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12 février 2024
ROMANNE PRESUME
Bloc 2 : Révolution scientifique, virage
technologique et informatisation des
Plan
sociétés : impacts sur l'organisation des
sociétés, du travail, de la formation 0.- Révolution numérique (5 diapos restantes) [Suite]
professionnelle. I.- Modèles théoriques des relations entre technologie et société
Cours 11.-Modèles théoriques des
relations entre technologie et société A.- Le déterminisme technologique
(1) & La sociologie des usages (2) 1.- Déterminisme radicale
2.- Déterminisme souple ou maitrisable
B.- La construction sociale
C.- La co construction
Sources
PROULX S. (2015), « La sociologie des usages, et après ? », Revue française des sciences de l'information et de la communication. URL :
http://rfsic.revues.org/1230
BOULLIER D., (2019), « Sociologie des usages », chap. 2, pp. 149-178, dans BOULLIER D., (2019), Sociologie du numérique. 2ème éd.,
Malakoff, Armand Colin, 572 p.
Lejeune, M. (2015). L’apport de la sociologie de la technologie à la professionnalisation de l’ingénieur. Phronesis, 4(2), 34–41. https://doi.org/10.7202/1033448ar
VALENDUC G. (2005 ), La technologie, un jeu de société. Louvain-La-Neuve, Bruylant-Academia, 251 p.
https://www.google.ca/url?sa=t&rct=j&q=&esrc=s&source=web&cd=&cad=rja&uact=8&ved=2ahUKEwjv2vSouvT8AhXXPEQIHW1SBl0QFnoECBEQAQ&url=https%3A%2F%2Fwww.researchgate.net%2Fpublication%2F359469469_La_technologie_un_jeu_de_
societe&usg=AOvVaw2vDa6fiPDU2Qxasp4UnS-L
I.-Modèles théoriques des relations entre technologie et société
Trois modèles et leurs différentes variantes: déterminisme technologique, construction sociale et co construction
A.- Le déterminisme technologique
• Le déterminisme technologique met l’emphase sur l’impact de la technologie sur la société, sur le caractère contraignant de la technologie.
Selon ce modèle, c’est la technologique qui influence la société et non l’inverse. On part de l’idée selon laquelle « la science détermine
la technologie qui elle détermine la société » (Lejeune, M., 2015, p. 37).
En général, lorsqu’on aborde les impacts sociaux, organisationnels et environnementaux de la technologie, cela nous renvoie surtout
au déterminisme technologique (Ibid.).
• On y distingue le déterminisme dur ou radical et le déterminisme souple.
Introduction :
Cette tradition de recherche institue un cadre d’analyse très critique analogue à « celle d’une sociologie des mouvements
sociaux » (Ibid.).
Les tenants de cette tradition de recherche militent en faveur de « « l’alphabétisme informatique » et « l’appropriation
sociale des technologies » » qu’ils considèrent comme « une source possible d’autonomie pour les personnes et
d’émancipation sociale et politique pour les groupes » (Proulx, 2015, p. 2).
En 2000, Josiane Jouët a réexaminé la sociologie des usages et préconise à ce qu’elle soit considérée au même niveau
que toutes les autres disciplines des sciences sociales.
Un an plus tard, Serge Proulx a formulé trois critères qui peuvent servir de guide en vue de réévaluer le domaine d’étude
des usages :
a. « une meilleure articulation avec les travaux sur l’innovation permettant de penser la coordination entre les
pratiques des concepteurs et des usagers » (Ibid.);
b. « une prise en compte des approches sociocognitives (telle que le modèle de la cognition distribuée) pour
appréhender les pratiques d’usage dans un contexte situé » (Ibid.);
c. « l’enchâssement des analyses microsociologiques des usages dans l’étude des enjeux macrosociologiques relevant
d’une approche sociopolitique » (Ibid.).
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II. La sociologie des usages
Introduction :
• En 2011, Josiane Jouët réexamina la sociologie des usages et dressa un inventaire des études françaises dans ce domaine.
