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Notions de trajectoires orthodromique et loxodromique

Cet article a pour objet d'expliciter les différences entre les trajectoires orthodromique et
loxodromique. Il doit permettre au lecteur de comprendre le calcul des arcs de cercle sur la sphère
terrestre.

Définition :

Loxodromie – du grec loxos oblique et dromos chemin (courbe bleue) : courbe sur la surface
terrestre coupant l'ensemble des méridiens selon un angle constant.
Pour simplifier, la loxodromie désigne la trajectoire qu'un mobile parcourt en conservant une route
constante (ex : cas d'un avion qui suit un cap donné).

Orthodromie – du grec orthos droit et dromos chemin (courbe rouge) : arc de grand cercle de la
sphère terrestre.
Pour simplifier, une orthodromie est une section d'un cercle de la sphère terrestre. Elle représente la
distance la plus courte entre deux points de la sphère terrestre.

La figure ci-dessus met en évidence les similitudes et les écarts entre ces deux trajectoires :
– pour de faibles distances, les trajectoires sont similaires,
– pour de grandes distances :
– la loxodromie tend vers le pôle Nord ou Sud (phénomène "d'enroulement"),
– l'orthodromie fait le tour de la terre.
Historique :

Les notions de trajectoires orthodromique et loxodromique sont intimement liées à la navigation


maritime. Elles ont été mises en évidence par le mathématicien portugais Pedro Nunes au 16e
siècle. Il a ainsi démontré que les navigateurs ne suivent pas une géodésique lorsqu'ils prennent
pour référence une route constante.

Il est important de préciser que l'utilisation des trajectoires orthodromiques n'a pas été réalisée
avant le 20e siècle. Ceci pour deux raisons majeures :
– le gain en distance est non significatif. Il est sans doute nul si l'on considère les dérives de
navigation (imprécision de la route, courant marin ...).
– pour assurer un gain en distance, il est nécessaire de connaitre avec précision sa position. En
effet, il n'existe pas de référence physique liée à la trajectoire (le cap évolue continuellement
contrairement à une loxodromie). Il n'est donc pas possible de suivre une route
orthodromique. La trajectoire est donc découpée en section loxodromique pour les
navigateurs. Une connaissance précise de sa position est nécessaire pour réaliser les
raccordements. Toutefois, il a fallu attendre le 19e siècle et la mise en application de
l'invention de John Harrisson (chronomètre précis) pour permettre aux navigateurs de
connaitre avec précision leur longitude.

Notion de géodésique :

Lorsque l'on définit une trajectoire, on cherche toujours à se positionner par rapport un optimum,
comme dans en toute chose du reste. Dans le cas de la navigation, cet optimum est souvent la
trajectoire de plus courte distance. Par rapport à cette référence, on définit alors une trajectoire
nécessaire, c'est à dire intégrant un ensemble de contraintes : sécurité, point de passage ...
Pour comprendre pourquoi la trajectoire orthodromique représente cette optimum, il faut d'abord
comprendre ce qui détermine une distance minimale.

Entre deux points, il est aisé de comprendre que la distance minimale est la ligne droite. En
conséquence, toute courbure de la trajectoire augmente la distance à parcourir. Un critère intuitif
pour approcher la distance minimale est de considérer la trajectoire la moins "tordue".
Pour la terre, une contrainte apparait, la trajectoire est "plaquée" sur une sphère. En conséquence,
toute trajectoire a une courbure intrinsèque, la courbure de la terre. Le rayon de courbure (rayon de
la terre) est orthogonale à la trajectoire. Toute torsion de la trajectoire est donc réalisée
perpendiculairement à cette courbure. Pour simplifier, une courbure de la trajectoire s'ajoute à la
courbure de la terre. En conséquence, la distance minimale est l'arc de grand cercle.
Pour appréhender ces propos, voici une approche par étape :

– 1ère figure : ligne droite


– 2e figure : ligne droite plaquée à la sphère
– 3e figure : représentation en 3D
– 4e figure : illustration de l'ajout d'une courbure à la courbure existance liée à la sphère. La
distance est naturellement augmentée.
Trigonométrie sphérique :

Les expressions mathématiques des trajectoires orthodromique et loxodromique s'appuient sur la


trigonométrie sphérique, c'est à dire sur un triangle appliqué à une sphère.
Ce paragraphe rappelle les principales relations mise en oeuvre.

