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50 ans de politiques linguistiques en République du Congo1

Omer Massoumou
Groupe de recherche en étude sémantique et interprétation
Département de langue et littérature françaises
Université Marien Ngouabi (Congo)

Introduction

La République du Congo se conçoit comme une entité territoriale issue de l’empire colonial
français. En 1910, la France crée le Moyen-Congo qui deviendra en 1960, la République du Congo. Par
sa volonté, la France avait réuni plusieurs peuples qui ne parlaient pas la même langue et qui
appartenaient à des systèmes sociopolitiques différents. Ces peuples devenus Congolais ont eu le
français en héritage.
Le problème actuel est celui de savoir comment les acteurs politiques ont géré et gèrent cet
héritage linguistique tout en tenant compte de leur propre langue et des langues des autres communautés
culturelles. Pour se faire une idée des politiques linguistiques des cinquante dernières années au Congo,
nous pouvons établir d’une part une stratification en trois points et d’autre part entreprendre une lecture
épistémologique des décisions politiques (constitutions, lois, projets…) et apprécier de façon consécutive
leur incidence sur le marché linguistique.
Ainsi, depuis 1960, la République du Congo a essentiellement connu trois périodes qui se
particularisent par leurs politiques linguistiques. Il s’agit premièrement de la période de la survivance des
politiques linguistiques coloniales (1960-1963), deuxièmement de la période de la révolution socialiste
(1963-1992) et troisièmement de la période du pluralisme politique (1992 à ce jour).

1. De la survivance des politiques linguistiques coloniales (1960-1963)


Lorsque le Moyen-Congo cesse de dépendre de la France en 1960, la situation linguistique est
politiquement mal définie. Le pouvoir politique antérieur n’avait accordé aucun crédit aux langues locales
véhiculaires ou vernaculaires. Les textes faisant mention de la politique linguistique applicable tendaient
à supprimer ou à limiter l’usage du français dans les milieux publics, ainsi se comprennent les affirmations
d’Augustin Niangouna et d’Ambroise Queffélec.

Les langues des Noirs sont exclues de l’interaction entre Blancs et Noirs. Aussi les textes officiels
concernant l’enseignement au Gabon en 1883 dont l’application sera étendue au Moyen Congo en
1925, réitérés en 1944 lors de la Conférence de Brazzaville, sont comme les effets de la loi
Deixonne votée en 1951, justifient-ils de manière indéniable et éloquente, une politique linguistique
fondée sur l’expansionnisme du nationalisme français. Les langues primaires du Congo
dépouillées de leur souveraineté et reléguées au rang de « dialectes », de « parlers » et même de
« patois », la France impose l’utilisation exclusive du français dans tous les actes de caractère
sérieux comme le précisent les prescriptions aussi rigoureuses que durables de la circulaire n° 8
du 8 mai 1911 concernant l’enseignement des Noirs :
1° le français est seul en usage dans les écoles. Il est interdit aux maîtres de se servir avec
leurs élèves des idiomes du pays.
[…]

1Cette contribution s’appuie en grande partie sur notre propos introductif au Français en République du Congo sous l’ère
pluripartiste (1991-2006), Paris, Editions des Archives contemporaines-AUF, 2007, 541p.
3° donner des connaissances du français parlé véhicule essentiel de la civilisation
française…2

A l’indépendance, les autorités de la République du Congo adoptaient une constitution où seule la


langue française avait le statut de langue officielle. Aucune mention n’était faite sur les deux langues
véhiculaires du pays, le munukutuba et le lingala ni sur les dizaines des langues vernaculaires. En outre
« le régime de Fulbert Youlou n’apporte aucun changement dans le fonctionnement du système
d’enseignement »3.
En somme, sur la période allant de 1960 à 1963, le Congo n’a aucune stratégie linguistique. Il ne
cherche pas à faire la promotion des langues véhiculaires en les incluant dans le système éducatif, en
autorisant leur pratique dans les milieux administratifs ou leur diffusion dans la presse écrite (qui ne s’édite
qu’en français). Et la création de la Télévision congolaise en 1962 conforte une politique linguistique
privilégiant le français.
Par ailleurs, le système éducatif qui constitue le point d’orgue de toute politique linguistique accorde
à l’enseignement du français des avantages considérables. En effet, la loi n° 44-61 du 28 septembre
1961 publiée au Journal officiel de la République du Congo (1er octobre 1961 n°21, article 5) accordait
des facilités aux élèves congolais. Jacques Osseté écrit à ce sujet : « L’État congolais doit assurer, au
moyen des subventions, la gratuité des fournitures scolaires aussi bien dans les écoles publiques que
privées »4. Ce soutien manifeste et exclusif à l’enseignement et à l’apprentissage du français paraît
comme un prolongement de l’idéologie coloniale. Par la langue, le peuple congolais exprimait alors sa
dépendance à la France.
Mais plusieurs raisons expliquent en réalité la non considération des langues congolaises dans la
politique linguistique des nouveaux responsables politiques. On peut premièrement penser à l’adhésion
à la culture française, à sa modernité et à la volonté de ne pas rompre complètement les liens avec la
France. Deuxièmement, on peut prétendre que les langues congolaises ne permettaient pas au Congo
d’avoir un rayonnement international. Troisièmement, la difficulté d’application d’une politique
monolinguistique en faveur d’une seule langue congolaise empêchait toute initiative. Ainsi il fallait
favoriser la pratique d’une langue neutre (le français) et non une des dizaines d’idiomes congolais. Une
langue typiquement congolaise d’union nationale restait donc à trouver.
Bien d’autres raisons logiques ou illogiques peuvent être avancées. Mais ce qui est vrai, c’est que
la République du Congo indépendante n’avait pas adopté une politique linguistique différente de celle
appliquée à la période coloniale. Ainsi le Congo évoluait avec une langue de pouvoir, de prestige,
d’éducation, le français et plusieurs autres langues de moindre importance, des langues de seconde
zone.

