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Résumé
Abstract
The legal framework for the payment of goods and services by telephone can only
be imagined in the DRC through the regulation of electronic money and electronic
evidence. These two regulations influence each other’s regimes. The modality of
payment of the IMEI (International Mobile Equipment Identity Number) right, the
so-called RAM tax, from communication credits, demonstrates that not all mobile
Introduction
Faire usage de son téléphone pour initier, autoriser et confirmer l’échange d’une
valeur financière en retour de biens et services 1 est une pratique qui s’accroît
rapidement en République démocratique du Congo (RDC 2). Si ce paiement à
l’aide du téléphone mobile est ainsi plébiscité par les consommateurs en raison
de sa simplicité, sa rapidité et son moindre coût, le moyen et la preuve dudit
paiement restent des sujets sensibles.
En dépit de l’adoption en 2018 de la loi relative aux systèmes de paiement et de
règlement-titres, le paiement mobile n’a pas de régime juridique propre en RDC.
Cette loi de 2018 préfère plutôt confier à la Banque centrale du Congo (BCC) le
pouvoir d’édicter une instruction qui définit des normes relatives à l’émission, la
gestion et la distribution de la monnaie électronique.
À ce jour, trois opérateurs de téléphonie mobile possèdent l’agrément pour
proposer des services de monnaie électronique en RDC : Airtel Money, M-Pesa et
Orange Money. Ces opérateurs émettent sous forme virtuelle des sommes d’argent
qui sont gardées dans un compte électronique sur la carte SIM du téléphone
mobile. La carte SIM sert donc à transmettre des ordres de transfert et de paiement,
alors que la contrepartie en espèces est conservée dans une banque classique. À
chaque opération de paiement, ces opérateurs envoient des textos ou SMS (Short
Message Service) de confirmation de la transaction. À défaut de ce SMS, le client
a la possibilité d’accéder au relevé de transactions dans le livre des opérations
conservé électroniquement, s’il veut par exemple vérifier l’effectivité du paiement.
1
L. Chaix, Le paiement mobile : perspectives économiques, modèles d’affaires et enjeux concur-
rentiels, thèse de doctorat, Université Nice Sophia Antipolis, 2013, p. 13, disponible sur : https://tel.
archives-ouvertes.fr/tel-00983937, consulté le 12 septembre 2021 ; T. Dissaux, Socioéconomie de la
monnaie mobile et des monnaies locales au Kenya : quelles innovations monétaires pour quel développe-
ment ?, thèse de doctorat, Université de Lyon, 2018, p. 80, disponible sur : https://tel.archives-ouvertes.
fr/tel-02052356, consulté le 12 septembre 2021.
2
Loi n° 18‑019 du 9 juillet 2018 relative aux systèmes de paiement et de règlement-titres,
J.O.R.D.C., 23 juillet 2018, Exposé des motifs.
3
Art. 26 de l’instruction de la Banque centrale du Congo n° 24 du 11 novembre 2011 relative à
l’émission de monnaie électronique et aux établissements de monnaie électronique.
4
L. Chaix, Le paiement mobile : perspectives économiques, modèles d’affaires et enjeux concur-
rentiels, op. cit., p. 86.
5
Le numéro IMEI (International Mobile Equipment Identity Number) est le numéro d’identité
internationale de l’appareil mobile, selon les spécifications de la GSMA, qui est l’association inter-
nationale d’opérateurs de la téléphonie mobile et d’autres industriels du secteur (art. 1, point 11, de
l’arrêté ministériel n° CAB/MIN/PT&NTIC/AKIM/KL/Kbs/002 du 10 juin 2020 portant mise en place
d’un système CEIR en République démocratique du Congo).
6
Le taux de la taxe RAM est de 1,17 dollar (appareil 3G-4G) ou 0,17 dollar (appareil 2G), voy.
www.ram.cd/, consulté le 13 décembre 2021. Nous n’avons trouvé aucun texte juridique qui fixe ce
taux. D’ailleurs, la Commission économique, financière et contrôle budgétaire (ECOFIN) de l’Assem-
blée nationale de la RDC vient d’alerter que la taxe RAM n’est ni dans le budget général, ni dans les
comptes spéciaux, ni dans les budgets annexes (www.radiookapi.net/2021/12/13/actualite/politique/
assemblee-nationale-la-commission-ecofin-demande-la-suppression-du, consulté le 13 décembre 2021).
Auditionné le 29 septembre 2021 sur la question de la légalité de la taxe RAM à l’Assemblée natio-
nale, le ministre des Postes, Télécommunications et Nouvelles Technologies de l’information et de la
communication (PTNTIC) a sollicité de revenir dans quarante-huit heures à la plénière afin de tenter
d’y répondre (https://actualite.cd/2021/09/29/dossier-ram-lassemblee-nationale-kibasa-se-dit-choque-
apres-avoir-ete-engueule-par-les, consulté le 13 décembre 2021). Il n’y est jamais revenu jusqu’à ce jour.
7
Art. 8 de l’arrêté ministériel n° CAB/MIN/PT&NTIC/AKIM/KL/Kbs/002 du 10 juin 2020 por-
tant mise en place d’un système CEIR en république démocratique du Congo. Un site internet a été
monté pour faciliter l’accès à l’information sur le RAM : www.ram.cd/, consulté le 13 décembre 2021.
8
Art. 2 de l’arrêté ministériel n° CAB/MIN/PT&NTIC/AKIM/KL/Kbs/002 du 10 juin 2020, préc.
