une couleur jaune
dans les leurs de solidage ou l’écorce de quercitron.
mise en ceuvre
Nous ne prendrons ici que quelques exemples de plantes, la
4 partir d’autres pétales jaunes étant similaire.
es
LES COULEURS - Du jaune avec les plantes a flavonoid
109
LE TOPINAMBOUR
Le topinambour est une fleur trés commune dans les jardins car il se mul-
tiplie spontanément. II ne demande aucun soin et illumine en fin d’été les
fonds de jardin par ses hautes fleurs jaune vif. Son nom latin, Helianthus
tuberosus, indique que cette plante est proche du tournesol Helianthus an-
nuus de la méme famille des Astéracées (anciennement Composées). Le to-
pinambour est aussi cultivé pour ses racines consommeées en légume. Toute
la plante présente une odeur caractéristique d’artichaut, y compris les fleurs.
110
ri
¢
4
" tee
SS
’
estar
LL. oo Sle
La Semahet
Recette
de la laque de gaude
° Faire chauffer pendant un quart d‘heure a 70 °C. Le esRe associé al’ cee décante
° Filtrer. au fond du récipient.
* Ajouter Valun et mélanger. Lalun est en quantité
suffisante quand la majorité du colorant dissous est
précipitée par lalun et que le liquide qui surnage
devient plus clair.
* Ajouter progressivement la craie en poudre fine
au liquide.
* Laisser le précipité décanter au fond du récipient,
puis le récupérer pour lefaire sécher sur des larges
récipients plats, ou des filtres posés a plat, comme
des chassis de toile.
° Réduire en poudre fine dans un mortier.
Eaet
Seas
haiesmetanteenaatas
112
—
Encre de fleurs Fleurs de carotte sauvage Encre de fleurs de genét.
de carotte sauvage. macérées dans |’eau de cendres.
z
'‘
113
du violet = TINCTORIAUX,
EXO Giies
Il existe quelques arbres tropicaux dont le bois de tronc est rouge et dont
les colorants sont solubles. Ces bois ont été d’une grande importance dans
Pindustrie des colorants, pour la teinture des tissus et pour la fabrication
des encres des enluminures. Certains de ces bois ont été importés d’Ex-
tréme-Orient jusqu’en Europe. Puis d’autres ont été importés du continent
américain apres la découverte du Nouveau Monde par les navires portugais.
Bien que le parti pris de cet ouvrage soit de traiter des plantes trouvées lo-
calement dans les campagnes frangaises, nous consacrons ici un chapitre a
ces bois tinctoriaux: les recettes utilisant ces plantes sont si nombreuses et si
anciennes qu’elles peuvent difficilement étre ignorées, méme si utilisation
de bois tropicaux n’est plus recommandeée.
Voici les quatre principales espéces de ces arbres, appartenant toutes a
la famille des Fabacées, que l'on nomme également légumineuses ou
Papilionacées, et dont les fruits sont des gousses:
- bois de sappan (Caesalpinia sappan)
ORIGINE: Asie du Sud-Est, COLORANT PRINCIPAL: braziline
- bois de pernambouc ou bois brésil (Caesalpinia echinata)
ORIGINE: nord-est du Brésil, COLORANT PRINCIPAL: braziline
- bois de campéche (Haematoxylum campechianum)
ORIGINE: Mexique, COLORANT PRINCIPAL: hematoxyline
- santal rouge (Pterocarpus santalinus)
ORIGINE: sud de I’Inde, COLORANT PRINCIPAL: santaline
LE BOIS DE SAPPAN
Le sappan est un arbuste épineux a feuilles persistantes, pouvant atteindre
3 a6 métres de hauteur. Il pousse sur les collines d’Asie du Sud-Est. Utilisé
pour la fabrication d’encre rose ou rouge, le colorant du bois de cceur est
également employé en médecine traditionnelle comme antidouleur,
Pour obtenir le colorant, la braziline, il est nécessaire de réduire d’abord le
bois en petits morceaux. La braziline doit s’oxyder au contact de l’air. Puis
le bois en morceaux est mis & macérer dans l’eau pendant une journée. Le
mélange est mis a bouillir durant une heure, puis filtré. Le bois subit encore
deux extractions supplémentaires. Les trois décoctions sont ensuite mélan-
gées. Au Japon, la poudre est d’abord mise & fermenter pour augmenter son
pouvoir tinctorial.
114
Les anciens ajoutaient de l’urine ou de la soude dans leur préparation. En
5) os 5) * . ) .
effet, addition d’alcalis forts permettait d’obtenir des tons rouge cramoisi
alors qu’avec des acides on obtenait des roses vifs.
LE BOIS DE PERNAMBOUC
OU BOIS BRESIL
Si nous pouvions comparer les anciennes garde-robes des Européens, celles
du Moyen-Age et jusqu’a la fin du xv* siécle, & celles d’aujourd’ hui, nous per-
cevrions les teintes des premiéres comme ternes (nonobstant la regrettable
prédominance actuelle du noir dans ’habillement des citadins). La gamme
des couleurs sur les tissus des vétements comportait essentiellement des
gris, des jaunes et des bruns. Plus rares, les rouges, les bleus et les pourpres
étaient réservés 4 quelques habits, au sein de l’Eglise ou de la cour royale.
Larrivée des Portugais et des Anglais en Amérique centrale a révolutionné
la palette des couleurs possibles pour les teintures en Europe, grace a la dé-
couverte botanique des arbres tinctoriaux américains. Avant cela, les rouges
du Moyen-Age étaient extraits principalement de la racine de garance, et du
bois de coeur du bois de sappan asiatique. Ce bois était importé d’Inde et
du Sri-lanka mais de facon trés limitée. La couleur était un beau rouge flam-
boyant appelée en francais « charbon ardent » puis « braise » puis « brasil »
en portugais. Au xi‘ siécle, dans les grandes villes drapiéres flamandes, le
métier de « tailleur de brésil » consiste 4 réduire ce bois en poudre pour les
besoins des teinturiers. A partir de 1500, les Portugais, en s'emparant des
territoires le long de la céte atlantique de lAmérique du Sud, découvrent les
bois tinctoriaux utilisés par les autochtones. Les arbres qui produisent ces
bois rouges y poussent abondamment. A partir de ce moment, les navires
marchands fournissent aux Européens des colorants trés populaires pour les
teintures sur tissu et pour les encres. A cause de ces arbres tinctoriaux, les
territoires colonisés sont désormais appelés « Terra de Brasil » et plus tard le
Brésil. Le commerce est trés florissant, et les navires portugais qui font route
vers Europe, chargés non seulement d’or et de bijoux, mais aussi de ces pré-
cieux colorants, sont la cible des boucaniers et des maraudeurs de haute mer.
Ce passage est traduit par: « Le lendemain, de grand matin, l’héte se léve, fait
porter devant lui, au lit du gargon, chemise et braies de toile fine, chausses
teintes en rouge de brésil, cotte de drap de soie tissé en Inde. »
Pour en revenir 4 l’Amérique du Sud, le terme Pau-brasil est employé par les
premiers colons portugais depuis 1500. Ce terme désigne spécifiquement
larbre de pernambouc, depuis que les colonisateurs ont associé cet arbre et
linvocation d’un esprit de la forét par les Indiens autochtones.
116
Nous avons déja mentionné le tome des manuels Enfin, voici ce que dit le traité de chimie des cou-
Roret consacré 4 la fabrication des encres. Voici leurs de Jules Lefort (1855):
donc une nouvelle recette:
118
SD
77
~
& Missa
ce
Glee
a
>
wi
aa i t sa TUNIS
i
Hin
Ha
KN
evecseness
S=ssless =e" --
it
he. :
Fig. 291. — Branche de bo is de Camptc te ®
exotiques
LES COULEURS - Du violet avec les bois tinctoriaux,
119
grande quantité contenus dans le bois réagissent vivement avec l’acétate de
fer, ou le sulfate de cuivre, pour donner des noirs trés stables, et des bleus
violet trés foncé.
Il est facile de distinguer une encre au campéche d’une encre a la noix de
galle: sous l’action de l’acide chlorhydrique, |’encre au campéche se colore
en rouge rose trés vif.
Composition
Le colorant du bois de campéche est I’hématoxyline, un composé phéno-
lique de la famille des flavonoides. Sa formule est quasiment identique a
celle de la braziline, le colorant du bois brésil. Lhématoxyline est facile a
extraire du bois en faisant bouillir les copeaux dans l’eau. Le bois est a l’ori-
gine faiblement coloré, mais hématoxyline quil contient est oxydée en
hématéine en présence d’oxygéne de l’air et prend une teinte rouge vif. De
nombreuses couleurs sont obtenues en fonction des réactifs que l’on ajoute:
orange, rouge vif, violet, vert émeraude. Le sulfate de cuivre donne un bleu
violet, le sulfate de zinc un violet foncé, le chlorure d’azote un orangé doré,
le chlorure de mercure un rouge orangé, le chlorure d’antimoine du pourpre,
l’acétate de plomb du bleu, l’arséniate de potasse un jaune profond, le nitrate
de baryum un violet brunatre et le chlorure de baryum un violet rougeatre.
Lajout d’ammoniaque fait virer en violet foncé et vert, alors qu un acide
dilué accentue la couleur rouge. La présence d’une quantité considérable de
tanin dans la solution rouge violacée permet a l’extrait de réagir avec les sels
de fer pour donner une couleur noire permanente. Divers mordants sont
souvent utilisés pour rendre la couleur plus persistante, tels que l’alun, le vi-
naigre et la creme de tartre. Lhématoxyline et I"hématéine sont actuellement
couramment utilisées pour les analyses en biologie médicale.
p. 120:
« Campéche en copeaux... 750 g
Alun de Rome... 30
Gomme arabique... 30
Sucre candi... 15
Faire bouillir le tout dans 6 litres d'eau pendant
I heure, laisser reposer pendant 2 a 3 jours, et passer
ensuite a travers un linge. »
Le manuel précise: « Plus cette encre vieillit, plus sa
qualité saméliore. »
experimentation dans teller
Recette de l’encre violette
ee
au bots de campéche
LE BOIS DE SANTAL
Larbre qui fournit le bois de santal est originaire du Sud-Est de I’Inde. Sa
croissance lente conjuguée a son exploitation depuis le xvii‘ siécle menacent
la survie de lespéce. Il faut donc dorénavant éviter d’exploiter cet arbre.
