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Crown Turret TSP 6500 Parts Catalog,

Service Manual
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nual

DescriptionCrown Turret TSP 6500 Parts Catalog, Service ManualSize: 95.6


MBLanguage: EnglishFormat: PDFType of Manual: Parts Catalog, Service
ManualType of Machine: Forklift TruckModel: Crown TSP 6500
TurretContents:TSP 6500 Service Manual (66 files)DIA-1965-001.pdfDIA-1965-03
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main» «comme une chose» qu'elle a «très au cœur»1299. C'est
probablement la lampe (lampade) dont il est question dans un acte
du 8 avril 1587 et dans une lettre du 2 août de la même année, qui
devait brûler perpétuellement devant l'autel de la Madone et à
l'entretien de laquelle elle affecta une somme annuelle de cent écus
pris sur ses revenus de Rome1300. Après une entrevue de ses fils,
Henri III et le duc d'Anjou, à Mézières, et une nouvelle
réconciliation, elle écrivait de cette ville même son intention de
donner aux Murate de Florence, les bonnes Murate, dont elle
sollicitait les prières pour le Roi et pour elle, des biens-fonds en
Toscane, d'un revenu de 6 000 écus1301. Par contrat du 5 juin 1584,
elle les gratifia en toute propriété d'un grand domaine de quatre
fermes qu'elle avait acheté au Val d'Elsa, à charge pour l'abbesse et
les nonnes de chanter tous les jours le Salve Regina pour le salut,
santé et conservation de son très cher fils, Henri III, roi de France,
et de célébrer une messe solennelle des morts le 10 juillet pour
l'âme d'Henri II. Elle demandait pour elle-même de dire à son
intention, de son vivant, la veille de Sainte-Catherine, les vêpres, et
le jour même (25 novembre) la messe; et à perpétuité, quand Dieu
l'aurait rappelée à lui, les vêpres et matines des morts, le jour
anniversaire de sa mort, et le lendemain l'office et messe des
morts1302. Dans la lettre qu'elle leur écrivit le 14 août 1584, pour
leur annoncer l'envoi de l'acte de donation, elle les prévenait aussi
qu'elle mettait à leur disposition mille écus d'or d'Italie, dont la
moitié devait être employée à l'achat du bétail pour les métairies
dont elle les faisait propriétaires «et le surplus au paiement d'une
statue de marbre qui me représentera, laquelle sera mise» en leur
«église suyvant le pourtraict (le dessin)» qu'elle adressait au grand-
duc de Toscane1303. La donation faite à Saint-Louis des Français à
Rome (mai 1584) est plus connue parce qu'elle a duré 1304. Après de
longs procès contre Marguerite de Parme, veuve d'Alexandre de
Médicis (voir l'appendice), Catherine avait recouvré une grande
partie des biens-fonds des Médicis, entre autres le palais des
Médicis--aujourd'hui palais du Sénat--situé tout à côté de l'église
Saint-Louis et de l'hôpital de la nation française, ainsi que des
maisons et boutiques et autres constructions contiguës à ce palais.
De toutes ces dépendances, la Reine assigna le revenu aux
gouverneurs et administrateurs de l'église et de l'hôpital aux mêmes
conditions de prières et de messes. Sixte-Quint avait chargé Saint-
Gouard, alors ambassadeur à Rome, de remettre à Catherine de sa
part «une medaille qui, avec un cent de semblables, a esté trouvée
dans une cassette d'airain, presque toute consommée de la rouille,
parmy les fouilles qu'il a faict à Saint-Jehan de Latran près le
baptistaire de Constantin». Le Pape était «après à verifier si ce aura
esté ledict Constantin ou sainte Hélène, sa mère, qui les y aura
mises, et lors il se déllibère d'y appliquer une infinité de très grandes
indulgences1305». Saint-Gouard, marquis de Pisani, très fin courtisan
sous sa rudesse apparente, n'aurait pas ajouté qu'il ne faillirait pas
d'envoyer les indulgences à la Reine si elle n'y avait pas eu foi.
Note 1299: (retour) Lettres, t. VIII. p. 53.

Note 1300: (retour) Ibid., t. IX, p. 227, et t. IX, p. 451. Sur les biens-
fonds de Catherine à Rome et en Toscane, voir en appendice, Les droits
de Catherine sur l'héritage des Médicis, p. 413-414.

Note 1301: (retour) Lettres, t. VIII, p. 112.

Note 1302: (retour) Ibid., t. VIII, p. 442.

Note 1303: (retour) Lettres, t. VIII, p. 208.--En 1588, elle renonça à


faire payer aux Murate les frais de la statue et même leur envoya un
portrait d'elle «au vif très bien faict». Lettres, t. VIII, p. 208, note 3. C'est
peut-être celui qui est dans le couloir du Musée des Uffizi au palais Pitti.

Note 1304: (retour) Texte de la donation, Lettres, t. IX, p. 493-494--Cf.


t. IX, p. 451, 221 et 227.

Note 1305: (retour) Lettre de Pisani du 30 juin 1587 en app. dans


Lettres, t. IX, p. 481-482.

Mais bien qu'elle multipliât les œuvres pies à mesure qu'elle


approchait de sa fin--et cela autant et peut-être plus par habitude
traditionnelle que par ferveur--elle continuait à distinguer la religion
de la politique. Elle resta toujours ennemie des pratiques outrées:
flagellations, retraites, processions et pèlerinages, où son fils
cherchait l'aide de Dieu, oubliant de s'aider lui-même. A propos d'un
voyage à pied à Notre-Dame de Cléry, elle écrivait avec humeur à
Villeroy: «... La dévotyon ayst bonne et le Roy son père enn a fets
dé voyages à Cléry et à Saint-Martyn-de-Tours, mès yl ne laiset
(laissait) rien de cet qu'yl falloyt pour fayre ses afayres»1306. Elle
n'était ni enthousiaste ni dupe des affectations de zèle. Elle savait ce
qu'elles cachent le plus souvent d'ambition et, pour la sincérité des
intentions, elle assimilait les souverains catholiques, Philippe II et le
duc de Savoie, Charles-Emmanuel, bandés contre Genève et
l'Angleterre protestante, aux chefs huguenots qui avaient tenté de la
faire prisonnière à Meaux avec ses enfants1307. Ce n'est donc ni par
sympathie personnelle, ni par illusion, ni par connivence, qu'elle
souscrivait aux exigences des princes catholiques, mais parce qu'ils
étaient les maîtres de l'heure. Une de ses maximes était de gagner
du temps au prix des sacrifices nécessaires et de savoir attendre le
tour de roue, celui-là favorable, de la fortune. En conséquence, le 18
juillet, quelques jours après la paix de Nemours, le Roi porta lui-
même au Parlement un édit, qui révoquait tous les édits de
pacification, n'autorisait plus qu'une seule religion dans le royaume,
bannissait les ministres, obligeait les simples fidèles à se convertir ou
à s'exiler dans les six mois, déclarait tous les hérétiques incapables
d'exercer aucunes charges publiques, états, offices, dignités et leur
ordonnait de restituer les places de sûreté.
Note 1306: (retour) 9 mars 1584, Lettres, t. VIII, p. 178, cf. L'Estoile,
II, p. 149-150.

