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Guide de
rédaction scientifique
L’hypothèse, clé de voûte de l’article scientifique
Éditions Quae, RD 10, 78026 Versailles Cedex, France
© Le code de la propriété intellectuelle interdit la photocopie à usage collectif sans autorisation des
ayants droit. Le non-respect de cette disposition met en danger l’édition, notamment scientifique,
et est sanctionné pénalement. Toute reproduction même partielle du présent ouvrage est interdite
sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie (CFC), 20 rue des Grands-
Augustins, Paris 6e.
Sommaire
Avant-propos 5
Préface 7
Réfléchir avant d’écrire 9
Rédiger pour achever votre travail de recherche 10
Le bon état d’esprit 11
Le bon style 12
Principes de construction d’un article scientifique 14
Comment démarrer ? Les 5 mythes de la rédaction scientifique 18
Mythe n° 1. Je dois apprendre le langage spécifique de la recherche
avant d’écrire correctement 19
Mythe n° 2. Je dois choisir la revue avant de commencer à écrire 20
Mythe n° 3. Si l’anglais n’est pas ma langue maternelle,
j’aurai besoin d’aide dès le départ 20
Mythe n° 4. Je dois écrire mon article dans l’ordre pour qu’il soit cohérent,
en commençant par le début et en finissant par la fin 21
Mythe n° 5. J’ai des résultats négatifs et les éditeurs ne publient pas
des résultats négatifs 22
Rédiger un article scientifique 25
Une structure logique et un style lisible 26
Le titre 27
L’introduction : l’hypothèse et sa justification 30
Formulation d’une hypothèse logique 32
Recherche de l’hypothèse sous-jacente 33
L’hypothèse, clé de voûte de l’article 35
Le raisonnement sous-jacent à l’hypothèse 36
Les matériel et méthodes 40
Les résultats 44
Choix des résultats à présenter 45
Quelle forme de présentation : texte ou illustrations ? 47
Quelles illustrations : figures ou tableaux ? 50
Utiliser des statistiques dans la présentation des résultats 52
La discussion 54
Qu’est ce qui fait une bonne discussion ? 54
Que faut-il discuter ? 57
Faire ressortir votre message scientifique 57
Le paragraphe, véhicule de vos arguments 60
Les erreurs de logique dans la discussion 62
Spéculations dans la discussion 63
Longueur de la discussion 64
Références dans la discussion 65
Vérifier la logique de la discussion 66
3
Le résumé 67
Les quatre éléments du résumé 67
L’élaboration du résumé 68
Les autres sections de l’article 69
Les auteurs 69
Les remerciements 71
La bibliographie 72
Corriger la lisibilité et le style 73
Éliminer les écueils freinant la lecture 74
Les huit écueils de la lecture 75
Livrer le message écrit d’une manière qui coïncide
avec la façon de lire du lecteur 87
Et maintenant ? 93
Comment juger la logique et le style objectivement 94
Les six étapes de polissage final du style et de la lisibilité 95
Relations avec la revue 97
Rédiger et communiquer avec d’autres supports scientifiques 103
Le texte pour une présentation orale à un séminaire scientifique 104
Les clés de la réussite d’une communication orale 104
Une structure bien pensée 105
Conception et préparation de posters pour des conférences 117
Qu’est ce qui fait le succès d’un poster? 118
La structure d’un poster réussi 119
L’article de synthèse 125
Structure de l’article de synthèse 126
Des idées novatrices 127
La bibliographie 128
Rester centré sur votre sujet 129
Quelques difficultés courantes dans les articles de synthèse 129
La rédaction scientifique pour un public non scientifique 131
Ce qu’un lecteur veut lire et ce qu’un chercheur veut dire 132
Qu’est-ce qui fait un bon article de vulgarisation ? 133
Les ingrédients essentiels 135
Construction de l’article de vulgarisation 136
Révision finale 137
La thèse 138
Forme et présentation d’une thèse 138
Revue de la littérature dans la thèse 139
La thèse sur articles 140
La thèse traditionnelle 141
Anatomie d’une thèse 147
Et maintenant, en avant pour la rédaction de la thèse, le résumé de travail 148
Des centaines de personnes ont contribué à ce livre. Ce sont pour la plupart des
chercheurs qui ont participé à des travaux pratiques et à des cours. Dans le cadre
de ces travaux, nous avons collectivement appliqué des concepts concernant la
réflexion et le raisonnement qui permettent de convertir des idées et des données
expérimentales en articles bien ciblés et publiables. Ces chercheurs, issus de divers
pays et parlant des langues différentes, ont testé les limites de ces concepts sur
des sujets très variés tels que la biologie moléculaire, le marketing et le droit.
Les principes de raisonnement et de rédaction illustrés dans ce livre ont émergé
de cet effort collectif. Je suis reconnaissant à ces personnes qui m’ont lancé des
défis et se sont livrées à des échanges de vues sans concession, cela m’a permis
de progresser dans la formulation des idées présentées dans ce livre. En fait, je
ne me souviens pas d’un seul cours qui ne m’ait appris quelque chose ou incité à
modifier au moins un élément que je pensais fermement établi.
La rédaction scientifique est un exercice dynamique. Pour preuve, il suffit de
comparer un article publié aujourd’hui avec un texte publié par exemple dans
les années soixante. Bien sûr, certains éléments comme la précision, la clarté et
la concision semblent immuables, mais beaucoup d’autres, comme l’utilisation
de la forme passive ou de la première personne « je » ou « nous », ont changé
notablement en un temps relativement court. L’ère électronique a modifié et
continuera de modifier la façon dont les articles sont soumis, évalués, publiés
et même la façon dont ils sont lus. Mais la nécessité d’une bonne rédaction reste
toujours aussi impérative. Toutefois, pour tenir compte des changements dans le
monde de l’édition scientifique, j’aurai besoin de corriger ce livre périodiquement
et pour cela j’ai besoin de votre aide. Quelque part dans ce livre, j’ai utilisé le
cliché disant que l’article scientifique parfait reste à écrire et cette réflexion
s’applique également aux livres. De plus, le risque inhérent à la publication
d’un livre conseillant comment écrire est qu’il prépare le lecteur à reconnaître
plus facilement les erreurs présentes dans ce même livre que dans un ouvrage
traitant d’autres sujets. Donc vous, lecteurs, êtes mieux placés que quiconque pour
suggérer comment l’améliorer et, si vous souhaitez contribuer à cette amélioration,
vos commentaires seront les bienvenus.
Cet ouvrage est aussi le fruit des interactions avec mes collègues, qui utilisent les
principes de structure et de style régulièrement dans leur propre recherche et dans
l’enseignement, et qui n’ont jamais hésité à lancer des discussions animées dans
les lieux et aux moments les plus improbables pour questionner un aspect ou un
autre de cet ouvrage. Je tiens tout particulièrement à mentionner Pascal Poindron,
AVA N T- P R O P O S 5
collègue francophone qui parle couramment l’anglais et l’espagnol et qui est
largement responsable de cette version française, mais aussi Pierre Le Neindre,
également francophone parlant couramment anglais et Ian Williams, collègue
australien passionné de bonne rédaction. Ils ont tous proposé des compléments
intéressants et des modifications précieuses à la rédaction de ce livre. De plus, ils
m’ont rendu particulièrement attentif aux problèmes, et parfois aux avantages, qui
surgissent lorsque des auteurs dont l’anglais n’est pas la langue maternelle doivent
rédiger leur travail en anglais, qui est de facto la langue universelle des publications
scientifiques. Cela m’a conduit à traiter beaucoup des aspects de la rédaction
scientifique du point de vue des auteurs français et à souligner qu’ils ne sont pas
aussi désavantagés qu’ils peuvent peut-être le penser. Le langage scientifique, qui
traite de logique et de raisonnement, est indépendant de la langue dans laquelle
il est exprimé. Puisque le but premier d’une bonne rédaction scientifique est de
communiquer de la science de bonne qualité, les bons chercheurs dont l’anglais
n’est pas la langue maternelle ont de fait tous les outils nécessaires pour bien écrire,
même s’ils ont besoin d’aide dans la phase finale de rédaction pour publier dans
des revues de langue anglaise.
Je dois énormément à ma fille Kate, pour la mise en forme très professionnelle et la
conception de la couverture de la version anglaise de cet ouvrage, et à mon épouse
Rosalind, pour sa bonne volonté quasi permanente lors de ses innombrables
relectures et corrections du manuscrit.
David Lindsay (juin 2011)
P R É FA C E 7
Réfléchir avant d’écrire
R É F L É C H I R AVA N T D ’ É C R I R E 9
Rédiger pour achever votre travail de recherche
Un des plus grands paradoxes dans tous les secteurs de recherche est que le travail
doit être rédigé pour pouvoir être considéré comme achevé. Et pourtant, la formation
à la rédaction scientifique est rare dans le cursus de formation des futurs chercheurs.
On a coutume de dire « Si vous ne l’avez pas rédigé, c’est comme si vous n’aviez
rien fait ». Ce n’est pas parce que le dernier échantillon a été prélevé ou les dernières
données analysées qu’un projet de recherche est terminé. Dans le monde de la
recherche, il ne suffit pas qu’un ou deux collègues du bureau d’à côté soient au courant
de vos derniers résultats pour avoir accompli quelque chose de concret. Depuis le jour
où vous avez commencé vos études de troisième cycle universitaire et avez décidé
de devenir un chercheur, votre cercle de collègues, ou de collègues potentiels, est
passé de quelques compagnons d’études à un nombre indéfini
de chercheurs dans le monde entier. Communiquer avec eux
est une tâche très différente de celles que vous accomplissiez
en tant qu’étudiant. De fait, vous pourriez bien découvrir que
« Si vous ne l’avez vous allez passer autant de temps à écrire, lire ou corriger des
pas rédigé, manuscrits qu’à réaliser des protocoles expérimentaux. Même
si vous exposez aux participants d’un grand congrès ou d’une
c’est comme si vous réunion ce que vous avez fait, ceux-ci ne représentent sans doute
n’aviez rien fait » qu’une faible proportion des scientifiques de votre domaine de
recherche et les répercussions seront probablement éphémères.
« Les paroles s’envolent mais les écrits restent ». Ce qui est écrit
est permanent, se diffuse et reste la meilleure manière d’informer le reste du monde
des résultats des recherches auxquelles vous avez participé de manière significative.
Malgré cela, parmi les aptitudes indispensables aux chercheurs, la rédaction
scientifique reste de loin l’une dont l’enseignement demeure très déficient. Il suffit
pour s’en convaincre de jeter un œil à quelques données sur la formation à la
rédaction scientifique :
• 99 % des scientifiques sont d’accord pour dire que la rédaction fait partie
intégrante de leur travail de recherche ;
• moins de 5 % ont eu un enseignement formel en rédaction scientifique dans
leur cursus de formation ;
• pour la plupart, la seule expérience qu’ils ont acquise a été l’exemple fourni
par la littérature qu’ils lisent ;
• environ 10 % des chercheurs prennent plaisir à rédiger, les autres 90 %
considèrent la rédaction comme un mal nécessaire.
Ces chiffres sont bien sûr approximatifs, mais ils sont le fruit d’enquêtes informelles
conduites sur de nombreuses années dans beaucoup de pays et je crois qu’ils reflètent
assez bien la réalité.
Il est facile de déduire qu’un sérieux problème se cache derrière ces statistiques.
Par exemple, si 90 % des scientifiques ne prennent pas réellement plaisir à écrire,
cela signifie que la plupart de la littérature que nous consultons est écrite par des
gens qui n’aiment pas écrire. Il est probable que, indépendamment de la qualité de
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formé en tant que scientifique à rechercher des informations et à les utiliser. Je vous
présente des données et leur interprétation et j’attends de vous que vous utilisiez
vos capacités pour en tirer le meilleur profit possible ». Cette expression « attitude
passive » peut paraître un peu sévère, mais je crois qu’elle reste une interprétation
correcte de l’esprit dans lequel beaucoup d’articles scientifiques sont rédigés.
La deuxième attitude est beaucoup plus positive et peut s’exprimer ainsi : « Je viens
juste de participer à une aventure de recherche scientifique et j’ai trouvé quelque
chose que je veux partager avec vous, lecteur. Dans cet article je vais vous entraîner
dans cette même aventure et vous raconter ce que j’y ai trouvé de passionnant. De
ce fait, j’espère que vous comprendrez et apprécierez ma contribution scientifique ».
Si les articles scientifiques sont écrits pour être lus, alors il est important pour vous
en tant qu’auteur d’avoir une idée réaliste du type de personnes à qui s’adresse
votre prose et de comment elles vont la lire. En fait, les motivations de vos lecteurs
potentiels ne vont pas être très différentes des vôtres. Ce qui veut dire qu’ils sont
très occupés, qu’ils ont aussi d’autres choses à lire que des articles scientifiques
dans leur programme de la journée. Par conséquent, ils sont facilement convaincus
qu’ils n’ont pas besoin de lire la plupart des articles des journaux scientifiques qui
passent sur leur bureau. Et ils ne vont certainement pas se mettre à lire un article
simplement dans l’espoir qu’il contienne une information inattendue qui pourrait
leur être utile, surtout si elle est cachée dans un paragraphe noyé dans le reste de
l’article. D’abord, il faut donc capter l’attention du lecteur et ensuite essayer de la
maintenir jusqu’à la dernière ligne. Ce doit être votre but, même s’il est probable
que vous n’y arriviez pas dans bon nombre de cas, y compris avec des articles bien
écrits. D’une manière générale, le lecteur potentiel reste sélectif jusqu’à ce qu’il se
fasse une première idée du contenu de l’article et de ce qu’il peut en retirer. Ensuite,
si l’article l’intéresse vraiment, il reviendra sur l’ensemble et le lira complètement
avec attention. Le défi est de s’assurer que même s’il ne fait que survoler votre
article, le lecteur retienne l’essentiel de ce que vous avez à dire. Cela signifie qu’il
doit trouver les parties les plus importantes clairement présentées et là où il s’attend
à les trouver. S’il est obligé d’aller chercher vos résultats les plus intéressants noyés
dans une masse hétérogène de données dans la section résultats, ou votre plus
brillante déduction dans un ensemble de commentaires confus dans la discussion,
vous avez peu de chances que votre travail soit reconnu et apprécié à sa juste valeur.
Pour écrire un bon article, vous ne pouvez pas vous contenter de mettre vos résultats
et vos commentaires sur papier ; vous devez faire un effort supplémentaire pour
vous assurer qu’ils sont bien structurés et présentés de façon à ce que le lecteur y
ait facilement accès.
Le bon style
Lors de la rédaction d’articles scientifiques, beaucoup d’entre nous bataillons pour
obtenir un style de rédaction qui ne nous vient pas spontanément. Nous pensons
qu’il faut adopter un style compliqué sur la base de vagues impressions provenant
de ce que nous lisons dans la littérature : rien n’est plus éloigné de la vérité. Et c’est
là que la plupart des modèles que nous utilisons dans la littérature nous trahissent.
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en anglais. En effet, la plupart du temps, la langue dans laquelle la science est
publiée aujourd’hui est l’anglais, alors que bien souvent ce n’est pas la langue
maternelle de ceux qui lisent les articles. Si ces lecteurs-là sont découragés parce
qu’il leur faut sans cesse chercher dans leur dictionnaire ce que les anglophones
veulent dire, l’objectif même de l’article, à savoir qu’il soit lu et compris, ne pourra
jamais être atteint. En fait, avec l’élargissement croissant de l’expertise scientifique
à travers le monde, les gens dont l’anglais est la langue maternelle ont une sérieuse
obligation vis-à-vis de leurs collègues non-anglo-saxons de ne pas faire étalage
de leur bonne fortune en utilisant des mots ou des formulations compliqués et
difficiles à comprendre. À plus forte raison, un francophone, ou toute personne
dont l’anglais n’est pas la langue maternelle et qui doit rédiger en anglais, n’a
aucun intérêt à le faire dans un style compliqué ou avec des mots inhabituels.
Cela ne ferait que lui compliquer la tâche, et l’usage de mots peu courants et un
style obscur peuvent impressionner, mais pas forcément de manière positive.
Souvenez-vous que votre premier objectif quand vous écrivez un article scientifique
doit être qu’un maximum de gens le lisent, le comprennent et soient influencés
par ce que vous avez écrit.
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remplir deux conditions pour être utile en recherche scientifique : elle doit être en
accord avec l’information connue et elle doit être vérifiable. Pour remplir la première
condition, vous, chercheur, devez lire la littérature et la comprendre. Pour remplir la
deuxième condition, vous devez confronter votre hypothèse à la réalité du terrain.
Dans le fond, l’article que vous êtes sur le point d’écrire ne concerne rien d’autre
que ces deux points là. Il vous est donc facile de comprendre pourquoi l’hypothèse
joue un rôle aussi central dans la rédaction scientifique.
Dans l’application de la méthode scientifique, l’énonciation, la justification et
la vérification d’une hypothèse représentent l’essence même de toute recherche
scientifique digne de ce nom. Ce rôle primordial de l’hypothèse est également ce
qui fait l’essence du présent livre. En effet, l’hypothèse est un élément essentiel dans
l’argumentation de votre raisonnement scientifique sur lequel repose l’ensemble
de votre article. Il y a trois raisons à cela.
• Il vous faut connaître toute l’information disponible et
acceptable avant de pouvoir proposer une hypothèse.
• Vous économisez du temps et de l’argent en faisant
« Une fois que vous vos erreurs mentalement avant de vous lancer dans
avez mis en mots l’expérimentation.
une hypothèse • L’énoncé de l’hypothèse donne à votre recherche un but
clair et précis et, quand vous rédigerez votre article, vous
bien argumentée, aussi, vous aurez un but clair et précis.
il est étonnant Formuler votre hypothèse dans l’introduction est la manière
de réaliser comment la plus efficace d’identifier ce but parce que cela donne à vos
lecteurs une idée claire de ce à quoi ils doivent s’attendre dans
tout l’article le reste de l’article scientifique. Si nous nous plaçons du point
se structure de vue du lecteur, cela rend la lecture plus facile et beaucoup
plus agréable. De votre côté, en tant qu’auteur, cela signifie que
logiquement » le lecteur pourra aborder vos résultats et l’argumentation dans
la discussion du même point de vue que vous.
Une fois que vous avez mis en mots une hypothèse bien argumentée, il est étonnant
de se rendre compte comment tout l’article se structure logiquement et sans
difficulté majeure. Cela s’explique globalement par la manière dont l’hypothèse
influence la structure de trois des parties les plus importantes de votre article,
l’introduction, les résultats et la discussion.
L’introduction comprend seulement deux parties et rien d’autre ou presque :
• l’hypothèse ou, formulé en d’autres termes, ce que vous vous attendiez à
trouver ;
• le raisonnement logique qui faisait de cette hypothèse la prédiction la plus
plausible à propos du phénomène que vous vouliez étudier.
Éventuellement, ces deux parties essentielles peuvent être précédées d’une ou
de quelques phrases qui replacent le travail dans un contexte plus large ou qui
soulignent son intérêt. Il peut être avantageux également de présenter brièvement
à la suite de l’hypothèse la stratégie expérimentale utilisée pour la tester.
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Comment démarrer ?
Les 5 mythes de la rédaction scientifique
Les scientifiques ont pour la plupart un problème pour commencer à rédiger.
Pour eux, il n’y a rien de plus déprimant qu’un écran d’ordinateur vide ou une
feuille blanche en attente de se remplir de façon cohérente et lisible. Les chercheurs
rassemblent leurs données et leur cahier de laboratoire, les résultats de leurs analyses
statistiques, les résumés d’analyses d’articles déjà publiés sur le sujet, les idées qu’ils
ont notées ici ou là et attendent l’arrivée de l’inspiration. Dans cette phase de collecte
du matériel nécessaire à la rédaction, c’est souvent un soulagement pour le chercheur
d’être distrait par un appel téléphonique ou par l’arrivée d’un collègue dans son
bureau. Ces distractions peuvent soulager temporairement l’angoisse de la page
blanche mais elles ne résolvent pas le problème. Il est utile d’avoir quelques stratégies
un peu plus efficaces pour pouvoir démarrer.
La première étape pour pouvoir commencer à écrire est de
prendre conscience que votre problème n’est pas tant de savoir
comment vous allez commencer, mais plutôt de savoir comment
« …votre problème
vous allez finir. On ne part pas en voyage sans connaître sa
n’est pas tant destination. Pourtant, bien souvent, quand nous nous lançons
dans un voyage rédactionnel, nous écrivons quelques mots
de savoir comment
en espérant que le reste va suivre, tout en s’emboîtant dans la
vous allez direction souhaitée. Malheureusement, la probabilité que cela
se passe ainsi est extrêmement faible. D’un autre côté, avoir au
commencer, mais
départ une bonne idée de comment doit se terminer une tâche
plutôt de savoir aussi complexe et exigeante qu’un article scientifique demande
beaucoup plus que ce que la plupart d’entre nous sommes
comment vous
capables de gérer. Le secret est de réduire la tâche à accomplir en
allez finir » sections de taille raisonnable. Alors, pour chacune de ces sections
prises individuellement, nous pouvons définir les conclusions
qui s’y rapportent et rédiger les phrases qui y conduisent. Il
devient alors beaucoup plus facile d’avancer efficacement. Ensuite, à mesure que
l’orientation générale de l’article devient de plus en plus claire, les sections peuvent
être rassemblées et corrigées pour devenir un ensemble consistant et cohérent.
Heureusement, les articles scientifiques ont une structure relativement rigide qui
doit être respectée et cette structure fournit un premier découpage en sections plus
petites. Le format IMRED, introduction, matériel et méthodes, résultats, discussion, fournit
quatre éléments principaux. Chacun de ces éléments possède un rôle et un contenu
particuliers et peut être planifié et écrit indépendamment des autres – au moins dans
un premier temps. Ces éléments peuvent à leur tour être divisés temporairement
en portions de texte plus petites ; pour chacune d’elles vous pourrez alors vous
représenter mentalement ce que vous voulez dire du début à la fin. Lorsque vous
aurez rédigé quelques-unes de ces portions, elles vont amorcer la rédaction d’autres
éléments, pour aboutir finalement à un premier brouillon de tout l’article.
Une fois ce premier brouillon obtenu, vous avez une vision entièrement nouvelle de
l’article. Le défi n’est plus de remplir un écran vide ou une feuille blanche. Il s’agit
C’est l’étape de correction. Corriger un texte est beaucoup plus facile que le générer
à partir de rien. Le texte que vous corrigez est déjà dans un contexte et il devient
beaucoup plus simple de vérifier comment il s’articule avec ce qui le précède et
avec ce qui le suit, ce qui rend sa modification moins risquée. Les modifications
de texte demandent beaucoup moins de temps et de réflexion que la création d’un
nouveau texte, parce qu’elles sont généralement mineures et dans un contexte déjà
bien défini. Qui plus est, le traitement informatique du texte simplifie encore plus
les modifications dans la mesure où des mots, des phrases ou des paragraphes
entiers peuvent être réorganisés ou déplacés par quelques commandes de clavier et le
résultat visualisé instantanément. Il ne faut pas hésiter à rédiger en utilisant ces outils.
Il est difficile de démarrer la rédaction pas seulement parce qu’il faut penser à ce
que nous allons dire, mais aussi parce nous ne sommes pas sûrs de comment il
faut le formuler. Cette incertitude est entretenue et renforcée de manière inutile
par au moins cinq mythes sur la rédaction scientifique.
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Le type de langage qui nous est le plus familier, et par conséquent avec lequel
nous sommes le plus à l’aise, est celui que nous utilisons dans nos conversations.
C’est plus que suffisant pour un premier brouillon d’article scientifique. Qui plus
est, lors des corrections ultérieures, et même lors des traductions éventuelles en
anglais, nous n’aurons pas à faire de changements importants dans le style. Par
conséquent, l’excuse qui consiste à dire que nous ne pouvons pas commencer
parce que nous ne sommes pas habitués à écrire dans le style scientifique tombe
d’elle-même, puisqu’un tel style n’existe pas.
