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L’APPREHENSION JURIDIQUE DE LA CRYPTO MONNAIE

AU CAMEROUN

La crypto monnaie fait de plus en plus l’objet d’une grande actualité sur les
plateformes économiques, juridiques, voire politiques. Chose curieuse pour autant que
cette monnaie ne figure sur aucune forme des devises communément connues et
utilisées telles que le Dollar, l’Euro ou encore le Franc CFA. Force est cependant de
constater la vivacité avec laquelle la crypto monnaie a pu s’insérer dans le marché
financier global et fait désormais l’objet de plusieurs transactions financières tant au
niveau national que transnational et international. Cette évolution suscite des
questions d’ordre juridique et économique, d’autant plus qu’elle continue de se
multiplier et on assiste de plus en plus à la création des nouvelles cryptos. A ce jour, il
y aurait environ 7 500 cryptomonnaies pour une capitalisation totale du marché de 480
milliards USD1. Cette monnaie constitue donc une grande menace pour le secteur
bancaire, pilier de l’économie mondiale dont la chute pourra entrainer une dépression
économique globale dans la mesure où elle n’est assujettie à aucune règlementation.

Comment cette réalité est-elle appréhendée dans l’espace juridique de la CEMAC en


général (II) et du Cameroun en particulier(III) ? En quoi consiste la crypto monnaie (I) ?

I. Définition et Fonctionnement de la Crypto Monnaie

La crypto monnaie s’entend d’une monnaie électronique et peer-to-peer, se


basant sur les principes de la cryptographie pour valider les transactions et la
génération de la monnaie elle-même. Chaque crypto monnaie requiert une
technologie blockChain, chaque blochkchain utilisant une « monnaie » (appelée token)
qui lui est propre. Il en ressort ainsi qu’il y a plusieurs crypto monnaies à l’instar du
bitcoin, du litecoin, de l’ether, du moreno, du ntx pour ne citer que celles-là2.

1
https://coinmarketcap.com/fr/ Web
2
Digital Business Africa – Avis d’expert. Par Winston K. POUKA
La crypto monnaie est une monnaie virtuelle qui s’échange de pair en pair via
un block Chain, n’ayant pas conséquent pas cours légal, elle peut être refusée en
paiement sans contrevenir aux dispositions légales3. Son fonctionnement en principe
repose sur des cryptographies pour valider les transactions et émettre les devises
même. Il est donc à préciser qu’elle n’a aucune forme physique comme les autres
monnaies que nous utilisons au quotidien, ce qui ne l’empêche pourtant pas de
continuer à gagner de l’ampleur, d’où le besoin d’un encadrement juridique.

II. La crypto monnaie dans l’espace CEMAC

Dans l’espace CEMAC, « Sont considérés comme des moyens de paiement


tous les instruments qui permettent à toute personne de transférer des fonds quel que
soit le support ou le procédé technique utilisé »4. Cette définition non limitative donnée
par l’article 12 du règlement CEMAC relatif aux systèmes moyens et incidents de
paiements y classe la monnaie électronique, le virement, la carte de paiement, le
chèque, le billet à ordre, la lettre de change. La catégorie des moyens de paiement qui
parait la plus proche des crypto monnaies est celle de la monnaie électronique.

Dans l’espace communautaire CEMAC, le texte de référence en la matière est le

règlement CEMAC relatif aux systèmes moyens et incidents de paiements, lequel en

son article 193 alinéa 1 définit la monnaie électronique comme un moyen de payement

constituant un titre de créances incorporé dans un instrument électronique et accepté

en paiement par les tiers autres que l’émetteur. L’alinéa 2 du même article poursuit en

précisant que l’on entend par instrument électronique l’enregistrement des signaux

dans une mémoire informatique, soit incorporée par une carte fournie à l’émetteur au

porteur et qui peut être nominative ou anonyme, soit incluse dans un ordinateur,

chargé par l’utilisateur ou utilisé de manière centralisée.

3
EMERGENCE DES CRYPTOMONNAIES Craintes et controverses, COFEB, Web
4
Art. 12 Règlement CEMAC relatif aux systèmes moyens et incidents de paiements
Si jusqu’à présent il y a osmose, les crypto monnaies ne remplissent pas la dernière

condition du règlement à savoir être soumise à la Banque Centrale : « tout projet de

création de monnaie électronique doit préalablement être soumis à la Banque des


États de l’Afrique Centrale (BEAC) pour autorisation », or nous savons pourtant que
les crypto-monnaies brillent par l’élément de décentralisation, en clair par une absence

d’autorité centrale qui en matière monétaire se trouve être la Banque Centrale 5.

Ainsi les crypto monnaies ne sont nullement des monnaies électroniques au


sens du droit communautaire CEMAC. Elles remplissent certes toutes leurs
caractéristiques et finalités à quelques exceptions près, elles ne sont pas listées
comme des moyens de paiement et surtout elles sont décentralisées6.

Et dans le même sens, la COSUMAF (Commission de Surveillance des


Marchés Financiers), qui a pour mission d’assurer le bon fonctionnement du marché
financier dans la sous-région a interdit les transactions sur les crypto, ce parce que la
CEMAC (Cameroun, Centrafrique, Congo, Gabon, Guinée équatoriale et Tchad) ne
dispose pas encore d’un cadre juridique et réglementaire pour encadrer son émission.

III. L’encadrement juridique imminent de la crypto monnaie par l’Etat du


Cameroun

Si la CEMAC a expressément interdit les transactions sur la crypto monnaie, il


n’en n’est pas de même pour tous ses Etats membres. Le Cameroun s’est en effet
engagé à préparer une législation nationale ayant vocation à règlementer l’activité liée
à la crypto monnaie. Face à la popularité croissante des crypto monnaies, le Cameroun
a jugé impérieux de préparer un texte y relatif.

5
Winston K. POUKA « Nature juridique de la crypto monnaie en droit communautaire CEMAC et au Cameroun »
Web
6
Digital Business Africa – Avis d’expert. Par Winston K. POUKA
Pour y arriver, le Ministère des Postes et Télécommunications (MINPOSTEL)
avait organisé en date du 15 Novembre 2021, un séminaire sur les enjeux,
opportunités et risques de la crypto-monnaie au Cameroun, au cours duquel ledit
Ministère a mis suspied « un papier blanc » sur la régulation et la réglementation des
crypto-monnaies et crypto actifs au Cameroun7. Mais bien avant, il faut noter que La
Commission de Surveillance du Marché Financier de l’Afrique centrale (COSUMAF)
avait déjà adressé en date du 13 octobre 2020, une lettre marquant son accord pour
la mise en place d’un cadre juridique et opérationnel pour l’encadrement des activités
de Global Investment Trading (GIT), le leader camerounais de la crypto monnaie. La
correspondance de la Cosumaf marquant son accord pour la mise en place d’un cadre
juridique approprié aux activités des cryptos actifs fait suite à la requête de Global
Investment Trading8.

Par Me Kevin DJAKI ZANKIA


Avocat au Barreau du Rwanda
Membre de l’EALS
Et Me Abel-John ELESSA
Avocat au Barreau du Cameroun
Associé Gérant

7
SYLVAIN ANDZONGA « Le Cameroun formule des propositions pour encadrer l’usage de la crypto-monnaie »
Web
8
« La crypto monnaie sort du maquis au Cameroun » paru le jeudi, 22 octobre 2020 04:05

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