Note 1307: (retour) Lettre à Villeroy du 13 novembre 1586, Lettres, t.


IX, p. 83. Sur les armements de Philippe II contre l'Angleterre et la
préparation de l'Armada, voir les lettres d'Henri III et de ses
ambassadeurs à Venise, Charrière, Négociations de la France dans le
Levant, t. IV, p. 542-562 et les notes; et sur les projets de Charles-
Emmanuel contre Genève, Rott, Histoire de la représentation
diplomatique de la France auprès des Cantons suisses, t. II, 274, 279,
283 et références; et aussi le chapitre V du t. I d'Italo Raulich, Storia di
Carlo Emmanuele I duca di Savoia, Turin, 1896, p. 230-314. Toutefois
Catherine semble croire que les levées de soldats même en Italie
menacent surtout l'Angleterre.
Il restait à imposer aux protestants et à leur chef cet arrêt
d'extermination. Le roi de Navarre racontait plus tard à
l'historiographe Pierre Mathieu, qu'en apprenant la paix de Nemours,
il avait eu quelques heures de réflexion si douloureuse que la moitié
de sa moustache avait blanchi. Son imagination avait peut-être au
cours du temps traduit son émotion en une forme concrète, mais
elle n'en a pas probablement exagéré le coup. Il devait craindre que
le bloc catholique ne l'écrasât de sa masse et sous son élan. Mais il
se ressaisit vite. Avec une dignité ferme, il demanda compte à la
négociatrice de cette paix qui bannissait, lui écrivait-il, «une grande
partie des subjets de ce royaulme et bons François» et qui armait,
disait-il, «les conspirateurs... de la force et autoricté du Roy» contre
eux et contre lui-même1308. Il déclarait fièrement qu'ayant cet
honneur d'appartenir au Roi de si près et de tenir tel degré en ce
royaume, il se sentait tenu de s'opposer «à la ruyne de la Couronne
et Maison de France» de tout son pouvoir «contre ceulx qui la
voudroyent entreprendre».

Et cependant Catherine ne désespérait pas, à ce qu'il semble, de


l'amener à se convertir ou tout au moins à souffrir qu'il n'y eût «plus
exercice en ce roiaulme que de la religion catholicque apostolticque
et romaine1309». Mais supposer qu'il changerait d'Église et trahirait
les proscrits pour assurer le repos de son fils, c'était bien mal le
connaître et montrer peu de psychologie.
Note 1308: (retour) Lettres missives, t. II, p. 98, 21 juillet.--Cf. t. II, p.
88.

Note 1309: (retour) Lettre à Bellièvre du 31 mai 1585, Lettres, t. VIII,


p. 308. Dans cette lettre elle dit que la conversion du roi de Navarre était
le seul moyen «de veoir le repos bien asseuré en ce roiaulme».

Il est possible que ses préventions l'aient empêchée d'apprécier


l'intelligence de son gendre. Elle avait d'ailleurs une si haute idée de
sa finesse qu'elle pensait l'avoir toute accaparée. Elle le croyait un
peu fol, et il est vrai qu'il l'était, mais seulement en amour, et elle
l'imaginait incapable d'une politique personnelle, mené et stylé par
ses maîtresses et ses conseillers. Dans une lettre à Henri III, lors des
conférences d'Epernay, elle le comparait à son oncle le cardinal, ce
vieillard sans cervelle. «...Monsieur de Guise, disait-elle est comme
le maistre d'escole et fait tout ainsy du Cardinal que faisoit en
Guyenne, quand j'y estois, le vicomte de Turenne du roy de
Navarre»1310. Aussi était-elle d'avis de bien traiter tous les
personnages influents de son entourage. Elle recommandait à
Bellièvre, qui s'occupait plus particulièrement des affaires de
Navarre, d'être plein de prévenances pour le sieur de Clervaut, qui
représentait son gendre auprès de son fils. Elle-même restait en
correspondance avec Turenne, ce Mentor imaginaire. A tout hasard,
elle conseillait de se préparer à la guerre.

Mais Henri III y montrait peu d'inclination. Il en voulait aux ligueurs,


ses sujets en révolte, de lui avoir fait la loi; il en voulait à sa mère de
lui avoir forcé la main et imposé la paix. En ses crises de colère et de
dignité, il ne consultait et ne ménageait personne. Il s'en prit au
successeur de Grégoire XIII, Sixte-Quint, dont cependant il avait
besoin pour aliéner des biens du clergé jusqu'à concurrence de deux
millions d'or de revenu. Il fit défendre au nouveau nonce, Fabio
Mirto Frangipani, archevêque de Nazareth, à qui il prêtait des
sentiments ligueurs et espagnols, de s'avancer plus loin que Lyon. A
Rome, Pisani, avisé le premier, alla solliciter du Pape comme une
faveur le rappel de Frangipani, et ajouta incidemment que le Roi
l'avait prié de s'arrêter à Lyon. Mais Sixte-Quint, violent et
autoritaire, sans attendre les explications d'Henri III, fit donner
l'ordre à l'ambassadeur (25 juillet 1585)1311 de sortir de Rome le
jour même et des États pontificaux dans les cinq jours. Cette
querelle entre le Roi et le Pape remettait en question la paix de
Nemours.
Note 1310: (retour) 29 mai 1585, Lettres, t. VIII, p. 302.