Mythe n° 4. Je dois écrire mon article dans l’ordre pour qu’il soit
cohérent, en commençant par le début et en finissant par la fin
Ceci implique que vous devez avoir toute votre information, toutes vos idées et
tout votre raisonnement clairement développés avant de vous mettre à écrire. C’est
beaucoup trop ambitieux et bien des résultats intéressants restent enfermés dans
des tiroirs parce que leurs auteurs les ont laissés là en attendant que l’inspiration
leur éclaircisse l’esprit. La rédaction est une partie intrinsèque du processus
scientifique, et l’exercice qui consiste à réfléchir à certains éléments de vos résultats
et à les rédiger génère presque toujours de nouvelles perspectives pour d’autres
éléments de l’article. Par conséquent, vous devriez accepter l’idée que vous allez
devoir élaborer votre article par morceaux, peut-être en commençant par les
parties les plus faciles et en les utilisant comme sources d’inspiration pour les
parties plus difficiles. Par la même occasion, vous éviterez l’étape difficile du
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« syndrome de la page blanche » pour vous retrouver au contraire rapidement
à l’étape de correction d’un texte déjà existant, ce qui est beaucoup plus facile à
gérer, particulièrement lors de courtes périodes de temps disponible. Beaucoup
d’auteurs aiment commencer par la section des matériel et méthodes, parce qu’elle
est descriptive et demande peu de travail d’interprétation. D’autres commencent
par une ébauche des résultats, pour disposer d’une base sur laquelle construire
leur raisonnement. D’autres encore considèrent important d’avoir un titre dès le
départ et c’est très bien, même si ce titre n’est pas forcément celui qui restera à la
fin, comme nous le verrons plus loin. Quel que soit l’ordre que vous choisissez
pour commencer à écrire, vous trouverez plus facile d’organiser et de rationaliser
les différents éléments en les corrigeant plus tard, plutôt que d’essayer de le faire en
rédigeant de façon séquentielle selon l’ordre dans lequel l’article doit être organisé
au final. Le seul élément qu’il vaut mieux éviter de rédiger en premier est le résumé.
En effet, essayer de résumer votre travail avant de l’avoir rédigé supposerait que
vous avez déjà mentalement une vue complète de votre article avant même de
l’avoir commencé. Non seulement c’est hautement improbable mais, de plus, la
rédaction du résumé nécessite une sélection rigoureuse des éléments essentiels de
votre article. Une telle sélection ne peut être effectuée efficacement qu’à la fin de
la rédaction, comme cela est expliqué pages 67-68.
Le style dans lequel vous écrivez est bien sûr important. Mais à ce stade initial, cette
préoccupation est secondaire par rapport au fait d’avoir une structure d’article
saine, logique et scientifique. Cela doit être votre but lors de la rédaction des
premiers éléments de votre brouillon. Bien sûr, si vous écrivez bien, de manière
intuitive et fluide, tant mieux ! Mais si vous devez batailler pour obtenir un texte
agréable et facile à lire à un point tel que vous perdiez de vue l’argumentation
logique et scientifique, le résultat risque d’être décevant et contre-productif. Il vaut
bien mieux dédier toute votre attention uniquement à construire un premier jet
bien structuré à ce stade et prévoir de travailler le style lors de la phase finale de
correction. C’est une stratégie valable pour tout auteur d’article scientifique, mais
encore plus pour les francophones dont l’anglais n’est pas la langue maternelle.
Les francophones ne devraient pas se sentir inhibés par les difficultés de la langue,
réelles ou non, qui pourraient les empêcher d’écrire un article rigoureux et logique.
En fait, ils ne seront probablement pas très désavantagés. En effet, s’ils veulent
exprimer des segments de raisonnements particulièrement complexes exactement
comme ils le souhaitent, il est préférable qu’ils écrivent au moins ces segments
dans leur langue maternelle et les traduisent ensuite, plutôt que d’anéantir leur
raisonnement parce que l’anglais est un frein supplémentaire.
R É F L É C H I R AVA N T D ’ É C R I R E 23
Rédiger un article scientifique
R É D I G E R U N A RT I C L E S C I E N T I F I Q U E 25
Une structure logique et un style lisible
Lorsqu’il sera fini, votre article présentera, ou devrait présenter, deux caractéristiques
très importantes. Il devrait avoir une structure logique et physique claire et il
devrait être écrit dans un style lisible, à la fois précis, clair et concis. Au début,
votre texte n’a peut-être aucune de ces deux propriétés, mais il est de la plus haute
importance que vous vous donniez pour objectif de les atteindre à mesure que
vous progressez. Pour cela, ne soyez pas trop ambitieux et évitez de vouloir gérer
la structure et le style simultanément. Faites-le plutôt par étapes ou par brouillons
successifs. Il vaut mieux rédiger en vous concentrant d’abord sur la structure de
l’article et ensuite en le modifiant pour améliorer le style et en vous assurant qu’il
se lit facilement. Je suggère de traiter la structure et le style séparément et dans cet
ordre, pour au moins trois raisons.
Premièrement, la nécessité d’une structure sans faille et les principes qui la régissent
ne sont pas aussi clairement admis que la nécessité d’un style lisible. De fait,
beaucoup de gens considèrent à tort qu’un article scientifique n’est rien de plus
qu’un exercice de rédaction, généralement en anglais. Donc il vaut mieux mettre
en avant l’importance de la structure dès le départ pour éviter de se concentrer
uniquement sur le style.
Deuxièmement, une structure sans faille est la preuve d’une réflexion et d’un
raisonnement scientifiques logiques. C’est votre spécialité. C’est le domaine dans
lequel vous avez été le mieux formé ; à vous d’utiliser cette formation pour renforcer
votre confiance pour écrire. Ensuite, dans un deuxième temps, améliorez le style
et la lisibilité.
Troisièmement, il n’y a pas de barrière de langue pour la science et le raisonnement
logique ; ils constituent une langue en eux-mêmes. Et c’est une langue universelle,
indépendamment de la langue dans laquelle vous vous exprimez normalement. Sur
ce plan, le fait que votre langue maternelle ne soit pas l’anglais ne vous désavantage
pas par rapport aux anglophones. Par conséquent, travaillez d’abord la structure.
Ensuite, même si vous avez besoin d’aide plus tard pour modifier la syntaxe
ou changer quelques mots, cela ne devrait pas poser de problème majeur. En
revanche, vous risquez de ne pas arriver à écrire « de la bonne science » si vous êtes
préoccupé en permanence par le souci d’écrire dans un anglais sans faute. Toutes
les corrections de style de l’anglais ne sauront convertir un texte mal structuré en
un bon article.
La structure physique d’un article scientifique est connue de tous et, excepté
quelques variations mineures, est pratiquement universelle.
Dans ce chapitre, nous allons examiner ce que devrait comporter chacune des
sections ci-dessous, dans l’ordre dans lequel nous les trouvons en général dans un
article. Mais cela ne veut pas dire pour autant qu’en pratique, vous devez à tout
prix rédiger dans cet ordre. En fait, beaucoup d’auteurs aiment bien commencer
par la section matériel et méthodes, pour se faciliter la tâche. Par contre, le résumé,
bien qu’il vienne en deuxième, est beaucoup plus facile à écrire après avoir rédigé
la discussion.
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conséquent, sont très peu attractifs pour le lecteur. L’exemple le plus commun sera
probablement : « L’effet de A sur B », « L’influence de A sur B » ou « A influence B ».
Un tel titre n’incite pas vraiment le lecteur à poursuivre la lecture de l’article
pour en savoir plus. Pire encore, ce titre ne dit pas grand-chose : « A » peut avoir
perturbé ou influencé « B » en l’augmentant ou en le diminuant, ou encore peut
ne pas l’avoir modifié du tout. Il est très frustrant de lire un article dont le titre
annonce que quelque chose est supposé influencer quelque chose d’autre, alors
que le texte montre que, finalement, il ne s’est rien passé.
D’autres titres sont un peu plus informatifs, mais la question est de savoir si
l’information qu’ils donnent est importante. Prenons l’exemple suivant : « Étude
clinique rétrospective linéaire de l’incidence de la maladie de Tournanron dans
une population rurale d’adolescents » ou, en suivant une habitude courante qui
consiste à mettre deux points dès qu’on le peut dans un titre, « Incidence de la
maladie de Tournanron dans une population rurale d’adolescents : une étude clinique
rétrospective linéaire ». La question importante est de savoir si cette information est
susceptible d’inciter le lecteur à se plonger dans la lecture de l’article. Le titre ci-dessus
fait ressortir la méthodologie utilisée, mais le résultat reste un secret bien gardé. En
fait, si le thème principal de l’article était de montrer que cette méthodologie est une
nouvelle manière originale d’étudier la maladie de Tournanron, ce serait une raison
valable pour utiliser ce type de titre. Mais si ce n’est pas le cas, alors les auteurs ont
gâché une excellente opportunité de vendre leur article. En résumé, un titre qui ne
révèle pas le contenu de l’article rate complètement son objectif.
Vous pouvez faire beaucoup mieux que cela, et voici un ensemble de
recommandations qui aident à produire un titre qui remplisse les deux fonctions :
• de persuader les lecteurs potentiels de lire au moins une partie de l’article ;
• de s’assurer que les moteurs de recherche bibliographique vont trouver
votre article si les mots clés appropriés sont utilisés.
Choisissez soigneusement les mots clés dans votre article, ce que l’éditeur vous
demandera de toute façon.
Faites-en une liste par ordre d’importance ; si on vous demandait de résumer votre
article en un seul mot, ce mot là devrait être le premier de la liste !
Construisez votre titre en utilisant tous les mots clés et en essayant de les placer
dans la mesure du possible dans l’ordre de votre liste. Ceci s’appuie sur le
principe que le lecteur percevra les premiers mots de votre titre comme étant plus
importants que ceux qui viennent ensuite. Vous arriverez rarement à placer tous
les mots dans l’ordre exact que vous aviez établi mais, si vous vous en approchez,
vous donnerez probablement au lecteur la même impression que la vôtre de ce
qui est important dans votre article.
Si le titre est trop long, retirez d’abord les mots clés les moins importants, mais
gardez-les en réserve ; vous en aurez besoin plus tard pour votre liste de mots clés.
Maintenant, corrigez cette ébauche de titre pour y introduire une idée de votre
résultat principal ou de votre conclusion principale, en d’autres termes, la raison
première pour laquelle vous voulez écrire l’article.
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de… », « Observations sur… » donnent l’impression que même si on lisait
l’article on ne serait pas beaucoup plus avancé. Des mots tels que changement,
influence ou effet n’indiquent pas de direction et devraient être remplacés par
des alternatives plus précises comme réduction, augmentation ou renforcement,
ou les verbes correspondants, qui indiquent aux lecteurs la direction de l’effet ou
du changement. De la même manière, les mots corrélation ou relation dans un
titre n’indiquent pas au lecteur ce qui se passe réellement, à moins qu’ils ne soient
accompagnés de qualificatifs comme positive ou négative.
Pour vous exercer, choisissez des titres dans une de vos revues habituelles et lisez
le résumé qui correspond à chacun d’entre eux. En utilisant cette information,
composez un nouveau titre qui ne soit pas plus long, mais qui soit plus précis
et informatif que l’original, et aussi plus utile aux moteurs de recherche
bibliographique. Un tel exercice est non seulement un bon entraînement, mais
il vous montrera aussi rapidement la mauvaise qualité de beaucoup des titres
proposés actuellement.
Quand vous élaborez votre liste de mots clés, assurez-vous qu’ils seront efficaces
en choisissant les mots les plus pertinents pour votre article. Si dans l’expérience
présentée dans votre article, vous avez trouvé une très forte corrélation
biologiquement importante entre A et B, assurez-vous que A et B sont bien dans
la liste des mots clés. En revanche, n’incluez pas des mots comme « corrélation »,
quel qu’en soit le signe, car il est très peu probable que la personne effectuant une
recherche bibliographique l’inclue dans sa liste de termes de recherche. La majeure
partie de vos mots clés devrait être des noms. Des adjectifs comme « important »
ou « significatif » n’apportent pas grand-chose.
Les moteurs de recherche bibliographique ne travaillent jamais uniquement sur
les mots de la section de mots clés. Ils prennent également toujours en compte le
titre. De fait, de nos jours certains moteurs de recherche travaillent sur tout l’article
et la section des mots clés perd progressivement de son importance. Cependant,
même si les ordinateurs et les moteurs de recherche modernes sont très puissants,
le champ des mots clés peut permettre de restreindre les limites d’une recherche.
De toute façon, il est inutile de répéter dans les mots clés des mots qui sont déjà
dans le titre ; en revanche assurez-vous bien d’y mettre ceux que vous n’avez
finalement pas utilisés lorsque vous avez construit votre titre.
R É D I G E R U N A RT I C L E S C I E N T I F I Q U E 31
donc vraiment très simple. L’introduction qui en résulte est également simple et
relativement concise, mais vous devez rester prudent parce que la réflexion, le
raisonnement et le travail indispensables pour arriver à ce résultat apparemment
simple sont loin d’être faciles. Toutefois, si vous êtes prêt à faire l’effort de réflexion
nécessaire pour produire et rédiger la justification logique de votre hypothèse, vous
serez récompensé par le fait que non seulement votre introduction sera plus facile
à écrire, mais tout le reste de l’article sera aussi plus simple à rédiger, parce qu’il
a un but central bien identifié. Encore plus important, les lecteurs interpréteront
plus facilement ce que vous avez à dire dans le reste de l’article, parce que votre
introduction les aura incités à anticiper certaines informations que vous allez leur
présenter là où ils les attendent. Il en résulte moins de risques que les lecteurs
vous comprennent mal ; au contraire, ils seront plus susceptibles d’interpréter
vos informations de la même manière que vous.
Il est triste de constater que lorsque de tels arguments sont avancés, les auteurs sous-
entendent, probablement sans s’en rendre compte, que leur article illustre comment
ils ont tâtonné dans l’obscurité en espérant que quelque chose d’intéressant allait
surgir. Il n’empêche qu’en aucun cas, les circonstances ne sont une excuse pour
éviter de faire l’effort de prédire ce qui pourrait être logiquement attendu comme
résultat, c’est-à-dire d’élaborer une hypothèse. Songez à des lecteurs confrontés à
un tel article pour la première fois, ils cherchent un encouragement scientifique
dans l’introduction pour décider de continuer à le lire ou pas. Pouvez-vous
imaginer qu’une déclaration exprimant l’une quelconque des raisons données
ci-dessus puisse les inciter à continuer ? Le plus probable, c’est qu’ils vont penser
que l’auteur a réalisé son étude un peu à tâtons, et ils se tourneront vers un article
un peu plus prometteur auquel dédier leur temps précieux. Par bonheur, dans
chacun des cas cités, il y a toujours une hypothèse sous-jacente qui, lorsqu’elle
est exprimée, donne aussi bien à l’auteur qu’aux lecteurs un fil conducteur pour
le reste de l’article. Examinons chacun de ces cas en détail.
R É D I G E R U N A RT I C L E S C I E N T I F I Q U E 33
puis dans votre discussion et cela va leur donner la motivation nécessaire pour
continuer à lire votre article.
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Vous pouvez aussi utiliser des expressions comme « Au vu des arguments ci-
dessous, nous avons déduit que [ou voulu savoir si] en appliquant le traitement A,
nous obtiendrions l’effet B », comme nous l’avons illustré avec l’exemple sur les
enfants obèses.
Que vous l’appeliez une hypothèse, une attente, une prédiction ou un raisonnement,
la solidité de la structure de votre article dépend d’une hypothèse bien argumentée
et clairement présentée. Elle devient la clé de voûte de l’article et, pour que vous
ne perdiez pas cela de vue, c’est une bonne idée de l’écrire en rouge, en majuscules
ou de toute autre manière qui la fera ressortir, et de la garder sous les yeux. Ainsi,
vous définissez le but de votre article et vous focalisez votre attention sur cette
cible, ce qui la rendra aussi plus évidente pour le lecteur. Cela sera d’autant plus
appréciable qu’il lira probablement l’article en dix minutes avec peu de risque
d’oublier cet objectif, ce qui lui facilitera encore plus la lecture. Vous, il vous faudra
peut-être des semaines ou des mois pour écrire votre article
au milieu de tout ce que vous avez à faire par ailleurs, de telle
manière qu’un pense-bête permanent de votre hypothèse vous
« …la solidité maintiendra sur le bon chemin.
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de chance de Fleming a été d’avoir un milieu de culture contaminé parce qu’il ne
travaillait pas dans les meilleures conditions possibles. Lui aussi a eu l’intelligence
de comprendre les conséquences de cet accident, ce qui l’a conduit avec Florey à
isoler la pénicilline. Parkes et Polge ont découvert que les spermatozoïdes peuvent
être protégés du gel parce qu’un technicien avait fait une erreur et avait mélangé
du glycérol avec des échantillons de sperme qu’ils essayaient de conserver. Ces
chercheurs aussi ont fait patiemment le chemin à l’envers à partir des résultats
jusqu’à leur explication pour aboutir à une découverte majeure.
À notre modeste niveau, beaucoup de nos idées viennent aussi d’une inspiration.
Heureusement, il n’y a pas de méthode pour développer des idées de manière
logique dans 100 % des cas. Si nous pouvions faire cela, nous n’aurions plus qu’à
confier tout le processus de découverte scientifique aux ordinateurs. La plupart
des idées qui nous viennent sont invalidées lorsqu’elles sont confrontées aux
données de la littérature ou lorsque nous les soumettons à l’expérimentation.
Parfois, une expérimentation est mise en place pour tester ce qui semble une bonne
hypothèse sur le moment, mais il s’avère finalement que les techniques utilisées
ne sont pas adaptées ou que l’idée n’était pas vraiment brillante. Néanmoins, de
telles expérimentations fournissent parfois des données intéressantes, mais en
réponse à une hypothèse autre que celle qui était posée au départ.
Si les processus de la pensée scientifique sont si fortuits, pourquoi est-ce que je
vous suggère de les organiser de manière si logique pour écrire un article ? Après
tout, une règle de base en sciences, c’est que nous devrions être scrupuleusement
honnêtes. Ne devrions-nous pas présenter nos idées, nos découvertes et nos échecs
dans l’ordre chronologique dans lequel ils arrivent ? Si nous avons testé une
hypothèse pour l’abandonner plus tard, mais que dans le même temps nous
avons réalisé que nos données permettent d’expliquer une autre hypothèse, ne
devrions-nous pas le dire ?
La réponse est « Probablement pas ! ». Cela fait entre six mois et peut-être
vingt ans que vous testez, rejetez, reformulez et rejetez de nouveau des idées et des
hypothèses. Vous avez dormi, mangé et travaillé avec ces idées en tête pendant tout
ce temps pour finalement aboutir à ce qui semble être une information importante.
Vos lecteurs, de leur côté, ont à peu près une minute pour parcourir le même
chemin. Vous êtes donc obligé, ne serait-ce que par respect pour vos lecteurs, de
leur fournir seulement l’essentiel de votre cheminement intellectuel. Faire un travail
de recherche et publier votre recherche sont deux choses différentes, avec des
objectifs très différents. La recherche consiste à obtenir des informations nouvelles
en testant des hypothèses pour les accepter ou les rejeter, les affiner et les vérifier
de nouveau, pour aboutir finalement à de nouvelles connaissances. La rédaction est
l’enregistrement dépassionné de la connaissance réellement acquise en présentant
les faits de manière honnête, plausible et simple. Les impasses, les désappointements
et les problèmes techniques que vous avez rencontrés ne doivent pas masquer au
lecteur votre nouvelle information comme étant un bel exemple de raisonnement
logique. Par conséquent, dans l’introduction, vous ne devriez présenter que la ou
les hypothèses que vous allez tester et discuter dans votre article, accompagnées
seulement de l’information qui rend ces hypothèses plausibles.
R É D I G E R U N A RT I C L E S C I E N T I F I Q U E 39
Les matériel et méthodes
Démarrer votre rédaction par la section des matériel et méthodes est un très bon choix
et donne confiance avant d’entreprendre les parties plus exigeantes de votre article.
Cette section est en général assez facile à rédiger parce qu’elle ne demande pas
beaucoup de travail d’interprétation. Ce que vous avez fait et comment vous l’avez
fait ne peuvent être changés même si, après réflexion ou au vu de l’expérience
acquise, vous pensez que vous auriez pu faire mieux. Votre tâche dans cette section
est de décrire ce que vous avez fait de manière à ce qu’un collègue compétent dans
la même discipline puisse refaire l’expérience à partir de l’information que vous
lui fournissez.
En dépit de sa relative simplicité, il peut y avoir des pièges dans la
rédaction d’un bon matériel et méthodes parce que vous connaissez
« Votre tâche dans « trop bien » ce que vous décrivez. L’art est non seulement de
savoir ce qu’on peut omettre, mais aussi et surtout ce qu’il faut
cette section est de inclure, pour permettre au lecteur qui ne connaît pas votre travail
décrire ce que vous de le comprendre et éventuellement de le répéter. La rédaction
du matériel et méthodes peut devenir un véritable casse-tête si vous
avez fait de manière essayez d’y mettre trop de détails. Prenez le temps d’examiner
à ce qu’un collègue minutieusement la liste de ce que vous pourriez y mettre et
triez ce que vous pouvez retirer sans perdre en précision et en
compétent dans clarté. Par ailleurs, il peut arriver que vous ayez à décrire une
la même discipline méthode qui vous est très familière. Alors, vous risquez d’omettre
inconsciemment des détails indispensables pour que le lecteur
puisse refaire puisse comprendre l’expérience. C’est une des raisons pour
l’expérience à partir laquelle vous avez besoin du regard d’un lecteur extérieur. En
définitive, le meilleur moyen de vérifier la qualité de votre matériel
de l’information et méthodes est de le soumettre à à ce que j’appelle « l’épreuve
que vous du collègue », c’est-à dire la lecture critique par un collègue
compétent qui n’a pas participé à l’expérience. Demandez-lui
lui fournissez. » s’il pourrait réellement refaire l’expérience avec l’information
que vous lui fournissez.
Et même si la rédaction du matériel et méthodes n’est pas la partie la plus compliquée
de votre article, il y a quelques principes qui peuvent vous aider pour sa rédaction.
Le premier point à considérer est que c’est la partie de votre article qui a de bonnes
chances d’être survolée ou ignorée par les lecteurs impatients d’arriver rapidement
aux résultats et à la discussion. En fait, certaines revues considèrent cela comme un
fait acquis et font du matériel et méthodes une sorte d’appendice en petits caractères
et placé en fin d’article. Toutefois, où qu’il soit placé dans la revue que vous avez
choisie, votre matériel et méthodes sera peut-être consulté méticuleusement par certains
lecteurs parce qu’ils sont particulièrement intéressés par le reste de l’article. Pourquoi
ne pas aider les lecteurs dès le départ à se faire une idée générale de la manière
dont l’étude a été réalisée en s’assurant qu’ils captent les points essentiels ? Vous
pouvez faire cela en fractionnant la section en une suite de sous-titres évocateurs qui
résument les points essentiels de votre méthodologie et du matériel utilisé.
Exemple 1
• Schéma expérimental
• Animaux expérimentaux et conditions d’entretien
• Traitements expérimentaux
• Variables prises en compte
• Méthodes de dosage
• Analyses statistiques
Exemple 2
• Planification de l’enquête « … ne veut pas
• Choix des patients dire pour autant
• Information demandées aux patients :
que vous devez
a) avant le traitement, b) après le traitement
• Informations cliniques médicales présenter toute
• Analyses statistiques l’information au
Il est dommage que cette section soit appelée matériel et méthodes lecteur dans cette
plutôt que Méthodes et matériel, parce que le lecteur ne peut
vraiment comprendre le matériel que vous utilisez que lorsqu’il
section. Cela veut
a une idée assez claire des méthodes que vous avez choisies. dire plutôt que
Par conséquent, une sous-section schéma expérimental, ou
quelque chose de similaire décrivant comment l’expérience a été
vous devez lui
effectuée (la stratégie choisie pour tester l’hypothèse), devrait fournir « un fil
être l’une des premières sous-sections de matériel et méthodes,
comme l’illustrent les deux exemples précédents. Ceci mis à
d’Ariane » qu’il
part, il n’y a pas d’ordre rigide imposé pour les autres sous- puisse suivre. »
sections ; mais à mesure que vous établirez la liste des sous-
sections qu’il vous paraît important d’aborder, il est probable
qu’un ordre logique s’impose de lui-même. Demandez-vous si ces seuls sous-
titres, associés à l’introduction, donneraient au lecteur une bonne idée de comment
vous avez réalisé votre expérience. Ainsi, dans l’exemple 2 ci-dessus, il pourrait
comprendre que vous avez étudié des patients sélectionnés d’après des critères bien
précis, que ces patients vous ont fourni des informations avant et après avoir reçu
un certain traitement et que vous avez relié ces informations à l’histoire clinique
de ces patients fournies par leur docteur. L’objectif et les attentes de ce protocole
expérimental auraient bien entendu déjà été annoncés dans l’introduction.
