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Université de Béjaia

Faculté de technologie
Département d’architecture
Année universitaire 2020-2021
Deuxième année Licence académique
Anthropologie de l’espace
Premier semestre
Mr. BADIS

3ème Cours: L’appropriation de l’espace

Sommaire:

1) Introduction.
2) Types d’appropriation de l’espace:
2-1) L’appropriation (au sens de possession).
2-1-1) L’appropriation (Posséder).
2-1-1-1) L’appropriation effective (concrète)
2-1-1-2) L’appropriation affective (symbolique)
2-1-2) La désappropriation (Déposséder).
2-1-3) La réappropriation (Récupérer).
2-2) L’appropriation (au sens d’adaptation).
2-2-1) L’appropriation-adaptation.
2-2-2) La réappropriation-réadaptation.
3) Bibliographie.
1) Introduction:

La thématique, ou bien, la problématique de l’appropriation de l’espace est


devenue, non seulement un nouvel objet de recherche pour le domaine
architectural (c’est-à-dire toutes les disciplines intervenant dans ce
sens), mais aussi un thème central accompagnant l’œuvre
architecturo-urbanistique tout au long de son processus de
contextualisation et de réalisation; En d’autres termes, ces domaines
qui ont pour sujet la réflexion, et pour objectif la production de l’espace,
sont tenus désormais de prendre en considération l’interaction entre
deux éléments spatiaux interactifs, à savoir l’espace et les usagers, et
de saisir l’impact ressenti de l’un sur l’autre.
L’appropriation de l’espace est alors appréhendée comme étant les
manières de posséder, d’appréhender, de consommer, d’utiliser et de
façonner l’espace; Ces manières d’approprier (posséder et façonner)
l’espace sont dûes aux facteurs (sociologiques) déterminants de la
qualité culturelle et du niveau de vie des usagers, qui définissent leurs
savoir-faire spatial et leur savoir-vivre dans l’espace, car ces usagers
recourent souvent à développer des représentations spatiales, des
mécanismes et des logiques d’appropriation de l’espace, ce qui crée
sur les plan socio-spatial une crise d’usage de l’espace, et sur le plan
socio-architectural, une crise de conception de celui-ci.
2) Types d’appropriation de l’espace:
2-1) L’appropriation (au sens de possession).

2-1-1) L’appropriation de l’espace (posséder).

L’appropriation de l’espace ici, est le fait de s’approprier, d’acquérir, de


posséder, de rendre propre à soi un espace donné, de quelque manière
qu’il soit, c’est-à-dire d’une manière légale ou illégale, d’une manière
directe ou indirecte, d’une manière effective ou affective, d’une manière
concrète ou symbolique, d’une manière individuelle ou collective,,,etc.
La sociologie urbaine, a assez étudié ce phénomène d’un point de vue
conflictuel, c’est-à-dire l’étude du conflit social autour de l’espace et
comment les individus se le disputent : Les bourgeois habitent les
quartiers chics et s’approprient les meilleures parcelles du centre urbain,
tandis que les pauvres se réfugient à la marge de la ville; les nouveaux
commerces se disputent les meilleures rues marchandes à forts revenus,
et s’installent dans les riches quartiers du centre urbains, tandis que les
anciens métiers de réfugient dans les quartiers à faible valeur foncière,,,
etc.
À cet effet, on peut discerner deux types d’appropriation de l’espace, suivant
que les gens qui ne peuvent s’approprier l’espace effectivement, s’en
réjouissent en l’appropriant symboliquement, ou bien, ils peuvent se
l’approprier que ce soit physiquement ou symboliquement :
2-1-1-1) L’appropriation effective (concrète).

L’appropriation de l’espace est ici réelle (propriété physique); Légale, ou


parfois même légalisée arbitrairement dans le cas, ou, pour le compte
de la mafia du foncier; L’espace ici s’acquiert que ce soit par le biais
de l’achat, de l’héritage, du legs, de la concession, du don, du
troc,,,etc ; d’une façon juridique, que ce soit par le biais des acte de
vente, de possession, de concession ou d’échange, qui définissent le
statut juridique de l’espace approprié.
L’espace autrefois, surtout rural, était la propriété sacrée, inaliénable et
collective de la communauté, du village, au point que ce sont les
individus qui appartiennent à l’espace et non le contraire, et qui se
transmettait essentiellement par l’héritage au sein du cercle familial;
mais avec l’urbanisation colonialiste (expropriation) de ces centre et
noyaux traditionnels, (villages, douars), l’État a pris forcément
possession de cet espace (colonisation, désappropriation), et qui en a
fait plus tard, une propriété privée aux mains des colons, ou bien
publique aux mains de l’armée et de l’État.
L’appropriation de l’espace, vue à partir de cet exemple historique,
signifie que l’espace est la base, le support physique et moral de la
société, et un enjeu social (objet de conquête, de litige, de meurtres)
qui détermine l’ancrage des population au sol, leur sédentarité, leur
culture, leur économie, leur appartenance, leur l’identité,,,etc.
2-1-1-2) L’appropriation affective (symbolique).