Néanmoins, on peut trouver (comme sur la photo ci-dessus) un sac de
poudre de bois datant d’anciens ateliers d’ébénisterie, car ce pigment était
utilisé autrefois pour teindre les bois clairs.
Le santal rouge ne doit pas étre confondu avec le santal blanc, Santalum al-
bum, un petit arbre tropical de la famille des Santalaceae, trés connu pour ses
propriétés odoriférantes. Cette espéce est en effet cultivée pour fournir des
huiles essentielles, extrémement recherchées d’une part pour leurs propriétés
en phytothérapie, et d’autre part pour la parfumerie.
Le santal rouge est nommé caliatour dans l'article sur la teinture de l Encyclo-
pédie de Diderot, et il est classé dans les plantes « grand teint », Cest-a-dire
solides a la lumiére.
Composition
Le bois de santal rouge contient une grande quantité d’un colorant appelé
santaline, de la famille des flavonoides, ainsi que d’autres colorants de la
méme famille. Il contient aussi une bonne quantité de tanins. La présence
de résines dans le bois rend ces colorants insolubles dans I’eau.
122
experimentation dans [atelier
Il existe deux procédés d’extraction: soit avec de
Palcool, soit avec une solution alcaline.
123
| du. tO AVEC LA GARANCE
A PREMIERE COULEUR NATURELLE
La grande famille botanique des Rubiacées doit son nom 4 la couleur rouge:
en effet Rubia signifie rouge en latin. Les colorants rouges sont contenus
dans |’écorce des racines de toutes ces plantes. Vespéce la plus intéressante
pour sa teneur en colorants est la garance tinctoriale, une longue plante her-
bacée vivace. Ses tiges peuvent atteindre 1,50 m et sont munies d’aiguillons
souples qui lui permettent de s’agripper aux autres plantes et de prendre de
la hauteur. La section de la tige est quadrangulaire. Les feuilles sont verti-
cillées, c’est-a-dire que plusieurs feuilles sont insérées périodiquement au
méme niveau autour de la tige. A l’automne, la partie aérienne disparait,
seule la racine survit, a l’abri dans le sol pendant toute la période hivernale.
La garance des teinturiers Rubia tinctorum L., contrairement 4 sa cousine
sauvage la garance voyageuse (Rubia peregrina L.), nest pas spontanée en
Europe, mais elle y est cultivée depuis des siécles. Ses racines sont plus
épaisses que celles de la garance voyageuse, dont les racines sont fines néan-
moins riches en colorants. La garance sauvage est commune dans l'Europe
méditerranéenne, ow elle tapisse les sous-bois et grimpe dans les haies.
Les racines des autres plantes de la famille des Rubiacées indigénes, 4 savoir
les aspérules, les gaillets et les caille-lait fournissent également des colorants
rouges. Mais ces racines sont fines et trés difficiles 4 récolter surtout lorsque
le sol est compact comme le sol argileux.
"124
Champ de garance cultivée prés de Niort en
Au xvii‘ siécle, les toiles de coton imprimées (on dit aussi « peintes ») avec de
la garance sont trés a la mode. La Compagnie des Indes, créée par Colbert en
1664, commercialise ces fameuses « indiennes » importées d’Orient. Légéres
et colorées, elles ont énormément de succés aupres du public et sont plus ap-
préciées que les toiles de chanvre ou de lin. A la mort de Colbert en 1686, le
ministre Louvois réagit 4 cet engouement par des interdictions et des confis-
cations. I tente de défendre les manufactures frangaises productrices de tex-
tiles 4 base de soie, de lin ou de chanvre, par exemple les fameuses soieries de
Lyon. Les indiennes en coton ne pouvant plus étre fabriquées en France sont
alors fabriquées par des protestants en Suisse, puis en Alsace qui ne fait pas
encore partie a cette époque du royaume frangais, et en Angleterre. VAlsace
restera une région productrice de garance pendant un siécle.
En 1759, la situation se débloque enfin, et la prohibition des indiennes
prend fin. Un jeune suisse, Oberkampf (1738-1815) crée la manufacture
de Jouy-en-Josas dans les Yvelines, qui produit la célébre toile de Jouy. Les
motifs sur le tissu représentent de charmantes scénes bucoliques, avec ber-
géres et bergers a la mode de I’époque. La teinture des tissus par les colorants
rouges de la garance est favorisée par la nature chimique particuliére de l’eau
de la Biévre, cette rivitre qui serpente de Jouy-en-Josas a la Seine.
126
soieries de Lyon. Il organise la culture de la garance dans les marais asséchés
du comtat Venaissin en 1770 et finalement meurt assez misérablement en
1774. Il légue pourtant a la région du Roussillon une culture qui va faire sa
richesse pendant une centaine d’années, jusqu’en 1869. A cette époque, le
Vaucluse produisait 25000 tonnes de poudre de garance, qui était broyée
dans des moulins a garance le long de la Sorgue.
Culture et récolte
La culture de la garance nécessite une terre légére et profonde. La terre doit
étre préparée et retournée a une profondeur d’au moins 50 centimetres. Le
semis est effectué en mars. Des sarclages permettent ensuite de lutter contre
les mauvaises herbes. La teneur en colorants des racines est faible la premiere
année et ne devient intéressante qu’au bout de trois ans. La récolte ne peut
donc avoir lieu qu’aprés plusieurs années. La plante peut étre laissée en terre
une dizaine d’années. Elle est alors arrachée en automne pour la récolte des
racines, qui peuvent s’enfoncer jusqu’a 70 centimetres de profondeur. Les
racines sont séchées au soleil ou dans des greniers, débarrassées de la terre
et des radicelles puis broyées. La poudre de garance est conservée a l'abri de
Phumidité, et se bonifie avec le temps.
Composition
Les deux pigments principaux de la garance sont des molécules de la fa-
mille des anthraquinones appelées alizarine et purpurine. Les colorants de
cette famille ont tous le méme squelette de base, auquel s'ajoutent différents
quantité
groupements hydroxyles, carboxyle, etc. Ils se trouvent en grande
différente s teintes de rouge,
sous l’écorce des racines. Ces colorants offrent
racines de tanins qui
rose, orangé, pourpre. Ils sont accompagnés dans les
contribuent a foncer la couleur.
- 10 g de racines de garance
- 400 ml d'eau distillée
- 10 gdalun dissous dans 50 ml d'eau
- 10 g de carbonate de calcium (craie en poudre ou
poudre de marbre ou blanc de Meudon)
128
COMPLEMENTS
D'INFORMATION
LES LAQUES
Le terme « laque » recouvre plusieurs no- résine naturelle qui sert de vernis dur avec
tions distinctes. Nous avons eu affaire dans de multiples applications. La gomme-laque
cet ouvrage a la notion de composé associant est de couleur jaune ambrée, sous la forme
un pigment organique et un ion métallique. de paillettes. Il est nécessaire de dissoudre
Pour éviter les confusions, détaillons rapide- cette résine dans de l’alcool 4 95° avant uti-
ment les autres significations du terme laque: lisation. La gomme-laque est surtout utili-
- Un laque, au masculin, est un objet fait en sée en ébénisterie et en lutherie, et dans la
bois ou en un autre matériau, d’abord enduit fabrication d’encres de Chine. Au début du
puis recouvert de multiples couches de pein- xx® siécle, elle est a la base de l'industrie du
ture dont chacune est poncée finement avant disque 78 tours, avant d’étre remplacée par
application de la suivante. I] en résulte une la bakélite.
surface exceptionnellement douce au toucher.
Ces objets proviennent de Chine ou du Japon Cette cochenille produisant de la laque ne
ou ils sont fabriqués depuis des millénaires. doit pas étre confondue avec une autre coche-
- Une laque au féminin est une résine natu- nille: la cochenille du rouge. En Amérique
relle sécrétée par un insecte, la cochenille a centrale et Amérique du Sud, les civilisations
laque, et c'est également une résine sécrétée précolombiennes, indiens Aztéques, Incas et
par une plante, le laquier. Mayas, extrayaient de ces insectes un somp-
tueux colorant « rouge carmin ». Cette coche-
LA COCHENILLE A LAQUE nille Dactylopius coccus vit sur un cactus nopal,
La cochenille est un petit insecte qui parasite Opuntia ficus-indica. Linsecte produit de
les plantes, comme on peut en déceler par- Pacide carminique pur, une anthraquinone.
fois sur nos plantes d’intérieur. Il en existe Ce colorant naturel intense est utilisé entre
de multiples espéces. La cochenille 4 laque autres pour la teinture des tissus car la couleur
sappelle Kerria lacca. Elle colonise les ra- est résistante au lavage. Au Pérou, ce colorant
meaux de plusieurs plantes-hétes exotiques, a été identifié dans des tissus datant d’envi-
par exemple le jujubier Zizyphus mauritiana, ron 400 avant notre ére.
ou le figuier des pagodes Ficus religiosa. Les
cochenilles, fixées en colonie nombreuse sur Il existe une autre cochenille produisant du
la plante héte, produisent une sécrétion qui rouge: le Kermés des teinturiers. Cette
les protége. C’est cette sécrétion que l’on cochenille Kermes vermilio vit sur le chéne
nomme gomme-laque. Les cochenilles sont Kermés, Quercus cocciféra, une espéce de chéne
tellement serrées les unes contre les autres méditerranéenne. Elle est également connue
quelles forment un manchon de laque ca- depuis la plus haute Antiquité, comme source
ractéristique. En Inde et en Chine, cette d’un magnifique colorant rouge. Le colorant
laque est exploitée depuis des millénaires. est un mélange d’une anthraquinone, I’acide
Elle est composée essentiellement d’une kermésique, et de l’acide laccaique D.