2. Les politiques linguistiques pendant la révolution socialiste (1963-1992)


La démission de Fulbert Youlou de la présidence de la République en août 1963 correspond à un
changement idéologique considérable. En fait, les Congolais passent du système de gestion libérale au
système de gestion socialiste : la République du Congo devient en 1972 République Populaire du Congo.
L’adoption d’une nouvelle constitution en décembre de la même année entérine les changements
politiques. De manière globale, la politique de nouvelles autorités en faveur des langues locales s’oriente
vers un radicalisme qui restera théorique puisque la présence du français dans toutes les structures de
l’État est plus que palpable. Les documents écrits à l’école, dans l’administration, dans la presse, etc. se
présentent essentiellement en langue française.
Pour étudier les politiques linguistiques pendant la période de la révolution socialiste, nous pouvons
lire les décisions prises pour le système éducatif et pour les langues locales. L’adoption du système de

2 Augustin Niangouna, « La langue française au Congo », FLSH, Le Congo aujourd’hui : figures du changement social,
Brazzaville, FLSH, 1990, p. 164.
3Jacques Osseté, Le livre scolaire au Congo, Paris, L’Harmattan, 1996, p.120.
4Jacques Osseté, idem, p.120.

2
gestion socialiste en 1963 ne change pas la langue d’enseignement. Le français reste la langue
dominante en dépit de violentes dénonciations du régime politique antérieur de F. Youlou, régime jugé
néocolonialiste. L’indécision dans la politique linguistique de la Révolution congolaise face à la langue
française est explicable, de façon primordiale, à partir des fondements linguistiques et culturels des
dirigeants de l’époque eux-mêmes. En effet, les « évolués » ou les « émancipés », dans l'ensemble,
n’affichaient pas une pratique plus aisée des langues locales. Pour eux, attribuer une place importante à
ces langues dans la vie nationale devenait une démarche d’auto-discréditation. Il était peu probable, dans
ces conditions, qu’une langue congolaise fût adoptée dans le cursus scolaire, dans le milieu administratif,
dans les média, etc. Par contre, des projets et des programmes ne cessaient constamment d'être
élaborés. Aussi au milieu de la décennie quatre-vingt, le Parti Congolais du Travail (PCT) élabore-t-il un
document portant sur des Eléments d’une politique linguistique nationale congolaise.
Après une présentation des enjeux linguistiques (ceux liés à la promotion culturelle, éducative et
scientifique), le document mentionne l’intérêt de choisir pour un pays plurilingue une langue nationale
garantissant son unité, son indépendance, sa démocratie et son développement. Et ayant également
constaté l’importance accordée aux langues nationales par plusieurs pays africains, le PCT et l’État
congolais prenaient des décisions pour changer une situation linguistique « aliénante » héritée de la
colonisation française. A partir de ce préalable, le document présente en quatre points une politique
linguistique nationale applicable en République Populaire du Congo.
Premièrement, un historique présente les principales dates favorables à une politique linguistique
au Congo. Cet historique porte sur une période de près de 15 ans entre 1970 et 1984. Les décisions en
faveur des langues nationales se présentent essentiellement sous la forme de recommandations ou de
résolutions et portent sur l’intégration des langues nationales dans le système éducatif (1970 ; 1974 ;
1976), sur la nécessité d’adoption d’une seule langue pour la nation congolaise (1974 ; 1976 ; 1984), la
création d’un institut de langues nationales (1984).
Deuxièmement, une politique linguistique est envisagée en six phases allant du cadre juridique et
institutionnel (définition des langues à promouvoir, création des institutions) à la planification (évaluation)
en passant par la formation et la sensibilisation des cadres, la codification de la langue (normalisation de
la transcription, fixation de l’orthographe), l’élaboration et la diffusion des documents (matériel
pédagogique, promotion culturelle des langues) et la coopération linguistique avec des pays tiers pour un
partage d’expérience et une harmonisation éventuelle des programmes au niveau de la sous-région
Afrique centrale.
Troisièmement, le document présente le programme alors réalisé et en cours de réalisation par le
PCT et l’État congolais pour une politique linguistique nationale. Au niveau du Parti, l’enseignement du
lingala était alors effectif à l’Ecole Supérieure du Parti par décision ministérielle (Premier Ministre) datant
de la lettre du 04 février 1975 et la production de documents de travail était signalée. Les ministères de
l’éducation nationale, de l’enseignement rural et de l’action coopérative, de l’information étaient
particulièrement impliqués pour la promotion ou la valorisation des langues nationales. Des services
(Institut National de Recherche d’Actions Pédagogiques INRAP avec les Services des Langues
Nationales, etc.), des institutions (Université Marien Ngouabi, Direction de l’Alphabétisation,
Radiodiffusion congolaise, Télévision congolaise…) étaient mobilisés pour mettre en pratique les
orientations retenues. Ainsi des manuels en munukutuba et lingala étaient produits (1975-1977), des
traductions d’œuvres littéraires, des usuels (dictionnaires ou lexiques) et des recueils de contes des
documents politiques ou administratifs, etc. représentaient les différentes actions exécutées.
De façon particulière, nous pouvons sommairement considérer, dans le cadre de cette réflexion,
la place accordée aux langues nationales à la Radiodiffusion congolaise :

