Vous êtes sur la page 1sur 456

Constitution de la modernité

sous la direction de Jean-Claude Zancarini


14

La Mémoire des révoltes en Europe


à ­­l ’époque moderne
Ouvrage publié avec le soutien de ­­l’ERLIS
(Équipe de recherche sur les littératures, les imaginaires et les sociétés,
EA 4254, UNICAEN)
et du LabEx EHNE (Écrire une histoire nouvelle de ­­l’Europe).
Ce travail a été réalisé au sein du LABEX COMOD (ANR-11-LABX-0041)
de ­­l’université de Lyon, dans le cadre du programme
« Investissements d’avenir
­­ » (ANR-11-IDEX-0007) de l’État
­­ français,
géré par ­­l’Agence nationale de la recherche (ANR)
La Mémoire
des révoltes
en Europe
à ­­l’époque moderne

Sous la direction ­­d’Alexandra Merle,


Stéphane Jettot et Manuel Herrero Sánchez

PARIS
CLASSIQUES GARNIER
2018
Alexandra Merle, ancienne élève de l’ENS
­­ est professeur à l’université
­­ de Caen. Elle
travaille sur la littérature politique de ­­l’Espagne moderne.

Stéphane Jettot est maître de conférences


­­ à Sorbonne université. Ses travaux portent
sur les pratiques mémorielles des élites britanniques au xviiie siècle.

Manuel Herrero Sánchez est professeur à l’université


­­ Pablo de Olavide (Séville). Il
travaille sur ­­l’empire espagnol à ­­l’époque moderne.

© 2018. Classiques Garnier, Paris.


Reproduction et traduction, même partielles, interdites.
Tous droits réservés pour tous les pays.

ISBN 978-2-406-08252-1 (livre broché)


ISBN 978-2-406-08253-8 (livre relié)
ISSN 2493-8947
INTRODUCTION

Depuis plusieurs décennies déjà les historiens ont entrepris de réha-


biliter l­’événement. ­L’un des principaux jalons de ce retournement
historiographique fut ­l’ouvrage que Georges Duby ­consacra en 1973 au
dimanche de Bouvines, ­conçu non pas ­comme ­l’histoire ­d’une bataille,
mais c­ omme celle de l­’insertion de cet événement dans la c­ onscience
temporelle des générations successives, ­jusqu’à ­l’époque ­contemporaine1.
Georges Duby replaçait ainsi l­ ’événement au cœur de l­ ’histoire sociale,
en dévoilant la manière dont les élites de la société chevaleresque éta-
blirent leur identité dynastique à partir de la célébration de leurs exploits
guerriers2. Les structures sociales sont en ce sens des structures tem-
porelles et si ­l’événement méritait ­d’être pris en ­considération par les
historiens, ce ­n’était pas seulement pour ses ­conséquences immédiates
mais pour sa capacité à se répercuter en des mémoires multiples et
parfois c­ oncurrentielles. L
­ ’opposition factice entre la longue durée et
­l’événement était donc dépassée, au profit ­d’une histoire attentive aux
effets de « remémorations3 ».
Depuis lors, de nombreux chercheurs ont exploré les processus de
recomposition et ­d’instrumentalisation à partir ­d’événements ­construits
rétrospectivement ­comme « fondateurs », tels que la bataille de Covadonga,
le traité de Westphalie ou la Révocation de ­l’Édit de Nantes, et ont
montré ­comment, sur plusieurs générations, voire plusieurs siècles,
individus et groupes sociaux se saisissent du souvenir ­d’un événement
pour l­’investir de nouvelles significations4. Les travaux autour de la
1 « Les événements sont ­comme l­ ’écume de ­l’histoire, des bulles grosses ou menues, qui crèvent
en surface et dont ­l’éclatement suscite des remous qui plus ou loin se propagent. Celui-ci a
laissé des traces très durables : elles ne sont pas ­aujourd’hui tout à fait effacées. Ces traces
seules lui ­confèrent existence. En dehors ­d’elles, ­l’événement n­ ’est rien. » Duby, 1973, p. 8.
2 Duby, 1988, p. 167-180.
3 Sur cette notion, voir Ricœur, 2000, p. 104 et suiv.
4 Sur la Reconquista, voir Ríos Saloma, 2011 ; sur la mémoire des Camisards, Cabanel,
Joutard (dir.), 2002 ; sur la paix de Westphalie, Gantet, 2001.
8 A. MERLE, S. JETTOT ET M. HERRERO SÁNCHEZ

mémoire représentent ­aujourd’hui un champ c­ onsidérable qui possède


des ramifications dans la plupart des sciences humaines, et qui ne laisse
pas de susciter des questionnements5.
Ainsi, ont été signalés les risques soulevés par une ­conception « pré-
sentiste » de ­l’histoire qui ferait du passé un temps du présent, une res-
source que divers groupes ou individus seraient susceptibles de mobiliser,
­d’occulter et/ou de subir6. Une autre question souvent abordée ­concerne les
effets de périodisation et notamment ­l’éventuelle rupture entre un ordre
ancien et un « régime moderne » de la mémoire, qui surviendrait vers la
fin du xviiie siècle mais qui aurait été esquissée, en France, dès la querelle
des Anciens et des Modernes à partir de 16707. Ce régime moderne de
temporalité verrait les logiques c­ ommémoratives se transformer par une
reconfiguration des rapports entre présent, passé et futur, et une promotion
de ­l’avenir ­comme un horizon souhaitable. ­D’autres chercheurs insistent
sur les nouvelles dynamiques mémorielles créées pendant les réformes
­confessionnelles du xvie siècle, qui ­conduisent à ­l’apparition du terme
« moderne » dans la langue vernaculaire8. Les éditeurs de ­l’ouvrage Memory
before Modernity, tout en observant que les études précédentes ne sont pas
parvenues à ­s’accorder sur une date, relèvent que ces interrogations sont
liées à d­ ’autres abstractions telles que la naissance de l­ ’individualisme, de
la sphère publique ou de ­l’État moderne9. Comme ­l’ont mis en évidence
les apports du groupe de travail dirigé par Judith Pollmann, le recours à la
mémoire historique, loin d­ ’être un phénomène associé à la c­ onstruction de
­l’État-nation au xixe siècle, présente une remarquable c­ ontinuité (malgré
quelques différences) avec les pratiques caractéristiques des sociétés d­ ’Ancien
Régime. De même, pour le xvie siècle, « des temporalités différentes purent
cohabiter et ­s’accorder différemment dans le présent » ­d’une société, ­comme
ce fut le cas par exemple dans ­l’Italie de la Renaissance10. La rupture avec le
temps médiéval était loin ­d’être absolue et les phénomènes de « réemploi »
abondaient dans les pratiques ­comme dans les écrits.
Parmi les événements dont les processus de mise en mémoire et
de remémoration sont particulièrement dignes d ­ ’intérêt figurent les
5 Sur ce tournant mémoriel voir en particulier Kline, 2000 et Traverso, 2005.
6 Hartog, 2003, p. 217 et suiv.
7 Koselleck, 1990.
8 Walsham, 2012, p. 900.
9 Pollmann, Kuijpers, Muller, Van der Steen (éd.), 2013, p. 2-3.
10 Callard, Crouzet-Pavan, Tallon (dir.), 2014, p. 11.
Introduction 9

révoltes et les révolutions, habituellement caractérisées par une volonté


affichée de rupture avec un ordre antérieur, et/ou de restauration ­d’un
ordre plus ancien encore, présenté c­ omme idéal. Du reste, certains
actes fondateurs, une émeute, une exécution sont en mesure d­ ’initier
un nouveau calendrier : ainsi en Angleterre les actes officiels émis sous
la République de Cromwell étaient-ils datés à partir du régicide de
1649, tandis que les partisans des Stuarts maintenaient la fiction d­ ’une
temporalité dynastique11.
En outre, le déploiement de la violence et de rituels lors des révoltes
­contribue à favoriser leur inscription dans les ­cultures mémorielles
antagonistes12. Dans une récente étude sur les transformations subies
par le ­concept de révolution, Francesco Benigno rappelait à juste titre le
passage d­ ’une perspective largement téléologique, associée au caractère
inévitable des processus de ­contestation et à des transformations sociales
nécessaires, vers un travail sur les c­ ommotions sociales liées à la violence
et sur le poids des émotions dans la ­confection du souvenir13. Aussi faut-
il tenir ­compte, ­comme y invitait récemment Dominick LaCapra, du
« role of the so-called transgenerational transmission of trauma to descendants
and intimates of both survivors and perpetrators14 ».
Le traitement de la mémoire de ces épisodes traumatiques suppose
de dépasser les démarcations disciplinaires tout en prenant ­conscience
de plusieurs difficultés méthodologiques, q­ u’il s­’agisse de l­’analyse des
processus de mise en récit – dans des écrits performatifs enjoignant à
­l’action ou dans des narrations ­composées ultérieurement dans un tout
autre c­ ontexte –, ou des questionnements liés à la notion de « mémoire
collective15 ». La recherche ­s’est longtemps ­concentrée sur les formes
narratives des révoltes, qui souvent ont joué un rôle déterminant dans
la c­ onstruction ­d’une ­communauté nationale aux dépens ­d’une plura-
lité ­d’identités sociales ou individuelles. On a donc souligné le risque
que groupes et individus se retrouvent éclipsés par une collectivité
11 Sur la révolution anglaise, Woolf, 2003 ; sur le calendrier révolutionnaire, voir Baczko,
1984.
12 Sans doute ­n’est-il pas fortuit que les travaux de certains historiens aient porté à la fois
sur la violence et sur les c­ ultures mémorielles. Voir Nassiet, 2000 et 2001.
13 « La irrupción de la llamada memoria histórica lleva a privilegiar la dimensión subjetiva, emotiva
y experiencial de los individuos y de los grupos », Benigno, 2013, p. 241.
14 LaCapra, 2016. Voir aussi Alexander, Butler Breese, Eyerman (éd.), 2011 et Jouhaud,
Ribard, Schapira, 2009.
15 Une mise au point dans Gensburger, 2011.
10 A. MERLE, S. JETTOT ET M. HERRERO SÁNCHEZ

aux ­contours imprécis, saisie hors de toute détermination sociale. Mais


la critique relève également les dangers ­d’une approche fondée sur
­l’opposition univoque entre une mémoire des « dominants » et celle
des vaincus16, la cohésion ­d’un groupe et de ses intérêts pouvant être
largement surestimée.
Enfin, à l­ ’échelle européenne, ­l’exploration des processus mémoriels,
très féconde ces dernières années, a eu tendance à favoriser ­l’étude de
certaines révoltes dans une aire géographique limitée. Ainsi, au-delà des
travaux que des révoltes ­considérées c­ omme fondatrices ont pu susciter
dans leurs historiographies nationales respectives – la « restauration »
portugaise, par exemple17 –, de grands programmes de recherche inter-
nationaux se sont penchés en particulier sur la révolte flamande qui
débuta sous Philippe II et trouva sa c­ onclusion dans l­ ’indépendance des
Provinces Unies18. Les recherches c­ oncernant le monde germanique et
le nord-est de l­’Europe19 sont la plupart du temps dissociées de celles
qui abordent ­l’espace du monde catholique et de ­l’Europe méridionale,
ce qui ­n’est peut-être pas sans rapports avec la persistance ­d’une vision
libérale et progressive whig qui attribue à cet espace un rôle secondaire
dans le développement de la pensée occidentale et donc de la modernité20.
Le présent volume répond au souhait ­d’offrir une vision plurielle
des phénomènes mémoriels à ­l’échelle européenne. Il ­s’inscrit dans
la c­ ontinuité de recherches collectives portant sur « la c­ ulture des
révoltes et révolutions dans ­l’Europe moderne21 », menées sous la
16 Gensburger et Lavabre, 2005.
17 Voir notamment Valladares, 1998.
18 Voir notamment le programme dirigé récemment (2008-2013) par Judith Pollmann à
­l’université de Leyde, « Tales of the Revolt. Oblivion, Memory and Identity in the Low
Countries, 1566-1700 ».
19 Citons notamment le programme dirigé par Malte Griesse depuis 2013 à ­l’université de
Constance, « Early Modern Revolts as Communicative Events ».
20 Une intéressante révision est sur le point ­d’être entreprise avec le programme « Resistance :
Rebellion and Resistance in the Iberian Empires, 16th-19th » (H2020-MSCA-RISE-2017),
dirigé par Mafalda Soares da Cunha (U. ­d’ Evora). Ce programme, qui débute en 2018,
aborde les formes de résistance des couches populaires et subalternes de la société et les
interactions entre les ­conflits et les structures de domination imposées par les monarchies
ibériques à l­ ’échelle globale.
21 ­C’est là l­’intitulé du programme ANR-13-BSH3-0006-02 dirigé par Alain Hugon.
Le présent volume est en grande partie issu ­d’un colloque qui ­s’est tenu du 10 au
12 décembre 2015 à la Casa de Velázquez, à Madrid, avec la collaboration du Labex
Écrire une Histoire nouvelle de l­ ’Europe, de l­ ’Université Paris-Sorbonne, et du programme
El modelo policéntrico de una soberanía c­ ompartida (siglos XVI-XVIII). Una vía alternativa
Introduction 11

direction d­ ’Alain Hugon, et qui ont déjà produit plusieurs volumes,


­consacrés soit à différentes études de cas relevant du même type de
mise en mémoire des événements insurrectionnels22, soit à des processus
mémoriels pluriels dans des espaces éloignés les uns des autres mais
soumis à une même souveraineté, telle que la monarchie hispanique
sous les Habsbourg23.
Tout au long de l­’époque moderne, le recours à la mémoire des
événements insurrectionnels a été ­constant, que ce soit lors ­d’épisodes
de protestation et de rébellion ou dans un c­ ontexte de c­ ontrôle et de
répression, de la part ­d’un large éventail ­d’agents, depuis toutes les
strates de la société et grâce à l­’emploi d ­ ’une multitude de voies de
­communication. Ces ­considérations ­conduisent à élargir ­considérablement
le spectre des acteurs sociaux ­concernés, et, ­comme le montrent les
différentes c­ ontributions réunies dans le présent volume, rendent néces-
saire l­ ’examen d­ ’une grande variété de matériaux documentaires parmi
lesquels se trouvent des sources manuscrites, tant officielles que privées,
des documents iconographiques et des sources imprimées telles que
pamphlets, libelles, gravures, traités théoriques, textes littéraires ou chan-
sons et toute sorte de sons. L­ ’élargissement des voies de c­ ommunication
politique nous permet d­ ’observer la c­ onstruction ­d’un espace public de
discussion dans lequel les discours critiques sur le pouvoir alternent avec
­l’utilisation des épisodes de désordre politique ­comme un antidote ­contre
la propagation de nouvelles révoltes. De la sorte, c­ omme le remarquait
Christian Jouhaud, le ­contrôle exercé depuis le pouvoir sur la mémoire
de certaines révoltes tombées dans l­ ’oubli nous oblige à revisiter certains
processus ­contestataires et à nous interroger sur le véritable impact de
ces épisodes dans l­’action politique quotidienne24.
en la ­construcción del estado moderno (HAR 2013-4537-P) dirigé par Manuel Herrero
(U. Pablo de Olavide). Que soient ici remerciés le directeur de la Casa de Velázquez,
Michel Bertrand, et Nicolas Morales, directeur des études pour la période moderne,
qui ont permis à cette rencontre de se dérouler dans les meilleures ­conditions, ainsi que
Carmen Sanz Ayán, Antonio Álvarez-Ossorio, James Amelang et Luis Ribot García,
qui nous ont fait l­ ’honneur de présider et d­ ’animer, avec Alain Hugon, les différentes
sessions de ce colloque.
22 Voir notamment le dossier édité par Stéphane Jettot et Gauthier Aubert, 2017 ; Haffemayer
(dir.), 2013 ; sur la transposition à l­ ’écran ­d’épisodes c­ ontestataires parmi les plus célèbres,
Haffemayer (dir.), 2015 ; enfin, sur la transmission orale, Guillorel, Hopkin, Pooley (dir.),
2017.
23 Alain Hugon et Alexandra Merle (éd.), 2016.
24 Jouhaud, 1990.
12 A. MERLE, S. JETTOT ET M. HERRERO SÁNCHEZ

La première partie du volume s­’intéresse à la mise en mémoire des


révoltes par ­l’écrit, dans des œuvres qui pour la plupart appartiennent
au genre historiographique ou s­’en inspirent – ­jusqu’à une littérature
de réflexion politique qui puise certains de ses exemples dans le passé
lointain ou récent – et furent ­conçues pour être diffusées dans l­ ’espace
public, même si dans plusieurs cas cette diffusion rencontra des obstacles.
Les cinq études réunies, s­’attachant à des soulèvements et révoltes
situés dans la Florence du xve siècle (la ­conjuration des Pazzi), dans
­l’espace de la péninsule Ibérique au xvie siècle (les Germanías de Valence
et les Comunidades de Castille qui marquèrent les premières années du
règne de Charles Quint, et la révolte de Saragosse en 1591), et dans les
Flandres à la même époque, sont sensibles au projet politique présent au
cœur des différents écrits ­considérés : œuvres de ­commande, ­composées
par des chroniqueurs au service d­ ’un monarque ou ­d’une institution,
ou narrations plus spontanées, c­ ontemporaines des événements ou
éloignées dans le temps, voire décalées dans ­l’espace ­comme ­c’est le
cas des écrits allemands sur la révolte flamande à la fin du xviiie siècle,
ces différents écrits, dans leur ­consignation des événements, adoptent
une démarche sélective et imposent une interprétation répondant à des
intérêts identifiables. Aussi est-il pertinent d­ ’évoquer à leur propos les
notions de censure et d­ ’autocensure, cette « forme d­ ’intériorisation et
­d’adoption (volontaire ou forcée) de principes et de critères qui fixent les
limites du discours », selon les termes de Cesc Esteve25, et cette mémoire
manipulée, déformée, obligée ou empêchée sur laquelle les travaux de
Paul Ricœur26 ont attiré ­l’attention.
Parmi les traits saillants c­ ommuns à plusieurs des textes examinés ici,
on remarquera en effet la propension à l­ ’occultation de certains épisodes
– parfois ­jusqu’à ­l’omission totale, témoignant ­d’une volonté ­d’imposer
­l’oubli, dans le cas des Germanías de Valence, dont Anne-Lise Richard
­constate ­qu’elles ne sont pas une fois mentionnées dans l­ ’histoire du règne
de Charles Quint écrite par Juan Ginés de Sepúlveda, chroniqueur de
­l’empereur – ou à la réduction d­ ’un événement c­ omplexe à une vision
simplificatrice. Ainsi, l­ ’explication du mécontentement des sujets par les
abus c­ ommis par des étrangers au royaume, c­ omme ­c’est le cas pour les
Comunidades de Castille notamment, et l­ ’attribution des débordements
25 Voir le dossier récemment publié sous la direction de Cesc Esteve, 2017, p. 14.
26 Voir notamment Ricœur, 2000.
Introduction 13

de violence à la plèbe aveugle sont des traits fréquents dans les textes
historiographiques de l­’époque moderne, la fonction première de ces
textes étant pour ainsi dire réparatrice. Il ­s’agit ­d’abord de projeter une
image flatteuse du règne mais aussi du royaume, et de permettre dans
le présent et dans le futur proche une réconciliation, une restauration
de la ­concorde. Plusieurs ­contributions démontrent que cet objectif est
largement partagé, y ­compris par des récits ­commandités par les instances
qui se sont soulevées ­contre l­ ’autorité royale, et par des témoignages plus
spontanés. Il en est ainsi des chroniques aragonaises postérieures à la
répression de la révolte de Saragosse, analysées par Jesús Gascón Pérez,
qui ­s’emploient ­d’une part à défendre la loyauté des sujets aragonais
envers la couronne – de même que les écrits valenciens qui abordent les
Germanías et les chroniques du règne de Charles Quint qui, dans leur
traitement des Comunidades, ­s’accordent sur la loyauté des Castillans –
et ­d’autre part à refonder, pour ­l’avenir proche, les rapports entre le
royaume et le monarque en préservant le régime foral aragonais.
Les oscillations entre une « dépolitisation » des révoltes et leur « re-
politisation » en fonction de l­ ’évolution du c­ ontexte ­d’écriture ont retenu
­l’attention. Ainsi, Alexandra Merle ­constate que les revendications
des ­comuneros ­concernant les rapports entre le roi et les Cortes (donc la
forme de la monarchie) et les c­ onceptions basées sur le droit de résis-
tance sont généralement passées sous silence pendant toute ­l’époque
moderne, et ce non seulement dans les chroniques mais aussi dans des
écrits ­consacrés à la réflexion politique, alors même ­qu’ils débattent des
causes des révoltes et des moyens d­ ’y remédier et s­’appuient sur cette
forme d­ ’expérience ­qu’est ­l’histoire ; de la même façon, la ­conjuration
des Pazzi c­ ontre les Médicis, dans les écrits des penseurs des Lumières
étudiés par Marion Bertholet, est le plus souvent présentée ­comme une
manifestation des rivalités lignagères et un épisode de vendetta, tout
en étant parfois exploitée (par Voltaire notamment) pour dénoncer les
ingérences de ­l’Église dans les affaires temporelles.
Le prolongement des analyses sur une longue durée permet la mise
en évidence de lectures successives, et parfois c­ ontradictoires, des évé-
nements, étroitement liées aux enjeux politiques propres aux différents
­contextes ­d’écriture : ainsi, l­ ’éclosion du libéralisme en Espagne amène
un réexamen des Germanías et des Comunidades et une re-politisation de
ces événements, ­comuneros et agermanados étant désormais vus c­ omme des
14 A. MERLE, S. JETTOT ET M. HERRERO SÁNCHEZ

défenseurs des libertés ­contre le pouvoir arbitraire des monarques, de


même ­qu’en Italie Sismondi fait des Pazzi des héros incompris, tombant
sous les coups d­ ’une populace que l­ ’emprise des Médicis a privée de ses
valeurs républicaines (Marion Bertholet) et que les écrits de Schiller,
analysés par Éric Leroy du Cardonnoy, ­s’inscrivant dans un ensemble
de textes de nature diverse rédigés par des intellectuels allemands dans
la période tendue qui suit la montée sur le trône impérial de Joseph II
(1780), manifestent un vif intérêt pour les révoltes du passé, établissent
un parallèle entre la politique de Joseph II et celle de Philippe II et
peignent Egmont en défenseur de la ­conservation des libertés tradi-
tionnelles. Une telle utilisation du souvenir de la révolte flamande est
­d’ailleurs ­constatée aussi dans ­l’action politique, ­comme le démontreront
certaines des études réunies dans la dernière partie de ce volume.

Plusieurs auteurs de ce volume partagent le souhait ­d’approcher la


mémoire des révoltes et des révolutions dans les pratiques archivistiques
des familles impliquées de près ou de loin dans ces événements. Il ne
­s’agit pas là, d­ ’une part, ­d’une mémoire mineure ou anecdotique placée à
côté de la grande histoire politique ou institutionnelle. Bien au ­contraire,
les familles sont des acteurs essentiels des crises politiques, ­qu’il s­ ’agisse
des élites ou des artisans et paysans. Leur mobilisation peut participer
de la solidarité familiale, mais il n­ ’est pas rare que les révoltes entraînent
aussi des lignes de fracture au cœur même de la parenté. Ainsi, Laura
Casella décrit le rôle ­d’une partie de la puissante famille des Savorgnan
dans le massacre de 1511 à Udine et celui des vendettas lancées par les
seigneurs de Porcia, au cours du xvie siècle. Pour les îles britanniques,
Ann Hughes ­s’intéresse aux épreuves endurées par des familles rurales
de Warwickshire et de Cheshire dans les affrontements des années
1640. Sur trois générations, de 1660 à 1740, Stéphane Jettot analyse
la manière dont les familles de la gentry impliquées dans la révolution
de 1640 organisent leurs archives personnelles. La ­contestation des
autorités politiques est aussi exprimée en termes de transgression d­ ’un
ordre familial, notamment patriarcal. Elle est dénoncée ­comme un acte
­contre nature, à rebours des liens d­ ’obéissance et de déférence imposés
par les liens du sang.
­D’autre part, et d­ ’une manière plus fondamentale, les archives fami-
liales selon leurs usages par les générations successives donnent lieu à
Introduction 15

des lectures très ­contrastées des événements. Sur ce point, ces chapitres
suivent un ordre chronologique qui permet de repérer des évolutions
significatives au cours de la période. Comme le souligne Laura Casella,
la publication des chroniques, des journaux et des livres de familles
au xixe siècle s­’est accompagnée d­ ’une suppression de tous les détails
et circonstances qui ne semblaient pas liés à ­l’histoire et à ses figures
héroïques. Ces publications érudites ont écarté tous les acteurs jugés
« mineurs », femmes, petits artisans, soldats. Ainsi, les cahiers de Venere
Bosina, une veuve appartenant au milieu artisanal et marchand, mêlent
des notes sur sa vie quotidienne et sur les diverses crises politiques du
xvie siècle. Ils témoignent de sa manière ­d’agir auprès de ses proches et
de réagir aux crises de son temps. Livres de c­ ompte ou de raison, journal
intime, généalogies ou mémoires sont autant d­ ’archives du « for privé »
qui participent à la mémoire des révoltes et révolutions27. Les finalités
associées aux actes d­ ’écriture et de préservation des documents divergent
des grandes entreprises historiographiques ou érudites.
Dans les documents du xviie siècle étudiés par Ann Hughes, la
­consignation des épreuves subies ­s’inscrit dans ­l’espoir de dédomma-
gements à venir. Ces documents qui livrent des ­chiffres mais aussi des
bribes de récits, sont pour elle une forme de transmission de ­l’expérience,
individuelle et collective, de la révolution. En effet ces archives ­n’étaient
pas produites par des officiers ­d’un état « moderne » mais par les familles
et leurs voisins qui participaient à leur élaboration en apportant témoi-
gnages, objets, documents susceptibles de satisfaire leurs attentes. En ce
sens, le « tournant mémoriel » identifié depuis plus d­ ’une décennie est
indissociable ­d’un « tournant archivistique » valorisant les ­conditions
matérielles de la création des archives28. Ces dernières ­n’ouvrent pas
nécessairement sur l­’intimité des individus et des familles, leur sous-
bassement mêle les sphères privées et publiques. Au-delà de la question
des réparations, elles témoignent de la diversité des attentes associée à
la mémoire : le souci de transmettre les traumatismes et de leur donner
un sens, l­’espoir de récréer un sentiment de c­ ontinuité entre l­’avant et
­l’après ou bien la volonté de défendre une réputation.
Des premiers livres de familles, les ricordanze italiens étudiés par
Laura Casella aux témoignages décrits par Ann Hughes un siècle plus
27 Arnoul, Bardet, Ruggiu, 2010.
28 Corens, Peters, Walsham (éd.), 2016.
16 A. MERLE, S. JETTOT ET M. HERRERO SÁNCHEZ

tard, ces égo-documents ont c­ onnu une diversification croissante. Les


modes narratifs ont changé avec la généralisation de l­’imprimé et
­l’alphabétisation. De plus en plus de familles s­’inspirent de passages
de la Bible ou de chroniques locales pour mieux faire valider leur expé-
rience des révoltes. La mémoire de l­ ’événement s­ ’inscrit moins dans une
perspective dynastique que dans des usages individuels et circonscrits
(dans le cas des réparations). Au xviiie siècle, époque où se multiplient
les ouvrages sur les années 1640, les mémoires familiales sont profilées
dans une perspective nationale ­comme le montre Stéphane Jettot qui
retrace leur assemblage dans de gros volumes diffusés sur l­’ensemble
des îles britanniques. ­C’est une évolution notable à ­l’échelle de l­ ’Europe
avant et après la révolution française avec la ­constitution des grandes
entreprises biographiques fondées sur les archives familiales c­ omme
le Famiglie celebri italiane de Pompeo Litta Biumi ou les dictionnaires
biographiques du Directoire29. Selon les circonstances et selon les géné-
rations, les archives familiales sont susceptibles de répondre à toutes
ces attentes. Régulièrement organisées et reclassées, partiellement
publiées ou diffusées, elles forment le socle des mémoires inachevées et
en c­ onstante reformulation.

À propos des mémoires orales, qui sont l­ ’objet ­d’un autre ensemble
de ­contributions, tous les auteurs partagent le même ­constat : il est
particulièrement difficile d­ ’exhumer ces mémoires des révoltes en milieu
urbain, et plus encore en milieu rural. Elles supposent un travail à partir
des sources moins formalisées, existant à l­’état de traces ou d­ ’indices
dans les archives judiciaires ou les chroniques. La distinction opérée
entre une mémoire « ­culturelle » fondée sur l­’écrit et la littérature en
particulier et une mémoire « ­communicationnelle » ­construite autour
de ­l’oralité et les témoignages, est de ce point de vue fondatrice30. Les
processus de damnatio memoriæ ­conduits par les institutions semblent
avoir été efficaces. Pour l­ ’époque médiévale, Vincent Challet détaille la
variété de ­l’arsenal répressif développé par les autorités pour disqualifier
le souvenir des révoltes rurales en recourant à des termes péjoratifs pour
désigner les émeutiers, c­ omme celui de « Jacques Bonhomme » pour les
29 Cremonini, 2016 ; Chappey, 2013.
30 Assmann, 2010, p. 19.
Introduction 17

révoltés en Ile de France, ou de « Tuchins » pour ceux de Normandie au


xive siècle. Jan Dumolyn et Jelle Haemers, dans le cas de la révolte de
Gand en 1455, font état des mesures prises par les autorités municipales
pour interdire ­l’évocation des « Gavere », un groupe de révoltés dont
le nom provient du village où ­s’est déroulée la répression de Philippe
le Bon deux années plus tôt. À Liège, en 1467, Charles le Hardi exige
la destruction des murs de la ville qui symbolisent son indépendance.
En écho, cette sanction peut être rapprochée de ­l’entrée ritualisée de
Louis XIV par la brèche des murs de Marseille après ­l’échec de la Fronde
en 1660. Pour le xviiie siècle, Éva Guillorel mentionne les résistances
des Jacobites, les partisans des Stuart, ­contre les autorités hanovriennes
qui tentent de censurer après 1745 les chansons favorables à la cause de
« Bonnie Prince Charlie ».
Simultanément, ces diverses études de cas laissent entendre la capacité
de résistance des plus humbles par le biais de chants, de prophéties, de
gestes ou de lieux spécifiques qui facilitent la transmission du souvenir
et agissent ­comme moteur de nouvelles révoltes.
­L’historien est ­conduit à emprunter les méthodologies de ­l’anthropologie
ou de la sociologie pour mieux appréhender les ressources de ­l’oralité.
Le corps apparaît ainsi ­comme un vecteur puissant de ces mémoires
empêchées. À travers ­l’étude des voix et du chant, Éva Guillorel retrace
la réutilisation ­d’un même timbre dans des révoltes différentes avec
­l’insertion de nouvelles paroles. ­S’intéressant aux chansons autour de
Guillaume Tell ou des Mazarinades, elle note la difficulté de reconsti-
tuer les ­conditions précises de la performance musicale dans laquelle
chanteurs et public sont engagés, c­ omme le ton et la gestuelle qui
accompagnent le chant. Elle surmonte toutefois en partie ces obstacles
en proposant elle-même une interprétation vocale de ces chants31. Jan
Dumolyn et Jelle Haemers, avec ­l’image des histoires transmises avec
le lait maternel ­comme celle des cruautés de Louis XI à Arras, traitent
aussi de l­’incorporation du souvenir. Réprimé par les autorités, ce der-
nier peut d­ ’ailleurs prendre la forme du fantôme hantant les vivants et
31 Cette initiative ­n’est pas sans analogie avec celle soutenue dans la revue Exercices de
Rhétorique qui associe historiens, littéraires et ­comédiens autour de la lecture de haran-
gues et de discours de ­l’Antiquité ­jusqu’à la Renaissance. Voir par exemple ­l’édition par
Francis Goyet de G. J. Vossius, Institutiones (1605), III, 17, « Le discours de reproches », et
18, « Le discours de ­condamnation sans appel », Exercices de rhétorique, 2 | 2013. ­consulté
le 17 janvier 2018.
18 A. MERLE, S. JETTOT ET M. HERRERO SÁNCHEZ

certains lieux emblématiques : la fréquence de ses apparitions démontre


que la mémoire des crises et des violences n­ ’est pas entièrement refoulée
et s­ ’invite de manière brutale sur la scène publique32. Enfin, il c­ onvient
de signaler la puissance évocatrice des noms de lieux – chapelles ou
monuments civiques ­comme le « Perron » de Liège – aux côtés des noms
de meneurs des révoltes.
Ces exemples qui soulignent la force des évocations de noms ou de
simples sons peuvent être rapprochés d­ ’autres illustrations, par le biais
de ­l’écrit cette fois, du rôle performatif du souvenir de révoltes parfois
très éloignées dans le temps. José Luis Egío, analysant l­ ’argumentation
développée par les Malcontents en France (1574-1576), met en effet en
évidence ­l’importance de la mémoire de soulèvements antérieurs : plu-
sieurs épisodes de c­ ontestation nobiliaire qui remportèrent un certain
succès, notamment la Ligue du Bien public c­ onstituée par les grands du
royaume ­contre Louis XI en 1465, ont assurément joué un rôle performatif
un siècle plus tard et sont un élément essentiel de la justification des
Malcontents, par la voie de pamphlets et de libelles largement diffusés.
Dans ces différents travaux, une circulation des mémoires ­contestataires
à l­ ’échelle de l­ ’Europe apparaît nettement. S­ ’il existe des champs histo-
riographiques bien c­ onstitués dans des espaces circonscrits, c­ omme la
mémoire huguenote en France, anglicane en Angleterre ou catholique
en Irlande, les modèles de ­contestation et de mobilisation font ici ­l’objet
­d’une approche ­comparative et ­d’une histoire des transferts. Ainsi,
Jan Dumolyn et Jelle Haemers soulignent des analogies, s­’agissant
des mémoires des révoltes citadines, entre les Flandres et le nord de
­l’Italie. Vincent Challet esquisse pour sa part une histoire européenne
des révoltes paysannes médiévales, avec de fréquentes c­ omparaisons
entre la révolte anglaise de 1381 et la Jacquerie de 1358. Éva Guillorel
rappelle les intersections qui se dessinent entre jacobitisme britannique
et jacobinisme français à ­l’occasion de la révolte irlandaise de 1798.
Les auteurs insistent aussi sur la nécessité de tenir c­ ompte de la
périodisation. Vincent Challet, dans le cas des ­communautés rurales
antérieures au xve siècle, ­constate que ­l’historien « doit souvent se
­contenter de bribes » et « se ­concentrer sur les gestes et les lieux plus que
sur les mots ». Pour les villes des Flandres du xve siècle, Jan Dumolyn
et Jelle Haemers disposent de sources plus abondantes sous la forme
32 Schmitt, 1994 ; Callard, 2012.
Introduction 19

de chroniques urbaines. Le moderniste tardif est nanti ­d’une palette


plus large, dont Eva Guillorel entreprend de faire l­ ’inventaire, de chants
ou de prophéties. La multiplication des imprimés, des gravures fait
que la c­ ulture orale est intimement imbriquée avec d­ ’autres supports
écrits ou graphiques, au point q­ u’il devient difficile de les dissocier33.
Cet assemblage est bien illustré par la ­contribution de José Luis Egío
autour des manipulations érudites d ­ ’Innocent Gentillet et du souve-
nir de la Ligue du Bien Public. « ­L’invention de la tradition » est un
paradigme célèbre qui exprimerait la capacité des élites à imposer une
mémoire ­consensuelle et « désamorcée » de tous éléments subversifs34.
Cependant, les travaux réalisés dans les deux dernières décennies ont
tendance à relativiser le caractère univoque de la tradition et à dissocier
la mémoire de ses formes institutionnelles. La parole des insurgés possède
des ressources insoupçonnées, elle s­’insinue dans les recoins laissés par
la mémoire officielle et dispose aussi ­d’une dynamique propre qui per-
pétue les aspirations à une « mémoire juste », susceptible selon Michèle
Baussant de verbaliser « un espoir d­ ’action réparatrice qui viendrait non
seulement restaurer le passé, mais aussi l­ ’espace existant entre le passé
et le présent35. »

La dernière partie de ce volume envisage ­l’utilisation de la mémoire


de la révolte dans ­l’action politique, en prenant pour exemple les usages
qui furent faits de la révolte flamande et des deux révolutions anglaises
– dont on a déjà souligné le rayonnement –, de la révolte napolitaine de
1647-1648 et des nombreuses insurrections et c­ onspirations génoises.
Ces diverses études ­s’intéressent avant tout au maniement de la mémoire
de ces événements dans l­’espace politique qui en fut le théâtre, sans
­s’interdire de prendre en ­compte plusieurs échelles – que ce soit dans
le temps ou dans l­’espace.
Une première c­ onstatation c­ oncerne le caractère c­ ontrasté des actions
guidées par l­’expérience récente d ­ ’une révolte ou d ­ ’une tentative
­d’insurrection. Si les réactions immédiates des autorités peuvent aller,
au gré des circonstances et des enjeux, de la volonté d­ ’occultation à la
plus large des publicités, ­comme le montre ­l’étude que Diego Pizzorno
33 Castillo Gómez, Amelang et Serrano, 2010.
34 Hobsbawm, Ranger (éd.), 1983. Sur une critique de ce paradigme, voir Readman, 2005.
35 Beaussant, 2006, p. 11.
20 A. MERLE, S. JETTOT ET M. HERRERO SÁNCHEZ

c­ onsacre à ­l’attitude du gouvernement de Gênes face à plusieurs ten-


tatives ­d’insurrection au cours du xviie siècle, ­l’impact de la mémoire
­d’événements moins rapprochés dans le temps n­ ’est pas moins variable.
Le désir de ne pas renouveler des erreurs qui ont ­conduit au ­conflit
peut mener à une plus grande souplesse, ou au ­contraire à une sévérité
accrue, et il ­n’est pas rare ­d’observer une oscillation entre ces deux
orientations, ­comme le montre Alberto Rodríguez Martínez dans le cas
des Flandres. Au moment de la négociation de la Trêve de Douze ans
avec les provinces rebelles, la politique menée par les archiducs Isabelle
Claire Eugénie et son époux Albert favorise en effet la médiation de
« naturels » flamands dans un esprit de ­conciliation inspiré par les ensei-
gnements du passé, tandis que ­l’entourage de Philippe III, à Madrid,
retire de ce même passé une méfiance prononcée envers ­l’ensemble des
Flamands. Cette ambiguïté est du reste une ­constante, ­comme le révèle
Manuel Herrero : d­ ’un côté, la peur de voir se renouveler un c­ omplot de
la noblesse flamande provoque, en 1632, ­l’arrestation à Madrid ­d’une de
ses principales figures, le prince ­d’Arenberg ; de l­ ’autre, ­c’est en tenant
­compte de la rancœur suscitée autrefois par ­l’exécution ­d’Egmont et
de Horne que don Juan José ­d’Autriche, lors de la révolte de Naples,
incline à la clémence.
Par ailleurs, plusieurs des études de cas présentées ici révèlent ­l’influence
du souvenir de certaines révoltes sur la façon dont sont perçus ­d’autres
épisodes de c­ ontestation parfois bien postérieurs : ainsi, Domenico Cecere
montre à quel point le souvenir de la révolte de Masaniello a pesé sur
la manière dont les tentatives de révoltes enregistrées à Naples ont été
jugées, ­jusqu’à ­l’extrême fin du xviiie siècle. De même, le souvenir de la
révolte flamande est omniprésent au sein de la monarchie espagnole, et
est ouvertement évoqué aussi bien lors des « altérations » de Saragosse
en 1591 (dont on craint q­ u’elles ne deviennent « otro Flandes »), ­qu’au
temps des révoltes des années 1640, à Naples, en Catalogne, au Portugal
ou même à l­’occasion de la révolte des Araucans au Chili, qualifiée de
« Flandes indiano » ­comme le relève Manuel Herrero.
Outre que ces divers épisodes de révolte peuvent alimenter, dans le
discours théorique, la réflexion sur les révoltes, sur les moyens de les
éviter et sur ­l’attitude à adopter après leur répression, et ce même en
dehors de ­l’espace ­culturel qui leur est propre – ainsi, Manuel Herrero
signale que la révolte flamande nourrit la réflexion politique tout à la
Introduction 21

fois dans la sphère protestante et dans ­l’espace catholique –, leur sou-


venir est fréquemment instrumentalisé dans le c­ ontexte de ­conflits et
de débats. Ulrich Niggemann dévoile toute la richesse des utilisations
des événements de 1640-1649 dans la vie politique anglaise du temps
de la reine Anne, d­ ’autant plus que leur souvenir est croisé avec celui de
la Glorieuse Révolution de 1688-1689. Dans les débats animés de ces
premières années du xviiie siècle, les Tories font grand usage du souvenir
de la première révolution pour disqualifier les Whigs, présentés c­ omme
héritiers des idées qui ont mené au régicide et accusés de vouloir détruire
la monarchie et ­l’Église d­ ’Angleterre ; de leur côté, les Whigs attaquent
le principe ­d’obéissance passive propagé par les Tories en l­ ’interprétant
­comme une ­condamnation de la Glorieuse Révolution.
À une autre échelle encore, la mémoire de certaines révoltes peut être
maniée depuis ­l’étranger, répondant à des enjeux internationaux. Ainsi
Manuel Herrero rappelle que les Français se sont efforcés d­ ’entretenir
ou de raviver le souvenir des atrocités ­commises par le duc ­d’Albe au
moment où, face à la politique de Louis XIV, dans la seconde moitié du
xviie siècle, se ­consolidait une alliance hispano-néerlandaise.
Les différentes études réunies ici, reposant sur des approches variées,
révèlent l­’existence ­d’une mémoire plurielle des événements insurrec-
tionnels, et ­d’un large éventail de voies de transmission, d­ ’adaptation et
­d’interprétation. Si nous avons souhaité mettre en valeur l­ ’importance
des processus mémoriels dans ­l’étude des révoltes et révolutions, notre
intention n­ ’a pas été de développer un traitement purement émotionnel,
impressionniste et subjectif des événements traumatiques, mais plutôt
de mettre en lumière ­l’existence, à ­l’époque moderne, ­d’interactions
­complexes entre la mémoire individuelle, familiale ou corporative et
la ­constitution d­ ’une mémoire publique qui répondait de son côté à la
pluralité des modèles d­ ’organisation étatique, caracterisée par l­ ’existence
de formes de souverainetés multiples et partagées36. Nous nous trou-
vons face à un ensemble ­complexe de formes de remémoration mais
aussi ­d’occultation de faits insurrectionnels qui sont à ­l’origine de la
­configuration ou de la redéfinition d­ ’identités sociales et politiques. Les
36 Nous renvoyons au programme pluriannuel de la Casa de Velázquez, « Villes insurgées,
villes réprimées » (VIVIR) coordonné par Antonio Álvarez-Ossorio, Manuel Herrero et
Alain Hugon, dans le cadre duquel ont été abordées des questions telles que les processus
­d’exclusion, de marginalisation et de répression des révoltes urbaines en Europe ou les
liens entre les révoltes et les différents modèles de souveraineté.
22 A. MERLE, S. JETTOT ET M. HERRERO SÁNCHEZ

différents processus de rupture du corps social ­qu’impliquent les soulè-


vements et révoltes se manifestent par de nombreux témoignages qui ne
sont pas toujours aisés à retracer. S­ ’agissant d­ ’événements marqués par
la violence et le désordre, les preuves documentaires, iconographiques
ou sonores dont nous disposons sont ­d’ordinaire peu nombreuses ou
difficilement accessibles du fait de la volonté ­d’occultation ou de la réa-
daptation et de la manipulation du sens dont elles ont pu être ­l’objet,
tant de la part des protagonistes eux-mêmes que des représentants
du pouvoir. Nous espérons avoir montré toutefois ­qu’elles sont plus
nombreuses ­qu’on ne pourrait le penser au premier abord. Dans la
mémoire des corporations, mais aussi des individus, dans les chansons,
dans certaines ­festivités et dans les vêtements, ou encore dans les trans-
formations subies par ­l’espace urbain, la pluralité et la flexibilité des
traces des révoltes du passé nous disent que l­ ’ordre et la stabilité sociale
ne sont ­qu’une parenthèse ; le souvenir de ces révoltes du passé palpite
encore et est capable d­ ’inspirer de nouvelles révoltes c­ omme de mettre
un frein à leur succès.

Alexandra Merle,
Stéphane Jettot
et Manuel Herrero Sánchez
PREMIÈRE PARTIE

­L’ÉCRITURE DE LA RÉVOLTE

LES USAGES POLITIQUES


DE ­L’HISTORIOGRAPHIE
“LA VERDAD SENCILLA Y DESNUDA
DE LOS SUCESOS DE ARAGÓN”
Memoria, olvido y proyecto político
en las obras sobre la rebelión de 1591 c­ ontra Felipe II

Esta es la verdad sencilla y desnuda de


los sucesos de Aragón: argumento bien
espacioso para responder á los que, ­como
dixe, tanto se desviaron della1.

Para un investigador del siglo XXI, resulta imposible realizar una


lectura ingenua de la apelación hecha por Lupercio de Argensola a
sus lectores en el último capítulo de su Informacion de los sucesos del
Reino de Aragon. No en vano, ­como se ha recordado recientemente, “la
verdad y la objetividad, c­ omo pilares de la historiografía tradicional,
han sido los dos principales blancos de la crítica postmoderna.”2 De
hecho, uno de los más feroces detractores de esta corriente de pen-
samiento deplora su pretensión de “haberse librado de ‘la tiranía de
la coherencia y la ­verdad’”3, y es preciso reconocer que tal actitud
ha generado abundantes debates al respecto de ambos ­conceptos y
de su vigencia en el ámbito de la historiografía4. Como ejemplo,
baste recordar la postura adoptada por el historiador británico Keith
Jenkins, a cuyo entender

1 Leonardo de Argensola, Informacion de los sucesos del Reino de Aragon, p. 231.


2 Bolaños de Miguel, 2011, p. 296.
3 Se trata de Bunge, 2013, p. 8. Dentro del ámbito científico, Sokal, Bricmont, 1999, se
han mostrado igualmente muy críticos ­con los pensadores posmodernos, lo mismo que
Callinicos, 2011, desde una perspectiva marxista.
4 Sobre las aportaciones de la historiografía posmoderna, es interesante la visión de ­conjunto
elaborada por Mussy, Valderrama, 2010, que incluye cuatro manifiestos de historiadores
posmodernos.
26 JESÚS GASCÓN PÉREZ

La historia es un discurso, un juego lingüístico; en él, la “verdad” y las expre-


siones similares a esta son artefactos que permiten la apertura, la regulación
y la clausura de las interpretaciones. La verdad actúa c­ omo un censor que
establece los límites. Sabemos que tales verdades son, en realidad, “ficciones
útiles” que se encuentran en el discurso en virtud del poder (alguien las ha
colocado y las mantiene allí) y que el poder utiliza el término “verdad” para
ejercer su ­control: los regímenes de verdad. La verdad previene el desorden y
es este miedo al desorden (a los desordenados) o, para decirlo de forma más
positiva, es este temor a la libertad (por parte de los que no son libres) lo que
la vincula funcionalmente a los intereses materiales5.

Pese al interés que encierran las reflexiones teóricas sobre la verdad y


la objetividad en el relato histórico, el presente estudio6 no tomará parte
en dicho debate, al que desde mediados del siglo XX han c­ ontribuido
filósofos e historiadores relevantes, ­como Paul Ricœur7, Edward Hallett
Carr8, Raymond Aron9, Adam Schaff10, Paul Veyne11, Hayden White12,
Michel de Certeau13, Henri-Irénée Marrou14, Michel Foucault15, Jerzy
Topolski16 o François Hartog17, por citar solo unos cuantos ejemplos.
5 Jenkins, 2009, p. 41.
6 Este trabajo ha recibido financiación del grupo de investigación “Blancas” del Gobierno
de Aragón (ref. H33) y del proyecto de investigación “Imagen y representación de la
Monarquía Hispánica: mitos y realidades de un modelo ­constitucional inacabado” del
Ministerio de Economía y Competitividad (ref. DER 2012-39719-C03-03).
7 Ricœur, 2015. En ­concreto, en un trabajo de 1951 (ibid., p. 193-224) el filósofo francés
reflexionó sobre el carácter pluridimensional de la verdad y propuso la existencia de distin-
tos “órdenes de verdad”, mientras que en otro texto publicado al año siguiente señaló que
“existen tantos niveles de objetividad ­como ­comportamientos metódicos » (ibid., p. 29).
8 Carr, 2011. Se trata de la reedición de unas c­ onferencias que pronunció en 1961.
9 Aron, 1962.
10 Schaff, 1974.
11 Veyne, 1972.
12 White, 2001 y 2003. Las ediciones originales en inglés aparecieron en 1973 y 1978,
respectivamente.
13 Certeau, 2006. Su obra se publicó en francés en 1975.
14 Marrou, 1999. El libro se editó en francés en 1975.
15 Una buena introducción al análisis de la verdad realizado por Foucault en varias obras
a partir de fines de la década de 1970, puede verse en Lorenzini, 2010, quien recuerda
que el filósofo francés se propuso elaborar una historia de la verdad en la que distinguió
entre la “verdad-demostración” y la “verdad-acontecimiento”, a la vez que señaló tres
formas de relación entre subjetividad y verdad: filosófica, positivista e histórica. De ahí
partió su formulación del c­ oncepto de “régimen de verdad”.
16 Topolski, 1997, p. 184.
17 Hartog, 2007. Partiendo de la propuesta de Foucault y basándose en los trabajos
del antropólogo Marshall Sahlins y del historiador Reinhart Koselleck, Hartog ha
desarrollado su noción de “régimen de historicidad”, que puede entenderse desde una
“La verdad sencilla y desnuda de los sucesos de Aragón” 27

No obstante, tampoco se perderá del todo el marco de referencia de tales


reflexiones, ya que el objetivo es ofrecer un análisis de la c­ onstrucción
histórica elaborada por los autores aragoneses que escribieron sobre el
levantamiento de 1591, que en otros lugares he calificado c­ omo apolo-
gética18. Conocido ya su ­contenido, así ­como las circunstancias en que este fue
elaborado ­como réplica a los autores que tras el ­conflicto escribieron crónicas
desfavorables para el reino de Aragón, en esta ocasión nuestra aproximación
al tema tomará en c­onsideración tres factores: la información que en dicha
­construcción apologética se ofrece, las omisiones que se detectan en ella y
el proyecto político que se percibe en su trasfondo.
Como paso previo a dicho análisis, inicialmente volveremos de nuevo
la vista al pasaje escogido para encabezar estas páginas, a fin de recordar
que la pretensión de veracidad fue un recurso retórico que los apologistas
aragoneses utilizaron para censurar a los autores que, según el ­conde
de Luna, “escribieron siniestramente de los sucesos de Zaragoza.”19
Como explica el citado Argensola, muchos de ellos habían ­compuesto
sus textos “­contra la verdad” de lo ocurrido en 1591, circunstancia que
achaca a que “algunos han sido mal informados, y otros por malicia ó
por ignorancia no han querido informarse.”20 En parecidos términos se
manifestó el franciscano Diego Murillo, que censuró
el engaño que recibieron los que movidos de solo el falso rumor de las cosas
que oyeron dezir, se arrojaron a escrivir ­contra la verdad, afirmando por cierto,
lo que no solo era dudoso, mas falso. Y cierto avian de c­ onsiderar, que (­como
dize el refran Español, a luengas vias luengas mentiras: y que aun dentro
del mismo lugar donde suceden las cosas, en diversos barrios se cuentan de
differente manera: y assi, o no avian de dar credito a qualquiera rumor (Nam
qui citó credit, levis est corde) o ya que le davan, no se avian de arrojar c­ on tan
leve fundamento a infamar a un Reyno, que en materia de lealtad puede
­competir c­ on todas las naciones del mundo21.

perspectiva limitada (­como la forma en que una sociedad se refiere a su pasado) o bien
desde una perspectiva más amplia (­como “la modalidad de c­ onciencia de sí misma
por parte de una c­ omunidad humana”). Según el propio autor, la primera vez que
sugirió la utilidad de dicha herramienta heurística fue en un artículo publicado en
1983 (ibid., p. 29).
18 Por ejemplo, en Gascón Pérez, 1995, p. 17-23, e Id., 1999, p. 244-252.
19 El noble aragonés utilizó dicha expresión en Gurrea y Aragón, Comentarios de los sucesos
de Aragón, p. 305.
20 Leonardo de Argensola, Informacion de los sucesos del Reino de Aragon, p. 1.
21 Murillo, Fundacion milagrosa, tratado ii, p. 137-138. La cita latina corresponde al Antiguo
Testamento, en ­concreto a Eclesiástico, 19, 4: “El que es fácil en creer es ligero de corazón.”
28 JESÚS GASCÓN PÉREZ

Por su parte, Bartolomé de Argensola, hermano menor de Lupercio, aun


mostrando su ­comprensión hacia los autores interesados en historiar un
episodio tan relevante, censuró las interpretaciones basadas en relaciones
alejadas de la verdad de los hechos:
Nadie negará que el desorden de las revoluciones, que molestaron el sosiego
de Zaragoza desde el año MDXCI, dio a los escritores ocasión para reducirles
a Historia; pero no licencia para interpretarlas a su alvedrío y mucho menos
a los vezinos que las miravan entonzes ­como en teatro, a donde la misma
verdad les pudo instruir mejor que las relaciones22.

Y ­con mayor dureza aún se manifestó el madrileño Gonzalo de Céspedes


y Meneses, a cuyo juicio tales escritores
erraron totalmente el sucesso, dixeron mil engaños, y descuydos, sin verdad,
ni aun ficcion (tanto quiero apretarlos) porque en la primera, faltaron sin
medida, y recato; y en la segunda, previrtieron lo ingenioso, y sutil, de la
Nobela; lo Verisimil y suspenso. Y finalmente para mas declararme, y dezir
sin ambages; sus afectos: unos fueron Pintores, y otros Poëtas; pero aquellos
al temple, y estos ­con torpes musas23.

A la vista de estos pasajes, parece claro que, en ­conjunto, los argu-


mentos escogidos por los apologistas del reino de Aragón para replicar
a sus oponentes reflejan una sintonía plena c­ on las ideas historiográficas
vigentes a finales del siglo XVI y c­ omienzos del XVII24. De hecho, estas
incluían una c­ oncepción retórica del género histórico y, al mismo tiempo,
establecían una clara diferenciación entre el trabajo de los historiadores y
el de literatos y artistas, para lo cual era habitual recurrir a términos ­como
los empleados por Céspedes. Así, el ­conde de Luna entendió justificables
los errores c­ ometidos por el indiano novohispano Antonio de Saavedra
Guzmán “en sus versos duros y mal limados”, aduciendo que “la licencia
poética lo disculpa” y recordando la máxima de Horacio según la cual
“Pictoribus atque Pœtis Quilibet audendi semper fuit æqua potestas.”25 Y el
22 Leonardo de Argensola, Alteraciones populares de Zaragoza, p. 83.
23 Céspedes y Meneses, Historia apologética en los sucessos del Reyno de Aragon, p. 214.
24 Entre las aproximaciones recientes a este asunto, citaré aquí tan solo los trabajos de Esteve,
2008, e Id., 2014.
25 Gurrea y Aragón, Borrador de los Comentarios, vol. 2, fo 73ro. Como indica el noble aragonés
en el margen del manuscrito, la máxima procede del Arte poética del autor latino, cuyas
distintas versiones al castellano c­ omparten dicha “licencia poética” c­ omo fondo c­ omún:
“Poder tienen pintores, y poetas / De osar acometer qualquiera cosa” (Espinel, Arte poetica
“La verdad sencilla y desnuda de los sucesos de Aragón” 29

mismo precepto fue recordado por el padre Murillo, quien, ­con criterio
más riguroso, puntualizó al respecto que “quando es cosa sucedida y no
ficcion lo que se escribe en verso, tiene obligacion el que lo escribe de
mirar que diga verdad; porque en tal caso no hace officio de Poeta, sino
de Historiador, y ­como tal ha de huyr de ficciones.”26 Una idea que, ­como
es sabido, Cervantes plasmó en el Quijote poniéndola en boca del bachiller
Sansón Carrasco, a cuyo parecer “uno es escribir ­como poeta, y otro ­como
historiador: el poeta puede c­ ontar o cantar las cosas, no c­ omo fueron, sino
­como debían ser; y el historiador las ha de escribir, no c­ omo debían ser, sino
­como fueron, sin añadir ni quitar a la verdad cosa alguna.”27 De manera
que, ­como sentencia el propio don Quijote pocas páginas más adelante,
“La historia es c­ omo cosa sagrada, porque ha de ser verdadera, y donde
está la verdad, está Dios, en cuanto a verdad; pero, no obstante esto, hay
algunos que así c­ omponen y arrojan libros de sí c­ omo si fuesen buñuelos.”28
Dejando a un lado la c­ onsideración teológica planteada por el perso-
naje cervantino, lo cierto es que resulta fácil c­ onstatar que, al igual que
sus coetáneos de los siglos XVI y XVII, los cronistas objeto de nuestro
estudio tomaron varios referentes de la preceptiva clásica, ­como queda
de manifiesto en la antedicha referencia a Horacio. A esta circunstancia
cabría añadir el evidente entronque ­con el archiconocido pasaje del diálogo
De oratore, en el que Cicerón presenta a la historia ­como “maestra de la
vida”29, una idea bien perceptible en el siguiente ­comentario de Vicencio
Blasco de Lanuza, pese a que no se cita expresamente al autor latino:
Es la historia maestra de la vida humana, porque de la variedad de sucessos,
y memoria dellos, (que la historia c­ onserva) nace la prudencia, govierno de
nuestra vida: y por esta causa, y otras muchas ha tenido muy buen lugar entre
todas las naciones del mundo: haziendo della la estimacion, que merece30.

de Oracio, p. 150vo); “Siempre pudieron atreverse á tódo / Pintores y Poetas” (Iriarte, El


arte poetica de Horacio, p. 4); “Confieso, que siempre tienen / Los Pintores, y Poetas / El
poder, y la osadia / De entrar en qualquiera empressa” (Lozano, Traduccion del arte poetica
de Horacio, s.p.). La obra censurada por el ­conde en este caso, fue la de Saavedra Guzmán,
El peregrino indiano.
26 Murillo, Fundacion milagrosa, tratado ii, p. 145.
27 Cervantes, 2004, Segunda parte, cap. iii, p. 569.
28 Ibid., Segunda parte, cap. iii, p. 573.
29 Cicerón, Sobre el orador, libro ii, p. 218. En c­ oncreto, el pasaje identifica a la historia c­ omo
“testigo de los tiempos, luz de la verdad, vida de la memoria, maestra de la vida, heraldo
del pasado”.
30 Blasco de Lanuza, “Prologo al letor”, en Ultimo tomo de historias eclesiasticas, s.p.
30 JESÚS GASCÓN PÉREZ

Por añadidura, la misma referencia a Cicerón, que atribuye a los


oradores la ­competencia de escribir historia, permite abundar si cabe en
la ­concepción de esta c­ omo género retórico, bien perceptible en muchos
autores de la época. A título de ejemplo, c­ omo se ha destacado de modo
reiterado, el Quijote ­contiene abundantes referencias que permiten acre-
ditar el c­ onocimiento que Cervantes tuvo de algunos escritos clásicos
sobre este asunto, en particular los de Plutarco31, autor que también es
mencionado de forma explícita ­como “historiador famoso” por Blasco de
Lanuza, quien declara imitar su práctica de incluir poemas en sus obras,
“proque [sic] ­con mucha brevedad dizen mucho, y encierran grandes
sentencias, son de ornato, tienen elegancia, y variedad c­ on que alegran,
y despiertan los ingenios.”32 En cualquier caso, ­como aclara el mismo
cronista aragonés, dicha práctica no suponía una mengua en cuanto
a la exigencia de verdad propia del género histórico, razón por la cual
aseguró que “oprobrios, no son admitidos en mis obras: la verdad y la
modestia son el fundamento, o por mejor decir el nivel, y regla de los
escritores Christianos.”33
Por otra parte, sin restar ni un ápice de importancia a las circuns-
tancias ­concretas que determinaron la ­composición de los escritos de
estos hombres, derivadas del difícil c­ ontexto generado por la rebelión de
159134, la forma en que desarrollaron su labor debe incardinarse también
dentro del momento historiográfico que les tocó vivir. Así, la denuncia
­contra los autores antiaragoneses por su falta de rigor debe relacionarse
­con la “creciente ­conciencia de la necesidad de probar la historia”, una
característica que Peter Burke juzgó definitoria de la historiografía
renacentista35 y que permitió a este autor británico, c­ on las debidas mati-
zaciones, hablar de la existencia de “una auténtica revolución histórica
­comparable a la revolución científica.”36 En este sentido, nada tiene de
extraño que los cronistas aragoneses, siguiendo la estela de su siempre
recordado Jerónimo Zurita37, alegasen estar ofreciendo a sus lectores “la

31 A este respecto, véanse, por ejemplo, los trabajos de Ramón Palerm, 1998, e Id., 1999.
32 Blasco de Lanuza, “Prologo al letor”, en Ultimo tomo de historias eclesiasticas, s.p.
33 Ibid., s.p.
34 Véanse a este respecto Gascón Pérez, 2013, e Id., 2017, así c­ omo Jarque Martínez, 2013.
35 Burke, 2016, p. 67.
36 Ibid., p. 93.
37 La imagen de Zurita ­como cronista riguroso ­continúa inalterable desde su época. A ello
ha ­contribuido el estudio clásico de Andrés de Uztárroz, Dormer, Progressos de la Historia
“La verdad sencilla y desnuda de los sucesos de Aragón” 31

verdad sencilla y desnuda de los sucesos de Aragon”, según la expresión


ya ­conocida de Argensola, o “la pura verdad de las cosas sucedidas en
esta ciudad y Reyno”, según el padre Murillo38, y que tratasen de ofrecer
pruebas fehacientes que avalasen sus asertos. Del mismo modo, la insisten-
cia en recordar los fundamentos de los fueros del reino puede entenderse
también ­como una manifestación del denominado “giro político” o “giro
pragmático” subrayado por diversos autores para el siglo XVI, según el
cual “la historia era importante y útil sobre todo porque procuraba a los
gobernantes una especie de escuela o de laboratorio de casos y ejemplos
de naturaleza política, cuyo estudio ­contribuiría significativamente a
aumentar su prudencia y sus destrezas39”. Y, por último, tampoco resulta
inadecuado vincular en parte la autocensura practicada por estos autores
­con la metodología histórica de la época, en la cual iba cobrando cada vez
mayor relevancia la idea de que el alejamiento y las pruebas documentales
resultaban herramientas necesarias para elaborar una historia rigurosa.
De este modo, ­como indica Cesc Esteve,
La revisión a la baja del valor epistemológico del relato histórico basado en la
vivencia y la experiencia del escritor y la c­ onvicción de que la distancia tem-
poral era imprescindible para captar objetivamente la significación histórica
de unos hechos o el espíritu distintivo de un período pueden ­considerarse
ideas sintomáticas de la modernización de la historiografía y no debe perderse
de vista que su formación estuvo estrechamente vinculada a las formas y los
usos de la censura en la historiografía40.

Al respecto de este proceso de revisión metodológica, resulta ilustra-


tiva la definición que del término “historia” ofreció en 1611 Sebastián de
Covarrubias en su Tesoro de la lengua castellana o española, ya que c­ omienza
haciéndose eco de la c­ onsideración clásica del historiador c­ omo testigo
de vista de los hechos que narra, para proponer a c­ ontinuación una
alternativa basada en el manejo de fuentes documentales y de autores
de ­confianza, así c­ omo en la honestidad del investigador:
en el Reyno de Aragon, del que son deudores, entre otros, los análisis de Viñaza, 1904,
Canellas, 1986, y Solano, 1986. Una aproximación más crítica a dicha imagen, en Gascón
Pérez, 2013a.
38 Murillo, Fundacion milagrosa, tratado ii, p. 137.
39 Esteve, 2017. Sobre el “giro político” de la historia en la época que nos ocupa, véase Kagan,
2010 y, para el caso c­ oncreto de la participación de Cervantes en él, Alvar Ezquerra,
Montcher, 2014.
40 Ibid., p. 10 del manuscrito original.
32 JESÚS GASCÓN PÉREZ

Historia, es una narracion y exposicion de acontecimientos passados: y en


rigor es de aquellas cosas que el autor de la historia vio por sus propios ojos,
y da fee dellas, c­ omo testigo de vista, segun la fuerça del vocablo ίςτορία, άπό
ϒω ιστορειν, quod est spectare, vel cognoscere. Pero basta que el historiador
tenga buenos originales, y autores fidedignos de aquello que narra y escrive,
y que de industria no mienta, o sea floxo en averiguar la verdad, antes que
la assegure ­como tal41.

Sin duda, la propia definición permite ­constatar las transformaciones


que se estaban operando en el ámbito de la historia en el momento de su
formulación. Ahora bien, el hecho de que Covarrubias pudiera cohonestar
sin dificultad dentro de un mismo texto dos enfoques historiográficos
divergentes también ayuda a entender que dichas transformaciones se
estaban produciendo de modo gradual, tal y ­como ha sugerido en nues-
tros días Cesc Esteve:
El paso de una ­concepción retórica y literaria de la historia a una ­concepción
pragmática, política y científica de la disciplina es quizá la evolución o, si se
quiere, la innovación más evidente y significativa en el desarrollo del pen-
samiento histórico de los siglos XV, XVI y XVII. Sin embargo, en ­contra
de lo que han postulado algunos estudios, esta transición en los modos de
entender la historia y regular su práctica ni implicó la colisión de tradiciones
o corrientes de pensamiento opuestas, ni ­comportó grandes rupturas en el
discurso teórico, ni hiatos insalvables entre los filósofos de la historia y los
historiadores coetáneos. Fue más bien el resultado de una reconsideración
gradual del interés y de la importancia de un c­ onjunto estable de c­ onvicciones
y cuestiones relativas a los principios, métodos y fines de la historiografía
ampliamente ­compartido por los distintos agentes de la ­cultura histórica
altomoderna. Quizá la forma más apropiada de describir estos cambios sea
en términos de desplazamiento, reequilibrio y reorganización jerárquica de
los géneros, temas y debates que dominaron el discurso teórico durante la
temprana modernidad42.

Así pues, ­como historiadores de su tiempo, los cronistas aragoneses


se vieron en la necesidad de probar la verdad de sus relatos sobre lo
ocurrido en 1591. Para ello, a tono c­ on la renovación historiográfica que
se acaba de describir, ­consultaron abundantes fuentes43 y en sus obras
reprodujeron documentos en apoyo de sus afirmaciones. Principalmente
41 Covarrubias Orozco, Tesoro de la lengua castellana, p. 473vo.
42 Esteve, 2014, p. 117.
43 Sobre este asunto, merece mención especial el exhaustivo análisis de las fuentes utilizadas
por Bartolomé de Argensola que acometió en su día Colás Latorre, 1995.
“La verdad sencilla y desnuda de los sucesos de Aragón” 33

cartas, ­como las escritas por Felipe II o por su general don Alonso de
Vargas en abono de la fidelidad del reino, que fueron aportadas por
Blasco de Lanuza44. Pero también, c­ omo fue el caso de Lupercio de
Argensola, documentos relativos a la c­ onvocatoria y celebración de las
Cortes de Tarazona de 1592, así ­como la sentencia dictada tres años
más tarde por el Consejo de Aragón c­ ontra el duque de Villahermosa45.
No obstante, ­como herederos de la tradición historiográfica clásica,
varios de estos autores recurrieron también al aval de su c­ ondición de
observadores directos de los hechos, lo cual permitió al c­ onde de Luna
argumentar que “lo que digo vi, y lo que vi escribo”46; a fray Marcos de
Guadalajara, referir “el principio, sucesso, y fin desta Inquietud, c­ omo
testigo de vista”47; al padre Murillo, reclamar “aver sido testigo de vista
en sus desventuras”48; y al abad Martín Carrillo, aducir “aver sido testigo
de vista, de lo que por esta causa sucedio en la ciudad de Çaragoça este
año [1591], y el siguiente.”49
Bajo estas premisas metodológicas se debe ­considerar la manera en
que estos autores c­ onstruyeron su interpretación apologética, surgida, no
hay que olvidarlo, en un c­ ontexto político y social c­ ondicionado por las
graves ­consecuencias del ­conflicto registrado en 1591, que influyeron
de modo decisivo en la elaboración y difusión de sus trabajos50. En este
sentido, la síntesis del c­ onflicto elaborada por el citado abad Carrillo en
1622 para formar parte de sus Annales puede ayudar a ilustrar el discurso
final elaborado, así ­como servir de base al análisis de su ­contenido según
los términos planteados páginas atrás:
En Aragon se c­ omovio cierta inquietud popular bien molesta, por querer
algunos favorecer la persona de Antonio Perez, sucessos mal entendidos,
y peor escritos por algunos autores estrangeros […] Tenia su Magestad un
exercito aprestado, para que passasse a Francia: sucedio en esta ocasion y año,

44 Así puede verse por ejemplo en el capítulo viiii de Blasco de Lanuza, Ultimo tomo de his-
torias eclesiasticas, p. 265-268, que ­contiene varias de esas cartas y que lleva el descriptivo
título de “Lo que don Alonso de Bargas escriviò a algunos hidalgos de Ribagorza. Lo
que a su Magestad, y a las Universidades desde Reyno. Lo que su Magestad estimò, y
honrò el valor, y fidelidad de los Aragoneses.”
45 Leonardo de Argensola, Informacion de los sucesos del Reino de Aragon, p. 163-230.
46 Gurrea y Aragón, Comentarios de los sucesos de Aragón, p. 16.
47 Guadalajara y Xavier, Quarta parte de la Historia pontifical, p. 5.
48 Murillo, “Prologo apologetico al christiano lector”, en Fundacion milagrosa, tratado i, s.p.
49 Carrillo, Annales y memorias cronologicas, p. 420vo.
50 Así lo he recordado en Gascón Pérez, 2013b, p. 120.
34 JESÚS GASCÓN PÉREZ

que Antonio Perez preso, y acusado por delictos graves, y por el Santo oficio,
fue por algunos, a quien el tenia engañados, y al vulgo sacado de las carceles,
y puesto en libertad: atrevieronse estos inquietos a la justicia, y al tribunal
de la Santa Inquisicion; era necessario el castigo destos excessos, mandò su
Magestad que dicho exercito passasse por Aragon, é hiziesse alto en Çaragoça:
entrò en la Ciudad sin ­contradicion, encuentro, ni detenimiento, ­como en
casa propria, y tierra de su Rey y señor: ­con esto se dio autoridad y poder
a la justicia, y fueron castigados los inquietos, y favorecedores de Antonio
Perez, pagando sus atrevimientos, unos c­ on las vidas, otros c­ on destierros,
segun sus delictos […]51.
Estando entendiendo la Magestad Catolica del Rey Don Philippe II en la
quietud y sosiego de Aragon, por medio de Cortes generales; entraron por las
Montañas de Jaca, ­con la gente y favor de Madama, la Princessa de Bearne, los
valedores de Antonio Perez, y se apoderaron de la villa de Biescas: creyendo
estos que luego se armaria la Montaña en su favor, quedaron desengañados;
porque la sangre leal y antigua de los Aragoneses, aun ervia en sus venas, en
defensa del Rey, y lealtad: y en ­consequencia desto, salieron ­contra ellos bien
apercebidos, y ­con la gente de la tierra llana, mezclados ­con los ginetes de
don Alonso de Vargas, y vanderas de Infanteria; desalojaron al enemigo, y
cerraron ­contra el, y de seyscientos que serian, murieron cassi quatrocientos; y
los demas fueron presos, sino algunos pocos que llevaron la nueva a su tierra:
a los Franceses se les dio luego libertad, y fueron degollados en Çaragoça
algunos de los inquietos naturales. Finalmente en Taraçona, ciudad deste
Reyno, por orden de su Magestad, se ajuntaron los quatro braços, y ­con la
presencia del Catolico Rey, se asentò en aquellas Cortes lo que c­ onvenia para
perpetua paz y sosiego del Reyno, dexando en su fuerça y vigor sus livertades
y Fueros antiguos: lo qual se podra ver en nuestros historiadores, y estrangeros
desapasionados52.

Los dos párrafos reproducidos corresponden, respectivamente, a los


años 1591 y 1592, y su apretado resumen refleja ­con precisión los aspec-
tos sustanciales del discurso apologético en favor del reino de Aragón,
­convertido en memoria oficial de lo sucedido. Dicha memoria, ­como
puede verse ya en la primera línea del texto, c­ omienza por relativizar el
alcance de la crisis, presentándola c­ omo “cierta inquietud popular bien
molesta” y atribuyendo su responsabilidad al delincuente y maquinador
Antonio Pérez, que se habría ganado la voluntad de “algunos” regnícolas,
­con cuya ayuda habría sublevado al “vulgo” para escapar de la justicia
regia. En ­conjunto, la ­combinación de estos tres factores sirve a los autores
51 Carrillo, Annales y memorias cronologicas, p. 420 vo-421ro.
52 Ibid., p. 421vo.
“La verdad sencilla y desnuda de los sucesos de Aragón” 35

para explicar las razones del ­conflicto, pues, ­como se hace notar en los
relatos más extensos, Pérez tuvo la habilidad suficiente para azuzar a
su favor dos sentimientos colectivos: por un lado, la c­ ompasión, pues,
­como apunta Lupercio de Argensola, “sin más especulación de medir
el poder del rei y de un vasallo, siempre juzga el vulgo en favor del
menos poderoso: falsa imágen de piedad, que engaña á muchos en este
reino”53; y por otro, el apego al régimen foral, ya que, según indicó el
padre Murillo, “el hypo del pueblo era no permitir que se les quebran-
tassen los fueros.”54 De hecho, en opinión de muchos cronistas, fue este
segundo aspecto el que tuvo efectos más poderosos en la movilización
de la población, ya que, en palabras de Gonzalo de Céspedes,
en lo que mayor fundamento abrio, a su maquina; fue en el ingerir y mezclar,
­con su propio negocio c­ on sus pretensiones y causas; diestramente, la obser-
vancia inviolable, de sus leyes y fueros. Para c­ on tal pretesto, c­ onfundir sus
delictos, divertir el castigo, y hazer (mediante su vigor, y las diligencias de
los sediciosos amigos) ­comun y publico, el daño particular y propio55.

Delimitando así el alcance del ­conflicto, en tanto que “todas las


­culpas fueron del vulgo insolente, y de algunos inquietos56”, resultaba
fácil también, ­como hace Martín Carrillo, reconocer la necesidad de
un castigo para restablecer el orden, al tiempo que circunscribir sus
­consecuencias a “los inquietos, y favorecedores de Antonio Perez, pagando
sus atrevimientos, unos ­con las vidas, otros ­con destierros, segun sus
delictos”. Para el resto de la población, lejos de suponer un problema,
la intervención de Felipe II para resolver la crisis habría resultado favo-
rable, pues, c­ omo indica el mismo autor, el rey ordenó celebrar Cortes en
Tarazona y “se asentó en aquellas Cortes lo que ­convenia para perpetua
paz y sosiego del Reyno, dexando en su fuerça y vigor sus livertades y
Fueros antiguos.”
Naturalmente, los relatos más extensos del c­ onflicto aragonés ofrecen
más detalles sobre lo sucedido. No obstante, su línea argumental básica
coincide en líneas generales ­con la expuesta hasta aquí. De hecho, aunque es
posible encontrar en ellos referencias a la existencia de “passiones civiles”57
53 Leonardo de Argensola, Informacion de los sucesos del Reino de Aragon, p. 51.
54 Murillo, Fundacion milagrosa, tratado ii, p. 85.
55 Céspedes y Meneses, Historia apologética en los sucessos del Reyno de Aragon, p. 116-117.
56 Murillo, Fundacion milagrosa, tratado ii, p. 115.
57 La expresión es usada por Guadalajara y Xavier, Quarta parte de la Historia pontifical, p. 6.
36 JESÚS GASCÓN PÉREZ

en Aragón ­con anterioridad a 1591, lo que llevó a Lupercio de Argensola a


­concluir que “todo este reino era un teatro de casos trágicos”58, igualmente
es frecuente hallar juicios ­como el del ­conde de Luna, quien ­consideró
que “todos éstos siendo tan grandes negocios, de por sí ni juntos no nos
perdieran si no cayera el rayo y desventurada sierpe de Antonio Pérez,
que le supo traer al término que hemos mostrado.”59 Incluso, la situación
así descrita permite valorar en su justa medida la omisión más llamativa
del relato de Carrillo: la ejecución del justicia de Aragón don Juan de
Lanuza, que sí es mencionada por el resto de autores. Al achacar la c­ ulpa
de lo sucedido a la actividad de Pérez, un grupo de inquietos y el vulgo,
y dado que uno de los recursos utilizados para movilizar a la población
fue identificar la causa del primero ­con la defensa de los fueros, resulta
posible c­ oncluir, ­como hizo el padre Murillo, que “aun en los mismos
­culpados nunca huvo animo de rebelion, ni intencion de infidelidad a
su Rey; sino zelo indiscreto (­como tengo dicho) de c­ onservar sus fueros y
libertades.”60 De este modo, igualmente resulta posible exonerar a Lanuza
y a los juristas que le aconsejaron encabezar la resistencia a las órdenes de
Felipe II, ya que lo hicieron atemorizados por los tumultos de la plebe61
y su requerimiento de defender los fueros. En c­ onsecuencia,
assi ni ellos pecaron, ni el Justicia que ­convocò el Reyno, ni el Diputado que
le assistiò, ni los que aceptaron los officios de la milicia, ni los que levantaron
bandera, ni los que tomaron armas ­con orden y por mandamiento del Justicia62.

Cabría suponer que la omisión del abad Carrillo no fuese casual, y


que de modo voluntario decidiese dejar fuera de su relato un episodio de
tanta gravedad c­ omo la ejecución del justicia de Aragón por orden del
rey. Si tal suposición fuera cierta, ¿podría entenderse ­como parte de una
estrategia de olvido, ­complementaria al establecimiento de la memoria
oficial de lo sucedido? Por ahora carecemos de c­ onstatación documental
al respecto, pero nada tendría de extraño, habida cuenta de la naturaleza
del proceso de selección de datos, protagonistas y argumentos acometido
por los apologistas del reino, del que es posible hacerse una idea cabal
58 Leonardo de Argensola, Informacion de los sucesos del Reino de Aragon, p. 62.
59 Gurrea y Aragón, Comentarios de los sucesos de Aragón, p. 194.
60 Murillo, Fundacion milagrosa, tratado ii, p. 82-83.
61 De hecho, ­como recuerda Leonardo de Argensola, Informacion de los sucesos del Reino de
Aragon, p. 186, el temor de la plebe fue alegado por muchos de los juristas en su defensa.
62 Murillo, Fundacion milagrosa, tratado ii, p. 120.
“La verdad sencilla y desnuda de los sucesos de Aragón” 37

cotejando sus escritos c­ on la documentación c­ onservada sobre el c­ onflicto


aragonés63. Al hacerlo, queda de manifiesto el esfuerzo por presentar
a los lectores una versión edulcorada del episodio, que amortigua la
magnitud del enfrentamiento a la vez que subraya la fidelidad de los
súbditos a su rey y c­ onfirma la autoridad de este sobre aquellos, todo
ello en un ­contexto presidido por el respeto de ambas partes a los fueros.
Sobre este fondo ­común a todos los autores, los Annales de Carrillo
presentan la particularidad de haber borrado de raíz todo recuerdo del
apoyo institucional que los sublevados encontraron en la Diputación
y en la Corte del Justicia, y de hacer especial hincapié en la necesidad
y proporcionalidad del castigo aplicado por Felipe II. A mi modo de
ver, una posible explicación de este hecho debe tener en cuenta que los
Annales fueron publicados en 1622, poco después del acceso al trono de
Felipe IV, quien además es el dedicatario de la obra. En este sentido,
el olvido practicado por Carrillo presenta diferencias ­con la actitud
observada por los autores que c­ ompusieron sus textos en el reinado
anterior, que en general se esforzaron por justificar el c­ omportamiento
de las instituciones durante el c­ onflicto. Entre los factores que ayudan
a explicar esta diferencia de postura, podría aludirse al hecho de que
en los inicios de su reinado Felipe III promulgó una serie de medidas
de gracia64 que parecían augurar la reconciliación definitiva entre el
reino y la Corona, lo cual habría animado a incluir dicha justificación
entre los argumentos de las apologías. El fracaso de tales expectativas,
­concretado en la circunstancia de que, pese a las reiteradas peticiones que
se le hicieron desde Aragón, el rey nunca ­convocó Cortes, pudo haber
sido la causa de que Carrillo decidiera plantear otra estrategia discursiva.
Sea c­ omo fuere, los procesos de selección de información que los cro-
nistas aragoneses desarrollaron para ­conservar la memoria de lo ocurrido
en 1591 y promover de modo simultáneo el olvido de los aspectos que
­consideraron más problemáticos, estuvieron orientados en último término
a afianzar el proyecto político articulado en torno a los fueros del reino,
que son presentados ­como “leyes suaves, y muy favorables a la libertad
63 En este punto, remito al estudio sobre la rebelión aragonesa que realicé en Gascón Pérez,
2010.
64 Como las reflejadas en la “Jornada de su majestad Felipe III y alteza la infanta doña
Isabel”, p. 268-275, que incluyen perdones a algunos ­condenados y la retirada de las
cabezas expuestas en lugares públicos tanto en Zaragoza ­como en Teruel. Véase, a este
respecto, Gascón Pérez, 2010, p. 284, 398-399 y 413.
38 JESÚS GASCÓN PÉREZ

y ­conservacion del Reyno”65 y elogiados ­como “las leyes mas justifica-


das que tiene Reyno del mundo.”66 En el diseño político e institucional
aragonés, no obstante, resultaba tan fundamental el respeto a los fueros
­como la preservación de una adecuada relación entre los súbditos y su
soberano. De ahí la insistencia en recordar que la resolución final del
­conflicto procedió de la c­ onvocatoria de las Cortes en Tarazona, cuyas
leyes fueron promulgadas, según recordó Lupercio de Argensola,
de voluntad del rei y de los quatro brazos […] sin alterar ni mudar la forma
antigua que en el reino habia, en hacer ó corregir leyes; porque no sé yo
ninguna nacion tan bárbara que no las haga segun la necesidad presente;
pues, c­ omo arriba dixe, las malas costumbres preceden á las buenas leyes67.

De este modo, una vez superada la crisis, Aragón habría seguido


disfrutando de un sistema político e institucional particularmente
favorable, que reunía, en opinión del padre Murillo, lo mejor de los tres
modos de gobierno descritos por Aristóteles, pues elaboran sus propias
leyes en una asamblea a la que ­concurren representantes de calidad
junto ­con su rey. Así,
Gozan los Aragoneses de lo bueno de los dos goviernos, Popular, y
Aristocratico, sin mezcla de las imperfecciones, que tuvieron las otras
republicas, que se governaron por ellos. Consta assi mismo, ­como entre los
goviernos escogieron el Monarchico, ­como mas excelente de todos, suje-
tandose a un Rey. Consta tambien, ­como remediaron el daño que puede
aver en este govierno por falta del entendimiento del Rey; pues para esto
ordenaron que el a solas no pudiesse hazer leyes, que obligassen al Reyno.
Y assi en Aragon no valen las reglas generales de los que dizen, que a solos
los Reyes pertenece el dar leyes, y a los vassallos el recibillas: porque por
acà por razon del pacto, y juramento que hazen los Reyes ­con el Reyno,
jurando guardar los privilegios y fueros, queda moderado este poder, c­ on
lo que las leyes disponen, que es no poder hazellas sin c­ onsentimiento del
Reyno. Pero ­con todo esso es verdad dezir, que el Rey es el que las da;
porque c­ onfirmandolas les da fuerça, y mandandolas publicar, haze que
­con la promulgacion obliguen. Y no obligan solamente a los subditos, sino
tambien al Rey; a ellos por la obediencia que le deven ­como a Rey y señor:
y a el por el juramento que haze de guardallas68.

65 Murillo, Fundacion milagrosa, tratado ii, p. 36.


66 Guadalajara y Xavier, Quarta parte de la Historia pontifical, p. 5.
67 Leonardo de Argensola, Informacion de los sucesos del Reino de Aragon, p. 187-188.
68 Murillo, Fundacion milagrosa, tratado ii, p. 38.
“La verdad sencilla y desnuda de los sucesos de Aragón” 39

Llegados a este punto, parece fuera de duda que el discurso apolo-


gético descrito en las páginas precedentes dista mucho de responder a
la pretensión de Lupercio de Argensola de ofrecer “la verdad sencilla y
desnuda de los sucesos de Aragon.” Antes bien, la c­ onstrucción resul-
tante difícilmente puede c­ onsiderarse un relato riguroso y desapasio-
nado, carente de los defectos que sus propios autores atribuyeron a los
escritores antiaragoneses y asimilable, por tanto, a los trabajos historio-
gráficos actuales. Ahora bien, desde la perspectiva historiográfica de
nuestra época, es precisamente esta c­ ondición la que le ­confiere interés
­como objeto de estudio, en tanto “reflejo problemático de su tiempo”,
por utilizar el término acuñado por Peter Burke69. Desde este punto
de vista, parece adecuado plantear su análisis en términos similares a
los descritos en la siguiente propuesta, destinada al estudio de los fal-
seamientos y sus responsables:
La cuestión no ha de dirigirse a si los relatos historiográficos están filtrados
por el tamiz positivista ­con el que el historiador de oficio está hoy familia-
rizado. Ni tampoco debemos aventurarnos a formular juicios sobre la ética
de los falseadores. El interés debería orientarse, más bien, a indagar por qué
esas historias o relatos, definitivamente falsos, tuvieron amplia difusión, y
entrar así de pleno en el c­ ontexto histórico en el que se desarrollan. Pues
es ahí, al fin y al cabo, en la interrelación entre fenómenos diversos, donde
se halla el sentido y la verdad. Los documentos aislados son huérfanos en
la Historia70.

A modo de ­conclusión, parece oportuno sugerir que la orfandad de


la ­construcción elaborada por los cronistas aragoneses resulta evitable
si se ­considera que estuvo c­ ondicionada por varios factores. Por un
lado, el difícil ­contexto político en que se produjo su aparición, tras
el ­conflicto de 1591. Por otro, su ­condición de réplica a los textos que
en los años inmediatamente posteriores a 1591 habían ­contribuido
a difundir una imagen desfavorable del reino de Aragón. En tercer
lugar, un panorama historiográfico en evolución, en el que pervivían
los preceptos clásicos sobre la historia, al tiempo que se iban desarrol-
lando formas nuevas de c­ omponerla. A c­ ontinuación, la obligatoriedad
de c­ ombinar la c­ onstrucción de la memoria de lo sucedido c­ on un
proceso de olvido de cuestiones problemáticas. Además, la necesidad
69 Burke, 2006, p. 35.
70 Alvar, Gonzales, Gómez, 2006, p. 15.
40 JESÚS GASCÓN PÉREZ

de cohonestar en un mismo discurso argumentos c­ ontradictorios. Y


por último, su carácter instrumental, ­como soporte de un proyecto
político sometido a tensiones diversas.

Jesús Gascón Pérez


Universidad de Zaragoza
ENTRE INTERPRÉTATIONS ET OMISSIONS
Les Germanías de Valence
dans quelques textes historiographiques espagnols
de l­’époque moderne au xixe siècle

Les Germanías de Valence c­ onstituent, avec les Comunidades de


Castille, un des deux grands mouvements de révolte qui marquent
le début du règne de Charles Quint dans la péninsule Ibérique1. Le
royaume de Valence c­ onnaît depuis les premières années du xvie siècle
une période difficile : il est plongé dans une grave crise de subsistance,
après une série de mauvaises récoltes, et la pression fiscale exercée par
la monarchie ajoute à ­l’endettement des municipalités. Naissent alors
plusieurs ­conflits sociaux, entre les seigneurs et les paysans, entre les
artisans et ceux qui c­ ontrôlent les corporations et, enfin, entre les chré-
tiens et les mudéjars, ces derniers étant ­considérés ­comme une menace
parce ­qu’ils ­constituent une main d­ ’œuvre rentable pour les seigneurs
et en raison de la proximité de l­’Afrique du Nord. À ce c­ ontexte déjà
tendu s­’ajoutent des circonstances aggravantes : Charles Ier, pressé de
se rendre en Allemagne où ­l’attend le trône du Saint-Empire, ­n’est pas
venu prêter serment devant les Cortes de Valence. Mais, pour faire face
aux attaques des barbaresques qui ravagent les côtes valenciennes, il a
approuvé une loi édictée en 1515 par Ferdinand le Catholique, qui met
en place un système de recrutement pour permettre aux artisans inclus
dans des milices de s­’armer et de s­’organiser en germanías2. Enfin, en
1519, l­’apparition de la peste, qui pousse les nobles et les autorités à
fuir la ville, mène à l­ ’éclatement de la révolte : afin de pallier ce « vide
1 Les ouvrages classiques sur le règne de Charles Quint c­ onsacrent peu de lignes à la révolte
valencienne : voir par exemple Fernández Álvarez, 1999, p. 175-176, 258, 276, 299 et
322-324 ; Köhler, 2001, p. 58-60. Toutefois, il existe de nombreux travaux intégralement
­consacrés à cette révolte, parmi lesquels : García Cárcel, 1975 ; Durán, 1982 ; Vallès
Borràs, 2000 ; Narbona Vizcaíno, 2001 ; Salvador Esteban, 2001 ; Ferrero Micó, 2013.
2 Le mot vient de « germá », qui signifie « frère » en valencien.
42 ANNE-LISE RICHARD

politique », la Junta de los trece formée de représentants de toutes les


corporations de Valence prend le ­contrôle de la ville3.
­S’ouvre alors une première étape modérée de la révolte, pendant
laquelle artisans et petits bourgeois s­’attachent à imposer leurs reven-
dications : avoir une représentation politique au sein du gouvernement
de la municipalité, réformer ­l’administration et mettre fin à la dette.
À partir de 1521, la physionomie de la révolte change, les dirigeants
­considérés ­comme modérés – Joan Llorenç4, Guillén Sorolla5 ou Bartolomé
Monfort6 – ayant été remplacés par des partisans ­d’une action plus
agressive – principalement Vicent Peris7. La radicalisation du mouve-
ment mène à des affrontements violents ­contre le parti fidèle au roi et
se caractérise par des campagnes massives de baptêmes forcés dirigées
­contre les mudéjars. La révolte prend fin en mai 1522, après la reprise
de la ville de Valence et la mort de Vicent Peris, mais ses ­conséquences
sont durables, notamment en ce qui ­concerne le sort des musulmans
­convertis par la force au cours de cette seconde phase du mouvement8.
Comment ces événements ont-ils été relatés et interprétés dans
­l’historiographie, notamment dans les chroniques ­consacrées au règne
de Charles Quint ou à ­l’histoire du royaume de Valence ? On sait que
­l’empereur était très attaché à la mise en mémoire de son règne – dès
le début de celui-ci, il a été attentif aux projets en la matière de son
­conseiller Guillaume de Croÿ, et a doublé le montant de la rémunération
associée à la fonction de cronista9 – et q­ u’il a eu recours à de nombreux
3 Remedios Ferrero Micó (2013, p. 182) en donne la ­composition exacte.
4 Il exerçait ­comme pelaire et appartenait à la bourgeoisie valencienne. Il est le premier
dirigeant de la germanía.
5 Egalement pelaire.
6 Juriste.
7 Fabricant de velours. Il est celui qui représente le mieux la radicalisation de la révolte.
8 En effet se pose la question de la validité de ces baptêmes, ­d’autant plus que de nombreux
musulmans baptisés de force sont ensuite retournés à leur foi originelle. La décision finale
sera prise en 1525 par une assemblée de théologiens et de juristes (voir notamment sur
ce sujet Poutrin, 2012). Le pardon général de ­l’empereur sera accordé en 1528. Par ail-
leurs, des résurgences se produisent autour de la figure messianique de ­l’Encubierto, qui
affirmait être le fils des Rois Catholiques, Jean. Il prétendait avoir reçu la mission divine
­d’entamer une nouvelle croisade ­contre l­’islam dans le royaume de Valence, ce qui lui
permit de rassembler la population face au camp royal. Il mourut dans des circonstances
troubles, les chroniques ne livrant pas la même version des faits.
9 Les Rois Catholiques avaient fixé la rémunération des chroniqueurs du royaume de
Castille à 40000 maravédis par an. Charles Quint la porte à 80000 maravédis. Voir
Kagan, 2001a, p. 116.
Entre interprétations et omissions 43

lettrés10. Même si, pour des raisons diverses, aucune des œuvres ­qu’ils
entreprirent ne fut publiée de son vivant11, plusieurs de ces textes men-
tionnent les Germanías, et il existe aussi ­d’autres chroniques, ­consacrées
à ­l’ensemble du règne de Charles Quint, à un événement particulier
ou encore spécifiquement au royaume de Valence. La c­ onfrontation de
plusieurs de ces récits, dont certains rédigés par des Valenciens, pen-
dant le règne ou après la mort de l­’empereur, et même à une certaine
distance dans le temps, sera ­l’objet de cette étude qui, sans prétendre
à ­l’exhaustivité12, ­s’efforcera de mettre en lumière des différences de
traitement et ­d’interprétation de la révolte, en fonction de la nature
des textes, des circonstances de leur élaboration et des intérêts propres
à chaque ­contexte.

INTERPRÉTATIONS DES GERMANÍAS


DANS LES TEXTES HISTORIOGRAPHIQUES
DU XVIE SIÈCLE

Parmi les chroniques générales du règne rédigées du vivant de


l­’empereur, celles de Pedro Mexía et ­d’Alonso de Santa Cruz – offi-
ciellement cosmographe et non cronista – proposent des interprétations
légèrement différentes, tandis que celle de Juan Ginés de Sepúlveda
se distingue par son occultation totale des événements de Valence. En
revanche, le Valencien Rafael Martín de Viciana, qui ­consacre un texte
entier au royaume de Valence, livre un témoignage certes partial mais
très précis.

10 Sur les chroniques du règne de Charles Quint, on ­consultera Morel-Fatio, 1913 ; Redondo,
1976, p. 303-349 ; Cuart Moner, 1994 ; Alvar Ezquerra, 2000.
11 Certains chroniqueurs laissèrent des manuscrits inachevés – Mexía notamment –, ou
des notes que leurs successeurs utilisèrent – Guevara, dont les papiers servirent à fray
Prudencio de Sandoval ultérieurement – ; Sepúlveda, le seul des chroniqueurs qui acheva
son histoire du règne, renonça à la publier.
12 Nous examinerons cinq chroniques générales du règne de Charles Quint, deux histoires
générales et deux textes valenciens, appartenant à des époques différentes, du règne de
­l’empereur ­jusqu’au xixe siècle.
44 ANNE-LISE RICHARD

LE POINT DE VUE DE DEUX CHRONIQUEURS CASTILLANS

Pedro Mexía13, nommé chroniqueur par Charles Quint en 1548 après


avoir publié la Silva de varia lección14 et une Historia imperial y cesárea15,
mourut trois ans après sa nomination et laissa de ce fait sa chronique
inachevée16. Toutefois son récit, qui prend fin en 1530, couvre la période
des Germanías. Le texte dû à Alonso de Santa Cruz17, cosmographe de
la Casa de Contratación qui avait entrepris de ­continuer la chronique de
Hernando del Pulgar sur les Rois Catholiques18 en recourant à divers
manuscrits, puis de relater ­l’histoire de leur successeur, est également
incomplet mais narre le règne de l­ ’empereur ­jusqu’au début des années
155019.
­D’emblée, on c­ onstate une différence formelle dans le traitement
des Germanías : Mexía imbrique quelques paragraphes relatifs à la
révolte de Valence dans des chapitres c­ onsacrés à celle des Comunidades
de Castille, ­l’une étant donc traitée par rapport à ­l’autre et dotée ­d’une
moindre importance, tandis que Santa Cruz, qui a choisi d­ ’organiser
sa chronique de manière strictement chronologique, c­ onsacre plusieurs
chapitres aux Germanías et se montre plus prolixe. Leurs interprétations
sont-elles pour autant dissemblables ?
Même si le cosmographe, ­contrairement à Mexía, relie ouvertement
le soulèvement aux barbaresques et à leurs incursions qui ont c­ onduit à

13 Pedro Mexía, doté ­d’une formation autodidacte principalement basée sur les mathéma-
tiques, la géographie, ­l’astronomie et ­l’histoire, avait été veinticuatro de Séville et avait
longtemps vécu loin de la cour. Sur sa vie et son œuvre historiographique, ­consulter
Costes, 1920 ; Chaulet, 2010 ; voir également Mata Carriazo, 1945.
14 Pedro Mexía, Silva de varia lección, Sevilla, Domingo de Robertis, 1540.
15 Pedro Mexía, Historia imperial y cesárea, en la qual en summa se c­ontienen las vidas y hechos
de todos los Emperadores de Roma, desde Julio Cesar hasta el Emperador Maximiliano, Sevilla,
Juan de León, 1545.
16 Ce texte a été publié pour la première fois dans la Revue Hispanique, sous le titre de
Historia de Carlos V, par Raymond Foulché-Delbosc, puis une seconde édition a vu le
jour en 1945 : Pedro Mexía, Historia del Emperador Carlos V, edición de J. Mata Carriazo,
Madrid, Espasa-Calpe, 1945. ­C’est l­ ’édition que nous utilisons.
17 Pour plus d­ ’informations sur Santa Cruz, c­ onsulter Dahlgren, 1892 ; Cuesta Domingo,
2004.
18 Alonso de Santa Cruz, Crónica de los Reyes Católicos, edición de Juan de Mata Carriazo,
Sevilla, Escuela de Estudios Hispano-Americanos, 1951.
19 Il a été publié au xxe siècle : Alonso de Santa Cruz, Crónica del emperador Carlos V, edición
de Antonio Blázquez y Ricardo Beltrán y Róspide, Madrid, Real Academia de la Historia,
1920-1925, 5 vol.
Entre interprétations et omissions 45

autoriser la population à ­s’armer – il mentionne notamment la capture


de tous les habitants de Cullera en 150320 –, les deux chroniqueurs
semblent s­’accorder sur les causes des Germanías : tous deux font état
de la déception des Valenciens envers un roi qui ne s­’est pas présenté
devant les Cortes, et qui place la couronne impériale bien plus haut que
celle du royaume de Valence. De plus, tous deux reconnaissent la base
sociale du soulèvement et mentionnent les différends entre le « peuple »
et les nobles. Pourtant, leur approche diffère : Mexía, en affirmant que
le c­ onflit est lié aux « privilèges et avantages que, selon les dires des
populaires, les nobles refusaient de respecter21 », paraît mettre en doute
les accusations portées par les classes populaires. Il assimile en outre la
révolte à une « sédition22 », et la définit ­comme un soulèvement prémé-
dité du peuple c­ ontre l­’autorité établie et c­ omme un crime qui a mis
en péril le royaume de Valence. Santa Cruz se montre en revanche plus
­compréhensif à ­l’égard du peuple et très critique envers certains seigneurs
qui, dit-il, n­ ’hésitaient pas à abuser de leur pouvoir et à faire « des choses
si laides q­ u’elles n­ ’étaient c­ onciliables ni avec la loi des chrétiens ni avec
la noblesse des chevaliers23 » : ­s’adonner aux plaisirs de la chair avec des
femmes maures, violer des jeunes filles, des femmes mariées ou veuves,
battre les apprentis, manipuler la justice pour ­qu’elle abonde dans leur
sens si les victimes de ces actes cruels venaient s­ ’en plaindre. Il dépeint
donc une noblesse qui ­n’était plus vertueuse et une justice manquant
­d’impartialité, voire corrompue. ­D’où la solution radicale mise en œuvre
par le peuple indigné : châtier lui-même les coupables.
Cette c­ ompréhension du désarroi du peuple et des causes de la révolte
­n’empêche pas que Santa Cruz, c­ omme Mexía, c­ onsidère celle-ci c­ omme
un crime de lèse-majesté24, et ­qu’il réprouve ­l’emploi de la violence :
« Les agermanados, c­ omme ils avaient déjà perdu aux yeux du monde
toute honte, décidèrent de perdre la crainte de Dieu25 », écrit-il. Il relate
en effet les vols des richesses que recelaient les églises, et estime que les
20 Ville côtière située au sud de Valence.
21 « preheminençias y previllegios que los populares deçían que los cavalleros les quebrantaban »,
Pedro Mexía, Historia del Emperador Carlos V, p. 118.
22 Ibid.
23 « tan feas cosas, que no cabían en ley de cristianos ni en nobleza de caballeros », Alonso de Santa
Cruz, Crónica del emperador Carlos V, tome I, p. 215.
24 Santa Cruz parle du « crimen de lesa Majestad en que habían incurrido », ibid., p. 417.
25 « los agermanados ­como ya habían perdido al mundo la vergüenza, acordaron de perder el temor
a Dios », Ibid., p. 234.
46 ANNE-LISE RICHARD

agermanados coupables de ces méfaits ne peuvent plus êtres ­considérés


­comme des croyants. En définitive, la justice divine les punit : alors
­qu’ils se rendent à Denia pour expulser le vice-roi26, les agermanados se
retrouvent ­confrontés au clergé
Avec leurs cagoules sur la tête et leurs croix dans les mains, alors ­qu’on leur
disait « miséricorde, miséricorde », ils répondaient « justice, justice », et par
la suite la justice de Dieu vint pour tous, et certains d­ ’entre eux [les ager-
manados] moururent poignardés, ­d’autres pendant la bataille, ou aux mains
de la justice27.

Santa Cruz, qui avait montré ­comment, dans un premier temps,


le peuple de Valence s­’était tourné vers Joan Llorenç, « homme âgé
et sage28 », afin ­qu’il intercède auprès de Chièvres en ­l’absence du
roi et obtienne ­l’autorisation de ­s’armer pour se défendre ­contre les
maures et punir, par voie de justice, les mauvais chrétiens, ne peut que
­condamner la suite violente des événements : il accuse les révoltés de
vouloir ­s’emparer des rentes du royaume, « de telle sorte que Valence
­n’était plus un Royaume de chevaliers et de citoyens, mais un désordre
de voleurs publics29 ». Il n­ ’approuve pas non plus les actions c­ ommises
­contre les mudéjars, et notamment les baptêmes forcés, en révélant
toutefois le rôle joué par les prophéties30 – ainsi Llorenç « tenait pour
prophétie de vieilles femmes ­l’affirmation selon laquelle ce royaume
devait se perdre à nouveau à cause des maures31 » –. Il montre que les
mudéjars furent victimes des agermanados, alors que « les maures ne

26 Diego Hurtado de Mendoza est nommé vice-roi en 1520 avant de devoir abandonner
Valence en 1521, suite à la bataille de Gandie. Il y revient à la fin de cette même année
et reprend le ­contrôle sur les rebelles.
27 « ­con sus capirotes en las cabezas y sus cruces en las manos, diciéndoles “misericordia, misericordia”,
ellos respondían “justicia, justicia”, y así fué que después vino por todos ellos la justicia de Dios,
y de ellos [los agermanados] fueron muertos á cuchillo, y otros en batalla y por justicia », Alonso
de Santa Cruz, p. 234-235.
28 Ibid., p. 215.
29 « por manera que ya Valencia no era Reino de caballeros y ciudadanos, sino una behetría de
públicos ladrones », Ibid., p. 417.
30 Comme ­l’a ­constaté Augustin Redondo, la prophétie, qui « appartient au domaine reli-
gieux et à l­’ordre du divin puisque le prophète est directement inspiré par Dieu […] a
permis toutes les manipulations, soit pour légitimer le pouvoir, soit pour le subvertir »,
Redondo, 2000, p. 6.
31 « tenía por profecía de viejas que aquel Reino se había de tornar á perder por causa de los moros »,
Alonso de Santa Cruz, p. 417.
Entre interprétations et omissions 47

prirent part ni par la parole ni par l­’action à ce soulèvement, et dans


toutes les révoltes que ­connut le royaume de Valence on ne vit jamais
aucun maure la lance au poing ­contre le roi ni ­contre son seigneur32 ». Il
dévoile la terreur qui les poussa à accepter le baptême, car « de crainte
de la mort ils étaient c­ ontents de ­l’accepter, et ce fut la cause pour
laquelle les maures, après avoir reçu le baptême, furent c­ ontraints de
resecter la loi des chrétiens33 ».
Santa Cruz révèle ­qu’un certain Palomares, désigné capitaine de
la ville ­d’Orihuela, a tenté de « négocier secrètement avec Murcie et
publiquement avec Tolède34 » ; mais le Marquis de los Velez fit échouer
son projet. Mexía pour sa part, faisant un parallèle entre les Germanías
et les Comunidades, choisit de ­comparer les deux révoltes à une longue
maladie qui ronge Valence et Tolède :
De sorte que ces deux villes, toutes les autres ayant été soumises, furent
­comme des suites ou séquelles que les hommes peuvent ­conserver après une
longue maladie, qui ne les laissent pas guérir c­ omplètement, mais leur causent
indispositions et douleurs. Il en fut ainsi de ces deux villes, où perdurèrent
les maladies et ­l’humeur maligne35.

Il exprime de nouveau cette idée au moment de ­conclure son récit sur


les Germanías, tout en renvoyant aux dix plaies d­ ’Égypte : « ­l’Espagne
finit par guérir de cette plaie et maladie de la Comunidad, que fut une
des plus graves dont elle ait jamais souffert36 ». Récit succinct, voire
simplificateur, en tout cas moins nuancé et moins ­compréhensif à ­l’égard
du peuple rebelle que celui de Santa Cruz, mais aucun des deux chro-
niqueurs ne prête aux agermanados un programme politique.
32 « en este ni en otro levantamiento no fueron en dicho ni en hecho los moros, ni en todas
las rebelaciones del Reino de Valencia ningún moro c­ ontra el Rey ni ­contra su señor
lanza en el puño », Ibid.
33 « de miedo de la muerte decían de ello muy c­ ontentos, y esta fué la causa por donde los moros después
de bautizados fueron ­constreñidos á que guardasen la ley de los cristianos », Ibid., p. 419.
34 Alonso de Santa Cruz, p. 440.
35 « De manera que fueron estas dos ciudades, sojuzgadas las otras, ­como reliquias y opilaciones que
suelen quedar de largas enfermedades a los hombres, que no los dexan acavar de sanar, antes
padecen indisposiciones y travajos. Assi fueron estas ciudades, que duraron en ellas las enfermedades
y mal humor », Pedro Mexía, p. 257.
36 « acabó de sanar España desta plaga y enfermedad de la Comunidad, que fué una de las mayores
que ha padesçido », Pedro Mexía, p. 299. Mexía, ­comme beaucoup d­ ’autres auteurs castillans,
­n’utilise pas le terme « Germanía » mais celui de « Comunidad ». Pour plus d­ ’explications
sur ce point, voir García Cárcel, 2002, p. 210.
48 ANNE-LISE RICHARD

UN TRAITEMENT PARTICULIER :
­L’OMISSION DE LA RÉVOLTE

Si la chronique de Mexía est très incomplète et peu nuancée, on peut


attendre un traitement plus circonstancié de la révolte de la part du seul
historiographe nommé par ­l’empereur qui ait achevé la rédaction de
son œuvre : Juan Ginés de Sepúlveda37, chroniqueur de Charles Quint
depuis 1536. Pourtant, le De rebus gestis Caroli V Imperatoris et Regis
Hispaniæ, qui ne sera publié pour la première fois q­ u’en 1780, par la
Real Academia de la Historia38 – Sepúlveda lui-même ayant renoncé à le
faire pour des raisons mal c­onnues39 – ne dit rien des Germanías alors q­ u’il
aborde de façon extensive la révolte des Comunidades de Castille. Mais
bien q­ u’il se taise sur la révolte en tant que telle, Sepúlveda mentionne
en revanche les ­conversions forcées des mudéjars, de manière décalée,
dans un discours q ­ u’il prête à Barberousse pendant la campagne de
Tunis (1535), soit dix ans après la promulgation de la loi obligeant tous
les mudéjars de Valence et de la couronne d­ ’Aragon à se c­ onvertir ou
à partir. Pour encourager ses hommes à c­ ontinuer à se battre malgré
la perte du port de La Goulette, Barberousse dresse un portrait de
­l’empereur en présentant, selon Sepúlveda, son action récente ­contre
les mahométans ­d’Aragon ­comme inhumaine et cruelle40, pour leur
montrer à quoi ils doivent s­ ’attendre en cas de défaite. Puis Sepúlveda,
après avoir précisé que Charles Quint, en appliquant cette loi, suivait
­l’exemple de ses grands-parents les Rois Catholiques, ajoute :
Cette loi, cependant, ­n’avait pas été acceptée dans les royaumes ­d’Aragon et
de Valence, sur la demande insistante des nobles, qui tenaient la plupart des

37 Sur Juan Ginés de Sepúlveda, sa vie et son œuvre, on pourra ­consulter : Fernández
Santamaría, 2007 ; Cuart Moner, 2001 ; Losada, 1949.
38 On dispose a­ ujourd’hui d ­ ’une édition moderne, publiée à partir de 1995, en version
bilingue (latin-espagnol), en plusieurs volumes, par la municipalité de Pozoblanco,
village de la province de Cordoue où Sepúlveda serait né. Les tomes I, II, X, XI, XIII,
XIV ­composent la Historia de Carlos V. ­C’est l­ ’édition que nous utilisons.
39 Baltasar Cuart Moner, dans son étude historique du premier volume de la Historia de
Carlos V, évoque plusieurs raisons à ce refus de publication : son découragement face à
­l’absence de protection de la part de la cour lors de la ­controverse de Valladolid et aussi
le désappointement suite à certaines critiques reçues par des courtisans ayant lu son
manuscrit. Il fait également allusion à ­l’utilisation du latin ­comme possible frein à la
publication. De fait, suivant les c­ onseils de son ami Diego de Neila, Sepúlveda se résolut
à laisser inédit son manuscrit.
40 Juan Ginés de Sepúlveda, Historia de Carlos V, t. X, p. 39.
Entre interprétations et omissions 49

maures de ces régions sous leur dépendance dans des villages et les employaient
presque ­comme des esclaves, en vertu ­d’une loi autrefois imposée aux vaincus,
car ceux qui étaient seulement vassaux du roi jouissaient ­d’une législation
plus bienveillante41.

­C’est là tout ce que l­’historiographe de l­’empereur se permet de


dire sur les rapports entre les mudéjars et les seigneurs du royaume
de Valence, ­l’action des agermanados et leur existence même restant
occultées. Ce silence, qui ne peut être imputé au fait que Sepúlveda se
désintéresse ­d’événements qui ont eu lieu en ­l’absence de ­l’empereur
– ­c’est le cas des Comunidades, ­qu’il relate – n ­ ’a pas manqué d ­ ’attirer
­l’attention des historiens et critiques qui se sont penchés sur ses écrits.
Pour Baltasar Cuart Moner, « Sepúlveda, en bon humaniste, prend
toute la liberté du monde pour sélectionner les épisodes à ses yeux les
plus significatifs et en oublier d­ ’autres, q
­ u’il c­ onsidère moins impor-
tants42 », tandis que Peter Burke affirme que « le silence c­ onstitue
lui aussi une arme puissante dans l­’arsenal de la propagande43 ». Le
silence de Sepúlveda peut donc ­s’expliquer par la volonté de reléguer
dans l­ ’oubli un épisode peu glorieux pour l­ ’histoire du règne – ­c’est
sans doute ce qui guide l­’empereur lui-même qui, dans le texte
­connu ­comme ses Mémoires44, ne mentionne pas une fois les Germanías
et à peine les Comunidades –, ou par un manque d ­ ’intérêt pour un
événement qui ne c­ oncerne que le royaume de Valence45. Mais on ne
peut exclure que ­l’occultation du souvenir des Germanías ne traduise
un certain malaise du chroniqueur, peut-être dû à la nature sociale
du soulèvement. Selon Ricardo García Cárcel en effet, la révolte était
« caractérisée par un radicalisme social étranger aux Comunidades46 »,

41 « Esta ley, sin embargo, no había sido aceptada en los reinos de Aragón ni de Valencia, al pedirlo
­con mucha insistencia los nobles, que tenían a la mayoría de los moros de aquellas regiones bajo su
dependencia por aldeas y servían casi c­omo esclavos en virtud de una ley impuesta antiguamente a
los vencidos, pues los que sólo eran vasallos del rey gozaban de una legislación más benigna », Ibid.
42 Baltasar Cuart Moner, dans Juan Ginés de Sepúlveda, Historia de Carlos V, t. XII, p. xviii.
43 Burke, 1999, p. 435.
44 Le texte a été publié par Manuel Fernández Álvarez dans le Corpus documental de Carlos V,
Salamanca, Ediciones Universidad de Salamanca, t. IV, 1979, p. 459-567.
45 Baltasar Cuart Moner, dans le t. I des Obras ­completas, écrit : « Sepúlveda […] que cree que
su misión c­ omo historiador es c­ ontar las hazañas de los españoles y no sus desavenencias – de hecho,
poco tratará de la historia interna de Castilla y casi nada de las de Aragón, ausentes ­como están
las Germanías en su crónica. » (p. lxiii).
46 Ricardo García Cárcel, 2002, p. 212.
50 ANNE-LISE RICHARD

­ ’un côté, des ­comuneros menés


­l’origine des révoltés étant différente : d
par des chefs issus de la petite noblesse ; de ­l’autre des agermanados
menés par des artisans, qui aspiraient à une représentation au sein du
gouvernement municipal et mettaient en péril les fondements de la
société47, y ­compris dans le monde rural. Les nobles et les autorités
ayant quitté Valence pour fuir la peste, la plèbe avait pris le c­ ontrôle
de la principale ville du royaume – ce qui c­ onstituait un boulever-
sement intolérable.
L­ ’INTERPRÉTATION D
­ ’UN CHRONIQUEUR VALENCIEN
DU XVIe SIÈCLE

Le jugement porté par un chroniqueur valencien du xvie siècle a


un intérêt particulier, dans la mesure où il répond à des objectifs peut-
être différents de ceux des chroniqueurs castillans de Charles Quint.
­L’œuvre majeure de Rafael Martín de Viciana48, Crónica de la ínclita y
coronada de Valencia49, ­consacrée à la fondation et à l­ ’histoire du royaume
de Valence, en relevant particulièrement ce qui ­concerne les villes et
les élites, ­n’esquive pas le récit des Germanías : le quatrième et dernier
volume de ­l’œuvre leur est intégralement dédié. Bien plus, ­l’oncle et le
père de Viciana ont participé à ces événements50 – en se rangeant du
côté de l­’autorité royale –, ainsi que lui-même. Il s­’agit ­d’une famille
qui appartient à la petite noblesse valencienne : une noblesse acquise
récemment par le grand-père de ­l’auteur qui la reçut de Jean II ­d’Aragon
en 1461 et résida ensuite à la cour de Ferdinand le Catholique, jouissant
­d’une certaine faveur dont bénéficièrent également l­ ’oncle et le père du
chroniqueur. Pourtant, la situation de Rafael Martín de Viciana ne fut
pas aussi brillante et c­ ’est pourquoi, après la révolte des Germanías, en
parallèle à la rédaction de sa chronique, il fut c­ ontraint ­d’exercer ­comme
47 « Considerada tradicionalmente c­omo una revuelta social de carácter urbano debida al malestar
gremial, la obra de Vicent Vallés ha puesto de manifiesto el amplio programa político de los
lideres agermanados en asuntos del gobierno municipal y de la fiscalidad », écrit Rafael Benítez
Sánchez-Blanco, 2012, p. 174. Mais les germanías ne semblent pas avoir donné lieu à un
programme politique écrit.
48 Sur Rafael Martín de Viciana on pourra c­ onsulter : García Martínez, 1983 ; Forner Tichell,
1922.
49 Rafael Martín de Viciana, Libro quarto de la crónica de la ínclita y coronada ciudad de
Valencia, Barcelona, en casa de Pablo Cortey, 1566.
50 Son oncle était gouverneur de la Plana. Son père, quant à lui, intègre l­ ’ordre de Calatrava
et obtient la encomienda de Burriana.
Entre interprétations et omissions 51

notaire, principalement à cause de la mort prématurée de son père, tué


à Saragosse en 152251.
­D’après ses dires, Viciana c­ ommence cette chronique, ­qu’il traduit
lui-même du valencien en castillan pour q­ u’elle soit c­ omprise par un plus
grand nombre de lecteurs52, à ­l’âge de quinze ans, en 1517. Il la clôture en
1566, date de la publication. Bien que non officielle53 car entreprise par goût
personnel, elle n­ ’en est pas moins une source d­ ’information importante54.
­L’auteur dit avoir utilisé quantité de lettres et de documents, dont une
majorité n­ ’existe plus ­qu’à travers la transcription ­qu’il en donne tout au
long de son récit. Selon Ricardo García Cárcel, « ­c’est ­l’exposition de cette
révolte la plus exhaustive et la plus fidèle que nous ­connaissions55 ». En
effet, ­contrairement aux auteurs castillans qui n­ ’évoquent les Germanías
que dans quelques paragraphes ou quelques chapitres d ­ ’une histoire
­consacrée à l­’ensemble du règne de Charles Quint, Viciana leur c­ onsacre
un volume entier. De toute évidence, son témoignage, ­s’il ne peut être
impartial étant donné son origine et ­l’implication de sa famille dans les
événements, est beaucoup plus précis.
Il donne par exemple à la peste de 1519, à peine mentionnée ou passée
sous silence par les chroniqueurs castillans, toute son importance dans
la naissance du soulèvement p­ uisqu’elle causa la fuite des autorités et
déboucha sur la création de la Junta de los trece. Surtout, il montre que

51 « Marchó a Zaragoza, en calidad de Mayordomo de don Fernando de Aragón, nieto del Católico y
posteriormente arzobispo de Zaragoza. Poco tiempo permaneció en su nuevo destino, puesto que “por
defender la real sangre de Vuestra Señoría – escribirá su hijo en la dedicatoria a don Fernando
de Aragón de una de las variantes de la tercera parte – y amparar sus criados en la iglesia de
Alcañiz celebrándosse la missa […] fue muerto por los c­ omuneros alterados”. » (Sebastián García
Martínez, 1983, p. 41)
52 Dans la dédicace au Libro de Alabanzas, Viciana écrit « me perdonen por haver vertido esta
obra de valenciana a castellana, que por la misma causa huve de vertir la Chronica de Valencia
[…] que después de haberlos copilado, en la versión de todos ellos tuve otro tanto trabajo, solamente
por hazerlos ­comunicables a muchas otras Provincias » (cité par Sebastián García Martínez,
1983, p. 57). Mais nous n­ ’avons pas trouvé trace de cette version en valencien.
53 Le premier chroniqueur officiel du royaume de Valence est Gaspar Juan Escolano, nommé
en 1604. Voir Castañeda y Alcocer, 1920, p. 35.
54 ­D’autres cronistas valenciens du xvie siècle ont également rédigé des textes sur les Germanías :
Jeroni Soria, Dietari de Jeroni Soria, Valencia, Acción Bibliográfica Valenciana, 1960.
Deux manuscrits (le Breu relació de la Germania de València de Guillén Ramón Català
et La Germanía dels menestrals de Valencia de Miquel García) ont été édités par Eulalià
Duran dans : Les cròniques sobre les Germanies de Guillem Ramon Català i de Miquel García
(segle XVI), Valence, Tres i Quatre, 1984.
55 Ricardo García Cárcel, 1975, p. 15.
52 ANNE-LISE RICHARD

dans ses débuts le mouvement fut pacifique et que son premier dirigeant,
Joan Llorenç, était désireux ­d’employer la ­communication plus que
les armes. Ce sont les prédicateurs dont il était entouré56 qui suscitent
la critique du chroniqueur : ils manipulent une population livrée à
elle-même. Llorenç a également recours à de nombreuses ambassades
adressées à ­l’empereur, prouvant son désir ­d’éviter toute violence, et se
désolidarise des actions brutales et gratuites :
La Germania ne fut certainement pas ­constituée pour exécuter des actions si
scandaleuses et abominables, mais pour châtier les méchants et faire justice,
et pour apporter paix et tranquillité à cette terre, mais puisque les gens sans
ordre ­s’enhardissent à ­commettre toutes sortes ­d’actions mauvaises, je vois
clairement que ceux-là seront cause de la perdition et de la désolation de la
ville, car ils ne c­ onnaissent pas la honte et ne craignent ni Dieu ni le Roi, et
refusent ­d’obéir aux officiers et ­d’accorder crédit aux c­ onseils des anciens57.

Viciana prend soin de dissocier « ceux qui n­ ’avaient pas honte de leurs
actions et ne craignaient plus Dieu » de Llorenç et des premiers initiateurs
­d’un mouvement qui n ­ ’était pas dans ses c­ ommencements une révolte
paysanne ou populaire désordonnée mais reposait sur des intentions
saines. Après avoir insisté sur cette première phase – plus que Mexía ou
même Santa Cruz qui mettaient en valeur la radicalisation de la révolte –
Viciana ne cache pas son hostilité envers la prise de pouvoir du peuple.
À ses yeux les agermanados, poussés par l­’ambition, se sont servis de la
situation désastreuse qui existait à Valence – fuite des autorités royales,
abus des nobles, attaques barbaresques – pour tenter de modifier la fis-
calité et de gouverner alors q­ u’ils ­n’avaient ni c­ ompétence ni légitimité,
remettant ainsi en cause les fondements de cette société si hiérarchisée.
Viciana dénonce leur œuvre de destruction de Valence, symbolisée par
leur décision de briser les tablas58 afin de ne plus avoir à payer d­ ’impôts.
Ces meneurs populaires sont en outre pour beaucoup, selon Viciana, des
« étrangers » fauteurs de troubles, distingués des vrais « naturels » de Valence :
ainsi, il met en scène une c­ onversation entre Juan González, secrétaire du
56 Rafael Martín de Viciana, Libro quarto de la crónica…, fo 3vo.
57 « No por cierto fue inuentada la germania, ni hecha para hazer coſas tan eſcandaloſas y abominables,
ſino para caſtigar los malos y hazer iuſticia, y poner en paz y ſoſſiego la tierra, pues la gente ſin
orden ſe deſmanda, a hazer y emprender toda coſa mala, veo claramente que eſtos ſeran cauſadores
de la perdicion y deſolacion de la ciudad, porque no tienen verguença, ni temen a Dios, ni al Rey,
ni quieren obedeſcer a los officiales, ni creen alos anſianos que les aconseian », Ibid., fo 59v-60ro.
58 Tables où sont répertoriés les droits de ­l’Église, du Roi, de la Ville et du royaume.
Entre interprétations et omissions 53

roi, et Bartolomé Monfort, juriste agermanado, au cours de laquelle Monfort


accuse les « étrangers » ­d’être en grande partie responsables de la dégradation
de la situation. Il affirme notamment que parmi les corporations ­d’artisans
« il n­ ’y en a pas le cinquième qui soient naturels de la ville59 » et il leur
reproche de refuser le vote des « cinco coſas60 ». La même distinction entre
naturels du royaume et étrangers est flagrante au moment de ­l’arrivée de
Vicent Peris à Valence en septembre 1521 : « les naturels souhaitaient la
venue de l­ ’infant, pour que la paix soit c­ onclue et pour la tranquillité de la
ville : les étrangers et nouveaux venus soutenaient Vicent Peis ; ces derniers
étaient nombreux et hardis61 ». Quant au vice-roi Hurtado de Mendoza, loin
­d’être c­ onsidéré par Viciana c­ omme un étranger au royaume, de surcroît peu
légitime ­puisqu’il représente un monarque qui ­n’a pas juré les fueros, il est
­l’objet ­d’un portrait flatteur. Viciana affirme que les nobles se réjouirent de
son arrivée, puis il le montre, avant ­l’affrontement avec Vicent Peris et les
siens, évoquant les hauts faits de son ancêtre, le Cid, libérateur de Valence :
Le marquis étant descendant du Cid Ruy Diaz de Vivar, lui devant son nom,
son sang, et étant en possession des terres de son c­ omté : lors de cette journée
il souhaitait gagner cette même ville de Valence, et la libérer des mains d­ ’un
tyran si méchant et si cruel62.