132
.
*
Gomme-laque. Chéne Kermés.
134
LIMPORTANCE DU PAPIER
DANS LE TRAVAIL
AVEC LES ENCRES VEGETALES
135
VOLUMEN ET CODEX en pulpe de bambou, en fibres de miirier,
Le rouleau de papyrus que l’on déroule d’un puis en fibres de chanvre ou de lin. Vers le
axe de bois a l’autre est appelé volumen. Le vit siécle, lorsque les civilisations chinoises
parchemin se présente également sous la et musulmanes s’affrontent sur la route de la
forme de rouleau jusqu’au IV siécle environ. soie, les secrets de fabrication du papier sont
Mais progressivement est adoptée une autre découverts par les Arabes. Cette découverte
forme pour le parchemin: le codex, consti- contribue alors 4 l’avénement de |’4ge d’or is-
tué de feuillets, écrits au recto et au verso, ce lamique et a la diffusion du Coran. Fabriqué
qui nest pas possible pour le papyrus. Cette d’abord a Bagdad, il est ensuite largement uti-
forme serait inspirée des tablettes de bois re- lisé en Espagne a l’époque des Omeyyades, et
couvertes de cire reliées entre elles par de la Cest ainsi quil parvient jusquen Europe au
corde. Les feuillets de peaux, pliés générale- xI° siecle. On le retrouve enfin en France au
ment en deux ou en quatre, sont reliés en- début du xiv‘ siécle.
semble en cahiers par une couture et protégés
par une couverture. Cette forme s’impose pe- Linvention de l’imprimerie par Gutenberg
tit a petit car elle est bien plus pratique pour en 1440 marque un essor de la fabrication
la lecture et aussi pour le rangement dans une du papier en Europe, d’autant que celui-ci
bibliothéque. Les pages que l’on peut tourner est utilisé par l’Eglise réformée comme sup-
dans un sens ou dans l|’autre, auxquelles on port de diffusion de sa doctrine. En France,
peut accéder directement, qui sont numéro- les artisans papetiers sont majoritairement
tées et indexées par une table des matiéres, protestants. Mais la révocation de l’édit de
tous ces facteurs contribuent al’essor du codex Nantes par Louis XIV en 1685 provoque
et a l’abandon du volumen. II faut ajouter a l’exil de nombreux protestants et met fin a
cela d’autres avantages, comme le fait de pou- ’hégémonie de la France en ce qui concerne
voir annoter dans les marges, ou insérer des la fabrication du papier.
marque-pages. A partir du Vv‘ siécle, le parche-
min sous la forme codex supplante totalement LES QUALITES DU PAPIER
le papyrus et la forme volumen, tout au moins Le papier est fait de fibres de cellulose enche-
pour les écrits importants. Le codex s'adaptera vétrées, agglutinées par des liaisons de type
ensuite trés bien au support papier et méme a hydrogéne. La cellulose est elle-méme un
Pinvention de l'imprimerie. polymére, cest-a-dire un enchainement d’un
trés grand nombre de molecules de glucose.
Le papier se présente sous forme de feuilles
minces. La cellulose provient aujourd’hui
LE PAPIER et depuis le xix* siécle essentiellement des
arbres: bois de résineux ou de feuillus. Les ré-
Alors qu’en Occident, le support de l’écri- sineux proviennent pour la France de la forét
ture est encore pendant plusieurs siécles le des Landes. C’est le papier kraft, trés résistant
Papyrus ou le parchemin, les Chinois uti- et réservé aux emballages. Le bois de feuillus
lisent le papier, dont ils ont inventé la fa- est réservé aux supports de ’écriture. Les pa-
brication vraisemblablement des le 11° siécle piers haut de gamme sont fabriqués 4 la main.
avant notre ére. autre support de I’écriture
pour les artistes chinois de cette époque était Le grammage est le poids du papier par uni-
la soie. Progressivement au cours des siécles, té de surface, le métre carré en Poccurrence.
la fabrication du papier est perfectionnée Le papier le plus classiquement utilisé dans
pour fournir des papiers de grande qualité, a les bureaux a un grammage de 80 g/m?, ce
la fois fins et résistants. Ce sont des papiers qui implique qu'une feuille de dimension A4
136
(21 x 29,7 cm) aun poids de 5 g (bon a savoir papier, qui serait due par exemple a une at-
lorsque l’on timbre une lettre postale...). Un mosphére polluée par du dioxyde de soufre.
papier trés fin comme le papier a cigarette est De plus, la pulpe du bois est mélangée main-
caractérisé par un faible grammage: jusqu’a tenant avec de la craie, ce qui réduit égale-
12 g/m’. Le papier journal fait environ 42 g/ ment l’acidité naturelle du bois.
m’. Le papier aquarelle est plus lourd: de 300
4 600 g/m’. Des études sont menées actuellement pour
produire des peupliers génétiquement mo-
La porosité du papier est en lien avec la difiés dont le bois comporterait moins de li-
quantité d’air quil contient. Elle est trés gnine et serait ainsi exclusivement destiné a
grande dans le cas du papier absorbant ou lindustrie papetiére. Cette méthode, comme
du buvard. Afin de diminuer la porosité du toutes les manipulations génétiques, com-
papier, et d’augmenter son opacité, l’ajout porte des risques pour la biodiversité et les
de pulpe de betterave a la pate 4 papier se- arguments justifiant ces recherches devraient
rait une voie de valorisation de ce déchet de donc étre débattus au sein de la société.
Pindustrie sucriére.
LE BLANCHIMENT DU PAPIER
Le papier posséde une acidité naturelle La fabrication du papier a été une importante
procurée par la présence de lignine dans source de pollution, mais de nombreuses
sa composition. La lignine est le deuxiéme améliorations ont été apportées, en parti-
constituant du bois des arbres, avec la cel- culier en ce qui concerne la consommation
lulose. C’est la lignine qui donne sa rigidi- d’eau, et également lors du processus de blan-
té au bois. La fabrication de la pate 4 papier chiment des pates a papier. La couleur origi-
consiste a éliminer le plus possible la lignine nelle brune que I’on veut éliminer est due a la
pour ne conserver que la cellulose. Cette li- présence de lignine dans la pate. Le blanchi-
gnine est responsable a long terme d’une dé- ment consiste 4 éliminer quasi-totalement la
térioration du papier, et d’ailleurs le papier lignine pour les pates chimiques ou attaquer
de grande qualité est appelé 100 % cellulose, les groupements chromophores de la lignine,
pour montrer l’absence totale de lignine. La responsables de la couleur, pour les pates mé-
pate a papier pour un papier de pure cellu- caniques. Le blanchiment permet d’obtenir
lose est une pate chimique alors que le pa- un papier bien blanc, quil faudrait réserver
pier ordinaire contenant de la lignine est uniquement au papier de ’édition. Le pro-
une pate mécanique: la pate mécanique est cessus classique de blanchiment, utilisant du
obtenue grace 4 des meules et des disques chlore, produit une famille de composés trés
qui défibrent le bois. Dans le cas d’une pate dangereux pour la santé et l’environnement:
chimique, ce sont des composés chimiques les dioxines. Ces dioxines s’accumulent dans
comme la soude qui sont employés pour dis- la chaine alimentaire, principalement dans les
soudre la lignine. graisses animales. Comme ces molécules sont
Pour €viter que les papiers ne se désagrégent assez stables, elles persistent longtemps dans
au sein des bibliothéques, et pour leur assu- l'environnement et les organismes animaux.
rer une durée de vie de plusieurs centaines Aujourd’hui, le traitement au chlore est rem-
d années, les livres sont maintenant impri- placé par un traitement a base d’oxygéne, les
més sur du papier totalement dépourvu de réactifs étant des peroxydes comme ce que
lignine. Une précaution complémentaire est l'on appelle Peau oxygénée, ou l’ozone. Un
employée :la pate 4 papier est mélangée avec autre composé est aussi utilisé, ’hydrosul-
du carbonate de calcium ou de magnésium, fite de sodium, produit également nocif. La
pour contrecarrer l’acidité du papier. Quand méthode de blanchiment est indiquée sur le
le papier fait mention de « réserve alcaline », papier par les sigles suivants:
C'est grace 4 un excés de cette base faible, afin ECF = Elemental Chlorine Free=pate blanchie
d’empécher toute acidification ultérieure du sans chlore ou TCF = Totally Chlorine Free.