[La radio congolaise] émet tous les jours de 5 heures à 1 heure du matin, conformément à la
nouvelle grille des programmes et aux directives du 3e Congrès du PCT à savoir : réhabiliter les
langues nationales, revaloriser les langues nationales. A ce sujet les préoccupations de la

3
radiodiffusion se résument à 10 heures d’émission par jour en langues nationales et à 10 heures
d’émission en français.5

Quatrièmement, le document présente les "grandes mesures" à prendre au niveau du Parti et de


l’État en faveur des langues nationales. Il s’agit particulièrement des mesures en quatre points portant
sur la planification, l’administration et la justice (traduction des documents officiels en langues locales,
cartes d’identité, actes d’État civil, etc.), l’enseignement et les médias (presse écrite en langues locales).
Les Eléments d’une politique linguistique nationale congolaise se terminent par une évocation de l’attitude
réservée des intellectuels vis-à-vis des langues locales et se posent comme un document présentant les
orientations officielles de la République populaire du Congo en matière des langues nationales. Ce
document souligne toutefois l’absence de cohérence entre la volonté politique et la réalité sur le terrain.
En somme, l’application du projet politique de l’École du peuple connaît un échec. Il dépassait
simplement et probablement le problème strictement linguistique puisqu’il fallait prendre en compte les
vecteurs et le contenu. Et le congrès du parti unique, le PCT le reconnaît implicitement en accordant le
statut de langue officielle au français et celui de langues nationales au lingala et au munukutuba. Et il
était surprenant de demander en français à un peuple d’employer ses langues nationales dans
l’enseignement, la vie politique et administrative.

3. Les politiques linguistiques de la période multipartiste (1992-2010)


Après vingt-neuf ans de monopartisme, l’avènement de la démocratie en 1992 laisse supposer un
changement des politiques linguistiques. La prise en compte de la diversité culturelle et linguistique dans
les textes fondamentaux de 1992 et 2002 aurait permis de croire, pour la première fois, dans l’histoire du
pays, à une vraie volonté politique pour favoriser une dynamique linguistique plurielle. La réalité est bien
différente. De façon générale, les langues congolaises ont été traitées de manière similaire par les deux
régimes qui se sont succédé ; celui de Pascal Lissouba (1992-1997) et celui de Denis Sassou Nguesso
(1997 à ce jour).
L’absence de projet linguistique phare oblige à rechercher les éléments d’une politique linguistique
à partir des domaines particuliers comme ceux de l’éducation, de la vie politique, des média. Il y a un
caractère vague, ambigu des orientations politiques sur les langues. La politique linguistique du Congo
ne cherche pas à assurer une autonomie de l’État par la promotion ou la reconnaissance d’une seule
langue locale comme langue officielle. Les constitutions de 1992 et de 2002 reconnaissent implicitement
le rôle secondaire des langues originellement congolaises. En effet, aucune langue nationale ou ethnique
ne bénéficie du statut officiel. Dans les mêmes termes, les deux textes notent : la langue officielle est le
français. Les langues nationales véhiculaires sont le lingala et le munukutuba.6 Si au niveau du texte
fondamental, la gestion du pluralisme linguistique n’est pas assez lisible, il existe néanmoins dans le
système éducatif et dans la presse surtout audiovisuelle une volonté de poursuivre les efforts de
valorisation linguistique commencés depuis la période marxisante. En effet, la radio et la télévision
nationales diffusent des émissions en français, munukutuba et lingala. Les langues ethniques y
apparaissent de façon accidentelle donc non programmée. La livraison en trois langues correspond à une
démarche politique de respect de toutes les sensibilités. L’école et l’université accordent une certaine
place à des langues autres que le français. C’est particulièrement dans l’enseignement supérieur, à
l’université Marien Ngouabi que les deux langues nationales sont étudiées dans certains départements.
Les langues ethniques ne sont souvent étudiées, de manière dialectologique, qu’à partir de la maîtrise
par quelques étudiants du département de Langues et linguistiques africaines.
En examinant l’organisation des enseignements dans le système éducatif, nous pouvons dégager
quelques aspects de la politique linguistique de la République du Congo. Notre méthode d'approche
repose sur une analyse du volume horaire hebdomadaire consacré à l'enseignement des langues (quelles
qu'elles soient) dans l'enseignement public. Les données obtenues sur le terrain, nous permettent de