La figure ci-dessus présente le triangle de travail constitué de segment d'arc de grand cercle :

Formule dite des cosinus :

cos (a)=cos( b). cos (c)+sin(b).sin (c) . cos( A)

cos (b)=cos (a ). cos (c)+sin( a). sin( c).cos ( B)

cos (c)=cos(a). cos(b)+sin( a). sin( b). cos(C)

NOTA : cette fomule peut-être facilement obtenue par produit scalaire.

Formule dite des sinus :

sin (a ) sin(b) sin (c)


= =
sin (A) sin ( B) sin (C)

Formule dite des longueurs :

sin(a) .cos ( A)=sin (b). cos (c)+cos (b). sin(c).sin (A)

sin( b). cos( B)=sin(c). cos (a )+cos (c).sin (a ). sin(B)

sin(c). cos (C )=sin( a) .cos (b)+cos(a) .sin (b). sin(C )


Loxodromie – approche mathématique :

La proprité de la loxodromie est de couper l'ensemble des méridiens d'une sphère selon un angle
constant.
Pour déterminer les relations latitude/longitude et de distance entre deux points A et B, il faut
utiliser une approche différentielle :

Relation latitude / longitude :

R.cos(L) . dG R : rayon terrestre


tan (C )=
R.dL C : cap (constant pour une loxodromie)

dG dL
=
tan(C ) cos( L)

Sans s'attarder sur la détermination de la primitive de l'inverse de cosinus, on obtient :

Lb pi La pi
Gb−Ga=tan (C) .(log ( tan( + ))−log (tan( + )))
2 4 2 4

Cette relation traduit une croissance logarithmique des longitudes.

Relation distance :

R.dL
cos (C)=
dD

R
D= .(Lb−La)
cos (C )

Cettte relation n'est évidemment pas valable pour un cap de 90° ou de 180°. Dans ce cas, la relation
à utiliser est la suivante :

D= R.cos( L) .(Gb−Ga)
Loxodromie – comportement :

Pour comprendre le comportement d'une trajectoire loxodromique, considérons la relation :


dG dL
=
tan(C ) cos( L)

Evolution : cos(L) est toujours positif. En conséquence, pour un cap donnée, une évolution de
longitude se traduit par une évolution de latitude de même signe. La loxodromie se rapproche donc
inexorablement d'un pôle terresre.
Vitesse : une évolution de longitude se traduit par une évolution de latitude :
– pour les faibles latitudes, cos(L)~1, donc dG est proportionnel à dL
– pour les latitudes moyennes, le facteur cos(L) est à prendre en compte pour intégrer le
resserement des méridiens
– pour les hautes latitudes, cos(L) ~ pi/2 – L, or la primitive de 1/x est la fonction logarithme.
Les longitudes suivent donc une croissance logarithmique à haute latitude.

La figure suivante met en évidence l'évolution de la latitude fonction de la longitude pour différents
caps initiaux :
L o x o d ro m ie - lo n g it u d e / la t it u d e
90

80

70

60

50
deg

40 88°
85°
80°
30 75°
65°
20 50°
30°
10°
10

0
0 50 100 150 200 250 300 350
deg

Cap initial : 85° Cap initial : 60° Cap initial : 20°


Orthodromie – approche mathématique :

L'orthodromie est un arc de grand cercle d'une sphère. Ainsi, la caractérisation d'une orthodromie
est équivalente à la caractérisation d'un grand cercle.
Pour déterminer les relations latitude/longitude et de distance entre deux points A et B, il faut
utiliser la trigonométrie sphérique :

Relation distance :

Cette relation est établie en faisant le produit scalaire des vecteurs OA et OB :

cos (D)=sin( La).sin ( Lb)+cos (La) . cos( Lb). cos (Gb−Ga)

Relation cap initial (au point A) :

Cette relation est établie à partir de la formule des cosinus appliquée au triangle ABP (P : pôle
terrestre).