138
LES PLANTES Le papier de riz est un papier chinois trés
QUI FOURNISSENT LES FIBRES léger fabriqué a l’origine avec de la farine de
Les fibres végétales issues du bois constituent riz. Maintenant il est fabriqué également avec
plus de 90 % de la production de papier. Les du mirier ou du chanvre. Le papier de soie
10 % restants sont issues d’autres végétaux : est fabriqué également avec la pulpe du bois
pailles, coton, lin, chanvre, alfa, kénaf, jute, de mirier, dont l’espéce est voisine de celle ot
ramie, abaca, bambous, canne A sucre. La est élevé le bombyx du mirier. C’est ce papil-
forét francaise, dont la surface continue de lon dont la larve nous procure les fils de soie.
sétendre (elle est deux fois plus étendue qu’a
la fin du xvurt siécle), fournit du bois dont seu- La texture du papier est obtenue par pressage.
lement 10 % est consommé par les papetiers. Il existe trois types de pressage:le papier pres-
En effet, l'industrie papetiére ne consomme sé a chaud est lisse, le papier pressé a froid
que les déchets de la filigre bois: les déchets a une texture plus rugueuse, différente sur
des scieries et les éclaircies pratiquées pour chacune des deux faces, le papier dit rugueux
permettre aux arbres de sépanouir. D’autre posséde deux faces identiques.
part, la moitié du papier fabriqué provient de
papier recycle. Le papier couché est recouvert d’une fine
couche de substances minérales diverses, et
Le papier chiffon est fait de tissus récupé- de liants. Cela apporte au papier une surface
rés, macérés dans l’eau puis déchiquetés. Le plus lisse, adaptée a impression, un aspect
chiffon de chanvre était le matériau princi- plus brillant, une plus grande blancheur et un
pal jusqu’au xix‘ siécle, d’ou l'importance du toucher agréable. Pour obtenir ce résultat, le
métier de chiffonnier, jusque dans les années papier est encollé par exemple a la gélatine ou
1960. Le chanvre, quasiment la seule plante a la seve de pin pour diminuer l’absorption.
utilisée en tant que constituant du papier Sil est parfait pour impression, en revanche il
jusqu’au début du xx siécle, est aujourd’hui nest pas agréable pour le dessin ou la peinture.
marginal. Cet abandon du chanvre a com-
mencé par la prohibition aux Etats-Unis du Par contre, une surface plus rugueuse, comme
chanvyre textile demandée par les lobbies de la cest le cas pour le papier aquarelle, permet
fibre synthétique comme Iindustriel Dupont- aux pigments de l’encre ou de la peinture de
de-Nemours. I] est maintenant réservé aux mieux sédimenter dans les creux, ce qui donne
papiers qui doivent 4 la fois étre trés fins et une profondeur et une lumiére particuliéres
solides: papier des billets de banque, papier a aux couleurs déposées. Le papier aquarelle est
cigarette et « papier bible ». C’est le trés noble composé de coton et ne contient pas de lignine,
« papier bible » des éditions de la Pléiade. La il nest absolument pas acide. Non seulement
légéreté de ce véritable voile de papier cor- il se conserve donc mieux dans le temps mais
respond a un grammage de 36 g/m’. C'est pour ce qui nous concerne ici, les composés de
un papier « sans bois » qui posséde une trés lencre végétale étant trés sensibles au pH, les
longue durée de conservation. couleurs de l’encre ne virent pas sur le papier
vers des teintes grisatres et ternes.
Le papier japonais est fabriqué a partir de
fibres de l’écorce de diverses espéces de mii- Le papier vergé est un papier qui laisse voir
riers. Pour la calligraphie, le papier « Japon » des lignes, par transparence, dans |’épaisseur
100 % cellulose, sans acide et avec réserve al- de la feuille. Ces lignes proviennent de la fa-
caline est prévu pour bien se conserver. Son brication du papier, au moment du tamisage
grammage autour de 130 g/m” permet l’uti- de la pate. Elles correspondent aux fils de mé-
lisation d’encres aqueuses, comme I’encre de tal qui soutiennent le tamis. C’est le méme
Chine ou les encres végétales, a la plume ou effet qu'un motif de filigrane, causé par un
au pinceau. Lutilisation d'une plume requiert fil métallique qui diminue légérement I'€pais-
un papier au grain lisse. seur du papier a l’endroit du motif.
140
LES ADJUVANTS
Dans les recettes de fabrication des encres, romain. Pur, il se présente sous la forme d’une
les extraits de plantes cétoient d’autres poudre verdatre.
composés :
- des sels métalliques comme le sulfate de fer, Chimie. Formule Fe(SO4), 7H2O
Pacétate de fer, le sulfate de cuivre, l’acétate de Le sel ferreux est un fer oxydé qui a cédé
cuivre, l’alun a base d’aluminium 2 électrons. Cela le distingue du sel ferrique
- des liants, comme la gomme arabique plus oxydé, qui a cédé 3 électrons et qui nest
- des modificateurs de pH comme la soude, autre que la rouille.
la potasse, le vinaigre
- les conservateurs. Comment l’obtenir? V Encyclopédie de
Voici quelques détails concernant ces compo- Diderot (Teinture) dit: « Couperose, se tire des
sés, avec en préambule, une petite précision mines de Flandre, de Liege et d’Angleterre ;il
& propos de l’eau employée. Elle doit étre y en a des mines dans les Pyrénées du coté de
trés pure. Il est donc préférable de nutiliser la France, mais elle est plus grasse et plus argi-
que de l’eau de pluie propre, ou bien de l’eau leuse. » On peut lobtenir par action de acide
déminéralisée ou distillée. Leau du robinet sulfurique sur le fer. Le sulfate de fer est fa-
convient moins bien, car elle contient gé- cile & trouver dans les jardineries. En effet, il
néralement du chlore incompatible avec les est vendu comme engrais pour les pelouses,
couleurs. Et elle est carrément déconseillée si et vendu en sacs de 25 kg. Il a un défaut:
elle est trés calcaire, car les tanins, composants son manque de pureté. Il contient un an-
essentiels de P’encre, ne peuvent étre solubili- ti-mottant, ou anti-agglomérant, substance
sés en présence de calcaire. qui limite Pagglutination de la poudre. Pour
le purifier, il faut le dissoudre dans de l’eau
déminéralisée puis le filtrer sur un filtre A café
pour obtenir une solution directement uti-
LES SELS METALLIQUES lisable. On peut se le procurer pur dans les
drogueries. Le sulfate de fer est assez corrosif
Le métal entrant dans la composition de pour le papier, il ne faut donc pas en abuser.
Pencre métallo-gallique est le plus souvent un
sel de fer, parfois de cuivre. Ces métaux sont Toxicité du sulfate de fer. Pur, il nest pas
employés sous forme de sulfates, ou d’acé- toxique, et méme prescrit dans des médica-
ments contre l’anémie, qui est une carence
tates. Ces sels réagissent chimiquement avec
en fer.
les tanins de la plante en présence d’oxygene
pour donner un pigment noir.
Solubilité du sulfate de fer. Dans Veau a
LE SULFATE DE FER
température ambiante: elle est denviron
20 %: 4 peu prés 200 g/l a 20 °C. Au-dela de
Jusqu’au xix‘ siécle le sulfate de fer était ap-
vitriol cette concentration, on obtient une solution
pelé couperose verte, vitriol vert, ou
142
LACETATE DE CUIVRE LALUN
Il est aussi appelé « verdet ». Il sert & faire vi- Lalun est appelé aussi alun de roche, pierre
rer les tons jaunes vers des tons vert olive ou d’alun ou alun de potassium. C’est un minéral
vert bronze. naturel dont il a été fait grand commerce de-
puis l’Antiquité. Aujourd’hui, il est plutdt ob-
Chimie. Formule Cu(CH,CO,),. Acétate de tenu par synthése. Durant les premiers siécles
cuivre non hydraté (solide cristallin vert fon- de notre ére, il fut l'un des produits de base
cé). Cu,(CH,CO,),(H,O), acétate de cuivre du commerce maritime en Méditerranée. II
hydraté (solide nettement vert-bleu). Comme provenait en particulier des exploitations mi-
le fer, il existe un sel cuivreux et un sel niéres des iles Lipari et était transporté dans
cuivrique selon le nombre d’électrons cédés. . des amphores. Lalun a encore aujourd’hui
de multiples usages, en particulier comme
Comment l’obtenir? I résulte de |’action de fixateur de pigments pour la fabrication des
lacide acétique (vinaigre) sur l’oxyde CuO ou peintures murales a base de chaux aérienne.
sur le carbonate de cuivre. Dans l’ouvrage de Il trouve aussi une utilisation en cosmétique:
Mrs Merrifield déja cité, on trouve une re- il est couramment utilisé contre la transpira-
cette de fabrication de |’acétate de cuivre par tion et comme hémostatique apres rasage, il
Pierre de Saint-Audemar : a aussi la réputation d’étre anti-acnéique, et
« Ayez un pot neuf, oi vous mettrez de fort vi- antihémorragique. Il est utilisé dans le trai-
naigre en prenant garde de ne pas le remplir. tement de l’eau potable. Valun a été et reste
Prenez ensuite des lames de cuivre bien pur, pla- bien sir un élément essentiel pour la teinture
cez-les par le dessus sans quelles touchent le vi- des tissus par des colorants végétaux. Il n’y a
naigre, ni se touchent entre elles. Bouchez et scellez guére que le bleu du pastel et les bruns des
lepot, mettez en lieu chaud, ou dans lefumier, ou tanins qui peuvent se passer de l’alun pour
dans la terre et laissez 6 mois durant. Au bout de colorer durablement un tissu. Lalun agit en
cela ouvrez, ratissez le vert-de-gris, recueillez-le en tant que mordant, cest-a-dire qu'il est Pou-
un pot net, faites le sécher au soleil. » til indispensable pour fixer les molécules de
Le verdet était lui-méme trés employé autre- colorants sur les fibres textiles, que cela soit
fois comme pigment mélangé a des liants pour pour teindre de la laine que pour teindre de la
fabriquer une peinture et protéger les bois ex- cellulose comme le coton, le chanvre ou le lin.
térieurs, grace au pouvoir anti-fongique du Dans une solution aqueuse, les trois éléments
cuivre. C’est ainsi que perdure aujourd’hui de l’alun, A savoir ion aluminium, lion po-
une tradition des volets peints en vert. tassium et l’ion sulfate sont dissociés. Il a été
montré que seul Pion aluminium a une action
Toxicité. Comme le sulfate de cuivre, cet in- importante dans le processus de mordangage,
grédient est nocif par inhalation, contact avec et que son action est soumise a l’influence du
la peau, les yeux et par ingestion. pH de la solution.
En ce qui concerne les encres, la présence de
Solubilité. Monohydraté dans l'eau a 20 °C: Paluminium confere de la stabilité a la cou-
72 g/litre. Peu soluble dans l’alcool. leur: le complexe formé par le pigment et le
métal est fixé solidement aux molécules de
Le Vert-de-gris. Le célébre « vert-de-gris » est cellulose du papier. La présence de l’alun est
un mélange d’oxydes de cuivre. Ce terme ap- constante dans les recettes de fabrication des
parait au xIV° siécle et son origine est confuse. laques de pigments.