5 PCT, Eléments d’une politique linguistique nationale congolaise, 1984, p.4.


6Voir la Constitution de la République du Congo du 15 mars 1992 article 3 et celle du 20 janvier 2002 article 6.
4
noter le temps accordé aux différentes langues enseignées (français, anglais, munukutuba, lingala, etc.).
Des tendances sous forme de statistiques sont par la suite présentées à travers des tableaux
récapitulatifs. Mais au préalable, évoquons la particularité de la réglementation dans le système éducatif
au sujet du livre scolaire qui est un moyen efficace de véhiculer une langue. Nous retenons avec Jacques
Osseté que :

Après la nationalisation de l’enseignement, les programmes scolaires sont uniformisés ; ils sont
élaborés par le ministère de l’Education nationale, c’est-à-dire par la seule autorité politique. Plus
tard, cette dernière crée une institution chargée de produire des livres scolaires nationaux. Cette
institution s’appelle Institut National de Recherche et d’Action Pédagogiques (INRAP). Elle conçoit
les livres scolaires en fonction des programmes officiels ; voilà pourquoi leur usage dans les écoles
primaires ne fait l’objet d’aucune réglementation particulière. Le contrôle du pouvoir politique
s’effectue par l’intermédiaire de l’institution publique ; c’est la principale différence avec la
réglementation coloniale du livre scolaire7.

Les programmes qui sont appliqués de l’école primaire au lycée expriment une politique
linguistique en faveur du français. Le volume horaire hebdomadaire consacré à l’étude de la langue
française (lecture, langage, écriture, copie, dictée, récitation…) occupe une place considérable. Le
français reste l’unique langue enseignée. Et, la pratique révèle que le recourt, à l’oral, aux langues
nationales ou ethniques est souvent nécessaire.
A partir de l’étude des emplois du temps, nous avons évalué la place accordée à l’enseignement
ou à l’apprentissage du français par l’État congolais. La langue française étant à la fois langue matière et
discipline occupe une place prépondérante dans l’enseignement primaire. Nous affirmons que la politique
linguistique congolaise opte pour la langue française comme langue d'enseignement mais aussi comme
langue de communication. Plus de la moitié du temps hebdomadaire d’enseignement est réservée au
français. Même si quelques réserves peuvent être émises en raison de l’insuffisance du nombre
d’enseignants, de leur démotivation et de la pléthore d’effectif, il se trouve que c’est le français qui reste
la discipline phare. Avec une moyenne de 55,55% de temps consacré à la langue française, la politique
linguistique congolaise annonce sa préférence. Si au primaire, plus de la moitié du temps d’enseignement
est consacré au français, au collège, les langues occupent théoriquement un volume horaire ayant un
pourcentage de 30% de temps d’enseignement par semaine. Le nombre insuffisant d’enseignants de
français et d’anglais rend relatif ce pourcentage. Quoi qu’il en soit, avec un pourcentage de 16,66% et
une présence générale comme langue d’enseignement, la langue française reste de loin, une discipline
prioritaire pour les autorités du système éducatif, qui reçoivent les ordres, faut-il encore le rappeler, des
différents gouvernements. Au lycée, les langues sont exploitées différemment. Si au collège les élèves
découvrent l’anglais, ils (particulièrement ceux de la série A) font la connaissance d’autres langues
étrangères dites langues vivantes étrangères (LVE) comme l’espagnol, l’allemand, le russe, l’arabe, le
chinois, etc. Aucune langue congolaise n’y est étudiée. La série A est la filière où l’on étudie les langues
au lycée avec une moyenne de 48,22%. Le temps accordé au français est toutefois supérieur à celui
accordé aux autres langues à l’exception des classes de première D et C. Nous constatons encore que
le français occupe une place primordiale dans le système éducatif. Et en faisant la moyenne des
pourcentages au lycée, nous avons constaté que le temps accordé aux langues (tout niveau confondu)
est presque équivalent à celui du collège puisqu’il est de 29,74%.
A l’Université Marien Ngouabi, la répartition horaire hebdomadaire à l’Institut Supérieur de Gestion
(ISG) au département de la Formation des techniciens supérieurs consacre des heures à l’enseignement
des langues congolaises. Toutefois, la place accordée à l’enseignement des langues est de moindre
importance. Elle ne permet pas de favoriser une réelle maîtrise des langues congolaises. La moyenne
des pourcentages donne 16,68% de temps accordé aux langues quelles qu’elles soient. Si l’anglais
semble bénéficier d'un intérêt plus considérable, nous pouvons toutefois nuancer cela pour affirmer que
7 Jacques Osseté, op. cit. p.206-207.
5
le français y reste encore la première langue au regard de son statut de langue d’enseignement. L’intérêt
accordé aux langues à la FLSH se situe à différents niveaux. Nous pouvons retenir que l’étude du français
(sous sa forme grammaticale ou des techniques d’expression) occupe peu de place, exception faite au
sein de deux départements langue et littérature françaises et littératures et civilisations africaines.
L’anglais semble dominer la répartition linguistique. C’est une langue omniprésente dans la majorité des
départements de la faculté. Dans l’ensemble, le temps d’enseignement de l’anglais atteint un pourcentage
qui oscille autour de 10% du temps global hebdomadaire (quand on exclut le département de LVE). Les
langues nationales sont étudiées à peine au sein de quatre départements : STC, LCA, LVE et LLA. Un
intérêt à des langues spécifiques (latin, grec, allemand, espagnol…) est à signaler. Cela traduit a priori la
prise en compte de la spécialisation et certainement une volonté de suivre les tendances en cours dans
les universités françaises.
Le système éducatif congolais, de l’enseignement primaire au supérieur, offre ainsi la possibilité
de lire la politique linguistique congolaise. Le système éducatif révèle une co-présence de langues. Il y a,
par exemple, à un degré variable, une présence des langues locales dans l’enseignement primaire. Par
ailleurs, du moment où les enseignements dans tout le cursus sont donnés en français, nous pouvons
reconnaître au français une place centrale. Sur cette situation, nous ne pouvons pas dire que le choix
politique est contraire à la réalité décrite. Si le français occupe une place centrale, c’est parce que l’État
le veut. En gérant le système éducatif, les gouvernements congolais déclarent implicitement leur choix
linguistique. Et là, la langue de l’État-Nation n’est rien d’autre que le français.

