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Thème 3: histoire et mémoires

INTRODUCTION - HISTOIRE ET MEMOIRE, - La différence entre histoire et mémoire.


HISTOIRE ET JUSTICE - Les notions de crime contre l’humanité et de génocide, et le contexte de
leur élaboration.

AXE 1 - HISTOIRE ET MÉMOIRES DES Produire et diffuser des connaissances


CONFLITS - Un débat historique et ses implications politiques : les causes de la Première
Guerre mondiale.
- Mémoires et histoire d’un conflit : la guerre d’Algérie.

AXE 2 - HISTOIRE, MEMOIRE ET JUSTICE La justice à l’échelle locale : les tribunaux gacaca face au génocide des Tutsis.
La construction d’une justice pénale internationale face aux crimes de masse : le
tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY).

AXE CONCLUSIF - HISTOIRE ET MÉMOIRES Lieux de mémoire du génocide des Juifs et des Tsiganes / Juger les crimes nazis
DES GÉNOCIDES DES JUIFS ET DES après Nuremberg / Le génocide dans la littérature et le cinéma.
TZIGANES
L’étude de ce thème a un double objectif.

 Le premier est de montrer comment les conflits et leur histoire s’inscrivent dans les mémoires des populations ;

 le second est d’étudier quel rôle jouent la connaissance historique et la justice dans la manière dont les sociétés et les Etats se reconstruisent
après des conflits majeurs.
• La mémoire et l’histoire sont deux perceptions différentes du passé.

• Là où la première résulte du vécu en perpétuelle évolution, la seconde est une connaissance abstraite, fruit d’une élaboration scientifique.

• Entre mémoires individuelles et mémoire collective, devoir de mémoire et besoins de commémoration, l’historien vise l’objectivité et le recul critique

 Quels rapports la mémoire et l’histoire entretiennent-elles ?

I- la différence entre histoire et mémoire


A - Des liens complexes entre histoire et mémoire

Nicolas Offenstadt -Il faut distinguer la Mémoire et l'Histoire

https://www.youtube.com/watch?v=EuGeAaeVrFw
 Fiche n°1: histoire et mémoire

• L'HISTOIRE est une science humaine, qui étudie les faits passés avec une exigence d’objectivité, en s’appuyant sur la critique et la confrontation des sources (archéologie,
archives, mais aussi témoignages, qu’il faut savoir critiquer, en les replaçant dans leur contexte de création) pour expliquer le passé de façon neutre, dépassionnée.
• Elle est produite par des spécialistes, des historiens qui se placent sur le terrain de la connaissance, et non sur celui de la morale ou de la justice. Si l’historien ne peut pas
être pleinement objectif, il tâche de l’être en confrontant des points de vue.
• La MÉMOIRE correspond à un ensemble de souvenirs liés à un évènement vécu par un individu ou un groupe.
• La mémoire suppose un lien affectif au passé : elle est donc subjective et partielle (il y a des déformations et des oublis, volontaires ou non, pour favoriser le sentiment
d’appartenance à un groupe).
• Les mémoires sont aussi plurielles, comme par exemple celles de la 2nde Guerre mondiale :

BUT: Expliquer le passé, Contextualise,


BUT: Faire revivre le passé d’un
produire un récit objectif fait évoluer groupe, produire un récit
subjectif, qui rassemble
HISTOIRE MÉMOIRE
METHODE: Approche MOYENS : Approche affective,
scientifique des sources: Etude et écriture des Souvenir(s) d’un utilisation sélective des
Sert de source et d’objet
critique, confrontation, etc. faits du passé d’étude
événement du passé souvenirs, des témoignages
Fiche n° 1: histoire et mémoire
Consigne : En vous appuyant sur votre réflexion personnelle et sur le corpus documentaire ci-joint, remplissez le tableau proposé afin de répondre à la question : « En quoi l’histoire et la mémoire sont deux approches différentes
du passé ? »