Le critère selon lequel un collègue compétent doit pouvoir répéter l’expérience
après avoir lu votre section matériel et méthodes ne veut pas dire pour autant que
vous devez présenter toute l’information au lecteur dans cette section. Cela veut
plutôt dire que vous devez lui fournir un « fil d’Ariane », une trame, qu’il puisse
suivre. Si vous avez utilisé de nouvelles techniques ou modifié des techniques déjà
R É D I G E R U N A RT I C L E S C I E N T I F I Q U E 41
existantes, vous devez bien sûr donner tous les détails correspondants. En revanche,
si vous avez utilisé des techniques déjà complètement décrites auparavant, il est
préférable de citer la référence de l’article dans lequel la technique a été publiée pour
la première fois ou l’article où elle est la mieux décrite. Assurez-vous de toute façon
de bien accorder le crédit bibliographique à qui de droit. Faire référence à un article
récent où la technique est décrite sommairement plutôt qu’à l’article original est
non seulement indélicat envers l’auteur inventeur, mais ne permet pas de placer la
technique dans sa perspective historique et empêche le lecteur d’accéder directement
à sa description complète. D’un autre côté, la référence d’origine est parfois difficile
d’accès ou la technique peut avoir été modifiée après sa publication initiale. Dans
ces cas, vous pouvez citer aussi un article plus récent qui donne accès à la technique
complète tout en donnant le crédit mérité aussi à celui ou ceux qui l’ont modifiée. En
utilisant les références appropriées que les lecteurs peuvent consulter pour répéter
votre travail, vous pouvez décrire en quelques lignes des expériences relativement
complexes comprenant beaucoup d’analyses d’usage courant.
Il se peut que vous ayez à décrire une nouvelle technique pour la première fois dans
le cadre de votre article et que cette nouvelle technique demande à être validée.
Beaucoup d’auteurs ont des difficultés à décider si les résultats de cette validation
doivent accompagner la description de la technique dans la section matériel et méthodes
ou s’il vaut mieux les garder pour la section de résultats. C’est encore plus compliqué
si l’article concerne plutôt la nouveauté de la technique que les données générées par
cette nouvelle technique. La solution réside en fait dans la manière dont l’hypothèse
a été formulée. Votre hypothèse prédisait peut-être clairement que cette nouvelle
méthodologie ouvrirait de nouvelles possibilités de recherche, ou qu’elle serait plus
précise, ou plus propre, ou plus économique que d’autres méthodes. Dans ce cas, il
s’agit d’un article de méthodologie. La validation de la méthode et tous les autres
paramètres que vous avez mesurés sur sa précision, son coût ou tout autre point
technique, font partie du processus de vérification de votre hypothèse ; toutes ces
informations appartiennent donc logiquement plus à la section des résultats qu’à celle
des matériel et méthodes. À l’inverse, si votre hypothèse suggérait que l’utilisation de
cette nouvelle technique allait vous permettre de vérifier une supposition biologique
R É D I G E R U N A RT I C L E S C I E N T I F I Q U E 43
pays ou institutions, l’avis favorable d’un comité d’éthique peut être obligatoire
pour effectuer votre recherche, alors que dans d’autre cas il peut être simplement
recommandé ou facultatif. Quel que soit le cas, soyez conscient que les revues
scientifiques demandent généralement des garanties indiquant que les travaux
que vous souhaitez publier ne soulèvent pas de problèmes éthiques ou de bien-
être des sujets utilisés dans vos expériences. Par conséquent, si votre travail a reçu
l’approbation d’un Comité d’éthique, signalez-le dans une sous-section éthique
(ethical note en anglais) en fournissant le cas échéant le numéro d’approbation
correspondant. S’il n’existe pas de Comité d’éthique ou de normes nationales
là où vous travaillez, il est utile de faire référence à des normes définies par des
circulaires officielles dans des pays où les considérations d’éthique et de bien-être
des animaux sont bien établies et reconnues internationalement. L’utilisation de
telles normes présente deux avantages. Premièrement, cela vous permettra d’offrir
les garanties nécessaires à l’éditeur de la revue dans laquelle vous soumettrez
votre article. Deuxièmement, le respect de ces normes vous guidera sur le plan
personnel pour prendre en compte les aspects d’éthique et de bien-être dans la
mise en place de votre expérimentation en l’absence des conseils d’un Comité
prévu à cet effet.
Les résultats
En s’inspirant d’une formule légale bien connue, les résultats, cela veut dire : les
résultats, tous les résultats et rien que les résultats. Cela semble si simple et évident
que vous penserez que cela va sans dire, ou presque. Mais vous seriez surpris du
nombre d’articles soumis où des résultats apparaissent pour la première fois dans
la discussion ou, pire encore, dans le résumé. La section de résultats est l’endroit où
les lecteurs s’attendent à trouver tous les résultats que vous avez l’intention de
présenter ; c’est donc là que vous devez les mettre. Des résultats placés à un autre
endroit dans l’article risquent de faire croire au lecteur qu’ils n’appartiennent pas
à l’expérience présentée, ou même qu’ils n’ont peut-être pas été obtenus par les
auteurs de l’article.
Occasionnellement, dans des articles très courts ou très simples, il n’y a pas grand-
chose à discuter après avoir présenté les résultats. Dans ces cas relativement rares,
il est possible de rajouter les quelques points de discussion nécessaires dans la
section résultats, qui peut alors être intitulée résultats et discussion. Quelques revues
le permettent, mais ce n’est ni très fréquent, ni vraiment conseillé. En fait, si
l’introduction a été correctement structurée et les raisons pour faire l’expérience
clairement énoncées, vous serez obligé de discuter dans quelle mesure vos résultats
ont répondu à vos attentes. Cette discussion est pratiquement toujours plus claire
et plus facile à mener si elle se trouve dans une section séparée des résultats. Sauf
pour des articles très courts, un tel mélange entre les résultats et leur discussion
génère toujours le chaos dans la logique de l’argumentation.
R É D I G E R U N A RT I C L E S C I E N T I F I Q U E 45
Au moment où vous rédigez, personne n’est mieux placé que vous pour déterminer
l’importance relative de chacune de vos données par rapport à l’ensemble des
résultats que vous avez à présenter. Lorsque vous avez fait ce travail consistant à
hiérarchiser vos résultats par ordre d’importance, vous pouvez alors décider de
la stratégie à adopter pour présenter vos résultats de façon à faire ressortir cette
hiérarchisation. Si vous ne le faites pas, les lecteurs risquent de se faire une fausse
opinion de ce qui est important et de ce qui l’est moins dans vos résultats, ce qui
pourrait finalement les conduire à une mauvaise interprétation de l’expérience
que vous leur décrivez.
Mais comment vous, auteur, pouvez-vous décider de cette importance et
la transmettre au lecteur ? La réponse se trouve dans l’introduction et plus
précisément dans l’hypothèse que vous avez annoncée et justifiée. Vous avez
donné là au lecteur un avant-goût de ce que vous vous attendiez à trouver dans
votre expérience. Maintenant dans les résultats, vous allez lui présenter les données
qui vont confirmer ou infirmer ce que vous vous attendiez à trouver. C’est ce que
le lecteur s’attend à trouver. Lui présenter autre chose le décevrait et le troublerait.
Pour affiner un peu plus ce concept, une bonne idée est
d’attribuer un niveau de priorité à toutes les données que vous
pensez présenter dans votre article. Cela clarifiera aussi dans
« …personne votre esprit l’importance relative de chacune de vos classes de
n’est mieux données expérimentales. Vous pouvez le faire en évaluant chaque
groupe de données en fonction de sa pertinence par rapport à
placé que vous votre hypothèse. En pratique, quatre catégories suffisent pour
pour déterminer vous permettre de mener à bien cette classification.
R É D I G E R U N A RT I C L E S C I E N T I F I Q U E 47
représenter mentalement quels sont les arguments qui vont finalement constituer
l’ossature de votre discussion. Un tel processus d’essais et d’erreurs est nécessaire
pour trouver la meilleure solution pour votre présentation définitive. Souvenez-
vous que vous aurez à utiliser les points les plus saillants de vos résultats comme
base de la discussion. Par conséquent, il est essentiel que ces points apparaissent
clairement dans les résultats. Quelle que soit votre forme finale de présentation,
tableaux, figures ou texte, arrangez-vous pour que l’information clé et les chiffres
clés ressortent clairement.
Mais d’abord, établissons trois règles de base importantes.
• La section de résultats comprend généralement à la fois
« …tableaux et du texte et des tableaux et (ou) des figures. Elle peut ne
contenir que du texte mais jamais seulement des tableaux
figures sont le
ou des figures. Vous devez décrire vos résultats par du
moyen qui permet texte et pas seulement présenter des chiffres.
aux auteurs d’être • Les tableaux, les figures (ou les graphiques) et le texte
doivent être autonomes. En d’autres termes, les lecteurs
précis et, cette ne devraient pas avoir à lire le texte pour comprendre
obligation étant de quoi traite un tableau ou une figure. De la même
manière, ils ne devraient pas avoir à consulter un tableau
remplie, ils peuvent ou une figure pour comprendre le sujet du texte.
se concentrer • Les mêmes données ne doivent pas être répétées dans
le texte d’un côté et dans les tableaux ou les figures
sur le texte pour de l’autre, ni entre les tableaux et les figures. Par
remplir la deuxième conséquent, il faut décider ce qui doit être mis dans les
tableaux ou figures et dans le texte, pour ne pas être
condition, à savoir répétitif et ennuyeux.
la clarté. » Lorsque beaucoup de données sont présentées, il est toujours
difficile de les lire, en particulier si elles forment une suite
ininterrompue de chiffres d’une ligne ou plus. Dans ce cas, des tableaux qui
organisent clairement les données en rangées et en colonnes ou des figures qui
illustrent des tendances sont généralement mieux adaptés.
Mais souvenez-vous aussi que l’utilisation de tableaux et de figures ne vous
dispense pas de la responsabilité de produire un texte cohérent. Cela ne veut
pas dire que le texte doive présenter la même chose que les tableaux. En fait,
dans les résultats, le texte et les tableaux ont des fonctions bien différentes, mais
complémentaires. Gardez toujours ces différences de fonction à l’esprit quand
vous structurez le contenu des résultats, parce qu’elles vous aident à remplir les
conditions nécessaires à toute rédaction scientifique : être précis et être clair. En
bref, tableaux et figures sont le moyen qui permet aux auteurs d’être précis et,
cette obligation étant remplie, ils peuvent se concentrer sur le texte pour remplir
la deuxième condition, à savoir la clarté.
Tableaux et figures sont faits à partir de chiffres, de telle manière que n’importe
quel degré de précision est possible, bien sûr dans la mesure où il reste sensé. Le
texte vous offre la possibilité de clarifier ou de renforcer les points des tableaux
R É D I G E R U N A RT I C L E S C I E N T I F I Q U E 49
figures sont les seuls endroits dans un article scientifique où le renvoi à des notes
de bas d’illustration est vraiment justifié. Dans tous les autres cas, les notes risquent
de casser le rythme de la lecture et faire perdre le fil au lecteur, dont la priorité reste
d’accéder le plus efficacement possible à l’information essentielle. Dans un livre,
que nous lisons le plus souvent par étapes, la situation est différente et le renvoi à
des notes de bas de page peut s’avérer pratique, à condition de ne pas en abuser.
Une bonne stratégie pour vérifier l’autonomie de vos tableaux et de vos figures
est de les montrer à des collègues sans le texte correspondant et de leur demander
s’ils les comprennent. Si ce n’est pas le cas, il faut ajouter des informations dans
le titre, les en-têtes ou les notes de manière à les rendre totalement intelligibles.
D’abord, l’auteur a estimé que l’information additionnelle des deux chiffres après
la virgule dans le tableau 1 n’est d’aucun intérêt pour décrire des différences de
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vente de limonade. Il a donc arrondi les valeurs à un niveau de précision gérable
par la mémoire à court terme du lecteur, mais qui reste suffisant.
Deuxièmement, l’impact visuel du succès relatif de chacun des sept points de vente
de limonade est souligné en les plaçant par ordre décroissant de volume de vente.
Peut-être que l’ordre alphabétique de présentation n’avait guère d’intérêt logique.
Troisièmement un espace, petit mais visible, a été ajouté pour souligner la claire
différence de débit entre les trois plus gros revendeurs et les quatre autres dont le
volume de vente est beaucoup plus faible. On pourrait le faire également en utilisant
une police de caractère en gras pour les ventes des trois premiers revendeurs.
Quatrièmement, les moyennes de chaque ligne et de chaque colonne ont été
ajoutées pour mieux guider le lecteur. Là encore, un espace a été ménagé pour
mieux distinguer les moyennes des valeurs individuelles. Une autre manière de
le faire serait d’utiliser des caractères en italique pour les valeurs des moyennes.
Le succès de chaque revendeur est confirmé par les moyennes de chaque ligne, et
une nouvelle information est fournie par les moyennes des différentes colonnes
qui illustrent les variations mensuelles de consommation de limonade. Remarquez
comment l’augmentation des ventes au cours du temps devient évidente, avec
un maximum en mai, alors que ces informations étaient loin d’être apparentes
dans le tableau 1. La présentation de ces moyennes montre immédiatement que
la consommation varie avec la saison et permet de suggérer une ou plusieurs
hypothèses explicatives lors de la discussion de ces résultats. Ehrenberg souligne
l’intérêt de présenter des moyennes plutôt que des sommes en dernière colonne ou
en dernière ligne, parce que des moyennes sont beaucoup plus faciles à comparer
avec les valeurs individuelles de chacune des cases du tableau.
En résumé, le tableau 2 rend volontairement évidentes les tendances et les
exceptions fournies par les données. Le tableau vous donne les résultats quasiment
avant que vous ayez lu les chiffres. De fait, on pourrait presque le décrire comme
une figure faite avec des chiffres.
De la même façon que les données des tableaux ne doivent pas être citées telles
quelles dans le texte, les graphiques ne doivent pas reproduire des données déjà
présentées dans des tableaux. Vous devez décider ce qui sert le mieux votre objectif.
Cet objectif est bien sûr de présenter vos résultats et vos conclusions de manière
claire et convaincante et c’est donc sur cette base que vous devez prendre votre
décision. Les éditeurs n’aiment pas du tout gaspiller de l’argent et de l’espace pour
des répétitions. Plus important encore, les lecteurs ne sont pas contents d’avoir à
lire deux fois la même chose pour se rendre compte ensuite qu’ils n’ont rien appris
de plus la deuxième fois. La répétition est à réserver pour les présentations orales
et pour des raisons tout à fait différentes, comme nous le verrons plus tard.
R É D I G E R U N A RT I C L E S C I E N T I F I Q U E 53
statistique, mais dans un article scientifique il est généralement synonyme de
« statistiquement significatif », compte tenu de son usage en sciences modernes.
C’est donc une bonne idée et une précaution utile de ne l’employer que dans ce
sens dans vos articles.
Enfin, il vaut la peine de réfléchir à la manière de présenter les valeurs des
probabilités obtenues lors des comparaisons statistiques. La coutume la plus
courante est de considérer une valeur de p = 0,05 (a = 0,05) comme seuil de
d’une différence significative. Par conséquent, les auteurs déclarent comme étant
significative toute comparaison pour laquelle p ≤ 0,05 et comme non significative
toute comparaison pour laquelle p > 0,05. Mais une telle dichotomie peut faire
perdre au lecteur une information précieuse. Même si le seuil « fatidique » de
0,05 n’est pas atteint, une probabilité de p = 0,06 n’a sans doute pas la même
signification pour le lecteur qu’une probabilité p = 0,64. Donc, lorsque c’est
possible, il est toujours préférable de donner la valeur exacte d’une probabilité
plutôt qu’un simple qualificatif lié à un seuil. Cela est d’ailleurs en accord avec le
principe proposé en début de ce livre selon lequel la première règle à respecter en
rédaction scientifique est la règle de précision. En revanche, la présentation des
valeurs exactes des probabilités dans le texte peut parfois générer des groupements
de chiffres assez indigestes pour le lecteur. Par exemple, supposons que vous ayez
effectué des comparaisons deux à deux entre quatre groupes et que les valeurs
des six comparaisons correspondantes soient toutes différentes, mais aussi toutes
inférieures au seuil de 5 %. Il est préférable dans ce cas d’écrire « p < 0,05 dans tous
les cas », plutôt que de donner les valeurs individuelles pour chaque comparaison.
La discussion
Ici, enfin, vous avez atteint la partie de l’article où votre raisonnement et vos
capacités d’interprétation sont révélées au grand jour. C’est là que vous avez
l’opportunité de permettre à vos lecteurs d’évaluer vos qualités
en tant que chercheur. Jusque-là, dans votre article, vous avez
certainement eu à réfléchir, mais le matériel composant chacune
« discussion veut des sections était déjà prédéterminé. Même si cela peut paraître
surprenant, vous aviez en fait peu de latitude pour exprimer
dire la discussion vos propres idées.
de vos résultats,
pas la discussion Qu’est ce qui fait une bonne discussion ?
des résultats Le premier principe dont vous devez vous rendre compte est
que discussion veut dire la discussion de vos résultats, pas la
des autres. » discussion des résultats des autres. Vous discutez vos résultats
en relation avec ceux des autres. Vous les discutez aussi peut-
être en relation avec le monde réel, c’est-à-dire en envisageant
leur validité dans certaines situations pratiques ou dans la sphère plus générale de
votre discipline de recherche. Par conséquent, ce n’est pas une section dans laquelle
vous vous lancez dans une revue générale de la littérature sur le thème de votre
étude. Toutes les références que vous citez doivent être là parce qu’elles confortent
R É D I G E R U N A RT I C L E S C I E N T I F I Q U E 55
Même une déclaration comme « Nous n’avons pas encore assez d’informations
sur X et Y pour pouvoir en tirer une conclusion » est bien plus satisfaisante pour
le lecteur qu’une liste d’informations concordantes ou contradictoires sans avis
ni commentaires de la part de l’auteur.
C’est là que la structure traditionnelle d’un paragraphe est une très bonne aide
pour votre rédaction. Une règle fondamentale dans la construction d’une phrase
est qu’elle doit posséder un verbe : pas de verbe, pas de phrase. Il y a une règle
similaire, bien que moins connue, selon laquelle, dans toute bonne rédaction
scientifique, chaque paragraphe de la discussion doit se terminer par une conclusion.
S’il n’y a pas de conclusion dans une argumentation scientifique, il n’y a pas de
paragraphe. Vous ne trouverez probablement pas cette règle dans les livres de
grammaire, parce que je viens juste de l’inventer. Mais si vous l’appliquez, vous
êtes en passe d’écrire une bonne discussion pour deux raisons essentielles. D’abord,
vous avez de bonnes chances de maintenir l’intérêt du lecteur.
Et deuxièmement, vous vous obligerez à maintenir le cap dans
votre rédaction. Si un élément d’information ne nécessite pas
« …dans que vous en tiriez une conclusion, c’est un signe fiable que ce
n’est probablement pas la peine de le discuter du tout.
toute bonne
Quand les auteurs pensent qu’un paragraphe est trop long,
argumentation beaucoup d’entre eux décident souvent de passer à un
scientifique, chaque nouveau paragraphe, sans autre raison que de s’assurer que
le paragraphe paraisse de la bonne taille. Si vous faites cela,
paragraphe doit le lecteur va se retrouver livré à lui-même et penser que vous
se terminer par n’avez rien de plus à dire sur le point qui était à l’origine du
paragraphe. La décision de couper ou pas un long paragraphe
une conclusion. » en deux est facile à prendre. Si vous pouvez identifier deux
conclusions, développez-les dans deux paragraphes séparés.
S’il n’y a qu’une conclusion, ne gardez qu’un seul paragraphe, même s’il paraît
trop long. En réalité, une chaîne complexe d’arguments de discussion, chacun
conduisant potentiellement à de longs paragraphes, peut souvent être expliquée
plus facilement si elle est découpée en plusieurs segments possédant chacun sa
propre conclusion. Lorsqu’une telle séquence a été identifiée, le long paragraphe
de départ peut être découpé en plusieurs nouveaux paragraphes plus petits et
bien construits, chacun avec sa propre conclusion.
Certains éditeurs de journaux scientifiques ont récemment ajouté de nouvelles
sections nommées conclusions ou conséquences pratiques (en anglais, implications), à
la suite de la discussion conventionnelle. Je soupçonne qu’ils l’ont fait en réponse à
leur frustration d’être confrontés à de nombreux auteurs qui essaient de discuter
leur travail sans rien conclure. Ces revues qui ont une section de conclusions
obligatoire posent un problème aux bons auteurs, parce que ceux-ci auront déjà
présenté leurs conclusions comme partie intrinsèque de la discussion. Le problème
est le même pour les conséquences pratiques, qui sont en fait aussi des conclusions,
mais qui s’appliquent généralement plutôt au monde réel, donc à caractère
pratique. Qu’il s’agisse de conclusions ou de conséquences pratiques, la solution la
plus simple est de les copier et de les reformuler sous forme de liste dans cette
R É D I G E R U N A RT I C L E S C I E N T I F I Q U E 57
pour faire passer ce message. Par exemple, l’information la plus importante est
toujours placée en premier. Elle occupe toujours plus de place que les nouvelles
moins importantes. Elle est aussi généralement présentée comme un titre avec des
caractères plus gros. Ce gros titre est formulé de manière attractive ou provocante
et associé à des photos ou des illustrations qui attirent l’œil. Le titre sera peut-être
même en couleur. Il en résultera de toute façon que les lecteurs n’auront aucun
doute sur ce qui constitue l’information la plus importante du jour, avant même
de l’avoir lue.
Comment tout cela se rapporte-t-il à la rédaction de votre discussion ? Il y a en
fait une grande similitude entre le travail quotidien des rédacteurs en chef et le
vôtre quand vous écrivez un article scientifique. Certains des points de votre
discussion vont être inévitablement plus importants que d’autres. Il faut que vos
lecteurs s’en rendent compte pour pouvoir apprécier pleinement l’ensemble de
votre discussion. Mais ce qui est encore plus intéressant dans ce travail de choix et
de mise en valeur des points que vous considérez importants, c’est que cela vous
offre l’opportunité de structurer votre discussion de telle manière que même des
lecteurs éphémères capteront votre message principal, y compris s’ils ne lisent
que les premières lignes de votre discussion.
Si la clé d’une discussion bien structurée est de choisir quels sont les arguments les
plus importants, alors il vous faut un moyen systématique pour évaluer la priorité
des arguments que vous avez l’intention d’utiliser. Quand vous commencerez à
rassembler et organiser vos arguments, vous vous rendrez compte que certains
ont vraisemblablement plus de poids que d’autres. Donc, prenez note de tous les
arguments que vous pensez avoir à utiliser dans la discussion. Ensuite clarifiez
pour vous-même l’importance relative de chacun d’entre eux. Examinez-les
individuellement et attribuez-leur une note. Quatre catégories similaires à celles
utilisées pour les résultats devraient faire l’affaire.
• Catégorie 1. Ces arguments se rapportent à l’hypothèse initiale et vous
permettent de formuler une opinion claire d’acceptation ou de rejet de cette
hypothèse.
• Catégorie 2. Ces arguments se rapportent à l’hypothèse initiale mais, pour
quelque raison que ce soit, ils restent ambigus, ou ils vous conduisent à
suggérer des expériences ou des observations supplémentaires avant de
pouvoir accepter ou rejeter l’hypothèse.
• Catégories 3. Ces arguments fournis par vos résultats ne se rapportent pas
à l’hypothèse initiale, mais vous les considérez suffisamment nouveaux ou
intéressants pour que cela vaille la peine de les inclure.
• Catégorie 4. Ces arguments fournis par vos résultats ne se rapportent pas à
l’hypothèse et sont d’un intérêt limité.
Lorsque vous êtes satisfait de votre classification, vous pouvez tirer d’autres
avantages des techniques journalistiques de mise en page. Bien sûr, beaucoup
des outils que les rédacteurs en chef peuvent utiliser pour souligner l’importance
d’un article, comme des caractères plus gros, des illustrations qui attirent l’œil et
des titres provocateurs, ne sont pas accessibles aux auteurs d’articles scientifiques.
