Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
| L
| | JM " | À A
| ré | à L { Ch & | À
“M +) Re | | = }
| |
C ( Æ ( Ÿ [ ï a ee \
| 1 L y L L \
|
|
|
|
| Le
|
|
* |
“ARGUMENTS"
ENITI/N
LL/I TI IV)
LA LITTÉRATURE
SELON
ROLAND BARTHES
© 1986 by LES EDITIONS DE MNUIT
7, rue Bernard-Palissy — 75006 Paris
La loi du 11 mars 1957 interdit les copies où reproductions destinées à une utilisation
collective. Toute représentation où reproduction intégrale ou partielle faite par quelque
procédé que ce soit, sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants cause, est illicite et
constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles 425 et suivants du Code pénal.
ISBN 2-7073-1066-2
VINCENT JOUVE
la
LA LITTÉRATURE
SELON
ROLAND BARTHES
._ ARGUMENTS
LES EDITIONS DE MINUIT
Es TE | dé 4 se L
FO TE CONS AN.
AD
| PA RATTE] AJ 0
“fat ne.
D oaurraAT TAAIORS 0
AVANT-PROPOS
Ar EU
At 0 ur
kr tn Lén dt
PR ç time)
Te AT
-
à, Huron LORS Se,
red 4
rt o x ve 7 >bafè À
4 pa di : . . Tv
AVERTISSEMENT
ROLAND BARTHES.
a, sf 1# Ré 207 NY TENTE Ti Ne i
| Be PNRe DETTE PR - he f \ l
Dre © hé
A". betynee <<qe durMie (Er SRE E
I
LA FORMULATION DU PROBLÈME :
SOCIOLOGIE OU ANTHROPOLOGIE ?
1. Cf. J.-P. Sartre, Qu'est-ce que la littérature ?, Paris, Gallimard, Collection « Idées »,
1948.
18 LA LITTÉRATURE SELON BARTHES
travers les lois, les valeurs, les jugements, l’homme reste enfermé
dans le champ du symbole jusqu’à sa mort. Lacan ne veut pas
dire autre chose lorsqu'il affirme que « les symboles envelop-
pent la vie de l’homme »”.
La littérature relevant d’une logique symbolique constitutive
de l'humain, il devient possible d'établir des équivalences entre
le fonctionnement inconscient du psychisme et la structure
narrative. C’est ainsi que Barthes considère le récit comme le
produit de l’« œdipe» : « Raconter, n'est-ce pas toujours
chercher son origine, dire ses démêlés avec la Loi, entrer dans
la dialectique de l’attendrissement et de la haine? » (PT,
75-76). Et, de fait, avec le complexe d'Œdipe et l’activité
littéraire, nous sommes en présence de deux composantes
anthropologiques dont le parallélisme invite à postuler l'unité
du champ symbolique humain.
La littérature présente ainsi, à l'évidence, un certain nombre
de traits transculturels. Il n’en résulte pas pour autant une
évacuation de l'Histoire. Il nous faut, ici encore, nous référer à
la distinction chomskienne entre « compétence » et « perfor-
mance ». Dans la sphère du littéraire, la « performance », c’est
la capacité individuelle d’engendrer des œuvres à partir du vaste
réseau des modèles, « patterns » syntagmatiques et protocoles
syntaxiques qui constituent la « compétence » de l'écrivain. Or,
si cette dernière notion permet de rendre compte des traits
systématiques de la littérature, il est difficile d’analyser la
« performance » sans recourir à l'Histoire.
La dimension historique.
6. Cf. F. de Saussure, Cours de linguistique générale (1906, 1911), Paris, Payot, 1972,
première partie, chapitre 1.
26 LA LITTÉRATURE SELON BARTHES
L'être de la littérature.
La position du problème.
3. Cf. Prétexte : Roland Barthes, Colloque de Cerisy (Ouvrage collectif), Paris, Union
générale d'éditions, collection « 10/18 », 1978, p. 84.
38 LA LITTÉRATURE SELON BARTHES
Le travail du signifiant.
s’en explique dès les Essars critiques dans un article consacré aux
Caractères de La Bruyère : « C’est un livre de fragments, parce
que précisément le fragment occupe une place intermédiaire
entre la maxime qui est une métaphore pure, puisqu'elle définit
(...) et l’anecdote, qui n’est que récit » (EC, 234). En recourant
ainsi à la technique de la fragmentation, La Bruyère satisfait, en
effet, à l’indirect de la littérature, dans la mesure où son texte
se situe à mi-chemin entre la définition et l'illustration. Dès que
la maxime menace de s’ériger en sens plein, l’histoire prend le
relais et la métaphore définitoire disparaît dans l’anecdote. Le
fragment évite la clausule, le dernier mot, le diktat de l’unité,
de la cohérence; il n’a pas à voir avec le signifié, mais avec le
signifiant : « Le fragment a son idéal : une haute condensation,
non de pensée, ou de sagesse, ou de vérité (comme dans la
Maxime), mais de musique : au “développement”, s’opposerait
le “ton”, quelque chose d’articulé et de chanté, une diction : là
devrait régner le timbre » (RB, 98). La grande force du frag-
ment, c’est peut-être, finalement, de se prêter à la fois à la
variation et à l'agencement. Forme souple, flexible, gratuite, il
est refus du centre et du signifié plein, plaisir savoureux de la
déprise. L'attachement de Barthes à la forme courte relève donc
d’une position idéologique, voire philosophique; il s’en expli-
que dans un entretien accordé en 1975 au Magazine litérarre :
« Ce qui y est impliqué du point de vue d’une idéologie ou
d'une contre-idéologie de la forme, c’est que le fragment casse
ce que jappellerai le nappé, la dissertation, le discours que l’on
construit dans l’idée de donner un sens final à ce qu’on dit, ce
qui est la règle de toute la rhétorique des siècles précédents »
(GV, 198). Décentrement, autonomie du signifiant, refus d’un
sens régulateur : telles sont les caractéristiques textuelles que
Barthes retrouve à l'échelle d’un pays entier, le Japon. Ce qui
le séduit dans cet « empire des signes », c’est l’exemption de
sens qui constitue, par exemple, la ville de Tokyo en véritable
écriture littéraire. La capitale japonaise est en effet « construite
autour d'un anneau opaque de murailles, d'eaux, de toits et
d'arbres, dont le centre lui-même n’est plus qu’une idée éva-
porée, subsistant là non pour irradier quelque pouvoir, mais
pour donner à tout le mouvement urbain l’appui de son vide
central » (ES, 46). Le plaisir que Barthes goûte au Japon, ce
n'est rien d'autre que le plaisir du texte.