Note 1311: (retour) Guy de Bremond d'Ars, Jean de Vivonne (Pisani), sa


vie et ses ambassades, 1884, p. 182-185.
Catherine ne fut, semble-t-il, informée qu'après coup. Son fils
affectait de la tenir à l'écart des affaires1312. Elle saisit l'occasion de
ce différend pour offrir ses bons offices, qu'on ne lui demandait pas.
Au fond, elle trouvait au Roi autant de tort qu'au Pape, mais elle ne
se serait pas aventurée à le lui dire. Elle commença par écrire à
Pisani qu'elle était «très marrie de l'injure faite au Roi «en sa»
personne»1313. Elle recommanda au cardinal Ferdinand de Médicis
les intérêts de leur maison. Puis, ayant su quelque temps après que
Sixte-Quint se préparait à excommunier le roi de Navarre et à le
déclarer déchu de ses droits à la Couronne, elle adressa à Villeroy,
n'osant l'adresser directement à Henri III, son avis sur les difficultés
pendantes. Elle ne se préoccuperait pas, disait-elle, de la bulle
annoncée s'il n'y avait lieu de craindre qu'elle n'apportât «plus de
mal que ce que nous avons ou sommes prestz à avoir». Le roi de
Navarre ne montrait pas grande envie de se soumettre à la volonté
du Roi et ses dispositions n'en seraient pas changées. «... En tout
cecy (renvoi de l'ambassadeur et obstination du roi de Navarre) je
n'y vois mal que pour le Roy, car si je le voyois avoir les moyens
pour estre fort, comme je voudrois qu'il le fust, je ne me soucierois
pas d'un bouton de toutes les pratiques et menées, car il n'y aurait
pape ny roy et moins encores ses subjets qui ne s'estimassent bien
heureux les uns de luy complaire, les autres de luy obéir». On avait
besoin du consentement du Pape pour tirer quelque argent du
clergé. «... Jusque là si j'estais creue (et cette réserve prouve qu'elle
ne l'était pas en ce moment), je ferois le doux à tous papes et roys
pour avoir le moyen de avoir les forces telles que je peusse
commander et non leur obéyr, car de commander et n'estre point
obéy, il vaut mieux faire semblant de ne vouloir que ce qu'on peut,
jusques à ce que l'on puisse faire ce que l'on doit»1314. Il ne faut pas
s'émouvoir trop de l'insulte faite au Roi, car elle vient, dit-elle avec
quelque dédain, d'un pape et non d'un prince. Et d'ailleurs «... vous
savez comme l'on a affaire de luy pour avoir de l'argent et aussi pour
l'empescher de faire quelque chose extraordinaire contre le service
du Roy, veu le peu de raison qu'il a (Sixte-Quint passait très
justement pour être colérique) et le peu de respect qu'il porte à tous
les princes»1315.
Note 1312: (retour) Rares sont les lettres d'un caractère politique en
août et septembre 1585.

Note 1313: (retour) : 17 août 1585, Lettres, t. VIII, p. 347.

Note 1314: (retour) 14 septembre 1585, Lettres, t. VIII, p. 350-351.

Note 1315: (retour) 16 septembre 1585, Ibid., p. 352.

Elle croyait si utile de «rhabiller ce désaccord» qu'elle offrait d'aller


elle-même à Rome. Le Roi y avait envoyé M. de Lenoncourt, mais
l'évêque d'Auxerre n'était pas l'ambassadeur qu'il eût fallu. Ce n'était
pas, assurait-elle, par dépit qu'elle blâmait ce choix, bien qu'elle vît,
«à dire la vérité», qu'on l'avait fait pour empêcher qu'elle n'y allât et
ne fit «quelque chose» à son «avis»1316. Maintenant elle n'y pourrait
aller que si son fils faisait entendre au Pape par le cardinal d'Este,
protecteur des affaires de France, les raisons de son voyage et si
Sixte-Quint renonçait à sa déclaration contre le roi de Navarre. Elle
mettait tant de conditions à son envoi qu'il n'est pas bien sûr qu'elle
en eût envie. Mais elle tenait à démontrer son affection à ce fils qui
la boudait. C'est aussi à même fin qu'elle travaillait et réussit, après
une négociation de près d'un an1317, à décider le duc de Nevers à
faire amende honorable à Henri III de sa velléité d'adhésion à la
Ligue. Mais quelque zèle qu'elle montrât, elle n'avait plus même
crédit. Le désaccord de la mère et du fils sur la politique à suivre
allait grandissant. Henri III, par paresse, par scrupules dynastiques,
par orgueil, par haine des Guise, ne se décidait pas à faire aux
protestants la guerre sans merci à laquelle il s'était obligé.
Note 1316: (retour) 14 septembre 1585, Ibid., p. 351.

Note 1317: (retour) : Documents publiés par M. le Cte Baguenault de


Puchesse, Lettres, t. VIII, passim, et t. IX, app., p. 397 sqq.

Catherine appréhendait le danger de ces atermoiements. La Ligue


marcherait contre le Roi, si le Roi ne marchait contre les hérétiques.
Que le Pape publie la bulle privatoire contre le roi de Navarre, et il
«se faut résoudre de faire, écrivait-elle à Villeroy, mais à l'intention
de son fils, ce que du commencement de tout ce remument icy ceux
(les ligueurs) qui les (le) ont commencé, en ont projeté. Car aussi
bien si vous ne faictes de bonne voulonté, à la fin on sera contrainct
d'en venir là»1318.
Note 1318: (retour) 14 septembre, Lettres, t. VIII, p. 351.

Henri III parut décidé. Il se rapprocha de sa mère, et le 16 octobre il


fit enregistrer par le Parlement une déclaration du 7, qui ordonnait à
tous ses sujets protestants de se convertir dans quinze jours ou de
quitter le royaume.