S’agissant des médias, nous avons la radio et la télédiffusion congolaises. la Radio-Congo émet
essentiellement qu’en français. Nous avons relevé que le français était la langue la plus utilisée8. Entre
2000 et 2010, nous notons que le lingala et le munukutuba occupe chacun un temps d’antenne d’environ
10%. Pour les langues étrangères, ce pourcentage est encore faible soit 1,79% de temps d’antenne par
semaine pour l’espagnol et 2,14% pour l’anglais. L’ensemble des langues n’occupe que 22,82% de temps
d’antenne. Cette situation consacre le français comme première langue dans la structure d’État qu’est
Radio-Congo. La Télévision congolaise, consacre environ 18% de temps d’antenne pour chaque langue
nationale ; ce qui produit un total, pour les deux langues de 35,92%. Ce pourcentage relativement
intéressant est toutefois sujet à caution en raison de réelles difficultés à exécuter des programmes. Il
apparaît en somme que le français reste encore la langue essentielle de la communication.
Dans l’ensemble, les structures de l’État examinées accordent une place importante au
rayonnement du français. Dans le système éducatif, l’enseignement primaire assure des acquis
linguistiques en français. On ne peut donc pas dire qu’une langue nationale est valorisée. Au collège,
l’anglais y apparaît avec un pourcentage de 13% du volume horaire hebdomadaire. La politique
linguistique du Congo semble ainsi privilégier une ouverture au monde par l’enseignement d’une langue
supposée la plus pratiquée universellement. Au lycée, l’ouverture au monde se conforte avec la présence
de nouvelles langues vivantes étrangères. Du primaire au collège, aucune attention n’est accordée à une
langue totalement congolaise. Il y a une tendance à l’exclusion des langues nationales dans le système
éducatif. Le niveau supérieur leur accorde un intérêt relatif avec un pourcentage qui varie entre 5 et
13,63% du temps hebdomadaire des cours. Dans la perspective de la construction d’une nation, nous ne
pouvons pas dire qu’il existe, par ce genre de pratique, une politique favorisant l’émergence d’une langue
locale comme langue unique ou langue de l’unité.
Après l’examen de la situation linguistique à travers certains organes de l’État, nous pouvons porter
notre attention sur les conflits pour caractériser les difficultés de mise en œuvre d’une politique
monolinguistique au Congo.