9
Art. 3, point. 23, de la loi n° 18‑019 du 9 juillet 2018, préc.
10
Voy. S. Lanskoy, « La nature juridique de la monnaie électronique », p. 12, disponible sur :
www.banque-france.fr/fileadmin/user_upload/banque_de_france/archipel/publications/bdf_bm/etudes_
bdf_bm/bdf_bm_70_etu_1.pdf, octobre 1999, consulté le 11 décembre 2021.
25
Acte uniforme OHADA du 15 décembre 2010 portant sur le droit commercial général,
J.O.OHADA, 15 février 2011, art. 192.
26
P. Pougoue et al., « Intermédiaires de commerce », Encyclopédie du droit OHADA, Paris,
Lamy, 2011, p. 1055.
27
Le site de RAM n’offre aucune information sur les contrats passés entre l’État congolais et les
opérateurs de téléphonie mobile sur le paiement de la taxe RAM.
28
Art. 4 de l’arrêté ministériel n° CAB/MIN/PT&NTIC/AKIM/KL/Kbs/002 du 10 juin 2020, préc.
29
Ibid., art. 2.
30
Ibid., art. 8.
31
Banque des États d’Afrique centrale (BEAC), avis du 29 octobre 2020 sur la mise en œuvre de
l’article 7 de la loi de finances 2019 du Cameroun.
32
Ibid. : « [l]es crédits de communication sont une marchandise, un produit ou un service, qui
ne servent que pour des services de téléphonie et qui, même s’ils ont une valeur marchande, ne sont
pas des moyens de paiement ou de la monnaie. En effet, ils sont créés par des entreprises qui ne sont
pas des prestataires de services de paiement habilités à émettre et gérer des moyens de paiement ».
39
Art. 94, al. 3, de la loi n° 18‑019 du 9 juillet 2018, préc.
40
I. Dinu, « Droit de la preuve appliqué au commerce électronique au Canada, droit civil/com-
mon law », Lex Electronica, 2006, vol. 11, n° 1, p. 12, disponible sur : www.lex-electronica.org/files/
sites/103/11‑1_dinu.pdf, consulté le 11 décembre 2021.
41
Ibid., p. 12.
42
Art. 15 de la loi n° 18‑020 du 9 juillet 2018, préc.
2. Relevé de transactions
Les émetteurs sont tenus d’assurer, sans exiger des frais supplémentaires aux
porteurs, la traçabilité pendant dix ans des chargements et des encaissements de la
monnaie électronique 44. De même, à l’instar des accepteurs, ils doivent conserver
sous forme électronique durant la même période des documents, notamment le
relevé des transactions d’un porteur. Les enregistrements du système de l’émetteur
sont considérés comme corrects et opposables à toutes les parties sauf preuve
contraire.
Le législateur congolais admet à la même valeur la preuve des engagements
par les écrits sur le support papier et les actes établis sous forme électronique 45.
Mais, les actes électroniques doivent être établis et maintenus selon un procédé
technique fiable, avec une garantie permanente de leur origine et de leur intégrité.
À ce propos, le relevé de transactions tiré du livre électronique des émetteurs de
paiement et des accepteurs peut être accepté comme moyen de preuve.
Le législateur pose néanmoins certaines conditions préalables pour la conser-
vation des documents sous forme électronique, notamment la qualité, l’accessi-
bilité et l’origine de l’information 46, que le relevé des transactions doit remplir.
En effet, l’information que contient le relevé doit demeurer accessible pour être
consultée ultérieurement. Les principaux émetteurs en RDC prévoient dans leur
contrat l’accès libre à leur système pour vérification des opérations. Mais ils
n’en délivrent pas un relevé de compte imprimé. Dans l’hypothèse d’un relevé
de compte imprimé, il sera question de préciser s’il s’agira d’une copie ou d’un
original. Comme copie, il devra être certifié conforme à l’original, qui est élec-
tronique, laquelle copie serait une meilleure preuve qu’une copie imprimée 47.
En sus, l’information doit être conservée en la forme sous laquelle elle a
été émise, à l’abri de toute possibilité de modification et d’altération dans son
43
Ibid., art. 94 et 106, point 2.
44
Art. 26 de l’instruction précitée de la Banque centrale du Congo.
45
Art. 94 de la loi n° 18‑019 du 9 juillet 2018, préc.
46
Ibid., art. 94 et 107.
47
I. Dinu, « Droit de la preuve appliqué au commerce électronique au Canada, droit civil/common
law », op. cit., p. 16.
contenu 48. En ce qui concerne le relevé des transactions, il doit contenir les
renseignements strictement identiques à ceux envoyés par SMS confirmatifs de
paiement mobile. Enfin, l’information conservée doit permettre de déterminer
l’origine et la destination du paiement ainsi que les indications de la date et de
l’heure de l’opération 49.
Un dispositif pénal tend à garantir l’intégrité des informations ou données
afférentes à une opération de paiement électronique, en l’occurrence le paiement
mobile. Le législateur punit de cinq à dix ans de servitude pénale et d’une amende
de 50 à 500 millions de francs congolais ou de l’une de ces peines seulement toute
personne qui, en connaissance de cause, s’évertue à fabriquer, manier, détenir
ou utiliser sans autorisation ou homologation un équipement spécifique destiné
à modifier ou altérer toute information ou donnée afférente à une opération de
paiement électronique. La portée et la sévérité de cette infraction témoignent de
l’importance de l’intégrité de l’information en matière de paiement électronique
ou mobile.
Conclusion
48
Ibid.
49
Ibid.