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Les secrets dévoilés de la géologie du Médoc

Suite aux sondages pétroliers de 1954 et 1965 près de Lesparre à Soulac, une prospection d’huile et
de gaz s’est révélée sans grand résultat. Cependant, grâce à cette prospection, des géoscientifiques
ont eu l’opportunité de retracer l’histoire géologique du Médoc (y compris celle de l’Estuaire de la
Gironde) à l’aide d’importantes données récupérées lors de l’étude du sous-sol profond dans la région
du Médoc.

Un petit rappel :
Selon Fairbridge (1980), un estuaire est défini comme « un bras de mer pénétrant une vallée fluviale
jusqu’à la limite amont de la marée ». Cette zone estuarienne est subdivisée en trois parties : l’estuaire
marin, l’estuaire moyen et l’estuaire fluvial. Long de 75 kilomètres et large de 12 kilomètres à son
embouchure, l’Estuaire de la Gironde est le plus vaste d’Europe occidentale, couvrant une superficie
de 635 km2.

Retraçons l’histoire géologique du Médoc en 20 étapes :

1. La région du Médoc repose sur un socle de terrain argilo-calcaire d’âge Dévonien plissé par la
formation de la chaîne Hercynienne, et ensuite fortement érodé jusqu’à devenir une pénéplaine.
Cette dernière est recouverte d’une dizaine de mètres d’argile continentale du Trias (Keuper
supérieur).

2. Au Lias inférieur, des évaporites (anhydrite et dolomie) s’accumulent dans des lagunes sursalées ;
puis la mer envahit toute la région (dit aussi une transgression marine). La présence de la mer
sur le continent permet la formation de 650m d’épaisseur de calcaires et de marnes à Ammonites
pendant 40 millions d’années (M. A.) au cours du Lias supérieur.

3. Un soulèvement du continent Eurasien, lié au mouvement de la plaque Ibérique, à la fin du


Jurassique, provoque un retrait/recul de la mer (autrement dit une régression marine) vers le
Sud-Ouest.

4. La région, de nouveau émergée au Crétacé inférieur, est soumise à une faible érosion.

5. Une nouvelle transgression marine, au Nord de l’Aquitaine, au Cénomanien, est caractérisée par
des sables et des argiles contenant des débris de bois transformés en lignites (cf photo prise à
Montalivet). Ces lithologies prouvent une proximité de la côte et une mer peu profonde. Se
succède 650m d’épaisseur de calcaires marins, très fossilifères, jusqu’à la fin du Crétacé (soit
durant -30 M. A.).

6. A nouveau, une régression marine vers l’Ouest résulte d’un soulèvement général du continent
eurasien lié à un début d’ouverture d’un rift dit le Golfe de Gascogne à l’Ouest à la fin du Crétacé.

7. Sous un climat tropical, chaud et humide, se forment des formations continentales de la période
Infra-Eocène : on parle de dépôts d’argiles rouges (semblables au latérites actuelles) résultantes
de la désagrégation des roches.

8. A la fin du Crétacé, la collision entre les plaques africaine et eurasienne donne naissance aux Alpes
autrichiennes et au golfe de Gascogne par rotation de la plaque Ibérique et, coulissage sur une
faille transformante suivant l’axe futur des Pyrénées.

Les secrets dévoilés de la géologie du Médoc, réalisée par Cindy METREAU, 2021.
Château Pierre de Montignac, Cru Bourgeois Supérieur, Appellation Médoc, Civrac-en-Médoc.
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9. A l’Eocène inférieur, la mer revient dans la région ; s’y déversent des sables et des argiles de
l’érosion du Massif Central, amenés par de grands fleuves et s’accumulent sur la bordure de la
mer. La formation de la chaîne des Pyrénées, événement majeur dans l’histoire de l’Aquitaine, se
termine vers la fin de l’Eocène. Elle est à l’origine d’une collision entre les plaques tectoniques
continentales Eurasienne et Ibérique vers -40 M.A.

Comme toute chaîne de montagne au cours de sa formation, elle créée des déformations de part
et d’autre de la collision, notamment de légers plissements dans le bordelais.
Il y a environ -49 M. A., cette chaîne engendre, en Aquitaine, la formation d’un affaissement (dit
aussi une subsidence à l’origine de la formation d’un bassin sédimentaire) et d’une transgression
marine surnommée « la transgression lutécienne ». Cette mer peu profonde permet la formation
d’un calcaire riche en fossiles d’échinodermes « des oursins » (la formation de calcaire
Couquèques).