4. Les enjeux linguistiques dans un espace multilingue

8Voir Omer Massoumou et Ambroise Queffélec, Le français en République du Congo sous l’ère pluripartiste (1991-2006),
Paris, Editions des Archives contemporaines-AUF, 2007, 541p.
6
A priori, l’on peut penser que l’existence de deux langues nationales en République du Congo
pouvait favoriser un créole par le jeu d’interférence ou de contact de langues. On aurait ainsi eu un contact
lingala-kituba. Mais dans la construction d’un État-Nation, le Congo n’a pas connu une telle situation de
(re)composition linguistique après les indépendances. Il a plutôt enregistré des conflits sur les critères
applicables dans le choix d’une langue nationale. Il était, d’un côté, envisagé que la communauté la moins
peuplée adoptât la langue de la communauté démographiquement la plus forte. Et, à ce titre, le kituba
serait retenu comme langue de l’État-Nation, de l’autre, on pensait que la langue ayant des
prédispositions internationales fût la langue de la nation. Ce qui profitait au lingala par rapport au contexte
sous-régional où le lingala connaissait une promotion nationale au niveau de l’ex-Zaïre, l’actuelle
République Démocratique du Congo. Dans l’un ou l’autre choix, une communauté congolaise aurait été
lésée. Et une aurait implicitement ou explicitement acquis une tendance hégémonique.
Et après l’opération de choix linguistique, il aurait été question de proposer des mesures pratiques
pour que la communauté dont la langue ne serait pas retenue se mît à l’apprentissage, l’assimilation et à
la pratique jusque dans l’intimité quotidienne, culturelle et cultuelle de la nouvelle et unique langue
nationale. Le caractère irréductible de ces différentes démarches a fait que les débats restent davantage
théoriques, fermés et réalisés souvent dans les cercles des dirigeants politiques. Comment faire que le
paysan beembé du sud du Congo abandonne sa langue pour adopter par exemple le lingala qu’il ne
comprend pas et qui est principalement parlé au nord ? En considérant avec Antoine Lipou que « la
fonction véhiculaire relève du fait sociologique et historique ; [et qu’] elle se constitue sur le terrain et au
cours du temps »9, nous ne pouvons que reconnaître la difficulté à imposer spontanément à une
communauté une langue étrangère bien que proche.
Le débat qui s’était encore posé était celui du caractère « national » du kituba ou du lingala qui
peuvent être assimilés à de simples langues locales ayant une diffusion simplement plus importante que
les langues locales ou ethniques. En effet, si au niveau de la constitution, ces deux langues sont dites
« langues nationales véhiculaires », la réalité ou la validité de leur nationalité ne se manifeste que sur un
ensemble des régions du sud ou du nord. Ainsi, dans la perspective de la construction d’un État-Nation,
il est préjudiciable de l’envisager avec deux langues partiellement nationales qui révèlent beaucoup plus
la division que l’unité nationale. Le kituba et le lingala séparent les Congolais aussi bien avant qu’après
l’indépendance. Elles expriment à elles seules les conflits sociaux, politiques, militaires, etc. Le conflit
communautaire est manifeste avec la pratique des langues locales laquelle tend à catégoriser les
locuteurs, à les faire passer pour des citoyens de seconde zone. Paul Nzeté souligne ces aspects en ces
termes : « L’observation de la pratique des gouvernements africains en matière d’emploi des langues
africaines aboutit à ce constat : les langues africaines sont réservées aux illettrés et ce, à travers la radio
et la télévision et à travers l’alphabétisation »10.
Ici se dégage donc une situation conflictuelle issue de la connaissance ou non de la langue
française. Il y a une restructuration sociale qui s’opère. Mais en dehors des conflits communautaires, le
choix de l’idéologie politique a aussi généré des oppositions sur la question de la langue.

4.1. Les conflits idéologiques et l’harmonisation linguistique


Dix années après l’indépendance nationale, les responsables politiques avaient l’impression de
perpétuer l’esprit et la culture français par le seul usage de la langue française. Le sentiment de
dépendance linguistique allait cristalliser les passions et mettre à jour des velléités indépendantistes
linguistiques. Le régime marxisant du président Marien Ngouabi (1968-1977) envisagea une réforme
radicale en faveur d’une politique de revalorisation linguistique.
Au cours de la décennie soixante-dix, les Congolais débattent sur le projet « Ecole du peuple ».
L’adhésion ou non au projet spécifiait la couleur politique des acteurs. Le régime politique socialiste
n’avait pas en effet encouragé un débat démocratique à ce sujet. Fidèle dans ses pratiques, le pouvoir

9 Antoine Lipou, « Le monolinguisme étatique dans les pays d’Afrique noire d’expression française », Annales de la Faculté
des lettres et des sciences humaines, n°1, Brazzaville, FLSH, 1985, p. 264.
10 Paul Nzeté, "Des langues africaines, pour quoi faire?", Dimi n° 6/7, 1984 -1985, p. 6.

7
politique marxisant, avec des velléités de domination ethnique ou régionaliste, organisait des débats
démocratiquement dirigés sur la question, des débats à l’issue desquels les décisions adoptées ou
retenues devraient correspondre à la volonté implicite ou explicite des dirigeants d’imposer le lingala. Il y
a donc eu de façon fort curieuse une absence de réel débat qui bien entendu n’effaçait pas les
contradictions existantes. Taxés de « valets de l’impérialiste », de « néocolonialistes », les partisans du
maintien du français dans la vie sociopolitique et éducative étaient contraints au silence.
En conséquence, la non application de certaines mesures politiques pendant la période marxisante
relève d’une attitude de démission ou d’impuissance, de difficulté d’application des recommandations ou
mesures. On peut toutefois être surpris de la non application par le parti unique des réformes préconisées.
La gestion de la pluralité linguistique dans la perspective d’une politique d’édification linguistique nationale
restait ainsi une question entière.

4.2. Les problèmes relatifs à l’adoption du français


L’adoption ou le maintien du français comme langue officielle au Congo ne s’est pas fait sans
discussion. Deux types de problèmes sont à retenir. D’une part, le français posait presque
systématiquement la question de la souveraineté nationale et d’autre part la langue française gênait la
visibilité des langues locales.
En effet, à partir du moment où le Congo indépendant maintient le français comme langue officielle,
il y a implicitement une volonté des dirigeants politiques de ne pas opérer un délicat choix d’une langue
locale parmi la multitude des langues congolaises. Mais par ce fait même, la politique linguistique
congolaise poursuivait les pratiques coloniales en la matière. Cela étant probablement dû au fait que les
responsables politiques ne pouvaient pas pratiquement changer la situation et peut-être dans une
moindre mesure entendaient garder des relations avec la France (A. Niangouna11).
La lutte pour l’indépendance avait généré, dans plusieurs pays africains, des sentiments d’hostilité
vis-à-vis de la langue française. Le rejet du colonialisme, avec tout ce qui le caractérise dont le français,
traduisait la lutte des indépendantistes. La promotion des langues nationales surtout d’une langue d’union
nationale devenait un leitmotiv. Louis-Jean Calvet (1974) résume la nature des conflits que connaissent
les pays d’Afrique noire francophone lors de leur accession à l’indépendance au sujet de la langue
française. Il affirme globalement que la majorité de ces pays avait maintenu le français et n’avait pas fait
de promotion des langues locales. Si les systèmes belge et anglais permettaient l’enseignement en
langues africaines dans le primaire, le système français n’accordait aucune place aux idiomes africains.
Pour marquer la rupture avec l’ancienne puissance coloniale, des changements d’importance mineure
sont opérés. C’est le cas avec les processus de dénomination/redénomination qu’évoque Jean-Alexis
Mfoutou en ces termes :