Ce serait peut-étre « vert de Gréce », ou le
Chimie. Formule Kal(SO,),,12H,O = di-sul-
latin viride aeris signifiant « vert de cuivre ».
Parmi ces oxydes, on trouve l’acétate de cuivre fate d’aluminium et de potassium hydraté.
et le carbonate de cuivre. C’est lui qui est ca-
Comment Vlobtenir? \| se présente au-
ractéristique des sculptures en bronze pati-
jourd’hui dans le commerce sous la forme
nées comme celles du jardin du Luxembourg.
COMPLEMENTS D'INFORMATION - Les adjuvants
143
GOMME —
ARABIQUE
POUDRE.
t)
E414 (Epaississan tare alirreinialtos
Utilisation dane tox
{ge contormar ia)
sgiaiaion on vigueut)
otV8choles
ballage farne
& conwtemumnant
atawii de
Les adjuvants nécessaires: alun de potassium, gomme arabique en poudre, sulfate de cuivre, vinaigre...
d’une poudre blanche cristalline, ou parfois Si on utilise une solution saturée d’alun, il
sous la forme de gros cristaux transparents. I] faut utiliser environ 17 ml ou 18 g de cette
est relativement stable mais doit étre conser- solution pour avoir l’équivalent de 1 g d’alun.
vé dans un récipient hermétique. II est facile
de s’en procurer auprés des droguistes. II est
également possible d’en acheter dans des ma-
gasins d’articles cosmétiques. LES LIANTS
Toxicité de Valun. Les notices toxicologiques Un liant permet de garder en suspension ho-
évoquent une irritation possible de la peau, mogéne les pigments dans le liquide et les
conseillent de l’utiliser avec prudence, de ne empéche de précipiter au fond du récipient.
pas l’ingérer, de ne pas l’inhaler et de ne pas
a* / Ty
+
144
(eau additionnée de gomme arabique), qui Solubilité de la gomme arabique. Dans
forme une solution colloidale. C’est pourquoi Peau: trés soluble contrairement 4 d’autres
lon ajoute toujours de la gomme al’encre, de gommes. On peut en mettre jusqu’a 50 %.
manieére a retarder le dépét du précipité noir, Mais elle est lente 4 dissoudre. Pour préparer
et a donner plus de brillant et de solidité a une certaine quantité de gomme 4 I’avance,
l’écriture. mélanger 50 g de gomme dans 0,1 litre d’eau
tiéde. Cela donne un mélange trés épais. Au
LA GOMME ARABIQUE moment de la préparation de l’encre, il faut
Elle est appelée aussi gomme Sénégal ou alors doubler le poids indiqué dans la recette.
gomme d’acacia. Comme toutes les gommes Elle est insoluble dans l’alcool et dans l’huile.
végétales, il s agit d’un polymére glucidique,
cest-a-dire d’une énorme molécule compo- Conservation de la gomme arabique. Sous
sée de petites molécules de sucre agrégées les forme solide, elle se conserve trés bien, mais
unes aux autres. La gomme arabique est une en solution, elle peut étre attaquée par les
résine produite par l’exsudation des branches micro-organismes. I] faut donc ajouter un
d’acacias de diverses espéces, principale- conservateur deés sa fabrication ou la conser-
ment des espéces cultivées en Afrique sub- ver au réfrigérateur.
saharienne: Sénégal, Soudan, bords du Nil,
mais aussi Australie. Les qualités de gomme La gomme arabique et la corrosion du
les plus appréciées sur le marché sont celles papier par Vencre. La gomme arabique est
du Ferlo (Sénégal) et du Kordofan (Soudan). utilisée en Occident comme agent liant dans
La gomme arabique est trés utilisée pour ses la préparation de l’encre gallique. Son impact
propriétés adhésives et stabilisantes dans les positif sur la corrosion de l’encre a été étu-
secteurs alimentaires, pharmaceutiques et dié. Une analyse au microscope électronique
cosmétiques ainsi que dans l'industrie du pa- d’échantillons de papiers a montré que la
pier. Elle se présente soit sous la forme de pe- gomme arabique forme une couche épaisse
tits morceaux arrondis, vitreux et irréguliers sur les échantillons bien conservés alors que
de couleur ambre, ou sous la forme de poudre presque rien ne peut étre observé sur les aires
fine et blanche. dencre des échantillons corrodés. La présence
La viscosité d’une solution de gomme ara- de gomme arabique dans I’encre retarde donc
bique est relativement faible. Elle dépend du le processus de dégradation du papier. La
pH :elle est plus élevée entre 4,5 et 9. Pour des gomme semble protéger physiquement le
meélanges trés acides ou trés basiques, la visco- papier parce que les composants corrosifs de
sité est trés faible, de méme si on chauffe le lencre sont incorporés dans |’agent liant.
mélange jusqu’a ébullition. Au-dela de 90 °C,
se produit une floculation. Elle est utilisée AUTRES LIANTS
comme épaississant 4 concentration élevée. Au xv‘ siécle, la gomme arabique était parfois
remplacée par des résines plus locales: résine
Comment Vobtenir? 1 est possible de la de cerisier, d’abricotier ou de prunier. D’autres
commander chez un boulanger par exemple. composés permettent d’obtenir des solutions
Elle est connue sous le nom de code E414. colloidales, comme la pectine des pépins de
Elle est utilisée en patisserie en tant que stabi- pomme, la gélatine, le blanc d’ceuf, le jaune
lisateur et émulsifiant. d’ceuf, l’amidon, la gomme adragante.
146
LES MODIFICATEURS DE pH
LA POTASSE ET LEAU DE CENDRES acétique par oxydation. Si l’on veut fabriquer
La potasse, ou plus exactement le carbonate soi-méme son vinaigre, le récipient ne doit pas
de potassium, RCO; est le principal ingré- étre hermétiquement fermé, mais au contraire
dient de l’eau de cendres, la lessive des « baba le liquide doit étre en contact avec I’air. Le
cool »! Leau de cendres est obtenue en faisant vinaigre blanc du commerce contient 8 ou
macérer des cendres de bois dans |’eau, & rai- 10 % d’acide acétique. Formule C,H,O,,.
son d’un volume de cendres pour un volume
d'eau. Les cendres sont préalablement tamisées LACIDE TARTRIQUE
pour éliminer les débris de bois et de charbon. . Lacide tartrique est connu depuis l’Antiquité.
La macération prend quelques jours, mais on Sa stabilité et sa grande solubilité en font une
peut accélérer la réaction en faisant bouillir le source d’acidité trés prisée.
mélange, ou en faisant chauffer eau avant de
la verser sur les cendres. Il faut évidemment Chimie. La molécule peut prendre plusieurs
utiliser exclusivement de la cendre de bois non formes, mais une seule existe naturellement,
traité. Avant de l’utiliser, filtrer le mélange en elle est notée acide tartrique L (+). Formule
le versant 4 travers un linge. Leau de cendres GEO;
contient alors essentiellement de la chaux et de
la potasse. Si elle est bien concentrée, la po- Comment l’obtenir? I| peut étre commandé
tasse est légérement visqueuse entre les doigts. dans une boulangerie.
Elle est basique (pH supérieur a 7) et varie en
fonction de sa concentration. Cette eau de Toxicité. Trés répandu dans le régne végé-
cendres remplace avantageusement tout type tal, on le trouve dans de nombreux fruits, en
de nettoyant ménager car elle dissout bien les particulier dans le raisin. Il est utilisé (E334)
graisses. Elle peut étre utilisée dans la machine pour l’acidification des vins, comme acidi-
4 laver le linge a la place de la lessive. Elle rem- fiant dans les friandises, comme antioxydant
place également le détergent pour la vaisselle, dans les conserves, etc.
mais dans ce cas, il faut la diluer un peu, et se
protéger les mains en cas de coupure. Elle est Solubilité. Dans l'eau: 1394 g-/ litre a 20 °C.
idéale pour nettoyer le sol de la cuisine.
LACIDE OXALIQUE
LES SELS DE SODIUM Lacide oxalique est un solide cristallin, inco-
La lessive de soude est une solution de soude lore et inodore. Formule C,H,O,.
caustique NaOH dans l'eau. C’est un pro-
duit extrémement corrosif 4 cause de son pH Comment Vobtenir? \\ est facile 4 trouver
élevé. Les cristaux de soude ont une formule dans les magasins de bricolage, car il est utilisé
légerement différente, car ils sont composés comme agent de blanchiment des textiles, du
de carbonate de sodium Na,CO,. Le pH est cuir et du bois, mais également agent mordant
un peu moins élevé, mais c’est un produit en- pour les teintures. Il élimine les taches d’encre
core trés basique et irritant pour la peau. Le ferro-galliques sur les tissus et sur le papier.
bicarbonate de soude NaHCO, quant lui
est inoffensif, grace 4 son pH faible. Toxicité. Voxalate de calcium est présent dans
de nombreuses plantes (rhubarbe, épinards,
LE VINAIGRE ET LACIDE ACETIQUE oseille), et en grande quantité dans le cacao
Le vinaigre est obtenu naturellement par fer- et le thé. Ces végétaux ne doivent pas étre
mentation acétique du vin ou du cidre, grace consommeés en excés car l’oxalate de calcium
4 un champignon qui forme la « mére » du peut étre la cause de calculs rénaux.
vinaigre. La réaction chimique qui agit lors de
la fermentation transforme |’éthanol en acide Solubilité. Dans l'eau: 220 g/litre a 25 °C.