R É D I G E R U N A RT I C L E S C I E N T I F I Q U E 59
que ce qu’ils lisent au début de la discussion présente peu d’intérêt. Mais l’inverse
est également vrai : les lecteurs seront probablement incités à poursuivre leur
lecture s’ils trouvent quelque chose qui les intéresse dans le premier paragraphe
de la discussion. Les éditeurs de journaux savent bien cela ; ils ne laissent jamais
les nouvelles les plus importantes pour la fin, et vous devriez faire de même.
Ils annoncent le point le plus important dès les premières lignes de leur article
et, dans votre cas, l’argument le plus important devrait être le sujet du premier
paragraphe de votre discussion. Les articles de journaux se terminent rarement par
un bouquet de révélations extraordinaires, comme peuvent le faire des romans ou
des histoires courtes. Ils cherchent à informer, pas à surprendre, et c’est aussi le
rôle d’une bonne discussion. Certains auteurs pensent aussi qu’il est souhaitable,
voire essentiel, de régler autant de détails que possible avant d’en venir aux
points essentiels. En faisant cela, ils attribuent beaucoup d’espace à des faiblesses
éventuelles de leurs méthodologies ou à des faits inattendus survenus pendant
leur travail expérimental, avant de présenter leurs conclusions principales. Du
point de vue du lecteur, et en rédaction c’est le seul à prendre en compte, il n’y a
rien de plus frustrant que de se trouver face à une collection de trivialités alors
qu’on cherche des conclusions importantes. À moins de disposer d’un temps
illimité ou d’avoir un intérêt tout à fait spécial pour ce travail, les lecteurs vont
lire votre premier paragraphe et en déduire que vos détails peu convaincants
sont tout ce que vous avez à discuter. Ils passeront à un autre article bien avant
d’atteindre les points intéressants.
Même animé des meilleures intentions, il n’est pas toujours possible de respecter
ces deux principes de jouer sur le volume de texte et sur sa position dans la
discussion pour faire ressortir efficacement ce que vous souhaitez. Dans ce cas,
cela ne peut pas faire de mal de dire « Le point le plus important qui ressort de mes
résultats… ». N’abusez pas non plus de cette formule, car la plupart des lecteurs se
lasse rapidement si vous répétez trop souvent la haute opinion que vous avez de
vos résultats. C’est une technique à utiliser occasionnellement, lorsque vous pensez
que vous devez compenser le fait que la taille et la position de votre argument dans
la discussion ne reflètent pas l’importance que vous voulez lui donner.
R É D I G E R U N A RT I C L E S C I E N T I F I Q U E 61
En pratique, c’est une bonne idée de tester les séquences d’information dans
chaque argumentation en les notant sous forme abrégée permettant une meilleure
vue d’ensemble de toute la séquence d’argumentation. De cette manière vous
pouvez décider quelle est finalement la séquence qui est la plus logique et qui sera
donc la plus rapidement comprise par un lecteur. Bien sûr, les phrases clés sont
la première, qui annonce le sujet du paragraphe, et la dernière, qui délivre votre
message principal. Une fois que vous les aurez rédigées, ce qui peut nécessiter pas
mal de réflexion, vous serez surpris de la simplicité avec laquelle vous pourrez
écrire les phrases intermédiaires, parce que vous avez un point de départ et
un point d’arrivée pour votre rédaction. Vous pouvez alors juger facilement si
chaque phrase intermédiaire s’intègre bien dans la logique conduisant vers votre
conclusion ou vous en écarte. Cela vous permettra rapidement de rédiger la phrase
en question ou de la rejeter parce qu’inutile.
R É D I G E R U N A RT I C L E S C I E N T I F I Q U E 63
piment de la science. C’est le moyen par lequel des idées non testées peuvent
être largement diffusées. De plus, les spéculations stimulent souvent les
lecteurs à générer eux-mêmes des idées novatrices ou à fournir l’information qui
manquait à l’auteur pour convertir un raisonnement spéculatif en une conclusion
solide et acceptée.
Mais laissez-moi préciser ma pensée sur ce point. Lorsque nous avons discuté du
développement des hypothèses, nous avons vu que l’hypothèse est une idée en
accord avec l’information disponible et qu’il est plausible d’envisager, mais qui
n’a pas encore été testée. C’est en fait une sorte de spéculation. Le plus pointilleux
des éditeurs l’acceptera dans l’introduction parce que cette spéculation va être
testée et acceptée ou rejetée dans le cadre de l’article, immédiatement après avoir
été proposée. Dans la discussion, les spéculations ne sont pas testées et incitent
donc aux critiques. Je crois que si un argument de spéculation est développé à
partir des résultats de l’expérience de la même manière qu’une hypothèse le
serait dans l’introduction, et que cet argument remplit les mêmes critères qu’une
hypothèse, alors cette spéculation n’est pas seulement acceptable dans la discussion,
mais elle y est souhaitable. Les seules raisons valables pour rejeter un élément de
spéculation sont qu’il ne coïncide pas avec l’information connue, y compris celle
présentée dans l’article, ou que la supposition ne pourrait pas être testée avec les
moyens disponibles actuellement. Ces restrictions sont suffisantes pour éviter
une théorisation inutile mais, en les respectant, les auteurs ont l’opportunité de
proposer des idées novatrices. Et les idées novatrices sont ce qu’il y a de plus
précieux en recherche scientifique.
Longueur de la discussion
Les éditeurs de revues scientifiques conviennent que l’un des défauts les plus
fréquents des discussions est qu’elles sont trop longues. Cette longueur les rend
généralement difficiles à suivre. La présence de références inutiles et de phrases
creuses qui ne conduisent pas aux conclusions présentées, sont des défauts
communs. Si l’auteur garde clairement à l’esprit sa conclusion en écrivant le corps
de chaque paragraphe, il ne devrait pas y avoir de problème.
Une autre source de texte en excès dans la discussion est la répétition mot pour
mot de données présentées dans les résultats. La discussion est supposée être lue
en conjonction avec les résultats et les répétitions sont donc rarement nécessaires.
Vous pouvez toujours faire référence aux valeurs des tableaux et des figures
présentés dans les résultats, sans avoir pour autant à les répéter. De toute façon il
est toujours difficile de lire une rangée de chiffres dans un texte. La discussion se
construit à partir de l’information présentée dans les résultats, en l’interprétant,
en généralisant, en faisant des comparaisons et en tirant des conclusions. Lorsque
des valeurs exactes sont nécessaires, un ou deux chiffres clés devraient suffire
pour ne pas embrouiller le raisonnement. Si vous trouvez que vous avez du mal
à être clair sans répéter de grandes portions de vos résultats, c’est un signe fiable
que vos résultats ne sont pas présentés de manière adéquate. De fait, beaucoup
d’auteurs se rendent compte qu’ils doivent changer la présentation des résultats
lorsqu’ils travaillent sur les derniers détails de la discussion. Cet ajustement en
R É D I G E R U N A RT I C L E S C I E N T I F I Q U E 65
« Toutes les bactéries aérobies sont sensibles à l’umptomycine (Bidule 2007). »
Ici, le rôle de cette référence est de montrer que c’est un concept accepté. Bidule
a été le premier à le prouver et vous, auteur, vous êtes d’accord. L’emphase est
signalée par le fait que le nom de l’auteur et la date sont placés entre parenthèses
à la fin de l’affirmation et par le fait que vous vous exprimez au présent.
« Bidule (2007) a trouvé (ou montré) que toutes les bactéries aérobies étaient
sensibles à l’umptomycine. »
Cette expression suppose que c’est un concept moins bien connu ; Bidule l’a trouvé,
et vous êtes d’accord avec lui. En vous exprimant au passé, vous indiquez que
votre accord se limite aux résultats auxquels vous faites référence, sans suggérer
pour autant que c’est un principe général admis par tous.
« Bidule (2007) a proposé que toutes les bactéries aérobies seraient sensibles à
l’umptomycine. »
Dans ce dernier cas, vous suggérez que Bidule s’opposait à l’opinion généralement
admise en faisant cette affirmation et vous, pour l’instant, vous gardez l’esprit
ouvert sur le sujet. Remarquez comment l’utilisation du verbe « proposer »
et le temps du verbe « être » suggèrent le doute et ouvrent la possibilité d’un
changement d’opinion à la faveur de résultats plus récents. Des petits changements
comme ceux-ci permettent de mettre l’accent de façon subtile sur votre position
par rapport à celle des autorités que vous citez. Vous remarquerez également que
ces principes s’appliquent aussi bien en français qu’en anglais.
R É D I G E R U N A RT I C L E S C I E N T I F I Q U E 67
L’élaboration du résumé
Qu’est-ce qui rentre dans chacun de ces quatre éléments ?
Pourquoi ? Si vous copiez l’hypothèse que vous avez testée et la placez comme
première phrase de votre résumé, vous donnez les raisons pour faire votre
expérience de la manière la plus efficace et la plus économe qui soit. Vous n’avez
pas la place pour répéter tout ou partie du raisonnement qui sous-tend l’hypothèse,
mais l’hypothèse elle-même est la conclusion de ce raisonnement et peut être
exprimée le plus souvent en une seule phrase.
Comment ? C’est une description générale du schéma expérimental que vous
avez utilisé pour tester l’hypothèse.
« Nous avons mesuré l’équilibre acido-basique et l’indice
peptidique chez des enfants d’écoles primaires dans la Province
de Rivière Anaconda trois années de suite. »
« Lorsque
« Nous avons analysé le taux de récupération après
le travail de fond hyperventilation chez des patients exposés à des températures
est fait, vous pouvez de 15, 20 ou 30 °C après un test de stress de Tournanron. »
R É D I G E R U N A RT I C L E S C I E N T I F I Q U E 69
• l’élaboration de l’article ;
• la correction des aspects de raisonnement et de logique de l’article (plutôt
que simplement des corrections de style) ;
• la réponse aux commentaires des rapporteurs et la préparation de la
version finale.
Ces six composants n’ont pas tous la même importance et varient d’une discipline
à une autre, ce qui fait que des groupes d’auteurs différents pourront leur donner
des poids relatifs différents.
Vous pourrez remarquer que cette liste omet plusieurs autres éléments comme :
• l’obtention des fonds nécessaires pour faire la recherche ;
• la gestion du Département au sein duquel la recherche a été effectuée ;
• la participation physique à la collecte des données et à l’obtention des
résultats ;
• l’utilisation de méthodes statistiques ou analytiques courantes pour
l’obtention des résultats, ou le prêt d’un appareil particulier ;
• la supervision technique d’un étudiant qui a fait le travail.
Les éléments de cette deuxième liste sont sans aucun doute vitaux pour la
réalisation fructueuse d’une expérience, mais en eux-mêmes ne font pas partie de
la contribution intellectuelle. D’un autre côté, ils peuvent comprendre des aspects
de la première liste. Par exemple, il est difficile d’imaginer que l’obtention de
contrats de recherche pour mener à bien un projet puisse aboutir sans de bonnes
idées ou une hypothèse originale. Cependant, si la personne qui a émis l’idée de
départ n’était pas celle qui a fait le travail de routine de remplir les formulaires
de demande de financement, il ne serait pas justifié que cette dernière prétende
avoir contribué intellectuellement au projet. De la même manière, les chercheurs
ont généralement une influence sur le mode de réflexion et de raisonnement
des étudiants qu’ils supervisent. C’est toujours le cas pour les bons chercheurs,
mais ils ne devraient pas automatiquement exiger de cosigner un article d’un de
leurs étudiants, à moins qu’ils n’aient spécifiquement influencé les résultats qui
seront publiés. Les chefs d’unités scientifiques et les administrateurs gagnent leur
reconnaissance autrement et ne devraient pas avoir systématiquement le droit de
coller leur nom sur des articles pour augmenter leur notoriété.
Une fois que tout le monde est d’accord sur les six composants de la première
liste, avec peut-être une certaine pondération en fonction du type de recherche
concernée, chaque auteur potentiel peut suggérer un pourcentage pour sa
contribution à chaque composant et un score général peut être calculé. En pratique,
le total sera bien supérieur à 100 %, mais si la logique décidée au départ est
respectée, les scores globaux pourront être utilisés pour décider finalement assez
objectivement des auteurs et de l’ordre de signature. De toute façon, ceci n’est que
l’option de rechange, rappelez-vous que rien ne peut remplacer avantageusement
la bonne volonté entre collaborateurs scientifiques.
L’utilisation de cet ordre objectif des signatures permet de proposer un premier
classement qui est particulièrement utile lorsque le nombre potentiel d’auteurs
Les remerciements
Les organismes de financement aiment voir leurs noms associés à une recherche
fructueuse et, dans votre propre intérêt de survie à long terme, c’est probablement
une bonne chose de leur faire plaisir en les citant dans les remerciements. Néanmoins,
il ne s’agit pas de citer un peu n’importe qui dans cette section. Si vous avez
l’intention de citer quelqu’un, informez-le avant et obtenez son accord. Si vous
ne le faites pas et qu’il préfère ne pas être associé à votre article, cela pourrait
devenir très embarrassant. Dans tous les cas et contrairement à ce que peuvent
penser certains, citer une célébrité de votre discipline dans les remerciements a peu
de chance d’influencer les commentaires d’un rapporteur ou d’un éditeur. C’est
à l’article lui-même de le faire.
R É D I G E R U N A RT I C L E S C I E N T I F I Q U E 71
La bibliographie
Les références bibliographiques sont le support essentiel de la logique du
raisonnement scientifique et de sa rédaction. Des articles solides évalués par des
pairs sont le point de départ le plus sûr pour développer des arguments conduisant
à des hypothèses et à des conclusions. La raison en est que ces articles ont subi un
processus d’examen et d’approbation par des scientifiques de métier spécialistes
de cette discipline. Cela veut dire que vous n’êtes pas obligé de justifier la validité
d’une référence comme vous devez le faire pour vos propres nouvelles données.
La citation de toutes les références à l’endroit qui leur correspond dans votre
article fait partie de ce processus d’argumentation, ainsi que leur report sans
erreur dans la section de bibliographie. Cependant, il y a des cas et certains secteurs
de recherche où des données évaluées par des pairs ne sont tout simplement pas
disponibles. Des sources moins convaincantes et scientifiquement moins solides
sont alors la seule information disponible. Il peut s’agir d’articles de journaux,
d’informations anecdotiques ou de pratiques coutumières. Si vous devez utiliser
de telles sources, ayez la prudence de reconnaître leur moindre rigueur et de
modifier en conséquence la force des conclusions que vous en tirez. Citez si
besoin est des portions de texte, mais il est alors particulièrement important que
la source soit correctement mentionnée dans la bibliographie. En effet une erreur,
même mineure pourrait rendre impossible l’accès à une source peu classique ; par
exemple, une simple faute de frappe empêchera l’accès à une source sur internet.
Les références jouent un rôle central dans le raisonnement et la rédaction
scientifiques. Il serait donc raisonnable de penser qu’il existe une forme logique
et standardisée pour les présenter. Ce n’est malheureusement pas le cas. Il y a
des centaines de combinaisons possibles et chaque revue a son propre format,
totalement rigide et qui peut être plus ou moins différent de celui d’une autre
revue du même domaine scientifique.
En termes généraux, il y a deux méthodes principales pour référencer des articles
dans les revues et les livres scientifiques : le système Harvard (auteur, date) et le
système Vancouver (auteur, chiffre). Dans le système Harvard, le nom de l’auteur et
l’année de publication sont cités dans le corps de l’article, par exemple (Schmurch,
2007) et les références sont listées à la fin de l’article par ordre alphabétique
par nom d’auteurs. Dans le système Vancouver, les citations dans le texte sont
indiquées par des chiffres entre parenthèses. Par exemple, « la lune est bleue à
l’équinoxe (1), mais Bloggs (2) a trouvé des traces de rouge ». Dans la bibliographie,
ces références sont listées en ordre numérique comme elles apparaissent dans
le texte. Bien entendu chaque système a ses défenseurs. L’avantage du système
Harvard est qu’un lecteur qui veut connaître l’auteur d’un travail cité n’a pas
besoin de le déchiffrer en se reportant à la bibliographie. Au contraire, les défenseurs
du système Vancouver considèrent que le texte principal se lit plus facilement et
certains éditeurs le trouvent plus discret. Le système Harvard est plus courant que
le système Vancouver, mais ce dernier reste fermement installé dans beaucoup de
revues en sciences médicales. Et pour compliquer le tout, de nombreuses revues
ont leur propre « style maison » qui impose des modifications spécifiques à ces
deux standards. Par conséquent, les auteurs ne peuvent pas se permettre d’ignorer
R É D I G E R U N A RT I C L E S C I E N T I F I Q U E 73
est d’autant plus grande qu’ils ont besoin de plus de temps pour le lire, justement
parce qu’ils risquent de ne pas prendre le temps nécessaire.
Il y a deux façons principales relativement simples pour vous assurer
intentionnellement que votre rédaction est fluide et lisible. La première est
d’éliminer de votre texte toutes les expressions et structures qui freinent la lecture,
sortes d’écueils sur lesquels les lecteurs risquent de buter et qui les obligent à
abandonner le fil de vos idées pour saisir la manière dont vos mots sont organisés.
La deuxième façon est de faire coïncider votre manière d’écrire avec la manière
de lire des lecteurs. Ceci exige que vous compreniez suffisamment bien la
manière dont les lecteurs lisent. Vous pourrez alors faire en sorte de structurer
votre texte de la même manière qu’ils le lisent, ce qui leur permettra de saisir
l’information facilement car ils n’auront pas à faire d’effort de lecture. Ces deux
techniques ne sont pas difficiles à mettre en œuvre et elles devraient être utilisées
systématiquement dans votre rédaction. En effet, les auteurs qui écrivent bien
utilisent probablement régulièrement ces techniques ou d’autres similaires sans
en être conscients. Mais maintenant que nous connaissons ces techniques, ceux
d’entre nous qui n’ont pas cette facilité intuitive de rédaction pourront améliorer
la lisibilité et la fluidité de leurs écrits de manière spectaculaire.
R É D I G E R U N A RT I C L E S C I E N T I F I Q U E 75
à cette situation en ignorant la proposition qualificative ou subordonnée pour
chercher d’abord la proposition principale. Lorsqu’ils ont trouvé cette dernière
et en possession de l’information qu’elle contient, ils relisent la phrase pour en
comprendre tout le sens. Bien sûr, ils arrivent finalement à comprendre la phrase,
mais ils doivent la lire deux fois pour le faire. Leur mémoire à court terme ne
leur permet pas de le faire en un seul passage. La partie la plus importante de
n’importe quelle phrase pour guider le lecteur est le début de la phrase et il ne
faut pas perdre cette opportunité.
Exemples
« Les poids [nom] des enfants ont été relevés. »
« Weights [nom] of children were taken. »
« Des réductions [nom] de température des cobayes ont été observées 10 minutes
après qu’ils aient été soumis à une immersion [nom] dans l’eau glacée. »
« Reductions [nom] in temperature of the guinea pigs were seen 10 minutes after they
were subjected to immersion [nom] in iced water. »
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« The temperature of the guinea pigs was reduced 10 minutes after they were immersed
in iced water ».
Vous remarquerez qu’en transformant un nom en verbe ayant la même racine ou
une racine synonyme, nous avons fait deux choses intéressantes. Premièrement,
nous avons automatiquement éliminé le verbe d’origine, ce qui indique qu’il
n’avait pas grande valeur de toute façon. En fait il était là juste pour que le texte
soit bien une phrase. Nous aurions pu utiliser « notés, enregistrés, observés (noted,
recorded, observed) » ou d’autres encore sans changer fondamentalement le sens de
la phrase. En revanche, dans la nouvelle phrase il n’y a pas, ou très peu, d’autres
verbes qui peuvent remplacer de manière satisfaisante les nouvelles formes
verbales « pesés, diminué, immergés (weighed, reduced, immersed) ». Deuxièmement,
nous avons raccourci les phrases.
Et grâce à ces deux améliorations, l’impact de la phrase est automatiquement
renforcé. L’élément remarquable de cette technique est qu’elle marche dans 100 %
des cas. Remplacer des noms par des verbes est l’un des outils les plus simples,
mais aussi les plus puissants dont vous disposez pour améliorer la précision, la
clarté et la concision de votre rédaction. Les exemples ci-dessus étaient courts
et simples, mais jetez un œil à la phrase suivante, beaucoup plus longue et
compliquée, dans laquelle trois noms en gras pourraient être changés en verbes.
« Des accroissements de la température se sont traduits par une détérioration du
statut sanitaire de la population, particulièrement dans les régions où le traitement
des lagunes de collecte n’a pas été fait avant le début du printemps ».
Lorsqu’on effectue ces trois changements la phrase devient :
« Lorsque les températures ambiantes ont augmenté, le statut sanitaire de la
population s’est dégradé, particulièrement lorsque les lagunes de collecte n’ont
pas été traitées avant le début du printemps. »
Ce simple traitement quasi mécanique a réduit une phrase de 37 à 29 mots, sans
perdre aucune information, ni même sa manière d’être présentée. Elle pourrait
probablement être encore améliorée sur d’autres points, mais changer des noms
par des verbes a représenté un premier pas de géant.
Là encore le système fonctionne aussi parfaitement en anglais, où le changement
de quatre noms par les verbes correspondants permet de passer d’une phrase de
33 mots à une phrase de 24 mots. En effet « Increases in ambient temperature resulted
in a deterioration of the community’s health status, particularly in regions where the
treatment of the effluent ponds had not been carried out until the commencement of
spring » devient « When ambient temperature increased, the community’s health status
deteriorated, particularly in regions where the effluent ponds had not been treated until
spring had commenced ».
R É D I G E R U N A RT I C L E S C I E N T I F I Q U E 79
contiennent jusqu’à vingt ou trente abréviations différentes. Certaines revues ont
récemment introduit une nouvelle section en début d’article où les abréviations
doivent être présentées et définies en ordre alphabétique. C’est traiter le problème
sans en attaquer la cause et encore moins les conséquences. Qu’ils soient dans
une liste ou pas, il n’y a guère de pire écueil à la lisibilité d’un texte qu’une
accumulation d’abréviations, de sigles ou d’acronymes, surtout s’ils n’évoquent
pas les mots qu’ils sont sensés représenter. Même les abréviations relativement
familières requièrent un moment d’attention qui distrait le lecteur avant qu’il
reprenne sereinement le fil de sa lecture. Et les abréviations peu courantes ont
toutes les chances de bloquer complètement le flux de l’information pour le lecteur,
qui est obligé de passer du temps à retrouver leur signification, qu’elles aient été
expliquées précédemment dans l’article ou présentées dans une liste.
Exemples
Des abréviations couramment acceptées et bien connues, qui ne le sont peut-être
finalement pas autant que vous l’imaginez, posent déjà quelques problèmes à la
plupart des lecteurs. Par exemple, « AA » veut dire « acide aminé » (amino acid) pour
des biochimistes et « absorption atomique » (atomic absorption) pour des physiciens.
Mais cela veut dire aussi « Association automobile » (Automobile Association) pour
les conducteurs de voitures et « Alcooliques anonymes » (Alcoholics Anonymous)
pour d’autres. Par ailleurs, de nouvelles abréviations que vous inventez et que
vous présentez au monde pour la première fois peuvent peut-être vous laisser
penser que vous êtes une sorte de pionnier. Mais soyez certain qu’elles cassent
la lisibilité de votre article à coup sûr et, pour cette raison, elles devraient être
évitées, sauf en cas de nécessité absolue.
R É D I G E R U N A RT I C L E S C I E N T I F I Q U E 81
demandez-vous si vous avez vraiment besoin de cette information dans votre
texte. Si ce n’est pas le cas, laissez tomber l’idée et laissez le lecteur poursuivre
sa lecture. Si vous en avez besoin, alors vous avez toutes les bonnes raisons pour
l’incorporer dans votre texte principal et éliminer l’écueil que constituait le fait
de placer l’information entre parenthèses.
Les notes de bas de page entrent dans la même catégorie que les parenthèses,
excepté qu’elles sont encore plus éloignées du texte principal qu’elles sont
supposées étayer et elles cassent donc encore plus la lecture. Heureusement, la
plupart des revues en biologie et en médecine découragent leur utilisation, mais
elles sont toujours bien vivantes dans certaines publications en sciences sociales.