[les] pratiques toponymiques variables dans le temps et portant sur des catégories différentes de
toponymes (nom du pays, de villes, voire de rues…) répondent ici à des motivations politiques :
changement de régime politique qui, à défaut de toucher à la langue proprement dite, tente
d’affecter ce qui l’accompagne et sa signification politique, processus de colonisation puis de
décolonisation, processus d’imposition du français, langue dominante, au détriment des langues
locales au fur et à mesure des étapes de l’édification étatique et nationale. Les pratiques
toponymiques constituent ici des enjeux à la fois linguistiques et politiques, en l’occurrence la
diffusion et l’imposition du français au détriment des langues locales, affectent de façon variable
les différentes catégories de toponymes12.

Les enjeux sur la présence toponymique française au Congo tendent à indiquer une conduite
politique allant dans le sens d’une dénomination. La volonté de gommer la présence française en
changeant les noms des lieux (ville, rue, etc.) qui l’évoquent traduit un aspect du conflit de l’imposition du

11Augustin Niangouna, art. cit., p. 165.


12 Jean-Alexis Mfoutou, Le français au Congo-Brazzaville, Maromme, Editions Espaces culturelles, 2000, p. 262.
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français. Mais cette volonté connaît une application partielle puisqu’il n’y a pas eu une disparition totale
des toponymes typiquement français. Brazzaville est encore aujourd’hui un nom fortement symbolique,
de même Dolisie. Des noms de rue évoquent encore la réalité coloniale rue de Reims, avenue Lyautey,
avenue de Bayardelle, etc.

4.3. Les options linguistiques francophones


La prise en compte de la résolution sur la langue française issue du XIIe Sommet de la
Francophonie de Québec (2008) semble caractériser un aspect actuel de la politique linguistique
congolaise. Il faut retenir que le Congo y était représenté par son chef d’Etat. Et dans le cadre du suivi et
de l’application des mesures retenues, des réunions plus ou moins régulières ont lieu au Ministère des
affaires étrangères et de la Francophonie. Ces réunions impliquent des représentants d’une quinzaine de
ministères.
De façon explicite, la résolution encourage l’usage de la langue française dans les différents
secteurs d’activités. La lecture de l’extrait ci-après nous permet de parler d’apprécier la réalité de
l’engagement pour la langue française du Congo.

- « Désireux de doter la Francophonie d’outils novateurs de rayonnement et de promotion de


l’usage de la langue française, Nous Chefs d’Etat et de gouvernement des pays ayant le
français en partage, réunis à Québec du 17 au 19 octobre 2008 […] réaffirmons la nécessité
de renforcer l’accessibilité aux technologies de l’information et la visibilité en ligne des
ressources en français, disponibles notamment sur les portails numériques francophones ; […]
exprimons notre volonté de faciliter l’accès aux supports culturels en français et à la presse
francophone ; encourageons la francophonie à poursuivre et à perfectionner l’observation de
l’usage de la langue française ; réaffirmons notre intérêt à développer la coopération
décentralisée comme vecteur de promotion et de rayonnement de la langue française »13.

La politique linguistique à laquelle adhère le Congo correspond à une dynamique particulière.


L’évocation de la diversité linguistique ou de la défense du multilinguisme reste lapidaire et on semble
laisser à chaque pays le soin de bâtir sa stratégie sur la question. La résolution ne porte pas sur une
éventuelle promotion des langues locales des pays francophones. La voie à suivre dans les pratiques
linguistiques est donc clairement dessinée : le multilinguisme doit se parler en français.
Mais en dehors de l’engagement francophone, il y a aussi un engagement linguistique panafricain
qui peut être interprété comme l’expression d’une politique linguistique. L’Union africaine a en effet
entrepris, par l’intermédiaire de l’Académie africaine des langues (Acalan), la promotion des langues
africaines. Comme le note Hamidou Togo, plusieurs chefs d’Etat s’étaient engagés à Khartoum au
Soudan à la promotion des langues africaines :

« L’on retiendra entre autres objectifs assignés à l’ACALAN au sommet des chefs d’Etats et de
gouvernement de Khartoum : Les promotions des langues africaines, des langues
transfrontalières, des langues transfrontalières véhiculaires ; l’appui technique aux Etats africains
dans la formation et la mise en œuvre des politiques linguistiques ; le renforcement de la
coopération linguistique entre les Etats africains ; la redéfinition des rapports langues africaines /
langues partenaires »14.