Le calame est un morceau de roseau ou de - Couper dans une tige de roseau bien séche
bambou taillé pour l’écriture. C’est un outil un morceau d’une vingtaine de centimétres
utilisé depuis l’Antiquité et il l’est encore cou- environ, d’un diamétre d’environ 12 mm.
ramment pour la calligraphie. A Porigine, il - Tenir avec une main le morceau de roseau et
était employé pour graver un matériau mou avec l’autre main, tenir un couteau tres afftité
comme l’argile. Puis il a été utilisé avec de (ou un cutter solide).
lencre pour écrire sur différents supports - Entamer le roseau en biais avec le couteau
comme le parchemin, le papyrus ou le papier. en s'aidant du pouce de la main qui tient le
En effet, la tige de roseau comme la tige de roseau. Le but est d’obtenir en plusieurs fois
bambou est rigide et creuse, ce qui permet une coupe bien nette et en biais.
une réserve d’encre. Le calame est facile a - Dégager la moelle du centre du cy-
fabriquer. Il est également agréable a utili- lindre, éventuellement avec un petit outil,
ser, il est léger, doux, il tient bien en main. comme une petite vrille par exemple: l’in-
Il donne un résultat élégant, et riche en ex- térieur du cylindre doit étre bien lisse pour
pressions. C’est l’outil idéal pour obtenir de recevoir |’encre.
magnifiques « pleins et déliés ». Il s’adapte a - Sila pointe du roseau est trop large, l’affiner
des supports variés. par 2 coupes latérales.
- Effectuer une fente pour faciliter I’écoule-
ment de l’encre vers la pointe. Pour cela poser
d’abord la pointe sur un support avant d’ef-
fectuer la fente.
- La pointe peut étre taillée en biais, en fonc-
tion de la main qui écrit, gauche ou droite.
148
Le roseau, ou phragmite, est une graminée qui pousse dans Le bambou f. t également partie de la famille des graminée
les endroits humides, bords de mares ou d’étangs. Sa tige est trés résistante: le calame n’en est que plus durable
mais plus difficile a tailler.
qui
La pointe peut étre taillée en biais, en fonction de la main
Effectuer une fente pour faciliter l’écoulement de lencre
vers la pointe. écrit, gauche ou droite.
Voici quelques indications pour comprendre utilisée pour faciliter l’extraction des compo-
les différents types de préparations. La re- sés phénoliques des plantes, par exemple les
cette de l’aquarelle est & base de pigments en tanins ou les flavonoides. Le mélange eau et
poudre, pour simplifier, et doit étre adaptée glycérine serait donc un meilleur solvant que
aux encres et aux laques obtenues 4 partir leau seule pour extraire ces colorants. La gly-
des plantes. cérine est un sous-produit de la fabrication du
savon. Lors du mélange d’un corps gras avec
de la soude ou de la potasse, on obtient de la
~__ Recette de base de V’aquarelle glycérine et du savon.
- eau
- gomme arabique Ajout de miel ou de sucre
- pigment en poudre Le miel ou le sucre ajoutés a la préparation
Dissoudre la gomme arabique dans l'eau: attendre en tres petite quantité retardent le séchage
24 heures que la dissolution se fasse d‘elle-méme de l’encre. Une fois séche, l’encre parait plus
ou chauffer le mélange au bain-marie. Mélanger lumineuse et brillante. Mais en trop grande
intimement leau gommée avec le pigment finement quantité, le sucre rend la préparation vis-
broyé. La proportion maximum de gomme arabique queuse et l’empéche de sécher.
et d eau est d'un pour un.
Ajout de craie en poudre
pour obtenir de la gouache
Ajout de glycérine Ajouter autant de blanc de Meudon qu'il est
La glycérine (appelée aussi glycérol) est un nécessaire pour obtenir la consistance pateuse
liquide incolore, transparent et visqueux que souhaitée. La craie en poudre ou le blanc de
l'on peut facilement se procurer dans les ma- Meudon (carbonate de calcium) sont appelés
gasins de cosmétiques. La glycérine est en ef- des « charges », comme aussi le talc (silicate
fet utilisée pour hydratation de la peau. Elle de magnésium). Le blanc de Meudon est
est capable de retenir plusieurs fois son poids équivalent au blanc de Toulouse, blanc de
en eau. La glycérine donne de la souplesse et Troyes, blanc de Champagne en fonction de
de lonctuosité a la préparation. Elle confére la provenance. Ces charges servent 4 opacifier
une certaine brillance a l’encre et, de ce fait, la peinture.
avive la teinte. Pour cela, 1 4 2 gouttes de gly-
cérine peuvent étre ajoutées 4 la préparation Ajout de jaune d’ceuf pour obtenir
finale d’une encre. La quantité de glycérine de la tempera (détrempe a l’euf)
ne doit pas dépasser 1/20° du poids d’eau Séparer le blanc du jaune et éter la peau qui
gommeée. Son affinité avec l’eau la rend hy- entoure le jaune d’ceuf, avant de mélanger
groscopique, c’est-a-dire quelle a tendance intimement avec le pigment. Le jaune d’ceuf
a absorber ’humidité de lair. Elle retarde le contient 16 % de protéines et 30 % de lipides,
séchage de la peinture. Elle est aussi parfois dont la lécithine, une substance émulsifiante.
150
Lémulsifiant permet de mélanger de fagon ho- composition des peintures est le plus souvent
mogéne une phase aqueuse avec une huile. La de I’huile de lin cuite. C’est parfois de ’huile
lécithine est une molécule qui appartient la d’ceillette ou huile de graines de pavot, plus
famille des phospholipides. Lune des extrémi- _ siccative, c’est-4-dire qu'elle séche plus vite,
tés de la molécule est hydrophile, Cest-a-dire alors que l’huile de lin ne séche pas mais elle
quelle a une grande affinité pour l'eau. Lautre s oxyde au contact de lair et passe de I’état
extrémité de la molécule est hydrophobe, in- liquide 4 l'état solide. La recette de base de
soluble dans l'eau mais soluble dans l’huile. la peinture 4 Phuile consiste 4 mélanger inti-
Dans une solution aqueuse contenant des mement les pigments en poudre en les écra-
gouttelettes d’huile, les molécules de lécithine — sant avec ’huile, sur un support extrémement
se placent a l’interface eau/huile: la partie de lisse et dur, une plaque de verre par exemple.
la molécule qui est hydrophile se met du cété Le diluant dans le cas de la peinture 4 ’huile
de l’eau, et la partie hydrophobe se place du est une essence volatile comme |’essence de
cété de lhuile. C’est 4 cause de cette propriété térébenthine.
que l’on appelle la lécithine un émulsifiant.
Elle empéche les gouttelettes d’huile de se Recette de peinture a Vhuile et a ’eeuf
réunir, de fusionner et de surnager au-dessus Aprés avoir mélangé les pigments et l’huile,
de Peau. C’est le principe de la mayonnaise [’ajout d’un ceuf permet de diluer la prépara-
dans laquelle la présence du jaune dceuf est tion huileuse avec de l’eau, grace au pouvoir
indispensable pour lier la moutarde et Phuile. émulsifiant de l’ceuf. Cette peinture épaisse et
Lutilisation du jaune d’ceuf pour fabriquer des _ grasse est utilisable sur de multiples supports,
peintures offre plusieurs avantages: le séchage en particulier les toiles enduites et tendues
est trés rapide, il est possible de superposer sur des chassis. Elle est lente a sécher ce qui
plusieurs couches. Par contre la peinture est permet les repentirs, et le travail sur plusieurs
fragile en milieu humide et ne se conserve pas. jours. La technique de la peinture a Phuile a
supplanté celle de la peinture 4 l’eau vers le
Ajout de blanc d’euf xv° siécle en Europe avec les Flamands Jan
Certaines recettes préconisent d’ajouter aussi Van Eyck et Rembrandt. Cette peinture per-
le blanc d’ceuf en méme temps que le jaune, met de mieux fusionner des couleurs conti-
ou méme seulement le blanc. Jacques Nicolas gués et de rendre possible des clairs-obscurs.
Paillot de Montabert écrit dans son Traité Si jadis la peinture était fabriquée dans les
complet de la peinture (1829) : ateliers, elle est fabriquée industriellement de-
« Doit-on user du jaune de V'ceuf seulement, puis le xix‘ siécle, et commercialisée dans des
ou bien du jaune mélé au blanc de Vwuf, ow tubes, ce qui a permis aux peintres impres-
quelquefois du blanc de Veuf uniquement? Je sionnistes de réaliser leurs ceuvres a l’extérieur
pense, d'apres les essais que jai faits, que les trois des ateliers.
moyens peuvent et doivent étre employés. La pré-
sence du jaune seul procure beaucoup d onctueux Le pastel
et d'énergie aux couleurs. Le mélange du blanc Le pastel est un batonnet constitué de pig-
donne de la ténacité et une plus grande transpa- ments broyés et mélangés avec des liants
rence. Lemploi du blanc d'ceuf seul procure des comme la colle ou la gomme arabique, et
couleurs plus vives, plus fortes encore mais moins additionnés de charges comme le talc ou la
moelleuses et plus friables. » craie. Il existe des pastels secs ou des pastels
Le blanc d’ceuf est composé d’eau 4 87 % et gras suivant leur composition. Le pastel est;
‘
; <8.
d’albumine, une protéine, a 12 %. Le blanc utilisé sur des papiers rugueux comme lepa
est transparent et visqueux, soluble dans Peau.