Viciana rend hommage au vice-roi qui a su se battre, grâce à Dieu, à son


honneur et à son courage, et mettre fin au mouvement agermanado. Il se
positionne ainsi nettement parmi les loyaux sujets. Son récit, plus détaillé
que ceux des chroniqueurs castillans de Charles Quint, est peut-être aussi
59 « no hay la quinta parte dellos que ſean naturales de la ciudad », Libro cuarto de la crónica…, fo 96ro.
60 Série de cinq ­conditions que fait le Roi aux agermanados : « Primeramente que el virey buelua
ala ciudad de Valencia, y que aſsiente ſu audiencia, y que ſea obedeſcido por todos generalmēte.
La ſegunda que el vſo de las armas ſea limitado ­con traer armas honeſtas, y acoſtūbradas por los
hombres hōrados en tiempo de paz : y que todas las otras armas ſe depoſiten en las caſas de las
cofradias, y que tengan las llaues delos depoſitos dellas el virei o el gouernador. La tercera que
la germania ſe deshada, y ceſſe el numero y oficio delos treze y todo c­oncierto y apercibimiento de
guerra, ſegun la orden y diſpoſicion que os diere el virei. La quarta q ſe ſatishagan los agrauios
y daños hechos enlas caſas y tierras de los caualleros pagandolo los malechores. La quinta que los
jurados q ſe hizieron, pues fuerō hechos ­contra la mēte y diſpuſicion del rey, que ſean depoſitados
del oficio : y que el virey haga eleccion de jurados ſegun orden de ſu mageſtad. » (Ibid., fo 89ro)
61 « los naturales deſſeauan la venida del infante : porque ſe ­concluyeſſe la paz y repoſo de la ciudad :
y eſtrangeros y aduenedizos favorecian a Vicent Periz : eſtos erā muchos y deſuergonçados », Libro
quarto de la crónica…, fo 177ro.
62 « ſiendo el marques descendiente del Cid Ruydiaz de Biuar, y traher ſu nombre, ſangre, y poſſear
el eſtado del c­ondado del Cid : que en eſta jornada ganaſſe la meſma ciudad de Valencia, y la
libraſſe delas manos de un tirano tā malo y cruel », Ibid., fo 200vo.
54 ANNE-LISE RICHARD

plus nuancé dans la mesure où il ne ­s’agit pas ­d’une chronique « officielle »,


bien ­qu’il soit marqué par ­l’appartenance de Viciana à un milieu social.
De fait, il ­s’emploie à se dissocier le plus possible du peuple révolté, et
à prouver que les actions les plus violentes et les dérives furent le fait
­d’étrangers au royaume de Valence ou à tout le moins de la populace. Ce
souci peut faire penser aux récits de la révolte de Saragosse de 1591 rédigés
par des Aragonais dans le but ­d’imputer le soulèvement à des étrangers au
royaume ­d’Aragon ou à des individus isolés qui ont manipulé la multitude,
à ceci près que de tels récits furent généralement écrits en réponse à une
demande des Cortes aragonaises, pour rétablir la réputation du royaume63.
Ainsi, bien que la révolte valencienne occupe dans les chroniques du
xvie siècle une place très variable, du silence le plus total à un volume
entier chez Viciana, le soulèvement ne peut être que c­ ondamné en tant
que désobéissance à l­’autorité royale. Si une différence existe entre les
chroniques qui imposent une vision globale des événements et celles qui
distinguent plusieurs phases et expriment une certaine ­compréhension
des causes du soulèvement dans ses ­commencements, toutes se rejoignent
dans le refus des violences, généralement imputées aux couches les plus
populaires de la société.

LA MÉMOIRE DU MOUVEMENT VALENCIEN


AUX XVIIe ET XVIIIe SIÈCLES
Entre ­continuité et rupture

Il nous faut maintenant examiner la mémoire à plus long terme des


Germanías, ­d’une part dans la Historia de la vida y hechos del Emperador
Carlos V64 de Fray Prudencio de Sandoval65, première chronique officielle

63 Gascón Pérez, 1999.


64 Prudencio de Sandoval, Primera parte de la vida y hechos del emperador Carlos Quinto,
Valladolid, Sebastián de Cañas, 1604 ; Prudencio de Sandoval, Segunda parte de la vida
y hechos del emperador Carlos Quinto, Valladolid, Sebastián de Cañas, 1606. Nous citons
­d’après Prudencio de Sandoval, Historia de la vida y hechos del emperador Carlos V, Edición
y estudio preliminar de D. Carlos Seco Serrano, Madrid, Atlas, 1955-1956.
65 Sur Sandoval, on pourra ­consulter : Canal Sánchez-Pagín, 1980 ; voir également
­l’introduction de Carlos Seco Serrano à son édition du texte, 1955-1956.
Entre interprétations et omissions 55

et ­complète du règne à être publiée, en 1604-1606, soit près de cinquante


ans après la mort de Charles Quint, d­ ’autre part dans l­ ’historiographie
du royaume de Valence. Le texte de Sandoval, qui fut nommé cronista
en 1600 et chargé par Philippe III ­d’écrire ­l’histoire du règne de son
grand-père, ­constituera pendant longtemps la seule version officielle
disponible de ­l’ensemble du règne, ­composée grâce à des manuscrits
ou des fragments des anciens historiographes de l­’empereur, tels que
Florián de Ocampo, Antonio de Guevara ou Pedro Mexía, ce qui favo-
rise une ­continuité dans ­l’interprétation des faits depuis le xvie siècle.
Quant à ­l’historiographie valencienne, elle est représentée par ­l’œuvre
­d’un c­ ontemporain de Sandoval, Gaspar Juan Escolano66, docteur en
théologie et membre de la Academia de los Nocturnos67, qui fut, en 1604,
le premier cronista du royaume de Valence. Ses Décadas de la historia de
la insigne y coronada ciudad y reino de Valencia furent publiées peu de
temps après l­ ’Histoire de Sandoval, en 1610 – pour la première partie –
et 1611 – pour la deuxième partie –, une troisième partie étant restée
inachevée68. Escolano y retrace la ­construction et ­l’évolution du royaume
de Valence en couvrant ­d’abord les temps primitifs ­jusqu’à la mort de
Pierre le Grand en 1285. Puis il décrit minutieusement Valence et ses
particularités et, au lieu de reprendre sa narration historique en suivant
la chronologie après cet intermède, il entreprend de relater la révolte des
Germanías, laissant donc de côté quelque deux cents ans, et poursuit son
récit ­jusqu’à ­l’expulsion des morisques en 1609. Ce découpage a pour
effet de mettre en valeur les Germanías et le passé récent de Valence.
Mais ­l’interprétation q­ u’il en donne ­n’en est pas pour autant originale.
De fait, non seulement la vision des Germanías chez Sandoval et chez
Escolano est dans ­l’ensemble peu différente de celle que livraient les écrits
du siècle précédent, mais on ­constate un amoindrissement des nuances
relevées entre Mexía, Santa Cruz et plus spécifiquement Viciana. Une
certaine uniformisation est à l­’œuvre, sans que l­’on sache précisément si
66 Sur Escolano, voir Martí Grajales, 1892 ; Almarche y Vázquez, 1919 ; Castañeda y Alcover,
1920.
67 Académie littéraire fondée en 1591 à Valence qui se réunissait une fois par semaine,
­jusqu’à sa suppression en 1594.
68 Gaspar Juan Escolano, Historia de la Insigne y Coronada Ciudad y Reino de Valencia, Valencia,
Pedro Patricio Mey, 1610-1611. ­L’édition ­consultée est : Gaspar Juan Escolano, Décadas
de la historia de la insigne y coronada ciudad y reino de Valencia, aumentada ­con gran caudal
de notas, ampliaciones aclaratorias y ­continuada hasta nuestros días por Juan Bautista Perales,
Valencia, Terraza, Aliena y Compañía Editores, 1878-1880.
56 ANNE-LISE RICHARD

Escolano a pris c­ onnaissance de l­’Histoire de Sandoval publiée quelques


années avant son propre ouvrage69. Pourtant, les deux écrits recèlent une
même particularité : l­’accentuation marquée des signes annonciateurs
de malheur ou de désastre avant ­l’éclatement de la révolte. Escolano et
Sandoval racontent en effet c­ omment le fleuve traversant la ville, qui
­d’ordinaire n­ ’avait que peu d­ ’eau, « grossit et sortit de son lit, à tel point
­qu’il mit Valence dans le plus grand péril ­qu’on ait jamais vu70 », avant que
des pluies torrentielles ne ­s’abattent sur la ville en 1517 pendant quarante
jours, reproduisant le Déluge ­comme ­l’écrit Escolano71 : le fleuve et la rue
ne faisaient plus ­qu’un et tous craignaient que la fin de Valence ne soit
arrivée. Or, cet épisode coïncide avec ­l’entrée du futur Charles Quint en
Espagne et c­ onstitue un présage funeste, c­ omplété par d­ ’autres éléments
annonciateurs de désordres : un lion est aperçu déambulant dans les rues,
ce que le chroniqueur valencien interprète c­ omme « ­l’Ange exterminateur,
­commissaire de la justice de Dieu, à qui avait été ­confié le châtiment de
notre cité72 », puis la terre tremble à Xàtiva, la foudre ­s’abat sur la ville
et enfin la peste fait fuir « la plus grande partie des bons de la cité73 ».
Sandoval se livre tout particulièrement à une charge virulente
­contre « le peuple bestial, si féroce ­lorsqu’il échappe au frein74 », tandis
­qu’Escolano décrit les meneurs de la révolte c­ omme des tyrans75. De
la sorte, tout en blâmant la désobéissance à l­’autorité royale, ils ins-
crivent la révolte dans un ordre providentiel. Si les deux chroniqueurs
insistent sur ces événements jouant le rôle de mauvais présage, c­ ’est aussi
pour mieux les caractériser c­ omme signes annonciateurs des futures
69 Escolano affirme, dans sa dédicace à la première décade, que « Los ocho [años] se han pasado
en organizarle, y juntar cuanto me ha sido posible de autores graves, escrituras auténticas, piedras,
medallas, y papeles fidedignos para dar forma á este ­concepto sacado de las entrañas de la verdad »
(Gaspar Juan Escolano, Décadas de la historia…, p. 8). À la lecture des décades, on s­ ’aperçoit
­qu’il a principalement étudié des auteurs valenciens, ­comme Martín de Viciana, Pere
Antoni Beuter ou Francisco Diago, à qui il fait clairement référence à plusieurs reprises.
70 « creció y salió de madre, tanta, que puso a Valencia en el mayor aprieto que jamás se vió »,
Prudencio de Sandoval, Historia de la vida y hechos…, tome I, p. 283.
71 « Pareció un retrato del diluvio de Noé », Gaspar Juan Escolano, Décadas de la historia…,
tome II, p. 642.
72 « el Angel percutiente, ­comisario de la justicia de Dios, á quien se habia c­ometido el castigo de
nuestra ciudad », Ibid., p. 643.
73 Ibid., p. 644.
74 « tan feroz es la bestia del vulgo cuando pierde el freno », Prudencio de Sandoval, Historia de
la vida y hechos…, tome I, p. 285.
75 ­C’est principalement le cas pour Guillén Sorolla ­comparé à Néron pour avoir organisé,
de manière machiavélique, sa fausse mort.
Entre interprétations et omissions 57

campagnes de baptêmes forcés organisées par les agermanados. Cette


accentuation est renforcée par le fait q­ u’ils écrivent tous deux pendant
la période des expulsions des morisques d­ ’Espagne76. Le traitement de
ces campagnes est-il pour autant différent en fonction de l­’époque de
rédaction ? Le texte de Sandoval s­ ’inscrit, c­ omme bien souvent, dans la
­continuité de Santa Cruz77 qui insiste sur la peur qui pousse les mudéjars
à accepter le baptême mais aussi sur le fait que cette action était une
manière ­d’atteindre les seigneurs pour qui travaillaient les mudéjars78.
En revanche, les chroniqueurs ne cautionnent en aucun cas l­ ’apostasie,
et de toute évidence approuvent la décision prise par l­’assemblée de
1525 de ­considérer les baptêmes ­comme valables, et ­d’obliger tous les
mudéjars de la couronne d­ ’Aragon à devenir chrétiens.
De son côté, Escolano se montre beaucoup plus précis sur les diffé-
rents échanges et instructions entre ­l’empereur et les mudéjars ainsi que
sur les soulèvements de ceux qui refusent le baptême. S­ ’il c­ ondamne
lui aussi toute apostasie, il pointe les défaillances quant à la méthode
et aux moyens utilisés : il déplore ­l’emploi de la violence, le manque
­d’instruction chrétienne reçu par les mudéjars et ­l’absence de prédicateur
depuis plus de cent vingt ans dans le royaume de Valence. Il évoque
également les précédentes campagnes de baptêmes forcés79 pour montrer
que ­l’utilisation de la force débouche toujours sur l­ ’échec de la c­ onversion.
En effet, « de même que ­l’homme qui se sent ­l’estomac embarrassé n­ ’a
pas de repos avant d­ ’avoir expulsé la bouchée indigeste, ces malheureux
qui reçurent avec dégoût et par la force le baptême, q­ u’ils ne pouvaient
avaler, ­n’avaient ­d’autre désir que de ­s’en défaire80 ». Pour lui, la solution
véritable pour c­ onvertir de façon pérenne est l­ ’instruction religieuse des
mudéjars grâce à des personnes ­compétentes et qualifiées.
76 Pour de plus amples informations sur ce sujet, on peut ­consulter : Bernabé Pons, 2009 ;
Domínguez Ortiz, Vincent, 1985, et Poutrin, 2012.
77 Mexía ne dit rien ­concernant ce sujet et Viciana ne fait que ­l’évoquer.
78 Les mudéjars versaient des impôts supplémentaires, q­ u’ils n­ ’étaient plus c­ ontraints de
payer en devenant chrétiens.
79 Gaspar Juan Escolano, Décadas de la historia…, tome II, p. 742-744. Il cite principa-
lement le baptême forcé des juifs, sous le règne de Sisebut, vers 610 et les décisions
prises par ses différents successeurs. Il parle également des juifs c­ onvertis de force en
Angleterre ainsi que de ceux qui ont subi le même sort en France, dans les années
1200.
80 « Como el hombre que se siente el estómago empachado, no puede reposar hasta echar el bocado
indigesto, estos desventurados que c­ on asco y fuerza recibieron el bautismo (que no podian tragar),
no anhelaban por otro, que por sacudirse dél », Ibid., p. 746.
58 ANNE-LISE RICHARD

Par la suite, au xviiie siècle, l­’intérêt pour les Germanías semble


­s’éteindre progressivement, au point que, selon Ricardo García Cárcel,
« ­l’historiographie du siècle, en raison du poids du centralisme des
Bourbons, oublia presque totalement ­l’existence des Germanías81 » :
les textes de Juan de Ferreras82 et de José Manuel Miñana83 échappent
pourtant à ce vide historiographique. Le premier, ecclésiastique ilustrado
qui s­’est grandement impliqué dans la création de la Real Academia de
España, entreprend une Historia de España84 tandis que le second, reli-
gieux et peintre valencien, choisit de poursuivre, en latin, le manuscrit
de Juan de Mariana. Les deux discours, qui appartiennent à des histoires
générales, semblent liés par cette ­continuité déjà de mise au xviie siècle
bien que des ruptures apparaissent également.
Ferreras, dont le texte semble être une ­compilation des sources aux-
quelles il fait régulièrement référence à la fin des paragraphes85, ­consacre
de très nombreuses pages à la révolte des Germanías, bien ­qu’il dise vouloir
les traiter avec la plus grande brièveté86 », et décrit ­consciencieusement
la révolte – ses débuts, ses épisodes c­ onflictuels, sa fin. Pour autant, son
texte reste très fidèle à l­ ’interprétation des siècles précédents et ne présente
guère d­ ’évolution. En revanche, le texte de Miñana allie c­ ontinuité et
rupture : d­ ’un côté il reste profondément marqué par ­l’aversion envers les
agermanados, ­qu’il juge trop téméraires, mais d­ ’un autre, il c­ ommence à
désigner ­l’empereur ­comme étant en partie responsable de la situation :
« Les Valenciens se servirent du pouvoir que le prince, sur un ­conseil
mûrement réfléchi, et au détriment de la République, leur avait donné
de lever des ­compagnies, et de se regrouper87 ». Il faut toutefois attendre
le xixe siècle pour voir se c­ oncrétiser des orientations divergentes en
fonction de nouveaux c­ ontextes.
81 Ricardo García Cárcel, 1973, p. 99.
82 Pour de plus amples informations sur Ferreras : Maiso González, 1994-1995 ; Valderas, 2000.
83 José Manuel Miñana, Historia general de España o ­continuacion de la historia de España del
R.P. Juan de Mariana dividida en cinco tomos, Amberes, Marcos-Miguel Bousquet y Compañia,
1739. La première édition est traduite en castillan. Voir García Hernán, 2004, p. 166-167.
84 Juan de Ferreras, Historia de España, Madrid, Imprenta de Francisco de el Hierro, 1700-
1727, 16 vol.
85 Parmi lesquelles les œuvres de Pedro Mexía, Prudencio de Sandoval, Rafael Martí de
Viciana ou encore Gaspar Juan Escolano.
86 « nos c­ontentarémos ­con un breve Epilogo de ellos », Juan de Ferreras, op. cit., vol. 12, p. 299.
87 « Y valiendoſſe los Valencianos del poder que c­on ſano, y maduro c­onſejo, y daño de la republica
les avia dado el Principe, de levantar c­ompañias, y centuriarſe de alli adelante », José Manuel
Miñana, op. cit., tomo XII, p. 100.
Entre interprétations et omissions 59

UNE RÉACTIVATION DE LA MÉMOIRE


DES GERMANÍAS AU XIXe SIÈCLE

La réactivation de la mémoire des Germanías se manifeste notam-


ment par une nouvelle édition de la chronique ­d’Escolano, à la fin du
xixe siècle, par les soins de Juan Bautista Perales. Cet écrivain valencien,
collaborateur de divers journaux, ne se ­contente pas de reproduire ­l’édition
originale mais annote les deux premières parties et entreprend même de
poursuivre l­ ’œuvre ­d’Escolano en rédigeant la troisième décade88. Pour
ce faire, Perales renoue le fil de ­l’histoire en retraçant les événements
­concernant Valence depuis 1285 ­jusqu’à 1868, avec quelques annotations
sur les années suivantes. De ce fait, il traite une nouvelle fois la révolte
valencienne, sans toutefois relater à son tour le détail des événements,
puisque c­ ’est l­ ’objet de la seconde décade, mais en donnant son interpré-
tation sur ­l’ensemble de la révolte, une interprétation qui, dit-il, diffère
de celle de tous les historiens qui l­ ’ont précédé89. Cette affirmation dont
on pourra vérifier ­l’exactitude est à mettre en relation avec l­’époque à
laquelle Perales écrit, marquée par l­’instabilité politique90.
Il est aisé de percevoir des différences d­ ’orientation liées à des c­ ontextes
politiques fluctuants si l­ ’on c­ onfronte l­ ’œuvre de Perales à celle de son
­contemporain José Muñoz Maldonado91, un personnage influent92 lié
aux Bourbons et qui ­connut une longue carrière juridique, politique
et littéraire, cette dernière particulièrement féconde p ­ uisqu’il laissa
88 Escolano avait lui-même pour projet ­d’écrire trois décades (Gaspar Juan Escolano, Juan
Bautista Perales, Décadas de la historia de la insigne y coronada ciudad, tome I, p. 8) : « Acordé
de repartirle en tres Décadas, por ser el número que agrada á Dios, (­como dijo el filósofo) y darle
este nombre por tener diez libros cada Década. »
89 Concernant les chapitres dédiés aux Germanías par Escolano, Perales précise (Décadas…,
tome II, p. 644) : « Nos abstendremos por tanto de anotar las páginas sucesivas que restan de
este décimo libro, porque en la c­ ontinuacion de la Historia habremos de pasar nuevamente sobre el
periodo de las Germanías y expulsion de los moriscos, y no creemos prudente incurrir en forzosas
repeticiones cuando nuestro criterio difiere en ambos periodos al de todos los historiadores que nos
han precedido. »
90 La deuxième édition des décades d­ ’Escolano, ­contenant la suite de Perales, fut publiée
entre 1878 et 1880.
91 Sur José Muñoz Maldonado, nous renvoyons à Dorado, 2014 et Pérez Ortega, 2008.
92 Il appartient à une famille qui évolue au sein même de la cour royale : Isabelle II lui
octroie les titres de ­comte de Fabraquer et vicomte de San Javier en 1847 et en 1861, il
est nommé ministre du Tribunal Suprême.
60 ANNE-LISE RICHARD

quelques deux cents ouvrages. Après avoir rédigé sur la demande du roi
Ferdinand VII une Historia política y militar de la Guerra de Independencia
en España ­contra Napoleón Bonaparte desde 1808 á 181493, il entreprit
quelques décennies plus tard ­l’écriture d ­ ’une Historia del Emperador
Carlos V94 qui est en grande partie une adaptation d ­ ’un ouvrage de
William Robertson datant du siècle précédent95, avec des modifications.
Dans cette Histoire publiée en 1862, Muñoz Maldonado livre une
interprétation en partie semblable à celle des chroniqueurs du xvie siècle,
et qui exprime mépris et défiance envers le peuple. À ses yeux, les classes
populaires se sont servies des attaques barbaresques c­ omme ­d’un prétexte
pour s­’armer, « en réalité pour se soustraire à l­’autorité des nobles qui
les brimaient96 », et les meneurs des agermanados étaient des êtres cruels,
violents et manipulateurs dont « la férocité et la détermination intrépide
suppléèrent au défaut de tactique et de discipline militaire97 ». Mais il
se permet quelques critiques à l­ ’encontre de Charles Quint, écrivant que
­l’empereur, trop pressé de s­ ’embarquer pour l­ ’Allemagne, « laissa libre
cours au soulèvement de la multitude98 », et ne fut pas mécontent dans
les premiers temps de voir la noblesse valencienne en difficulté, car elle lui
avait refusé les secours financiers ­qu’il demandait. Charles Quint partit
donc pour recevoir la couronne de roi des Romains « sans se préoccuper
de laisser derrière lui une terrible révolution qui pouvait ­l’exposer à
perdre une couronne de plus de prix et qui ceignait déjà son front99 ».
Si certains chroniqueurs du xvie siècle relevaient l­’inexpérience du
monarque, la hâte avec laquelle il quitta la Péninsule, indisposant ses
nouveaux sujets, Muñoz Maldonado reproche plus ouvertement au
premier Habsbourg ­d’Espagne de « tout sacrifier à l­’ambition et à la
93 José Muñoz Maldonado, Historia política y militar de la Guerra de Independencia en España
­contra Napoleón Bonaparte desde 1808 á 1814, Madrid, 1833, 3 vol.
94 José Muñoz Maldonado, Historia del Emperador Carlos V (1500 á 1558), Madrid,
Establecimiento tipográfico de D. Francisco de P. Mellado, 1862. De nombreux textes
espagnols ont été rédigés au xixe siècle sur l­’histoire générale de l­’Espagne mais on
­compte peu d­ ’œuvres spécifiquement ­consacrées à Charles Quint.
95 William Robertson, History of the Reign of the Emperor Charles V, London, 1769, 4 vol.
96 « en la realidad para sustraerse á la autoridad de los nobles que los vejaban », José Muñoz
Maldonado, Historia del Emperador Carlos V, p. 27.
97 « la ferocidad y una resolución intrépida suplieron á la táctica y á la disciplina militar », Ibid.,
p. 111.
98 « autorizó el levantamiento de la multitud », Ibid., p. 27.
99 « sin cuidarse de que dejaba detrás de sí una terrible revolucion que podia esponerle á perder una
corona de mas alto precio y que ya ceñia su frente », Ibid., p. 29.
Entre interprétations et omissions 61

gloire100 ». Surtout, il déclare que le soulèvement, « ­comme toutes les


insurrections qui échouent, servit surtout à établir sur des bases plus
fermes et plus durables le despotisme de la couronne101 ».
Perales, lui, donne une tout autre image du peuple et choisit de mettre
en accusation la noblesse du royaume de Valence. Bien q­ u’il définisse
­d’abord les Germanías c­ omme « un mouvement qui avait ­commencé sans
­qu’on sût c­ omment, car c­ ’est là le caractère des révolutions populaires102 »,
il situe les origines de la révolte au tout début du xvie siècle et ­l’explique
par ­l’accumulation de difficultés que le peuple fut ­contraint ­d’affronter
– famine, abandon des autorités, menaces barbaresques – si bien que
« la coupe de ses souffrances finit par déborder103 ». Il montre les effets
néfastes de certaines prédications et d­ ’une religiosité excessive : en effet
­c’est « un excès de zèle dans l­ ’obéissance aux préceptes de la religion et
aux prescriptions d­ ’un ministre de ­l’Église104 » qui provoqua le bascule-
ment du mouvement dans la violence, c­ omme il le prouve en rapportant
les discours d­ ’un orateur franciscain incitant le peuple à verser le sang
pour apaiser la colère de Dieu105. Mais ce sont surtout les nobles qui se
trouvent accusés d­ ’avoir abandonné le peuple, par exemple en ne prenant
pas la peine de ­s’armer pour le défendre lors du pillage de Cullera. Cet
épisode n­ ’est ­qu’une manifestation ­d’un phénomène plus général : selon
Perales, le c­ omportement de la noblesse valencienne a changé depuis le
règne de Ferdinand Ier ­d’Aragon106, et cette dégénérescence est en partie
expliquée par le ­contact étroit avec la noblesse castillane :

100 « lo sacrifica todo á la ambicion y la gloria », Ibid., p. 30.


101 « c­omo todas las insurrecciones que no triunfan, sirvió solo para establecer sobre bases mas firmes
y duraderas el despotismo de la corona », Ibid., p. 111.
102 « un movimiento que había c­omenzado sin saber cómo, que tal es el carácter de las revoluciones
populares », Gaspar Juan Escolano, Juan Bautista Perales, Décadas…, tomo III, p. 577.
103 « la copa de sus sufrimientos vino al fin á desbordarse », Ibid., p. 572.
104 « un esceso de celo por obedecer los preceptos de la Religion y las prescripciones de un ministro de la
Iglesia », Ibid., p. 574.
105 Un boulanger accusé du pecado nefando ­n’ayant pas été c­ ondamné, faute de preuves, un
franciscain persuade le peuple ­qu’il faut apaiser la colère de Dieu en tuant cet homme.
Le boulanger est remis au peuple « para que desahogasen en aquella victima la saña y
las justas quejas de un pueblo oprimido, castigado, ­con honerosas exacciones, ­con las plagas
de la naturaleza y de los elementos, y escandalosamente exaltado y arrastrado al sendero de
los desórdenes, por el escesivo celo religioso ó quizá por resentimientos personales de un orador
sagrado » (Ibid., p. 574).
106 Grand-père paternel de Ferdinand II ­d’Aragon. Premier roi de la dynastie des Trastamare
dans la couronne ­d’Aragon (1412-1416).
62 ANNE-LISE RICHARD

Une longue période de paix intérieure, le c­ ontact et la fréquente c­ ommunication


avec la noblesse castillane, ­l’introduction de ses mœurs, de sa fastueuse
ostentation, de ses vices et de ses désordres, c­ ontaminèrent la noblesse de ce
royaume qui en vint à ­s’élever c­ ontre la justice, la morale et la ­considération
due aux classes inférieures107.

Cette accusation peut rappeler l­ ’attitude d­ ’un autre Valencien, Viciana,


qui rejetait la ­culpabilité sur les « étrangers » au royaume de Valence,
mais, alors que ­l’accusation de Viciana visait le peuple qui ­s’est soulevé,
Perales ­s’en prend à une noblesse toute-puissante, et déplore ouvertement
les c­ onséquences de l­ ’arrivée sur le trône de la couronne d­ ’Aragon d­ ’une
dynastie castillane.
Par ailleurs, Perales ­s’intéresse particulièrement à quelques figures
importantes de la révolte, dont il dresse un portrait flatté. Joan Llorenç,
premier dirigeant de la germanía, est ainsi ­comparé à Lucius Quinctius
Cincinnatus108, perçu, dans ­l’historiographie romaine, ­comme un homme
vertueux, humble et dépourvu ­d’ambition personnelle : autant de qualités
nécessaires à un chef et à un bon gouvernant. Llorenç, qui avait pressenti
que Vicent Peris « devait causer la perte de la Germanía109 », mérite res-
pect et ­considération car il a agi ­comme un protecteur du peuple et de la
justice. En revanche, le portrait que dresse ­l’historiographe valencien de
Guillén Sorolla, membre de la première Junta de los trece ­connu pour avoir
organisé sa propre mort, n­ ’est pas aussi bienveillant. Il ne voit en lui q­ u’un
jeune homme audacieux, certes bon orateur et courageux, mais imbu de
lui-même et mû par son intérêt personnel. Il lui ôte donc toute légitimité,
en précisant q ­ u’il aurait pu être un autre Guillaume Tell – archétype
de la rébellion, symbole de la résistance du peuple face à l­’oppression
menant à un changement de régime politique110 – s­’il ­s’était réellement
intéressé au devenir du peuple. Cette ­comparaison permet à Perales, en
évoquant simplement le célèbre arbalétrier, de se positionner en faveur
107 « Un largo periodo de paz interior, el roce y la frecuente ­comunicacion ­con la nobleza castellana, la
importacion de sus costumbres, de su fastuosa ostentacion, de sus vicios y sus desórdenes, ­contaminó
á la nobleza de este reino que llegó á insolentarse ­contra la justicia, la moral y la ­consideracion
debida á las clases inferiores », Gaspar Juan Escolano, Juan Bautista Perales, Décadas…,
p. 575.
108 Homme politique romain (519 av. J.-C. – 439 av. J.-C.), devenu ­consul puis dictateur.
109 « había de ser causa de la perdicion de la Germanía », Ibid., p. 577.
110 Rappelons que la Suisse faisait partie au xiiie siècle du Saint-Empire romain germanique
et que la légende affirme que Guillaume Tell a libéré les cantons suisses de ­l’oppression
des Habsbourg, permettant de fait la création de la c­ onfédération suisse en 1291.
Entre interprétations et omissions 63

de l­ ’indépendance du royaume valencien. Pour Perales, l­ ’exact opposé de


Sorolla – Llorenç étant mort prématurément – est Vicent Peris : soldat
courageux, chef habile et surtout citoyen modèle, « digne rival des héros de
la Grèce111 », réputés pour leur habileté au ­combat, leur sang-froid et leur
bravoure. Peris l­ ’a prouvé lors de la bataille de Gandie où il a pris le dessus
sur le vice-roi et les capitaines entraînés de ­l’armée royale. ­L’affrontement
final où Peris lutte ­jusqu’à la mort inspire à Perales cette tirade :
Ni les flammes de l­’incendie, ni le fracas du c­ ombat, ni les hurlements de
la soldatesque, ni la foule terrifiée ne réussissent à faire décliner le courage
du fier citoyen […]. Il succomba en ce lieu ­comme un brave, ­comme un
héros de l­’antiquité, c­ omme un soldat de Léonidas, c­ omme un défenseur
des Thermopyles, ­comme ces demi-dieux que produisit ­l’ancienne Sparte112.

Ces portraits héroïques ne laissent aucun doute sur les sympathies de Perales
et sur son désir ­d’anoblir ­l’action des révoltés et de donner aux représentants
du peuple une stature et une dignité nouvelles. Pour lui, les agermanados
étaient les défenseurs des libertés, et il va j­usqu’à faire des Germanías un
mouvement en avance sur son temps, précurseur des grandes révolutions
de la fin de ­l’époque moderne, tout en soutenant ­qu’il ne ­s’agissait pas
­d’abattre le pouvoir royal mais de libérer le peuple de ­l’emprise des nobles :
La Germanía, en résumé, fut un mouvement véritablement populaire qui ne
pouvait faire triompher ses idées, parce q­ u’elles étaient c­ ontraires à l­’esprit
de ce temps-là et au caractère de tous les peuples d­ ’Europe, subordonnés au
pouvoir de la noblesse dont ils pensaient ne pas pouvoir se passer. […] Elle
détient, à notre avis, ­l’indiscutable mérite ­d’avoir défendu courageusement
avant tout autre peuple ­l’idée de la liberté, devançant de plus ­d’un siècle la
révolution d­ ’Angleterre et laissant derrière elle les graines qui devaient germer
plus tard lors de la révolution française113.

111 « digno rival de los héroes de Grecia », Ibid.


112 « Ni las llamas del incendio ni el fragor del ­combate, ni los alaridos de la soldadesca, ni la
multitud aterrada, ­consiguen hacer decaer el valor del altivo ciudadano […]. Allí sucumbió ­como
un valiente, ­como un héroe de la antigüedad, ­como un soldado de Leónidas, ­como un defensor de
las Termópilas, c­omo aquellos hombres semidioses que produjo la antigua Esparta », Ibid.
113 « La Germanía en resúmen, fué un movimiento verdaderamente popular que no podia alcanzar el
triunfo de sus ideas, porque eran ­contrarias al espíritu de aquellos tiempos y al carácter de todos los
pueblos de Europa, supeditados al poder de la nobleza de la que creian no poder prescindir […].
Encierra á nuestro modo de ver, el indisputable mérito de haber defendido valerosamente antes que
ningun otro pueblo la idea de la libertad, adelantándose en más de un siglo á la revolucion de
Inglaterra y dejando sembradas las semillas que habian de germinar más tarde en la revolucion
francesa », Ibid., p. 581.
64 ANNE-LISE RICHARD

S­ ’il regrette les violences c­ ommises et écrit sentencieusement que « le


sang ne produit que le sang et ses fruits ne sont pas ­d’ordinaire ceux
qui ­conviennent le mieux aux peuples114 », son interprétation tranche
certainement sur les précédentes.

CONCLUSION

Dans ­l’étude de textes historiographiques à laquelle nous venons de


nous livrer, on peut dégager un traitement relativement nuancé de la
révolte des Germanías, et surtout une évolution des interprétations entre
le xvie et le xixe siècle, suivant un rythme différent selon que la mise en
mémoire est ­l’œuvre ­d’auteurs castillans ou valenciens. Dans les écrits du
xvie siècle, qui selon l­’origine de l­’auteur accordent une importance très
variée aux événements de Valence, l­’uniformisation ­n’est pas totale ; bien
que la ­condamnation des agissements du peuple soit ferme et unanime
et que la révolte soit vue principalement ­comme un épisode de désobéis-
sance à ­l’autorité royale, certains textes se ­concentrent sur la radicalisation
du soulèvement tandis que ­d’autres mettent en avant sa première phase
modérée et prennent soin de séparer les loyaux sujets des « étrangers ». Par
la suite, et dès le xviie siècle dans les textes valenciens, des critiques de la
responsabilité du Roi dans le ­conflit se font jour, et les baptêmes forcés des
musulmans sont ­l’objet de critiques plus nombreuses. Mais il faut attendre
le xixe siècle pour voir éclore des dissemblances flagrantes entre les textes,
notamment en ce qui ­concerne l­ ’image du peuple. À Valence, la réactiva-
tion du souvenir des Germanías laisse percevoir une hostilité ouverte à une
noblesse toute-puissante dont le peuple souhaitait s­’affranchir, et sert les
désirs ­d’indépendance ­d’un royaume qui a cessé ­d’exister en tant que tel.

Anne-Lise Richard
Normandie Univ., UNICAEN

114 « la sangre solo reporta sangre y no suelen ser sus frutos los que más ­convienen á los pueblos », Ibid.
INTERPRÉTATIONS
ET ÉCHOS DES COMUNIDADES DE CASTILLE
de l­’historiographie à la réflexion politique
dans ­l’Espagne moderne

La révolte des Comunidades, qui débuta alors que le jeune Charles Ier,
récemment porté au trône du Saint Empire romain germanique, se
rendait en Allemagne pour y recevoir sa première couronne et mit le
royaume de Castille à feu et à sang, eut vraisemblablement des causes
multiples, certaines circonstancielles – les maladresses du nouveau
monarque et ­l’avidité de son entourage flamand et bourguignon entre
autres1 –, et d­ ’autres plus profondes, liées à ­l’accroissement de ­l’autorité
de la couronne au temps des Rois Catholiques et à ­l’évolution de ses
rapports avec les municipalités. Les revendications des ­comuneros, telles
­qu’elles apparaissent dans divers documents et notamment dans la « loi
perpétuelle » ­qu’ils tentèrent d­ ’imposer, c­ ontenaient, outre des exigences
de nature fiscale et protectionniste2, un certain nombre de clauses visant
1 Né et éduqué dans les Flandres, le fils de Jeanne « la Folle » et de l­ ’archiduc Philippe le
Beau débarqua dans la péninsule Ibérique en septembre 1517 après avoir été proclamé
depuis Bruxelles roi de Castille et d­ ’Aragon, alors q­ u’il aurait dû, selon les termes du
testament ­d’Isabelle la Catholique, se ­contenter ­d’être régent du royaume de Castille
au nom de sa mère, incapable ­d’exercer le pouvoir. Il était de surcroît accompagné de
­conseillers qui se firent attribuer force grâces royales, charges, honneurs et prébendes
ecclésiastiques ; ainsi, la ­concession de ­l’archevêché de Tolède à Guillaume de Croy, neveu
de Monsieur de Chièvres, fit scandale. Puis vinrent ­l’élection impériale de 1519, qui
suscita la crainte d­ ’un assujettissement du royaume au Saint Empire, et la c­ onvocation
des Cortes castillanes à Saint Jacques de Compostelle peu de temps après leur réunion à
Valladolid, où les représentants des villes avaient voté un impôt substantiel. La session,
qui avait pour but d­ ’obtenir de nouveaux subsides afin de financer le voyage du monarque
en Allemagne, se déroula dans un climat de grande tension, et dut être interrompue
pour reprendre à La Corogne. Les procuradores, soumis à des pressions, accordèrent ­l’impôt
demandé, mais le soulèvement éclata à Tolède en juin 1520.
2 Joseph Pérez (1999, p. 555) parle même de « nationalisme économique » et plusieurs clauses
de la « loi perpétuelle », visant à protéger les intérêts du royaume de Castille, ­contiennent
­l’interdiction répétée de c­ onfier des charges et des offices à des « non-naturels ». Pour une
66 ALEXANDRA MERLE

à modifier la relation entre le roi et le royaume, représenté par des Cortes


qui se voyaient dotées d­ ’une relative autonomie et d­ ’une responsabilité
affirmée envers le « bien c­ ommun ».
Si la nature et les aspirations du soulèvement prêtent encore de nos
jours à c­ ontroverse, certains y voyant une révolte d­ ’inspiration médiévale,
réitérant des exigences déjà formulées au temps ­d’Henri IV de Castille3,
tandis que d ­ ’autres l­’interprètent c­ omme une ébauche de révolution
moderne , il est indéniable que les Comunidades avaient une assise
4

idéologique qui ­n’est pas sans liens avec les théories diffusées depuis
Salamanque dans le dernier tiers du xve siècle. Plusieurs travaux ont
en effet montré que les revendications des ­comuneros s­’appuyaient non
seulement sur un pactisme bien enraciné, qui s­ ’exprimait aux Cortes en
certaines occasions, mais aussi sur des écrits ­comme ceux de Pedro de
Osma et Fernando de Roa, ­commentateurs de la Politique ­d’Aristote,
qui défendaient la résistance au roi injuste – qualifiée de guerre juste
et distinguée de la sédition – et même le tyrannicide5, et prônaient une
forme de gouvernement limitant le pouvoir du roi et favorisant celui
des « classes moyennes » citadines6.
On peut aisément ­concevoir que ce soulèvement, auquel participèrent
la plupart des villes de Castille et qui ne fut réprimé que grâce à l­ ’appui
­d’une partie de la noblesse, eut un écho durable et laissa des traces per-
ceptibles – ne serait-ce que dans l­’aspect de certains lieux7. Pour notre
part, nous nous intéresserons ici à la mémoire écrite du soulèvement,
c­ onsultation de ce document nous renvoyons à ­l’ouvrage de José Joaquín Jerez (2007),
qui publie en annexe différentes versions des revendications des ­comuneros.
3 Voir par exemple González Alonso (1980), qui relève les similitudes entre la Ley perpetua
et la Sentencia ­compromisoria élaborée en 1465. Toutefois, le texte de 1520 se distingue
en prévoyant la réunion régulière des Cortes, y c­ ompris indépendamment de la présence
du roi, et l­’obligation pour les procuradores de rendre des c­ omptes aux villes qui les ont
mandatés. Carretero Zamora (2002) souligne de son côté la nouveauté de l­’autonomie
projetée des Cortes.
4 Pérez (1999), López-Vela (2004), Alonso García (2009).
5 Voir notamment Castillo Vegas (2013) et Suárez Varela (2007 et 2013). Sur le droit de
résistance et la question du tyrannicide en Castille nous renvoyons à Nieto Soria (2011)
et Merle (2015).
6 Diago Hernando (2007, p. 111) note que Roa défend « un modelo de gobierno en que el ejercicio
del poder debía quedar en manos de los representantes de las clases medias, ­con exclusión tanto de
los sectores populares, c­omo de los miembros de la nobleza. »
7 Ainsi à Medina del Campo, certains visiteurs étrangers tels que l­ ’ambassadeur vénitien
Andrea Navagero se plaisent à relever les vestiges de ­l’incendie qui c­ onstitua un épisode
majeur de la révolte. Voir Richer-Rossi, 2008, p. 6.
INTERPRÉTATIONS ET ÉCHOS DES COMUNIDADES DE CASTILLE 67

et plus précisément à l­’interprétation de ses causes et de sa nature non


seulement dans les écrits historiographiques élaborés au cours de toute
­l’époque moderne – ­jusqu’au xviiie siècle où le changement dynastique
et ­l’éclosion des Lumières en Espagne ont eu une incidence bien ­connue
sur le regard porté sur le passé – mais aussi dans une littérature qui,
étant ­consacrée à ­l’art de gouverner, ne peut ­s’abstenir de traiter des
révoltes, des moyens de les réprimer ou de les éviter, et dans laquelle
nous tenterons ­d’évaluer ­l’importance du souvenir des Comunidades.

LES CHRONIQUEURS DE CHARLES QUINT


ET LES COMUNIDADES
­L’écriture de la révolte entre censure et autocensure

Si l­ ’empereur lui-même, dans le texte q­ u’il dicta à la fin de son règne


et que ­l’on cite ­d’ordinaire ­comme les « Mémoires de Charles Quint »,
avait le loisir de passer sous silence, ou peu s­ ’en faut, les Comunidades8, les
historiographes appointés pour écrire ­l’histoire de son règne ne pouvaient
faire de même. À une époque où se développait une réflexion théorique
sur ­l’art d ­ ’écrire l­’histoire qui, tout en mettant en avant l­’obligation
de dire la vérité, ­n’en était pas moins soucieuse de définir une série de
critères ou de limites pour guider le travail du chroniqueur, ce qui a
­conduit à évoquer la notion ­d’autocensure9, la relation d ­ ’événements
­d’une telle gravité exigeait sans doute des précautions particulières.
8 Il s­ ’agit de mémoires dictées par Charles Quint à partir de 1550, à la 3e personne, envoyées
à son fils Philippe en Espagne avec recommandation de les tenir secrètes, puis sans doute
­continuées à Yuste et récupérées à la mort de ­l’empereur par Philippe II, et que ­l’on
­connaît grâce à une traduction manuscrite en langue portugaise datée de 1620 qui a été
retrouvée inopinément à Paris au xixe siècle. On ignore toujours dans quelle langue fut
rédigé ­l’original. Les Comunidades ­n’apparaissent que 4 fois dans ce texte, toujours au milieu
­d’une série ­d’actions et de négociations de la plus haute importance menées parallèlement,
avec le roi d­ ’Angleterre ou avec le roi de France, sans doute pour réduire l­’importance du
soulèvement. Même si la finalité de ce texte reste imprécise, on peut au moins affirmer ­qu’il
y a dans ­l’acte de ­consignation des événements de son règne par ­l’empereur une volonté
­d’oubli. Voir l­ ’édition critique en espagnol dans le Corpus documental de Carlos V publié par
M. Fernández Álvarez (2003) et, parmi les travaux c­ onsacrés au texte, Kagan, 2001b.
9 À la fois « forma de anticipación o prevención respecto a la acción sancionadora de la censura » et
« forma de interiorización y adopción (voluntaria o forzada) de los principios y criterios que fijan
68 ALEXANDRA MERLE

Dans le cas qui nous occupe, la mise en mémoire « officielle » fut


singulièrement défaillante. La diffusion des différents écrits rédigés du
temps de ­l’empereur, achevés ou non, se trouva longtemps retardée en
raison d­ ’un ­concours de circonstances mais peut-être aussi, précisément,
­d’obstacles ­constituant des formes d­ ’autocensure ou de censure. De tous
les chroniqueurs dûment rémunérés10 pour écrire l­’histoire du règne
de Charles Quint, le seul qui mena à bien sa tâche fut Juan Ginés de
Sepúlveda ; or son œuvre ­composée en latin ne fut publiée ­qu’en 1780,
son auteur lui-même ayant renoncé à la publier de son vivant, laissant
ce soin à ses héritiers11. Les autres chroniques, incomplètes ou inache-
vées, étant restées également inédites12, la première histoire du règne
de Charles Quint publiée en Espagne13 fut celle de fray Prudencio de
Sandoval, historiographe de Philippe III, en 1604-1606. Or, les cinquante
années qui séparent la date ­d’édition du texte de la mort de ­l’empereur
­n’empêchent pas Sandoval ­d’exprimer, au moment de narrer la révolte
des Comunidades, un embarras profond.
Outre cette mémoire « officielle », il existe aussi une mémoire écrite
­constituée de relations rédigées par ­d’autres auteurs et donc plus spon-
tanée en principe, bien que certains de ces personnages aient été liés
los límites del discurso », selon les termes de Cesc Esteve, cette autocensure répond à des
intérêts divers, parmi lesquels il ne faut pas négliger la c­ onception éthique et esthétique
de la discipline (Esteve, 2017a, p. 14). Voir aussi, à propos de la réflexion théorique sur
­l’écriture de ­l’histoire, Esteve (2017b et 2014), et sur ­l’historiographie officielle à ­l’époque
moderne, Cuart Moner (1994), García Hernán (2006), Kagan (2001a et 2010) et Von
Ostenfeld-Suske (2012).
10 Sur les chroniqueurs de ­l’empereur, voir par exemple Alvar Ezquerra (2000), Kagan
(1999 et 2002).
11 Sepúlveda avait été nommé historiographe par l­’empereur en 1536, et fut par la suite
un des précepteurs du futur Philippe II, dont il écrivit aussi ­l’histoire. Sur les raisons
qui ­l’amenèrent à différer la publication de sa chronique, De rebus gestis Caroli V, achevée
quelques années après la mort de ­l’empereur, voir Merle, 2017.
12 Fray Antonio de Guevara, auteur prolifique pourtant, nommé chroniqueur dès 1526,
ne laissa aucune chronique rédigée ; on suppose que ses papiers furent récupérés par
des c­ ontinuateurs, notamment par fray Prudencio de Sandoval. Pedro Mexía, nommé
chroniqueur en 1548, mourut peu de temps après, raison pour laquelle son récit s­ ’arrête
aux années 1530 (couvrant donc les Comunidades). Il fut publié au xxe siècle seulement
(1945).
13 Il existe des chroniques du règne de Charles Quint écrites par des auteurs italiens tels
que Paolo Giovio, Antonio Doria et Lodovico Dolce, et ­l’on ­connaît aussi une biographie
de l­ ’empereur due à un Espagnol installé à Venise, Alfonso de Ulloa, publiée à Venise en
italien en 1560 (et qui semble c­ ontenir des erreurs grossières sur les Comunidades). Nous
ne nous en occuperons pas ici.
INTERPRÉTATIONS ET ÉCHOS DES COMUNIDADES DE CASTILLE 69

­ ’une façon ou ­d’une autre à la couronne, tel Alonso de Santa Cruz,


d
cosmographe dépendant de la Casa de c­ontratación, qui ­composa une
histoire du règne de Charles Quint très détaillée. ­D’autres récits restés
manuscrits, découverts en général bien longtemps après leur élaboration,
sont susceptibles ­d’adopter un ton plus libre, tels que De motu Hispaniæ
de Juan Maldonado, un texte en latin qui fut publié au xixe siècle
(1840), le récit de Pedro de Alcocer, Relación de algunas cosas que pasa-
ron en estos reynos desde que murió la reina Catolica dona Ysabel hasta que
se acabaron las Comunidades en la ciudad de Toledo (publié à Séville en
1872), ou encore la Relación del origen y discurso de las Comunidades, un
récit anonyme découvert récemment qui, ­d’après son éditrice, pourrait
avoir été c­ omposé entre 1529 et 153114.
Or, certains de ces écrits semblent avoir été maintenus dans ­l’ombre
par une forme de censure, exercée depuis le faîte du pouvoir : il en est
ainsi de la chronique ­d’Alonso de Santa Cruz, dont Richard Kagan
dit q­ u’elle fut achevée en 1551, immédiatement c­ onfisquée sur ordre
du prince Philippe, alors régent, et ­conservée ensuite dans les archives
royales pour ­n’en sortir ­qu’en 192015. Quant au De motu Hispaniæ de
Juan Maldonado, selon Maria Ángeles Durán Ramas, en 1540 son auteur
tenta de le publier en s­ ’adressant au prince Philippe, tentative qui resta
infructueuse. Le texte resta par c­ onséquent inédit j­ usqu’en 1840, date à
laquelle il fut découvert par hasard par un bibliothécaire de l­ ’Escorial16.
Certes, on ne saurait affirmer que l­ ’occultation dont furent victimes
ces chroniques est due à la façon dont leurs auteurs rendaient c­ ompte,
précisément, de la révolte de 1520-1521. Toutefois, des cas ­d’expurgation
dans des écrits historiographiques qui, sans être des chroniques du règne
de Charles Quint, abordaient les Comunidades, ont été rapportés : ainsi,
Ignacio García Pinilla ­constate que dans une biographie ­consacrée à
Cisneros, publiée en 1569 par Alvar Gómez de Castro, des passages
relatifs aux Comunidades qui figuraient dans le premier manuscrit
­connu de l­ ’œuvre, daté de 1565, ont été supprimés après des corrections
14 Il ­s’agit ­d’un manuscrit de la Biblioteca de la Junta de Castilla y León, de 257 folios,
édité par Ana Diaz Medina en 2003.
15 Kagan, 2010, p. 113-114.
16 Maldonado, qui est associé au courant érasmiste en Espagne et qui vécut surtout à Burgos,
­commença son récit des Comunidades vers 1525 et lui donna la forme d­ ’un dialogue entre
un Tolédan (ancien ­comunero), un Italien, un Allemand et un Français. Voir l­ ’édition du
texte par M. A. Durán Ramas, 1991.
70 ALEXANDRA MERLE

réalisées par ­l’auteur avec ­l’aide de Paez de Castro, historiographe du


roi Philippe II17.
Les travaux antérieurs c­ onsacrés au traitement des Comunidades dans
­l’ensemble de ces textes historiographiques18 ont souligné la relative
uniformité de leur interprétation : même si Mexía affirme sans ambages
que le soulèvement n­ ’a rien de rationnel et ne saurait ­s’expliquer que
par ­l’intervention du Malin qui « altéra les pensées du peuple19 », les
autres chroniqueurs identifient une série de causes, parmi lesquelles
ils mettent en avant, invariablement, la cupidité de l­ ’entourage du roi,
­comme ­l’a relevé David Torres Sanz : ces auteurs « ­s’accordent à attribuer
à la pression fiscale et/ou à ­l’avidité des étrangers du cercle courtisan de
Charles Quint, sans ­qu’il soit possible ­d’établir une nette distinction
entre les deux causes, la qualité de principal élément déclencheur de la
révolte20 ». Cette ligne interprétative est également suivie dans les écrits
« non officiels » ­comme celui de Santa Cruz ou la chronique anonyme
publiée en 2003, dont le titre c­ omplet est : Relación del origen y discurso
de las Comunidades que en estos reinos de Castilla se levantaron por ausencia
que el emperador don Carlos, quinto de este nombre, hizo de ellos siendo electo
Emperador en Alemania, causadas por los estranjeros que ­consigo traxo quando
vino a ellos de Flandes.
Pourtant certains chroniqueurs, tout en c­ ondamnant la violence du
soulèvement et le principe même de la désobéissance au roi, semblent
trouver aux ­comuneros quelques circonstances atténuantes ; ­c’est le cas de
Sepúlveda21, qui donne une voix à leurs meneurs, notamment à Pedro
Lasso de la Vega. Puis, dans la suite du récit des événements, une dis-
tinction est souvent perceptible entre les débuts du soulèvement et sa
radicalisation, unanimement ­condamnée bien que certains auteurs ne

17 García Pinilla, 2013.


18 Voir notamment Fernández Albaladejo (2002), Kagan (2002), García Cárcel (2002),
Castañeda Tordera (2008), Torres Sanz (2013).
19 « Dos años y medio avía, y aun no cavales, que el Enperador avía venido a estos reynos y gover-
nadolos por su persona y presencia, y los tenía en mucha tranquilidad paz e justicia, quando el
demonio, sembrador de cizañas, c­ omenço a alterar los pensamientos e voluntades de algunos pueblos
y gentes ; de tal manera que se levantaron después tempestades, y alborotos, y sediciones, de que
se siguieron grandes daños y aun muertes y guerras en la mayor parte della, que duraron hartos
días… » (Mexía, 1945, p. 123).
20 Torres Sanz, 2013, p. 22 (nous traduisons).
21 Pour García Hernán (2006, p. 138) Sepúlveda « se muestra incluso c­omprensible c­on los
­comuneros, que no les c­onsidera rebeldes, sino súbditos equivocados. »
INTERPRÉTATIONS ET ÉCHOS DES COMUNIDADES DE CASTILLE 71

cachent pas la responsabilité de la couronne dans cette évolution. Ainsi,


tout en jetant le blâme sur les violences c­ ommises par les révoltés, q­ u’il
appelle « alborotadores », « desleales », « movedores del escándalo », et q­ u’il
accuse ­d’avoir voulu « tyranniser le royaume », ­l’auteur de la chronique
anonyme affirme que le soulèvement avait seulement pour but dans ses
­commencements ­d’attirer ­l’attention du roi, et que les protestations
formulées par les sujets de façon loyale et ouverte furent mal reçues par
ses ­conseillers, qui ­n’apportèrent pas la réponse nécessaire pour calmer
les esprits : « ceux qui furent à l­ ’origine de cette affaire ne souhaitaient
nullement que les choses aillent aussi loin q­ u’elles allèrent par la suite,
et n­ ’avaient pas envisagé que le scandale puisse être si grand et causer
tant de mal22 ».
De même, la réponse rédigée par Jiménez de Quesada en 1567 (mais
restée manuscrite23) à la chronique de Paolo Giovio, dont il avait lu une
traduction par le juriste Gaspar de Baeza, publiée en 1562-1563 en deux
parties à Salamanque24, a beau annoncer des rectifications importantes à
­l’interprétation du chroniqueur italien, elle ne ­s’écarte pas de cette ligne
interprétative c­ ommune. Ainsi, bien ­qu’il proclame ­d’abord que « le
docte Jovio ­s’est trompé » en faisant de la cupidité des Flamands la cause
principale de la révolte, ­l’auteur ­concède que « quelques-uns ­d’entre eux
firent preuve ­d’une grande avidité25 ». Sans doute met-il ­l’accent sur la
légèreté du peuple, prompt à s­ ’enflammer pour un rien, mais il reconnaît
que ce peuple si turbulent faisait valoir des raisons, en particulier trois :
­l’absence du roi, la ­concession d­ ’offices et de grâces à des étrangers au

22 « no fue la intención de los que dieron principio a este negocio que la cosa passase tan adelante
­como después pasó, ni que el escándalo fuese tan general ni tan dañoso », Relación del discurso de
las Comunidades, p. 71-72 (nous traduisons).
23 ­L’auteur, né en 1509 et mort en 1579, fut fondateur en 1538 du Nuevo reino de Granada.
Le titre ­complet de son manuscrit, dédié au président du Conseil des Indes et ­aujourd’hui
­connu ­comme Antijovio, est : Apuntamientos y anotaciones sobre la historia de Paulo Jovio,
obispo de Nochera, en que se declara la verdad de las cosas que pasaron en tiempo del emperador
don Carlos V, desde que c­ omenço a reynar en España hasta el año de MDXLIIII, c­ on descargo de
la nación Española. Lo qual escrivia y ordenava Don Gonçalo Ximenez de Quesada adelantado
y capitan general en el nuevo reyno de Granada. Le texte fut publié pour la première fois en
1952 à Bogota.
24 Sur les différentes traductions espagnoles de Giovio, voir Cuart Moner, 2001b.
25 « Pues biniendo a tratar de las Comunidades digo q­ u’el docto Jovio se engañó en asignar por causa
de las alteraciones españolas la cobdicia de los flamencos […] aunque ubo algo desta codicia en
algunos, otros vivieron muy moderadamente c­ omo personas que merecian tener el lugar que tenian
cabe su príncipe […] », Antijovio, chap. 3.
72 ALEXANDRA MERLE

royaume, et la crainte de voir ­l’or sortir de Castille. Autrement dit, il


­s’en tient aux causes énoncées généralement, en ajoutant cependant que
les « étoiles » purent aussi jouer un rôle26, idée que reprendra plus tard
Prudencio de Sandoval.
Dans ­l’ensemble de ces écrits, si ­l’on distingue entre les motivations ini-
tiales des chefs des ­comuneros, souvent présentées ­comme ­compréhensibles,
voire légitimes, et ­l’emballement incontrôlable de la plèbe, responsable
de la plupart des violences c­ ommises, ce n­ ’est q­ u’exceptionnellement
que l­ ’on impute aux ­comuneros ­l’intention de « détrôner » le roi, ou plus
exactement de restaurer ­l’autorité de Jeanne sa mère, ­comme le font
Pedro Mártir de Anglería (qui manifeste d­ ’ailleurs son indignation devant
ce q­ u’il qualifie de « spectacle atroce et détestable, c­ ontre l­’autorité du
roi »), et ­l’auteur de la relation anonyme27. La plupart des chroniques
­n’évoquent pas cette intention et évitent soigneusement de mettre en
lumière les allusions au droit de résistance dans les discours des révoltés.
Ainsi Sepúlveda, ­lorsqu’il expose leurs revendications, résume les
clauses qui ­concernent le fonctionnement des Cortes et ­n’évoque à aucun
moment ­l’hypothèse ­d’une destitution du monarque, ou même ­d’une
transformation du rapport entre le roi et le royaume. Il prête aux ­comuneros
des déclarations qui ne laissent aucun doute sur leur attachement à la
monarchie et ne retranscrit pas ou adoucit les passages qui font clai-
rement appel aux théories sur la résistance au mauvais gouvernement.
Cette ligne interprétative se prolonge dans l­ ’historiographie bien au-
delà des textes rédigés à l­ ’époque de Charles Quint. Ainsi, la Historia de
la vida y hechos del emperador Carlos V c­ omposée par l­ ’historiographe de
Philippe III, Prudencio de Sandoval, et publiée en 1604-1606, livrant
enfin au public une « histoire officielle » du règne, ne ­s’en démarque guère
pour ­l’essentiel. Sandoval, qui revendique l­’absence de passion propre
à l­’historien idéal28 et sait faire preuve d­ ’un certain esprit critique (par
26 « También se pueden atribuir estos alborotos a influencias de las estrellas porque en aquellos años
no quedo reyno de fieles ni infieles que no se alterasse ­contra su señor, principalmente ­contre el
emperador don Carlos […] », ibid.
27 ­D’après Torres Sanz (2013, p. 27), dans la relation anonyme il est dit (p. 119) que la Junta
­comunera voulait « quitar la administración de esos reinos y el título de rey al Emperador. »
28 « Yo ni loo ni ­condeno a nadie, ­con afición ni otra pasión. Ni ­cometeré tal pecado por cuanto Dios
tiene en el suelo, ni miraré en que sea mi natural, ni que sea extranjero. No puedo decir lo que no
vi, porque no era nacido ; diré lo que he hallado en papeles, en personas y autores graves a quien
se debe dar crédito, y en los papeles originales de los Consejos, y cartas del rey y sus ministros. »
(Historia de la vida y hechos…, Livre III, chap. xvi, p. 195)
INTERPRÉTATIONS ET ÉCHOS DES COMUNIDADES DE CASTILLE 73

exemple à propos des jugements de Pedro Mexía29), ne se fait pas faute,


dès le préambule de sa narration des Comunidades, au moment même
où il expose son embarras, d­ ’orienter ­l’interprétation du soulèvement
en affirmant la profonde loyauté des Castillans à la monarchie et au roi.
Matière assurément déplorable, et que ­j’aimerais beaucoup pouvoir passer sous
silence, du fait ­qu’elle touche à quelques illustres maisons, à des villes et cités
capitales de ces royaumes, qui n­ ’ont jamais failli au respect dû à leurs rois,
mais ont au ­contraire prouvé leur loyauté. Je ne crois pas, ­d’ailleurs, ­qu’ils [les
­comuneros] aient pensé manquer à leurs devoirs envers le roi, mais plutôt le tirer
de ­l’oppression dans laquelle le tenaient ses favoris. La preuve en est q­ u’ils en
ont toujours appelé au roi, le priant de ne point quitter le royaume, disant
­qu’ils souhaitaient le voir et jouir de sa royale présence, ce ­qu’ils ­n’auraient
pas demandé ­s’ils avaient voulu manquer à leurs devoirs envers lui30.

Tout en se montrant sur plusieurs points délicats plus précis que la


plupart de ses devanciers – ainsi, il ­n’occulte rien des tensions qui suivirent
la mort de Ferdinand le Catholique en 151631 – et en insérant dans sa nar-
ration un nombre ­considérable de témoignages et de documents, dont la
« loi perpétuelle » avec toutes ses clauses (y ­compris le préambule et la fin
du texte qui recèlent des déclarations faisant appel au droit de résistance
des sujets au cas où le roi ou un de ses successeurs tenterait ­d’abroger ou
de modifier cette loi), il donne une grande importance, dans son récit, à
­l’illustration des méfaits d­ ’une privanza mal c­ omprise. Ainsi, il s­’attarde
volontiers sur le portrait de monsieur de Chièvres en privado de Carlos,
assorti de généralisations sentencieuses dans lesquelles on reconnaît des
réflexions propres à la littérature politique de son temps :
Les rois s­’en remettent à leurs favoris, ils leur c­ onfient le gouvernement et
­c’est ainsi que se perdent les royaumes, car ils ne sont pas gouvernés par leur
prince naturel mais par qui ne ­l’est pas, et dont le cœur n­ ’est pas, ­comme

29 Par exemple, après avoir relevé que Mexía présente Chièvres c­ omme « muy prudente » et très
fidèle au roi, il écrit : « ­con todo, parece que habla Pero Mexía ­con alguna afición, porque respondiendo
al cargo que al rey se hacía, de que extranjeros gobernaban el reino, dice que no era así […] ».
30 « Materia, por cierto, lastimosa, y que yo quisiera harto pasar en silencio por tocar a algunas
casas ilustres, ciudades y villas cabezas destos reinos, que nunca desirvieron a sus reyes, antes
les fueron muy leales. Ni entiendo yo que ellos pensaban que le deservían sino que le sacaban de
una opresión en que sus privados le tenían. Y ­consta claro en que siempre apellidaron por su rey,
y que no se fuese del reino, que le querían ver y gozar de su real presencia, lo cual no pidieran si
quisieran deservirle », Sandoval, Livre V, p. 280 (nous traduisons).
31 Il transcrit par exemple une lettre envoyée par le ­conseil de Castille à Charles, alors ­qu’il
était encore dans les Flandres, pour le dissuader de prendre le titre de roi.
74 ALEXANDRA MERLE

celui du roi, dans la main de Dieu. Les maux qui en résultent sont bien
­connus […]. Nous verrons ces royaumes troublés, non par la déloyauté de la
nation castillane, qui a toujours été très fidèle, mais à cause de l­ ’avarice ­d’un
favori étranger […]32.

À une époque – celle de Philippe III et du duc de Lerma – où l­’on


débattait beaucoup en Espagne sur les c­ onditions de l­ ’exercice du vali-
miento, les causes des Comunidades – les mêmes que pour les chroniqueurs
du siècle précédent33– fournissent donc un exemple instructif des méfaits
de la faveur, quand le favori est cupide et ­s’empare du pouvoir :
la faveur de Monsieur de Chièvres était telle ­qu’on aurait plutôt dit que
Chièvres était le roi, et le roi son fils, et non que Chièvres était le vassal et le
serviteur, ­comme il ­l’était. Il ­n’y avait ­d’entrées et le roi ­n’avait ­d’oreille que
pour qui avait l­ ’agrément de Chièvres. […] et à la vérité ce fut là la première
cause de mécontentement c­ ontre le prince innocent34.

Il ­s’agit par ailleurs d­ ’un favori étranger, détail que Sandoval ne manque
pas de relever et qui ajoute au caractère « nationaliste » ­d’une œuvre
qui tend à glorifier les sujets espagnols de ­l’empereur, ­comme cela a
été souvent c­ onstaté. Enfin, après avoir raconté la déroute de Villalar
et ­l’exécution des principaux chefs des rebelles, il exalte la clémence
de Charles Quint.
En somme, ­l’histoire de Sandoval, si elle expose avec précision les
causes immédiates du soulèvement, ­n’approfondit nullement les velléités de
32 « Ríndense los reyes a sus privados, fíanles el gobierno y piérdense los reinos, porque no los rige su
principe natural, sino el que no lo es, cuyo corazon no esta, ­como el del rey, en la mano de Dios.
Los daños que de esto resultan son al mundo notorios […] veremos alterados estos reinos, no por
deslealtad de la nación castellana, que siempre fue fidelissima, sino por la avaricia de un privado
extranjero », Sandoval, p. 145 (nous traduisons). Il écrit aussi : « la experiencia muestra que
de venderse los oficios se siguen levantamientos y discordias de los pueblos, ­como los hubo en Castilla
no por faltar los castellanos en la fidelidad debida a sus reyes, sino por éstas y otras intolerables
demasías de malos ministros. » (Livre II, p. 158).
33 « Por manera que tres fueron las causas principales de las alteraciones. Ver salir al rey del reino,
por estar acostumbrados a tener sus reyes en España […]. La segunda, que se daban los oficios
y beneficios a extranjeros ; la tercera fue gritar que se sacaba el dinero de España en gran suma
para reinos extraños. Y podemos añadir la cuarta : que alguna mala influencia reinó estos años,
porque en todos ellos casi se alteraron en Castilla, en Sicilia, en Cerdeña y aun Austria, haciendo
en todas partes unos mesmos desatinos » (peut-être un écho à ­l’Antijovio, p. 283).
34 « la privanza de Monsieur de Xevres era tanta que más parecía ser Xevres el rey, el rey su hijo,
que no ser Xevres vasallo y criado ­como lo era. No había puerta ni oído en el rey, mas de para
quien Xevres quería […] y a la verdad ésta fue la primera ocasion por donde el inocente principe
­comenzó a ser malquisto », Sandoval, Livre V, p. 281 (nous traduisons).
INTERPRÉTATIONS ET ÉCHOS DES COMUNIDADES DE CASTILLE 75

modification du fonctionnement des institutions castillanes, et ­condamne


nettement les actions c­ ontre l­’autorité royale. Cette mise en mémoire
­convenable prévaudra pendant tout le xviie siècle, au gré des nombreuses
rééditions du texte35. Par la suite, écrit Ramón Sánchez González,
­L’écho des Comunidades ­s’atténue aux xviie et xviiie siècles, à mesure ­qu’elles
­s’éloignent dans le temps, et elles perdent leur attrait aux yeux des chroni-
queurs. Néanmoins les allusions ­consistent ­d’ordinaire en ­condamnations,
du fait q ­ u’elles ont porté atteinte au pouvoir établi et ­qu’elles avaient un
caractère séditieux, même ­lorsqu’on reconnaît ­l’existence ­d’abus susceptibles
­d’expliquer le malaise qui mena à la subversion36.

Il semble donc que ­l’historiographie du temps des Habsbourg répugne


à attribuer aux ­comuneros un projet politique impliquant à tout le moins
un changement dans le fonctionnement des institutions. Le processus
de mise en mémoire, indépendamment de la question de la diffusion,
est sélectif et vise à affirmer la stabilité de la monarchie et la loyauté
des sujets castillans. De même, les écrits c­ onsacrés à l­’histoire parti-
culière de certaines villes, qui se développent aux xvie et xviie siècles,
ont tendance à atténuer ou même à nier toute participation de ces villes
aux désordres ­commis par les ­comuneros et à proclamer hautement leur
fidélité à la couronne37.

LA PRÉSENCE DISCRÈTE
DES COMUNIDADES DANS LA RÉFLEXION POLITIQUE
DE ­L’ÉPOQUE MODERNE

Les Comunidades ne furent pas sans répercussions sur la réflexion


politique, mais il ­s’agit tout d­ ’abord ­d’une influence en creux, perceptible
dans les années qui suivent la répression et dans une moindre mesure
35 Après l­’édition originale en deux volumes (Valladolid, 1604 et 1606), on enregistre
­d’autres éditions, notamment : Pamplona, en casa de Bartholomé Paris, 1614 (avec une
nouvelle émission en 1618, puis en 1634 avec une nouvelle page de titre) ; Barcelona, por
Sebastián Cormellas, 1625 ; Madrid, por Joseph Fernández de Buendia, 1675 ; Amberes,
Geronymo Verdussen, 1681…
36 Sánchez González, 2008, p. 20 (nous traduisons).
37 Gómez Vozmediano (2010) le montre parfaitement dans le cas de Cordoue et de Séville.
76 ALEXANDRA MERLE

pendant le reste du règne, où les écrits qui définissent la c­ onduite du


monarque tendent à éviter certaines thématiques par trop gênantes.
Après le curieux Tractado de república publié par le trinitaire Alonso de
Castrillo en 1521 – qui, tout en ­condamnant explicitement le soulèvement
en raison de sa violence38, donne une image sombre de la monarchie
en ne citant que des mauvais monarques39 et défend la participation
des « citoyens » à ­l’exercice du pouvoir –, les ouvrages publiés sous le
règne de Charles Quint et traitant sous des formes diverses de questions
politiques, dont certains sont ­d’ailleurs dus à des historiographes de
­l’empereur, sont plus enclins à insister sur le devoir d­ ’obéissance des
sujets que sur leur droit de résistance face à la tyrannie, c­ omme nous
avons eu l­’occasion de le montrer dans des travaux antérieurs40.
On trouve ainsi, dans le Relox de príncipes publié par fray Antonio
de Guevara en 1529, une œuvre qui présente quelques caractéristiques
du miroir du prince, ­l’affirmation insistante – ­qu’elle soit sincère ou
opportuniste, c­ omme l­’ont suggéré plusieurs c­ ommentateurs41 – de
­l’inviolabilité du monarque42. Parallèlement, même si les théories sur
la transmission indirecte de la souveraineté ne disparaissent pas tota-
lement au lendemain des Comunidades, même si le lexique du ­contrat
tacite ou du pacte entre roi et royaume est toujours employé, tant par
les théologiens de Salamanque que par les humanistes espagnols de
­l’entourage de Charles Quint, ­comme Valdés, nombre de ces auteurs
évitent de traiter des c­ onséquences ultimes de ces théories et de poser
cette question embarrassante : que doit-on faire lorsque le roi se ­comporte
en tyran ? Ainsi, dans son De ­concordia et discordia dédié à Charles Quint
38 Plus exactement, il ­condamne les violences, ­qu’il attribue à la plèbe, tout en soulignant
la justesse de la cause. Il écrit par exemple : « Ciertamente ningún justo ni sabio puede dudar
que las gentes ­comunes en los principios pidiesen muy justa justicia […] » (Castrillo, Tractado
de república…, p. 11).
39 Sur ce texte, voir notamment Alonso Baelo (2007), Andrés Santos (2009), Merle (2012).
40 Merle, 2015.
41 Voir Francisco Márquez Villanueva (2001, p. 27). Quant au traitement des Comunidades
par Guevara dans ­d’autres textes (notamment les Epístolas familiares, publiées dix ans plus
tard que le Relox, en 1539), il est sujet à discussion mais pour Richard L. Kagan (2002,
p. 151) la position de Guevara dans les cinq textes où il fait allusion à l­ ’événement serait
clairement « anticomunera » et « abiertamente regalista ». Quoi ­qu’il en soit, ce qui importe
ici est la volonté de diffuser largement certaines idées et ­d’en exclure ­d’autres.
42 « pues en verdad los príncipes son puestos por mano de Dios para governar, nosotros somos obligados
en todo y por todo a los obedescer ; porque no ay mayor pestilencia para la república que levantar
­contra su príncipe la obediencia », Guevara, Livre I, chap. xxxi, p. 218.
INTERPRÉTATIONS ET ÉCHOS DES COMUNIDADES DE CASTILLE 77

en 1529, Juan Luis Vives dépeint les angoisses du tyran – ­d’une manière
certainement dissuasive – sans envisager à aucun moment une possible
action des sujets c­ ontre lui. Les théologiens de Salamanque, quant à eux,
enveloppent la question d­ ’une ambiguïté qui a été remarquée – ­c’est
le cas en ce qui c­ oncerne Vitoria43 – ou restreignent les possibilités de
déposition en se référant à la potestas indirecta du pape ­comme le fait
Domingo de Soto44.
Sepúlveda, quant à lui, dans son De regno, ­composé sans doute à la
fin du règne de Charles Quint mais publié en 1571 seulement, ne veut
envisager que la déposition du tyran d­ ’usurpation, car les rois légitimes
devenus tyrans ­d’exercice doivent être supportés patiemment, selon la
volonté divine. Et, ­s’il évoque – une seule fois – les Comunidades dans ce
texte, ­c’est pour louer la clémence de ­l’empereur45, et encore leur ôte-t-il
de ­l’importance en parlant des « séditions populaires d­ ’Espagne », et en
leur associant la révolte de Gand, qui fut loin ­d’avoir la même ampleur
et dont les causes étaient essentiellement fiscales.
De fait, si avec le temps une réactivation du débat sur le droit de
résistance a lieu, favorisée par le ­contexte des ­conflits religieux de la
seconde moitié du xvie siècle, le souvenir des Comunidades ­n’en reste pas
moins ténu dans les textes espagnols, q­ u’ils soient de nature théorique
ou c­ onsacrés à un examen circonstancié de la situation de la monarchie.
Mariana lui-même, qui, dans son célèbre De rege et regis institutione, défend
le tyrannicide y ­compris face à un tyran ­d’exercice – en laissant de sur-
croît aux sujets ­l’initiative ­d’une telle action, pour peu que le caractère
tyrannique du roi ait été reconnu par « des personnes sages », donc, sans
la caution du pape46 – et, non ­content de proclamer que le royaume est

43 Dans sa relectio De potestate civili prononcée en 1527-1528 à Salamanque, Francisco de


Vitoria distingue la potestas ­d’origine divine et la auctoritas octroyée par la ­communauté
au roi, sans dire clairement si la c­ ommunauté peut la lui retirer.
44 La relectio De dominio, prononcée en 1534-1535, ­constitue la base du livre IV du De
Iustitia et iure, publié pour la première fois en 1553-1554 puis augmenté pour la seconde
édition (1556).
45 « en razón de esta equidad se ha introducido el que, en un delito en que esta implicada la mayoría,
debe perdonarse a la muchedumbre y castigarse a los promotores y cabecillas del crimen. De esta
moderación se sirvió, siendo motivo de alabanza, el César Carlos, vuestro padre, príncipe excepcional
y muy benévolo, a la hora de castigar las rebeliones de España y algunos años después, la traición
de Gante » (De regno, livre III, p. 84). En latin : « […] in seditionibus Hispaniæ popularibus
et post aliquot annos in Gandavensium defectione punienda. »
46 Voir Merle, 2014.
78 ALEXANDRA MERLE

au-dessus du roi, se distingue en déplorant ouvertement ­l’affaiblissement


des Cortes de Castille47, ne se permet aucune allusion aux événements
de 1520-1521. Il ne les mentionne par ailleurs que très rapidement
dans son Historia de rebus Hispaniæ, sans ­s’écarter de ­l’interprétation
habituelle, mettant en cause les abus de Chièvres et des Flamands48.
Cette réticence est ­d’autant plus frappante ­qu’elle semble réservée aux
Comunidades ; Mariana, qui recourt volontiers à des exemples historiques
plutôt ­qu’à des références érudites, en un temps où le courant tacitiste
met en valeur les enseignements ­qu’ils ­contiennent, vante en effet dans
le De rege ­l’excellence des institutions aragonaises et s­’enhardit j­usqu’à
rappeler que le rôle du Justicia est de protéger les fueros et de maintenir
le pouvoir royal dans certaines limites, ce qui, si peu de temps après
­l’exécution de Lanuza, peut paraître provocateur.
Bien que cette damnatio memoriæ à laquelle ont été soumises les
Comunidades semble ­s’atténuer au cours du xviie siècle et que les allusions
à la révolte deviennent plus explicites, elles ne sont guère nombreuses et
restent réservées à des sujets étroitement délimités : elles illustrent les
maux ­qu’engendre ­l’absence du roi – Quevedo se demande ouvertement,
dans El Chitón de las tarabillas en 1630 si « les Comunidades furent causées
par autre chose que le désordre et ­l’absence49 » – ou les inconvénients
de ­l’emploi d­ ’étrangers pour traiter les affaires de ­l’État.
Ainsi, on trouve dans la Doctrina política civil escrita en Aphorismos
­d’Eugenio de Narbona, parmi un ensemble ­d’aphorismes sur les ­conseillers
et les « ministres » chargés d­ ’exécuter les décisions royales, cette sentence :
Que le prince ­n’admette des étrangers ni pour c­ onseillers, ni pour ministres,
car il ne peut y avoir en eux suffisamment de c­ onnaissance ni d­ ’amour, et
parce que les vassaux naturels en sont toujours fâchés. Les troubles qui eurent
lieu en Castille sous le nom de ­comunidades au début du règne de Charles le
font bien c­ omprendre […]50.

47 La dignidad real y la educación del rey (De rege et regis institutione), livre I, chap. viii, p. 101.
48 Sur la Historia de rebus Hispaniæ de Mariana, ­d’abord publiée en latin à Tolède en 1592
(et rééditée plusieurs fois) puis traduite par l­’auteur lui-même en espagnol et publiée à
Tolède en 1601, voir par exemple García Hernán, 2004, p. 136-152.
49 « las Comunidades fueron c­ ulpa sino de la desorden y la ausencia », cité par Fernando Bouza,
2013, p. 69.
50 « Estrangeros no los admita el Príncipe, ni por ­consejeros, ni por ministros, por la falta de noticia
y de amor, y porque siempre lo llevan mal los vasallos naturales. Los alborotos de Castilla ­con
nombre de ­comunidades, en el principio del reyno de Don Carlos, dan a entenderlo. » Aphorisme
CXXVI (nous traduisons). L­ ’ouvrage d­ ’Eugenio de Narbona, publié une première fois
INTERPRÉTATIONS ET ÉCHOS DES COMUNIDADES DE CASTILLE 79

­ ’est aussi dans ce sens que Saavedra Fajardo emploie l­’exemple des
C
Comunidades dans l­’une de ses Empresas políticas, ­consacrée aux causes
des révoltes. Parmi les mauvais traitements qui poussent les sujets à se
révolter, dit-il,
Les sujets ne ressentent pas moins ­comme un affront et une honte d ­ ’être
gouvernés par des étrangers, ou de voir q­ u’on distribue entre eux les dignités
et les grâces ; car (­comme ­l’a dit le roi Henri), « ­c’est montrer que dans nos
royaumes on manque de sujets capables et méritants ». Ce qui fut la cause des
mouvements de Castille au temps de ­l’Empereur Charles Quint51.

Notons que, si Saavedra choisit prudemment ­d’associer cette seule


cause aux Comunidades, il évoque aussi ­d’autres motifs de révolte – les
exactions envers les sujets, le mépris de ceux-ci pour le roi qui ne sait
pas imposer son autorité, se montre négligent, se laisse gouverner par
­d’autres… – en les illustrant par des épisodes pris de préférence dans
­l’histoire médiévale.
Plus rarement, le souvenir des Comunidades se trouve ­convoqué pour
signaler les dangers des sermons. Par exemple, le jésuite Martín Lanaja
rappelle en 1678 le rôle joué par certains prédicateurs lors des « séditions
populaires de Castille » :
Les événements tristes et calamiteux qui ont été causés par la prédication impru-
dente et téméraire de quelques prédicateurs audacieux oblige, en des temps troublés
et dangereux, à accorder la plus grande attention aux sermons et aux paroles des
prédicateurs afin d­ ’éviter que le feu de la discorde, au lieu d­ ’être apaisé, ne soit
attisé […]. Au temps des séditions populaires de Castille, appelées ­comunidades,
sous le règne de Charles Quint, les ­comuneros incitaient les prédicateurs à exhorter
les peuples, pour la patrie, à prendre les armes ­contre les ministres du gouverne-
ment royal sous prétexte q­ u’ils tyrannisaient la justice, et leurs paroles persuasives
ayant été bien accueillies par quelques prédicateurs imprudents, c­ ’est de cette
manière que la flamme de la sédition put grandir […]52.

en 1604 et c­ onfisqué, fut ­l’objet d­ ’une nouvelle édition à Madrid en 1621. Nous citons
d­ ’après une édition de 1779, p. 107.
51 « no menos sienten los súbditos por agravio y mengua el ser mandados de extranjeros, o que entre
ellos se repartan las dignidades y mercedes ; porque (­como dijo el rey don Enrique), “es mostrar que
en nuestros reinos haya falta de personas dignas y habiles”. Lo cual dio motivos a los movimientos
de Castilla en tiempo del Emperador Carlos Quinto », Saavedra Fajardo, Empresa LX, p. 709
(nous traduisons).
52 « los sucesos tristes y calamitosos que se han originado de la predicación imprudente y temeraria
de algunos predicadores arrojados obliga a que, en tiempos turbados y peligrosos, atiendan mucho
a lo que predican y hablan los predicadores por no encender más el fuego de la discordia en vez de
80 ALEXANDRA MERLE

Mais les Comunidades servent surtout à exalter la clémence de


Charles Quint et, à travers cet exemple, ­l’excellence de la maison de
Habsbourg, dans des écrits volontiers apologétiques tels que la Corona
virtuosa, virtud coronada du jésuite Eusebio de Nieremberg :
Sa clémence égala sa grandeur […]. Quand, au temps des Comunidades
­d’Espagne, les coupables redoutaient et les loyaux sujets désiraient que le
César décidât ­d’un châtiment exemplaire pour ceux qui avaient eu ­l’audace
de se rebeller c­ ontre lui, Charles Quint était si loin de vouloir répandre le
sang de ses Espagnols (sachant bien que les fautes passées devaient plus à
­l’ignorance q­ u’à la méchanceté) et si soucieux de soutenir leur fidélité que,
parmi le grand nombre de prisonniers ­qu’il trouva, il fit exécuter la sentence
de mort sur huit personnes seulement, qui avaient mérité ce châtiment
pour ­d’autres délits (en soustrayant du jugement tout ce qui avait trait
aux ­comunidades), et notre Prince ne manqua pas d­ ’ordonner ce châtiment
justifié avec douleur. Il octroya aux autres un pardon général, en exceptant
cent quatre vingt personnes, c­ omme cela était alors approprié, mais elles
reçurent par la suite leur pardon ; car cette sentence eut la qualité de la
foudre, qui tombe au péril de quelques-uns et frappe de stupeur le plus
grand nombre […]53.

Toutes ces allusions, pour explicites q­ u’elles soient, sont en accord


avec l­ ’interprétation usuelle de la révolte et de ses causes ; non seulement
les possibles fondements idéologiques des ­comuneros sont passés sous
silence, mais on peine à reconnaître que le soulèvement castillan a mis
apagarlo […]. En tiempos de las sediciones populares de Castilla, llamadas ­comunidades, reinando
Carlos V, iban los c­ omuneros solicitando los predicadores a que exhortasen los pueblos en favor de la
patria a tomar las armas ­contra los ministros reales del gobierno so pretexto que tenían tiranizada
la justicia, y hallando buena acogida sus persuasiones en algunos predicadores imprudentes, creció
por este camino grandemente la llama de la sedición », El misionero perfecto deducido de la vida,
virtudes, predicacion y misiones del venerable y apostolico predicador P. Geronimo Lopez de la
Compania de Jesus, Zaragoza, 1678, p. 160, cité par F. Negredo del Cerro, 2008, p. 269
(nous traduisons).
53 « Su clemencia fue igual a su grandeza […]. Quando en las Comunidades de España estavan
temiendo los ­culpados, y deseando los buenos, que el Cesar hiziesse castigo exemplar en los que
atrevidamente se le avían rebuelto : tan lexos estava Carlos Quinto de derramar la sangre de sus
españoles (­conociendo que las c­ulpas passadas tenían su origen, mas en la ignorancia que en la
malicia) y tan cuidadoso era de acreditar su fidelidad, que de gran cantidad de presos que halló
solo mando justiciar y degollar ocho personas que (abstrayendo de su juizio todo lo que tocó a
­comunidades) por otros delitos merecían este castigo, no faltando en el a nuestro Principe la felicidad
de darlo, no solo c­ on justificación, pero ­con dolor. A los demas dio perdón general, exceptuando ciento
y ochenta personas, que por entonces c­ onvino, y despues se perdonaron todas : porque esta sentencia
tuvo la calidad del rayo, que cae c­ on peligro de pocos, y c­ on asombro de muchos », Corona virtuosa
y virtud coronada, p. 176-177 (nous traduisons).
INTERPRÉTATIONS ET ÉCHOS DES COMUNIDADES DE CASTILLE 81

en péril ­l’autorité du roi, et ­qu’une autre forme de gouvernement était


peut-être souhaitée par les révoltés.
La Política o razón de estado sacada de la doctrina de Aristóteles rédigée
probablement entre 1623 et 162454 par Diego Pérez de Mesa, fait ici
figure ­d’exception, en prenant acte du danger de destitution encouru
par Charles Quint. Dans un chapitre traitant « du roi héritier étranger »,
Pérez de Mesa écrit en effet que, sans ­l’intervention des Grands, « la
maison ­d’Autriche aurait été sans difficulté expulsée d­ ’Espagne55 ». Puis,
dans un chapitre intitulé « De la mutación del reino » et ­consacré aux
soulèvements en général, il note que la rébellion peut provenir « ­d’un
mauvais gouvernement ou de l­ ’autorité excessive ­d’étrangers au sein de
­l’État, c­ omme ce fut le cas pour les Comunidades de Charles Quint, et
le royaume courut alors le péril ­d’être réduit à une forme de démocra-
tie56 ». Pérez de Mesa se distingue aussi en employant sans fard le terme
de « rébellion », quand le lexique employé par ­d’autres auteurs tend
à réduire le soulèvement à de simples « alborotos » ou « movimientos »,
mais il n­ ’en attribue pas moins la responsabilité de cette rébellion aux
agissements des « étrangers » au royaume.
Enfin, la mention des Comunidades reste bien plus exceptionnelle
que celle ­d’autres mouvements de révolte, ­comme en témoignent tout
à la fois le discours politique de nature très pragmatique adressé par
Álamos de Barrientos au jeune Philippe III à la fin du xvie siècle et
les ­commentaires aux Annales de Tacite57, également empreints de
pragmatisme, publiés par Juan Alfonso de Lancina presque un siècle
plus tard, en 1687. Álamos de Barrientos, prétendant ne rien cacher des
difficultés rencontrées par la monarchie dans plusieurs de ses possessions
avant de c­ onseiller des remèdes, se garde bien d­ ’évoquer les Comunidades
54 Selon Luciano Pereña (« estudio preliminar » à son édition du texte, 1980, p. xxxiii). Le
manuscrit fut dédié en 1632 au cardinal Gaspar de Borja.
55 « sabemos que siendo Carlos V verdadero heredero, hijo de dona Juana, c­on el pretexto de mal
govierno de forasteros se ­comenzaban a rebelar los reinos, apellidando ­con el pueblo ­comunidades y
república : de manera que si don Carlos no hubiera tenido dos grandes amigos, el Almirante y el
Condestable de Castilla, o que la rebelión hubiera tomado otra voz y intento que el de ­comunidad,
la casa de Austria sin dificultad habría sido echada de España. El origen primero fue no haber
nacido y criádose Carlos V en España » (Pérez de Mesa, Política o razón de Estado, p. 126).
56 « o de mal gobierno o de dar demasiada autoridad a forasteros en el Estado, ­como fueron las
­comunidades de Carlos V, llegando la cosa a peligro de reducirse el reino en forma de democracia »
(Pérez de Mesa, chap. xxxiii, p. 223).
57 Il ­s’agit en fait de la traduction du premier livre des Annales seulement (avec publication
pour la première fois en Espagne du texte latin), assortie de très abondants c­ ommentaires.
82 ALEXANDRA MERLE

alors q ­ u’il ne voit aucun inconvénient à mentionner la rébellion des


Flandres58 et à raisonner sur ­l’attitude à adopter vis-à-vis des Portugais
et des Aragonais59. ­L’analyse ­qu’il c­ onsacre à l­’état de la Castille omet
tout souvenir de la révolte. Son lecteur averti peut toutefois y songer
­lorsqu’il signale le rôle joué par des ecclésiastiques dans les rébellions60,
et surtout lorsque, c­ onseillant au roi d­ ’appeler auprès de lui les Grands
et de leur c­ onfier des charges, il lui rappelle le rôle que joua la haute
noblesse dans la répression de certain soulèvement qui se produisit « à
­l’époque de nos grands-parents », sans plus de détails61.
Quant au volumineux ouvrage de Lancina, où le texte tacitéen, dans
lequel il est abondamment question de révoltes et de rébellions, sert
souvent de préambule à des réflexions sur la monarchie espagnole, il
évoque fréquemment la révolte de Messine – ce qui ne saurait surprendre
puisque Lancina a vécu ­l’événement et lui a ­consacré un récit62 – mais
aussi celle de Naples en 1647, celles de la Catalogne et du Portugal…
Or, la seule allusion explicite aux Comunidades sert à illustrer les incon-
vénients de ­l’absence des princes :
Tibère n
­ ’était pas encore bien établi à Rome, il ­n’aurait pas dû la quitter
pour gagner au prix d­ ’un long voyage des provinces si éloignées, d­ ’où il ne

58 Les réflexions sur la révolte des Flandres et les enseignements q­ u’il c­ onvient d­ ’en tirer
sont abondantes dans la littérature politique espagnole, ­comme le montre ­l’article de
Manuel Herrero Sánchez dans ce même volume.
59 Álamos ­conseille au roi de visiter l­’Aragon et de « perdonar a todos los presentes, aunque
estén ­condenados por las revueltas pasadas, y restituirles las haciendas que no hubieran pasado a
tercero, y esto sin excepción de personas. Cuando se llega a perdonar y ­conviene que se perdone, y
más a sangre fría, a todos ha de ser, y ­con todos se ha de entender. Y no tendría por buen ­consejo
dejar predicadores de rebelión para memoria de ellas, c­ on ver huidos y en reinos extranjeros los no
perdonados, y que ­con eso no se olvide ni cese la desconfianza » (Discurso político al rey Felipe III,
p. 102-103). Voir aussi ­l’analyse ­consacrée à la couronne ­d’Aragon, p. 22-25.
60 « y éstos son los que jamás han dejado de tener muy gran parte en las ­conjuraciones y rebeliones,
que siempre se cubren c­on nombres falsos de religión y libertad, siendo antes destrucción suya. Y
tienen menos que perder. Y por esto, y no tener hijos, ni prendas estables que no hallen en cualquiera
parte que lleguen, son más osados y poderosos en las revueltas : y así lo hemos visto por experiencia
en todos los tiempos » (Discurso político, p. 98-99). Sur le rôle joué par certains membres du
clergé au cours des Comunidades, nous renvoyons à Diago Hernando, 2007.
61 « que si éstos están c­ on Vuestra Majestad y favorecidos de su mano, y gustosos de su señorío, ¿quién
queda para moverse, ni ­con la imaginación, a perderle el respeto ? Y más teniendo por experiencia
que éstos fueron los mismos que quebraron la cabeza a aquella bestia descomedida en el siglo de
nuestros abuelos ; que aun por eso quedan ya obligados a sustentar la misma opinión. » (Discurso
político, p. 111)
62 La Historia de las reboluciones del senado de Mesina, publiée en 1692 mais rédigée auparavant.
INTERPRÉTATIONS ET ÉCHOS DES COMUNIDADES DE CASTILLE 83

pouvait c­ ommuniquer à toute la République la chaleur du gouvernement.


De telles décisions peuvent être prises quand un Prince est bien établi depuis
quelques années. En Espagne, de nombreuses absences ne suscitèrent pas de
troubles, mais il y en eut lors de la première absence que fit Charles Quint
au début de son règne63.

Lancina utilise d­ ’ailleurs en cette occasion le terme « novedad », un des


plus ténus qui soient pour désigner une révolte, tandis q­ u’il parle cou-
ramment des « revoluciones de Mesina » et des « revoluciones de Cataluña ».
Ces disparités, cette réserve dans les écrits – et surtout dans ceux
qui furent publiés – à ­l’endroit des Comunidades ne signifie pas que le
souvenir en soit éteint, ou perçu ­comme dénué ­d’importance. De fait,
plusieurs indices montrent que les représentants de la couronne redou-
taient, des décennies après les événements et en dehors de tout c­ ontexte
de tension, tout ce qui pouvait raviver ce souvenir. Ainsi, Fernando Bouza
se fait l­ ’écho d­ ’une anecdote significative, en rapportant c­ omment sous
Philippe IV la découverte à Ségovie, dans les ruines de l­ ’église de Santa
Eulalia, ­d’une colonne en pierre de la hauteur d­ ’un homme qui avait
servi autrefois à marquer le lieu de réunion des ­comuneros provoqua ­l’émoi
des autorités, depuis le corregidor ­jusqu’au Conseil de Castille et au roi
lui-même. La destruction de cette colonne, ordonnée par Philippe IV,
et le soin qui fut mis à empêcher que le bruit de la découverte puis de
­l’anéantissement de cet objet se répandît par écrit, sont pour Fernando
Bouza l­’expression d ­ ’une « volonté décidée d­ ’effacer la mémoire [des
Comunidades] par la destruction matérielle de ce qui en était un signe
visible64 ».
­D’autres travaux témoignent de la persistance, malgré toutes les
précautions prises, ­d’une mémoire populaire, orale, entretenue par des
chansons et des récits courant de bouche en bouche65, et l­’on c­ onnaît
63 « No estaba Tiberio bien afirmado en Roma, no debía dejarla pasando a provincias tan distantes
­con un viaje muy largo, de donde no podía suministrar a toda la República el calor del gobierno.
Pueden tomarse estas resoluciones cuando un príncipe se halla ya afirmado por algunos años. En
España no hubo novedad en muchas ausencias, pero la hubo en la primera que hizo a los principios
del reinado Carlos Quinto », CCXI, 5 (nous traduisons). Nous citons d­ ’après l­’édition de
José Luis Bermejo Cabrero, Comentarios políticos a Tácito, p. 327.
64 Bouza, 2013 (nous traduisons).
65 Pedro Carasa Soto dans son prologue, intitulé « La memoria y los ­comuneros » au livre
­d’Enrique Berzal de la Rosa (2008, p. 13) écrit : « Las Comunidades han sido recreadas por
la memoria popular en Castilla y León, a base de cantares, coplas, dichos y leyendas que corren
de boca en boca. »
84 ALEXANDRA MERLE

plusieurs exemples de résurgence et ­d’échos des Comunidades dans la


vie politique du xviie siècle, dans des moments de crise, depuis les pas-
quins et libelles dénonçant la « tyrannie » ­d’Olivares, qui en appellent
à la figure de Juan de Padilla66, ­jusqu’aux manifestes catalans de la
guerre de Succession d­ ’Espagne : selon Joaquim Albareda, « ­l’appel à
la liberté de ­l’Espagne et ­l’évocation de sa perte en Castille lors de la
défaite des ­comuneros à Villalar (1521), sous Charles Quint, c­ onstitue
un lieu ­commun dans les textes les plus représentatifs de la résistance
catalane67 ». Enfin, des références aux Comunidades et à leur répression
ont aussi été enregistrées dans des correspondances politiques ou des
écrits de nature privée relatifs à des révoltes plus lointaines – c­ ’est le
cas par exemple après le « tumulte de México68 » en 1624 –, preuve ­s’il
en était besoin de la présence des événements de 1521 dans la ­culture
politique des serviteurs de la monarchie, un siècle après les événements.

LES COMUNIDADES SOUS L­ ’ÉCLAIRAGE DES LUMIÈRES


De nouveaux usages de la mémoire ?

Si les Comunidades, tout en étant bien présentes dans les mémoires,


ne sont évoquées dans ­l’historiographie et dans la réflexion politique
destinée à une diffusion dans l­ ’espace public ­qu’avec d­ ’infinies précau-
tions, ­comme on ­l’a vu, ces usages changent-ils au Siècle des Lumières ?
On sait que dans les écrits des Ilustrados ­l’arrivée en Espagne de la
maison de Habsbourg fait souvent ­contraste avec le temps heureux et
glorieux des Rois Catholiques, vu c­ omme un âge d­ ’or, et que l­ ’on accuse
volontiers Charles Quint et ses successeurs ­d’avoir dilapidé les richesses
des royaumes espagnols et causé leur déclin. Pourtant, on trouve peu de
mentions précises des Comunidades, tout au moins dans les écrits destinés
66 Bouza (2013) évoque de tels pasquins à Tolède en 1632. Voir aussi Negredo del Cerro,
2008, p. 269.
67 Albareda, 2016, p. 281 (nous traduisons).
68 Ainsi, après le « tumulte de México », soulèvement populaire qui renversa le vice-roi en
janvier 1624, Bernardino de Urrutia évoque dans sa correspondance depuis México avec
Philippe IV les exceptions au pardon général octroyé par Charles Quint aux ­comuneros.
Voir Ballone, 2017.
INTERPRÉTATIONS ET ÉCHOS DES COMUNIDADES DE CASTILLE 85

à une large diffusion. Sans doute ­n’est-il pas opportun, sous le règne
des Bourbons, de rappeler ces actes ­d’insolence fondés sur des théories
allant à l­’encontre d­ ’un absolutisme exprimé au grand jour.
­S’il existe quelques exceptions, annonçant la grande publicité qui
sera donnée au xixe siècle aux Comunidades et leur réinterprétation, elles
­concernent des écrits qui restèrent ­confidentiels et qui sont empreints
­d’intentions polémiques. Ainsi, dès 1741 le ­comte Juan Amor de Soria,
un Aragonais qui fut partisan des Habsbourg au temps de la guerre de
Succession et qui ­s’exila à Vienne, écrit une Enfermedad chrónica y peligrosa
de los reynos de España69 : ce texte curieux mentionne les Comunidades
à plusieurs reprises, en utilisant la chronique de Sandoval ­comme
principale source70, mais se soucie fort peu de cohérence. Tout ­d’abord,
pour fustiger par c­ ontraste la cruauté de la répression menée par les
Bourbons, l­’auteur évoque la clémence dont fit preuve Charles Quint
envers les ­comuneros et ­s’empresse ­d’extrapoler pour louer la « générosité
de la maison d ­ ’Autriche71 ». Puis il reprend et développe le souvenir
des Comunidades, cette fois pour déplorer l­’amoindrissement du rôle
des Cortes après la bataille de Villalar : la défaite des ­comuneros signifia
en effet « abolition des lois fondamentales du royaume, réduction des
peuples à la servitude, puis despotisme sur la noblesse et la plèbe, et
pouvoir arbitraire72 ».
Une telle tirade fait penser à la phrase bien c­ onnue de León de
Arroyal qui, dans une de ses lettres au ­comte de Lerena, dans les années
69 Les papiers de ce personnage parvinrent ­jusqu’à la bibliothèque de la Academia de la
Historia, où ils furent retrouvés par J.A Maravall (1967) puis c­ ommentés par d ­ ’autres
historiens, tels que Fernández Albaladejo, Antonio Elorza (1988, p. 154), et plus récem-
ment Virginia León Sanz (1990 et 1993) et Ernest Lluch. Voir son édition sous le titre
Aragonesismo austracista (1734-1742). Conde Juan Amor de Soria, edición y estudio intro-
ductorio de Ernest Lluch, Zaragoza, Institución « Fernando el Católico » (CSIC), 2010,
p. 73-375. Sur cet auteur, voir aussi Alabrús (2007).
70 Il utilise plus exactement une réédition ou c­ ompilation de cette chronique par Martínezla
Puente, Historia del emperador Carlos V, 1675.
71 « Las historias de España nos demuestran ejemplos muy opuestos en tantas guerras civiles de estos
reinos, pues a la pacificación interna siguió el olvido, el absoluto perdón, y fueron admitidos a los
oficios, a los cargos y a los empleos los mismos que se vieron c­omplicados en las alteraciones c­ontra
sus reyes legítimos, y así es notable el caso de la generosidad austriaca, cuando sucedieron las
­comunidades en tiempo del emperador Carlos V […] » (Aragonesismo austracista, p. 194).
72 « abolición de las leyes fundamentales del reino, servidumbre de los pueblos, sucesivo despotismo
sobre nobleza y plebe, poder arbitrario », Aragonesismo austracista, p. 234 (nous traduisons).
Puis, il note que la défaite de Villalar « produjo la servidumbre de las ciudades y la esclavitud
de los pueblos. »
86 ALEXANDRA MERLE

1790, présente les Comunidades ­comme le « dernier soupir de la liberté


castillane », et déplore la réduction des Cortes à une obéissance passive :
L­ ’empereur, ne rencontrant plus aucune résistance, dicta les impôts q­ u’il voulut
et disposa et modifia les lois à sa ­convenance, sans que les Cortes servissent à
autre chose ­qu’à entériner ce qui leur était ordonné depuis la cour73.

Ces quelques exemples annoncent la propension immodérée du libé-


ralisme naissant à prêter aux Cortes castillanes ­d’avant les Habsbourg
une fonction législative ­qu’elles ­n’ont jamais eue et à pleurer les libertés
médiévales perdues74, en associant à cette invention d ­ ’une tradition
politique une exaltation des ­comuneros, et notamment de Padilla75. Ainsi
Martínez Marina décrira-t-il les Comunidades, dans sa Teoría de las cortes
o grandes juntas nacionales (1813), c­ omme « des c­ onfédérations populaires
­contre le despotisme des Rois et des oppresseurs de la liberté nationale76 ».
Mais, au temps des Lumières, il y a encore un autre usage des
Comunidades, cette fois de la part des membres du gouvernement,
dans une circonstance particulière du règne de Charles III : le motín de
Esquilache, soulèvement populaire c­ ontre le ministre ­d’origine italienne
Squillace, après une série de mesures et de réformes mal ­comprises, que
­l’entourage du roi soupçonne très vite ­d’avoir des fondements politiques
et des instigateurs parmi les élites – les jésuites notamment, dont
­l’expulsion est bientôt décidée.
Précisément, dans le Dictamen fiscal de expulsión de los jesuitas de España,
un document destiné au roi, Campomanes évoque les Comunidades pour
mesurer – ou plutôt pour accentuer – la gravité des événements qui
viennent ­d’avoir lieu : il ­s’emploie en effet à réduire la portée politique
des Comunidades pour grossir par ­comparaison celle du motín de 1766,
dont les meneurs étaient d­ ’après lui nourris de théories régicides pro-
pagées par les jésuites :
73 « El emperador, no encontrando ya resistencia, impuso los pechos que quiso, y arregló o dispuso las leyes
a su modo de pensar sin que las Cortes sirviesen de otra cosa que de firmar lo que por la corte se les
tenía ordenado », Arroyal, Cartas político-económicas al Conde de Lerena, p. 33 (nous traduisons).
74 Voir sur cette relecture du passé José Manuel Nieto Soria, 2007.
75 Dès 1797 Manuel José Quintana ­composa la célèbre Oda a Juan de Padilla, censurée par
­l’Inquisition en 1805 et publiée dans ses Poesías patrióticas lors du soulèvement c­ ontre
les troupes de Napoléon.
76 « ­confederaciones populares c­ ontra el despotismo de los Reyes y de los opresores de la libertad nacio-
nal », cité par Sánchez León, 2002, p. 164. Voir aussi sur l­ ’historiographie du xixe siècle
López-Vela (2004), Rivero Rodríguez (2004) et Jerez (2007, p. 46-49).
INTERPRÉTATIONS ET ÉCHOS DES COMUNIDADES DE CASTILLE 87

De telles expressions ­n’ont jamais été proférées par les Espagnols à propos
de leur roi, pas même lors des Comunidades au temps du roi Charles Ier, car
alors la souveraineté était respectée et les plaintes se limitaient au gouverne-
ment des Flamands sous le baron de Chièvres ; de sorte que la violence des
Comunidades était populaire, les excès particuliers furent nombreux mais il
­n’était pas question de c­ onjuration ni de manque de respect envers l­ ’autorité
royale. La plèbe déchaînée ne prononça jamais dans ses excès le nom de la
personne sacrée du roi pour blasphémer, et on ne vit aucun membre du clergé
resusciter la doctrine hérétique du régicide et du tyrannicide, ­condamnée
et proscrite par le Concile oecuménique de Constance, et qui, pourtant, a
été propagée et donnée pour ­commune, acceptable et même digne ­d’éloge
pendant le soulèvement de Madrid, et même après, c­ omme on le verra dans
la suite des faits77.

Cette référence aux Comunidades deux siècles et demi après, et à elles


seules, fût-ce pour en nier la portée subversive, dit assez ­qu’elles restent la
référence, l­ ’étalon en quelque sorte, en matière d­ ’attentat à la souveraineté.

CONCLUSIONS

Dans les écrits historiographiques s­’est imposée dès l­’époque de


Charles Quint et a persisté durablement une interprétation visant à
dépolitiser le soulèvement, à en faire une simple réaction à des abus
­commis par des ­conseillers et serviteurs étrangers au royaume. Cette
mise en mémoire sélective, réduisant à peu de chose le projet d­ ’une autre
forme de monarchie qui transparaissait dans certaines revendications
des ­comuneros, ne ­s’est pas limitée à ­l’historiographie mais a ­connu des
prolongements dans la réflexion politique, où les Comunidades, ­lorsqu’elles
77 « Semejantes expresiones nunca se oyeron en boca de los españoles hablando de su rey, ni aun en
las Comunidades del tiempo del señor Carlos I, porque entonces se respetaba la soberanía, y las
quejas terminaban al gobierno de los flamencos bajo del baron de Xebres ; de modo que el furor de
las Comunidades era popular, los excesos particulares muchos, pero no había c­onjuración ni falta
de respeto a la real autoridad. La plebe desfogada c­ on sus excesos nunca tomó en boca la sagrada
persona real para blasfemar, ni hubo personas eclesiásticas que resucitasen la heretical doctrina
del regicidio y tiranicidio, ­condenada y proscrita en el Concilio Ecuménico de Constancia, que,
sin embargo, se ha extendido ­como ­común y opinable y aun ­como meritoria durante el motín de
Madrid, y aun después de él, ­como se irá viendo en el progreso de los hechos », Dictamen fiscal…,
p. 47-48 (nous traduisons).
88 ALEXANDRA MERLE

sont mentionnées, restent cantonnées aux mêmes emplois pendant toute


­l’époque moderne, avant que le libéralisme naissant ne procède à une
re-politisation qui ­n’est sans doute ­qu’une autre instrumentalisation.
La rareté des références aux Comunidades qui a été c­ onstatée ici78 peut
être interprétée c­ omme une manifestation en creux de la gravité et de la
durée du traumatisme, ­s’agissant ­d’une révolte née dans ce qui était perçu
à ­l’époque moderne ­comme le cœur même de la monarchie. On notera par
ailleurs que les œuvres de fiction semblent observer la même discrétion, à
­commencer par le théâtre, qui se nourrit volontiers au siècle ­d’or de ­l’histoire
récente : tandis que de nombreuses pièces empruntent leur argument à
des épisodes fameux de la guerre des Flandres, ­comme cela a été relevé
par Yolanda Rodríguez79, il faudra attendre la fin du xviiie siècle et les
troubles de la guerre ­d’Indépendance pour voir ­s’affronter publiquement
des images ­concurrentes de Maria Pacheco, épouse de Padilla80.
Reste que cette discrétion tenace dans les écrits destinés à ­l’espace
public ­n’a pas empêché la présence insistante des Comunidades dans les
mémoires, et en premier lieu dans la c­ ulture politique des représentants
de l­ ’autorité royale, c­ omme l­ ’indiquent les c­ omparaisons qui surgissent,
­comme par réflexe, dans les correspondances et autres rapports de ceux
qui sont c­ onfrontés à un soulèvement. Elle ­n’a pas empêché non plus,
hors des possessions de la monarchie espagnole, l­’existence d­ ’échos et
­d’interprétations plus libres mais non pas moins intéressées.
Ainsi, dans ­l’Angleterre du milieu du xviie siècle, une traduction de la
partie de la chronique de Prudencio de Sandoval relative aux Comunidades,
publiée en 1652 sous le titre de The Civil Wars of Spain, ­s’orne de textes
liminaires qui font le rapprochement avec les récents événements qui
ont coûté à Charles Ier son trône ­d’abord, puis la vie. ­L’auteur de cette
traduction, James Wadsworth81, qui dédie son œuvre à trois figures
78 Notre étude n­ ’ayant pas prétention à l­ ’exhaustivité, il s­ ’agit là d­ ’une c­ onstatation en l­ ’état
actuel des recherches.
79 Rodríguez, 2008.
80 Voir Doña Maria Pacheco, mujer de Padilla, de Ignacio García Malo (une tragédie publiée
en 1788, qui ­condamne les ­comuneros et met en scène le repentir final de ­l’héroïne) et,
dans un autre c­ ontexte, La viuda de Padilla de Martínez de la Rosa (1812).
81 James Wadsworth (1604-1656 ?) est un personnage assez douteux, qui vécut une partie
de sa jeunesse en Espagne (son père y avait été envoyé ­comme chapelain de ­l’ambassadeur
anglais en 1605, avant de devenir catholique), étudia chez les jésuites à St Omer, et eut
une vie aventureuse au cours de laquelle, rentré en Angleterre, il se mit au service du
Privy council et poursuivit les catholiques, notamment les jésuites.
INTERPRÉTATIONS ET ÉCHOS DES COMUNIDADES DE CASTILLE 89

notables du nouveau régime (le régicide Thomas Chaloner, son frère


James, et Herbert Morley, membre du Parlement), semble voir dans
­l’issue opposée des deux événements la seule différence, ce qui tendrait
à prêter aux ­comuneros ­l’intention de détrôner Charles Quint, voire ­d’en
finir avec la monarchie. Il écrit en effet dans son adresse au lecteur :
Je ne peux que me flatter que cette Narration ne sera pas mal accueillie
par votre regard curieux, du fait ­qu’elle relate fidèlement les c­ onflits aussi
véridiques ­qu’étonnants qui eurent lieu entre Charles Quint, dans ses jeunes
années, et ses sujets d ­ ’Espagne, qui présentent tant de ressemblance avec
certains épisodes survenus ensuite dans notre Nation que, si les événements
de Castille ­n’étaient pas bien antérieurs, nous aurions pu dire que les nôtres
leur ont servi de modèle, bien que l­ ’issue ait été différente82.

Alexandra Merle
Normandie Univ., UNICAEN
ANR CURR

82 « I cannot but promiss my self, that this Narration will not be unwelcolm to your curious eies, in
regard it doth punctually relate the no less strange, then true transactions, betwixt Charles the Fifth
in his Minorities anf his Subjects in Spain, which had so much similitude to divers late passages
in the our Nation, that had not those of Castilla had the privilege of many years before us, we
might have been said to have been their pattern, although the successes are different », The Civil
Wars of Spain in the beginning of the Reign of Charls the 5th, 1652, « To the Reader », adresse
au lecteur non paginée (nous traduisons). Il ne semble pas que la traduction modifie en
profondeur le texte de Sandoval, bien ­qu’il ­s’agisse d ­ ’un ­condensé, mais le traducteur
prend soin de souligner l­ ’attachement du chroniqueur aux intérêts de la couronne et sa
sévérité obligée avec les ­comuneros.
ÉCRITURES, MÉMOIRES ET USAGES
POLITIQUES D
­ ’UNE RÉVOLUTION MANQUÉE
La c­ onjuration des Pazzi
et la révolte des Florentins (1478)
dans ­l’historiographie des Lumières à Sismondi

En 1476, le duc de Milan, Galéas Marie Sforza, fut assassiné par des
­conjurés dans une église de sa cité. Une fois le coup mortel porté au
duc, une terrible répression ­s’abattit sur eux : ­l’un mourut dans ­l’action
et son corps fut livré aux exactions de la foule tandis que ses ­compères
furent arrêtés quelque temps après, puis jugés et exécutés1. Les trois
­conspirateurs étaient tous issus de la noblesse milanaise ; il ­s’agissait de
membres de la famille des Visconti, des Olgiati et des Lampugnati. Ce
­complot de palais a eu quelque retentissement dans l­ ’historiographie, mais
sa postérité a toujours été moindre au regard de celle de la c­ onjuration
des Pazzi qui se déroula deux ans plus tard, à Florence, en 1478. La
­complexité des facteurs ayant animé le poignard des Pazzi et le ­contexte
du système politique et institutionnel médicéen peuvent expliquer la
différence de traitement de ces deux événements dans l­ ’historiographie.
Toutefois, il existe des points ­communs flagrants entre eux, car tous
deux illustrent parfaitement le passage des violences de type c­ ommunal
aux violences des arcanes imperii2. À partir du resserrement politique
que c­ onnaissent les cités au cours du xive siècle3, les affrontements de
matrice ­communale laissent place à de nouvelles violences : les ­complots
de palais symbolisés par le poignard et le poison. Cette évolution politico-
institutionnelle ­s’est accompagnée ­d’un glissement spatial : aux luttes
urbaines du temps des ­communes ont succédé les ­complots fomentés

1 Crouzet-Pavan, 2007, p. 179-184.


2 Maire Vigueur, 2003 ; Martines, 1972 ; Zorzi, 1994 et 2009.
3 Pour une vue ­d’ensemble du processus du changement politique, voir Crouzet-Pavan,
2001 ; Menant, 2005 ; Franceschi, Taddei, 2012 ; Maire Vigueur, 2013.
92 MARION BERTHOLET

dans des espaces semi-fermés. La c­ onclusion du c­ onflit se déroule dans


un second temps, dans la rue, où le peuple intervient pour appuyer ou
désavouer ­l’action des ­conjurés. La ­conjuration se caractérise par le secret
qui entoure la préparation du renversement du pouvoir et se distingue
en cela de la révolte, plus spontanée et s­ ’appuyant sur une mobilisation
plus large du peuple. Néanmoins, la réaction des citoyens tient toujours
une place prépondérante : c­ ’est leur appui que recherchent les c­ onjurés.
Leur soulèvement détermine l­ ’échec ou la réussite de la révolution – au
sens de changement de régime politique – et demeure par là même un
élément décisif.
­L’exemple de la ­conjuration des Pazzi illustre parfaitement la ­complexité
de ces violences et leurs nouvelles logiques socio-spatiales. ­L’événement
fait intervenir de multiples acteurs à l­ ’échelle italienne : les principaux
sont les Pazzi. Issus de l­’élite dirigeante, ce sont de grands banquiers,
rivaux des Médicis et proches de ­l’oligarchie qui dominait les institutions
florentines depuis la fin du xive siècle, avant de se faire évincer par le
renforcement du pouvoir personnel des Médicis4. Les profondes rivalités
privées q ­ u’entretenaient les Pazzi avec cette famille se sont dissoutes
dans les aspirations de l­ ’ancienne oligarchie qui souhaitait rétablir une
situation politique équilibrée. Cependant, afin de « dépolitiser » leur acte,
­l’historiographie proche des Médicis a tendu à accentuer les anciennes
haines et les jalousies pour détacher leur action de la situation politique
florentine5. À ces acteurs locaux ­s’ajoute ­l’influence du pape Sixte IV
et de ses alliés, le roi Ferdinand de Naples, la république de Sienne et
­d’autres encore6. Le Souverain Pontife aurait pris part à la c­ onjuration
dans le but d­ ’agrandir les possessions territoriales de son neveu Jérôme
Riario, projet auquel se seraient opposés les princes médicéens. D ­ ’autres
acteurs, liés au monde ecclésiastique, sont également mêlés à l­’affaire :
­l’archevêque de Pise Francesco Salviati, le cardinal Raffaelle Riario,
neveu de Sixte IV, et de simples prélats. Les victimes du c­ omplot sont
les deux jeunes Médicis, Laurent et son frère Julien, les héritiers de
­l’influence politique de leur grand-père, Côme l­’Ancien.
Le temps de la ­conjuration mobilise ces différents acteurs et se
déroule en plusieurs étapes au sein ­d’espaces névralgiques de la cité. Les
4 De Angelis, 2014 ; Taddei, 2004 ; Fubini, 2014 ; Rubinstein, 1971.
5 Villard, 2008, p. 233-244.
6 Fubini, 1994 ; Martines, 2005.
LA ­CONJURATION DES PAZZI ET LA RÉVOLTE DES FLORENTINS 93

Pazzi auraient d­ ’abord voulu empoisonner les frères Médicis lors ­d’un
banquet auquel Julien ne ­s’était pas rendu, ils auraient alors décidé de
les frapper, le 26 avril 1478, dans l­ ’église Santa Maria del Fiore. Lors de
­l’office, avec l­’aide de leurs alliés, ils attaquent les deux frères : Julien
décède de ses blessures, tandis que Laurent parvient à se réfugier dans
la sacristie où il se barricade avec ses proches. Ils tentent ensuite de
soulever Florence mais le peuple se retourne violemment ­contre eux
et une sanglante chasse à ­l’homme est déclenchée dans les rues de la
cité du lis. ­L’archevêque de Pise et Francesco dei Pazzi sont pendus aux
fenêtres du Palazzo Vecchio, tandis que les autres personnes impliquées
sont pourchassées les jours suivants et subissent le même sort. Le peuple,
par son retournement, opère une véritable entreprise de vengeance au
bénéfice de Laurent de Médicis7. Peu après, Sixte IV mobilise ses alliés
­contre Florence, officiellement pour punir la mort des ecclésiastiques,
victimes des représailles populaires. La tension monte, mais la situation
est rapidement pacifiée par ­l’intervention du prince florentin à Naples8.
­L’exposition des différents acteurs et de leurs motifs supposés a une
importance capitale dans les interprétations politiques de ­l’assassinat.
­C’est en effet autour de tous ces éléments que la mémoire de la c­ onjuration
des Pazzi a été transmise et retravaillée par l­ ’historiographie. Plusieurs
récits ont immédiatement été produits par les écrivains proches des
Médicis pour expliquer aux membres des réseaux diplomatiques cet
événement touchant l­ ’équilibre ­d’une cité importante dans la politique
européenne9. Par la suite, l­’historiographie a détaillé les rouages de la
­conjuration, c­ omme le fait Machiavel dans les Histoires florentines (1532)
ou Muratori dans son œuvre les Annali ­d’Italia (1751)10. ­C’est princi-
palement à partir de ces éléments que le xviiie siècle a ­construit ses
représentations sur la ­conjuration des Pazzi. Les auteurs des Lumières
se sont appropriés la grande ­complexité de cet événement et sont par-
venus à l­ ’accommoder à leurs diverses préoccupations. En dépit de cette
diversité, les interprétations du xviiie siècle se caractérisent globalement
par un fort attachement envers les princes médicéens : l­’acte des Pazzi
apparaît ­comme illégitime, visant des gouvernants capables ­d’apporter

7 Martines, 2005, p. 116-153 ; Villard, 2007.


8 Fubini, 1996.
9 Villard, 2007, p. 233-244.
10 Dupront, 1976 ; Bertelli, 1960 ; Tabacco, 1973.
94 MARION BERTHOLET

le bonheur à leur peuple. À la fin du xviiie siècle, une nouvelle version,


plus originale, se crée. Elle hérite largement de la pensée historique sur
le tyrannicide11. Sismondi diffuse cette lecture au début du xixe siècle
et lui donne une dimension libérale. Les Pazzi deviennent alors des héros
de la liberté, qui seuls pouvaient libérer la cité florentine de ses chaînes ;
mais ce sont des héros tragiques, incompris par une population qui,
ayant perdu son indépendance, ne peut plus, en se révoltant, développer
des vertus politiques et ­comprendre les intérêts du bien ­commun.