10. A la fin de la période de l’Eocène inférieur, une autre régression marine à nouveau vers l’Ouest.
Néanmoins, la région reste cette fois-ci recouverte par les eaux de grandes lagunes et de
marécages. Des argiles à Ostrea cucullaris et le « calcaire lacustre de Plassac » se sont formés dans
de petits lacs présents par endroits.

11. C’est alors que le plus intéressant arrive. Une nouvelle fois, la mer recouvre les lagunes et y dépose
des calcaires et des marnes dits de Saint-Estèphe. Cette formation géologique calco-marneuse
de St Estèphe s.l. datant de la période de l’Eocène supérieur moyen est caractérisée à son membre
supérieur par un faciès marin : on parle de plate-forme carbonatée marine. Ce faciès marin est
appelé les “calcaires de St Estèphe s.s”, un calcaire bioclastique très fossilifère.

Plus précisément, ce sont des alternances de calcaires et calcaires argileux à passées marneuses,
à E.ovalis et Sismodia occitana.
A partir de 1988, la propriété du Château Pierre de Montignac plante ses premières vignes dans
cette formation géologique ;

12. Des sédiments de plus en plus continentaux, vers la fin de l’Eocène (-37 M. A.), sont observés suite
à une autre régression marine.
Ce sont notamment des sables venus du continent situé plus à l’Est qui se déposent sur le Médoc :
on les appelle « les Molasses du Fronsadais » originaire de Fronsac, des sédiments d’origine
fluviatile. Ils sont impossibles à dater sans la présence d’organisme, supposés de l’Eocène.

A l’Oligocène inférieur, une courte apparition de la mer favorise le dépôt de sédiments marins
riches en faune : ce sont les marnes de Bel-Air (près de Civrac).
Une nouvelle fois retirée, des lacs se forment riches en planorbes.
De retour sur le continent, la mer assez chaude et peu profonde dépose 30 à 40m de « calcaires à
Astéries » (oursins, petits coraux, étoiles de mer). Il existe des couches lacustres attribuées à la fin
de l’Oligocène, retrouvées à 90m de profondeur sous la région d’Hourtin.

13. Au début du Miocène (-25 M. A.), la région du Médoc est recouverte par des eaux marines
déposant ainsi des sédiments marneux et sableux coquillers à « faluns » à tendance verdâtre
(présence de glauconie).

14. La dernière régression marine est observée vers la fin du Miocène. Par la suite, les interprétations
de la prospection deviennent plus floues.

15. Au Pliocène (-5 M. A.), une forte altération de tous les terrains s’est traduite par un climat tropical.
16. Le début du Quaternaire (ou Pléistocène) est rentré dans une époque glaciaire.

Les secrets dévoilés de la géologie du Médoc, réalisée par Cindy METREAU, 2021.
Château Pierre de Montignac, Cru Bourgeois Supérieur, Appellation Médoc, Civrac-en-Médoc.
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17. De grands fleuves -les futures Dordogne et Garonne- charrient des sables, des graviers et des
galets en provenance des Pyrénées et du Massif Central. La feuille de Lesparre -autrement dit le
Médoc- est nettement recouverte par ces dépôts dans lesquels les fleuves recreusent leur lit, en
déplaçant les sédiments déjà déposés. Selon des océanographes, vers -20 M. A., le rivage était
beaucoup plus loin à l’Ouest.

18. L’Estuaire de la Gironde existe déjà, à la fin de l’époque glaciaire, avec les sables et les graviers
entaillés par des vallées étroites et profondes (20 à 40m). En parallèle, la mer a déjà commencé à
remonter.

19. Lors de la période Holocène (dite aussi post-glaciaire), il y a -10000 ans, le climat se réchauffe
progressivement avec une mer régressive à environ 45m sous son niveau actuel. Elle dépose, des
argiles et des sables (Huîtres et Lamellibranches lisses à coquille mince), au Nord de Lesparre et de
Couquèques. Ces dépôts sont retrouvés lors des marées basses sur les plages de l’Estuaire
(Verdon).