. ?
pier chiffon, qui accroche la matiére. Utilisée
depuis le xvi siécle, la technique du pastel sec
Les techniques a base d’huile s'est largement développée au xix‘ siécle chez
Lhuile apporte a la peinture de la solidité, des artistes comme Edgar Degas ou Toulouse-
et un aspect satiné. Uhuile entrant dans la Lautrec. Ces ceuvres au pastel sec sont
et des laques
COMPLEMENTS D'INFORMATION - Au-dela des encres
151
extrémement fragiles et ne doivent ni étre Le papier marbré: Ebru
touchées, ni exposées a la lumiére, comme on Lart du papier marbré permet d’obtenir de
le voit dans la salle des pastels, salle tres peu magnifiques ornements colorés sur des pa-
éclairée du musée d’Orsay. Ces oeuvres sont piers. En Europe, ces papiers ont été utilisés
dailleurs déménagées du musée lorsque des couramment pour la couverture intérieure
travaux créant des vibrations sont entrepris lors de la reliure des livres. Cette technique
dans le quartier. Les pigments déposés sur d’ornementation du papier est née au Japon
le papier et le velouté des couleurs dans les au XxiI* siécle oti elle est appelée Suminagashi.
ceuvres d’Odilon Redon évoquent la délica- Elle est ensuite arrivée jusqu’en Turquie par
tesse et la luminosité des ailes de papillon. Au Asie mineure 4 l’époque de Empire ot-
xx® siécle, Pajout d’huile pour la fabrication toman. Cet art traditionnel turc est appelé
de pastels gras augmente |’adhérence des pig- Ebru. Pour obtenir ces ornements, les encres,
ments au support et donc la solidité. minérales ou végétales, sont d’abord mélan-
gées a du fiel de boeuf puis projetées délica-
tement sur une couche d’eau contenue dans
un bac de la méme dimension que la feuille
de papier que l’on veut orner. Leau a été au
préalable épaissie par une gomme adragante.
152
te
et des laques
COMPLEMENTS D'INFORMATION - Au-dela des encres
SOURCES D'INFORMATION
INTRODUCTION 2- folios 43r-51r: moine Théophile: Theophili 5- folios 81v-90r: Jean Alcherius: Libellus de
- liber de omni scientia picturae artis (début compositione colorum: authore Joanne Alcerio
* Pigments et colorants de l’Antiquité et du xiI° siécle) (xiv* siécle)
Moyen Age: Teinture, peinture, enluminure, Les détails de I’ceuvre complete du moine
études historiques et physico-chimiques| Institut Théophile sont signalés plus loin. Ne figurent 6- folios 92r-101v: Jean Le Bégue: Differentes
de recherche et d’histoire des textes, Centre dans ce manuscrit que les 29 premiers chapitres receptes sur les couleurs; recueillies par Jean
de recherche sur les collections, Equipe Etude du livre I. le Begue, Greffier de la Monnoye de Paris
des pigments, histoire et archéologie (dir.) (1368-1457)
Paris: CNRS Editions, 2002 (375 p.) 3- folios 52r-64r; Pierre de Saint-Audemar:
Cet ouvrage scientifique est accessible en Petri de Sancto Audemaro - liber de coloribus Le texte de Jean le Bégue est repris dans
version intégrale sur le Net: faciendis = traité sur les couleurs (x1V siécle) des éditions plus récentes, comme:
www.books.openedition.org/editionscnrs/8116
Pierre de Saint-Audemar ou Saint-Audomar * La peinture médiévale vers 1400 autour
semble avoir été moine a Saint-Omer dans le d'un manuscrit de Jean le Begue (1368-1457)
LE NOIR Pas-de-Calais. Dés le x‘ siécle, la communauté Libri colorum (Contient la transcription du
monastique de Saint-Omer était riche de manuscrit 6741). Paris: Ecole nationale des
¢ Noir: histoire d'une couleur| plusieurs ateliers d’art. Ce livre renferme des chartes, 1995
Michel Pastoureau. Seuil, 2008 procédeés relatifs 4 l’enluminure et 4 la peinture,
et des recettes de fabrication de l’encre. De cet * Erudition et politique. La personnalité de
° Laine et Colorants: fixation, quantification et ouvrage, nous avons tiré la recette a l’acétate Jean le Begue d apres les notes marginales de ses
vieillissement. Etude par spectrométrie Raman | de cuivre. manuscrits |Nicole Pons. Actes du congrés
Frédérique Salpin. Thése de doctorat de de la Société des historiens médiévistes de
Puniversité Pierre et Marie Curie, spécialité 4- folios 64v-81r: Heraclius: Heraclii libri lenseignement supérieur public, 1998, Vol. 29,
Chimie physique, 2008 tres - de coloribus et de artibus Romanorum = des n°l pp. 281-297
couleurs et des arts chez les romains (x* siécle,
ou plutét vin‘ siécle selon Inés Villela-Petit) * Nouveau manuel complet de la fabrication des
LES ENCRES METALLO-GALLIQUES encres: telles que encres a écrire... etc. |Francois
Le texte latin est divisé en trois livres dont les Malepeyre, de Champour (1794-1877,
° Apparition de l'encre métallo-gallique en Egypte deux premiers sont écrits en vers. C’est une rédacteur de plusieurs encyclopédies pratiques
4 partir de la collection de papyrus du Louvre | compilation hétérogéne de recettes relatives et éditeur). Paris, librairie encyclopédique de
E. Delange et al. Revue d’égyptologie, 1990 a la métallurgie, la verrerie, la teinture, la Roret, 1856 (207 p.)
peinture. Le troisiéme livre est une compilation Consultable sur Gallica.bnf.fr
* Les Encres noires au Moyen Age (jusqu’a 1600) | plus récente de sources diverses. Eraclius (ou
Monique Zerdoun Bat-Yehouda. CNRS, 2003 Heraclius) est un auteur sans doute italien,
dont le pseudonyme fait référence au célébre LES GALLES DE CHENE
* Alchimie de l'enluminure: 80 recettes éprouvées! empereur du vi‘ siecle Heraclius, qui était
Marc Niederhauser. Eyrolles, 2011 réputé adepte des sciences occultes et féru * Les pages entomologiques d’André Lequet,
dalchimie. Quand cet ouvrage est rédigé au accessibles sur www.insectes-net.fr: un site
° Recherches chimiques sur l'encre, son altérabilité xX‘ siécle, Rome n’est plus que l’ombre d’elle- plein d’informations passionnantes présentées
et les moyens dy remédier |Charles-Nicolas- méme, épuisée par les famines et les épidémies, avec humour et pédagogie
Alexandre Haldat du lys (1770-1852) lempire ayant succombé et subi les invasions
Paris: Koenig, 1805 (84 p.) successives des Lombards puis des sarrasins. * Un cours d’entomologie par Alain Ramel,
Consultable a la Bibliotheque nationale Louvrage traite de calligraphie et de peinture, riche de superbes photographies: aramel.free.fr
de France et sur le site gallica.bnf-fr. et certains articles sont consacrés 4 l’extraction
des couleurs végétales. Malheureusement * Guide des galles de France et d’Europe /
* Le recueil de textes copiés en 1431 par Jean comme c’est souvent le cas dans les traités Patrick Dauphin. Ed. Belin, 2012
le Bégue est disponible au Département des anciens, l’auteur n’a pas expérimenté les
manuscrits 4 la Bibliothéque nationale de recettes, et celles-ci s’en trouvent parfois
France a Paris sous la référence Ms. lat. 6741. incompréhensibles, Le savoir-faire des artisans LES PLANTES A TANINS
Le contenu de ce manuscrit de référence est se transmettait oralement de maitre 4 apprenti,
le suivant: Experimenta de coloribus. ou de pére en fils, tandis que les textes étaient ° Analyse de quelques tannins végétaux utilisés
rédigés par une autre catégorie de personnes, pour la fabrication des cuirs |Pascale Richardin
1- folios 2r-41y: auteurs anonymes: et recopiés avec plus ou moins de fidélité au et al. Centre de recherche et de restauration
praemittitur tabula ordine alphabetico digesta cours des siécles. Les recettes dans ce recueil des musées de France
de vocabulis synonymis et aequivocis colorum, sont des transcriptions de textes de l’Antiquité. NB: les deux orthographes « tanin »
eorumque accidentium = table des matiéres et Les ingrédients sont parfois tres nombreux, sans et « tannin » sont admises.
glossaire des termes de couleurs que la recette en soit meilleure.
* Analyse des tanins hydrolysables susceptibles
‘entrer dans la composition des encres
154
ferro-galliques |Francoise Flieder, Rosa Maria * Mise au point de méthodes de laboratoire pour A noter: le site d’Inés Villela-Petit, médi€viste,
Barroso Bermejo, C. Oruezabal. In: Comité évaluer l'action des tanins cenologiques sur les historienne de l’art, archiviste paléographe,
pour la conservation de PICOM. 4° réunion vins|Philippe Poinsaut. In: Revue frangaise diplémée de I’école du Louvre, conservateur
triennale. Venise. 1975, 16 p. d’cenologie, n° 219 du patrimoine, conservatrice au Cabinet
des médailles et antiques de la Bibliotheque
° Alchimie de V'enluminure |Marc Niederhauser. * Colorants & base d'anthocyanes: composition en nationale de France, On y trouve la liste de
Eyrolles, 2011 pigments et copigments et mécanismes chimiques ses nombreuses publications sur les couleurs
assoctés a la stabilité de la couleur| et pigments du Moyen Age, et en particulier,
* Les encres noires au Moyen Age / Céline Malien-Aubert. Thése de doctorat un commentaire sur l’ouvrage de Mary
Monique Zerdoun. CNRS, 1983 en chimie soutenue en 2001 4 Avignon. P. Merrifield:
¢ Le manuscrit en latin de 1431, contenant les * Natural Pigments: Stabilization Methods ° Mary P Merrifield, Medieval and Renaissance
écrits du moine Théophile (vers 1070-1125), ofAnthocyanins for Food Applications | Treatises on the Arts of Painting|Villela-Petit
est compris dans le manuscrit Ms. Lat. 6741 Regina Cortez et al. In: Comprehensive reviews Inés. Mineola, New York, Dover Publications,
déja cité précédemment. Lceuvre complete de in food science and food safety, Vol. 16, 01- 1999. In: Bulletin Monumental, tome 159,
Théophile est divisée en 3 volumes: 2017, pp. 180-198 n° 2, 2001. pp. 203-205.