Il est naïf de croire que l’accumulation d’information additionnelle dans une note
de bas de page va augmenter la fluidité du texte principal. Les lecteurs confrontés
à une demi-page de texte qui paraît être l’histoire principale et une autre demi-
page qui est une note de bas de page ont à choisir entre suivre l’histoire principale
et ignorer la note, ou la consulter en espérant ne pas perdre le fil de l’histoire
principale. Ils ont aussi l’option attrayante d’arrêter là leur lecture s’ils n’ont pas
de raison essentielle de se frayer un chemin dans ce labyrinthe.
« Nous utilisons alors une stratégie bien différente, car ce que nous voulons
surtout, c’est ne pas perdre le fil de l’idée que nous sommes en train de développer
et pouvoir la développer jusqu’au bout, mais il en résulte souvent des phrases
très longues, surtout dans le premier brouillon de notre article. »
« Nous utilisons alors une stratégie bien différente. En effet, ce que nous voulons
surtout, c’est ne pas perdre le fil de l’idée que nous sommes en train de développer
et pouvoir la développer jusqu’au bout. Malheureusement, il en résulte souvent
des phrases très longues, surtout dans le premier brouillon de notre article. »
Remarquez que je n’ai pas utilisé la possibilité de faire une césure à l’endroit du
« et », car elle n’améliorait plus la lisibilité, la phrase initiale étant déjà scindée
en trois nouvelles phrases. De fait, une succession de plusieurs phrases courtes
peut aussi nuire à la lisibilité, en particulier si les transitions entre elles ne sont
pas évidentes. Mais en règle générale, la césure de phrases trop longues présente
deux avantages. Premièrement, elle facilite la lisibilité du texte en réduisant
l’effort de mémoire à court terme nécessaire au lecteur, évitant ainsi sa fatigue.
Deuxièmement, le fait d’avoir à raccourcir une phrase peut permettre de lever des
ambiguïtés d’interprétations, comme l’illustre l’exemple suivant :
« Les traitements ont augmenté les concentrations obtenues dans le sol après
lessivage par des pluies torrentielles seulement pour les doses supérieures à 5 %,
ces valeurs étant bien supérieures aux normes admises. »
Dans cet exemple « ces valeurs » est un terme ambigu, car il peut se rapporter
à « concentrations » ou à « doses ». En coupant la phrase après 5 %, nous nous
posons la question de la liaison entre les deux nouvelles phrases créées et
l’ambiguïté devient évidente. La phrase initiale peut être modifiée facilement
dans la nouvelle phrase en ajoutant une conjonction et en précisant à quoi le
terme « valeurs » se rapporte :
R É D I G E R U N A RT I C L E S C I E N T I F I Q U E 83
« Les traitements ont augmenté les concentrations obtenues dans le sol après
lessivage par des pluies torrentielles seulement pour les doses supérieures à 5 %.
Cependant, des traitements à ces doses sont bien supérieurs aux normes admises. »
Pour en terminer avec le problème des phrases trop longues, je crois important
d’attirer l’attention sur le fait que nous écrivons souvent pour un public dont la
langue maternelle n’est pas nécessairement celle de notre article. En effet, une
phrase un peu longue écrite en anglais sera facile à suivre pour un lecteur dont
l’anglais est la langue maternelle, mais ne le sera peut-être pas pour une personne
dont l’anglais est la deuxième langue, même si son niveau d’anglais est assez bon.
C’est une raison supplémentaire pour s’efforcer de faire des phrases relativement
courtes. C’est d’autant plus vrai si vous rédigez en anglais alors que ce n’est pas
votre langue maternelle, car vous trouverez en plus beaucoup plus facile de rédiger
des phrases courtes que des phrases plus longues. La même chose est valable
lorsque vous rédigez en français.
Groupement de noms
L’emploi en anglais des groupements de noms dans lesquels les prépositions sont
omises constitue un piège qu’on ne rencontre pas tel quel en français, mais qui
est typique de la langue anglaise. De nombreuses personnes dont l’anglais n’est
pas la langue maternelle s’imaginent que c’est faire preuve d’une bonne maîtrise
de l’anglais que d’utiliser de tels groupements de mots. Hélas, ces expressions
sont toujours difficiles à lire et correspondent parfaitement à la définition du
mot « jargon » dans un dictionnaire anglais : « …langage qui est utilisé par un
groupe, une profession ou une culture particulier, surtout quand les mots et les
phrases ne sont pas compris ou utilisés par d’autres personnes ». Parfois l’auteur
utilise ces blocs de mots en pensant qu’ils économisent une place précieuse, en
supprimant des prépositions telles que « as, of, on, in, for, comme, de, sur, dans,
pour » ou d’autres. De plus, des auteurs habitués à rencontrer certains groupes
de mots les reconnaissent parfois comme une entité unique et ne se rendent pas
compte qu’un lecteur essayant de les assimiler pour la première fois aura du mal à
y parvenir. Omettre les prépositions peut être acceptable quand le mot manquant
est évident à comprendre. Mais c’est loin d’être toujours le cas.
Exemples
Soil nitrogen uptake
Annoying infant pathology problems
Starch absorption rate analyses
Artificial learning enhancement programs
Plasma urea nitrogen concentrations
Est-ce que « soil nitrogen uptake » signifie « nitrogen taken up from the soil (absorption
de l’azote qui est dans le sol) » ou « nitrogen taken up by the soil (absorption de
l’azote par le sol) » ? En effet, ce groupement de mots ne permet pas de savoir
R É D I G E R U N A RT I C L E S C I E N T I F I Q U E 85
si l’azote est fixé par le sol ou s’il est extrait du sol et les deux interprétations
possibles sont pratiquement opposées l’une de l’autre. Autant dire qu’avec de
tels groupements de mots, les deux règles les plus importantes de la rédaction
scientifique, la précision et la clarté, ne sont pas respectées ! Par ailleurs, les
conjonctions et prépositions employées pour éviter ces groupements de mots en
anglais peuvent également être sources d’ambiguïtés en elles-mêmes en français.
Par exemple une imprécision similaire à celle causée par le groupement de noms
en anglais pourrait exister si nous écrivions « absorption de l’azote du sol ». En
effet « du », ou « of » en anglais, n’est pas précis. Il est nécessaire d’indiquer le
sens de l’absorption en utilisant soit « qui est dans » ou « par ». C’est pourquoi la
relecture du texte est une tâche importante en fin de rédaction pour vérifier qu’il
n’y a pas de multiples interprétations possibles.
Lorsque plusieurs noms sont regroupés ainsi et qu’il y a en plus un vrai adjectif
dans le groupe de mots, il est souvent très difficile de savoir à quel nom l’adjectif
se réfère. Ainsi, dans le deuxième exemple, « annoying infant pathology problems »,
est-ce qu’on a affaire à des symptômes pathologiques chez des enfants difficiles,
des symptômes difficiles dans les pathologies infantiles ou des symptômes de
pathologies difficiles chez les enfants ? En clair il y a trois interprétations possibles
assez différentes les unes des autres.
R É D I G E R U N A RT I C L E S C I E N T I F I Q U E 87
de fragments de textes simplement en respectant le bon ordre de présentation. Si,
en même temps, nous prenons soin d’utiliser des mots de transition qui indiquent
l’essence de notre idée suivante, nous pouvons quasiment faire des miracles avec
un texte qui était au départ difficile à suivre.
Vous avez peut-être déjà identifié dans ce livre la notion de créer chez le lecteur
une anticipation qu’il peut confronter avec une information nouvelle. Le concept
s’applique à l’article dans son ensemble, où l’hypothèse crée une anticipation qui
peut être alors comblée par l’information qui suit. Le principe fonctionne aussi
pour le paragraphe, où la phrase thématique permet au lecteur d’anticiper ce qui
va être discuté dans le reste du paragraphe. Lors du passage d’une phrase à la
suivante, la manière dont la deuxième phrase est structurée permet au phénomène
d’anticipation de servir efficacement de guide pour que le lecteur ne perde pas
le fil de sa lecture.
Il y a deux manières de relier les mots du début d’une phrase avec l’information
dont le lecteur a déjà pris connaissance. La première est de répéter des mots
déjà utilisés dans la phrase précédente ou, au plus, dans les deux dernières
phrases, c’est-à-dire ce que Gopen et Swan appellent de la « vieille information »
ou, autrement dit, de l’information déjà connue grâce à la lecture du texte
immédiatement antérieur. La deuxième est d’utiliser des mots de liaison, qui
indiquent une relation logique avec l’idée de la phrase précédente.
Une phrase simple de ce type est aussi efficace qu’une carte pour
orienter le lecteur dans un passage relativement compliqué. Elle
met chaque élément de l’information en perspective par rapport L’utilisation
aux autres. Chaque élément commencera par « Premièrement du principe
(First),… Deuxièmement (Second),… Troisièmement (Third),… »
et même si l’un ou plusieurs des éléments nécessitent plus d’anticipation
d’une phrase, les lecteurs sauront exactement où ils en sont et du lecteur de Gopen
pourront suivre votre raisonnement plus facilement.
et Swan est si simple
L’utilisation du principe d’anticipation du lecteur de Gopen et
Swan est si simple qu’il est difficile de croire qu’il puisse être qu’il est difficile
aussi efficace. Mais il est incontestablement facile à utiliser et de croire qu’il puisse
le résultat est immanquablement remarquable. La stratégie est
de développer une méthode systématique pour l’utiliser. Avec être aussi efficace.
l’habitude, vous incorporerez automatiquement l’information
déjà connue ou le panneau indicateur au début de la plupart
de vos phrases au moment même où vous les écrivez. Néanmoins, il se peut que
vous n’y arriviez pas toujours lors de la rédaction de la première version de votre
article, parce que vous devez aussi vous concentrer sur son contenu scientifique et
sur sa logique. En fait, lors de la rédaction du premier brouillon, l’effort à faire pour
appliquer ce principe d’anticipation risque de vous distraire et ne devrait pas être
votre priorité. Mais au moment de la correction, cela devient presque un processus
automatique que vous pouvez effectuer sans porter beaucoup d’attention au
contenu scientifique. Personnellement, je prends beaucoup de plaisir à cette étape.
En effet, lorsque j’ai fini et que je relis le texte en me concentrant de nouveau sur le
R É D I G E R U N A RT I C L E S C I E N T I F I Q U E 89
contenu scientifique, je suis souvent étonné de la façon dont l’écriture est devenue
automatiquement plus fluide.
Prenons l’exemple suivant qui traite de la mémoire à court terme et à long terme :
« La mémoire peut être divisée en deux phases : la mémoire à court terme et la
mémoire à long terme. Lorsqu’un animal apprend quelque chose, cette information
entre d’abord dans la mémoire à court terme, où elle va demeurer pendant un
temps pouvant aller de quelques minutes à quelques heures. Les méthodes
expérimentales utilisées et les espèces animales étudiées peuvent affecter la durée
exacte de la mémoire à court terme. Un certain nombre d’agents tels que les chocs
électro-convulsifs (chocs électriques de forte intensité appliqués au niveau de la
tête), le froid, le coma et une anesthésie profonde, peuvent détruire l’information
en train d’être stockée dans la mémoire à court terme. L’un quelconque de ces
traitements peut produire un état connu sous le nom d’amnésie rétrograde, dans
lequel la mémoire des événements récents est détruite, sans que la mémoire
d’événements antérieurs soit affectée. Puisque les mémoires plus anciennes sont
résistantes à cette destruction, il en a été conclu que le mécanisme par lequel
l’information est stockée dans la mémoire à court terme diffère de celui de la
mémoire à long terme. Parce que la mémoire à court terme est détruite relativement
facilement par des procédés dont il est prévisible qu’ils perturbent fortement
l’activité électrique du cerveau, il a été suggéré que l’information est stockée
dans la mémoire à court terme en tant qu’activité électrique réverbérante dans
le cerveau. À mesure que l’information passe dans la mémoire à long terme, par
contre, elle est stockée sous une forme plus durable. »
Les mots et les phrases ne sont ni compliqués ni trop longs et le texte est
grammaticalement correct. Donc, prises individuellement, les phrases sont faciles
à lire mais, mises ensemble elles nécessitent beaucoup de travail pour suivre l’idée
générale. Autrement dit, le paragraphe n’est pas fluide. Chaque phrase assaille le
lecteur avec de l’information nouvelle sans tenir compte de ce que disent les autres
phrases qui l’entourent. Par conséquent, le lecteur n’a pas la possibilité d’intégrer
l’information déjà connue alors qu’il lui faut déjà en intégrer une nouvelle. Son
esprit a du mal à classer l’information de manière logique, avec au moins deux
conséquences malheureuses. La première est que le lecteur est obligé de stocker
beaucoup d’informations pendant qu’il retourne en arrière pour relire et trouver
plus d’indices sur la manière d’utiliser ces informations. La deuxième, comme
conséquence directe de la confusion créée, est que les informations risquent d’être
interprétées différemment par des lecteurs différents.
Examinons les morceaux d’informations qui commencent chaque phrase de ce
paragraphe :
« La mémoire peut être divisée en deux phases : la mémoire à court terme
et la mémoire à long terme. Lorsqu’un animal apprend quelque chose, cette
information entre d’abord dans la mémoire à court terme, où elle va demeurer
pendant un temps pouvant aller de quelques minutes à quelques heures.
Les méthodes expérimentales utilisées et les espèces animales étudiées
peuvent affecter la durée exacte de la mémoire à court terme. Un certain nombre
R É D I G E R U N A RT I C L E S C I E N T I F I Q U E 91
sur laquelle nous appuyer. De toute façon, c’est une excellente phrase thématique
qui nous annonce quel va être le thème de ce paragraphe.
En revanche, dans la deuxième phrase la nouvelle information concernant la
mémoire à court terme n’est maintenant plus évoquée avant que nous l’ayons
liée avec l’information déjà connue de la première phrase. La phrase modifiée
commence maintenant en indiquant qu’elle va continuer à nous parler de mémoire
à court terme. De la même manière, la nouvelle troisième phrase, ainsi que la
quatrième, nous guident vers le thème maintenant connu du lecteur concernant
le stockage de l’information avant d’introduire des éléments nouveaux indiquant
ce qui peut arriver à cette information. Ensuite, comme la phrase précédente, la
nouvelle cinquième phrase commence avec des ingrédients qui nous sont là aussi
connus. Le flux logique pour passer d’une phrase à la suivante a été mis en place
et continue dans tout le paragraphe. Cela a été fait principalement en commençant
les phrases avec des mots répétés des phrases précédentes, mais dans le cas de
« Cependant », « Par conséquent », « En revanche » c’est l’utilisation de panneaux
indicateurs qui indique aussi le sens dans lequel la phrase va s’orienter.
Pour bien illustrer l’universalité de ce principe quelle que soit la langue dans
laquelle vous devez écrire votre article, le même exercice d’amélioration de la
lisibilité est présenté ci-dessous pour la version originale du texte en anglais.
Vous pourrez voir qu’à quelques détails près, exactement les mêmes recettes ont
fonctionné pour rendre le texte beaucoup plus facile à lire.
Le texte de départ était le suivant :
“Memory can be divided into two phases: short-term memory and long-term memory.
When an animal learns something this information first of all enters the short-term memory
where it will remain for a matter of minutes to hours. The experimental methods used
and the species of animal studied can affect the precise duration of short-term memory.
A number of agents including electro-convulsive shock (strong electric shocks applied to
the head), low temperature, coma and deep anaesthesia can disrupt information that is
being stored in short-term memory. Any of these treatments may produce a state known
as retrograde amnesia, in which the memory of recent events is disrupted leaving earlier
events unaffected. Since more remote memories are resistant to disruption, it has been
concluded that the mechanism by which the information is stored in short-term memory
differs from that for long-term memory. Because short term memory is disrupted relatively
easily by procedures which may be expected to have a profound effect on the electrical
activity of the brain, it has been suggested that information is stored in short-term memory
as reverberating electrical activity in the brain. As information passes into long-term
memory, on the other hand, it is stored in a more durable form.”
Identifions les idées commençant chaque phrase :
“Memory can be divided into two phases: short-term memory and long-term memory.
When an animal learns something this information first of all enters the short-term
memory where it will remain for a matter of minutes to hours. The experimental methods
used and the species of animal studied can affect the precise duration of short-term
memory. A number of agents including electro-convulsive shock (strong electric shocks
applied to the head), low temperature, coma and deep anaesthesia can disrupt information
Et maintenant ?
À ce stade, l’article devrait être à peu près terminé. Sa structure générale a été
bien réfléchie et il est écrit dans un style fluide et facile à suivre.
Du moins, c’est ce que vous croyez !
R É D I G E R U N A RT I C L E S C I E N T I F I Q U E 93
Comment juger la logique et le style objectivement
Vous avez maintenant un autre problème à résoudre. Ce problème, c’est que vous
connaissez tellement bien votre travail et ce que vous voulez en dire, que cet
excès de familiarité vous empêche de juger la logique et le style de votre article
de manière vraiment objective. Donc, vous avez besoin d’aide.
Les premières personnes auprès desquelles vous devez obtenir de l’aide sont vos
co-auteurs. Jusqu’ici, c’est vous qui avez pris la responsabilité principale pour la
rédaction de la première version de l’article. C’est donc maintenant leur tour de
prendre leurs propres responsabilités pour contribuer à la rédaction de l’article
en vous aidant pour les corrections finales. Et, étant donné que vous en savez
probablement plus qu’eux sur l’article et ce qu’il est censé apporter, vous devez
les guider pour que leur participation soit réelle et fructueuse et pas simplement
l’émission d’opinions qu’il vous incomberait ensuite de prendre en compte. Il n’y
a rien de plus frustrant à ce stade que des co-auteurs qui vous rendent votre texte
sans aucune correction de style. Cela indique qu’au mieux ils l’ont lu en le survolant
et au pire qu’ils ne l’ont pas lu du tout. Pour attirer leur attention, vous pouvez leur
préparer une liste des points à vérifier comme celle présentée page 95 qui, s’ils la
suivent, les incitera à réfléchir et donner leur avis sur tous les points importants
de chaque section de l’article. En bonus, cet exercice peut fournir des repères pour
discuter de passages sur lesquels les opinions de vos co-auteurs diffèrent de la vôtre.
Sans de tels repères, vous risquez de perdre beaucoup de temps. Vous remarquerez
que la liste suggérée page 95 couvre de nombreux points de structure et de style,
mais ne concerne pas la qualité scientifique du travail ni sa réalisation. L’essentiel
de la réflexion sur ces deux derniers aspects doit être effectuée dans la mesure du
possible avant de commencer la rédaction et de toute façon avant de discuter tout
désaccord de structure et de style. Essayer d’améliorer en même temps les aspects
scientifique, de structure et de style serait une tâche démesurée et menant à la
confusion. Au moment de cette étape de correction concertée entre co-auteurs, il
est préférable de vous mettre d’accord sur chaque aspect séparément : la science,
puis la structure et enfin le style.
Cependant, même vos co-auteurs peuvent être très familiers avec ce qui est dit dans
l’article ; dans ce cas, eux aussi assumeront à tort que ce qui leur paraît parfaitement
clair l’est également pour tout autre lecteur partout dans le monde. Idéalement,
il faudrait vous assurer qu’au moins une personne, qui n’a été impliquée ni dans
le travail ni dans la rédaction de l’article, vérifie qu’il est compréhensible et se lit
facilement. C’est la lecture critique d’un collègue, qui reste la meilleure façon de
vous assurer que votre article sera compréhensible pour les rapporteurs qui vont
l’évaluer avant sa publication et pour le reste du monde ensuite.
La difficulté de cette étape réside dans le fait que vos collègues sont généralement
occupés à autre chose, pour ne pas dire débordés, et n’ont pas de temps à dédier
à la révision d’un article entier dans lequel ils n’ont pas d’intérêt majeur, à part
peut-être celui de vous aider. Vous pouvez presque les entendre gémir lorsque vous
posez sur leur bureau un article d’une bonne trentaine de pages en leur demandant
de le lire d’un œil critique. Ils calculent mentalement que cela va leur prendre au
R É D I G E R U N A RT I C L E S C I E N T I F I Q U E 95
Étape 1. Est-ce un paragraphe ? Vérifiez la première phrase pour voir si elle
définit le thème du paragraphe et la dernière pour vérifier qu’il s’agit bien d’une
vraie phrase de conclusion. Assurez-vous que les autres phrases sont pertinentes
par rapport au thème annoncé et qu’elles contribuent au développement du
raisonnement vers sa conclusion.
Étape 2. Est-ce que les phrases s’enchaînent correctement ? Examinez les premiers
mots de chaque phrase et assurez-vous qu’ils comprennent des mots utilisés dans
la phrase précédente ou que ce sont des mots panneaux indicateurs qui relient le
reste de la phrase avec la phrase précédente.
Étape 3. Y-a-t-il des écueils ? Recherchez les mots et les expressions qui peuvent
distraire le lecteur en créant le doute, l’ambiguïté ou qui demandent du temps pour
être déchiffrés et qui vont donc freiner la compréhension du message. Assurez-
vous aussi que vos phrases ne sont pas trop longues.
Étape 5. Le texte dit-il bien ce que vous voulez dire ? Les quatre étapes précédentes
sont assez automatiques et peuvent être réalisées sans regarder de près le message
que vous voulez délivrer dans le paragraphe. Vous devez maintenant relire le
paragraphe corrigé pour vous assurer qu’il dit bien toujours ce que vous voulez.
Étape 6. La vérification finale de l’anglais. Maintenant que vous avez réalisé ces
cinq étapes de vérification, c’est le moment d’envisager de faire vérifier l’anglais
par une personne dont c’est la langue maternelle. C’est bien sûr inutile si vous
avez la chance d’être parfaitement bilingue ou si l’un de vos co-auteurs l’est ou est
anglo-saxon, auquel cas ce travail de vérification lui incombe tout naturellement.
En revanche, si vous n’avez pas cette chance, il est important de faire effectuer cette
révision. En effet, il est très rare pour une personne de pouvoir écrire parfaitement
dans une autre langue que la sienne, l’anglais dans le cas présent, même si son
niveau d’anglais est très bon, grâce par exemple à plusieurs années de séjour dans
un pays anglo-saxon. Idéalement, cette révision de style devrait être faite par
une personne familiarisée avec le style scientifique, pour respecter les besoins de
précision, de clarté et de concision indispensables à un bon article. Ce peut être
un chercheur anglo-saxon présent dans votre laboratoire, un collègue de votre
connaissance ou un traducteur privé que vous pouvez d’ailleurs choisir dans des
listes que fournissent les revues scientifiques. C’est en fait essentiellement cette
étape finale de correction de l’anglais qui représente un désavantage concret
pour les auteurs dont l’anglais n’est pas la langue maternelle par rapport à leurs
collègues anglo-saxons. Mais soyez bien conscient que ce désavantage, pour ne
pas dire cette épreuve, sera d’autant plus facile à surmonter que vous aurez fait
l’effort de fournir à votre correcteur un texte bien structuré, logiquement construit,
précis, et argumenté dans un style clair et concis.
R É D I G E R U N A RT I C L E S C I E N T I F I Q U E 97
à la revue dans son ensemble et pas individuellement aux articles qu’elle contient.
Par conséquent, arriver à publier dans une revue à fort impact un article qui ne
sera lu que par un nombre restreint de lecteurs de cette revue contribuera peut-être
à augmenter le budget des financements de l’année suivante, mais cela n’aidera
guère à améliorer la reconnaissance des auteurs par leurs pairs.
Souvenez-vous que la première raison pour écrire un article scientifique est
que le plus grand nombre possible de personnes le lisent, le comprennent et en
soient influencés. Ce principe devrait aussi être la clé pour choisir la revue la plus
appropriée pour votre article. Cherchez la revue qui a les meilleures chances d’être
lue par le plus grand nombre de personnes que vous souhaitez influencer. Vous
vous êtes déjà assuré que la majorité de ces personnes liront et comprendront
votre article par la manière dont vous l’avez organisé et grâce au style lisible dans
lequel vous l’avez rédigé. Donc, vous aurez rempli toutes les
conditions essentielles si vous choisissez des revues qui sont
lues par des gens qui lisent votre type d’article.