Simultanément, au cours de cours épisodes, cette régression marine favorise l’accumulation de


sable et la croissance de dunes (dits aussi des cordons dunaires) formés en bordure de l’Océan
Atlantique, sous l’action du vent.
A l’heure actuelle, ces cordons dunaires ont subi une érosion de taille creusant ainsi des falaises
qui recoupent d’anciens sols. Cette érosion est due à la remontée des océans dont le niveau a
augmenté de 120m depuis la fin des temps glaciaires, il y a environ -15000 ans.

Dès lors, le côté positif de cette érosion est la découverte de vestiges préhistoriques. Par exemple,
d’émouvantes empreintes de troupeaux de moutons datées du néolithique final, l’époque des
débuts d’agriculture, se sont révélées au Gurp, près de Soulac.

20. Les petites vallées creusées par les fleuves dans lesquelles la mer s’est avancée sont colmatées
progressivement par des argiles. Ces vallées sont ensuite transformées en marais où poussent des
joncs qui plus tard deviendront des tourbes (Source : carte géologique à 1/50000 de Lesparre-
Médoc, l’aperçu géographique et géologique d’ensemble de Lesparre-Médoc, faite par le Bureau
de Recherche en Géologie Minière (BRGM)).

Grâce à des ingénieurs hollandais, sous le règne de Louis XIV, ces étendues de tourbes (dites
marécageuses) sont définitivement asséchées. Elles restent néanmoins alimentées par de petits
ruisseaux appelés des jalles (ou esteys).

Ces zones désertes ont servi pour l’activité humaine. La Loi de Napoléon 3 en 1857 n’a pas fait
naître la forêt landaise mais elle a créé une forêt à vocation industrielle. Il s’est trouvé que le pin
sylvestre fût choisi par sa croissance et sa rentabilité rapides (bois, résine).

Cette connotation industrielle n’existe plus à partir du 26 Mai 2019 : en effet, la forêt des Landes,
un important massif forestier, le premier au niveau européen, sera classée en tant que Parc
Naturel Régional (PNR) du Médoc, soit en 54ème position sur l’ensemble des PNR de France (cf
symbole www.pnr-medoc.fr).

Les secrets dévoilés de la géologie du Médoc, réalisée par Cindy METREAU, 2021.
Château Pierre de Montignac, Cru Bourgeois Supérieur, Appellation Médoc, Civrac-en-Médoc.
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Etude des structures tectoniques de la région girondine (dont le Médoc) :

• Elles affectent toutes les couches géologiques depuis le socle hercynien (ère Primaire, Dévonien)
jusqu’à l’Eocène supérieur (dont la formation de St-Estèphe), de part et d’autre de l’estuaire. Ce
sont notamment :

o Plusieurs réseaux de failles normales d’orientation NW-SE et de fort pendage vers le SW


suivis par le cours du fleuve de la Garonne et de l’estuaire de la Gironde.

Ces deux derniers présentent une rive gauche affaissée de 40-50m par rapport à la rive droite
(cf fig. 1).

Figure 1 : Schéma représentant la dislocation de la plate-forme calcaire, liée aux failles de


Bordeaux et de la Garonne

(source : https://parclab.files.wordpress.com/2017/07/2017-05-17-bc-parccotx-2.pdf).

La rive gauche se retrouve avec 6 terrasses datant du Quaternaire sur lesquelles se sont
développés différents domaines de vignoble tel que les AOC de Pauillac, de St-Estèphe et du
Médoc.
Tandis que la rive droite est dominée par une épaisse plateforme carbonatée et son sol
graveleux du Quaternaire, aussi recouverte de quelques vignobles et autres activités agricoles.
Elles sont des marqueurs de la phase d’extension lors de la formation du rift du golfe de
Gascogne à l’Ouest pendant la rotation de la plaque Ibérique le long d’une faille transformante
à partir de -180 M.A.

Exemples : les failles de l’estuaire et de Bordeaux ;

o Plusieurs séries de plis synclinaux-anticlinaux.


D’après la chronique du livre « L’évolution du relief dans la région girondine » écrit par François
Taillefer en 1945, « par sa structure, la région girondine correspond en effet à un vaste
synclinal limité au Nord et au Sud par deux bombements anticlinaux. Au Nord, c’est le plus
méridional des anticlinaux crétacés des Charentes, celui de Jonzac. (…). Beaucoup moins
important apparaît le bombement qui limite le synclinal girondin au Sud.