LES USAGES DE ­L’ÉCHEC D


­ ’UNE RÉVOLUTION
ET D
­ ’UNE RÉVOLTE AU XVIIIe SIÈCLE

­L’échec de la révolution et de la révolte qui devait ­l’appuyer a inspiré


les Lumières et leur écriture de ­l’histoire. Ces thèmes leur permettent
­d’engager une réflexion profonde sur ­l’état de la société italienne à la
Renaissance, dans une relation qui engage étroitement le passé et le présent.
LES RÉFLEXIONS RELIGIEUSES
AUTOUR DU RÉCIT DE LA ­CONJURATION

­L’ouvrage historique le plus influent dans la production philosophique


française au xviiie siècle demeure l­ ’Essai sur les mœurs (1756) de Voltaire.
Contrairement à ce que nous pourrions penser, sa vision du temps
médiéval et renaissant est loin d­ ’être caractérisée par une c­ ondamnation
univoque, mais elle présente au ­contraire une lecture plus nuancée12.
La c­ onjuration des Pazzi incarne les pires déboires de cette époque : elle
synthétise la violence des hommes, leur incroyance et les intercessions
du pouvoir spirituel dans les affaires temporelles.
Voltaire, dans son écriture de l­ ’histoire de Florence, reprend un topos
de « ­l’humanisme civique13 », ­consistant à faire de la cité du lis une
nouvelle Athènes14. Cela permet de rapprocher leurs développements
11 Minois, 1997 ; Cottret, 2009 ; Turchetti, 2013.
12 Brumfitt, 1958 ; Gatto, 1992 ; Ferguson, 2009, p. 150-171.
13 Skinner, 2009 ; Gilly, 2004.
14 Taddei, 2013.
LA ­CONJURATION DES PAZZI ET LA RÉVOLTE DES FLORENTINS 95

artistiques et c­ ulturels mais aussi de dénoncer un modèle politique


antique abâtardi. La ­conjuration des Pazzi ressemble au tyrannicide des
Pisistratides : Côme ­l’Ancien est ­comparé à Pisistrate, ses petits-fils,
Laurent et Julien, à ses descendants victimes de ­l’assassinat perpétré
par Aristogiton et Harmodios15. Cependant, cette c­ omparaison avec
le célèbre tyrannicide athénien de 514 avant notre ère ne permet pas
­d’affirmer que Voltaire identifie la c­ onjuration des Pazzi à un acte dirigé
­contre des figures tyranniques. Le rapprochement est plutôt ­d’ordre
­culturel, il puise dans le registre classique pour mieux opposer la
situation antique aux désordres du Quattrocento italien. Voltaire précise
que seule la survie de Laurent et la mort de Julien, situation identique
au sort des enfants de Pisistrate, peut permettre de rapprocher les deux
événements. Selon lui, à Florence, des éléments religieux, absents de
­l’Athènes antique, se mêlent à ­l’attentat, du fait que des ecclésiastiques
ont participé à la ­conjuration. Pour Voltaire le principal acteur est le
pape Sixte IV. Il ­s’inspire de Machiavel (Histoires florentines, Livre VIII,
chapitres i à ix) pour décrire la c­ onjuration des Pazzi, mais c­ ontrairement
à lui, il insiste uniquement sur le rôle des religieux. La famille florentine
est reléguée au rang ­d’acteur secondaire, ses membres ne sont que les
exécutants du projet pontifical. Le titre du chapitre (chapitre cv) ignore
­l’appellation de « ­conjuration des Pazzi », chrononyme16 utilisé depuis
longtemps dans ­l’historiographie. Voltaire ­l’intitule uniquement : « De
­l’assassinat des Médicis dans une église ; de la part que Sixte IV eut à
cette ­conjuration17 », soulignant le rôle du Souverain Pontife et de son
entourage. Dans son récit, ­c’est lui qui trame la c­ onjuration ; il rencontre
les Pazzi à Rome et se sert de leur inimitié pour réaliser ses projets ;
les membres de la famille florentine ne sont que des pions sur le grand
échiquier politique de la papauté.
Pour Voltaire, la manière ignominieuse ­qu’a le pape ­d’intervenir dans
les affaires temporelles et de céder à des pratiques ­d’une rare violence
permet ­d’incarner la physionomie de ­l’Église de ce temps. Les religieux
choisissent pour frapper les princes un lieu de c­ ulte, Santa Maria del
Fiore, et attendent le moment de ­l’élévation de ­l’hostie. Ces pratiques sont

15 Voltaire, Essai sur les mœurs, Paris, Garnier, édition de R. Pomeau, 1990, 2 tomes, t. II,
p. 70.
16 Bacot, Douzou, Honoré, 2008 ; Kalifa, 2016.
17 Voltaire, Essai sur les mœurs, t. II, p. 68.
96 MARION BERTHOLET

c­ ondamnées avec ­d’autant plus de véhémence par Voltaire et les écrivains


du xviiie siècle que, deux ans auparavant, le meurtre de Galéas Marie
Sforza a eu lieu dans des circonstances similaires18. Tout cela prouve pour
Voltaire l­’athéisme de ce temps. Les élites politiques et religieuses se
désintéressent c­ omplètement de la religion et n­ ’hésitent pas à ­commettre
des meurtres au moment censé représenter ­l’incarnation de Jésus-Christ,
bafouant les dogmes et la liturgie. Le peuple, quant à lui, aveuglé par
la religion et c­ ontraint par le rite à demeurer tête penchée, ne peut agir
pour protéger ses princes. La façade religieuse des élites devient un
outil de domination politique pour abuser les citoyens. Cependant, la
portée religieuse est fondamentale dans ­l’acte des ­conjurés ; sa dimen-
sion spirituelle est réelle : les assassins prient avant l­’action et agissent
dans les églises pour placer leur geste sous la protection des saints de
la cité, dans ­l’objectif de sacraliser leur sacrifice pour la ­communauté19.
Cette dimension de la c­ onjuration des Pazzi est donc lue au xviiie siècle
­comme un acte d­ ’athéisme, s­’opposant à une piété sincère et marquée
par la raison. ­C’est une occasion de fustiger les mœurs violentes de cette
époque et, pour Voltaire, de dénoncer les imbrications du spirituel dans
le temporel. Cette lecture, courante au sein des Lumières françaises,
sert les idées des philosophes : le remplacement des vieilles pratiques
abusives par une Église utile et gallicane ainsi que la valorisation de la
religion naturelle ­contre les dogmes et l­’incroyance20.
En Italie, la dimension religieuse de la ­conjuration des Pazzi a éga-
lement suscité de nombreux ­commentaires chez les auteurs, mais leur
attitude critique demeure plus prudente. Muratori la détaille dans les
Annali ­d’Italia (1751). Sans porter de jugement précis sur les acteurs et sur
le gouvernement florentin, il se ­contente ­d’exposer clairement les enjeux
qui inscrivent cet événement dans le climat politique italien de cette
époque21. Étant un clerc éclairé, formé à l­’érudition historique religieuse
avant de passer à ­l’histoire civile22, il s­’intéresse à ­l’implication du pape
dans la ­conjuration et notamment à la guerre ­qu’il a entreprise ­contre les
Florentins après ­l’échec de celle-ci. Il en fait le symbole des abus et des
manipulations politiques que c­ onnaissait la religion catholique avant le
18 Ibid., p. 71.
19 Crouzet-Pavan, 2007, p. 179-180 ; Villard, 2008, p. 395-511.
20 Froeschle-Chopard, 1999.
21 Falco, Forti (éd.), 1964, t. II, p. 1336-1339.
22 Vismara, 2007-2008.
LA ­CONJURATION DES PAZZI ET LA RÉVOLTE DES FLORENTINS 97

Concile de Trente, la foi passant après les intérêts des acteurs religieux :
« ed ecco dove si lasciavano trasportare allora i papi per cagion di quel nepotismo
da cui finalmente abbiam veduto esenti ai dí nostri alcuni saggi pontefici, e
da cui spezialmente alieno rimiriamo il glorioso pontificato del regnante papa
Benedetto XIV23 ». Muratori adopte une attitude plus mesurée vis-à-vis des
critiques religieuses. Il dénonce les excès temporels des papes, mais il les
circonscrit dans un cadre temporel précis en soulignant la rupture qui fut
par la suite opérée. En creux, ces critiques des temps anciens permettent
de louer les pratiques rénovées du présent ; débarrassées de tous ces abus
injustes elles se recentrent sur le plus important : la foi catholique.
Une autre interprétation se lit chez ­l’historien Carlo Denina, auteur
de ­l’Istoria delle rivoluzioni d­ ’Italia (1769-1770). Tout en appartenant au
monde ecclésiastique, ce dernier a tenu des positions très critiques vis-à-vis
du clergé, notamment sur les questions de l­ ’inutilité des ordres réguliers
et de ­l’implication sociale de la religion24. Or, il dédouane entièrement
le pape Sixte IV de toute intervention dans la c­ onjuration des Pazzi25. Il
­s’attarde peu sur cet événement dans son récit, passant sous silence les
détails. Les seuls motifs ­qu’il avance sont ceux de ­l’invidia des Florentins
et notamment des Pazzi ­contre le pouvoir des Médicis. ­S’il évoque la
présence ­d’ecclésiastiques dans la ­conjuration, il exprime cependant clai-
rement ­l’idée de ­l’innocence du pape. Bien ­qu’il signale la sympathie de
Sixte IV pour les ­conjurés et sa haine particulière à ­l’égard de Laurent
de Médicis, Denina ne fait intervenir le pape que dans un second temps,
après la répression de la ­conjuration, lors de la mise au point de ­l’alliance
politique ­qu’il suscite c­ ontre Florence, pour venger la mort des membres
de son clergé. Cette attitude, plus en retrait, moins vindicative que chez
Voltaire, relève éventuellement du statut de clerc de Denina, mais ­c’est
surtout le c­ ontexte ­d’écriture qui peut l­’éclairer. L ­ ’élaboration de son
œuvre historique est étroitement soumise au c­ ontrôle de la censure des
rois de Sardaigne et à la volonté ­d’éviter sa mise à ­l’Index par Rome. Par
ses aspects polémiques, la dénonciation de l­’action d ­ ’un pape dans la
­conjuration des Pazzi pourrait être perçue ­comme une attaque frontale
vis-à-vis de ­l’Église ; ce que Voltaire, dans un esprit provocateur ­n’hésite
pas à faire, mais que Denina ne peut se permettre.
23 Muratori, t. II, p. 1338-1339.
24 Fagioli Vercellone, 1990 ; Venturi, 1976, p. 78-85.
25 Denina, Delle rivoluzioni d­ ’Italia, Milano, Giovanni Sivelstri, 1819, 6 tomes, t. V, p. 13-16.
98 MARION BERTHOLET

­L’INTERPRÉTATION DE ­L’ABSENCE
DE RÉVOLTE C­ ONTRE LES MÉDICIS

Malgré la diversité des usages que les Lumières font de la c­ onjuration


des Pazzi, un élément demeure ­constant : ­l’idée sous-jacente de la légi-
timité des Médicis et, par effet inverse, de l­ ’injustice de l­ ’acte perpétré
­contre eux. Les Médicis sont glorifiés sous les traits c­ ommuns des bons
princes par les auteurs des Lumières, pour avoir ­contribué au bonheur,
au calme et à la splendeur de leur cité. La réaction du peuple florentin en
est la preuve. Voltaire précise que les assassins ont attendu un moment
­d’inattention des citoyens pour agir. Cela suppose que la vigilance des
Florentins a été trompée sciemment. Ils auraient défendu leurs princes
­contre leurs attaquants, si les c­ onjurés ­n’avaient pas profité de ce moment
fugace pour frapper. La réaction violente du peuple est un élément clé
dans ­l’interprétation des auteurs des Lumières ; ceux-ci perçoivent dans
ses excès la matérialisation de sentiments de loyauté et ­d’attachement.
Pour Voltaire, les Médicis, aimés de leurs ­concitoyens, ont été vengés
par les sévices infligés aux coupables26. Le peuple, en se déchaînant
­contre les ennemis de ses gouvernants, incarne la légitimité du pouvoir
en place. Sa réaction loyaliste prouve ­l’isolement des Pazzi, de leur acte
et de leurs motivations, et elle permet de renforcer la c­ oncorde de la
cité ; les citoyens forment un corps autour de leur prince, un corps dont
­l’unité est garantie par ­l’éviction des éléments perturbateurs.
­L’idée selon laquelle les princes médicéens, légitimes dans leur domi-
nation et appréciés de leurs c­ oncitoyens, ont amené ­l’ordre dans la cité
et ont été les malheureuses victimes ­d’un acte injuste, est reprise en
substance dans le récit dressé par Condillac dans le Cours ­d’étude (1775)27.
Le philosophe explique la c­ onjuration en se c­ oncentrant uniquement
sur ­l’action locale des Pazzi. Il occulte tous les acteurs extérieurs, avant
­d’exposer la manière dont le peuple a vengé son prince, en suppliciant
les coupables et en les mettant en pièces dans les rues de Florence. La
­conséquence de cet acte a été que Laurent est parvenu par la suite à
gouverner en paix Florence et à assurer, à plus large échelle, la prospé-
rité de l­ ’Italie j­usqu’à sa mort en 149228. Dans cette vision, l­ ’assassinat
des Pazzi apparaît presque ­comme le dernier acte des déchirements
26 Voltaire, Essai sur les mœurs, t. II, p. 72-73.
27 Guerci, 1978.
28 Condillac, Cours ­d’étude, Paris, Houel, 1798, t. III, p. 241-242.
LA ­CONJURATION DES PAZZI ET LA RÉVOLTE DES FLORENTINS 99

terribles qui ont secoué la cité du lis depuis son époque c­ ommunale.
Cette instabilité est longuement développée dans le récit de Condillac,
influencé par les ouvrages de Machiavel. Elle était entretenue, selon le
philosophe des Lumières, par une mauvaise ­constitution, créée dans des
temps ­d’obscurantisme. La tentative ­d’assassinat des Pazzi serait la der-
nière réminiscence de ces vicissitudes, issues du régime « républicain » ;
désormais le prince, légitime et aimé de ses c­ oncitoyens, assure la paix
dans sa cité et lui donne sa prospérité. L­ ’idée de la sagesse et de la pru-
dence de Laurent se retrouve chez Voltaire et Denina pour qualifier la
réaction ­qu’il eut après la c­ onjuration. Selon le premier, le pape, n­ ’étant
plus à un abus près, porte ­l’injustice ­jusqu’à user de ­l’excommunication
et de ­l’anathème pour pourchasser les Florentins, coupables uniquement
­d’avoir défendu leur prince ­contre les calculs de la papauté. Voltaire
vante l­’action diplomatique et protectrice de Laurent de Médicis, qui
est parvenu à mettre rapidement fin au ­conflit. Denina reprend égale-
ment cette ­conclusion. Il montre que le Magnifique a assuré la paix à
­l’Italie, grâce à son habileté. La c­ onjuration a permis au jeune prince
de se légitimer dans son action et de se c­ oncentrer sur le bien public,
tout en assurant ­l’équilibre des forces en Toscane et dans la péninsule.
­L’échec des Pazzi est l­ ’incarnation pour les philosophes des Lumières
de la sagesse du gouvernement des Médicis. Ils en trouvent ­confirmation
dans la réaction du peuple, qui, en agissant publiquement, appuie le bon
gouvernement dont il bénéficie. Après la ­conjuration, Laurent de Médicis
a également su se montrer digne de l­ ’attachement de ses c­ oncitoyens et
de leur ­confiance en garantissant la paix à Florence et, plus largement,
dans ­l’Italie entière.
LA DÉPOLITISATION DE LA ­CONJURATION
DANS ­L’ÉCRITURE DES LUMIÈRES

­L’attachement à la figure des Médicis et la méfiance envers les régimes


républicains amènent les écrivains des Lumières à avancer une lecture
médicéo-centrée de la ­conjuration des Pazzi. Cette attitude se révèle
à travers les raisons que les auteurs mettent en évidence pour expli-
quer les motivations de cette famille. Renaud Villard a montré que
­l’exposition de ­l’assassinat relevait ­d’enjeux politiques très importants29.
La lecture traditionnelle a tendu à isoler les Pazzi d­ ’un c­ ontexte de tension
29 Villard, 2008, p. 233-244.
100 MARION BERTHOLET

et de ressentiment politiques suscité par la domination des Médicis.


­L’exacerbation de l­’inimitié personnelle entre les Pazzi et les Médicis
permet de rattacher la violence de la ­conjuration aux anciennes exactions
des vendette qui animaient les familles florentines. Les philosophes des
Lumières sont très largement tributaires de cette vision, qui ­concorde
avec leurs appréhensions politiques ; ils se ­l’approprient et ­l’adaptent
dans leurs discours à différents degrés d­ ’interprétation. En faisant des
Pazzi des acteurs secondaires de la ­conjuration, Voltaire dit du chef
de famille q­ u’il est « [­l’]ennemi des deux frères30 » ; ­c’est en raison de
cette haine ­qu’il propose au pape de les assassiner, afin ­d’achever leur
processus ­d’inimitié par le meurtre. En insistant sur les manipulations
ecclésiastiques, Voltaire fait des ­conjurés les instruments du projet
pontifical. Voltaire passe sous silence le c­ ontexte politique de tension ;
­l’acte des Pazzi est détaché du mécontentement qui peut régner dans
une partie de ­l’élite, évincée par les Médicis, pour être résumé sous la
forme d­ ’une inimitié lignagère que Voltaire ne développe pas.
Condillac, quant à lui, n­ ’évoque absolument pas les éléments extérieurs
de la ­conjuration. Il ne mentionne ni le pape ni les puissances rivales de
Florence, pour se ­concentrer sur la fermeture des institutions qui a pro-
voqué le mécontentement au sein des anciennes élites écartées du pouvoir
par les Médicis. Néanmoins, malgré la prise en c­ ompte des changements
socio-politiques florentins et ­l’association des Pazzi à ces groupes insatis-
faits, il précise que ­c’est parce ­qu’ils voulaient « se venger pour quelque
sujet particulier de mécontentement, [­qu’ils] ­conjurèrent la mort des deux
Médicis31 ». Le ­contexte politique devient un élément explicatif dans la ver-
sion de Condillac, mais il demeure subordonné aux arguments traditionnels
des haines lignagères. Denina, dans cette perspective, évoque une « invidia
­de’cittadini32 » à l­’égard des deux frères. S­ ’il lie la situation politique à la
­conjuration, il c­ ontinue néanmoins de donner la primauté aux sentiments
de haine et de jalousie, qui sont les ingrédients des anciennes rivalités entre
les partis du temps de la c­ ommune florentine. La c­ onjuration n­ ’acquiert
pas, ici, une portée universelle de refondation des institutions florentines ;
elle est perçue ­comme un acte injuste, dirigé c­ ontre des princes puissants
et dominateurs, mais servant loyalement Florence.

30 Voltaire, Essai sur les mœurs, t. II, p. 71.


31 Condillac, Cours ­d’étude, t. III, p. 241.
32 Denina, Delle rivoluzioni, t. V, p. 13.
LA ­CONJURATION DES PAZZI ET LA RÉVOLTE DES FLORENTINS 101

La vision la plus originale, personnelle et apolitique est sans doute celle


que nous trouvons dans le guide de voyage de Lalande. Ce scientifique,
empreint de la c­ ulture encyclopédique des Lumières françaises, effectue
un voyage en Italie en 1765-1766 dans un ­contexte ­d’intensification des
mobilités à l­ ’échelle européenne33. À partir de son expérience, il écrit un
guide/récit de voyage, genre très à la mode au xviiie siècle, qui ­compile
les informations des voyageurs précédents tout en donnant des précisions
sur le voyage réalisé, avec l­ ’objectif d­ ’orienter le lecteur dans un potentiel
périple34. À Florence, il évoque la fameuse c­ onjuration des Pazzi35. La
lecture historique et détaillée l­’intéressant peu, il préfère la relier aux
célèbres tournois, dont la postérité a marqué ­l’image du Quattrocento
florentin dans la mémoire européenne36. Si ces fêtes sont inscrites dans
les représentations de Lalande, il c­ onfond néanmoins le tournoi de
1469, donné pour le mariage de Laurent de Médicis avec Clarisse des
Orsini, et le tournoi de 1475, dont la renommée a été assurée grâce au
poème inachevé du Politien : les Stanze (1475-1478). Lalande ­s’appuie
sur cette c­ ulture chevaleresque pour associer la ­conjuration des Pazzi à
une rivalité amoureuse entre Julien de Médicis et Francesco dei Pazzi.
Selon lui, lors du tournoi, les deux hommes sont subjugués par la même
femme, Camille Caffarelli – bien q­ u’il veuille plus vraisemblablement
parler de Fioretta Gorini, amante de Julien de Médicis, et, ce que précise
Lalande, mère de Clément VII. Mais Francesco dei Pazzi est écarté. Fou
de rage, il fomente la ­conjuration, en réactivant les lointaines haines de
sa famille. Il assassine de sa main son rival en amour et ses ­complices,
moins exaltés dans leurs passions, échouent dans le meurtre de Laurent.
Lalande n­ ’évoque pas du tout le ­contexte politique florentin ou italien
et réduit toute l­’action de la c­ onjuration à des violences résultant de
­l’honneur chevaleresque. Loin de rattacher l­ ’assassinat à des affrontements
politiques, il préfère donner une version plus poétique, puisant dans les
références littéraires courtoises des hommes de lettres.

33 Roche, 2003 et 2011.


34 Bertrand, 2008 ; Harder, 1981.
35 Lalande, Jérôme de, Voyage ­d’un Français en Italie, Paris, Desaint, 1769, 8 tomes, t. II,
p. 169-170.
36 Carew-Reid, 1993.
102 MARION BERTHOLET

SISMONDI : LA JUSTIFICATION DE LA C
­ ONJURATION
ET DU TYRANNICIDE DES PAZZI

Les philosophes des Lumières, dans leur lecture de la ­conjuration


des Pazzi, demeurent largement soumis à leur attachement envers les
Médicis. La tentative de révolution, injuste et illégale, ne pouvait ­conduire
­qu’à ­l’échec. Sismondi, quant à lui, offre une lecture différente, associant
étroitement la c­ onjuration des Pazzi à un acte tyrannicide et libéral,
dont il détaille les rouages pour légitimer le recours à ces méthodes.
LA FABRICATION DU TYRAN ET DES TYRANNICIDES

Sismondi (1773-1842)37 a été ­l’un des premiers auteurs à diffuser


largement le Moyen Âge italien. Son œuvre, ­l’Histoire des républiques
italiennes du Moyen Âge (1807-1818), est marquée par ses préoccupa-
tions libérales, qui ­l’amènent à chercher dans le passé les expressions
de ­l’indépendance des hommes. Dans son étude, Florence tient une
place particulière en raison de ­l’expérience personnelle ­qu’il a de la
Toscane38. Il exalte les gouvernements équilibrés, dans lesquels les
hommes exercent leur souveraineté populaire sous le ­contrôle ­d’une
élite probe et capable, qui limite leurs excès. Il trouve ce modèle dans
la ­commune populaire florentine mais donne plus précisément la pri-
mauté au gouvernement établi par les Albizzi en 1382, caractérisé par
son resserrement oligarchique. Sismondi, à travers l­ ’image idéalisée d­ ’un
modèle politique équilibré, exalte ces gouvernants, sages et prudents,
qui se soumettent aux intérêts du bien ­commun. À ­l’inverse, selon lui,
­l’arrivée des Médicis a marqué progressivement la soumission de Florence
et le début de la perte de son indépendance, provoquant à terme son
déclin et la fin de la liberté italienne39. Côme ­l’Ancien, de retour ­d’exil
en 1434, impose une première étape, mais ce sont surtout ses petits-
fils, Laurent et Julien, qui rompent avec les idéaux « républicains » de
Florence. Ils sont présentés ­comme des princes biaisant les institutions
37 De Salis, 1932 ; Atti del colloquio internazionale sul Sismondi : Pescia 8-10 settembre 1970,
Roma, Academia nazionale dei Lincei, 1973.
38 Sofia, 2001 ; Pazzagli, 2000.
39 Casalena, 2016.
LA ­CONJURATION DES PAZZI ET LA RÉVOLTE DES FLORENTINS 103

florentines pour substituer à ­l’ancienne forme ­d’élections qui était « la


plus démocratique de toutes […], la plus arbitraire des oligarchies40 ».
Pour appuyer ses propos, Sismondi détaille les évolutions du système
électif qui leur ont permis ­d’imposer leur clientèle. Ce processus est
rendu possible par la désignation des magistrats au sein de petits groupes
­qu’ils ­contrôlent, au détriment de la pratique traditionnelle du tirage
au sort. À ces manipulations ­s’ajoute le caractère princier des jeunes
Médicis, portés au faste et à la magnificence. Leurs penchants étant
dispendieux, ils ont ruiné le sage c­ ommerce de leur grand-père, mais
­s’en sont toujours sortis grâce aux deniers de l­’État, qui les a renfloués
aux pires moments. Par leur caractère et leurs intrigues, ils « marchent
ainsi à la tyrannie41 ».
Sismondi oppose aux Médicis la famille des Pazzi. Il décrit leur
lignée, issue de la noblesse féodale du Val ­d’Arno, et montre que ce
sont des grands récemment réintégrés au Popolo ; c­ ’est-à-dire que cette
famille a été supprimée de la liste des magnats, catégorie assimilable
aux nobles. Ce statut les excluait de la vie politique, limitait leurs
droits de citoyenneté et les empêchait d­ ’accéder aux hautes charges du
gouvernement, tout en leur imposant des c­ ontraintes juridiques42. Selon
Sismondi, ce changement a été opéré en 1434, lors du retour de Côme,
mais Andrea dei Pazzi a renoncé, de lui-même, à son statut de magnat,
avant cette abrogation43. Ce ­n’est pas tant la date de leur réinsertion
dans la civitas qui importe que la lecture politico-­culturelle donnée
par Sismondi de ce processus de réintégration. Celui-ci illustre à quel
point ces hommes ont assimilé rapidement les valeurs des citoyens de
la république florentine ; ­comme eux, ils participent à la vie politique
et gèrent sagement leurs affaires c­ ommerciales, sans avoir à abuser des
revenus de l­ ’État, c­ ontrairement aux Médicis44. Sismondi insiste sur les
abus des membres de cette dernière famille. Dominés par leurs intérêts
personnels et leur souci de magnificence, ils se détachent du statut de
citoyen pour se rapprocher de celui de prince, tandis que leurs ambi-
tions et leurs intrigues politiques les font glisser vers la figure honnie
40 Sismondi, Histoire des républiques italiennes du Moyen Âge, Paris, Treuttel et Würtz, 1840,
10 tomes, t. VII, p. 99.
41 Ibid., p. 100.
42 Klapisch-Zuber, 2006.
43 Martines, 2005, p. 65-86.
44 Sismondi, Histoire des républiques, t. VII, p. 101-102.
104 MARION BERTHOLET

du tyran. Il leur oppose les Pazzi qui eux sont nobles de naissance, mais
se sont acculturés aux pratiques et à la ­culture marchande. Ces derniers
sont les symboles du triomphe de l­ ’ethos des marchands-magistrats de
Florence, capables de ­conduire les affaires publiques avec la sagesse ­qu’ils
accordent à leurs affaires privées.
Par cette opposition, Sismondi associe les ­conjurés à la ­continuité
­culturelle et politique de l­’ancienne élite qui gouvernait sainement
Florence. Par ­conséquent, ces hommes se battent pour rendre la liberté
à leur cité ; à l­ ’inverse, les frères Médicis sont associés à des tyrans q­ u’il
faut abattre par un geste salvateur pour mettre fin à leur mauvais gou-
vernement et rétablir l­’ancienne république.
­L’UNIQUE MOYEN D
­ ’AGIR : LE TYRANNICIDE

­L’association des Pazzi à l­’ancienne liberté florentine, affrontant la


« tyrannie » des Médicis, ne suffit pas à justifier le meurtre. Sismondi
­s’attache donc à développer un long argumentaire pour légitimer le
recours à la ­conjuration et à la violence cachée. Le tyrannicide a ­connu
une longue théorisation dans l­ ’histoire moderne, certains cas d­ ’abus de
pouvoir rendant acceptable le meurtre ­d’un souverain45. Dans cette
perspective, Sismondi se réfère plus précisément aux œuvres de Machiavel
et d­ ’Alfieri, ce dernier s­ ’inspirant par ailleurs largement du philosophe
florentin. Dans Les Discours sur la première Décade de Tite-Live (Livre III,
Chapitre vi), Machiavel ­s’intéresse aux ­conjurations et à leurs motifs,
dont la volonté de briser le joug sous lequel souffre la patrie ; il examine
ensuite les modalités ­d’action mais sans les justifier directement. Dans
son traité De la Tyrannie (1777-1790), Alfieri avance tout un développe-
ment pour appuyer et glorifier la légitimité de la ­conjuration ­d’individus
­contre des princes tyranniques. Il encense ces hommes, prêts à mourir
pour restituer la liberté à leur patrie, qui ­s’élèvent ­contre l­’injustice et
­l’arbitraire. Dans une réflexion générale sur le tyrannicide, Sismondi
reprend ces idées glorifiant les particuliers, qui, malgré la faiblesse de
leurs forces face à des hommes à l­’autorité démesurée, n­ ’hésitent pas,
portés par leur enthousiasme et leur patriotisme, à se sacrifier pour
la ­communauté46. Son intérêt pour ­l’engagement des Pazzi lui vient

45 Minois, 1997 ; Cottret, 2009 ; Turchetti, 2013.


46 Sismondi, Histoire des républiques, t. VII, p. 75-77.
LA ­CONJURATION DES PAZZI ET LA RÉVOLTE DES FLORENTINS 105

également des œuvres de théâtre ­d’Alfieri, et particulièrement de sa


tragédie, La Conjuration des Pazzi47.
Sismondi justifie les procédés qui ont été mis en œuvre. Les actions
des fuoriusciti ne peuvent plus, c­ omme au temps des c­ ommunes, rétablir
la liberté depuis ­l’étranger. Les bannis chassés par les Médicis ont échoué
dans toutes leurs tentatives ; une nouvelle agression extérieure de leur
part aurait provoqué, après son échec inévitable, un renforcement de
­l’arbitraire. Une action depuis l­’intérieur de la cité, grâce aux recours
légaux, est également une entreprise impossible. Les Médicis bloquent
les ­contre-pouvoirs prévus par la c­ onstitution ; ils ont noyauté les ins-
titutions et tiennent dans leur clientèle les magistrats et les juges qui
se seraient impitoyablement retournés c­ ontre toute personne tentant
de les destituer légalement48. Une sédition préparée en amont, avec
les forces des citoyens-soldats, aurait également été impossible car les
Médicis possèdent l­’appareil militaire et les principaux lieux fortifiés
de Florence. Dès lors, les anciennes révoltes, de type c­ ommunal, sont
impuissantes à rétablir l­ ’ordre dans la cité. L­ ’unique solution possible relève
des violences de palais. Seul le recours à la ­conjuration et à ­l’assassinat,
choisi par les Pazzi, pouvait rendre à Florence sa liberté. Le peuple,
ensuite, ne manquerait pas de légitimer cette action, en reconnaissant
son caractère libéral : « les citoyens qui tremblaient devant les Médicis],
­s’empresseraient de c­ ondamner leur mémoire, et de reconnaître, c­ omme
un acte de la vengeance publique, ­l’attentat de leurs meurtriers49 ».

47 Alfieri a ­composé cette œuvre entre 1779 et 1781. Les protagonistes de la tragédie sont
Raimondo dei Pazzi (personnage fictif associé à Guglielmo dei Pazzi), son épouse Bianca
(sœur des frères Médicis), le prêtre Salviati, Julien et Laurent de Médicis. Alfieri dresse
son action autour du sacrifice vain de Raimondo dei Pazzi, héros de la liberté, mort pour
sauver Florence du joug médicéen. Le traitement réservé à Laurent de Médicis oscille entre
la haine du tyran et ­l’admiration pour le protecteur des arts. Maier, 1989 ; Fenocchio,
2012.
48 Sismondi, Histoire des républiques, t. VII, p. 105.
49 Ibid., t. VII, p. 105.
106 MARION BERTHOLET

L­ ’INTERPRÉTATION DE ­L’ÉCHEC
DU TYRANNICIDE ET DE LA RÉVOLTE DES FLORENTINS
CHEZ SISMONDI

Sismondi justifie ­l’assassinat dans le cadre ­d’une c­ onjuration, en


associant l­ ’action ­contre les Médicis à un tyrannicide. Laurent et Julien
prennent les traits de tyrans, tandis que les Pazzi deviennent des héros,
prêts à sacrifier leur vie pour rendre à leurs ­concitoyens leur liberté. Leurs
haines personnelles à l­’égard des Médicis sont évoquées par Sismondi
­comme étant les déclencheurs de la ­conjuration ; après les injustices ­qu’ils
ont subies de la part des princes Florentins, les membres de la famille
ont fomenté un c­ omplot, soutenu par le pape et divers autres acteurs,
pour rentrer dans leurs droits et réparer les affronts reçus. Cependant,
à ces motifs classiques Sismondi ajoute une dimension libérale dans
laquelle la portée supérieure et patriotique de leur action domine lar-
gement50. ­L’échec de la c­ onjuration est perçu, par Sismondi, c­ omme le
début du déclin de la cité florentine ; il est le symbole de l­’étiolement
des institutions républicaines, qui ne sont plus capables d­ ’assurer les
vertus de la liberté et de garantir la cité c­ ontre la tyrannie par le biais
de révoltes vertueuses.
FLORENCE SI DUOLE MA NON SI MUOVE PIÙ :
­L’ABSENCE DE RÉVOLTE DES FLORENTINS

Selon les penseurs des Lumières, la réaction du peuple prouvait son


attachement aux Médicis, ce qui induisait la légitimité de la domina-
tion de ces derniers sur Florence ; par cet acte, l­’opinion publique51
manifestait son soutien envers leur bon gouvernement et punissait
leurs ennemis. En se faisant les instruments de la justice, les citoyens
approuvaient dans les faits leur pouvoir. Sismondi au c­ ontraire juge très
durement la réaction populaire, qui révèle à ses yeux une inversion des

50 Dans la notice « Pazzi », écrite pour la Biographie universelle des frères Michaud, Sismondi
résume ces motivations : « Les Pazzi zélés pour la liberté de leur patrie, et jaloux d­ ’une
maison rivale, formèrent, en 1478, le projet de rendre à Florence son antique ­constitution » ;
Casalena, 2012, p. 284.
51 Landi, 2006.
LA ­CONJURATION DES PAZZI ET LA RÉVOLTE DES FLORENTINS 107

vertus du peuple florentin et une perte de sa capacité de régénérescence.


Il détaille les violences qui ont suivi ­l’échec de la tentative ­d’assassinat
des Pazzi. Les c­ onjurés tentent de soulever le peuple en s­ ’emparant des
lieux symboliques du pouvoir, notamment le Palazzo Vecchio ; Iacopo
Pazzi parcourt la cité en criant « libertas » pour exhorter le peuple à se
soulever et à rétablir la res publica, mais celui-ci ne le suit pas, seul le cri
des Médicis, « Palle », répond à ­l’appel de la liberté. Le sacrifice patriotique
des ­conspirateurs fut récompensé par un déchaînement de violence52.
Leurs corps furent l­ ’objet de multiples violences symboliques : ils furent
dépecés et traînés dans les rues, victimes de la rage populaire. Sismondi
décrit notamment le sort de la dépouille de Iacopo Pazzi dont l­ ’histoire
a été retranscrite dans les chroniques de la fin du Moyen Âge53. Après
son décès, il fut inhumé dans le caveau familial des Pazzi, à Santa Croce,
à ­l’intérieur de l­ ’enceinte de la cité. La pluie ne cessant de s­ ’abattre, les
esprits associèrent sa présence dans ce lieu sacré à un châtiment divin.
Pour y remédier, son corps fut transporté hors des murs. Les enfants
­s’amusèrent par la suite avec son cadavre. Ils le déterrèrent, le charrièrent
dans les rues de Florence, puis le jetèrent et le récupérèrent plusieurs
fois dans l­ ’Arno, avant de laisser définitivement le fleuve l­ ’emmener au
loin. Ils effectuaient ainsi un acte de régénérescence de la cité. À travers
ce rituel expiatoire c­ onfié à l­ ’innocence des pueri, ceux-ci chassaient du
corps citoyen les maux susceptibles de perturber son repos54.
Sismondi associe les violences du peuple – ­qu’il identifie avec la
« populace » – à une perte des valeurs républicaines et vertueuses des
habitants de la cité florentine ; la population ne tend plus vers le bien
­commun et la liberté, laissant la cité courir à sa perte. Dans la vision de
Sismondi, les hommes sont les produits des lois, leur caractère et leur
grandeur résident entièrement dans leurs effets ; en ferme opposition
avec la théorie des climats en vogue au xviiie siècle55, il nie tout impact
des milieux dans la destinée des civilisations. Or, les violences c­ ontre les
héros de la liberté, de la part du peuple, peuvent être associées à cette
interprétation politico-institutionnelle. Le gouvernement florentin, grevé
de l­’intérieur par les Médicis, a provoqué l­’étiolement du sens du bien

52 Sismondi, Histoire des républiques, t. VII, p. 111-116.


53 Ibid., p. 115-116.
54 Villard, 2007 et 2008 (p. 474-476) ; Zorzi, 1994 ; Taddei, 2001.
55 Walter, 2004 ; Althusser, 1959 ; Duchet, 1971.
108 MARION BERTHOLET

c­ ommun chez les citoyens. Ils ne sont plus entièrement tendus vers la
liberté, leurs révoltes et leurs violences ne parviennent plus à rétablir
la perfection des institutions en les régénérant. Ici la « populace » se
détache du reste du peuple, les c­ omposantes sociales de la cité n­ ’agissent
plus de c­ oncert en un bloc uni.
La ­conjuration des Pazzi rompt avec la manière dont Sismondi
­concevait les séditions florentines du xiiie-xive siècle. Le ­conflit était
alors un moyen de restaurer la liberté, les hommes par leurs violences
agissaient dans l­ ’intérêt du bien c­ ommun56. Sa perception est largement
marquée par la lecture des partis développée par Machiavel, qui voyait
dans les affrontements de l­’ancienne Rome un moteur permettant de
maintenir la res publica et d­ ’œuvrer c­ onstamment pour la perfection de
son gouvernement57. Sismondi a transposé cette vision dans le monde
­communal italien et notamment florentin. Ce processus ­s’est par exemple
illustré en 1343, lorsque le peuple a chassé, les armes à la main, le duc
­d’Athènes qui, la même année, avait imposé sa seigneurie sur la cité. Par
son éloignement des pratiques c­ ommunales, son gouvernement autoritaire
a poussé la tradition florentine à le rapprocher des figures tyranniques58.
La principale source dont se sert Sismondi pour détailler la révolte est
la célèbre chronique de Giovanni Villani59 (mort en 1348), où le peuple
est célébré c­ omme uni, entièrement tendu vers la reprise de sa liberté
(Villani, Nuova Cronica, Livre XIII, Chapitre 17). ­L’auteur genevois ­s’en
inspire et perçoit cette force dans le cri de libertas, qui montant des rues
de Florence symbolise la c­ oncorde des citoyens dans le rétablissement
de leurs anciennes valeurs « républicaines » et dans la reprise de leur
indépendance politique60. Ce processus de régénération par la violence
et la sédition s­ ’exprime clairement chez Sismondi à travers un proverbe
toscan mentionné dans la chronique de Villani : « Firenze non si muove,
se non tutta si duole ». Or, cet ancien cycle de violence semble terminé.
Désormais les Florentins ne sont plus capables de reprendre leur liberté
par la sédition. Au temps de la c­ onjuration des Pazzi, dans un climat
politique glissant vers l­’établissement de la tyrannie, l­’assassinat était
­l’unique forme de violence opérationnelle. Mais cette action n­ ’a pas été
56 Je me permets de renvoyer à mes propres travaux : Bertholet, 2015.
57 Skinner, 2001.
58 Zorzi, 2013 ; Zablia, 2013.
59 Bordone et Garofani, 2000 ; Ragone, 1998.
60 Sismondi, Histoire des républiques, t. IV, p. 26-30.
LA ­CONJURATION DES PAZZI ET LA RÉVOLTE DES FLORENTINS 109

capable de trouver le soutien du peuple. Ce dernier est à présent privé


de ses instincts de liberté.
Sismondi change sa manière de décrire le soulèvement de la foule,
entre l­ ’événement libérateur du renvoi du duc d­ ’Athènes et la c­ onjuration
des Pazzi. Dans le premier cas, il souligne que les instincts violents sont
mis au service de la liberté et les magnifie en occultant des éléments
de la chronique de Villani61. ­L’écrivain florentin détaille les exactions
du peuple et sa cruauté ­contre le juge, Guillaume ­d’Assise, et son fils.
Sismondi afin de sublimer la mobilisation des Florentins occulte les
passages pouvant ­l’altérer. Il se sert de Villani pour décrire la cruauté du
magistrat, mais il accentue également ce caractère, quasiment atavique,
chez son fils. Pour appuyer ­l’idée de la barbarie innée de ce jeune homme,
qui depuis son âge le plus tendre aurait été porté vers des penchants
cruels, il lui donne quatorze ans, là où Villani lui en attribue dix-huit.
Sa perversion est mentionnée dans la chronique, mais l­ ’auteur genevois
­l’exacerbe. Il évoque un enfant se délectant des séances de tortures et
qui, pour prolonger son plaisir, invectivait les bourreaux en les incitant
à éterniser les supplices de leurs victimes. En insistant sur ­l’atrocité des
dirigeants, mis en pièce par le peuple florentin, Sismondi légitime et
sublime leur acte libérateur. Dans ce but, il passe sous silence les détails
les plus dérangeants de la révolte. Là où Villani évoque les cadavres
du juge et de son fils, dévorés par les Florentins dans un acte rituel
anthropophagique62, Sismondi jette un voile pudique sur ces cruautés
pour ne pas entacher le processus de régénération de la liberté par des
excès c­ ontredisant l­’image d­ ’un peuple vertueux.
À ­l’inverse, dans la ­conjuration des Pazzi, Sismondi ­s’attarde longue-
ment sur les exactions de la foule à l­’encontre de ceux qui ont essayé
de la rendre libre. Il insiste sur la tentative des c­ onjurés de soulever
le peuple en jouant sur leurs sens. Dans cette perspective la prise des
bâtiments symboliques était cruciale, et ­l’échec de cette entreprise a été
fatal. Selon lui, « la multitude ne juge que par des images grossières63 ».
Ce ­n’est donc plus un peuple, porté par un instinct supérieur, qui se
révolte pour reprendre sa liberté. Ces hommes ­n’agissent plus dans le
cadre ­d’une violence soumise à leur raison, ­comme lors de la révolte
61 Ibid., t. IV, p. 29.
62 Villard, 2008, p. 467-477.
63 Sismondi, Histoire des républiques, t. VII, p. 111-112.
110 MARION BERTHOLET

c­ ontre le duc ­d’Athènes. Ils sont désormais analysés selon les principes
du sensualisme64. Leurs impressions dominent leurs opinions, ce qui les
pousse à soutenir les individus faisant appel à leurs sens, et non ceux
œuvrant pour leur salut politique. Ils sont par là même les instruments
de leur propre servitude. Les acteurs des violences ­contre les Pazzi ne
sont ­d’ailleurs pas associés par Sismondi au peuple florentin, à savoir
les personnes les plus dignes – les marchands, les citoyens et ceux qui
possèdent une fortune – mais à la « populace ». Les violences de cette
dernière, en dominant les anciennes formes de sédition d ­ ’un peuple
uni, amènent une rupture. Là où les citoyens de la bourgeoisie étaient
capables de rétablir la liberté, « la populace », sans guide vertueux,
renforce la tyrannie des Médicis, qui la domine entièrement par la
manipulation de ses impulsions. Dans cette distinction, Sismondi est
tributaire de son système de pensée libéral. Il est méfiant vis-à-vis des
excès des foules, q­ u’il associe aux déboires de la Terreur dont il a subi
les effets lors de la révolution à Genève en 1793-1794. Il distingue ainsi
les révoltes libérales, mesurées et réunissant la ­communauté entière
pour renverser la tyrannie, des foules guidées par leurs sens ; privées de
réflexion intérieure, elles appuient aveuglément les tyrans et ­s’opposent
à la liberté que leur offrent des héros incompris.
LA CRÉATION D­ ’UNE MÉMOIRE PATRIOTIQUE
DE LA ­CONJURATION

Sismondi dépeint la famille des Pazzi sous cet angle. Il s­’oppose à


une lecture égocentrique de leur acte, pour souligner au ­contraire leur
désintéressement. Il les décrit prêts à mourir pour leur patrie et sa liberté,
à la manière des personnages des tragédies d ­ ’Alfieri. Cependant ces
hommes, portés par un engagement supérieur, sont voués à l­’échec car
ils sont incompris de leurs semblables, qui ne perçoivent pas les idéaux
­qu’ils servent. C
­ ’est ce sentiment q­ u’il prête à Francesco dei Pazzi quand
la foule armée le c­ onduit depuis sa maison j­usqu’au Palazzo Vecchio, où
une mort certaine ­l’attend. Selon Sismondi, il regardait « ­d’un œil fixe ses
­concitoyens qui retournaient à leur esclavage et il soupirait65 ». ­L’historien
­s’inspire de Machiavel tout en transformant son récit. Le philosophe
florentin mentionne le calvaire ­qu’a subi Francesco dei Pazzi lorsque,
64 Duchesnau, 1982 ; Auroux, 2007.
65 Sismondi, Histoire des républiques, t. VII, p. 114.
LA ­CONJURATION DES PAZZI ET LA RÉVOLTE DES FLORENTINS 111

escorté dans les rues de Florence, il subit les insultes et les humiliations
du peuple. Selon lui, ce tourment le rendit muet et le poussait à soupirer,
mais il ­n’interprète pas sa peine à ­l’aune de ses sentiments politiques
(Histoires florentines, Livre VIII, chapitre ix). Sismondi associe cette attitude
prostrée au regret de voir ses égaux se jeter dans les bras de la tyrannie.
­L’affliction que ressent Francesco dei Pazzi est entièrement suscitée, selon
lui, par la vision de ses ­concitoyens ne ­comprenant pas l­ ’affranchissement
­qu’il leur offrait. Il sublime ainsi ­l’isolement du héros de la liberté, seul
­conscient du triste avenir de sa cité et ne pouvant enrayer son destin.
La qualité de héros de la liberté se heurte aux traditions du xviiie siècle,
qui se sont peu intéressées aux Pazzi pour se ­concentrer sur les autres
acteurs de la c­ onjuration ou sur les motifs privés de la famille floren-
tine. Sismondi s­ ’oppose vivement à ces traditions en voulant rétablir la
mémoire de ces hommes, tout en ne cachant pas que le motif initial de
leur action était d­ ’ordre personnel. Dans un premier temps, il s­ ’interroge
sur ­l’idée de l­ ’orgueil et des vices q­ u’on leur prête traditionnellement66.
Selon lui, cette vision est héritée de la subjectivité des écrivains proches
des Médicis, ­comme Politien, qui dans leur partialité ont déformé la
réalité. Sismondi, au ­contraire, insiste sur la piété de ces hommes, en
­l’illustrant par ­l’exemple de la charité de Iacopo dei Pazzi, prêt à aider
les pauvres et à orner les églises de Florence grâce à ses dons.
La revalorisation de leurs vertus personnelles ne suffit pas pour rétablir
la mémoire de leur acte. Sismondi doit également encenser leur action
dans la sphère publique et transcender leur assassinat, a priori motivé
par des éléments privés, en violence libérale. La tradition du xviiie siècle
insistait sur le caractère personnel de la querelle entre les deux familles
rivales, mais la politisation de ­l’acte des Pazzi, tentée par Sismondi,
pose néanmoins des problèmes d ­ ’interprétation ­qu’il doit dépasser.
Les ­conjurés portent les rancœurs de ­l’ancienne oligarchie florentine ;
or, Sismondi encense les modèles politiques équilibrés et déplore leur
fermeture. De manière idéalisée, il trouve son absolu institutionnel dans
le gouvernement des arts florentins qui aurait triomphé, précise-t-il,
­jusqu’au retour d­ ’exil de Côme de Médicis en 1434. Ces représentations
poussent Sismondi à oublier la dimension aristocratique des projets
politiques des c­ onjurés, pour les rattacher à l­’esprit démocratique et
libéral caractérisant la période pré-médicéenne. Il précise cette vision,
66 Ibid., t. VII, p. 116.
112 MARION BERTHOLET

simplement sous-entendue dans la première édition de son Histoire des


républiques italiennes du Moyen Âge, à ­l’occasion de sa longue querelle avec
­l’historien anglais William Roscoe.
Ce dernier a ­connu le succès en publiant Life of Lorenzo dei Medici
(1796). Après la parution de ­l’œuvre de Sismondi, il élabore un ajout
à sa biographie c­ onnu sous le nom de Illustration of the life of Lorenzo
di Medici (1822), où il ­s’en prend à l­’historien genevois ; ce dernier lui
répond sous la forme de plusieurs notes de bas de page dans les éditions
postérieures de son histoire du Moyen Âge italien. La querelle est parti-
culièrement animée autour de la c­ onjuration des Pazzi. Sismondi accuse
Roscoe de partialité envers les Médicis et son adversaire dénonce des
attaques infondées envers ces princes, qualifiés de tyran. ­C’est justement
à propos de la réaction du peuple que les deux écrivains ­s’affrontent pour
déterminer quel parti représente le Popolo et lequel est aristocratique.
Sismondi, dans sa note de bas de page, reprend les attaques de Roscoe,
qui se sert des violences du peuple pour les interpréter c­ omme des
actes de loyauté envers son « élu » et d­ ’opposition aux vues élitistes de
­l’oligarchie qui agissait ­contre ses intérêts67. En se fiant à la réaction du
peuple, c­ omme preuve de la légitimité de Laurent et de Julien, Roscoe
reprend les analyses des auteurs du xviiie siècle. En revanche, Sismondi ne
peut pas tolérer que les Pazzi soient associés aux intérêts de ­l’oligarchie,
car, de fait, leur geste perdrait toute portée libérale et universelle. C ­ ’est
pourquoi il réaffirme le caractère républicain des Pazzi. Ceux-ci portent
les intérêts des citoyens et cherchent à leur rendre leur liberté. ­C’est
autour de cet enjeu que se pose ­l’identification socio-politique du peuple
acteur de la répression. Pour Sismondi ­c’est « la populace » qui agit. Au
­contraire, par son silence et son absence de mobilisation, le peuple des
citoyens apporte son soutien aux Pazzi. Les hommes qui s­’acharnent
sur les ­conjurés ­n’expriment pas la souveraineté des Florentins, ils ne
sont que la lie du peuple aveuglée par les tyrans. En définissant de la
sorte le soutien que reçoivent les Médicis, Sismondi inverse le rapport
établi par les Lumières et par Roscoe : le peuple – ou du moins celui qui
­compte – reconnaît ses héros dans les ­conjurés et non dans les Médicis.
­L’action désespérée des Pazzi est marquée par la liberté et la légitimité ;
ce sont les derniers héros de la grandeur florentine, les derniers espoirs
des citoyens ­contraints au silence.
67 Ibid., t. VII, p. 115.
LA ­CONJURATION DES PAZZI ET LA RÉVOLTE DES FLORENTINS 113

Le caractère héroïque des Pazzi et de leurs alliés se heurte également


au type de violence dont ils ont usé. Sismondi a justifié le recours à la
­conjuration plus haut, mais il reprend cette défense pour associer définiti-
vement ces hommes à la lignée des glorieux tyrannicides. La dissimulation
et la traîtrise sont justifiables car ce sont les seuls moyens ­d’agir ­contre les
tyrans. Par leur geste, ils n­ ’ont fait que réitérer les actes des grandes figures
antiques : Aristogiton, Harmodius, les deux Brutus… qui, tous, pour
sauver leur patrie n­ ’ont eu d­ ’autre choix que de dissimuler. En revanche,
si le poignard ou le poison peuvent être des armes libérales et légitimes, il
refuse ce caractère aux princes qui les utilisent. Comme ils possèdent des
forces supérieures, il leur est possible d­ ’agir autrement, ce que ne peuvent
pas faire les patriotes républicains68. Ainsi, pour rattacher définitivement
les ­conjurés au monde de la liberté, Sismondi distingue au sein des « vio-
lences de palais » les cruautés dévoyées et lâches des princes, de celles,
justifiables, des patriotes au service de la liberté de leur cité. Il déclare :
Le glaive a été rendu par ­l’opinion aux citoyens pour venger leur honneur dans
des duels, aux républicains pour retrouver leur liberté dans des ­conspirations
légitimes. Les duels, ­comme les ­conspirations sont interdits par ­l’honneur
aux souverains qui ont un autre juge dans le sort des armes publiques69.

Cette figure libérale des ­conjurés et de leurs modes ­d’action ­s’inscrit


dans le ­contexte ­d’écriture de Sismondi. Il élabore son œuvre au tournant
de la Révolution, de ­l’Empire et de la Restauration, qui marque une
époque de densification des réseaux républicains et libéraux, à l­ ’échelle
européenne, pour lutter c­ ontre l­ ’arbitraire. Les attentats deviennent une
forme ­d’expression en expansion, qui réactive la pensée du tyrannicide
­combattue par le xviiie siècle pour ­l’appliquer à la figure du patriote.
­L’homme peut agir pour le bien ­commun ­contre le pouvoir arbitraire
et, par ce biais, chacun devient maître du destin de la ­communauté70.
68 Ibid., t. VII, p. 122-123. Cette analyse permet également à Sismondi de c­ ondamner
­l’implication du pape dans la ­conjuration. En se mêlant de la sorte aux affaires tem-
porelles, pour ses propres intérêts, et en recourant à la traîtrise et à la dissimulation là
où sa puissance aurait dû le c­ onduire à intervenir sous des formes plus légales, il a agi
de manière abusive et scandaleuse, une attitude q­ u’il prolonge en menant une guerre
­contre Florence après l­ ’échec du c­ omplot. Les Pazzi, eux, en tant que citoyens, n­ ’avaient
pas ­d’alternative à leur disposition, ils étaient ­contraints de ­conspirer, de trahir et de
tromper pour mettre fin à la tyrannie médicéenne.
69 Ibid., t. VII, p. 123.
70 Salome, 2010.
114 MARION BERTHOLET

« CELUI QUI VEUT MOURIR EST MAÎTRE DE LA VIE DU ROI »

Sismondi exalte la disposition intrinsèque du citoyen à devenir un


protagoniste de la liberté pour garantir la ­communauté ­contre ­l’arbitraire.
La tentative de tyrannicide avortée c­ ontre les Médicis reprend cette
rhétorique ; son message est universel, ­c’est celui de la capacité des
individus de résister à un pouvoir injuste. Chez Sismondi, cette portée
se retrouve dans les récits d­ ’autres événements de l­’histoire médiévale
italienne, associés à l­ ’imaginaire du tyrannicide. Celui-ci évoque le cas
­d’un membre de ­l’élite véronaise : Giovanni Scanarola. Après avoir été
emprisonné, en 1247, sous la seigneurie d­ ’Ezzelino III da Romano, pour
avoir ­conspiré c­ ontre sa domination, il se jette sur le podestat, Enrico da
Egna, le jour de son jugement, dans le palais ­communal de Vérone71.
Ezzelino da Romano, en établissant sa seigneurie dans les Marches, des
années 1230 j­usqu’à sa mort en 1259, a imposé un pouvoir fort et sou-
vent violent, présenté dans les chroniques c­ omme une tyrannie72. Cette
rhétorique a largement dominé les mémoires. Ce sont ses logiques que
reprend Sismondi. Pour cela, il ­s’inspire de la chronique de Rolandino
de Padoue, qui exacerbe la figure tyrannique du prince, et de celle ano-
nyme attribuée à un moine padouan. Il décrit à partir de ces sources
la tentative de tyrannicide c­ ontre la créature ­d’Ezzelino, aussi cruelle
que son maître. Il exacerbe le côté despotique et le déséquilibre des
forces, lorsque le jeune héros, Scanarola, couvert de chaînes, se jette sur
le podestat avec un poignard q­ u’il avait caché. Touché mortellement,
le juge décède quelques jours plus tard de ses blessures, tandis que le
tyrannicide est immédiatement mis en pièces par les hallebardes des
gardes. Ce dernier détail ­n’apparaît pas dans la chronique, les armes en
question étant ­d’invention postérieure ; cet anachronisme est un moyen
­d’accentuer le despotisme du juge d­ ’Ezzelino, et le déséquilibre entre
le patriote, porté par son amour de la liberté, et les instruments de la
tyrannie. À partir des chroniques, Sismondi déclare que désormais un
proverbe italien se répand : « celui qui veut mourir est maître de la vie du
roi73 ». Il ­s’inspire pour cela de la ­conclusion du récit du moine padouan :
« Patet itaque illud antiquum proverbium esse verum, quod qui vult mori, regem

71 Varanini, 1993.
72 Zorzi, 2013 ; Ortalli, 1992 ; Fiorese, 2004.
73 Ibid., t. II, p. 278.
LA ­CONJURATION DES PAZZI ET LA RÉVOLTE DES FLORENTINS 115

potest occidere74 ». Ce proverbe était une réflexion large du chroniqueur.


Sismondi, lui, ­s’en empare pour en faire un mot d­ ’ordre, qui se répand
dans les cœurs italiens guidant leur volonté de liberté ; il accentue la
portée libérale de cet élément en traduisant par « celui qui veut mourir
est maître de la vie du roi », là où la traduction littérale serait « celui
qui veut mourir peut tuer le roi ». En insistant sur la possibilité pour les
citoyens de déterminer le destin des princes, Sismondi accentue la portée
libérale de cet épisode historique. Il réactive les anciennes rhétoriques
médiévales de la lutte c­ ontre la tyrannie ­d’Ezzelino, pour leur donner
une portée plus large. La ­conjuration des Pazzi reprend ces objectifs et
­conduit à la même ­conclusion. Les hommes ont la capacité de se lever
­contre le pouvoir qui les opprime, leur entreprise peut être couronnée
de succès ou non, mais chacun représente en soi la garantie des droits
de la ­communauté ­contre l­’arbitraire.
Les tyrannicides et la glorification de la mémoire des Pazzi ne sont
pas des appels lancés par Sismondi à agir, dans le présent, c­ ontre le
pouvoir sous la forme de l­ ’attentat. Il demeure libéral : à ce titre, il hait
la tyrannie mais il apprécie par-dessus tout l­ ’ordre et se méfie des excès
de violence en politique. À travers ces exemples historiques, il cherche
à glorifier les temps passés et à réfléchir sur la perte de ­l’indépendance
florentine et plus largement italienne. Il ­n’appelle pas à les imiter
littéralement, mais souhaite édifier les Italiens pour les sortir de leur
déclin et de leur dépendance politique, en leur transmettant la glorieuse
mémoire de leurs ancêtres et de leur capacité de résistance. Grâce aux
leçons des Pazzi – et des autres tyrannicides de ­l’histoire italienne –
les Italiens doivent prendre ­conscience de leur capacité ­d’action. Leur
liberté est un ­combat ­constant c­ ontre ­l’arbitraire dont ils sont les acteurs
principaux. Leurs ancêtres ont tenté, avec succès ou non, ­d’agir pour
le bien ­commun ; ils doivent se montrer dignes de l­’exemplarité ­qu’ils
leur ont offerte et reprendre leur indépendance. Par sa lecture libérale,
Sismondi a fait ­connaître le Moyen Âge italien au public européen,
et particulièrement transalpin. Il a permis de divulguer des thèmes
historiques reçus par les Romantiques et les patriotes du mouvement
risorgimental75. La lecture politique du tyrannicide des Pazzi, qui se
74 Chronicon Monachus Patavinus, dans Muratori (éd.), Rerum Italicarum Scriptores, t. VIII,
1726, p. 682-683.
75 Pagliai, Sofia, 2011 ; De Saint Victor, 2009 ; Balestracci, 2015 ; Vallerani, 2004.
116 MARION BERTHOLET

nourrit également de la pièce ­d’Alfieri, a pu être réactivée. Mais ­c’est


surtout une dimension poétique qui se retrouve dans les lectures des
mémoires françaises. À Florence, Stendhal – grand lecteur de Sismondi,
bien que le décriant – c­ ontemple le Palazzo Vecchio et observe ce palais,
rude et plein de force, où tant de révolutions se sont déroulées. Dans sa
­contemplation émerveillée de l­ ’illustre bâtiment des temps médiévaux,
il écrit : « Là à cette fenêtre, du côté nord […], fut pendu l­’archevêque
Pazzi, revêtu de ses habits pontificaux76 ». Stendhal ­confond les acteurs
de la ­conjuration, mélangeant le statut des victimes pendues le long des
façades de ­l’édifice. Ce qui importe, pour ­l’écrivain, ­n’est pas tant la
­complexité des acteurs que ­l’énergie et la puissance édifiante, et ­d’une
certaine manière esthétique dans ses excès, que la ­conjuration évoque à
son esprit. La portée politique et libérale est secondaire, seule demeurant
chez lui la poésie des emportements médiévaux.
La ­conjuration des Pazzi a frappé les esprits des ­contemporains ; les
réseaux diplomatiques des pouvoirs italiens et européens ont été secoués
par les ­conséquences de ­l’attentat, mais ­c’est surtout à l­’échelle de la
cité florentine que cet acte a provoqué un profond émoi. ­L’inscription
du Palazzo Davanzati, ­consistant en ces mots : « A dì 26 aprile fu morto
Giuliano d­ e’ Medici in Santa Ma[ria] ­de’ F[io]re77 » griffonnés à la hâte
dans les cuisines, vraisemblablement par un domestique de la maison,
témoigne du coup de tonnerre qui frappa les citoyens à ­l’annonce de la
nouvelle. Cet acte agita Florence de violence et d­ ’émotion, mais il fut
aussi un tournant dans ­l’emprise du pouvoir médicéen. ­L’importance
politique ­qu’il représenta pour la cité du lis explique l­ ’écriture immédiate
extrêmement c­ omplexe qui s­’est développée et qui a tendu à brouiller
les interprétations de la ­conjuration des Pazzi. ­C’est cette ­complexité
­d’acteurs et de motifs qui a été reçue au xviiie siècle de manière plurielle.
­L’échec de la révolution et de la révolte tendait à prouver pour les Lumières
­l’illégitimité ­d’un attentat privé, manipulé par ­l’Église, incapable de
porter les aspirations du peuple. Le retournement de la sédition c­ ontre
les ­conjurés pour appuyer les Médicis est un acte ­d’opinion publique,
­confortant l­ ’image positive que les Lumières ont eue du gouvernement
de cette illustre famille.
76 Stendhal, Rome, Naples et Florence 1826, dans V. del Litto (éd.), Stendhal : Voyages en Italie,
Paris, Gallimard, Pléiade, 1973, p. 483.
77 Cité d­ ’après Frugoni, 2013, p. 218.
LA ­CONJURATION DES PAZZI ET LA RÉVOLTE DES FLORENTINS 117

­L’exaltation du geste des Pazzi intervient plus tardivement. Sismondi


s­’inspire largement des héros alfiériens, tout en les historicisant, pour
associer l­’acte des Pazzi à une portée libérale. Les griefs personnels de
cette famille envers les Médicis deviennent des moteurs secondaires
de leur attentat, puisque leur réel motif est de rendre l­’indépendance
aux institutions florentines. Tout ­l’enjeu de la lecture plus politisée de
Sismondi est de justifier le recours à des « violences de palais », lesquelles
sont associées aux abus princiers de la Renaissance, rompant avec les
violences médiévales marquées par les affrontements de rues entre les
citoyens. L­ ’élaboration d­ ’une théorie du tyrannicide permet de rendre
légitime ­l’action des Pazzi et de les rattacher à la lutte ­contre la servitude
de leurs ­concitoyens. Leur action, guidée par leur jalousie mais aussi
par la volonté de sauver leur patrie, amène Sismondi à fabriquer une
nouvelle clé de lecture. Alors que le xviiie siècle insistait sur la rivalité
personnelle des Pazzi en matière ­commerciale et politique, Sismondi les
rattache au monde patriotique. Ce sont des défenseurs de la « démocra-
tie ». ­L’esprit oligarchique qui anime leur geste est de ce fait secondaire.
Ils agissent moins par rancœur personnelle, ou pour porter les intérêts
­d’une ancienne élite restreinte, que pour servir l­ ’intérêt supérieur de la
liberté florentine. Cependant, les Florentins, pervertis par la domination
des Médicis, ne les appuient pas ; le processus de régénération par la
révolte, qui était opérant lors de ­l’ouverture institutionnelle de Florence,
est désormais bloqué. Le peuple uni n ­ ’est plus un acteur capable de
reprendre sa liberté ; seule la « populace » aveuglée intervient. Leurs
victimes c­ onnaissaient les intérêts supérieurs de leur cité, mais, isolées,
elles ne sont pas parvenues à changer par leur action individuelle ­l’avenir
de la ­communauté. Cette lecture libérale de la ­conjuration des Pazzi
­contribue à c­ omplexifier cet événement, en fabriquant de nouvelles
interprétations. Sismondi lui donne une valeur universelle : tout homme
peut agir et se lever ­contre l­’arbitraire.
Si Sismondi insiste sur la portée du tyrannicide des Pazzi, sa lecture
a ­connu un moindre succès que celle du meurtre du duc Alexandre Ier de
Médicis, en 1537, par son cousin Lorenzo. Face à cet épisode, Sismondi
demeure sceptique. Il évoque un homme solitaire, c­ onspirateur et
intéressé : « on ne lui ­connaissait pas le zèle pour la liberté ­qu’il affecta
ensuite, et qui peut-être ­n’était q­ u’un héroïsme ­d’emprunt78 ». Doutant
78 Sismondi, Histoire des républiques…, t. X, p. 156-157.
118 MARION BERTHOLET

de ­l’intérêt libéral de cette figure ambiguë, ­l’historien ­l’associe plutôt


au monde ­condamnable des traîtrises princières, là où les Pazzi sont
les représentants des valeurs vertueuses des patriotes. Cependant, au
xixe siècle, ­c’est la mémoire de Lorenzo qui triomphe, notamment grâce
au succès de la pièce ­d’Alfred Musset, Lorenzaccio (1834), où il prend les
traits du héros de la liberté dans son ­combat c­ ontre la tyrannie.

Marion Bertholet
Université de Grenoble-Alpes
CLIO, UNE MUSE MINEURE ?
ou ­l’Histoire du soulèvement des Pays-Bas
de Friedrich Schiller1

Si l­ ’on ­considère les pratiques réelles,


on doit admettre ­qu’il ­n’existe ni fiction
pure ni Histoire si rigoureuse q ­ u’elle
­s’abstienne de toute mise en intrigue et de
tout procédé romanesque2.

Clio ne serait-elle q­ u’une muse de second rang face à Calliope, Thalie


et Melpomène ? Ou bien la sororité des Muses est-elle une parenté qui,
au fil du temps, se serait métamorphosée en opposition, voire en affron-
tement ouvert ? Pourrait-on parler alors de petits meurtres en famille ?
­L’objectif de cet article est précisément de présenter la position de Schiller
au niveau de ­l’évolution de la « science » historique en général et du
regard sur les « révoltes » en particulier face à la littérature, si tant est
­qu’il soit possible ­d’en tirer des ­conclusions générales pour ce ­qu’il en
est de la démarcation naissante au crépuscule du xviiie siècle entre les
belles-lettres et l­’histoire3.
Face aux événements des Pays-Bas, l­ ’entreprise schillérienne souligne
dans un premier temps ­l’importance de la « mode » autour de la révolte
et plus précisément du personnage d­ ’Egmont dans les années 1780, et
1 Nous avons opté pour des raisons de simple ­commodité ici pour le titre « traditionnel »
Histoire du soulèvement des Pays-Bas sous Philippe II, même si le titre original, c­ omme nous
le verrons plus loin est en fait plus subtil et ­complexe.
2 Genette, 2004, p. 166.
3 Voir à ce sujet notamment Rancière (1998), qui démontre ­l’émergence de la littérature face
aux belles-lettres dans la première moitié du xixe siècle. Ce mouvement ­d’émancipation
est aussi observable, me semble-t-il, en Allemagne à l­ ’orée du xixe siècle entre les belles-
lettres et ­l’histoire, et Schiller peut être ­considéré ­comme ­l’un des représentants de cette
tendance.
120 ÉRIC LEROY DU CARDONNOY

replace de fait ­l’ouvrage dans un ­contexte historique, mais aussi géné-


rique de réception dans lequel il faut c­ onsidérer les deux traitements de
la question par Goethe et Schiller, l­ ’un par une œuvre dramatique (une
scénographie), ­l’autre par un ouvrage « historique » (utilisant les ­concepts
de République, traditions et liberté(s)). Il ­s’agira donc de montrer ­comment,
à la toute veille de la Révolution française, un auteur, déjà célèbre, reçoit
une révolte étrangère afin de cristalliser dans la figure de protagonistes
« nobles » les revendications ­d’une autre classe – la bourgeoisie – qui
entend réclamer à cet instant dans les pays de langue allemande le partage
du pouvoir, tout en restant respectueuse des traditions.
­L’ouvrage traduit également l­’intérêt de ­l’auteur pour ­l’histoire
­contemporaine, avec la révolution brabançonne (1787-1790), et si ­l’on
en croit Ernst Schulin, Schiller marque une appétence forte pour les
histoires de soulèvements4. Walter Müller-Seidel note pour sa part que
­l’intérêt de Schiller pour l­’histoire porte sur des périodes précises5 où
éclatent des révoltes et des rébellions, c­ omme le révèle son intention,
en 1786, de rédiger son premier essai historique dans un recueil dont
le titre aurait été Geschichte merkwürdiger Rebellionen und Verschwörungen
aus mittleren und neueren Zeiten (Histoire des rébellions et révolutions les plus
remarquables de ­l’époque ancienne et moderne), et qui deviendra finalement
­l’Histoire du soulèvement6 .

MODE OU ESPRIT DU TEMPS ?

En Allemagne, avant la publication par Schiller et Goethe des deux


ouvrages ­consacrés au soulèvement des Pays-Bas, l­ ’historiographie, qui
­s’intéresse à ­l’histoire de ce pays7, révèle un ­contexte favorable et même

4 Schulin, 1995, p. 137-155. ­L’impossibilité de décrire les événements violents de ce soulèvement


est peut-être à ­comprendre c­ omme une impossibilité propre à Schiller à le représenter dans
un texte de prose narrative. Rappelons brièvement les principales productions de Schiller
au cours des années qui précèdent le Soulèvement des Pays-Bas : en 1783 La Conjuration de
Fiesque, en 1784 Cabale et Amour, en 1787 Don Carlos, infant ­d’Espagne.
5 Müller-Seidel, 1990, p. 422-446.
6 Voir à ce sujet notamment Süssmann, 2000, p. 90-92.
7 Notons tout de même que Goethe travaille à son drame depuis 1774-1775.
Clio, une muse mineure ? 121

assez clairement antiespagnol, par ­l’influence évidente de la légende


noire de Philippe II et de l­ ’Espagne qui se développa dans le sillage de
la guerre de Trente Ans, ­comme par exemple Gespräche in dem Reiche
derer Todten (1718-1740) de David Fassmann où apparaît le duc d­ ’Albe
(8e entrevue entre Philippe II et Guillaume d­ ’Orange8 ; 130e, 131e et
132e entrevues9 entre Néron et le duc ­d’Albe où Egmont est présenté
­comme la victime iconique de la terreur espagnole10). Les Entretiens de
Fassmann furent très lus à son époque11 et sont le signe d ­ ’un intérêt
croissant des intellectuels allemands pour les questions politiques
­d’actualité12 débattues dans ces entretiens.
Mais ce sont particulièrement les années 1780-1790 qui prennent
­l’histoire, à la fois récente et plus ancienne, des Pays-Bas c­ omme sujet
­d’étude et de réflexion ; ­l’importance du c­ ontexte politique à ­l’extérieur
et à l­’intérieur des Pays-Bas et du Saint Empire romain Germanique
avec les réformes inspirées des Lumières et menées par Joseph II depuis
son accession au trône impérial en 1780, soulèvent de nombreux pro-
blèmes. La « Joyeuse entrée », censée garantir les droits et ­l’indépendance
des institutions régionales, est battue en brèche par les multiples édits
de l­’empereur qui alimentent un mécontentement grandissant : les
intellectuels allemands s­’intéressent, dans ce ­contexte des Lumières et
­d’une politique ­concrète représentée ­comme issue directement de ce
terreau intellectuel, aux événements c­ ontemporains en les mettant en
parallèle avec des événements du passé – la révolte des Pays-Bas face à
Philippe II par exemple – qui semblent similaires et mettre en jeu les
mêmes revendications, les mêmes forces, les mêmes acteurs, ­d’autant plus
que le souverain régnant, Joseph II, est un descendant de Charles Quint ;
certains parallèles, par exemple entre Joseph II et Philippe II c­ onsidérés
dans un premier temps ­comme de simples héritiers ­d’illustres parents,
Marie-Thérèse pour ­l’un et Charles Quint pour ­l’autre, mettent à ­l’ordre
du jour la question de la nation et du peuple, ­d’autre part les troubles
provoqués par les patriotes bataves dans les Provinces Unies (1780-1787),
les tentatives d­ ’imposer une forme de gouvernement républicaine, la fuite
8 Fassmann, 1719.
9 Fassman, 1731, p. 53-280.
10 Voir Dreyfürst, 2014.
11 Ainsi le numéro de 1719, par exemple, ­consacré à ­l’arrivée de Charles XII de Suède au
royaume des ombres fut vendu j­usqu’en 1737 à 15 000 exemplaires.
12 Voir Hammer & Voss, 1976, p. 386-416, en particulier p. 388-407.
122 ÉRIC LEROY DU CARDONNOY

du stathouder Guillaume V, l­’intervention des troupes prussiennes qui


répriment la fronde attirent l­ ’attention des intellectuels allemands du fait
de la proximité géographique du territoire néerlandais, mais aussi du fait
que le duc Charles-Auguste de Saxe-Weimar participe à la répression en
septembre 178713. Plus généralement, depuis la révolution américaine,
les débats sur les différentes formes de gouvernement et les luttes pour
­l’indépendance sont à ­l’ordre du jour dans les cercles intellectuels européens.
On pourrait presque parler dans ces dix dernières années du xviiie siècle
en Allemagne d­ ’une « mode » historiographique dont sont l­ ’objet les Pays-
Bas en général et le personnage ­d’Egmont en particulier14. Dans ce ­contexte
cinq auteurs, outre Schiller et Goethe, tentèrent ­d’établir un parallèle entre
la situation de 1787 et celle du xvie siècle15 en ­s’inscrivant dans une écriture
de ­l’histoire nationale, qui en est encore à ses premiers balbutiements16.
Les différents auteurs c­ onsidérés, Patrice-François de Neny (1716-1784),
Otto Carl Franz von Eberstein (1758-après 1814), Ludwig Timotheus
Spittler (1752-1810), August Ludwig Schlözer (1735-1809) et Karl
Hammerdörfer (1758-1794), prennent tous une position très critique vis-
à-vis de la politique menée par Philippe II dans les Pays-Bas espagnols
de la seconde moitié du xvie siècle soulignant soit les différences dans
la politique menée entre Philippe II et son père Charles Quint – qui a
mené, selon Patrice-François de Neny17, une politique à l­’écoute de ce
qui se passait, dans le respect des traditions, et doit être en tant que
tel imité, tandis que la politique absolutiste menée par son fils fut un
régime totalement étranger aux mœurs du pays et en tant que telle ne
doit sous aucun prétexte être reproduite – soit la perfidie du duc ­d’Albe
dans sa volonté de se débarrasser d­ ’Egmont et Hoorn18, des accusations
mensongères et des traitements odieux qui leur furent infligés19, soit
13 Le duc accueillit à Weimar, capitale de sa principauté, non seulement Goethe, Wieland,
Schiller mais encore grand nombre ­d’auteurs allemands de ­l’époque tel Herder, et fit
de Iéna un second centre intellectuel sur son territoire : en cela nombre d­ ’intellectuels
voient en lui un représentant des Lumières et de ses idéaux. Voir à ce sujet en particulier
Delinière, 2004, notamment p. 47-182.
14 Voir à ce sujet Rittersma, 2009.
15 En particulier Hammerdörfer, Spittler et von Eberstein, voir infra.
16 Voir à ce sujet notamment Hartog (2003) et son ­concept de « régime d­ ’historicité ».
17 de Neny, 1784.
18 Anonyme (H…e), 1785, p. 101-123.
19 Idem, p. 123 : « Dies war das Ende des Grafen Egmond, den eigentlich Philipps Arglist ins Netz
gezogen hatte, aus dessen Blute aber auch die Freyheit der vereinigten Provinzen entsproß. Denn
nichts würde den niederländischen Adel und auch die anderen Stände so vereinigt und wieder die
Clio, une muse mineure ? 123

en établissant un tableau manichéen du ­conflit entre les Néerlandais et


les Espagnols qui c­ onsidère ­l’émancipation des Pays-Bas ­comme une
sorte de loi naturelle20, bref en dressant un réquisitoire en bonne et
due forme ­contre l­ ’Espagne et son souverain21 dans une réflexion plus
ample sur le pouvoir monarchique autoritaire22 et les revendications de
ses sujets, à ­l’adresse notamment de ­l’empereur Joseph II, en ­n’hésitant
pas à lui rappeler ­qu’un bon gouvernement suppose, outre certaines
innovations nécessaires, le respect des traditions afin de ­conserver
­l’amour de ses sujets23. En effet, c­ omme l­’écrit Karl Hammerdörfer,
­l’histoire des Pays-Bas est « à ­l’heure actuelle le sujet principal autour
duquel tournent toutes les ­conversations dans les grandes ou petites
­compagnies24 » du fait que des troupes prussiennes ont été envoyées aux
Pays-Bas ­contre les soulèvements interprétés par les autorités ­comme
antimonarchiques.
Tel est le ­contexte médiatique dans lequel les deux œuvres les plus
­connues c­ onsacrées à la situation des Pays-Bas lors de la révolte en
1566-1568 apparaissent25.

spanische Tyranney so unversöhnlich erbittert haben, als dieses Beyspiel der empörendsten Tücke
und Grausamkeit. » (« Telle fut la fin du ­comte Egmont que la traîtrise de Philippe avait
attiré dans ses filets et du sang duquel jaillit la liberté des Provinces Unies. Car rien
­d’autre ­n’aurait su souder la noblesse néerlandaise et les autres états ­contre la tyrannie
espagnole ­d’une manière aussi irréconciliable que cet exemple de la perfidie et de la
cruauté le plus éhonté. »)
20 von Eberstein (1787), « Vergebens bietet der mächtige Monarch seine furchtbaren Kräfte auf :
der Staat entsteht ! kann nicht in der Geburt erstickt werden. », p. 17-18.
21 Ibid.
22 Spittler, 1787, p. 714-752.
23 Ibidem, p. 752 : « …, was wir gegen jeden Feind für dich thun würden, für dich, den unser
ganzes Volk liebt. » (« qui feront tout pour toi ­contre tes ennemis, pour toi qui aimes tout
notre peuple. »)
24 Hammerdörfer, 1788, p. 1, « gegenwärtig Hauptgegenstand, um den sich das Gespräch in
grossen und kleinen Gesellschaften drehet ».
25 Il ne s­ ’agit bien entendu ici que d­ ’une esquisse de l­ ’écho médiatique des événements des
Pays-Bas, il faudrait en effet c­ onsidérer toutes les autres manifestations imprimées de
cet intérêt c­ omme les tracts, les feuilles volantes, etc., mais cela dépasserait le cadre de
cet article.
124 ÉRIC LEROY DU CARDONNOY

LA NOTION ­D’HISTOIRE
ET SCHILLER AVANT ­L’HISTOIRE DU SOULÈVEMENT

Avant de poursuivre il c­ onvient de rappeler la particularité de la


« matière historique » dans les pays de langue allemande et l­ ’évolution
de cette discipline au cours du xviiie siècle : dans le dictionnaire de
Zedler26 en 1739 seul le mot « Historie » apparaît c­ omme entrée, mais
pas celui de « Geschichte » (au sens de narration ­d’événements) ; ce der-
nier est très souvent au pluriel et ­continue à avoir ce sens jusque vers la
fin du xviiie siècle, mais sans c­ ontenir le côté réflexif, « subjectif », que
le c­ oncept peut avoir a­ ujourd’hui ; chez Adelung27 une cinquantaine
­d’années plus tard, les deux termes sont présents, et « Geschichte » signifie
non seulement un événement mais aussi l­’enchaînement, la causalité
entre eux et les changements opérés (au sens de 1. ce qui a eu lieu, 2.
narration des événements – équivaut alors à Historie et 3. ­connaissance
des événements28) ; chez Campe29 en 1808 il n­ ’y a plus que le terme de
« Geschichte », qui est devenu le mot ­d’usage en ce ­qu’il a absorbé ­l’autre ;
il porte sur la question du « rapport » (« Zusammenhang ») et ­n’est donc
plus tourné que vers le passé, sur le modèle de la historia magistra vitæ,
mais c­ oncerne désormais le présent et l­’avenir30. ­L’histoire n ­ ’est donc
plus seulement antiquaire, statique et empirique, mais au sens moderne
26 Grosses vollständiges Universal-Lexicon Aller Wissenschafften und Künste, Halle-Leipzig, Verlegts
Johann Heinrich Zedler, 1731-1754, ici, tome 13 (Hi-HZ), 1739, p. 281-286. Il est à noter
tout de même que l­ ’article insiste sur la question du vraisemblable (« Wahrscheinlichkeit »)
et cite ­comme exemple de parfait ­d’historien (« Geschichtsschreiber ») Philippe de Commines
(p. 286) ; cela étant, il utilise également le terme latin de « Historici » pour qualifier les
historiens latins ou grecs, hésitant entre les termes ­d’origine latine et ceux ­d’origine
germanique dans ­l’article « Geschichte ».
27 Adelung, 1774-1786, tome 1.
28 Idem, tome 2, p. 605-606 pour le terme « Geschichte » : « 1) Was geschehen ist, eine geschehene
Sache […]. 2) Die Erzählung solcher Geschichte oder geschehenen Begebenheiten ; die Historie.
[…] 3) Die Kenntniß der geschehenen Begebenheiten, die Geschichtkunde ; ohne Plural. […] » et
p. 1213 (pour le terme « Historie »). À la même page, Adelung précise ­qu’à son époque
le terme « Geschichte » est préféré à celui ­d’« Historie », termes pour lesquels il donne la
même définition.
29 Campe, 1808, p. 328.
30 Voir Brunner, Conze, Koselleck, 1975, p. 593-719. Il ne faut pas oublier que l­ ’histoire en
tant que discipline universitaire ne ­s’impose que dans la deuxième moitié du xviiie siècle
dans les pays de langue allemande. Voir Bödeker, 1986, p. 296.
Clio, une muse mineure ? 125

causale et explicative. Schiller ­s’inscrit ainsi dans un mouvement qui


réfléchit au sens à donner à l­ ’activité historiographique et à ses orienta-
tions, en essayant de se démarquer de l­’histoire universelle.
Entre 1765 et 1785 les écrits historiques de Gibbon, Iselin, Gatterer,
Abt, Schlözer, Lessing, Herder, Adelung et Kant ­connaissent un franc
succès en Allemagne, et le fait que Schiller passe de ­l’écriture de drames
à ­l’écriture de textes historiques ­n’est pas dû q ­ u’à un intérêt personnel
croissant pour ces questions, mais dépend également des lois du marché :
Schiller est en effet un écrivain qui vit de sa plume et qui, pour para-
phraser Pierre Bourdieu, doit pour exister occuper une place visible dans
le champ dans lequel il prétend s­ ’inscrire. Ainsi en août 1786, il annonce
(avec Huber) la publication de plusieurs volumes ­consacrés à une Histoire
des rébellions les plus remarquables de Catilina à la révolution anglaise en
deux volumes de 400 pages, tout en excluant pour raisons de censure les
« révolutions politiques » : Huber ­s’occupera du putsch romain de Rienzi
(1347) et de la c­ onspiration du marquis de Bedmar (1618) tandis que Schiller
­s’occupera du soulèvement de 1567 ­contre le duc ­d’Albe. Mais très vite
il demande un délai, car il est submergé par l­’étude des sources. Malgré
tout, le premier volume des Histoires extraordinaires paraît à ­l’automne
1788 à Leipzig, avec la première partie du soulèvement des Pays-Bas
jusque 1567 – la seconde partie, qui devait ­comprendre la période allant
­jusqu’à la mort de Philippe II, ne verra jamais le jour. En juin et juillet
1788 Schiller avait fait paraître trois courtes ­contributions, et en octobre
un texte ­consacré au duc ­d’Albe, puis une étude sur le gouvernement des
jésuites au Paraguay, cette fois sans se baser sur des sources historiques. On
voit donc que les années 1787-1789 sont des périodes d­ ’intenses activités,
­d’études historiques pour Schiller, qui délaisse ainsi le domaine littéraire.
Les traités historiques de Schiller circulent très rapidement et ren-
contrent un succès non négligeable, de telle sorte q­ u’il est désormais
plus ­connu ­comme historien que ­comme poète, et que par ­l’entremise de
Goethe il obtient une chaire ­d’histoire à ­l’université ­d’Iéna où il donne
son premier cours magistral les 26 et 27 mai 1789, ­consacré à « Ce
que signifie ­l’histoire universelle et pour quelles raisons on ­l’étudie »
et où il explique que les phases d­ ’oppression de la liberté humaine à
cause de liens défavorables entre des ­conditions sociales, économiques
et c­ onfessionnelles ne sont que des étapes de l­’histoire de l­’humanité
vers une organisation cosmopolite qui permettra ­d’asseoir le statut
126 ÉRIC LEROY DU CARDONNOY

autonome du sujet. Il c­ onserve son poste j­ usqu’en 1793. De 1791 à 1793


il rédige une Histoire des troubles français qui ont précédé le gouvernement
­d’Henri IV en s­ ’appuyant sur les mémoires de Sully dans laquelle il dresse
le portrait ­d’un pays ravagé par les ­conflits ­confessionnels et politiques
entre 1562 et 1572. Enfin en 1791-1793 paraît son Histoire de la guerre
de Trente ans. Son avant-dernier ouvrage historique date de mars 1795 et
est c­ onsacré au siège ­d’Anvers par le prince de Parme, qui est une étude
­s’appuyant peu sur les sources historiques. Le dernier sera ­consacré à
une présentation des mémoires du maréchal de Vieilleville publiées en
1797. L­ ’évolution, selon Peter-André Alt31, est claire : Schiller après s­ ’être
intéressé aux personnages de rebelles et de tyrans, a tourné son attention
vers les diplomates et les stratèges qui permettent ­d’organiser un état
stable et non pas de mener une révolution. Cette évolution s­’explique
entre autres bien entendu par le ­contexte international : ­comme beau-
coup ­d’intellectuels allemands, qui ont dans un premier temps regardé
la révolution française avec entrain ou du moins avec sympathie, il se
détourne ­d’elle lorsque la révolution porte la guerre en Europe et que
la Terreur éclate ; dans un second temps l­’histoire, selon lui, doit ­d’un
point de vue téléologique mener ­l’humanité vers une certaine harmonie,
une certaine paix. Comme le rappelle Dorothee Kimmich, harmonie et
ordre sont pour Schiller des c­ onstantes anthropologiques32.

EGMONT : UN HÉROS C
­ ULTE ?

Comme ­l’écrit Rengenier Rittersma, un véritable ­culte à Egmont se


développe au sein du classicisme weimarien – au sens large – au cours
des années 1787-178833, corollaire de l­’intérêt pour l­’histoire des Pays-
Bas mentionné plus haut. En ­l’espace ­d’un peu plus ­d’un an paraissent
coup sur coup plusieurs textes dans lesquels Egmont occupe une place
centrale34 et où il ­s’agit de ­s’interroger sur les formes autocratiques de
31 Alt, 2000, p. 603, Band I.
32 Kimich, 2002, p. 39-40.
33 Rittersma, 2009, p. 202.
34 Cinq textes, dans lesquels Egmont occupe une place centrale. Comme le rappelle
Rittersma (p. 203 et suiv.), on peut observer quatre lieux européens ­s’intéresser à Egmont
Clio, une muse mineure ? 127

gouvernement et également de réfléchir aux idées anti-absolutistes35 :


il ­s’agit de la pièce de Goethe, de la recension de celle-ci par Schiller,
de son texte sur le soulèvement et de son article sur la vie ­d’Egmont36.
Pour Goethe, Egmont représente le héros « humain » incapable de
fourberie, innocent en quelque sorte, mais qui, par une force innée,
« ­comprend » le peuple, sent ce q­ u’il veut et met son rang et son pou-
voir, ou tout du moins le pouvoir ­qu’il croit détenir, la gloire ­qu’il a
acquise au service de son souverain, pour défendre les revendications
populaires. Le drame est centré sur le personnage – ­comme « authentique
Néerlandais » – et son destin et ne ­concerne que la première phase du
­combat pour l­’indépendance j­usqu’à son exécution en 1568. Goethe
fait ­d’Egmont un martyre de la liberté tout en prenant des libertés
avec l­’histoire (épisode de Klärchen par exemple) afin de donner une
dimension allégorique à son personnage, qui symbolise aussi ­l’unité
entre vie privée et vie publique. Egmont se fait le porte-parole de la
diversité des c­ onditions particulières et des traditions locales c­ ontre un
nivellement par la loi autocratique dans la scène avec le duc d­ ’Albe où
il défend les droits des états (Stände) ­contre ­l’absolutisme37. Egmont
est finalement un héros de la liberté, mais tout en étant ­conservateur.
Goethe fait référence aux événements brabançons dans son Voyage en
Italie à la date du 9 juillet 178738, où il voit un parallèle flagrant entre
le peuple aux portes du palais de la régente Marie-Christine et le rôle
de Marguerite de Parme dans son drame. Egmont représenterait, selon
Rittersma, un idéal anthropologique de l­’époque.

à cette époque : Weimar-Iéna, les Pays-Bas autrichiens, Rome et Naples pour des raisons
« anthropologiques » similaires.
35 Pour Egmont voir Borchmeyer, 1987, p. 49-74 et Saviane, 1987, p. 47-71.
36 Le centre névralgique du présent article portant sur Schiller, nous nous ­contenterons
­d’esquisser les grandes lignes c­ oncernant la pièce de Goethe.
37 Cela rappelle les idées développées par Justus Möser dans son essai de 1775 « Der jetzige
Hang zu allgemeinen Gesetzen und Verordnungen ist der gemeinen Freiheit gefährlich »
Patriotische Phantasien, 4 Teile (1774-1786) Teil II. Sämtliche Schriften historisch-kritische
Ausgabe in 14 Bänden (dir. Ludwig Schirmeyer, Werner Kohlschmidt et al.), Oldenburg,
G. Stalling, 1944 Bd. 5, p. 22-27, et qui ont fortement influencé Goethe.
38 J. W. v. Goethe, Italienische Reise, 9. Juli 1787 : « Ich bin fleißig, mein ‘­Egmont’ rückt sehr
vor. Sonderbar ­ist’s, daß sie eben jetzt in Brüssel die Szene spielen, wie ich sie vor zwölf Jahren
aufschrieb, man wird vieles jetzt für Pasquill halten. » Contrairement à Schiller, qui selon
Süssmann utilise le modèle de la tragédie ­comme matrice du soulèvement batave, Goethe
semble ici lui préférer, du fait de la distance temporelle entre la première et la seconde
rédaction, celui de la satire.
128 ÉRIC LEROY DU CARDONNOY

Schiller fait une recension critique de la pièce goethéenne, intitulée


Ueber Egmont, Trauerspiel von Goethe39, où il intègre sa réflexion sur la
pièce dans le cadre plus général d­ ’une réflexion sur la tragédie, à savoir
­qu’il en existe différents types – ­d’actions ou de situations, de passions,
de personnages40 – même si ces types peuvent se mélanger ou être par-
fois difficilement différentiables. L­ ’Egmont de Goethe s­’inscrit dans la
tradition shakespearienne qui met en scène ­l’homme et sa vie dans son
entièreté ; en effet seul le personnage permet ­d’établir des liens et une
logique entre les différents éléments de la pièce qui, sinon, apparaîtrait
totalement décousue41 : il s­ ’agit ici ­d’un moment de réflexion sur l­ ’histoire
et sa c­ onstitution de la part de Schiller. Egmont est intéressant en ce
­qu’il est un personnage aux qualités extra-ordinaires42 : il est certes un
héros dans tous les sens du terme, mais, Schiller le souligne, un héros
du passé43, et en quelque sorte un héros « ordinaire44 ». Goethe ne ­s’en
tient pas à la vérité historique : Egmont en effet était marié et avait des
enfants et n­ ’était pas amoureux de la fille d­ ’un bourgeois ; « ­l’erreur »
historique c­ ommise par Goethe le c­ ontraint à recourir à la ruse de la
­confiance absolue ­qu’Egmont voue à sa bonne étoile45. Son rapport à
la nation et au gouvernement n­ ’est pas traité dramatiquement, mais il
­s’agit d­ ’un héros non seulement d­ ’une époque, mais d­ ’un peuple, d­ ’une
nation précise46.
Le personnage de la duchesse de Parme est quant à elle ennobli47, le
duc ­d’Albe parvient à nous intéresser même s­’il ne peut réchauffer les
39 F. v. Schiller, Allgemeine Literatur-Zeitung, no 227a / 227b, 20. September 1788, p. 769-778.
40 Idem, p. 769 : « […] Handlungen und Situationen, oder sind Leidenschaften oder es sind Charaktere
[…] ».
41 Ibidem, p. 770 : « Die Einheit dieses Stücks liegt also weder in den Situationen, noch in irgend
einer Leidenschaft, sondern sie liegt in dem Menschen. »
42 Ibid., p. 771 : « Diese übergroße Zuversicht, von deren Ungrund wir unterrichtet werden, und
der unglückliche Ausschlag derselben sollen uns Furcht und Mitleiden einflößen oder uns tragisch
rühren – und diese Wirkung wird erreicht. »
43 Ibid., p. 771 : « Egmont ist ein Held, aber auch ganz nur ein flämischer Held, ein Held des
sechzehnten Jahrhunderts ; Patriot, jedoch ohne sich durch das allgemeine Elend in seinen Freuden
stören zu lassen. »
44 Ibid., p. 772 : « Durch seine schöne Humanität, nicht durch Außerordentlichkeit, soll dieser
Charakter uns rühren ; wir sollen ihn lieb gewinnen, nicht über ihn erstaunen. »
45 Ibid., p. 773 : « […] aus einem leichtsinnigen Selbstvertrauen […] ».
46 Ibid., p. 775 : « Wir erkennen darinn den Niederländer, und zwar den Niederländer dieses und
keines anderen Jahrhunderts. »
47 Ibid., p. 776 : « Milder und menschlicher ist doch hier alles und sehr veredelt ist besonders der
Charakter der Herzoginn von Parma. »
Clio, une muse mineure ? 129

cœurs48. Schiller loue la scène entre Egmont et le fils du duc ­d’Albe en


prison49, qui ­n’est que de son fait, et où le fils de son ennemi en vient
à ­l’admirer. Tous les autres personnages sont assez bien dessinés, tel
le prince ­d’Orange ; mais Egmont reste celui dans lequel se reflètent
tous les autres, ce qui explique pourquoi Hoorn n ­ ’apparaît pas dans
la pièce50. Finalement Schiller reproche à Goethe la fin de son drame
qui fait passer la pièce de la tragédie à l­ ’opéra, même si l­ ’on c­ omprend
­l’allégorie de la liberté sous ­l’aspect de Klärchen ­puisqu’il ­s’agit de la
motivation des actions d­ ’Egmont51.
Un an plus tard, Schiller publie « Des Grafen Lamoral von Egmont
Leben und Tod » dans la revue Thalia52 dont le but essentiel est de
présenter la vérité historique sur le personnage du ­comte Egmont53.
Après l­’avoir présenté par sa biographie sans indiquer ses sources pré-
cisément, mais en citant certains textes historiques, c­ omme Strada par
exemple, il tente de montrer le rôle politique ­qu’Egmont a essayé de
jouer, ­l’influence des circonstances, son procès et sa mort ainsi que son
immédiate montée au panthéon des héros nationaux hollandais. ­C’est
donc en historien interprétant des faits ­qu’il travaille, même ­s’il se per-
met de mettre en scène des dialogues entre certains personnages, qui
sont manifestement soit de son invention, soit des réécritures. Le texte
traduit également ­l’impact que le personnage et le moment historique
de la révolte des Pays-Bas ont eu sur Schiller, mais aussi le besoin
­d’expliciter son ouvrage sur la révolte en se c­ oncentrant sur l­’un des
deux personnages qui a marqué le mouvement de révolte, mais aussi
­comme correctif à ­l’image q­ u’en a donnée la pièce de son ami.

48 Ibid., p. 776 : « Die kluge Vorsicht, womit er die Anstalten zu Egmonts Verhaftung trifft, ersetzt
ihm an unsrer Bewunderung, was ihm an unsrem Wohlwollen abgeht. »
49 Ibid., p. 777.
50 Ibid., p. 777.
51 Ibid., p. 778 : « [wir] werden durch einen salto mortale in eine Opernwelt versetzt […] ihm
schien die Idee, Klärchen und die Freyheit, Egmonts beide herrschende Gefühle, in Egmonts Kopf
allegorisch zu verbinden, […] ».
52 « Des Grafen Lamoral von Egmont Leben und Tod » dans Thalia – Zweiter Band, Heft
8 (1789), p. 42–83 (1789) Verlag Georg Joachim Göschen.
53 Idem, p. 42 : « Ein historisches Detail seiner Geschichte, aus glaubwürdigen Quellen geschöpft,
dürfte manchen Leser vielleicht interessieren. »
130 ÉRIC LEROY DU CARDONNOY

HISTOIRE DU SOULÈVEMENT DES PAYS-BAS


SOUS PHILIPPE II ROI D
­ ’ESPAGNE (1788)
OU LES ADAM BATAVES

Schiller utilise plusieurs sources de types différents qui ne devraient,


logiquement, pas être traitées sur le même plan, mais qui, pour le plaisir
de l­ ’argumentation le sont tout de même. Il est en effet clair que le récit
historique, même ­s’il est fondamentalement un texte fictionnel, dont les
fondements sont ou ont été réels et reposent sur des témoignages et des
sources identifiables, ­n’est pas de même nature ­qu’un texte dramatique ou
fictionnel, quoique Gérard Genette, dans le sillage ­d’Hayden White54,
souligne la parenté qui existe entre les deux en ce ­qu’ils tentent tous les
deux de mettre des faits – réels et/ou fictionnels – en un récit cohérent :
[On doit admettre] que les deux régimes [fiction pure et Histoire rigoureuse]
ne sont donc pas aussi éloignés ­l’un de ­l’autre, ni, chacun de son côté, aussi
homogènes ­qu’on peut le supposer à distance, et ­qu’il pourrait bien y avoir
davantage de différences narratologiques, par exemple (­comme le montre
Hamburger) entre un roman classique et un roman moderne ­qu’entre celui-ci
et un reportage un peu déluré55.

Mais leur but reste différent : ­l’un (fictum) en créant une mise en
récit ­d’événements, réels ou non, se donne pour objectif de représenter
des possibles, et vise aussi au plaisir esthétique et à la distraction tan-
dis que l­’autre (factum) tente d­ ’expliciter, de faire c­ omprendre des faits
qui ont eu lieu, de trouver les « raisons » de leur enchaînement afin de
permettre à ­l’homme de ­s’orienter dans le temps, qui lui est soit anté-
rieur soit c­ ontemporain, afin également ­d’envisager d ­ ’autres options
pour ­l’avenir – une tâche pédagogique et politique donc. Mais tous
les deux, en tant que discours, sont quoi q­ u’il en soit des narrations,

54 White (1973) montre notamment de quelle manière les structures narratives sont déter-
minantes pour la c­ onstitution de la c­ onnaissance historique (ou du savoir historique) en
ce que la différence entre texte fictionnel et texte historique disparaît. Il ne s­’agit pas
de nier ­l’importance des sources, mais de montrer que les liens établis entre les sources
ne se font pas selon un modèle positiviste, mais sont déterminés par un principe de
­construction issu des structures narratives nécessaires à l­ ’écriture de ­l’histoire.
55 Genette, 2004.
Clio, une muse mineure ? 131

effectivement des mises en discours. Ce ­n’est donc pas tant sur le quoi
que sur le ­comment que la différence peut se faire entre ces deux modes
de représentation. Or, Schiller dans son traité tente ­d’utiliser ­l’art pour
expliciter ­l’histoire.
Mais tout ­d’abord il c­ onvient de ­s’arrêter sur le titre de ­l’ouvrage : en
effet, même si le texte historiographique de Schiller traite de la rébellion,
du soulèvement des Néerlandais c­ ontre l­’Espagne, il est intéressant de
­s’attacher à la formulation exacte ­qu’il a choisie. Tout d­ ’abord il ne ­s’agit
pas ­d’une révolte ou ­d’une rébellion, encore moins ­d’un soulèvement.
« Abfall » est en effet le terme utilisé dans la Bible pour qualifier la
situation ­d’Adam après avoir ­commis le péché originel (« der Abfall
Adams von Gott »), à savoir une apostasie, dont les ­connotations sont
loin ­d’être simplement politiques, et dans le cas présent bien entendu
sécularisées : les Néerlandais sont pour Schiller des Adams modernes.
Malgré le sujet, Schiller parle peu de « Aufstand56 », « Aufruhr » ou
« Erhebung » (tous des synonymes de « soulèvement »), mais beaucoup
de « Rebellion57 ». Avec le terme « Abfall », il ne s­ ’agit par c­ onséquent pas
tant d­ ’un mouvement vers le haut que vers le bas, de mutations dans
­l’évolution de ­l’humanité qui sont pour lui le signe de la liberté. À
­l’instar de l­’épisode biblique, il y a passage de l­’innocence à la faute,
rupture avec le père (Philippe II en ­l’occurrence). En 1790 dans son
cours magistral à Iéna « Etwas über die erste Menschengesellschaft nach dem
Leitfaden der mosaischen Urkunde », il écrit :
Si donc nous transformons cette voix de Dieu dans ­l’Éden, qui lui interdit
­l’arbre de la ­connaissance, en une voix de son instinct qui le retenait loin
de cet arbre, cette désobéissance prétendue à cet ordre de Dieu n­ ’est autre
chose ­qu’un acte de défection envers l­ ’instinct, par c­ onséquent une première
manifestation de son activité propre, un premier essai risqué par sa raison, un
premier c­ ommencement de son existence morale. Cette défection de ­l’homme
envers ­l’instinct, qui porta, il est vrai, le mal moral dans la création, mais
seulement pour y rendre possible le bien moral, est incontestablement le plus

56 Le mot apparaît 10 fois dans l­’ensemble du texte et « Erhebung » une seule fois, tandis
que « Aufruhr » est employé 19 fois et « Unruhen » 14 fois.
57 Le mot « Rebellion » apparaît dans le sous-titre de l­ ’ouvrage, puis 51 fois dans l­ ’ensemble
du texte, or la rébellion est une révolte c­ ontre l­ ’ordre établi, c­ ’est-à-dire exactement ce q­ u’a
fait Adam. « Revolution » quant à lui est utilisé trois fois dans l­ ’introduction uniquement
afin de faire référence aux événements qui suivront ceux dont il traite présentement.
Quant au mot « Abfall », il ne se trouve que 6 occurrences dans l­’ensemble du texte,
toujours en relation avec Egmont, Brederode ou le Conseil ­d’État.
132 ÉRIC LEROY DU CARDONNOY

heureux et le plus grand événement de ­l’histoire de ­l’homme : ­c’est de ce


moment que date sa liberté, ­c’est alors que fut posée, pour un lointain avenir,
la première pierre fondamentale de sa moralité. […] car l­ ’homme, de créature
innocente, devint créature coupable ; d­ ’élève parfait de la nature, être moral
imparfait ; ­d’instrument utile, artiste malheureux58.

Même si le texte dont est extrait ce passage est de deux ans postérieur
au texte sur les Pays-Bas, il ­n’en reste pas moins, selon Peter-André
Alt, ­qu’il explicite la ­conception de ­l’histoire de Schiller au moment de
la rédaction de son premier ouvrage historique. Pour Schiller en effet,
le fait ­qu’Adam ait mangé le fruit de ­l’arbre de la ­connaissance est à
interpréter anthropologiquement, historiquement et philosophiquement
­comme un geste fondateur, c­ omme le passage d­ ’un état et d­ ’un être de
nature à un état et un être de ­culture, et par ­conséquent moral. Dans
ce même acte, il identifie la défection ­d’Adam à une libération, la nais-
sance de son malheur mais aussi de sa liberté ; en tant que « première
manifestation de son activité propre », cette défection est par ­conséquent
le passage de l­ ’homme à l­ ’autonomie, au fait q­ u’il prenne, quelles q­ u’en
soient les ­conséquences, son destin en main. Et ­c’est précisément ce qui
se passe dans le texte de 1788 : les Néerlandais font défection envers le
roi ­d’Espagne, représentant de Dieu sur terre, qui est aussi le moment
de leur libération du joug hispanique. D ­ ’un point de vue moral, il s­ ’agit
aussi du passage de la monarchie tyrannique, voire du despotisme royal,
à la république parlementaire bourgeoise, de la prise de responsabilité
personnelle par le remplacement du catholicisme par le calvinisme.
­D’un autre côté l­’opposition mentionnée dans le titre met face à
face une réalité étatique au pluriel (« die vereinigten Niederlande ») et une
58 Friedrich Schiller, « Etwas über die erste Menschengesellschaft nach dem Leitfaden
der mosaischen Urkunde », Schillers Werke, Historische Schriften. Erster Teil. Hrsg. von
Karl-Heinz Hahn, Weimar, Böhlau, 1970, Bd. 17, p. 399-400 : « Wenn wir also jene
Stimme Gottes in Eden, die ihm den Baum der Erkenntniß verbot, in eine Stimme seines Instinkts
verwandeln, der ihn von diesem Baume zurückzog. so ist sein vermeintlicher Ungehorsam gegen
jenes göttliche Gebot nichts anders, als – ein Abfall von seinem Instinkte – also erste Aeußerung
seiner Selbstthätigkeit, erstes Wagestück seiner Vernunft, erster Anfang seines moralischen Daseins.
Dieser Abfall des Menschen vom Instinkte, der das moralische Uebel zwar in die Schöpfung
brachte, aber nur um das moralische Gute darin möglich zu machen, ist ohne Widerspruch die
glücklichste und größte Begebenheit in der Menschengeschichte ; von diesem Augenblick her schreibt
sich seine Freiheit, hier wurde zu seiner Moralität der erste entfernte Grundstein geleget. […]
denn der Mensch wurde aus einem unschuldigen Geschöpf ein schuldiges, aus einem vollkommenen
Zögling der Natur ein unvollkommenes moralisches Wesen, aus einem glücklichen Instrumente ein
unglücklicher Künstler. »
Clio, une muse mineure ? 133

réalité politique au singulier, un organe gouvernemental (« die spanische


Regierung ») ; l­’antagonisme se situe par ­conséquent entre un peuple et
un gouvernement, non pas entre deux états ou deux peuples ; Schiller
donne à entendre que les Pays-Bas se trouvent dans une situation de
soumission indigne et ­qu’ils vont gagner leur indépendance, même si de
la sorte ils se rendent coupables de lèse-majesté, mais font un premier
pas vers la liberté et ­l’autonomie. Il y va également de ­l’opposition entre
la pluralité que représente la « République » néerlandaise au sens de res
publica à ­l’unicité du gouvernement qui est incarnée par la tyrannie du
duc d­ ’Albe ­d’une part et Philippe II de ­l’autre, un pays ­contre un homme.

HISTOIRE ET DRAME

Dans la préface, Schiller rappelle la raison de son intérêt pour le


sujet – enthousiasme à la lecture de ­l’œuvre de Watson – la posi-
tion q ­ u’il a adoptée ­consistant à ­combler des vides59, surmonter des
­contradictions et rétablir des liens de causalité manquant. Cherchant à
prévenir ­d’éventuelles objections, il affirme suivre le rythme de ­l’histoire
afin ­d’initier le lecteur aux causes profondes et aux personnages impor-
tants tout en regrettant de ­n’avoir pas pu étudier « tous les détails dans
les sources primitives et dans les documens [sic !] ­contemporains ».
Mais surtout il recourt à la métaphore théâtrale (« Staatsaktionen »,
« Schauplatz », « handelnde Personen », « Handlung ») pour parler du travail
de ­l’écrivain-historien, avant de c­ onclure :

59 Friedrich Schiller, Geschichte des Abfalls der vereinigten Niederlande von der Spanischen
Regierung, Erster Theil enthaltend die Geschichte der Rebellionen bis zur Utrechtischen Verdindung,
Leipzig, Siegfried Lebrecht Crusius, 1788 : « weite leere Strecken, die ich ausfüllen, anscheinende
Widersprüche, die ich heben, isolirte Facta, die ich an die übrigen anknüpfen musste. » p. 2 /
Friedrich Schiller Histoire du soulèvement des Pays-Bas sous Philippe II, roi ­d’Espagne (traduc-
tion Mis de Châteaugiron), Paris, A. Sautelet et Cie, 1827, p. 1 : « Une c­ onnaissance plus
approfondie de mon sujet me fit bientôt apercevoir des vides auxquels je ne m ­ ’étais pas
attendu, des vastes lacunes à remplir, des c­ ontradictions apparentes à faire disparaître,
des faits isolés à rattacher aux autres faits. » Nous avons opté pour la traduction de
Châteaugiron, car elle est plus ­complète et exacte que celle de Cloët qui date de 1821,
même si toutes les deux suivent l­ ’édition de 1801. Châteaugiron indique en note de bas
de page les modifications apportées par Schiller dans cette édition.
134 ÉRIC LEROY DU CARDONNOY

Mon but, en publiant cet essai, sera entièrement rempli ­s’il peut ­convaincre
une partie du public, instruit de la possibilité d­ ’écrire les faits historiques
avec fidélité, sans lasser la patience du lecteur ; ­s’il force ­l’autre à reconnaître
que ­l’Histoire peut emprunter quelque chose à ­l’art dramatique, sans perdre
son caractère60.

La traduction française escamote à ce sujet le point important de


l­’opposition établie entre ­d’un côté ­l’histoire ­comme théâtre à tous les
sens du terme et la fiction théâtrale de l­’autre. Pour Schiller l­’histoire
et l­ ’historiographie sont envisagées sous l­ ’angle dramatique en ce q­ u’il
tente ainsi de dépasser la ­conception aristotélicienne selon laquelle his-
toire et tragédie, puisque c­ ’est la seule forme théâtrale analysée par le
philosophe de ­l’Antiquité, sont très proches, mais ­s’opposent au niveau
de l­’action ; l­’histoire, selon lui, raconte ce qui est arrivé tandis que
la tragédie en présentant ce qui peut ou pourrait arriver toucherait à
­l’universel et serait plus philosophique que l­ ’histoire. Or, Schiller essaie
précisément de réconcilier ces deux perspectives, histoire et théâtre,
­comme ­d’ailleurs Germaine de Staël ­l’avait très bien analysé dans son
ouvrage De ­l’Allemagne :
Schiller est à la tête des historiens philosophiques, ­c’est-à-dire de ceux qui
­considèrent les faits ­comme des raisonnements à ­l’appui de leurs opinions.
La révolution des Pays-Bas se lit ­comme un plaidoyer plein ­d’intérêt et de
chaleur. […] Schiller en a fait l­ ’histoire avec un sentiment de patriotisme et
­d’amour pour les lumières et pour la liberté, qui honore tout à la fois son
âme et son génie ; […]
­L’histoire de Schiller a été écrite dans cette époque du dix-huitième siècle
où l­ ’on faisait de tout des armes, […]. Mais quand le but q­ u’on se propose est
la tolérance et la liberté, et que ­l’on y tend par des moyens et des sentiments
aussi nobles que ceux de Schiller, on ­compose toujours un bel ouvrage, quand
même on pourrait désirer, dans la part accordée aux faits et aux réflexions,
quelque chose de plus ou de moins étendu.
Par un ­contraste singulier, ­c’est Schiller, le grand auteur dramatique, qui
a mis peut-être trop de philosophie, et par ­conséquent trop d­ ’idées générales
dans ses récits […]61.

60 « Meine Absicht bei diesem Versuche ist mehr als erreicht, wenn er einen Theil des lesenden
Publikums von der Möglichkeit überführt, daß eine Geschichte historisch treu geschrieben sein kann,
ohne darum eine Geduldprobe für den Leser zu sein, und wenn er einem andern das Geständniß
abgewinnt, daß die Geschichte von einer verwandten Kunst etwas borgen kann, ohne deßwegen
nothwendig zum Roman zu werden. » p. 6 / p. 5.
61 de Staël, 1813-1814, p. 344-346, « des historiens allemands et J. de Müller en particulier ».
Clio, une muse mineure ? 135

­L’objectif de Schiller est par c­ onséquent d­ ’utiliser les ressources de l­ ’art


dramatique pour les mettre au service de l­ ’histoire, ­d’organiser dramati-
quement le moment historique ­qu’il présente afin ­d’en faire ressortir son
universalité tout en soulignant le caractère exemplaire de ­l’événement pour
­l’histoire de ­l’humanité, envisagée ­comme une histoire du progrès de la
civilisation. ­C’est ce q­ u’il rappelle p­ resqu’aussitôt dans l­’introduction où
il mentionne « ­l’amour de la liberté, gravé dans le cœur des hommes »
­comme ­l’un des movens de ­l’histoire. Le soulèvement est aussi un « beau
monument de la force nationale » ainsi ­qu’« un exemple nouveau et irré-
cusable de ce que peuvent tenter et exécuter des hommes réunis pour la
cause de la liberté62 ». Rappelant la différence entre ­l’époque moderne et
­l’Antiquité, avide de faits héroïques et c­ onstitués d­ ’hommes exceptionnels
(à la différence de son époque ­d’une « civilisation efféminée ») il se lance
dans une psychologie des peuples (« le plus pacifique de l­’Europe, moins
capable que ses voisins ­d’acquérir cet esprit ­d’héroïsme qui donne un
caractère élevé aux actions même ordinaires de la vie. ») pour souligner
le paradoxe de cette histoire qui en fait sa valeur exemplaire, même si
intervient le hasard ­comme facteur de détermination historique, une
marge de liberté ­qu’il nomme Providence quelques lignes plus bas et
qualifie d­ ’« empire des circonstances » et de « main invisible du destin63 ».
Tout au long de ­l’introduction, Schiller dramatise son propos par une
technique particulière, par un changement de temps dans sa narration,
le passage du passé-simple au présent de ­l’indicatif, par exemple p. 12,
14 et 15 : « on y voit Philippe II » ; « Guillaume-le-Taciturne se dévoue,
­comme un second Brutus, au grand œuvre de la liberté » ; « La main
­d’un meurtrier arrache le pilote du gouvernail ; le sort de la nouvelle
république paraît décidé, et toutes ses espérances ­s’évanouissent avec
Guillaume ­d’Orange ; mais le vaisseau poursuit sa route au milieu de la
tempête, et les voiles enflées ne réclament plus les secours des rameurs.
[…] La liberté lutte opiniâtrement ­contre le despotisme » et « Le sang du
vainqueur se ­confond avec celui du vaincu, tandis que la Hollande attire
à elle ­l’industrie fugitive, et ­qu’elle fonde sur la ruine de ses voisins le
pompeux édifice de sa grandeur. » Ces c­ onsidérations à valeur générale
donnent au ­combat des Bataves une valeur axiomatique qui peut servir
à ­l’analyse du temps présent et à venir.
62 Schiller, Geschichte des Abfalls…, p. 8.
63 Idem, p. 9 et 27.
136 ÉRIC LEROY DU CARDONNOY

Dans ­l’organisation interne du corps du texte, Schiller suit les règles


de l­ ’historiographie en s­ ’intéressant dans le premier chapitre à l­ ’histoire
qui a précédé ­l’insurrection à partir de 1522 (instauration de ­l’Inquisition)
­comme cadre partiellement explicatif, puis en traitant le c­ onflit de
Charles Quint avec les Hollandais pour terminer par la succession de
Charles et la prise de pouvoir de Philippe II aux Pays-Bas. La seconde
partie analyse les causes des troubles provoqués par la politique menée
par Marguerite de Parme en c­ onsidérant plus particulièrement les événe-
ments de 1558 à 1565 j­ usqu’à la création de l­ ’alliance des Gueux – tant
économique que politique. La dernière partie est c­ onsacrée à la part
prise par la noblesse dans cette révolte, la démission du prince d­ ’Orange
­comme gouverneur provincial, l­’arrivée du duc d­ ’Albe et l­’abdication
de Marguerite de Parme. Mais en même temps, il utilise les ressources
de ­l’art dramatique pour ­conférer un mouvement à son texte qui corres-
pond aux quatre premiers actes ­d’une pièce de théâtre64 : la préface et
­l’introduction peuvent correspondre à un prologue dans lequel l­ ’auteur
expose sa démarche et son intention ; les chapitres 1 à 3 du premier livre
jouent le rôle ­d’un premier acte, à savoir une exposition dans laquelle
est présentée l­ ’histoire antérieure et le cadre du récit ; les chapitres 6 et
7 du livre I et les chapitres 1 à 4 du livre II font office de second acte
­comme moment ascendant faisant progresser le c­ onflit dramatique en
présentant les différents acteurs de l­ ’action ; les chapitres 1 à 3 du livre III
­constituent le troisième acte c­ omme point c­ ulminant et retournement
de ­l’action à partir du moment où la noblesse, les Gueux ainsi que les
prédicateurs prennent fait et cause c­ ontre le roi, tandis que les chapitres 1
à 6 du livre IV forment une nouvelle progression du récit accompagnée de
moments de retardement avec la guerre civile, la dissolution des Gueux,
­l’arrivée du duc ­d’Albe et le départ de la duchesse de Parme, gouvernante
des Pays-Bas. Le cinquième acte dans lequel a lieu la catastrophe ainsi
que la résolution du ­conflit initial aurait dû logiquement ­constituer la
seconde partie. L­ ’on sait que le texte est annoncé c­ omme la première
partie, et que la seconde, qui aurait dû couvrir ­l’insurrection elle-même
et ses résultats, ­n’a jamais vu le jour. Même si la plupart des critiques
attribue ce fait à des raisons externes au projet, il me semble au ­contraire
64 Pour plus de clarté et de facilité, nous utiliserons la seconde édition de l­ ’ouvrage (1801)
que Schiller organise en quatre livres et chapitres, même si les livres ne correspondent
pas aux actes ­d’une pièce de théâtre.
Clio, une muse mineure ? 137

­ u’il y va également de raisons internes, en ce sens que Schiller ­s’est


q
aperçu, peut-être précisément pour des raisons dans un premier temps
extérieures à son dessein, que l­’association histoire-théâtre ne pouvait
être raisonnablement menée à bien65.
Schiller entendait décrire les causes sociales, économiques, politiques
et c­ onfessionnelles des événements – il ne s­’agit plus d ­ ’une histoire
« métaphysique » – et expliquer les affrontements entre ­l’Espagne et les
Pays-Bas sans renoncer à décrire les personnages importants qui ont pris
part au c­ onflit, ce qui explique les deux faces du travail : d­ ’un côté un
travail de recherche des faits parmi ses sources et de l­ ’autre une démarche
psychologisante pour c­ omprendre les motivations des hommes sans
pour autant faire, ­comme ce sera le cas pour les historiens allemands du
xixe siècle (Hegel, Ranke), de ceux-ci des héros. Les personnages jouent
le rôle de « médiateurs » pour le lecteur afin que celui-ci ­comprenne
mieux les événements historiques et leur déroulement. Ainsi on pourra
remarquer que le « je », prépondérant dans la préface et ­l’introduction,
disparaît peu à peu du corps du texte pour devenir un « nous », traduisant
le passage d­ ’un narrateur individualisé à un c­ ommun dénominateur,
celui de ­l’historien (identifiable) à ­l’homme (identique aux autres, et
peut-être spectateur plutôt ­qu’acteur).
Comme le montrent très bien Thomas Prüfer et Stephan Jäger66,
Schiller espérait ­qu’en reliant histoire et art il serait possible de mener
­l’homme sur le chemin de ­l’humanité, autrement dit ce que fait
Schiller est d­ ’un côté une œuvre d­ ’historien au sens de celui qui raconte
­l’enchaînement d­ ’événements et leurs c­ onséquences, de l­ ’autre il ­s’agit
aussi ­d’un ouvrage réflexif dont la théorie est immédiatement mise en
pratique, en ce sens que Schiller réfléchit sur ce ­qu’est la matière histo-
rique et ­comment il faut la c­ oncevoir, il ­s’agit donc aussi ­d’un ouvrage
programmatique selon lequel l­’histoire est c­ onçue c­ omme vade mecum
­d’une histoire générale du progrès humain.

65 Voir Jäger, 2003, p. 95-114, ici notamment à propos de la polémique avec Fichte en 1795,
p. 97. ­L’argumentation est reprise par ­l’auteur dans Jäger, 2011, p. 181-262.
66 Prüfer, 2012, p. 123-241 et Jäger, 2011, p. 289 en particulier.
138 ÉRIC LEROY DU CARDONNOY

CONCLUSION

Dans le ­contexte, relativement bref chronologiquement, où Schiller


s­ ’est ­consacré à la discipline historique (1788-1790), ­L’histoire du soulèvement
est une réflexion sur la liberté et le despotisme67. ­D’ailleurs la dernière
phrase du premier chapitre du texte est à cet égard hautement révélatrice :
en effet Schiller y fait naître l­’imprimerie dans la ville ­d’Haarlem et
non à Mayence, ce qui, soit dit en passant, pousse le traducteur français
Hippolyte de Châteaugiron68 (1774-1848) en 1827 à rédiger une note
qui prend plus de la moitié de la page parce que Schiller ôterait à son
­compatriote Gutenberg l­’origine de cette technique ! Quoi q ­ u’il en
soit, si Schiller le fait, ­c’est tout simplement parce ­qu’elle a une valeur
symbolique et pratique de la plus haute importance : elle donne nais-
sance au medium qui permet la liberté d­ ’opinion en créant justement
­l’opinion publique, première manifestation c­ oncrète de la lutte pour la
liberté ­contre l­’oppression du pouvoir tyrannique.
Le texte de Schiller ­n’est pas terminé c­ omme nous l­’avons indiqué,
pour plusieurs raisons, mais peut-être aussi parce ­qu’il découvre dans
­l’attaque foncièrement destructrice des iconoclastes une face du peuple
ou plutôt de la populace qui l­ ’effraie, et q­ u’il retrouve en quelque sorte
dans les événements français quelques années plus tard (­d’où sa très
grande distance vis-à-vis de ce qui se passe à Paris et dans le reste du
pays), et qui réduit à néant la vision de ­l’histoire ­qu’il entendait propo-
ser et qui est ­contraire à ­l’esthétique et à ­l’harmonie ­qu’elle est censée
instaurer. Il y va ­d’une nouvelle ­conscience pour ­l’histoire allemande
pour laquelle la subjectivité est incontournable et permet ainsi une mise
en perspective par l­’historiographie69. Pour Schiller ­l’esthétisation de
­l’histoire est nécessaire, car la ­connaissance scientifique et le Beau ou
67 Voir ­l’actualité indirecte du Tacitisme par ­l’intermédiaire de ses lectures des sources
hollandaises, mais aussi par quelques-uns des enseignants à la Hohe Karlsschule à
Stuttgart.
68 René-Charles-Hippolyte Le PrestreLézonnetChâteaugiron (1774-1848) est, selon la notice
­d’autorité de la bibliothèque nationale de France un littérateur. – Co-fondateur de la
Société des bibliophiles français. – Membre du Conseil général de la Seine (arrondissement
de Sceaux, 1826-1840). – Pair de France. – Premier secrétaire ­d’ambassade à Berlin et à
Saint-Pétersbourg.
69 Fulda, 1996, p. 232.
Clio, une muse mineure ? 139

l­’art ont des affinités structurelles70 et ne peuvent jamais être totale-


ment séparés ­l’un de ­l’autre, ce qui ­confèrerait à ­l’histoire son caractère
éducatif. Schiller utilise par c­ onséquent le soulèvement des Pays-Bas
­comme une leçon pour le temps présent et à venir, ce qui se traduit
par une oscillation c­ onstante entre une objectivité dans la description
des faits et une prise de position critique vis-à-vis de ­l’Espagne et de
sa politique « tyrannique » et « despotique » au xvie siècle dans une
perspective téléologique.
Le travail effectué par Schiller est certes une « seconde » mise en
mémoire de mémoires de la révolte ; les sources q­ u’il utilise ne sont pas
uniquement des sources de première main, mais également des prises
de position politiques suivant le camp dans lequel leurs auteurs se
trouvent ou selon le point de vue ­qu’ils entendent défendre suivant leur
­confession. En ce sens, il utilise donc des textes qui, pour les historiens
­d’­aujourd’hui, ­n’ont peut-être pas la noble valeur de « sources », et qui
à leur manière, et Schiller en est tout à fait c­ onscient et le reconnaît, ne
sont pas des sources primaires, mais permettent de donner un sens à
un moment historique particulier dans le ­contexte plus général ­qu’est
­l’histoire de ­l’humanité.
Enfin ­comme le montre très clairement Stephan Jaeger, Schiller est
à un tournant pour ce qui est de ­l’historiographie, entre ­l’histoire uni-
verselle des Lumières et ­l’histoire qui deviendra nationale au xixe siècle ;
son texte est ainsi la trace ­d’une mise en forme possible de ­l’histoire qui,
du fait des circonstances politiques et philosophiques surtout, ­n’a pas eu
de suite, mais ­constitue un maillon dans ­l’évolution de ­l’historiographie
en Europe. Même si ­l’individu est libre, il ­n’en reste pas moins pour
Schiller que ­l’essence de ­l’histoire est la nécessité, et par ­conséquent la
dialectique de ­l’histoire qui est en jeu donnera toujours la victoire à
­l’humanité sur ­l’individu – ce que Hegel pensera également quelques
années plus tard dans ses Leçons sur la philosophie de ­l’histoire (1822-1830).