L’appropriation de l’espace est ici irréelle (propriété symbolique); illégale


(par le biais du squatte), les gens s’approprient l’espace, car ils se sont
familiarisés avec lui (à force de passer par une rue, de s’asseoir dans
une place, de vivre dans une encoignure, celles-ci deviennent
familières), car ils font extension spatiale de leurs activités (à force
d’étaler son commerce dans le trottoir, celui-ci devient la propriété
symbolique du commerçant et non des passagers,,,etc). Un vendeur
qui ne peut s’approprier un local dans une rue marchande, installe son
petit commerce (table) à la sauvette dans le trottoir, un vendeur qui ne
peut s’approprier un local beaucoup plus spacieux pour son activité,
étale sa devanture à même le trottoir, et ce, en guise d’extension.
De même, les habitants des quartiers chics ont tendance à éloigner et
exclure les gens qui n’y habitent pas, dans certains cas, ce sont des
patrouilles de police qui assurent cette tendance; Tandis que les
quartiers populaires sont impénétrables à leur tour pour les gens des
quartiers riches, dans certains cas, ce sont les gangs qui assurent
cette tendance; Aussi, dans les quartiers riches, les périmètres et les
lignes de démarcation sont matérialisées par des signes comme les
plaques de circulation (stationnement interdit, sens interdit, sens
unique, propriété privée,,,etc), et quant aux quartiers populaires, leur
territorialité est signifiée aux extras par des signes comme les graffitis
de mafia ou des clubs de foot (MCA à Alger, MOB à Béjaia,,,etc.).
2-1-2) Désappropriation de l’espace: (déposséder)

La désappropriation de l’espace signifie ici, déposséder quelqu’un de son


espace, le priver de son usage, l’exclure de son cadre physique ou
symbolique; L’exemple le plus démonstratif dans ce cas de figure est
bel et bien l’expropriation, que ce soit une désappropriation ‘’forcée’’,
comme ce fût le cas avec le colonialisme français qui a détruit les villes
algériennes (casbah d’Alger, de Béjaïa,,,etc) pour y installer la ville
européenne et la communauté européenne; Ou une désappropriation
‘’négociée’’, comme ce fût le cas avec le réaménagement
haussmannien de l’ancien Paris; Dans les deux cas, les anciens
habitants ou citadins sont sommés de quitter les lieux, pour des raisons
de renouvellement urbain, c’est-à-dire qu’ils cèdent l’espace à de
nouveaux propriétaires, à de nouveaux occupants, ce qui constitue un
phénomène de gentrification ou d’embourgeoisement de l’espace.
Les mécanismes de désappropriation peuvent être juridiques, (faute d’acte
de propriété), administrative (primauté de l’intérêt général), financières
(taxes sur l’habitat, impôts sur les services, ), économiques (les prix
élèves du foncier et de l’immobilier).
2-1-3) Réappropriation de l’espace: (récupérer).

La réappropriation de l’espace signifie ici, la récupération de son espace qui lui


est déjà désapproprié par quelqu’un d’autre, c’est-à-dire, retrouver son
usage, recouvrer son droit sur lui, et regagner son cadre spatial.
Les enfants qui jouent dans la rue, ne font que se réapproprier l’espace qui
était jadis leur terrain de jeux avant qu’il devienne une rue; Les bergers qui
font encore paître leurs bêtes dans les espaces verts, ne font que se
réapproprier l’espace qui était jadis leur pâturage avant qu’ils soient
rattrapés par la ville et devienne un espaces verts; Les gens qui protestent
dans les rues et les places publiques ne font que se réapproprier l’espace
publique qui leur a été interdits d’accès par les autorités publique et
politiques; Les algériens qui ont pris d’assaut les villes européennes après
l’indépendance, ne font que se réapproprier l’espace urbain qui leur a été
exproprié par le colonialisme,,etc.
Le gens n’arrêtent pas de se réapproprier leur ancien espace, car, ils
n’oublient pas l’espace qui était autrefois un support de leur mémoire
collective (attachement au lieu), qui était un support de leur communauté
(liens et relations sociales), qui était un support de leur vie et de leur
existence (lieu d’habitat et de travail).
2-2) L’appropriation de l’espace (au sens d’adaptation)