Doc. 3- Profession historien, par Pierre Bonnechere Doc. 2: Albert Bettannier, La Tache noire, tableau de 1887
L’histoire, en tant que savoir, n’est que le fruit d’un travail de reconstitution mené selon une méthode rigoureuse, pétrie à la fois de science et
d’intuition. Une méthode qui permet d’abord de trouver les témoignages pertinents à sa recherche, puis de les interpréter avec justesse, en les
forçant à révéler tout ce qu’ils ont à révéler, mais pas une once de plus. Une méthode qui mène ensuite à replacer tous les faits les uns par rapport
aux autres, en définissant leurs causes et leurs conséquences potentielles. Chaque nouvelle étude dresse ainsi le tableau d’un pan du passé qui
s’imbrique dans le réseau de faits déjà connus et le précise, ou qui parfois le contredit en amenant les spécialistes à revoir ce qu’ils croyaient
acquis. Grâce à toutes ces découvertes, petites et grandes, les historiens recomposent patiemment un passé qu’ils ne peuvent faire revivre que Doc 4 : citation de Pierre Laborie, historien (1936-2017)
dans ses grandes lignes, et non dans son incommensurable complexité.
L’histoire, c’est le compte rendu raisonné d’une enquête scientifique dans le passé humain à jamais refermé sur lui-même, sous le regard amusé
d’une fée retorse, nommée Vérité. « Le rôle de l’historien n’est pas seulement de distinguer la mémoire
La vérité existe-t-elle ? Non : il s’agit d’une abstraction philosophique inaccessible telle une brillante étoile. S’il existe une vérité, ce serait le point de l’histoire, de séparer le vrai du faux, mais de faire de cette
de vue de Dieu, conscient du pourquoi et du comment de toute chose. […] L’historien, avec les moyens limités dont il dispose – son intelligence
rationnelle –, n’a donc d’autre avenue qu’une vérité partielle, relativisée par autant de filtres irrémédiablement déformants : son éducation, ses mémoire un objet d’histoire, de s’interroger sur l’usage du faux
convictions et ses peurs, en bref sa propre personnalité prisonnière des idées de son époque. […] comme du vrai et sur le sens que les acteurs veulent ainsi donner au
Si l’historien professionnel cherche d’abord pour découvrir, pour faire avancer les connaissances dans son domaine, l’utilité de l’histoire est plus
délicate à mettre en relief. Cette finalité a d’ailleurs évolué au cours des siècles, parce que l’histoire fut elle-même un concept en constante passé et leur passé (…). Conservateur de mémoire, l’historien se
évolution. […] Tous les historiens rêvent d’utiliser les erreurs d’un sombre passé comme le grand miroir qui réfléchirait le chemin vers un meilleur trouve chargé de préserver ce qu’il doit par ailleurs décaper et
futur. Ces prétentions louables, idéales sur le papier, relèvent d’un problème complexe. […] La véritable finalité de l’histoire réside dans la
meilleure connaissance de l’homme lui-même et de ses réalisations, bonnes et mauvaises, de la genèse des différentes cultures de par le monde. démythifier. Il est et doit être, tout à la fois, un sauve-mémoire et un
[…] La tâche pédagogique de l’historien va bien au-delà des dates et faits principaux à apprendre par coeur : l’histoire est en effet une redoutable
discipline qui nécessite un jugement sans faille, une force de caractère pour tenir tête à ses propres préjugés, un esprit critique aiguisé pour
trouble-mémoire… »
analyser les documents disparates du passé et pour replacer tous les faits dans une perspective dynamique.
Source : Article de Pierre Bonnechere « Profession historien » : https://books.openedition.org/pum/446?lang=fr
histoire Mémoire

Qui ? Acteurs, auteurs

Démarche individuelle ou
collective ?

Comment ? Méthode

Niveau d’objectivité

Pourquoi ? Buts

Quand ? Quand construit-on le


discours ?

Quelle distance est prise


avec le passé ?

Esprit Limites
critique
• La mémoire d'un événement constitue en elle-même un objet d'histoire : l’historien étudie l’évolution des mémoires.

• La mémoire est aussi une source pour l’historien.

• Inversement, le regard qu'un groupe porte sur son passé suscite un besoin d’histoire, et peut évoluer grâce aux travaux des
historiens, à l’évolution de l’enseignement de l’histoire, etc.
B - Des mémoires émancipées ? L’exemple des mémoires de la 2GM
• En 1958, retour du général De Gaulle au pouvoir, la mémoire officielle se cristallise autour d’une France unie, résistante et martyre (le résistancialisme) symbolisée
par :

- Un lieu (1960): création du mémorial de la France combattante au mont Valérien (où plus de 1 000 otages et résistants ont été fusillés).

- Une action (1961): mise en place du concours national de la Résistance et de la Déportation pour les élèves du secondaire.

- Un homme (1964): transfert des cendres de Jean moulin au Panthéon et discours d’André Malraux qui, en glorifiant tout à la fois de Gaulle et Jean Moulin dans son discours,
béatifie l’unité résistante.

Mémorial du Mont valérien inauguré en 1960


• Des « impossibles mémoires »

- De nombreuses mémoires ne peuvent pas apparaitre c’est le cas des soldats français de 1940. (Ils n’ont pas l’aura des poilus de 1914 victorieux de l’aigle allemand. Ce sont
les soldats de la débâcle de 1940 : 2 millions de prisonniers. (battus héroïquement 90 000 morts et 120 000 blessés).

- Il y a aussi la mémoire des «malgré-nous». Les deux départements l’Alsace et la Moselle sont annexés à l’Allemagne nazie en juin 1940. (13 malgré nous de la DIVISION
DAS REICH participe au massacre de 644 villageois d’Oradour sur- Glane (20 km de Limoges) le 10 juin 1944. Le procès de Bordeaux en 1953 les condamne mais l’Etat les
amnistie suite aux protestations des maires alsaciens).