Éric Leroy du Cardonnoy


Normandie Univ., UNICAEN

70 Idem, p. 233.
DEUXIÈME PARTIE

MÉMOIRES PUBLIQUES,
MÉMOIRES PRIVÉES

LES ARCHIVES FAMILIALES


DE LA RÉVOLTE
MÉMOIRE DE LA RÉVOLTE
ET MÉMOIRES DE FAMILLE
La crudel zobia grassa (1511)
dans les livres de famille du xvie siècle :
Brève histoire des manuscrits et des éditions

27 FÉVRIER 1511, JEUDI GRAS


Les faits, la mémoire et l­’interprétation
­d’une révolte

Le 27 février 1511, dernier jeudi de Carnaval, appelé « jeudi gras » (la


zobia grassa), une révolte sanglante éclate à Udine, chef-lieu du Frioul, la
partie la plus orientale de la République de Venise. Quelques milliers de
paysans formant les milices rurales font leur entrée en ville avec Antonio
Savorgnan, représentant de la famille la plus riche et la plus puissante
de la région, à la tête de la faction noble Zamberlana – celle qui, au
début du xve siècle, avait secondé et soutenu Venise dans ­l’extension
de son domaine sur ces terres. Les paysans sont armés puisque sur leurs
têtes plane une menace ­constante : la guerre qui en ces années oppose la
République de Venise à la Ligue de Cambrai. Ces paysans s­ ’unissent aux
habitants ­d’Udine et attaquent les nobles jusque dans leurs palais ; ils
tuent les représentants des familles les plus illustres affiliées au parti des
Strumieri, adversaires des Savorgnan, ils mettent le feu à leurs maisons,
se livrent à des pillages et à des massacres et ­s’acharnent sur les corps
des ennemis q­ u’ils traînent dans les rues de la ville, mutilés, jetés en
pâture aux ­chiens, dans une atmosphère de folie collective.
Aucune opération de médiation entre les factions de la part de la
plus haute autorité vénitienne de la région (le Lieutenant) ne parvient
à apaiser le tumulte dans la ville. Cette violence, augmentant encore
144 LAURA CASELLA

dans les jours qui suivent, atteindra les territoires riverains et apportera
destruction et mort dans beaucoup de châteaux où ­l’ancienne noblesse
féodale et philo-Habsbourg – Colloredo, Della Torre, Strassoldo, ennemie
de Savorgnan – croyait avoir trouvé un abri.
­L’épisode décrit brièvement ici est une des révoltes les plus sanglantes
et probablement une des plus importantes de l­ ’Italie de la Renaissance.
Il s­’agit d­ ’une affaire c­ omplexe marquant le point c­ ulminant de ten-
sions sociales et de ­conflits politiques de longue durée, exaspérés par
une difficile c­ onjoncture économique et politico-militaire, celle de la
guerre de Cambrai.
Un grand nombre ­d’intérêts et ­d’acteurs ­s’affrontent au moment
de la révolte : des paysans qui ­s’opposent aux seigneurs féodaux après
des années de guerres, de privations, d­ ’impôts et d­ ’abus de pouvoir
grandissants ; des nobles de deux factions qui se déchirent depuis des
siècles et qui apportent dans la politique d­ ’un territoire de frontière
­l’écho de leurs relations avec des puissances étrangères, d­ ’un côté la
République de Venise, de ­l’autre les Habsbourg. La révolte représente
­l’apogée ­d’une situation de désordres et de ­conflits dans la partie
de ­l’État vénitien la moins assimilée à Venise. Après un siècle de
domination vénitienne prudente ­commencée en 1420, les équilibres
politiques ont bel et bien sauté et la relation ­d’intérêt réciproque qui
jusque là résultait de la nécessité où était Venise de gouverner un
territoire de frontière, ­d’un côté, et de la suprématie des Savorgnan
sur ce territoire, de l­’autre, en vient à se rompre. Après le massacre,
sans la protection de Venise, Antonio Savorgnan trahit et cherche
refuge sur le territoire impérial, mais ses adversaires le repèrent et se
vengent, le mettant à mort.
Les ­conséquences de la révolte obligent la République de Venise à
apporter un changement profond dans le système administratif vénitien
au Frioul : elle entame ainsi une centralisation des formes de gouverne-
ment, en luttant ­d’une manière plus ferme ­contre le recours à la violence
privée, en limitant les privilèges de nature judiciaire des seigneurs féo-
daux, en mettant en place des voies institutionnelles directes de sorte
que les paysans aient des représentants. Dans la capitale au ­contraire,
la réforme introduit une nette division entre la noblesse et le peuple, à
­l’avantage de la première, dans la ­composition du Conseil, et ­l’abolition de
­l’assemblée du peuple, l­ ’Arengo : changements profonds qui restreignent
Mémoire de la révolte et mémoires de famille 145

non seulement la participation populaire au gouvernement mais aussi


la puissance clientélaire des Savorgnan1.
Le Frioul du début du xvie siècle a longtemps représenté un excellent
exemple d ­ ’anti-Renaissance, un territoire aux marges, aussi bien du
point de vue géographique q ­ u’historique. Si, ­jusqu’aux années 1980,
les études, et notamment celles qui visaient à établir la « modernité »
de l­’État, exprimaient la c­ onviction que la révolte de 1511 s­’était
produite de telle manière et avec une telle puissance du fait que la
société frioulane avait une structure féodale et antimoderne, ­qu’elle
vivait dans ­l’anomie, dans ­l’absence de règles, de loi et ­d’ordre, à par-
tir des années 1990 cette vision a été corrigée grâce à des recherches
historiques qui ont surmonté une c­ onception juridico-formelle du
pouvoir et qui ont donné une place dans la politique de l­’Ancien
Régime à la féodalité moderne, à la ­complexité des relations entre le
centre et la périphérie, au rôle politique, et surtout aux alliances, aux
stratégies et aux réseaux de la famille noble. Des études qui ont mis
en lumière le fait que ­l’on gouverne le territoire même à travers la
vengeance – qui a ses propres règles, ses lois, son ordre, et donc son
nomos. En effet, la structuration des intérêts politiques en factions a
longtemps représenté un processus adapté à la gestion du c­ onsensus
social et aussi à la c­ ommunication politique entre les strates supé-
rieures et inférieures de la société, entre centre et périphérie, entre
appareils formels et informels du pouvoir.
Deux ouvrages en particulier ont analysé cet épisode : le premier le
voit ­comme résultat des tensions entre seigneurs et peuple et ­comme
apogée ­d’un ­conflit séculaire entre factions nobiliaires ; le second a attiré
­l’attention sur les rituels de la violence, à la fois grotesques et cruels,
qui, en temps de Carnaval, ici ­comme ailleurs, se sont exprimés au cours
des tumultes de cette journée2. Il s­’agit là de thèmes qui au cours des
dernières années ont donné lieu à des études toujours plus approfondies
et ­comparatives sur le langage de la violence ­comme partie de la réflexion
plus générale sur les langages politiques3 : les querelles, la vengeance, les
1 Pour une synthèse, on renverra à Trebbi, 1998. Sur la réforme de la représentation du
peuple, voir Cargnelutti, 1991.
2 Voir Bianco, 2011 et Muir, 1993. Consulter aussi les réflexions de Andreozzi, 1996. La
­comparaison s­ ’impose avec l­ ’étude fondamentale de Le Roy Ladurie, 1979. Voir aussi la
réflexion générale de De Benedictis, 2013.
3 Gamberini, Petralia (éd.), 2007.
146 LAURA CASELLA

factions ­comme éléments structurels et performants de la dynamique


politique de la fin du Moyen Âge et du début de l­’époque moderne4.
La reconstitution de la révolte a été basée sur des sources premières
de nature diverse, parmi lesquelles la documentation des magistratures
vénitiennes, dont les sources judiciaires – moins nombreuses q ­ u’on
­n’aurait pu ­l’espérer. Contrairement au cas ­d’autres révoltes et soulè-
vements européens, les sources iconographiques ne sont guère utiles à
­l’historien5. En revanche, les chroniques qui élaborent la narration de
la révolte sont largement utilisées, en tant que sources ­contemporaines
des événements. Dans les décennies qui suivent cette année fatidique
avec ses pillages, ses tueries, ses incendies, un grand nombre de textes
relatent en effet ces événements dans le but de formuler un jugement
politique sur les actions et sur les nobles qui les ont menées et de jus-
tifier la nouvelle organisation politique et sociale imposée par Venise.
Dans les siècles suivants et récemment encore les historiens ont
utilisé ces textes uniquement ­comme chroniques politiques alors ­qu’il
­s’agit souvent de mémoires appartenant au registre des écritures privées
ou de livres de mémoire des familles de l­’aristocratie. Si d­ ’un côté ces
écrits élaborent et transmettent à la descendance la mémoire d­ ’un fait
politique et social d­ ’importance capitale dans ­l’histoire de la région la
plus orientale de la République vénitienne, de ­l’autre ils ­constituent et
représentent la mémoire familiale, avec l­’identité et l­’héritage que les
auteurs souhaitent c­ onfier aux générations qui leur succèderaient.
Bien que, dans le cas de cette révolte, la tradition historico-politique
trouve en grande partie ses racines dans l­ ’écriture familiale et dans les
écrits mémoriels utiles à la ­construction d ­ ’une tradition politique et
sociale de classe, peu de chercheurs se sont interrogés sur la nature de
ces textes, sur leurs objectifs et les canons qui les régissent. Chronique
semble être un terme utile et général pour définir des matériaux nar-
ratifs de différents types, insérés dans différents ­contextes ­d’écriture.
Ainsi, même si la révolte a été reconstruite dans ses phases et intégrée
4 Parmi les plus récentes, Gauvard, Zorzi (éd.), 2015 ; Povolo, 2015a et 2015b ; Ricciardelli,
Zorzi (éd.), 2015. Pour ce qui ­concerne l­ ’espace politique italien, Gentile (éd.), 2005.
5 Si l­’on fait exception d ­ ’un manuscrit anonyme accompagné d ­ ’images et datant du
xviiie siècle, les images de la révolte manquent. Voir Museo Civico Correr, Venezia, Codici
Cicogna, ms. 963/1. Les dessins tirés de cette source ont été publiés dans les volumes de
Bianco (2001 et 2011) et Muir (1993). Sur la narration des révoltes à travers les images,
nous renvoyons à Haffemayer et al. (éd.), 2016.
Mémoire de la révolte et mémoires de famille 147

dans le cadre politique du moment, les aspects liés à ­l’élaboration et


à la transmission de sa mémoire n­ ’ont pas été l­’objet de beaucoup de
travaux, les faits intéressant plus que leur mise en récit.
Pourtant, malgré les c­ onstats permis par la documentation de première
main, la narration occupe une place importante dans la ­connaissance
que nous avons des événements et il paraît pertinent de porter notre
attention sur les modalités de son élaboration et sur l­’utilisation qui
en a été faite6. Aussi, dans ­l’intention de c­ onsidérer un aspect négligé
par la tradition historiographique et de proposer une lecture critique
de ces sources, nous chercherons à approfondir la relation qui lie les
réélaborations historiques de la révolte de 1511 et l­ ’identité familiale et
politique des auteurs, en nous interrogeant sur la nature et la finalité
de ces sources responsables en grande partie de ­l’idée que nous avons
­aujourd’hui de cette révolte, et sur la sélection de la mémoire des faits
qui y est opérée.
Ceci nous amène à prendre en c­ onsidération certaines sources histo-
riques, leur usage mémoriel et leurs réemplois au xixe siècle. Il ­s’agit
donc de faire un voyage en arrière qui nous amène à envisager deux
niveaux temporels : celui de c­ ontemporains de la révolte (et de ceux qui
écrivent dans les décennies qui suivent) et celui de la tradition moderne
des études sur la révolte même. Comment les ­contemporains qui ont
vécu la violence de la révolte ont-ils raconté ce moment ? Comment
les enfants, les proches, les amis de ceux qui avaient été massacrés ou
qui avaient perpétré ces crimes ont-ils relaté ­l’événement, et dans quel
but ­l’ont-ils fait ? À partir de quels documents, de quelle sélection de
la mémoire de l­ ’épisode en question, la tradition historique a-t-elle été
transmise à la postérité siècle après siècle7 ?
­C’est sur ces questions que je porterai mon attention, avec un double
objectif. En premier lieu, proposer une analyse et une reconstitution
philologique de quelques textes et chroniques parmi les plus impor-
tants du xvie siècle. Les textes que ­j’analyserai ne sont pas tant (ou pas
seulement) des chroniques politiques, des histoires publiques, que des
textes mémoriels intégrés dans des livres de famille ou des textes que
6 Ce ­n’est pas le lieu ici d­ ’entrer dans la question du narrativisme qui, depuis les années
1970, a ses défenseurs et ses critiques mais il semble utile de renvoyer au récent panorama
­qu’offre ­l’essai de Morsel, 2016.
7 Ces questionnements sur ­l’événement et la mémoire de l­’événement sont au cœur du
volume ­consacré à la révolte de Naples par Hugon, 2011.
148 LAURA CASELLA

nous pouvons mieux c­ omprendre par l­ ’intermédiaire de la relation qui


les unit dans un système d­ ’écritures familiales. L­ ’analyse textuelle cor-
recte amène donc à situer sous un jour plus ­conforme non seulement les
raisons pour lesquelles les auteurs rédigent ces mémoires mais encore
le destinataire de ces écrits. ­L’analyse du style et de ­l’objectif des textes
appelle une re-sémantisation de la mémoire de l­’épisode.
Cela m
­ ’amènera forcément, en deuxième lieu, à déconstruire le récit
historique traditionnel de la révolte en montrant le caractère inadapté
de la lecture toute politique des deux derniers siècles : ­l’édition de ces
textes qui a lieu entre la deuxième moitié du xixe et la première moi-
tié du xxe siècle reflète cette perspective. Et pourtant, c­ ’est bien cette
forme qui c­ ontinue d­ ’être véhiculée, de nos jours. Amorcer une critique
philologique entraîne donc une critique historiographique.

PREMIER ACTE
Écrire la mémoire de la révolte

­C’est dans le cadre de guerres privées et de vengeances récurrentes


entre familles nobles q­ u’il faut rapporter l­’écriture de mémoires de la
révolte. La plupart des récits du xvie siècle ont été écrits par des membres
de la faction des Strumieri (par exemple Cergneu, Strassoldo) ou par
des membres de familles appartenant au patriciat d­ ’Udine (par exemple
Amaseo, Belloni). Ces dernières font partie des familles citadines qui
entrent au gouvernement de la ville dans les décennies suivant la révolte,
et qui exercent des professions libérales et en particulier juridiques.
Gagnant en importance avec la réforme administrative de Venise, elles
souhaitent arracher à l­’influence des Savorgnan le c­ ontrôle politique et
le développement économique de la ville ; elles mènent une politique de
fidélité à Venise et ­l’appuient, à partir de la seconde moitié du xvie siècle,
dans son action anti-féodale. Dans cette phase toutefois, avant que le
­conflit ne ­s’institutionnalise, ­comme dans les années suivantes où les
aspirations hégémoniques ­d’Udine et de ses dirigeants s­’opposent à
celles de la noblesse plus ancienne qui siège au Parlement de la Patrie
du Frioul, certaines nouvelles familles de la Cité et l­ ’ancienne noblesse
Mémoire de la révolte et mémoires de famille 149

philo-impériale ont en ­commun ­l’opposition à Antonio Savorgnan et


le désir de réduire le pouvoir de sa famille8.
­L’analyse de certains de ces écrits, de leur forme et de leur modèle
permet de développer des c­ onsidérations c­ oncernant les chemins par
lesquels la mémoire de l­’épisode a été transmise. Si ces textes sont
distincts les uns des autres sur le plan des caractéristiques textuelles,
ils affichent des éléments thématiques récurrents. La représentation des
faits, dans les décennies qui les suivent, livrée par la partie la plus frap-
pée et lésée, les victimes, ­consiste en des récits qui fixent, diffusent et
insistent sur des thèmes que l­ ’on peut facilement rapporter à l­ ’idéologie
de la noblesse, à son credo religieux ainsi que, bien évidemment, à ses
intérêts politiques. Avant tout, la bestialité, ­l’irrationnel, la violence du
peuple, sa haine et sa fureur c­ ontre les seigneurs. Le deuxième thème
récurrent est ­l’interprétation religieuse de la tragédie que l­ ’on attribue
à la colère de Dieu. Cette vision est renforcée par ­d’autres circonstances
et événements qui nourrissent une vision apocalyptique de l­’épisode :
la guerre en arrière-plan et une épidémie de peste, un tremblement de
terre et la famine, événements qui touchent le Frioul dans les mois qui
suivent immédiatement la révolte. Si ­l’on doit en croire les chroniqueurs,
jamais la colère de Dieu n­ ’avait frappé la Patrie du Frioul en lui infligeant
cinq fléaux, tous ensemble, qui s­’ajoutent à la révolte et en amplifient
­l’importance historique et la portée symbolique. Enfin, on fait retomber
la responsabilité politique des faits uniquement sur Antonio Savorgnan.
Si d­ ’un côté il y a des éléments que les récits partagent, de l­’autre
on observe une variété de typologies de récits. Les écrits peuvent varier
en longueur, allant de notes succinctes à quelques pages et ­jusqu’à
des récits plus développés. Mais on perçoit également des différences
dans la nature des documents qui ­contiennent ces textes : le récit de
la révolte peut en effet trouver sa place dans des manuscrits achevés et
indépendants, mais il peut également être inséré dans des documents
ayant un autre but. Dans les journaux de certains notaires, par exemple.
­C’est le cas des notes que l­ ’on retrouve dans les actes notariés ­d’Antonio
Belloni, Francesco Porzio et Sebastiano Decio, trois notaires qui sont
autant de représentants importants de la noblesse urbaine issue des
8 Sur les divisions qui traversent la noblesse dans le Frioul et sur ­l’opposition entre le
Parlement et la municipalité d­ ’Udine, nous renvoyons à Corbellini, 1998 ; Casella, 1999.
Sur les familles de la Cité, Stefanutti, 2006 et Casella, 2011, en particulier p. 342-348.
150 LAURA CASELLA

professions juridiques et en train de faire une brillante ascension sociale


et politique9. ­C’est à partir du xviiie siècle que quelques érudits font
circuler ces récits, ­d’abord sous forme manuscrite, ensuite imprimés en
édition limitée afin de récupérer une tradition ­d’histoire urbaine et de
lui donner une meilleure visibilité. La représentation mémorielle de la
« zobia grassa » peut aussi faire partie des archives familiales, elle peut
­s’entremêler à des écritures personnelles et privées, notamment des
livres de famille.

DEUXIÈME ACTE
Sélectionner et publier la mémoire de la révolte

Dans la deuxième moitié du xixe siècle et les premières décennies


du xxe siècle, un grand nombre de ces écrits ont été réunis et publiés
­comme chroniques politiques : les éditeurs ont mis en évidence ­l’esprit
partisan qui les anime. Cependant, en même temps, ils les ont maniés
­comme des mémoires et des annales politiques, ­comme sources ­d’histoire
publique, en sortant ces écrits de la logique qui les anime et des raisons
pour lesquelles ils furent rédigés. Le but principal de ces érudits était de
rassembler les mémoires de la petite patrie sur lesquelles bâtir l­ ’histoire
de la nation, dans un territoire frontalier – ­n’oublions pas la puissance
symbolique de la frontière orientale pour la ­construction de ­l’histoire
italienne – où l­’Italie naît en s­’opposant à ­l’Autriche ; une histoire
où le modèle social et ­constitutionnel de nature urbaine ­s’oppose au
système féodal et impérial10. Dans cette perspective un intérêt pour
la biographie ou pour l­ ’histoire familiale ne serait ­considéré que dans
la mesure où elle fournit la matière historique sur laquelle créer les
héros de la nation.
9 Plusieurs copies manuscrites des notes tirées des registres des trois notaires ont été
­conservées, dont l­ ’une à la Biblioteca Comunale di Udine (BCU), Fondo Principale, ms. 688,
Belloni [Antonio], Porzio [Francesco], Decio [Sebastiano], Il sacco di Udine 1511. Antonio
Belloni, en particulier, est une figure c­ onnue des milieux juridiques et humanistes de
la ville dans les premières décennies du xvie siècle. Voir Norbedo, 2009, p. 439-445 et
Casella, 2004.
10 Pour une discussion sur ce point, voir Casella, 2012 et 2013.
Mémoire de la révolte et mémoires de famille 151

GUERRE ET RÉVOLTE, HÉROS ET ANTI-HÉROS :


LES COUSINS SAVORGNAN

­L’histoire de la famille Savorgnan représente un excellent exemple


de ce point de vue car ­c’est au sein de cette famille, dans ­l’antagonisme
entre les deux figures les plus importantes des premières décennies du
xvie siècle, q­ u’il est possible de déceler le héros et le anti-héros.
Comme nous ­l’avons indiqué et ­comme nous le verrons mieux plus
loin, dans les dernières décennies du xixe siècle sont réalisées des études
qui affichent un intérêt grandissant pour la redécouverte et la publication
de la littérature historique ­concernant la révolte de 1511, ­d’où ressort
de toute évidence la démonisation ­d’Antonio Savorgnan, ­l’aristocrate
dégénéré, le traître. Il existe, en parallèle, ­d’autres études qui glorifient
le cousin d­ ’Antonio, Girolamo, puisque dans les mêmes années, durant
la guerre de Cambrai, Girolamo défend sa patrie et ­l’État vénitien en
résistant à un long siège de son château ­d’Osoppo et en repoussant les
armées impériales au-delà des frontières.
Vincenzo Joppi est la figure la plus notable des érudits de la seconde
moitié du xixe siècle qui ­s’engagent pour récupérer des mémoires
historiques, pour donner un fondement à ­l’histoire régionale et à
celle de la jeune nation italienne, et pour développer les institutions
­culturelles citadines11. Au cours de son intense activité de recherche
pour rassembler et publier des manuscrits, il prépare l­ ’édition d­ ’une
partie des chroniques de la révolte. En 1896 il publie également les
lettres que, de 1508 à 1528, Girolamo adresse à Venise depuis les
théâtres de la guerre. Par le biais de ces lettres, il avait ­construit image
de lui-même opposée à celle de son cousin : Girolamo se présente
­comme fidèle au souverain ; il renonce à imposer sur la région aussi
bien sa suprématie personnelle que celle de sa famille ; il s­’engage à
exploiter les armes et la faveur du peuple non pas à son avantage, mais
seulement au service du Prince12.
La sélection même que les descendants des Savorgnan avaient opé-
rée dans la mémoire familiale, visant à transmettre une représentation
glorificatrice de leur maison – héritage auquel a été donnée une forme
11 Tamburlini et Vecchiet (éd.), 2004.
12 Girolamo Savorgnan, Lettere storiche d­ all’anno 1508 al 1528, éd. Vincenzo Joppi, Udine,
Doretti, 1896. Sur le personnage de Girolamo voir Casella, 2009, p. 2258-2265 et en
particulier, sur les lettres, Casella, 1988.
152 LAURA CASELLA

apologétique dans les histoires familiales entre la fin du xviiie et le


xixe siècle13 – avait ­conduit à oublier Antonio et à glorifier Girolamo. Ce
dernier devient un exemple ­d’homme vertueux, modèle ­d’un panthéon
­d’hommes illustres de petites et grandes patries. Les historiens nationa-
listes ­s’emparent du personnage de Girolamo Savorgnan et exploitent
notamment la valeur militaire du guerrier en particulier aux moments
de ­l’histoire nationale où ­l’Italie se trouve opposée à ­l’Autriche, et sur-
tout à certaines époques, au moment du Risorgimento, dans les décennies
annonçant la première guerre mondiale et pendant la guerre elle-même,
enfin plus tard, dans la rhétorique militaire fasciste.
Les deux cousins incarnent des valeurs qui sont positives et négatives,
universelles et éternelles. Dans cette perspective opposant Antonio à
Girolamo, les événements historiques auxquels ils prennent part sont
eux aussi soumis à un jugement historique : la révolte est désordre,
prévarication, manifestation de l­ ’hybris, logique politique c­ ontre ­l’État ;
la guerre pour la patrie est, bien évidemment, héroïque.
LES ANCIENNES CHRONIQUES ET LA JEUNE NATION

­L’inauguration, en 1895, par ­l’Accademia udinese (Académie ­d’Udine)


de la collection « Antiche cronache friulane » (Anciennes chroniques
frioulanes), illustre de manière très efficace ­l’esprit de la publication de
ces manuscrits et son projet ­culturel : récupérer et diffuser des documents
qui servent à ­construire une histoire de la patrie – de la municipalité,
de la région, de la nation – qui est alors à écrire entièrement et qui
est avant tout une histoire politique. Cette entreprise ­d’érudition ­n’est
guidée par aucune intention philologique.
Le but explicite est de faire paraître les chroniques inédites et de
réimprimer les plus anciennes, en rectifiant « les erreurs qui les avi-
lissent ». Chaque chronique sera en outre « précédée de brèves notices
sur son auteur et sur son importance14 ». La collection n­ ’ira pas plus loin
que les deux premiers volumes ­consacrés à la publication de la Cronaca

13 Francesco Caro, Historia de signori Sauorgnani detti del Monte ­conti di Belgrado, Castel Nuovo,
In Verona, per Gio. Battista Merlo, 1685 (réédité plusieurs fois au cours du xviiie siècle)
et Benedetto Vollo, I Savorgnani, Venezia, tipografia Cecchini, 1856.
14 ­C’est ce q­ u’indiquent les avertissements qui figurent au dos de la couverture du premier
volume de la collection : Giovanni Battista Cergneu, Cronache delle guerre friulane coi
germani dal 1507 al 1524, éd. Joppi Vincenzo e Marchesi Vincenzo, Udine, Doretti, 1895.
Mémoire de la révolte et mémoires de famille 153

delle guerre dei friulani coi germani dal 1507 al 1524 de Giovan Battista
Cergneu15 et de la Cronaca di Soldoniero di Strassoldo dal 1509 al 160316.
Les auteurs, Giovan Battista Cergneu et Soldoniero de Strassoldo,
appartiennent tous les deux à la faction aristocratique ennemie de
Savorgnan. Leurs familles sont de celles qui ont été le plus durement
frappées par la violence des Zamberlani et qui, dans les années suivantes,
se sont trouvées impliquées dans la spirale de vengeances et de duels
qui en découlent. Le père de Soldoniero est même soupçonné d­ ’avoir
été parmi ceux qui ont ­commandité le meurtre ­d’Antonio Savorgnan,
à Villach le 21 juillet 1512.
Les deux écrits, présentés ici c­ omme chroniques, sont tout ­d’abord
des textes destinés à la transmission de la mémoire familiale et du rang,
qui est également politique. Ces écrits représentent pour la descendance
un horizon de mémoire à perpétuer, qui demeure indissolublement
publique et privée. Une analyse philologique de ces pages – qui ne
peut se faire q­ u’à partir d­ ’une ­comparaison entre le texte publié et le
manuscrit, quand il est disponible – dénote leur finalité pédagogique
vis-à-vis de la postérité, ce terme désignant tout d­ ’abord un « public »
fait d­ ’enfants, petits-enfants, arrière-petits-enfants.
Giovan Battista Cergneu est le fils de Francesco, homme de la faction
des Strumieri, ennemi juré, c­ omme on l­ ’a dit, d­ ’Antonio Savorgnan et
de sa famille17. ­L’auteur précise en ouverture de sa chronique la raison
pour laquelle il la rédige : il écrit « pour instruire », pour expliquer « les
persécutions et les offenses faites à tous les châtelains de la Patrie, et à
nous, en particulier » ; il écrit afin que « les descendants » « apprennent
à punir18 ». Et il ajoute que si les mots ­qu’il emploie sont « durs et non
appropriés », ­c’est parce que « notre profession ­n’a jamais été ­d’écrire

15 Voir ci-dessus.
16 Éditée par Ernesto Degani, Udine, Doretti, 1895.
17 Girolamo Savorgnan, le cousin ­d’Antonio, le situe aussi dans les rangs de ­l’armée impériale
pendant le siège d­ ’Osoppo : « Francesco Cergneo, lo quale era c­ on l­ ’inimici in campo sotto Osoppo
[…] et per aventura ­consigliava li nemici da che parte dovessero piantar ­l’artiglierie […]. Per ogni
via possibile cercavano la rovina, et destruttion mia ; non mia ma della Serenità Vostra », Per il
sentar di mezo delli deputati della Terra ­d’Udene. Discorso di Girolamo Savorgnan, Biblioteca
del Museo Correr, Venezia, ms. P.D. 220, cc. 133r-161v, publié dans Casella, 2003, p. 302.
18 « Volendo io le persecuzioni ed injurie a tutti i nobili castellani della Patria, ed a noi particolar-
mente fatte, a nostri posteri c­on breve c­ompendio esplanare, acciocchè de nostri mali edocti li loro
­con premeditate ­conjecture castigare imparino », Giovan Battista Cergneu, Cronaca delle guerre
dei friulani, p. 2.
154 LAURA CASELLA

l­ ’Histoire19 ». Selon ­l’incipit de cette rédaction il ­n’y a donc là aucune


ambition intellectuelle ; elle ne se veut ni opération de haute c­ ulture ni
écriture historique de grande valeur. Seul ­compte ­l’objectif de léguer
une mémoire utile, éducative.
Il faut préciser que nous ne c­ onnaissons pas le manuscrit autographe
de la chronique de Cergneu et que ­l’édition du xixe siècle se fonde sur
la collation de différents manuscrits de la fin du xvie siècle dont un en
particulier a été privilégié : celui qui restitue, c­ omme le dit l­’éditeur,
« ­l’ancien style rude de Cergneu », ce style où ­l’âpreté devient, pour les
éditeurs, synonyme de véracité20.
LA MÉMOIRE POLITIQUE ­COMME HÉRITAGE DE FAMILLE

La transmission manuscrite de cette chronique présente des aspects


qui devraient être mieux explorés. Néanmoins, certains éléments per-
mettent de formuler quelques premières c­ onstatations : les manuscrits
­connus sont tous incomplets et le texte est interrompu en plusieurs
parties par des « omissis » ; la subdivision en chapitres (la même qui
a été adoptée dans l­’édition imprimée) a été introduite a posteriori et
­n’est pas de la même main mais, ­comme ­l’indiquent les éditeurs, elle
est aussi présente dans une autre copie manuscrite. La typologie du
texte autographe est donc impossible à déterminer et la ­connaissance
de la chronique est étroitement liée à ­l’histoire de sa transmission et
des interventions q­ u’elle a subies : il importe de savoir qui a retranscrit
la chronique et qui la fait circuler ; ce qui a été omis et à quel moment
a eu lieu ­l’intervention pour décomposer le texte en chapitres et lui
­conférer une structure plus évidente de chronique politique. Le thème
principal lui-même, ­comme en témoigne le titre choisi dans ­l’édition
imprimée – la « guerre » de Cambrai et les ­conflits affectant le territoire
oriental de la République de Venise – sert de cadre, peut-être postiche,
à ­l’analyse plus approfondie qui intéresse Cergneu : celle qui porte sur
les événements politiques dans la région entre 1508 et 1511, sur les
­conflits factionnels et le tragique succès de la révolte du jeudi gras21.
19 « Quantunque rude sian, e mal ­composte nostre parole, né mai de descriver le Historie nostra
professione fusse », Ibidem.
20 La copie sur laquelle se base ­l’édition se trouve à la Biblioteca Comunale di Udine (BCU),
Fondo Principale, ms. 694.
21 ­D’autres copies du texte portent un autre titre, centré sur les ­conflits entre factions plutôt
que sur la guerre, et montrant de plus la variabilité de ­l’arc chronologique choisi. Voir
Mémoire de la révolte et mémoires de famille 155

La volonté de dédommagement moral de la partie affectée par le désir


de prééminence d ­ ’Antonio Savorgnan et par la bestialité du peuple
transparaît dans chaque page, et fait de la chronique un récit partisan
dédié en premier lieu à la mémoire de tous les descendants de cette
faction. En outre, il ne faut pas exclure – et les nombreuses omissions
pourraient en être un témoignage – que le texte a été c­ onçu ­comme
faisant partie d­ ’un véritable mémorial familial.
La deuxième chronique publiée dans la collection de l­ ’Académie en
1895, celle de Soldoniero de Strassoldo, est un excellent exemple de ce
type de textes. ­L’éditeur, Ernesto Degani, opère une intervention édi-
toriale qui lui ­confère un ordre arbitraire permettant de reconstruire,
­comme il ­l’indique, « les événements racontés dans la chronique, mis
dans ­l’ordre chronologique22. » Le texte ­commence par des scènes de la
vie du père de ­l’auteur, Francesco, qui, ­comme nous ­l’avons noté, faisait
partie de la plus ancienne noblesse au service de ­l’Empereur et de la
faction Strumiera. Il nous offre aussi quelques indications sur l­ ’assassinat
­d’Antonio Savorgnan, et se poursuit par une alternance entre les nouvelles
qui appartiennent à la chronique politique – dont beaucoup relatives
aux vendettas entre les deux parties après le soulèvement – et celles qui
se rapportent à la famille Strassoldo, enregistrant les étapes principales
de la vie de ses membres (naissances, mariages, décès), des indications
sur le temps et le climat, des faits divers et quelques événements qui
opposent, de façon même violente, deux branches de la famille. Le texte
de la chronique c­ ontient également la transcription du testament de
Soldoniero, faite en 1601.
La nature de l­ ’information ­contenue suggère que, selon toute probabi-
lité, le texte est un parfait exemple de livre de famille ; le même Degani
souligne dans la préface que l­’auteur a voulu que les notes historiques

BCU, Fondo Joppi, ms. 67, Cronache friulane, fasc. IV. Historia delle guerre et fattioni in
Friuli dal 1507 al 1525 de Giambattista di Cergnocco, qui sur le frontispice arbore un
titre encore différent : Cronica delle guerre et fationi in Friuli dal 1507 fino al 1518. Des
copies postérieures se trouvent à la BCU, Fondo Principale, mss 694, 695, 696 et aux
Archives d­ ’Udine : Archivio di Stato di Udine (ASU), Archivio Caimo, b. 60.
22 Comme on peut le lire au début de la table des matières, Cronaca di Soldoniero di Strassoldo
dal 1509 al 1603, ed. Ernesto Degani, Udine, tipografia Doretti, 1895, p. 3. Il n­ ’a pas été
pas possible de trouver la trace du manuscrit original que Degani prétend avoir obtenu
grâce à un descendant du Strassoldo, Nicolò Panciera di Zoppola. Une c­ onsultation des
archives ­conservées par la famille ­confirme ­l’absence de ce manuscrit depuis la fin du
xixe siècle.
156 LAURA CASELLA

« ne soient pas du tout destinées à la publicité, mais seulement c­ onçues


c­ omme des règles domestiques23 ». Parmi ces « règles domestiques » se
trouvait avant tout ­l’obligation de la vengeance, et son neveu Giovanni
Francesco, auquel les notes sont principalement adressées, « étant né
gentilhomme, ­n’aurait eu ­d’autre issue que de prendre à son ­compte
une noble vengeance24. » Le thème de l­’honneur nobiliaire apparaît
­comme un impératif lié à la famille et à la faction, plus encore ­qu’un
des fondements de l­’ordre social.
Quelques années plus tôt, l­ ’activité de diffusion passionnément entre-
prise par Joppi avait c­ onduit à la publication d­ ’une autre chronique, due
elle aussi à ­l’un des Strassoldo, qui portait sur les années antérieures à
la révolte de 1511 et, en particulier, sur quelques épisodes de la guerre
en cours. Dans ce cas, il est facile de ­constater que le texte publié sous
le titre de Cronaca di Nicolò Maria di Strassoldo, anni 1469-150925 est
tiré d­ ’un livre de famille proprement dit, le Liber Familiaris Nicolai de
Strassoldo26.
­L’auteur annonce explicitement, dès le début, que la raison pour
laquelle il le rédige est de s­ ’assurer la gratitude de ses descendants aux-
quels ils ne lègue pas de richesses matérielles mais le patrimoine de la
mémoire aristocratique, nécessaire pour accomplir des choix assumés
aussi bien dans le domaine familial que dans le domaine politique et
social. Il imagine que « la postérité […] dira : notre Nicolomaria n ­ ’a
laissé ni pierres précieuses ni or, mais ce livre que nous pouvons tenir
dans la plus grande ­considération et garder dans nos chambres pour
les nécessités et les urgences, privées et publiques27. » Le livre ­consiste
en une suite d ­ ’écrits provenant de plusieurs plumes et transmet des
nouvelles ­s’étalant sur cinq générations. Ensuite viennent les pages de
ladite chronique publiée en 1895, sans que rien ne soit dit du c­ ontexte
­d’écriture. Comme c­ ’est l­ ’habitude dans les livres de famille, les nouvelles
sont souvent introduites par un « Nota ­come », c­ ’est-à-dire une forme
impersonnelle équivalant à « Je note que ». Il ­s’agit ­d’une modalité
23 Cronaca di Soldoniero di Strassoldo, p. 13.
24 Ibidem, p. 10.
25 Éditée par Vincenzo Joppi, Udine, Seitz, 1876.
26 BCU, Fondo Joppi, ms. 186, Liber Familiaris Nicolai de Strassoldo.
27 « i posteri […] diranno, Nicolomaria nostro non celasso ne gemme ne oro per esser de quelle exausto :
ma ancora questo possemo locare nelle nostre camere et tenerlle care per le private e pubbliche oppor-
tunità et emergentie nostre », Ibidem, c. 1v.
Mémoire de la révolte et mémoires de famille 157

fréquemment ­constatée dans d­ ’autres écrits masculins, mais aussi dans


des écritures mémorielles de femmes.
Le même type ­d’annotations se trouve en fait dans une autre chronique
sur le soulèvement ­d’Udine de 1511, dans le Rotolo di esazioni ­d’Agostino di
Colloredo, chanoine ­d’Aquilée et de Cividale, publié en 1889 dans le journal
Pagine friulane sous le titre 1508-1518. Notizie di guerra, del tumulto udinese
e morte di Antonio e Nicolò Savorgnano. Encore une fois ont été extrapolés
les éléments du texte mémoriel relatifs à la chronique politique, souvent
introduits par ce « Nota ­come » qui est une méthode ­d’enregistrement des
événements récurrente dans les écrits de caractère personnel et familial. La
forme du registre lui-même met en évidence son caractère privé, s­ ’agissant
­d’un type ­d’écriture de ­comptabilité domestique28. « Rotolo » ou rottolo (rou-
leau) est en effet le nom assigné à ces livres de dépenses qui prenaient, par
­commodité, forme de rouleau. Le nom est resté par la suite pour désigner
un cahier de ­comptes même quand le support change de forme et devient
un véritable registre avec couverture en parchemin ou en carton29.
Même les quelques écrits participant de la mémoire féminine du début
de ­l’époque moderne peuvent ouvrir des possibilités de ­comparaison,
du point de vue du style par exemple. Sofonisba Antonini, qui a épousé
Luigi dell Torre, note les moments cruciaux de sa vie de 1621 à 1630
– la promesse de mariage, le mariage, l­’entrée dans la maison de son
mari, la naissance des enfants, leur baptême, l­’épidémie de peste, les
devoirs militaires de l­’époux – selon la séquence répandue du « nota
­come » : un enregistrement des faits de la vie privée et publique, à la
première personne et par une main féminine, qui rappelle, dans le style
et le ­contenu, le livre de famille masculin30.

28 ­L’éditeur le présente ­comme tiré du manuscrit autographe dans Rotolo di esazioni di Agostino
e Marzio di Colloredo, Archivio di Paolo di Colloredo. Voir « Pagine friulane », a. 2, n. 1
(17 febbraio 1889), p. 5-6.
29 À cette typologie des mémoires il faut ajouter aussi la Cronaca udinese dal 1554 al 1564,
tirée des notes ­qu’Emilio Candido, un noble ­d’Udine, ­confie aux pages ­d’un Rotolo des
dépenses et des recettes (Bibliothèque du Séminaire archiépiscopal, Fondo Cernazai).
Dans ce cas aussi, Vincenzo Joppi retranscrit pour la publication (Udine, Tipografia del
Patronato, 1886) les nouvelles des chroniques d­ ’Udine qui dénoncent encore, des décennies
plus tard, une forte instabilité, causée aussi bien par la propagation des épidémies que
par les séquelles de ­l’opposition entre les familles de la noblesse : Candido lui-même
mourra dans une embuscade tendue par le parti adverse en 1570, alors ­qu’en tant que
député de la ville il faisait partie de la suite du Lieutenant vénitien.
30 ASU, Archivio Torriani, b. 79.
158 LAURA CASELLA

Il ne sera pas possible ­d’aborder ici la question du genre de ces


écritures mais il ­convient de mentionner au moins un cas de mémoire
féminine où s­ ’entrelacent ­l’écriture familiale et le récit des faits politiques,
notamment les affrontements entre factions, les événements sanglants
liés aux nombreuses vendetta qui ont eu lieu au Frioul, au xvie siècle, à
la suite des faits de 1511.
Le texte est un journal intime, dans lequel ­l’auteur relate les uns à
la suite des autres les événements de ­l’histoire politique locale et inter-
nationale, ainsi que des faits de la vie quotidienne et de sa vie privée,
entre 1541 et 1591, avec l­ ’intention de ne pas demeurer oisive durant les
jours de fêtes. Ce texte intitulé Libro delle cose che son degne de eser notate
et tenute a memoria del 1541 in qua se présente à la fois ­comme de petites
annales et ­comme un journal intime. Son auteur, Venere Bosina, est une
femme du milieu artisanal et marchand, veuve, habituée à gouverner
elle-même des affaires économiques et, pour cette raison, à regarder
attentivement le monde qui l­’entoure. Les notes de ce cahier dessinent
très précisément des intérêts, dans la double acception de ce terme :
affaires économiques dans lesquelles elle est impliquée, et nouvelles et
événements qui attirent son attention et sur lesquels elle exprime son avis.
À côté des nouvelles c­ oncernant les membres de sa famille, Venere
annote et ­commente deux autres catégories ­d’épisodes : ­d’une part les
informations les plus directement utiles à ses activités économiques et,
­d’autre part, les faits relevant de la chronique sociale et politique en
mesure de les influencer. Mais ­c’est surtout ­l’enregistrement des évé-
nements politiques qui étonne le plus : Venere est capable d­ ’observer
et de décrire avec attention le pouvoir. Elle peut être attentive tant au
cadre politique local q­ u’à un horizon plus vaste. Elle raconte les c­ onflits
sanglants qui troublent sa c­ ommunauté, montre q­ u’elle est au courant
des dynamiques de factions et c­ ommente les luttes entre les groupes, les
embuscades, les assassinats ­concernant les gens du peuple31 ­comme les
seigneurs de Porcia, feudataires du lieu impliqués dans la vendetta entre
31 Comme celui ­d’un jour ­d’août 1582 : « fu amacato Isepo dal Ponte a ora una de di ­con
un scopo ­con dui bale e non se sa da ­chi ma faco questo pronoscico che tuti queli che aveva dato
­consilio favore a zanbatista de la avostin de tal tradimento che tuti farano la mala morte per
aver tradito il sangue iusto e uno apostol de cristo lo cerca causa e il dito messer isepo fu macato
in casa sua avanti il suo balcon che si vestiva », Biblioteca Statale Isontina di Gorizia,
ms. 40, Libro de le cose che son degne de eser notate et tenute memoria dal 1541 in qua,
fol. 27r.
Mémoire de la révolte et mémoires de famille 159

factions nobiliaires32. En outre, Venere ne se limite pas aux événements


locaux, aux jeux de pouvoir dont ­l’influence ne dépasse pas le territoire
où elle vit et ­qu’elle peut c­ onnaître par expérience directe.
Le journal de Venere est donc une source particulièrement riche.
Il ­confirme ­l’importance des écrits personnels, des écrits du for privé,
dans le renouvellement méthodologique de ­l’histoire sociale et poli-
tique et ouvre une perspective vers l­’histoire du genre, en permettant
de libérer l­’étude de la politique de sa dimension publique et formelle
pour la greffer sur les dynamiques sociales ­concrètes, sur les ­contextes
économiques et sur la chaleur ­d’un vécu biographique.
­C’est un monde stratifié que le journal de Venere raconte, où des
épisodes de la vie privée se mêlent à des événements de la vie publique, à
des questions patrimoniales et financières et à des sentiments religieux.
­C’est de cette façon que doivent être ­considérés, c­ omme ­j’espère l­ ’avoir
montré, une grande partie de ces textes qui ont été publiés en tant que
chroniques entre le xixe et le xxe siècle, en occultant tout caractère familial
et privé et en mettant en lumière uniquement la valeur de témoignage
politique et publique. On en dénature ainsi les finalités et les objectifs
et on finit par en méconnaître le sens ­culturel, en interprétant mal en
outre leur langage et leur style, dévalorisés du fait q­ u’ils semblent ne
pas correspondre à un hypothétique et supposé idéal littéraire.

ÉCRITURE POLITIQUE
ET ÉCRITURE DOMESTIQUE
La Historia della crudel zobia grassa
et les Diarii udinesi des Amaseo

La recherche entreprise en Italie sur les livres de famille, à par-


tir du travail novateur de Cicchetti et Mordenti en 1985, a montré
désormais la grande importance des écritures privées et familiales
32 « Et per questo fu fata una gran costion tra li nostri signori c­onti et questo fu del 1554 del mese
de avosto adi 13. Cosi fu derito il ­conte Alfonso su il braco ma poco, ma messer Francesco have
molte ferite del milisso. Andete a Venecia tuti li ­conti per far la pace ma fu tuto al ­contrari che fu
amacato il c­onte Giulio dal ­conte Ascanio /…/. Del 1558 fu fata la pace », Libro…, fol. 7v.
160 LAURA CASELLA

pour ­l’histoire sociale et c­ ulturelle de l­’Ancien régime33. ­L’essor de


filières d­ ’enquête similaires dans les plus grandes historiographies
européennes, donnant lieu à des études de plus en plus approfondies,
met en évidence la présence de ce genre de sources dans toutes les
sociétés européennes34. Cette diffusion témoigne de la capacité de ces
écrits à nous faire repenser la dimension politique des siècles du Bas
Moyen Âge et des premiers siècles modernes. Et en particulier, à jeter
un regard différent par le biais des pratiques c­ oncrètes sur l­’histoire
du pouvoir et de ses formes ­d’expression possibles : vendetta, luttes
entre factions, révoltes dont les logiques et les intérêts familiaux font
partie intégrante.
Repenser la question en ces termes appelle tout d­ ’abord une opération
de repositionnement de nature philologique qui intéresse les sources
éditées. Comme pour les écrits que ­j’ai déjà cités, les plus ­connus parmi
ceux qui narrent la révolte de 1511, la Historia della crudel zobia grassa
et altri nefarii excessi et horrende calamità intervenute in la città di Udine et
Patria del Friuli del 1511 de Gregorio Amaseo, a été imprimée pour sa
valeur de riche et détaillé témoignage public et politique.
­L’importance de ce texte et la ­complexité du système ­d’écriture de la
famille de ­l’auteur ­conduisent à réserver pour une autre occasion ­l’étude
plus approfondie de ces pages et la c­ omparaison avec les autres récits
de la révolte, d ­ ’une part, et les autres écrits domestiques, de l­’autre.
Cependant, je propose ici une première réflexion sur le manuscrit et la
relation entre ­l’écriture de ce texte et ­d’autres écrits du même auteur
présents dans le livre de famille, les Diarii udinesi.
Tout ­d’abord, dans ce cas également il faut signaler ­l’absence de
manuscrit autographe et la diffusion de plusieurs copies apographes
« ­con esemplari sparsi un ­po’ dappertutto in archivi e biblioteche italiani, tanto
da rendere difficile la ricostruzione della genealogia dei codici », selon Furio
Bianco qui a réalisé ­l’édition la plus récente35. Nous verrons bientôt
­comment Gregorio lui-même explique ­l’absence de ­l’original.
33 Cicchetti, Mordenti, 1985 et Cicchetti, 2002.
34 Les études sur ces fonds se sont multipliées dans les dernières décennies en Italie et en
Europe. Un aperçu général est offert dans Arnoul, Bardet, Ruggiu (éd.), 2010, et dans
Ciappelli, 2009.
35 Bianco, 2011, p. 107 (nous traduisons). On ne peut que souligner ­l’importance ­d’effectuer
un recensement le plus ­complet possible des exemplaires afin de faire la lumière sur les
variantes et la diffusion du texte.
Mémoire de la révolte et mémoires de famille 161

Considérons ­d’abord la première édition de la chronique, due encore


une fois à ­l’infatigable Vincenzo Joppi, ajoutée en 1884 en annexe à
­l’édition des Diarii udinesi des frères Amaseo, Leonardo et Gregorio,
une œuvre à laquelle a ­contribué également Giovanni Antonio Azio qui
avait c­ ontinué à noter les événements entre 1510 et 1512, donc durant la
période où ont lieu la révolte, sa préparation et ses c­ onséquences immé-
diates, et ce à la demande de Gregorio dont Azio est un disciple36. Il
faut rappeler que Gregorio est un enseignant de rhétorique, un homme
de lettres, ­comme le sera son fils Romolo Quirino qui obtiendra des
charges importantes à la cour des Gonzaga et deviendra le précepteur
­d’Alessandro Farnese et de Guido Ascanio Sforza, les deux cardinaux
neveux de Paul III. On ne sait pas pour quelles raisons Gregorio délègue
la poursuite de ­l’écriture à Azio ; si pour quelques mois il est banni de la
ville en c­ onséquence d­ ’un procès civil, nous savons que dans les jours de
la révolte il est en ville et est au cœur des affrontements entre factions.
Leonardo, ­l’autre frère, qui avait ­commencé à rédiger cette chronique en
1508, au moment où se multipliaient des épisodes notoires dont il était
témoin et protagoniste, est mort en 1510. Les deux frères appartiennent à
une famille originaire de Bologne, intégrée dans le tissu social d­ ’Udine,
­s’impliquant dans les heurts que ­connaît la ville, d­ ’abord en faveur et
ensuite ­contre la politique des Savorgnan. Le journal de la révolte que
Gregorio écrira quelques années plus tard, Historia della crudel zobia
grassa, est un acte précis et percutant par lequel il attribue à Savorgnan
la responsabilité du massacre et des pillages.
Mais ­c’est la ­comparaison entre cet écrit et les Diari udinesi et ­l’étude
de ces derniers qui offrent des pistes plus prometteuses. Il s­’agit ­d’un
texte c­ omplexe, un assemblage de cahiers manuscrits qui n ­ ’ont pas
été rédigés dans ­l’ordre chronologique dans lequel ils sont organisés,
­comme on peut aisément le relever en analysant le manuscrit original
de la Bibliothèque Ambrosienne de Milan37. Le manuscrit, tel q ­ u’il
se présente de nos jours, s­’ouvre sur une biographie de Leonardo, que
36 Leonardo e Gregorio Amaseo, Gian Antonio Azio, Diarii udinesi d­ all’anno 1508 al 1541,
éd. Antonio Ceruti, Venezia, Deputazione di storia patria, 1884. Pour les profils biogra-
phiques, on renverra à Di Lenardo, 2009, p. 244, 247-248 ; Norbedo, 2009, p. 350-351.
37 Biblioteca Ambrosiana, Milano (BAM), cod. D 185 inf. Le texte des Diarii udinesi a
attiré l­ ’attention de Angelo Cicchetti et Raoul Mordenti qui ont eu le mérite de mettre
en lumière leur nature de « livre de famille » et en ont décrit la structure. Voir Cicchetti
et Mordenti, 1985, p. 87-105.
162 LAURA CASELLA

Gregorio rédige à la mort de son frère, en se servant des données bio-


graphiques de ce dernier pour fixer la représentation de la famille et
de ses vertus. Par la suite, cette biographie sera placée avant le texte de
la chronique : un portrait personnel qui devient donc un portrait de
famille, le portrait de la « Casa Amasea ». Viennent ensuite quelques
données au sujet des enfants de Leonardo ; dans certains cas, ce sont les
enfants eux-mêmes qui, suivant les indications de leur oncle Gregorio,
écrivent les quelques notes qui les c­ oncernent, en laissant ainsi des
exemples précieux d­ ’écriture ­d’enfants. Une centaine de pages forment
le cœur des chroniques ­commencées par Leonardo, et elles décrivent
des épisodes militaires et politiques découlant de la paix de Cambrai.
Suit une nouvelle partie c­ oncernant les affaires privées – le titre,
Memoria di cose private, non apartinente a l­’ordene incomenzato dele guerre,
a été ajouté plus tard – et qui est suivie d­ ’une ­continuation de la chro-
nique ­jusqu’au mois d­ ’avril 1512, c­ onfiée, c­ omme on l­ ’a dit, à Giovanni
Antonio Azio et c­ ontinuée, ultérieurement, par Gregorio qui reprend
­l’écriture des événements de 1513 à 1541. Pour ­conclure, une nouvelle
section familiale ; un portrait de Gregorio esquissé à sa mort par son
fils Romolo Quirino et une brève histoire de la famille, c­ ontenant à son
tour le portrait de Romolo, fait par son fils Pompilio.
Un texte stratifié, donc, aussi bien en ­considération de ceux qui se
succèdent dans l­’acte d ­ ’écriture (qui ne sont pas tous membres de la
famille), que du fait que se superposent des styles ­d’écriture différents,
allant de la chronique à l­’inscription de données privées familiales, de
la biographie à fonction célébrative à l­’histoire familiale. Une histoire
­complexe, de manuscrits, digne ­d’être reconstituée de manière plus
approfondie maintenant que la perspective en historiographie nous amène
à nous interroger sur les écrits personnels et familiaux en nous posant
des questions plus pertinentes par rapport à la logique dans laquelle ils
­s’inscrivent et ont été produits.
Une logique que ­l’édition des Diarii udinesi de 1884 ignore
­complètement. Antonio Ceruti qui édite ce texte dans la collection des
« Monumenti storici della Deputazione di storia patria per le Venezie »,
exploite la possibilité d­ ’utiliser le texte en le modifiant pour l­’adapter
à son objectif : fonder ­l’histoire sur des chroniques anciennes. ­L’éditeur
retire alors des Diarii les nombreuses notices biographiques et les don-
nées ­d’histoire familiale q­ u’il réintroduit ensuite, moyennant ­d’amples
Mémoire de la révolte et mémoires de famille 163

citations, dans ­l’introduction ­qu’il rédige. Le but de ces citations est


de reconstituer les biographies des personnages individuels, selon le
schéma que nous avons déjà mis en évidence et qui préside à ­l’édition
des chroniques de ­l’Académie ­d’Udine. Opération qui se situe dans la
perspective c­ ulturelle du xixe siècle, selon laquelle les fondements de
­l’histoire nationale ne doivent pas se retrouver amoindris sous le poids
de la dimension biographique et privée. La nature hybride du texte, son
écriture de la main de plusieurs personnes sur plusieurs générations, les
différents registres qui la c­ onnotent, la présence de la chronique à côté
de la notation ­d’événements privés-familiaux font de ce document, au
­contraire, un « osservatorio privilegiato, per l­’individuazione del genere, per
­comprendere i problemi relativi ­all’interpretazione e ­all’edizione dei libri di
famiglia, per analizzare in tutte le sue fasi il ­complesso rapporto che si stabilisce
tra cronaca, storia di famiglia, biografia celebrativa38. »
En appendice à cette édition, sous la direction de Vincenzo Joppi,
on retrouve le texte politique, la Historia della crudel zobia grassa. Pages
qui c­ oncernent les informations sur la révolte, l­ ’emploi de la violence, la
présence et l­’absence de ­l’État, la scène publique et ses protagonistes :
des éléments qui prennent le relief qui leur est dû dans une c­ onception
purement politique de ­l’histoire, telle que celle imaginée dans la jeune
nation italienne par les érudits du xixe siècle.
Mais dans les pages qui marquent la transition entre l­’écriture des
Diarii udinesi c­ onfiée à Azio et la reprise de la tâche des Amaseo se trouvent
quelques notes de ce dernier qui méritent ­d’être prises en ­considération car
elles nous permettent de mieux reconstituer la rédaction de cette Historia.
­C’est dans cette section des Diarii que Gregorio motive ­l’absence du
manuscrit original, en ­l’expliquant par un vol perpétré par les hommes
de Savorgnan et ordonné par le fils naturel de ce dernier, Nicolò Chiribin.
Il dit avoir été menacé à plusieurs reprises de mort du fait même q­ u’il a
entrepris la reconstruction écrite des faits39. Cette annotation porte la date

38 Cicchetti, Mordenti, 1985, p. 88.


39 « 1518, 17 zugno, Io ne son stato a maximi pericoli più e più volte, manezado sula propria vita
da diverse bande et maxime perché io havea facta una historia de tuti li andamenti si de miser
Antonio Savorgnan, capo de parte gelpha, cum tuti li soi seguaci dal principio dela guerra, che
incomenzò del 1509, per fin ala morte de esso Savorgnan, che fu del 1512, adì 27 mazo, et deli
andamentii deli soi aversarii et precipue del horribil caso della zobia grassa, la qual historia me
fu robata et data in man de Nicolò Chieribin bastardo et di altri ­complici ­d’essi Savorgnani : per
il che son stato a maximi pericoli della propria vita da diverse bande, praecipue siandome referito
164 LAURA CASELLA

du 17 juin 1518, et apparaît à la fin de quelques pages dans lesquelles


Gregorio Amaseo raconte de manière synthétique les faits de la zobia
grassa. Ce passage, qui correspond à une dizaine de pages40, porte le titre
Dela sedition e strage dela zobia grassa fatta in Udene del 1511, 27 febraro, et
suit la narration du disciple, qui relate en détail les péripéties de la guerre
entre les armées de ­l’empereur Maximilien de Habsbourg et celles du roi
français Louis XII d­ ’une part, et les troupes de Venise de ­l’autre, mais
qui ne se référait à la révolte q­ u’indirectement en mentionnant la perte
du territoire du Frioul en raison de la trahison d­ ’Antonio Savorgnan41.
La c­ oncise histoire des événements a certainement été c­ omposée en 1518
parce ­qu’est mentionnée la mort du fils naturel d ­ ’Antonio Savorgnan,
Nicolas Chiribin, qui a eu lieu cette année-là. La note finale à laquelle
nous avons fait référence, qui porte la date de 1518, vient ­confirmer cette
hypothèse. Gregorio justifie la nécessité de revenir sur ces années, pour
ajouter, bien que succinctement, ­l’histoire de ces journées tumultueuses,
« per esser cosa memorabile42 », dont aucune « mémoire » ­n’a été faite.
Trois aspects méritent ­d’être soulignés, parmi ceux qui exigent
une analyse plus approfondie. Tout d­ ’abord, les matériaux sur lesquels
Gregorio c­ onstruit sa mémoire. Son entreprise visant à ­combler le vide
dont il se plaint pour donner voix aux massacres, aux pillages et à la
destruction se base, c­ omme il ­l’indique, sur les rumeurs des rues, sur
les bruits et les histoires qui circulaient et perpétuaient la mémoire du
soulèvement43. Rumeurs qui circulent et qui sont des sources du récit
à chaque étape de cet épisode, à partir de ses origines, ­comme nous le
verrons : voix qui prétendent que le Savorgnan a diffamé ses ennemis
à Venise les accusant de favoriser une attaque des troupes impériales
da più bande, ­come ditto bastardo me havea deliberato far al tutto occidere », Amaseo Leonardo
e Gregorio – Azio Gian Antonio, Diarii udinesi, p. 235.
40 Ibidem, p. 224-235.
41 Ibidem, p. 213.
42 « Qui finisse le cose notade per Zuane Antonio Actio, che incominzano qui de sopra ; dapoi dele
quale non siando sta fatta alcuna memoria per mi Gregorio Amaseo perfin al 1513, adi 12
dicembrio, pertanto non fo notado qui de sopra altramente che quel che se ­contien qui de sopra ; et
poi li fo adjuncto per mia man quanto seguita della Zobia grassa, per esser cosa memorabile, qui
de sotto », Ibidem, p. 224.
43 La reconstruction des faits est basée sur « lo ­comun parlar dele piace in gran parte de loro, et
parte de vera intelligentia maxime quelle in la Patria son sta fatte e da noi cognosute positivamente
et senza alcun ornato e poca diligentia », Diarii udinesi, p. 235. Sur la diffusion des nou-
velles, sur ­l’oralité de la ­communication politique et la sphère publique, voir ­Dall’Aglio,
Richardson, Rospocher (éd.), 2016 ; Rospocher, Salzberg (éd.), 2010 ; De Vivo, 2009.
Mémoire de la révolte et mémoires de famille 165

dans la Patrie du Frioul ; rumeurs qui prétendent que ces troupes sont
aux portes ­d’Udine. Le récit ­s’appuie également sur son « intelligence »
directe des faits, Amaseo ayant été un des acteurs. Gregorio est mis en
scène ­comme soutien du lieutenant et, au nom de la vieille amitié qui
­l’avait uni dans le passé aux Savorgnan, intervient quelques heures avant
le début du soulèvement pour que ce dernier arrête le massacre. Une
reconstruction menée par Amaseo grâce au dédoublement du souvenir,
accompagnée de ­l’intention ­d’être bref et direct, et de ­l’utilisation de la
première personne quand il parle de lui-même et de son implication :
ces éléments nous poussent à ­considérer cette mémoire ­comme une sorte
­d’abrégé de ces événements sanglants. Presque c­ omme ­s’il ­s’agissait de
notes préparatoires du produit le plus accompli que sera l­ ’Historia della
crudel zobia grassa, ­l’histoire est placée dans les pages du livre « de la
maison », entre une partie écrite par Azio et la reprise de ­l’enregistrement
des événements classés chronologiquement par Gregorio.
La deuxième ­considération ­concerne, précisément, la nécessité ­d’établir
une c­ omparaison entre ces pages, insérées à une date ultérieure dans les
Diarii, ­confirmant leur ­configuration en tant que mémoire personnelle et
familiale, et ­l’Historia. Une analyse plus approfondie devrait être menée
sur les deux écrits de point de vue du lexique et du style ­compte tenu
des différents publics auxquels ils ­s’adressent.
Le style différent et la structure littéraire de ­l’Historia sont signalés par
des éléments très éloquents que nous mentionnons ici brièvement dans
le but de souligner ­l’épaisseur historico-politique que ­l’auteur donne à
­l’écriture. Dans la première partie, Amaseo présente le cadre historique,
dans un ­contexte large et non simplement local, celui des guerres ­d’Italie.
Ainsi, les deux factions qui s­ ’affrontent dans la région du Frioul ne sont
pas présentées, sur le mode local, ­comme Strumieri et Zambarlani, mais,
­comme dans le reste de ­l’Italie, en tant que Guelfes et Gibelins. Dès les
premiers chapitres est décrit le rôle d­ ’Antonio Savorgnan, sa direction et
donc sa responsabilité dans l­ ’épisode. Sa puissance est ancienne, dérivée
de ­l’hégémonie de sa famille, enracinée dans les c­ ommunautés, dans les
villages, dans la ville, mais rénovée à la suite du pouvoir légitime que
lui attribue Venise en tant que chef de la « cernide », les ­contingents des
paysans armés pour la défense du territoire.
Amaseo prend ouvertement position c­ ontre lui et il montre quelques
épisodes advenus au cours des années et des mois précédents ­comme
166 LAURA CASELLA

signes préparatoires de ce qui allait ensuite exploser durant la révolte du


Carnaval. Il décrit les premières émeutes, le soulèvement du peuple, les
bruits qui c­ ommencent à circuler, c­ omme nous l­ ’avons vu, les soupçons
qui empoisonnent le climat effervescent de cette fête qui se transformera
vite en tragédie44. Il expose les premières négociations et rapporte – à
la troisième personne, cette fois, pour donner une plus grande objec-
tivité au récit –, son intervention, en attribuant à « Gregorio Amaseo
“dottore veramente” » le rôle de médiateur et en le créditant d ­ ’efforts
pour empêcher le massacre45. Il énumère en recourant à la personnifi-
cation les séquences de meurtre qui suivent. « Del caso e morte di Isidoro
Turriano », « Della morte di Alvise Turriano », « Della morte ­d’Apollonio
Gorgo […] », « Del caso e morte di Soldoniero », « Del caso e morte di messer
Theseo Colloredo ». Ce ne sont là que quelques titres des chapitres qui
racontent au cas par cas, famille par famille, la façon dont se sont déroulés
les massacres et les pillages des demeures46. La volonté de porter une
attention particulière à chaque homme, de mettre ces individus, un par
un, au centre du récit nous semble marquante : ­d’un côté est exprimée
la mesure anthropologique de la destruction et de la tragédie ; de ­l’autre
la mémoire politique de tous ceux qui ont été éliminés, mémoire qui
doit être réhabilitée à travers cette reconstruction. ­L’Historia montre
ensuite ­l’extension du soulèvement ­comme une tache ­d’huile hors des
murs de la ville et ­l’attaque et la destruction de nombreux châteaux
et demeures aristocratiques ; des hommes et des femmes qui fuient en
apprenant ­l’arrivée des rebelles ; des femmes avec leurs enfants, des
femmes enceintes qui accoucheront une fois arrivées à Venise. Andrea
Loredan, chef du Conseil des Dix, envoyé à Venise quelques semaines plus
tard pour assister le Lieutenant et instruire le procès ne prendra aucune
mesure ­contre Savorgnan, qui sera tout de même ­convoqué à Venise pour
44 Sur ces aspects il c­ onvient de renvoyer à Muir, 1993.
45 Gregorio Amaseo, Historia delle crudel zobia grassa et altri nefarii excessi et horrende calamità
intervenute in la città di Udine et Patria del Friuli del 1511, en appendice à Bianco, 2011,
p. 111-188 (p. 133). Les termes « vraiment docteur » sont polémiques et liés au ­conflit
avec Antonio Savorgnan, qui aurait été diplômé de l­’Université de Padoue mais qui,
aux yeux ­d’Amaseo, appartenait à un autre type de noblesse qui n­ ’avait rien à voir avec
la vertu personnelle ni avec le savoir, donc avec les valeurs dans lesquelles la nouvelle
noblesse de la ville se reconnaissait.
46 ­L’édition préparée par Furio Bianco, à la différence de celle de Vincenzo Joppi au xixe siècle
qui est prise cependant c­ omme référence, a réintroduit la division de la chronique en
chapitres tels q­ u’ils figuraient dans le manuscrit utilisé (BCU, Fondo principale, ms. 561).
Mémoire de la révolte et mémoires de famille 167

être entendu. « Con sommo stupor de tutti [e] ­con pochissima satisfation delli
offesi » (à la grande stupeur de tous [et] au grand déplaisir des offensés),
Savorgnan reviendra dans la lagune. Justice ­n’a pas été rendue, tout du
moins pas la justice des hommes. La justice divine, « la qual mai non
falla47 », ne manquera pas de se manifester cependant : les tremblements
de terre, la peste, la famine sont autant ­d’événements qui expliquent,
avec une dimension surnaturelle, la tragédie et ­confirment les signes
­qu’Amaseo signale ­comme prémonitoires – la « pessima ­constellazione » qui
caractérisait astrologiquement cette journée48 – auxquels s­’ajoutent les
anges aux épées couvertes de sang entourés par le feu, vus par « diverse
persone religiose et dignissime di fede » au dessus de ­l’église Saint François,
près de la demeure de Savorgnan49.
La synthétique description du texte – qui raconte le retour de
Savorgnan, vu ­comme une personnification de la peste, la perte puis
la récupération, grâce à Girolamo Savorgnan du territoire du Frioul, la
trahison et la mort ­d’Antonio – laisse entrevoir une richesse symbolique
et historique qui demande un approfondissement, qui devra nécessaire-
ment passer par une collation soignée des manuscrits et des éditions de
cette même Histoire. Pour la ­contextualisation des écrits, la ­comparaison
avec les autres écritures familiales des Amaseo, notamment les Diarii
et les lettres que les membres de la familles échangeaient, sera d­ ’une
extrême importance50.
Cette perspective de recherche sur les écrits de la famille nous ­conduit
en effet à mettre en évidence un troisième élément de réflexion. Il aborde
les raisons pour lesquelles en 1518 Amaseo insère sa reconstruction
synthétique de la révolte du jeudi gras et rédige – bien que, nous le
répétons, tout soit encore à clarifier sur les temps et les modalités de
cette écriture – l­’Historia della crudel zobia grassa.
­L’hypothèse est que cette histoire, qui insiste de façon accusa-
toire sur l­’épisode et sur les responsabilités de Savorgnan, émane
de la plume d­ ’un membre de la plus récente noblesse urbaine, de ce
patriciat qui se renforçait dans son rôle social et politique grâce aux
47 Ibidem, p. 162.
48 Ibidem, p. 137.
49 Ibidem, p. 163.
50 Une partie des lettres se trouve à la BAM, Cod. A 59 inf, c­ ontenant les epistole en latin
et les lettres en langue vulgaire échangées par divers membres de la famille de plusieurs
générations. On trouvera une première utilisation de ces sources dans Casella, 2015.
168 LAURA CASELLA

réformes introduites par Venise dans les règlements du gouvernement


de la ville51, au moment où Girolamo Savorgnan tente de reprendre
le c­ ontrôle de celle-ci.
Fort de ses entreprises militaires, menées avec ténacité dans le but
­d’éloigner de la « réputation » de la famille le souvenir de « quella male-
detta giornata52 », le cousin et adversaire ­d’Antonio présente des requêtes
à la Sérénissime : la restitution à sa maison ­d’une prérogative fiscale sur
les marchandises en transit, qui lui sera c­ oncédée, et celle du droit de
siéger, en tant que huitième membre, lors de la c­ onvocation des Sept
députés de la ville53.
Si une reprise de ­l’influence de la famille dans la politique de la ville
est fortement c­ ontestée par plusieurs secteurs – des vieilles familles de la
faction Strumieri, c­ omme par exemple, les Cergneu – il faut aussi souli-
gner ­qu’elle ­constitue une véritable menace pour ceux qui ­construisent
leur ascension sociale grâce à la nouvelle organisation des institutions
urbaines, c­ omme les Amaseo.
Même si Girolamo s­’efforce de montrer q ­ u’il n
­ ’y a rien à craindre
du retour des Savorgnan dans la politique de la capitale de la Patrie
du Frioul, parce que « non è verosimile che una famiglia sforzi et violenti un
populo, una terra della qualità d­ ’Udine54 » (il ­n’est pas vraisemblable q­ u’une
famille force et violente un peuple, une terre de la qualité d­ ’Udine), il
est facile de c­ onstater – plusieurs ambassades à Venise, des écrits et des
mémoires en témoignent – que la possibilité de renouer une alliance
entre les Savorgnan et le peuple est un véritable motif de préoccupation
politique pour les familles du patriciat.
À côté de ses projets pour sa carrière ­d’homme de lettres et celle
de son fils Romolo, c­ omme le montre leur correspondance, qui met en
évidence la centralité du personnage de Gregorio pour la famille désor-
mais éparpillée en Italie55, il ne ménage pas ses forces durant toutes ces
51 ­L’abolition de l­ ’Arengo, assemblée du peuple, et la réforme, dans une logique aristocra-
tique, du Conseil qui ­comportait désormais 150 nobles et 80 membres du peuple, avaient
favorisé ­l’émergence ­d’un petit nombre de familles du patriciat urbain qui poursuivaient
une politique antiféodale et antipopulaire en même temps.
52 Ainsi Girolamo parle du 27 février 1511 dans le discours ­qu’il prononce devant les magis-
tratures vénitiennes, Per il sentar di mezo delli deputadi della terra ­d’Udine. Voir Casella,
2003, p. 291.
53 Casella Laura, 2003, p. 85 et suiv.
54 Girolamo Savorgnan, Per lo sentar di mezo, dans Casella, 2003.
55 Casella, 2015.
Mémoire de la révolte et mémoires de famille 169

années pour ­conserver la position que les Amaseo ont atteinte dans le
­contexte politique ­communal.
La défense de sa maison, de la nouvelle élite patricienne à laquelle
il appartient et qui a grandi dans le ­contexte de la réforme adminis-
trative de la ville d ­ ’Udine, qui revendique son rôle de capitale de la
région parce ­qu’elle est le siège des tribunaux de Venise, forment un
tout dans la mémoire reconstruite et critique – ­confiée aux pages de
la Historia – d­ ’une révolte qui était le dernier et terrible sursaut d­ ’un
ordre politique désormais dépassé.
Ses mots ne peuvent pas lier plus clairement le plan familial et
personnel, celui de l­’appartenance sociale et le plan politique, de la
ville et de ­l’État, sanctifiés par ­l’observance religieuse et la paix : « je
­n’avais jamais fait une telle opération ni de réforme de nouveaux ordres
de notre ville et Patrie, ni ­d’une telle histoire vulgaire pour offenser
­quelqu’un, mais seulement par souci de justice et de liberté et pour le
bien ­commun, à la gloire de Dieu, grand et éternel, et de la tranquilité
de notre ville et Patrie56. »
La ­conclusion que nous pouvons en tirer, pour reprendre le fils ­d’un
raisonnement qui tend à suggérer ici le potentiel d­ ’une resémantisation
de la tradition de ­l’écriture sur la révolte de 1511, est de réfléchir sur
richesse que représentent les sources personnelles non seulement pour
­l’histoire familiale, mais encore pour l­ ’histoire politique, dans un jeu de
miroirs qui leur est utile et propre, chacune étant le miroir de l­’autre.

Laura Casella
Università di Udine

56 Diarii udinesi, p. 235.


TAKING ACCOUNT
AND MAKING MEMORIES
IN THE ENGLISH CIVIL WAR

In 1674 during an inspection of churches in the Diocese of Worcester,


the inhabitants of Alcester in Warwickshire reported that their “church
Bible is imperfect, the Apocrypha being torne out by the Scots”1. They
were recalling events almost thirty years earlier in the summer of 1645
when the Scots army, allies of the English parliament, had marched
south to besiege (without success) the royalist city of Hereford. Scores of
Scots from the Lord S­ inclair’s regiment had taken free quarter in Alcester
for several days on their way to and from Hereford. A few ­months’
later the exactions and misdeeds of these Scottish forces loomed large
in financial accounts drawn up by the people of Alcester of losses they
had sustained to the parliamentarian war effort. The Scots had taken
free-quarter (forced billeting) for as many as eleven days; their horse
had c­ onsumed or spoilt large amounts of hay and grass, and the soldiers
had plundered much precious property, as described at some length and
with indignant detail by their owners. The Scots had killed “two fat
heifers” belonging to George Tongue “which were worth at the least”,
£7; they had taken linens worth £1 from Thomas Woodward, while
Richard Jennings provided a long list of “losses he sustained by the
Scots army” including three sheets and six napkins, “a hempen smock”,
a pair of new shoes and a table-cloth, valued in all at £6-3-4d2. Drawing
up financial accounts enabled Alcester people to record a dramatic and
oppressive incursion of strangers into their small ­community, offering
more detail than a purely factual or monetary record demanded. And
the memory of the Scots persisted, prompted by damage to a signifi-
cant piece of collective property, although we should acknowledge that

1 Morgan, 1986, p. 46. I owe this reference to Dr Maureen Harris.


2 The National Archives of the United Kingdom (henceforth TNA) SP 28/201.
172 ANN HUGHES

tearing out the Apocrypha was not a straightforward act of vandalism,


but a ­considered, deliberate attempt to remove a section of the Bible
not regarded as by the Scots as scripturally valid.
The experience of Alcester supports the current scholarly c­ onsensus
that the British Civil Wars, in England as well as in Scotland and Ireland,
were burdensome ­conflicts, with heavy costs to inhabitants in blood and
treasure. In England, at least a tenth of the adult male population saw
military service, and the loss of life (in battle, and indirectly through
the spread of disease) may have been greater, proportionately, than that
in the first world war3. The burdens of war, and the ­complexities of
allegiance, ensured also that E ­ ngland’s civil war spawned a Revolution.
­Parliament’s aims at the start of the civil war were, in some ways,
modest: to recall King Charles I to London, and to rescue him from
his “evil counsellors”. But from the start also, parliament (or more pro-
perly the House of Commons) presented itself as the representative of
the people, and sought to rally “the people” to its cause, while it also
claimed to be fighting for true religion against popery and antichrist.
Parliamentarianism was thus a social and an ideological coalition,
capable of creative transformation under the pressures of war and the
perplexities of achieving settlement; in formal terms it c­ ulminated in
the public trial and execution of an anointed king for crimes against
his people. Broad mobilisations of the people encouraged debate over
fundamental questions of political authority and religious affiliation4.
In fighting and winning the war against Charles I, the parliament
imposed heavy demands on the population, through unfamiliar mili-
tarisation and drastically increased taxation. Levies on land, movable
property and ­consumption rose to as much as ten times pre-war levels,
and involved a much higher proportion of the population. Besides formal
levies, the civilian population was subject to the forced provision of board
and lodging for soldiers and their horses, and sometimes to unauthorised
plunder of property. In parliamentarian ­controlled areas in particular,
the power of the state impinged on the population in unprecedented
and enduring ways5. P ­ arliament’s state-building war effort also entailed
intensified demands for information from local c­ ommunities. The war
3 For a range of views see Carlton, 1998, p. 272-305; Donagan, 2008.
4 Recent work on the nature of the civil war includes Braddick, 2008; Hughes, 2006,
p. 192-204.
5 Hughes, 1987, chapter 7; Braddick, 1996; Id., 2000; Wheeler, 1999.
TAKING ACCOUNT AND MAKING MEMORIES 173

generated intimidating amounts of paperwork, particularly financial


records, from soldiers and civilian officials, individuals and c­ ommunities.
Historians have not fully exploited the potential of this material, which
is evidence not only for the practical economic or military burdens of
war, but also for the interactions between central authorities and local
­communities, characteristic of early modern English state formation,
and for the agency of individuals and groups at many social levels.
The records created were never simply the product of straightforward
­compliance with central orders, but created through a participatory
process in which the population engaged with and reflected on “the
state”, or versions of the state, to some extent on their own terms and
for their own purposes. The promise of receiving pay arrears promp-
ted parliamentarian soldiers to produce mini-autobiographies of their
service; while the prospect of pensions for maimed parliamentarian
soldiers in the 1650s, and royalists after 1660 encouraged old soldiers
to recount the ways in which the wars had left indelible marks on their
individual bodies6. This chapter uses financial records of losses drawn
up by hundreds of English parishes in the mid-1640s, including indi-
vidual accounts from thousands of people, male and female, rich and
poor. It argues that paying attention to the forms and language of these
accounts, reveals how apparently mundane recollections of the practical
effects of war became ways of recording, understanding and defining
the meaning of personal experience, marking the broader emotional
and political impact of civil war7.
Parish accounts were produced under the auspices of a central
­committee of accounts established by parliamentarian ordinance in
February 1644, with powers to establish local sub-­committees in the
provinces. An important later measure, an ordinance of 27 June 1645,
empowered the sub-­committees to demand from local c­ ommunities
an account of everything that had been “received, taken, collected,
raised, seized or sequestered” by troops and officials operating under

6 Stoyle, 2003, p. 204-226.


7 I use the term parish accounts for ­convenience, although they were c­ ommissioned according
to administrative divisions of parishes, wards and townships. My discussion is based on
systematic research in the parish accounts of Warwickshire on which I have worked for
many years, with more impressionistic use of material from other areas. Most are in the
“Commonwealth Exchequer Papers”, more properly the records of ­parliament’s Accounts
and Army Committees in the United K ­ ingdom’s National Archives: TNA SP 28.
174 ANN HUGHES

the authority of parliament. The accounts were thus to cover unautho-


rised demands, and enforced ­contributions (particularly free-quarter)
as well as formal taxation but not anything seized or collected by the
­king’s forces. This was because the drive for a full account of civil war
exactions was associated essentially with moderate parliamentarians,
who were suspicious of the arbitrary and perhaps corrupt tendencies
of the militant war effort, and anxious to achieve a peace with the
king that would restore more familiar forms of government; such
men dominated the central accounts c­ ommittee and many local sub-­
committees8. Surviving parish accounts are most numerous in counties
like Warwickshire and Northamptonshire, where there were active
sub-­committees; in both cases about 150 parish accounts survive,
covering three-quarters of the ­county’s parishes. The enthusiasm with
which many c­ ommunities responded and the very detailed nature of
their accounts, suggest that the invitation to draw up accounts struck
a chord with people, beyond support for particular parliamentarian
factions. When the English parliamentary authorities asked villages to
submit accounts, they presumably expected orderly and systematic lists
of levies and losses. In some counties, lists of questions or printed forms
were provided to structure responses, but most parish accounts were
nonetheless ­compilations of individual returns, idiosyncratic, personal
and detailed narratives of taxes paid, and precious possessions lost, and
of ­complex encounters with soldiers, within or passing by their homes.
Local agency transformed the more abstract or instrumental demands
of the “state” into personal recordings of experience.
There is now a rich scholarship on the political, social and ­cultural
importance of accounting. Accounting as a practice and a genre was
ubiquitous in early modern English ­culture, for individuals and collective
bodies alike. Drawing up accounts served obvious practical purposes
in peace and war, but it was more than this. As Craig Muldrew and
Alexandra Shepard have demonstrated, English people were accustomed
and adept at assessing the credit-worthiness of their neighbours, through
broad-brush, but effective appraisal of the value of their moveable
goods9. Credit-worthiness in itself involved ­conceptions of honesty
8 A fuller discussion of the generation of the material and its potential is in Hughes, 2016;
Pennington, 1961; Hughes, 1987, p. 238-250.
9 Muldrew, 1998 especially p. 62-67; Shepard, 2015.
TAKING ACCOUNT AND MAKING MEMORIES 175

and trust, underlining the extent to which financial accounting was


a process with profound normative or moral ­connotations. The notion
of “holding to account” evokes c­ oncepts of justice, fair-dealing, and
restitution, while the process of “giving an account”, indicates that
accounting also involved the telling of stories, the subjective narrating
of personal experience. Financial accounts might ultimately develop
into forms of life writing10.
In the ­context of a burdensome and troubling civil war, accounting
was furthermore a crucial form of recollection and memory making.
Accounts were c­ ommissioned from c­ ommunities, and in a minority
of cases, only collective totals were reported. More often, however, the
­community accounts were based on evidence presented or bills drawn
up by individuals on behalf of themselves and their households. The
accounts were based on direct recent experience, from 1640 until 1646
or 1647. We have access, then, to individual or autobiographical memo-
ries of the recent past, produced in cooperation and c­ onsultation with
neighbours. Such memories have received ­comparatively little attention
from early modern historians. The most influential work on early-modern
memory has focused on social or ­communal modes, developed and sus-
tained over the very long-term; the characteristic focus is on the flexible
and frequently renewed understandings of ancient, normative custom,
deployed in struggles over access to resources11. Although all individual
memory develops within collective social and c­ ultural c­ ontexts, we need
to be alert to the particularities of autobiographical memory, what has
been called the gap between the public outside and the private inside
of memory12. Recollection of financial exactions operated within both a
collective and an individual framework: c­ ommunities frequently c­ ontest
their overall liabilities through appeals to long-standing c­ onventions,
but particular losses and payments inevitably distinguished between
neighbours. Memories of loss can thus illuminate the relationships
between individual and collective forms of remembering, while they
also remind us that memory is “a process of selection and ordering that
starts close to the events themselves” (Pollmann and Kuijpers). Civil
10 See in particular, Soll, 2014; Smyth, 2011.
11 See in particular, Wood, 2013; Fox, 1999, p. 233-256; and for perceptive general approaches:
Cubitt, 2007; Susannah Radstone and Schwarz, 2010.
12 Radstone and Hodgkin, 2005 quoted by Edward Legon, 2015, p. 34; Wulf Kansteiner,
2002, p. 179-197.
176 ANN HUGHES

war accounts involved precisely a process of organising, interpreting


and narrating recent, difficult experiences13.
There is a rich, developing body of work on memories of early
modern European c­ onflicts, and specifically on the wars of the 1640s
in Britain and Ireland. The main focus here has been on the period
after 1660, using, for example, accounts of the civil war in literary
works of history and auto/biography; and c­ ommemorative sermons,
and other evidence of partisan and c­ ontested c­ ommemorations (of the
regicide, or of particular military events such as the sieges of Taunton
and Gloucester). This work inevitably privileges the memorial practices
of elites and activists capable of articulating accounts of the past with
some political and religious sophistication. Analyses of legal proceedings
against “seditious words”, expressing royalist sympathies in the 1650s
or parliamentarian/republican allegiance after 1660, have revealed
enduring partisan ­commitment amongst activists at all social levels,
while Imogen Peck has pointed to the deployment of rival accounts of
civil war allegiance as ammunition against opponents in legal disputes
that began about something else entirely14. Recollections of financial
exactions through accounting are more opaque and ambiguous in their
political implications, but they offer some access to the memorialising
practices of a wider range of the population. While local officials had
overall responsibility for drawing up the ­­community’s accounts, most
are ­compilations of individual written or oral testimony. It is clear that
in many cases oral evidence was taken down by a scribe. Sometimes a
statement began using the formal, “he saith”, in the manner of a legal
deposition, before evolving into a more direct first-person narrative.
Lott Keyte of Great Wolford, Warwickshire, described his personal
losses at length in a statement that began in the third person: “he saith
that upon the Lord Brooke his request a horse and furniture … did
in the whole amount to” £6. 5s, but soon became a personal narrative:
“about August 1643 one Hastings Ingram then taking up arms for the
parliament I did furnish him with four souldiers”, or:
In July 1645 by reason of my inabilitie and oft plunder by the k­ ing’s side, then
having but three milch cowes for the maintenance of me and my family, and

13 Pollman and Kuijpers, 2013, p. 1-23, especially, p. 14-15.


14 Amongst a growing literature see: Neufeld, 2013; Chedgzoy, 2007; Stoyle, 2014, p. 95-119;
Peck, 2013, p. 39-53.
TAKING ACCOUNT AND MAKING MEMORIES 177

being not able to pay Contribution, John Ward, a corporal to Captain Wells
tooke from me two milch cowes out of three worth £5 although I did give
him a particular of my losses and the necessities I and my family was in15.

Keyte was, or had been, a relatively prosperous man who had served
as village c­ onstable, but his evidence demonstrates that illiteracy was not
a barrier to giving in accounts, while civil war exactions were imposed
on a wide range of the population. Thus the parish accounts offer access
to the recollection and ordering of experience by a significant propor-
tion of the population. Comparison with later taxation records suggests
that at least a third of households are represented in the accounts from
Warwickshire parishes, and many were much more inclusive. The ­county’s
accounts encompassed the losses of Thomas Barnet of Leek Wootton, “a
very poore man and hath nothing but what he getts by his dayly labour”;
others claimed to include “the accounts of cottars and laboring men”; or
“the charges and losses of every particular parishioner.”16

REMEMBERING AND FORGETTING

All studies of memory have stressed the inextricable ­connections


between remembering and forgetting. Drawing up effective, or in early
modern terms “perfect” accounts required particularly strenuous feats of
recollection, and necessarily raised the ever-present danger of forgetting,
of falling short of perfection17. The disruptions of war intensified these
difficulties and some ­communities despaired. When Great Wolford sent
in a second account they insisted they had obeyed all warrants sent to
them by the ­Parliament’s officers:
But forasmuch as the most part of the sayd Inhabitants are husbandmen and
unlearned men, and have kept no account of theyr great charges and losses

15 TNA SP 28/182, Part Three, “Woolverd”, p. 3-4.


16 For these examples: Leek Wootton: TNA SP 28/185, Long Lawford: SP 28/183/33;
Farnborough: SP 28/182. See further, Hughes, 2016.
17 For examples from other early modern c­ onflicts: Pollman and Kuijpers, 2013, p. 176-196;
Wilson, 2013, p. 153-175. Broomhall, 2013, p. 251-267. For remembering and forgetting
as accountants: Smyth, 2011, p. 120.
178 ANN HUGHES

for these fouer or five yeares last past; nor can possibly so call to mynd the
sayd charges every way as to make any perfect Account thereof. They thus
desired to be excused from making any further return18.

More c­ ommonly, however, those responsible for c­ ompiling the accounts


stressed the importance they attached to providing a ­comprehensive,
accurate return and the efforts they had made to achieve this, while
acknowledging problems and limitations. In both collective summa-
ries, and individual accounts, apologies and qualifications abound. The
­comments from the officials who drew up the accounts of Kings Cliff
in Northamptonshire are representative: “Wee whose names are unde-
rwritten have endeavoured with much care and paines to make parfect
our booke of Accompts soe neere as wee can”. In the same county, the
inhabitants of Wood Newton stressed their “diligent inquiry” and the
people of Ravensthorpe and Teeton had “faithfully collected” as much
information as possible although they acknowledged “in many places
they be defective yet have we done our utmost indeavour and cannot
possibly supply the defects thereof by reason that many of the accounts
of the townes are lost and many men have forgotten upon some occasions
what sumes they payd and to whom.”19
Individuals added their own hesitations. A Cheshire ­widow’s accounts
were headed: “A perfect accompt of quartering and losses which Margaret
Barker of Gavell in Over hath sustained to her best remembrance”; the
claim of perfection immediately undermined by the acknowledged
fragility of memory. Another widow, Jane Banam, acknowledged her
accounts were not perfect: “I cannot tell to whome or what was paide
to any man more than I have set downe by reason my husband is dead
and soe longe as the tax was paid I paid it though my husband died.”20
We should not assume that women were more likely to be unsure or
forgetful, and within households it was often women who kept the
accounts. Hence Nicholas Riland of Stratford on Avon listed £2 he had
paid for the excise on beer, as “his wife informed him whoe only deales
therewith.”21 Men were equally cautious; nearly all the accounts from
18 TNA SP 28/185.
19 TNA SP 28/171 f. 649, 600; SP 28/174 Part 4.
20 British Library, (hereafter BL) Harley MS 2126 f. 33r; TNA SP 28/201, Cross Cheaping
Ward, Coventry.
21 TNA SP 28/136 f. 303r; Whittle and Griffiths, 2012.
TAKING ACCOUNT AND MAKING MEMORIES 179

Willoughby in Warwickshire were hedged with qualifiers: Thomas


Clarke accounted for what was paid “to the use of the Parlliament soe
farr as I can give in to my knowledge”; Walter W ­ atson’s accounts were
“as neare as I can remember”; William C ­ larke’s “according to my beste
remembrance”. The difficulty in remembering was a c­ ommon problem,
but the subtle differences in the wording used indicate these were per-
sonal rather than ­conventional responses22.
As the examples of Great Wolford and Ravensthorpe and Teeton
suggest, some of the reasons for incomplete accounts were practical:
officials were dead, paperwork had been lost or never kept. But these
excuses and apologies also suggest a reluctance to ­confront and itemise
difficult and sometimes traumatic experiences. The particular insistence
on lost records surely reveals also a profound c­ onnection between the
disruptions of civil war and the fragility of the local archive. Local records,
kept in a parish chest, were precious and authoritative, “a repository
of ­communal memory”23. The war damaged the sense of ­continuity
with the past embodied in a systematic written record. Real anxiety lay
behind the excuses of the Northamptonshire parishes already quotes,
or in the lament of the ­constables of Wibtoft (Warwickshire) who
acknowledged their accounts were imperfect, “by reason of the death
of our then ­constable and the losse of many of our noates and papers
by occasion of theis calamitous distractions.”24 On the other hand
attempting to produce the best possible account for an official purpose
could be a means of making calamity more bearable.

PATTERNS OF RECOLLECTION

The shared ­contexts in which people placed their civil war losses under-
line the social nature of remembering, while personal and specific details
and forms of expression reveal individual experience. I will deal briefly in
turn with temporal markers, the enumeration of lost possessions, ­complex
22 TNA SP 28/184, Part Five.
23 See, especially, Wood, 2013, p. 249-250, 258-260.
24 TNA SP 28/182, Part Three.
180 ANN HUGHES

understandings of places transformed by c­ onflict, accounts of free-quarter


and of violence. The detailed examples reflect the superfluous information
supplied by villagers, a superfluity that indicates the meanings giving in
accounts had beyond a simple response to an official enquiry.
Memorialisation of specific charges was linked to major incidents
such as battles although, these were more ­commonly and evasively
described as “fights”, as indeed was the case years later when maimed
soldiers explained where and when they had been wounded25. In the
town of Warwick, the siege of the castle in the early stages of the war
was an obvious temporal marker, while another was the nearby battle of
Edgehill (or Kineton fight) which left many wounded quartered in the
town. Richard Morell, a Warwick blacksmith dated his losses from “the
siege at Warwick Castle which began the 9th of August 1642”. Midlands
accounts also mentioned the battles of Naseby and Cropredy while in
Cheshire, the struggles over Beeston castle, were an aid to memory, as
when Ralph Bostock remembered losses of £1 when Captain B ­ uckley’s
troops destroyed “with their horses in corn and hay and burned my
fire wood when Prince Rupert relieved Beeston Castle”. Memories of
Kineton fight in Warwick were intensified by the harsh weather of the
following winter, Thomas Turpin of Market Place Ward listed: “For
wood spent and burnt up” by several captains and “their soldyers about
one hundred and forty that came from Kington fight, the weather then
being extreame cold and many of the said soldyers wounded”; while
his neighbour, Joan Harrison also remembered the “very hard & frosty
weather” of the winter of 1642-164326.
A “surplus of meanings” applied to ­people’s things; they were crucial
markers of loss that mattered emotionally, as demonstrated in other
wars, through the depositions of dispossessed Protestant settlers in
1640s Ireland, or in claims for restitution after more recent ­conflicts27.
25 Stoyle, 2014, p. 213.
26 TNA SP 28/184, Part One, the accounts of High Pavement Ward for Morell, and Market
Place Ward for Turpin and Harrison; BL Harley MS 2126 f. 16r (Over in Cheshire).
27 Roche, 2000, p. 7. In the depositions collected from Protestant settlers in Ireland after
1641, many informants listed their lost possessions in copious detail whereas officials
­considering circulation of the material crossed out these lists, leaving only the bare cash
total: see, for example, the depositions from Joane Crews of Cork, and Anthony Farmer
of Tipperary: 1641. As Leora Auslander has described, French Jews returning from
deportation in 1945 mourned their “lost lives through petitioning… for restitution of
the c­ ontents of their homes”. As in civil war England this process began as a response to
TAKING ACCOUNT AND MAKING MEMORIES 181

Goods given to, or taken by soldiers were defined precisely and des-
cribed in detail, only very rarely were they listed with a monetary
value alone. Widow Crafts of Long Lawford, Warwickshire, had sent
provision worth 3s. “to the heath to the earle of Essex when he cam
downe first from London, 8 gallons of drinke one lofe of Bread and 2
cheeses”28. This precise delineation of everyday necessities is one example
amongst thousands of personal descriptions of lost possessions, linens,
plate, cattle, clothes, dishes, food, hay and grass. The specific goods
themselves mattered as much as their estimated cash value, whether
they were c­ ommonplace provisions, albeit difficult to spare, or more
valuable c­ onsumer goods. One of Widow C ­ rafts’ neighbours, Thomas
Webb, listed “a boke the practis of pietie and a pare of spures and a
table napkin a pare of gloves and a band and a handcarcheve”, taken by
Sir William W ­ aller’s men, while another, Edward Atkins had lost the
same widely read book as well as “a hat and a jackit Coat and a new
pare of stocings for a man”, to the same soldiers29. The term “plunder”,
a relatively recent English coinage, was frequently deployed as when
John Chantler of Church Lawton in Cheshire listed, “Plundered from
him, by souldiers that weare under Command of Sir William Farefaxe,
Two flaxon sheets, five yards of woollen Cloath, two silke garters, one
hatbande, sixe hand carchaffes, Two bands & one payre of stockings”,
valued in all at £130. John Burton, a Coventry tiler, indignantly listed
property, “lost by the Scots these goods following which they violently
took from him”, including a musket and a sword, a ­woman’s coat, three
pairs of new stockings, new sheets, pewter dishes and a brass kettle, and
“one hogshead of strong beer”, worth in all about £8. Where many poor
people relied on second-hand goods, it was important to stress where
new possessions had been taken, and one of B ­ urton’s neighbours, Richard
Lakins, also emphasised that the goods “plundered by the Scots” were
all new, including a new belt, a new pair of shoes and a new ­comb31. As
plundered goods were vividly described, so the experience of plunder
a bureaucratic demand, but “rarely in fact ­complied with it”; as in England the petitions
included irrelevant or superfluous detail, and lapsed into narrative: Auslander, 2005,
p. 1015-1045. I am grateful to Margot Finn for this reference.
28 TNA SP 28/183/33.
29 TNA SP 28/183/33.
30 BL Harley MS 1943 f. 13r.
31 TNA SP 28/174, Part One, the accounts of Gosford Street Ward, Coventry.
182 ANN HUGHES

was “narrativised”, made part of a story as when Henry Greswold of


Rowington, a household servant to a wealthy Catholic widow, noted
the loss of money in his purse, his clothes, and his bed linen, and also
mentioned how his hat, worth an improbable 6s 8d had been taken
directly from his head32.
A sense of place is crucial to processes of memorialisation and civil
war memories are infused with a powerful sense of spaces violated, and
familiar places rendered strange and vulnerable. Accounts of free-quarter
and plunder are narratives of soldiers on the move, to and through the
place of account, as when Robert Manyer, a cottager of Abbots Salford
in Warwickshire explained that “when William Waller went by us it
cost me in free quarter and grass” 10s, or Robert Bridges of Daventry
listed a horse worth £6 “taken away by the Earle of Essex his Army the
next day after Edgehill fight when they came through Daventry”, while
other Northamptonshire villagers recorded the marches of the Earl of
­Manchester’s forces through the county. Amongst the charges of Mr
Christopher Desborowe of Stanion “since these troublesome times” was
the loss of a horse worth £6 “at the Returne of the Earle of Manchesters
Horse out of the North”, while in Kings Cliffe in the same county,
John Wildbore had given quarter to these forces “passing to and from
York”33. Villages have become vulnerable thoroughfares, defenceless
in the face of marching armies34. Hence Cheshire villagers noted the
losses to Scots soldiers heading north “when the Scotts Army did march
thorow our county”, or more specifically, “when the Scotts marched from
Hereford towards Yorkshire in August 1645”35. As we have seen with
Alcester midlands villagers noted the earlier depredations of the Scots
on their way south towards Hereford: as seen also in Studley where they
listed “free quarter to the Scottish Army when they marched by us, the
Lord Lanarks Regiment quartering with us”36. Military mobility was
one c­ ommon theme, while another was the presentation of nearby and

32 TNA SP 28/185 f. 49v.


33 TNA SP 28/185 (Abbots Salford); SP 28/171 Part One (Daventry and Stanion); Part Four
(Kings Cliffe).
34 For the importance of place to memory: Whyte, 2007; Hindle, 2000; Walsham, 2012,
p. 899-938; Wood, 2013.
35 BL Harley MS 1943 ff. 29r, 39r.
36 BL Harley MS 2126 f. 24; For a Worcestershire example of losses to the Scots, see the
accounts of Hartlebury: TNA SP28/187 Part One.
TAKING ACCOUNT AND MAKING MEMORIES 183

familiar places as militarised, politicised and dangerous sites, of battles,


garrisons or ­officials’ head-quarters. Widow ­Craft’s heath taken over by
the Earl of E­ ssex’s forces is one example; another is the presentation in
Cheshire accounts of the once peaceful market town of Nantwich as a
centre of military and official authority issuing incessant demands for
money and service. Many of the inhabitants of Church Lawton recalled
summons to serve as “cudgelers” (poorly armed temporary soldiers), at
very short notice, Jeremy Brownell listing his journeys to “Namptwiche
when siege was first layd to Chester”. Even closer to home, Ralph Bostocke
of Over in Cheshire, remembered how: “Captain Buckley at the retreat
from Beeston Castle kept a horse gard over against the house… and
did eate and distroy with their horses in Corne and hay and burned my
fyre wood”37. Such depredations of the immediate environment were
most c­ ommon in garrison towns, where building fortifications wreaked
much damage on homes and gardens, so widow Eedes of Warwick
­complained that “she had a very great Elme tree grew in her back syde
which did much shelter her house from the vyalence of the wynd which
at the tyme of makeinge the Bulwarks was cut downe and taken away
by the soulders whoe made her pay for the Chypps thereof (haveinge
noe satisfaccon for the tree, which synce it hath cost her 30s in repaires
by reason of the wynd and wilbe a c­ ontynuall charge”38.
The most intimately violated places were the homes giving free
quarter to soldiers. Gregory Day of Berkswell lost £4-10s when Captain
Miller kept a court of guard at his house, the troops “beinge very unrea-
sonable in their carriag and behaviour whilest they tarried there”39.
The inhabitants of High Barnet in Hertfordshire had already given
in an account of their quartering charges for soldiers from the Eastern
Association but ‘upon ­examinacon’ this “appeareth to us to bee farr
short of the charges which the inhabitants of the said towne were in
truth putt unto by such free quarters in regard of the unreasonable-
ness and unrulines of the souldiers, whoe spent them greate quantities
of drinke as alsoe of fuell it being in the winter tyme and besides in
some houses where many of them and their horses were quartered for
a long tyme the inhabitants were inforced to hire men and to keepe

37 BL Harley MS 1943, f. 24v; Harley MS 2126, f. 16.


38 TNA SP 28/184, Part One, High Pavement Ward.
39 TNA E 179/194/321, the parish accounts of Berkswell.
184 ANN HUGHES

more servants then otherwise they wold of purpose to attend them,


for which extraordinary (yett true) charges noe Accompt was formerly
made”40. Evidence of resentment is ample, but more surprising, and as
­common are accounts of free-quarter with superfluous detail or discri-
minating c­ ommentary that suggest attempts to humanise or (literally)
to domesticate the intrusive, alien experience of having strangers forcibly
boarded in your home. Rank and file soldiers as well as officers were
named, or given additional descriptors, suggestive of a more familiar
social relationship. In Kings Langley in Hertfordshire, the ­constable
named many of the troopers in ­Manchester’s army given free quarter
in December 1644, and remembered “9 foote souldiers that came
sicke with ricketts that stayed a day and night a piece”41. A Cheshire
widow had quartered “one footman a drummer under Captain Booth,
one night 6d”. Warwick men had quartered “a Dutchman three weeks
who was wounded at Edgehill”, and, “Lambert Browne a Trooper under
the Lord Hastings three weeks being wounded at Edgehill” 13s 6d42.
Communities and individual informants often distinguished amongst
the troops they had boarded. Eighty men under the c­ ommand of Major
Redman of Northamptonshire had taken free quarter in Wibtoft: “Yett
wee acknowledge and avow that his and everie one of his troopes carriage
was so faire and c­ ommendable that wee would not have this att anie
time or in anie sort objected against him or anie of them, to his or anie
of their distast, charge or disparagement”43. George Hunt of Studley
­complained about goods “plundered from mee” by the troops from
the nearby Warwick garrison, but he added at the end of his account:
“Besides for the quarteringe of the Lord of Essex souldiers being 3 or
4 in one night when they returned from Worcester before Edge Hill
Battell some 3 nights together because they used themselves well and
payed some small tribute… noathing”44. Similarly John Wildbore of
Kings Cliff claimed nothing for many of the troops he quartered, for
some “he freely gave” or “chargeth not”, but soldiers from Northampton
and Rockingham were another matter and he emphasised the costs of

40 TNA SP 28/155, High Barnet, December 1644.


41 TNA SP 28/155, ‘A Coppy of the Accompts of the severall parishes within the two
Hundreds of Cislio and ­Dicorum’, p. 28.
42 BL Harley MS 2126 f. 10r; TNA SP 28/184, Part One, Marketplace Ward.
43 TNA SP 28/182/36.
44 TNA SP 28/185.
TAKING ACCOUNT AND MAKING MEMORIES 185

those “who cam twice in the night with five horses and five men and
put me in feare… to the damage of 20s”45.
As in ­Wildbore’s aside that he had been put “in feare”, several of my
examples have hinted at violent encounters with soldiers: Humphrey
Greswold had lost his hat through what was in effect an assault, while
the Scots had “violently” taken John ­Burton’s goods. The evidence is
relatively rare and usually oblique, which might seem surprising given
what we know about the heavy casualties during the civil wars. Only
the deaths of sick quartered soldiers, because they usually led to greater
expense for their reluctant hosts, are recounted directly. The accounting
form did not easily allow for descriptions of physical assaults that did
not involve direct financial loss and where assaults are described, they
are usually presented as excuses for imperfect accounts or in c­ onnection
with subsequent losses. Lot Keyte explained that he had been “wounded
in two places of my body”, adding as an afterthought that this was at
the hands of the k­ ing’s soldiers, explaining why he had not executed
a parliamentary warrant, while Thomas How sought to justify the
failings in his accounts:
In regard of a wound I receaved on Kington fight day, which hath occationed
my much prejudice and misery, as it is not unknowne to most part of the
towne, I am not able to give an exact account of all my losses and Payments
and therefore shall wave what is due to mee for quarteringe many souldiers at
severall tymes, because I know not the names of the men nor theyr officers46.

Beyond the generic limitations imposed by accounting, the reluctance


to describe violence may reflect profounder difficulties in c­ onfronting
horror. Mark Stoyle has suggested that it is “maimed” ­soldiers’ willingness
to explain where and how they were wounded that is more unusual;
disclosure of these experiences to officials was required if pensions were
to be awarded. In the Thirty ­Years’ war, similarly, brutality was rarely
described directly, rather it was presented as something that happened
elsewhere, and was usually perpetrated by foreigners and strangers.
This may also account for the prominence of the Scots in England as
violent plunderers47.

45 TNA SP 28/171, Part Four.


46 TNA SP 28/182, Part Three; SP 28/184, Part One, Mill Street Ward, Warwick.
47 Stoyle, 2014, p. 214; Wilson, 2013.
186 ANN HUGHES

ENGAGING WITH THE “PUBLIC SERVICE”

If the accounts afforded scant opportunity for descriptions of violence,


there was little room either for extended political c­ omment. There are,
however, many examples of emotionally and morally charged language,
and ­common deployment of such terms as the ­state’s or the public service.
Most obviously there is evidence of ­complaint and resentment. Mr John
Walford of Warwick, for example, claiming £12 for free-quarter, offered
an indignant narrative: “Item: for quartering of one soldier 16 weeks
under the ­command of the Earl of Essex which was maimed at Kineton
fight, who spoiled my bedding, besides one to attend him c­ ontinually,
Mr Bryan [the local cleric who acted as treasurer to Warwick garrison]
promised I should be paid for what he had but doth not perform”48.
Some pointed c­ omments probably indicated royalist sympathies. Richard
Hill of Napton ­complained that he had been forced to pay Captain
Flower for the recovery of cattle soldiers took from him, “for certayne
lands of corne I bought of [a royalist] Sir Richard Shuckburgh… under
pretents that they would make [me] to pay weekly ­contribucon for part
of Sir Richard Shuckburgh his land when I had no right at all to pay
a thing unto them”. The accounts of the Countess of Sunderland and
her daughter in law Lady Spencer clearly expressed royalist allegiance
with a sardonic aside, to one item in their accounts, listing the 1250
sheep and other livestock that “Captain Hawkesworth of Warwick took
out of these grounds in June 1643 by virtue of an order from the said
­committee of Coventry (as he said)”49.
More abstractly there is widespread use of a language of public, state
and party, with the variations in how the authorities imposing exactions
are described, suggesting ­contrasting political attitudes. John Wildbore
of Kings Cliffe, whose accounts have been discussed at several points in
this chapter, listed his ­contributions as “for the use and service of the
Kings Majestie and Parliament… out of his small estate”. To still believe,
or pretend, in 1647 that the p­ arliament’s cause was also the k­ ing’s was
a distinctly moderate stance, and there is also a clear sense of injustice.
48 TNA SP 28/184, Part One, High Pavement Ward.
49 TNA SP 28/186, Napton and Wormleighton.
TAKING ACCOUNT AND MAKING MEMORIES 187

In c­ ontrast the people of Atherstone in Warwickshire emphasised “how


willing they have bin to serve the state with men and horses”; and
Birmingham insisted they had ­contributed freely for the service of the
state. Sometimes then the ­state’s service was identified with the parlia-
ment, while elsewhere a more open awareness of division was displayed
as when the accounts of Binton, Warwickshire, included “what wee
have voluntary sent in for the Parliament service at the ­Towne’s charge
in a general way”. The people of Over in Cheshire chose to describe
their losses as to the “­parliament’s party” a formulation that suggests
a more unwelcome sense of partisanship and faction50. Occasionally it
seems that descriptions of authority were chosen by individuals rather
than being c­ ommunal preferences or scribal impositions. Accounts
from Warwick Borough present ­contrasting designations even by close
neighbours. Examples range from the ­conventional, “A parfect noate of
what Thomas Roe hath voluntarily lennt for the sarvice of the kinge
and parliment … also what losse he hath sustayned sence these warrs
began”; to the more partisan, “expences layd out Bye mee John Lathburie
of the burrowe of Warwick in way of parlament servise as followeth as
near as possible may bee Remembered”; to accounts that list “charges for
the state”, or “A note to shew charges which John Drayton and George
Drayton of Warwick have been at for the use of the c­ ommon weale”51.
Individual charges were thus presented within a variety of general,
national frameworks and demonstrate rival engagements with political
­commitment and the public service amongst the general population;
evidence for what John Walter has described as “a popular political
­culture more formally engaged with the politics of church and state”52.

50 TNA SP 28/171, Part Four; SP 28/183/25; SP28/186 (Birmingham and Binton); BL


Harley MS 2126.
51 THA SP 28/184, High Pavement and Smith Street Wards.
52 Walter, 2016. I am very grateful for the opportunity to read John ­Walter’s book before
publication. See also Peck, 2013 on the resort to the vocabulary of national politics in
local disputes.
188 ANN HUGHES

CONCLUSIONS

The process of drawing up detailed accounts of civil war exactions


must have worked to imprint more securely in p­ eople’s c­ onsciousness, the
drastic and onerous nature of the wartime burdens. All political mobili-
sations in England in the later 1640s can be c­ onnected to this profound
awareness of the blood and treasure spent in the war. Most scholarship
has ­concentrated on what we might call ­conservative responses, in which
a c­ onsciousness of the costs of the parliamentary war effort in particular,
prompted denunciations of parliamentary tyranny and calls for a return
to traditional forms of government. Examples include the west-country
clubmen (although some groups were more critical of royalist soldiers)
and the former parliamentarians in Wales and south-east England who
joined with royalists in the second civil war. The desire to return to an
idealised pre-war state was no-doubt the more c­ ommon response, but
radicals in the army and in civilian movements also called for recom-
pense for wartime sacrifices. At the Putney Debates, when ­parliament’s
army discussed the post-war settlement, Edward Sexby insisted that the
soldiers had ventured their lives “to recover our birthrights and privileges
as Englishmen”; if they were not to receive political rights, then “I wonder
we were so much deceived”. Very ­concrete experiences of ­contributing to
the p­ arliament’s war effort legitimated the participation of humble men
and women in public matters. Anna Trapnel, the young daughter of
London artisan, became an influential prophetess in the 1650s, inspired
in part by the scriptures that demonstrated God chosen “the weak things
of the world, to ­confound the things that are mighty”. But Trapnel also
justified her “publick-spiritedness” through her practical involvement
with the public service:
I lived with my mother till she died, which was about twenty years, then
I kept house with the means my mother left me, and paid taxes towards
maintaining of the army then in the field, and this I did not grudgingly,
but freely and willingly; I sold my plate and rings, and gave the money to
the public use53.

53 See, amongst a rich literature: Morrill, 1998, a revision of Revolt of the Provinces, first
published in 1976; Ashton, 1994; Braddick, 2008, p. 413-426; Hughes, 1986, p. 49-78;
TAKING ACCOUNT AND MAKING MEMORIES 189

Assessment of the longer-term implications of broad participation in


drawing up accounts of losses is inevitably speculative. Alexandra Shepard
has suggested that plunder had made moveable property a more precarious
basis for the assessment of wealth. After the civil war witnesses in court
were much less inclined to assess their creditworthiness with reference
to the value of their goods54. It was relatively unusual for authorities to
require listings of losses to their own officials and soldiers rather than
to their ­enemies’. In Ireland and Scotland, as in the Netherlands it was
usually the defeated e­ nemy’s exactions that were probed, although there
were mechanisms in Scotland for achieving reductions in official burdens of
quarter and taxation. Consequently, when Dutch people remembered and
listed their losses in the hope of financial ­compensation, their memories
were placed in the heroic or miraculous ­context of a war of liberation,
submerging any troubling sense of the c­ onflict as a civil war55. Listing
losses to the ­parliament’s party but not to the ­king’s may well have had the
unintended ­consequences of fixing parliamentarian exactions in particular
more firmly in popular memory. Furthermore, the process of accounting
encouraged distinctions between civilian sufferers and military oppressors,
despite the fact that most men in arms were local, and often part-time.
In Warwick, where the castle was a significant garrison, manned mostly
by townsmen, the accounts of losses ­consisted mostly of individual bills
sewn together and delivered to the local sub-­committee. George Medley
submitted two separate bills: the first c­ oncerned his service as a soldier in
the Castle, for which he acknowledged receipts of over £40 with arrears
of some £7. The second, however, was headed, “The Dammage that I
George Medley have sustained since the warrs began” and itemised his
other losses: the weekly tax or “­contribution” he had paid to Warwick
­commanders at 9d per week between December 1643 and April 1646; just
over £3 in work done and money paid for the defences at the castle, and
£1 in “spoil of my grass” by marching armies. Musters of county forces
show Medley serving as a gunner and drum major until the end of 1646,
yet through these accounts he presented his civilian and military roles as

Sexby quoted at the Putney Debates: Sharp, 1998, p. 120; Anna Trapnel, Report and
Plea (London, 1654), p. 50.
54 Shepard, 2015, p. 287-290.
55 Pollman and Kuijpers, 2015: in 1608 the States of Holland offered pensions to all who
had survived the siege of Oudewater, prompting survivors to narrate their stories; Stewart,
2016, p. 229-234.
190 ANN HUGHES

distinct56. One of my early examples, the Coventry Tiler, John Burton,


who vividly described his losses to the Scots, was himself also a soldier for
his accounts also listed £2-8-4 arrears of pay as a foot soldier in the city
garrison57. Burton gives no sign of seeing the Scots as allies or ­comrades.
In their immediate work of recollection, drawing up accounts of
their losses to the parliament, English men and women inevitably had
to c­ onfront and categorise the authority demanding their resources and
define their experiences of the 1640s. They became, as we have seen,
familiar with the language of the state and the public service, while
having to acknowledge that both the ­king’s and the ­parliament’s “parties”
or “sides” were claiming to represent the public. Parish accounts describe
‘calamitous ­distractions’ or “troublesome times”; ­compilers date their
accounts from the beginning of “these wars”, but they hardly ever use
the term “civil war” as if that horror is too much to acknowledge58. The
accounts list general liabilities and individual, personal losses; personal
memories are presented within a variety of more general and obliquely
political frameworks. More elaborate, and ­contested memories of civil
war and revolution infused later-seventeenth century English ­culture
and helped to structure religious and political c­ onflict59. The language
of accounts demonstrates more broadly both a profound awareness of
division and a desire to avoid all its implications. The specific process
of memorialisation through accounting c­ ontributed to central features
of later seventeenth-century popular political c­ ulture, notably hostility
to a burdensome state characterised by standing armies, and heavy par-
liamentary taxation; but also, perhaps paradoxically, the potential for
divisive mobilisations of local people on party lines, even while there
remained deep suspicions of division.

Ann Hughes
Keele University

56 TNA SP 28/184, Part One, High Pavement Ward. For the musters of these forces from
November 1643 to December 1646: TNA SP 28/121A, 122, and 123.
57 TNA SP 28/174, accounts of Gosford Street Ward, Coventry.
58 Cf. Stoyle, 2003, p. 222 (although Stoyle reaches a different ­conclusion).
59 See, for example, Legon, 2015; Neufeld, 2013; Lyon, 2016; Scott, 2000; Knights, 2004.
DE LA DISSIMULATION
À LA C
­ OMMERCIALISATION
Les mémoires familiales
de la première révolution anglaise (1660-1740)

­L’une des questions cruciales posées par les mémoires des révoltes
et révolutions tourne autour de l­ ’environnement social et politique qui
entrave ou facilite leur circulation. Bien des recherches traitent de la
manière dont les autorités travaillent à endiguer le flot de souvenirs
subversifs dans l­’espoir d­ ’imposer une mémoire officielle et univoque.
Pour ­l’histoire moderne, on estime que la paix et le rétablissement de
la souveraineté après les temps de troubles, ­s’accompagne de mesures
assez efficaces qui mêlent ­l’amnistie de la majorité des acteurs et la
damnatio memoriæ de quelques individus. C ­ ’est dans un second temps
que le cortège des souvenirs resurgit de manière plus incontrôlable dans
la sphère publique et suscite des appropriations ­controversées.
Ainsi, sous le règne de Louis XIV, les événements de la Fronde
ont-ils été désamorcés et privés de leur potentiel subversif par le biais
des académies savantes et des historiographes du roi. Dans un premier
temps, la fabrication ­d’un « roi de guerre » destinée à disqualifier pour
­l’éternité la légitimité de la révolte armée a, semble-t-il, été ­d’un grande
efficacité1. Le succès de cette amnésie ­s’explique par la ­complicité ­d’une
partie significative de la population, et notamment ­d’une large part de
la noblesse, soucieuse de souligner sa fidélité vis-à-vis de ­l’État royal.
De manière tacite et négociée, les élites sociales et la monarchie se sont
accordées sur ­l’occultation des événements frondeurs. Ainsi, les enquêtes
généalogiques menées au début du règne de Louis XIV ne doivent pas
être interprétées ­comme une police mémorielle susceptible de traquer
jusque dans les archives privées la ­complicité des parents dans des
révoltes anciennes ou récentes. Ces instruments « ne furent pas réellement
1 Cornette, 2010 (1993) ; Burke, 1995.
192 STÉPHANE JETTOT

activés par une monarchie soucieuse de ­concorde sociale au sortir des


troubles, ­contrainte de ménager des officiers de justice et de finance
­conquérants […]. La raison de la floraison des travaux généalogiques
est […] à rechercher dans la société elle-même2 ». Elles participent à la
­confection de généalogies expurgées des épisodes de désobéissance ou de
révoltes armées. Ce ­n’est ­qu’au cours du xviiie siècle à partir ­d’une « série
­d’opération et de publication », que les « mémoires » des Frondeurs, de
­l’état de manuscrits, sont devenues un genre éditorial censé éclairer le
génie et la position sociale des grandes familles de révoltés3.
­L’exemple de la Fronde invite à ­d’autres ­comparaisons et nous sou-
haitons envisager de ­l’autre côté de la Manche, la manière dont les
mémoires familiales des années 1640 et du régicide ont été successivement
occultées, sélectionnées puis rendues accessibles à la curiosité du public.
Cette première révolution eut un impact profond sur ­l’ensemble des îles
britanniques. Elle entraîne la mobilisation dans les armées ­d’un quart de
la population masculine et la mort de plus de 200 000 personnes. On
estime à présent q­ u’un quart de la population irlandaise fut décimée4.
Compte tenu de ­l’ampleur des traumatismes et des bouleversements,
elle occupe une place obsédante et omniprésente dans la mémoire des
­contemporains et a été étudiée sur plusieurs échelles dans le temps : de la
retranscription immédiate des événements en passant par les politiques
mémorielles de la Restauration ­jusqu’aux répercussions sur le long terme5.
La réflexion s­’est aussi portée sur la diversité des supports mémoriels
et leur dynamique propre : chroniques, sermons, satires, mémoires et
martyrologies6. Les ­contributions des poètes royalistes ou républicains
­comme Abraham Cowley ou John Dryden, des chroniqueurs et his-
toriens c­ omme Edmond Ludlow ou Thomas May sont à présent bien
­connues. Dernièrement, la ­culture orale ainsi que les feuilles volantes
sur une vaste échelle ont fait l­’objet d­ ’études très pertinentes. Comme
pour la Fronde, les réflexions sur les dynamiques mémorielles autour
de la révolution de 1640 ­s’inscrivent à présent dans une perspective
pluridisciplinaire7. De même, le cadre familial est perçu c­ omme une
2 Poncet, 2014, p. 105.
3 Jouhaud, Ribard, Shapira, 2009, p. 34 et suiv.
4 Braddick, 2012, p. 6.
5 Gillivray, 1974 ; Worden, 2001 ; Stoyle, 2003, Norbrook, 2012, Neufeld, 2013.
6 Cressy, 2005.
7 Legon, 2015, Peters, 2017.
De la dissimulation à la ­commercialisation 193

échelle d­ ’observation privilégiée. On rappellera que la révolution est-


elle même perçue c­ omme une crise familiale aux facettes multiples. Les
­contemporains, familiers des généalogies bibliques et royales, ont puisé
dans ces modèles pour interpréter la remise en cause des rapports de
patriarchie et de solidarités dynastiques. Les poèmes de John Milton ou
John Dryden ou Mary Astell décrivent les violences de la révolution à
partir d­ ’une perspective familiale8. De même, les pratiques archivistiques
des familles et la manière dont celles-ci sont transformées par les crises
politiques soulèvent bien des interrogations. Elles permettent de restituer
les oscillations de la mémoire des événements sur plusieurs générations.
Les élites sociales en particulier ne doivent pas être envisagées seulement
­comme un groupe social mais aussi ­comme un ensemble de familles
disposant de ressources mémorielles et archivistiques ­considérables9.
Dans le présent article, nous envisagerons les usages archivistiques des
élites anglaises et la mémoires des événements de 164010. En privilégiant
les trois générations successives, de 1660 à 1740, plusieurs séquences
se dégagent.
Dans un premier moment, la monarchie et les élites s­’accordent, à
partir de 1660, sur une censure collective des souvenirs. L­ ’expression
­d’« interrègne », occultant à la fois la guerre civile, le régicide et ­l’épisode
républicain, ­commence à se généraliser. La mémoire familiale reste un
trésor caché dans les ­comtés. Cependant, la première révolution britan-
nique se distingue de la Fronde en ce ­qu’elle génère de manière précoce
des clivages partisans et religieux qui ne vont pas tarder à se réactiver
lors des crises de succession de 1679 et lors la Glorieuse Révolution
de 168911. Cette « rage des partis » entraîne une instrumentalisation
sélective de certaines archives familiales et un débat public autour de
la ­comparaison entre les révolutions de 1640 et de 1689. La stabilisa-
tion du régime des Hanovre à partir de 1720 ­conduit à de nouveaux
usages mémoriels. Avec ­l’affaiblissement des affrontements partisans,

8 Murphy, 2011.
9 Sur les liens entre événements, archives et mémoires familiales, voir Fentress et Wickham,
1992, Teuscher, 2004, Butaud et Pietri, 2006, Ruggiu, 2007, Mouysset, 2008, Ketelaar,
2010.
10 ­L’éclairage sera c­ onsacré aux familles restées dans les îles britanniques. Dans le cas des
­communautés exilées lors des révolutions de 1640 et de 1689, voir Woolf, 2003, Jettot,
2015, Corens, 2016.
11 Harris, 1992, p. 700-720.
194 STÉPHANE JETTOT

les archives familiales ­contribuent à l­ ’essor ­d’un marché du livre fondé


sur les savoirs antiquaires et généalogiques. Les souvenirs du trauma-
tisme ­commencent à faire ­l’objet ­d’une ­commercialisation à destination
­d’une oligarchie soucieuse de transformer la mémoire en une histoire
héroïque et ­consensuelle.