Elle apercevait « la transmission de certaines postures d’investigation – notamment la mise à distance du déterminisme
technique – en même temps qu’une récurrence de quelques thématiques (appropriation, innovation autour des
protocoles de communication, nouvelles pratiques en réseau) » (Ibid., p. 2).
Elle constate aussi plusieurs traits de discontinuité. Car, la technologie a connu des progrès qui ont des incidences
significatives sur les acteurs concernés, entrainant du même coup de nouvelles formes de médiations.
• « la question de la médiation opérée par la technologie a connu une nouvelle vigueur du fait de l’importance prise par les
Internet Studies ; les problématiques se sont complexifiées (explosion des services d’Internet, développement de nouvelles
interfaces et configurations sociotechniques, diversification des usages) ; les protocoles d’observation se sont raffinés (suivi
des usagers à la trace, observation des pratiques en ligne, production de graphes relationnels faisant émerger la structure et les
flux de réseaux) » (Ibid.).
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II. La sociologie des usages
Introduction :
• En ce qui concerne les études sur les usages, on déplore le fait que les corpus soient seulement structurés autour des traces laissées par les
utilisateurs.
Une telle posture peut excessivement « conduire à un empirisme méthodologique à outrance sans consistance théorique, l’épaisseur
sociologique des usages se réduisant à n’être plus qu’une comptabilisation de clics » (Ibid., p. 2).
L’obsession pour la quantification des traces a réduit l’usager à un clic seulement. Par exemple, lorsque nous achetons sur Amazon,
eBay ou autres, ces sites utilisent nos clics et nos achats pour définir nos goûts et nos préférences comme consommateur (Ibid.).
Les outils techniques qu’ils utilisent réduisent l’individu à « n’être qu’un consommateur-avec-des-goûts alors que l’être humain est
beaucoup plus que cette description sans qualité » (Ibid., pp. 2, 3).
Sous cet angle, Josiane Jouët a observé l’existence d’un risque de « « réification des liens électroniques » alors que l’usager appartient
pourtant simultanément à plusieurs « mondes sociaux » » (Ibid., p. 3).
On tente de définir l’usager à partir d’une seule dimension de sa vie : son type d’achat en ligne, ses clics sur différents objets pour
déterminer ses gouts et ses préférences alors que l’identité de l’individu est plurielle.
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II. La sociologie des usages
B.- Seconde topique (1995-2010) : nouvelles orientations vers l’ethnographie de l’activité - abandon d’un point de vue centré sur
l’objet technique
• À partir de 1995, on estime que la sociologie des usages orientée vers les objets techniques était insatisfaisante pour l’analyse « des
situations et des pratiques d’usage dans les milieux les plus divers, notamment dans les organisations et les situations contraintes par
l’organisation du travail » (Ibid., pp. 4, 5).
On va adopter une posture alternative qui vise à inscrire les incidences de la technique dans un autre angle d’approche plus vaste qui
prend en compte la pluralité de déterminations (Doray et Millerand, 2015, p. 67).
Donc, au lieu de parler de « déterminisme technique », on va mettre l’accent sur le « déterminisme multiple » (Ibid.).
Dans cette perspective, « L’organisation, par exemple, serait façonnée non seulement par les techniques adoptées, mais aussi par les
stratégies des acteurs, les modes de gestion du changement technologique, le type de marché économique dans lequel l’entreprise
baigne, etc. » (Ibid., p. 67).
De nombreuses études empiriques réalisées au cours de cette période abordaient les situations et les usages dans divers milieux sous un
angle pluridisciplinaire (Proulx, op. cit., p. 5).
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II. La sociologie des usages
B.- Seconde topique (1995-2010) : nouvelles orientations vers l’ethnographie de l’activité - abandon d’un point de vue centré sur
l’objet technique
Désormais, « Divers modèles d’étude ont émergé à partir de nombreux travaux empiriques. Les modèles sont devenus pluriels et
davantage interdisciplinaires » (Ibid., p. 5).
Des chercheurs venant d’horizons divers ont recouru à une gamme « de problématiques et de cadrages théoriques » (Ibid.).