- Il y a aussi les travailleurs du STO mis en place en 1943. Certains se considèrent comme des déportés. Pour les réfractaires au STO ils sont considérés comme des lâches.
La notion de «déportés du travail» leur a été refusée.
Fiche n°2: Des mémoires émancipées ? L’exemple des
mémoires de la 2GM

 Quelles sont les différentes formes de lutte et d’organisation


évoquées par le général de Gaulle? (Doc 1)

 Quelle vision De Gaulle veut–il donner de la Résistance? Qu’en


pensez vous?

1. Quelle image de Pétain et de l’Etat français est-elle véhiculée par l’Histoire de


Vichy de Robert Aron ?

2. Sur quels documents Aron s’est-il appuyé pour valider le mythe du bouclier ?
Document 3: « L’historien R Paxton révèle la nature de Vichy » Pourquoi ne sont-ils pas fiables selon Paxton ?

En 1999, dans la 2ème édition de « la France de Vichy », Robert Paxton précise dans son avant- Document 2: « Le mythe du bouclier et de l’épée »
propos la méthode de travail qu’il a utilisée et les conclusions auxquelles il abouti.
L’honneur qu’allègue le Maréchal Pétain, c’est l’honneur d’un gouvernement qui a su
Quand je me suis plongé dans les télégrammes et les notes envoyés quotidiennement à Berlin maintenir les données de son indépendance et protège les populations; en un mot,
[..], je me suis aperçu que les postulats qui soutenaient l’Histoire de Vichy de Robert Aron, c’est l’honneur civique. Celui qu’invoque le général de Gaulle, c’est l’honneur militaire
l’ouvrage de référence en ces années-là, ne correspondaient pas à ce que j’étais en train de pour qui s’avouer vaincu est toujours infâmant. De ces honneurs, il se peut que l’un soit
lire. […] Les principaux documents utilisés par Robert Aron sont les transcriptions
plus impérieux, plus instinctif, plus spontané. L’autre existe, sur un mode sans doute
sténographiques des audiences publiques des procès d’épuration d’après-guerre […]. La
moins éclatant, mais il est pourtant réel. Le premier correspondrait à l’aventure
formule du « bouclier » inventée en 1945, n’est qu’un stratagème pour minimiser les initiatives
exaltante mais d’apparence désespérée, dont Charles de Gaulle est l’annonciateur. Le
de Vichy […]. Les archives apportent la preuve que Vichy a cherché à dépasser l’accord
d’armistice pour instaurer une « collaboration » volontaire avec l’Allemagne. […] plus personne second à l’épreuve lente et douloureuse dont Philippe Pétain ne prévoyait ni la durée ni
ne peut contester que les 1ères mesures antijuives de 1940 relevaient d’une initiative purement la fin. Tous deux étaient également nécessaires à la France. Selon le mot que l’on
française, (…). prêtera à Pétain et à De Gaulle: « le Maréchal était le bouclier, le Général l’épée. »

Robert Paxton, La France de Vichy, 1973 Robert Aron, Histoire de Vichy, 1954
Mémorial du Mont valérien inauguré en 1960
Aucune distinction entre les déportés
Un tel succès unanime reflète la vision de l’époque, comme toute oeuvre portant sur un tel sujet, et nous amène un demi- siècle plus tard à nous interroger sur son contenu historique, à la lumière des vues nouvelles que la recherche a suscitées.
En quoi le film est-il daté? D’abord, et surtout, parce qu’il présente une analyse alors communément admise, mais que l’historiographie a depuis sensiblement modifiée : celle d’un « univers concentrationnaire» (selon la formule de David
Rousset) qui englobe l’ensemble des déportés.
En témoigne la terminologie employée (les camps, les camps de concentration, les camps de la mort, les bagnes nazis, etc.) qui a fait place à la différenciation actuelle entre « camps de concentration » pour les victimes de la répression, et «
camps d’extermination» pour celles de la persécution raciste et antisémite. Le film, qui privilégie Auschwitz dans ses reportages en montrant le célèbre portail de Birkenau, les monceaux de cheveux, de vêtements d’enfants, etc., et les
complexes industriels des «Crématoires » aux chambres à gaz pouvant contenir plusieurs milliers de personnes, n’établit à aucun moment cette distinction qui s’est imposée progressivement aux historiens contemporains. Nul ne remarqua cette
confusion, tant l’analyse de l’époque paraissait évidente: les détenus de tous les camps ne portaient-ils pas les mêmes tenues rayées, n’avaient-ils pas tous le crâne rasé, et les camps n’offraient-ils pas plus d’analogies que de différences?
Les rescapés de la « Solution finale» n’étaient guère visibles en raison de leur petit nombre. Rien d’étonnant par conséquent à ce que le génocide des prétendues «races inférieures» ait été sous-estimé en 1945 dans sa spécificité et qu’il ait fallu
attendre les années soixante et la prise de conscience qui s’opéra à la suite du procès Eichmann pour que la question fût posée de façon de plus en plus claire, chiffres à l’appui. Souvenons-nous d’ailleurs qu’à l’époque, ni Shoah, ni génocide, ni
holocauste n’étaient usités, ce qui confirme amplement cette absence dans la conscience collective, y compris celle de la plupart des déportés juifs. Eux-mêmes s’étaient insurgés contre l’appellation de «déportés raciaux» et on les englobait
dorénavant dans la catégorie des «déportés politiques».
A propos de Nuit et Brouillard, Maurice CLING,
Le Patriote Resistant, Février 2003, N° 760