Mais il employa le moins possible les chefs de la Ligue à exécuter le


dessein de la Ligue. Il ne confia pas d'armée au duc de Guise, et s'il
consentit à donner à Mayenne le commandement de celle de
Guyenne, il négligea de lui envoyer des renforts et de l'argent. Il eut
ce contentement que Condé rejeta au delà de la Loire le duc de
Mercœur, qui avait envahi le Poitou, et qu'il fut à son tour mis en
déroute par Henri de Joyeuse, un frère du favori, et forcé de se
réfugier à Guernesey (octobre). Ce double succès des protestants
sur les ligueurs et des troupes royales sur les protestants l'enhardit
tant qu'il avoua les bourgeois d'Auxonne, qui le 1er novembre
avaient emprisonné leur gouverneur pour la Ligue, Jean de Saulx-
Tavannes. Catherine elle-même, qui n'avait capitulé à Epernay que
par peur d'un plus grand mal, en profita pour faire la leçon au duc
de Guise. «Pour le fait de ce qui est avenu à Aussonne, vous avez
grande occasion de le remercier (le Roi) et par vos effets luy faire
connoistre l'assurance que vous avez de sa bonne grace et vous
connoistrez par là qu'il vous a dict vray, que, vous comportant avec
luy comme la raison veut, luy faisant connoistre que vous vous
voulez conformer à toutes ses volontez et avez toute assurance de
sa bonne volonté, qu'il feroit plus que ne sauriez désirer. Je vous prie
donc me croire, et qu'il connoisse qu'estes content et que n'avez
plus nulle défiance qu'il ne vous ayme»1319. Elle voulait à toute force
qu'il se rendît auprès d'Henri III pour louer Dieu tous ensemble «de
nous avoir donné la victoire (sur les protestants) par ses mains
seulle, sans que nul des nostres aist été en hazard»1320. Mais Guise
aurait mieux aimé que ce fût par celles de la Ligue.
Note 1319: (retour) Ibid., p. 364, 8 novembre.

Note 1320: (retour) 15 novembre, Ibid., p. 366.

Cependant les huguenots n'étaient pas tellement «étonnés» de leur


échec qu'ils songeassent, comme elle l'espérait, à se faire
catholiques. Le roi de Navarre avait renoué avec Montmorency-
Damville, à qui Joyeuse voulait ôter son gouvernement de
Languedoc, l'ancienne alliance des huguenots et des catholiques
unis (entrevue de Saint-Paul de Cadajoux, près de Lavaur, 10 août
1585). Il avait député Ségur-Pardaillan à Élisabeth et aux Allemands
pour demander à l'une la somme nécessaire à la levée d'une armée
et offrir aux autres «auprès de qui il (l'ambassadeur) allait sans
argent ni latin» de les payer en terres, faisant «des colonies en ce
royaume de ceux qui y voudront venir».

La passion du roi de Navarre à défendre son parti déconcertait


Catherine qui, à défaut de conversion, se fût contentée, semble-t-il,
d'une défection. Je «croy, écrivait-elle à Bellièvre, que, quant le roy
de Navarre auré byen considéré l'état de toutes chauses, et du
présant et de l'avenir, qu'il conestra que tout son plus grent byen c'et
de se remettre du tout à la volanté du Roy, ay (et) luy aider par tous
moyen à fayr poser les armes,... et que ryen ne le peult fayre que
luy, set remetent (se remettant), come yl douyt (il doit) pour son
byen à cet que le Roy luy demandera». Son grand argument c'est
qu'Henri III, qui avait toujours jusque-là ménagé ses sujets
huguenots, serait encore plus accommodant quand ils auraient
désarmé et qu'il serait «seul fort en son royaume». Mais quand
Clervaut lui demandait: «Que fera le roi de France pour le roi de
Navarre?», elle éludait la question. «Que sarét-yl fayre d'adventège
(davantage) quand yl serèt son fils que ly concéler (conseiller) de
fayre cet que (qui) le peult asseurer de demeurer cet qu'il est nay
(né) en cet royaume, et le prenant en sa bonne grase et protection,
que peult-yl désirer d'aventège?»1321. Le roi de Navarre n'était pas
assez naïf pour se rendre à merci.

Elle résolut d'aller le convaincre et partit en juillet 1586 pour


Chenonceaux, où elle était plus près du théâtre de la guerre et des
négociations. Mais elle avait affaire à forte partie. Il lui fit dire,
écrivait-elle à Bellièvre, 10 août 1586, «que yl desirèt de parler
aveques moy et cet (se) dégorger et que yl savèt byen qu'yl avoit le
moyen de pasyfier cet royaume et qu'yl avèt tousjour coneu que je
le désirès», et qu'«yl me fayrèt conestre que yl desirèt me donner
contentement»1322.

Mais ce n'étaient que paroles pour l'amuser, pendant qu'il négociait


sous main avec le maréchal de Biron, que le Roi avait envoyé contre
les protestants de l'Ouest. Quand il eut obtenu de lui qu'il levât le
siège de Marans, près de la Rochelle, et qu'il consentît une sorte de
trêve (août 1586), il fit le «dyfisile» pour aller la voir. Catherine, qui
n'avait rien su de cet accord qu'après sa conclusion, se désolait de
voir se perdre l'argent de son fils et croître la réputation de son
gendre. Le roi de Navarre obtint encore que, pendant les
conférences, Biron éloignerait ses troupes et qu'il ne se commettrait
aucun acte d'hostilité «es provinces du Hault et Bas Poictou,
Angoumois, Xainctonge, païs d'Onys (Aunis et Brouage)»1323.
Note 1321: (retour) Décembre 1585, à Bellièvre, Lettres, t. VIII, p. 376.

Note 1322: (retour) Lettres, t. IX, p. 28, 10 août 1586.

Note 1323: (retour) Ibid., t. IX, p. 405 et 407.