Les secrets dévoilés de la géologie du Médoc, réalisée par Cindy METREAU, 2021.
Château Pierre de Montignac, Cru Bourgeois Supérieur, Appellation Médoc, Civrac-en-Médoc.
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Il s’agit du plus septentrional des alignements anticlinaux qui forment, dans le Sud du Bassin
d’Aquitaine, comme les dernières vagues du plissement pyrénéens. » (source : p.122,
https://www.persee.fr/doc/rgpso_0035-3221_1945_num_16_1_1229).

Mais aussi, « le synclinal girondin ne répond pas à la définition classique du synclinal, pli en
creux entre deux plis en voûte appartenant au même plissement.
C’est une zone synclinale où interfèrent les ondes de deux plissements différents par l’origine
et par la direction de la poussée, et par l’âge du paroxysme, la poussée pyrénéenne étant déjà
sur son déclin quand celle venue des Alpes atteignait sa plus grande force. » (source : p.124,
https://www.persee.fr/doc/rgpso_0035-3221_1945_num_16_1_1229).

Citons comme exemples de plis anticlinaux celui de Jonzac en Charentes et, de Couquèques
côté Médoc. Pour les plis synclinaux, celui de Hourtin-Pauillac et celui de Bordeaux (cf fig. 2).

Figure 2 : schéma structural géologique profonde de la Gironde (d’après


Prud’Homme et Gottis, 1966 et gely et Sztrakos, 2000, modifié,
http://sigesaqi.brgm.fr/IMG/png/apercu_geologique_figure_2.png.

o Des réseaux de failles décrochantes et inverses orientées N60-N70E (quasi Est-Ouest),


marqueurs d’une déformation à la fois « coulissante » et compressive Nord-Sud, commençant
d’Ouest en Est, lors de la formation de la chaîne Pyrénéenne par la remontée de la plaque
Afrique vers celle de l’Eurasie.

Vers -30 M. A., cette collision ferme définitivement une fosse marine profonde qui a relié
auparavant l’Océan Atlantique à la Mer Méditerranée.

Les secrets dévoilés de la géologie du Médoc, réalisée par Cindy METREAU, 2021.
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Bilan de la géologie du Médoc :

• Sur le plan lithologique, une série de successions de transgressions et de régressions marines


ainsi que d’érosions a favorisé la formation du bassin d’Aquitaine (dont la région du Médoc),
de grands fleuves (la Dordogne et la Garonne) et de l’Estuaire de la Gironde d’aujourd’hui (cf
fig. 3).

Figure 3 : Schéma de la répartition et de l’origine des différents dépôts dans le synclinal girondin

(source : https://parclab.files.wordpress.com/2017/07/2017-05-17-bc-parccotx-2.pdf)

• Sur le plan structural, ces paysages sont aussi formés par l’influence de nombreuses structures
tectoniques profondes assez complexes par la formation simultanée du rift du Golfe de
Gascogne et de deux chaînes montagneuses, celle des Pyrénées et des Alpes.

• Sur le plan géographique, rappelons-nous que le Château Pierre de Montignac appartient


au AOC Médoc. L’AOC Médoc concerne la partie nord de la presqu’île de la Gironde dans le
Sud-Ouest de la France. Elle s’étend sur 80 km de long et 10 km de large.
Divisée en deux, le Haut-Médoc se trouve au Sud et le Bas-Médoc au Nord, dit aussi
Appellation Médoc (https://avis-vin.lefigaro.fr/connaitre-deguster/tout-savoir-sur-le-
vin/guide-des-regions-et-des-appellations/bordeaux/medoc/appellation-medoc).

Les sols argilo-calcaires de St-Estèphe bien drainés de l’Eocène, sur lesquels le Château Pierre
de Montignac repose, favorise la production de vins très colorés, au bouquet délicat, très
tanniques dès leur jeunesse. Ces vins de sols argilo-calcaires peuvent être dégustés très
jeunes. D’autre part, ils peuvent vieillir longtemps jusqu’à atteindre leur apogée après 5 à 10
ans : on les considère comme des vins de garde.

Les secrets dévoilés de la géologie du Médoc, réalisée par Cindy METREAU, 2021.
Château Pierre de Montignac, Cru Bourgeois Supérieur, Appellation Médoc, Civrac-en-Médoc.

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