• La célébration de l’héroïsme résistants et des déportés politiques de retour d’Allemagne laisse dans l’ombre les
juifs. Les déportés raciaux sont amalgamés avec les victimes des camps de concentration (cas dans Nuit et
Brouillard d’Alain Resnais 1956) et n’ont pas toujours envie de témoigner.

• Au retour des camps en 1945, les survivants juifs ont


besoin de témoigner par des récits individuels, des
« livres du souvenir »…
• Ceux qui tentent de parler se heurtent à
l’incompréhension (Primo Levi : si c’est un homme -1947-
) et à la gêne.
• Les survivants sont assimilés à la masse
indifférenciée des déportés (le retour se fait en même
Annette Wieviorka, « Le procès qui fait entrer la Shoah dans l’histoire», L’Histoire,
temps et dans un même lieu –l’hôtel Lutetia à Paris)
n°362, mars 2011.
La fin du résistancialisme ou « Vichy, un passé qui ne passe pas. »

• En 1971, l’image d’une France majoritairement résistante est mis à mal par le film de Marcel Ophuls, le chagrin et la pitié (Documentaire de 1969).
• Les certitudes volent en éclats (on parle de France vichyste) mais la mémoire officielle ne change pas beaucoup, jusqu’au milieu des années 1980; la Résistance
bénéficie d’un statut intact.
La renaissance de la mémoire de l’Holocauste (1961 – 1990)

• Le procès d’Adolf Eichmann, à Jérusalem en 1961, organisateur de la solution finale est un électrochoc et sert d’outil pédagogique car il repose en partie sur la déposition de
111 « survivants » démontrant la spécificité du génocide du peuple juif.

• La parole des survivants français se libère (Simone Weil) et interpelle car les mesures antisémites étaient considérées comme imposées par l’occupant.
• Révoltés par la volonté de Pompidou de jeter le « voile de l’oubli » (71- 72, grâce présidentielle accordé à Paul Touvier, ancien chef de la milice, accusé de complicité de crimes
contre l’humanité), des survivants et des associations juives (serge et Beate Klarsfeld) obtiennent l’inculpation pour crimes contre l’humanité d’anciens responsables de
Vichy (Touvier -1994-, Papon -1997 1998-, Bousquet –pas de procès car tué en 1993- ) et du SS Klaus Barbie (1987)).

Procès de Paul
Touvier en
Procès de Klaus 1994 Procès de
Barbie en 1987 Maurice Papon
en 1997

• Ces procès permettent la dénonciation des crimes (rafle du vel d’hiv en 1942) et de la responsabilité du régime de Vichy.

• Dans le même temps, se structure le discours révisionniste (en 1978, dans l’Express, Darquier de Pellepoix (chargé des questions juive dans le gouvernement de Vichy)
annonce qu’à Auschwitz « on n’a gazé que les poux » et , la même année, le Monde publie un article de Roger Faurisson intitulé « le problème des chambres à gaz ou la
rumeur d’Auschwitz »)

Article de l’Express, 1978,


interview de Darquier de
Pellepoix.
Depuis 1990, le temps du « devoir de mémoire »

Jean-Claude
Gayssot

• En 1990, la loi Gayssot, première loi « mémorielle », interdit toute diffusion des thèses négationistes (refus de reconnaître la politique génocidaire des nazis).

• Le décret du 3 février 1993 instaure une journée de commémoration des « persécutions racistes et antisémites » le 16 juillet (date anniversaire de la rafle du Vel’ d’Hiv’ -16
juillet 1942-).