Ils se sont appuyés sur diverses approches et références théoriques provenant de « L’ethnométhodologie, l’anthropologie des sciences
et des techniques, les approches de la cognition située, la sociologie pragmatique, la théorie de l’activité », et autres (Ibid.).
Il s’agit d’une nouvelle manière d’envisager l’étude des usages qui vise d’une part à l’affranchir d’une vision exclusivement
sociologique et d’autre part en la libérant du « focus analytique orienté prioritairement vers les objets techniques (et en particulier,
l’usage de ces objets) ».
Avec ce nouvel angle d’approche, la technologie est devenue non le seul aspect de « l’écologie humaine et sociale », mais une
dimension parmi tant d’autres.
C’est en observant attentivement les activités de l’homme que l’on parviendra à mieux comprendre l’importance des « objets
techniques dans l’environnement équipé des agents » (Ibid.).
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II. La sociologie des usages
B.- Seconde topique (1995-2010) : nouvelles orientations vers l’ethnographie de l’activité - abandon d’un point de vue centré sur
l’objet technique
Ainsi, « Le travail d’observation consiste à décrire non plus « ce que les gens font avec les objets techniques » (première topique) mais
bien : « ce que les gens font (tout court)… Ce dans quoi les humains sont engagés » ».
Cette nouvelle manière d’envisager les usages retentit auprès des sociologues de style pragmatique, notamment avec la sociologie des
épreuves (Ibid.).
Elle est apparue comme « un méta-modèle qui met en relief et hiérarchise les principaux niveaux d’analyse pouvant être mobilisés
selon différents angles de vue sur les pratiques et les situations d’usage » (Ibid., p. 5).
Dans cette perspective, Serge Proulx a conçu une grille dans laquelle se regroupent en cinq dimensions les modèles théoriques et
méthodologiques servant à encadrer les études empiriques sur les usages :
1. « Suivre l’utilisateur dans son face-à-face avec l’objet technique : décrire l’interaction dialogique utilisateur / dispositif technique
(Human-Computer Interaction - HCI) » (Ibid., p. 5) ;
2. « Suivre le cours d’actions de coordination entre le concepteur et l’usager : cet angle postule une perméabilité entre les univers du
concepteur et de l’usager ; le concepteur inscrit des « scripts » (Akrich, 1987) dans les objets techniques, inscriptions corrigées et
ajustées en permanence en fonction des attentes et des pratiques déployées par l’usager » (Ibid., p. 5) ;
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II. La sociologie des usages
B.- Seconde topique (1995-2010) : nouvelles orientations vers l’ethnographie de l’activité - abandon d’un point de vue centré sur
l’objet technique
3. « Décrire de manière fine et détaillée la situation d’usage : décrire de façon étoffée (thick description) les pratiques des agents et
des collectifs dans l’environnement équipé (description compréhensive de l’expérience de l’usager individuel ou collectif) » (Ibid., p.
5) ;
4. « Suivre la trajectoire de l’objet prescripteur : au fil de sa construction, depuis les premiers tâtonnements des concepteurs jusqu’à
sa stabilisation pour une mise en marché, des dimensions politiques et morales se voient inscrites dans le design de l’objet technique ;
ce travail itératif d’ajustement des inscriptions se répercute dans la « configuration de l’usager » (Woolgar, 1991) » (Ibid., p. 5) ;
5. « Retracer l’ancrage collectif et historique des usages dans des séries et séquences structurelles (logiques) qui constituent les
formes sociohistoriques de l’usage » (Ibid., p. 5) ;
« Dans le contexte de ces travaux descriptifs et ethnographiques sur les activités en situation, la centralité du point de vue de
l’observateur sur l’usage des technologies par l’agent humain a été abandonnée. L’observateur s’attache plutôt à décrire la totalité
de l’activité en situation, la mobilisation d’un dispositif technique par l’agent humain devenant l’une des dimensions de la
description parmi d’autres. L’observateur décrit comment les agents se coordonnent entre eux et avec les dispositifs techniques, en
habitant de façon durable dans un environnement équipé de technologies ».
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