Cherchez la revue
Soumettre l’article à la revue
qui a les meilleures
Beaucoup de facteurs entrent en jeu pour faire un bon article
chances d’être scientifique et nous avons traité dans ce livre la plupart de
ceux objectivement identifiables. Mais il y a aussi des facteurs
lue par le plus
subjectifs, qui font qu’un article est bon pour un auteur et
grand nombre excellent pour un autre. L’un des facteurs les plus importants
est la formation scientifique de chacun des lecteurs, qui ont
de personnes
par conséquent des préférences différentes pour certains des
que vous souhaitez thèmes discutés ou pour l’emploi de certains mots plutôt que
d’autres tout aussi appropriés. C’est pourquoi l’article parfait
influencer
n’a jamais été écrit. Par conséquent, ne continuez pas pendant
des mois, voire des années, à demander à vos collègues de
corriger et recorriger votre article en attendant vainement la perfection. Lorsque
les corrections que vous recevez ou celles que vous apportez ne concernent que
des différences mineures d’opinion, sans rien changer aux faits, à la structure, au
style ou à la lisibilité de votre article, il est temps de l’envoyer à la revue que vous
avez choisie. Après avoir vérifié une dernière fois les références, les éventuelles
erreurs typographiques et que vous avez bien suivi les règles de la revue stipulées
dans le guide aux auteurs, envoyez-le.
Lorsque vous envoyez votre article, vous pouvez augmenter vos chances qu’il soit
bien perçu par l’éditeur de la revue en l’accompagnant d’une lettre de présentation
(covering letter des revues anglo-saxonnes) bien argumentée. Cette lettre doit dire
plus que « Voici un article que j’aimerais que vous considériez pour être publié dans
votre revue ». Lorsque vous avez choisi la revue, vous l’avez fait pour certaines
raisons. Par exemple, votre article peut complémenter d’autres travaux récemment
publiés dans la même revue, ou il peut ouvrir de nouvelles perspectives sur des
problèmes connus qui sont dans le champ d’intérêt de la revue. Une déclaration
en deux ou trois phrases expliquant à l’éditeur pourquoi vous pensez que cette
revue peut être le moyen de diffusion idéal de votre article pourrait aider l’éditeur
R É D I G E R U N A RT I C L E S C I E N T I F I Q U E 99
recherche douteuse qu’à une recherche de qualité. Pratiquement tous les auteurs
ont souffert à un moment ou à un autre de cet interminable délai exaspérant entre
la soumission d’un manuscrit et son acceptation pour publication à cause d’un
rapporteur en retard. Donc, si vous tombez sur un tel rapporteur lors de votre
première soumission d’article, soyez philosophe et acceptez tout cela comme
faisant partie d’une étape malheureuse mais nécessaire du processus de recherche.
La deuxième évaluation, capitale, de votre texte par l’éditeur vient lorsqu’il a reçu
les rapports des rapporteurs. Après une relecture de votre article à la lumière de
ces rapports, l’éditeur décide de son acceptabilité pour publication.
Si tous les rapporteurs disent que le travail est bon et que l’éditeur pense que le
style et la présentation sont bons, vous recevrez une lettre par courrier postal ou
par courrier électronique dans laquelle l’éditeur vous annonce que l’article est
accepté avec quelques corrections mineures et qu’il sera publié dans un volume
à venir de la revue. Si vous recevez une lettre de ce type, vous avez toutes les
raisons du monde pour fêter cet événement, parce que, de manière peut-être
un peu surprenante, ce genre de lettre est plutôt rare de nos jours. Il est plus
fréquent, même si c’est aussi une bonne nouvelle, de recevoir un courrier dans
lequel les rapporteurs, l’éditeur, ou les deux, proposent que l’article soit modifié
pour plusieurs raisons et que, si vous suivez ces recommandations, l’éditeur fera
une nouvelle évaluation de l’article. Ces révisions sont généralement qualifiées de
mineures ou de majeures en fonction de l’estimation par l’éditeur de la quantité
de travail que ces modifications impliquent.
Vous serez certainement déçu ou même en colère parce que les rapporteurs ont
trouvé des fautes, petites ou grosses, dans le travail sur lequel vous aviez réfléchi
avec tant de soin et que vous aviez construit si soigneusement. Pire encore, vous
aurez peut-être l’impression que les rapporteurs n’ont pas tout compris, alors
qu’ils sont supposés être des experts du sujet. C’est pourquoi c’est souvent une
bonne idée de se donner le temps de digérer la réponse de l’éditeur et de la mettre
en attente dans un tiroir pendant quelques jours, plutôt que d’envoyer une réponse
rapide et inappropriée. Pour bien évaluer la valeur des commentaires de l’éditeur
et des rapporteurs, il faut prendre en compte les rôles que ces acteurs ont à jouer
dans le processus de publication. Ils ne sont pas là pour s’assurer que votre article
va être rejeté, même si vous pourriez être tenté de le penser. Les éditeurs ont deux
tâches principales, qui consistent à assurer la parution régulière de la revue et
garantir sa qualité scientifique et rédactionnelle. Pour cela ils ont besoin de travaux
comme les vôtres, mais ils veulent que ces travaux soient de la plus grande qualité
que vous puissiez produire en concertation avec eux. Les éditeurs assument en
général totalement la responsabilité de la qualité littéraire et de présentation.
Toutefois, ils ne sont généralement pas experts dans le domaine précis de votre
article et pour cette raison ils choisissent des rapporteurs pour évaluer l’intérêt
et la qualité de la recherche que vous voulez publier. Ces rapporteurs sont le
plus souvent des chercheurs qui travaillent dans un domaine proche de celui de
votre article et il leur est demandé d’évaluer la méthodologie, les résultats et le
raisonnement scientifique. L’éditeur ne considère pas automatiquement que les
rapporteurs soient plus compétents que vous ; il les considère plutôt simplement
R É D I G E R U N A RT I C L E S C I E N T I F I Q U E 101
Mettez de côté votre envie d’argumenter que c’est vous qui avez raison et pas le
rapporteur. De toute façon, et malheureusement pour votre ego, vous vous rendrez
compte que dans la plupart des cas le rapporteur a raison et que si vous acceptez
sa critique, votre document s’en trouvera amélioré. Mais, de temps en temps, vous
rencontrerez un commentaire qui s’apparente à une manie ou un parti-pris et qui
selon vous n’améliore pas ou très peu votre travail. Il faut alors vous demander si
vous pouvez accepter la correction proposée par le rapporteur, bien que vous ne la
trouviez pas meilleure que votre texte original. Si c’est le cas, soyez pragmatique,
faites la correction et remerciez le rapporteur pour sa suggestion. De cette manière,
vous construisez votre propre crédibilité comme étant un auteur raisonnable et
non pas quelqu’un qui bondit devant des suggestions dont la plupart ont été faites
probablement en toute bonne foi. Cette crédibilité est importante, parce que votre
refus sera pris en compte plus sérieusement par l’éditeur lorsque vous ne serez
pas d’accord avec une recommandation dont vous pensez qu’elle compromettrait
le message scientifique que vous présentez. En bref, c’est votre intérêt d’éviter
tout commentaire qui pourrait résulter de votre agacement ou de votre colère et
d’accepter de bonne grâce les suggestions marginales et sans importance.
Pour rejeter l’avis d’un rapporteur, les bons éditeurs ne considèrent pas que les
rapporteurs sont plus intelligents que les auteurs lorsqu’il y a désaccord entre
eux. Au lieu de cela, ils pèsent le pour et le contre des arguments et prennent leur
décision seulement en fonction de cela. Ainsi, si un rapporteur vous dit : « Votre
introduction manque de substance parce qu’elle ne mentionne pas l’important
travail de Bidule (2007) », et que vous répondez quelque chose comme : « En
dépit de son importance pour d’autres aspects, le travail de Bidule de 2007 n’a
aucun rapport avec la justification de l’hypothèse que j’ai testée dans cet article.
Il romprait la logique si je l’incorporais », la plupart des éditeurs acceptera votre
argument sans plus de questions.
En résumé, étant donné que le sort de votre article dépend de votre réponse
à l’éditeur, assurez-vous qu’elle soit excellente. Traitez soigneusement tous les
points soulevés par l’éditeur et les rapporteurs, même les plus infimes. Préparez
tout aussi soigneusement un document listant comment vous avez traité chaque
commentaire, comme cela est suggéré plus haut (page 101), de façon à ce
que l’éditeur puisse l’utiliser comme liste de contrôle. Incluez cette liste dans
votre nouvel envoi de l’article après correction, ainsi qu’une courte lettre de
présentation et répondez aussi rapidement que vous pouvez. Mais donnez-vous
quand même le temps de bien réfléchir à vos réponses, surtout pour les points de
controverse. Souvenez-vous qu’en vous invitant à soumettre une version révisée
et en définissant les conditions qui rendraient l’article acceptable, l’éditeur a pris
l’engagement tacite de l’accepter si ces conditions sont remplies. Votre objectif
est donc qu’il soit aussi difficile que possible à l’éditeur de trouver une raison
pour ne pas tenir son engagement, en traitant tous les points qui ont été soulevés.
R É D I G E R E T C O M M U N I Q U E R AV E C D ’ A U T R E S S U P P O R T S S C I E N T I F I Q U E S 103
Le texte pour une présentation orale
à un séminaire scientifique
La publication de résultats dans une revue scientifique spécialisée à comité de
lecture est sans conteste l’un des objectifs majeurs de tout chercheur souhaitant
remplir sa fonction avec succès. Mais le développement d’une recherche originale
et efficace et sa diffusion dépendent également d’autres éléments très importants
qui ne peuvent pas être accomplis pleinement par la seule activité de publication
dans des revues spécialisées. Se faire connaître, établir des contacts et des
collaborations, échanger des idées, sont également des conditions importantes
pour la valorisation de votre travail. Pour atteindre ces objectifs, la participation à
des séminaires scientifiques ou des conférences, et plus encore la présentation de
vos résultats dans ces réunions sont indispensables. Comme pour un article dans
une revue spécialisée, la qualité de votre communication sera déterminante, qu’il
s’agisse d’une communication orale ou affichée sous forme de poster.
R É D I G E R E T C O M M U N I Q U E R AV E C D ’ A U T R E S S U P P O R T S S C I E N T I F I Q U E S 105
attende avec impatience pour noter chacune des révélations que vous êtes sur le
point de lui faire. Au lieu de cela, les participants sont peut-être en train de penser
que vous avez les cheveux en bataille, que vous avez l’air nerveux, qu’il fait trop
chaud ou que la session est trop longue. C’est votre premier obstacle. Vous pourriez
faire une entrée spectaculaire en vous prenant les pieds dans le fil du micro ou
en renversant le verre d’eau du président de séance sur ses genoux, mais il serait
difficile de maintenir le même niveau pour le reste de votre communication. De
telles actions unifieraient certainement les pensées de tout l’auditoire, mais pas
d’une manière qui l’encouragerait à faire attention à ce que vous dites. Les mots
restent votre outil principal et votre phrase d’ouverture est cruciale. Elle doit créer
un impact et, en même temps, inciter les gens à vouloir en entendre davantage.
Ne gâchez pas votre entrée par quelque chose comme :
« Le titre de ma présentation cet après midi est ‘L’effet du
facteur inhibiteur de la leucémie sur la synthèse de la protéine
du lait dans les cellules épithéliales de la glande mammaire
Vous ne pouvez chez la vache’. »
pas espérer que Un titre n’est pas l’annonce du thème général dont vous
allez parler mais une annonce précise du sujet que vous allez
vos auditeurs présenter et ce sont deux choses différentes. Si la personne qui
comprennent préside la session fait bien son travail, l’auditoire connaîtra déjà
le titre de votre présentation de toute façon.
des points précis
Une alternative serait de commencer en annonçant tout de
sans avoir une suite un détail tel que :
idée d’ensemble « Suite à des études très complètes de la mamelle chez la vache
du problème en 2006, Trucmuche et ses collaborateurs ont conclu que la
production de protéines du lait par les cellules épithéliales peut
être inhibée sous certaines conditions… »
Vous ne pouvez pas espérer que vos auditeurs comprennent des points précis sans
avoir une idée d’ensemble du problème. Mis à part le type d’auditeur compulsif
qui ne veut pas perdre une seule miette d’aucune présentation du congrès,
pratiquement tout le monde risque de retomber instantanément dans son état de
somnolence digestive avec une entrée en matière aussi pointue. Combien plus
attrayante serait la formule suivante :
« Cet après-midi, je vais vous montrer que le facteur inhibiteur de la leucémie
inhibe la production de lait et de protéines dans la glande mammaire chez la vache
et qu’en bloquant son activité, nous pouvons augmenter la production de lait ».
Non seulement la phrase est plus informative, mais en plus elle annonce aux
auditeurs ce à quoi ils doivent s’attendre. C’est un résumé de toute la présentation
en une seule phrase.
Par conséquent, avant de rédiger votre communication, représentez-vous l’idée
d’ensemble de votre travail. Elle constituera votre message principal. Ensuite,
imaginez l’annonce la plus spectaculaire, stimulante ou intellectuellement
provocante que vous pouvez honnêtement dire à son propos.
R É D I G E R E T C O M M U N I Q U E R AV E C D ’ A U T R E S S U P P O R T S S C I E N T I F I Q U E S 107
« J’interprète cela comme… »
au lieu de « Cela semble vouloir dire que… »
Ce style personnel aide vos auditeurs à vous imaginer, la personne qu’ils ont
devant eux, en train de vous frayer votre chemin au cours de votre travail et votre
raisonnement, ce qui renforce le message que vous êtes en train de leur transmettre.
Un autre moyen de soutenir et retenir l’attention est d’inclure un peu d’humour dans
votre exposé. Cela allège une session chargée et si vous pouvez inclure avec succès
une blague en début de votre exposé, vous maintiendrez au moins l’attention de
certaines personnes parce qu’elles en attendent une deuxième. Malheureusement,
tout le monde n’est pas doué pour raconter des blagues et tous les auditoires ne
répondent pas de façon prévisible à une plaisanterie. De plus, un humour forcé est
pire que tout. Les anecdotes du style de « Connaissez-vous la blague du… » ou « Ça
me rappelle celle du boucher unijambiste…. » sont à éviter absolument, parce qu’elles
annoncent justement que vous allez dire une blague et que vous vous attendez à
ce que votre auditoire rie à la fin. Cela peut vous conduire parfois à une situation
très inconfortable si la blague tombe à plat. En revanche, les bons orateurs dans les
réunions scientifiques développent leurs plaisanteries par de très légères variations
du texte sérieux et s’appuient sur des remarques ou des formulations de phrase
inattendues plutôt que sur des blagues prévisibles. De cette manière, l’humour ne
gâche pas ou peu de temps et augmente beaucoup l’attention, quand il atteint son
but. Si cela ne fonctionne pas, ce qui arrive parfois avec un auditoire apathique ou
somnolent, vous pouvez continuer sans même indiquer que vous vous attendiez
à une réaction. Si vous avez commencé avec une introduction du style de « Est-ce
que vous connaissez celle de… », vous ne pourrez pas éviter d’être embarrassé si
l’auditoire ne répond pas à votre blague.
R É D I G E R E T C O M M U N I Q U E R AV E C D ’ A U T R E S S U P P O R T S S C I E N T I F I Q U E S 109
être illustrés et clarifiés en donnant des exemples précis pour illustrer l’impact
de ces généralisations, particulièrement si ces exemples parlent aux auditeurs.
Lors de votre exposé, vous aurez très certainement des documents audiovisuels
pour vous aider, comme un diaporama contenant des photos, des graphiques et
des tableaux, ou même du matériel qui peut être utilisé pour une démonstration
visuelle et gestuelle théâtrale. Tous ces outils vous permettent de renforcer votre
argument tout en donnant à vos auditeurs le temps de se mettre au même niveau
de raisonnement que vous, sans pour autant avoir à vous répéter.
Les orateurs expérimentés deviennent habiles à évaluer comment réagit leur
auditoire à ce qui est dit et y prêtent attention. Quand ils s’aperçoivent que
l’attention commence à baisser dans l’assistance, ils utilisent cela comme signal
pour passer au point important suivant. À l’inverse, s’ils jugent que les auditeurs
sont encore en train d’assimiler l’information présentée et que
cela nécessite plus de temps, ils ralentissent pour leur en donner
le temps avant de passer au point suivant. Ralentir ou accélérer
votre débit, bien sûr en restant dans des limites raisonnables,
Personne ne vous
vous permet de garder le rythme de votre présentation en
critiquera si vous harmonie avec la capacité de l’assistance à le suivre.
lisez. Par contre, Tout cela pourrait suggérer que votre présentation devrait
être une affaire d’improvisation adaptée en fonction de votre
on le fera sans
estimation de l’auditoire plutôt qu’une structure préétablie. Ce
doute si vous n’est pas du tout le cas. Pour que votre exposé ait de bonnes
donnez l’impression chances d’être réussi, il doit être soigneusement structuré et
présenté en respectant cette structure aussi fidèlement que
que vous le faites ! possible. Il n’y a pas de problème à faire des petits ajustements
pour tenir compte de l’humeur et des capacités de votre
auditoire, mais des envolées fantaisistes qui vous viennent à
l’esprit pour la première fois au milieu de votre présentation sont des recettes
potentielles de catastrophe. Vous ne pouvez jamais être sûr de combien de temps
vous allez avoir besoin pour les mener à bien et vous saurez encore moins quel
va être leur effet sur vos auditeurs. De plus, une fois que vous aurez abandonné
la structure que vous aviez soigneusement mise au point, cela peut devenir un
cauchemar pour y revenir. Même si vous avez admiré un orateur particulièrement
doué qui ne semblait pas avoir de notes et qui paraissait improviser tout son
exposé, ne vous y trompez pas. Si l’exposé était bon, il avait probablement été
préparé et répété de nombreuses fois pour en faire finalement l’exposé brillant
que vous avez apprécié.
Par conséquent, suivez votre scénario, mais soyez conscient aussi que l’impact que
vous aurez sera diminué s’il devient évident pour l’auditoire que vous lisez et que
vous dépendez d’un scénario préétabli. Une stratégie est de répéter votre exposé et
de le connaître par cœur, de telle sorte que vous puissiez le délivrer sans paraître
du tout dépendre de vos notes. D’un autre côté, cela peut être risqué de n’avoir
aucune note, parce que si vous n’avez aucun support de secours, vous devenez
vulnérable à la moindre défaillance de mémoire ou de concentration. Une option
plus sûre est d’avoir vos notes sous la main. Personne ne vous critiquera si vous
R É D I G E R E T C O M M U N I Q U E R AV E C D ’ A U T R E S S U P P O R T S S C I E N T I F I Q U E S 111
sur l’écran. Vous allez vous apercevoir qu’il faut 5 à 10 secondes avant que les
premières personnes se rendent compte qu’elles sont en train de lire en silence.
Une alternative est que vous disiez quelque chose de totalement absurde pendant
le temps mort ; il y a de bonnes chances que personne ne s’en aperçoive ! Vous
pouvez utiliser le temps mort pour lire vos notes en silence sans être remarqué ou,
si le silence vous incommode, vous pouvez en profiter pour donner des détails
marginaux sur la diapositive que l’assistance commence à regarder, comme la
description des axes d’un graphique ou des variables d’un tableau. Quel que soit
votre choix, rappelez-vous que ce n’est pas le moment pour délivrer les messages
clés de votre exposé, ni même le message clé de la diapositive que vous êtes en
train de présenter. Pour faire cela, attendez que l’assistance soit revenue en mode
d’écoute.
Tableau 3. Différences de structure entre un texte préparé pour une présentation orale à une
conférence et le texte de cet exposé à publier dans les comptes rendus de cette même conférence.
Phrase d’ouverture Essentiel que cette phrase ait le Peut être moins conclusive et
plus d’impact possible plus introductive
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Ensuite l’orateur n’y gagne rien, bien au contraire ! Les orateurs qui sont satisfaits
d’avoir placé un ou deux faits supplémentaires en grappillant quelques minutes
devraient y réfléchir à deux fois.
En fait, l’une des premières règles pour la personne présidant une réunion est
précisément de gérer la session en respectant l’horaire. Les bons présidents de
séance sont sans pitié jusqu’à en être intransigeants envers des orateurs qui
cherchent à déborder sur leur temps de parole. De tels présidents ne permettent
pas aux orateurs de continuer même quelques secondes au-delà du temps prévu.
La tragédie, c’est que c’est la fin de la présentation qui est supprimée, c’est-à-dire
la conclusion finale avec le message à ramener chez soi ou, en d’autres termes, la
partie dont l’auditoire est supposé se souvenir. Et c’est bien sûr la partie essentielle
de tout l’exposé. Le résultat de cette sanction sera que la structure de l’ensemble de
l’exposé ne sera plus perceptible et la présentation sera inévitablement un échec.
Mais vous pouvez aussi avoir le cas inverse. Que va-t-il se passer si l’orateur
s’est rendu compte que le président de séance n’est pas très strict et en profite
pour continuer opiniâtrement pour finir sa présentation malgré les injonctions du
président de séance ? Le résultat sera le même. À partir du moment où le président
commence à s’approcher de l’orateur avec l’intention évidente de terminer l’exposé,
l’assistance réalise qu’il va y avoir du spectacle. Elle commence à se concentrer sur
la stratégie du président pour faire taire l’orateur et sur les réactions de ce dernier.
Est-ce qu’ils vont se fâcher ? Est-ce que l’orateur va faire semblant de ne pas voir
le président ou ignorer ses instructions ? Mais le point important dans tout cela,
c’est que quelle que soit l’information nouvelle que l’orateur peut arriver à délivrer,
personne ne l’écoute vraiment et elle sera perdue. Un désordre inopiné réveillera
peut-être l’assistance, mais pas pour les bonnes raisons.
Par conséquent, les raisons pour respecter votre temps de parole sont évidentes
et il y a des moyens simples pour y arriver. Premièrement, calculez le temps
maximal dont vous disposez. Comptez 10 % de moins que ce qui est annoncé
dans le programme, duquel il faut retrancher encore 30 secondes. En d’autres
termes, pour un exposé de dix minutes vous devez prévoir un temps de parole
réel de huit minutes et demie. Les 10 % restants sont à prévoir pour les temps
morts entre orateurs, le temps de présentation par le président, les ajustements de
matériel comme l’installation du micro de l’orateur ou l’ouverture de votre fichier
de présentation et autres détails du même ordre. Les 30 secondes permettent de
couvrir le fait que les orateurs parlent généralement plus vite quand ils répètent
dans leur salle de bain que dans un grand amphithéâtre devant une assistance
nombreuse. Si, en faisant ces ajustements, vous avez surestimé la durée de
votre exposé et que vous prenez moins de temps que prévu, personne ne s’en
rendra compte excepté le président, car personne d’autre ne vous chronomètre.
Et, au moins, vous n’aurez offensé personne et le président vous sera toujours
reconnaissant d’avoir respecté l’horaire. En revanche, si vous sous-estimez votre
temps de parole et que vous le dépassez, ne serait-ce que de quelques secondes,
vous courrez le risque de discréditer tout votre exposé.
Après avoir décidé de combien de temps vous disposez, il est pratique de faire
une liste des diapositives que vous pensez présenter, avec un titre qui résume
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de discuter ensuite avec vous individuellement de votre exposé ou d’autres
aspects de votre travail. La condition primordiale que votre communication doit
remplir absolument, c’est d’être stimulante et intéressante. C’est pourquoi votre
priorité doit être de présenter votre idée principale efficacement et de laisser une
bonne impression.
R É D I G E R E T C O M M U N I Q U E R AV E C D ’ A U T R E S S U P P O R T S S C I E N T I F I Q U E S 117
partisans et leurs détracteurs. Mais en tout état de cause, aujourd’hui les posters
sont un mode de diffusion de l’information très populaire dans la communication
scientifique moderne.
Attirer le regard
Nous voyons parfois des posters qui trahissent la main de graphistes professionnels ;
ils attirent invariablement l’attention comme le feraient des publicités bien pensées.
Toutefois, la plupart des auteurs de posters scientifiques n’ont pas accès à une
aide aussi spécialisée et doivent recourir à des moyens moins professionnels et
généralement moins coûteux pour séduire leur assistance. Ceci ne devrait pas être
un obstacle majeur. En définitive, attirer l’œil est important, mais ce n’est pas ce qui
incite les autres chercheurs à s’arrêter et lire le poster. Son contenu et la présentation
astucieuse de ce contenu sont ce qui provoque la lecture. De façon très générale, la
plupart des scientifiques ont assez d’intuition pour s’assurer que la présentation de
leur travail est suffisamment agréable pour que la plupart des passants s’y arrêtent.