sin ( Lb)−sin (La) . cos( D)


cos (C)=
cos (La ). sin( D)

Cette relation est établie à partir de la formule des sinus appliquée au triangle ABP :

cos ( Lb). sin(Gb−Ga)


sin(C )=
sin( D)

A partir des trois relations précédentes, on peut relier le cap initial est les positions des points
A et B :

tan (Lb). cos (La) tan(La )


cotan(C )= −
sin (Gb−Ga) tan (Gb−Ga)

Position du vertex :

Le vertex désigne le point de plus grande élévation sur le grand cercle, soit de latitude maximale (il
en existe donc deux en opposition) :
Pour déterminer sa position, il faut se placer dans le triangle AVN (V : vertex, N : pôle terrestre).
Par application de la formule des sinus, on a :

cos ( Lv)=cos( La).sin (C)

La longitude du vertex est obtenue par application de la formule des cosinus au triangle AVN :

tan( La)
cos (Gv−Ga)=
tan ( Lv)
Orthodromie – comportement :

La compréhension du comportement d'une orthodromie est simple dans la mesure ou l'on discute le
positionnement d'un cercle dans une sphère. La difficulté provient de la projection spatiale de ce
cercle en trois dimensions.
La figure suivante met en évidence l'évolution de la latitude fonction de la longitude pour différents
caps initiaux (ex : trajectoires satellites) :

O rt h o d ro m ie - lo n g it u d e / la t it u d e

80

60

40

20

0
deg

-2 0
88 °
85 °
-4 0 80 °
75 °
65 °
-6 0 50 °
30 °
10 °
-8 0

-2 0 0 -1 5 0 -1 0 0 -5 0 0 50 100 150 200


deg

Cap initial : 45° Cap initial : 70°


Comparaison – Orthodromie / Loxodromie :

L'analyse distincte de ces deux trajectoires a permis de mettre en évidence leurs caractéristiques
propres. Nous allons désormais comparer leurs évolutions.
La figure suivante présente une trajectoire loxodromique et orthodromique respectivement pour un
cap initial de 45° :

L o n g it u d e / la t it u d e
90

80

70

60

Loxo
50 O rth o
deg

40

30

20

10

0
0 20 40 60 80 100 120 140 160 180
deg

Pour de courtes distances, les deux trajectoires sont similaires. Pour de longues distances, les deux
trajectoires sont distinctes. A noter que pour un même cap et une même position initiale, l'élévation
de la loxodromie est toujours plus importante.
Pour nos latitudes (<60°), calculons l'écart entre ces deux trajectoires (au sens orthodromique) pour
un cap initial de 45° et une position initiale (0° , 0°) :

E c a r t lo x o / o rt h o fo n c t io n d e la d is t a n c e p a r c o u ru e Z O O M : E c a r t l o x o / o r t h o fo n c t i o n d e l a d i s t a n c e p a r c o u r u e
5000 200

4500 180

4000 160

3500 140

3000 120

2500 100
km

km

2000 80

1500 60

1000 40

500 20

0 0
0 2000 4000 6000 8000 10000 12000 14000 0 1000 2000 3000 4000 5000
km km

Cette figure montre que l'écart entre ces deux trajectoires est :
– non significatif pour des distances régionales (<1000 km),
– peu significatif vis à vis d'exigences autres que la distance à parcourir (sécurité ...) pour des
distances intercontinentales (<5000 km)
– considérable lorsque les distances sont de l'ordre de la dimension terrestre (rappel : 1 quart
de la circonférence terrestre : 10000 km).
NOTA : ces résultats sont à pondérer en fonction de la position initiale et du cap initial.
Comparaison – applications pratiques :

Position initiale – Paris :


– latitude : 48,86°
– longitude : 2,34°

Position finale – New-York :


– latitude : 40,73°
– longitude : -74°

Orthodromie en rouge, loxodromie en bleu.

Distance :
– orthodromie : 5842 km
– loxodromie : 6083 km

Cap initial :
– orthodromie : -68,20°
– loxodromie : -98,56°

L'écart de distance est peu important, par contre, l'écart de cap initial est significatif.

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