Y A-T-IL UN SIGNIFIANT LITTÉRAIRE ? 45
6. C£.S. Freud, « Le travail du rêve », in L'interprélalion des rêves, trad. franç., Paris,
PUF 1967:
46 LA LITTÉRATURE SELON BARTHES
LITTÉRATURE RÊVE
Près de vingt ans plus tard, dans le Roland Barthes par Roland
Barthes, l'écriture est cette fois mise en relation avec le fan-
tasme : « Le fantasme me plaît parce qu'il reste concomitant à
la conscience de la réalité (celle du lieu où je suis) ; ainsi se crée
un espace double, déboîté, échelonné, au sein duquel une voix
(...), comme dans la marche d’une fugue, se met en position
d'indirect : quelque chose se fresse, c’est, sans plume ni papier,
un début d'écriture » (RB, 90). Le fantasme est comme la
littérature un langage intermédiaire, mitoyen, pris entre plu-
sieurs systèmes.
Pratique onirique, fantasmatique, la langue de la littérature
n’est finalement rien d’autre que la langue de l'imaginaire.
L'évaluation littéraire.
TABLEAU 1
Typologie textuelle et valeur littéraire
VALEUR
TYPOLOGIE CARACTERE EXEMPLES LITTÉRAIRE
l’impubliable
le recevable brûlant assumé |
Mallarmé
le scriptible jouissif Bataille
Sollers
Racine
le lisible
plaisant Sade
polysémique
Balzac
—#—— ————— ——
le lisible , littérature
poisseux
univoque de masse
54 LA LITTÉRATURE SELON BARTHES
TABLEAU 2
Répartition littéraire des codes
ne
Texte
recevable
Texte + +
scriptible
Texte
lisible + + + + +
polysémique
Texte
lisible
univoque
RES
LA QUESTION DU SENS
Le mécanisme sémantique.
Ethan
(ERC)
3.B. Brecht, Ecris sur le théâtre, trad. franç., Paris, L’Arche, 1963 et 1972, tome I,
p. 349.
66 LA LITTÉRATURE SELON BARTHES
phrase d’une platitude), les mots, les sons, les lettres, tout ce
dont peut se bourrer l'écriture pour tenir de la voix, non son
leurre expressif, mais son timbre, son grain, ce que, dans l’art
vocal, on appelle son #ordant, c’est-à-dire la marque inéluctable,
inaliénable du corps » (SE, 59).
L'empreinte que l’auteur imprime à son texte pose cepen-
dant un problème : n’y a-t-il pas contradiction à chercher un
sujet dans le texte négateur de tout sujet? Il semblerait que
non, dans la mesure où le sujet qui transparaît dans la trame
textuelle ne renvoie pas à l’image pleine et structurée d’un
référent identifiable ;le corps qui s'inscrit dans le texte est un
corps dispersé : « L'auteur qui vient de son texte et va dans
notre vie n’a pas d'unité; il est un simple pluriel de “charmes”,
le lieu de quelques détails ténus, source cependant de vives
lueurs romanesques, un chant discontinu d’amabilités » (SFL,
13). Ces détails sans ordre, ces notations désinvoltes qui
dessinent une image mobile et flottante de l’auteur, Barthes
propose de les nommer « biographèmes ». Ainsi, on ne retien-
dra du sujet Loyola que «ses beaux yeux, toujours un peu
embués de larmes », et la vie de Sade sera concentrée en un
ensemble discontinu de vingt-deux fragments : « Au thème de
l’urne et de la stèle, objets forts, fermés, instituteurs du destin,
s'opposeraient les éclats du souvenir, l'érosion qui ne laisse de
la vie passée que quelques plis » (SEL, 14).
L'infini de la signification.
4. P. Valéry, Tel quel, Paris, Gallimard, collection « Idées », 1941, tome I, p. 206.
76 LA LITTÉRATURE SELON BARTHES
FES AE
(ERC)
(ERC)
Dans le texte, en effet, le décrochage est infini; la fuite des sens
est sans limite. La signification sature l’œuvre littéraire : « Dire :
7. P. Valéry, Tel quel, Paris, Gallimard, collection « Idées », tome II, 1943, p. 49.
IV
L'EFFET - LITTÉRATURE
Livres
Revues
DEMCO
ST. OLAF COLLEGE
COLEECTION
0111 00005
ISBN 2-7073-1066-2 T
2ON
,4