­L’INVENTION DE « ­L’INTERRÈGNE »
(1660-1680)

­L’expression « ­d’interrègne » utilisée alors pour désigner la révolution


permet ­d’en nier la signification politique, ­comme le souligne Alice Hunt :
« ­L’expérience républicaine ­n’apparaît alors que ­comme la ­conséquence
des guerres civiles de 1640 et non ­comme le début de quelque chose de
nouveau et de potentiellement permanent12 ». L­ ’entreprise de désarme-
ment de la période républicaine repose à la fois sur une large amnistie
et sur un appel collectif à l­’expiation.
Du point de vue législatif, le Parlement et le roi restauré ­s’entendent
sur une loi qui prévoit à la fois des réparations financières pour les victimes
des « troubles » et une amnistie pour la grande majorité des acteurs à
­l’exception de ceux impliqués dans le régicide. Adoptée en août 1660,
elle c­ oncernait « toutes sortes de trahisons, dissimulations de trahisons,
meurtres, félonies, délits, violations, outrages et autres infractions »,
que ce soit pour défendre la cause du parlement ou la cause royaliste,
entre le 1er janvier 1638 et le 24 juin 166013. Pour faire bonne mesure,
un ­comité parlementaire est désigné pour expurger du journal du Long
Parliament (1642-1649) tous les débats jugés attentatoires à la dignité
des Stuarts14. Cependant l­’amnistie diffère ­d’une injonction à ­l’oubli
­puisqu’elle suppose pour être efficace un discours visant à façonner le
­consensus. En effet, c­ omme le souligne Erin Peters, « le passé – loin
12 Hunt, 2017, p. 256.
13 Raithby, 1819, p. 226-234.
14 « Ordered that certain members look into the Journals of the Long Parliament from the time the
king left London till its dissolution and report on what they thought should be ‘expunged thereout,
as treasonable and scandalous to his Majesty and his Royal father », Common journal, cité dans
Firth, 1911, p. xxxiv.
De la dissimulation à la ­commercialisation 195

d­ ’être oublié – dut en réalité être recomposé ou du moins réinterprété


par le régime des Stuarts15 ». Outre ­l’évocation nostalgique ­d’un âge
­d’or précédant les « troubles », les prêches, les prières publiques dans
les paroisses et à la cour de Charles II ou les histoires officielles ­comme
­l’Eikon Basilike insistèrent sur la nécessité d ­ ’une expiation collective.
La honte devait être ressentie par tous et interdire la possibilité ­d’un
règlement de c­ ompte entre républicains et royalistes.
Au cœur de ces opérations mémorielles, la place des archives fami-
liales reste encore peu exploirée. Pourtant, les mesures d­ ’amnistie et
­d’expiation se sont accompagnées d­ ’un travail généalogique et archivis-
tique essentiel dans la remémoration des événements. Seules quelques
familles sont désignées à l­ ’opprobe publique afin de faciliter l­ ’amnistie
du plus grand nombre. Ainsi, 104 personnes sont exemptées de la loi
­d’amnistie (Clause of Exception in the Act of general Pardon) pour avoir été
directement impliquées dans la préparation et l­ ’exécution de Charles Ier.
En réalité, seuls 29 individus sont exécutés16. Désignés ­comme « hommes
de sang », ces derniers se voient réassigner un statut social subalterne.
Diverses manipulations généalogiques sont employées pour reclasser
bien des régicides dont les origines nobiliaires étaient ­connues de tous,
dans le camp des ­commoners, celui des bouchers, des artisans dont les
origines humbles les auraient prédisposés au crime17. Privés de toute
attache familiale, de profondeur généalogique, ces individus c­ omme
Oliver Cromwell ou Sir John Danver sont à nouveau jugés et c­ ondamnés
à l­’oubli par la procédure de ­l’attainder. Cette dernière ­condamnait le
prévenu ainsi que ses descendants à une privation de leurs propriétés.
Le sang souillé (corrupted blood) par la trahison pour rébellion ­condamne
aussi théoriquement la famille à la déchéance publique. En réalité, la
procédure devient plus encadrée et les accusations de félonie à partir du
xvie siècle ne disqualifient plus les veuve et les héritiers à leurs droits
de succession18. À ­l’exception de ces quelques familles de régicides, la
plupart des républicains sont amnistiés au cours ­d’une intense négociation
entre les parlementaires et Charles II. On rappellera ­qu’aux élections de
15 Peters, 2017, p. 272.
16 An exact and most impartial accompt of the indictment, arraignment, trial, and judgment (accor-
ding to law) of twenty-nine regicides, the murtherers of His Late Sacred Majesty of most glorious
memory, London, 1660.
17 Jettot, 2014, p. 79-91.
18 Kesselring, 2009, p. 214.
196 STÉPHANE JETTOT

1661, sur 507 députés, seuls 168 ont c­ ombattu dans les armées royales
pendant la guerre civile et 164 ont exercé des charges publiques sous
Cromwell. Par un dispositif qui n ­ ’est pas sans rappeler les amnisties
antérieures accordées par Elisabeth en 1559 aux élites catholiques de
Marie Tudor, la violence des divisions se trouve occultée au nom du
principe de charité19.
Cette amnistie collective n ­ ’est pas imposée par le gouvernement,
elle répond au souhait des familles. Les lignes de partage au cours
de la révolution ont été d ­ ’une grande porosité et les parlementaires
­comptent dans leurs rangs et dans leurs familles un bon nombre de
­convertis de la dernière heure, les « turncoats20 ». Parmi ces derniers
figurent des personnalités célèbres, le colonel Hutchinson, un régicide
qui se rallie aux Stuarts en 1660. Le cas d­ ’Hutchinson mérite d ­ ’être
souligné dans la mesure où son amnistie fut obtenue par la mobilisation
de toute sa parenté, de son épouse et d ­ ’un rappel de son prestigieux
pedigree. ­L’honneur de la famille, illustré sur plusieurs générations des
différentes branches des Hutchinson permettait, ­d’occulter le souvenir
de la dernière décennie21. De plus, les familles enrichies et distinguées
pendant la révolution espéraient faire remonter leur ascension sociale
à une période ultérieure. Pour la plupart ­d’entre elles, la monarchie
accède à leurs désirs. Ainsi, le College of Arms, une institution chargée
depuis le xve siècle d­ ’authentifier la validité des titres de la gentry, invite
indistinctement toutes les familles à présenter des preuves de noblesse.
Dans un mémoire publié en 1667, les hérauts ­d’arme, Edward Walker
et William Dugdale, enjoignent les personnes ayant reçu le titre de
baronet à venir le faire enregistrer. Une invitation qui ­s’adresse en priorité
aux familles ayant été distinguées dans des ­conditions « douteuses ou
­contestables », en ­l’occurrence des ­combattants royalistes récompen-
sés sur le champ de bataille par Charles Ier avant sa mort ou bien des
dignitaires républicains22. Le héraut d­ ’arme William Dugdale réalise
ensuite un recueil généalogique de toutes les familles nobles dans un
ouvrage luxueux intitulé Baronage (1675). Si dans la préface, il déplore de

19 Walsham, 2006.
20 Hooper, 2010.
21 Lucy Hutchinson et ses Memoirs of the Life of Colonel Hutchinson with a fragment of
Autobiography. Voir Norbrook, 2012, p. 233 ; Gheeraert-Graffeuille, 2010, p. 69.
22 A Catalogue of the baronets of this kingdom of England from the first erection of that dignity until
this time (1667).
De la dissimulation à la ­commercialisation 197

manière générale les destructions déclenchées par la guerre civile et les


principes « presbytériens », il se garde bien d­ ’identifier les responsables des
« troubles23 ». Dans la ­continuité de mesures antérieures, cette première
généalogie collective des élites du royaume nie la possibilité de toute
implication de la noblesse dans la guerre civile. Le travail de collecte
réalisé par Dugdale ainsi ­qu’une édition très sélective des archives sus-
cite cependant les sarcasmes de plusieurs de ses amis royalistes. Antony
Wood lui adresse plusieurs lettres dans lesquelles il exprime sa sidéra-
tion à ­l’égard de ses ­commentaires magnanimes vis-à-vis des familles
républicaines. Comment Denzil Holles, qui fut l­’une des premières
figures de ­l’opposition parlementaire ­contre Charles Ier, pouvait-il être
célébré ­comme un « instrument de la joyeuse restauration » alors que
lui et bien ­d’autres presbytériens avaient semé partout la ­confusion24 ?.
Ce premier dictionnaire généalogique témoignait ­d’un renforcement des
status sociaux sous la Restauration. Les hiérarchies « naturelles » dans
la société avaient bien été menacées aussi bien par des écrits d­ ’auteurs
radicaux que par la multiplication des pétitions adressées au Parlement
à partir de 1642. Ces dernières fondaient leur légitimité sur le nombre
de signataires plutôt que sur leur position sociale25.
À ­l’échelle locale, la répression des souvenirs de la guerre civile
remporte aussi une large adhésion. Les c­ omtés ou les villes ont été le
théâtre des plus violentes opérations militaires et les élites provinciales
ont été profondément divisées. Loin de ­l’image ­d’un cadre ­comtal uni
et homogène, Ann Hughes, pour le c­ omté de Warwickshire, a démontré
­l’existence de fortes oppositions idéologiques et religieuses ainsi q­ u’un
profond renouvellement des élites par des newcomers26. Mais dès la
Restauration, par une sorte de ­consentement tacite, la plupart des familles
­qu’elles soient royalistes ou républicaines, catholiques ou protestantes, se

23 « And that the greatest part of King Charles the F­ irst’s, was calm and peaceable, until the pre-
valent party in that unhappy Long Parliament, being tainted with Presbyterian Principles ; raised
such an insurrection as destroyed many Thousands », The baronage of England, or, An historical
account of the lives and most memorable actions of our English nobility, London, 1675, p. ii.
24 Kiessling (éd.), 2002, p. 222.
25 « What is striking about the kind of petitioning that became ­common in 1641, therefore, was
that print provided a valuable means of demonstrating popular views, and that this was done
in ways which tended to prioritize and validate numerical strength rather than social status »,
Peacey, 2012, p. 282. Pour un phénomène ­comparable pendant la Révolution française
voir Chappey, 2013, p. 170 et suiv.
26 Holmes, 1980 ; Hughes, 1982, p. 42 ; Broadway, 2012, p. 39.
198 STÉPHANE JETTOT

tiennent à distance de toute publication polémique. Il ­n’était pas question


de faire circuler des papiers recensant des persécutions ou attestant des
profits réalisés lors de la ­confiscation des terres. Cette circonspection
­s’accompagne aussi ­d’une ­condamnation de tout esprit de vengeance27.
Divers études sur les inscriptions tombales c­ onfirment la très grande
prudence des descendants quant aux circonstances de la mort de leurs
parents. Ainsi, les Davenant dans le Wiltshire choisissent simplement
de surmonter le tombeau de leur parent l­’évêque de Salisbury par une
mître, symbole discret de la fidélité à la cause anglicane pendant la
guerre civile28.
Cette auto-censure se vérifie aussi dans les diverses chroniques
­comtales publiées dans les décennies 1650 et 1660. ­C’est avec beaucoup
de prudence et de réticence que les élites foncières c­ onsentent à participer
à leur élaboration. Ainsi, avant de publier son Baronage, Dudgale doit
sa réputation à son histoire des antiquités du Warwickshire publiée en
165629. Si l­ ’ouvrage est célébré pour la qualité de son érudition médié-
vale, il ­n’évoque que de manière brouillée la période révolutionnaire,
occultant la violence des divisions dans le ­comté. Dugdale ne mentionne
pas les menées des familles Brooke et Purefoy c­ ontre le roi. Comme
précédemment dans son Baronage, il évite toute attaque personnelle
au-delà la référence aux « troubles ». En dépit de sa prudence, l­ ’ouvrage
­connaît ­d’abord un faible succès ­commercial. De ­l’aveu de son auteur,
il reste en 1675 près ­d’une centaine ­d’invendus30. D ­ ’autres tentatives
analogues ­s’étaient heurtées au désintérêt ou à la méfiance des grandes
familles c­ omtales. Ainsi, en 1659, les Mainwaring entendent soutenir la
réalisation d­ ’une histoire du Cheshire sur le modèle de celle réalisée pour
le Warwickshire. Ils avaient été divisés dans leur engagement pendant
la révolution. Le père du baronet Thomas Mainwaring ­s’était engagé
dans ­l’armée de Cromwell alors que son grand-oncle était resté fidèle
à la cause des Stuart. À nouveau, l­’objectif est de nourrir ­l’idéal ­d’une
­communauté ­comtale héroïque et restée étrangère à la violence du peuple
et des esprits sectaires. Cette initiative est soutenu par Dugdale qui se
27 Appleby, 2012.
28 Sherlock, 2008, p. 193.
29 The Antiquities of Warwickshire Illustrated, London, 1656.
30 « Touching my Warwickshire work, I think it will not be reprinted in this age ; the first impression
being not as yet totally gone. I believe there are near a hundred left », 16 avril 1675, cité dans
McKenzie et Bell (éd.), 2006, vol. 2, p. 84.
De la dissimulation à la ­commercialisation 199

propose ­d’enquêter dans les archives familiales du ­comté31. En dépit de


son caractère irénique, le projet des Mainwaring rencontre l­ ’hostilité de
leurs voisins et se trouve vite abandonné. Le refus ­d’aborder les blessures
héritées de la révolution ne relève pas seulement ­d’une injonction ou
­d’une censure gouvernementale mais aussi ­d’une aspiration largement
partagée dans ­l’upper sort locale.
Ces dernières ont aussi pesé de manière décisive sur le reste de la
population. Ainsi, Mark Stoyle a reconstitué pour le Devonshire la
manière dont les soldats royalistes invalides élaborent un récit détaillé
de leurs souffrances et de leurs sacrifices pour le service du roi. Dans
­l’espoir d­ ’obtenir une pension, ils se gardent bien ­d’identifier des enne-
mis précis ou ­d’en appeler à la vengeance, ­conscients que bien des juges
de paix sont d ­ ’anciens républicains32. De même, quinze années après
la Restauration, un noble catholique se désespère ­d’obtenir réparation.
Lord Aston de Tixall se plaint auprès d­ ’un ministre des persécutions
infligées par des juges q­ u’il suspecte de républicanisme. Compte tenu
de son prestigieux lignage et de sa fidélité à la monarchie, il ­s’indigne
que d­ ’anciens magistrats cromwelliens puissent encore sévir dans les
cours ­d’assise. Mais sa pétition se heurte à une fin de non-recevoir du
ministre33. Ces tensions au sein des élites restent ­contenues car pour
la plupart, elles s­’accordent sur la nécessité de renforcer leur ­contrôle
des institutions et de leurs propriétés. Une révolte républicaine dans le
Yorkshire en 1663 est ­d’ailleurs réprimée avec le ­concours de juges de
paix royalistes et de ceux ayant exercé sous Cromwell34.

31 « There must be treaty had with the Gentlemen of that County and their ­consents obtained that I
may have free access to view and take notes out of their antient writings and evidences », Pogson,
2014, p. 9.
32 Stoyle, 2003, p. 204.
33 « I have that pride not to bear with patience, abiding in a country where my family has been
eminent twenty descents and bore always places of trust under their kings, now to be trampled on
and falsely accused by such as, till their fighting against the king and buying the estates of his
loyal subject, were not in the least known », cité par Appleby, 2012, p. 106.
34 Hooper, 2002.
200 STÉPHANE JETTOT

LA REMÉMORATION DES « TROUBLES »


DANS LES AFFRONTEMENTS PARTISANS
(1680-1720)

À partir des années 1680, cette discipline collective est mise à mal par
une série de crises qui font rejouer les traumatismes de la révolution35.
­L’efficacité de la répression, un terme envisagé à la fois dans un sens
politique et psychologique, est c­ ompromise par la fragilité des Stuart.
Dans un premier temps, la Restauration s­ ’est traduite par la répression
des non-­conformistes protestants mais lorsque la perspective ­d’un roi
catholique se ­confirme – avec la c­ onversion du frère du roi, Jacques
­d’York – le Parlement se divise entre une majorité favorable à une
loyauté inconditionnelle à la dynastie Stuart (Tories) et une opposition
croissante qui refuse la perspective d­ ’un roi catholique (Whigs). Cette
crise de succession à partir de 1679 c­ onduit nombre de c­ ontemporains à
redouter l­ ’imminence d­ ’une nouvelle guerre civile36. À la différence de
la Fronde, la polarisation de la société est bien plus profonde ­puisqu’elle
joue sur des engagements religieux opposés (presbytériens, quakers,
anglicans, catholiques). La crise se dénoue une décennie plus tard avec
la « Glorieuse révolution » en 1689, l­’exil de Jacques II et son rempla-
cement par un roi protestant.
Ces deux nouvelles crises politiques de 1679 et de 1690 vont trans-
former en profondeur les usages de la mémoire familiale aristocratique.
Cette dernière ­commence à être mobilisée dans les affrontements partisans
au Parlement et elle se déploie à ­l’échelle de la métropole londonienne
qui c­ oncentre les journalistes et les libraires. Londres prend une place
centrale dans la divulgation de secrets de famille qui n­ ’aurait pas été
permise dans un cadre où les mécanismes ­d’auto-censure étaient plus
résistants. Y circulent de manière précoce et clandestine des récits
manuscrits sur la révolution, notamment The Epitome of the Civil Wars
(Behemoth) d­ ’Hobbes. En effet, La suspension de toute autorisation sur
les imprimés – le Licensing Act en 1679 et à partir de 1695 – c­ ontribue
à une forte mobilisation partisane des équipes de presse londoniennes.
35 Harris, 1992.
36 Knights, 2005, p. 4, p. 20.
De la dissimulation à la ­commercialisation 201

Leurs pamphlets et gazettes sont alors distribués dans l­’ensemble du


royaume. La Glorieuse Révolution c­ onduit aussi à la suppression du droit
de visite du College of Arms dans les ­comtés. Cette mesure ­contribue à une
plus grande circulation des archives familiales au-delà de l­’institution
du College et leur utilisation par des équipes de presse rivales.
Les partisans des Tories travaillent à établir un lien entre les familles
révoltées sous Charles Ier et celles qui s­ ’opposent à la succession d­ ’un roi
catholique. Ainsi William Dugdale, dont on a pu mesurer la prudence
dans les années 1650 et 1670, publie un nouvel ouvrage en 1681 qui
mêle l­’érudition et la polémique et qui c­ onstruit un parallèle entre la
crise de succession de 1679 et les affrontements militaires de la décennie
1640. Il ­n’hésite plus à donner une liste de quelques grandes familles
hostiles à Charles Ier. Sont évoqués le c­ omte d­ ’Essex célébré par le Long
Parliament pour son action dans la bataille de Kinalton ainsi que le Lord
Maire de Londres qui avait accueilli avec tous les honneurs Cromwell
après le régicide de 1649. Les deux noms ­n’étaient pas choisis au hasard
dans la mesure où Lord Essex et le Lord Maire étaient c­ onsidérés c­ omme
faisant partie des principaux acteurs principaux de la révolte whig37. Au
même moment est publié par un journaliste Tory, The Weekly Discovery
of the Mystery of Iniquity : une série ­d’enquêtes hebdomadaire qui entend
enfin livrer la vérité sur les acteurs de The horrid Revolution. Le premier
numéro paraît en février 1680 et célèbre les vertus de la longue durée.
Selon son auteur, elle seule permettrait de situer la dernière crise poli-
tique de 1679 dans la suite ­d’autres troubles plus anciens et de lui
donner toute sa signification38. Dans le second numéro est évoqué la
responsabilité de membres du clergé, de la gentry et de la noblesse dans
la guerre civile39. Dans le troisième numéro, est publiée l­’anecdote
selon laquelle Edward Sackville (1590-1652), Comte Dorset aurait,
dans les premiers moments de la révolution, fait preuve d­ ’insolence en
traitant le roi de fellow subject. Même si par la suite, Dorset s­’est rangé

37 A Brief Survey of the Late Troubles to which is added A Perfect Narrative of the Treaty at
Uxbridge in an. 1644, London, 1681, p. 111, p. 418.
38 « The present age in being has always the pleasure and advantage of looking from the top of this
Teneriff upon the two oceans of past and future and by the ­comparing several events of distant
age », The Weekly Discovery of the Mystery of Iniquity in The Rise, Growth, Methods and Ends
of the Late Unnatural Rebellion in England, London, p. i.
39 « Many of the clergy and Gentry and some of the nobility were carried down the stream […] and
help to swell the flood », Ibid.
202 STÉPHANE JETTOT

du côté des royalistes, cette audace fut, du point de vue de l­ ’auteur tory,
­d’une irresponsabilité singulière p­ uisqu’elle ­contribua au discrédit de la
personne royale. Dorset s­ ’attira ainsi la punition divine, en mourant en
1652 isolé dans son domaine et couvert de dettes. À nouveau, le choix
de la famille Sackville c­ omme artisan involontaire du chaos politique
­n’est pas une coïncidence puisque son fils figure parmi les premiers
fondateurs du parti Whig. Ainsi, loin ­d’être occulté, le souvenir de la
révolution devient l­ ’instrument polémique privilégié du nouveau parti
tory. Le huitième numéro décrit les insolences du baronet et parlementaire
Sir John Hotham. En avril 1642, ce dernier avait interdit au roi l­ ’accès
à la ville de Hull et à son dépôt ­d’armes40. Comme pour Dorset, cet
affront est payé en retour par une suite de mésaventures qui le ­conduit
dans les geôles londoniennes et à son exécution par les parlementaires.
Du côté des Whigs, la stratégie vise à démontrer que le devoir de
révolte, dans des circonstances précises, est l­’un des attributs des plus
grandes familles. La révolution est envisagée dans son sens astronomique,
celui ­d’un rétablissement de ­l’ordre ancien. À la différence de la première
révolution, la seconde était présentée ­comme une authentique restauration
des équilibres coutumiers entre le roi et le Parlement. En réponse aux
attaques tories lors de la crise ­d’Exclusion, ­l’une des premières initiatives
whig ­conduit à réhabiliter une partie des familles républicaines dans leur
opposition à la fois à Charles Ier et à Cromwell. Ainsi dans son Discours
sur le gouvernement, le républicain Algernon Sidney récuse la validité du
devoir d­ ’obéissance passive vis-à-vis de princes. Leur légitimité est dis-
cutable, de même que leurs généalogies sont le plus souvent douteuses,
à la différence de celles des plus grandes familles de la noblesse. Les
Tudor, vainqueurs de la guerre des Roses en Angleterre, ­n’avaient-ils pas
­qu’un « sordide » pedigree gallois à faire valoir41 ?. Capturé en possession
­d’une version manuscrite de son Discours, Sidney est exécuté en 1683
et lors de son procès, il évoque le lignage prestigieux de sa famille. Ce
­n’est pas la loi des princes à laquelle il faut obéir mais celle donnée par
ses ancêtres et par soi-même. La mémoire illustre ­d’une famille est ici
40 The Weekly Discovery, Ibid., 6 mars 1681.
41 « Three kings and two presumptive heirs of the crown were m ­ urder’d, and the nation brought
to that shameful exigence, to set up a young man to reign over them, who had no better cover for
his sordid extraction than a Welsh pedigree, that might shew how a tailor was descended from
Prince Arthur, Cadwallader and Brutus », Discourses Concerning Government, 1698. Sur la
résurgence ­d’une mémoire républicaine, on se reportera à Scott, 1991.
De la dissimulation à la ­commercialisation 203

utilisée et valorisée pour justifier le devoir de révolte mais en 1679, il


­s’agit encore ­d’une démarche exceptionnelle et isolée.
En revanche, la Glorieuse Révolution représente une rupture plus
profonde dans l­ ’expression des mémoires alternatives. L­ ’exil du souverain
ainsi que le vote d­ ’une loi de tolérance en 1689 en faveur des familles
des non-­conformistes ont réactivé les clivages religieux des années 1640.
Du côté des Tories ou des partisans de James II (jacobites), les misères du
roi déchu sont ­comparées à celles subies par Charles Ier. L­ ’érudit oxonien
Anthony Wood, qui reprochait à Dugdale son indulgence vis-à-vis des
républicains, publie en 1691 un recueil de biographies intitulé Athenae
Oxonienses : An Exact History of all the Writers and Bishops. Il y
célèbre ­l’héroïsme des familles anglicanes restées fidèles aux Stuart en
1640 mais dénonce dans sa préface le refus des familles non-­conformistes
de ­l’aider dans ses recherches. Cette défiance lui apparait suspecte et
­condamnable. Pour quelles raisons pensaient-ils q­ u’une enquête érudite
dans leurs archives leur serait défavorable42 ? ­D’autres anglicans zélés
redoublent de sévérité vis-à-vis des non-­conformistes. Ainsi, Gilbert
Ironside, ­l’évêque ­d’Hereford, fait détruire en 1694 une inscription sur la
stèle d­ ’un presbytérien, le Colonel John Birch, estimant q­ u’elle attentait
par ses allusions républicaines à la dignité des souverains. Le neveu du
colonel, à la suite d­ ’un procès, ­contraint cependant l­ ’évêque à réinscrire
la devise de son oncle43. Pendant l­ ’affaire Sacheverell en 1709, la mémoire
des « troubles » ­s’impose ­comme un puissant levier pour discréditer le
gouvernement whig. Le pasteur anglican Henri Sacheverell prononce à
Saint-Paul un sermon sur The Perils of False Brethren, les « faux frères »,
les non-­conformistes et les Low Churchmen qui corrompaient ­l’Église et
­l’État. Il défend les vertus de la non-résistance face à l­’autorité royale,
prédit le retour à ­l’anarchie des années 1640 et répond à ses ennemis ­qu’il
était prêt à suivre Charles Ier sur la voie du martyre44. De même en 1714,
John Walker, un pasteur anglican de l­ ’Exeter, publie à Londres une vaste
collecte des récits et des souffrances des membres de l­ ’Église. Dans son
Account of the suffering of the clergy of the church of England, il indique par
ordre alphabétique tous les sévices et souffrances infligés aux enfants et

42 « […] not knowing what use might be made of such ­communication to their Disadvantage », To
the reader, A. Wood, Athenae Oxoniense, vol. 1, préface.
43 Sherlock, 2008, p. 193.
44 Cowan, 2012.
204 STÉPHANE JETTOT

aux parents des clercs anglicans. Walker évoque l­ ’ensemble des manus-
crits que les familles ­concernées ont c­ onsenti à lui transmettre. Fiona
McGall démontre que pour ces familles de la middle sort, ­l’éloignement
de Walker hors du cadre c­ omtal a atténué l­ ’autocensure des fils et filles
des clercs ayant subi les persécutions45.
Dans un mouvement symétrique, la Glorieuse Révolution autorise
aussi une mise à jour des souffrances endurées par les presbytériens ou
les anabaptistes pendant la Révolution de 1640. Elle ­s’inscrit dans la
suite de la révocation de l­ ’édit de Nantes qui a ­conduit à l­ ’exil de nom-
breuses familles huguenotes, dont de nombreux éditeurs et libraires. De
Pierre Bayle à Rotterdam à Abel Boyer à Londres, ­l’influence huguenote
va se traduire par la circulation de nouveaux formats ­d’édition et en
particulier la promotion des dictionnaires biographiques. Ainsi, un
proche de Pierre Bayle, John Toland, publie de 1697 à 1699 une série de
mémoires de parlementaires radicaux et non-­conformistes ­comme James
Harrington, Denzil Holles et Edmond Ludow. De même, en riposte
aux notices biographiques ­d’Antony Wood, le non-­conformiste Edmund
Calamy publie en 1702 An Abridgement of Mr Baxter […] with an account
of many others of those Worthy ministers who were ejected46 . À nouveau la
préface souligne ­l’importance des enquêtes menées auprès des familles
afin de documenter leur souffrance47. Comme pour les Tories, le savoir
antiquaire est mobilisé pour soutenir ­l’engagement partisan. Toutefois,
la réhabilitation des non-­conformistes ne passe pas encore par celle de
la cause républicaine. Ainsi, en 1715, le presbytérien Ralph Thoresby,
publie son Ducatus Leodiensis, or, The Topography of Leedes. Son père,
un marchand de la ville, s­’était engagé c­ ontre Charles Ier dans ­l’armée
du parlement. L­ ’ouvrage est financé par souscription et publié à plus
de 2000 exemplaires. Si les persécutions des non-­conformistes à Leeds
sont évoquées pendant les années de « trouble », en revanche il ­n’est
pas question ­d’assumer ­l’héritage des violences républicaines, ni celui
du régicide. Ainsi, un proche de Thoresby, Jonathan Priestley, le félicite
­d’avoir passé sous silence la révolte républicaine de Farnley Wood en
1663 qui avait été utilisée par les Tories pour démontrer les liens entre

45 McCall, 2013, p. 617.


46 Rivers, 2001, p. 141-146.
47 « It hath cost me much time and pains in reading and abridging so many printed accounts and
manuscript narrative », An Abridgement of Mr Baxter, London, 1702, préface.
De la dissimulation à la ­commercialisation 205

républicanisme et non-­conformisme48. Si des mémoires républicaines


­commençaient à circuler, les héritiers ­continuent ­d’en assurer un ­contrôle
étroit et ­d’imposer un usage restrictif. Le manuscrit de 1650 utilisé
par Thoresby fait mention ­d’une clause de ­confidentialité, les familles
ne souhaitent pas être accusées de vouloir célébrer les exploits de leurs
descendants49. Après 1689, si les Whigs entendent dénoncer la politique
anglicane autoritaire de Charles Ier, ils ­continuent de se démarquer de
­l’héritage républicain pour ne pas ainsi prêter flanc aux attaques des Tories.
Avec la montée sur le trône de George Ier de Hanovre, les Whigs
­s’assurent le c­ ontrôle de la plupart des institutions, réduisant le parti
adverse à une position défensive puis marginale. À nouveau, le princi-
pal angle ­d’attaque est d­ ’associer les familles whigs aux régicides. Dans
la décennie 1720, Lord Bolingbroke, le principal meneur des Tories,
multiplie les attaques personnelles c­ ontre le gouvernement de Robert
Walpole. Dans son périodique, The Craftsman Being a Critique on the
Times, le parti whig est associé au gouvernement de nouveaux riches, des
hommes aux origines obscures et dont la seule obsession serait ­l’appât du
gain. Bolingbroke réactualise la rhétorique employée à la Restauration
­contre les régicides, des hommes dégénérés et monstrueux. La violence
politique en 1649 c­ omme en 1689 provient d ­ ’hommes modestes, de
parasites dont les prétentions sociales sont jugées c­ ontre nature50.
­L’argument généalogique est à nouveau utilisé à des fins partisanes.
­L’attaque portée sur les origines modestes des Whigs ­n’implique pas
pour autant un jugement bienveillant sur Charles Ier ou Jacques II. Par
leurs erreurs grossières, ces monarques sont indirectement responsables
de la fortune de ces factions de newcomers qui ­s’imposent devant les
élites traditionnelles. Les partisans de Walpole prennent ces attaques au
sérieux dans la mesure où The Craftsman ­connaît une large audience. Si
les Whigs ­condamnent la première révolution dans son principe et son
dénouement, ils entendent ­commémorer leur participation décisive dans

48 « I am glad you did no fool your book with Farnly-wood plot, as it was then called ; for so far as
I ever understood, it was a pure piece of malice and revenge to draw in some not very ill-meaning
people that had a favour for O ­ liver’s government », cité dans Hooper, 2002, p. 283.
49 « ­Tho’ this manuscript is worthy of preservation, yet it should not be published no exposed to publick
view, because several worthy families now living descended from the Persons herein m
­ ention’d who abhor
such fanatic Commonwealth Principles as their forefathers were foolishly drawn into », Ibid. p. 283.
50 « The greatest monster of power and wickedness that ever infected the face of the earth […]. A
great voracious land-fish whom we call a wicked minister ». Cité par Kramnick, 1968, p. 21.
206 STÉPHANE JETTOT

la seconde. ­C’est dans cette logique q­ u’Arthur Collins, un libraire érudit,


­confectionne plusieurs histoires familiales c­ onsacrées aux prestigieux
lignages des « patriotes » de 1689. Dans son English Baronage, publié en
1727 sous le patronage de Walpole, Collins entend démonter les attaques
de Bolingbroke associant esprit révolutionnaire et origines plébéiennes. Le
titre choisi fait allusion à la première édition du Baronage par Dugdale
et l­’ouvrage est présenté c­ omme étant sa suite logique. Mais en réalité
il ne publie q­ u’une dizaine de généalogies, celles de grandes familles de
Lords whigs : les Churchill, les Pelham, les Sackville et les Walpole. Dans
son récit réalisé à partir de longs séjours dans les archives, il ­s’emploie à
démontrer ­qu’elles furent toutes fidèles aux Stuarts en 1640 mais révol-
tées en 1689. D ­ ’autres familles Whigs viendront rejoindre ce panthéon
prestigieux51. Il ­s’agit de volumes de grand format (folio) très coûteux
qui n­ ’ont aucune rentabilité c­ ommerciale et qui sont destinés à un usage
interne au sein de ­l’oligarchie whig.

VERS UNE ­COMMERCIALISATION DU SOUVENIR


DES RÉVOLUTIONS (1720-1750)

Cependant, à partir des années 1720, la mémoire de la révolution de 1640


dépasse le cadre partisan pour devenir un discours historique susceptible
­d’une plus large ­commercialisation. Cette évolution suppose ­d’abord ­l’intérêt
­d’un public élargi aux élites provinciales, et le recours à la souscription est
incontournable. La souscription ­s’est généralisée à Londres dès les années
1640 et elle a été ensuite utilisée pour financer des projets coûteux en
format folio ­comme les histoires c­ omtales de Dugdale ou dans le cadre des
affrontements partisans52. Mais le nombre de souscripteurs reste limité. En
revanche, les premiers répertoires généalogiques des familles, publiés à partir
de 1720 en format octavo et duodécimo nécessitent pour leur financement
la mobilisation ­d’un plus grand nombre de souscripteurs. Pour obtenir
une adhésion étendue à l­ ’ensemble du royaume, il fallait abandonner une

51 Memoirs of the antient and noble family of Sackville. Collected from old records, wills, Manuscripts,
our most a­ pprov’d Historians, London, 1741.
52 Barnard, 2001, p. 1-16 ; Parry, 2008.
De la dissimulation à la ­commercialisation 207

mémoire partisane de la révolution. Avant de se tourner vers les publi-


cations des Lords Whigs, Arthur Collins avait fait l­’expérience précoce
de cette incompatibilité. En 1711, dans plusieurs gazettes whigs, Arthur
Collins publie une souscription appelant à regrouper toutes les familles
détentrices du titre de baronet. Dans son Proposals for printing, a genealogical
history of all the families of the baronets of England, il invite les familles de
« patriotes » à venir témoigner de leurs exploits pendant la révolution de
1689. Explicitement, il ­s’agit de rétablir ­l’équilibre avec la martyrologie
royaliste des années 1640 qui est jugée trop exclusive53. Cependant l­ ’appel
à souscription ­n’a pas le succès escompté et une première version tronquée
voit le jour en 1720. Pour la plupart des familles, l­’enjeu n­ ’est plus de se
retrouver sur une liste partisane mais de faire valoir à l­’échelle nationale
le prestige de leurs origines et les exploits de leurs ancêtres.
Cette période coïncide avec ­l’affaiblissement de la « rage des partis » et
au renforcement ­d’une ­culture ­commune ­d’une oligarchie à la fois urbaine
et rurale. La forte croissance urbaine c­ omme la prospérité croissante des
propriétaires c­ ontribuent à partir du règne de George II à un recul de
la violence partisane54. Les élites catholiques ou protestantes, les Tories
ou les Whigs, ­s’identifient de plus en plus aux valeurs inclusives ­d’une
oligarchie foncière55. Émerge alors une ­culture ­consensuelle, celle de la
politeness, façonnée par des modes de c­ onsommation partagés et par la
fréquentation des mêmes lieux de sociabilité (les villes thermales, le West-
End)56. La c­ onsommation ­d’ouvrages historiques et de mémoires familiales
ne s­ ’inscrit plus dans un esprit de vengeance ou de réhabilitation mais
plus bien dans le partage d­ ’un passé prestigieux et héroïque. Le caractère
polémique des historiens whigs c­ omme John Oldmixon est ­condamné
dans des gazettes dédiées à tous les gentlemen57. La mémoire familiale
devient susceptible de nourrir « les plaisirs de ­l’imagination », que ­l’on
soit dans le camp des vaincus ou des victorieux58. Pour répondre aux

53 « If there be any who think I have wrote too favourably of such as ­suffer’d for their loyalty to
King Charles the First, I can truly answer that as I ­esteem’d their adherence to the Sovereign
in his Troubles, to be a virtue, so the reader will find that I have had an equal regard for those
patriots who e­ ndeavour’d the redressing the grievances of the Nation and the exorbitant Power of
the Crown. » Proposal, p. 6.
54 Holmes, 1987, p. xvi.
55 Rosenheim, 1998.
56 Sweet, 1997, Plumb, 1967, p. xviii.
57 Richard Savage, « On false historian » (1741), cité par Watson, 1985, p. 323.
58 Peltonen, 2005, p. 400.
208 STÉPHANE JETTOT

appétits mémoriels du « public », Matthieu Wotton, l­ ’un des publishers


­d’Arthur Collins et un libraire de la City, organise une vaste collecte de
données généalogiques publiées sous forme de dictionnaires en 1727 et
en 1741. La promotion de son initiative se fait à partir des principaux
journaux du pays, notamment dans The Gentlemen Magazine et le Post
Boy. Membre ­d’une corporation de métier et issu de la petite Middle
sort, il ­n’a pas accès, à la différence ­d’Arthur Collins, aux archives de
grandes familles. Ainsi son projet éditorial est bien différent : il ne mise
pas sur le patronage du gouvernement mais sur la participation ­d’un
large public afin d­ ’assurer la rentabilité c­ ommerciale de son entreprise.
Wotton se garde bien de marquer sa préférence pour l­’un ou l­’autre
des partis. Il se ­contente dans la préface de célébrer la grandeur des
élites et l­’intérêt de leurs archives pour le bien du public59. Cet appel
aux bonnes volontés rencontre un succès c­ onsidérable, des centaines de
familles ­consentent à lui transmettre divers papiers, mémoires et notes
érudites. Avec une première liste de 80 souscripteurs, Wotton réalise
une première publication de 3 volumes luxueux au format quarto pour
£ 3 et au format in-16 pour quelques shillings. Une quinzaine ­d’années
plus tard, plus de 200 familles répondent à ­l’appel. Il entreprend alors
en 1741 une publication au format octavo de cinq volumes60.
Ce vaste mouvement de souscription ­conduit à la juxtaposition de
mémoires familiales très c­ ontrastées. Pour la première fois, des familles
anglicanes, catholiques ou anciennement républicaines coexistent dans
un même ouvrage. Aux côtés des familles royalistes récompensées à la
Restauration, figurent à présent les nouvelles élites du régime hanovrien
­comme ­l’Écossais Sir George Warrender de Lochend, qui entend signaler
son rôle en 1689, cette « joyeuse révolution […] pour la défense de la
liberté et de la religion ». Cet événement est opposé à cette « rébellion
­contre nature » de 1715, ­c’est-à-dire lorsque les partisans des Stuart ont
tenté un coup de force c­ ontre les Hanovre61. ­S’y trouvent également
les familles républicaines ralliées à la monarchie ­comme les Blount

59 « An account of your family which will be of great service to the Publick », British Library Ms
Add 24120, fol. 1.
60 Thomas Wotton, The English Baronets, being a genealogical and historical account of their
families, 1727 ; Id., The English Baronetage : Containing a Genealogical and Historical Account
of All the English Baronets, 1741.
61 George Warrender à Wotton, BL Add. Ms 24121, f. 327 ; The English Baronetage, op. cit.,
vol. 4, p. 172.
De la dissimulation à la ­commercialisation 209

de Tittenhanger et les Musgrave ­d’Hayton Castle. Wotton est aussi


sollicité par des familles coloniales soucieuses d­ ’inscrire leur histoire
sur le sol britannique. Sir William Stapleton depuis les Antilles, écrit
pour faire c­ onnaître au public l­’implantation ancienne de la famille
dans le c­ omté de Tipperary en Irlande et les souffrances subies lors de
la rébellion catholique de 164262. La c­ omparaison terme à terme entre
les informations transmises par les familles et la version imprimée laisse
toutefois apparaître un important travail d­ ’édition et de sélection par
Wotton. Parfois les changements sont mineurs. Il ­s’agit pour ­l’éditeur
­d’actualiser le vocabulaire du dix-septième siècle et ­d’ajouter des détails
anecdotiques. Ainsi Robert Adams évoque les violences subies par son
grand-père, le sheriff de Londres en 1644. Il aurait été traîné hors du
lit par les « malcontents » puis enfermé à la tour de Londres. Wotton
ajoute q­ u’il aurait été emmené par « les chevilles » par des « rebelles63 ».
Le terme de malcontent reste associé au ­contexte des guerres de religion
françaises et à la revendication d­ ’une projet politique alternatif. Ambigu
et peu usité au xviiie siècle – il ­n’apparaît pas dans le dictionnaire de
Samuel Johnson – « malcontent » est remplacé par le terme plus général
de « rebelle », ce qui permet d­ ’éviter toute allusion religieuse à l­ ’origine
de la révolution et renforce la signification subversive du mouvement.
­L’éditeur opère un travail plus sélectif pour certaines situations
délicates c­ oncernant des familles républicaines ou catholiques. On ­s’en
tiendra à ­l’exemple de deux familles du Lancashire. Dans le premier cas,
la famille de Moore de Bank Hall à Liverpool fut directement impliquée
dans la mort de Charles Ier. John Moore fut colonel des gardes c­ ontre les
catholiques irlandais en 1645, représentant au Parlement et signataire
de la ­condamnation à mort du monarque. Son fils servit également dans
la New Model Army de Cromwell. La famille et Wotton s­ ’entendent sur
la nécessité de taire ce détail sur la mort du roi. Comme le précise un
cousin, les descendants immédiats semble frappés ­d’amnésie64. Wotton
indique cependant que lors de l­’amnistie collective imposée lors de
la Restauration, son fils fut fait baronet mais à la suite de nombreuses
62 BL Add. Ms 24121, fol. 260.
63 « Himself was pulled out of bed on ye street by the malcontents in looking for Charles I », BL Add.
Ms 24120, fol. 6. « Himself was pulled out of bed by the heels on the street by the rebels », The
English Baronetage, op. cit., vol. 3, p. 29.
64 « Thomas More being an old man, I could get little of him. […] I went to his d­ aughter’ husband
who c­onsulted his wife but has little better ». BL Add. 24121, fol. 98.
210 STÉPHANE JETTOT

résistances, il ne fut distingué ­qu’en 1675. En 1740, les descendants sou-


haitent voir leur nom figurer dans ­l’ouvrage de Wotton sans pour autant
évoquer le détail de leur implication dans la mort du roi. Laissant de côté
­l’année 1649, Wotton évoque plutôt son rôle dans la défense héroïque
de Liverpool c­ ontre les armées royales et sur l­’amnistie difficile de la
famille sous la Restauration65. ­L’engagement républicain de la famille
est reconnu mais son caractère polémique est atténué par la mention des
seules qualités guerrière de John Moore, ce qui fait de lui un patriote.
De même, dans le cas d­ ’anciens catholiques et de Tories, la mémoire
des Bradshaigh est désarmée de tout potentiel subversif par le travail
éditorial de Wotton. La famille a refusé de reconnaître la légalité de la
Glorieuse Révolution, de reconnaître Guillaume III et se trouve accusée
­d’entretenir des pratiques crypto-catholiques. Rédigée en collaboration
avec les membres de la famille, la notice occulte la révolution de 1689
mais inclut un long passage sur la manière dont le grand-père de Sir
Roger Bradshaigh, un « vrai patriote », se serait ­converti au protestan-
tisme par la fréquentation du fils du c­ omte de Derby pendant la guerre
civile66. Pour renforcer la crédibilité du récit, Wotton va chercher dans
une source extérieure, dans l­ ’ouvrage biographique ­d’un clerc anglican
John Jones (c.1700–1770) publié en 1739, Memorials and characters of
eminent Persons. La question de l­ ’engagement des Bradshaigh du côté des
Tories est occulté par la description de sa longue carrière au Parlement
qui témoigne de son attachement pour les institutions du royaume.
Bradshaigh figure parmi les plus anciens parlementaires, après 32 années
de réélection sur le siège de Wigan67.
Ainsi, dans ces deux familles du Lancashire, ­l’évocation de la guerre
civile est utilisée dans un sens ­consensuel pour célébrer pour Moore
les valeurs guerrières des ancêtres et pour Bradshaigh la ­conversion au
protestantisme. ­L’initiative de Wotton c­ onstitue un jalon important
65 « Colonel John More, or Morehall who defended Liverpool against King Charles I [whose son]
was to have been created a baronet in the year 1660, but the receipt was not signed till March
I, 1661 and the patent p­ ass’d not under the great seal, until the time before mentioned (1675) »,
The Baronetage, op. cit., vol. 3. 2, p. 583.
66 « He being hereby seasonably retrieved from the errors of Popery (in which the rest of his relations
were trained up) revived the religion of his ancestors and restored new lustre to his family by the
choice of a better profession », Ibid., vol. 1, p. 659.
67 « […] has sat in Parliament as a Member for that place [Wigan] ever since [1695] which is
now above 32 years, this is more then [sic] be said of any gentleman of his age in England », BL,
Add. Ms 24120, fol. 140.
De la dissimulation à la ­commercialisation 211

dans la circulation de mémoires hétérodoxes de la première révolution.


Les opérations d­ ’autocensure et d­ ’édition sélective restent encore impor-
tantes mais ces recueils imprimés de mémoires familiales deviennent
plus diversifiés et moins inclusifs. Le produit ­commercial développé par
Wotton est suivi ­d’autres initiatives similaires ­comme celle de Sir James
Burrow en 1763 (A few anecdotes and observations relating to Oliver
Cromwell and his family) ou bien celle de John Prestwich en 1787 (Le
Res Publica). Dans un cas c­ omme dans l­’autre, les éditeurs entendent
faire circuler des mémoires proscrites, celles des régicides et des répu-
blicains. Ainsi ­l’ouvrage de Prestwich réunit toutes les généalogies des
élites du Commonwealth ainsi ­qu’une liste ­complète des régicides : de
Cromwell en passant par les députés, officiers. Il estime caduc le temps
de la proscription et dénonce le ­complot du silence liant les divers
éditeurs londoniens68. On peut penser que les affrontements avec la
France (la guerre de la succession d­ ’Autriche ainsi que la guerre de Sept
Ans) donnent aux valeurs martiales, si bien illustrées par les armées
de Cromwell dans les colonies ­comme en Irlande, une valeur exem-
plaire. Pour les catholiques irlandais victimes des exactions des troupes
protestantes, il faudra attendre le début du xixe siècle et ­l’apparition
­d’éditeurs catholiques et irlandais sur le marché de Londres ­comme le
Peerage and Baronetage de John Burke pour obtenir des récits de leur
tribulation pendant les guerres civiles, leurs exils sur le ­continent ou
dans les colonies.
Au-delà de la politique mémorielle imposée par la monarchie lors de
sa Restauration en 1660, il nous semble que les sources généalogiques
­constituent un terrain ­d’enquête prometteur pour aborder la mobili-
sation des élites dans les pratiques ­d’occultation ou de remémoration
des souvenirs de la révolution. Il est essentiel d­ ’envisager une période
assez longue afin de faire apparaître des inflexions significatives dans des
pratiques ­culturelles situées entre les archives du for privé et le monde
des imprimeurs à Londres.
À la manière de filtres successifs, diverses opérations de publication
vont progressivement transformer les manuscrits familiaux en recueils
imprimés. Les premières initiatives c­ ommencent à la Restauration de
68 « In this list will be found the armorial of several worthy family, most of them being of the true
old Saxon stock, but whom the envy and partiality of authors have covered with silence, thinking
through prejudice, that such families as were for the Commonwealth were of the vilest of the people »,
Prestwich Respublica, London, 1787, p. 170.
212 STÉPHANE JETTOT

la part de quelques auteurs royalistes qui entretiennent par le biais


­d’ouvrages coûteux et érudits la fiction ­d’une élite entièrement acquise au
parti de Charles Ier. Dans leur ensemble, la plupart des familles refusent
­d’ouvrir leurs archives et se tiennent à une position attentiste. Cependant,
après 1678, la remise en cause de ­l’autorité des Stuart et la nouvelle
révolution de 1689 c­ onduisent à des remémorations partisanes. Divers
mémoires familiales sont publiées et nourrissent des parallèles entre les
révolutions de 1649 et de 1689. Reproduites sous forme d­ ’extraits dans
des pamphlets ou des recueils biographiques, elles sont mobilisées par
les deux partis Whig et Tory. Avec les déclins des affrontements parti-
sans, sous le règne de George II, la mémoire familiale de la révolution
fait l­’objet ­d’une plus large ­commercialisation qui favorise un récit
­consensuel. Regroupés en plusieurs volumes généalogiques, les récits
familiaux imprimés occupent une place de choix dans les bibliothèques
de la gentry et de la noblesse. Ces mémoires, de manuscrits dissimulés,
sont devenus des objets de luxe et de ­consommation. Encouragées par
les souscriptions et les publicités placées dans les gazettes, les familles
­s’offrent la possibilité de publier une partie de leurs archives après
un tri préalable. Cette transformation du marché éditorial ­conduit à
la circulation de mémoires plurielles, associant familles catholiques,
républicaines ou anglicanes. Cependant, en 1740 certaines proscriptions
­continuent d­ ’être respectées, les agissements des ancêtres régicides ou
bien des jacobites restent encore prudemment enfouis.

Stéphane Jettot
Sorbonne Université
TROISIÈME PARTIE

ORALITÉS ET TRANSMISSIONS

LES EFFETS SUBVERSIFS


DE LA REMÉMORATION
ENTRE OUBLI ET RÉSURGENCE
Le souvenir des révoltes paysannes
dans ­l’Occident médiéval

Dans un chapitre intitulé « Se souvenir de ­l’insurrection » et ­consacré


à la grande révolte qui agita le royaume ­d’Angleterre en 1381, Steven
Justice avançait ­l’idée que « ­l’histoire de la manière dont le soulèvement
fut préservé dans les mémoires est aussi l­’histoire de la manière dont
il fut oublié, de la machinerie c­ ulturelle et psychique qui a permis de
la garder au passé1 ». Il précisait également que ce que nous appelons
­d’ordinaire la mémoire ­d’une rébellion ­n’est finalement jamais rien
­d’autre que la mémoire des victimes dans la mesure où elle ­constitue la
seule mémoire disponible et accessible aux historiens. Un tel jugement
pourrait, sans réelle difficulté, s­’appliquer à l­’ensemble des révoltes
paysannes médiévales, lesquelles subirent, du moins en apparence, une
sorte ­d’amnésie collective dans les décennies qui suivirent leur écrase-
ment brutal. De manière générale, cette apparente perte de mémoire
paraît être le phénomène dominant, du moins ­jusqu’à l­’apparition
des premiers manifestes paysans au début du xvie siècle, à l­’instar de
ce qui se produisit au cours de la Guerre des Paysans en Allemagne,
même si l­’un des plus précoces exemples c­ onservés de ce type de
documentation est ­constitué par les ­complaintes et demandes des
« ­communes » du Kent en 14502. Sans doute est-il toujours possible de
retrouver quelques rares exemples antérieurs, six lettres ­concernant la
révolte anglaise de 1381 et ­contenant un appel aux armes ayant circulé
au sein des insurgés sous la forme de billets peut-être déposés sur les
places des marchés ou cloués aux portes des églises3 ayant été mira-
culeusement préservées et transcrites au sein des chroniques ­d’Henry
1 Justice, 1994, p. 193.
2 Dobson, 1970, p. 336-342.
3 Sur ce type de phénomène, quoique dans un ­contexte géographique très différent, voir
Lecuppre-Desjardins, 2010.
216 VINCENT CHALLET

Knighton et de Thomas Walsingham4, sans ­qu’il faille pourtant y


voir une particularité anglaise, Jacques ou Tuchins français recourant
régulièrement à l­ ’écrit mais paraissant ­s’en servir plutôt sous la forme
de messages informatifs que sous celles de lettres ­d’intention ou de
textes programmatiques5. Ce recours partiel et tardif à l­’écriture ne
facilita certes pas la transmission des souvenirs et ­constitua ­l’un des
facteurs facilitant une certaine dissolution mémorielle. Cette amnésie
ne toucha pas cependant les événements eux-mêmes, leur mémoire
étant ­constamment entretenue par la vision des vainqueurs, dûment
inscrite au sein des différentes chroniques mais il ne s­ ’agit là que d­ ’une
mémoire déformée et déformante par excellence, ­s’attachant à la sau-
vagerie des insurgés pour mieux les déconsidérer ou, à ­l’inverse, à la
violence ­d’une répression seigneuriale et royale orchestrée en représailles
et qui devait servir ­d’avertissement aux paysans ultérieurement tentés
par la rébellion. En somme, et ­comme le fait remarquer avec justesse
Georges Bischoff à propos des c­ ontestations paysannes du Bundschuh,
« quand elle ­n’est pas canalisée dans les cahiers de doléances ou corsetée
par les juges, la parole des insurgés nous échappe6 ». On mesure par là
la difficulté ­qu’il y a à vouloir appréhender une mémoire des révoltes
paysannes qui serait plus sociale que collective et ­composerait, à défaut
­d’une ­contre-mémoire, une mémoire du moins alternative7.
Travailler sur de telles mémoires revient donc à se ­concentrer sur les
gestes et les lieux plus que sur les mots et user du « paradigme indi-
ciaire » cher à Carlo Ginzburg8 pour partir à la recherche de résidus
parfois ténus et ­contourner la voix dominante – celle de chroniques qui
ne nous livrent guère q­ u’un imaginaire en négatif de ce que furent les
rébellions – pour prêter ­l’oreille à des paroles plus diffuses – même si
certaines sont publiques, à l­’instar des prêches de John Ball – et plus

4 Voir Justice, 1994, p. 13-66. ­L’auteur réfute ­l’idée, généralement admise, que de tels
billets auraient été rédigés par John Ball et montre ­comment ils ne peuvent être ­l’œuvre
que des insurgés eux-mêmes.
5 Pour ­l’opinion inverse qui insiste au ­contraire sur la spécificité de ­l’usage de ­l’écrit dans
le ­contexte des révoltes anglaises voir Cohn, 2010.
6 Bischoff, 2009, p. 62. ­L’auteur montre toutefois ­comment le Chant du Rosemont a pu
préserver des fragments ­d’une mémoire alternative.
7 Sur les raisons qui me ­conduisent à préférer, au terme de « mémoire collective » mis en
avant par Maurice Halbwachs, celui de « mémoire sociale », voir l­ ’excellente discussion
menée par Haemers, 2011, et sa c­ ontribution dans ce même volume.
8 Ginzburg, 1980.
Entre oubli et résurgence 217

incertaines qui, souvent, parviennent ­jusqu’à nous parce que leur caractère
séditieux a pu inquiéter les autorités, à ­l’instar de ce brassier de Beaucaire
qui, coupable d ­ ’avoir dit publiquement tout le bien ­qu’il pensait des
Tuchins de Languedoc, écopa en 1382 ­d’une amende colossale de dix
francs ­d’or9. De telles paroles, pour autant, ne restent pas inaudibles pour
­l’historien dès lors q­ u’il parvient à capter les murmures des archives et
à se départir de ­l’idée tenace que les rebelles des temps médiévaux ne
parviendraient pas à se déprendre de la c­ ulture dominante10. Travailler
sur la mémoire des révoltes paysannes, ­c’est tenter de retrouver une
« vision des vaincus », tenter « en quelque sorte de passer de ­l’autre
côté de la scène et de scruter ­l’histoire à ­l’envers, puisque aussi bien
nous sommes accoutumés à ­considérer le point de vue (des dominants)
­comme ­l’endroit11 ». C ­ ’est ­qu’en effet ce qui, au premier abord, paraît
se dissoudre ­n’est pas tant la révolte que sa signification profonde en
termes politiques et sociaux pour les rebelles dans la mesure où leurs
mots, leurs gestes et leurs cris ne nous parviennent q­ u’à travers l­’écho
assourdi et déformé de sources narratives et judiciaires dont ­l’objectif
ne saurait être de nous renseigner sur ce que pensent les révoltés. Enfin,
travailler sur la mémoire des révoltes paysannes, ­c’est ne pas négliger son
revers, celui de l­ ’oubli, puisque l­ ’omission, q­ u’elle ne soit q­ u’apparente
ou bien réelle, ­constitue une part incontournable de la mémoire12. On
sait en effet ­comment, tout au long de la période médiévale, certains
groupes dominants ­n’hésitèrent pas à devenir de véritables prescripteurs
de mémoire en forgeant et reforgeant à leur guise et selon leurs propres
intérêts les événements passés, opérant de ce fait des reconstructions
historiques autant que mémorielles13. ­C’est ainsi que, tout au long du
xie siècle, certains moines se muèrent en professionnels de la manipu-
lation mémorielle pour façonner et refaçonner, en recourant à de faux
diplômes si nécessaire, un passé carolingien indispensable à la défense
des droits de leurs monastères sur des terres qui leur étaient disputées
par des laïcs, même si un tel phénomène, aussi maîtrisé soit-il, ne peut

9 Bibl. Nat. de France, ms. lat. 9176, fo 86 : c­ ondamnation de Jacme Blausac pour avoir
dit que « les Touchins estoient bon ­compaignons et ce ­qu’ils faisoient estoit bien fait ».
Sur la révolte des Tuchins, voir Challet, 2003.
10 Dumolyn et Haemers, 2012.
11 Wachtel, 1971, p. 22. C
­ ’est moi qui remplace ici « des européens » par « des dominants ».
12 Geary, 1994.
13 Pour un exemple précis, celui des c­ onsuls montpelliérains, voir Challet, 2015.
218 VINCENT CHALLET

manquer de laisser subsister ce ­qu’il ­convient ­d’appeler avec Patrick Geary


des « fantômes du souvenir », soit autant de pièces discordantes dans le
vaste puzzle de cette reconstruction des temps anciens. Tant et si bien
­qu’il est loisible de se demander si les mémoires médiévales ­n’ont pas,
en définitive, plus à voir avec un processus ­conscient de manipulation
du passé q­ u’avec ce que nous avons coutume de qualifier de mémoire
collective, ­d’autant que le c­ ontrôle de ce passé offrait des moyens de
déterminer à la fois le présent et ­l’avenir. La mémoire médiévale, cepen-
dant, loin de ne reposer que sur des traces écrites14, puise généralement
à la fois à des sources écrites et orales et, en dépit de ­l’usage croissant de
registres et de chartes dans le cadre de « la révolution scripturaire » du
xiie siècle15, demeure de nature essentiellement orale pendant l­ ’ensemble
de la période16. Une telle ­constatation, néanmoins, ­n’aide guère l­ ’historien
à clarifier certains fondements mémoriels, de surcroît ­lorsqu’il se penche
sur des situations c­ onflictuelles marquées par un très fort hiatus entre
une mémoire collective dominante c­ onstruite par les chroniques et autres
sources judiciaires et le souvenir plus diffus que pouvaient ­conserver les
membres d­ ’une c­ ommunauté donnée de leur propre participation à une
rébellion. En d ­ ’autres termes, que se passait-il vraiment lorsque, face
aux maîtres auto-proclamés de la mémoire –moines, nobles et surtout
pouvoir royal – tentant d ­ ’occulter le souvenir d­ ’une révolte et de la
faire disparaître au profit ­d’un horizon de violence, les ­communautés
paysannes entendaient en préserver le sens politique et social ? Face à
la double injonction mémorielle lancée à ­l’encontre de leurs insurrec-
tions – effacer j­usqu’au nom des révoltes mais ne jamais les oublier
pour autant, ce qui ­constitue le paradoxe biblique ­d’Amaleq17 –, ces
­communautés tentèrent de préserver leur propre mémoire des événements
et de ­constituer une mémoire sociale18 alternative, propre à sauver de
­l’oubli une vision antagoniste des soulèvements. Certes, il ­n’est guère
assuré ­qu’un tel souvenir ait pu se perpétuer au-delà ­d’un siècle dans
la mesure où les hommes du Moyen Âge admettaient généralement

14 Le Goff, 1986, p. 131.


15 Maire-Vigueur, 1995.
16 Carruthers, 1990, p. 11.
17 Le Goff, 1986, p. 132.
18 Fentress et Wickam, 1992. Sur la capacité des c­ ommunautés paysannes à ­s’affirmer en
tant que productrices de ­contre-mémoire, voir, dans le c­ ontexte castillan, Oliva Herrer,
2014.
Entre oubli et résurgence 219

q­ u’au-delà de ce laps de temps ­commençaient les temps anciens pour


lesquels aucun témoignage oral ­n’était plus accessible19. Mais, si nous
retenons ce délai ­d’environ un siècle, cela nous ­conduit à supposer que
la mémoire de la Jacquerie d ­ ’Île-de-France ne ­s’estompa, tant au sein
des ­communautés paysannes qui en avaient été les principales actrices
que dans les milieux nobiliaires qui en avaient été les victimes, guère
avant le milieu du xve siècle et, donc, la fin de la guerre de Cent Ans.
Rien, pourtant, ne permet d­ ’affirmer catégoriquement un tel effacement
mémoriel : il est probable, en effet, que les mouvements paysans qui
suivirent firent resurgir des réminiscences de la Jacquerie et, notamment,
­l’épisode des Brigands d­ ’Île-de-France qui, dans les années 1420, prirent
les armes pour lutter ­contre les routiers armagnacs qui ravageaient les
campagnes parisiennes. ­D’autant que, dans le ­contexte français des
xive et xve siècles, les mouvements d­ ’autodéfense paysans à l­’encontre
des gens ­d’armes de tout poil et autres routiers ­s’apparentent bien
souvent à des épisodes séditieux et peuvent, au gré des circonstances,
être ­considérés ­comme tels par le pouvoir royal. Une telle ambiguïté
se discerne dans ­l’histoire du Grand Ferré et de la défense, en 1358, du
village de Longueuil Sainte-Marie, « accrochage d ­ ’importance locale,
lié à la micro-histoire des villages de Sainte-Corneille20 », transformé
sous la plume du chroniqueur de Jean de Venette en épisode héroïque
de la lutte c­ ontre les Anglais. Il est pourtant possible que Guillaume
­l’Aloue ait été élu capitaine en raison de sa participation à la Jacquerie
­l’année précédente, ce qui expliquerait à la fois son expérience mili-
taire et l­’ascendant q ­ u’il prit sur ses c­ ompagnons et Jean de Venette
précise que « cette lutte fut courageusement menée par les paysans
­c’est-à-dire des Jacques Bonhomme », même si ce dernier terme ­constitue
ici une désignation générique plus ­qu’une réminiscence de la Jacquerie
­d’Île-de-France. Toutefois, pour un accrochage local sauvé de ­l’oubli par
le talent ­d’un chroniqueur médiéval et érigé en symbole de la résistance
à ­l’occupation anglaise, ­combien ­d’épisodes de cette lutte incessante
entre paysans et routiers demeurent dans l­’ombre documentaire ? Or,
chaque prise d­ ’armes des ruraux qui est aussi, ­d’une certaine manière,
une forme de rébellion face une monarchie visant à imposer un mono-
pole de la « violence légitime » ­contribue, à intervalles très réguliers,
19 Guenée, 1980, p. 78-82.
20 Beaune, 2010 (p. 377 pour la citation) et 2013.
220 VINCENT CHALLET

à remettre au jour des gestes, des attitudes, des c­ omportements qui se


réactivent d­ ’autant plus aisément q­ u’ils s­’appuient sur la mémoire de
prises d­ ’armes antérieures21.
Pour autant, les déformations que les chroniqueurs médiévaux firent
subir aux révoltes paysannes ne sauraient suffire, à elles seules, à expliquer
une disparition aussi rapide en apparence de la signification intrinsèque
des rébellions. Dans la plupart des cas, elles se doublèrent d­ ’un phéno-
mène volontaire de damnatio memoriæ et, même si les mesures prises par
les autorités peuvent paraître moins spectaculaires que celles adoptées
dans les cités italiennes où les maisons c­ onfisquées aux familles exilées
pouvaient rester à l­ ’état de gasti durant de nombreuses années et ancrer
dans la mémoire urbaine la défaite d­ ’un clan, elles ­n’en furent pas moins
efficientes. Ce phénomène était ­d’ordinaire lié à la première phase de
répression/rémission qui suivait toute rébellion paysanne mais se révélait,
­d’une manière plus subtile, bien plus efficace en termes de ­contrainte
pesant sur les ­communautés paysannes pour les obliger à oublier – ou à
enfouir au plus profond ­d’elles-mêmes – la signification de leurs propres
actes. De ce point de vue, la répression sauvage ­conduite par les nobles
après la Jacquerie ­d’Île-de-France participe déjà ­d’un tel processus de
damnatio memoriæ : en pendant le maire de Meaux et en incendiant une
ville coupable de coopération avec les Jacques et les milices parisiennes,
les nobles ne faisaient, au final, que brûler leurs propres peurs22. Le
pouvoir royal décida même ­qu’à ­l’avenir plus personne ne pourrait
demeurer dans la ville et que Meaux serait ­condamnée à disparaître,
un châtiment issu de la législation impériale et couramment ordonné
– mais rarement appliqué – à l­’encontre des villes rebelles23. Dans le
même c­ ontexte, les supplices infligés à certains des partisans ­d’Étienne
Marcel, dont Peire Gilli qui avait participé à l­’attaque du marché de
Meaux aux côtés des Jacques et dont on coupa la langue avant de le
décapiter peuvent, elles aussi, être c­ onsidérées c­ omme une forme de
21 Challet, 2011. Pour une éloquente c­ omparaison avec ­l’époque moderne et le lien entre
autodéfense rurale et sédition, voir ­l’ensemble des travaux de Philippe Hamon qui écrit
notamment que « ­l’engagement dans la défense rurale […] ­contribue à la politisation
des ­communautés » ; Hamon, 2014 (p. 230 pour la citation).
22 Sur l­ ’épisode de l­ ’attaque du marché de Meaux et la répression qui s­ ’ensuivit voir Luce,
1894.
23 Quelques mois plus tard en effet, Charles, duc de Normandie et régent du royaume,
annula cette ordonnance et autorisa les habitants à venir repeupler la ville de Meaux, ne
maintenant en revanche que la suppression de la ­commune.
Entre oubli et résurgence 221

damnatio memoriæ dans la mesure où l­ ’ablation de la langue c­ ondamne


à l­ ’oubli les paroles séditieuses, injurieuses ou blasphématoires, q­ u’elles
possèdent une dimension politique ou ­qu’elles portent atteinte à ­l’honneur
même des personnes royales24.
­D’un autre côté toutefois, la répression ne pouvait que mener inver-
sement à la c­ onstitution d­ ’une autre mémoire si l­ ’on retient ­l’idée, géné-
ralement admise depuis les travaux de Michel Foucault, de ­l’exemplarité
de la peine : les exécutions publiques poursuivraient ainsi un but didac-
tique, celui d­ ’imprimer dans la mémoire des populations le souvenir du
châtiment de ceux qui avaient osé se rebeller à l­’encontre de l­’autorité
royale25. Certes, des études précises menées à partir d­ ’enquêtes villageoises
permettent de fortement nuancer cette impression et de montrer que les
châtiments corporels infligés par la puissance judiciaire ne c­ onstituent que
­l’un des points de repère potentiels, parmi tant ­d’autres, de la mémoire
paysanne. ­C’est ce qui ressort, par exemple, ­d’une enquête judiciaire
menée dans la ­communauté de Vendres, non loin de Béziers, à la toute
fin du xiiie siècle26 : les témoins interrogés se souviennent tout autant,
sinon plus, des saisies c­ onfiscatoires opérées par le bayle du lieu ou des
discussions préalables à des unions matrimoniales que des châtiments
corporels ­qu’ils n­ ’évoquent en outre pas spontanément, se ­contentant de
répondre sur ce point aux questions posées par le ­commissaire enquêteur.
Si tous les témoins se souviennent de la seule pendaison qui eut lieu dans
le village sur les 60 ans précédant ­l’enquête, rares sont ceux à pouvoir
relater l­ ’essorillement ­d’un voleur ou l­ ’amputation du poing d­ ’un autre
larron. En outre, il ­convient de ne pas oublier que de telles enquêtes
judiciaires se focalisent sur ces exécutions publiques parce q­ u’elles sont
un moyen de préciser à qui appartiennent les droits de haute justice :
­c’est donc l­ ’enquête qui sollicite un type particulier de mémoire. Il n­ ’en
demeure pas moins que la pendaison c­ onstitue bien un marqueur de la
mémoire paysanne, notamment en raison de son caractère éminemment

24 « Le cappitaine du Louvre et Pierre Gilles ourent les langues tranchées, pour ce q­ u’ilz
avoient dit villaines paroles de monseigneur le duc de Normandie, de madame la duchesse
aussi. » Chronique des quatre premiers Valois (1327-1380), Siméon Luce éd., Paris, 1861,
p. 85. Selon un procédé assez courant au Moyen Âge, la dimension politique des paroles
prononcées est ici occultée au profit ­d’injures à caractère sexuel.
25 Foucault, 1975. La même idée est reprise, entre autres, par Gonthier, 1998.
26 Sur cette enquête, voir Bourin et Challet, 2013. Sur l­ ’enquête en général, voir Gauvard,
2008.
222 VINCENT CHALLET

exceptionnel – une, peut-être, tous les 25 ans – et du déploiement de


­l’appareil de justice qui l­’accompagne et qui est, d­ ’ordinaire, absent du
cadre villageois27. Un tel apparat, toutefois, ­n’accompagne que très rare-
ment les pendaisons qui sanctionnent ­l’échec des rébellions paysannes
et qui ­s’avèrent, le plus souvent, bien plus expéditives. En Languedoc, la
révolte des Tuchins en offre maints exemples : le 5 mars 1382, Enguerrand
­d’Eudin, sénéchal de Beaucaire, fit ainsi pendre, sans information ni
enquête, des villageois de Poussan aux arbres les plus proches28. De même,
en juin 1383, après s­’être emparé du village de Vézénobres aux dépens
des rebelles, ­n’hésita-t-il pas à faire exécuter aussitôt les Tuchins dont
il put se saisir29. Le caractère expéditif de telles exécutions n­ ’empêche
­d’ailleurs nullement des témoins originaires de Bagnols-sur-Cèze, distant
­d’une cinquantaine de kilomètres, de ­confier à ­l’occasion ­d’un procès
que ­c’est sous les murs de Vézénobres que fut pendu ­l’ancien bayle du
château ­d’Aiguèze qui avait rallié les Tuchins30. Enfin, à ­l’occasion ­d’une
autre enquête judiciaire menée à Alès en 1416, plus de trente ans après
la rébellion, Raymond ­d’Aujac, notaire ­d’Alès, se remémore avoir assisté
à la pendaison de quatre Tuchins aux portes de la ville31. Toutefois, si
le souvenir de ces exécutions ne manqua pas de s­’ancrer au sein des
mémoires individuelles, en revanche, leur impact véritable en termes de
mémoire des rébellions demeure largement incertain. Dans l­’enquête
alésienne, Raymond de Gaujac, âgé de quatre-vingts ans au moment de
sa déposition, est certes capable de préciser ­qu’il a vu les Tuchins courir
le pays et se montrer rebelles au duc de Berry qui était alors lieutenant
du roi de France en Languedoc. Mais personne ne songe évidemment
à lui demander ce q­ u’il a bien pu retenir de la révolte, de ses modalités
et de ses objectifs politiques, ­l’objet de la procédure étant purement

27 Sur cet aspect et en particulier la présence exceptionnelle ­d’un juge, ­d’un crieur public ou
encore d­ ’un bourreau dans le cadre du village de Soumont en Lodévois, voir Challet, 2015a.
28 Petit Thalamus de Montpellier, édition en ligne, http://thalamus.huma-num.fr/annales-occi-
tanes/annee-1381.html : « Item, I dimercres a V de mars, mossen Enguerran d­ ’Eudin, senescal
de Belcayre, anan de Latas a Bezers, trobet prop Sant Vincens d­ ’Ortols XX homes de Porssan
sens armas, dels quals tantost senes enformacion et senes enquesta, de fach, el ne f­es pendre en los
albres XIX e ­l’autre fo aussit a glazi. »
29 Ibid., http://thalamus.huma-num.fr/annales-occitanes/annee-1383.html : « Et entretant
los Tochis sauteron detras per los murs, et per so foron ne prezes XVI de que los XV foron tantost
pendutz, et ­l’autre fo mes en prezon. »
30 Challet, 2002, vol. 2, p. 481-483.
31 Challet, 2010a.
Entre oubli et résurgence 223

financier. En d­ ’autres termes, ce n­ ’est pas parce q­ u’un témoin se souvient


de la pendaison d­ ’un révolté q­ u’il se souvient de ce que fut la rébellion.
Le pouvoir royal ­n’hésita pas non plus à recourir à ­l’arme sémantique
afin ­d’imposer ­l’oubli des rébellions en imposant une désignation péjora-
tive déniant aux révoltés toute ­conscience politique et assimilant tout acte
de révolte à des actions criminelles. Le nom de « Jacques Bonhomme »
était à ­l’origine un surnom donné, en Île-de-France, par les nobles à
­l’ensemble des paysans et ne devint le nom collectif des rebelles que
par dérision et parce ­qu’un Jacques désignait aussi un idiot, une déno-
mination qui reflète in fine le mépris des nobles pour leurs tenanciers.
De même, le fait que les rebelles languedociens aient été désignés par
le pouvoir royal sous le terme de Tuchins est le résultat ­d’un processus
­complexe de disqualification politique : ce vocable apparaît dans les
sources pour la première fois en Normandie en 1356 pour désigner des
paysans réfugiés dans les bois pour échapper aux routiers anglais et qui,
dans un second temps, prirent les armes pour se défendre c­ ontre leurs
agresseurs. Vingt ans plus tard, pourtant, le terme finit par ­s’appliquer à
de simples pillards et ­c’est avec ce glissement de sens ­qu’il fut utilisé par
les autorités royales afin de disqualifier politiquement les Tuchins et de
réduire leurs actions à de simples entreprises criminelles32. De manière
générale, les groupes dominants rejetèrent les procédés d­ ’auto-désignation
des paysans rebelles parce ­qu’ils possédaient une signification politique :
les Jacques se qualifiaient de « ­commun » ou « des c­ ommunes du pays »,
les Tuchins se ­considéraient c­ omme des « ­companhos » et les paysans
anglais qui prirent les armes en 1381 se désignèrent sous l­’expression
de « the true c­ommons of England », qui apparaît dans leur mot de passe
« With whom haldes you ? » auquel il c­ onvenait de répondre « With kynge
Richarde and wythe the trew ­communes33 ». En appliquant un surnom péjoratif
aux rebelles, le pouvoir royal leur déniait toute légitimité politique : les
paysans en armes ne faisaient plus partie des « ­communes », ils ­n’étaient
plus des membres à part entière de la c­ ommunauté du royaume, mais
des meurtriers, des larrons et des traîtres.
La délivrance de lettres de rémission faisait également partie de ce
processus ­d’oubli dans la mesure où de tels documents ne se c­ ontentaient
pas de remettre le crime, par le biais de la grâce royale, mais imposaient

32 Challet, 2006b.
33 Watts, 2007.
224 VINCENT CHALLET

silence sur les actes c­ ommis et rétablissaient la fama publica des béné-
ficiaires. De manière significative, la chancellerie royale usait, en guise
de ­conclusion, de la formule super predictis silencium imponendo, signifiant
par là que nul ne pourrait à ­l’avenir parler du crime et le plongeant dans
les limbes de ­l’oubli34. Or, de nombreux individus impliqués dans les
révoltes paysannes, soit au titre de la rébellion elle-même, soit au titre
de sa répression, bénéficièrent de telles lettres35 si bien que rémission
rima bien souvent avec omission. Dans certains cas, le pouvoir royal
put même aller ­jusqu’à ­l’interdiction pure et simple de toute évocation
­d’une révolte : à Nîmes, ville qui ­s’était longtemps montrée favorable
aux Tuchins, il fut crié publiquement « à voix de trompette, que nul ne
feust si hardi ­d’appeler aucune personne touchin36 ». Une telle décision
justifiée par la volonté de faciliter le retour à la paix civile et d­ ’éviter
le déclenchement de vengeances privées ­n’en assimilait pas moins le
terme de Tuchins à une insulte et procurait au pouvoir royal un outil
remarquablement efficace pour effacer toute mémoire de la révolte.
Ainsi privées de tout support écrit c­ omme de toute c­ ommunication
orale, les rébellions paysannes semblaient être c­ ondamnées à tomber
dans ­l’oubli. A ­contrario, ­l’efficacité du processus de damnatio memoriæ
ne se mesure jamais autant que dans le cas de révoltes dont le succès
parvint à mettre un terme à la domination seigneuriale. Là, la mémoire
de la rébellion est capable de survivre et de se transmettre de généra-
tion en génération j­usqu’à devenir l­’un des fondements mythiques de
­l’action politique des c­ ommunautés. C ­ ’est ce qui se produisit en Suisse
où ­l’histoire de Guillaume Tell et le serment originel ­d’assistance réci-
proque prêté entre trois paysans de Swyz, Uri et Unterwalden fonction-
nèrent c­ omme un mythe c­ onstamment réactualisé, moteur de l­’action
politique. Il est vrai cependant que cette mémoire put s­’appuyer sur
une large production écrite, à l­ ’instar du poème c­ omposé pour célébrer
la victoire des Suisses sur le duc Léopold de Habsbourg à Sempach en
1386, des chansons ­composées pour célébrer le triomphe de Murten
en 1476 ou de ces nombreux Kampflieder dont la survie ­s’explique par
­l’absence ­d’une autorité impériale ou ducale capable ­d’en interdire la

34 Sur ce processus, voir Gauvard, 1991.


35 À titre d­ ’exemple, voir les lettres de rémission publiées en pièces justificatives dans Luce,
1894.
36 Arch. Nat. de France, JJ 137, no 107 ; publié par Thomas, 1914.
Entre oubli et résurgence 225

diffusion. Pour être le plus ­connu, le cas suisse ne ­constitue pourtant


pas une exception : dans les Dithmarschen, les paysans formèrent une
­confédération de ­communautés libres suffisamment forte pour ­s’opposer
militairement aux ­comtes de Schleswig-Holstein et s­ ’emparer du château
de Marienburg en 1404, le jour de cette victoire devenant par la suite
un jour férié et célébré chaque année37.
De toute manière, ce processus de damnatio memoriæ ne pouvait être que
long à se mettre en place, ne ­s’achevant q­ u’à la mort des derniers rebelles,
des décennies plus tard, voire au moment de l­ ’interruption de la chaîne de
transmission des témoignages. Dans les années qui suivirent les rébellions,
la mémoire de la sédition demeure vivace au sein des c­ ommunautés rurales
et tant seigneurs que tenanciers en ­conservent soigneusement le souve-
nir. En Angleterre, tous les paysans impliqués dans la rébellion de 1381
ne furent ni pendus, ni décapités mais parfois ­condamnés à une simple
amende et s­’en retournèrent vivre dans leur ­communauté et on peut en
dire autant des paysans flamands vaincus à la bataille de Cassel en 1328,
des Tuchins de Languedoc après 1384 ou des Jacques d ­ ’Île-de-France
après 1358 c­ omme le montre l­’exemple de Guillaume l­’Aloue. Bien des
années après les révoltes et en dépit des grâces royales, certains seigneurs
­n’hésitèrent pas à se livrer au meurtre d­ ’anciens rebelles, c­ omme en écho
aux luttes antérieures : en août 1360, deux ans après la Jacquerie, le che-
valier Rasse de Ligne tua deux paysans qui avaient participé à ­l’incendie
de ses manoirs de Beaufort et de Beauvoir38 ; en mars 1397, Jean, fils de
Bertrand de Sauve, tua un certain Jean Picart, qui « avoit esté touchin
et rebelle » et avait été impliqué, quinze ans auparavant, dans ­l’incendie
du château ­d’Arpaillargues qui appartenait à Bertrand de Sauve39. De
tels exemples que l­’on pourrait multiplier à l­’infini invitent à rester pru-
dent quant à la victoire définitive ­d’une damnatio memoriæ imposée par
les autorités et qui pourrait bien ne relever que d­ ’un effet de sources, la
documentation ­conservée ne permettant guère de sonder en profondeur la
mémoire politique des ­communautés paysannes. Toutefois, cette mémoire,
­lorsqu’elle est sollicitée sur des sujets aussi c­ omplexes que la délimitation
des finages villageois se révèle ­d’une étonnante précision, apte à reconsti-
tuer des chaînes de transmission du savoir et à remonter le temps au-delà
37 Freedman, 1999, p. 185-203.
38 Dommanget, 1971, p. 89.
39 Thomas, 1914.
226 VINCENT CHALLET

de ­l’existence propre des individus appelés à témoigner. Si bien ­qu’il y a


peu de raisons de supposer que les souvenirs paysans en matière politique
soient beaucoup plus vagues ­qu’en matière territoriale. Le problème réside
plutôt dans le biais introduit par les enquêtes judiciaires tant il est difficile
­d’imaginer un paysan raconter à un c­ ommissaire royal ou seigneurial ses
souvenirs ­d’ancien rebelle !
En dépit des difficultés à la retracer, il est indéniable ­qu’une mémoire
paysanne, autonome et indépendante de celle élaborée et imposée par
les autorités, était capable de survivre au sein des ­communautés rurales
en ­s’appuyant sur des gestes, des symboles, des lieux spécifiques et une
transmission orale qui s­ ’effectuait par le biais de chansons qui ne nous
ont été c­ onservées q­ u’en fonction de circonstances très particulières. Ce
fut notamment le cas du mouvement ­d’auto-défense mené par les vil-
lageois normands ­contre les pillages des garnisons anglaises à partir de
1415, lequel ­s’apparentait par bien des aspects à une rébellion paysanne
mais qui, parce ­qu’il était tourné ­contre les Anglais, possédait aux yeux
du pouvoir royal français une c­ onnotation patriotique40. ­L’ambiguïté
­d’un tel ­combat, entre auto-défense paysanne et lutte c­ ontre l­ ’occupant
anglais, explique que certaines chansons appelant les villageois à prendre
les armes furent copiées après 1480 dans un manuscrit réalisé pour le
­connétable Charles de Bourbon et sont ainsi parvenues ­jusqu’à nous41.
De manière plus générale, toute prise ­d’armes paysanne est aussi une
prise de son c­ omme ­l’atteste la véritable entrée en fanfare des Tuchins
languedociens dans la petite ville de Bagnols-sur-Cèze, au son des trom-
pettes et des cornemuses42. De nombreux chants de rébellion circulèrent
sans doute mais le médiéviste, bien moins heureux en la matière que
le moderniste43, doit souvent se ­contenter de bribes, parfois ­consignées
au sein de procédures judiciaires visant à les interdire à l­’instar de la
chanson des partisans du Yorkshire de 1392, ou ultérieurement recueillies
dans des chansonniers c­ omme le chant des rebelles du Kent de 145044.

40 Challet, 2010b.
41 Ainsi, la chanson no 35 intitulée « A la ­compagnie ­d’ung bauchier » qui proclame : « Se
les Englois viennent piller / Nous les mectrons à tel martire / Que nous les garderons de
rire / Et d­ ’aller à notre poullier », cité par Billiet, 2007.
42 Challet, 2006a.
43 Voir la c­ ontribution ­d’Éva Guillorel dans ce même volume.
44 Ces chants sont publiés par Dobson, 1970, p. 383-385. Sur la rébellion de Jack Cade,
voir Harvey, 1991.
Entre oubli et résurgence 227

Certes, il demeure difficile ­d’évaluer leur impact en tant que support


de mémoire mais leur survie, en dépit des interdictions qui les visaient,
témoigne que de telles chansons entretenaient et réactivaient le souvenir
des révoltes antérieures et que leur simple reprise résonnait ­comme rien
moins ­qu’un appel aux armes.
La principale difficulté à appréhender la mémoire des rébellions pay-
sannes médiévales réside précisément dans cette occultation officielle qui
oblige à travailler sur une mémoire clandestine, une mémoire souterraine
dont nous ne voyons que, de loin en loin, resurgir des fragments, des
éclats qui attestent ­d’une transmission de mots, de gestes, de signes
liés à des situations de révoltes et qui se font écho de loin en loin. Et
­c’est ce phénomène d ­ ’écho, parfois distancié dans le temps c­ omme
dans ­l’espace, qui atteste le mieux du souvenir des rébellions passées.
En Angleterre, ­l’un des capitaines de la rébellion de Jack Cade en 1450
prit ­comme pseudonyme celui de Jack Straw, déjà adopté par l­’un des
capitaines et ­compagnons de Wat Tyler en 1381. Et il est même pos-
sible que la mémoire insurgée se révèle capable de traverser la Manche :
Steven Justice a ainsi émis ­l’hypothèse que le fait ­qu’autant de rebelles
anglais aient choisi en 1381 un nom d­ ’emprunt c­ omposé à partir du
prénom Jack – Jack Straw, Jack Trewman, Jack Milner, Jack Carter –
alors ­qu’il était loin ­d’être le plus usité dans la société anglaise de la fin
du xive siècle pourrait être une réminiscence volontaire de la Jacquerie
­d’Île-de-France et un défi sémantique lancé aux nobles d­ ’Angleterre45.
Loin de se résumer à une simple réutilisation de noms d­ ’emprunt ou
de sobriquets détournés, ce phénomène ­d’écho se signale parfois aussi
par le réemploi des mêmes mots ­d’ordre à plus ­d’un siècle de distance :
en 1549, les rebelles du Norfolk demandèrent « that all bonde men may
be ffre for god made all ffre with his precious blode shedding », reprenant très
exactement les mots prononcés en 1381 par John Ball à ­l’adresse des
troupes de Wat Tyler sur le champ de Blackheath, où devaient égale-
ment se réunir les hommes de Jack Cade en 145046. Le thème, voire les
45 Justice, 1994, p. 222.
46 Ces phénomènes ­d’écho ont été étudiés en détail, pour ­l’Angleterre par Wood, 2007.
­L’auteur discerne une réelle ­continuité dans les rébellions paysannes de 1381 à 1549 et
argumente, de manière ­convaincante, que les réminiscences ­d’une révolte à l­’autre ne
peuvent être le fruit du hasard mais résultent bien d­ ’une démarche volontaire : « there is
the possibility that rebels were c­ onscious of these c­ ontinuities : that is, that a red threat bound one
rebellion to another, producing an ideology of popular protest. » (p. 1 pour la citation).
228 VINCENT CHALLET

paroles mêmes du sermon de John Ball, se retrouvent également sur le


­continent : dans un procès mal daté – mais de peu postérieur à 1381 et
sans doute c­ ontemporain de la révolte des Tuchins – les syndics de la ville
de Lunel, afin de c­ ontraindre les nobles à c­ ontribuer aux tailles levées
pour la défense du pays, ­n’hésitent pas à poser la question suivante : si
Adam est notre père et Ève notre mère, pourquoi ne sommes-nous pas
tous égaux en noblesse47 ? Un argument que n­ ’aurait certes pas renié
John Ball et qui fait sans doute écho à ses propres paroles.
Il existe donc dans l­ ’Europe médiévale, y c­ ompris en milieu rural, une
mémoire de la rébellion qui, en temps ordinaire, demeure souterraine
– et donc inaccessible à ­l’historien – parce ­qu’interdite et soumise à une
forme de damnatio memoriæ et qui ne se révèle au grand jour que ­lorsqu’elle
est réactivée et réinvestie par un nouvel épisode de ­contestation. Mais
la fréquence de telles séditions, parfois très localisées, suffit largement à
expliquer le maintien d­ ’une mémoire alternative : la petite c­ ommunauté
de Villeveyrac c­ onnut ainsi entre 1355 et 1388 trois émeutes d­ ’une impor-
tance certes minime mais qui ­n’en firent pas moins ­l’objet ­d’une enquête
royale pour crime de lèse-majesté48. Or, de tels épisodes ­n’entretiennent
pas seulement le souvenir de la rébellion, ils la mettent en pratique et
permettent de ­comprendre ­comment se réactive une gamme de gestes,
de mots et ­d’attitudes qui ­construisent ensemble une mémoire sans cesse
augmentée des faits précédents, ce qui explique aussi la facilité et la rapidité
avec laquelle les ­communautés villageoises se révèlent aptes à prendre
les armes. Si ­l’on c­ onsidère donc que chaque habitant a pu ­connaître, sa
vie durant, quatre ou cinq de ces émeutes très localisées, il y a tout lieu
de se demander si, en ­complément des traces et résurgences des grandes
révoltes paysannes, il ne faut pas également envisager une tradition de
rébellion à ­l’échelle plus restreinte du village – ou du quartier en milieu
urbain. Les ­communautés villageoises fonctionnent ­comme autant de
microsociétés mémorielles qui entrecroisent dans leurs souvenirs le rappel
de vastes rébellions et celui de séditions plus localisées dans un entrelacs
de fragments mémoriels et de ­conduites pragmatiques.
Cette mémoire souterraine explique un certain nombre de caractéris-
tiques des révoltes paysannes. En dépit ­d’une apparente damnatio memoriæ,
47 Arch. Mun. de Lunel, II 5/2 : Si pater est Adam et cunctis sit mater Eva, cur non sumus nobi-
litate pares ?
48 Challet, 2014.
Entre oubli et résurgence 229

les c­ ommunautés rurales c­ onservaient le souvenir non seulement des


rébellions mais aussi de chaque procès, de chaque ­contestation ­d’une
décision royale ou seigneuriale, de chaque émeute ou prise d­ ’armes et se
forgeaient progressivement une « mémoire insurgée » faite de jugements,
de résistance passive et, éventuellement, ­d’appel aux armes49, laquelle
­constituait un élément fondamental de l­ ’identité paysanne dans l­ ’Europe
occidentale50. Certes, on pourra toujours faire remarquer q­ u’un tel raison-
nement est en partie tautologique : s­ ’il ­n’y a que peu de traces de cette
mémoire de la rébellion, cette rareté ne fait, en somme, que c­ onforter
la thèse ­qu’il ­s’agit ­d’une mémoire souterraine. ­N’empêche ­qu’il faut
sans doute admettre, sans toujours pouvoir ­l’expliquer, la survivance
mémorielle des séditions paysannes. Comment expliquer sinon que les
Provençaux, selon Michel de Nostredame, appelaient encore au xvie siècle
les valets de leurs jeux de cartes des Tuchins, ou que, selon Frédéric
Mistral, à la fin du xixe siècle, les habitants du village de Vézénobres
étaient encore c­ onnus sous le surnom de Touchis de Bénobré51 ? Comment
expliquer que la toponymie ait c­ onservé le souvenir de l­’endroit où les
Jacques furent défaits sous le c­ ommandement de Guillaume Cale52
ou q­ u’une croix de pierre marquait le champ de bataille où les insur-
gés anglais furent écrasés en 138153 ? Ce que l­’on sait, dans d ­ ’autres
domaines, des mémoires paysannes médiévales, oblige donc ­l’historien
à se ­comporter à la manière ­d’un inquisiteur, un peu à la façon dont
Étienne de Bourbon partait à la recherche des racines ­d’un étrange – et
très peu orthodoxe – c­ ulte rendu à un lévrier guérisseur sanctifié par les
populations des Dombes, saint Guinefort, ­culte qui ­s’appuyait – faut-il
le rappeler ? – sur une mémoire nettement antiseigneuriale54.

Vincent Challet
Université Paul-Valéry-Montpellier 3
ANR CURR
49 Neveux, 1997.
50 Blickle, 1998.
51 Mistral, 1968.
52 Dommanget, 1971, p. 17.
53 Dobson, 1970, p. 31.
54 Schmitt, 1979.
“WE WILL ASK FOR A NEW ARTEVELDE”
Names, Sites, and the Memory of Revolt
in the Late Medieval Low Countries1

In recent years there has been a lot of scholarly interest in the political
­culture of remembrance in the early modern Low Countries, particularly
within the ­context of the Dutch Revolt. For the period starting from the
Sixteenth century onwards, such a memorial ­culture, often specifically
of traumatic events like wars and revolts experienced by c­ ommunities,
has been well documented in chronicles, pamphlets, ego-documents and
literary works2. But while the source situation is greatly improved for
the early modern period, collectively c­ ommemorating political events
was already a well-established practice. The reconstructed genealogies
and heroic ancestors of medieval elite families often appear in chronicles
they c­ ommissioned and religious c­ ommunities manipulated the memories
of their founders and establishment in hagiographies, chronicles and
charters. Yet prior to 1300, “non-elite” sources are lacking and other
texts offer only occasional glimpses of popular speech and ­culture, thus
making the reconstruction of social memories of European peasant or
urban populations a difficult task3. It is only from the later medieval
period onwards that we have substantial evidence at our disposal for
wider societal groups collectively remembering major events, such as
popular insurgencies and wars.
By means of these ­constructed and reconstructed “collective” or “social”
memories dealing with past social and political c­ onflicts or disasters,
­communities created a specific sense of history. As with ­conflicts in
preindustrial Europe in general, the medieval Low Countries, a region
characterized by waves of popular rebellion, “counter-memories” of
1 We thank Godfried Croenen, Lisa Demets and Dirk Schoenaers for their help with
specific chronicle fragments.
2 Kuijpers, 2013; Arnade, 2008; Duke, 2009.
3 Geary, 1994; Fentress, Wickham, 1992, p. 144-172; Marchal, 2001.
232 JAN DUMOLYN ET JELLE HAEMERS

political subversion were also produced and reproduced to legitimize


popular resistance and define group solidarities4. In England, for example,
Andy Wood has shown that memories of earlier revolts were used to
justify ­people’s assertiveness in the present5. The ­common people
often identified with subversive heroes of past political struggles, but
narratives of the same events were also maintained and reconstructed
in a historiography closer to the ruling elites. Indeed, for various social
groups and ­communities the past served as a political resource: one to
be manipulated, suppressed, or highlighted as the occasion demanded.
Many of the other c­ ontributions in this book demonstrate that his-
torical narratives about ­conflicts are essential to the ­commemoration
of tumultuous times, but in this essay, we try to demonstrate that
names given to events, the perception of physical space, and the use of
religious ceremonies were also important in the creation and transmis-
sion of such shared and manipulated memories. In the later medieval
southern Low Countries – in which we mainly focus on the county of
Flanders, the duchy of Brabant and the prince-bishopric of Liège – the
specific signifiers used to denote collective actions, in other words the
proper names given to these revolts, c­ onstitute a central element in
this process of remembering and reconstructing shared experiences and
social memories. That they appear throughout scattered and fragmented
sources shows that they were an essential feature of a historical tradition
transmitted both written and orally by city-dwellers of both elite and
artisanal origins. They also circulated within a literary tradition of “public
poetry” – songs, tales and sayings that kept alive and reconstructed the
memories of popular politics and civic strife6. In the words of Lauro
Martines, these popular texts in various forms functioned as “memory
capsules”, in which a historical episode, however selectively, was made
more memorable, and given a voice and an edge7. Apart from these
linguistic expressions, specific sites and monuments that could be linked
to battles and fights were also crucial to the practices of remembrance
of popular collective action and functioned as “lieux de mémoire”8.
4 Compare with Burke, 1989, p. 98. See also Hugon, 2011, and Joutard, 2013.
5 Wood, 2013, p. 335; Wood, 2014.
6 Haemers, 2011; Dumolyn, Haemers, 2014.
7 Martines, 2001, p. 233-234.
8 For France: Nora, 1984-1992; in Germany: François, Schulze, 2003; in Belgium: Tollebeek,
2008.
“We Will Ask for a New Artevelde” 233

Spatially situated carriers of collective memories, whether deliberately


reconstructed or not, notably included churches and chapels, city gates
and walls, and other buildings and monuments with a specific symbolic
value attached to them. In various cases they were also associated with
sets of ritual practices, from the masses held in memory of deceased
heroes to ceremonies of triumph or reconciliation. Such practices, often
religiously inspired, were used both by repressive authorities as well
as by popular groups and were a c­ ommon strategy for generating or
distorting memories of ­conflicts.

THE MEMORIES OF POPULAR LEADERS


AND HEROES

In England and France, insurgencies were sometimes remembered


through its leaders, as is the case for two famous revolts: the English Revolt
of 1381 and the French Jacquerie of 1358. During the fifteenth century, the
name of Jack Straw, one of the leaders of the 1381 revolt, was a metonym
for the uprising – and not that of the now more famous Watt Tyler9. In
the case of the Jacquerie, it is unlikely that any such “Jacques Bonhomme”
ever existed. He was clearly a fictional archetype whose generic name was
lent to the widespread peasant uprising. The Parisian butcher and rebel
leader Simon Caboche, on the other hand, was an actual person, and his
followers in the Paris revolt of 1413 were called “Cabochiens”10. In the medie-
val Low Countries, however, c­ onflicts that were remembered by the name
of a particular protagonist are rather rare; instead, they are usually referred
to by the time and place11. Yet there are some examples. Chronicles and
poems sometimes highlighted the leadership of an individual although
in reality the c­ onflict was often a collective action in which these leaders
only played minor roles. Revolts in the medieval Southern Netherlands
were in many cases craft guild revolts12. The guilds were well-established

9 Harvey, 1997, p. 168. See also Wood, 2013, p. 62.


10 Bulst, 1987; Ross, 2009.
11 Dumolyn, Haemers, 2016.
12 Prak, 2006; Haemers, 2016.
234 JAN DUMOLYN ET JELLE HAEMERS

institutions that provided the means, people and ideology for collective
actions, sometimes in coalitions with segments of the elites. Leaders usually
functioned as mere spokesmen or sometimes as charismatic figures tem-
porarily needed to transcend discord among the different groups taking
part in the rebellion.
Pieter Coutereel lent his name to such a guild revolt in 1360. A chro-
nicle account suggests that Coutereel challenged the Duke of ­Brabant’s
authority by supporting ­Leuven’s craftsmen in their ultimately successful
demand for the right to elect aldermen. He was the city sheriff – the
­Duke’s c­ hief local judicial officer, in other words, as well as a former
advisor. His presence at the side of the rebels played an important
part in legitimizing their demands. Coutereel also repeatedly acted
as their spokesman during negotiations, but he later remained in the
background. Despite this, one chapter of a Brabant chronicle is titled
“How Pieter Coutereel organised his riot with the ­commoners against
the good men”, thus portraying one individual as the primary cause of
events13. Even if the revolt was not in fact instigated by Coutereel, but
rather by the ­guilds’ leaders, ­Coutereel’s participation remained central
to later reconstructions of what happened. The same can be said of
Pierre Andricas, a Liège fur merchant, who in the first quarter of the
fourteenth century led a craft revolt against the urban elite. The main
chronicler of the insurgency, Jean ­d’Outremeuse, reported that Andricas
“inflamed the people to wage war against the bishop”. However, this
revolt was also not a one-man show, as it was fueled by the craft ­guilds’
­common cause in overthrowing the oligarchical city government. In
the end, they were successful; the 1313 “peace of Angleur” gave them
the right to participate in city council meetings. Afterwards, Andricas
became a symbol of the rebellion, even though he had clearly not been
its c­ hief instigator14.
When a revolt failed, popular leaders usually received an exem-
plary punishment, serving as scapegoats for everything that had gone
wrong in the eyes of the authorities. The most remarkable case is that
of Jacob Peyt, a charismatic leader of the 1323-1328 peasant rebellion
in coastal Flanders, who was persecuted even after his death in 1327.
13 “Hoe Peter Coutereel sijn opset maecte metter ghemeinten jeghen die goede manne” (De Brabantsche
Yeesten, vol. 2, p. 160). See Haemers, 2014.
14 Xhayet, 1997, p. 164-166.
“We Will Ask for a New Artevelde” 235

A posthumous trial determined that this former military captain of


Bergues-Saint-Winnoc was a heretic, and one year after he died, his body
was exhumed by the bishop of Thérouanne and publicly burnt. Peyt
had become a symbol for the violent actions c­ ommitted by the peasants
against the clergy in protest of their wealth and their role as oppressive
landlords. They had not attacked the Church or its doctrines, and so the
accusation of heresy was in all likelihood exaggerated. Presumably, one
of the main intentions of this posthumous trial and corpse desecration
was to diabolise the rebel leader in order to prevent Jacob Peyt from
being remembered as a popular hero. Indeed, such remembrances were
utterances of insurgent social memories of unjust court proceedings,
passive resistance and calls to arms – memories that made up funda-
mental elements of ­peasants’ identities. The authorities, in turn, tried
to impose a damnatio memoriæ upon them15.
In a few cases, however, the political significance of rebel leaders
could become quite crucial. A classic example of such a medieval rebel
leader is Jacob van Artevelde16, the popular captain of Ghent during
the revolutionary period of 1338-1345. These were the early days of
the Hundred Years War, and Artevelde and his followers decided to
recognize the King of England as heir to the French throne. Artevelde
not only personally negotiated with the King, he also dominated both
Ghent and the rest of Flanders. One generation later, during the so-called
“Ghent War” of 1379-1385, his son Philip became a military leader in
a new rebellion against the Count and the French King. This family
tradition of revolutionary leadership explains why in many sources the
narratives of these events centred on the deeds and personalities of the
Arteveldes. Various “memory books” from Ghent, a genre typical of
Flemish urban historiography primarily c­ onsisting of brief annalistic
annotations organised around ­magistrates’ lists, mention that Jacob van
Artevelde ruled Flanders for a mythical period of seven years, seven
months, and seven days. In reality, the revolt was about two weeks
shorter, but the stories clearly tried to sanctify ­Jacob’s leadership17. His
name also became central to the social memory of popular collective

15 Challet, 2010a, p. 409; Oliva Herrer, 2007, p. 188-192. About Jacob Peyt: te Brake,
1993, p. 117-118.
16 He is usually referred to in English as James of Artevelde.
17 Van Bruaene, 1998, p. 133.
236 JAN DUMOLYN ET JELLE HAEMERS

actions in late medieval Flanders in general, as Artevelde later became


the subject of various popular pamphlets, songs and tales. For instance,
in 1451, more than a century after A ­ rtevelde’s death, as the people of
Ghent were on the verge of open rebellion against Burgundian Duke
Philip the Good, an anonymous leaflet was nailed to the door of the
city hall. It symbolically called for the return of the historical popular
leader if the ­city’s aldermen failed to oppose the ­Duke’s violations of
­Ghent’s privileges. “We will ask for a new Artevelde”, it said, trying to
force the urban government to appoint firm leaders in preparation for
the impending revolt18.
During the turbulent events that followed, the guildsmen chose
new leaders – some of whom had names that resonated strongly wit-
hin ­Ghent’s tradition of rebellion. On April 25, 1452, Pieter van den
Bossche and Willem van Vaernewijck were elected military captains
of two Ghent parishes19. Given that neither had any military expe-
rience, it seems that their famous names, the same as rebel heroes from
a century before, accounted for their new public office. In 1338-1342,
a certain Willem Van Vaernewijck had been a key supporter of Jacob
van Artevelde in the ­city’s administration, while another Pieter van
den Bossche had taken up arms with ­Jacob’s son, Philip. Indeed, even
the name Artevelde seems to have become synonymous with rebellious
behaviour and defence of the ­city’s privileges. In 1423, one of the D
­ uke’s
councillors insulted the burgomaster of Ghent because of his political
opposition, calling him an “Artevelde”20. It is even plausible that the
given name Jacob was exceptionally frequent in later medieval Ghent
because of the popular ­leader’s social memory21.
In Jehan F­ roissart’s famous chronicle as well, both Arteveldes play
a central role in the narrative, almost ­comparable to the importance
attributed by the ­chivalric historian to the great princes of his age22.
For his account on the older rebel leader, the Hainault chronicler was
mostly dependent on his model, the chronicle of Jehan le Bel, but
18 “Ghy slapscheten van Ghendt, die nu hebt ‘t regiment, wy en zullen ’t hu nyet meer ghewaghen,
maer zullen ‘t eenen nyeuwen Artevelt claghen” (Dagboek van Gent, 1901, vol. 1, p. 129);
Haemers, 2011, p. 453-454.
19 Haemers, 2004, p. 291-292.
20 Prevenier, 1985, p. 298.
21 Boone, Schoups, 1996.
22 Contamine, 2006, p. 46, and the ­comment on this paper by Peter Ainsworth on p. 48.
“We Will Ask for a New Artevelde” 237

Philip van Artevelde was a ­contemporary of his and as he recounted


the 1379-1385 revolt, Froissart showed a keen interest in how the son
came to power – including how twelve former ­conspirators against
the elder Artevelde were executed, more than forty years after the first
uprising. Later copyists of Froissart clearly retained interest in Jacob
van Artevelde, and successive versions of Book I of the Chronicles show
an increasing appreciation of his importance within their narratives23.
The mid-fifteenth-century Middle Dutch Froissart translation by Gerrit
Potter van der Loo, a member of the Council of Holland under Philip
the Good, again demonstrates the extent to which stories about Jacob
van Artevelde circulated in the Low Countries. For instance, the frag-
ment regarding the appointment of Philip van Artevelde as a military
captain of Ghent in 1382, also present in the French original, reports
that his fellow citizen and rebel leader Pieter van den Bossche ­convinced
him to take up military leadership because his name obliged him to.
Pieter had said to Philip that « his master John Lion [i.e. Jan Yoens, yet
another Ghent rebel leader] and other old and wise men in Ghent » had
reminded him that P ­ hilip’s father had done great honour to the city.
Moreover, Pieter daily heard people in Ghent saying that “our affairs
would be better today if Jacob van Artevelde were still alive”24.
Other types of accounts of ­Jacob’s deeds circulated in the Low
Countries, including a number of so-called “pseudo-prophecies”, which
often announced the incipient arrival of a heroic ruler. For instance, some
Flemish pseudo-prophetic texts predicted that Jacob van Artevelde would
­come to save the “small people” from oppression – thereby serving as a
medium for the preservation of collective memories of political events,
and sanctifying his efforts25. Indeed, in another fragment of P ­ otter’s
elaboration on Froissart, Pieter van den Bossche presented Jacob as a
prophet who had brought Flanders into “good order” by his “zeal and
wisdom”; he had heard old wise men saying that the county was never
23 Van Herwaarden, 1981, p. 102, 107-108.
24 “Dese Pieter van Bosch hadde Jan Lyon, sijn meyster, ende oic andere ouden, wijsen mannen binnen
Gendt menichwerven horen seggen van der groter eerbairhede des voirseits Jacobs van Airtevelde,
ende dat dat lant van Vlaenderen nye so zeer ontsien noch oic geëert geweest en hadde, alst geweest
hadde in den tijden dat dat Jacob van Airtevelde in sinen regimente hadde. Oic en wast also
niet van binnen Gent, en plagen doe ten tijden noch dagelix wael te seggen: Wairt sake dat Jacob
van Airtevelde leefde, onse saken souden wael ende bet staen dan sij nu doen” ( Jehan Froissarts
Cronyke van Vlaenderen, 1898, vol. 1, p. 125). About the chronicle see Schoenaers, 2012.
25 We elaborate on this in Dumolyn, Haemers, 2015, p. 288.
238 JAN DUMOLYN ET JELLE HAEMERS

again “so well held in justice” as during J­ acob’s reign26. In short, the
name Artevelde had become a synonym for good times in general and
rightful rebellion in particular, and a central topic of popular stories
transmitted both orally and in writing.

FACTIONS, MEMORY, AND RELIGION

Alongside guild struggles, factional c­ onflicts were also a regular feature


of political strife in the principalities of the Low Countries27, and various
instances were later remembered either through the names of the fami-
lies involved or those used to indicate clusters of elite families and their
wider circle of sympathizers among the popular classes. For instance, in
the 1480s two factions struggled over the regency of the minor count of
Flanders, Philip the Fair. One version of a major chronicle tradition, the
Excellente Cronicke van Vlaanderen, ­composed somewhat after the events and
printed in 1531, referred to them as the “Philippins” and the “Monetans”
– names that do not appear in any ­contemporary source. The first group
­consisted mostly of elements from the urban elite and artisans of Bruges
and Ghent, as well as a number of important nobles, and were apparently
named after Count Philip because they supported a regency council rather
than his father, the unpopular Maximilian of Habsburg. The latter party,
­consisting of a rival faction of the urban elite of Ghent and Bruges and
its noble supporters, ­considered P
­ hilip’s father rightful regent. “Moneta”
referred to the coins Maximilian had minted in ­Philip’s name, the so-
called “Moneta Archiducum”28. In this case, it seems that one or more
early sixteenth-century copyists or c­ ontinuators of this chronicle actually
invented these rather “literary” names29. Contemporary sources used “le
parti du roy des Romains” and “le parti de monseigneur Phelippe”, respectively
26 Jehan Froissarts Cronyke van Vlaenderen, 1898, p. 128.
27 Braekevelt, Buylaert, Dumolyn, Haemers, 2012.
28 Haemers, 2009. The names can be found in Dits die Excellente Cronike, 1531, fo 261vo, and
also in a chronicle inspired by the latter: Despars, 1840, vol. 4, p. 435.
29 The name Monetanen appears in the ­continuation of an earlier manuscript of the Excellent
Cronike van Vlaenderen probably c­ omposed by the Bruges notary Rombout de Doppere
(Bibliothèque Municipale de Douai, ms. 1110, fo 448vo-440vo and 479ro-491vo), after 1506,
“We Will Ask for a New Artevelde” 239

referring to the king of the Romans, as Maximilian was then called, and
Philip of Cleves, the nobleman who led the rebellion against Maximilian30.
However, even these names were only occasionally applied to the fac-
tions because their divisions were not always clear-cut. The later terms
“Philippins” and “Monetans” used in the Excellent Chronicle of Flanders,
one or two generations after the civil war, reshaped the memory of the
­conflict into a clear dichotomy: two opposing parties, two specific names.
The reality, however, had been more ­complex and nuanced, involving
different social groups and political ideologies.
The very use of such names could evoke “bad” memories of unruli-
ness and discord, as has been shown with regard to factional struggles
in Italian cities31. In the Northern Low Countries, only the long-term,
structural c­ onflict between the so-called “Hooks” and “Cods” in four-
teenth and fifteenth century Holland is ­comparable in the sense that
even if the political realities and group ­compositions changed, their
party names remained the same. The Hooks (Hoeken) and the Cods
(Kabeljauwen) were used to designate the citizens and nobles allied with
different candidates claiming to be the rightful Count of Holland.
Neither Hooks nor Cods gained the upper hand, and civic strife remained
endemic, flaring up during periods of economic and political crisis32.
Memories and stories, as well as insults and reproaches towards former
enemies, could stir up emotions in such a volatile climate, and so rulers
actively tried to erase them. For example, in July of 1428, Philip the
Good stipulated that “nobody of whichever estate or ­condition he may
be”, should reproach another person for what had happened in one of
the violent fights that took place when he had become the governor of
the Countess of Hainaut (Jacqueline of Bavaria) after her imprisonment
by Philip. The new governor further decreed that people persisting
in using the names Hooks and Cods would be punished in order to
silence the ­conflict once and for all33. Obviously, using party names

and was perhaps added by a later copyist. Philippijnen may also be an early sixteenth-
century addition. See also Demets, Dumolyn, 2016.
30 State Archives of Ghent, Collection Varia 3, no 244, documents 5, 24, and 26 (1492).
About this revolt and its protagonists, Haemers, 2007.
31 Martines, 2003; Crouzet-Pavan, 2007; Gentile, 2009.
32 Van Gent, 1994; ter Braake, 2009.
33 “Item, est ordonné que nul d­ ’un costé ne d­ ’autre, de quelque estat ou c­ ondicion q­ u’il soit, ne reproche
a autre aucunes choses passees a l­’occasion de ceste guerre ne ne parle doresenavant de houc ne de
240 JAN DUMOLYN ET JELLE HAEMERS

could generate memories that could possibly endanger the new c­ ount’s
political position.
Although we would certainly not downplay the importance of more
straightforward economic and political reasons in explaining the ratio-
nale of factional ­conflict, it is obvious that the social memories of such
parties were also vital to their organisational longevity. Every faction
member worthy of the name would have been socialized since infancy
to believe that there were certain acts – such as a murder – that had
to be remembered for all eternity simply for the sake of remembrance.
This was a crucial credo of the code of honour and revenge that inspired
factions34. During such ­conflicts memories of the « injustices » inflicted
upon a particular group were kept alive, and this was particularly true
in the ever-­combative political climate of Liège, which was known for
its factionalism. There, political victories were regularly celebrated in
order to ­commemorate certain events and capitalize upon them. On
January 6, 1433, after their victory over the Datin faction, a coalition
of the Surlet-delle Chaussée faction and the ­city’s 32 craft guilds ins-
tituted an annual celebration of their rise to power. It c­ ommenced on
the market square. The g­ uilds’ charter of alliance was read aloud, and
a bonfire was lit from wood gathered on their ­enemies’ lands in Jehay,
near Huy, as well as coal from their mines. It ended with a meal for
representatives of the craft guilds and the urban authorities35. This
annual ­festivity was clearly supposed to ­commemorate and bolster the
supremacy of one faction above another. Of course, this was not firm
foundation for enduring peace, as obviously the defeated faction would
­continue, either privately or in much a more covert fashion, to cherish
another, equally one-sided view of the ­conflict.
It appears that memories of political struggles could only serve to
pacify a situation if they were framed or ritualized in ways that could
be shared or accepted by all parties involved. Examples in the prince-
bishopric of Liège, demonstrate that the creation of such ­common memo-
ries by means of religious rituals could be highly useful in decreasing
political tensions. On May 16, 1335, the so-called “Paix des Douze” was
cabillau, sur peine ­d’en estre puni tellement que tous autres y prendront exemple” (Cauchies,
2010, p. 54).
34 Remembering “noble deeds” was important for the status of nobles and the same can be
said of factions, see Harari, 2004, p. 111-115; Buylaert, 2010; Sterchi, 2005.
35 Xhayet, 1997, p. 385.
“We Will Ask for a New Artevelde” 241

c­ oncluded between the Awans and Waroux clans in order to end their
long-running vendetta36. The treaty was arranged by a ­commission
of six representatives from each family, which was also charged with
regulating similar c­ onflicts in the future. Apart from including a clause
that prohibited clan members from again taking up arms, it also created
favorable c­ onditions in which memories of the factional ­conflict could
be used to pacify it. The treaty obliged the ­competing parties to found
a new church in which thirteen chaplains (twelve for the families, and
one for the Virgin Mary) would celebrate mass for the deceased members
of both factions at thirteen altars. Jointly financed, the church would
symbolize the union between the families and ­commemorate the peace
settlement. In the end, the church was never ­constructed, presumably
because of the prohibitive expense of such an undertaking. However,
an “altare illarum de Awans et Waroux” was established in the church
in Waremme near Liège, along with two other altars for the twelve
apostles and the Holy Virgin, with the aim of celebrating the “memo-
ria” of clan members. Memoriae clearly indicates obiit masses held for
deceased family members – the most frequent meaning of this term in
the medieval c­ ontext – and a mainstay of memorial practice in general,
also in political ­contexts37.
These rituals were echoed in a similar service organized in the county
of Namur more than a century later, albeit not to c­ onclude a factional
struggle, but rather the long-running inter-urban rivalry between the
cities of Namur and Dinant. That latter had erected military fortresses
on the river Meuse to the south of Namur, making it an important
military hub for the prince bishop of Liège because Dinant belonged
to his territories. A violent war broke out in 1430, and in December of
1431, Dinant surrendered following a siege and fierce attack by the new
Count of Namur – Duke Philip the Good, who had recently bought the
county. In the peace settlement, prince bishop John of Heinsberg agreed
to dismantle some of these fortresses. Furthermore, a new chapel was to
be established on Christmas Day of the following year in the parochial
church of Bossière, where a mansion of the Count of Namur was located,
and a perpetual mass held “for the salvation and the welfare of the souls
of subjects of the Duke of Burgundy who had died there, and the other
36 Masson, 2013, p. 668-669; Xhayet, 1994, p. 320.
37 Oexle, 1982; Richard, 2009; for the Low Countries: Trio, 2010.
242 JAN DUMOLYN ET JELLE HAEMERS

victims of the war”38. Although the peace settlement did not prevent
further c­ onflict between Namur and Dinant some decades later, this
remarkable foundation once again demonstrates that ­common religious
rituals were a popular medium for memories of past ­conflicts. Thus, as
in the “Paix des Douze” of 1335, the ritual of obit masses fulfilled both
religious and political goals: keeping the peace via the remembrance of
victims of war and factional struggle while praying for their souls in a
spirit of Christian forgiveness.

SITES OF MEMORY

According to Pierre Nora, in modern society “there are lieux de


mémoire, sites of memory, physical, visible and tangible locations, because
there are no longer milieux de mémoire, real environments of memory39”.
However, phenomena ­comparable to such modern sites of memory can
certainly also be found in later medieval and early modern Europe.
In the medieval ­context, chapels that held obits for deceased heroes
or anti-heroes of popular or factional struggles were the most obvious
sites of memory. An early example of this practice is attested to in
thirteenth-century Bruges. A chronicle of the abbey of Sint-Andries
near Bruges, the Chronica Sancti Andreae, written by abbot Arnulph
Goethals between 1525 and 1546, recounts the Moerlemaye revolt of
1280-1281. Two and a half centuries after the events, it does so from
a very particular point of view that diverges from most other sources.
Following the older Chronicon Sancti Bertini written by Johannes Longus,
the chronicle of Sint-Andries begins by telling how the Bruges Belfry
accidently burned down. All of the documents establishing the ­town’s
privileges perished in the fire. The Count would not grant Bruges new
copies and wanted to “reduce the city to its earlier servility”, resulting
in ­commotion. This account seems plausible though it is given a far
greater centrality in Johannes ­Longus’s narrative of the revolt than is
for instance suggested by the charter material also documenting the
38 Bormans, 1880, vol. 1, p. 209-210.
39 Nora, 1989, p. 7.
“We Will Ask for a New Artevelde” 243

events of 1280-1281. Moreover, according to Longus, who was followed


in this by Goethals, “many good men” supposedly intervened so that
the city would retain its privileges in return for a sum of money, a fact
totally uncorroborated by the numerous other documents that deal
with this revolt. In any case, the count “treacherously” had five people
executed, and they were buried in Sint-Andries, in a chapel founded
by their heirs40.
While the older chronicle by Johannes Longus only mentions that
these men were buried in the monastery in a chapel founded by their
heirs, the chronicle of the Sint-Andries abbey expands on this story,
thus associating the institution with the memory of these Bruges heroes
who had died for a just cause. The chapel in question already lay in
ruins by 1525, roughly when abbot Goethals was writing. Given that
he systematically used an older chronicle as well as available archival
sources, he had not invented the tale out of thin air. Indeed, on September
3, 1281, Jan Coopman, Boudin Priem, Jan and Lambert Danwilt and
Lambert Lam, four of whom can certainly be c­ onsidered leaders of the
revolt according to the ­comital administration sources, were beheaded
outside the Bruges Boeverie Gate. They were buried in the abbey of Sint-
Andries, where “the chapel of the five lords” was later built. Goethals
narrates how the heirs of the rebel leaders had founded a daily mass
for their souls and a solemn anniversary to be celebrated by the abbot
in the chapel, and describes their tombstones. And indeed, a charter
from 1287 tells us that a certain Jan Danwilt founded a mass for his
father and gave 200 pounds to the abbey for the chapel41. According
to the chronicle, Boudin P ­ riem’s tombstone had “Gloriosius ducens mori
pro libertate quam vivere in servitude” inscribed on it, while a rough trans-
lation of the four cornerstones states that Boudin had died innocently
in defence of his land and people and their liberty so that the people
would not be harmed by division42. Moreover, the chronicle states that

40 Chronica monasterii Sancti Andreae, 1868, p. 87-89; Longus, 1880, p. 864; Huygebaert,
1960, p. 86-87. About the revolt: Wyffels, 1966; Bardoel, 1994. The sanctuary was
finally demolished in 1550 by Jan van den Weerde, the abbot who took up office after
Goethals. The chapel was also described in a ­continuation of the Sint-Andries chronicle,
the Continuatio Chronicae monasterii Sancti Andreae.
41 Wyffels, 1966, p. 81-82.
42 “Qua ratione perit? Mortem quo jure meretur? Qui patriam, populum, libertatem tuetur. Ne per
dissidium vulgus c­ommune gravetur. Balduini necis haec quum causa fuisse putetur” (Chronica
244 JAN DUMOLYN ET JELLE HAEMERS

it was because of these very inscriptions that the people still knew that
Priem had been an innocent because the m ­ arker’s placement had been
prevented by the count and his successors until ninety years later. A bit
further in the text, the chronicle is also very partisan in its support for
the rebels of the Flemish revolt of 1302. It c­ ontains a fictitious story of
how Philippa, the daughter of the count, was strangled while in French
captivity together with her twenty chamber maidens and then thrown
into the Seine. The chronicler thought it was probable that she had died
because of Divine Vengeance for the blood of the innocent five lords.
Mention is also made of a yearly mass celebrated on July 11th, which
was not only the Feast of Saint Benedict, the ­abbey’s patron, but also
the day upon which the Flemish militias defeated the French army at
the battle of Courtrai in 1302. In this manner, the religious ­community
succeeded in closely associating itself with these benefactors and the
memory of their just c­ onduct in the c­ ontext of a period of revolt in
Flanders and especially in Bruges, a memory which their ancestors also
wanted to be cherished43.
A very ­comparable case deals with the memory of Zeger van Kortrijk,
a Flemish knight arrested by the Count of Flanders on the eve of the
Hundred Years War because he had sided with the English and had
strong ­connections to the city of Ghent. Immediately after his execu-
tion in 1337, the Artevelde party came to power in Flanders, and they
­considered Zeger a hero of the popular cause44. Two centuries later, the
1544 Antwerp Songbook, the first major printed collection of popular
songs in Middle Dutch, included one dealing with the same Zeger van
Kortrijk. Although by then, his name had been transformed into “Cort
Rozijn”, which derived from the French version of his name: “Sohier le
Courtraisien”. The song clearly sided with the rebels, even thought it
narrated the events in a depoliticized and fairy tale-like style45. As in
the case of the Bruges rebel leaders, it seems that Z ­ eger’s memory was
kept alive because he was buried in a chapel. This “site of memory”
was located in Our Lady in Drongen, in ­Zeger’s seigniory. Versions of
the abovementioned Memory Books of Ghent mention that in 1336

monasterii Sancti Andreae, 1868, p. 84).