Il se trouve que le président Sassou-Nguesso du Congo avait signé aussi les engagements de
Khartoum en faveur des langues africaines. Une telle position nous permet de faire deux commentaires.
Premièrement, il existe une politique linguistique actuelle qui vise essentiellement un positionnement

13 « Résolution sur la langue française », XIIe Sommet de la Francophonie, Québec, 2008.


14
Hamidou Togo « L’Académie Africaine des Langues (ACALAN) a 7 ans ! 8 Septembre 2001-8 septembre 2008 »,
http://www.rsbiko.com/L-Academie-Africaine-des-Langues.html consulté en juin 2010
9
idéologique du Congo. C’est le sens des engagements aussi bien pour le français dans l’espace
francophone que pour les langues africaines dans l’espace panafricain. Deuxièmement, au niveau
national, les politiques ne se prononcent de façon directe dans la gestion des langues congolaises.

5.4. En guise de conclusion


Le pluralisme linguistique est un phénomène saillant en République du Congo. Dans le cadre d’une
édification d’une politique linguistique nationale, un intérêt réel reste accordé à la langue française. Mais
ce français qui occupe de façon presque exclusive le système éducatif, la presse écrite et audiovisuelle…,
reste en concurrence avec plusieurs langues congolaises. En considérant la pratique des langues locales
(en famille, dans les milieux publics, etc.), la place du français dans la vie socio-politique, culturelle connait
une situation complexe. Ambroise Queffélec note à ce sujet : Le marché linguistique reste accaparé par
les langues africaines, mais, dans la capitale, on sent déjà poindre une guerre des langues et des cultures
que sent bien l’observateur attentif15.
En conséquence, si les structures de l’État accordent une place primordiale au français, les
structures sociales consacrent plus d’intérêt aux langues locales. Les autorités politiques doivent toutefois
se fonder sur les valeurs linguistiques congolaises pour ne pas générer des situations de dépaysement
linguistique. Entre l’ouverture à l’extérieur que favorise la promotion des langues vivantes étrangères par
le système éducatif et les médias et le maintien ou la sauvegarde des langues locales par une pratique
quotidienne, la politique linguistique devrait s’appuyer sur un choix clair applicable dans tout le pays. Par
un important investissement financier et humain en faveur de quelques langues, il serait possible d’arriver
à une mise en valeur des langues du patrimoine. Mais il y a des préalables. Il faut auparavant tenir compte
du nombre de langues ethniques. L’analyse de la réalité montre que le français est une langue congolaise
à part entière. Si des années ou des siècles plus tard, une langue originellement congolaise parvient à
remplacer le français, ce ne sera possible que si dès maintenant des moyens sont mis en œuvre. Nous
pensons aussi que les responsables politiques peuvent favoriser l’émergence d’un bilinguisme ou d’un
plurilinguisme par une valorisation accrue des langues nationales. Pour mettre en pratique de telles idées,
la création d’un centre d’aménagement linguistique paraît nécessaire pour apprécier régulièrement
l’efficience des mesures retenues.

Références

- Atlas du Congo, Paris, Les Editions Jeune Afrique, 2ème édition, 2001, 76p.
- Atlas linguistique de l’Afrique Centrale (ALAC). Situation linguistique en Afrique Centrale.
Inventaire préliminaire. Le Congo. (1987). ACCT-CERDOTOLA –Equipe Nationale du Congo.
- « Résolution sur la langue française », XIIe Sommet de la Francophonie, Québec, 2008.
- Constitution de la République du Congo du 15 mars 1992 article 3 et celle du 20 janvier 2002
article 6.
- Lipou Antoine, « Le monolinguisme étatique dans les pays d’Afrique noire d’expression
française », Annales de la Faculté des lettres et des sciences humaines, n°1, Brazzaville, FLSH,
1985, pp. 259-264.
- Massoumou Omer et Queffélec Ambroise, Le français en République du Congo sous l’ère
pluripartiste (1991-2006), Paris, Editions des Archives contemporaines-AUF, 2007, 541p.
- Mfoutou Jean-Alexis, Le français au Congo-Brazzaville, Editions Espaces culturelles, 2000.
- Niangouna Augustin, « La langue française au Congo », FLSH, Le Congo aujourd’hui : figures
du changement social, Brazzaville, FLSH, 1990, pp. 163-189.
- Nzeté Paul, "Des langues africaines, pour quoi faire?", Dimi n° 6/7, 1984 -1985.
- Osseté Jacques, Le livre scolaire au Congo, Paris, L’Harmattan, 1996.
- PCT, Eléments d’une politique linguistique nationale congolaise, 1984.
15 Ambroise Queffélec,op. cit., p. 337.
10
- Queffélec Ambroise et Niangouna Augustin, Le français au Congo, Publications de l’Université
de Provence, 1990.
- Queffélec Ambroise, « Le français en Afrique noire francophone », Gérald Antoine et Bernard
Cerquiglini (éds), Histoire de la langue française 1945-2000, Paris, CNRS éditions, 2000, pp.
797-851.
- Togo Hamidou, « L’Académie Africaine des Langues (ACALAN) a 7 ans ! 8 Septembre 2001-8
septembre 2008 », http://www.rsbiko.com/L-Academie-Africaine-des-Langues.html consulté en
juin 2010.

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