Alors il fut encore moins pressé de convenir avec elle du rendez-


vous. Il avait intérêt à gagner du temps, sachant que les princes
protestants d'Allemagne avaient fait partir des ambassadeurs pour
recommander à Henri III le rétablissement de la liberté religieuse, et
que, faute d'argent, les armées royales commençaient à se ruiner.
Il multiplia les objections, ne trouva jamais les sûretés assez
grandes, provoqua les défiances par des défiances. Mais elle
s'entêta. Aucune fatigue ne lui coûtait quand il s'agissait de défendre
les intérêts de son fils et aussi de satisfaire sa passion pour les
exercices de haute école diplomatique. A soixante-sept ans, elle
s'exposa, malgré son catarrhe et ses rhumatismes, aux froids de
l'hiver, aux hasards des mauvais gîtes dans les châteaux forts ou les
petites villes et aux coups de main des bandes et des voleurs. Des
pillards arrêtaient ses courriers, dévalisaient ses fournisseurs, et se
montraient «si asseuré (assurés), écrit-elle à Villeroy, que davant-
hyer, où je diné, yl y ann'y avoit quatre; je ne l'é seu qu'après aystre
partye1324». Elle alla chercher son gendre en plein pays protestant,
au château de Saint-Brice, entre Cognac et Jarnac, sur la rive droite
de la Charente. Elle était accompagnée du duc de Nevers, qu'elle
voulait faire témoin de son zèle catholique et brouiller avec la Ligue
par ses attentions, du duc de Montpensier, de quelques conseillers,
de ses dames d'honneur et de sa petite-fille, Christine de Lorraine.
Le roi de Navarre avait avec lui le vicomte de Turenne et le prince de
Condé. La première entrevue (13 décembre) fut peu cordiale1325.
Après les embrassades et quelques propos communs, écrit-elle à son
fils, elle se plaignit à son gendre de la longue attente qu'il lui avait
imposée, et lui du tort qu'on lui avait fait. Elle voulut lui démontrer
que la déclaration de juillet contre les protestants n'avait pas
«seulement esté pour le salut du royaume, mais aussi pour son bien
particulier quand il voudra faire ce qu'il doibt». Il répliqua qu'on avait
levé «plusieurs armées pour tascher à le ruyner», mais que «graces
à Dieu» on ne lui avait pas «faict grand mal» et qu'il aurait «bientost
de grandes forces de reytres». Elle soutint qu'il n'avait point de
reîtres, et que «quand il en auroit, ce seroit sa propre ruyne, car il
achèveroit de se faire hayr des catholicques, de qui il debvroit
rechercher l'amytié». Comme elle le pressait de lui dire ses
intentions, il objecta qu'il ne pouvait rien faire par lui seul et qu'il
devait consulter les Églises. Elle lui représenta, dit-elle, «par les plus
vives raisons que j'ay peu, comme elles sont très grandes et très
véritables en cella, que vous luy tendiez les bras pour son grand
bien, et que s'il tardoit plus à les recepvoir, il y auroit regret toute sa
vie». Mais elle n'en tira rien, et encore «après beaucoup de
difficultez», que la promesse d'en parler le soir à ses partisans1326.
Les propos furent quelquefois très vifs, ainsi que nous le savons par
d'autres témoignages, qui malheureusement sont suspects de
quelque arrangement «.... Le Roy, qui m'est, aurait dit le roi de
Navarre, comme père, au lieu de me nourrir comme son enfant, et
ne me perdre, m'a faict la guerre en loup, et quant à vous, Madame,
vous me l'avez faite en lionne.--Mais mon fils,... voulez-vous que la
peine que j'ay prise depuis six mois ou environ demeure
infructueuse?--Madame, ce n'est pas moy qui en suis cause; au
contraire c'est vous. Je ne vous empesche que reposiez en vostre
lict, mais vous depuis dix-huict mois m'empeschez de coucher dans
le mien.--Et quoy! seray-je toujours dans ceste peyne, moi qui ne
demande que le repos!--Madame, ceste peyne vous plaist et vous
nourrit; si vous estiez en repos, vous ne sçauriez vivre
longuement»1327. C'était la bien connaître.
Note 1324: (retour) 7 novembre 1586, Lettres, t. IX, p. 81.

Note 1325: (retour) Références sur ces conférences dans Lettres, t. IX,
p. 76. Documents en app. t. IX, p. 402-430. Guy de Brémond d'Ars, La
Conférence de Saint-Brice, R. Quest. Histor., octobre 1884.

Note 1326: (retour) Récit de la Reine-mère à son fils du 13 décembre,


Lettres, t. IX, p. 112-114.

Note 1327: (retour) Lettres, t. IX, p. 114, note.

Il revint le lendemain avec Condé, et tous deux demandèrent deux


mois pour faire venir les députés des Églises et écrire en Angleterre
et en Allemagne, «comme ils y sont tenus envers leurs amys». Les
conseillers de la Reine-mère, qu'elle tira à part pour les consulter,
furent d'avis de n'accorder qu'un mois ou six semaines, mais les
princes ne cédèrent pas1328.

Les deux dernières entrevues furent plus courtoises, mais sans plus
d'effet. Elle lui avait fait dire que c'était la volonté du Roi et la sienne
qu'il revînt au catholicisme et fît cesser l'exercice de la religion
réformée dans les villes qu'il occupait. Il s'étonna qu'elle eût pris la
peine de le venir trouver pour lui renouveler une proposition dont il
avait les oreilles rompues. Quand ils se revirent, elle insista jusqu'à
l'importunité sur les avantages d'une conversion. Enfin, voyant
qu'elle ne gagnait rien sur lui, elle offrit de lui accorder une trêve
générale d'un an «à la charge qu'il n'y eût nul exercice de la religion
[réformée] dans le royaume.» Mais il répondit que l'exercice de la
religion ne pouvait être suspendu que par un concile libre et
légitime. Ils se séparèrent sur la promesse vague de se revoir un
peu plus tard en compagnie des députés des Églises «pour adviser
aux moyens d'une bonne et perdurable paix»1329 et en attendant ils
prolongèrent la trêve de deux mois et demi sans conditions.

Elle avait eu double négociation à conduire, avec ce gendre qui se


montrait intraitable, avec son fils, dont les instructions changeaient
d'une lettre à l'autre. En janvier 1587, il écrivait à sa mère qu'il était
résolu à la guerre, si le roi de Navarre refusait «de se réduire à la
religion catholicque et y ranger ceulx de son oppinion»1330. Mais le
même mois, il prévoyait une trêve d'un ou deux ans pour permettre
la réunion d'une assemblée des États ou des principaux du royaume,
qui aviseraient «au salut d'iceluy». Il faudrait pourtant que le roi de
Navarre l'aidât «au faict de la religion». S'il se convertissait, il lui
conserverait le rang «qui luy appartient en ce royaume» et ne
souffrirait «qu'il luy en soit faict aucun tort». En outre, il lui
donnerait une pension «telle que l'on a accoustumé de donner à un
filz de France, qui est de cent mil livres tournois par an; mais il luy
fault oster l'espérance d'avoir un appanage»; car c'est chose qu'il
n'accorderait jamais. Toute cette affaire doit être conduite très
secrètement pour ne pas encourager la désobéissance des
huguenots ou provoquer l'inquiétude des catholiques1331.
Note 1328: (retour) Ibid., p. 115-116.