43 Ibidem, p. 89.
44 Chronique de Jean le Bel, 1904, p. 132.
45 Van der Poel, 2004, vol. 1, p. 39, and vol. 2, p. 76-78.
“We Will Ask for a New Artevelde” 245

– as we have seen, it was in fact 1337 – “Cuertroosijn van ­Ghent’ died


and was buried in that chapel, as you enter, at the north side under a
tombstone which is highly situated.”46 ­Zeger’s gravestone was in cop-
per, and included his image and the inscription Villa Gandensis Tutor,
or “guardian of the city of Ghent”. As the chapel was destroyed during
the Iconoclasm of 1566, this notice must have dated from the fifteenth
or early sixteenth centuries47. Possibly, it was this site of memory
that provoked or reinforced narratives on the role of the hero Zeger
van Kortrijk, stories which may have been transmitted in both oral
and written forms. It even seems plausible that the song about “Cort
Rozijn” was itself directly inspired by the chapel as a visible marker of
these past events.

MEMORY AND REPRESSION

That sites of memory played a role in forming collective narratives


in given ­communities is demonstrated by the fact that even mentioning
places encapsulating memories of past c­ onflicts could be a dangerous
affair. As a kind of damnatio memoriæ of a particular place and event, in
1455, G­ hent’s urban authorities promulgated an ordinance that forbade
inhabitants to mention “Gavere”, the name of a nearby village close
to where the Ghent rebels had been defeated by Philip the Good in
1453. The name Gavere had become a symbol of repression, a collective
trauma, and merely mentioning the area where the battle had taken
place could apparently incite the people of Ghent rebellion anew. In 1467,
after yet another revolt, the city government also forbade the g­ uilds’
deans from speaking about Gavere when they swore their oaths – “the
time before Gavere” evoked, as other places and names sometimes did,
shared memories of “better days” in which the rights and privileges of
artisans and other townsmen had still been respected48.

46 Memorieboek der stad Ghent, 1852, p. 45. See also Van Bruaene, 1998, p. 53-54.
47 De Potter, Broeckaert, 1864, vol. 2/1, p. 17.
48 “Nous estions advertiz […] que si […] estait faite mention de la paix de Gavere, meismement du
mot de la paix de Gavere, que le peuple se mettrait en c­ommotion” (Gaillard, 1856, p. 172).
246 JAN DUMOLYN ET JELLE HAEMERS

Likewise, monuments that symbolized urban autonomy could also


be targeted. The most famous example in the history of the medieval
Low Countries is that of the “Perron” of Liège, a stone pillar placed
on the market squares of the prince-­bishopric’s “free cities”, including
Borgloon, Tongeren, Sint-Truiden, Verviers, Maastricht and Liège itself.
The perrons demonstrated that they had liberties such as a free market
and a certain degree of political autonomy. A monument like the Perron
made an easy symbolic target when a prince wanted to restrict privileges
after a rebellion. In 1467, the city of Liège saw its Perron removed to
Bruges after the war it had waged against Charles the Bold, Duke of
Burgundy. Ten years later, however, it was returned to the city after the
­Duke’s violent death on the battlefield of Nancy and the subsequent
revolt of his former Flemish subjects, who thus demonstrated their
solidarity with Liège49.
Another measure, taken by Charles the Bold after his victory in
the c­ onflict of 1465-1467, shows the importance of city walls in social
memory. With the charter promulgated in Lowaige (Lauw) on November
8, 1467, the duke obliged Hasselt and eight other cities in the County of
Loon, which had joined the rebellion of Liège, to tear down their walls
and fill up the surrounding moats. Likewise, the cities had to hand over
their banners, as others had been forced to do after the repression of
similar rebellions50. Such measures had a primarily military purpose,
but they were also a symbolic means by which to make clear that the
cities had lost their autonomy. The impact of such spatial interventions
on the inhabitants cannot be underestimated. Demolishing the city walls
would certainly have had a traumatic effect as the desolate view made
burghers aware of the fact that their insurrection had led to dramatic
­consequences for their freedom. Understandably, citizens were reluctant
to obey these orders. For instance, in 1483, in a letter to Hasselt, Philip
of Cleves, at that moment still a lieutenant in service of the Dukes of
Burgundy, once more asked the city to demolish its fortifications as the
aldermen had promised about a decade before51. Others simply rebuilt
49 Pirenne, 1933.
50 “Item, que les murs et portes de ladite ville de Hasselt et de toutes les aultres et fors du dit pays
de Looz seront demoliz et abatus et les fossez remplis” (Bormans, 1878, p. 154). It ­concerns
Herk-de-Stad, Beringen, Maaseik, Tongeren, Borgloon, Bree, Bilzen, and Stokkem. On
spatial interventions by princes, see Arnade, 2013.
51 State Archives of Hasselt, Schepenbank Hasselt, no 162, letter of February 17, 1483.
“We Will Ask for a New Artevelde” 247

them as soon as possible, which is what the city of Liège did after the
death of Charles the Bold. From this point of view, the inscription on
one of the main towers on the city walls in Liège (the so-called “Tour de
Moxhons”) is revealing. This triumphantly ­commemorated its restoration,
specifically indicating that it had been paid for by a ­common tax levied
just for that purpose: “I am the Tour au Moxhon […] rebuilt in 1483
by the means and the good c­ onduct of the tax collectors of the city”52.
The inscription illustrates the i­nhabitants’ pride and the importance
they attached to the walls. They were not only physical markers that
distinguished the city from the countryside, but also places that evoked
memories of ­conflict and victory.
City gates were also linked with popular memories about past events
and, again, religious practices ­commemorating death. The 1544 Antwerp
Songbook includes one titled “My Lord of Lelidam”, and it is an inte-
resting case in point. The narrative is structured as a dialogue between
two protagonists: the Lord of ­L’Isle-Adam and Philip the Good, against
whom the people of Bruges rebelled in 1436, and, in general, it closely
follows the line of events as recounted in numerous other sources53.
On May 22, 1436, Jehan de Villiers, lord of ­L’Isle-Adam, was killed in
Bruges as the Burgundian army tried to seize the rebellious city. In the
song, the Lord of “Lelidam” (literally “Lilly Dam”, an adaptation of his
name as a result of folk etymology), who had supposedly taken Paris
three times, did not want the city of Bruges to be c­ onquered by treason.
However, even though the author of the song was clearly familiar with
the urban landscape of Bruges, he does not mention the Boeverie Gate,
through which the Burgundian army had entered the town in 1437.
Part of Philip the ­Good’s harsh verdict against the city stipulated that
a chapel where a daily mass would be said in his memory be set up
in the Boeverie Gate, which was to be bricked up. The ­painters’ guild
would receive a yearly sum for administering the c­ hapel’s services, at
which ­Bruges’ aldermen and all of the ­guilds’ deans had to be present.
In 1452, the gate was reopened because Bruges had obeyed the prince

52 “Je suis nommée la Tour au Moxhon qui fut démolie et détruite par Charles de Bourguignon l­ ’an
mille quat cent soixante huitte et puis reffaite, qui bien me duit l­ ’an huitant troye en verité par le
moyen et bon ­conduit des fermeteurs de la cité”. The “fermeteurs” were the urban functionaries
charged with the collection of the taxes levied for the fortification of the town, see Denoel,
2005 and Billen, 2010, p. 82-83.
53 Van der Poel, 2004, vol. 1, p. 151-153, vol. 2, p. 167-170. See Dumolyn, 2007.
248 JAN DUMOLYN ET JELLE HAEMERS

and not supported ­Ghent’s current revolt. The song may have been
­composed then, but it could also have been written in the c­ ontext of
the turbulent 1477-1490 period in Bruges54. Indeed, when revolt broke
out again in 1477, the new rebellious city government was unwilling
to c­ ontinue funding the obit in the chapel of the ­painters’ guild55.
Regardless, Philip left his mark on Bruges, where he died in 1467.
Until 1796, another annual mass was held in the main church of Saint-
Donatian, where he had his grave and a tombstone, with an inscription
and the year 1437 in chronogram56. Again, it seems plausible that it
was this memorial practice, in ­connection with specific sites, that had
given rise to – or helped to reconstruct – later social memories of both
this and subsequent revolts.
A final example showing the traumatic and lasting effects princely
repression could generate ­consists of the stories told in the city of Arras
during the 1570s. They shed light on what is perhaps the most important
medium for memories in the late medieval period, though also the most
difficult to retrieve, namely oral narratives. Arras had an unfortunate
history: after the death of Charles the Bold in the beginning of 1477,
the county of Artois and its main city Arras were violently c­ onquered
by the French King Louis XI who severely punished the city for its
stiff resistance. Not only were the main quarters pillaged and burnt,
Louis XI also removed the city bells and dubbed the city “Franchise” in
reference to the privileges the French kings had granted it in previous
centuries. Though the city was renamed Arras in 1482, some inhabitants
used the remembrance of the tragic events of 1477 as evidence of the
unreliability of the French kings. During the turbulent 1570s, when the
Estates General of the Low Countries discussed a possible alliance with
King Henry III of France against their Habsburg ruler, the Spanish
king Philip II, burghers argued against the alliance by mentioning
tales told by elderly women about the cruelties of Louis XI, calling
him “the bad king” and “the worst Christian king who had reigned in
the last two centuries”. The existence of these stories is mentioned in a
­contemporary report made by the Catholic jurist Pontus Payen, who was
54 Given that a very similar version is mentioned in a 1517 chronicle, it seems that the
story was circulating some decades before it was printed in 1544: Divisiekroniek, 1517,
fo 285 vo.
55 Brown, 2011, p. 268-270.
56 Viaene, 1958.
“We Will Ask for a New Artevelde” 249

against the alliance with France. He justified the anger that existed in
Arras (and elsewhere) against the French, by stating that the stories about
Louis XI caused “an irreconcilable hatred against the French nation”
because “they were transmitted with the ­mother’s milk to ­children”57.
It is impossible to know whether Payen was telling the truth, but what
matters is that he used these vivid memories of repression in support
of his argument. This once more demonstrates that the Low Countries
had a well-established tradition of passing rebellious stories from one
generation to another “with the m ­ other’s milk”, as it were. Both urban
and princely authorities as well as specific milieus among the elite and
popular classes c­ ontinuously and functionally used distorted stories about
traumatic defeats and glorious victories with the aim of influencing
­contemporary debates. It is now clear that the well-studied ­culture of
political remembrance in the Low Countries during the Reformation
and the early modern period already had a long history – or should we
say a long memory?

Jan Dumolyn
(Ghent University),
Jelle Haemers
(University of Leuven)

57 “Meismes les vielles femmes scavent encoires à parler de ce roy, qui at esté de son temps le plus cruel
et malicieux que prince chrestien quy ayt régné depuis deux cens ans, le nommant le roy bossu,
et en font de beaux longs c­ontes ­qu’ils ont apprins de leurs devanchiers à leurs enffans, affin de
leur faire sucher avecq le laict une haine irréconciliable ­contre la nation franchoise” (Mémoires
de Pontus Payen, 1861, vol. 2, p. 75-76). See Duquenne, 2010, p. 61. On Arras in 1477:
Naegle, 2012.
LA MÉMOIRE ­COMME MOTEUR
DE LA RÉVOLTE
Réflexions autour du rôle subversif
des traditions orales dans ­l’Europe moderne

La mémoire des révoltes dans les c­ ultures orales a attiré depuis


plusieurs décennies ­l’attention ­d’historiens qui ont analysé ce phéno-
mène c­ omplexe à l­’intersection entre différents supports de diffusion,
en montrant la porosité entre ­cultures lettrées et populaires dans la
­construction ­d’une mémoire sociale sur le temps long. ­L’approche la
plus évidente c­ onsiste à étudier c­ omment de tels événements laissent
des traces préservées et parfois réactivées dans des ­contextes ultérieurs :
autrement dit, ­comment certaines révoltes sont créatrices de mémoires, qui
sont presque toujours plurielles, parfois c­ ontradictoires et c­ onflictuelles
selon les individus et les groupes qui les portent et les transmettent.
Mais il est tout aussi intéressant ­d’analyser ­comment le souvenir de
­contestations transmis au sein de ­communautés peut influencer le cours
de révoltes ultérieures, voire en être l­’un des moteurs. Ainsi, dans un
double mouvement, non seulement la révolte peut entraîner la mémoire,
mais la mémoire peut également entraîner la révolte. Ce second aspect,
nettement moins étudié que le premier, est ici abordé en ­s’intéressant
plus particulièrement à la mémoire orale c­ omme moteur de la révolte :
­l’interrogation porte sur le caractère subversif des traditions orales et
sur la façon dont ­l’évocation de révoltes passées dans ces traditions peut
générer ou influencer des soulèvements ultérieurs.
­L’oralité laisse par définition peu de traces, et ­l’étude des traditions
orales est habituellement plus du ressort de ­l’anthropologie ou de
­l’ethnologie que de ­l’histoire. Ces raisons expliquent pourquoi les études
historiques sur ce thème sont peu nombreuses pour ­l’Europe moderne.
­L’oralité est de plus difficilement dissociable d­ ’autres formes mémorielles :
elle est en interaction étroite avec l­ ’écrit, l­ ’image, les objets, les paysages,
252 ÉVA GUILLOREL

pour aboutir à la formation d­ ’une mémoire sociale c­ onstituée à la fois


de ­connaissances partagées collectivement et ­d’interprétations indivi-
duelles de ces mêmes savoirs1. Or, ­l’époque moderne est marquée par
­d’importants bouleversements dans la circulation de l­ ’information, liés
notamment à ­l’essor de ­l’imprimé : les relations entre oralité et autres
supports de diffusion ne ­s’envisagent donc pas de la même manière
si l­’on c­ onsidère le début ou la fin de la période. Pour c­ omprendre la
place de ­l’oral au sein de cette mémoire sociale, il est dès lors nécessaire
­d’étudier ce que Patrick Cabanel appelle la « traçabilité de la tradition2 ».
Dans cette perspective, ­l’attention est portée ici plus précisément sur
les formes et les usages des traditions orales, entendues ­comme savoirs
à la structure plus ou moins codifiée, telles que les chansons ou récits
légendaires, dont la transmission se fait en bonne partie ou en totalité de
façon orale (ce qui ne veut pas dire bien sûr ­qu’il ­n’y ait pas ­d’interaction
avec d­ ’autres médias) dans un ­contexte familial ou de voisinage sur plu-
sieurs générations voire plusieurs siècles. Mais la réflexion intègre aussi
­d’autres marques de mémoires orales, définies dans un sens plus large
­comme des discours sur les révoltes passées véhiculés principalement
par l­’oralité sur plusieurs générations.
Les traditions orales sont souvent ­considérées ­comme des vecteurs
de ­conformisme. Dans un article influent, même si ­aujourd’hui un peu
ancien, ­l’anthropologue William R. Bascom distingue quatre fonctions
occupées par les traditions orales dans les sociétés, dont ­l’une est de
maintenir la ­conformité aux normes ­culturelles attendues et permettre
le ­contrôle social3. Dans le débat qui a suivi cette publication, Wendy
Reich a répondu en affirmant au c­ ontraire que les traditions orales
peuvent être mobilisées pour justifier les changements sociaux boule-
versant l­ ’ordre établi, dont les révoltes et les révolutions. Elle appuie son
propos sur des exemples extra-européens et ­contemporains, par exemple
­l’usage des ­contes populaires ­chinois pour accompagner la révolution
­communiste de Mao Zedong4.
­Qu’en est-il pour Europe moderne ? En quoi la transmission et la
mise en avant de traditions orales – et plus largement de mémoires

1 Fentress, Wickham, 1992.


2 Cabanel, 2007.
3 Bascom, 1954, p. 346-348.
4 Reich, 1971.
La mémoire ­comme moteur de la révolte 253

orales – évoquant le souvenir de révoltes passées peuvent-elles influencer


­l’irruption ou le déroulement de soulèvements ultérieurs ? Dit autre-
ment, en quoi cette mémoire orale peut-elle être un acteur et parfois
même un des moteurs de la révolte, en se faisant ­l’écho ­d’événements
subversifs passés ?

­L’EFFICACITÉ DE LA MUSIQUE ET DU CHANT


DANS LA TRANSMISSION ET LA RÉACTIVATION
DU SOUVENIR DE RÉVOLTES

Le rôle du chant ­comme véhicule de la pensée ­contestataire est bien


­connu. Ce medium tire sa force de ­l’articulation entre texte et musique,
de son interprétation devant un auditoire qui écoute mais aussi souvent
participe (en chantant collectivement ou en répétant certains vers ou
refrains) dans le cadre ­d’une performance habituellement chantée en
public et qui touche une large audience. Il ­n’est donc pas étonnant que
certains chants possèdent dès l­ ’origine, ou bien acquièrent et entretiennent
au fil des générations, une dimension subversive. Les adaptations et réu-
tilisations de la Marseillaise ­constituent un exemple bien documenté de
ce phénomène, étudié entre autres par Michel Vovelle : ce Chant de guerre
de pour l­ ’armée du Rhin c­ omposé en 1792 accompagne non seulement les
succès de la Révolution française, mais est aussi repris pour accompagner
les grandes révolutions européennes du long xixe siècle dans le c­ ontexte
­d’émancipation des peuples et du mouvement des nationalités5.
En remontant le temps j­ usqu’à l­ ’aube de l­ ’époque moderne, on peut
trouver bien ­d’autres exemples de réutilisation de chants à caractère
subversif dans des ­contextes de révoltes ou tensions ultérieures. ­C’est le
cas des chants autour de Guillaume Tell étudiés par Marc Lerner. Lors
de la « guerre des paysans » suisse de 1653, les meneurs de la vallée
­d’Entlebuch reprennent la figure du héros mythique de l­ ’indépendance
suisse au xive siècle pour ­s’opposer aux autorités patriciennes : ils font
chanter de nuit des chansons vantant ses exploits sous la fenêtre des
délégués de la ville de Lucerne venus rétablir ­l’ordre ; le lendemain, le
5 Vovelle, 1984.
254 ÉVA GUILLOREL

représentant du canton ­d’Uri arrive habillé à la manière de Guillaume


Tell – qui était originaire de cette région –, portant un arc et suivi
­d’une troupe armée et il refuse de saluer les représentants urbains6.
­L’utilisation d­ ’éléments subversifs intégrés dans une mémoire sociale
largement c­ onnue et partagée en Suisse au service de la c­ ontestation du
pouvoir plusieurs siècles après les épisodes associés à Guillaume Tell
est ici évidente. On peut cependant ­s’interroger sur la part d ­ ’oralité
dans la c­ onstitution de cette mémoire chantée. Des attestations écrites
de chants sur ce héros sont ­connues dès la fin du xve siècle et ont joué
un rôle dans l­’élaboration des mémoires postérieures. Cependant, ces
traces écrites apparaissent près de deux siècles après les événements
supposés, pendant lesquels la tradition orale ­s’est déjà structurée et a
nécessairement influencé les mises par écrit. Ces dernières ont ensuite
pu interagir avec des discours oraux pour former une multiplicité de
récits diffusés par différents médias, créant une imbrication forte et
difficile à démêler entre écrit, oral et image.
Au-delà des paroles, ­l’efficacité du chant est beaucoup liée au choix de
­l’air qui l­ ’accompagne. Or, certaines mélodies acquièrent une c­ onnotation
subversive à travers leur usage lors de révoltes et peuvent aussi être
remobilisées au cours de soulèvements ultérieurs. Ce phénomène est
facilité par la pratique de réemploi de timbres pour la ­composition de
chansons nouvelles, ­c’est-à-dire la réutilisation ­d’airs préexistants aux
paroles qui sont déjà ­connus des auditeurs7. Utiliser un timbre présente
le double intérêt de faciliter l­ ’acquisition du chant par l­ ’auditoire et de
­contribuer à la structuration ­d’une mémoire transgénérationnelle : en
effet, en réutilisant un air familier, on rappelle aux auditeurs le souve-
nir de chants plus anciens sur le même timbre qui parlent de thèmes
similaires8.
Dans la France moderne, Claude Grasland a ainsi étudié la perma-
nence de timbres repris de révolte en révolte en y associant des paroles
nouvelles9. ­C’est le cas de O filii et filiae, au départ hymne religieux
attesté dès le xve siècle ponctué du refrain « Alléluia ». Bien que ­n’étant
pas associé à une forme de ­contestation sociale ou politique à ­l’origine,
6 Lerner, 2017 ; voir aussi les remarques de Challet, 2010a.
7 Coirault, 1942, p. 207 ; Guilcher, 1989, p. 156-158.
8 Pour des travaux c­ oncernant le réemploi de timbres dans l­ ’Europe moderne, voir Grijp,
2010 ; McIlvenna, 2015.
9 Grasland, 1990.
La mémoire ­comme moteur de la révolte 255

il devient l­’un des plus anciens et durables supports de vaudeville, ces


chansons urbaines sur timbres qui traitent de l­’actualité politique et
qui ­connaissent un grand succès aux xviie et xviiie siècles. ­C’est ­l’un
des principaux timbres repris lors de ­l’explosion chansonnière et pam-
phlétaire des mazarinades qui accompagne la Fronde. On le retrouve
par exemple dans l­’Alleluya des Barricades ­composé en 1648 :
Ce fut une étrange rumeur
Lorsque Paris tout en fureur
­S’émut et se barricada
Alleluya
Sur les deux heures après dîné
Dedans la rue Saint-Honoré
Toutes les vitres ­l’on cassa
Alleluya10.

Après la Fronde, O filii et filiae sert à nouveau de timbre de vaude-


ville en 1718 dans un ­contexte de crise politique majeure autour de
la ­contestation du Régent à la fois par le Parlement de Paris et par le
parti hispanophile de la duchesse du Maine. La ­composition se termine
­d’ailleurs par un véritable appel à ­l’insurrection qui ne peut que faire
écho aux chansons de révoltes plus anciennes sur le même timbre :
Cet exemple sera suivi
Et chaque province à ­l’envie
À son tour se révoltera
Alleluia […]
Le feu va prendre aux quatre coins
Mais Philippe n­ ’en boit pas moins
Rira bien qui le dernier rira
Alleluia11.

De la même manière, d­ ’autres timbres sont utilisés lors de différents


épisodes de révoltes, ­comme Vive Henri IV, déjà ­connu c­ omme support
de chant de Noël à la fin du xvie siècle sous le nom ­d’Air de Cassandre,
10 Extrait du « Recueil de chansons choisies… », version publiée dans Barbier, Vernillat, p. 14-16.
Sur la diffusion de ­L’Alleluya des Barricades bien au-delà du ­contexte parisien de la Fronde,
voir les remarques de Dauzat, 1938, p. 41-42, reprises dans Guillorel, Hopkin, 2017,
p. 20-21.
11 Extrait tiré du chansonnier de Maurepas, t. XIV, Bibliothèque nationale de France (Paris),
ms. 12629, p. 297-301. Publié dans : Grasland, 1990, p. 543-546.
256 ÉVA GUILLOREL

repris ensuite c­ omme support de mazarinade au xviie siècle, puis de


chant c­ ontre les aristocrates à la Révolution, avant de devenir un hymne
ultra-royaliste au xixe siècle12.
Le recours aux timbres fonctionne de façon identique dans l­ ’Angleterre
moderne. Gerald Porter a par exemple étudié c­ omment l­ ’air Derry down,
dont les premières attestations ­connues datent du milieu du xvie siècle,
est repris avec une tonalité insurrectionnelle aux xviie et xviiie siècles : il
est utilisé pour chanter des ballades sur Robin des Bois, mais aussi pour
accompagner ­l’opposition c­ ontre la mainmise de propriétaires terriens
sur des terres c­ ommunes dans le Leicestershire en 1748, ou encore pour
mettre en musique les idées radicales de Thomas Paine au moment des
révolutions américaine et française13.
Dans ­l’analyse des chants et musiques à ­connotation subversive, les
éléments les plus évidents à repérer pour les historiens sont les mentions
explicites ­d’appel à la révolte. Mais de nombreuses allusions implicites,
rarement ­compréhensibles a­ ujourd’hui, leur échappent dans ce domaine,
­d’autant plus que les traces de ces formes orales sont presque toujours
lacunaires pour l­’Europe moderne. Pour les chansons, beaucoup de
recueils imprimés, chansonniers manuscrits ou feuilles volantes ne
donnent accès q­ u’au texte sans transcrire les airs ; et même lorsque l­ ’on
possède les deux, on ne dispose presque jamais ­d’éléments sur le ­contexte
de performance, le ton, la gestuelle qui les accompagnent et qui sont
aussi porteurs de sens. ­C’est ­d’autant plus regrettable pour un répertoire
de ­contestation, pour lequel il est plus prudent d­ ’interpréter des chants
non explicites car plus difficiles à réprimer : des textes en apparence
totalement anodins peuvent ainsi être investis d­ ’un pouvoir subversif
dans un certain ­contexte ou ­lorsqu’ils sont chantés ­d’une certaine façon.
­C’est ce que Murray Pittock a analysé dans le cas de ­l’Écosse du
xviiie siècle, en montrant que certains airs sont associés au jacobitisme,
­comme The Piper ­o’ Dundee : le seul fait de les jouer devient une forme
de résistance face aux autorités. ­D’autres chants relatent des récits méta-
phoriques ­compréhensibles seulement pour les initiés et qui protègent les
interprètes des poursuites : dans The Bonnie Highland Laddie, un highlander
qui enlève une femme respectable peut être interprété ­comme une allégorie
de Charles Édouard Stuart (« Bonnie Prince Charlie »), prétendant au trône
12 Weckerlin, 1903, p. 112-115 ; Robine, 1994, p. 88-89.
13 Porter, 2017.
La mémoire ­comme moteur de la révolte 257

d­ ’Angleterre à la tête de la rébellion jacobite de 1745, qui délivre l­ ’Écosse


représentée sous une forme féminisée en reprenant des codes esthétiques
du répertoire de tradition orale bien ancrés dans les ­cultures populaires14.
­L’interprétation de ce répertoire permet donc d­ ’entretenir le souvenir des
soulèvements jacobites et ­d’appeler à des insurrections futures.
Cette importance de ­l’implicite dans les traditions liées aux révoltes se
retrouve également chez les Camisards cévenols au début du xviiie siècle.
Peu de chansons faisant référence au c­ onflit généré par la politique religieuse
de Louis XIV ont été retrouvées15, mais la pratique ­d’hymnes religieux
par les protestants insurgés est par ­contre bien attestée. Dès 1707, le
Théâtre des Cévennes imprimé à Londres, et qui rassemble des témoignages
sur la guerre des Camisards, rapporte que le psaume 68 dit « psaume
des batailles » était utilisé lors de l­ ’insurrection en lui donnant ainsi une
­connotation subversive. Des récits légendaires transmis sur le temps long
et recueillis pas Philippe Joutard dans les années 1960 évoquent quant
à eux ­comment des Camisards avaient appris le psaume 68 à des merles
pour faire croire aux dragons du roi que les révoltés étaient beaucoup plus
importants que leur nombre réel : on note ici ­l’ajout ­d’éléments merveilleux
empruntés au registre du c­ onte qui révèlent que cette forme mémorielle
de la révolte a pleinement intégré la tradition orale et son esthétique16.
Le chant et la musique jouent donc un rôle particulièrement fort
dans la ­constitution et la transmission ­d’une mémoire orale permettant
des résonnances entre différents épisodes de révoltes.

PROPHÉTIES, MÉMOIRES ORALES


ET RÉSONNANCES ENTRE RÉVOLTES

Les prophéties forment un autre genre qui joue un rôle de premier


plan dans certaines révoltes, en mettant en avant ­l’espoir d­ ’un soulè-
vement libérateur en référence aux attentes passées et présentes. Elles
circulent pour certaines par écrit – de nombreuses prophéties sont
14 Pittock, 1998, p. 68-70.
15 Bost, 1940.
16 Joutard, 1977, p. 304-306 ; Robert, 2002, p. 54.
258 ÉVA GUILLOREL

imprimées au cours de ­l’époque moderne – mais sont aussi largement


véhiculées oralement et se rattachent pour beaucoup à un réservoir de
motifs puisés dans les récits de tradition orale.
Au Pays de Galles, plusieurs tentatives de soulèvement ­s’appuient
directement sur les prophéties anciennes qui circulent entre 1200 et
1400, facilitant ainsi le ralliement des habitants et faisant résonnance
aux soulèvements passés ­contre ­l’Angleterre17. En 1282, Llywelyn ap
Gruffydd prend les armes ­contre Édouard Ier : son échec marque la fin
de ­l’indépendance galloise et ­conduit à un regain de prophéties qui
appellent au retour d­ ’un libérateur. De nombreux textes évoquent en
particulier le nom d­ ’un héros nommé Owain : en 1360, le soulèvement
­d’Owain Lawgoch est donc naturellement identifié à la prophétie,
­d’autant plus q ­ u’il prépare, de façon c­ onforme à ce qui est annoncé,
une libération par la mer, même si ce débarquement ­n’est pas mené à
terme suite à son assassinat en 1378. Owain Glyn Dŵr, dont le nom
fait nécessairement écho à celui ­d’Owain Lawgoch, est le meneur de
la dernière grande rébellion des Gallois c­ ontre les Anglais entre 1400
et 1415 : il évoque lui-même les prophéties annonçant le retour ­d’un
libérateur pour justifier ses actions auprès de ses hommes et pour tenter
de ­convaincre des alliés de le rejoindre (il mentionne par exemple les
prophéties l­orsqu’il demande de l­ ’aide au roi d­ ’Écosse ou aux seigneurs
irlandais18). Après l­ ’échec de cette révolte, Owain Glyn Dŵr est l­ ’objet
de nombreux récits dans lesquels ce personnage se mêle à ­d’autres motifs
de c­ ontes et légendes pour alimenter une tradition orale sur le temps
long19. Les traditions prophétiques galloises fonctionnent donc ­comme
autant ­d’échos qui résonnent de révolte en révolte.
Elles occupent aussi une place importante dans ­l’histoire politique
de ­l’Angleterre moderne, ­comme ­l’a récemment bien analysé Tim
Thornton20. ­D’anciennes prophéties sont utilisées c­ omme outil politique
par Henry VII pour s­ ’imposer sur le trône ­d’Angleterre face à Richard III
vaincu à la bataille de Bosworth en 1485. Le fondateur de la dynastie
Tudor tire profit de sa double appartenance anglaise et galloise – ­puisqu’il
17 Parmi de nombreuses études sur les prophéties au Pays de Galles, on peut notamment
se reporter, pour une approche historique et ethnologique, à : Williams, 1979 ; Henken,
1996 ; Davies, 1997.
18 Henken, 1996, p. 60.
19 Id., chap. 3 à 5.
20 Thornton, 2006.
La mémoire ­comme moteur de la révolte 259

est associé par sa généalogie à ­l’ancien roi du Gwynedd et héros gallois


Cadwaladr au viie siècle – et se présente c­ omme le souverain providentiel.
Dans un but de légitimation, il adapte ses actions pour les faire corres-
pondre aux nombreuses prophéties qui annoncent que le prochain roi
­d’Angleterre sera gallois : de façon ­conforme aux prédictions, il arrive
par mer en débarquant en 1485 à Milford Haven après quatorze ans
­d’exil en Bretagne, puis décide d­ ’appeler son fils Arthur en référence
aux croyances dans le retour de ce héros légendaire21.
En Irlande, une longue tradition prophétique présente aussi des simi-
litudes avec les prophéties galloises, notamment le motif de ­l’attente ­d’un
libérateur venu par la mer. Aux xviie et xviiie siècles, elle imprègne le
genre des aisling, poème prophétique en gaélique décrivant des visions. Or,
la ­connaissance de ces traditions prophétiques influence le ­comportement
des populations irlandaises lors des débarquements, c­ omme l­’a ana-
lysé Guy Beiner22. Des prophéties associant rébellion des Irlandais et
débarquement étranger circulent depuis le Moyen Âge, la diffusion de
ces thèmes étant surtout importante lors des périodes de crise. Il ­n’est
donc pas surprenant de les retrouver de façon marquée dans les tradi-
tions jacobites, mais elles ­connaissent aussi un nouvel écho lors de la
Révolution française qui correspond à un pic de diffusion des prophéties
à la fois écrites et orales : les traditions apocalyptiques sont réinves-
ties par les United Irishmen, l­’organisation au cœur du soulèvement
irlandais de 1798, c­ omme outil de politisation populaire. En réponse,
des ­contre-prophéties sont diffusées par les Anglicans en reprenant les
mêmes codes esthétiques empruntés aux traditions orales, en mettant
par exemple en scène les visions d­ ’une vieille femme annonçant l­ ’échec
du débarquement français. Ces prophéties sont renforcées par des chan-
sons, c­ omme la très populaire The Shan Van Vocht, largement diffusée
par transmission orale au xviiie siècle avant d­ ’être imprimée pour la
première fois en 1840. Des prophéties c­ ontinuent à circuler même
après ­l’échec du soulèvement de 1798, et des récits et chants annon-
çant ­l’arrivée des Français pour délivrer ­l’Irlande sont encore recueillis
de tradition orale au xixe siècle et jusque dans les années 1930 lors
­d’enquêtes ethnographiques23.
21 Williams, 1996 ; Henken, 1996, p. 51-56.
22 Beiner, 2006.
23 Id., p. 92-108.
260 ÉVA GUILLOREL

­L’importance des récits prophétiques dans le déclenchement de sou-


lèvements, avec des phénomènes d­ ’échos entre différentes révoltes, se
retrouve dans de nombreux autres espaces européens. On en retrouve
un exemple en Bretagne en 1677 lorsque « les prédictions de l­’ancien
pronosticque breton le vénérable Guinglan qui depuix le règne de Gralon
avoit prédit tous les derniers malheurs de la province » sont mentionnées
­comme argument par les paysans de Pleumeur-Bodou pour se rebeller et
refuser de payer la dîme à ­l’abbaye voisine de Bégard24. Le prophétisme
peut aussi être rapproché des courants millénaristes très importants au
Moyen Âge et j­usqu’au xvie siècle en Europe, par exemple lors de la
Guerre des Paysans de 1525 en Allemagne. Il est également bien présent
dans la ­culture politique des Pays-Bas des xve-xvie siècles25.

RÉCITS LÉGENDAIRES, ORALITÉ


ET ÉCHOS DES RÉVOLTES

Les légendes regroupent une grande variété de récits non versifiés de


forme moins codifiée que le chant ou les prophéties, mais qui répondent
à certaines exigences : elles mettent en scène des événements ou des
personnages qui se rattachent à l­ ’histoire – ici au souvenir de révoltes –
tout en opérant un processus de lissage du récit pour répondre à une
esthétique attendue dans la tradition orale, notamment avec le recours
à des éléments de merveilleux. La place de ­l’oral est essentielle et est
parfois le seul mode de transmission de ces légendes qui circulent souvent
dans un espace restreint et qui sont associés à des lieux, des personnages
et des événements précis. Les récits légendaires sont ici élargis à toute
forme de discours sur les révoltes passées qui circule dans un ­contexte
familial ou de voisinage sur plusieurs générations même ­lorsqu’on ne
retrouve pas les éléments de codification qui les rapprochent de la tra-
dition orale. Quelle que soit leur forme, ces marques de mémoire orale

24 Archives départementales des Côtes-­d’Armor (Saint-Brieuc), G182, 1677. Pour une remise
en perspective de ce prophète ­d’après les sources médiévales et modernes, voir Le Bihan,
2013.
25 Dumolyn, Haemers, 2015.
La mémoire ­comme moteur de la révolte 261

c­ onstituent une source remarquable pour c­ omprendre le rôle subversif


et le réemploi des traditions liées aux révoltes et ­contestations.
Dans la thèse de doctorat ­qu’elle ­consacre aux « mémoires affrontées »
entre protestants et catholiques dans le sud de la France, Valérie Sottocasa
montre ­comment la résurgence mémorielle des guerres de religion a
influencé les choix politiques et c­ ulturels des c­ ommunautés sur trois
siècles26. Elle insiste notamment sur l­ ’importance des guerres de Rohan
dans les années 1620 qui c­ ontribuent à forger une image de résistance
protestante dans le Languedoc ensuite ancrée dans les mémoires. La réac-
tivation des insurrections trois générations plus tard lors de la guerre des
Camisards, puis encore trois générations plus tard lors de la Révolution
française sont autant d­ ’occasions de rejeu des haines religieuses anciennes
entretenant une mémoire longue qui reste à vif du fait d­ ’épisodes de
violences et de soulèvements réguliers. ­L’oralité et la transmission fami-
liale occupent une place importante dans cette mémoire qui résonne sur
plusieurs siècles à travers des récits légendaires mettant en scène des héros
de la résistance : ces individus sont associés à des lieux physiques qui
permettent d­ ’ancrer la mémoire dans le paysage, lui garantissant ainsi un
écho plus important et une actualité renouvelée à chaque génération27.
On retrouve la trace de discours oraux liés aux c­ onflits de religion dans
des récits de voyageurs c­ omme celui du c­ ompagnon-vitrier Ménétra au
milieu du xviiie siècle28, dans des témoignages en justice à différentes
époques (notamment à travers les dépositions de témoins évoquant
cette mémoire orale) ou encore dans des récits recueillis lors ­d’enquêtes
ethnographiques réalisées à partir du xixe siècle29.
Au-delà des ­conflits religieux, la question de la permanence de
mémoires orales ­conservant le souvenir de soulèvements et ­confortant de
nouvelles attitudes de révolte se pose pour ­d’autres espaces, par exemple
en Basse-Bretagne : depuis le xve siècle s­ ’y succèdent des soulèvements
populaires ruraux notamment étudiés par Michel Nassiet et Philippe
Hamon30. Ils coïncident avec la géographie du domaine ­congéable, mode
26 Sottocasa, 2002 ; Sottocasa, 2004, p. 275-312.
27 Pour des travaux récents sur l­ ’importance du paysage dans la c­ onstruction mémorielle,
voir Beiner, 2006, p. 208-230 ; Whyte, 2009 ; Wood, 2013, p. 188-246.
28 Ménétra, 1982, p. 120-121.
29 Sottocasa, 2002.
30 Nassiet, 1990 ; Nassiet, 2009a ; Hamon, 2015 ; Laurent, Nassiet, 2017. Je remercie Philippe
Hamon de m ­ ’avoir permis de lire une partie de ses travaux encore inédits à ce sujet.
262 ÉVA GUILLOREL

de tenure des terres générateur de nombreuses tensions entre proprié-


taires et tenanciers, avec des soulèvements paysans c­ ontre les seigneurs
en 1490, 1589-1590 puis 1675. Se pose alors la question ­d’une ­continuité
de la mémoire orale des révoltes au sein de ces c­ ommunautés, malheu-
reusement difficile à documenter31. La révolte du papier timbré et des
bonnets rouges en 1675 génère des récits transmis familialement, qui
apparaissent par exemple dans une procédure criminelle de 1704 : dans
cette affaire d­ ’injures et offenses c­ ontre l­ ’honneur entre deux femmes à
propos de leurs aïeux respectifs, les dépositions de témoins reviennent
à sept reprises sur ­l’accusation selon laquelle le grand-père de l­’une
­d’elles aurait rejoint les bonnets rouges32. Mais les quelques souvenirs
de la révolte glanés dans la tradition orale aux xixe et xxe siècles sont
maigres pour affirmer une ­continuité forte de cette mémoire au-delà
des trois générations qui apparaissent là, et les récentes c­ ontestations
se revendiquant de ­l’héritage des bonnets rouges apparaissent ­comme
une réappropriation basée sur ­l’écrit et la valorisation de cet épisode
historique dans ­l’historiographie militante bretonne bien plus que sur
une transmission longue du souvenir oral33.
Ce qui apparaît à l­ ’état de bribes dans le cas de la mémoire des révoltes
en Bretagne est nettement mieux documenté dans ­d’autres espaces,
­comme les Flandres de la fin du Moyen Âge. Jelle Haemers a montré
­comment la mémoire sociale de ­conflits passés façonne les traditions de
rébellion des artisans de la ville de Gand et permet une remarquable
cohérence des revendications et des formes ­d’actions politiques entre
1280 et 1540, soit sur près de trois siècles34. Ce souvenir est entretenu
grâce à une multiplicité de médias, parmi lesquels l­’oralité joue un
grand rôle dans un c­ ontexte de transmission familiale ou au sein des
guildes, même si on n ­ ’a gardé que des traces écrites de cette c­ ulture
orale : celles-ci prennent la forme de souvenirs familiaux, chansons,
récits et ­contes fictionnels ­comme celui de Till ­l’espiègle. Les autorités
cherchent d ­ ’ailleurs à interdire et supprimer ces expressions orales,
preuve de leur efficacité. Dans ce ­contexte, la transmission de discours
sur le passé permet tout à la fois de c­ onserver la mémoire des révoltes

31 Nassiet, 2009b ; Aubert, 2014, p. 603-638.


32 Guillorel, 2010, p. 479.
33 Croix, 2002 ; Le Coadic, 2015 ; Cornette, 2016.
34 Haemers, 2011, p. 451-455.
La mémoire ­comme moteur de la révolte 263

anciennes, de critiquer le pouvoir c­ ontemporain et d­ ’aider à organiser


de nouveaux soulèvements.
Dans l­’Angleterre du sud-est, Andy Wood a clairement montré le
rôle de la mémoire orale dans la réactivation de révoltes au xvie siècle35.
Il a étudié en particulier la plus importante d­ ’entre elles, menée par
Robert Kett en 1549 ­contre l­’enclosure des terres, qui mobilise à son
paroxysme ­jusqu’à 16 000 hommes. La ­constitution ­d’une mémoire
sociale des révoltes est dans ce cadre fondée largement sur ­l’oral (ce qui
ne veut pas dire ­qu’il ­n’y ait pas interaction avec des sources écrites, par
exemple les pamphlets diffusés par les autorités) et permet le maintien
de mémoires alternatives au discours officiel axé sur la répression des
rebelles. Il existe par exemple une forte c­ ontinuité de traditions locales
de protestations populaires dans la ville de Lavenham dans le Suffolk
avec des rébellions en 1525, 1549 et 1569, où des formes de remobili-
sation de la mémoire des soulèvements passés sont réactivées à chaque
génération : un des meneurs de ­l’insurrection de 1569, James Fuller,
explique ainsi après son arrestation ­qu’il a volontairement rappelé le
souvenir des événements passés pour mobiliser les habitants des vil-
lages déjà insurgés en 1549. Cette mémoire se maintient sur plusieurs
générations : entre 1617 et 1627, un fabricant de paniers, John Kettle,
est ­condamné pour avoir refusé de payer ses taxes : peut-être du fait de
la proximité entre son nom et celui du meneur de la révolte de 1549, le
bruit court dans la ville ­qu’il est un rebelle, même ­s’il se défend dans
son interrogatoire ­d’avoir voulu refaire la révolte de Robert Kett ; ainsi,
près de 80 ans après, les événements restent bien ­connus et Kett est
devenu un héros local de résistance.
La révolte de 1549 n­ ’est pas un cas unique : d­ ’autres exemples de
mémoire de soulèvements populaires influençant des révoltes ultérieures
peuvent être repérés en Cornouailles aux xve-xvie siècles. Dans le Kent,
la mémoire de la grande révolte des paysans de 1381 est toujours vivante
lors d­ ’un soulèvement en 1452, deux ans après la répression violente de
la révolte de Jack Cade en 1450, dont on retrouve probablement encore
le souvenir lors de ­l’épisode de 1549. Dans tous ces mouvements insur-
rectionnels, on ­constate une ­continuité des tactiques, ­d’organisation et
de mots ­d’ordre utilisés par les révoltés, dans des régions où les mêmes
villages se soulèvent régulièrement. La mémoire des révoltes participe
35 Wood, 2007, p. 242-249.
264 ÉVA GUILLOREL

ainsi à la c­ onstruction d­ ’une c­ ulture politique de résistance sur le temps


long : dans le cas de la révolte de Kett en 1549, on repère une transmis-
sion orale évidente sur plusieurs générations, puis un affaiblissement
des mémoires populaires même si le souvenir de la révolte, alimenté à
la fois par ­l’oral et par ­l’écrit, ­continue ­d’être un récit subversif encore
invoqué lors de tensions et rebellions au xviiie siècle36.

RÉEMPLOIS ET RENOUVELLEMENTS
DES MÉMOIRES ORALES DES RÉVOLTES

La mémoire fonctionne sur un modèle de non-linéarité, étudié dans


les travaux récents de chercheurs c­ omme Judith Pollmann37. La trans-
mission orale ­conduit par ailleurs à des processus de simplification,
­d’uniformisation mais aussi de renouvellements des récits38. On ­constate
donc sans surprise que la mémoire sociale mélange souvent et parfois
­confond tout à fait des révoltes totalement différentes mais associées
dans le souvenir oral.
­C’est le cas des riches traditions qui entremêlent le souvenir des
révoltes de Stenka Razine (1670-1671) et ­d’Emelian Pougatchev un siècle
plus tard (1773-1775). Malte Griesse montre que la ­confusion entre ces
soulèvements dans la mémoire sociale est facilitée par le fait que les
deux meneurs sont nés sur le même territoire des cosaques du Don au
sud de la Russie et c­ onduisent tous les deux une insurrection c­ ontre le
pouvoir tsariste. Pougatchev est présenté dans les c­ ontes populaires et
chansons recueillies par les ethnographes au xixe siècle – notamment
Alexandre Pouchkine – c­ omme la réincarnation de Razine revenu
venger les injustices c­ ontre les misérables. La persistance de traditions

36 Id., 2007, p. 249-258. Pour d­ ’autres exemples c­ oncernant la mémoire de la révolte de


1569 sollicitée pour encourager une nouvelle révolte une génération plus tard dans les
années 1580 dans ­l’Essex, voir Kesselring, 2007, p. 175-178.
37 Notamment dans le cadre du programme « Tales of the Revolt : Memory, oblivion and
identity in the Low Countries, 1566-1700 » : http://www.hum.leiden.edu/history/tale-
softherevolt/ [page c­ onsultée le 4 novembre 2016]. Voir en particulier Deseure, Pollmann,
2013.
38 Fentress, Wickham, 1992 ; Guillorel, 2010, p. 473-481.
La mémoire ­comme moteur de la révolte 265

orales valorisant les actions de Razine et la similitude des acteurs et des


objectifs entre les deux soulèvements ont alors pu faciliter le ralliement
­d’hommes à Pougatchev en souvenir de la révolte passée39.
En Écosse et en Irlande, la Révolution française permet de réactualiser
le souvenir des luttes jacobites et influence les choix politiques et les
événements. En 1792, des soulèvements ont lieu dans plusieurs villes
écossaises, notamment à Aberdeen où est fondée la première Society of the
Friends of the People d­ ’Écosse : cette société qui défend des idées radicales
véhicule ses messages à la fois en créant des chansons nouvelles et en
reprenant des chansons jacobites ­connues ­d’une audience large, avec ­l’idée
­d’associer les deux insurrections en en faisant une même lutte c­ ontre la
tyrannie40. Un lien clair entre jacobitisme et jacobinisme est également
établi lors de la révolte irlandaise de 1798 c­ ontre la couronne britannique,
au cours de laquelle des chants jacobites sont remis au goût du jour.
On peut recenser une multitude d­ ’exemples montrant le mélange entre
les deux insurrections dans les mémoires populaires : une des chansons
jacobites les plus c­ onnues, The C
­ hevalier’s Muster Roll ­composée sans doute
pour ­l’armée jacobite en marche vers l­’Angleterre en 1715, est utilisée
deux générations plus tard pour soutenir le soulèvement irlandais de
179841 ; ­l’hymne jacobite The White Cockade est encore joué en mémoire
­d’un vétéran rebelle de 1798 dans un village du c­ omté de Mayo au
xixe siècle ; une chanson reprenant des codes de la poésie jacobite du
xviiie siècle est actualisée pour y intégrer le refrain « Fi fá la The French
is ­coming » en référence aux chansons françaises et au cri de ralliement
de la Révolution « vive la, vive la liberté » ou « vive la République42 » ;
de même, un chant qui évoque Napoléon Bonaparte débarquant en
Irlande en août 1798 fait référence au héros jacobite des années 1680
Patrick Sarsfield qui avait ­combattu au service de Jacques II puis de
Louis XIV43. Un tel ancrage de la mémoire longue des soulèvements
irlandais défaits – on en trouve encore trace a­ ujourd’hui dans le répertoire
de c­ onteurs ayant appris de tradition familiale des récits de l­ ’insurrection
39 Griesse, 2017.
40 Pittock, 1994, p. 209-210.
41 Pittock, 1998, p. 68-70.
42 Beiner, 2006, p. 94, 151-152.
43 Id., p. 94 et 145. En 1798, la rumeur circule que Napoléon Bonaparte a débarqué en
Irlande pour aider au soulèvement : il est en réalité en Égypte, et ­c’est le général Humbert
qui ­commande les troupes françaises de ­l’expédition d­ ’Irlande.
266 ÉVA GUILLOREL

de 1798, même si d­ ’autres médias ont pu les influencer44 – interpelle


Peter Burke : cet historien émet ­l’hypothèse que ­l’Irlande, parce q­ u’elle
est une nation de vaincus, un pays partitionné et un territoire de forte
émigration, a besoin d ­ ’entretenir sa mémoire douloureuse, ­d’où une
obsession du passé là où des nations victorieuses peuvent s­’en défaire
plus facilement puisque ­l’histoire officielle leur donne raison45.
La ­confusion entre révoltes dans le souvenir oral est également
nette dans la mémoire de la guerre des Camisards, dont ­l’analyse est
bien documentée suite aux recherches de Philippe Joutard et de ses
successeurs46. Le phénomène de « camisardisation » du souvenir en
est l­’un des renouvellements marquants : des événements historiques
liés à des révoltes antérieures ou postérieures sont associées à la guerre
des Camisards c­ ontre Louis XIV dans la mémoire sociale. Dans les
témoignages recueillis dans les enquêtes orales postérieures à la seconde
guerre mondiale, l­’association (et parfois la c­ onfusion) est même faite
entre camisards et maquisards dans cette région de montagne qui a été
à la fois terre de Résistance et de refuge47.

CONCLUSION

Loin de l­ ’idée que la tradition orale est toujours c­ onformiste, certains


chants, musiques, légendes, prophéties, et plus largement les différentes
formes de discours diffusés par l­’oralité de génération en génération,
peuvent ainsi avoir une ­connotation subversive par leur ­contenu et surtout
en acquérir une par leurs usages au cours des siècles. Le fonctionne-
ment non linéaire de la mémoire tout c­ omme les effets de résonnance
entre les revendications et modes ­d’action des révoltes facilitent les
réemplois en associant des épisodes chronologiquement distincts mais
dont l­’association fait sens dans la mémoire sociale – parfois j­usqu’à
la ­confusion et l­’assimilation – parce q­ u’ils portent un même discours

44 Id., p. 333.
45 Burke, 1997, p. 54.
46 Joutard, 1977 ; Joutard, 1983 ; Cabanel, Joutard, 2002.
47 Joutard, 1977, p. 310-311 ; Joutard, Poujol, Cabanel, 1987.
La mémoire ­comme moteur de la révolte 267

de résistance. La mémoire transmise par ­l’oralité sous des formes plus


ou moins codifiées apparaît donc ­comme un acteur souvent négligé de
la révolte qui mérite pourtant que les historiens s­’y intéressent de près
­puisqu’elle peut non seulement accompagner mais aussi, en jouant sur
le rappel ­d’insurrections passées, parfois ­constituer ­l’un des moteurs
de la révolte.

Éva Guillorel
Normandie Univ., UNICAEN
ANR CURR
“RESTAURAR EL REINO DE FRANCIA
EN SU ANTIGUO ESPLENDOR”
Percepción y fundamentación histórica
en la sublevación de los malcontents (1574-1576)

Poco después de la célebre Matanza de San Bartolomé (1572), tuvo


lugar en Francia una sublevación nobiliaria que logró aglutinar a impor-
tantes nobles católicos y hugonotes, la c­ onocida ­como ­conjura de los
malcontents o nobles descontentos ­con su marginación en la Corte y en la
gestión de los asuntos de la Corona durante los reinados de los jóvenes
y débiles reyes Valois Carlos IX y Enrique III.
Se trata de lo que podríamos ­considerar c­ omo una rebelión nobi-
liaria tradicional1, aunando varios elementos presentes en este tipo
de revueltas: 1) un descontento ­contra innovaciones fiscales recientes;
2) el malestar por el relegamiento de los miembros de las principales
casas nobiliarias francesas, especialmente de los príncipes de sangre,
de las altas dignidades del reino, ocupadas por ­consejeros de origen
oscuro y, a menudo, extranjeros; 3) presencia entre los ­conjurados de
un miembro destacado de la familia real, en este caso, el joven príncipe
Francisco de Alenzón, segunda persona del reino por su ­condición
de hermano menor de Enrique III, también deseoso de mejorar su
situación en la Corte.
El elemento que distingue al levantamiento nobiliario de los mal-
contents de sublevaciones similares que habían tenido lugar en el pasado2,
viene marcado por el hecho de que entre 1574 y 1576, período en el
que se desarrolló la revuelta, Francia se encontraba en el ecuador de las
llamadas Guerras de Religión, libradas entre un grupo de nobles católi-
cos apoyados usualmente por la Corte y la nobleza hugonota francesa,
1 Informaciones detalladas sobre la c­ onjura en Holt, 1986; Jouanna, 1998, p. 228-241;
Jouanna, 1989a.
2 Arlette Jouanna se hace eco de varias revueltas nobiliarias medievales entendiéndolas
­como antecedentes de las acaecidas en la Primera Modernidad, Jouanna, 1989b.
270 JOSÉ LUIS EGÍO

liderada por Enrique de Navarra (el futuro Enrique IV) y Enrique de


Borbón-Condé, ambos príncipes de sangre.
Hasta 1572 habían tenido lugar, en efecto, las que se c­ onocen c­ omo
cuatro primeras Guerras de Religión3. Aunque la historiografía suele
hacer figurar la sublevación de los malcontents ­como una quinta guerra
o un quinto episodio de esta ­contienda, lo cierto es que se trataría más
bien de un paréntesis en la dinámica c­ onfesional que había motivado
los enfrentamientos precedentes. En el trienio 1574-1576 la violencia y
el desacatamiento hacia las instrucciones reales no son tanto el resultado
de motivaciones religiosas, sino de causas políticas, sociales y económi-
cas. En este sentido, las demandas propiamente religiosas, expresadas
en tratados y panfletos por los hugonotes partícipes de la insurrección
(peticiones ­como la de que se respetaran los lugares de ­culto protestante
en Francia, que se otorgara a los hugonotes el gobierno de una serie
de ciudades o plazas fuertes en las que poder refugiarse ante nuevas
persecuciones o que se celebrara un ­concilio nacional interconfesional
para solucionar el diferendo religioso en Francia) ocupan en el período
1574-1576 un lugar relativamente marginal4.
Al margen de las reivindicaciones c­ onfesionales que mencionamos
y que habían sido forjadas ya a mediados del siglo XVI, aparecen en
este momento una serie de demandas inter-­confesionales que recaban
tanto apoyos entre la nobleza calvinista c­ omo entre nobles católicos
marginados en la Corte, circunstancia excepcional que hará que nobles
de una y otra religión unan sus fuerzas en algunas campañas bélicas y
fuercen a Enrique III a c­ onvocar los Estados Generales, celebrados en
Blois desde finales de 15765.

3 La bibliografía sobre las Guerras de Religión es muy amplia. Algunos de los trabajos de
carácter más general y más citados: Jouanna, 1998; Crouzet, 1990; Le Roux, 2009.
4 Ver Mellet, 2007, p. 83-88.
5 El escrito que da cuenta c­ on mayor lujo de detalles de lo acaecido durante la reunión de
los Estados Generales en Blois lo firma un grande de la historia de las ideas políticas,
Juan Bodino, Relation journalière de tout ce qui ­s’est négotié en ­l’Assemblée généralle des Estats
[…], 1614. La mejor expresión de las demandas reformadas en los Estados de Blois la
encontramos en una Remonstrance escrita por el también polemista protestante Philippe
Duplessis Mornay, quien firma este escrito haciéndose pasar por un “buen católico francés”.
Remonstrance aulx Estats de Blois pour la paix sous la personne ­d’un Catholique romain […],
1824. Otro escrito significativo es la Remonstrance ­d’un bon catholique François, aux trois
Estats de France, qui s­ ’assembleront a Blois […], cercana en título y c­ ontenido al escrito de
Mornay y c­ onfundida a menudo c­ on la primera. En cuanto a las demandas católicas, ver
“Restaurar el reino de Francia en su antiguo esplendor” 271

LAS DEMANDAS CLÁSICAS DE LOS MALCONTENTS


Fiscalidad, marginación nobiliaria
y “usurpadores” extranjeros

El programa político u hoja de ruta de los malcontents es relativamente


simple y poco original. Se trata, ante todo, de una reacción a la hipotética
dominación de la Corona de Francia por un grupo de “maquiavélicos”
­consejeros italianos y lorenos, advenedizos que habrían “usurpado”
las posiciones que, por derecho, correspondían en el Consejo del rey
a Francisco de Alenzón, hermano del monarca (y, por ende, “segunda
persona del reino”) y al resto de príncipes de sangre y cabezas de las
principales casas nobiliarias francesas, ­considerados ­como ­consejeros
naturales de los reyes de Francia6.
Se exige, fundamentalmente, la expulsión de la Corte de c­ onsejeros
“extranjeros” ­como Enrique de Lorena, duque de Guisa, y de italianos que
ocupan posiciones prominentes en el reino ­como Alberto de Gondi, maré-
chal de Francia, Renato Birago, que en esta época ocupaba el importante
cargo de chancelier o Luis de Gonzaga, miembro también del ­consejo real
y ­comandante de los ejércitos del rey durante las Guerras de Religión7.
La inquietud de varias de las principales familias nobiliarias del reino
ante la promoción de estos extranjeros, vistos ­como advenedizos oscuros y
la arenga pronunciada por el obispo de Lyon, Pierre D ­ ’Épinac, Harengue prononcee devant
le roy, seant en ses Estats generaulx à Bloys, 1577.
6 Del Discours c­ ontre Machiavel de Gentillet a panfletos anónimos c­ omo el Discours merveilleux
y La France-Turquie y sin olvidar a Hotman, todas las plumas del movimiento insistieron
en la existencia de una ­conspiración extranjera ­contra la nobleza patria. “¿Acaso no son
los Maquiavelistas (italianos o italianizados) los que manejan los sellos de Francia, dictan
los edictos, arreglan los asuntos dentro y fuera del reino, ocupan las mejores posiciones y
disfrutan de las rentas del reino?”, Gentillet, Anti-Machiavel, 1968 [1576], p. 38. Hotman
denuncia también que el Consejo del rey está “formado por usurpadores y extranjeros”
y ­considera más adelante que esos extranjeros “saquean lo que le pertenece a la nobleza
francesa”, Remonstrance aus seigneurs gentilshommes et aultres faisans profession de la Religion
reformée en France […], 1574, p. 6, 23.
7 Se llega incluso a apuntar a los ­consejeros italianos y a la misma Reina Madre, Catalina
de Médici, ­como organizadores de un plan tiránico destinado a exterminar a la nobleza
francesa. La France-Turquie: ­c’est à dire, Conseils et moyens tenus par les ennemis de la Couronne
de France, pour reduire le royaume en tel estat que la Tyrannie Turquesque, 1576, p. 46. Ideas
semejantes en Remonstrance d­ ’un bon catholique François, p. 75; Discours merveilleux sur la
vie, actions et deportements de Catherine de Médicis, Royne-mère, 1995 [1575], p. 266.
272 JOSÉ LUIS EGÍO

usurpadores, es tal que lleva en este momento a casas nobiliarias católicas


­como la de los Montmorency, titulares de dignidades importantes c­ omo
las de ­condestable, mariscal o almirante en Francia desde el siglo XI,
a asociarse a los hugonotes8. Este es el ­contexto en el que ­comienzan a
forjarse, precisamente, una serie de alianzas que resultarán fundamentales
para que años más tarde Enrique de Navarra, antiguo líder del denomi-
nado partido hugonote, sea coronado c­ omo rey de Francia.
El segundo gran bloque de demandas de esta ­conjura bi-­confesional
­consiste en la anulación de toda una serie de pautas de gobierno imple-
mentadas desde décadas atrás, pero que los polemistas que trabajan al
servicio de los ­conjurados atribuyen estratégicamente a los “malvados”
e “impíos” ­consejeros extranjeros. Se reinterpretan o actualizan en este
momento peticiones característica y tradicionalmente nobiliarias c­ omo
la de que se c­ onvoquen ­con frecuencia los Estados Generales, para que
sean los nobles laicos e integrados en el clero los que dirijan la gestión
de los asuntos del reino y no la camarilla de c­ onsejeros de ­confianza del
rey9. Otras peticiones tienen que ver c­ on las magistraturas judiciales,
exigiéndose que se anule la venta de los cargos en los Parlamentos10 y
que éstos sean otorgados a la nobleza de sangre de cada región, para
que ­continúe así, en cierto modo, la dinámica de las señorías jurisdic-
cionales feudales.
La fiscalidad es el tercer gran campo de batalla en estas peticiones. La
nobleza ve c­ on desconfianza, en términos generales, la progresiva inde-
pendencia que los reyes han ido adquiriendo gracias a los prestamistas que

8 Consultar el escrito publicado por uno de los miembros destacados de esta casa nobilia-
ria para justificar su adhesión al levantamiento malcontent: De Montmorency-Damville,
Déclaration et Protestation de Monseigneur de Dampville maréchal de France […], 1872-1905,
col. 1105-1111. La historia de esta importante saga familiar en Kermina, 2002.
9 Exigencia, presente, por ejemplo, en Remonstrances de los tratadistas hugonotes Gentillet
y Hotman. [Innocent Gentillet], Briève remonstrance à la noblesse de France sur le faict de la
Declaration de Monseigneur le Duc ­d’Alençon […], 1576, p. 211. Remonstrance aus seigneurs
gentilshommes, p. 37.
10 El estudio clásico sobre el tema es el de Mastellone, 1972. Innocent Gentillet llega a
­considerar la c­ ompra de oficios en los Parlamentos y otras instituciones políticas y judi-
ciales no sólo c­ omo la causa del desgobierno y la deficiente administración de justicia
en Francia, sino incluso ­como una causa directa de la guerra civil: “Porque desde que
la puerta de los oficios se abrió para los extranjeros, los ambiciosos y los avaros, que no
pudiendo acceder a ellos por virtud, los obtuvieron c­ on dinero, y desde que el número
de magistrados ha crecido tanto, no se han visto en Francia más que un montón de
asesinatos, masacres, robos y guerras civiles”, Brieve remonstrance a la noblesse, p. 157.
“Restaurar el reino de Francia en su antiguo esplendor” 273

financian los ejércitos regios copados de mercenarios y son indispensables


en cada campaña militar. Para volver a hacer al rey dependiente de las
armas y recursos de la nobleza, se pide la expulsión de Francia de todos
los banqueros extranjeros y una restricción sustancial en la actividad del
crédito a interés11. Esta motivación no es, lógicamente, la que resaltan
los polemistas al servicio de los malcontents, quienes, estratégicamente,
apuntan, más bien, a problemas perceptibles por todos los franceses y
que suscitan quejas generalizadas en esta época.
Uno de estos problemas es la subida generalizada de los impuestos
asociados a productos de primera necesidad, en particular, de los derechos
de aduana, que en esta época encarecen muchísimo alimento y vestido.
Se trata de una queja ­con un fundamento real, pues en las décadas de
1560 y 1570 son varios los extranjeros a los que, c­ omo ­contrapartida de
los préstamos realizados a la Corona, se les entrega el cobro en arriendo
de las tasas regias. Sabemos por los trabajos de historia económica que en
ciudades ­como París, Marsella, Rouen o Lyon banqueros italianos ­como
Sardini, el clan de los Gondi (uno de cuyos miembros era este Alberto
de Gondi que llegó a ser mariscal de Francia y gobernador de la región
de la Provenza en la década de 1570)12 o Dadiaccetto monopolizaron
el arriendo de las tasas regias mediante la creación de sindicatos de
banqueros-arrendatarios c­ omo las Cinq Grands Fermes13.

MEMORIA DE REVUELTAS NOBILIARIAS ANTERIORES


Y JUSTIFICACIÓN DE LA INSURRECCIÓN ARMADA
Ligue du bien public y guerre folle

Por razones de espacio y pertinencia no podemos entrar en muchos


detalles sobre las motivaciones específicas que propiciaron la ­conjura de
los malcontents. Lo que nos interesa, más bien, respondiendo al objetivo
general planteado por los organizadores de este evento y, en particular,

11 La Brieve remonstrance a la noblesse resulta nuevamente ilustrativa respecto a las peticiones


de los insurrectos a este respecto, p. 159-160.
12 Ver detalles sobre su vida y acciones en JullienPommerol, 1953.
13 Heller, 2003, p. 165-166.
274 JOSÉ LUIS EGÍO

de esta mesa dedicada a los efectos subversivos de la rememoración, es


­considerar la forma en la que la memoria de revueltas nobiliarias prece-
dentes fue vehiculada en algunos de los tratados, panfletos y declaraciones
publicadas durante la rebelión malcontent ­con el objetivo de legitimar
una nueva toma de armas nobiliaria y las reiteradas muestras de desobe-
diencia hacia las instrucciones regias que se produjeron en este período.
En el caso de los malcontents es, precisamente, esta memoria de revuel-
tas previas, especialmente de la Liga del Bien Público que plantó cara
a Louis XI en 146514, la que desempeña un papel performativo clave
en la preparación o estallido de la c­ onjura.
Como bien apuntaban los organizadores del Congreso Formas y usos
de la Memoria de las Revueltas y Revoluciones en Europa pensando en un
fenómeno que es una auténtica c­ onstante, aunque a veces no suficien-
temente subrayada en la historiografía sobre las revueltas de la Edad
Moderna, el papel que juega la memoria en estos c­ onflictos no es sólo el
de registrar, una vez que cesan las hostilidades, las distintas campañas y
reivindicaciones integradas en el levantamiento. La memoria es, antes que
registro del hecho bélico, un elemento performativo determinante para
entender cómo se va fraguando la rebelión violenta y c­ omo se justifica
la misma una vez desatada.
Si atendemos a la literatura polémica publicada durante la revuelta
de los malcontents podemos ver cómo, en este caso, resulta totalmente
justificado hablar de la memoria ­como auténtico motor del levantamiento
y de una memoria entendida al mismo tiempo ­como mirada y referencia
­continua a revueltas anteriores y c­ omo idealización o mitificación de
un “buen orden antiguo”, elemento ideológico-discursivo en el que nos
­concentraremos en la c­ onclusión de nuestro escrito.
En las obras del tratadista más activo durante la c­ onjura de los
malcontents, el jurista hugonote Innocent Gentillet, podemos observar
­con gran claridad cómo se articulan los distintos elementos menciona-
dos. Entre 1574 y 1576, Gentillet escribió una primera Remonstrance à
Henri III transmitiéndole los principales motivos de queja de los nobles
­conjurados15, una segunda Remonstrance à la noblesse de France16 apoyando

14 Un estudio brillante de la importancia de la historiografía sobre el reinado de Luis XI


para la historia política de la monarquía francesa en Bakos, 1997.
15 [Innocent Gentillet], Remonstrance au roy tres-chrestien Henry III. de ce nom […], 1574.
16 Briève remonstrance à la noblesse.
“Restaurar el reino de Francia en su antiguo esplendor” 275

la Declaration que el hermano del rey, Francisco de Alenzón publicó en


septiembre de 1575 para justificar su adhesión a la ­conjura y un amplio
Discours ­contre Machiavel17, destinado a desenmascarar a los cortesanos
italianos que mencionamos y a derivar las innovaciones políticas que, en
teoría, estaban implementando en Francia, de los escritos del “malvado”,
“irreverente” y “ateo” Nicolás Maquiavelo.
Gentillet es un tratadista fuertemente influido por la tradición de
pensamiento de la monarchie réglée o regulada, una forma de entender la
autoridad de los reyes de Francia c­ omo una suma de potestades diversas
que, para garantizar su óptimo funcionamiento, debían ser ejercidas ­con
la participación de los príncipes de sangre, los jefes de las casas nobiliarias
más importantes, las principales dignidades eclesiásticas del reino y los
oficiales reales, integrados todos ellos en una c­ ompleja escala jerárquica
coronada por la sagrada figura del rey.
Esta tradición de pensamiento había sido sistematizada a principios
del siglo XVI (1519) en La Monarchie de France18 del obispo y ­consejero
de Luis XII, Claude de Seyssel. Para Seyssel, la clara separación de los
Estados en Francia y el acuerdo y apoyo mutuo de rey y nobleza era una
característica fundamental de la Corona de Francia y una de las claves
de su pervivencia en el tiempo19. Seyssel fue defenestrado poco después
de escribir su Monarchie de France por un joven y ambicioso Francisco I
poco proclive a someter a c­ onsulta sus iniciativas políticas. Sin embargo,
en el ecuador de las Guerras de Religión, el ideario seysseliano de la
monarchie réglée o tempérée seguía estando muy presente tanto en las obras
de polemistas hugonotes c­ omo Gentillet, c­ omo en tratadistas católicos
coetáneos de la talla de Loys le Roy o Guillaume La Perrière20.
17 [Innocent Gentillet], Discours […] ­contre Nicolas Machiavel Florentin […], 1576. Hemos
citado el texto en notas anteriores recurriendo a una edición c­ ontemporánea publicada
por Droz en Ginebra bajo el título Anti-Machiavel.
18 Claude De Seyssel, La Monarchie de France, 1961 [1519].
19 Para Seyssel: “Hay además, otro orden y forma de vivir en este reino, tendente a ese
mismo fin, que ha sido muy elogiado y que mantiene la unión y acuerdo entre todos los
Estados. Y es que éstos fueron tan bien creados y mantenidos, que es muy difícil que
el reino decaiga mientras se los ­conserve. Puesto que cada uno de los Estados tiene sus
derechos y preeminencias acordes a su calidad y apenas puede uno oprimir a otro ni
­conspirar c­ on los demás c­ ontra el Jefe y Monarca”, La Monarchie de France, p. 120-121.
Nuevas perspectivas sobre el pensamiento del obispo saboyano en Eichell-Lojkine (dir.),
2010.
20 Sobre Seyssel y su enorme influencia en el pensamiento político francés de la segunda
mitad del siglo XVI, ­consultar el valiosísimo trabajo de Sciacca, 2005.
276 JOSÉ LUIS EGÍO

Volviendo a Gentillet, resulta interesante atender c­ on detalle a la


manera en la que enmarcó la sublevación de los malcontents en la historia
gloriosa de una Corona marcada por el recurso de la Providencia divina
a los príncipes de sangre cada vez que propósitos oscuros de dominación
tiránica se habían cernido sobre Francia. Para Gentillet, Dios había
favorecido, por ejemplo, en una coyuntura muy similar a Carlos, Duque
de Berry y hermano de Luis XI, cuando a la cabeza del grupo de nobles
coaligado para la defensa del Bien Público, se levantó en armas ciento
diez años atrás, no para oponerse al rey, sino para golpear, ­como sostenía
Gentillet en su Remonstrance a la nobleza francesa de 1576, “el apetito
de algunas personas de baja ­condición y escaso valor por las cuales
el Rey se dejaba gobernar y por cuyos ­consejos se imponían grandes
­contribuciones e impuestos al pueblo21”.
La pauta de argumentación seguida por Gentillet durante la c­ onjura
malcontent fue, precisamente, la acumulación de exempla históricos.
Evocados de una forma polémica permiten al tratadista equiparar los
problemas del pasado y del presente, proponiendo, al mismo tiempo, una
idéntica manera de reparación de los mismos: un alzamiento nobiliario
triunfante al que debía seguir una negociación o capitulación cara a cara
­con el rey (separado ya de los malvados c­ onsejeros que lo orientaban
erróneamente), en la que rey y nobleza tomarían c­ onjuntamente las riendas
de los principales asuntos del reino. En la Remonstrance a Enrique III de
1574 observamos, por ejemplo, elogios a la sabia rectificación de Luis XI
tras ser derrotado por los nobles ­conjurados en la Ligue du Bien Public.
Se trata de un ejemplo de historia patria que Gentillet se ­complace c­ on
frecuencia en c­ ontraponer a la ­conducta imprudente y ­conducente a la
catástrofe de tiranos depuestos por empeñarse en gobernar de manera
absoluta o tiránica c­ omo el Roboam del Antiguo Testamento, Tarquino
el Soberbio o Eduardo II de Inglaterra. Señala Gentillet:
El Rey Luis XI (príncipe hábil y astuto c­ omo no fue otro en Francia) se
­comportó mal cuando accedió al trono, dando marcha atrás en varios asuntos
y prescindiendo de muchos buenos y viejos servidores de la Corona […]. Esa
fue la causa de que esos señores descontentos suscitaran una guerra civil ­contra
el Rey, a la que llamaron el Bien Público […]. Reconociendo su ­culpa, ese
sabio Rey intentó por todos los medios a su alcance que acabara la guerra, y
siguió en este asunto la recomendación y ­consejo de su buen amigo Francisco

21 Brieve remonstrance a la noblesse, p. 173.


“Restaurar el reino de Francia en su antiguo esplendor” 277

Sforza, duque de Milán, quien le aconsejó que no rechazara nada de lo que se


le pedía ­con tal de lograr la paz. De manera que satisfaciendo las demandas
de sus súbditos, logró acabar ­con esta guerra civil22.

La recomendación por vía histórica que, en el ­contexto de la suble-


vación malcontent, hacía Gentillet a Enrique III para que aceptara las
exigencias de los nobles alzados no podía ser más clara. Vemos incluso
­como la denominación de ambas c­ onjuras, la Ligue du Bien Public y la de
los malcontents se fusiona, al definir Gentillet a los sublevados de 1465
­como “señores descontentos”. Otras sublevaciones nobiliarias, c­ omo la
encabezada por el futuro Luis XII, al que Gentillet ponía en paralelo
­con Francisco de Alenzón por su ­condición de “segunda persona de
Francia” durante el reinado de Charles VIII, la ­conocida ­como Guerre
folle de 1485-148823, fue también agrupada por el jurista hugonote
bajo la misma categoría de c­ onjuras destinadas a apartar de la Corte
a ­consejeros innobles e indignos que, ocupando posiciones usurpadas,
alteraban el orden tradicional del reino24.
Aunque no ­contamos ­con espacio para entrar a ­comparar en este
texto los alegatos de Gentillet ­con los formulados por otros juristas en
revueltas similares acaecidas durante el llamado Antiguo Régimen, por
lo que muestran varias de las c­ ontribuciones publicadas en este mismo
volumen colectivo nos parece que el papel que la historia y la memoria
tienen c­ omo vía de argumentación preferente en los tratados jurídicos y
panfletos políticos de Gentillet sería extensible a otros escritos, juristas
y revueltas. En el caso del hugonote resulta fundamental su apelación a
sublevaciones victoriosas precedentes, cuyas justas motivaciones habían
sido reconocidas en capitulaciones o tratados de paz firmados por reyes
no vencidos, sino, más bien, esclarecidos acerca de errores precedentes
o liberados del influjo pernicioso de los flatteurs o halagadores tiránicos.
Tales precedentes se presentan en el discurso polémico de Gentillet c­ omo
22 Remonstrance a Henri III, p. 67-68.
23 Una ­compilación de fuentes de la época sobre esta revuelta tardo-medieval en Zeller
(­comp.), 1888.
24 “En tiempos del Rey Carlos VIII algunos ­consejeros del Rey hacían varias cosas que no
eran buenas, desdeñando c­ onsultar los asuntos del Reino a Luis, Duque de Orleans (más
tarde Rey, ­con el nombre de Luis XII), aunque fuera la segunda persona de Francia. Esa
fue la causa de que ese buen Duque, no queriendo soportar más el que se le apartara y
despreciara de ese modo, se levantara en armas ­contra los gobernadores del Rey”, Brieve
remonstrance a la noblesse, p. 174.
278 JOSÉ LUIS EGÍO

elementos probatorios de la justicia o legitimidad del levantamiento


encabezado por Francisco de Alenzón, muy similar ­como decíamos en
sus principales elementos a frondas nobiliarias anteriores.
La idea general que Gentillet repite en sus escritos es que la viola-
ción de la escala jerárquica natural que asignaba un rol preeminente a
los príncipes de sangre y a las principales casas nobiliarias del reino en
la gestión de los asuntos de la Corona, era una grave violación de una
ley fundamental del reino que ponía en juego la misma supervivencia
del orden estamental de la monarquía francesa. Ante el peligro de
hundimiento o transformación radical (hoy diríamos revolucionaria)
del edificio tripartito de la monarquía, los nobles estaban legitimados
para expresar su descontento desobedeciendo las instrucciones regias y
persiguiendo a mano armada a los que ­consideraban responsables de
innovaciones políticas intolerables. Así lo habían hecho los nobles a lo
largo de la historia y, de acuerdo a Gentillet, el éxito c­ ontinuo de esta
ligas en defensa del bien público, reflejado en las principales crónicas
de la monarquía francesa, mostraba la c­ onformidad de la Providencia
divina c­ on las iniciativas nobiliarias destinadas a evitar el gobierno
tiránico de los príncipes o la disolución del orden estamental. Afirma
Gentillet, en este sentido:
Se podrían alegar a este respecto muchos ejemplos extraídos de las historias de
Roma y de otros reinos y monarquías en las que Dios ha suscitado a menudo
a personas heroicas para oponerse a las tiranías que los malvados tramaban e
intentaban. Será suficiente, sin embargo, c­ on estos tres ejemplos domésticos,
para demostrar que lo que Monseigneur [Francisco de Alenzón] intenta, lo hace
siguiendo el ejemplo de sus ancestros, de cuya sangre es descendiente y cuyas
virtudes heroicas pretende imitar, ­con la gracia de Dios25.

Como deja claro la peculiar narrativa histórica de Gentillet, Francisco


de Alenzón y los malcontents no hacían sino repetir pautas anti-tiránicas
ancestrales y ­conductas que la tradición historiográfica en la que se
enmarcan los escritos del hugonote c­ onsideraba virtuosas y hasta heroicas.
Las principales fuentes históricas en las que se fundamenta la labor de
Gentillet ­como polemista político y jurista al servicio de los malcontents
son las crónicas y memorias escritas en los siglos XIV y XV por autores
­como Monstrelet, Froissart o Commynes. A los que ­conocen la historia
25 Brieve remonstrance a la noblesse, p. 174-175.
“Restaurar el reino de Francia en su antiguo esplendor” 279

francesa de este período no les sorprenderá esta selección, sobre todo,


si ­consideramos que cronistas ­como Commynes fueron también casi
rebeldes de profesión. De Commynes, por ejemplo, ­conocemos tanto su
­condición de impulsor ideológico principal de la Guerre folle de la década
de 1480 c­ ontra Carlos VIII26 ­como la estrecha relación existente entre
sus obras históricas y su acción política27. Apoyándose en Commynes,
Gentillet no sólo habría encontrado numerosos ejemplos de insurrec-
ciones nobiliarias triunfantes, sino también un modelo de hombre de
acción, historiador y jurista que el hugonote aspiraba, probablemente,
a reencarnar en un nuevo ­contexto temporal y geográfico.

MEMORIA DE LAS PERSISTENTES


REVUELTAS PLEBEYAS (CHAPERONS BLANCS, MAILLOTINS)
Y DEFINICIÓN EN NEGATIVO
DEL LEVANTAMIENTO MALCONTENT

Las justificaciones histórico-jurídicas aportadas por Gentillet al


levantamiento malcontent son interesantes también en la medida en la
que el hugonote encontró en las crónicas del pasado no sólo modelos
positivos de hombres y acciones a imitar, sino también referencias o hitos
de rebeldía de los que distanciarse: hablamos de la importante presencia
que tienen en sus escritos las c­ onjuras plebeyas, utilizadas para definir
en negativo la propia ­conjura de los malcontents. En ­comparación ­con el
levantamiento heroico de los malcontents, los levantamientos populares son,
para Gentillet, siempre ilegítimos. Lo son desde su mismo nacimiento,
ya que en ellos no ­concurren personas de calidad ­como príncipes de
sangre o miembros de las altas casas nobiliarias, ­consejeros naturales del
rey que legitiman ­con su presencia cualquier movimiento ­contestatario.
La dimensión anti-plebeya del ejercicio de memoria realizado por
Gentillet resplandece cuando recuerda, en clave polémica, revueltas c­ omo
la de los “chaperons de livree” o Chaperons Blancs y de los Maillotins,
revueltas urbanas que se produjeron en Flandes y en París a c­ omienzos
26 Blanchard, 2000, p. 207-221.
27 Perspectivas generales en Blanchard, 1996; Blanchard (dir.), 2012.
280 JOSÉ LUIS EGÍO

del reinado de Carlos VI28 y de las que Gentillet había podido tener
noticias leyendo las crónicas de Froissart29. Se trata, en ambos casos, de
­conjuras aplastadas c­ on gran violencia por el rey francés y la nobleza
pero que, durante algunos meses, llegaron a amenazar la estabilidad y
pervivencia de la monarquía francesa. Los ejemplos de ­conjuras de gente
“de baja estoja” que Gentillet citó ­con cierto desprecio en el Discours
­contre Machiavel permiten ilustrar bien su posición hacia las demandas
del pueblo. Sensible hacia sus sufrimientos y partidario de la moderación
tributaria, Gentillet ­comprendía que se produjeran motines populares
en situaciones extremas, pero no los justificaba. Al ­contrario, ­como buen
defensor del orden estamental tradicional, su intención en el Discours
­contre Machiavel fue más bien la de aconsejar a los reyes el modo idóneo
y ordinario de fijar tributos para evitar tener que enfrentarse a una
­contestación violenta. Sostiene Gentillet pensando en estas ­conjuras:
Lo mismo ha sucedido a menudo en Francia, ya que en tiempos del rey
Felipe Augusto El Conquistador, en tiempos de San Luis, en tiempos del rey
Juan y en muchas otras ocasiones, los Judíos y los Italianos que tenían bancos
y ejercían la usura en Francia, arruinando al pueblo, fueron expulsados del
reino, prohibiéndoseles también su entrada. Las facciones de los Maillotins, de
los Chaperons de livree y otras invenciones populares semejantes, tendentes a
las sediciones y guerras civiles, no tuvieron otro fundamento que éste, puesto
que siempre fueron personas necesitadas y de baja ­condición los autores y
ejecutores de tales facciones y sediciones30.

Nótese c­ omo Gentillet distingue ­conceptualmente entre el “soulèvement”


o levantamiento heroico, categoría bajo la cual se incluiría la c­ onjura de
los malcontents, y las “inventions populaires”, “séditions”, “guerres civiles”
o “factions”, términos que utiliza para designar las revueltas plebeyas.
Estas distinciones resultan de gran interés para entender el ­complejo
mapa c­ onceptual utilizado por los agentes históricos a la hora de des-
cribir revueltas y revoluciones, problemática a la que refieren varios de
los trabajos publicados en este volumen colectivo.
Otro de los propósitos discursivos del jurista hugonote en este pasaje
del Discours ­contre Machiavel es el de exculpar a la nobleza y reyes galos
28 Sublevaciones estudiadas en la obra clásica de Mirot, 1905.
29 Sobre la revuelta de los Maillotins ver el Libro II, cap. 151 de las Chroniques de Jean
Froissart. Buchon (ed.), 1838.
30 Anti-Machiavel, p. 566.
“Restaurar el reino de Francia en su antiguo esplendor” 281

por la opresión violenta y los abusos fiscales que suelen estar detrás de
las revueltas plebeyas. Siguiendo las pautas generales del argumentario
anti-extranjero de los malcontents, Gentillet apunta de nuevo a un cabeza
de turco, en esta ocasión banqueros italianos y judíos, para descargar
en estas ­comunidades “extranjeras” la responsabilidad de los motines
populares suscitados c­ ontro el cobro de impuestos excesivos.
Como todo ejercicio de memoria política, también éste tuvo una tra-
ducción práctica casi inmediata. Sabemos, por ejemplo, que entre 1579
y 1580 tuvo lugar una importante insurrección campesina y artesana en
la región del Delfinado, de la que Gentillet era oriundo. Las revueltas
populares habían c­ omenzado en febrero de 1579 c­ on el ataque a una de
las posiciones fortificadas de los reformados, Châteaudouble, gobernado
a golpe de exacciones por el capitán hugonote La Prade. En el verano de
ese mismo año, la Reina Madre Catalina de Médici estaba de visita en la
región para intentar poner de acuerdo a nobles protestantes y católicos
y se inquietaba viendo el futuro de la Corona y de la nobleza de ambas
religiones ­comprometido ante la amenaza creciente que representaba el
hastío campesino por las exacciones fiscales. En una de las cartas que
dirigió a su hijo Enrique III, le informaba ­con preocupación, precisamente,
de que había escuchado de boca de los nobles delfineses que los líderes
de una liga de “villanos” alzaban un rastrillo para agitar al pueblo y lo
­convocaban al toque del cuerno helvético31. Es sabido que rastrillo y
cuerno son dos símbolos esenciales del republicanismo anti-nobiliario
suizo32 cuyo espectro atraviesa, ­como vemos, los Alpes en esta fase o
episodio predominantemente social de las llamadas Guerras de Religión.
La mezcla de este influjo republicano y de la suma de exacciones
fiscales impuestas a los campesinos y artesanos de la región para finan-
ciar los ejércitos nobiliarios protestantes y católicos desde el c­ omienzo
de las Guerras de Religión es un cóctel explosivo que no tarda en
explotar. La insurrección plebeya se hace generalizada en el Delfinado
en febrero de 1580 y, curiosamente, motiva una tregua general entre
nobles católicos y protestantes. Con una finta maestra, los protestantes,
por intermediación precisamente de Gentillet, que en este período ocu-
paba el cargo de secretario del caudillo protestante delfinés Lesdiguières,
31 Roman, 1890, p. 343.
32 Hemos analizado las características del republicanismo suizo del siglo XVI y la atracción
que ejercía en la Francia del último cuarto del siglo XVI en el artículo Egío, 2013.
282 JOSÉ LUIS EGÍO

prometieron a los sublevados una importante ayuda militar si persistían


en su enfrentamiento ­con los nobles católicos en lugar de negociar ­con
ellos. Evidentemente, la ayuda militar de los nobles hugonotes nunca
llegó a localidades ocupadas por los sublevados ­como Romans o Valence.
Los sublevados fueron desalojados ­con violencia de ambas plazas. En
abril de ese mismo año las tropas reales y nobiliarias los asediaron en
Moirans y 900 campesinos y artesanos fueron ejecutados y despedazados
por unos magistrados reales deseosos de eliminar la amenaza popular
de una vez por todas. La cifra espectacular de muertos y la extrema
violencia de la represión la encontramos en las mismas fuentes de la
época, informes escritos por oficiales reales para probar lo que ­consideran
un gran servicio militar hecho a la Corona33.
En relación ­con la aversión de Gentillet y los malcontents a las subleva-
ciones populares, quisiera apuntar todavía otra idea clave para entender
la naturaleza de su levantamiento y de otras revueltas nobiliarias en el
Antiguo Régimen. Es importante mencionar que, en este caso, asistimos
claramente a una dinámica que opone rebelión a transformación radi-
cal, es decir, se justifica una revuelta ­con argumentos tradicionalistas
­considerándola c­ omo la solución de urgencia necesaria para impedir
que se lleven a cabo esos grandes cambios sociales y económicos que
hoy designamos c­ on el nombre de revolución. La palabra no figura, por
cierto, en el léxico político de Gentillet o los malcontents.
Si aparece, revestido de c­ onnotaciones muy negativas otro c­ oncepto
que tiene que ver ­con el tiempo. Se trata del ­concepto de innovation,
­concebido, en primer lugar, c­ omo alteración ilegítima de unas leyes
fundamentales del reino que habrían nacido ­con la monarquía francesa
y serían inmutables y, en segundo lugar, ­como afrenta, precisamente, a
la memoria y a la historia gloriosa de esa monarquía puesta en peligro
por las propuestas de cambio. En términos generales, podemos decir
que el peso de la historia y la memoria en justificaciones tradicionalistas
­como las proporcionadas por Gentillet para la causa de los malcontent es
tal que toda innovación política o fiscal se evalúa siempre ­con mucho
33 De Mézeray es bastante explícito a la hora de describir la represión de la revuelta de
campesinos y artesanos, que derrotada en Valence y Romans capituló tras el asedio de
Moirans a manos de un ­comandante de las tropas reales (llamado Mandelot) inmisericorde,
« habiéndolos despedazado a todos para vengar la muerte de un sobrino suyo muerto en
un ataque », François Eudes de Mézeray, Histoire de France, 1685 [1643-1651], vol. III,
p. 488.
“Restaurar el reino de Francia en su antiguo esplendor” 283

desconfianza o, simplemente, es rechazada abiertamente en una retórica


que equipara novedad a error.

EL RECUERDO IDEALIZADO
DE UN BUEN ORDEN ANTIGUO,
MOTOR DEL DESCONTENTO

Antes de cerrar mi exposición me gustaría ­concentrarme en otro


elemento que c­ onsidero estrechamente relacionado c­ on la función de
motor que la invocación de revueltas precedentes tuvo en el desarrollo
del levantamiento malcontent. La idea en la que quiero insistir en último
lugar tiene que ver ­con otra de las grandes creencias o idearios ­compartidos
por la amplia mayoría de los polemistas políticos del siglo XVI, a saber,
la creencia en que los tiempos pasados fueron mejores que un siglo
caracterizado, para Gentillet y muchos coetáneos, por la innovación y
el desorden social, fiscal o religioso.
Como mostró hace ya algunas décadas un sugerente trabajo de
Claude-Gilbert Dubois, titulado Celtes et Gaulois au xvie siècle. Le déve-
loppement littéraire ­d’un mythe nationaliste34, el siglo XVI es un siglo de
creación y divulgación de numerosos mitos en torno a la gran longevidad
y superioridad histórica de la monarquía francesa c­ on respecto a otras
monarquías y repúblicas. Las obras de los Le Maire de Belges, Guillaume
du Bellay o Guillaume Postel se hacen eco de tópicos antiguos y los
amplifican aportando nuevos argumentos histórico-ideológicos que per-
miten presentar a Francia c­ omo la más insigne y duradera monarquía
del mundo, elegida incluso por Dios desde los tiempos de Clovis y los
merovingios para difundir el Evangelio entre los pueblos bárbaros de
Europa y jugar un papel preponderante respecto a los demás poderes
temporales y espirituales del orbe.
La nostalgia temporis de Postel y ­compañía está especialmente desar-
rollada en el caso de los polemistas hugonotes, cuyos deseos de vuelta al
origen o a la pureza primitiva se reflejan tanto en sus escritos políticos
­como en los que tienen que ver ­con la religión cristiana. Trasladando,
34 Dubois, 1972.
284 JOSÉ LUIS EGÍO

en cierta forma al ámbito político el propósito de purificar a la Iglesia


de añadidos tardíos y perjudiciales, tanto Gentillet c­ omo Teodoro de
Beza o Lambert Daneau, parecen soñar en esta época c­ on recuperar un
“buen orden antiguo” que correligionarios c­ omo Hotman (en su famosa
Franco-Gallia, publicada en 1573) hacen remontar incluso a los reinados
de galos, francos y merovingios35.
Con un recorrido histórico algo más modesto, Gentillet, que se basa
fundamentalmente en la historia bíblica, la historia del Imperio Romano
y la historia de la Francia tardo-medieval, intentó definir en su Discours
­contre Machiavel de 1576, al que ya hemos aludido y cuyo título c­ ompleto
reza, curiosamente, Discours sur les moyens de bien gouverner et maintenir en
bonne paix un royaume ou autre principauté: divisez en trois parties, asavoir,
du c­onseil, de la religion et de la police que doit tenir un prince: c­ontre Nicolas
Machiavel Florentin, las que habrían sido las pautas de gobierno empleadas
históricamente por los reyes franceses, que el jurista hugonote ­concibe
también ­como muy similares a las máximas de gobierno seguidas por
los mejores Emperadores romanos.
Gentillet ­considera, en este sentido, la historia del Imperio Romano
y, sobre todo, de la monarquía francesa, ­como la de un dominio clemente
y magnánimo, en ­consonancia ­con el carácter puro y bienintencionado
de sus súbditos. Apunta, además, a la automoderación tradicional de
los reyes franceses en el uso de su puissance c­ omo causa histórica fun-
damental de los grandes éxitos alcanzados por monarcas ­como Felipe
de Valois (Felipe VI), Carlos VII, el Luis XI post Liga del Bien Public
o un Luis XII muy elogiado en la literatura política de este período36.
35 En el caso de Hotman, la investigación sobre las tradiciones políticas de estos pueblos
alcanza los lejanos tiempos en los que Tácito escribió su De origine et situ Germanorum. Las
libertades políticas de los francos, de los que Hotman hacía nacer a los fundadores de la
monarquía francesa, le servían ­como elemento de ­contraste c­ on la deriva tiránica que, en
su opinión, había experimentado el reino bajo los Valois: “[…] los Franceses aprendieron,
más bien, esta forma de erigir su República de los Alemanes que de los Galos, es decir,
de su misma gente, visto que Tácito en el Libro sobre las costumbres de Alemania lo escribe
así. Los Reyes, dice él, no tenían un poder absoluto ni infinito. Por c­ onsiguiente, es fácil
deducir que no hay una forma de gobierno menos c­ onforme a un dominio tiránico que
lo era aquella”, François Hotman, La Gaule françoise […], 1574, p. 94-95.
36 Gentillet expone su visión retrospectiva sobre el ejercicio del poder por parte de los reyes
franceses en la epístola c­ on la que dedicó su tratado antimaquiavélico a Francisco de
Alenzón, al que exhorta a ­comportarse de acuerdo a los ejemplos de moderación propor-
cionados por sus ancestros: “Y en lo tocante a la policía, su Excelencia podrá ver también
notables ejemplos de sus progenitores, los reyes de Francia, y de los más grandes y antiguos
“Restaurar el reino de Francia en su antiguo esplendor” 285

Desde esta perspectiva, el motor de la revuelta malcontent sería tanto


el recuerdo de las revueltas nobiliarias precedentes, ­concebidas ­como
respuestas legítimas a iniciativas tiránicas, ­como la nostalgia por un
“buen orden antiguo”. De manera muy idealizada, este orden preté-
rito es descrito c­ omo un largo período de tiempo: se extiende a varios
siglos marcados por la amistad fraternal y el amor sincero entre reyes y
nobles, el gobierno de los reyes en el marco de una c­ ontinua ­consulta y
reconocimiento a sus pares y, en general, por el trato dulce y benigno
imperante en las relaciones entre monarcas y súbditos.

GENTILLET Y MAQUIAVELO
Una disputa en torno a la gestión de la memoria
y el oficio de polyhistor

En la Tercera parte de su Discours c­ ontre Machiavel, la más amplia de la


obra, Gentillet presenta diversos episodios históricos de los reinados que
mencioné, extraídos también de las crónicas de Froissart, Commynes o
Monstrelet. Su intención es la de definir un modelo de gobierno o police
capaz de c­ ontrariar las “innovaciones” crueles y tiránicas recomendadas
por Maquiavelo en escritos ­como el Principe o los Discorsi sopra la prima
deca di Tito Livio37. La historia es el material fundamental empleado por
Gentillet para ­construir este prototipo modélico de buen orden antiguo,
Emperadores romanos, en los cuales queda claro que los príncipes que se c­ ondujeron ­con
dulzura, clemencia y justicia y que recurrieron también a la moderación y la bondad
en el trato c­ on sus súbditos, prosperaron siempre mucho y reinaron largo tiempo. Al
­contrario, los príncipes crueles, malvados, pérfidos y que oprimían a sus súbditos, fueron
destronados rápidamente y se pusieron a sí mismos y a su estado en peligro, cuando no
lo llevaron a la ruina. No reinaron largo tiempo y, en la mayoría de los casos, acabaron
sus días de una forma sangrienta y violenta […]”, Anti-Machiavel, p. 20-21.
37 Para que la paz pudiera regresar a Francia, Gentillet ­consideraba indispensable no sólo
el que fueran apartados de la Corte los italianos responsables de las guerras civiles, sino
también el que su ideólogo, un Maquiavelo « impostor » al que apuntaba ­como autor
intelectual de la matanza de San Bartolomé y otros crímenes de Estado fuera desterrado del
reino: “[…] para que se alcance una buena paz, es necesario que se prohiba perpetuamente
a Maquiavelo en Francia, puesto que es el más grande mentiroso e impostor que existió
nunca, habiéndose gobernado los antiguos Romanos, Griegos, Franceses y todas otras
Monarquías y Repúblicas bien ordenadas, de una forma totalmente ­contraria a la que él
286 JOSÉ LUIS EGÍO

forjado ­con la acumulación de c­ ontraejemplos patrios y también de


exempla clásicos. El polemista reformado los extrae en este caso de las
obras de Tucídides, Polibio, Herodoto o Tito Livio, opuestas, desde
su perspectiva, a esa necesidad de innovar y de adaptarse a la calidad
de los tiempos y los giros de la Fortuna a las que Maquiavelo exhorta
­continuamente en sus escritos.
Para Gentillet, al ­contrario, la ­concordancia entre las historias clásicas
y las crónicas sobre la monarquía francesa mostraba la existencia de un
único modelo de buen gobierno, patrón eterno definido c­ omo ejercicio
“temperado”, moderado y ­consultivo de la autoridad regia, en las antí-
podas de la soberbia, secretismo y celo por monopolizar el manejo de
los asuntos públicos mostrado por los príncipes que pretendían imitar
el “macabro” modelo de Maquiavelo38.
Como ya mencionábamos anteriormente, Gentillet c­ onsidera el ideal
de la monarquía temperada c­ omo un modelo político deliberadamente
querido y apoyado por Dios, quien a lo largo de la historia había interve-
nido en un sinfín de ocasiones derribando de sus tronos a monopolizadores
del poder y tíranos c­ omo los alabados por Maquiavelo. Lo que es intere-
sante en este punto no es, evidentemente, la perspectiva providencialista
expresada por Gentillet, totalmente acorde a la mentalidad de su época,
sino que su c­ ontestación a Maquiavelo se fundamentara además de en
sus ­convicciones religiosas, en una reflexión sobre la naturaleza del oficio
del polyhistor, término utilizado en la Grecia antigua para designar al
enseña y que sus discípulos, introductores en Francia de la observación de los preceptos
de Maquiavelo, son la causa de las guerras civiles y calamidades del reino”, Ibid., p. 151.
38 “Pero querer inferir y decir a partir de ahí (­como hace Maquiavelo) que el gobierno de
un príncipe depende de su propia prudencia y que uno no puede estar bien aconsejado
más que por sí mismo, no es posible, siendo tal c­ onclusión falsa y de c­ onsecuencias muy
perniciosas […]. Puesto que un príncipe, por muy prudente que sea, no debe tanto esti-
mar su propia prudencia c­ omo para despreciar el c­ onsejo de otras personas sabias”, Ibid.,
p. 49-50. Gentillet exhorta a los reyes Valois a restablecer el diálogo c­ on los príncipes
de sangre y nobles más prominentes, ­consejeros naturales del rey (y afines, en varios
casos, a la causa de la Reforma). Sigue la opinión de tratadistas hugonotes coetáneos
­como Jean De Coras, para quien los príncipes que no respetaban las instituciones y cos-
tumbres c­ onsultivas perdían su ­condición de reyes legítimos y se ­convertían en tiranos:
“Comportándose de otra manera, no ejercería la función de rey, sino la de tirano. Puesto
que el que es rey, rige y administra su reino ­con medida, prudencia y ­consejo, no cree
sólo en sí mismo, no sigue su sensualidad, sino que modera todas las cosas de acuerdo a
la razón. Al ­contrario, el tirano es aquel que desprecia el c­ onsejo y no cree más que en
sí mismo, siguiendo su capricho y rechazando toda razón”, Question politique: ­s’il est licite
aux subjects de capituler avec leur prince, 1989 [1570], p. 21.
“Restaurar el reino de Francia en su antiguo esplendor” 287

sabio ­conocedor de muchas historias y del arte de redactarlas y que en


el siglo XVI recupera el humanismo39.
Desde la perspectiva de Gentillet, Maquiavelo había demostrado
además de su maldad y su desvergüenza, una pésima ­competencia ­como
gestor de la memoria pública. Los libros del “ignorante” Maquiavelo
estaban redactados, en este sentido, desde una perspectiva de la his-
toria totalmente errada. Para Gentillet, Maquiavelo había llegado à
­conclusiones o máximas políticas opuestas a las de todos los escritores de
historias y prontuarios políticos por su « ignorancia » total de las reglas
de trabajo del polyhistor. El hugonote ­contesta tanto el número exiguo de
ejemplos proporcionados por Maquiavelo cada vez que intenta probar
una determinada máxima política, c­ omo la calidad y representatividad
de esos ejemplos. Extraídos de las historias recientes de las pequeñas
ciudades italianas, en las que los que gobernaban eran, en muchas
ocasiones, tiranos fugaces de extracción popular, los ejemplos alegados
por Maquiavelo le parecen a Gentillet indignos de figurar en los libros
de historia universal y en los tratados histórico-políticos sobre el arte
de gobernar40, en los que solamente episodios extraídos de la historia
bíblica y de las más grandes y longevas monarquías de todos los tiempos,
principalmente Francia y el Imperio Romano, merecían ser señalados
­como ejemplos de buen gobierno.
Entre Gentillet y Maquiavelo y, más tarde, entre los tratadistas tra-
dicionalistas y los modernos adalides de la razón de Estado, se abrió, por
tanto, un enorme foso plagado, por un lado, de diferencias fundamentales
39 El editor anónimo de una versión del Discours c­ontre Machiavel publicada en Leyden en
1609, subrayó precisamente la c­ ompetencia de Gentillet c­ omo polyhistor. Este elogio resulta
indicativo de que aunque su metodología de prueba de máximas ético-políticas a partir
de acumulación de exempla pueda resultarnos hoy en día farragosa, resultaba totalmente
acorde a las tendencias de redacción propias de su época. “El autor de los discursos
incluidos en este volumen dio durante mucho tiempo testimonio de su sabiduría, sobre
todo de su extrema diligencia en la c­ onversación c­ on los Antiguos y, en particular, c­ on
las historias, cuyos espaciosos y deleitantes campos recorrió ­con el ojo curioso del alma
durante muchos años, haciendo más liviano ­con el ejercicio poli-histórico los trabajos
relacionados ­con el estudio del Derecho Civil y otras materias relacionadas”, “Epître au
lecteur debonnaire”, en [Innocent Gentillet], Discours d­ ’Estat, sur les moyens de bien gouverner
et maintenir en bonne paix un Royaume c­ontre Machiavel, 1609, s.p.
40 Para el hugonote, el Maquiavelo ignorante de las grandes y dignas historias arrastraba,
de hecho, a su lector a la depravación c­ on los « ejemplos de esos pequeños potentados de
Italia que existieron en su tiempo o poco antes, ejemplos que no vale la pena c­ ontar y que
son todavía menos dignos de ser propuestos c­ omo modelos a imitar », Anti-Machiavel,
p. 33.
288 JOSÉ LUIS EGÍO

sobre el modo idóneo de gobernar, pero también a propósito de la manera


correcta de escribir historias y de gestionar una memoria entendida c­ omo
un saber eminentemente práctico, cuya labor era la de buscar en el pasado
modelos exitosos de acción y lecciones universales de gobierno a aplicar
en un presente trastornado y necesitado de puntos de anclaje históricos.

José Luis Egío


Max Planck Institute for European
Legal History, Frankfurt am Main
QUATRIÈME PARTIE

LA MÉMOIRE DE LA RÉVOLTE
DANS L­ ’ACTION POLITIQUE
NEGOCIACIÓN, SUBLEVACIÓN
Y ­CONCIERTO
Memoria e imagen de la revuelta de Flandes
en los Países Bajos meridionales durante la negociación
de la Tregua de los Doce Años (1598-1609)1

En mayo de 1598 Felipe II estipuló en su testamento la desvincula-


ción de las provincias de los Países Bajos y de los territorios borgoñones
del patrimonio de la Corona, cediéndolas y otorgando la soberanía y el
gobierno sobre estas a su hija Isabel Clara Eugenia y su yerno el archiduque
Alberto de Austria en una serie de cláusulas que se agrupan en lo que
se ha venido c­ onociendo c­ omo el Acta de Cesión2. Fundamentado en
un c­ onjunto de escrituras de carácter jurídico por las que tanto Felipe II
­como su heredero mostraron su ­conformidad al respecto, el traspaso
de la titularidad sobre los territorios tuvo ciertas repercusiones en el
panorama internacional c­ on la aparición de un nuevo centro cortesano
y de poder en Europa. Desde Bruselas los archiduques se habrían de
erigir, aparentemente al menos, ­como nuevos soberanos del territorio.
Sin embargo, algunas de las cláusulas recogidas en el texto de 1598
permitían a la Corona seguir manteniendo el interés y la presencia sobre
esta pieza clave para la hegemonía hispánica y, en última instancia,
garantizaban no solo la inclusión de estas provincias y de sus nuevos
soberanos en el entramado de la Monarquía Hispánica y su tutelaje sobre
ellas, sino que también ­contemplaban la posibilidad de que volviesen
a quedar insertas automáticamente en el c­ onjunto patrimonial de los
1 El presente trabajo se enmarca dentro del proyecto de investigación financiado por el
MINECO c­ on fondos FEDER de la Unión Europea El modelo policéntrico de soberanía c­ ompartida
(siglos XVI-XVIII). Una vía alternativa en la c­onstrucción del Estado Moderno (HAR2013-
45357-P), radicado en la Universidad Pablo de Olavide (ES-41013) Sevilla, España.
2 Reproducción de las cláusulas sobre las que se fundamentó el negocio de la cesión en
Colección de Documentos Inéditos para la Historia de España, 42, p. 218-225. En adelante
CODOIN.
292 ALBERTO RODRÍGUEZ MARTÍNEZ

monarcas madrileños en caso de que la pareja archiducal no tuviese


descendencia. Fue sobre todo en el terreno diplomático y religioso donde
sonaron c­ on más fuerza los ­condicionamientos y las limitaciones que la
escritura planteaba al régimen archiducal en su papel ­como gobierno
independiente. Paralelamente, una serie de cláusulas adicionales fueron
añadidas de forma secreta a la escritura original de Felipe II, ­con las que,
entre otros aspectos, la Corona se reservaba para sí el ­control directo
del gobierno y las guarniciones de una serie de plazas estratégicas en
los Países Bajos c­ omo Amberes, Gante y Cambrai, quedando en manos
del monarca la provisión de cargos y la financiación de estas fuerzas3.
Condicionamientos de este tipo, sobre los que hubo de definirse el
proceso del traspaso de soberanía y el establecimiento del gobierno de
los archiduques, marcarían al régimen archiducal desde su origen y a
lo largo de todo su desarrollo. En este sentido, parece evidente cómo la
existencia de estas cláusulas sobre las que se asentaba jurídicamente el
negocio perjudicaba la capacidad de actuación autónoma de los nuevos
príncipes e iba en menoscabo de su autoridad. En este sentido, la pre-
sencia de guarniciones dependientes del monarca hispánico dentro de
unos territorios cuyo gobierno ­competía a los archiduques no deja de ser
reseñable, pero en ningún caso se trató de algo excepcional o fuera de
toda lógica si tenemos en cuenta que la Corona siguió actuando c­ omo
principal responsable en la financiación de las operaciones militares
y en el mantenimiento del ejército en los Países Bajos católicos a lo
largo de todo el período archiducal. Circunstancia que, por otra parte,
permitía al monarca seguir teniendo mano en los asuntos flamencos y
le otorgaba, en principio, cierta capacidad de intervención e influencia
sobre un gobierno dependiente de las provisiones españolas e incapaz
de hacer frente a las necesidades del ­conflicto de forma autónoma4. En
cualquier caso, lo que nos interesa aquí no es tanto insistir en el carácter
3 Es en su testamento donde Felipe II justifica esta medida, para que ­con ella “quede a
sus Altezas este golpe de gente vieja y ­confidente y estas plazas y puertos seguros, por lo
que toca al país para cualquier alteración que pudiese dar cuidado, sin que los naturales
puedan formar queja de sus dueños ni atribuírselo a desconfianza”, (Testamento y codicilo
del rey don Felipe II, p. 52). Ya para 1598 encontramos alusiones a la posibilidad de una
rebelión, que se repetirán c­ ontinuamente en los años sucesivos.
4 « Aunque sea así que siempre las cartas del señor archiduque acaban c­ on pedir dinero,
es fuerza que lo haga, pues no se puede sustentar sin él un ejército numeroso en el que
hay gente acostumbrada a motines » (Archivo General de Simancas, Estado, leg. 624,
118. Consulta del Consejo de Estado. Octubre de 1606).
Negociación, sublevación y ­concierto 293

c­ ontradictorio de la soberanía de los archiduques y en esa “independencia


dependiente”5 en la que está basada su gobierno, sino intentar entender a
través de este tipo de ­condicionamientos la estrecha supervisión y c­ ontrol
que Madrid trató de establecer sobre ciertos ámbitos de actuación del
régimen archiducal. Como veremos, la política exterior de los archiduques
fue uno de esos terrenos en los que la Corona intentó hacer valer unos
criterios y puntos de vista propios que no siempre coincidieron c­ on los
de los nuevos soberanos6.
En este c­ ontexto, no será difícil entender la presencia de Madrid
en unas negociaciones c­ on las Provincias Unidas cuya planificación y
desarrollo partían, en mayor medida, de Bruselas. Pese a esta circuns-
tancia, instituciones ­como el Consejo de Estado o la misma Corona
pretendieron ­constantemente marcar el rumbo de unas negociaciones en
las que veían implicados sus intereses y reputación. Es a partir de aquí
desde donde intentaremos analizar algunas de sus reacciones frente a
una realidad del acercamiento diplomático que no se basaba tanto en un
­control y dirección efectiva desde Madrid sino más bien en la iniciativa
y la participación de las elites locales y de una serie de individuos que se
movían en torno a la corte bruselense. En esta línea, tendremos ocasión
de ver cómo esta participación de los naturales de los Países Bajos tuvo
probablemente más peso e importancia de lo que seguramente desearon
ciertos círculos del ámbito madrileño, de donde surgieron una serie de
reacciones y discursos que, teniendo c­ omo referencia la memoria de la
antigua revuelta, advertían sobre la posibilidad de una nueva rebelión
de las provincias obedientes. Todo ello en un momento de enormes
dificultades en las provincias meridionales, creadas por el ­conflicto, y en
un ­contexto en el que “se ­conocía que al fin los pueblos, por no dejarse
oprimir más tiempo de tantos males, ­convertirían la paciencia en furor,
y de este pasarían a otra más extraña y desesperada resolución.”7
En todo caso, resulta ­conveniente dedicar primero unas líneas a
intentar reconocer cuáles pudieron ser los motivos por los que Felipe II
llegó a desprenderse desde el punto de vista patrimonial de un territorio
estratégico para la Monarquía Hispánica. Para ello hemos de ­considerar
la difícil situación en la que ésta se encontraba para los últimos años
5 Esteban Estríngana, 2005, p. 6. Sobre el régimen archiducal y su naturaleza política
véase Carter, 1964; Thomas, 1999.
6 Su reflejo sobre las negociaciones c­ on Inglaterra en Thomas, 2008.
7 Bentivoglio, 1687, p. 516.
294 ALBERTO RODRÍGUEZ MARTÍNEZ

del siglo XVI8. El agravamiento del ­conflicto ­con los neerlandeses, que
para estos años alcanzó nuevas cotas empezando a incorporar el ámbito
ultramarino ­como escenario de sus enfrentamientos, llamaba a la bús-
queda de soluciones y remedios9. Prioritario en este sentido resultaba
el afianzamiento de la estabilidad política en unos territorios que, tras
unos primeros años de rebelión, finalmente habían acabado mante-
niéndose leales a la Corona y a la fe católica. En línea c­ on la defensa
que, para estos años, ciertos juristas y hombres de estado hacían de
políticas c­ onservacionistas ­como fundamento para el mantenimiento
de la hegemonía y del patrimonio10 parecía más c­ onveniente lograr
dicha estabilidad por medio de una vía de blandura (voie de douceur) y
no solamente por la fuerza de las armas (voie de force), especialmente en
unos territorios diezmados por décadas de ­conflicto y en los aún podría
reverdecer la semilla de la rebelión11. Tal y c­ omo quedó advertido el
archiduque en 1600 por un papel anónimo ­con algunas recomendaciones
para el gobierno de los asuntos flamencos, no sería fácil poner remedio
a la situación de inseguridad política en unos territorios que
son c­ omo un cuerpo lleno de malos humores […] porque se han amontonado los
desórdenes, ­como la pelota de nieve que rodada por ella, va siempre creciendo
y espesándose. Con todo esto no queda desahuciado el remedio si Vuestra
Alteza se sirve de aplicarse a ello de veras y sin más dilación, metiéndose
delante de los ojos la memoria de las desórdenes pasadas y presentes […] para
según eso resolverse a tomar el camino seguro y cierto, y dejar el incierto12.

Por tanto, el recuerdo de la rebelión y de los factores que la motivaron


resultaba necesario para evitar una repetición de los errores del pasado

8 Para un balance general de las c­ ondiciones en las que tiene lugar la sucesión de Felipe III
al trono en 1598 véanse García García, 1996; Feros, 2002. Un análisis más centrado en
cuestiones de política exterior en Allen, 2001.
9 Referencias a las dimensiones globales que tomaba el c­ onflicto en Israel, 1997, p. 25-26.
Un análisis de la presencia y la importancia que la cuestión de las Indias cobraría en los
años siguientes en Herrero Sánchez, 2009.
10 En García García, 2007, p. 1215-1219.
11 Sobre el afecto real y el amor hacia los súbditos c­ omo instrumento para la c­ onservación
del Estado y la ­comunidad política, véase Pérez y ÁlamosBarrientos, 1991, p. 23-32.
Aunque es principalmente en la transición entre los siglos XVI y XVII y en el ­contexto
de una reorientación de las bases de su hegemonía cuando desde la Monarquía se da más
peso a mecanismos ­como la negociación y la reconciliación, probablemente haya que ver
en el siglo XVI el origen de estas dinámicas (SOEN, 2009).
12 CODOIN, 42, p. 244.
Negociación, sublevación y ­concierto 295

y cerrar la puerta a la posibilidad de nuevas revueltas. En esta línea,


el hecho de que la Corona optase por c­ onceder a estos territorios y sus
vasallos unos soberanos propios estaba, sin duda, fuertemente relacio-
nado ­con la necesidad de preservar tanto su quietud política ­como su
vinculación c­ on el catolicismo, reforzando así la sujeción y la fidelidad a
unos príncipes naturales que, por otra parte, desarrollaron una política
­confesional fuertemente c­ omprometida c­ on el dogma ­contrarreformista13.
Con la llegada de los archiduques habría de ser la negociación y no
las armas el factor fundamental para mantener esta obediencia de los
naturales. Una negociación que, por otra parte, no tendría por qué
estar dirigida únicamente a las provincias meridionales sino que en ella
también podrían incluirse a las llamadas provincias rebeldes del norte,
­con las que los archiduques podrían actuar c­ omo perfectos mediadores
en la búsqueda de una solución al problema flamenco14. No obstante,
las referencias a los medios armados c­ omo principal garantía para la
obediencia de los súbditos flamencos nunca llegaron a desaparecer del
todo ni de Madrid ni de Bruselas, desde donde el archiduque afirmaba
cómo “mientras haya recado de armas c­ on que hacer obedecer […], habrá
seguridad de que no perderán el respeto.”15
La búsqueda de una negociación a nivel general en los Países Bajos
que pusiera fin al c­ onflicto y permitiese alcanzar la paz y la reconcilia-
ción entre las provincias del norte y las del sur está precisamente en la
base por la que el régimen archiducal justifica su existencia16. Vemos
cómo los archiduques parecen manifestar, especialmente al inicio de su
gobierno y en línea ­con este propósito, un verdadero deseo por lograr
la pacificación y la reunificación de los Países Bajos a través de un
renovado esfuerzo de negociación y acercamiento a los neerlandeses.
Esta búsqueda de ­contactos c­ on el exterior intentó además ­combinarse
­con una serie de medidas en el interior que promoviesen la idea de la
13 Duerloo, 2015.
14 La reserva de asientos que en la ceremonia del juramento de los nuevos soberanos se
hizo para los representantes de las provincias del norte, de acuerdo ­con la descripción
coetánea que hace un tal Juan de Palacios (CODOIN, 42, p. 228-234), c­ onstituye un
gesto significativo de cómo los archiduques c­ onsideraron la aproximación c­ on sus vecinos
y la reunificación de las provincias c­ omo piedra angular de su actuación durante sus
primeros años de gobierno.
15 Archivo General de Simancas, Estado, leg. 2024, 76. Consulta del Consejo de Estado de
24 de marzo de 1605.
16 De Ridder, 2012; Esteban Estríngana, 2009.
296 ALBERTO RODRÍGUEZ MARTÍNEZ

reconciliación, la cual estuvo presente a través de la exteriorización


política del régimen archiducal en celebraciones de carácter cívico o en
la difusión de ciertos escritos y panfletos desde el entorno bruselense17.
No obstante, las esperanzas que desde Madrid se tenían puestas en
la gestión de los archiduques ­como interlocutores ­con las Provincias
Unidas se truncaron en poco tiempo y sus esfuerzos por promover un
acercamiento no c­ onsiguieron ningún resultado significativo18. Ello
obligó a los archiduques, en ocasiones, a presentar sus ofertas por vía
indirecta a través de instituciones tradicionales o por medio de naturales
de las provincias, en la dinámica de acercamientos que tuvo lugar entre
los inicios del régimen archiducal y la firma de la Tregua de los Doce
Años (esto es, el período 1598-1609)19. Lo que el gobierno de Bruselas
intentaba probablemente ­con esta participación de vasallos flamencos era
quizás aprovechar esos canales particulares de c­ ontacto y c­ omunicación
que se abrían entre las provincias del norte y las del sur para introducir
propuestas y ofertas de negociación c­ on las que buscar una salida al
­conflicto, habida cuenta de la dificultad para hacerlo por vía formal. No
obstante y ­como veremos a ­continuación, el visible protagonismo que
a partir de aquí tuvieron los naturales flamencos y valones en aquellos
acercamientos diplomáticos ­con las Provincias Unidas que se dieron en
los primeros años del siglo XVII no podían sino levantar sospechas en
Madrid respecto a la forma de gestionar estos c­ ontactos.
Sirva, a modo de ejemplo de estas diferencias de percepción entre
ambos centros políticos respecto a la participación de los naturales en
las negociaciones, el análisis de las c­ onversaciones que tuvieron lugar en
17 En el libelo Beclach ende doleancie van den Pays, yegens die XVII Provincien van den Nederlandt,
impreso en 1600 por Rutgeert Velpius, individuo próximo a la corte bruselense, una
personificación del país se lamenta del c­ onflicto, asegurando cómo en el pasado “todas
mis negociaciones y ­conversaciones han estado llenas de paz, amenidad, ganas y deseo
de los corazones de las provincias”. El texto hacía hincapié en la negociación y corres-
pondencia entre unos territorios que parecían haber olvidado cómo « la prosperidad de
una provincia proporciona aquellas cosas que en la otra faltan y de las que hay necesidad ».
Más referencias en Zuilen, 2005. Para la exteriorización de la naturaleza política y del
ideario del régimen archiducal en el marco de celebraciones urbanas véase Thofner, 2007,
p. 199-225. Contamos ­con una descripción ­contemporánea de éstas en Bochius, 1602.
18 La negativa respuesta que los Estados Generales dieron en enero de 1607 a las propuestas
de negociación presentadas por Walrave van Wittenhorst en nombre de los archiduques
nos muestran cómo La Haya ­consideraba al gobierno archiducal c­ omo un mero agregado
de la Monarquía, ajeno a la identidad y tradición política de los Países Bajos. En AGS,
Estado, leg. 2289, 30.
19 Groenveld, 2009, p. 35-36; Allen, 2001, p. 166.
Negociación, sublevación y ­concierto 297

los primeros meses de 1605 entre los Estados Generales y los Estados de
Brabante. El hecho de que estas c­ onversaciones directas entre “rebeldes”
y “obedientes” se c­ ondujesen por canales en los que ni los archiduques
ni ningún representante de Felipe III participaban suscitó una honda
preocupación en el entorno del monarca, así c­ omo la denuncia de nume-
rosas voces que, teniendo en cuenta esta correspondencia y ­contacto de
los vasallos leales c­ on el enemigo, hicieron revivir desde Madrid el anti-
guo fantasma de la rebelión y el miedo a una nueva sublevación de las
provincias católicas. En las c­ onsultas celebradas en el Consejo de Estado
a lo largo de la primera mitad de 1605 se apuntaron c­ on insistencia los
peligros que nacían de una negociación protagonizada por los naturales
y que corría por vía de sus representantes e instituciones tradicionales,
al margen de sus soberanos. De las opiniones emitidas por los distintos
­consejeros se percibe la pervivencia de una imagen de los habitantes de
los Países Bajos en la que se recalcaba su tendencia a la rebelión y a la
desobediencia hacia sus príncipes. Una imagen que tenía su origen en
la revuelta de 1568 y que se rescataba ahora especialmente ­con motivo
de las negociaciones, pero que probablemente nunca llegó a desaparecer
de la memoria colectiva de ciertos grupos, ni siquiera tras las fórmulas
de reconciliación arbitradas por Farnesio o la renovación de lealtades
promovida por los archiduques. En este sentido, Álamos de Barrientos
hacía para 1598 pocas distinciones entre los rebeldes neerlandeses, a
los que cabía c­ onsiderar enemigos públicos, y “los reducidos, porque lo
fueron y quédales la memoria y temor de la ofensa, cuyo castigo más
entienden que se les ha diferido que perdonado.”20 En relación a las
­conversaciones entre rebeldes y obedientes a las que nos hemos referido,
las palabras del c­ onde de Olivares en la c­ onsulta del Consejo de Estado
de 24 de marzo son representativas a la hora de poner en evidencia la
sospecha generalizada que entre los c­ onsejeros existía hacia las mismas,
advirtiendo cómo estas podían acabar dando lugar a una colaboración
entre las provincias del norte y las del sur para procurar la salida de los
españoles, “lo cual desean tanto los obedientes c­ omo los rebeldes. Y así es
de creer que en procurarlo serán todos uno.”21 El Comendador Mayor de
León, por su parte, apuntaba cómo estos tratos podían dar lugar a “que
de aquí nazca arrimar a Sus Altezas o hacerlos retirar, c­ omo le sucedió al

20 ÁlamosBarrientos, 1990, p. 10.