- le premier traite de l’art de la peinture,
- le deuxiéme le travail du verre, ° Household dyeing plants and traditional uses
- et le troisiéme le travail du métal. NERPRUN ET BOURDAINE in some areas of Italy| Paolo Maria Guarrera
Dans le premier volume, celui qui nous In: Journal of Ethnobiology and
intéresse ici, les premiers chapitres indiquent * Dictionnaire visuel de botanique| Ethnomedicine, 2006, 2:9
les couleurs & employer pour représenter les Maurice Reille. Paris: Ulmer, 2014
corps humains a l’aide de pigments minéraux * Graines d’Avignon
comme la céruse, l’ocre ou le cinabre. Le manuscrit de Bologne (xv* siécle) est souvent Dictionnaire universel / Antoine Furetiére.
Le chapitre XIV mentionne l’emploi du jus cité: Segreti per colori = Les secrets des couleurs, 1727
de sureau pour représenter des draperies. sous la référence « Bologne Bibl. Univ. ms.
Le chapitre XXVII explique comment utiliser 2869 ». Cest un réceptaire italien anonyme ° Chimie des couleurs pour la peinture a
la gomme issue du cerisier ou du prunier. contenant 390 recettes de pigments en latin et Teau et a Ubuile: comprenant Uhistorique,
Le chapitre XXXVIII mentionne I’emploi du en italien, compilation élaborée dans les années la synonymie, les propriétés physiques et chimiques,
jus de poireau, d’iris et de chou. 1440 — 1460 en Italie de l’est. la préparation, les variétés, les falsifications,
Le chapitre XVII donne la fabrication du vert laction toxique et l'emploi des couleurs anciennes
a partir de lames de cuivre. ° Il Libro dei colori: segreti del secolo xv | et nouvelles / Lefort, Jules (1819-1896).
La recette de l’encre d’aubépine figure au Olindo Guerrini, Corrado Ricci. Ed. Masson, 1855
chapitre XLV. Romagnoli Dall’Acqua, 1887. Ce texte est Consultable sur Gallica.bnf.fr
accessible dans un ouvrage du XIx* siécle resté
Le texte du moine Théophile a été repris dans trés célébre grace 4 de multiples rééditions: ° Encyclopédie chimique — tome X: Fabrication
différents ouvrages. Citons une édition de 2011 des couleurs |Charles-Ernest Guignet (1829
et une édition de 1843 : ¢ Medieval and Renaissance Treatises on the — 1906, Chimiste et répétiteur de physique
© Diversarum artium schedula = Essai sur divers Arts ofPainting: Original Texts with English al Ecole Polytechnique (1854-1874),
arts: secrets et recettes pour la réalisation de Translations / Mary Philadelphia Merrifield inventeur du « Vert Guignet », directeur de
Venluminure, Vorfevrerie, livoire, le vitrail, la Dover Publications, Incorporated, 2012 la Manufacture des Gobelins, sous-préfet de
fresque et autres divers arts | moine Théophile, (1280 pages) Langres). Dunod, 1888
artisan du XII‘ siécle; traduit du latin par
Charles de LEscalopier (1812-1861). Nouvelle Dans le volume I, figurent les textes compris ° Recueil de procédés et d expériences sur
éd. préparée par Eric de Bussac. Clermont- dans le manuscrit Ms. Lat. 6741 déja cité, mais les teintures solides que nos végétaux indigenes
Ferrand: Ed. Paleo, 2011 (211 p.) cette fois avec les traductions en anglais: communiquent aux laines et aux lainages|
Manuscripts of Jehan le Begue - Tabula de Dambourney, Louis-Auguste. Paris: impr. de
* Theophili presbyteri et monachi libri IIT: seu, vocabulis sinonimis et equivocis colorum P-D. Pierres, 1786-1788. 2 vol. (407, 152 p.)
Diversarum artium schedula. Opera et studio Alia tabula imperfecta et sine inicio Consultable sur Gallica.bnf.fr
Caroli de l’Escalopier |Théophile. Trad. Charles Experimenta de coloribus Les pages 36 a 49 traitent de la teinture aux
comte de l’Escalopier. Ed. J. A. Toulouse, 1843 Manuscripts of S. Audemar - Liber Magistri baies de bourdaine: www.gallica.
(314 p.). Introduction par J-M. Guichard, 1844. Petri de Sancto Audemaro de Coloribus Faciendis
Manuscripts of Eraclius - De coloribus et artibus ° Etude chimique et caractérisation de
romanorum (Lib I. II. III.) principes colorants historiquement employes
LES PLANTES A ANTHOCYANES Manuscripts of Archerius - De coloribus diversis dans l'impression des indiennes en Provence |
modis tractatur Guillaume Cuoco. Thése de doctorat en
° Mémoire sur le Phytolacca decandra | De diversis coloribus Sciences, spéc. Chimie, Université d’Avignon
M. Dubuc. In: Précis analytique des travaux Additional recipies by Jehan le Begue et des pays de Vaucluse, 11-2009.
de P'académie (royale) des Sciences, Belles-
Dans le volume II, figurent des textes ° Lo-kao: Etudes sur le régime des manufactures:
lettres et Arts de Rouen. Rouen: Ed. Nicetas
découverts lors du voyage de Mrs Merrifield condition des ouvriers en soiel Louis Reybaud.
Periaux, 1831.
en Italie: Slatkine, 1978
Consultable sur Gallica.bnf-fr
- Segreti per colori = Les secrets des couleurs,
ou manuscrit de Bologne ainsi que d’autres * Notice sur le vert de Chine et de la teinture
* Le mystore de la couleur des fleurs, des fruits...
documents et des recettes. en vert chez les Chinois |M. Natalis Rondot;
et du vin!/ Raymond Brouillard, André
étude des propriétés chimiques et tinctoriales du
Fougerousse. Université de Strasbourg, 2008
¢ Article de Francis Richard: « Une recette + Lemploi des plantes tinctoriales dans l'art
en persan pour colorer le papier», publié dans de l'enluminure: lexemple du bois de brésil | LES ADJUVANTS
la Revue des mondes musulmans et de la Patricia Roger (2004)
Méditerranée, pp. 95-100, 2002 https://irht.hypotheses.org/524 * Cuivre et ses dérivés |INERIS - Fiche de
données toxicologiques et environnementales
° Traité de mignature, pour apprendre aisément ° Pigments et colorants anciens: exemple d’une des substances chimiques
4 peindre sans maistre. Avec le secret de faire les étude comparée d’enluminures du xv‘ siécle/
plus belles couleurs, Vor bruny, & Vor en coquille. Patricia Roger (2002)
3e édition. Revue, corrigée & augmentée par www.irht.hypotheses.org/435 QUELQUES RECETTES DE PEINTURE
Pautheur / C. Boutet. Christophe Ballard. 1696
Consultable sur Gallica.bnf.fr ° Les laques de brésil dans !enluminure * Traité complet de la peinture | Jacques-Nicolas
médiévale :reconstitution a partir de recettes Paillot de Montabert (Troyes, 1771-1849,
anciennes|P. Roger, S. Vandroy et I. Villela- peintre de sujets mythologiques et portraits,
UNE PLANTE A NAPHTOQUINONE: Petit. In: Studies in Conservation, t. 48, n° 3, historien d’art). Bossange Pére, 1829 (9 tomes)
LE NOYER 2003, p. 155-170 Consultable sur Gallica.bnf.fr
° Catalogue Collection art graphique - * Chimie des couleurs pour la peinture a eau et a
La collection du Centre Pompidou, Musée Ubuile |Jules Lefort (1819-1896, pharmacien et
national d’art moderne, sous la direction de chimiste). Masson, 1855. (344 p.)
Agnés de la Beaumelle, Centre Pompidou, Consultable sur Gallica.bnf-fr
2008
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Iris des marais + alun Genét Carotte sauvage Nerprun alaterne Iris des jardins séchés
+ sel de fer P. 108 P.108 P.90 + bicarbonate de soude
+ gomme arabique P94
P.102
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Chou rouge Bois de campéche Phytolaque Rose trémiére Garance
+ gomme arabique + vinaigre P. 74 + acide oxalique P.124
+ alun P, 118 P. 78
P.72
158
Aubépine Grenade
+ sulfate de fer + sulfate de fer
+ gomme arabique + gomme arabique
P. 62 P. 64
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Nerprun Nerprun Iris des jardins Iris des jardins + alun Iris des jardins
+ alun +potasse + sulfate de cuivre P.94 + bicarbonate de soude macérés dans l'eau
P. 84 P. 84 + gomme arabique P.94
P.94
159
CREDITS PHOTOGRAPHIQUES:
Toutes les photos et illustrations sont de l’auteur, sauf:
- Ludovic de Valon: p. 8
- Héléne Dumont: p. 47
- Xavier Dumont: p. 82
- Biosphoto: pp. 11 (bg), 12 (d), 19, 57 (h, md), 58 (bg), 61 (hg, bd),
65 (hg, d), 78 (d), 111 (hd), 120, 122 (g), 125 (bg).
- Fotolia: pp. 11 (h, bd), 76 (b)
- Le Phare d’Eddystone/Hugo Victor/O RMN - Grand Palais/
Agence Bulloz/Paris, maison Victor Hugo: p. 29
- Lion au repos/Rembrandt/© RMN - Grand Palais/
Jean-Gilles Berizzi/Paris, musée du Louvre, D.A.G.: p.33
=Gallica.fr/ BNF: pp. 35, 56, 375.87, 97, 111(b);
- Wikimedia commons: pp. 23, 90 (g), 96, 119.
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Papier issu Be
sources responsables
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des
Faire de l’encre avec des plantes,
c'est conjuguer l'amour des
plantes avec celui du dessin
ou de l'écriture, et se réapproprier
des savoir-faire anciens oubliés.
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ISBN :978-2-841: 5