Ainsi entendu, un espace donné intervient et agit sur les individus de


plusieures manières:
D’une part, en les appropriant à lui, c’est-à-dire que l’espace les possède
et les contient dans son périmètre et dans son cadre spatial, il fixe les
populations en son sein par le phénomène de l’ancrage; (Ex: Ce type
appartient à la cité ‘x’, celui-ci a vécu au quartier ‘y’, celui-là habite la
rue ‘z’,,,etc), les individus se reconnaissent ainsi et s’identifient par leur
appartenance à l’espace dont ils font partie; D’autre part, (après qu’ils
aient été possédés) en les conditionnant comportementalement (Les
gens sont orientés, guidés et même policés par les propriétés
physiques de son cadre bâti, d’où l’importance de l’architecture
urbaine), et en les encadrant cognitivement (Les gens sont influencés,
inspirés et même éduqués par la diffusion culturelle de son cadre
culturel, d’où l’importance de l’art en architecture); (Ex: ce type à l’air
d’habiter un quartier chic, celui là a l’allure d’un habitant des quartiers
populaires), donc les individus deviennent des productions de l’espace,
c’est-à-dire un produit à don image, c’est pourquoi on peut facilement
reconnaître une parisienne à paris, ou un new yorkais à mannhattan.
Réciproquement, les usagers de cet espace, réagissent et agissent à leur
tour, et selon leurs cadres socioculturels référentiels et leurs priorités
préférentielles, en appropriant et modifiant continuellement l’espace qui
les approprie et les modifient.
Ainsi entendu, un groupe social donné intervient et agit sur l’espace de
plusieures manières: Dune part, en l’appropriant différemment, rendre
un espace public privé (terrasse, cage d’escalier, espace vert), faire
d’un espace commun un usage individuel (parking); D’autre part, en le
modifiant à ce qu’il soit compatible avec ses usages, avec ses besoins,
ses arrières pensées, ses représentations sociales et avec ses logiques
spatiales; Ainsi, l’espace habité ou occupé, connaît sans cesse des
interventions spatio-fonctionnelles (déplacement de la cuisine car
parallèle avec les WC, maximisation de l’espace convivial par
l’extension du salon, ... d’une pièce par l’annexion du balcon,,,etc.).
2-2-1) appropriation-adaptation

Dans ce cas, l’espace et les usagers s’approprient l’un l’autre et


s’adaptent l’un à l’autre, sans qu’il y ait défaut d’appropriation ou
d’adaptation, sans qu’il y ait incompatibilité d’usage entre les usagers
et l’espace; car, dans ce cas de figure, l’espace est produit
généralement pour satisfaire une clientèle exigeante, ou une
population pétrie de culture urbaine, il est donc produit à l’image des
usagers clients, ou des usagers parfaits.
Ainsi, les usagers s’approprient l’espace selon des modalités et des
réglementations déjà fixées par les services concernés, (ministère de
l’intérieur, de l’habitat, du territoire, de la ville,,,etc.); ainsi que selon
des procédés d’accès à l’espace déjà fixés par les producteurs de
l’espaces (architectes, géographes, urbanistes, démographes,,,etc.),
qui l’adaptent et le façonnent selon les caractéristiques sociologiques
de tels individus ou tels groupes sociaux.
C’est-à-dire que l’appropriation se fait suivant le cours normal du
processus d’appropriation, car elle répond aux normes de
compatibilité, de dialogue, fixées entre l’élément spatial et l’élément
usager.
2-2-2) réappropriation-réadaptation.

Dans ce cas, l’espace et les usagers se réapproprient (refaçonnent)


mutuellement et se réadaptent l’un pour l’autre, vu qu’il y a une
incompatibilité de l’un avec l’autre, c’est-à-dire que tel espace n’a pas
dû être conçu pour tel individus ou tels groupes, il y a donc un conflit,
une inadaptation, une inadéquation, une incompatibilité et une
incohérence entre l’espace tel que produit et son usage tel que
remodelé par les usagers.
L’espace ici, tend désespérément à adapter l’usager à sa vocation et sa
fonction première, tandis que l’usager tend à réadapter
stratégiquement l’espace à son besoin primaire et sa priorité
pressente; C’est pourquoi, l’espace qui a été conçu pour adapter et
façonner l’habitant (par le biais de l’espace habité) et le citadin (par le
biais de l’espace urbain), fini par être réapproprié et refaçonné par
celui-ci, et que l’idée essentielle du concepteur, se trouve ici défigurée
par les logiques spatiales qui adoptent un utilitarisme spatial; Ex, le
séjour, ou le salon, qui est conçu pour être la pièce de convivialité et
d’hospitalité, a fini par devenir une chambre à coucher pour les enfants
ayant atteint l’age de l’adolescence, l’espace balcon qui a été
approprié par l’architecte pour servir de séchoir ou de porte sur
l’extérieur fini par être réapproprié par l’habitant à un usage de
débarras, d’entrepôt ou de dépôt d’animaux (chiens, chats,
poules,,,etc.)
Bibliographie :

1) Anne Raulin, Anthropologie urbaine, 2ème éd; Arman Collin; Coll,


Cursus, France,

2) Françoise Choay, pour une anthropologie de l’espace, éd; Seuil,


France,

3) Marion Ségaud, Anthropologie de l’espace, habiter, fonder


distribuer, transformer, 2ème éd; Arman Collin; Coll, ‘U’, France.

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