21 AGS, Estado, leg. 2024, 76. Consulta del Consejo de Estado de 24 de marzo de 1605.
298 ALBERTO RODRÍGUEZ MARTÍNEZ

señor don Juan de Austria.” Sin duda el miedo a que aquellas antiguas
reivindicaciones que habían marcado la pasada revuelta pudiesen volver
a cobrar fuerza justificaba la respuesta tajante del monarca “vuélvase a
escribir a mi tío que de ninguna manera c­ onviene la c­ omunicación de
los obedientes c­ on los rebeldes, y que así corte estas pláticas.”22
Las críticas del c­ onsejo, por otra parte, no solo se vertían c­ ontra los
súbditos flamencos, sino que también alcanzaron al archiduque Alberto
por haber dado lugar a este tipo de actuación. La permisividad del archi-
duque fue duramente reprendida por individuos c­ omo el c­ ondestable
de Castilla que, subrayando la necesidad de hombres y dineros para
evitar cualquier desorden recomendaba la toma de precauciones ­contra
Alberto y “que el dinero vaya de manera que Su Alteza no pueda dis-
poner de él si la paz se hiciese entre los Estados.”23 La justificación del
archiduque no tardó en llegar por medio del c­ onde de Solre, quien
informó al monarca de cómo esta correspondencia “fue forzoso hacerse
[…] por no poner en desesperación a los súbditos obedientes de que no
se les permitía siquiera el dar oídos y respuesta a lo que los de las Islas
le propusiesen.” Como parece reflejarse de ­consultas ­como la de marzo
de 1605 la opinión mayoritaria de los miembros del ­consejo mantuvo
esa tendencia hacia la desconfianza de los naturales y la denuncia de sus
malas intenciones pese a las palabras del archiduque en defensa de sus
súbditos, quien garantizaba que el respeto y la obediencia de que estos
hacían gala imposibilitarían una actuación en ­contra de la voluntad de
su príncipe o en perjuicio de su autoridad24. Asimismo, el propio c­ onde
de Solre se nos muestra c­ omo uno de los más enérgicos defensores de
la lealtad de los flamencos, de los que señala cómo “correspondiendo al
deber de buenos vasallos y al amor y respeto que siempre han tenido
a sus Príncipes y a la ­conservación de la Religión Católica, los han
acudido siempre c­ on sus ayudas”25, siendo necesario por tanto “que se
quiten todas las sombras de desconfianza que tanto mal han causado y
podrían causar, y se hagan tales demostraciones de c­ onfianza que c­ on
ellos crezca la autoridad de Su Majestad.”26 Pese a esto, todo apunta

22 Ibíd.
23 AGS, Estado, leg. 2024, 53. Consulta del Consejo de Estado de 29 de enero de 1605.
24 AGS, Estado, leg. 2024, 76. Consulta del Consejo de Estado de 24 de marzo de 1605.
25 AGS, Estado, leg. 2024, 47. Apuntes biográficos del ­conde de Solre y de su posicionamiento
ante el problema flamenco en García García, 2002.
26 AGS, Estado, leg. 2024, 69.
Negociación, sublevación y ­concierto 299

a la pervivencia de una imagen negativa heredada de la memoria de


aquella revuelta generalizada que tuvo lugar en los Países Bajos, espe-
cialmente en la década de los setenta del siglo XVI, ­contra la autoridad
de la Corona. Una revuelta que, c­ omo llegó a apuntarse en los primeros
años de gobierno de los archiduques, sería c­ onveniente tener presente a
la hora de definir una nueva actuación política en el c­ ontexto flamenco,
bajo la recomendación de que ésta habría de atender a la valoración de
los acontecimientos del pasado y a las enseñanzas de una experiencia
que “nos hace en un instante tocar c­ on un dedo lo que no se puede dar
a entender c­ on mucho discurso.”27
Posicionamientos y opiniones de este tipo también se encontraban
presentes entre los c­ onsejeros en algunas c­ onsultas de años anteriores.
En este sentido, ­con motivo de una ­consulta en junio de 1604 en la
que se hacía referencia a la difícil situación por la que entonces pasaban
las provincias ­como resultado de fuertes amotinamientos y de la falta
de fondos para el mantenimiento de numerosos efectivos, el ­conde de
Chinchón manifestaba la posibilidad de que los súbditos de las provin-
cias “apretados de la necesidad y de ver que el señor archiduque no los
puede defender se junten c­ on rebeldes […] pues de alemanes y valones
la experiencia muestra cada día lo poco que se puede fiar.” El c­ onde
llegaba incluso a señalar que “­como otras veces ha dicho, lo que más
importa es que se procure volver a incorporar aquellos estados c­ on esta
corona porque cuanto más se dilatare más se imposibilitará el remedio
de ellos.”28
A la hora de intentar identificar cuáles fueron los motivos que dieron
lugar a la progresiva recuperación desde ciertos espacios de poder de
una ­concepción peyorativa hacia flamencos y valones, así ­como a ese
aumento de la inquietud que tan evidente parece entre los ­consejeros,
cabe pensar cómo todo esto tiene lugar en un momento que parece
marcado por la intensificación de los ­contactos entre el norte y el sur.
Como hemos visto, fue en aquellos momentos en los que se hizo evidente
el peso que en este acercamiento tenían los naturales y aquellos canales
de ­contacto tradicionales entre rebeldes y obedientes heredados de la
revuelta, cuando hicieron su aparición las críticas hacia las negociaciones
e incluso hacia los fundamentos mismos de la cesión del territorio a los
27 CODOIN, 42, p. 275.
28 AGS, Estado, leg. 2024, 22. Consulta del Consejo de Estado de 22 de junio de 1604.
300 ALBERTO RODRÍGUEZ MARTÍNEZ

archiduques. A partir de aquí, la Corona intentó arbitrar una serie de


pautas para reforzar su c­ ontrol sobre una c­ omunicación entre rebeldes y
obedientes de imprevisibles c­ onsecuencias, hacia la que los archiduques
parecían mantener además una postura transigente y al margen de las
directrices madrileñas29. En este sentido, parece lógico que el monarca
enviase a Bruselas a Diego de Ibarra y Vargas pocos meses después de
que los archiduques llegasen a un armisticio ­con las Provincias Unidas
que ­comprometía a la Corona y la obligaba a posicionarse respecto a
la negociación de una manera clara30. Después de lo del armisticio,
era necesario frenar la tendencia autonomista de los archiduques y su
entorno y poner las negociaciones en manos de un representante del rey
que limitase la fuerte influencia que Ambrosio Spínola parecía ejercer en
el manejo de los c­ ontactos c­ on los rebeldes31. Parece necesario destacar
cómo en los argumentos de Ibarra siempre ocupó un lugar destacado la
estrecha c­ onexión que en su opinión existía entre el mantenimiento de

29 El marqués de Guadaleste, embajador del monarca en Bruselas, representaba cómo los


canales informales a través de los que en ocasiones corrió la negociación dificultaba la
posibilidad de un seguimiento efectivo, ya que “allí se trata esto ­con tanto recato que le
ha sido forzoso valerse de un correspondiente que tiene en las Islas” (AGS, Estado, leg.
625, 36. Consulta del Consejo de Estado de 11 de septiembre de 1607). Esto no quiere
decir que Madrid quedase ­completamente al margen del negocio, sino que se trata más
bien de destacar cómo la c­ omplejidad intrínseca a la propia dinámica de negociación
entre dos entidades de carácter policéntrico c­ omo eran las provincias meridionales y la
República creaba la necesidad de ­conducirla a través de múltiples vías, muchas veces
de carácter privado, y no solo a través de los mecanismos formales de representación y
negociación diplomática.
30 Ibarra llegó a Bruselas a finales de junio de 1607 para reforzar la supervisión de Madrid
sobre la actuación de Alberto y para garantizar la presencia de los criterios del monarca
en las ­conversaciones ­con las Provincias Unidas, las cuales habían llegado en abril a una
suspensión de armas ­con los archiduques por la que éstos se declaraban “­contend de traitter
avec les Estats Generaux des Provinces Unies en qualité et c­ omme les tenand pour pays,
provinces et estats libres, sur les quels Leurs Altezes ne pretendent rien” (AGS, Estado,
leg. 2289, 59. Copia del tratado de la suspensión en francés). Sobre la mala acogida que
la noticia del armisticio tuvo en Madrid y las justificaciones y disculpas por parte de
sus principales promotores véanse las cartas de Spínola y Alberto en AGS, Estado, leg.
2289, 88. y AGS, Estado, leg. 2289, 113.
31 CabreraCórdoba, 1997, p. 305. Ibarra subrayó a través de su correspondencia el fuerte
interés que en su opinión tenía el genovés en el mantenimiento de las negociaciones,
­considerando « que es su particular negocio que se le acabe la guerra en las manos y que
pueda, echando ese cargo a Su Majestad de haberle servido en ello, verse así libre de los
trabajos y peligros de ella » (AGS, Estado, leg. 2289, 91. Carta de Diego de Ibarra al
monarca desde Poitiers. 6 de junio de 1607). Las quejas de Spínola ante el monarca c­ on
motivo de la llegada de Ibarra en Rodríguez Villa, 1904, p. 175-176.
Negociación, sublevación y ­concierto 301

las c­ onversaciones c­ on los rebeldes y la posibilidad de una nueva rebelión


en las provincias meridionales. Más allá de los problemas de carácter
­comercial o religioso que pudieran derivarse, Ibarra puso ­constantemente
el acento en los perjudiciales efectos que desde el punto de vista político
tendría un reconocimiento de la soberanía de las Provincias Unidas tal
y ­como los neerlandeses demandaban en la negociación, cláusula que
­consideraba
de muy grande inconveniente para el fin que tan justamente se tiene de
­conservar Vuestra Majestad su soberanía ­con ellos y ­con los obedientes, los
cuales podrá ser que tengan el mismo deseo […] y podrá ser que a ejemplo de
lo que se habría hecho c­ on los rebeldes dejándolos por señores de lo que tienen
pretendiesen lo mismo, desengañados de la asistencia de Vuestra Majestad por
el estado que tiene su hacienda y sentidos de verse de tanto peor ­condición
que sus hermanos32.

Tal y c­ omo Ibarra señalaba, reconocer a las provincias rebeldes c­ omo


una entidad soberana propia a cambio de la paz o la tregua podría sentar
un funesto precedente político capaz de ser aprovechado y explotado
por otros territorios de la Monarquía, quienes no dudarían en recurrir
a la rebelión ­como forma de mejorar sus ­condiciones de vinculación a la
Corona y c­ omo herramienta para c­ onseguir nuevos privilegios. De acuerdo
­con esto, parecía poco c­ onveniente proseguir ­con unas negociaciones en
estos términos, pues “aunque Vuestra Majestad deseaba la paz, no creía
sería de manera que la desreputación de ella levantase otras guerras, que
sabía cuán mal se hablaba generalmente en estas provincias obedientes
en ella.”33 Esta no era una opinión aislada, sino ­compartida ­con otros
integrantes del llamado “partido español” en Bruselas que, de la misma
manera que Ibarra, también aprovecharon su ­comunicación c­ on Madrid
para manifestar su rechazo de las negociaciones y su preocupación ante
las c­ onsecuencias que en las provincias meridionales podría traer ­consigo
el ­concierto c­ on los rebeldes en términos tan negativos34.
32 AGS, Estado, leg. 2289, 92. Carta de Diego de Ibarra. 8 de junio de 1607.
33 AGS, Estado, leg. 2289, 109 Carta de Diego de Ibarra al monarca. 24 de junio de 1607.
34 Entre sus miembros, ­como principales defensores en el entorno archiducal de la política
regia y de los intereses de Madrid, destacamos a Iñigo de Borja, castellano de Amberes, al
gobernador de Cambrai Juan de Rivas o a Luis de Velasco, capitán general de la caballería
ligera del ejército de Flandes. En torno a la ­composición, la actuación y el alcance de
este grupo véase también Lefèvre, 1923; Thomas, 2011. Comentarios de Luis de Velasco
respecto a las negociaciones en AGS, Estado, 2289, 65.
302 ALBERTO RODRÍGUEZ MARTÍNEZ

De las advertencias que para estos años ciertos individuos hicieron


tanto desde Madrid ­como desde Bruselas sobre la posibilidad de una
rebelión en los Países Bajos meridionales no solamente podemos señalar
sus llamadas de atención acerca de las preocupantes c­ onsecuencias que
para el gobierno de los archiduques y la vinculación de los territorios
a la Monarquía tendría tolerar la ­comunicación de unas provincias ­con
otras o el reconocimiento la soberanía de la República neerlandesa a
través de las negociaciones. Más allá de los problemas que pudieran
residir en el hecho de que los naturales interviniesen directa y activa-
mente en el acercamiento diplomático norte-sur y más allá del hecho
de que las ­concesiones a los neerlandeses pudiesen despertar entre los
obedientes un deseo de imitación de sus vecinos, cabe destacar cómo
detrás de este tipo de discursos nos encontramos ­con referencias a una
idea que está en la base de estos temores a una nueva rebelión. Idea
que tenía su origen en la experiencia del pasado y que sin duda hubo
de tomar fuerza en estos años de ­comunicación y acercamiento. Nos
referimos a una opinión generalizada acerca de la existencia de una
afinidad natural entre las provincias del norte y del sur, en tanto que
antiguos miembros de una entidad histórica ­común ­como habían sido
las Diecisiete Provincias y reforzada por una serie de ­concomitancias de
carácter político y c­ ultural entre ambos espacios35. Una imagen c­ on la
que Bruselas intentó promover sin éxito una reconciliación y reunifica-
ción de las Diecisiete Provincias bajo la tutela de la Corona, recurriendo
a un tipo de discurso que acentuaba los lazos y los intereses ­comunes
entre las provincias y que, paradójicamente, no estaba demasiado lejos
de los argumentos que La Haya mantenía en su ­comunicación ­con los
representantes de las provincias católicas36. En cuanto a Madrid, sin duda
parece probable que para estos años la idea de afinidad natural entre
unas provincias y otras pervivía en el imaginario colectivo de indivi-
duos e instituciones al servicio del monarca, tal y ­como también lo hizo
35 Aspectos relacionados ­con esta ­concomitancia entre modelos en De Schepper, 2014; Geyl,
1960.
36 Defendiendo una cooperación y asistencia recíproca entre las provincias, los Estados
Generales neerlandeses no dejaron de señalar la posibilidad de una reunificación en sus
­contactos c­ on el sur, e indicaban cómo “han siempre mantenido por buena y legítima
causa […] que en la Unión establecida entre las provincias de los dichos Países Bajos sean
reintegradas todas aquellas […] que, o por violencia o por secretos meneos y pláticas, se
han distraído y apartado del mantenimiento de la dicha Unión” (AGS, Estado, leg. 2289,
30).
Negociación, sublevación y ­concierto 303

después37. Pese a un proceso de distanciamiento entre las provincias que


se había iniciado años atrás ­con la ­configuración de dos bloques ­como
fueron la Unión de Utrecht y la Unión de Arrás, y que parece fue en
aumento posteriormente durante el período de la tregua38, lo cierto es
que para los años 1598-1609, la sensación de afinidad y correspondencia
entre las provincias hubo de ser muy fuerte en algunos espacios políticos
y de toma de decisión dentro de la Monarquía, al mismo tiempo que
se multiplicaban las manifestaciones de inquietud ante la posibilidad
de una rebelión generalizada.
Al hablar del c­ onvencimiento que ciertas figuras mantenían respecto
a la afinidad natural entre obedientes y rebeldes hemos de tener en
cuenta ciertos elementos que sin duda alimentaron aquella desconfianza
que desde el ámbito madrileño se tenía hacia los naturales y sus actua-
ciones, particularmente en lo tocante a sus relaciones ­con los vecinos
neerlandeses. El establecimiento del régimen archiducal y sus políticas
de pacificación, c­ on la puesta en marcha de ese aumento de los ­contactos
diplomáticos ­con la República que se observa para sus primeros años
de gobierno, fue un factor que probablemente ayudó a reactivar unos
tradicionales canales de ­comunicación, circulación e intercambio que
parecen haberse mantenido pese al ­conflicto desde los tiempos de la
revuelta y que se reforzaron ­con la llegada de la tregua en 160939. En
este sentido, los años previos a su inicio parecen haber sido testigos
de una intensificación de la correspondencia y el acercamiento entre
neerlandeses y habitantes de las provincias meridionales no solamente
a nivel diplomático. Asuntos de carácter privado o personal también
parecían c­ ontribuir a una permeabilidad de las fronteras y facilitaban el
movimiento de personas y el intercambio de noticias e intereses, ­con los
negativos efectos que muchos apuntaron ante esta situación40. A la hora
de buscar el origen de unas c­ onexiones cada vez más estrechas entre los

37 Peñaranda sugería en el ­contexto de las ­conversaciones de Münster cómo la supervivencia


de las provincias ante la creciente amenaza de Francia y Suecia pasaba por una “asociación
[…] de cosas tan unidas ­como son los Países Bajos, adonde los dos partidos son ­como dos
manos que han de lavarse la una a la otra” (Archivo Histórico Nacional, Estado, leg. 2791,
7. Puntos para la instrucción de lo que se podría tratar en La Haya. 26 de junio de 1648).
38 Pollmann, 2007.
39 Groenveld, 2009, p. 67-74.
40 “Su Majestad y Altezas habían de mandar bien y expresamente que en ninguna manera
ni forma ningún vasallo suyo sea osado, pena de la vida, escribir carta o cartas ni tener
correspondencia ­con los dichos rebeldes de Holanda y Zelanda […] Y en esto se había
304 ALBERTO RODRÍGUEZ MARTÍNEZ

dos grupos no faltó quien responsabilizara directamente a la figura del


archiduque Alberto y su excesiva tendencia a la venta y ­concesión de
licencias y pasaportes al enemigo, a través de las cuales éste aseguraba
su ­comunicación y su ­comercio ­con las provincias católicas. En esta
línea, el veedor de ­comercio Hurtuño de Urizar apuntaba en sus cartas
desde Bruselas los inconvenientes que se seguían “de permitir el señor
archiduque la c­ omunicación y el trato entre rebeldes y obedientes, porque
­con esto se da al enemigo la mitad para su sustento.”41 De la misma
manera que hicieron otros, Urizar no dejó de señalar los riesgos que
podrían derivarse de las negociaciones ­con los rebeldes para la quietud
de los obedientes, manifestando al c­ onsejo cómo éstos “van sintiendo
cada día más el ver que las [provincias] rebeldes hayan de quedar no solo
mejoradas, pero también libres y exentas, de que se puede temer algún
desconcierto.” Señala cómo el remedio para evitar esta posibilidad pasa
por c­ ontrolar la presencia armada de naturales, especialmente en plazas
costeras y “apunta del inconveniente que es que […] las tengan naturales
del país, y el ejemplo de la rebelión de Holanda por la misma causa.”42
Sus argumentos c­ onectaban ­con aquellas opiniones expuestas por algunas
voces del Consejo de Estado años antes, ­como las del Comendador Mayor
de León y el marqués de Velada cuando defendieron que el mando de
las fortalezas estuviesen en manos de los españoles y no de unos natu-
rales de los que cabía recelar, trayendo a la memoria el recuerdo de la
actitud ambigua que el duque de Aerschot había mostrado hacia Juan
de Austria en sus años ­como gobernador general de los Países Bajos43.
Junto a los de Ibarra o Urizar, otros testimonios procedentes de
individuos adscritos al partido español en Bruselas y bajo el servicio de
la Corona llamaban la atención sobre una serie de prácticas que ponían
en evidencia la tendencia que existía entre algunos súbditos flamencos
hacia la colaboración mercantil c­ on los rebeldes. Los avisos que Iñigo de
Borja o el marqués de Guadaleste dieron a Madrid durante el período
de negociación de la tregua acerca de la participación de hombres de
negocios antuerpienses en los proyectos de la Compañía Neerlandesa
de Indias Orientales no hacían sino reforzar una desconfianza cada vez
de mirar mucho, especialmente en las provincias de Flandes y Brabante” (Biblioteca
Nacional de España, ms. 18324, fº 11rº).
41 AGS, Estado, leg. 625, 26. Consulta del Consejo de Estado. 9 de abril de 1607.
42 AGS, Estado, leg. 625, 79. Consulta del Consejo de Estado. 22 de marzo de 1608.
43 AGS, Estado, leg. 2023, 19. Consulta del Consejo de Estado. 5 de junio de 1601.
Negociación, sublevación y ­concierto 305

mayor hacia los vasallos de las provincias católicas44. Se fortalecía así


­con sus palabras aquella negativa imagen de los flamencos por la que
subrayaban sus semejanzas ­con los neerlandeses y la casi natural incli-
nación que los obedientes mostraban hacia el trato ­con los rebeldes y la
imitación de sus actuaciones.
Por otro lado, cabe destacar cómo la circulación de esta imagen
fue más allá de los límites del Consejo de Estado y de los canales de
­comunicación política entre Madrid y Bruselas. En el ­contexto de la
tregua y de forma excepcional, también encontramos rastros de esta
imagen en obras literarias y representaciones teatrales45. No obstante,
para estos primeros años del XVII parece evidente la ausencia de una
distinción terminológica y c­ onceptual clara entre flamencos y neer-
landeses. La diferenciación y la caracterización de estos grupos habría
de ser paulatina a lo largo del siglo, mientras que lo que encontramos
para el período que nos ocupa parece más bien una imagen estereoti-
pada y c­ omún para todos los habitantes de los Países Bajos, derivada
seguramente del recuerdo de aquel período de revuelta generalizada a
partir de 156846. De ésta se resaltaba, ­como hizo Diego de Villalobos y
Benavides, una naturaleza inclinada a la rebelión y a la transformación
del gobierno que c­ ompartían tanto en el norte y en el sur y que justi-
ficaría el hecho de que
han mudado casi forma y señorío diversas veces; haciendo c­ onfederaciones,
ya ­con franceses, ya ­con alemanes y c­ on otros sus c­ onfinantes y vecinos […]
son fáciles a persuadirse a hacerlo, c­ on notable daño de sí propios y nunca
escarmentados; y ­con este deseo de novedades están tan llenos de errores, que
juntas todas las herejías del mundo se hallan sobre ellos47.

Imágenes de este tipo, basadas en el uso de los mismos elementos


a la hora de definir a unas ­comunidades que parecían no diferenciarse
claramente entre sí, estuvieron seguramente en estrecho diálogo e inter-
relación c­ on aquellos discursos en los que se denunciaban una serie de
44 Representativo fue el caso de Henri Hoens, arrestado por presunta colaboración c­ on
mercaderes de la VOC. Referencias en AGS, Estado, leg. 626, 105. Consulta del Consejo
de Estado. 17 de julio de 1608.
45 Rodríguez Pérez, 2008, p. 135-170.
46 Sobre esta véase Parker, 1989. Respecto a la ­construcción de la revuelta ­como lieu de
mémoire fundamental en el desarrollo de identidades y en las rivalidades políticas internas
de los Países Bajos c­ onsúltese Steen, 2015.
47 Villalobos Y Benavides, 1612, fº 1vº.
306 ALBERTO RODRÍGUEZ MARTÍNEZ

c­ omportamientos por parte de flamencos y valones cuyo origen había que


buscar en las revueltas pasadas, una experiencia histórica ­compartida por
las distintas partes de los Países Bajos a partir de la que se habrían creado
unos fuertes lazos de afinidad y colaboración. Se trata de unos argumen-
tos cuyo eco puede advertirse a lo largo de todo el período hasta 1648 y
que, en cierta medida, refuerzan la actual hipótesis de una proximidad
entre el norte y el sur de los Países Bajos que parece evidente, sobre todo
a partir de un análisis c­ omparativo de sus modelos políticos. Pese a la
separación en que parecen haber quedado ambos espacios c­ omo resultado
de una perspectiva historiográfica en clave nacionalista, especialmente
a partir del siglo XIX, los trabajos recientes hacen cada vez más visible
su ­comunicación e interdependencia c­ omo aspectos fundamentales que
ciertos individuos fueron capaces de percibir, c­ ontribuyendo ­con ello a
la ­configuración c­ onceptual de una imagen global de los Países Bajos
fuertemente marcada por la memoria de la rebelión. Una memoria que,
por otra parte, también fue intensamente revivida por parte de ciertos
grupos e individuos neerlandeses ­contrarios a la negociación ­con unos
españoles cuya crueldad y falta de credibilidad intentaron apuntalar
remitiéndose a las experiencias del pasado48. Es el caso de Mauricio de
Nassau quien, en su deseo de deshacer las negociaciones,
volvía a traer a la memoria los sucesos de los tiempos pasados, tantos males,
tantos engaños y crueldades horribles que, según decía, habían c­ ometido los
españoles, juntamente ­con otros fieros recuerdos, que eran a propósito para
hacer sospechosísimo todo trato ­con ellos49.

En un momento en que los mensajes y la simbología característica


de los tiempos de la revuelta parecían volver a manifestarse c­ on fuerza
a través de panfletos, impresos y otros soportes de c­ ontenido político50,
vemos por tanto cómo su memoria también estuvo muy presente en
el ámbito neerlandés durante los años de negociación que desemboca-
ron en la Tregua de los Doce Años. Hablamos de unos recuerdos de
la revuelta que de alguna manera afectaron a las negociaciones, bien
influyéndolas directamente o bien sirviendo de argumento para aquellos
que intentaron influir sobre ellas recurriendo a los ejemplos del pasado.
48 Pollmann, 2010.
49 Bentivoglio, 1687, p. 523.
50 Kaer, 1980. Sobre la pervivencia de la imaginería revolucionaria en estos años y su uti-
lización c­ omo propaganda visual c­ on una finalidad política véase Sawyer, 2010.
Negociación, sublevación y ­concierto 307

Más allá de las mismas, el miedo desde el ámbito hispánico a nuevas


alteraciones y la pervivencia de esta memoria de la revuelta a lo largo
de todo el siglo XVII, la cual circuló entre los distintos nodos políticos
integrados en la Monarquía, se ­convertiría además en uno de los elemen-
tos fundamentales que más influyeron a la hora de c­ onducir la gestión
y el gobierno de las provincias católicas por parte de las autoridades
hispánicas ­con posterioridad a 1609.

Alberto Rodríguez Martínez


Universidad Pablo de Olavide,
Sevilla
LA MEMORIA DE LA REVUELTA
DE FLANDES
en la toma de decisiones
y en la acción política de la Monarquía Hispánica
entre 1621 y 17001

LA MEMORIA DE LA REVUELTA
Y LA EXPERIENCIA DE LA HISTORIA C
­ OMO FUNDAMENTO
DE LA ACCIÓN POLÍTICA

A lo largo del siglo XVII, el ejemplo del pasado y la necesidad


de evitar los errores o aprender de los aciertos que ofrecía la Historia
­constituían los fundamentos del buen gobierno. El éxito de las doctrinas
de la Razón de Estado, gracias a la rápida difusión de la obra de Tácito
por parte de Justo Lipsio y de Giovanni Botero, animaba a todo gober-
nante prudente a sustentar sus decisiones en la práctica de la experiencia
y en el ­conocimiento del pasado ­como el mejor camino para c­ onservar
sus dominios, tanto de las amenazas externas ­como de la inestabilidad
interior2. La única manera de atajar posibles revueltas ­consistía, por lo
tanto, en reflexionar y ­conocer los motivos que habían provocado este
tipo de episodios a lo largo de la Historia. Ahora bien, ­como ha pun-
tualizado Lisa Kattenberg en su reciente tesis doctoral defendida en la
Universidad de Ámsterdam3, el recurso a la Historia no se sustentaba

1 El presente trabajo se enmarca dentro del proyecto de investigación: “El modelo policéntrico
de soberanía ­compartida (siglos XVI-XVIII). Una vía alternativa en la ­construcción del
Estado Moderno” (HAR 2013-45357-P). radicado en la Universidad Pablo de Olavide,
ES-41013, Sevilla, España, del que soy director y que está financiado por el MINECO
gracias a los fondos FEDER de la Unión Europea.
2 Merle, Oïffer-Bomsel, 2017; Carrasco Martínez, 2013; Martínez Bermejo, 2010.
3 Kattenberg, 2017.
310 MANUEL HERRERO SÁNCHEZ

tan sólo en los ejemplos extraídos de la Biblia o de la antigüedad clásica,


sino que tomaba también en ­consideración las experiencias sacadas de
los movimientos de revuelta c­ ontemporáneos. El desastroso ejemplo
de la revuelta de Flandes entre 1580 y 1650 se ­convirtió en uno de los
principales temas de reflexión para los teóricos políticos a la vez que
permeaba de forma ­constante el ejercicio de la acción política.
En línea ­con las ­consideraciones esbozadas por Lisa Kattenberg, el
objetivo de este capítulo ­consiste en enfatizar el ­considerable impacto
que la memoria de la revuelta de Flandes imprimió en la práctica coti-
diana de gobierno en el seno de la Monarquía Hispánica. Comenzaremos
por ofrecer unas breves c­ onsideraciones en torno al notable peso que
la interpretación del levantamiento de los Países Bajos ha tenido en la
­consolidación de una serie de estereotipos historiográficos sustentados
en el recurso a toda una gama de dualismos reduccionistas por los que
se presenta el c­ onflicto entre la Monarquía Hispánica y las Provincias
Unidas c­ omo la expresión más elocuente de un enfrentamiento entre
arcaísmo y progreso, absolutismo y parlamentarismo, sistemas dinásticos
y republicanismo. A partir de estas premisas, procederemos a analizar
cómo el recuerdo y la mención permanente de dichos acontecimientos
traumáticos por parte de los c­ ontemporáneos ­condicionaron de forma
notable la toma de decisiones políticas entre 1621, momento de renovación
del ­conflicto ­con las Provincias Unidas tras los doce años de tregua, y la
llegada al trono de la nueva dinastía borbónica en 1700, que implicó una
revisión del modelo de gobernanza de los dominios bajo la jurisdicción
del monarca católico. Durante estos años, la memoria de la ruptura de los
Países Bajos actuó c­ omo un acicate para reflexionar sobre la legitimidad
del derecho de resistencia c­ ontra la tiranía y para moderar toda posible
medida absolutista y centralizadora c­ omo generadoras de descontento.
El elevado coste en hombres y recursos derivados del c­ onflicto flamenco
suscitó el temor a que los acontecimientos revolucionarios de la década de
1640 en Cataluña, Portugal, Nápoles y Sicilia, asociados a la puesta en
cuestión durante el valimiento del c­ onde duque de Olivares del modelo
de gobierno c­ onsensual y respetuoso c­ on los privilegios y libertades
locales característico de la Monarquía Hispánica, pudiesen suponer la
definitiva fragmentación de tan c­ omplejo agregado territorial. Tras el
reconocimiento de la independencia de las Provincias Unidas en 1648,
que entrañó un proceso de acercamiento diplomático hacia las potencias
La memoria de la revuelta de Flandes 311

protestantes, y ante el triunfo de las formas de soberanía plena en Francia


una vez sofocada la Fronda, los Habsburgo se erigieron en los garantes
de la preservación en Europa de un modelo de soberanía policéntrico
y desagregado amenazado por la política expansionista de Luis XIV4.
No en vano, el rey Cristianísimo no tardó en ser presentado ­como el
­continuador de la agresiva política ­confesional y autoritaria de Felipe II lo
que implicó una reactualización del recuerdo de la rebelión de Flandes. De
forma paradójica, este proceso de reasignación de significados en relación
a la memoria del levantamiento de los Países Bajos sirvió para fortalecer
la autoridad del monarca católico en sus dominios septentrionales. A
pesar de la reducción de efectivos militares en la zona, de los sucesivos
recortes territoriales y del permanente estado de guerra, durante la
segunda mitad del siglo XVII, y salvo algunos episodios menores que,
­como la revuelta de Amberes a finales de la década de 1650, se saldaron
­con la renovación de los ­consensos, la fidelidad de las autoridades locales
hacia un soberano que aparecía c­ omo uno de los principales garantes de
sus privilegios y libertades fue la tónica dominante. La memoria de los
acontecimientos revolucionarios de la centuria anterior siguió marcando
la manera en el que el soberano debía relacionarse c­ on las numerosas
instancias de poder local en sus dominios septentrionales y se ­convirtió
en uno de los fundamentos de la fidelidad.

LA REVUELTA DE FLANDES EN LA CREACIÓN


DE ESTEREOTIPOS HISTORIOGRÁFICOS

En un reciente estudio en torno al alcance del republicanismo en la


Europa Moderna, hemos tenido ocasión de advertir sobre los límites de
un enfoque prevalentemente atlántico y anglosajón de dicho fenómeno
y sobre la perduración de toda una serie de narrativas historiográficas
reticentes a la hora de señalar las analogías y los múltiples elementos
de interdependencia entre formas políticas que, ­como las monarquías y
las repúblicas, se nos han presentado hasta el momento ­como antagó-
nicas pero que requieren de nuevos análisis cruzados más atentos a
4 Herrero, 2000.
312 MANUEL HERRERO SÁNCHEZ

observar los numerosos elementos de hibridación5. Se trata, en suma,


de cuestionar toda una serie de explicaciones unilineales sustentadas
en el establecimiento de rígidos modelos binarios que, de manera sim-
plista, han establecido una rígida oposición entre un espacio innovador,
protestante, parlamentario, tolerante y republicano, representado por
las Provincias Unidas e Inglaterra, en ­constante enfrentamiento ­con el
catolicismo intransigente y las formas políticas autoritarias y aristocrá-
ticas característicos de Francia y la Monarquía Hispánica6. La realidad,
­como ha observado c­ on acierto James Collins en sus c­ omentarios en
torno al notable peso del republicanismo en la monarquía francesa7,
era bastante más c­ ompleja y nos permite atisbar numerosas analogías
entre los dos vértices de la c­ omparación e interesantes c­ oncomitancias
entre dos modelos aparentemente antagónicos.
A pesar del notable peso de las ciudades en el funcionamiento de
una monarquía que c­ omo la hispánica incluía en su seno algunos de
los territorios más dinámicos y densamente urbanizados del ­continente
y de que el respeto a la diversidad jurisdiccional, lingüística, ­cultural,
étnica y política ­constituía una de las principales señas de identidad de
dicha estructura política, sigue siendo frecuente subrayar la aparente
incompatibilidad entre el agregado imperial bajo la jurisdicción de los
Habsburgo y la defensa de las libertades locales. A partir de estos pos-
tulados, la revuelta de Flandes no sólo sería inevitable sino que aparece
­como la expresión más palpable de dicha discordancia para erigirse
en el primer eslabón de un proceso de emancipación ­contra la tiranía.
Del mismo modo, y a pesar de la férrea rivalidad mercantil, la alianza
de las recién creadas Provincias Unidas c­ on Inglaterra se nos presenta,
según la clásica interpretación whig de la Historia8, ­como un proceso
natural y ­como un valioso ­componente moderador de la deriva dinástica
y absolutista experimentada en Gran Bretaña durante el gobierno de
los Estuardos9. El amor por la libertad y el valor de la joven república
5 Herrero, 2017a.
6 A modo de ejemplo véanse Holenstein, Maissen y Prak, 2008; Skinner y Van Gelderen,
2000 así c­ omo las recientes ­consideraciones de Elliott, 2012, p. 74-75.
7 Collins, 2016.
8 Sobre la escasa relevancia que, desde la historiografía whig, tuvo el pensamiento político del
mundo católico y de la Europa meridional véanse las ­consideraciones de Gil Pujol, 2012.
9 Aunque sustenta sus planteamientos en una rigurosa crítica a la narrativa whig de la
revolución inglesa de 1688, Steven Pincus subraya los fuertes vínculos entre el modelo
estatal anglo-holandés ­como diametralmente opuesto al modelo alternativo católico
La memoria de la revuelta de Flandes 313

holandesa en su enfrentamiento ­con la principal potencia imperial del


momento, que tendría en la abjuración de Felipe II su más palmaria
expresión, c­ onstituía, en palabras de Benjamin Franklin “our great
example” y estaba en la base de la declaración de independencia de los
Estados Unidos en 177610.

EL IMPACTO DE LA REVUELTA
DE LOS PAÍSES BAJOS Y DE LA GUERRA DE FLANDES
ENTRE LOS C­ ONTEMPORÁNEOS

Como se desprende del expresivo título del reciente libro de Lisa


Jardine en el que, en línea ­con los trabajos de Charles Wilson sobre la
inestimable aportación holandesa a la civilización occidental, subraya
la apropiación por parte de Inglaterra de los valores, formas de vida y
modelo burgués característicos, a su modo de ver, de la república de
las Provincias Unidas, este tipo de cuadros explicativos se resisten a
desaparecer11. Los estrechos lazos dinásticos, ­culturales e intelectuales
de ambas potencias no eran el fruto de la llegada al trono inglés de
Guillermo III de Orange sino que, ­como sugiere Hugh Dunthorne,
emanaban del imponente impacto que la revuelta de Flandes había
provocado en numerosos sectores de la población inglesa gracias a la
circulación, impulsada desde finales del siglo XVI por los estrechos
­contactos diplomáticos y militares, de estudiantes, soldados, hombres de
negocios, pensadores políticos, refugiados religiosos o simples marineros12.
El ejemplo de la revuelta de Flandes y las lecciones que podían
extraerse del largo c­ onflicto militar entre las Provincias Unidas y la
Monarquía Hispánica en los Países Bajos no atraían tan sólo el interés
de Inglaterra sino que se c­ onvirtieron también en el principal foco de
y absolutista representado por la Francia de Luis XIV sin tomar en c­ onsideración el
peso crucial del sostén de los Habsburgo de Viena y de Madrid a favor de la causa de
Guillermo III, Pincus, 2010.
10 Franklin, Benjamin (1907), The Writings of Benjamin Franklin, Collected and edited by
Albert H. Smyth, vol. 7, 1777-1778, New York, Haskells House Publishers, p. 139.
11 Jardine, 2008.
12 Dunthorne, 2013.
314 MANUEL HERRERO SÁNCHEZ

atención de una Europa asolada por la guerra y por todo tipo de movi-
mientos de protesta derivados de las crecientes exigencias fiscales y de
los sangrientos enfrentamientos religiosos que dividían el c­ ontinente.
Como ha advertido c­ on acierto Jasper Van der Steen en un reciente
libro en torno al peso de la rememoración de la guerra de Flandes a
lo largo del siglo XVII, dicho c­ onflicto se c­ onvirtió en un referente
fundamental en la ­conformación de una memoria c­ omún tanto en las
Provincias Unidas ­como en los Países Bajos del sur que se mantuvieron
fieles al monarca católico13. No debemos olvidar tampoco que, a pesar
de la notable difusión y el impacto de los innumerables panfletos dis-
tribuidos desde Holanda en ­contra de los Habsburgo14, los libros sobre
la guerra de Flandes que lograron mayor circulación fueron publicados
en el espacio político católico. En 1632, el que fuera internuncio papal
en Bruselas entre 1607 y 1615 y nuncio apostólico en París entre 1616
y 1621, Guido Bentivoglio, publicaba en Colonia la primera parte Della
guerra di Fiandria que no tardó en ­convertirse en la obra de referencia
sobre la fase inicial del ­conflicto, ­como acreditan las sucesivas reediciones
y el gran número de lenguas a las que fue traducido15. Ahora bien, el
libro más c­ onsultado sobre sobre el c­ onflicto de los Países Bajos fueron
los diez volúmenes redactados por el jesuita Famiano Strada aparecidos
por vez primera en latín en 1632 y que, a pesar del elevado coste de la

13 Van der Steen, 2015.


14 Sobre la difusión de panfletos y el uso de la imprenta en las Provincias Unidas, véase
Harline, 1987.
15 Bentivoglio, Guido, Della guerra di Fiandria, Colonia, 1632. Las nuevas ediciones del
libro se fueron sucediendo de forma vertiginosa. En Colonia se volvía a publicar entre
1633 y 1639 añadiendo nuevos libros hasta alcanzar los 10 volúmenes; en Venecia en
1637 y de nuevo en Colonia y en Venecia tres años después: en Roma en 1647 y 1654,
París en 1648, Bolonia en 1655, Venecia en 1667 y 1687. En 1641, el padre Basilio Varen
realizaría una edición en castellano que sería c­ ontinuada por Antonio Vásquez. En el
prólogo a la edición aparecida en Amberes en 1687 se señalaba: “Reconociendo yo los
grandes intereses que resultaría a nuestra gloriosa nación naturalizando en su lengua las
acciones prodigiosas de sus hijos me resolví de servirla… porque los casos de que se hace
memoria en este volumen es fuerza engendren fuego en los pechos españoles ­con que
de nuevo se informen de aquel valiente ardimiento c­ on que se c­ onsiguieron tan ilustres
victorias. Gran fuerza tuvo siempre el ejemplo de los mayores para mover a su imitación.
Y en esta edad, que parece declinan de aquel esfuerzo antiguo, juzgué por ­conveniente
viesen c­ on claridad tan numerosos ejemplos para que c­ on la fresca memoria de ellos se
alienten a imitarlos en las presentes ocasiones.” Bentivioglio, Guido, Las guerras de Flandes
desde la muerte del emperador Carlos V hasta la c­ onclusion de la tregua de doze anos, Amberes,
Geron Verdussen, 1687.
La memoria de la revuelta de Flandes 315

edición, serían traducidos nada menos que a seis idiomas. Una versión en
holandés llegó a publicarse ­con gran éxito en Dordrecht por la aceptación
que alcanzó entre los sectores anti-orangistas de la república debido a
las ácidas críticas vertidas ­contra el Estatúder y su entorno cortesano16.
El valor ejemplarizante de la guerra de Flandes parecía estar indiso-
lublemente unido a los motivos que movían a la Monarquía Hispánica
a mantener su presencia militar en dicho territorio a pesar del elevado
coste en hombres y en dinero y de las numerosas voces que apostaban
por alcanzar un acuerdo de paz c­ on los rebeldes flamencos que permi-
tiera a la corona canalizar sus energías hacia otros escenarios. En 1640,
lo advertía de forma harto elocuente Saavedra Fajardo cuando señalaba:
Con las guerras de los Países Bajos se olvidaron en España las civiles. Mucho
ha importado a su monarquía aquella palestra o escuela marcial, donde se
han aprendido y ejercitado todas las artes militares. Si bien ha sido c­ omún la
enseñanza en los émulos y enemigos suyos, habiendo todos los príncipes de
Europa tomado allí lección de la espada. Y también ha sido costoso el sustentar
la guerra en provincias destempladas y remotas, a precio de las vidas y de
graves usuras, ­con tantas ventajas de los enemigos y tan pocas nuestras, que
se puede dudar si nos estaría mejor el ser vencidos o el vencer, o si c­ onvendría
aplicar algún medio, ­con que se extinguiese, o por lo menos se suspendiese
aquel fuego sediento de la sangre y del oro, para emplear en ambos mares,
Mediterráneo y Océano, manteniendo en África la guerra, cuyos progresos,
por la vecindad de Italia y España, unirían la monarquía. Pero el amor a
aquellos vasallos tan antiguos y tan buenos, y el deseo de verlos desengañados
de la vil servidumbre que padecen a título de libertad, y que se reduzcan al
verdadero c­ ulto, puede más que la razón de Estado17.

El valor de Flandes no radicaba tan sólo en su función de principal


plaza de armas de la Monarquía o en su carácter de antemural imperial
capaz de canalizar las energías guerreras de la nobleza fuera del corazón
de Castilla y mantener la paz interior del reino18. El principal motivo
que movía a la corona a sostener un ­conflicto tan extenuante derivaba del
­compromiso del monarca a la hora de velar por la defensa de la “verdadera”
fe y de las obligaciones c­ ontraídas c­ on los pueblos bajo su jurisdicción

16 Strada, Famiano (1632-1649), De Bello Belgico, Amberes, Jan Cnobbaert.


17 Empresa 83, Saavedra Fajardo, Diego, Idea de un príncipe Christiano representada en 100
empresas, Munich, 1640.
18 Sobre el papel de Flandes en el seno de la Monarquía Hispánica véanse nuestras
­consideraciones generales en Herrero, 2005.
316 MANUEL HERRERO SÁNCHEZ

que, en última instancia, eran los depositarios de la soberanía y los que


dotaban de legitimidad y autoridad el dominio que los Habsburgo ejercían
sobre los vastos y heterogéneos territorios bajo su jurisdicción. El sostén
de las potencias protestantes en defensa del derecho de las Provincias
Unidas a romper los vínculos de dependencia c­ on un soberano acusado
de tirano, era semejante al apoyo prestado desde la Monarquía Hispánica
a la Liga católica en Francia19 y explica que las ciudades flamencas se
­convirtieran en el principal lugar de acogida del exilio católico interna-
cional20. La defensa del bien ­común asociado a la respublica entrañaba
una marcada interrelación entre valores morales y políticos y dotaba
de un evidente tinte religioso a una justicia c­ omunitaria que, según ha
subrayado Bartolomé Clavero, se caracterizaba por la existencia de una
fuerte pluralidad de jurisdicciones21. Como apuntaban los principales
teólogos y juristas castellanos (que tanto influjo ejercieron sobre pensa-
dores políticos protestantes c­ omo Johannes Althusius o Hugo Grotio
­con los que ­compartían un mismo universo teórico y ­conceptual) el rey
se veía obligado a respetar las distintas jurisdicciones y las inmunidades
y franquicias de los múltiples órganos corporativos que operaban en sus
dominios, que eran la expresión de la existencia de una justicia privativa
y de un orden ­comunitario en el que, por voluntad divina, reposaba la
soberanía22. El catolicismo actuaba, por lo tanto, c­ omo un imponente
factor de cohesión y era el fundamento de una monarquía encargada
de velar por la existencia de una justicia equitativa y respetuosa ­con los
espacios privativos de cada una de las corporaciones que c­ onformaban
el todo. Como ­con agudeza ha señalado Giovanni Levi, esta justicia
­comunitaria era incompatible ­con procesos de centralización y homoge-
neización administrativa c­ omo los que acabarán por adoptarse tanto en
Francia c­ omo en Inglaterra a finales del siglo XVII. El monarca católico
era ­considerado, sin duda, ­como el representante de Dios “pero no había
sido elegido por Dios precisamente porque Dios había creado al hombre
social, y, por tanto, ­con el deber de darse un gobierno según su libre
19 Descimon y Ruiz Ibáñez, 2005.
20 Ruiz Ibáñez y Pérez Tostado, 2015.
21 Clavero, 1986.
22 José Javier Ruiz Ibáñez ha puesto de manifiesto cómo en 1595, al aceptar el dominio sobre
Cambrai, el monarca católico reconocía implícitamente la validez de la transferencia de
soberanía por vía electiva y el derecho del pueblo a la hora de elegir a su nuevo señor y
deponer a su antiguo soberano, Ruiz Ibáñez, 2000.
La memoria de la revuelta de Flandes 317

albedrío. Quizás no se ha enfatizado lo suficiente el hecho de que una


monarquía católica c­ ompuesta por territorios tan diversos tenía el deber
de respetar las formas de gobierno que los hombres se habían dado, a
pesar de que podían intentar modificarlas, pero solo c­ on el c­ onsenso
de estos […]. De este modo, por las venas del Imperio circulaba sangre
­comunitaria y, al menos, en este sentido, republicana.”23
La revuelta de Flandes se c­ onvirtió en uno de los principales ejes de
la reflexión política por parte de los ­contemporáneos tanto en el espacio
católico c­ omo en el protestante. Sin embargo, las discusiones sobre su
mantenimiento o sobre la legitimidad de la ruptura ­con el soberano
legítimo no eran privativas de los sectores cortesanos o de los princi-
pales pensadores políticos sino que, c­ omo se observa en el caso del reino
Castilla, el territorio que mayores fondos aportaba al esfuerzo militar
desplegado por la Monarquía en el norte de Europa, alcanzaba de lleno
a los sectores populares y estaba presente en la vida cotidiana de sus
habitantes. Los innumerables refranes y proverbios en los que aparecía
el término “Flandes” oscilaban entre la exaltación de sus riquezas y de la
cortesanía de sus habitantes (“No hay más Flandes”) y las más frecuentes
referencias a un esfuerzo ímprobo y casi imposible (“O todo Flandes, o
todo a fondo”) o a las tremendas ­consecuencias de un ­conflicto extenuante
(“España mi natura, Italia mi ventura, Flandes mi sepultura”)24. El teatro
barroco, que ­constituía otro de los mayores vehículos de canalización
ideológica, se ­convirtió en una de las principales vías de popularización
del c­ onflicto flamenco en Castilla. Yolanda Rodríguez ha recogido nada
menos que 25 obras de teatro en la que se abordaban, ya fuese de manera
directa o indirecta, diferentes episodios de dicha ­contienda25. Junto a la
23 Levi, 2017, p. 14.
24 Todos estos refranes quedaban recogidos en el manuscrito elaborado en 1627 por el
profesor del Colegio Trilingüe de la Universidad de Salamanca, Gonzalo Correas, que no
se publicaría hasta el siglo XX bajo el título de Vocabulario de refranes proverbiales y otras
fórmulas c­ omunes de la lengua castellana en que van todos los impresos antes y otra gran copia que
juntó el Maestro Gonzalo de Correas. Sobre la escasa presencia de refranes que ofrecen una
visión favorable de Flandes, Álvaro Baraibar ha recogido un ácido texto de Francisco de
Quevedo tomado de su Prágmatica de aranceles generales en el que señala: “Los que, estando
en alguna ­conversación de regocijo, dicen No hay más Flandes, por encarecimiento de gusto,
les c­ ondenamos a que sean desdichos en presencia de hermano mayor y hermandad, pues
hasta ahora no hemos visto de aquellos estados cosa de entretenimiento, sino ojos sacados,
tuertos, o brazos quebrados y piernas”, Baraibar, 2013.
25 Entre estas obras destacan: El asalto de Maestrique o los españoles en Flandes de Lope de Vega,
El señor don Juan de Austria en Flandes de Alonso Remón, El sitio de Breda de Calderónla
318 MANUEL HERRERO SÁNCHEZ

descripción de episodios heroicos o la dura crítica hacia los rebeldes, no


siempre se ofrecía una imagen idealizada de los soldados españoles sino
que en muchos casos se ponía el acento en las miserias de la guerra, el
hambre y el papel protagonista de la muerte.

EL EJEMPLO DE LA REVUELTA DE FLANDES


EN EL ESTALLIDO DE NUEVOS MOVIMIENTOS
DE PROTESTA EN EL SENO DE LA MONARQUÍA HISPÁNICA
DURANTE EL SIGLO XVII

En 1645, en plena crisis ­constitucional de la monarquía católica tras el


levantamiento de Cataluña y la separación de Portugal, Diego Saavedra
Fajardo advertía en estos ­contundentes términos sobre los peligros de
propagación que el estallido de todo movimiento de protesta podía
provocar en el seno de una estructura política fragmentada ­como la his-
pánica: “No advirtieron los castellanos que la rebelión en una provincia
suele encender ­con sus centellas las demás.”26 En efecto, la memoria de
la exitosa revuelta de los Países Bajos y la c­ onstante referencia a dichos
acontecimientos se ­convirtieron en un lugar ­común entre los protagonistas
de las numerosas revueltas y revoluciones que sacudieron Europa a lo
largo del siglo XVII pero también entre los responsables de sofocarlas
o de aplicar medidas para que determinados estallidos de violencia no
terminaran por degenerar en un proceso incontrolable.
En el interior de la Monarquía Hispánica disponemos de numerosos
testimonios que nos informan sobre el establecimiento de este tipo de
paralelismo y que c­ onstituyen una prueba fehaciente sobre el impacto
que el recuerdo de tan dramático episodio ejerció sobre la acción de

Barca: Rodríguez, 2002 y 2008. Por su parte, Porfirio Sanz Camañes hace referencia a
otras obras de teatro c­ omo Los amotinados de Flandes de Luis Vélez, El valiente negro en
Flandes de Andrés de Claramonte o El saco de Amberes atribuida a Rojas Zorrilla: Sanz
Camañes (2004).
26 Diego Saavedra Fajardo, Locuras de Europa, 1645. Este texto no se publicaría hasta mediados
del siglo XVIII pero su circulación manuscrita fue muy amplia y su impacto, ­como la
mayor parte de la obra de Saavedra Fajardo, uno de los publicistas y diplomáticos que
mayor reconocimiento alcanzó en la Europa del momento, ­considerable.
La memoria de la revuelta de Flandes 319

gobierno. Álvaro Baraibar ha rastreado numerosos ejemplos sobre el


temor de que los altercados de Aragón en la década de 1590 pudiesen
degenerar en “otro Flandes” o cómo el levantamiento de Cataluña en
1640 corría el peligro de transformarse, en palabras del cronista castel-
lano Gil González Dávila, en “el segundo Flandes de España que acabe
­con lo poco que queda de sustancia y vida.” Una correlación que alcanzó
su máxima expresión para el caso del largo y violento ­conflicto que
mantuvo la monarquía en América c­ ontra los auracanos ­como acredita
el hecho de que, en su Historia general del reino de Chile, el jesuita Diego
de Rosales incluyese el elocuente subtítulo de Flandes Indiano. Se trataba
de una expresión que ya había aparecido en numerosas crónicas o en la
correspondencia de los representantes del rey en la zona y que, recorría
las páginas de la relación escrita por el franciscano Diego de Córdoba
Salinas en 1651 donde ­comparaba el indomable alzamiento de los pueblos
indígenas de Chile ­con lo que había supuesto “Numancia ­contra el poder
de Roma, Cantabria ­contra la felicidad de Augusto César y Flandes para
la augusta casa de Austria.” El propio Diego de Rosales relacionaba este
­conflicto ­con el de los Países Bajos debido a la interminable duración
de la guerra y a la dificultad para sofocar la rebelión a pesar de que la
corona hubiese recurrido para ello a los más experimentados soldados,
algunos de los cuales habían ­combatido incluso en el frente flamenco27.
La circulación de experiencias imperiales de la mano de todo tipo de
entramados mercantiles, aristocráticos, burocráticos, religiosos o militares
actuaba ­como un claro factor de cohesión entre los distantes y heterogé-
neos dominios bajo la jurisdicción del monarca católico. No obstante, en
muchas ocasiones los ­conocimientos adquiridos en determinados terri-
torios en c­ onflicto no servían tan sólo para aplicar medidas destinadas a
reforzar los lazos de unión sino que podían ­convertirse en un factor de
desestabilización. Como ha señalado Alain Hugon en su análisis memorial
en torno a la revuelta de Nápoles entre 1647 y 1648, el éxito inicial del

27 “La dureza de la guerra en la Araucanía, la prolongación de dicha guerra en el tiempo


y su presencia c­ onstante en la vida ­chilena, la imposibilidad de encontrar un final al
­conflicto, el enorme coste económico que suponía para las arcas reales junto a otros
aspectos más ­concretos ­como la presencia en el país andino de veteranos de la guerra en
los Países Bajos, la ­constitución de un cuerpo de soldados que se estableció en la región
de manera permanente y los intentos holandeses de aliarse ­con los araucanos y asentarse
en la región, fueron sin duda aspectos que propiciaron la asociación de ideas entre Chile
y Flandes.” Baraibar, 2013.
320 MANUEL HERRERO SÁNCHEZ

movimiento popular procedía, en gran medida, de las habilidades adqui-


ridas por antiguos soldados que, ­como los capitanes Francesco Filangiero o
Domenico Mellone, habían servido en los tercios que operaban en Flandes28.
Por su parte, Salvo Mastellone ha subrayado el interés despertado por las
relaciones de la guerra de Flandes de Guido Bentivoglio entre aquellos
sectores deseosos de poner coto a la hegemonía hispánica sobre Italia
al demostrar que una revuelta c­ ontra el monarca católico podía tener
éxito29. Las analogías entre el caso holandés y el estallido revolucionario en
Nápoles son numerosas: el manifiesto por el que se declaraba la república
en 1647 tomaba c­ omo modelo el Acta de abjuración c­ ontra Felipe II de
1581, mientras que, ­como señalara el cronista Fuidoro, el papel protector
que se esperaba que adoptara el duque de Guisa era semejante al ejercido
por el príncipe de Orange en las Provincias Unidas30. La experiencia de
la revuelta de Flandes tuvo asimismo un notable ascendiente una vez
sofocada la rebelión. A la hora de restablecer los ­consensos entre el rey y
sus súbditos napolitanos, Don Juan José de Austria se inclinó, ­contra el
parecer del c­ onde de Oñate, que apostaba por la ejecución ejemplar del
duque de Guisa, por el camino de la clemencia al c­ onsiderar que su muerte
podría provocar un movimiento de repulsa semejante al ajusticiamiento
de los c­ ondes de Egmont y Hornes por parte del duque de Alba en 1568.
En los Países Bajos meridionales, a pesar del permanente estado de
guerra y de la paulatina disminución de efectivos militares en la zona, en
especial tras las firmas de las paces de Westfalia y Pirineos, la estabilidad
fue la tónica dominante y no se experimentaron movimientos revolucio-
narios semejantes a los acaecidos en Cataluña, Portugal, Nápoles o Sicilia.
El riguroso respeto hacia los privilegios locales por parte del soberano y
la situación por la que atravesaban los territorios que habían sido ocu-
pados por Francia, que vieron rigurosamente cercenadas sus libertades,
pero también por las Provincias Unidas en Flandes y Brabante que, bajo
el apelativo de Estados de la Generalidad, carecían de espacios de repre-
sentación semejantes al resto de los dominios de la república, actuaron
­como un acicate para ­consolidar la obediencia hacia el monarca católico.
Aun así, la memoria de la revuelta de Flandes seguía estando presente y
cualquier movimiento desestabilizador reactivaba dicho recuerdo. Como
28 Hugon, 2011, p. 197-198.
29 Mastellone, 1985.
30 Comparato, 1987.
La memoria de la revuelta de Flandes 321

ha señalado René Vermeir, el descontento de la nobleza por la adversa


evolución del ­conflicto militar provocó en 1632 una situación de inesta-
bilidad que fue atajada de forma ­contundente por parte del Conde duque
de Olivares. Ante la amenaza de un ­complot semejante al liderado por la
aristocracia ­contra Felipe II, el Príncipe de Arenberg y duque de Arschot,
grande de España y principal noble flamenco, fue apresado en Madrid al
año siguiente acusado de estar a la cabeza de una ­conjura que pretendía
ceder dichos territorios al rey de Francia31.
Una vez reconocida la independencia de las Provincias Unidas en 1648,
el gobernador de los Países Bajos, el Archiduque Leopoldo Guillermo,
enfatizaba los recelos que todavía existían hacia la alta aristocracia fla-
menca. En un informe remitido a Felipe IV en 1653 para justificar las
medidas aplicadas para evitar que la nobleza volviese a ocupar cargos
relevantes en el Consejo de Estado de Bruselas, volvía a sacar a colación
el recuerdo de la revuelta de Flandes al acusarles de haber sido “los
primeros autores de la Rebelión General de estos países valiéndose de
su autoridad y sequito.”32 A pesar de todo, y ­como hemos tenido oca-
sión de observar para el caso de Nápoles, la vía de la clemencia seguía
siendo el camino elegido para sofocar los escasos movimientos desesta-
bilizadores que afectaron a dichos dominios durante la segunda mitad
del siglo XVII33. Tras la detención ese mismo año del ­conde Bassigny,
gobernador del Estado de Artois, acusado de encabezar una ­conjura para
ceder algunas plazas tan estratégicas c­ omo Saint-Omer o Gravelinas al
enemigo francés, las irregularidades del proceso judicial emprendido
al no haber remitido la causa al Gran Consejo de Malinas ­como exigía
la calidad del prisionero, permitieron a Felipe IV recomendar al nuevo
gobernador de los Países Bajos, Don Juan José de Autria, evitar una
sentencia rigurosa pues, según señalaba: “sentencias y castigos de esta
calidad en países y en personas tales nunca han salido bien pues aún
de presente se padecen los daños de las que hubieron por lo pasado.”34

31 Entre los c­ onsejeros de Estado que prepararon el arresto se encontraba el duque de Alba
lo que, según un observador ­contemporáneo era un “mal presagio para flamencos por las
cabezas que quitó su abuelo en los Países Bajos” en Vermeir, 2009, p. 320-321.
32 Archives Générales du Royaume de Bruxelles (AGRB), Secrétairerie ­d’État et de Guerre
SEG, 254, f.120, El Archiduque Leopoldo Guillermo a Felipe IV, Bruselas, 1653.
33 Herrero, 2000, p. 201-220. Véase también Ribot, 2015.
34 Archivo General de Simancas (AGS), Estado, 2267 Carta de Felipe IV a Don Juan José
de Austria, Madrid, 11-7-1656.
322 MANUEL HERRERO SÁNCHEZ

Más preocupantes resultaron los movimientos desestabilizadores y la


deriva democratizadora en el seno del gobierno municipal de la ciudad
de Amberes que, en pleno avance francés en la frontera meridional de
los Países Bajos, logró arrancar al gobernador nuevos privilegios fiscales.
En palabras del Archiduque Leopoldo Guillermo, no existía otra opción
que ir “caminando c­ on dulzura al remedio” y realizar nuevas ­concesiones
pues, según se recogía en los múltiples panfletos que circulaban por la
ciudad, en caso ­contrario “se juntarían cien hombres de diversos esta-
mentos para representármelo, acción ­con que ­comenzó la rebelión de
estas provincias.”35 El final del c­ onflicto ­con Francia en 1659, permitió
al nuevo gobernador general, el marqués de Caracena, cortar de raíz la
protesta. Al mando de un nutrido ejército cercó la ciudad y procedió a
negociar ­con los rebeldes. En lugar de recurrir a la violencia de las armas
y dar rienda suelta a un saqueo de la ciudad que habría podido provocar
unos resultados semejantes a los experimentados en 1576 por la famosa
furia española, se inclinó por la vía del c­ onsenso y por “obrar c­ on blan-
dura”. Mediante un castigo selectivo, por el que tan sólo se emitieron 6
sentencias de muerte, se c­ omprometió a c­ onservar los privilegios de la
villa a cambio de recuperar los derechos reales y de imponer un nuevo
sistema en la elección de los magistrados lo que fue aplaudido por el
resto de las ciudades de los Países Bajos pero también de las ciudades
de las Provincias Unidas que recelaban del ascendiente alcanzado por
los gremios durante el periodo de inestabilidad. Del mismo modo, evitó
reforzar la guarnición militar de Amberes ya que, c­ omo señalaba en
el pormenorizado informe que remitió a Madrid, dicha medida habría
podido ­comprometer los efectos favorables que, para el ­comercio, se
podían esperar de la firma de la paz c­ on Francia: “pues si pusiésemos
la guarnición necesaria, ningún mercader ni negociante querría venir a
ella y muchos de los que hoy hay se saldrían.”36 Se trataba, a la postre,
de evitar una situación semejante a la experimentada por la ciudad de
Amberes en 1585 cuando, tras la recuperación de la plaza por Alejandro
Farnesio, gran parte de la elite mercantil se trasladó a Ámsterdam.
El marqués de Caracena, al igual que la mayor parte de los hombres
de gobierno al servicio del monarca católico, parecía seguir las pautas
35 AGRB, SEG, 259, f. 88, Carta del Archiduque Leopoldo Guillermo a Felipe IV, Bruselas,
13-2-1655.
36 AGS, Estado, 2095, Carta del marqués de Caracena a Felipe IV, Amberes, 28-10-1659.
La memoria de la revuelta de Flandes 323

marcadas en su momento por Justo Lipsio cuando apostaba por la vía


del ­concierto sobre la del c­ onflicto para poner fin a los enfrentamientos
civiles que asolaban Europa. Para ello, advertía sobre la necesidad de ser
selectivo en los castigos y limitarlos exclusivamente a los c­ ulpables sin
poner en cuestión los privilegios y las libertades locales “porque lo que
muchos ­cometieron, no se puede vengar en todos.”37 Se trataba de una
exaltación hacia las formas de gobierno moderado y respetuoso c­ on los
ordenamientos jurídicos locales que no difería de las recomendaciones
propuestas en 1601 por Philippe de Croy, c­ onde de Solre, al c­ omienzo
del gobierno de los Archiduques en los Países Bajos en las que no parecía
ahorrar críticas hacia la política practicada por los ministros de Felipe II
al ­comienzo de la revuelta de Flandes:
Tan sólo existen dos maneras para mantener un estado y estas son ­como los
dos polos Ártico y Antártico sobre los que gira la máquina de este mundo.
Son la fuerza y el amor […] El declive de nuestra prosperidad ­comenzó ­con
un gobierno absoluto. Al abolir las antiguas costumbres es c­ omo si se hubiese
abolido el bienestar del país […] sus ministros [de Felipe II] juzgaron que
era necesario debilitar a sus súbditos para fortalecer al príncipe, por lo que
­consideraron más eficaz recurrir al rigor que al amor38.

Los duros reproches hacía las sanguinarias y brutales medidas aplica-


das para sofocar la rebelión de Flandes eran ­compartidos en Castilla por
figuras de la talla del padre Mariana que en su De Rege no titubeaba a
la hora de acusar a Felipe II de haber instigado los disturbios al ejecutar
de forma arbitraria a los c­ ondes de Egmont y Hornes enajenándose, de
este modo, el necesario sostén de la nobleza flamenca en lugar de apostar
por una política c­ onciliadora sustentada en el respaldo de las asambleas
representativas locales que hubiera sido mucho más idónea para cortar de
raíz la difusión de la herejía39. La prudencia política no hacía aconsejable
37 Lipsio, Justo (1598), Políticas. Estudio de Javier Peña Echevarría y Modesto Santos López,
Tecnos, Madrid, 1997, libro VI, p. 325. En ese mismo libro señalaba: “la guerra civil se puede
acabar en dos maneras: por ­concierto, o por victoria. Yo escojo el ­concierto”, Ibid., p. 338.
38 “Il ­n’y a que deux moyens pour maintenir un état et sont c­omme les deux pôles Arctiques et
Antarctique sur lesquels la machine de ce grand monde roule. ­C’est la force et ­l’amour […] Le
déclin de notre prospérité c­ommença avec un c­ommandement absolu. Abolissant les anciennes
coutumes, l­’on a c­omme aboli le bonheur du pays […] ses ministres [de Philippe II] ayant jugé
­qu’il fallait affaiblir ses sujets pour fortifier le prince, ayant trouvé plus expédiente la rigueur
que ­l’amour.” Texto tomado de García García, 2002, p. 149. Al respecto, ­consúltense las
­consideraciones de Alberto Rodríguez Martínez en este mismo volumen.
39 Braun, 2007, p. 113-114.
324 MANUEL HERRERO SÁNCHEZ

intentar implantar el modo de gobierno existente en Castilla al resto


de los territorios bajo la jurisdicción del monarca católico. Lo acertado
­consistía en emplear en cada provincia los medios y formas de gobierno
específicos de cada territorio y tener en cuenta el carácter y el genio de
cada ­comunidad40. La memoria de la revuelta de los Países Bajos y sus
trágicas ­consecuencias parecían cuestionar la apuesta por modelos de
soberanía plena ­como los propuestos desde Francia por Jean Bodin ­como
el mejor camino para restaurar la autoridad del rey. Ahora bien, la rea-
nudación del c­ onflicto c­ on las Provincias Unidas en 1621 y los apremios
financieros derivados del estado de guerra total en el que se vio envuelta
la Monarquía Hispánica volvieron a impulsar la puesta en marcha de
medidas expeditivas que, ­como las aplicadas durante el gobierno del c­ onde
duque de Olivares, terminaron por poner en cuestión gran parte de los
­consensos sobre los que sostenía la estabilidad del sistema. El estallido
revolucionario de la década de 1640 que estuvo a punto de provocar la
disgregación de la Monarquía Católica fue atajado mediante el retorno
a las formas de gobierno policéntrico propias de los Habsburgo que,
en c­ onsonancia c­ on las recomendaciones de Saavedra Fajardo, volvían a
sustentarse en el escrupuloso respeto a los ordenamientos locales pues,
según advertía en una de sus Empresas: “­como es diferente el modo ­con
que se curan, tratan y manejan los caballos españoles y los napolitanos
y húngaros, ­con ser una especie misma, así también se han de gobernar
las naciones según sus naturalezas, costumbres y estilos.”41

LA MEMORIA DE LA REVUELTA
DE FLANDES EN LA ­CONSOLIDACIÓN DE LA ALIANZA
HISPANO-NEERLANDESA FRENTE A LUIS XIV
De la tiranía española a la francesa

Entre las décadas de 1630 y 1640, c­ omo acredita su actividad diplomá-


tica en el Imperio y en los Cantones suizos y su papel protagonista ­como
impulsor del inicio de las negociaciones de paz en Westfalia, Saavedra
40 Méchoulan, 2007, p. 266.
41 Saavedra, 1640, Empresa 81.
La memoria de la revuelta de Flandes 325

Fajardo se había esforzado, mediante la difusión de libelos y la publicación


de todo tipo de opúsculos, por hacer ­comprender a las Provincias Unidas
que el verdadero peligro para la estabilidad de la república no procedía
de la Monarquía Hispánica, ­con la que en gran medida ­compartía una
forma de gobierno respetuosa c­ on los privilegios locales, sino de Francia42.
El avance de los ejércitos franceses en los Países Bajos meridionales y
la resolución de los ­contenciosos coloniales tras la ruptura de Portugal,
facilitaron el acuerdo de paz de Munster entre Madrid y La Haya a pesar
de las resistencias del partido orangista y de los sectores calvinistas más
radicales. Como ha señalado Laura Manzano, los esfuerzos por mantener
vivo el recuerdo de la revuelta de Flandes se habían c­ onvertido hasta el
momento en el mejor mecanismo para frenar todo posible entendimiento
­con el monarca católico mediante la ­constante difusión de panfletos y
alegorías en los que se subrayaba la rapacidad, crueldad y violencia de
los españoles43. La guerra ­contra el monarca católico era la razón de ser
de la joven república y actuaba c­ omo un factor de cohesión interna por
lo que la estabilidad interior parecía depender de la rememoración de las
atrocidades c­ ometidas por el diabólico Felipe II y sus ministros. En 1622,
un año después de la reanudación del ­conflicto y ­con el recuerdo todavía
vivo de las las agudas tensiones internas entre gomaristas y arminianos
que se achacaban a los 12 años de duración de la tregua, se reeditó la
célebre serie de grabados titulada la Tiranía española (De spaansche
Tyrannie). Este tipo de campañas propagandísticas sumado a la acción
militante de los predicadores calvinistas, cuya lengua, según señalara
Juan de Salazar, había hecho más daño que la espada para c­ onsolidar
el triunfo de la revuelta44, mantenían vivo el odio a los españoles en la
opinión pública y dificultaban todo posible entendimiento.
A pesar de que el arraigo de este tipo de prejuicios parecía lastrar
la ­consolidación de los acuerdos de paz de 1648, la inesperada muerte
del Estatúder Guillermo II en 1650 se tradujo en un paulatino desdi-
bujamiento de los mismos. Según señalaba ­con orgullo el embajador
42 Sobre la tensión entre los modelos de soberanía plena impulsados por el reino de Francia a
partir de Westfalia y la persistencia de los sistemas policéntricos en Europa véase Herrero,
2015.
43 Manzano, 2011.
44 En su Política española de 1619, Juan de Salazar señalaba cómo la letra escrita c­ onstituía
uno de los principales instrumentos para el aumento y ­conservación de la Monarquía.
Olivari, 2002, p. 184-185.
326 MANUEL HERRERO SÁNCHEZ

español, Francisco de Gamarra, en el informe que remitió en 1657 a


don Luis de Haro para informarle del grave altercado que había tenido
en las calles de La Haya ­con el representante francés, la opinión pública
holandesa parecía empezar a cambiar:
Fue tal la parcialidad del pueblo en mi favor que admiró a todos y me refirió
ayer el Pensionario general de Holanda (aunque tan fino francés ­como es) que
su padre habiendo venido aquella noche a su casa le dijo c­ on gran admiración
¿Qué es esto hijo? ¿Quién hubiera jamás creído tanta mudanza45?

Tras la firma de la paz de los Pirineos en 1659, la creciente debilidad de


la Monarquía Hispánica frente a la agresiva política exterior de Luis XIV
suponía una grave amenaza para el mantenimiento de la barrera protectora
de los Países Bajos meridionales y c­ onstituía, asimismo, un evidente peligro
para las Provincias Unidas que veían impotentes cómo su antiguo aliado
francés aplicaba una batería de medidas proteccionistas en ­contra de sus
intereses mercantiles. En 1667, en pleno c­ onflicto naval anglo-neerlandés,
Luis XIV ponía en marcha una campaña publicitaria para legitimar los
pretendidos derechos que la reina de Francia, María Teresa de Austria,
tenía, en calidad de primogénita de Felipe IV, sobre determinados terri-
torios de los Países Bajos. Se desataba de este modo un verdadera guerra
propagandística en la que, ­como ha señalado recientemente Charles-Édouard
Levillain, el borgoñón François-Paul de Lisola logró impulsar la primera
alianza internacional c­ ontra el rey Cristianísimo gracias al impacto alcan-
zado por su libro Le Bouclier ­d’État et de Justice donde se cuestionaba la
primacía del derecho local sobre el derecho internacional y el equilibrio de
poderes46. A pesar de sus recelos a involucrarse en el ­conflicto, las Provincias
Unidas se alineaban por vez primera del lado de su enemigo hereditario.
Sin embargo, lo que resultaba más sorprendente era que, ­como ­con cierta
ironía apuntaba el embajador español en La Haya, habían sido precisamente
los predicadores calvinistas los que de un modo más efectivo se habían
involucrado en esta operación de ­comunicación política al difundir ­con
éxito los numerosos panfletos y opúsculos anti-franceses47.

45 AGS, Embajada de España en La Haya, 8471, f. 125-128, Carta de Gamarra a Haro, La


Haya, 16-8-1657.
46 Levillain, 2015.
47 AGS, EEH, 8532, Carta de Gamarra al marqués de Castel Rodrigo, La Haya, 16-6-1667,
f. 154.
La memoria de la revuelta de Flandes 327

Ante la ­consolidación del acercamiento hispano-neerlandés, que


c­ ulminaría en 1673 c­ on la firma de la alianza de La Haya por la que
las Provincias Unidas lograban el sostén de los Habsburgo para frenar
los efectos desastrosos de la invasión franco-británica del año anterior,
la maquinaría de propaganda francesa volvió a recuperar el recuerdo
de la revuelta de Flandes para denunciar el acuerdo antinatural entre
los holandeses y la monarquía católica. Junto a un sinfín de panfletos
en los que se volvía a traer a colación la figura del duque de Alba, cir-
cularon otro tipo de textos destinados a cuestionar dicha alianza. Entre
1672 y 1674, el abbé Vichard de Saint-Réal, un tacitista ­convencido del
papel ejemplarizante de la Historia, publicaba dos novelas históricas que
alcanzarían un rotundo éxito: Don Carlos y La Conspiration des Espagnols
­contre Venise. Según ha señalado Marc Fumaroli, la correspondencia entre
Saint-Réal y Jean-Baptiste Colbert pone de manifiesto el fuerte c­ ontenido
propagandístico de ambas nouvelles tragiques y su deseo de denunciar el
maquiavelismo de la corte de Carlos II, un espacio dominado por las
intrigas y la oscurantista presencia de la Inquisición, cuyas buenas rela-
ciones ­con los holandeses ocultaba aviesas intenciones semejantes a las que
había padecido en su momento la república hermana de Venecia48. En
opinión de Saint-Réal, la c­ onjura orquestada por el marqués de Bedmar
desde la embajada española en Venecia estaba destinada a ­compensar la
pérdida de crédito de la Monarquía que se había visto obligada a firmar
la tregua de los Doce años c­ on las Provincias Unidas. A fin de cuentas,
el verdadero objetivo de Bedmar radicaba en poner en cuestión la propia
libertad de la república: “Creyó incluso que para su objetivo era necesario
poner en cuestión los fundamentos de la veneración que toda Europa había
depositado durante tantos siglos en esta república, c­ onsiderada c­ omo el
más antiguo y el más libre de todos los estados.”49 El paralelismo ­con las
48 Fumaroli, 2010, p. 174-176. Sobre el impacto de ambos libros, en especial del Don
Carlos, en la ­construcción de una imagen peyorativa de España, nos habla la influencia
que ejercieron en el dramaturgo inglés de la Restauración Thomas Otway que se inspiró
en ellas para dos obras de teatro que alcanzarían un enorme éxito: Don Carlos (1676) y
Venice Preserved (1682). El alcance del Don Carlos de Saint-Réal podemos rastrearlo en la
obra de Friedrich Schiller, que lo usará para su Don Carlos redactado entre 1783 y 1787,
o en el impacto de la ópera de Verdi de 1865-1867. Sobre la memoria de la revuelta de
Flandes en la obra de Schiller véase el capítulo de Éric Leroy du Cardonnoy en este mismo
libro.
49 “Il crut même, ­qu’il était important pour son dessein de renverser les fondements de la vénération
que toute l­ ’Europe avait depuis tant de siècles pour cette république, c­ omme pour le plus ancien et le
328 MANUEL HERRERO SÁNCHEZ

aviesas intenciones españolas en su alianza ­con las Provincias Unidas no


dejaban lugar a dudas. No obstante, cuestionar el sostén que los Habsburgo
mostraban por entonces hacia los escasos sistemas republicanos existentes
en Europa no resultaba demasiado creíble en especial si se c­ omparaba el
apoyo militar y diplomático ofrecido por la Monarquía Hispánica ­con
la agresividad desplegada por el gobierno francés que, en 1672, se había
puesto a la cabeza de las invasiones de Génova y las Provincias Unidas50.
La violenta acción de los ejércitos franceses en su avance por el territorio
de la república hizo reverdecer de nuevo el recuerdo de la guerra de Flandes
pero en un sentido bien diferente del que pretendían los publicistas al ser-
vicio de Luis XIV. La tiranía española acabó por transmutarse en tiranía
francesa por lo que gran parte de las imágenes, grabados y textos críticos que
habían sido utilizados para denunciar los excesos de los ejércitos del monarca
católico en el siglo XVI fueron reutilizados para ilustrar ahora las masacres
llevadas a cabo por los franceses en dos pueblos de la ocupada provincia
de Utrecht, Zwannerdam y Bodegraven, que habían sido ­completamente
destruidos en diciembre de 1672. En la crónica realizada al año siguiente
por el predicador Johannes Quintius, c­ omparaba tales crímenes c­ on los
de algunos de los más sanguinarios emperadores romanos c­ omo Calígula,
Nerón, Valeriano pero también c­ on Felipe II51. Por su parte, el médico de
Ámsterdam Gabriel Piso realizaba un símil semejante entre las acciones
llevadas a cabo por el mariscal de Luxemburgo y el duque de Alba, mien-
tras que el famoso diplomático Abraham de Wicquefort publicaba, ese
mismo año, un violento alegato anti-francés ­con ilustraciones de Romeyn
de Hooghe que, bajo el expresivo título Advis fidelle aux véritables Hollandois:
touchant ce qui ­s’est passé dans les villages de Bodegrave & Swammerdam, & les
cruautés inoüies, que les François y ont exercées, alcanzó un éxito fulgurante lo
que sumado a la difusión de una impresionante multiplicación de panfletos
supusieron un golpe irreversible a la imagen exterior de Luis XIV asociada,
a partir de entonces, a un violento belicismo expansionista52. El paralelismo
plus libre de tous les états.” Abbé Vichard de Saint-Réal (1674), La Conjuration des Espagnols
­contre la République de Venise, Londres, A. Dulau, 1800, p. 34.
50 Herrero, 2017b.
51 Quintius, Johannes (1673), Bodegraven en Swammerdan in brandt, Ámsterdam, Jacob
Benjamin. Sobre el impacto de estos traumáticos acontecimientos en el sentimiento de
identidad holandés véase, Moss, 2016.
52 Levillain, 2015, p. 265-266. Anne Munt ha puesto de relieve cómo al c­ omienzo de la
Guerra de Holanda el número de panfletos se multiplicó por tres, Munt, 1997. Sobre el
­contenido de los mismos, véase Reinder, 2008.
La memoria de la revuelta de Flandes 329

c­ on los excesos c­ ometidos un siglo antes por Felipe II se evidencia, según


apunta Jasper Van der Steen, en le mención realizada por Adam Verduyn
al recuerdo que tenía de las crueldades ­cometidas por los españoles en
Naarden y Zutphen de las que había oído hablar ­con frecuencia a sus padres
­con la salvedad de que, a pesar de su ­comportamiento tiránico, al menos
el monarca católico tenía derechos legítimos sobre dichos territorios lo
que no era el caso de Luis XIV53. La identificación entre ambos soberanos
adquirió tintes de mayor verosimilitud debido al marcado giro ­confesional
impulsado por el rey Cristinanísimo en especial tras la revocación del Edicto
de Nantes en 1685 y la expulsión de los hugonotes del reino. Ese mismo
año uno de estos refugiados, publicaba en Ámsterdam una obra de teatro
sobre la muerte de los ­condes de Egmont y de Hornes54 en la que se insis-
tía en el deseo de Luis XIV de imitar el ­comportamiento de su bisabuelo
en defensa de un marcado expansionismo católico. El sostén prestado por
el rey de Francia a la causa de Jacobo II en Inglaterra mediante la fallida
expedición naval a Irlanda de 1689 c­ onstituía una prueba adicional sobre
sus respectivas aspiraciones a la monarquía universal y dio alas a la difu-
sión de libros ­como el publicado por otro exiliado hugonote, Jean Jacques
Quesnot de la Chesnée, que, en plena Guerra de Sucesión a la corona de
España, denunciaba la ­continuidad entre las políticas de ambos soberanos
en su influyente diatriba Paralèlle de Philippe II et de Louis XIV55.
Las semejanzas ­con la revuelta de Flandes tenían también otra vertiente
que ayudó a Guillermo III a ­convertirse en el líder de la coalición inter-
nacional ­contra el monarca francés al igual que lo había sido su antecesor,
Guillermo el Taciturno, c­ ontra el Rey Prudente. Tras la restauración de
su cargo ­como Estatúder en plena invasión francesa en 1672 y su llegada
al trono británico en 1688, el príncipe de Orange se c­ onvirtió en el
principal defensor de la libertad de ­conciencia en el ­continente. A través
de una activa campaña propagandística, el Rey-estatúder recurría a la
memoria de su familia para exigir nuevas ­contribuciones a los siempre
53 Van der Steen, 2015, p. 277-278.
54 Asselijn, Thomas, De dood van de graaven Egmond en Hoorne, Ámsterdam, Jacob Lescailje,
1685.
55 Schaub, 2004, p. 264. Según señala Rafael Valladares, dicho libro reproducía pasajes
enteros del trabajo de otro exiliado hugonote, Pierre Jurieu, Présages de la décadence des
Empires, publicado en Mekelbourg en 1688. Valladares, 2000, p. 116. Ahora bien, la imagen
de Felipe II c­ ontó también c­ on algunas biografías menos críticas e incluso elogiosas por
parte de figuras del ascendiente de Gregorio Leti, Vita del Catolico Rè Filippo II. Monarca
delle Spagne, Coligny, Giovanni Antonio Choüet, 1679.
330 MANUEL HERRERO SÁNCHEZ

reticentes regentes para justificar el costoso esfuerzo bélico ­contra el rey


Cristianísimo. El uso de la memoria privada de la guerra de Flandes ­como
arma de promoción política se observa también en el caso del duque
de Sexto, Filippo Spinola Colonna. En 1673, al c­ omienzo de la Guerra
de Holanda, Jacopo Cellesi le dedicaba la versión italiana del libro de
Angelo Gallucci, Historia della guerra di Fiandra d­ all’anno 1593 sin alla
tregua ­conchiusa ­l’anno 1609, que había aparecido publicado primero en
latín en honor del rey Carlos II. Filippo Spinola era hijo del III marqués
de los Balbases que, por entonces, servía c­ omo embajador del monarca
católico en la corte imperial y que sería el responsable de la negociación
de la paz de Nimega en 167856. El volumen suponía una exaltación de
las virtudes diplomáticas y de las habilidades políticas mostradas por
los miembros de dicha familia, en especial de su bisabuelo, Ambrogio
Spinola, del que se enfatizaban no sólo sus éxitos militares sino su talla
de hombre de estado:
Gracias a cuya prudencia y fortaleza militar se administró durante treinta años
la guerra de Flandes. Y en la narración de sus batallas y victorias tendremos
que emplear casi toda la segunda parte de esta Historia: y la mayor parte
de esta narración se extraerá de su correspondencia y de la que mantuvo ­con
otros; será c­ onveniente rememorar de forma breve su patria, su estirpe, su
educación y a través de qué calidades los miembros de esta familia lograron
alcanzar el punto ­culminante de la gloria militar57.

CONSIDERACIONES FINALES

Los casos del príncipe de Orange o de Filippo Spinola ponen de


manifiesto cómo la memoria histórica de la revuelta de Flandes per-
mitía privilegiar la experiencia particular y la dimensión subjetiva de
un ­conflicto cuyo recuerdo facilitaba la promoción de sus respectivas
56 Herrero y Álvarez-Ossorio, 2011.
57 “Dalla cui prudenza e fortezza militare fu per ­tant’anni amministrata la guerra di Fiandra. E
nel racconto delle cui battaglie e vittorie dobbiamo impiegar quasi tutta la seconda parte di quesa
Storia: e la maggior parte de racconti si caverà dalle lettere di lui, e d­ ’altri; sarà c­onveniente
rammemorar in breve la patria loro, la stirpe, ­l’educatione e per quali gradi siano saliti al sommo
della gloria militare.” Angelo Gallucci, Historia della guerra di Fiandra d­ all’anno 1593 sin
alla tregua ­conchiusa l­’anno 1609, Roma, 1673, vol. 2, p. 99.
La memoria de la revuelta de Flandes 331

familias y legitimaba su ascendiente político. Del mismo modo, a lo


largo de estas páginas hemos observado cómo la rememoración de dichos
acontecimientos revolucionarios se erigió en un acicate para limitar la
puesta en marcha de políticas centralizadoras destinadas a erosionar
la autonomía y los legítimos privilegios que c­ on tanto celo defendían
cada uno de los territorios bajo la jurisdicción del monarca católico. La
revuelta de Flandes se ­convirtió en la referencia ineludible para ilustrar
las catastróficas c­ onsecuencias que podía acarrear toda medida política
que socavase los c­ onsensos sobre los que se sustentaba la estabilidad de
una estructura política policéntrica ­como la Monarquía Hispánica. No
en vano, durante la segunda mitad del siglo XVII, el monarca católico se
­convirtió, ­con la colaboración del Emperador, en uno de los principales
protectores de las c­ onfederaciones urbanas y de las repúblicas euro-
peas que, por el c­ ontrario, sufrieron los embates de la agresiva política
expansionista de Luis XIV. La legitimidad del soberano reposaba en
un exquisito respeto hacia las formas de gobierno mixto y en el nece-
sario acatamiento a las libertades y privilegios locales pues se partía de
la ­convicción de que, en última instancia, la soberanía reposaba en el
pueblo que la transfería, por voluntad divina, a su legítimo soberano.
El cuestionamiento de las inmunidades y prerrogativas de las distintas
corporaciones que ­conformaban el cuerpo político debía ­considerarse,
por lo tanto, c­ omo un acto de tiranía por lo que, a la postre, se acababa
por legitimar en parte el levantamiento de los Países Bajos.

Manuel Herrero Sánchez


Universidad Pablo de Olavide,
Sevilla
THE EVER-IMPEDED REVOLT
The Seventeenth-century Genoese Conspiracies
and their Memory

We shall say that for one hundred years,


and c­ ontrary to all reason, the majority
of the citizens of the Republic of Genoa
have been excluded from its government1.

INTRODUCTION
The “Coup ­d’État” as a fundamental element
of Genoese history

The history of Genoa is rich in c­ onspiratorial and subversive epi-


sodes, which starting from the Middle Ages succeeded one another right
across the early modern period2. This insurrectional climate was the
­common thread which bound the historical affairs of the Genoese state
during this long period, profoundly shaping its political and institu-
tional evolution as it did so. Recounting the history of Genoa through
its c­ onspiracies would allow us to identify significant elements of both
­continuity and rupture in the development of the Genoese state. This
is an ambitious aim, and one which the present study will not pursue,
limiting itself instead to an overview of the coups of the seventeenth cen-
tury, in relation to the equally significant question of the way in which
the memory of these revolts was c­ ontrolled. As such, this survey will
1 Oratione dimostrativa et persuasiva a tutto il popolo di Genova…, Genova, 1628.
2 On the ­conspiracies and insurrections of the Middle Ages as c­ onsistent tools of political
struggle, see Petti Balbi, 2003. For the proceeding period, see instead Pacini, 1996;
Musso, 2007.
334 DIEGO PIZZORNO

take into ­consideration two antithetical cases of ­conspiracy, which were


met in turn with two opposing government responses: the effacement
of memory on the one hand, and manifest ­condemnation on the other.
In truth, the idea of the “ever-impeded revolt” (la rivolta sempre sventata)
– the recurrence of a subversive yet systematically neutralised threat – is
not a phenomenon which originated in the seventeenth century. The real
moment of departure arrived in 1528, when a coup organized by Andrea
Doria gave rise to the birth of the aristocratic Republic in Genoa3: a defining
turning point which underlined the significant role played by sedition
throughout Genoese history, as it witnessed the emergence of a more
rigid governmental structure, and one which was capable of ­confronting
internal insurrections more effectively. Throughout the sixteenth century,
there was no lack of similarly subversive turning points, such as the 1547
coup by Gian Luigi Fieschi and the “troubles” of 1575-1576. But these two
events reinforced the new Republic, eventually furnishing it with its own
definitive ­constitutional artefact, the Leges Novæ4.
­Fieschi’s uprising also illustrates the ­controversial issue of transmit-
ting the memory of the Genoese coups. The plans for this insurrection
offered a clear (albeit not particularly original) reference model for the
future: the introduction of troops into the city, the popolo called to
arms, the support of a foreign monarch or prince, and the decimation
or outright destruction of the ruling class. Yet his attempted coup was
not subsequently imitated or followed. The c­ onspiracy had triggered a
heavily violent repression, bringing about the dismemberment of the
Fieschi feudal state in the Ligurian Levant and the disgrace of a family
which had been amongst the most important of the old nobility. It was
followed by a rigorous damnatio memoriæ of Gian Luigi Fieschi which
soon extended beyond the official historiography and ­commemorations,
such that his name and deeds enjoyed only a very belated legacy within
the memory and imagination of the Genoese c­ onspiracies. Shortly after
the fall of the aristocratic Republic, the German dramatist Friedrich
Schiller would make him the subject of one of his tragedies5; whilst the

3 Pacini, 1999.
4 The insurrection of Gian Luigi Fieschi is well recounted by Pacini, 2010; see also Raggio,
1997. On the events of the years 1575-1576 see Savelli, 1981, and for a more general
overview of the institutional revolutions of the sixteenth century see Pacini, 2003.
5 Schiller, 1783. ­Schiller’s influence on Verdi also inspired the ­latter’s Simon Boccanegra,
which recalls another famous c­ onspiratorial episode of fourteenth century Genoa (see
The Ever-impeded Revolt 335

historiography of the nineteenth century Risorgimento revisited the affair


in a somewhat ­contrived and rhetorical fashion: associating Fieschi with
Brutus, defender of the republican liberty of ancient Rome6. Anyway,
until then, ­Fieschi’s coup had neither been a point of reference, nor an
ideological banner, for the vast and clamorous subversive movements
which followed; a somewhat puzzling fact given that tyranny had been
a central theme within the incendiary pamphlets of prominent Genoese
polemicists during the Ancien Régime, such as Oberto Foglietta in the
sixteenth century or Giovanni Antonio Ansaldi in the seventeenth7. Even
if, however, the so-called golpe fliscano, as told through the historiogra-
phy of the Risorgimento, highlighted the political wrongdoings of the
ancient Italian states in the age of the pax hispanica, the ­contemporary
polemicists and outcasts of the Ancien Régime who rallied around the
cause of the lower classes had failed to be inspired by the example of
the nobleman Fieschi. Not even another subversive patrician, Gian
Paolo Balbi, who in 1648 ­conceived a highly similar plan to that of
Fieschi8, drew upon this illustrious precedent, perhaps in this case due
to its very disastrous ­conclusion. Thus, with the nineteenth century
exceptions discussed above, a notable silence fell upon the case of Gian
Luigi Fieschi, destined to endure even to this day9.
In the case of the many other attempted revolts of the seventeenth
century, there remains a similar lack of in-depth examination. The
few general overviews which are available largely retread the same
­contemporary narratives, with all their lacunae and obscurities10. This
Balbi, 1969, for more details of the affair). On the relationship between Schiller and
Verdi, see a recent article by Melloni, 2007, p. 417-437.
6 It is worth noting, to take one example, the reflections of Emanuele Celesia – an individual
deeply entrenched in the spirit of the Risorgimento – who, in regards to Fieschi, wrote
that “he feigned with the Doria, and betrayed his word, but only for political purposes;
and the great clamour to impede those who attempted his life and the goal to restore
liberty to the Republic did serve, if not necessarily to absolve them, then to create a
favourable impression of them in the eyes of posterity. Even Brutus deceived and yet
remains great” (Celesia, 1864, p. 142).
7 For more information on these two figures and their seditious activities, see the well
­compiled biographical profiles by Bitossi, 1997, but also the examination given in
Pizzorno, 2015a, p. 99-120.
8 Isnardi, 1878; Rosina, 1962; Bitossi, 1986, p. 587-626; Grendi, 1993, p. 775-814.
9 No recent examinations of the Gian Luigi Fieschi ­conspiracy in any particular detail are
yet to emerge, save for the brief overview of nineteenth century bibliographic sources
given in ­Pacini’s account cited above.
10 Mazzini, 1904, p. 405-432; Cassina, 1974, p. 237-265.
336 DIEGO PIZZORNO

presents genuine c­ oncerns not only about the actual substance of a


number of these episodes, but also about the specific “governmental
responses” to the aborted coups. One does not wish to play down the
subversive movements of the time, which were a ­concrete and destabi-
lising factor during a century in which French hostilities were equally
matched by violent Savoyard aggression11, whilst the c­ ombination of
foreign encroachment and internal uprisings represented a manifest
danger for the stability of the Republic on numerous occasions. However,
looking through the historiography in relation to the not insignificant
number of surviving archival sources, one gets the impression that the
“ever-impeded revolt” had in fact partly ­constituted a propagandistic
scenario, one which affirmed the solidity of the Republic when faced with
the crisis of a pervasive revolutionary climate. In particular, one aspect
appears ­consistently and explicitly throughout: a narrative framework
in which the c­ onspiracy is discovered and swiftly repressed at the final
moment, when in fact in many cases the plots had already been uncovered
through leaked news and revelations. It is a framework which in truth
was not unique to the Genoese ­context of the Ancien Régime, but can in
fact be observed in the many occurrences of neutralised revolt of which
historical testimony survives, from antiquity to the modern era, which
do not require extensive recollection here. Moreover, the insurrections
were often not dealt with until the final moment for reasons of effective
policing, so that the entire ­conspiratorial web could be pieced together
and all its ­constituent members removed. This of course was a risky
strategy, as it required a degree of patience which the Genoese authorities
were not always able to put into practice. One such example provides
us with a particularly useful case for examination here, the ­conspiracy
led by Giulio Cesare Vachero: an event which, as we will see below,
indicated a distinct lack of preparation by the Genoese government.
­Vachero’s plot, which directly follows that of Fieschi in order of its
gravity, serves as a further turning point in the revolutionary history of
Genoa and the generation of its memory. Moreover, it too impacted upon
the institutional history of the city, as it precipitated the creation of the
State ­Inquisitors’ office: an intelligence agency which would both prove
highly efficient and establish itself as a fundamental organ within the

11 In the absence of any detailed or c­ omprehensive studies on the subject of Genoese-Turinese


hostilities during the seventeenth century, I will refer readers to Pizzorno, 2015b.
The Ever-impeded Revolt 337

c­ ity’s systems of power12. In addition, it marked the point at which, in


lieu of the damnatio memoriæ, the Genoese c­ onspirators would be subject
to the erection of defamatory monuments, as well as full denunciations
taken from the literary model of the Cateline ­conspiracies. Until then,
as we will now examine in the case of Giovanni Gregorio Leveratto,
the response of the Genoese authorities had been markedly different.

THE EFFACEMENT OF MEMORY


Giovanni Gregorio Leveratto

In the case of the ­conspiracy led by the medic Giovanni Gregorio


Leveratto, the uncertainties surrounding both its chronology and the name
of the c­ onspirator himself illustrate the way in which this affair had been
silenced to posterity. The annalist Filippo Casoni – possibly borrowing
from Schiaffino13 – places the event in 160114, as did ­contemporary histo-
riographers such as Vito Vitale, who in fact recalled the ­chief ­­conspirator’s
name as Giovanni Giorgio15. Another annalist, Antonio Roccatagliata,
suggests 1602 instead16, whilst Claudio Costantini has spoken recently of
a more general period “between 1601 and 1602.”17 Such doubts and uncer-
tainties are destined to remain regarding this obscure ­conspiracy from the
beginning of the seventeenth century, yet the most reliable dating points
towards 1603. This is supported by various archival documents, amongst
12 Carlo Bitossi has demonstrated the gradual establishment during the seventeenth cen-
tury of a “strong executive body, serving the oligarchic balance of power and supported
by the State Inquisitors” (Bitossi, 1990, p. 290). On the subject of this magistracy, see
Pizzorno (unedited).
13 The Memorie of Padre Agostino Schiaffino are a ­composite text, whose philological origins
remain highly ­complicated. Various manuscript copies have survived with a number of
discrepancies between them; not all of which are directly attributable to Schiaffino. His
account – which begins in 1515 – has been partially reproduced as a critical edition
(Schiaffino, 1996). For my own research, I have drawn upon the copy preserved at the
Biblioteca Civica Berio di Genova (Memorie di varie cose di Genova occorse d­ all’anno 1516 sino
­all’anno 1647, BCB, ms. B. VI. 5. 20).
14 Casoni, 1800, p. 230-231.
15 Vitale, 1955, I, p. 37.
16 Roccatagliata, 1873, p. 250-253.
17 Costantini, 1978, p. 210-211.
338 DIEGO PIZZORNO

them a manuscript which is specifically titled: “The ­conspiracy of Gregorio


Leveratto and Giovanni Batta Vassallo against the Most Serene Duke of
Genoa and the entire nobility”. In a ­concluding note, albeit one written
in a different hand, the manuscript states that Leveratto was beheaded
on 26 July 1603 in Genoa, on “the piazza of the Vastato, by the osteria of
Santa Marta.”18 This, however, is a somewhat peculiar document, and one
which illustrates the many obscurities which typically surround the affair.
Despite the suggestion of a historical and ­commemorative work given by
the title, the text c­ onsists entirely of the revelations of the man who had
betrayed the c­ onspiracy, Giovanni Antonio Marasso. Moreover, it is not a
piece of government documentation, but a transcript c­ omprising various
accounts of ­conspiracies and revolts, extending even beyond Genoa itself.
It is therefore necessary to treat the details which it ­contains with due
caution. In addition, it was likely written some time after the event, with
possible manipulations and interpolations of an original version which is
no longer likely to exist. In particular, the correction of ­Leveratto’s name
is clearly visible in this manuscript, in which the initial Giovanni Giorgio
becomes Giovanni Gregorio; an uncertainty which is reflected in V ­ itale’s
aforementioned “error”.
In the manuscript, Marasso is described as a close friend of Leveratto
who, turning towards the Doge of the Republic, reports to him his f­ riend’s
seditious plan. With the ­complicity of Giovanni Battista Vassallo, who
held ­contacts in Paris, Leveratto had arranged to allow French troops,
dispatched by sea, into the city. Their entrance would be assured thanks
to a villa located in Carignano, the area in which F­ ieschi’s residences
were before their demolition upon his failed uprising in 1547. Genoa
would then be placed under the French Crown, which would impose
its own governor, whilst Leveratto set about with the destruction of the
­city’s entire ruling class; including “the c­ hildren”, such that they would
be “submerged in blood up to their knees.” Giovanni Battista Vassallo
– who had already taken refuge in France – would instead receive the
vague promise of becoming Duke of Genoa – roughly the same title as
that which was supposedly later promised to Gian Paolo Balbi in 164819.

18 Congiura di Gregorio Leveratto e Gio. Batta Vassallo c­ontro il Serenissimo Duce di Genova e
nobiltà tutta…
19 On the reward – in truth an archducal title – promised to Balbi, see also the amusing
reconstruction given in the so-called Stella Nera (Ansaldo, 1934).
The Ever-impeded Revolt 339

The support of the French monarchy, the insurrection beginning in


the same location as ­Fieschi’s, the active participation of the popolo, the
slaughter of the ruling class and the enormous (almost parodically so)
ambition of the individuals involved seem indicative of a stereotypical
narrative, and one which would go on to be incorporated by others.
However, it is worth noting that a Francophile revolutionary strategy
was a very definite threat, and the potential validity of these revelations
was supported by the declaration extracted from Leveratto himself
after his arrest in July 1603. Despite the fact that it is a government
record, in fact perhaps because of it, this declaration also highlights the
oddities of the case, even in its title: “Memories of the medic Leveratto
­concerning the c­ onspiracies, both internal and external, against the
Republic.”20 It is not in fact a transcript of the conspirator’s
­­ interroga-
tion, but a precise and detailed examination given by Leveratto on the
weaknesses of the Genoese state – an “informative ­confession” in the
style of a police report, and which was thus likely subject to various
alterations by the governing authorities. It appears to ­confirm the fact
that, amongst the issues on which Leveratto “informed” the Genoese
authorities, there were insufficiencies in the “manner with which guards
were distributed.” This particular admonition, however, was made after
a government decree which in June that year had already reorganised
the surveillance infrastructure of the city, focussing on the Carignano
area as a distinct vulnus within the systems of civic defence21. How can
we explain, therefore, ­Leveratto’s warning in this regard, if the gover-
ning authorities of the Republic had already taken the defensive steps
suggested by the c­ onspiratorial medic? Most likely, this account was
intended as a means of justifying after the fact the adoption of these
new restrictive measures, a move which risked potentially invoking
opposition and unrest amongst the ruling class.
In any case, this document also recalls the year of the c­ onspiracy as
1603. It is dated 22 July, shortly before the execution carried out on
the 26th, typical of the alacrity with which threatened rulers carried

20 Archivio di Stato di Genova, Archivio segreto, Politicorum, 1651.


21 Decreto dei Serenissimi Collegi mediante il quale i soldati sono suddivisi nelle varie parti della
città affinché di giorno e di notte vigilino attentamente (Archivio di Stato di Genova, Archivio
segreto, Politicorum, 1651). The aforementioned Gian Paolo Balbi also intended to intro-
duce troops into this area in 1648.
340 DIEGO PIZZORNO

out their judicial processes. News of the alleged ­conspiracy, however,


had already been circulating for some time, as illustrated by a missive
written by the Cardinal Protector of the Republic, Domenico Pinelli,
to the government on 23 May to discuss the incident, even invoking
the name of the alleged c­ onspirator, Giovanni Giorgio22. One parti-
cular detail within ­Pinelli’s letter, which does not subsequently refer
to the event, is of notable interest, as he writes of having spoken with
the Pope and his Cardinal nephew in order to ensure that the “order
of silence” with which he had been entrusted by the government was
respected23 – an issue for which he had received full reassurances.
The Cardinal also added, however, that ‘many noblemen of the ­city’
resident in Rome had not been ­conforming to this directive, and
that there had been “many things written c­ oncerning this affair,
in a manner that is almost entirely ­consistent with what you have
informed me.” This uneasy correspondence illustrates that behind the
Leveratto affair were hidden various subversive murmurings which had
been deemed necessary to silence. In fact, this particular episode had
threatened to ally itself with the previous internal disturbances faced
by the Republic, above all the sixteenth century polemical movement
which had already found a strong voice in Rome through authors such
as the aforementioned Foglietta24. Such ties were clearly illustrated
by the discovery in L­ everatto’s residence of a copy of the Relatione di
Genova, a text which had circulated in at least two versions towards
the end of the sixteenth century25. The authorship of the Relatione
has been at the centre of various historiographical discussions, which
have attributed it to either Matteo Senarega, Doge between 1595 and
1597 and ambassador of the new nobility (nuovi) in Rome during the
so-called “civil wars”, or else to one Giacomo Mancini26. The text itself
is a forensic examination of the power structures of the Republic,
and had raised significant c­ oncerns due to its potentially subversive

22 The correspondence is held in the Archivio di Stato di Genova, Archivio segreto, Lettere
cardinali, 2812.
23 Pinelli wrote of having adopted this policy so that “all that which Your Serenity [the
Doge] and Illustrious Sirs [the College] have instructed me may fall silent.”
24 On the Genoese polemicists, in particular relation to the events of 1575-1576 and to the
movements in Rome, see Savelli, 1980.
25 Relatione di Genova…
26 On this issue, see in particular Doria, Savelli, 1980, p. 277-355, note 83.
The Ever-impeded Revolt 341

interpretations. The volume c­ onfiscated from Leveratto27 can perhaps


provide certain useful indications on its authorship. This particular
copy was a more abridged version of the Relatione, and according to a
note inserted at the beginning of the text was attributed to Mancini.
The same notes recalls that, during a subsequent investigation, the
text was analysed and judged to be “deceitful and scandalous” in
December 1603, and was thus “placed in the chest of state records”
the following February. Given the political grandeur of the ex-Doge
Senarega, the story of the two copies of the Relatione suggests another
instrumental direction of the Leveratto affair. The version seized was
the shorter one, and attribute its authorship to the obscure Mancini
probably served to exonerate the ex-Doge Senarega – presumed author
of the longest version of the Relatione – from possible insurrectional
intentions. The insurgent was the mysterious Mancini and not the
powerful Senarega oligarch.
To these hypotheses and c­ onjectures, we can add an interesting
political interpretation provided by another anonymous Genoese manus-
cript c­ ompiled during the first half of the 1620s: the Dialoghi sopra la
Repubblica di Genova28. In the Dialoghi, the Leveratto affair is linked to
the disquiet surrounding the appointment of Senators to the Republic
around the same time. The Senators numbered twelve in total, and
a quarter of these were replaced every six months through a mixed
procedure of elections and drawing lots – a ­common process in the
nomination of all other government offices. It was a system which often
instigated heated disputes; as suggested in the Dialoghi and previously
remarked upon in the Relatione, the older nobility (vecchi) were regularly
penalised for “­consistently marrying amongst themselves and belonging
to fewer families”, as they were thus “more likely […] to fall victim
to the mechanisms for exclusion on the grounds of ­consanguinity.”29
The Leveratto ­conspiracy was to find itself in the midst of one such
­contestation, as its discovery had c­ ome shortly after an expulsion of
Senators which the vecchi had immediately attempted to invalidate.
The newer nobility (nuovi) would have profited from the affair in their
27 Libro stato trovato in casa del medico Gio. Gregorio Leveratto… On the cover of this manus-
cript, moreover, is an explicit reference to the “most c­ omplete” text of the Relatione: a
fuller version of the work is thus to be found elsewhere.
28 Dialoghi sopra la Repubblica di Genova…
29 Bitossi, 1990, p. 91-92.
342 DIEGO PIZZORNO

attempts to impede these protests, as it allowed them to highlight the


dangers of civil unrest and the importance of not interfering with the
elective processes of the Republic.
Would the Leveratto affair have likely been utilised by the nuovi in
this way? The author of the Dialoghi certainly thought so, and openly
­contested the actual substance of this particular ­conspiracy. Leveratto
was not “a natural leader, nor a very well-known man, nor even a man
to have ever held a sword in his life”, and that “in order to embellish the
case against him, it was c­ ontrived that, with one his cousins being the
captain of two French vessels, he had negotiated the arrangements for
a ­conspiracy by these means.” To support his thesis, the author of the
Dialoghi recounts that the authorities of the Republic, having failed to
capture a brother of Leveratto for assisting in the escape of the assassin
of the former Doge Lorenzo Sauli, turned their attentions instead to
Giovanni Gregorio, subjecting him to unjust torture so that he would
reveal “that which his brother had done.” From this emerged the fanciful
idea of Leveratto as a ­conspirator, which would have been exploited as
a pretext by the nuovi in their dispute with the vecchi.
A highly c­ ompelling and fantastical version of events, which ­confirms
the date of the affair as 1603, but one which nevertheless presents
various discrepancies of its own: the Dialoghi, for instance, date ­Sauli’s
murder as “the day of Holy Saturday in the year 1602”, when instead
we know for certain that it had occurred in 160130. Perhaps the best
interpretation is one of a “showdown” between the old and new nobility.
The reference to Laurenzo ­Sauli’s murder, in close ­connection to the
Leveratto episode, could lead us to hypothesise that the killing of the
former Doge was in fact arranged by the vecchi themselves. As the laws
of the Republic dictate, Sauli, having fulfilled his ducal career, was to
become a procurator for life. His membership of the “new” nobility
had served to strengthen their position, and thus perhaps his murder
was orchestrated by the vecchi in order to restore the previous balance
of power. Whilst still remaining within the realms of c­ onjecture, the
nuovi may have responded by giving credence to the Leveratto “coup”

30 The date of Lorenzo S­ auli’s murder is more precisely traceable thanks to a letter written
by the v­ ictim’s brother, Cardinal Antonio Sauli, who in May 1601 wrote to thank the
government for the ­condolences which they had expressed (ASG, Archivio segreto, Lettere
cardinali, 2817).
The Ever-impeded Revolt 343

in order to push through the c­ ontested senatorial election described


above. Although only a hypothesis, this interpretation is nevertheless
­consistent with the instructions given to Cardinal Pinelli in Rome,
who kept his silence ­concerning the affair; a silence which was useful
in c­ oncealing the designs and petty infighting surrounding the bitter
dispute between these two Genoese noble factions.

GIULIO CESARE VACHERO


The accursed ­conspiracy

A directly ­contrasting governmental response can be seen in the


treatment reserved for the 1628 ­conspiracy of Giulio Cesare Vachero31.
Its deviation from the Leveratto case is particularly evident in the column
of infamy erected in place of the ­­conspirator’s residence, still visible today
(only partially obscured by a fountain) in the historic centre of the city.
A final act of repression against this ­conspiracy, the column of infamy
was a means of making manifest the widespread c­ ondemnation of the
time32. It was a strategy of perpetuating memory which the Genoese
oligarchy would not subsequently relinquish, applying it instead to
each of the most serious rebellious episodes which followed, albeit in
the form of a defamatory plaque33. Their departure from the earlier

31 Beyond the c­ ontemporary and archival sources, on which we will focus shortly, there
exists a single c­ omprehensive – albeit much later dated – account of this ­conspiracy:
Arias, 1897.
32 An in-depth analysis of the practice of memorialising ­condemnation through the columns
of infamy has yet to be made. It is an instrument which partly derives from the practice
of defamatory painting, for which I refer readers to Ortalli, 1979. In any case, the column
of infamy was at the centre of various literary-juridical reflections, amongst which stands
out ­Manzoni’s Storia della Colonna infame, which has been subject to numerous critical
editions over the years (here, I cite one of the most recent and c­ omprehensive: Manzoni,
2002).
33 After the failed ­conspiracies of Gian Paolo Balbi in 1648 and Raffele Della Torre the
younger in 1672, two defamatory plaques were erected, and remain visible in two dif-
ferent locations within the ­city’s historical centre. On the attempted coup of ‘­Raffaellino’
Della Torre, which was directly tied to the outbreak of the second guerra savoina, see
Demaria, 1892; Marana, La ­congiura di Raffaello Della Torre ­con le mosse della Savoia ­contro
la Repubblica di Genova; Salvi, 1933.
344 DIEGO PIZZORNO

strategy of silencing memory was, in this particular case, a necessity


imposed by the international circumstances accompanying the Vachero
plot, which had proved itself far more ­concrete and threatening than
that of Leveratto before it.
Backed by a fierce popular following, the Vachero plot had arisen against
the backdrop of hostilities between Genoa and the Duchy of Savoy. Three
years earlier, in 1625, a Franco-Savoyard army had attacked the Republic,
thus opening a new Italian frontier in the Thirty Years War34. This c­ onflict
had c­ oncluded in G­ enoa’s favour, albeit with great uncertainty and only
after a decisive intervention from Madrid. An armistice subsequently
followed, but one which failed to soothe the great rivalry between the two
states which was destined to play out until the Peace of Cherasco in 1631.
After the 1625 assault, the Savoyard threat took on a different form. In
anticipation of a second war over the Duchy of Montferrat, which finally
erupted in the early months of 1628 in ­concurrence with the Vachero
plot35, Charles Emmanuelle of Savoy had abandoned his French alliance
in favour of Spain. This switch of allegiances meant that a military cam-
paign against the Republic, which remained under the armed protection
of Madrid, was no longer feasible, and so the restless Duke took a more
subversive approach: a coup which, striking Genoa from within, would
open the path towards a new military invasion. To this end, Charles
Emmanuelle entrusted Vachero – an agitated Genoese popolano, recently
returned from various misadventures involving Genoa, Florence and
Corsica – alongside an experienced Genoese libellista: Giovanni Antonio
Ansaldi, then living in exile in Turin under the title of Count of Saint
Peter, and from where he had begun to circulate seditious pamphlets
within Genoa against the c­ ity’s oligarchic order36.
There is no doubt as to the substance of ­Vachero’s c­ onspiracy, which
was finally uncovered and repressed in the spring of 1628. Charles
Emmanuelle openly laid claim to the plot, for which he had arrogantly

34 On the subject of the first guerra savoina, see Casanova, 1983.


35 Quazza, 1926. For a more general overview of the geo-political and military landscape of
Montferrat, see also Raviola, Il Monferrato gonzaghesco: istituzioni ed élites di un micro-Stato
(1536-1708), Firenze, Olschki, 2003.
36 On the activities of Genoese ideologues and c­ onspirators at the Savoyard court during
the early decades of the seventeenth century, see Pizzorno, 2015a, p. 20-25. The full
version of this work ­contains information which will also be reiterated over the following
pages, unless otherwise indicated in the notes.
The Ever-impeded Revolt 345

assumed responsibility37, and it is difficult to imagine in this case a


similar deception to before; even if – as previously mentioned – the
Vachero c­ onspiracy induced the Genoese government to establish the
office of State Inquisitor in order to reinforce the c­ ity’s policing systems.
It should be noted, however, that given both the incendiary propaganda
of Ansaldi, and the general circumstances of the plot, the Genoese
government could not rest easy. Even during the war of 1625, another
­conspiratorial web had been dismantled; this time surrounding the De
Marini family, which had at its centre another exile resident in Turin,
Claudio, then the French ambassador at the Savoyard court. One of
his relatives, the Genoese post-master Vincenzo, was hastily sent to
the gallows on charges of treason and espionage whilst the opposing
army was advancing in Liguria. The same Giulio Cesare Vachero had
in fact served a brief period of detention on suspicion of supporting the
De Marini family. In these circumstances, the familiar trope of last-
minute intervention and repression had once again been repeated. The
existence of this ­conspiratorial web was brought to light by a Genoese
spy, Giovanni Battista Mongiardino, who had been a close collaborator
with Claudio De Marini in Turin, and who from 1621 had been duly
informing the Genoese government of his movements38.
The same turn of events had manifested in the case of Vachero c­ onspiracy,
news of which had reached the government a few weeks before its plan-
ned execution through Giovanni Giacomo Ruffo and Giovanni Battista
Benigassi. These two men, already under the radar of the Genoese autho-
rities for seditious activity39, had revealed the entire ­conspiracy after their
arrest and interrogation following a meeting with Ansaldi in Liguria.
Once again, however, the Genoese oligarchy had eschewed the option of
preventative intervention40. Instead, they opted for a waiting game, subtly
driven perhaps by propagandistic intentions as the last-minute discovery

37 On the extremely delicate situation which arose in the wake of this attempted c­ onspiracy,
see Quazza, 1930.
38 On the wider movements of Mongiardo, see also Pizzorno, 2015a.
39 Casoni, Annali della Repubblica di Genova del secolo decimosettimo, p. 140.
40 Ruffo was arrested in September 1627, specifically on the grounds of his ties to Ansaldi
(ASG, Archivio segreto, 2984: Informazioni prese per ­l’arrivo del Conte Ansaldo Agente del
Duca di Savoia in Rapallo, e carcerazione di Giacomo Raffo [sic] per aver praticato ­con lo stesso).
Benigassi had instead been subject to two separate trials on counts of having ­conspired
alongside Claudio De Marini himself. Having been sentenced to exile in Sicily in June
1626, Benigassi was later restored to freedom upon the payment of his bail. The court
346 DIEGO PIZZORNO

of the plot gave a more theatrical efficacy to their subsequent repression.


The success of this plan, however, relied upon the actual scope and reach
of the ­conspiracy itself, and, even if ­Vachero’s plot had failed due to the
last-minute revelations of the informant Giovanni Francesco Rodino41,
their response was laborious and ungainly. Having been given the tip-off
by Rodino, the Genoese government decided not to entrust the subsequent
arrests to their sheriff, Erminio, as it appeared that he may have held
strong ties with the head of the c­ onspiracy. The same degree of prudence
had not escaped Erminio himself, as he in turn gave notice to two of the
­conspirators, Grandino and Consigliero, who then fled to Montferrat. Only
then was Erminio charged with arresting the two fugitives42, a farcical
situation which highlighted the rifts and mistrust within the existing
policing structures, and so justified the creation of the State Inquisitors.
In addition, the activity of the Spanish Crown was proving dangerous and
extremely worrying. Now allied to Savoy, Spain attempted to provoke the
Genoese government into showing an otherwise unacceptable degree of
clemency towards the ­conspirators. Thus stuck between the audacious
threats of Charles Emmanuelle, who promised reprisals against the Genoese
prisoners held at Turin after the war of 1625, and the interferences of the
Spanish ministers, the rulers of the Republic were ­compelled to give a
show of force by sentencing Vachero – alongside those c­ onspirators who
had been unable to escape arrest – to death.
The Vachero episode was the c­ ulmination of a Savoyard terrorist
offensive which gave rise to numerous plots throughout the second half
of the 1620s. Nearly all of these were successfully thwarted, with the sole
exception of an ambush which resulted in the killing of the patrician
Giovanni Gerolamo di Negro by the Genoese bandit Paolo Sartore in
September 162843. This alone was enough to explain the severe reactions

proceedings of the case against Benigassi are held in the Archivio di Stato di Genova,
Archivio segreto, 2981-2982.
41 Rodino himself remains a largely obscure figure, and was probably acting in search of
atonement. Between 1625 and 1626, he had been on trial for high treason, on charges
of having orchestrated, alongside his relatives Giovanni Gregorio and Giovanni Paolo,
the Piedmontese invasion of the Ligurian Ponente in 1625 (Rodino had been resident in
Diano). The court proceedings against Rodino, which began in August 1625, are held
in the Archivio di Stato di Genova, Archivio segreto, 2982.
42 Arias, 1897, p. 72-73.
43 On the Savoyard assassination attempts in Genoa between 1628 and 1629, see Pizzorno
(unedited).
The Ever-impeded Revolt 347

of the Genoese government, with the physical memento of the column


of infamy accompanied by a body of historiographical ­commemoration
which sought to perpetuate the memory of the conspiracy’s
­­ leader. Even
here, however, there were a number of uncertainties and inconsisten-
cies, characteristic of a strategy of silence which ultimately ­constituted
the preferred approach of the Genoese oligarchy in even the gravest of
situations44. The events of 1628 were given particular attention in a
long report by the patrician and respected jurist Raffaele della Torre
the elder, the ­chief magistrate in the trial against the ­conspirators. His
account, entitled Storia della ­congiura di Vacchero45, would however only
go to print in the mid eighteenth century, under the title of Congiura di
Giulio Cesare Vachero46. Even then, the work was c­ ompiled in an almost
entirely propagandistic tone, infused as it was with an aristocratic disdain
for the incorrigible and c­ onspiratorial popolare. After a broad historical
overview which drew together the “fabulous, Janus-like accounts”, Della
Torre turned his attention to the process of institutional reconstruction
within the Republic; a passage which helped to reinforce the legitimacy
of the resulting political order, as well as the necessity of “introducing
a law abiding nature, and respect towards the government – characte-
ristics without which a Republic cannot hope to preserve itself – into a
population which had become unrestrained through excessive license.”
At the forefront of this reflection were the institutional reforms brought
into the city around this time, and in particular the much cited intro-
duction of the State Inquisitors.
Inversely, however, the text also expressed severe criticisms of G
­ enoa’s
institutions, drawing particular attention to their corruptions and inef-
ficiencies as the source of much misconduct, disaffection and unrest. It
was this dissection which most likely ­contributed to the censorship of
the work in print, yet Della Torre c­ ontinued nevertheless with a sca-
thing profile of the ­chief c­ onspirator himself. “Equally odious to both
the heavens and the earth”, Vachero had previously been cited for the
wicked crimes of rape, murder and incestuous procurement, and had
spread “his vile poison” from Nice to Florence to Bastia. Having reached
Genoa, he then incited hatred and discontent, affiliating himself with
44 On the subject of this political manœuvring by the Genoese oligarchy, see the reflections
of Assereto, 1999.
45 Storia della c­ongiura del Vacchero, descritta da Raffaello della Torre…
46 Della Torre, Congiura di Giulio Cesare Vachero, p. 545-653.
348 DIEGO PIZZORNO

Ansaldi and the ­conspiratorial plans of Savoy. He had no hesitations in


recruiting an assortment of bandits to his cause, and his tactics were to
be far more violent than those of Leveratto before him. Indeed, Vachero
would have overseen the defenestration of the Doge and his Senators from
the Ducal Palace, followed by the extermination of the nobility “with
no regard for age or gender, and with no person spared or exonerated.”
In all, amidst a city in the throes of popular uprising, Vachero would
have satiated his desire to “plunge his hands, up to his elbows, in the
blood of its ­children”; a final passage which renders the revelations made
of Leveratto by Massaro almost pedestrian in their nature.
Della ­Torre’s characterisation here followed the literary model of
the Cateline Orations, despite the fact that his image of Vachero is
actually more akin to the figure of Brutus. This is a rather interesting
­comparison, as Vachero purported to raise the standard of liberty against
tyranny, the same notion of dignity in tyrannicide for the sake of free-
dom which Della Torre had identified in the case of Brutus. However,
the problematic example of ancient Rome was deliberately intended as
a point of ­contrast between the enormity of the latter ­conspiracy and
the more petty nature of the former: if Brutus had failed, why should
these wretched ­conspirators succeed in his wake? This was a somewhat
vacillating rhetorical c­ onstruction, which also drew upon the curious fact
that, like B
­ rutus’ famous victim, Vachero was named Giulio Cesare. In
this regard, Della Torre was thus perhaps attempting to point towards
the tyrant within Vachero himself.
In any event, this was a partisan undertaking, typical amongst the
government writings of the time. It was brought to light once again
during the 1930s in the form of two articles written by the Genoese
journalist Giovanni Ansaldo, under the pseudonym “Black Star” (Stella
Nera)47. Revisiting the character of Vachero through his entertaining
and amusing prose, Ansaldo ­contrasted the recollections of Della Torre
with both the inscriptions of the column of infamy and a number of
archival documents – amongst them, the trial records and the last will
and testament of ­Vachero’s father, which ­contradicted the accusations
of parental abuse made by Giulio Cesare himself. However, more than
the rhetoric of Della Torre, Ansaldo was struck by a passage from the
47 Stella Nera (G. Ansaldo), 1933; Id., 1933. During this period, the fascist regime had
forbidden Ansaldo from publishing under his own name (Biscione-Russo, 1988).
The Ever-impeded Revolt 349

defamatory inscription: qui, cum in rempublicam c­ onspirasset, in which the


qui cum was separated by a ­comma, brought to mind his old instructions
in Latin: “the maestro who pulls away the initial qui, does so to make
us aware of the fact that there was some trickery underneath.” Ansaldo
thus attempted to subject the Vachero affair to a more objective his-
torical scrutiny, far beyond the simple ­conceits of either exaltation or
­condemnation. This ambition was perhaps only tenable thanks to the
pseudonymous nature of the piece; even in this period of Italian history,
Vachero remained the archetypal figure of the ­conspirator, and was thus
not to be appreciated or reassessed. His legacy was an indication of the
many difficulties faced in the historiographical and ­commemorative
treatment of a ­conspiracy: an event which, by its very nature, especially
when so c­ onspicuous and unsuccessful, lends itself to a variety of inter-
pretations, manipulations, and of course easy c­ ondemnations.