• En 2007, le président Sarkozy, impose la lecture de la lettre de Guy Môquet, résistant communiste fusillé en 1941 ,aux lycéens.
Fiche n°3: l’élargissement du devoir de mémoire

Consigne:
1- Lisez ce compte-rendu de l’ouvrage de Johann Michel sur le devoir de mémoire.
2- Reconstituez la chronologie du développement de cette pratique. Pour cela, retrouvez les étapes, acteurs et objets concernés par l’élargissement du devoir de mémoire. Votre réponse
pourra prendre la forme d’un tableau, d’une frise, d’un schéma.
Le devoir de mémoire de Johann Michel
PUF, Que sais-je ? n° 4125, 2018, 126 pages.
Compte-rendu par Joël Drogland, sur le site des Clionautes, 27 Nov 2018.
Professeur à l’université de Poitiers, Johann Michel est chercheur au CEM/EHESS. Membre du Comité national pour la mémoire de l’esclavage, il est l’auteur de plusieurs articles et ouvrages sur les politiques
mémorielles et plus particulièrement sur la mémoire de l’esclavage, notamment Gouverner les mémoires. Les politiques mémorielles de la France, Paris, PUF, 2010, et Devenir descendant d’esclave. Enquête sur
les régimes mémoriels, PUR, 2015. Il signe dans la célèbre collection Que-sais-je ? la première édition d’une synthèse sur le devoir de mémoire.
« Devoir de mémoire » est un néologisme inventé dans l’espace public et politique français. Il se présente comme une injonction, un impératif moral, voire un commandement politique : tu dois te souvenir. L’auteur
traite des origines de l’expression, en rappelant que sur ce thème l’ouvrage de référence reste la thèse de Sébastien Ledoux, des cadres de sa problématisation, des modalités de son institutionnalisation, de ses
enjeux éthiques, épistémologiques et politiques. Il expose dans un dernier chapitre les critiques dont fait l’objet le devoir de mémoire du fait de ses effets pervers, en abordant les notions de devoir d’histoire et de
travail de mémoire.
Le « souviens-toi » s’inscrit dans le temps long
« Dans une perspective anthropologique sur le long cours des sociétés humaines, le devoir de mémoire n’est qu’une expression parmi d’autres pour désigner la fonction morale de la mémoire. » Paul Ricoeur a
montré qu’il n’y a pas d’identité sans récits, et pas de récits sans mémoire. Certains événements doivent être oubliés, du moins momentanément quand c’est une condition de la concorde civile au sein d’une société
; d’autres mettraient en péril une société s’ils étaient oubliés. Ils doivent donc être rappelés. L’une des traductions religieuses fondatrices du devoir de mémoire se trouve dans la Bible : c’est l’injonction du «
souviens-toi » de la sortie de la servitude [en Egypte] faite au peuple juif par Dieu. La Pâque juive est le rituel du devoir de mémoire. Par la suite, sous la monarchie française par exemple, le « souviens-toi » a pour
objet les faits glorieux des rois, ou de quelques personnages hors du commun.
« C’est surtout après la Première Guerre mondiale que la démocratisation des politiques de la mémoire connaît une inflexion décisive » Les commémorations qui entourent l’armistice de la Grande Guerre inventent
un nouveau cérémonial du devoir de mémoire. On crée un culte républicain avec ses rituels spécifiques ; on célèbre des citoyens morts pour la patrie, des héros mais aussi des victimes. Les commémorations du 11
Novembre deviennent le modèle à imiter pour honorer d’autres héros et d’autres victimes morts pour la France sur d’autres fronts. Le souvenir de la Résistance suscite « une frénésie commémorative » dans l’après-
guerre, qui opère avec les mêmes rituels, toujours envers ceux qui sont morts pour ce qu’ils ont fait (combattre, résister). Il en ira de même pour les combattants des guerres coloniales. Le 11 Novembre reste « le
référentiel par excellence » de ce que Paul Ricoeur appelle la « mémoire obligée », avant que l’expression « devoir de mémoire » ne s’impose.
L’auteur rappelle la gestation de la mémoire des victimes de la Shoah dans les décennies d’après-guerre, objet de l’étude de François Azouvi, Le Mythe du grand silence , étude qui démontre que la Shoah a été
commémorée à l’intérieur de la communauté juive française dès le lendemain de la guerre, et qu’il n’y a pas eu de silence médiatique, intellectuel et officiel. Il expose ensuite les étapes et les acteurs du
développement de la mémoire juive dans la société, en montrant l’importance des actions des époux Klarsfeld et des actions judiciaires intentées au nom du crime contre l’humanité. Le référentiel de la Shoah
invente une nouvelle manière de concevoir le devoir de mémoire. On ne commémore plus les héros, mais les victimes, il ne s’agit plus des morts pour la France, mais des morts à cause de la France.
Les esclaves sont d’autres victimes, mortes à cause de la France. Le paradigme de la Shoah va s’élargir à ces victimes. L’auteur, qui est un spécialiste de la question, retrace les initiatives en vue de reconnaître la
traite négrière et l’esclavage comme crimes contre l’humanité. Il montre que furent d’abord célébrées, dans le cadre associatif, les grandes figures de l’abolitionnisme, avant que, sous l’influence du référentiel de la
Shoah, on ne rende hommage aux victimes persécutées à cause de la France.
L’auteur constate que le devoir de mémoire s’est d’abord exprimé au sein de groupes ou communautés restreintes (ce qu’il appelle le devoir de mémoire collective) ; que dans un second temps la société entière a
été conduite à prendre conscience de la nécessité de se souvenir (devoir de mémoire publique) ; avant que, dans un troisième temps, les autorités politiques imposent ces souvenirs dans le cadre d’une politique de
la mémoire (devoir de mémoire officielle).
Dans le second chapitre Johann Michel rend compte du processus de conversion du devoir de mémoire publique au devoir de mémoire officielle. Il structure son exposé en quatre parties : la judiciarisation du devoir