R É D I G E R E T C O M M U N I Q U E R AV E C D ’ A U T R E S S U P P O R T S S C I E N T I F I Q U E S 119
Dans un chapitre précédent concernant les articles écrits, nous avons vu que pour
souligner les points importants il n’y avait pas beaucoup d’options, mises à part la
position et la taille des énoncés. La conception des posters n’est pas limitée par la
plupart de ces contraintes. Vous pouvez jouer sur de nombreux éléments pour inciter
le spectateur à jeter un deuxième coup d’œil. Cela va du choix des couleurs, ou
même l’utilisation d’une couleur de fond au lieu du blanc classique, à la répartition
et au contenu des photographies et des graphiques, en passant par l’utilisation de
toute une palette de polices de caractères ou de différents diagrammes.
Mais, avant cela, nous devons faire attention à nous débarrasser d’un certain nombre
d’éléments qui rendent les posters désagréables. Le défaut de loin le plus courant
dans les posters est l’excès d’information. Une présentation qui ressemble à une page
agrandie d’un livre de référence spécialisé n’est visuellement pas du tout attrayante.
Comme l’information ne peut évidemment pas être lue en 30 à 60 secondes, le plus
souvent les gens ne vont même pas essayer de le faire. Ils le feront d’autant moins
qu’ils sont impatients de jeter aussi un œil à tous les autres posters affichés, ou au
moins à tous ceux qu’ils ont sélectionnés. Un autre facteur qui anéantit toute envie de
lire se trouve dans les posters dépourvus d’imagination et composés de différentes
sections, généralement les mêmes que celles d’un article écrit (introduction, matériel
et méthodes,…), chacune imprimée sur une feuille de format standard (21 x 29,7 cm)
et collée sur le panneau dans l’espace disponible. L’effet est encore pire si le texte et
l’information présentés n’ont pas de relation directe avec le message que le poster
devrait transmettre. Ces défauts rendent la lecture très ardue pour un lecteur qui
se tient dans une pièce bruyante au milieu de plusieurs centaines de congressistes.
Un troisième défaut très courant chez les auteurs de posters est l’utilisation d’une
taille de caractère trop petite pour être lue à plus d’un mètre. La présence d’un seul
de ces trois défauts suffit pour empêcher que le poster ait une chance raisonnable
d’attirer le regard de l’assistance.
C’est sur ce point que des décisions majeures doivent être prises. Vous devez
condenser toute l’information scientifique importante de votre poster en un texte
qui puisse être lu en 10 secondes au plus. En pratique, cela correspond à environ
trois phrases qui doivent ressortir suffisamment pour être détectées lors du premier
examen visuel. Ces phrases n’ont pas besoin d’être obligatoirement ensemble et elles
peuvent être renforcées par des informations additionnelles moins proéminentes sur
lesquelles le lecteur peut revenir plus tard. Mais elles doivent représenter le message
essentiel de la communication. En d’autres termes, ce texte peut être constitué
de titres bien élaborés et judicieusement placés, ou de deux ou trois phrases qui
résument l’ensemble de l’histoire que vous voulez raconter. Avec cette règle simple à
l’esprit, il devient évident que vous devez ignorer complètement plusieurs éléments
d’un article écrit pour une revue scientifique, y compris sa structure habituelle.
Comme nous l’avons déjà vu, des titres comme introduction, matériel et méthodes,
résultats et discussion sont presque toujours inappropriés dans un poster. Ils ne
contiennent aucune information réelle et les lecteurs n’ont tout simplement pas le
temps ou l’envie de lire le texte placé sous ces titres. Leur fonction dans un article
R É D I G E R E T C O M M U N I Q U E R AV E C D ’ A U T R E S S U P P O R T S S C I E N T I F I Q U E S 121
revanche, maintenant que vous avez établi le contact vous pouvez regagner ce
terrain et, de plus, vous n’êtes pas limité seulement à la conversation. Vous pouvez
avoir un document écrit qui fournit plus d’information que le poster lui-même et
vous pouvez aussi inclure d’autres documents que vous aimeriez transmettre à un
collègue intéressé par votre sujet. Vous pouvez même distribuer
des tirés à part de vos articles les plus récents pour renforcer
votre présent message. Le point le plus important dont vous
…ce n’est pas juste devez être conscient est que la raison réelle de présenter votre
poster est d’arriver à engager la discussion avec des collègues
une question de intéressés par votre travail. Par conséquent, ce n’est pas juste
préparer un poster une question de préparer un poster accrocheur, original et
informatif. Vous devez aussi être capable d’en parler.
accrocheur, original
Si vous vous êtes bien préparé pour cette phase en ayant des
et informatif. Vous documents additionnels ou en ayant préparé et répété les
devez aussi être réponses aux questions et commentaires les plus probables,
vous atteindrez alors l’objectif de vous faire pleinement
capable d’en parler. apprécier, vous et votre travail, à la conférence où vous
présentez votre poster.
R É D I G E R E T C O M M U N I Q U E R AV E C D ’ A U T R E S S U P P O R T S S C I E N T I F I Q U E S 123
Figure 2. Un poster attractif capable de faire passer son message principal en quelques instants.
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À première vue, tout cela peut sembler une tâche écrasante. Après tout, un article
de synthèse ne consiste pas à discuter une information nouvelle ou une expérience
et ne contient pas de données originales. En fait, les articles de synthèse qui
présentent des informations nouvelles sous forme de résultats non publiés ou
de communications personnelles peuvent être très décevants et scientifiquement
inacceptables. De telles informations ne permettent d’avoir accès aux données
et d’évaluer la méthodologie utilisée pour obtenir les résultats. Si l’auteur juge
indispensable d’utiliser des résultats non publiés dans un article de synthèse, ce
qui peut arriver, il a l’obligation scientifique de fournir assez de détails pour que
les données puissent être vérifiées par d’autres.
Par conséquent, dans la mesure du possible, le rédacteur d’un article de synthèse
utilisera les données de travaux déjà publiés dans des articles antérieurs et
développera des arguments à partir de ces données. C’est sur ce processus que
repose une bonne synthèse. Chacun de ces articles contient ses propres résultats
et conclusions, mais ces conclusions ne prenaient en compte que la littérature
disponible lorsque l’article avait été rédigé. L’auteur d’une synthèse a l’opportunité
d’examiner de façon plus globale les informations tirées de tous les articles qu’il a
rassemblés et d’en tirer des conclusions et des idées novatrices, inaccessibles aux
auteurs des différentes publications prises individuellement. Ces conclusions et ces
idées peuvent être très variées. Elles peuvent inclure des réflexions nouvelles sur le
sujet scientifique concerné, des suggestions pour la résolution de conflits existant
dans la littérature, des propositions de recherches futures, des implications pour
des innovations appliquées ou encore des applications dans d’autres secteurs de
recherche. En résumé, les articles de synthèse remplissent une fonction importante
dans la littérature scientifique que les articles traitant de résultats originaux ne
peuvent pas accomplir.
R É D I G E R E T C O M M U N I Q U E R AV E C D ’ A U T R E S S U P P O R T S S C I E N T I F I Q U E S 127
est la plus réaliste parce que… », vous n’apportez aucune information ou aucune
idée novatrice, mais vous ajoutez quelque chose à l’interprétation de données ou
de théories existantes. Vous remarquerez cependant l’importance de la conjonction
« parce que » dans chaque clause introductive. La présentation de matériel sous
forme argumentée d’idées, d’opinions et de jugements, marque la personnalité
et l’habileté scientifique de l’auteur de l’article de synthèse. Nous pouvons donc
dire que l’information n’est pas originale, étant donné qu’elle a déjà été publiée
ailleurs, mais l’article est néanmoins original et intéressant parce qu’il s’appuie sur
ces données pour élaborer de nouveaux points de vue.
La bonne nouvelle est qu’il est assez facile d’arranger et de présenter votre
information de manière à générer cette nouveauté pour informer et satisfaire vos
lecteurs. Il suffit de se servir de l’impact qu’un paragraphe
bien construit permet de produire. Lorsque vous préparez
votre article de synthèse, la première étape est de vous poser
La présentation de la question « de quoi vais-je parler ? ». Pour y répondre, le
plus simple est de faire un plan, un peu comme une table des
matériel sous forme
matières, qui énonce les différents points que vous allez aborder
argumentée d’idées, et de les organiser en une suite logique. En plus, lors de cette
phase poussez votre effort de réflexion un peu plus loin. Passez
d’opinions et de
à l’étape suivante qui consiste à formuler la conclusion que vous
jugements, marque voulez tirer pour chacun de ces sujets ou des éléments qui les
composent. Si vous notez ces deux informations de base, à savoir
la personnalité
le sujet et le message que vous voulez que le lecteur retienne,
et l’habileté vous avez l’essentiel de ce dont vous avez besoin pour écrire tout
votre article. Maintenant, vous pouvez attribuer un paragraphe
scientifique de
à chaque sujet et les deux informations que vous avez notées à
l’auteur de l’article son propos deviennent les phrases d’ouverture et de conclusion
de ces paragraphes : le sujet est votre thème d’ouverture et le
de synthèse
message votre conclusion. En bref, vous avez fait le plus gros du
travail de réflexion pour votre article. Vous n’avez pas encore
sous les yeux les mots pour le milieu de chaque paragraphe, c’est-à-dire ce qui
constitue le développement logique. Mais maintenant que vous avez clairement
formulé son thème et sa conclusion, il vous sera très facile de trouver les mots
qui vous manquent pour expliquer pourquoi votre conclusion est raisonnable. Ce
sera facile non seulement parce que vous avez déjà fait la plus grande partie de
la réflexion quand vous avez énoncé votre conclusion, mais aussi parce que vous
vous concentrerez uniquement sur la justification de cette conclusion et rien d’autre,
jusqu’à ce que vous passiez au paragraphe suivant. Savoir où vous allez lorsque
vous écrivez est un excellent moyen pour ne pas vous perdre.
La bibliographie
Dans la mesure du possible, vous devez présenter toute la littérature pertinente
relative au thème de votre synthèse, ou tout au moins fournir une piste bibliographique
de références en citant d’autres articles de synthèse qui contiennent ces références.
Nous savons tous que certaines données scientifiques sont plus fiables que d’autres
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une opinion plutôt que l’autre. La façon d’aborder le problème est de reconnaître que
vous, et la littérature, êtes dans le doute, au moins pour le moment. Les lecteurs, qui
risquent aussi d’être troublés de toute façon, seront bien plus à l’aise s’ils savent dès
le départ que le matériel que vous leur présentez est dans une zone d’incertitude.
Si vous n’avertissez pas les lecteurs, ils en déduiront que leur incapacité à tirer une
conclusion claire est de votre faute. Parfois, dans de tels cas une des approches les
plus fructueuses est de proposer dans votre article une expérience qui pourrait
tester laquelle des deux opinions se rapproche le plus de la réalité.
À l’inverse, vous trouverez parfois que les seules informations disponibles sur
un sujet donné viennent d’une ou plusieurs sources peu sûres et dans lesquelles
vous n’avez pas confiance. Là encore, vous devez être honnête et dire clairement
que les arguments que vous allez développer sur le sujet reposent sur la meilleure
information disponible, laquelle est sujette à caution. Un parfait exemple de ce
type de source est celui des résultats non publiés ou autres
observations personnelles annoncés dans une discussion ou dans
un article de synthèse. Dans ce cas, des chiffres sont cités sans
En tant que que leur valeur ait été évaluée par des pairs. Si vous utilisez de
rédacteur d’une telles sources, il est important de signaler qu’elles ne sont pas
confirmées et restent donc sujettes à caution. Ainsi, les lecteurs
synthèse, vous avez peuvent ajuster leur interprétation de votre raisonnement. Cette
un rôle vital honnêteté permet aussi que votre réputation n’en pâtisse pas si
une expérience ultérieure démolit ces résultats non publiés et
à jouer dans l’étape du même coup la tentative d’interprétation que vous proposez.
d’interprétation. Vous vous posez peut-être la question « Pourquoi proposer
une quelconque interprétation si les données sont de mauvaise
qualité ? ». La réponse est que la science progresse par l’enchaînement d’une
série d’événements : d’abord en s’appuyant sur les données disponibles, aussi
mauvaises soient-elles, puis en les interprétant et en testant cette interprétation,
ce qui fournit finalement des informations plus sûres. En tant que rédacteur d’une
synthèse, vous avez un rôle crucial à jouer dans l’étape d’interprétation. Si vous ne
remplissez pas ce rôle, ça ne vaut probablement pas la peine d’écrire la synthèse.
R É D I G E R E T C O M M U N I Q U E R AV E C D ’ A U T R E S S U P P O R T S S C I E N T I F I Q U E S 131
ce qui peut faire un scoop. Le risque est que l’attrait du sensationnel l’emporte
sur la vérité. Et pour empirer les choses, beaucoup de scientifiques sont sur la
défensive lorsqu’il leur est demandé de fournir des informations aux journalistes,
parce qu’il leur est déjà arrivé d’être mal cités ou mal interprétés, au point d’en être
embarrassés ou offensés. Deuxièmement, les chercheurs qui écrivent des articles
s’efforcent d’être exacts et de respecter les justifications scientifiques, y compris
sur des détails marginaux, ce qui le plus souvent diminue l’intérêt du message
principal. Les chercheurs sont entraînés à être prudents et à
ne pas pousser trop loin l’interprétation de leurs résultats.
Troisièmement, la plupart d’entre eux, à la différence des bons
…les chercheurs journalistes, ont du mal à juger ce qui, dans leurs résultats,
est susceptible d’intéresser des lecteurs non spécialisés. Pour
doivent fournir l’une ou plusieurs de ces raisons, la valeur réelle du travail
des textes éducatifs peut ne jamais apparaître clairement.
Quoi qu’il en soit, il devient de plus en plus fréquent que les
pour le public
chercheurs aient à fournir des textes éducatifs pour le public
non scientifique non scientifique et le plus sûr et le mieux est qu’ils le fassent
eux-mêmes. Le problème est que les chercheurs, qui peuvent
et le plus sûr et le
communiquer entre eux généralement sans difficulté, sont
mieux est qu’ils le souvent mal à l’aise lorsqu’ils doivent expliquer leur travail
à une audience sans formation scientifique. Il y a une raison
fassent eux-mêmes.
logique à ce malaise et la comprendre aide beaucoup à réduire
le fossé entre les scientifiques et leur public.
R É D I G E R E T C O M M U N I Q U E R AV E C D ’ A U T R E S S U P P O R T S S C I E N T I F I Q U E S 133
méthodes, des résultats et une bonne discussion, brillante et incisive. Ils ont
l’habitude de la structure d’un article scientifique et ils savent exactement où ils
doivent chercher l’information dont ils ont besoin. C’est pour cela que ces articles
sont des articles scientifiques. Quand des non-scientifiques essaient de lire les
mêmes articles, ils n’ont pas la culture professionnelle qui leur permettrait de tirer
parti de leur structure ni, dans la plupart des cas, de comprendre leur contenu.
Par conséquent, pourquoi des non-scientifiques se donnent-ils la peine de lire des
informations scientifiques ou des faits qui s’y rapportent ? La raison est simple : la
science a une influence sur la vie, le travail et les intérêts de pratiquement tout le
monde. En fait c’est une caractéristique inhérente à tous les humains, scientifiques
ou pas, de chercher à comprendre le comment et le pourquoi des choses et des
êtres. Cette curiosité peut être vue sans doute comme la prolongation chez l’adulte
de la préoccupation incessante des enfants à demander « pourquoi ? », comme le
signalait le Prix Nobel de physique Georges Charpak. Et c’est dans cette curiosité
que réside la clé d’une transition réussie entre le monde des scientifiques et celui
des non-scientifiques dans la communication, qu’elle soit écrite ou orale. Vous
devez identifier ce qui a des chances d’attirer leur intérêt. Le lecteur doit être incité
à se jeter dans la lecture et ensuite y être maintenu à mesure que sa lecture avance.
Voici quelques exemples de ce qui peut attirer un lecteur profane :
Le sujet. Certains sujets sont d’intérêt universel et toujours d’actualité. La liste
est longue et inclut les sujets qui informent sur des économies d’argent ou qui
divertissent, comme les sports et les arts, ou encore qui traitent de questions
qui nous préoccupent, comme le réchauffement de la planète, pourquoi nous
nous comportons comme nous le faisons, ou encore les nouvelles possibilités de
combattre certaines maladies.
Le moment. Certains sujets peuvent être très populaires s’ils sont proposés aux
lecteurs à des moments bien précis. Un article sur un nouveau type de sous-
vêtements protégeant du froid sera plus lu en hiver qu’en été, de même qu’un
article sur les moyens de lutter contre les rhumes. Un article sur une nouvelle
variété de blé est le plus souvent pertinent juste avant la saison des semis
plutôt qu’à celle de la récolte. Un article sur le réchauffement planétaire aura
probablement plus d’impact en été qu’en hiver.
La présentation de la science avec une dimension humaine. Les lecteurs peuvent
apprécier la composante humaine d’une découverte scientifique : les joies d’un
succès, la déception liée à un échec, le dur travail d’un chercheur en solitaire.
La curiosité. Souvent les lecteurs sont attirés par une nouvelle approche scientifique
d’un problème récurrent, ou par une réponse à quelque chose qui restait jusque-là
un mystère, ou encore par l’explication d’un événement de la vie quotidienne.
La longueur de l’article. Le fait qu’un article soit lu ou pas dépend souvent de
sa longueur et de l’endroit et du moment où il est possible de le lire. Par exemple
un long article peut être approprié pour un journal de fin de semaine, mais sera
évité par les utilisateurs réguliers des transports en commun s’il est publié dans
le quotidien du matin. L’article n’aura généralement pas de succès s’il ne peut
pas être lu en une seule fois.
R É D I G E R E T C O M M U N I Q U E R AV E C D ’ A U T R E S S U P P O R T S S C I E N T I F I Q U E S 135
La longueur de l’article est souvent imposée. Dans la grande majorité des cas,
qu’il s’agisse d’une page, une demi-page, 500 mots ou 1 000 mots, cela veut dire
exactement cette longueur et pas un mot de plus. Par conséquent, la concision est
aussi une obligation. Généralement, lorsque vous commencez à écrire, vous avez plus
de choses à dire que de mots ou de place pour le dire. Pour obtenir un bon résultat,
vous devez d’abord décider ce que vous pouvez vous permettre de supprimer du
matériel que vous aviez sélectionné au départ. Cela fait, vous devez ensuite rédiger
ce que vous avez choisi de dire de la manière la plus concise possible. Dans la presse
populaire, proposer un texte qui dépasse un peu la limite du nombre exact de mots
annoncée ne marche généralement pas et vous pourriez vous retrouver à devoir
supprimer une ou deux phrases, ou à devoir changer la structure d’une partie de
votre texte pour respecter exactement les limites imposées. Pire encore, si vous ne le
faites pas, un éditeur de la revue pourrait le faire à votre place sans vous demander
votre avis et tronquer ou déséquilibrer complètement votre article.
Révision finale
Quand vous avez fini d’écrire et que vous avez vérifié les fautes de frappe, la
grammaire et l’orthographe, vérifiez aussi si l’article est bien adapté à ses lecteurs.
Pour cela, vérifiez simplement qu’il remplit bien cinq critères importants.
Il doit être :
• attractif et alerte pour gagner l’attention du lecteur dès le départ ;
• brillant et pertinent pour le lecteur ;
• informatif, pas seulement par son propre contenu, mais aussi en dirigeant
le lecteur vers des informations complémentaires ;
• précis dans ce qu’il présente et faisable dans ce qu’il propose ;
• de la bonne longueur.
Après vous être assuré que ces critères sont bien remplis, une dernière étape, si
vous en avez l’opportunité, est d’en faire vérifier la lisibilité par un lecteur naïf.
Mais contrairement à un article scientifique spécialisé, choisissez un lecteur non
scientifique plutôt qu’un collègue et surtout pas un spécialiste du sujet.
R É D I G E R E T C O M M U N I Q U E R AV E C D ’ A U T R E S S U P P O R T S S C I E N T I F I Q U E S 137
La thèse
Tous les éléments qui caractérisent les bons articles scientifiques et les bons
articles de synthèse se retrouvent dans les bonnes thèses. Celles-ci sont cependant
généralement beaucoup plus longues que les articles et cette longueur est souvent
source de problèmes. Les thèses sont le témoin écrit d’un effort soutenu de
recherche qui a pris un à trois ans selon de type de thèse, mais parfois aussi
cinq ans ou plus. Le plus souvent, les thèses contiennent de manière imposée une
revue de la littérature en plus des données relatives à la recherche. Le problème
est, comme toujours dans des documents de cette taille, celui de la cohérence. Ce
n’est pas une difficulté dans le cas d’une thèse d’un an comme pour un master,
qui rapporte habituellement les résultats d’une seule expérience. Dans ce cas,
la structure de la thèse est fondamentalement la même que celle d’un article de
recherche (l’expérience), précédée par une revue de la littérature. En revanche, une
thèse d’université, ou un PhD (Philosophy Doctorate), qui a duré plusieurs années
peut inclure plusieurs expériences qui sont sources potentielles de plusieurs
articles scientifiques spécialisés et elle sera par conséquent plus complexe. Mais
quelle que soit leur durée, les thèses peuvent être homogénéisées et structurées de
façon cohérente, ce qui les rend faciles à lire, en utilisant comme thème directeur
l’élaboration, la justification et la mise à l’épreuve de l’hypothèse.
R É D I G E R E T C O M M U N I Q U E R AV E C D ’ A U T R E S S U P P O R T S S C I E N T I F I Q U E S 139
En absence de règles bien définies à propos de l’ampleur du champ de littérature à
couvrir, il est parfois difficile de décider la quantité de matériel bibliographique à
inclure. Une stratégie qui porte ses fruits est de rassembler toute la littérature qui
a conduit au développement de toutes les hypothèses testées dans les différents
chapitres, ainsi que, si besoin est, celle justifiant les méthodes, matériels ou modèles
animaux utilisés. Parfois cette littérature se chevauche ou se répète, et le matériel
qui sert à justifier plusieurs hypothèses peut être rassemblé dans une même section.
Lorsque vous aurez fait cela, vous trouverez peut-être qu’il y a des vides flagrants
entre vos différentes sections. Vous aurez alors probablement à ajouter du matériel
bibliographique supplémentaire pour assembler les différentes sections en un
tout cohérent et bien structuré. Supposons par exemple que la sensibilité d’une
plante aux attaques d’un insecte dépende de cinq facteurs environnementaux,
mais que vous n’en ayez étudié que deux dans votre thèse. Pour que votre revue
de littérature soit complète et bien équilibrée, il sera souhaitable qu’elle considère
aussi les trois autres facteurs, même si c’est de façon moins détaillée que ceux qui
font l’objet de votre travail. Ce qui est important à considérer c’est que tout le
matériel inclus dans votre revue de la littérature ait une raison d’y être : soit pour
développer des arguments à utiliser dans les expériences qui seront décrites dans
les chapitres suivants, soit pour homogénéiser la présentation de ces arguments
ou pour étayer des points de discussion qui surgiront de vos résultats. En gardant
une telle règle à l’esprit, vous disposerez d’une base rationnelle pour limiter le
champ de votre revue de la littérature.
Néanmoins, même une revue de la littérature bien ciblée est difficile à intégrer
pleinement dans la structure de la thèse parce qu’une partie des informations
qu’elle contient reste toujours marginale par rapport à la section expérimentale,
et aussi du fait de sa taille. Votre revue devrait bien sûr toujours présenter les
conclusions et les arguments qui mènent aux hypothèses testées dans la thèse.
Mais ces arguments sont souvent présentés 30 ou 40 pages avant l’endroit où les
schémas expérimentaux résultant de ces arguments sont abordés et le lecteur aura
donc beaucoup de difficulté pour les relier. La tactique la plus sûre est de traiter
la revue de la littérature comme un exercice indépendant. Rédigez-la en suivant les
conseils des pages 128 et 129 donnés pour l’article de synthèse, et assurez-vous
que les arguments concernant chaque expérience sont à nouveau explicités dans
l’introduction de chacun des chapitres correspondants. Ce principe s’applique
aussi bien à une thèse sur articles qu’à une thèse traditionnelle.
La thèse traditionnelle
Une thèse traditionnelle typique est généralement constituée des sections
suivantes :
• Revue de la littérature
• Introduction générale
• Matériel et méthodes
• Section expérimentale : un ou plusieurs chapitres contenant chacun une ou
plusieurs expériences complémentaires
• Discussion générale (y compris les conclusions générales)
• Bibliographie
• Résumé
De plus, la thèse peut contenir des sections courtes pour les remerciements, des
index, des appendices, des déclarations de principe et tout autre matériel demandé
par l’institution dont dépend la thèse. Ces différentes sections principales sont
détaillées ci-dessous, excepté la revue de la littérature, que nous avons déjà examinée
plus haut.