Note 1329: (retour) Ibid., p. 118 note 1 et p. 121, 18 déc. 1586.

Note 1330: (retour) Janvier 1587, Ibid., t. IX, p. 431.

Note 1331: (retour) Ibid., IX, p. 436-437.


Peut-être Catherine a-t-elle employé d'autres arguments pour
décider son gendre à changer de religion et de parti.

Après la mort du duc d'Anjou, la reine de Navarre avait plus intérêt


que jamais à maintenir en étroite union son frère, qui n'avait pas
d'enfant, et son mari, que la loi salique appelait à lui succéder. Mais
il aurait fallu aimer les deux rois ou mieux encore être aimée d'eux.
La réconciliation des deux époux n'avait pas été suivie de cet accord
parfait que la Reine-mère recommandait à la protection divine. Le roi
de Navarre s'était épris, et comme toujours follement, de Diane
d'Andouins, veuve de Philibert, comte de Guiche et de Gramont, la
belle Corisande1332, comme il l'appelait, qui n'était pas d'humeur à
se laisser traiter de haut ou mettre de côté. Elle s'estimait d'assez
grande maison pour épouser le roi de Navarre et, en ayant
l'espérance, comptait bien se débarrasser de cette intruse légitime.
Marguerite, irritée des bravades de la maîtresse et des rebuffades de
l'amant, s'était enfuie de Nérac, où elle ne se croyait plus en sûreté,
et réfugiée dans Agen, ville de son apanage (mars 1585). Elle s'unit
aux princes catholiques qui allaient imposer à Henri III l'humiliant
traité de Nemours, leva des troupes, se retrancha, et, femme de
l'héritier présomptif, se déclara contre l'héritier présomptif. C'était
bien choisir son temps pour se ressentir des infidélités de son mari.

La Reine-mère s'était d'abord apitoyée sur le sort de sa fille, qui


vivait à Agen «fort desnuée de moyens», et elle avait prié Villeroy de
la faire secourir de quelque argent, «car à ce que j'entendz elle est
en très grande nécessité, n'ayant pas moien d'avoir de la viande
pour elle»1333. Mais ses bonnes dispositions ne durèrent pas. Henri
III, qui ne pardonnait pas à la Ligue de vouloir le mettre en tutelle,
avait de nouvelles raisons de détester sa sœur, qui s'y était affiliée. Il
tenait la preuve authentique, bien qu'elle niât effrontément, qu'elle
avait demandé asile au duc de Lorraine, cet allié honteux du parti
catholique, en intention peut-être de se rapprocher du duc de Guise
et des principaux chefs ligueurs. Catherine en fut malade de chagrin.
En ces nouveaux troubles, écrit-elle à Villeroy, elle recevait de sa fille
«tant d'ennuyz» qu'elle en avait «cuidé (pensé) mourir»1334. Dans
une lettre à Bellièvre du 15 juin, elle parlait de cette «createure»
que Dieu lui avait laissée «pour la punytyon» de ses péchés, «mon
flo (fléau), disait-elle, en cet (ce) monde»1335.
Note 1332: (retour) De Jorgains, Corisande d'Andouins, comtesse de
Guiche et dame de Gramont, Bayonne, 1907, ne dit rien de cette rivalité.

Note 1333: (retour) 27 avril 1585, Lettres, t. VIII, p. 265.

Note 1334: (retour) 22 mai 1585, Ibid., p. 291.

Note 1335: (retour) 15 juin 1585, Ibid., p. 318.

Elle continuait à s'intéresser à elle, mais c'était par acquit de


conscience, et il faut avouer que Marguerite mettait sa tendresse à
une rude épreuve. Henri III ayant ordonné au maréchal de Matignon
de la chasser d'Agen (25 septembre 1585), la Reine-mère fit offrir à
la fugitive--était-ce un asile ou une prison?--le château d'Ibois (près
d'Issoire); mais Marguerite refusa de sortir de Carlat
(arrondissement d'Aurillac), où elle s'était retirée, et pendant plus
d'un an (31 septembre 1585-13 octobre 1586), elle y vécut
abandonnée à ses plaisirs, n'écoutant ni ordres ni remontrances.

Puis, à bout de ressources, elle partit sans chevaux et sans armes et


«portée», dit Catherine, par «quelque aysprit (bon ou mauvais
génie)»1336, elle franchit les âpres montagnes du Cantal pour gagner
Ibois, dont elle n'avait pas voulu un an auparavant. Mais l'humeur de
la Reine-mère n'était plus la même, à supposer même que son offre
d'antan ne fût pas un piège. Elle était scandalisée de la liaison
publique de sa fille avec un tout petit gentilhomme, d'Aubiac, et
avait résolu d'y mettre ordre à la façon du temps. Aussitôt qu'elle sut
l'arrivée de Marguerite à Ibois, elle pressa le Roi avec une ardeur
cruelle de la faire arrêter sans perdre une heure, «aultrement et
(elle) nous fayra encore quelqu'aultre honte». «Tenés-i la mayn,
écrit-elle à Villeroy, qu'yl (Henri III) euse de delygense (use de
diligence)» et que, lui, Villeroy fasse ce qui sera nécessaire «pour à
set coup, nous haulter (ôter) de se torment ynsuportable»1337. Mais
Henri III n'avait pas besoin d'être excité. Avant même d'avoir reçu la
lettre de sa mère, il avait ordonné à Canillac, gouverneur de la
Haute-Auvergne, de se saisir de sa sœur et de l'enfermer dans le
château d'Usson, haut perché sur un roc et ceint d'un triple rang de
remparts1338. Sa lettre au Conseil des finances pour demander
l'argent nécessaire à la garde de la prisonnière respire la haine,
comme aussi cet ordre à Villeroy: «Je ne la veuz apeller dans les
[lettres] patentes que seur (sœur) sans chere et bien aimée; ostez
cella»1339. Il ajoutait: «La Reyne m'enjoint de faire pandre Obyac et
que ce soit an la présence de seste misérable en la court du chateau
d'Usson»1340.
Note 1336: (retour) 23 octobre 1586, Lettres, t. IX, p. 513.