de mémoire avec le procès Barbie (« avec le procès Barbie, le devoir de mémoire entre dans les foyers »), la politisation du devoir de mémoire avec Mitterrand, Chirac et la commémoration de la rafle du Vélodrome
d’hiver (introduction sans précédent : celle d’une « commémoration négative », qui marque une période honteuse de l’histoire, tandis que la mémoire des Justes peut encore se lire dans un paradigme du 11
Novembre élargi aux non-combattants), la légalisation du devoir de mémoire avec la question de la commémoration de l’esclavage (officialisée dans la matrice forgée par la mémoire de la Shoah) et de la
colonisation ; il aborde enfin la question de l’internationalisation du devoir de mémoire avec la question de l’Europe et des Journées internationales du souvenir (question de la reconnaissance du génocide arménien)
Un impératif controversé
C’est le thème du troisième et dernier chapitre qui s’ouvre sur cette citation de Simone Veil « Je n’aime pas l’expression devoir de mémoire. Le seul devoir, c’est d’enseigner et de transmettre. » Le devoir de
mémoire est devenu omniprésent, peut-être en partie à cause d’un changement de régime d’historicité de nos sociétés, les utopies ayant perdu leur pouvoir mobilisateur, le présent étant anxiogène, les sociétés se
tournent vers le passé (voir les études de François Hartog). L’intensification du devoir de mémoire, surtout à partir des années 2000, a provoqué des mouvements de contestation : le devoir de mémoire a été l’objet
de critiques politiques, épistémologiques et juridiques.
En 2005 deux événements incitent les historiens à se mobiliser collectivement : la promulgation de loi du 23 février 2005 qui reconnait le rôle positif de la colonisation et l’affaire dite « Pétré-Grenouilleau »,
universitaire assigné en justice par une association lui reprochant des déclarations selon lesquelles la traite occidentale n’est pas la seule et que les traites ne sont pas des génocides. Les historiens demandent
l’abrogation des lois mémorielles (pour certains d’entre eux sauf la loi Gayssot, voire la loi Taubira) qui sont contraires à la liberté de l’historien.
Dans ce contexte le législateur met en oeuvre des commissions chargées de réfléchir au sens des commémorations nationales et à la justification des lois mémorielles. La commission Accoyer reçoit une mission
d’information sur les questions mémorielles et la commission Kaspi doit réfléchir à la modernisation des commémorations publiques. « De fait, c’est le procès du devoir de mémoire lui-même qui est alors instruit ».
La commission Kaspi propose de réduire de 12 à trois le nombre de journées de commémoration nationale (11 Novembre, 8 Mai et 14 Juillet). La commission Accoyer, sans revenir sur l’acquis des lois mémorielles,
demande qu’aucune nouvelle loi de ce type ne soit plus adoptée.
C’est dans ce contexte de contestation du devoir de mémoire que des historiens forgent une nouvelle expression dont le but est de se substituer à la précédente : le devoir d’histoire, expression utilisée par Antoine
Prost dans ses Douze leçons pour l’histoire. Il s’agit de donner la primauté à l’enquête distanciée et scientifique sur l’émotion de la mémoire. L’opposition de ces deux formules renvoie à l’opposition entre l’histoire et
la mémoire (que tout n’oppose pas cependant puisque la mémoire est une des matrices de l’histoire). L’historien considère que le témoignage peut devenir une source archivée, et donc être soumis à la critique. «
Les deux logiques, celle du devoir de mémoire et celle du devoir d’histoire, peuvent aller de concert lorsque la première est encadrée par la seconde. C’est le cas lorsque, par exemple, un professeur d’histoire
d’enseignement secondaire, dans le cadre d’une leçon sur la Seconde Guerre mondiale (après restitution des faits et connaissances, établissement des régimes de causalité…) invite un rescapé ou un ancien
résistant à venir témoigner de son expérience auprès de ses élèves. »
Une autre expression a vu le jour, celle du travail de mémoire, due au philosophe Paul Ricoeur ; elle s’inspire de la pratique analytique et rappelle celle du « travail de deuil » inventée par Freud. Le travail de
mémoire est un effort critique, réflexif et interprétatif : il permet d’extraire des souvenirs traumatisants leur valeur exemplaire ; comme le travail de deuil, il réconcilie le passé avec le présent et l’historien y prend toute
sa place. C’est un travail dialectique de la mémoire et de l’histoire. « Le devoir de mémoire n’a rien de condamnable ou de juste en soi. Sa légitimité dépend de ses usages. Le devoir de mémoire collective et
publique restreint à l’identité d’un groupe particulier a toute sa place dans une société pluraliste et démocratique (…) C’est l’usage officiel, c’est-à-dire politique, du devoir de mémoire qui pose véritablement
problème, lorsque la mémoire obligée devient en même temps commandée, et parfois soumise aux caprices du prince, à la démagogie du législateur et aux pouvoirs de pression. Le principe du devoir de mémoire
pris en charge par les pouvoirs publics ne peut avoir une pleine légitimité, au nom d’un impératif de justice à l’égard des victimes, que s’il est adossé à la fois à un travail de mémoire et à un devoir d’histoire. »
Pour en savoir plus : excellente synthèse du CNDP de Reims :
http://www.cndp.fr/crdp-reims/memoire/enseigner/memoire_histoire/05historiens1.htm
Des historiens prennent leur distance face à l’inflation mémorielle.
• Devant l’inflation mémorielle notamment la loi Gayssot, de nombreux historiens critiquent cette loi comme Pierre Vidal- Naquet et Max Gallo qui pensent qu’elle
porte atteinte à la liberté de travail des historiens. Pour eux il n’est pas admissible que L’Etat dicte l’histoire correcte, celle qui doit être enseignée.