Introduction générale
L’objectif de cette section, en plus de présenter le cadre général de la thèse, est de
présenter et justifier ce que nous appellerons l’hypothèse unificatrice. La nature
de cette hypothèse est différente de celle que nous avons vue jusqu’ici parce
qu’elle est moins spécifique. C’est en fait une hypothèse qui nécessite plusieurs
expériences pour être testée complètement et votre introduction générale doit être
constituée des informations nécessaires pour justifier cette hypothèse unificatrice.
Vous justifiez ainsi de manière pertinente votre programme de recherche. Voyons
dans deux exemples comment cette hypothèse unificatrice s’applique en pratique.
Georgget Banchero a présenté un PhD à l’Université d’Australie occidentale dont
l’introduction générale était construite à partir des informations et des arguments
suivants :
• 1. il existe une forte relation entre la nutrition des brebis gestantes et leurs
performances au début de la lactation ;
• 2. le premier lait, appelé colostrum, s’accumule dans la mamelle pendant
les derniers jours de la gestation pour être disponible dès la naissance de
l’agneau. Il est vital pour l’agneau nouveau-né et lui assure un bon départ
dans la vie ;
• 3. le début de la lactation est associé à des changements rapides de
l’équilibre hormonal en fin de gestation et au moment de la naissance de
l’agneau ;
R É D I G E R E T C O M M U N I Q U E R AV E C D ’ A U T R E S S U P P O R T S S C I E N T I F I Q U E S 141
• 4. les brebis insuffisamment nourries dans les dernières semaines de la
gestation ne produisent pas assez de colostrum ou le produisent trop
lentement pour que l’agneau en ait suffisamment lorsqu’il en a besoin ;
• 5. les brebis donnent souvent naissance à plus d’un agneau, ce qui exacerbe
le problème.
À partir de ces informations, G. Banchero développa l’hypothèse selon laquelle
des brebis recevant un supplément nutritionnel pour un temps court à la fin
de la gestation auraient des quantités supérieures de colostrum disponibles à la
naissance, et que ceci favoriserait la survie de leurs agneaux.
Pour vérifier cette hypothèse, l’étudiante avait besoin de faire plus d’une
expérience ; en fait elle fit neuf expériences séparées. Dans l’une de ces expériences,
elle compara spécifiquement la production de colostrum chez des brebis mères
d’un ou de deux agneaux, ainsi qu’entre des mères présentant des grandes
variations d’état d’engraissement avant de recevoir un supplément nutritionnel.
Dans d’autres expériences, elle analysa et testa plusieurs types de suppléments
alimentaires pour savoir si certains éléments nutritionnels particuliers jouaient
un rôle important pour induire une production abondante de colostrum. Dans
d’autres encore, elle testa de quelle manière les hormones dont dépend la lactation
étaient associées avec les suppléments alimentaires les plus efficaces.
Chacune de ces expériences testait une hypothèse spécifique bien précise. Les
résultats de chacune d’entre elles furent assemblés finalement dans la discussion
générale pour tester l’hypothèse unificatrice de départ. De cette façon, l’étudiante
structura l’ensemble de son travail en se rapportant à son hypothèse unificatrice,
en lui fournissant à chaque étape une raison et un objectif clairs.
Elle conclut en définitive que l’hypothèse unificatrice était vérifiée et, dans les
conclusions de la discussion générale, elle présenta de nouvelles informations sur
les relations entre nutrition et hormones en fin de gestation. Elle fit ensuite une
série de recommandations pratiques pour la conduite de l’élevage et la nutrition
des brebis pendant la gestation. Les conclusions étaient donc de différents types,
mais sans que cela porte atteinte à la cohérence de la thèse dans son ensemble
pour le lecteur.
Un second exemple est celui d’un étudiant qui a réalisé une thèse à partir des
informations suivantes :
• 1. des arbres d’une certaine espèce forestière étaient attaqués et tués par un
champignon ;
• 2. cette espèce d’arbre était toujours trouvée en association avec différentes
essences du sous-bois en fonction de la présence de feux et d’autres causes
aléatoires ;
• 3. en présence de certaines associations d’essences, les arbres n’étaient pas
affectés par le champignon, même si les conditions du sol paraissaient
favorables à celui-ci.
L’hypothèse unificatrice, ou générale, de l’étudiant était que la maladie pouvait
être contrôlée en encourageant la présence de certaines plantes qui seraient
nuisibles pour le champignon pathogène. Là aussi, pour tester cette hypothèse
Matériel et méthodes
Une thèse décrit le plus souvent plusieurs expériences, mais celles-ci ont
généralement plusieurs éléments en commun. Elles peuvent avoir été réalisées
dans la même région, ou avec le même groupe de patients, ou sur le même type
de sol. Elles peuvent encore avoir utilisé les mêmes microorganismes ou tout
autre matériel biologique commun, ou encore les mêmes analyses chimiques.
Autrement dit, une grande partie des matériels ou des techniques utilisés dans
les matériel et méthodes peuvent être communs à la plupart des expériences. La
répétition pour chaque expérience d’une description complète de tous ces détails
serait ennuyeuse et distrairait l’attention du lecteur. Ceci est exactement ce qui
risque d’arriver dans une thèse sur articles parce que chaque article doit être
autosuffisant et indépendant. En revanche, dans une thèse traditionnelle, il est
fréquent d’inclure un chapitre qui rassemble les matériels et les techniques utilisés
dans la plupart des expériences. Ceci présente deux avantages. Vous évitez les
répétitions et réduisez l’espace entre la présentation des résultats d’une section
donnée et l’hypothèse spécifique qui leur correspond, en supprimant de longs
détails de méthodologie. Ce chapitre séparé de matériel et méthodes peut aussi
présenter la validation de méthodes ou de matériels utilisés, même si dans certains
cas cette validation a nécessité de petites expérimentations.
Section expérimentale
Chacune des expériences aura malgré tout ses particularités, la plus évidente étant
le schéma expérimental spécifique de l’hypothèse testée, ou certaines méthodes
utilisées uniquement dans une seule des expériences. Vous aurez donc toujours
besoin dans chaque chapitre expérimental d’une section traitant des matériels et
méthodes. Toutefois, cette section sera constituée uniquement de la description de
la procédure expérimentale ou du schéma expérimental propre à l’expérience en
R É D I G E R E T C O M M U N I Q U E R AV E C D ’ A U T R E S S U P P O R T S S C I E N T I F I Q U E S 143
question, ainsi que des techniques et matériels correspondants. En effet, la plupart
des éléments qui constitueraient normalement le matériel et méthodes d’un article
de recherche a déjà été décrite dans le chapitre général de matériel et méthodes. Pour
éviter toute confusion entre ces deux niveaux de matériel et méthodes, je suggère
l’utilisation d’un titre différent plus descriptif, procédure expérimentale, pour les
chapitres de la section expérimentale. Seule l’information spécifique de l’expérience
a besoin d’y être présentée.
Cette section comprend un ou, le plus souvent, plusieurs chapitres qui contiennent
chacun une ou plusieurs expérimentations ayant un étroit rapport entre elles.
Chaque chapitre est de la même forme qu’un article scientifique avec ses différentes
sections : introduction, matériel et méthodes, mais appelée ici procédure expérimentale,
résultats et discussion. L’organisation du contenu de ces sections est cependant
différente de celle des mêmes sections dans un article scientifique rédigé pour un
journal spécialisé. L’introduction peut être très courte parce qu’une bonne partie
des données bibliographiques nécessaires a déjà été présentée dans la revue de la
littérature ou dans la discussion du chapitre expérimental précédent. Il suffit de
prolonger les arguments déjà développés précédemment dans ces sections et de
les compléter par l’hypothèse spécifique de l’expérience du présent chapitre. La
section procédure expérimentale, sera également plus courte que le serait celle de
matériel et méthodes d’un article pour les raisons que nous venons d’expliquer dans
le paragraphe précédent.
discussion générale
R É D I G E R E T C O M M U N I Q U E R AV E C D ’ A U T R E S S U P P O R T S S C I E N T I F I Q U E S 145
structurée logiquement et constitue le plus souvent la section la plus informative
de la thèse. C’est certainement la preuve la plus claire pour les examinateurs, de
votre capacité à comprendre le sujet dans son ensemble. Votre capacité à montrer
une telle vision synthétique de votre travail leur permettra d’émettre une opinion
sans réserve sur votre contribution à la connaissance scientifique, comme cela leur
est généralement demandé.
Que vous rédigiez ou pas une section de conclusions à la fin de la discussion générale
est une question de choix personnel. Certaines personnes pensent qu’à la fin d’une
longue thèse un concentré de sagesse est souhaitable pour souligner les points
essentiels de la thèse. D’autres pensent que cela est suffisamment couvert par
un bon résumé et considèrent que la discussion générale est si importante comme
section de synthèse de la thèse qu’elle ne devrait pas être encombrée par quoi
que ce soit d’autre. Personnellement, je considère que le seul objectif véritable
de la discussion générale, comme de toutes les discussions, est de développer un
raisonnement pour formuler des conclusions à partir des résultats obtenus, et
que ces conclusions n’ont besoin d’être répétées que dans le résumé. Il me paraît
superflu d’ajouter une section de conclusion qui ne serait qu’une répétition de
fragments de la discussion générale.
Bibliographie
La section bibliographie ou références dans une thèse ne diffère pas de celle d’un
article de recherche ou d’un article de synthèse, excepté qu’elle est généralement
plus longue. La plupart des universités ne sont pas aussi inflexibles que les éditeurs
de journaux scientifiques en ce qui concerne le format des références. Néanmoins,
lorsque vous avez choisi le format que vous allez utiliser, vous devez vous y
conformer pour toutes les références. Lorsque vous revenez plus tard sur une
partie de votre thèse que vous voulez réorganiser pour publier un ou plusieurs
articles, il se peut que les journaux auxquels vous voulez soumettre ces articles
demandent un format différent de celui que vous aviez choisi pour votre thèse.
C’est par conséquent une bonne idée de choisir pour la thèse un format qui soit
le plus complet possible, avec les noms et initiales de tous les auteurs, le titre
de l’article, le nom de la revue en entier, le volume et les numéros des pages de
début et de fin de l’article. Au minimum, si vous disposez d’un logiciel de gestion
de votre bibliographie, assurez-vous que ces informations complètes sont bien
dans votre base de données, même si vous utilisez une version abrégée pour la
présentation des références dans votre thèse. De cette manière, vous serez sûr
d’avoir immédiatement sous la main les informations nécessaires lorsque vous
préparerez vos articles, quelle que soit la forme de la bibliographie exigée par
n’importe quel éditeur de revue.
Résumé
Dans le cas d’une thèse relativement courte, le résumé a la même fonction et la
même forme que celles d’un article de recherche. Lorsque le nombre d’expériences
et le volume des résultats est élevé, il peut devenir nécessaire de faire un tri. Des
résumés de cinq ou six pages ne sont plus des résumés. La technique pour obtenir
R É D I G E R E T C O M M U N I Q U E R AV E C D ’ A U T R E S S U P P O R T S S C I E N T I F I Q U E S 147
Chapitre N+1. discussion générale
Une discussion des résultats de toutes les expériences en relation avec l’hypothèse
générale unificatrice qui était présentée et justifiée dans l’introduction générale.
Résumé
• 1. Un rappel de l’hypothèse générale unificatrice.
• 2. Le principe général des procédures expérimentales.
• 3. Les principaux résultats et leur signification.
• 4. La conclusion générale.
Références
Une compilation soigneuse et complète de toutes les références citées et aucune
autre.
Expérience 6
Hypothèse
Les exsudations d’espèces indigènes de légumineuses freinent la croissance du
champignon pathogène Phytophtora
Résultats principaux
1. (Expérience 1). Les nombres de Phytophtora sont plus faibles dans le sol venant
de la zone où se trouvent les racines de légumineuses que dans les sols venant de
zones des racines d’autres plantes.
2. (Expérience 2). Des plaques de culture des Phytophtora sont inhibées quand
du tissu de racines vivantes de légumineuses est ajouté au milieu de culture, mais
pas s’il s’agit de tissu mort.
Conclusions principales
1. L’hypothèse est confirmée dans chaque expérience.
2. La substance inhibitrice se trouve uniquement dans le tissu vivant. Par
conséquent une nouvelle hypothèse est que, dans la nature, les légumineuses
doivent être en croissance pour inhiber le champignon.
Expérience 7
Hypothèse : celle exprimée dans la conclusion de l’expérience 6.
Résultats principaux : etc.
Conclusions principales : etc.
Si nous ajoutons maintenant l’hypothèse générale de l’introduction, nous pouvons
utiliser cette hypothèse comme base pour développer la discussion générale à partir
du résumé des thèmes contenus dans les sections de résultats et de discussion de
chaque expérience. À ce stade, la présence éventuelle de déficiences importantes
dans l’ensemble des expériences devient évidente, tant pour l’étudiant que pour
son superviseur. Cette forme de résumé de travail permet donc aussi de suggérer
quelles expériences complémentaires doivent être faites pour que le travail
constitue un ensemble cohérent qui résulte en une thèse de qualité.
Réduire les expériences à leurs éléments essentiels de cette façon peut paraître
facile, mais en pratique cela peut être assez complexe parce que ces quelques
affirmations sont le résultat de la majeure partie de la réflexion et de l’analyse
nécessaires au départ pour construire la thèse. Il n’est pas rare que l’élaboration
R É D I G E R E T C O M M U N I Q U E R AV E C D ’ A U T R E S S U P P O R T S S C I E N T I F I Q U E S 149
d’un résumé de travail de thèse demande un mois ou plus, bien qu’il ne fasse au
final que trois ou quatre pages. En revanche, une fois que le résumé de travail
est fait, la rédaction se limite essentiellement à compléter les détails et, avec le
résumé sous la main, il devient pratiquement impossible de se perdre dans la
grande masse de données qui constituera le plus gros de la thèse. Les superviseurs
ou les membres du comité de thèse, qui doivent lire et commenter des brouillons
de sections de la thèse, peuvent le faire de manière beaucoup plus pertinente et
sûre s’ils ont, eux aussi, une copie du résumé de travail sous
la main pour évaluer la perspective dans laquelle se place la
section qu’ils sont en train de lire.
…une fois que
L’utilisation du résumé de travail
le résumé de
Avec un résumé de travail soigneusement établi sous la main,
travail est fait, la vous pouvez maintenant commencer à écrire.
rédaction se limite • Chaque introduction sera une justification de l’hypothèse
ou des hypothèses spécifiques proposées dans chaque
essentiellement
section.
à compléter • Chaque procédure expérimentale (ou schéma expérimental)
les détails… présentera les grandes lignes des différentes expériences
pour vérifier ces hypothèses.
• Chaque section de résultats sera rédigée de manière à ce que les résultats
principaux spécifiés dans le résumé de travail soient bien mis en valeur.
Les tableaux, les graphiques et le texte seront tous élaborés en gardant ces
résultats principaux à l’esprit. Les autres résultats moins importants seront
aussi inclus, mais leur position et leur volume devraient indiquer cette
moindre importance.
• Chaque discussion sera aussi construite à partir du résumé de travail en
utilisant les principes que nous avons déjà vus page 145 pour développer
les thèmes de discussion.
La fonction principale de la revue de la littérature est de fournir le contexte pour
les hypothèses et de les introduire. Le résumé de travail est utile ici aussi, comme
une sorte de liste de contrôle qui peut servir de plan général pour la revue de la
littérature.
Il serait surprenant si, au cours de la rédaction de la thèse, aucune idée novatrice
ne vous venait à l’esprit. De telles idées peuvent être incluses dans le résumé de
travail sans réduire son efficacité en tant que plan des grandes lignes de la thèse.
Au contraire, grâce au résumé de travail, vous pourrez insérer facilement ces
idées novatrices dans la trame de votre thèse en suggérant exactement où elles
s’inséreront le mieux.
Si nous considérons le résumé de travail comme le premier brouillon de la thèse,
nous pouvons alors considérer la version plus développée que nous venons
d’évoquer ci-dessus comme étant le deuxième jet. À ce stade, un étudiant en
train d’écrire sa thèse devrait tirer avantage du fait d’avoir un superviseur qui est,
ou devrait être, un participant officiellement nommé et disponible pour faire une
R É D I G E R E T C O M M U N I Q U E R AV E C D ’ A U T R E S S U P P O R T S S C I E N T I F I Q U E S 151
Mémento des étapes de rédaction
d’un article scientifique
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bibliographique inutile à la justification de l’hypothèse. Éventuellement,
ajoutez une ou quelques phrases de contexte au début de l’introduction
et une brève présentation du schéma expérimental à la fin ;
• matériel et méthodes. Le travail essentiel est ici de faire le tri pour n’incorporer
que ce qui est nécessaire. Commencez si possible par présenter en détail le
schéma expérimental. Le lecteur comprendra ainsi plus facilement la logique
permettant de vérifier l’hypothèse. Faites une liste des sous-titres de tous les
éléments techniques nécessaires pour que le lecteur puisse aussi comprendre
et évaluer correctement vos résultats. Assurez-vous enfin que le lecteur
dispose de toutes les informations nécessaires pour pouvoir refaire
l’expérience s’il le souhaite ;
• résultats. Classez vos résultats en quatre catégories selon leur importance par
rapport à l’hypothèse et à leur intérêt scientifique en général. Les résultats des
catégories 1 et 2 se rapportent à l’hypothèse directement (catégorie 1) ou de
façon moins évidente (catégorie 2). Les résultats de catégorie 3 présentent un
intérêt scientifique certain mais sans relation avec l’hypothèse. Les résultats
de catégorie 4 ne présentent qu’un intérêt marginal et sans rapport avec
l’hypothèse. Dans la mesure du possible, structurez votre section de résultats
en présentant vos résultats dans l’ordre 1, 2 et 3 et omettez les résultats
de catégorie 4 ;
• discussion. Comme pour la section des résultats, identifiez les arguments
pertinents découlant de l’interprétation de vos résultats. Classez-les en quatre
types en fonction de leur importance par rapport à l’hypothèse, en commençant
si possible par les plus importants. Les arguments de type 1 sont ceux qui
appuient le plus fortement l’acceptation ou le rejet de l’hypothèse de départ.
Ensuite viennent les arguments de type 2, qui permettent d’émettre une
opinion sur la validité de l’hypothèse, mais qui sont moins convaincants que les
précédents. Puis viennent les arguments de type 3, qui sont intéressants sur le
plan scientifique, mais qui sont sans rapport avec l’hypothèse initiale. Placez en
dernier les arguments n’ayant qu’un intérêt marginal sans rapport avec votre
hypothèse (type 4). N’hésitez pas à éliminer les arguments de ce dernier type
car le plus souvent ils ne font que rallonger inutilement la discussion et diluer
la force des arguments essentiels. Il peut arriver bien sûr que tous ces types
d’arguments ne soient pas présents dans votre discussion.
Étape n° 4 – Rédiger
Maintenant, et maintenant seulement, commence la rédaction proprement dite.
Fixez-vous comme objectif des tâches de taille limitée, par exemple un ou quelques
paragraphes. Pour chaque paragraphe, définissez-en le thème, qui constituera votre
phrase d’ouverture, ainsi qu’une conclusion, qui sera votre dernière phrase. Ensuite,
développez les arguments qui conduisent de la première à la dernière phrase. À ce
stade de rédaction, écrivez sans chercher à le faire dans un style parfait. Gardez le
polissage pour l’étape suivante. Concentrez-vous seulement sur les règles de précision,
de clarté et de concision, hiérarchisées dans cet ordre.
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Index
INDEX 157
introduction dans un article de synthèse 126 moteur de recherche bibliographique 27, 28, 30
introduction dans un article scientifique 16, 27, 30 mot imprécis 78
introduction générale de la thèse 141 motivation du lecteur 12, 34
J mythes sur la rédaction scientifique 19
jargon 85 N
jeune auteur 97 nom au lieu d’un verbe 77
journaliste 131 note de bas de page 50, 81
justifier les arguments dans la discussion 57 note de bas d’illustration 50
L O
langage de la science et de la recherche 19, 20 objectif d’un article de vulgarisation 136
langage fleuri 13 objectif d’une communication orale 116
langue maternelle 9, 13, 14, 20, 22, 73, 84, 85 objectif d’une expérience 33, 36
lecteur 11 objectifs d’un poster 118
lecteur, langue maternelle du 84 objectivité des résultats 44
lecteur non spécialisé 132 observation personnelle 130
lecture critique 40, 94, 151 opinions contradictoires 129
lettre de l’éditeur 100 ordre de présentation de l’article scientifique 133
lettre de présentation de votre article à l’éditeur 98 ordre de rédaction des différentes sections 21
lignes et colonnes dans un tableau 50 ordre des auteurs 69, 70
limite de temps d’un poster 119 organismes de financement et remerciements 71
lire votre présentation orale 111 orienter le lecteur 36, 89, 127
lisibilité 26, 74, 80, 87, 92, 137, 151 P
liste de contrôle de l’article scientifique 95 paragraphe, bonne taille de 56, 59
liste des points à vérifier dans la correction 94 paragraphe, structure du 60
littérature dans un article de synthèse 127, 128 parenthèses 81
logique de la discussion, vérifier la 66 parler de votre poster 122
longueur d’un article de vulgarisation 136 phrase compliquée par de nombreux adjectifs 84
longueur du résumé 67 phrase d’ouverture d’une présentation orale 106
M phrase thématique d’un paragraphe 60
matériel bibliographique pour la thèse 140 phrase trop longue 82
matériel et méthodes dans l’article scientifique 40 planification d’un programme de recherche 14
matériel et méthodes dans la thèse 143 point de vue du lecteur 16, 60
mémento des étapes de rédaction polissage final du style 95
d’un article scientifique 153 positionnement des arguments
mémoire à court terme du lecteur 52 dans la discussion 59
message à ramener chez soi 107, 114 poster 117
message clé 112 poster dépourvu d’imagination 120
message clé d’une présentation orale 105 poster, exemples de bon et mauvais 122
message dans un article de synthèse 128 pour en savoir plus (section de) 136, 137
message de conclusion dans précision 13, 50, 73, 78, 86, 135
une présentation orale 115 prédiction 15, 16, 35
message scientifique dans la discussion 57 premier auteur 71
méthode scientifique 15 préposition 85, 86
méthodologie 33, 39, 126, 132 présentation des chiffres dans un tableau 50
mise en valeur des points importants présentation orale 104
dans la discussion 58 principe d’anticipation du lecteur 87, 89, 137
moment de publication d’un article priorité des résultats 46, 144
de vulgarisation 134 probabilités bilatérales 43
mot clé 28, 30 probabilités unilatérales 43
mot de connexion 89 procédure expérimentale dans une thèse
mot de liaison 89 (section de) 144
INDEX 159
style de l’orateur 105 temps mort entre orateurs 114
style de rédaction 13 temps morts entre diapositives 112
style de rédaction dans la thèse 140 terminer votre exposé 116
style maison 20, 72, 99 texte dans les résultats 48
style pour la rédaction scientifique 11, 19, 93 texte pour comptes rendus
style, varier votre 109 des présentations orales 112
sujet dans l’introduction 39 texte pour la clarté 48
sujet d’un article de vulgarisation 134 texte sous forme de titres dans un poster 120
sujet et message dans un article de synthèse 128 thèse 138
summary, résumé 67 thèse sur articles 138
superviseur comme cosignataire de l’article 71 thèse traditionnelle 138
superviseur et rédaction de la thèse 139, 149, 150 titre avec conclusion principale 28
superviseur et structure de la thèse 138 titre avec résultat principal 28
survol des matériel et méthodes 40 titre de figure ou de tableau 49
symbole 79 titre d’un article de vulgarisation 136
système Harvard 72 titre, fonction du 27
système Vancouver 72 titres dans un poster 120
titre trop long 28
T
tableau et figure dans une thèse, présentation de 145 U
tableau ou figure 50 unification des arguments 140
tableaux et figures utilisés pour la précision 48 V
table des matières 27 validation de méthodes dans une thèse 143
taille des caractères dans un poster 120, 121 validation de nouvelles techniques 42
taille des caractères pour les titres d’un poster 122 verbe 77
take-home message, message à ramener chez soi 115 vérification finale de l’anglais 96
technique déjà publiée 42 vieille information, information déjà connue 88
technique ultra-moderne 105 vous dans une présentation orale 107
temps de parole 114 vue d’ensemble dans une thèse 139