Note 1337: (retour) Ibid., p. 513.

Note 1338: (retour) Scaligeriana sive excerpta... Josephi Scaligeri, 2e


éd., La Haye, 168, p. 239. Usson «est une ville située en une plaine où il
y a un roc et trois villes l'une sur l'autre en forme du bonnet du pape tout
à l'entour de la roche et au haut il y a le château avec une petite villette
à l'alentour».

Note 1339: (retour) Lettre de la première semaine de Janvier 1587, et


non d'octobre 1586, citée par M. le Cte Baguenault de Puchesse, t. IX, p.
108-109, note 1. Henri III dit en effet qu'il sera à Saint-Germain le jour
des Rois, nommément mardi prochain. Le jour des Rois, c'est le 6 Janvier
1587.

Note 1340: (retour) Henri III revint sur cette décision; il voulut
probablement tirer de ce mignon de couchette ce qu'il savait des
agissements de sa sœur (Merki, La Reine Margot, 1905, p. 350). Camillac
expédia Aubiac à Aigueperse, où Lugoli, lieutenant du grand prévôt de
France, qui l'attendait, l'interrogea et, avec ou sans ordre, le fit ensuite
exécuter.

C'était pendant les conférences de Saint-Brice que le Roi arrêtait


avec sa mère la détention et le châtiment de la coupable. Il n'est
donc pas invraisemblable que Catherine ait offert à son gendre, s'il
abjurait, de faire enfermer sa fille dans un couvent et de le remarier
avec sa petite-fille, Christine de Lorraine. La conversion du roi de
Navarre aurait été si avantageuse à Henri III que Catherine a pu
penser, pour un résultat de cette importance, à faire annuler une
union, qui était déjà dissoute en fait. Mais il répugne de croire qu'elle
ait proposé ou laissé proposer à Henri de Navarre de le débarrasser
de Marguerite en la faisant mourir. L'histoire est, il est vrai, rapportée
par Claude Groulard, premier président du parlement de Normandie,
et celui-ci l'avait ouï raconter en 1588, moins d'un an après les
conférences de Saint-Brice, par le maréchal de Retz, qui y avait
assisté. Mais Groulard était un politique et, comme la plupart des
politiques, il tenait Catherine pour le mauvais génie de la famille des
Valois. Quand il répétait, en 1599, la conversation du maréchal de
Retz à Henri IV, devenu roi de France, il y avait onze ans qu'il l'avait
entendue et peut-être y avait-il inconsciemment ajouté. Le fait
qu'Henri IV, à qui il en faisait le récit, lui «eust dict que tout cela
estoit vrai»1341 ne prouve guère. Henri IV estimait que son métier de
roi était de régler les affaires d'État, non de renseigner les curieux.
Quand ses historiographes, Pierre Matthieu par exemple,
l'interrogeaient sur un événement du passé, il faisait la réponse que
l'intérêt du moment lui suggérait1342. A la date où Groulard invoquait
son témoignage, il avait obtenu de Marguerite de Valois qu'elle
consentît au divorce et probablement lui convenait-il de laisser croire
qu'il avait sauvé la vie à la femme qui venait, très opportunément
pour l'avenir de sa dynastie, de lui rendre sa liberté. C'est à lui
qu'Henri III, dans une lettre à sa mère du commencement de 1587,
impute la suggestion de mesures rigoureuses contre sa sœur. «...Il
ne fault pas, écrivait-il, qu'il attende de nous que nous la traitions
inhumainement ny aussi qu'il la puisse répudier pour après en
espouser une aultre»... «je voudrois qu'elle fust mise en lieu où il la
peusse (pût) veoir quand il voudroit pour essayer d'en tirer des
enffans et neantmoins fust asseuré qu'elle ne se pourroit gouverner
aultrement que tres sagement, encores qu'elle [n'] eust volonté de
ce faire.... Je pense bien que cette ouverture luy sera d'abordée de
dure digestion, d'aultant que j'ay entendu qu'il a le nom de sa dicte
femme très à contrecœur. Si est-ce toutes-fois qu'il fault qu'il se
resolve de n'en espouser jamais d'aultre tant qu'elle vivra et que, s'il
s'oublioit tant que de faire aultrement, oultre qu'il mettroit sa lignée
en doubte pour jamais, il me auroyt pour ennemi capital»1343.
Note 1341: (retour) Mémoires de Claude Groulard, dans Michaud et
Poujoulat, 1re série, t. XI, p. 582.

Note 1342: (retour) II avait la mémoire imprécise et complaisante des


hommes d'État et une imagination très vive. Nombre de légendes se sont
ainsi établies sur sa foi. Il aurait entendu à l'entrevue de Bayonne
concerter le projet de la Saint-Barthélemy, comme s'il était vraisemblable
qu'on eût décidé le massacre des protestants devant cet enfant de onze
ans et demi, d'une intelligence précoce, et qui n'aurait pas manqué d'en
avertir sa mère, Jeanne d'Albret, cette hugnenote soupçonneuse. Il
raconta au Parlement, pour enlever l'enregistrement de l'Édit de Nantes,
qu'après le massacre de Paris, jouant aux dés avec le duc de Guise, il les
lui avait vu abattre rouges de sang. En 1603, afin d'obtenir le rappel des
Jésuites, il ne craignit pas d'affirmer à cette Cour, qui savait bien le
contraire, que Barrière, son assassin, ne s'était pas confessé à un jésuite
et même qu'il avait été dénoncé par un jésuite. Or il est certain que la
dénonciation vint d'un dominicain florentin établi à Lyon. Il serait facile de
multiplier les exemples de ces altérations volontaires ou non de la vérité.

Note 1343: (retour) Janvier 1587, Lettres, t. IX, p. 437.