Pierre Vidal-Naquet
Max Gallo

• D’autres lois mémorielles ont été rédigées pour répondre à une demande de reconnaissance de la part d'associations de victimes ou de leurs descendants
(donc pour reconnaitre une mémoire), comme la loi Taubira de 2001 faisant de la traite et de l'esclavage un crime contre l'humanité

Liberté pour l'histoire - Tribune publiée dans Libération, le 13 décembre 2005


Émus par les interventions politiques de plus en plus fréquentes dans l'appréciation des événements du passé […], nous tenons à rappeler les principes suivants :
- L'histoire n'est pas une religion. L'historien n'accepte aucun dogme, ne respecte aucun interdit, ne connaît pas de tabous. Il peut être dérangeant.
- L'histoire n'est pas la morale. L'historien n'a pas pour rôle d'exalter ou de condamner, il explique.
- L'histoire n'est pas la mémoire. L'historien, dans une démarche scientifique, recueille les souvenirs des hommes, les compare entre eux, les confronte aux documents, et établit les faits.
- L'histoire n'est pas un objet juridique. Dans un État libre, il n'appartient ni au Parlement ni à l'autorité judiciaire de définir la vérité historique.
C'est en violation de ces principes que des lois successives ont restreint la liberté de l'historien et lui ont dit, sous peine de sanctions, ce qu'il doit chercher et ce qu'il doit trouver, et posé des limites.

• Bousculé par les lois mémorielles, des historiens comme Jean-Pierre Rioux publie « La France perd la mémoire » en 2006. La transmission de la mémoire
suscite l’émotion tandis que la rechercher historique privilégie la démarche scientifique. C’est le travail de mémoire qui se distingue du devoir de mémoire.

Jean-Pierre Rioux

[Pour refuser sa convocation au procès Papon], Henry Rousso invoque d'abord « une raison éthique et de principe. J'ai écrit à propos d'un autre procès pour crime contre l'humanité que la présence d'historiens au sein d'une cour d'assises me
semblait poser certains problèmes. Je pense que l'historien ne peut pas être un témoin et que sa capacité d’expertise s'accommode assez mal des règles et des objectifs qui sont ceux d'une juridiction de jugement. C'est une chose que de tenter de
comprendre l'histoire dans le cadre d'une recherche ou d'un enseignement, avec la liberté intellectuelle que suppose cette activité, c'en est une autre que de le faire, sous serment, alors que se joue le sort d'un individu particulier. Enfin, ayant été
convoqué contre ma volonté, avec une publicité que je déplore, j'ai de très fortes craintes que mon "témoignage" ne soit un prétexte pour instrumentaliser des recherches scientifiques ou des interprétations historiques.
Henry Rousso cité par Béatrice Vallaeys dans l’article « Maurice Papon devant ses juges. Deux historiens refusent de témoigner », Libération, octobre 1997.

• Pour Henry Rousso, les historiens ne doivent pas témoigner lors des procès car ils évoquent des faits que, comme les jurés, ils n’ont pas connu, et ne sont donc pas des « témoins » au
sens juridique du terme.