Du récit de Claude Groulart comparé avec cette lettre, et en


supposant qu'il soit exact, on peut simplement conclure que la
Reine-mère a d'elle-même sans l'aveu de son fils, proposé à son
gendre la solution du divorce et du remariage qu'elle lui savait
agréable, mais à condition qu'il se fît catholique et elle savait
combien il y répugnait. L'appât qu'elle lui tendait n'avait peut-être
d'autre objet que de mesurer la force de son attachement au parti
protestant.

Marguerite, dans les premiers temps de sa captivité, se crut perdue.


Elle écrivait à M. de Sarlan, maître d'hôtel de Catherine: «Soubs son
asseurement et commandement (de sa mère) je m'estois sauvée
chez elle et au lieu du bon traitement que je m'y promettois je n'y ai
trouvé que honteuse ruine. Patience! elle m'a mise au monde, elle
m'en veut oster»1344. Avait-elle le soupçon de quelque dessein
criminel ou parlait-elle de sa réclusion avec l'exagération de la
douleur?

Mais elle ne s'abandonna pas longtemps. Elle séduisit ou acheta le


marquis de Canillac, son geôlier1345. Le duc de Guise ne l'oubliait
pas. Dès le 18 février 1587, la Reine-mère savait par une lettre du
Roi que Canillac négociait avec les ligueurs. Elle refusait de croire à
cette «infidellité», de la part d'un serviteur jusque-là si zélé.
«Monsieur mon filz,... ce me seroit une telle augmentation
d'affliction que je ne sçay comment je la pourrois supporter»1346.
Mais deux jours après elle apprenait, sans y ajouter encore foi, que
dans une réunion à Lyon, où se trouvaient quelques-uns des plus
notables personnages de la Ligue, M. de Lyon (Pierre d'Épinac,
archevêque de Lyon), le gouverneur Mandelot et le comte de
Randan, gouverneur d'Auvergne, Canillac avait promis de mettre «la
Reyne de Navarre en lyberté et en lyeu seur»1347. En effet Canillac
s'entendit avec Marguerite et lui livra le château, d'où il avait fait
sortir ou laissé expulser les Suisses qui le gardaient. Elle vécut là
dénuée de ressources, reniée par les siens, mais toutefois à l'abri
des tempêtes politiques et des catastrophes et se consolant de ses
disgrâces par l'étude, la rédaction de ses Mémoires et d'autres
plaisirs moins innocents1348. Henri III avait trop d'affaires pour
penser à reprendre Usson.
Note 1344: (retour) : Mémoires et lettres de Marguerite de Valois, éd.
Guessard, p. 298, lettre qui est citée à tort par l'éditeur des Lettres, t.
VIII. p. 265, comme ayant été écrite après la fuite de Nérac.

Note 1345: (retour) Merki, p. 356 sq. Que Canillac ait été débauché du
service du Roi par la beauté de sa prisonnière, comme le veut la légende,
c'est possible, mais contrairement à la légende, il ne se laissa pas berner.
Il lui vendit à bon prix la liberté et le château d'Usson, et peut-être reçut-
il quelque chose de plus comme à-compte ou comme appoint. Séduction
et rançon ne s'excluent pas nécessairement.

Note 1346: (retour) Lettres, t. IX, p. 176; lettre à Canillac, ibid., p. 177.

Note 1347: (retour) Lettres, t. IX, p. 181. Sur les relations des Guise
avec l'Archevêque, voir P. Richard Pierre d'Épinac, 1901, p. 272, qui les
fait commencer un peu plus tard.

Note 1348: (retour) 1348: «Elle est libre, dit le célèbre philologue,
Joseph Scaliger, qui la visita à Usson, faict ce qu'elle veut, a des hommes
tant qu'elle veut et les choisit.» Scaligeriana, 1668, p. 239.
A Saint-Brice, le roi de Navarre s'était gardé de rompre avant que les
secours d'Allemagne fussent rassemblés; il fit traîner ensuite les
négociations tant qu'il put. Il donnait par exemple rendez-vous à
Catherine à Fontenay, mais de Marans où il venait d'arriver, il se
refusait à faire un pas vers elle. Il finit par lui envoyer le vicomte de
Turenne, qui lui proposa sans rire le secours des protestants français
et étrangers «pour restablir l'autorité du Roi anéantie par ceulx de la
Ligue et acquérir un perdurable repos à ses sujets»1349. Elle comprit
que le roi de Navarre se moquait d'elle; ce fut la fin des conférences
(7 mars 1587).

Il y avait sept mois et demi qu'elle avait quitté son fils. Elle revint à
Paris où sa présence était bien nécessaire. Elle ne pouvait pas traiter
avec un parti sans alarmer l'autre. Avant même qu'elle eût joint le
roi de Navarre, le duc de Guise écrivait à l'ambassadeur d'Espagne
Mendoza qu'elle voulait «troubler le repos des catholiques de ces
deux couronnes (France et Espagne), qui consiste en union».1350 Il
invita son frère, le duc de Mayenne, en prévision du compromis qu'il
redoutait, à rentrer en son gouvernement de Bourgogne et à
s'assurer de Dijon. Les chefs de la Ligue réunis à l'abbaye
d'Ourscamp (octobre 1586) décidèrent d'inviter le Roi à observer
l'Édit d'Union de point en point, et s'entrejurèrent de lui désobéir s'il
faisait quelque accord avec les hérétiques. Sans attendre ses ordres,
ils attaquèrent le duc de Bouillon, qui recueillait dans ses États les
protestants fugitifs, et, contrairement à ses ordres, Guise assiégea
pendant l'hiver de 1586-87 les places de Sedan et de Jametz, qui
bridaient la Lorraine.

Le duc d'Aumale s'empara de Doullens, du Crotoy, etc., en Picardie.


A Paris, la haute bourgeoisie parlementaire restait fidèle à Henri III
par loyalisme et par peur des troubles; mais la moyenne bourgeoisie
et le peuple s'indignaient de sa mollesse contre les hérétiques et
imputaient à hypocrisie les pèlerinages, les processions et les
retraites, toutes les mascarades de sa piété maladive. L'exécution de
Marie Stuart (18 février) surexcita la haine contre les protestants,
ces protégés de la «Jézabel anglaise». Les ligueurs les plus ardents

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