• De plus, selon lui, ils ne sont pas non plus des « experts » au sens juridique : leur expertise aurait été utile lors de la constitution du dossier, en amont du procès, mais son utilisation
est critiquable au cours d’un procès car les historiens ne sont pas formés à la « rhétorique judiciaire », ne sont pas formés à être experts juridiques.
II. HISTOIRE ET JUSTICE

Le Procès de Nuremberg - La Grande Explication


https://www.youtube.com/watch?v=yZ2-nmo5938
• Au sortir de la Seconde Guerre mondiale, les Alliés engagent le processus de « dénazification ». Il s’agit, en partie, de juger les plus hauts dignitaires nazis.

• Le procès de Nuremberg se tient de 1945 à 1946 dans la ville de Nuremberg. Le procès repose sur un Tribunal pénal international (NOUVEAUTE !) composé de quatre juges (représentant
les quatre vainqueurs, hormis la Chine).

• A cette occasion, de nouvelles notions juridiques sont crées pour pouvoir juger des crimes d’une nouvelle ampleur : le « génocide » (notion créée en 1944 par le juriste polonais Raphael
Lemkin, puis reconnue comme un crime par l’ONU en 1948) et le « crime contre l’humanité » (créé en 1945).

• Le CRIME CONTRE L'HUMANITÉ, nouvelle notion juridique créée pour servir de chef d'accusation du Tribunal militaire international de Nuremberg, correspond à l’origine aux seules
exactions commises à l'encontre des populations civiles en temps de guerre, à savoir l’assassinat, l’extermination, la réduction en esclavage, la déportation et la persécution de populations
civiles. Contrairement aux crimes de guerre (commis contre des militaires), les crimes contre l'humanité sont imprescriptibles.

 La définition de cette notion a été élargie dans les années 1990, en particulier avec la création de la Cour pénale internationale en 2002 à la Haye (premier tribunal international permanent,
dépendant de l’ONU, dont les statuts ont été signés en 1998): le préalable d’un conflit armé disparait, et sont ajoutés la torture, le viol et l’emprisonnement.
Qu'est-ce que la Cour internationale de Justice ?
https://www.youtube.com/watch?v=idZAmlnF6Lc
• Le génocide est une catégorie de CRIME DE MASSE. Trois critères essentiels distinguent le génocide des autres crimes contre l’humanité : l’objectif d’anéantissement, les motifs (raciaux,
religieux ou ethniques) à l’origine de cette volonté, et enfin la programmation organisée de cet anéantissement.

• Le GÉNOCIDE désigne donc la destruction méthodique d’un groupe humain.


Juger des crimes contre l’humanité
À quoi sert la Cour pénale internationale ? https://www.youtube.com/watch?v=EocMemOkxDE
• JUSTICE INTERNATIONALE : La justice pénale internationale s’est constituée après la Seconde Guerre mondiale, pour juger les crimes de guerre commis par les forces
de l’Axe.

• Elle s’est ensuite développée dans les années 1990, avec la création de nouveaux tribunaux internationaux exceptionnels destinés à juger de nouveaux crimes de
masse (au Rwanda et en Ex-Yougoslavie). Ces nouveaux crimes ont généré le besoin de créer un tribunal permanent, la CPI, créée en 2002.

• Cette forme nouvelle de justice s’est développée dans la 2nde moitié du XXème siècle, comme en témoigne le fait que nombreux pays ont signé et ratifié le statut de
la Cour pénale internationale. Toutefois certains pays ont signé le statut sans le ratifier (ex : les États-Unis, la Russie), tandis que d’autres ne l’ont ni signé, ni ratifié (ex
: Chine, Inde).

• L’efficacité de la CPI est donc fragilisée : elle ne peut pas juger les crimes commis sur les territoires de ces États.

 Selon-vous, pourquoi tous les pays ne s’engagent pas dans la Justice pénale internationale?

• Certains pays ne reconnaissent pas la CPI car ses dirigeants peuvent être des auteurs ou des complices de crimes contre l’humanité.

• D’autres refusent l’ingérence des instances internationales dans leurs affaires intérieures, synonyme de perte de souveraineté.

• PROCES NATIONAUX - Les crimes contre l’humanité étant reconnus comme imprescriptibles, ils peuvent être jugés longtemps après les faits.

• Ces procès tardifs nécessitent d’aider les juges à bien comprendre le contexte de l’époque des faits. C'est pourquoi ils peuvent faire appel à des historiens : Robert Paxton, historien
américain spécialiste du régime de Vichy, est ainsi appelé à témoigner en 1997 lors du procès de Maurice Papon, ancien secrétaire général de la Préfecture de Gironde de 1942 à 1944,
poursuivi pour crimes contre l'humanité.

• Mais certains historiens refusent d’y participer, comme Henry Rousso.

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