Diego Pizzorno
HISTORY IN THE SERVICE OF ORDER
The memory of popular revolts
in the public domain and in judicial practices
(Kingdom of Naples, 17th-18th century)1

After the repression of the anti-Spanish revolt of 1647-1648, in a


city savaged by nine months of violence, war and bloody repression, the
viceroy and the institutions loyal to Spain sought to facilitate pacifica-
tion, for example by curbing acts of revenge and punishment, at least
at first2. During those months, however, the battle of memory began,
because the way of establishing the memory of those dramatic events
in public discourse “was a deeply political matter on all levels of early
modern European society”3. As soon as they had regained ­control of the
Kingdom of Naples and its capital, the restored authorities were aware
of what was at stake in the narrative intrinsic to past upheavals in order
to give back prestige and credibility to the Monarquía and reaffirm the
­condemnation of those who had promoted those upheavals. As Alain
Hugon has pointed out, these were driven, on the one hand, by the
need to remove the memory of those events and to erase its traces even
in the urban fabric, with the aim of favouring the re-establishment of
harmony within the body politic4. At the same time, however, they
knew that it was impossible to make the memory of such traumatic
events disappear in a short time. The severity, scale and duration of the
uprising had favoured the diffusion of written propaganda, chronicles
and memoirs, as well as an unprecedented circulation of subversive
ideas and political principles, which had to be opposed. Moreover, it
was necessary to develop and transmit a precise reading of those events,
which had revealed the possibility of independent initiative to large
1 English translation by Maria Tirelli.
2 Muto, 2012.
3 Pollmann, Kuijpers, 2013, p. 6.
4 Hugon, 2011, p. 257-290; Galasso, 2005, p. 86-106.
352 DOMENICO CECERE

sectors of the urban and rural population, their capacity to develop


an organic political programme, and to set up a political and military
organization. Thus that movement was prematurely assimilated by its
adversaries into a plebeian tumult animated by insubordination and
a mere thirst for social revenge, thievery and pillage, establishing a
reductive and distorted picture that was nonetheless destined to endure
for a long time5.
During the century and a half after that revolt, the spectre of
Masaniello6, as a symbol of blind popular wrath without political
solutions, ­continued to haunt the collective ­consciousness of the leading
classes and to influence their way of interpreting disturbances and riots
that occurred in the Kingdom of Naples at least until the dawn of the
Age of Revolutions.
In the period between the so-called Revolt of Masaniello and the
huge, bloody anti-Republican insurgency of 1799, the populations of
southern Italy did not undertake wide-ranging insurrectional initiatives
capable of threatening the social and political structure of the Kingdom.
And yet the unease of different social groups manifested itself at various
times in episodes of violent resistance to representatives of the local and
central powers, the religious authorities and members of the local leading
classes. In most cases, such upheavals did not cross the boundaries of
the village or the urban ­community, and only in some circumstances
did they give rise to spates that could shake several areas at once and
for similar reasons7.
And yet images of violent and unrestrained plebs c­ ontinued to
influence the ways in which similar initiatives, which bypassed the
channels of legality, were interpreted. This observation prompts an
investigation into the memory of the revolts of the past as a filter
through which observers, judges and politicians interpreted the political
and social reality of their time between the second half of the 17th and
the end of the 18th centuries. This investigation is not limited to the
mere representation of the events but is ­concerned with exploring the
function of the recollection of such memories within the framework
of the political and judicial strategies of the different political actors.
5 ­D’Alessio, 2003, p. 95-110; Villari, 2012, p. 476, 506 and passim.
6 ­D’Alessio, 2007, p. 222-223.
7 Cecere, 2013a.
History in the service of order 353

In reality, this investigation proves to be, at least in part, an analysis


of a certain reticence, because references to the revolts of the past are
found rather unevenly in the sources. For reasons of exposition, it is
here useful to divide the texts into two groups: those drafted by the
representatives of the central and local powers, and those produced by
the insurgents and their spokespersons. In the latter texts, the recourse
to force is generally dissimulated or scaled down, and the violent events
are recalled only rarely and cautiously. Mostly, the insurgents strove
to minimise the excesses ­committed and to represent themselves as
obedient to the laws and respectful of the institutions: for this reason,
they tended to avoid references to the upheavals and rebellions of the
past, the recollection of which may have c­ ompromised their strategies
for achieving their demands.
In ­contrast, such references are frequent in the sources produced by
judges, officials, governors, members of the local élites, feudal lords,
ministers, etc.; that is, by the representatives of the institutions and
the social groups that were the most frequent targets of the protests.
Besides, also due to their readier availability, the administrative and
judicial papers produced by central and peripheral institutions, dispatches,
reports, trials, sentences, etc., often ­constitute the primary source for
the study of the protest movements in the Europe of the old regime.
It is therefore by starting from these sources that a reflection can be
developed upon the use of the past in the description and interpretation
of ­contemporary political and social phenomena.
This reflection must be situated within a more general examination
of the political and juridical frameworks of the old regime. It is in
light of dominant ideas of order and obedience, doctrines of the right
of resistance, procedures of justice and repressive mechanisms, that it is
possible to understand in what way and for what reasons the past was
used to read the present. Revolts, seditions, c­ onspiracies that occurred
in the previous centuries are frequently evoked, mainly by jurists and
political writers8. This leads primarily to an enquiry about the function
of the examples taken from the past in the ­construction of juridical
and political discourses that aimed at strengthening royal power and
sheltering it from the risks of being overthrown9.
8 Chiffoleau, 2007.
9 Sbriccoli, 1974; De Benedictis, 2013b.
354 DOMENICO CECERE

The jurist Tommaso Saverio Caravita discussed the crime of lèse-


majesté in different sections of his influential treatise on criminal law
published in Latin in 1740. With the support of passages taken from
Classical authors (primarily Cicero, Virgil and Tacitus), and the opinions
of ancient and modern jurists, (Ulpian, Tiberio Deciani, etc.), Caravita
illustrated the different crimes that could be grouped in the category
of crimes against the dignity of the sovereign and against the State,
and distinguished them according to the seriousness of the offence, the
degree of premeditation and the character of the offender. His primary
aim was to outline a phenomenology of seditious behaviours in order
to distinguish the crimes that c­ onstituted an offense to sovereignty
from those less serious, and therefore establish scales of seriousness on
the basis of which the perpetrators could be judged. Alongside this,
the jurist does not refrain from offering the sovereign and his ministers
suggestions on models of behaviour against such threats. It is to this
dual goal that the author focuses on episodes from the history of both
the Kingdom of Naples and other European states.
Appealing to the authority of Tacitus, according to whom “in civil
strife, where action is more needed than deliberation, nothing is safer
than haste”10, Caravita illustrates the punishments to be meted out
to the rebels and proposes as examples the death sentences and exiles
ordered by the Duke of Alba in the Lowlands against the Calvinist
rebels; hence the case of Duke Henri II de Montmorency, who had led
the insurrection in Languedoc against Louis XIII of France: the deter-
mination of the latter and of Cardinal Richelieu, and the barbarity of
the public torture to which he was ­condemned in Paris in 1632 sapped
“the audacity of the rebels” and led the French to show themselves even
more in subjection to the Prince11.
The examples mentioned allowed the author to claim that the response
of authority to any threat had to be decisive, exemplary, even heinous:
it had to unsettle the subjects and dissuade them from possible future
affronts. The acts of punishment had to be impressive and expiatory
because they had the task of reaffirming the momentarily wounded

10 “Nihil in discordiis civilibus f­ estinatione tutius, ubi facto magis quam c­ onsulto opus est”, Tacitus,
Histories I 62, quot. by Caravita, Institutionum criminalium, II, p. 480.
11 Caravita, Institutionum criminalium, II, p. 469-479: “statim ­compressa seditiosa audacia, Galli
omnes uno, et c­oncordi animo in obsequium Principis proniores se reddiderunt”.
History in the service of order 355

sovereignty and showing its capacity to be in c­ ontrol12. Any distur-


bance of the peace, any excess had to be promptly chastised: possible
hesitations on the part of the monarch would only have encouraged the
haughtiness of his adversaries and paved the way for civil war13.
Jurists like Caravita thus did not leave any room for the possibility
of glimpsing the recourse to the right of resistance in open opposition to
the sovereign or his ministers. The doctrinaire system of the ius resistendi
had been developed by European judicial tradition between the late
Middle Ages and the early modern period with the aim of defending
divine and natural law from possible despotic degenerations on the
part of the royal power14, but also preventing the recourse to violence
by uncontrollable multitudes, thus divesting the popular uprisings of
legitimacy because such a right was generally reserved exclusively to
the higher classes or to the assemblies of estates15.
No ­concession to this juridical tradition is found in Caravita, or in
many other jurists of this period who glimpsed in it a limitation of
the suprema potestas and perhaps a risk of anarchy. The chronicles of the
Kingdom of Naples offered several examples in support of the opposite
theory, which affirmed the need for a harsh and swift response by the
royal power. Caravita illustrates this by citing ample excerpts from a
famous history of the viceroys of Naples written in the vernacular at
the end of the 17th century by the versatile writer, gazetteer and printer
Domenico Antonio Parrino. In 1622, the viceroy Zapata showed himself
to be too lenient towards the murmurs of the plebs vexed by the rising
cost of food, leading to major disturbances that ceased only when the
viceroy had some death sentences enacted16. An even more questio-
nable ­conduct was that of another viceroy, the Duke of Arcos, who,
in 1647, underestimated the gatherings and the isolated disturbances
that preceded the outbreak of the revolt in July: had he acted firmly
from the beginning, he would not have given the abbot Genoino and

12 Foucault, 1975, p. 36-72.


13 Caravita, Institutionum criminalium, II, p. 481.
14 Hespanha, 1993, p. 295-321; De Benedictis, 2006.
15 Fontana, 1999 and, more generally, Zancarini, 1999.
16 Parrino, Teatro eroico e politico, II, p. 144: “Questa tolleranza in vece d­ ’acchetare, fomentava i
tumulti […] fù di genio cotanto facile, e clemente fuor di misura, ché la sua soverchia indulgenza
fomentò quei tumulti, che c­ on castighi avrebbe potuto sul bel principio reprimere”, quot. by Caravita,
Institutionum criminalium, II, p. 481.
356 DOMENICO CECERE

Masaniello the time to plot their machinations and incite the “plebs”
against the government17.
In my opinion, the recourse to similar examples taken from the history
of the previous centuries, which is very frequent in Caravita but is also
found in the work of other jurists, such as in the treatises of Aniello de
Sarno (1672), Carlo Antonio de Rosa (1680) or Giuseppe Basta (1783),
met multiple requirements: of the juridical, psychological and political
kind. The two primary goals are those which I have already mentioned:
distinguishing between the different cases of rebellion and providing the
rulers with models and anti-models of behaviour, indicating the most
appropriate strategies in order to avert any threat. This need was all
the more perceived inasmuch as in the Kingdom of Naples the proce-
dures to be adopted in case of disturbances were not rigidly codified: in
matters of political crime, the Roman laws and jurisprudence remained
the foundations for the organization and the doctrine, and no law of
the Kingdom was specifically devoted to rebellion18. The examples
taken from the history of the recent centuries thus had the function
of bringing the somewhat abstract and often anachronistic formulas of
Roman law back to c­ oncrete situations. In doing so, they allowed for
a distinction between the different specific cases of rebellion and the
different situations, for the formulation of a sort of hierarchy of crimes
on the basis of their seriousness.
Alongside this need, however, it is possible to recognise other, less
explicit, and sometimes, to some extent, even unconscious needs. If
“the very act of writing was an effective way of coping with exceptio-
nal events” because it made it possible to give order and meaning to
traumatic memories19, reference to the past in particular was one of
the tools that made it possible to inscribe those, often traumatic, events
into a sequence, to give them an order and to evaluate them in light
of the past. Textual criticism, as well as studies of social psychology
and ­cultural sociology, ­confirm that disruptive events, especially when
they represent a threat to the social order and to the collective identities
­connected to it, in the public sphere are often related to recognized

17 Caravita, Institutionum criminalium, II, p. 482.


18 In the mid-18th century the jurist Domenico Moro wrote: “le leggi nostrali, per le pene ­de’
ribelli niente in sostanza han mutato il diritto ­commune”, Moro, Pratica criminale, III, p. 258.
19 Pollmann, Kuijpers, 2013.
History in the service of order 357

explicative models and shared experiences: that which is already known


is an essential term of reference for making unsettling phenomena that
may escape ­comprehension intelligible20. The famous ­conspiracies and
the great rebellions of the past, the memory of which had been passed
on by the chronicles, historiography, political literature and theatre
thus ­constituted narrative models and allowed representatives of the
institutions, judges, members of the local élites to qualify and give
sense to events that escaped the ordinary categories of political struggle.
This is one of the reasons why not only in the writings of distinguished
jurists, but also in many of the chronicles and the reports drafted by
officials, judges, mere observers in the aftermath of a tumult, the events
relayed are often related to c­ onventional images of revolt or assimilated
into famous uprisings of the past: those who wrote often tended to refer
a specific case to stereotypical figures of sedition21. With a variable
degree of intentionality and awareness, the narration of the causes and
enfolding of the events was often modelled after famous exempla trans-
mitted by literary tradition and political literature, making it possible to
re-assimilate, within c­ onsolidated explicative schemes, processes that the
exponents of the ­cultured classes sometimes struggled to ­comprehend.
Among the most frequently recurring schemes, one that is almost
omnipresent is that of the ­conspiracy22, plotted by power-hungry
figures driven by envy or resentment but capable of taking hold over
the basest instincts of unstable multitudes prone to be manipulated: a
scheme legitimised by historiography, political literature and dramatic
literature because the narrative of ­conspiracy, which has its greatest
archetype in ­Sallust’s The Conspiracy of Catiline, had established itself
almost as a subgenre in the dramatic and historiographic literature of
the 17th century23.
20 Caruth, 1996; Jouhaud, Ribard, Schapira, 2009, p. 294-296; Lavergne, Perdoncin, 2010;
Alexander, Butler Breese, Eyreman, 2011; Alexander, 2012; Vollmer, 2013, p. 28-68.
21 Farge, Revel, 1988, p. 17-26.
22 The centrality of the narrative model of ­conspiracy, which sets events with often ­complex
and sometimes very different causes within an easily understandable framework, is also
observed by Erdélyi, 2013 in relation to the 1514 peasant revolt in Hungary.
23 On the recurrence of the tòpos of ­conspiracy in the political struggle of the Modern Era,
see Campbell, 2004; see also Gallo, 2011. On the ­conspiracy narrative, Di Napoli, 1989.
On S­ allust’s primacy in the European printed editions in the Modern Era, Burke, 1966;
on French historiography and dramaturgy of the 17th century see Lafond, 1996, and
Grell, 1996. See also Carlo G­ inzburg’s analysis, in Ginzburg, 1999.
358 DOMENICO CECERE

This process usually led to the reduction of ­complex phenomena


to stereotyped narrative schemes c­ onnoted by the prevalence of repe-
titive and distorted images: crowds in turmoil depicted as unwitting
instruments in the hands of c­ onspirators or driven by feral instincts,
unfounded fears, envy and revenge. And if such distortions may in part
be the involuntary outcome of the o­ bservers’ psychological and c­ ultural
needs, they were also often the result of the deliberately pursued goal
of unsettling the interlocutor by relying on frightening or pathetic
images diffused by popular literature24. Moreover, a c­ ontribution to
these distortions could be made by the deliberate willingness to wea-
ken and discredit those who relied on the support of the lower classes,
traditionally excluded from political life, often through the recourse to
extralegal initiatives.
These goals are evident in the attitude of the local leading groups in
many episodes in which the ordinary dynamics of the struggle between
factions within the elites25 were altered by popular protest. In May
1779 in Penne, a town in the Abruzzi region, a disturbance occurred
by which the people seized the local government, using force to oust
the privileged classes and remaining in charge of the town for about
a month. Although no violence was perpetrated against the persons
or the assets of the notables, a nobleman who had ­contacts in Naples
hastened to write to the government that “a real revolution of People
similar to that of Masaniello” had taken place26. In this way, the events
that were enfolding in the Abruzzi town were immediately qualified
as dangerous for the stability of the social order through cursory refe-
rence to insurrectional events that had occurred over a century earlier,
the memory of which immediately evoked unsettling images of chaos,
popular wrath and reversal of social roles.
This episode, like many others, c­ onfirms that the image of the
Revolt of Masaniello c­ ontinued to influence the way of narrating revolts
until the last decades of the 18th century. But such an image, as already
mentioned, proves to be ­considerably simplified and distorted with
respect to the ­complexity of the events of 1647-1648, the variety of the

24 Jouhaud, Ribard, Schapira, 2009, p. 309-316.


25 Delille, 2003.
26 Archivio di Stato (Napoli), Real Camera di Santa Chiara, Processi criminali, 11, 84,
fo 55-58.
History in the service of order 359

causes and the multiplicity of the subjects who were their protagonists.
The reworking of their memory had begun in the aftermath of their
occurrence, by the restored authorities and ­cultural agents27 (chroniclers,
poets, jurists, painters, etc.) who had been entrusted with the task, or
granted the power, of providing readings of the events that had occur-
red. From 1648, c­ ontrol over the publication and circulation of news
was strengthened28, in sync with what was happening in other areas
in Europe29, and stricter ­control of ­communication processes favoured
the establishment of agreed versions of the past30. The c­ onstruction
of a shared memory was successful in spreading and establishing the
images of an upheaval produced by the insolence, greed and thirst for
“novelties” of the urban plebs, in the ­context of the glorification of the
Spanish monarchy. In this powerful narrative, the participation of the
different social groups, as well as the projects and political goals of the
insurgents, were c­ onsiderably scaled down and discredited, if not omitted;
the insurrectional movement was presented as the ­consequence of the
cupidity of some c­ onspirators and of the basest impulses of the urban
plebs. A similar reading is found, for example, in the famous history
of the viceroys written by Parrino at the end of the 17th century, which
ascribes the revolt to the action of the “discontented, who served as bel-
lows to light this fire”. The leading figure amongst these was Genoino,
who, “taking advantage of the K ­ ing’s clemency, sought opportunities
to vent his rage, and the malevolence, which he harboured in his
soul”31; his “pernicious maxims” found an audience in some leaders of
the urban plebs, like Giuseppe Palumbo and Domenico Perrone, who
were “greatly cross, for having been held in prisons for many months”
for dealing in c­ ontraband, and especially in Masaniello, “base servant
of a fishmonger”, who was also full of rancour towards the government
since the arrest of his wife: “he was seeking the opportunity to avenge
such an affront, and c­ ontemplated the idea of stirring some uprising”32.
The reading furnished by Troyli in the middle of the following century
was not very different; Troyli models his narration after the chronicle

27 Alexander, 2012.
28 Santoro, 1986, p. 34-36; Lombardi, 2000, p. 146-147.
29 Dooley, Baron, 2001; Koopmans, 2005.
30 Fentress, Wickham, 2008, p. 41-85.
31 Parrino, Teatro eroico e politico, II, p. 345.
32 Ibid., p. 345-346.
360 DOMENICO CECERE

of Agostino Nicolai (1660, written in 1648) and ascribed the outbreak


of the disturbances to G ­ enoino’s propaganda among the people, the
irritability of the “lowest Plebs” (defined elsewhere as “bacchanalian”)
and to the indiscipline of the “ragazzaglia” (rabble) led by Masaniello33.
In these stories, alongside the ­contemptuous judgments passed on
the leaders of the revolt and their goals, it is necessary to observe the
main role and often sole protagonist of the insurrectional movement
attributed to the urban plebs, despite the ­complex social structure of
17th century Naples. Ever since the beginning of the century, various
pro-people historians and writers such as Giovanni A. Summonte,
Francesco Imperato and Camillo Tutini, aiming to strengthen the
political prerogatives of the Neapolitan “people” and bring them closer
to the nobility, had been c­ ommitted to demonstrating the antiquity of
the c­ ity’s institutions and to distinguishing the popolo from the plebe34.
And in 1647, the political claims developed by the popolo civile in the previous
decades ­contributed to transforming an anti-fiscal revolt into a vast and
organized insurrectional movement in which the higher echelons of
the “people” (lawyers, doctors, naturalists, former officers, members of
the clergy, craftsmen, members of the guilds) played a leading role35.
Yet, after the restoration of the monarchy in April 1648, such c­ omplex
an image of Neapolitan society and its political institutions ended up
being overly simplified and the people tended increasingly to be equated
with its lower strata, the plebs.
This flattening of the image of the revolt and its protagonists was
inserted in that broader process of celebration of public quiet, of the
stability of the republic as the main goal of the sovereigns, which had
pervaded political discourse in the Italian peninsula from the second half
of the 16th century, reinforcing the agenda of those who preached absolute
loyalty to the sovereign36. The ­consequence of this was an increased de-
legitimisation of rebellion, which in the 17th century deeply permeated
­culture and collective c­ onsciousness, to the extent of depriving value
33 Troyli, Istoria generale, V, p. 305-306.
34 Galasso, 1994, p. 247-269; Visceglia, 1998, p. 29-43; Muto, 2008; Villari, 2012, p. 67-127.
35 Rovito, 1986; Musi, 1992; Villari, 2012, p. 301-520.
36 Muto, 2008; see also Borrelli, 2000, p. 113-176. Besides, in the two centuries during
which the Kingdom was part of the Spanish monarchy, beyond the great revolt of 1647-
1648, the most numerous manifestations of violence were found in the 16th century,
especially in the cities, see Muto 2010.
History in the service of order 361

and legitimacy from any form of resistance to oppression37. In reality,


the investigations of Angela De Benedictis have highlighted, in different
areas of the Italian peninsula and well into the end of the 17th century,
the persistence of defensive strategies based on the legitimisation of
disobedience to the prince and of armed resistance to his officers, and
on the simultaneous rejection of the accusation of rebellion38. However,
in the Kingdom of Naples between the middle of the 17th and the end
of the 18th centuries, the recourse to similar strategies on the part of
the defenders of rebellious multitudes is quite rare, because the judges
tended to qualify as rebellion (and therefore as a crime of lèse-majesté
or of vis publica, public violence) open resistance to an officer, an armed
squad, a baronial agent, especially when those responsible belonged to
the lower strata of the population. Therefore, in the texts produced by
the insurgents or their spokespersons during some disturbances or in
their aftermaths – such as pleas, grievances, petitions, statements of
defence, etc. – the recourse to force was almost always denied, dissi-
mulated, diminished, or in some cases presented as the work of small
fringes of disgruntled and unstable people.
Indeed, the study of the social ­conflicts and upheavals of this period
shows that the populations of the capital and of the provinces of the
Kingdom were preferably c­ ommitted to resorting to justice against the
feudal lords, exponents of the local élites, magistrates, or against expo-
nents of adversary factions, rather than to forms of extralegal protest
that may lead to physical clashes. Although recourses to open resistance
were not rare, the occurrences of violence in general were ­contained,
directed towards precise goals and often aimed at strengthening battles
that were pursued primarily in the chambers of the civic parliaments
and the courts39.
The ­complementarity between political battles, legal procedures
and episodes of collective violence, which can be observed in most of
the episodes of violence in this period, often led the rebels to show the
agreement of their demands with the laws, with local customs and
statutes, to represent themselves as submissive and subjected to the
institutions, and therefore to seek to mask or scale down the possible
37 Villari, 2010, p. 97-124; see also Maravall, 1975.
38 De Benedictis, 2013a, p. 257-266 and passim.
39 Cecere, 2013b and 2015.
362 DOMENICO CECERE

acts of violence ­committed. Reproach of any recourse to open force was


so widespread in the public sphere that even resistance to the action
of local tax collectors, or baronial agents with tyrannical and random
methods, was claimed to be a legitimate action only in rare cases. This
largely explains why in the texts written in support of demands, the
memory of the upheavals of the past is almost always absent, for its sha-
dow may have c­ ompromised the image of loyal and respectful subjects
which the claimants sought to c­ onvey of themselves. The case of Melfi
in the first half of the 18th century is emblematic of this widespread
cautiousness in evoking past disturbances, even when they were recent
and well imprinted in the memory of the protagonists.
Ever since the first half of the 16th century, this town in the Basilicata
region had been a fiefdom of the powerful Doria noble family, which
hailed from Genoa. In 1728, a sizeable part of the c­ ommunity rebelled
against the baronial agents, refusing to pay the flour tax40. The revolt
was suppressed only after fierce fighting, but in the following years, the
università (citizenry) undertook several legal actions against the feudal
lord, leading to embittered c­ ontroversy after the accession of Charles of
Bourbon to the Neapolitan throne (1734). Despite the severity of the
clash, and although the promoters of the accusations against the agents
of Prince Doria were in many cases relatives and allies of the authors of
the tumult, in none of the ­prosecutors’ pleas, petitions and presentations
of historical facts against the lord, appear references to the action of 1728
or to its bloody repression41. On the ­contrary, it was the defenders of the
baron who evoked those events in order to highlight the dangerousness
and scarce loyalty of the Melfi citizens, who, spurred on by the “priests”,
aspired to nothing else than to escape feudal rule42. In retrospect, it
is possible to observe that, in a sense, the defenders of Doria were not
entirely wrong, because a few years later, in 1738, the town once again
rebelled against the agents of the lord for reasons altogether similar to
those that had led to the clash ten years previously.
The cases in which mention of the disturbances of the past can be
observed in the texts and discourses of the insurgents are indeed rare.
40 Archivio di Stato (Napoli), Consiglio Collaterale, Consulte originali, vol. 8, 29.
41 Archivio di Stato (Napoli), Processi antichi, Pandetta Rossa, vol. 170, 5042; Brieve notizia
di fatti; Della Monica, Il reo innocente; Id., Difesa de gli aggravamenti.
42 Archivio di Stato (Napoli), Real Camera di S. Chiara, Bozze di Consulte, vol. 31, 43,
July 30, 1738.
History in the service of order 363

Notable among these is the case of the rebellion of the inhabitants of


Arena and Soreto against their lord, an episode of revolt that in many
respects is exceptional ­compared to the majority of the disturbances
that occurred in this period. In the first half of the 18th century, these
two villages in southern Calabria were often in dispute with Marquis
Fabrizio Caracciolo, and on several occasions the quarrels degenerated
into violent clashes. The reasons for the dispute pertained to the econo-
mic, fiscal and judiciary sphere of feudal rule and were similar to those
that in the same decades were fomenting the clashes between lords and
­communities in many areas of the Kingdom. The ­conflict worsened after
the arrival of Charles of Bourbon: while disputes reignited in the courts
of law, in Arena and Soreto between 1736 and 1739 the ­conflict on several
occasions degenerated into disturbances and violence. The resistance of
the majority of the inhabitants against the baronial agents was tenacious
and enduring, to the extent that the latter entirely lost ­control of the
territory of the two estates for long periods43. Similar episodes of open
and violent c­ onflict led by sections of the c­ ommunities against the barons,
their agents and their acolytes were quite frequent in the fourth decade
of the 18th century and were often the extreme outcome of rising tensions
between lords and ample sectors of the enfeoffed ­communities between
the end of Austrian rule and the beginning of the Bourbon period44. In
most ­conflicts, the two parties involved strove – often pretended – to
appear open to seeking a ­compromise and displayed a willingness to
attack their adversary exclusively by legal means. In Arena and Soreto,
however, no effort was made to find an agreement due to the severity of
the ­conflict, which found its deep roots in longstanding ­conflicts, and
to Marquis C ­ aracciolo’s incapacity to establish relationships with one of
the local factions. On their part, the insurgents were so sure of being in
the right in the face of the b­ aron’s abusive and tyrannical practices that
they did not bother to mask the escalation of violence that had occurred
in the two villages. And while the lawyers of the lord were seeking to
discredit the image of the rioters by claiming that “they could only be
­compared to the Scythians, the Vandals, the Saracens”, and remembe-
ring that some of them had already been the protagonists of upheavals

43 Archivio di Stato (Napoli), Real Camera di S. Chiara, Bozze di Consulte, vol. 5, 77; De
Ruffi, Difesa per le Università; Grassi, Ragioni ­dell’Illustre Marchese.
44 Cecere, 2013b.
364 DOMENICO CECERE

against the baronial agents in 170745, the two insurgent ­communities,


during the most intense phase of the clashes, did not hesitate to evoke
the memory of violence that occurred in the previous century. On the
occasion of the spring ­festivities of 1736, in various places within the
feudal area the villagers prepared puppets representing the lord, and
after parading and reviling them, they burned them46. The ­festivities
offered the inhabitants of the two villages the opportunity to stage in
ritualistic guise that resentment towards the baronial power and its
apparatus which in the same months also found its expression in far
more ­concrete actions; those rituals brought back to memory similar
displays of hostility towards lordly power which had been staged slightly
less than a century earlier. During the revolt of 1647-1648, which in
the provinces of the Kingdom often took an anti-feudal leaning, the
Marquis of Arena had sought to take advantage of the disturbances
to seize Stilo, a nearby town with no feudal bonds. At the beginning
of 1648, in order to demonstrate their opposition, the inhabitants had
prepared a straw puppet depicting the baron and set it on fire; a few
days later, the nobleman had taken revenge by sending 300 hirelings
to Stilo, and having the noblemen and those responsible for the insult
slaughtered47. The memory of that episode was still alive in 173648: the
choice of evoking, during the clashes of those years, the resistance of
the inhabitants of Stilo and the ­consequent display of brutality by the
ancestor of their lord had the function of casting a sinister shadow on
the c­ onduct and goals of the latter; with that act of remembrance, they
ultimately wanted to affirm that the forms of feudal rule in their view
had not changed much ­compared to the previous century.
This episode suggests that, no matter how they strove to propagandise
their version of past events, the authorities could not entirely c­ ontrol the
recourse to them, and in certain circumstances, rebel memories could
resurface in the public domain and clash with the versions of the authorities.
On the other hand, however, the case of the uprising of Arena and
Soreto in many respects represents an exception. The harshness of the

45 Grassi, Ragioni d­ ell’Illustre Marchese. Of one of them it was said “ne per ­l’età canuta se gli
è raffreddato quel mal talento, quella perversità, quel furore, che trasse fin dalle fasce.”
46 Ibid.
47 Von Lobstein, 1973, p. 259-260.
48 Grassi, Ragioni d­ ell’Illustre Marchese: “[…] ne sono vive tuttavia in q­ uel’ Paese le rimembranze
tramandate da lor maggiori”.
History in the service of order 365

c­ onflict, the groundlessness of the demands of the baronial agents and


the arrogance with which the lawyers defended the lord in the courts,
had not only hindered any pursuit of support within the c­ ommunity
but had also put the marquis in a position of such disrepute in the eyes
of the ministers and of the royal institutions that even the open, violent
and prolonged resistance of the villagers could be judged with lenience.
Despite blaming the excesses c­ ommitted by the insurgents, the royal
judges accepted most of their demands and ruled in their favour.
Similar outcomes were quite rare in the Kingdom of Naples, howe-
ver. On the ­contrary, accusations of tumult and sedition were mostly
equated to crimes of lèse majesté or vis publica and put the accused in a
position of weakness: indeed, in similar cases of c­ onflicts between lords
and c­ ommunities, when the former had the chance to accuse their coun-
terpart of acts of violence and disturbances, the judges mostly ended
up ruling against the latter.
In the 18th century, the process of ­condemnation and criminalisation
of any recourse to force on the part of uncontrollable multitudes had
long been ­completed. In public discourse and in judicial practice, open
resistance was resolutely c­ ondemned: not only, as it is obvious, when it
was directed at the king or his highest magistrates, but also when vio-
lence was directed at tax collectors or the agents of a feudal lord. Even
when it ­constituted a reaction to blatantly illicit or abusive behaviours,
it could hardly be judged as legitimate resistance. I could not say to
what extent the revolt of 1647-1648, due to its nature and intensity,
may have c­ ontributed to this process of criminalisation of resistance,
or whether it had represented a turning point in this process. It is
however certain that from the mid-17th century every popular initiative
that crossed the borders of legality could easily renew the memory of
an event that invariably recalled unsettling images of anarchy, blind
wrath and subversion of social hierarchies.

Domenico Cecere
Telemme, Aix-Marseille Université
CONTESTED MEMORIES
The Revolutions of the Past
in Eighteenth-Century Britain

At the height of intense political c­ onflict and struggle during the


reign of Queen Anne, a broadsheet appeared in London, featuring an
engraving entitled Like Coachman, Like Cause: Or, An Emblem Of what we
must expect, if Low Church gets uppermost1. The design is full of emblematical
allusion. It shows a coach dragged by six horses against the background
of an urban scene. Benjamin Hoadly, one of the champions of the so-
called Low Church, and one of the most prominent Whig writers of
the day, sits on the front horse as postillion. The horses trample down
the most cherished ideas of the so-called High Church and the Tories:
“Episcopacy”, “Loyalty”, “Liberty of the subject” and “Monarchy”. The
horses themselves symbolise slogans which the authors of the broad-
sheet associated with the Whig party: “Moderation”, “Presbitery”,
“Republican Tirany”. The broadsheet is a highly polemical warning
against the Whigs and their presence within the Church of England,
the ecclesiastical branch of the Whig party. It is a warning against the
destruction of the English monarchy and of the Church of England. Of
special interest to this chapter is how the engraving plays with images of
the past. The personification of the Episcopal structure of the Church of
England is – significantly – William Laud, King Charles I’s archbishop
of Canterbury, who was imprisoned, tried and executed during the first
civil war of the 1640s2. “Loyalty” is represented by the Earl of Strafford,
one of the most distinguished counsellors of Charles I, who was beheaded
by means of a bill of attainder in 16413. A prostrate figure represents
Everyman as the “Liberty of the subject”, crushed under hooves. The

1 British Museum Satires 1497.


2 Trevor-Roper, 1962.
3 Woolrych, 2002, p. 164-182.
368 ULRICH NIGGEMANN

final figure of the monarchy is represented by Charles I himself. The


coach is not only steered by the devil, but carries in it Oliver Cromwell,
calling “No Monarchy”, along with the axe that beheaded King Charles
and a paper entitled “The Covenant”. The coach itself represents the
“Common Wealth”, signalling the republic established in 1649.
The broadsheet is not only a warning against the Whigs and their
alleged Republican principles, but also an attempt to link these supposed
Whig principles with the Revolution of 1641 to 1649, and the regime
of the Interregnum from 1649 to 1660. In this ­context, the revolution
of the past became a threatening perspective for present-day politics. It
became an argument against those supposedly trying to repeat and re-
enact that past. At the heart of the argument lies a historical narrative
which celebrates Charles I and his advisors, and which ­condemns the
civil wars and the revolution. From this point of view, the authors of
the broadsheet, as well as of a broad range of pamphlets, warned that
the Whigs would repeat that narrative. One poem states: “Again they
play the Game of Forty One”4.
Yet, did the Whigs or Hoadly actually claim any intent to repeat
the revolution of the 1640s? Would they themselves have described
their political aims in the terms insinuated by their opponents? In fact,
they strictly denied any association with the “rebellion” of the 1640s.
Instead, they sought to associate themselves with another set of events,
the so-called “Glorious Revolution” of 1688-1689, which they regarded
as fundamentally different from the revolution of the mid-century,
thereby also professing a negative view of the “rebellion” of the 1640s5.
Ostensibly, there was no fundamental difference between the Whigs
and the Tories in their view of the revolution of the 1640s. Furthermore,
as demonstrated in this article, the Tories also distinguished between
both revolutions. However, if the Whigs and the Tories – or the Low
Church and the High Church – agreed in their negative view of the
events of the mid-century, and in their positive assessment of the
so-called “Glorious Revolution”, what then was the struggle about?
This is indeed a question about memory politics and about different
perspectives and uses of memories of the past. To answer this question,
the first section of this chapter looks at the ­controversies between the
4 Anon., For and Against Dr. Sacheverell, p. 3.
5 See below.
Contested Memories 369

parties after the Revolution of 1688-1689, and at the practices of this


party struggle. It briefly summarises the causes of ­conflict, as the revo-
lutionary past was not in itself the cause of the intense c­ onflicts within
English society and the Church. Yet, the revolutionary past was an
important argument for either party, and this is precisely the reason
why refigurations of the past were so important and ­contentious6. Thus,
the first part of this chapter explains which kinds of ­conflict ­culminated
in the so-called Sacheverell affair of 1709-1710, and how the different
parties used revolutionary memories to support their point. The second
part outlines several debates in the later eighteenth century – which
cannot be done in extenso, as important research on the subject is still
to be performed. Nevertheless, it becomes clear that the mechanisms
of memory politics and the design of historical arguments along party
lines were still factoring in the dispute, though the realignment of those
lines was still occurring given the circumstances.
It is evident that party ­contention became a political reality after
1689, and that political c­ onflict developed more or less along party
lines7. It is difficult to define the ideological positions of both parties
in general, particularly in the latter half of the reign of William III, as
court and country divisions served to either undermine or c­ omplement
the Whig/Tory antagonism8. More relevant to this discussion is that
there were divisions within the Church of England, which ­contemporaries
described using the polemical terms of “High” and “Low Church”. Party
division within Parliament, within the Church and in broader society
thus became an important fact, and – as can be traced in the political
debates of the early eighteenth century – party names and ideological
catchwords were focal points of political identities9. Despite the role the
parties played in structuring political opinion, the views of the “Glorious
Revolution” did not differ as much as one might think; in fact, there
were arguably more similarities than differences between their views.
This serves as a starting point in ­considering the ­conflict in British
society in the years following the “Glorious Revolution”.

6 See Niggemann, unpublished. For the ­concept of narrative “refiguration” see Ricœur,
1983, p. 109-129.
7 Holmes, 1987; Speck, 1970; Hill, 1976 and 1996; Harris, 1993.
8 Rubini, 1967.
9 Niggemann, 2013, p. 63-75.
370 ULRICH NIGGEMANN

It is sometimes stated that the Tories, after 1688, c­ ondemned the


“Glorious Revolution” as a rebellion similar to that of the 1640s, and
that at the same time the Whigs lauded the Revolution on the ground
of ­contractual resistance theories10. This is not entirely correct. There
was indeed a minority of Tories who became Jacobites, rejecting the
Revolution Settlement and desiring a Stuart restoration; and there
was indeed a minority of Whigs who advanced theories of a c­ ontract
between the monarch and the people. However, the majority of both
parties welcomed the Revolution and did so for very similar reasons.
Firstly, there was a general c­ onsensus that the Revolution was the result
of an exceptional intervention by God to rescue the English Church and
nation from popery and slavery11. Secondly, there was a large c­ onsensus
that the Revolution was not the result of large-scale resistance by the
people12. Thirdly, there was also broad agreement that the voluntary
flight of King James, during the invasion of William III, caused the
throne to devolve automatically to the next heir, Queen Mary II, wife of
William III – ignoring the Prince of Wales, born in the summer of 1688,
and the suspicious circumstances of his birth13. The only irregularity in
this ­consensual view, was that William and Mary were both crowned,
though William was only third in the line of royal succession14. Some
Whigs, however, tended towards the position that there was a vacancy
on the throne and that the Convention, elected in January 1689, had
filled it; whereas Tories were inclined to assume that the Convention
merely stated an already given fact. Tories were anxious to avoid any
appearance of the King having been elected by the people. Thus, they
stressed the automatic devolution of the crown from James II – whose
flight was interpreted as an abdication – to his next heirs. Whigs were
generally more ready to allow the Convention the right to fill the vacant
throne15. Consequently, in the years following the Revolution of 1688-
1689, there was much ­controversy between the different parties, not

10 Kenyon, 1977, p. 5; Sharpe, 2013, p. 343-351.


11 Straka, 1962, p. 638-658; Claydon, 1996; Niggemann, unpublished, p. 129-159.
12 Kenyon, 1977, p. 5-34; Goldie, 1980, p. 485-491; Niggemann, unpublished, p. 125-222.
13 Kenyon, 1963, p. 418-426; Gregg, 1980, p. 52-58; Harris, 2006, p. 258-259; Sharpe,
2013, p. 315-318; Niggemann, unpublished, p. 185-188.
14 Nenner, 1995, p. 147-157.
15 For the debates in the Convention, see Horwitz, 1977, p. 8-14; Jones, 1988; Schwoerer,
1981, p. 171-231.
Contested Memories 371

c­ oncerning the legitimacy of the Revolution as such, but ­concerning


their different interpretations of the event.
However, the ­conflicts and debates between both parties were closely
­connected to ­controversies occurring within the Church of England. The
backgrounds of these c­ ontroversies are c­ omplex. One of the issues was the
schism caused by the Revolution, in which approximately four hundred
clergymen refused to swear the oath of allegiance to the new regime.
Due to their refusal, these so-called “nonjurors” were forced to leave their
positions and form an underground church – the Nonjuring Church of
England – which they claimed to be the true Anglican Church16. Many
of those who stayed within the official Church retained great sympathy
for their dismissed brethren. Thus, the Revolution was tainted by the
schism as it caused these tensions within the Church of England.
A further problem was the preference of the new regime for the
latitudinarian wing within the Church17. The Latitudinarians were
those Anglicans who, from the 1660 Restoration of the monarchy
onwards, demanded a broader church including moderate Protestant
dissenters. They were prepared to abandon parts of the liturgy and of
those elements they called the “adiaphora”, referring to parts of the
Book of Common Prayer they deemed not essential for salvation18.
Those of the clergy, however, who stressed Episcopal hierarchy, apostolic
succession and the full liturgy of the Book of Common Prayer, were
alienated by William ­III’s preference for the latitudinarians, which
they increasingly perceived to be their enemies within the Church – or,
as Henry Sacheverell claimed, their “false brethren”19. These High
Churchmen were further disgusted by the 1689 Toleration Act, which
allowed Protestant dissenters to worship freely outside the Church of
England20. These two currents within the Church became steadily more
opposed to each other, and the ecclesiastical policies of the Revolution
Settlement were not determined to reconcile the High Church clerics
with the results of the Revolution.
16 See Kenyon, 1977, p. 21-60; Gibson, 2002, p. 36-39; Rose, 1999, p. 152-160; Hoppit,
2002, p. 34-36.
17 See Bennett, 1965, p. 104-131.
18 Griffin, 1992; Spellman, 1993; Walsh, Taylor, 1995, p. 1-64 (p. 29-39).
19 Sacheverell, The Perils of False Brethren, both in Church, and State, 1709.
20 For the Toleration Act, see Schochet, 1996, p. 165-187. For the attitude of High Church
clerics, see Bennett, 1975, p. 10-16; Holmes, 1975, p. 12-15; Champion, 2014, p. 5-6.
372 ULRICH NIGGEMANN

Moreover W ­ illiam’s refusal, after 1689, to call the Convocation


caused further alienation between the revolutionary regime and the High
Church. The Convocation was the most significant platform of debate
within the Church. It was ­comprised of a Lower House, ­consisting of
the parish clergy and with a clear High Church majority, and an Upper
House, c­ onsisting of the bishops with strong Low Church affiliations.
Demands to call the Convocation were growing in the 1690s, but William
– unsatisfied with its refusal to integrate moderate dissenters into the
Church during the debates on the Comprehension Bill in 1689 – was
determined not to call it anymore. However, in 1701, the necessity for
a change of ministry, and his turning to Robert Harley, Earl of Oxford,
caused him to agree to call it against his own preference21. When the
Convocation finally met in 1701, the deep tensions between the opposing
currents erupted into an open ­conflict within the Church22. In March
1702, with the Church ­conflicts still unresolved, William III died, and
Queen Anne assumed the throne – not only a Stuart, but also a staunch
Anglican with strong High Church sympathies23.
At this point, a c­ onfident High Church movement, with Francis
Atterbury and Offspring Blackall as leaders, not only celebrated the
new Queen, but began to aggressively c­ ondemn the principles of the
Whigs and the Low Church. They sought to restrict the worship of
dissenters, and especially their accession to offices, and to re-establish
the monopoly of the Church of England. They wrote fierce pamphlets
and sermons against any kind of resistance theory, thereby telling the
Queen that it was only them and the Tories on whom she could rely, as
they represented the true loyalty to the crown, while the Whigs were
a suspicious Republican party24.
It was within this c­ ontext that the so-called Rage of Party unfolded,
with the Sacheverell affair as its c­ ulmination. In 1710, Great Britain and
its capital of London were troubled not only by an intense pamphlet war,

21 Bennett, 1975, p. 43-56; Gibson, 2002, p. 70-74; Rose, 1999, p. 190-194.


22 Bennett, 1975, p. 56-62.
23 This became very clear in Queen A ­ nne’s preference for John Sharp, Archbishop of York;
see Bennett, 1975, p. 67-68; Gregg, 1980, p. 154; Hoppit, 2002, p. 279; Sharpe, 2013,
p. 558.
24 See Place, The true English revolutionist, or the happy turn, rightly taken, 1710, p. 4; The
Examiner, Or, Remarks upon papers and occurrences, no 31, 6-9 March 1712, p. 1-2; Anon.,
Wonders upon Wonders, 1710.
Contested Memories 373

but also by large-scale rioting25. These riots took place in the aftermath
of the trial of Henry Sacheverell, who was impeached by the House of
Commons in December 1709 due to a sermon he had preached on the
5th of November that year. A cleric of the Anglican Church, Sacheverell
had preached against Protestant dissenters and against the toleration
established by the “Glorious Revolution” in 168926. The sermon was
understood by his opponents as a statement against the Revolution
Settlement itself, and for this offence, the Whig majority within the
House of Commons pushed the impeachment through Parliament.
The verdict ­confirmed ­Sacheverell’s guilt, but dismissed him with a
mild punishment. The trial caused much popular unrest, and the lax
punishment represented a triumph for S­ acheverell’s supporters. The
rioting and pamphlet war persisted that year through highly-­contested
parliamentary elections, which brought a landslide victory for the Tories
and enormous losses for the Whigs27. The sermon by Sacheverell, and
the riots as well as the Tory victory can be interpreted as symptoms of
a broad dissatisfaction with the political and religious situation in post-
revolutionary England. Thus they ­constituted a high point of religious
and political ­conflict during the reign of Queen Anne.
It is, however, crucial to note that the party struggle was not about the
legitimacy of the Revolution of 1688-1689. It was about the Church and
which party the Queen could trust. The projected Hanoverian succession
was already looming, set to become reality in 171428. In this situation,
recollections of the two revolutions of the seventeenth century framed
political debates. These memories were used as arguments against the
claims of the political enemy, and they became mighty weapons used
to vilify and defame the opposite party.
As shown, the Tories and their High Church allies made use of memo-
ries of the mid-century revolution to attack the Whigs as Republicans
in disguise, seeking to destroy the monarchy and the Church of England
to erect a republic and a Presbyterian Church. The memories of the civil
wars and the interregnum were, from a Tory point of view, a ­constant

25 Holmes, 1973, p. 167-168.


26 Sacheverell, The Perils of False Brethren.
27 For the sermon and the impeachment, see Holmes, 1973; Knights (ed.), 2012. For the
elections of 1710, see Holmes, 1987, p. 56-57; Hoppit, 2002, p. 300.
28 Asch, 2014, p. 11-35; Thompson, 2006, p. 43-60.
374 ULRICH NIGGEMANN

reminder that to renounce a strict obedience towards a government


established by God must necessarily bring a society to the brink of
ruin. ­Clarendon’s History of the Rebellion (1702), written shortly after the
Restoration, worked as the most stringent and authoritative reference
to the Tory view of the 1640s29. Moreover, the annual liturgy and
sermons on the 30th of January reminded the nation of its permanent
guilt for the regicide and its ­consequences30. The Whig ideas of
­contract and resistance meant – as Luke Milbourne preached in a ser-
mon – “that whenever a Factious Crew finds themselves a­ ggriev’d with
their Governours, they, as Superiours to their Sovereign, may call them
to a strict Account, and Coerce and Dethrone them”31. This approach
could result in nothing but anarchy and chaos.
However, their ­concern did not mean that the majority of the Tories
rejected the Revolution of 1688-1689. On the c­ ontrary, they claimed
that they themselves, and not the Whigs, were the true supporters of
the Revolution and the Revolution Settlement. It was, for example, the
defence of Henry Sacheverell during the impeachment which argued:
“The said Henry Sacheverell is so far from Reflecting on His Late
Majesty [i.e. King William III] or the Happy Revolution [of 1688-1689],
that he endeavours in that Sermon, to clear the Revolution and His
Late Majesty, from the Black and Odious Colours which their greatest
Enemies had endeavoured to cast upon both”32. In keeping with this
statement, Sacheverell and the High Church were strong supporters
of the “Glorious Revolution”. The Whigs and their interpretation of
the Revolution as an act of resistance – argues Sacheverell – made the
Revolution odious. If the Whigs founded the Revolution of 1688-1689
on their resistance theories – as some of them did, particularly after
1702 – then, as the Tories argued, they paralleled that Revolution with
the “rebellion” of the mid-century. One of the main targets of Tory pole-
mics was Benjamin Hoadly, one of the leading Low Church and Whig
pamphleteers. The print where Hoadly is depicted as the postillion of
a new rebellion is only one in a multitude of examples. One print, for

29 Hyde, The History of the Rebellion and Civil Wars in England, Begun in the Year 1641. See
Richardson, 1977, p. 36-38.
30 Potter, 1999, p. 240-262; Sharpe, 2000, p. 383-405; Lacey, 2003.
31 Milbourne, The Measures of Resistance to The Higher Powers, p. 5.
32 [Sacheverell], The Answer of Henry Sacheverell, p. 9.
Contested Memories 375

example, shows him leading a seven-headed monster, loaded with the


symbols of rebellion and working to destroy the Church33. Another
print depicts him in his study, with the classic books of Republican or
otherwise-­condemned authors – such as James Harrington, Thomas
Hobbes, Algernon Sidney, John Toland or John Locke – on the shelf.
Cromwell, with the e­ xecutioner’s axe, stands behind him, perhaps dic-
tating the text Hoadly is writing34.
It is apparent that memories of the mid-century revolution, and
the alleged intellectual familiarity between the “ideas of 41” and then
present-day Whig ideas, served to defame the Whigs. Opponents of
the Whigs and the Low Church relied heavily on civil war memories to
support their position. Yet this was not to undermine the Revolution
of 1688-1689, but to reject a certain interpretation of that event. The
pamphlet entitled “The Revolution no Rebellion” makes this point:
“You do great injustice both to the Revolution, and the whole Nation,
in that unfair Insinuation” – meaning the insinuation that the revolu-
tions of 1688-1689 and of the mid-century were grounded on the same
principles of resistance and the accountability of the monarch35. By such
an argument, the Tories and the High Church could use memories of
both revolutions to serve their purpose of defaming the Whigs. They
did so by distinguishing sharply between both events, while insinuating
that the Whigs did not, but rather saw them as grounded on the same
foundations. According to this view, the Whigs were rebels and justified
rebellion generally by depicting the “Glorious Revolution” as a success.
The Whigs, however, used very similar arguments against the
Tories, and the Tory doctrines of non-resistance and passive obedience
were the main targets of Whig attacks. For the Whigs, memories of
the “Glorious Revolution” played a much greater role than those of
the mid-century. It was particularly due to the 5th of November in
its amended liturgy – reminding not only of the Gunpowder Plot of
1605, but also of William ­III’s landing in Torbay on the same date in
1688 – which served as a day of praise for the Revolution and one of
defaming the Tories36. Those speech acts by the Tories, which tended to

33 Anon., The Schismatickal attack.


34 Anon., Guess att my Meaning.
35 Anon., The Revolution no Rebellion, p. 11.
36 Cressy, 1989, p. 185-186; Caudle, unpublished, p. 255-258; Niggemann, unpublished, p. 103.
376 ULRICH NIGGEMANN

c­ ondemn every kind of resistance against the government, appeared to the


Whigs as defamations of the Revolution. Hoadly, for example, criticised
such statements which “joyn in blackening that Resistance, and that
Revolution, on which our present Establishment is founded”37. Another
author stated “that by upholding the Doctrine of Passive Obedience to
the Will of a Prince, he [the High Church leader Offspring Blackall]
might cast a slur upon the Justice of the late happy Revolution, and
make void the Principle upon which it was grounded”38. Daniel Defoe,
too, presented the rejection of a right to resist as a “plain insult upon
the Memory of King William”39. In his journal, the Review, he wrote:
“The Doctrine of Non-Resistance, which we now cry up with a Madness
not to be accounted for, is only a plot against the Revolution”40. Many
pamphlets, journals and sermons made the same claim. The ­Tories’
cherished principle of absolute loyalty for the monarch was perceived as
a ­condemnation of the revolution. The Whigs, therefore, accused their
adversaries of “making the late Revolution a Damnable Rebellion and
Usurpation”41.
This brings us to the point of the ­Whigs’ argument: when the Tories
and their High Church allies vilified the Revolution by their rejection
of resistance, they could not inherently be relied upon or trusted, as the
monarchy of Queen Anne and that of the Hanoverians must then be
grounded on the sin of rebellion, in their view. How could the Tories
be loyal to such a government, which they must perceive as a sinful
state? This argument ended as a paradox: the ostentatious loyalty of
the Tories could result in nothing but disloyalty against Queen Anne
and the Hanoverian kings, as according to their own logic, they must
disavow any monarch who ruled on the foundation of the Revolution.
This antithetical ­concept of Toryism was portrayed in a broadsheet
entitled Needs must when the Devil drives: or, an Emblem Of what we must
expect if High-Church gets uppermost42. This broadsheet with its engraving
provided the occasion for the aforementioned Like Coachman, Like Cause
37 Hoadly, The Happiness of the Present Establishment, and the Unhappiness of Absolute Monarchy,
p. 14-15.
38 Anon., Bess ­o’ ­Bedlam’s Love to her Brother Tom, p. 6.
39 McVeagh (ed.), 2009, p. 447.
40 Ibid.
41 Anon., Vox Populi, Vox Dei, p. 38.
42 British Museum Satires 1496.
Contested Memories 377

engraving. The scenery of both is quite similar, but now Sacheverell sits
as postillion on the front horse, and James Francis Edward Stuart, the
suspiciously born son of James II, sits in the coach. The horses trample
down the ­concepts of “Moderation”, “Toleration”, “Liberty” and “Property”,
and at the back of the coach are wooden shoes, symbolising French sla-
very43. This print was a clear warning that Toryism, as represented by
Sacheverell, meant nothing less than the destruction of the Revolution
Settlement. Many other pamphlets struck the same chord44. Even the
articles of impeachment against Sacheverell accused him of a “wicked,
malicious, and seditious Intention, to undermine and subvert Her M­ ajesty’s
Government, and the Protestant Succession as by Law established, to
defame Her M ­ ajesty’s Administration, to asperse the Memory of His late
Majesty, to traduce and c­ ondemn the late happy Revolution”45.
Thus, the Tory and High Church position, with its strict rejection
of resistance, was thought to be a rejection of the Revolution; therefore,
the Tories and their supporters were seen as Jacobites in disguise.
The struggle ­concerning the interpretation of the past had pragmatic
and strategic implications. The aim was not only to enforce a certain
meaning of the events, but to establish interpretative predominance. Both
parties tended to ignore the fact that there were different interpretations
of the “Glorious Revolution”. They judged the opposite position based
on their own understanding. In doing so, they refigured the memories
of both revolutions not only to give meaning to the events, but also to
serve present-day purposes. Both sides used memories of the past to
­construe a negative image of their adversaries as enemies of the present
settlement. These techniques were part of a political practice of defama-
tion and self-fashioning, and they worked against the background of the
bogy of Jacobite and/or Republican threats. It was a highly emotional
­contest, because the images and memories were charged with symbolic
meaning and moral judgments, and were linked to central aspects of
society, in particular the Church. The fervour of these debates may
explain why, in the course of the impeachment against Sacheverell,
people took to rioting.
43 Pincus, 1995, p. 333-361.
44 For example [Kennett], A True Answer to Dr. S­ acheverell’s Sermon Before the Lord Mayor;
Anon., Chuse which you Please; [Toland], High Church ­Display’d. For a ­comprehensive
overview of ­contemporary publications, see Madan, 1978.
45 [Sacheverell], The Answer of Henry Sacheverell, p. 5.
378 ULRICH NIGGEMANN

Revolutionary memories were manifested in the political and societal


debates of this given moment in time. They tended to be fluid and open
to different uses, and were refigured by various speakers to match varying
situations of remembering. By 1710, the “Glorious Revolution” could be
seen either as an act of resistance, or as a c­ onsensual and restorative act
with little or no impact on the ancient c­ onstitution of England. Both
interpretations tried to distinguish the positive revolution of 1688-1689
from the negative one in the 1640s, but they did so differently and with
a clear intention to defame their political adversary. This background
encourages in turn a short look into the second half of the eighteenth
century.
Works on later eighteenth-century historiography of the English
revolutions tend to begin with Edmund Burke and the debates about the
French Revolution. Burke is seen as the founder of a c­ onservative interpre-
tation of the “Glorious Revolution” as a reasonable revolution, c­ ompared
to the anarchic and terrifying rebellion of the French Revolution46.
However, as we have seen, there had already been c­ onservative and
progressive readings of the events of 1688-1689 in the beginning of
the eighteenth century. It seems unlikely that there was no further
discussion between the Sacheverell affair and Edmund B ­ urke’s famous
Reflections on the Revolution in France (1790). In fact there had been much
discussion, and both the mid-century revolution and that of 1688-1689
had been used as arguments in the ­controversies between the Walpolian
Whigs and the opposition in the 1720s and 1730s, as well as later on.
Interestingly, some opposition pamphlets used memories of 1688-
1689 to remind the nation not only of the aims of the Revolution,
but also of its unfulfilled promises47. This was a new perspective and
argument, unknown in the earlier period. Early examples of this view
on the Revolution appeared in Lord ­Bolingbroke’s journal The Craftsman
(1726-1752). His statements were uttered in response to writers in the
pay of Robert Walpole and the government or court Whigs, who praised
the “Glorious Revolution” as the “Birth of real Liberty” or as a new era
of liberty48. Opposition papers claimed that the aims of the Revolution

46 Vallance, 2006, p. 9-10; Schwoerer, 1992, p. 1-20, at p. 2; Pincus, 2009, p. 22-23.


47 Wilson, 1989, p. 349-386; Id., 1992, p. 299-334.
48 For example [Hervey], Ancient and Modern Liberty Stated and C ­ ompar’d; Id., The Conduct of
the Opposition; Osborne [i.e. James Pitt], A Discourse on the Blessings of the Revolution, p. 1.
Contested Memories 379

had been betrayed by the governing Whig party. In this c­ ontext, The
Craftsman argued that central aspects of British liberties had not been
codified in the Bill of Rights. Thus, a corrupt government could easily
destroy the achievements of the Revolution49.
However, it was in the 1760s – after George III’s accession to the
throne and the end of the Whig monopoly in the ministry – that a
new debate opened, in which memories of ­Britain’s revolutionary past
once again played an important role. Not only had some of the most
authoritative histories of England been published towards the middle of
the century – such as Paul de Rapin T ­ hoyras’s History of England (1732)
and, even more importantly, David H ­ ume’s History of England From the
Invasion of Julius Caesar to the Revolution of 1688 (1754-1761) – which
provided the public with a stringent narrative of ­England’s past50.
Yet the political and societal circumstances themselves enforced a cri-
tical retrospect in search of models to solve current problems and to
serve as ideological weapons against opponents. Ministerial crises; an
expensive war; the burgeoning struggle with the American colonies;
and the revival of religious strife between the Church of England and
new dissenting groups, such as the Methodists, are only some of the
problems that were at hand51.
John Wilkes and radicals in the second half of the eighteenth century
­continued those attacks which opposition groups in the earlier century
had begun52. In fact, Wilkes cherished the Revolution as “the great æra
of English liberty”, stressing that from then on, “freedom has made a
regular, uninterrupted abode in our happy island”53. Edward Pickard, a
dissenting preacher, also lauded the “Glorious Revolution” as the great
caesura in ­England’s history of liberty54. This praise of the Revolution of
1688-1689 can be further interpreted in light of Tory ministers appointed
49 For example [Saint John], The Craftsman, vol. 6, p. 121; Ibid., vol. 7, p. 399-400; Ibid.,
vol. 8, p. 238-239. Similarly [Toland], Letters from the Right Honourable the late Earl of
Shaftesbury, to Robert Molesworth, vii-viii; Anon., The Right of British Subjects, p. 4-5. See
Niggemann, unpublished, p. 412-471.
50 De Rapin Thoyras, The History of England; Hume, The History of England from the Invasion
of Julius Caesar to the Revolution of 1688. See Okie, 1991.
51 For an introduction, see Langford, 1989.
52 For Wilkes and his supporters, see Rudé, 1962; Christie, 1962; Wilson, 1998, p. 206-236.
53 Wilkes, The History of England from the Revolution to the Accession of the Brunswick Line,
p. 5.
54 Pickard, National Praise to God for the glorious revolution, p. 15.
380 ULRICH NIGGEMANN

by George III. The Whigs revived some of their anti-Tory arguments of


earlier times and styled themselves as the true heirs of the Revolution,
whereas the Tories were depicted as untrustworthy or as Jacobites55. A few
years later, already in the ­context of the American War of Independence,
Catharine Macaulay, a Republican and an early ­combatant for w ­ omen’s
rights, also characterised the Reformation and the “Glorious Revolution”
as a “two grand æras” in English history. For her, the Revolution ended
Tudor and Stuart tyranny and established a c­ ontractual monarchy56.
Nonetheless, John Wilkes and his followers also criticised the incom-
pleteness of the Revolution Settlement. In some statements, the Revolution
was seen as a missed opportunity to reform parliamentary elections and
to broaden political participation. The landed elites in particular were
charged with not having had any interest in further reforms57. Macaulay
regretted that the prejudices of the people led the Convention “to neglect
this fair opportunity to cut off all the prerogatives of the crown”58. The
memory of the Revolution thus became somewhat ambiguous. It inspired
the reform movements of the late eighteenth century to demand further
reforms, but it could also be criticised for its ­conservative character. It
was in this c­ ontext that careful steps were taken towards a reappraisal
of the 1640s. In White K ­ ennett’s 1704 sermon entitled A Compassionate
Enquiry into the Causes of the Civil War, part of the guilt was taken from
the parliamentarians and accorded to the circumstances of the times,
which provoked sharp reactions59. The mainstream of the English view
of the 1640s still ­condemned the revolutionaries and celebrated King
Charles60. However, in the later 1760s and 1770s, as Whig pamphleteers
and historians began to be more critical of the “Glorious Revolution”,
they became more sympathetic towards the revolutionaries of the
1640s61. When the establishment, Whigs and Tories alike, celebrated
55 See, for example, Anon., “To the Cocoa-Tree”, in The North Briton, no 32, p. 187-192; Ibid.,
no 33, p. 193-198.
56 Macaulay, The History of England from the Revolution to the Present Time, p. 2-4.
57 See Wilson, 1989, p. 356-364; Pincus, 2009, p. 23-24; Glickman, 2013, p. 243-271, at
p. 270-271.
58 Macaulay, The History of England, p. 4.
59 Kennett, A Compassionate Enquiry into the Causes of the Civil War; [Astell], An Impartial
Enquiry into the Causes of Rebellion and Civil War; Anon., White against Kennet.
60 This is especially true of the history by Hume; see Richardson, 1977, p. 49-53.
61 For example, Macaulay, The History of England, vol. 1, p. 350, 365 ; Anon., The Political
Beacon. See also, on Catharine Macaulay, Richardson, 1977, p. 53-55.
Contested Memories 381

the anniversary of the “Glorious Revolution” in 1788, there still existed


a minority of radicals who criticised the Revolution of 1688-1689, and
­considered the events of the 1640s as the “real” English Revolution62.
On the other hand, while c­ onservative Whigs as well as Tories
stressed the restorative character of the Revolution in positive terms,
they still ­condemned the events of the 1640s. As early as the debates
of the 1730s, Whig writers such as John Hervey stressed the singular
character of the Revolution of 1688-1689, thus rejecting the idea of an
ongoing revolution63. It was a revolution once and for all. For these
writers, the Revolution of 1688-1689 became the foundation of the
established c­ onstitution, which should incur no further changes64. As
such, memories of the Revolution could be used to reject demands of
further reform. The revolutionary memories served – paradoxically – a
strongly c­ onservative interest.

CONCLUSION

From 1688 onwards, authors of a variety of media articulated different


perceptions and interpretations of the events of the so-called “Glorious
Revolution”. These various readings were, however, developed against
the backdrop of the mid-century revolution. Consequently, both events
were depicted in relation to each other, even when they were sharply
distinguished by authors and from distinct perspectives. During the
years of the reign of Queen Anne in particular, ­conflicts in the Church
and society reached a ­culminating point, and it was in this situation that
memories of the past became important to arguments within the party
struggles. The parties tended to refigure the memories of the events and
to make their own interpretations absolute. From their point of view,
the opposite party betrayed the positive Revolution of 1688-1689. The
Tories accused the Whigs of being Republicans in disguise, because
they grounded the Revolution on resistance and must then have been
62 For the celebrations and their political ambiguity, see Schwoerer, 1990, p. 1-20.
63 [Hervey], Ancient and Modern Liberty.
64 See Pincus, 2009, p. 22-23.
382 ULRICH NIGGEMANN

paralleling it with the mid-century revolution, also seen as a rebellion.


The Whigs, on the other hand, accused the Tories of being Jacobites in
disguise, as their rejection of resistance made the Revolution a rebellion,
too. In the Whig view, there was resistance in the Revolution, and to
­condemn resistance was to c­ ondemn the Revolution.
Although both parties claimed to defend the Revolution of 1688-
1689, their adversaries supposed them to disparage it. Hence, memories
of the Revolution were c­ ontroversial, not because the legitimacy of the
event was debated, but because the interpretation of it varied. In the
end, especially after 1714, the Whigs were more successful in their
self-fashioning as the party of the “Glorious Revolution”, and it was
partially because of this posturing that, over the course of the Jacobite
rebellion in 1715, Tory proscription began.
After 1760, when new reform movements began to criticise the
“Glorious Revolution” as a ­conservative event, it became clear that
English or British society had accepted the memories of the events of
1688-1689 as a significant part of their collective identity. It was c­ ommon
knowledge that the “Glorious Revolution” had rescued England, and
that the mid-century revolution was a damnable rebellion. It was this
view of English history that was attacked by the new reform movements,
which now began to reappraise the Revolution of the 1640s.
In hindsight, memories of the past revolutions were important aspects
of the practice and strategy of party politics in eighteenth-century
England. The parties and movements identified themselves with certain
interpretations of the revolutions and tried to defame their adversaries
for their interpretation – or refiguration – of revolutionary memories.

Ulrich Niggemann
Augsburg Universität
SOURCES ET BIBLIOGRAPHIE

SOURCES

A Collection of Poems, For and Against Dr. Sacheverell, London, s.n., 1710. British
Library 1346.g.2.(6.).
Adelung, Johann Christoph, Grammatisch-kritisches Wörterbuch der Hochdeutschen
Mundart mit beständiger Vergleichung der übrigen Mundarten, besonders aber
der oberdeutschen, Zweyte, vermehrte und verbesserte Ausgabe. Leipzig,
1793-1801 [1re éd. 1774-1786].
Álamos de Barrientos Baltasar, Discurso político al rey Felipe III al ­comienzo
de su reinado [1598], introducción y notas de Modesto Santos, Barcelona,
Anthropos, 1990.
Alcocer Pedro de, Relación de algunas cosas que pasaron en estos reynos desde que
murió la reina Catolica dona Ysabel hasta que se acabaron las Comunidades en
la ciudad de Toledo, Sevilla, 1872.
Amaseo, Leonardo e Gregorio, Azio, Gian Antonio, Diarii udinesi ­dall’anno 1508
al 1541, éd. Antonio Ceruti, Venezia, Deputazione di storia patria, 1884.
Amor de Soria Juan, Aragonesismo austracista (1734-1742) del c­onde Juan
Amor de Soria, edición y estudio introductorio de Ernest Lluch, Zaragoza,
Institución « Fernando el Católico », 2010.
An Dialog etre Arzur Roe ­d’an Bretounet ha Guynglaff. « Le dialogue entre Arthur
roi des Bretons et Guynglaff ». Texte prophétique breton en vers (1450) édité
et présenté par Hervé Le Bihan, avec c­ ommentaires et notes, Rennes,
TIR, 2013.
Andrés de Uztarroz, Juan Francisco, Dormer, Diego Josef, Progressos de la
Historia en el Reyno de Aragon, y elogios de Geronimo Zurita, su primer coronista,
Zaragoza, Herederos de Diego Dormer, 1680 [rééd., 1878].
Arroyal, León de, Cartas político-económicas al Conde de Lerena, edición de
José Caso González, Oviedo, 1971.
Asselijn, Thomas, De dood van de graaven Egmond en Hoorne, Ámsterdam,
Jacob Lescailje, 1685.
384 LA MÉMOIRE DES RÉVOLTES EN EUROPE À L’ÉPOQUE
­­ MODERNE

[Astell, Mary], An Impartial Enquiry into the Causes of Rebellion and Civil
War in this Kingdom. In an Examination of Dr. ­Kennett’s Sermon, January 31.
1703/1704. And in Vindication of the Royal Martyr, London, R. Wilkin, 1704.
Belloni [Antonio], Porzio [Francesco], Decio [Sebastiano], Il sacco di Udine
1511, ms. 688, Biblioteca Comunale di Udine, Fondo Principale.
Bentivoglio, Guido, Della guerra di Fiandria, Colonia, 1632.
Bentivoglio, Guido, Las guerras de Flandes desde la muerte del Emperador
Carlos V hasta la ­conclusión de la Tregua de Doce Años, Amberes, Geronimo
Verdussen, 1687.
Bess o­ ’ B
­ edlam’s Love to her Brother Tom : With a Word in behalf of Poor Brother
Ben Hoadly, London, Booksellers of London and Westminster, 1709, British
Library, T. 773.(6.).
Blasco de Lanuza, Vicencio, Último tomo de historias eclesiásticas y seculares
de Aragón, desde el año 1556 hasta el de 1618, Zaragoza, Juan de Lanaja y
Quartanet, 1619 [rééd., 1622, éd. facs., 1998].
Bochius, Joannes, Historica narratio profectionis et inaugurationis serenissimorum
Belgii principum Alberti et Isabellae, Austriae archiducum, Amberes, Plantino,
1602.
Bodin, Jean, Relation journalière de tout ce qui s­ ’est négotié en ­l’Assemblée généralle des
Estats, assignez par le roy en la ville de Blois, en ­l’an mil cinq cens soixante & seize
pris des mémoires de M.J. Bodin, l­ ’un des députez, Paris, Martin Gobert, 1614.
Brieve notizia di fatti, e ragioni a benefizio della magnifica, e fedele Città di Melfi.
Contro i Magnifici Governadori Generali dello Stato, Napoli, s.n., 1729.
Cabrera de Córdoba, Luis, Relaciones de las cosas sucedidas en la corte de España
desde 1599 hasta 1614, Salamanca, Consejería de Educación y Cultura, 1997.
Campe, Joachim Heinrich, Wörterbuch der deutschen Sprache, Braunschweig,
Schulbuchhandlung, 1808.
Campomanes, Pedro Rodríguez de, Dictamen fiscal de expulsión de los jesuitas
de España (1766-1767), edición de Jorge Cejudo y Teofanes Egido, Madrid,
Fundación Universitaria Española, 1977.
Caravita, Tommaso Saverio, Institutionum criminalium libri quatuor, Napoli,
presso Domenico Rosselli, 1740, 2 vol.
Caro, Francesco, Historia de signori Sauorgnani detti del Monte ­conti di Belgrado,
Castel Nuovo, Verona, Gio. Battista Merlo, 1685.
Carrillo, Martín, Annales y memorias cronologicas. Contienen las cossas mas
notables assi Ecclesiasticas c­ omo Seculares succedidas en el Mundo señaladamente
en España desde su principio y poblacion hasta el Año m.dc.xx, Huesca, Pedro
Blusón, 1622 [rééd., 1634].
Castrillo, Alonso de, Tractado de república, c­ on otras Hystorias y antigüedades :
intitulado al muy reverendo señor fray Diego de Gayangos Maestro en sancta
Sources et bibliographie 385

theología Provincial de la Orden de la Sanctissima Trinidad de la redemption de


los captivos, en estos reynos de Castilla [1521], Madrid, Instituto de Estudios
Políticos, 1958.
Català, Guillén Ramón, Breu relació de la Germania de València, in Eulalià
Duran (éd.), Les cròniques sobre les Germanies de Guillem Ramon Català i de
Miquel García (segle XVI), Valencia, Tres i Quatre, 1984.
Cergneu, Giovanni Battista, Cronache delle guerre friulane coi germani dal 1507
al 1524, ed. Vincenzo Joppi e Vincenzo Marchesi, Udine, Doretti, 1895.
Cervantes, Miguel de, Don Quijote de la Mancha, éd. Francisco Rico, Madrid,
Real Academia Española / Asociación de Academias de la Lengua Española,
2004.
Céspedes y Meneses, Gonzalo de, Historia apologética en los sucessos del Reyno
de Aragon y su ciudad de Çaragoça, Años de 91 y 92 y relaciones fieles de la
verdad, que hasta aora manzillaron diversos Escritores, Zaragoza, Juan de
Lanaja y Quartanet, 1622 [éd. facs., 1978].
Chronica monasterii Sancti Andreae juxta Brugas ordinis Sancti Benedicti ab Arnulpho
Goethals (1868), ed. James Weale, Bruges, Gailliard.
Chronicon Monachus Patavinus, in Muratori (éd.), Rerum Italicarum Scriptores,
t. VIII, 1726, p. 682-683.
Chronique de Jean le Bel, éditée par Jules Viard et Eugène Déprez, Paris,
Renouard, 1904.
Chronique des quatre premiers Valois (1327-1380), éd. Siméon Luce, Paris, 1861.
Chuse which you Please : Or, Dr. Sacheverell, and Mr. Hoadly, Drawn to the Life,
London, Booksellers of London and Westminster, 1710.
Cicerón, Sobre el orador, éd. José Javier Iso, Madrid, Gredos, 2002.
Condillac, Cours ­d’étude, Paris, Houel, 1798.
Congiura di Gregorio Leveratto e Gio. Batta Vassallo ­contro il Serenissimo Duce di
Genova e nobiltà tutta, Società Ligure di Storia Patria, Archivio William
Piastra, ms. 157.
Corpus documental de Carlos V, éd. Manuel Fernández Álvarez, Salamanca,
Ediciones Universidad de Salamanca, 1979.
Coras, Jean de, Question politique : ­s’il est licite aux subjects de capituler avec leur
prince, Genève, Droz, 1989.
Correas, Gonzalo, Vocabulario de refranes proverbiales y otras fórmulas ­comunes de
la lengua castellana en que van todos los impresos antes y otra gran copia (1627),
Madrid, Establecimiento tipográfico de Jaime Ratés, edición de 1906.
Covarrubias Orozco, Sebastián de, Tesoro de la lengua castellana, o española,
Madrid, Luis Sánchez, 1611.
Dagboek van Gent van 1447 tot 1470, met een vervolg van 1477 tot 1515, éd. Victor
Fris, Ghent, Annoot-Braeckman, 1901-1904.
386 LA MÉMOIRE DES RÉVOLTES EN EUROPE À L’ÉPOQUE
­­ MODERNE

De Brabantsche Yeesten, of Rymkronyk van Braband éd. Jan Frans Willems,


Brussels, 1843.
Della Monica, Angiolantonio, Il reo innocente ovvero picciola nota di fatti,
e ragioni a Benefizio del Dottor Angiolantonio della Monica c­ontro il sindaco
­dell’Università di Melfi, Napoli, s.n., 1731.
Della Monica, Angiolantonio, Difesa de gli aggravamenti, che soffrono il Comune,
e Cittadini di Melfi ­dall’Ill. Principe Doria Landi, e suo Governadore Generale
Ill. Marchese D. Lucottavio Restori, Napoli, s.n., 1738.
Denina, Carlo, Delle rivoluzioni ­d’Italia, Milano, Giovanni Sivelstri, 1819, 6 t.
De Ruffi, Domenico Antonio, Difesa per le Università, e Cittadini dello Stato di
Arena, e Soreto. Contra la pretensione delle Angarie, e Perangarie, ultimamente
dedotta per parte d­ ell’Ill. Marchese di Arena, e Duca di Soreto, Signor D. Fabrizio
Caracciolo, Napoli, s.n., 1737.
Despars, Nicholas, Cronycke van den lande ende graefscepe van Vlaenderen, éd.
Joseph De Jonghe, Bruges, Kiessling, 1840.
Dialoghi sopra la Repubblica di Genova, Archivio di Stato di Genova, ms. 859.
Discours merveilleux sur la vie, actions et deportements de Catherine de Médicis,
Royne-mère, Genève, Droz, 1995.
Dits die Excellente Cronike van Vlaenderen, Antwerpen, Willem Vorsterman, 1531.
Divisiekroniek, Cronycke van Hollandt, Zeelandt ende Vrieslant, Leiden, 1517.
Duplessis Mornay, Philippe, Remonstrance aulx Estats de Blois pour la paix
sous la personne ­d’un Catholique romain, ­l’an 1576, in Armand Désiré de La
Fontenelle de Vaudore, Pierre René Auguis (éd.), Mémoires et correspondance
de Duplessis Mornay, Paris, Treuttel et Würtz, 1824, tome II, p. 41-78.
Eberstein, Otto Carl Franz von, Geschichte der vereinigten Niederlande von
Entstehung der Republik bis auf gegenwärtige Zeiten, nebst der Biographie
merkwürdiger Männer, die sich als Helden und Gelehrte um ihr Vaterland
verdient gemacht haben, Dinkelsbühl, 1787.
épinac, Pierre ­d’, Harengue prononcee devant le roy, seant en ses Estats generaulx
à Bloys, Anvers, Christophe Plantin, 1577.
Escolano, Gaspar Juan, Historia de la Insigne y Coronada Ciudad y Reino de
Valencia, Valencia, Pedro Patricio Mey, 1610-1611.
Escolano, Gaspar Juan, Perales, Juan Bautista, Décadas de la historia de
la insigne y coronada ciudad y reino de Valencia, aumentada ­con gran caudal
de notas, ampliaciones aclaratorias y ­continuada hasta nuestros días por Juan
Bautista Perales, Valencia, Terraza, Aliena y Compañía Editores, 1878-1880.
Espinel, Vicente, Arte poetica de Oracio, traducida en verso Castellano, in Diversas
rimas de Vicente Espinel beneficiado de las iglesias de Ronda, ­con el Arte Poetica, y
algunas Odas de Oracio, traduzidas en verso Castellano, Madrid, Luis Sánchez,
1591.
Sources et bibliographie 387

The Examiner, Or, Remarks Upon Papers and Occurences, no 31, 6-9 March 1712.
Fassmann, David, Gespräche in dem Reiche derer Todten, 8. Entrevue, zwischen
Philippo II., König von Spanien, und Willhelmo von Nassau, Prinzen
von Oranien, Leipzig, in Commission bey denen Cörnerischen Erben auf
de Neuen Neu-Marct, 1719.
Fassman, David, Gespräche in dem Reiche derer Todten, 130. Entrevue, zwischen
dem unmenschlichen Römischen Kayser Nerone und dem ebenfalls wegen
seiner verübten Grausamkeiten, weltberüchtigten Spanischen Herzog von
Alba, Leipzig, verlegts Wolffgang Deer, unter Herrn Johann Schwabens
Hause, in der Grimmischen Gasse, 1729, aufgelegt 1731.
Ferreras, Juan de, Historia de España, Madrid, Imprenta de Francisco de el
Hierro, 1700-1727, 16 vol.
La France-Turquie : ­c’est à dire, Conseils et moyens tenus par les ennemis de la Couronne
de France, pour reduire le royaume en tel estat que la Tyrannie Turquesque,
Orléans, Thibaut des Murs, 1576.
Franklin, Benjamin, The Writings of Benjamin Franklin, Collected and edited
by Albert H. Smyth, vol. 7, 1777-1778, Nueva York, Haskells House
Publishers, 1907.
Gallucci Angelo, Historia della guerra di Fiandra ­dall’anno 1593 sin alla tregua
­conchiusa ­l’anno 1609, Roma, 1673.
García, Miquel, La Germanía dels menestrals de Valencia, in Eulalià Duran
(éd.), Les cròniques sobre les Germanies de Guillem Ramon Català i de Miquel
García (segle XVI), Valencia, Tres i Quatre, 1984.
[Gentillet, Innocent], Remonstrance au roy tres-chrestien Henry III. de ce nom, roy
de France et de Pologne, sur le faict des deux edicts de sa Majesté donnez à Lyon,
­l’un du X. de septembre, et ­l’autre du XIII. ­d’octobre dernier passé, presente année
1574. touchant la necessité de paix, et moyens de la faire, Francfort [Genève],
[ Jean Berjon pour Jean I Lertout], 1574.
[Gentillet, Innocent], Briève remonstrance à la noblesse de France sur le faict de
la Declaration de Monseigneur le Duc d­ ’Alençon […], Aygenstain [Genève],
Gabriel Jason [ Jacob Stoer], 1576.
[Gentillet, Innocent], Discours sur les moyens de bien gouverner et maintenir en
bonne paix un royaume ou autre principauté : divisez en trois parties, asavoir,
du c­onseil, de la religion et de la police que doit tenir un prince : c­ontre Nicolas
Machiavel Florentin : à trèshaut et très-illustre prince François duc ­d’Alençon,
fils et frère de roy, [Genève], [ Jacob Stoer], 1576.
[Gentillet, Innocent], Discours ­d’Estat, sur les moyens de bien gouverner et
maintenir en bonne paix un Royaume ­contre Machiavel, Leyden, [s.n.], 1609.
Gentillet, Innocent, Anti-Machiavel [1576], Genève, Droz, 1968.
Goethe, Johann Wolfgang von, Sämtliche Werke Italienische Reise : Sämtliche
388 LA MÉMOIRE DES RÉVOLTES EN EUROPE À L’ÉPOQUE
­­ MODERNE

Werke nach Epochen seines Schaffens, 1787 ; Münchner Ausgabe (hg. von
Andreas Beyer Norbert Miller in Zusammenarbeit mit Christoph Thoenes,
München, Carl Hanser Verlag, 2006 [1992].
Grassi, Fabrizio, Ragioni d­ ell’Illustre Marchese di Arena, e Duca di Soreto c­ ontro
­de’ suoi vassalli, e di Soreto, e di Arena, Napoli, s.n., 1739.
Grosses vollständiges Universal-Lexicon Aller Wissenschafften und Künste, Halle-
Leipzig, Verlegts Johann Heinrich Zedler, 1731-1754.
Guadalajara y Xavier, fray Marcos de, Quarta parte de la Historia pontifical
general y catholica, en que se prosiguen las vidas y hechos de Clemente VIII.
Leon XI y Eleccion de Paulo V, Zaragoza, Juan de Lanaja y Quartanet, 1612.
Guess att my Meaning, s.l., 1709.
Guevara, fray Antonio de, Relox de príncipes [1529], in Obras ­completas de fray
Antonio de Guevara, edición y prólogo de Emilio Blanco, Madrid, Turner,
1994, vol. 2.
Gurrea y Aragón, Francisco de, Conde de Luna, Borrador de los Comentarios de
los años de 91 y 92, Biblioteca del Real Seminario de San Carlos, Manuscritos,
mss. B-5-18 y B-5-19.
Gurrea y Aragón, Francisco de, Conde de Luna, Comentarios de los sucesos de
Aragón en los años 1591 y 1592, Marcelino de Aragón y Azlor, Duque de
Villahermosa (éd.), Madrid, Imprenta de Antonio Pérez Dubrull, 1888.
H…e (anonyme), « Beytrag zur Lebensgeschichte des berühmten Grafen von
Egmond », in Litteratur und Völkerkunde 6, Dessau, 1785.
Hammerdörfer, Karl, Holländische Denkwürdigkeiten oder ausführliche Geschichte
der gegenwärtigen Unruhen in den Vereinigten Niederlanden, Leipzig, G. E. Beer,
1788.
[Hervey, John], Ancient and Modern Liberty Stated and ­Compar’d, London,
J. Roberts, 1734.
[Hervey, John], The Conduct of the Opposition, and the Tendency of Modern
Patriotism […] ­Review’d and E ­ xamin’d, London, J. Peele, 1734.
High Church Politicks. Or the Abuse of the 30th of January ­Consider’d, London,
B. Bragge, 1710.
Hoadly, Benjamin, The Happiness of the Present Establishment, and the Unhappiness
of Absolute Monarchy. A Sermon P ­ reach’d at the Assizes at Hartford, March
22d. 1707-1708, London, H. Clarke, 1708.
[Hotman, François], Remonstrance aus seigneurs gentilshommes et aultres faisans
profession de la Religion reformée en France, Et tous altres bons François desirans
la c­onservation de ce Royaume, Bâle, [s.n.], 1574.
Hotman, François, La Gaule françoise de François Hotoman Iurisconsulte.
Nouvellement traduite de Latin en Francois. Edition premiere, Cologne [Lausanne],
Hierome Bertulphe [ Jean & François Lepreux], 1574.
Sources et bibliographie 389

Hume, David, The History of England from the Invasion of Julius Caesar to the Revolution
of 1688 [London, 1754-1762], 6 vol., Indianapolis/Ind., Liberty Fund, 1983.
Hyde, Edward, Earl of Clarendon, The History of the Rebellion and Civil Wars
in England, Begun in the Year 1641, Oxford, 1702-1704, 3 vol.
Iriarte, Tomás de, El arte poetica de Horacio, ó Epistola a los Pisones, Traducida
en verso Castellano, Madrid, Imprenta Real de la Gazeta, 1777.
Jehan Froissarts Cronyke van Vlaenderen getranslateert uuter franssoyse in Duytsscher
tale Gerijt Potter van der Loo, éd. Napoléon de Pauw, Ghent, Siffer, 1898.
Jornada de su majestad Felipe III y alteza la infanta doña Isabel, desde Madrid,
á casarse, el rey c­on la reina Margarita y su alteza c­on el archiduque Alberto,
in Relaciones historicas de los siglos XVI y XVII. Publícalas la Sociedad de
Bibliófilos Españoles, éd. Francisco R. de Uhagón, Madrid, Imprenta de la
Viuda é Hijos de M. Tello, 1896, p. 241-276.
Kennett, White, A Compassionate Enquiry into the Causes of the Civil War.
A Sermon Preached In the Church of St. Botolph Aldgate, on January XXXI,
1703-1704, London, H. Hills, 1704.
[Kennett, White], A True Answer to Dr. ­Sacheverell’s Sermon Before the Lord
Mayor, Nov. 5. 1709, London, A. Baldwin, 1709.
Lalande, Jérôme de, Voyage d­ ’un Français en Italie, Paris, Desaint, 1769, 8 t.
Lanaja Martín, El misionero perfecto deducido de la vida, virtudes, predicacion y
misiones del venerable y apostolico predicador P. Geronimo Lopez de la Compania
de Jesus, Zaragoza, 1678.
Lancina Juan Alfonso de, Comentarios políticos a Tácito [1687], edición y estudio
preliminar de José Luis Bermejo Cabrero, Madrid, Centro de estudios
políticos y c­ onstitucionales, 2004.
Leonardo de Argensola, Bartolomé, Alteraciones populares de Zaragoza.
Año 1591, éd. Gregorio Colás Latorre, Zaragoza, Institución « Fernando
el Católico », 1995.
Leonardo de Argensola, Lupercio, Informacion de los sucesos del Reino de
Aragon en los años de 1590 y 1591, en que se advierte los yerros de algunos
autores, Zaragoza, Edizions de ­l’Astral / El Justicia de Aragón, 1991 [éd.
orig., 1808].
Leti, Gregorio, Vita del Catolico Rè Filippo II. Monarca delle Spagne, Coligny,
Giovanni Antonio Choüet, 1679.
Libro stato trovato in casa del medico Gio. Gregorio Leveratto, Archivio di Stato
di Genova, ms. 129.
Like Coachman, Like Cause : Or, An Emblem Of what we must expect if Low Church
gets uppermost, London, s.n., 1709-1710.
Lipsio, Justo, Políticas (1604). Estudio de Javier Peña Echervarría y Modesto
Santos López, Tecnos, Madrid, 1997.
390 LA MÉMOIRE DES RÉVOLTES EN EUROPE À L’ÉPOQUE
­­ MODERNE

Longus, Johannes, Chronicon Sancti Bertini, éd. Otto Holder-Egger, Hannover,


BSB, 1880.
Lozano, Fernando, Traducción del arte poética de Horacio, o Epístola a los Pisones,
Sevilla, Manuel Nicolás Vázquez y Compañía, 1777.
Macaulay, Catharine, The History of England from the Accession of James I to the
Elevation of the House of Hanover, vol. 1, London, Edward & Charles Dilly, 1769.
Macaulay, Catharine, The History of England from the Revolution to the Present
Time. In a Series of Letters to a Friend, vol. 1, Bath, R. Cruttwell, 1778.
Maldonado Juan, De Motu Hispaniæ. El levantamiento de España, traducción,
notas e introducción de María Ángeles Durán Ramas, Madrid, Centro de
Estudios Constitucionales, 1991.
Manzoni, Alessandro, Storia della colonna infame, edizione critica e ­commento a
cura di C. Riccardi, Milano, Centro Nazionale di Studi Manzoniani, 2002.
Marana, Giovanni Paolo, La c­ ongiura di Raffaello Della Torre c­ on le mosse della
Savoia ­contro la Repubblica di Genova, Lione, 1682.
Mariana Juan de, La dignidad real y la educación del rey (De rege et regis
institutione), edición y estudio preliminar de Luis Sánchez Agesta, Madrid,
Centro de estudios c­ onstitucionales, 1981.
Mémoires de Pontus Payen, avec notices et annotations, éd. Antoine Henne, Brussels,
SHB, 1861.
Memorias de Carlos V, traducción y edición crítica por Manuel Fernández
Álvarez, Corpus documental de Carlos V, t. IV (1554-1558), Madrid, Espasa
Calpe, 2003 [1973].
Memorie di varie cose di Genova occorse ­dall’anno 1516 sino ­all’anno 1647, Biblioteca
Civica Berio, ms. B. VI. 5. 20.
Memorieboek der stad Ghent van ’t jaer 1301 tot 1737, éd. Polydore-Charles
Vander Meersch, Ghent, Annoot-Braeckman, 1852.
Ménétra, Jacques-Louis, Journal de ma vie, éd. Daniel Roche, Paris, Montalba,
1982.
Mexía, Pedro, Silva de varia lección, Sevilla, Domingo de Robertis, 1540.
Mexía, Pedro, Historia imperial y cesárea, en la qual en summa se ­contienen las
vidas y hechos de todos los Emperadores de Roma, desde Julio Cesar hasta el
Emperador Maximiliano, Sevilla, Juan de León, 1545.
Mexía, Pedro, Historia del Emperador Carlos V, edición de Juan de Mata
Carriazo, Madrid, Espasa-Calpe, 1945.
Mézeray, François Eudes de, Histoire de France, Paris, Guignard & Barbin,
vol. 3, 1685.
Milbourne, Luke, The Measures of Resistance to The Higher Powers, So far as
becomes a Christian. In a Sermon, ­Preach’d on January the 30th […], London,
George Sawbridge, 1710.
Sources et bibliographie 391

Miñana, José Manuel, Historia general de España o ­continuacion de la historia de


España del R.P. Juan de Mariana dividida en cinco tomos, Amberes, Marcos-
Miguel Bousquet y Compañia, 1739.
Montmorency-Damville, Henry de, Déclaration et Protestation de Monseigneur
de Dampville maréchal de France, Strasbourg, [s.n.], 1575, in Claude De Vic,
Joseph Vaissette, Histoire générale de Languedoc, Toulouse, Privat, 1872-
1905, t. XII, col. 1105-1111.
Moro, Domenico, Pratica criminale, Napoli, appresso Vincenzo Pauria, 1755-
1757, 4 vol.
Muñoz Maldonado, José, Historia política y militar de la Guerra de Independencia
en España c­ ontra Napoleón Bonaparte desde 1808 á 1814, Madrid, 1833, 3 vol.
Muñoz Maldonado, José, Historia del Emperador Carlos V (1500 a 1558),
Madrid, Establecimiento tipográfico de D. Francisco de P. Mellado, 1862.
Murillo, Diego, Fundacion milagrosa de la capilla angelica y apostolica de la
Madre de Dios del Pilar, y Excellencias de la Imperial Ciudad de Çaragoça,
Barcelona, Sebastián Matevad, 1616.
Narbona Eugenio de, Doctrina política civil escrita en aphorismos [1621], Madrid, 1779.
Needs must when the Devil drives : or, An Emblem Of what we must expect if High-
Church gets uppermost, s.l., 1709-1710.
Neny, Patrice-François de, Mémoires historiques et politiques des Pays-Bas autrichiens,
Neufchâtel, de l­’imp. de Fauche, Favre et Cie, 1784.
Nieremberg, Juan Eusebio, Corona virtuosa y virtud coronada. En que se proponen
los frutos de la Virtud de un Principe, juntamente ­con los heroicos Exemplos de
Virtudes de los Emperadores de la Casa de Austria, y Reyes de España, por el padre
Juan Eusebio Nieremberg, de la Compañía de Jesus, c­ on privilegio, Madrid, 1643.
Osborne, Francis [i.e. James Pitt], « A Discourse on the Blessings of the
Revolution ; and the Means of preserving them », The London Journal,
no 699, 18 November 1732.
Parrino, Domenico Antonio, Teatro eroico, e politico ­de’ viceré del Regno di
Napoli dal tempo del Re Ferdinando il cattolico fino al presente, Napoli, presso
D.A. Parrino, 1692-1695, 3 vol.
Pérez, Antonio y Álamos de Barrientos, Baltasar, Suma de preceptos justos,
necesarios y provechosos en ­consejo de estado al rey Felipe III, siendo príncipe,
Barcelona, Anthropos, 1991.
Pérez de Mesa Diego, Política o razón de Estado. Convivencia y educación
democráticas, edición crítica de L. Pereña y C. Baciero, Madrid, Consejo
superior de investigaciones científicas, 1980.
Pickard, Edward, National Praise to God for the glorious revolution, the protestant
succession, and the signal successes and blessings with which Providence has crowned
us, London, J. Johnson, 1761.
392 LA MÉMOIRE DES RÉVOLTES EN EUROPE À L’ÉPOQUE
­­ MODERNE

The Political Beacon : Or the Life and Character of Oliver Cromwell, Impartially
Illustrated. Containing an Historical Account of his Political Transactions and
Connections, Which carried on, and at length enacted the Grand Revolution,
London, J. Swan, 1770.
Quesnot de la Chesnée, Jean-Jacques, Paralèlle de Philippe II et de Louis XIV
sur le renversement de la Monarchie Universelle, Colonia, Jacques Le Sincere,
1709.
Quintius, Johannes, Bodegraven en Swammerdan in brandt, Ámsterdam, Jacob
Benjamin, 1673.
Rapin de Thoyras, Paul de, The History of England : Written originally in
French, London, James Mechell, 1732, 3 vol.
Recueil de chansons choisies pour servir à ­l’histoire anecdotte, Bibliothèque nationale
de France, Res-Vm a 7 1, et Bibliothèque nationale de France, ms. fr. 12617.
Relación del origen y discurso de las Comunidades que en estos reinos de Castilla se
levantaron por ausencia que el emperador don Carlos, quinto de este nombre, hizo
de ellos siendo electo Emperador en Alemania, causadas por los estranjeros que
­consigo traxo quando vino a ellos de Flandes, edición de Ana Díaz Medina,
Junta de Castilla y León, 2003.
Relatione di Genova, Archivio di Stato di Genova, ms. 117.
Remonstrance ­d’un bon catholique François, aux trois Estats de France, qui ­s’assembleront
a Blois, suivant les lettres de sa Maiesté du VI d­ ’Aoust, presente année M.D.LXXVI,
[s.l.], [s.n.], 1576.
The Revolution no Rebellion : Or, Serious Reflections Offered to the Reverend Mr.
Benjamin Hoadly, ­Occasion’d by his Considerations on the Bishop of E ­ xeter’s
Sermon, ­preach’d before Her Majesty, March the 8th, 1708. By a Citizen of
London : A Lover of the present Establishment both in Church and State, London,
booksellers of London and Westminster, 1709.
The Right of British Subjects, To Petition and Apply to their Representatives, asserted
and vindicated. In a Letter to ***, London, M. Smith, 1733.
Robertson, William, History of the Reign of the Emperor Charles V, London,
1769, 4 vol.
Saavedra Fajardo, Diego, Idea de un príncipe político christiano representada en
cien empresas [1640], edición de Sagrario López Poza, Madrid, Cátedra, 1999.
Saavedra Fajardo, Diego, Locuras de Europa, 1645.
Saavedra Guzmán, Antonio de, El peregrino indiano, Madrid, Pedro Madrigal,
1599.
Sacheverell, Henry, The Perils of False Brethren, both in Church and State.
Set forth in a Sermon ­Preach’d Before the Right Honourable the Lord-Mayor,
Aldermen, and Citizens of London, at the Cathedral-Church of St. Paul, On the
5th of November, 1709, London, Henry Clements, 1709.
Sources et bibliographie 393

[Sacheverell, Henry], The Answer of Henry Sacheverell D.D. to the Articles of


Impeachment, Exhibited against Him by the Honourable House of Commons &c.
For Preaching Two Sermons. I. At the assizes held at Derby, August 15th. II.
At the Cathedral church of St. Paul. Nov. 5th. 1709. To which are p­ refix’d, the
articles of impeachment, s.l., 1710.
[Saint John, Henry, Viscount Bolingbroke et al.], The Craftsman. By Caleb
­d’Anvers of ­Gray’s Inn, Esq., vol. 6, London, R. Franklin, 1731, no 197, 11
April 1730.
[Saint John, Henry, Viscount Bolingbroke et al.], The Craftsman. By Caleb
­d’Anvers of ­Gray’s Inn, Esq., vol. 7, London 1731, R. Franklin, no 255, 22
May 1731.
[Saint John, Henry, Viscount Bolingbroke et al.], The Craftsman. By Caleb
­d’Anvers of ­Gray’s Inn, Esq., vol. 8, London 1731, R. Franklin, no 283, 4
December 1731.
Saint-Réal, Abbé Vichard de, La Conjuration des Espagnols c­ ontre la République
de Venise (1674), Londres, A. Dulau, 1800.
Sandoval, Prudencio de, Primera parte de la vida y hechos del emperador
Carlos Quinto, Valladolid, Sebastián de Cañas, 1604.
Sandoval, Prudencio de, Segunda parte de la vida y hechos del emperador Carlos
Quinto, Valladolid, Sebastián de Cañas, 1606.
Sandoval Prudencio de, Historia de la vida y hechos del emperador Carlos V
(1604-1606), edición y estudio preliminar de Carlos Seco Serrano, Madrid,
Atlas, 1955-1956.
Santa Cruz, Alonso de, Crónica del emperador Carlos V, edición de Antonio
Blázquez y Ricardo Beltrán y Róspide, Madrid, Real Academia de la
Historia, 1920-1925, 5 vol.
Santa Cruz, Alonso de, Crónica de los Reyes Católicos, edición de Juan de Mata
Carriazo, Sevilla, Escuela de Estudios Hispano-Americanos, 1951.
Savorgnan, Girolamo, Lettere storiche ­dall’anno 1508 al 1528, éd. Vincenzo
Joppi, Udine, Doretti, 1896.
Schiaffino, Agostino, « Memorie di Genova (1624-1647), a cura di C. Cabella »,
Quaderni di storia e letteratura, Università di Genova, Dipartimento di storia
moderna e ­contemporanea, 3, 1996.
Schiller, Friedrich, Die Verschwörung des Fiesko zu Genua. Ein republikanisches
traverspiel, Schwan, Mannheim, 1783.
Schiller, Friedrich von, Geschichte des Abfalls der vereinigten Niederlande von
der Spanischen Regierung, Erster Theil enthaltend die Geschichte der Rebellionen
bis zur Utrechtischen Verdindung, Leipzig, Siegfried Lebrecht Crusius, 1788.
Schiller, Friedrich von, Allgemeine Literatur-Zeitung, no 227a / 227b, 20,
September 1788, p. 769-778.
394 LA MÉMOIRE DES RÉVOLTES EN EUROPE À L’ÉPOQUE
­­ MODERNE

Schiller, Friedrich von, « Des Grafen Lamoral von Egmont Leben und
Tod », in Thalia – Zweiter Band, Heft 8 1789, p. 42-83, Verlag Georg
Joachim Göschen.
Schiller, Friedrich von, « Etwas über die erste Menschengesellschaft nach
dem Leitfaden der mosaischen Urkunde », 1790, Schillers Werke, Historische
Schriften. Erster Teil. Hrsg. von Karl-Heinz Hahn, Weimar, Böhlau,
1970, Bd. 17.
Schiller, Friedrich von, Histoire du soulèvement des Pays-Bas sous Philippe II, roi
­d’Espagne (traduction Mis de Châteaugiron), Paris, A. Sautelet et Cie, 1827.
The Schismatickal attack or ye Church B ­ esieg’d by ye Ephesian Beast, s.l., 1709.
Sepúlveda Juan Ginés de, De rebus gestis Caroli V / Historia de Carlos V,
traducción de E. Rodríguez Peregrina, estudio histórico de B. Cuart Moner,
in Obras c­ompletas de Juan Ginés de Sepúlveda, Excmo. Ayuntamiento de
Pozoblanco, t. I, II, X, XI, XIII, XIV, 1995-2010.
Seyssel, Claude de, La Monarchie de France, Paris, Librairie d­ ’Argences, 1961.
Soria, Jeroni, Dietari de Jeroni Soria, Valencia, Acción Bibliográfica Valenciana,
1960.
Sismondi, Histoire des républiques italiennes du Moyen Âge, Paris, Treuttel et
Würtz, 1840, 10 t.
Spittler, Ludwig Timotheus, « historische Bemerkungen über die in den
österreichischen Niederlanden ausgebrochenen Unruhen, nebst beygefügter
Joyeuse Entrée von Brabant », in Göttingisches Historisches Magazin, Hannover,
1787, Bd. 1, p. 714-752.
Staël, Germaine de, De ­l’Allemagne, Paris, H. Nicolle, 1813-1814.
Stendhal, Rome, Naples et Florence 1826, in Stendhal : Voyages en Italie, éd. V.
del Litto, Paris, Gallimard, Pléiade, 1973.
Storia della ­congiura del Vacchero, descritta da Raffaello della Torre, Biblioteca
Universitaria di Genova, ms. B. I.11.
Strada, Famiano, De Bello Belgico, Amberes, Jan Cnobbaert, 1632-1649.
Strassoldo, Soldoniero di, Cronaca di Soldoniero di Strassoldo dal 1509 al
1603, éd. Ernesto Degani, Udine, tipografia Doretti, 1895.
Testamento y codicilo del rey don Felipe II : copia exacta tomada del original que
existe en el archivo reservado del Monasterio de San Lorenzo del Escorial, Madrid,
Eduardo Mengíbar, 1882.
[Toland, John], High Church D ­ isplay’d : Being a Compleat History of the Affair
of Dr. Sacheverel, In its Origin, Progress, and Consequences, s.l., 1711.
[Toland, John], Letters from the Right Honourable the late Earl of Shaftesbury, to
Robert Molesworth, Esq., London, W. Wilkins, vii-viii, 1721.
Troyli, Placido, Istoria generale del Reame di Napoli, Napoli, s.e., 1748-1753,
5 vol.
Sources et bibliographie 395

Viciana, Rafael Martín de, Libro quarto de la crónica de la ínclita y coronada


ciudad de Valencia, Barcelona, en casa de Pablo Cortey, 1566.
Viciana, Rafael Martín de, Libro quarto de la crónica de la ínclita y coronada
ciudad de Valencia y de su reino, éd. Joan Iborra, Valencia, Universitat de
Valencia, 2004.
Villalobos y Benavides, Diego de, Comentarios de las cosas sucedidas en los
Países Bajos de Flandes desde el año de 1594 hasta el de 1598, Madrid, Luis
Sánchez, 1612.
Vollo, Benedetto, I Savorgnani, Venezia, tipografia Cecchini, 1856.
Voltaire, Essai sur les mœurs, Paris, Garnier, édition de R. Pomeau, 1990, 2 t.
Vox Populi, Vox Dei : Being True Maxims of Government, London, T. Harrison,
1709.
Wadsworth, James, The Civil Wars of Spain in the beginning of the Reign of
Charls the 5th, Emperor of Germanie, and King of that nation. Written originally
in the Spanish tongue, by Prudencio de Sandoval, Doctor of Divinitie and Abbat
of the Monasterie of St Isidro el Real, in Valladolid…, historiographer Roial of
Philip the Third ; never yet translated, now put into English by Captain J.W.,
London, 1652.
White against Kennet : Or, Dr. ­Kennet’s Panegyrick upon the Late King James,
London, J. Nutts, 1704.
Wilkes, John, The History of England from the Revolution to the Accession of the
Brunswick Line, London, J. Almon, 1768.
Wicquefort, Abraham de, Advis fidelle aux véritables Hollandois : touchant
ce qui s­’est passé dans les villages de Bodegrave & Swammerdam, & les cruautés
inoüies, que les François y ont exercées, La Haye, 1673.
Wonders upon Wonders. In Answer to the Age of Wonders. To the Tune of Chivy
Chase, London, Sutton Nicholls, 1710.

BIBLIOGRAPHIE

Alabrús, Rosa María (2007), « El pensamiento político, social y económico


del austracismo : Juan Amor de Soria », Historia social, no 59, p. 3-20.
Albareda, Joaquim (2016), « De la revuelta de los Barretines (1687-1689) a
la resistencia catalana de 1713-1714 c­ ontra Felipe V. Constitucionalismo,
republicanismo », in Soulèvements, révoltes, révolutions dans l­ ’empire des Habsbourg
­d’Espagne, xvie-xviie siècle, études réunies par Alain Hugon et Alexandra
Merle, Madrid, Casa de Velázquez, p. 267-284.
396 LA MÉMOIRE DES RÉVOLTES EN EUROPE À L’ÉPOQUE
­­ MODERNE

Alexander, Jeffrey C. (2012), Trauma. A Social Theory, Cambridge – Maiden,


Polity Press.
Alexander, Jeffrey C., Butler Breese, Elizabeth, Eyerman, Ron (2011),
« On Social Suffering and Its Cultural Construction », in Id. (éd.), Narrating
Trauma. On the Impact of Collective Suffering, Boulder – London, Paradigm
Publishers, p. i-xxxiii.
Almarche y Vázquez, Francisco (1919), Historiografía valenciana : catálogo
bibliográfico de dietarios, libros de memoria, diarios, relaciones, autobiografías,
etc., inéditas y referentes a la historia del antiguo Reino de Valencia, Valencia,
La Imprenta La Voz Valenciana.
Alonso Baelo, Pablo Luis (2007), « El Tratado de República de Alonso de
Castrillo. Una reflexión sobre la legitimidad de la acción política », Res
publica, 18, p. 457-490.
Alonso García, David (2009), « Debate historiográfico : las Comunidades
de Castilla en el siglo XXI », Tiempos Modernos, 19 (2009/2).
Alt, Peter-André (2000), Schiller. Leben-Werk-Zeit, München, C.H. Beck.
Althusser, Louis (1959), Montesquieu, la politique et l­’histoire, Paris, PUF.
Alvar, Jaime, Gonzales, Antonio, Gómez, Francisco (2006), « Falso, Falsario,
Falsificación, Falseamiento », ARYS, 7, p. 3-15.
Alvar Ezquerra, Alfredo (2000), « La necesidad de modernización
historiográfica y los cronistas de Carlos V », in Bernardo José García
García (coord.), El imperio de Carlos V. Procesos de agregación y ­conflictos,
Fundación Carlos de Amberes, p. 301-324.
Alvar Ezquerra, Alfredo, Montcher, Fabien (2014), « Miguel de Cervantes
and the Political Turn of History (c. 1570-1615) », Cervantes. Bulletin of the
Cervantes Society of America, 34, 2 (otoño), p. 15-36.
Andreozzi, Daniele (1996), « Rivolte e fazioni tra Quattro e Cinquecento :
il caso del Friuli. Un ­contributo », Metodi e ricerche, XV, 2, p. 3-38.
Andrés Santos, Francisco J. (2010), « Monarquía y republicanismo en
el pensamiento humanista español del siglo XVI », in István Szászdi
León-Borja (coord.), Monarquía y revolución : en torno a las Comunidades de
Castilla, I Simposio internacional de Historia c­ omunera, Valladolid, Fundación
Villalar, p. 99-116.
Arnade, Peter (2008), Beggars, Iconoclasts, and Civic Patriots. The Political
Culture of the Dutch Revolt, Ithaca, Cornell University Press.
Arnade, Peter (2013), « Carthage or Jerusalem ? Princely violence and the
spatial transformation of the medieval into the early modern city », Journal
of Urban History, 39, p. 726-748.
Arias, Gino (1897), La ­congiura di G. C. Vachero, Firenze, Cellini.
Arnoul, Élisabeth, Bardet, Jean-Pierre, Ruggiu, François-Joseph (éd.)
Sources et bibliographie 397

(2010), Les Écrits du for privé en Europe du Moyen Âge à ­l’époque ­contemporaine.
Enquêtes, analyses, publications, Bordeaux, Presses universitaires de Bordeaux.
Aron, Raymond (1962), Dimensiones de la c­ onciencia histórica, Madrid, Tecnos
[orig. fr., 1961].
Asch, Ronald G. (2014), « Einleitung », in Ronald G. Asch (éd.), Hannover,
Großbritannien und Europa. Erfahrungsraum Personalunion 1714-1837,
Veröffentlichungen der Historischen Kommission für Niedersachsen
und Bremen, 277, Göttingen, Wallstein, p. 11-35.
Ashton, Robert (1994), Counter-Revolution : The Second Civil War and its Origins
1646-1648, London and New Haven, Yale University Press.
Assereto, Giovanni (1999), « Inquisitori e libri nel Seicento », in Le metamorfosi
della Repubblica. Saggi di storia genovese tra il xvi e il xix secolo, Savona, Elio
Ferraris.
Assmann, Jan (2010), La Mémoire ­culturelle. Écriture, souvenir et imaginaire
politique dans les civilisations antiques, Paris, Aubier.
Atherton, Ian (2014), « Remembering (and forgetting) F­ airfax’s Battlefields »,
in Andrew Hopper and Philip Major (éd.), E ­ ngland’s Fortress. New Perspectives
on Thomas, 3rd Lord Fairfax, Aldershot, Ashgate, p. 95-119.
Aubert, Gauthier (2014), Les Révoltes du papier timbré, 1675. Essai ­d’histoire
événementielle, Rennes, Presses universitaires de Rennes.
Auroux, Sylvain (2007), « Sensualisme », in Michel Delon (dir.), Dictionnaire
des Lumières, Paris, PUF, p. 1137-1141.
Auslander, Leora (2005), « Beyond Words », American Historical Review,
110, p. 1015-1045.
Bacot, Paul, Douzou, Laurent, Honoré, Jean-Paul (2008), « Chrononymes.
La politisation du temps », Mots. Les langages du Politique, no 87, p. 5-12.
Baczko, Bronislaw (1984), « Le calendrier républicain. Décréter ­l’éternité »,
in Pierre Nora (dir.), Entre Mémoire et Histoire. La problématique des lieux,
Paris, Gallimard, p. 37-79.
Bakos, Adrianna (1997), Images of Kingship in Early Modern France : Louis XI
in Political Thought, London-New York, Routledge.
Balbi, Giovanna (1969), « Boccanegra, Simone », in Dizionario Biografico degli
Italiani, Roma, Istituto della Enciclopedia italiana, vol. 11.
Balestracci, Ducio (2015), Medioevo e Risorgimento, Bologna, Il Mulino.
Ballone, Angela (2017), The 1624 Tumult of Mexico in Perspective (c. 1620-
1650). Authority and Conflict Resolution in the Iberian Atlantic, Leyden, Brill.
Baraibar, Alvaro (2013), « Chile c­ omo un « Flandes indiano » en las crónicas
de los siglos XVI y XVII », Revista ­chilena de literatura, 85, p. 157-177.
Barbier, Pierre, Vernillat, France (1957), Histoire de France par les Chansons,
t. II : Mazarin et Louis XIV, Paris, Gallimard.
398 LA MÉMOIRE DES RÉVOLTES EN EUROPE À L’ÉPOQUE
­­ MODERNE

Bardoel, Agatha (1994), « The Urban Uprising at Bruges, 1280-1281. Some


New Findings about the Rebels and the Partisans », Revue Belge de Philologie
et ­d’Histoire, 72, p. 761-791.
Bascom, W. R. (1954), « Four Functions of Folklore », Journal of American
Folklore, 67, p. 333-349.
Beaune, Colette (2010), « Le Grand Ferré », in Une histoire pour un royaume
(xiie-xve siècles), Paris, Perrin, p. 361-377,
Beaune, Colette (2013), Le Grand Ferré. Premier héros paysan, Paris, Perrin.
Beausant, Michèle (dir.) (2006), Du vrai au juste. La mémoire, ­l’histoire et
­l’oubli, Presses de l­’université Laval.
Beiner, Guy (2006), Remembering the Year of the French. Irish Folk History and
Social Memory, Madison, University of Wisconsin Press.
Benigno, Francesco (2013), Las palabras del tiempo. Un ideario para pensar
históricamente, Madrid, Cátedra.
Benítez Sánchez-Blanco, Rafael (2012), « Revueltas y rebeliones en la España
moderna », in Juan Luis Castellano, Miguel Luis López-Guadalupe
Muñoz (coord.), Actas de la xi reunión científica de la fundación española de
historia moderna, Granada, Universidad de Granada.
Bennett, Gareth V. (1965), « King William III and the Episcopate », in
Gareth V. Bennett and John D. Walsh (éd.), Essays in Modern English
Church History. In Memory of Norman Sykes, London, Adam & Charles
Black, p. 104-131.
Bennett, Gareth V. (1975), The Tory Crisis in Church and State, 1688-
1730. The Career of Francis Atterbury Bishop of Rochester, Oxford, Oxford
University Press.
Bernabé Pons, Luis Fernando (2009), Los moriscos : c­onflicto, expulsión y
diáspora, Madrid, Catarata.
Bertelli, Sergio (1960), Erudizione e storia in Lodovico Antonio Muratori, Napoli,
Istituto italiano per gli studi storici.
Bertholet, Marion (2015), « Violence anarchique ou violence libérale ? Le
Moyen Âge italien au tournant des Lumières de Muratori et Voltaire à
Sismondi », Dix-huitième Siècle, Paris, La Découverte, no 47, p. 475-500.
Bertrand, Gilles (2008), Le Grand Tour revisité. Pour une archéologie du tourisme :
le voyage des Français en Italie, milieu du xviiie siècle-début xixe siècle, Rome,
École Française de Rome.
Berzal de la Rosa, Enrique (2008), Los ­comuneros. De la realidad al mito,
Madrid, Silex.
Bianco, Furio (2001), Storie raccontate e disegnate. Cerimonie di giustizia capitale
e cronaca nera nelle stampe popolari e nelle memorie cittadine tra ‘500 e ‘800,
Udine, E&C edizioni.
Sources et bibliographie 399

Bianco, Furio (2011), 1511. La « crudel zobia grassa ». Rivolte ­contadine e faide
nobiliari in Friuli tra ‘400 e ‘500, Pordenone.
Billen, Claire (2010), « Dire le bien c­ ommun dans l­ ’espace public : matérialité
épigraphique et monumentale du bien c­ ommun dans les villes des Pays-Bas
à la fin du moyen âge », in Élodie Lecuppre-Desjardin, Anne-Laure Van
Bruaene (éd.), De Bono Communi. The Discourse and Practice of the Common
Good in the European City, 13th-16th centuries, Turnhout, Brepols, p. 71-88.
Billiet, Frédéric (2007), « Témoignages de la chanson de c­ ontestation dans le
Manuscrit de Bayeux », in Catherine Bougy et Sophie Poirey (éd.), Images
de la ­contestation du pouvoir dans le monde normand (xe-xviiie siècle), Caen,
Presses Universitaires de Caen, p. 185-204.
Bischoff, Georges (2009), « Contestations paysannes entre Vosges et Forêt
Noire : la génération du Bundschuh (1493-1525) », in Ghislain Brunel
et Serge Brunet (éd.), Les Luttes anti-seigneuriales dans ­l’Europe médiévale
et moderne, Cahiers de Flaran XXIX, Toulouse, Presses Universitaires du
Mirail, p. 61-78.
Biscione, Francesco Maria, Russo, Giovanni (1988), « Ansaldo, Giovanni »,
in Dizionario Biografico degli Italiani, Roma, Istituto della Enciclopedia
italiana, vol. 34.
Bitossi, Carlo (1986), « “Mobbe” e c­ ongiure. Note sulla crisi politica genovese
di metà Seicento », Miscellanea storica ligure, XVIII, p. 587-626.
Bitossi, Carlo (1990), Il governo dei magnifici. Patriziato e politica a Genova fra
Cinque e Seicento, Genova, Ecig.
Bitossi, Carlo (1997), « Foglietta, Oberto », in Dizionario Biografico degli
Italiani, Roma, Istituto della Enciclopedia italiana, vol. 48.
Blanchard, Joël (1996), Commynes ­l’Européen : l­ ’invention du politique, Genève,
Droz.
Blanchard, Joël (2000), « Commynes et les princes rebelles (1484-1487) :
documents inédits », Bulletin de la Société Historique et Scientifique des Deux-
Sèvres, série 3, vol. 8, p. 207-221.
Blanchard, Joël (dir.) (2012), 1511-2011, Philippe de Commynes : droit, écriture,
deux piliers de la souveraineté, Genève, Droz.
Blickle, Peter (éd.) (1998), Résistance, représentation et c­ ommunauté, Paris, Presses
Universitaires de France.
Bödeker, Hans Erich (1986), Aufklärung und Geschichte. Studien zur deutschen
Geschichtswissenschaft im 18. Jahrhundert, Göttingen (Veröffentlichungen
des Max-Planck-Instituts für Geschichte Bd. 81).
Bolaños de Miguel, Aitor Manuel (2011), « Historiografía y postmodernidad :
la teoría de la representación de F. R. Ankersmit », Historia y Política, 25
(enero-junio), p. 271-308.
400 LA MÉMOIRE DES RÉVOLTES EN EUROPE À L’ÉPOQUE
­­ MODERNE

Boone, Marc, Schoups, Inge (1996), « Jan, Johan en alleman. Voornaamgeving


bij de Gentse ambachtslieden, 14de – 15de eeuw, symptoom van een
groepsbewustzijn ? », in Joris De Zutter et al. (éd.), Qui valet ingenio.
Liber amicorum aangeboden aan Dr. Johan Decavele, Ghent, Mens en Kultuur,
p. 39-54.
Borchmeyer, Dieter (1987), « Der aufgeklärte Herrscher im Spiegel von
Goethes Schauspiel », in Aufklärung. Der Idealtyp des aufgeklärten Herrschers
(Hg. von Günter Birtsch), Hamburg, Jg. 2, H. 1, p. 9-74.
Bordone, Renato et Garofani, Barbara (2000), « Les chroniqueurs italiens
(xie-xve siècle) », in Isabelle Heullant-Donat (dir.), Cultures italiennes
(xiie-xve siècle), Paris, éd. du Cerf, p. 169-191.
Borrelli, Gianfranco (2000), Non far novità. Alle origini della ­cultura italiana
della c­onservazione politica, Napoli, Bibliopolis.
Bost, Charles (1940), « Poésies populaires huguenotes du Vivarais (du xvie siècle
à la fin de la révolte camisarde) », Bulletin de la Société de ­l’Histoire du
Protestantisme Français, 89, p. 201-236 et 317-340.
Bourin, Monique et Challet, Vincent (2013), « Temps, lieux et supplices : les
mémoires paysannes à ­l’épreuve de ­l’enquête (Vendres, fin du xiiie siècle) »,
Annales du Midi, t. 125, no 282, avril-juin 2013, p. 239-262.
Bouza, Fernando (2013), « No despertemos a los que duermen. Memoria ­comunitaria
y olvido político en la destrucción de un morrillo de los ­comuneros de
Segovia en 1629 », in Antonio Jiménez Estrella, Julián J. Lozano
Navarro, Francisco Sánchez-Montes González, Margarita Maria
Birriel Salcedo (éd.), Construyendo historia. Estudios en torno a Juan Luis
Castellano, Granada, p. 67-77.
Braddick, Michael (1996), The Nerves of State : Taxation and the Financing
of the English State, 1558-1714, Manchester, Manchester University Press.
Braddick, Michael (2000), Braddick, State Formation in Early Modern England
c. 1550-1700, Cambridge, Cambridge University Press.
Braddick, Michael (2008), G ­ od’s Fury, ­England’s Fire, London, Allen Lane.
Braekevelt, Jonas, Buylaert, Frederik, Dumolyn, Jan, Haemers, Jelle
(2012), « The Politics of Factional Conflict in Late Medieval Flanders »,
Historical Research, 85, p. 13-31.
Braun, Harald (2007), Juan de Mariana and Early Modern Spanish Political
Thought, Aldershot-Burlington, Ashgate.
Broomhall, Susan (2013), « Disturbing memories : Narrating Experiences
and Emotions of Distressing Events in the French Wars of Religion », in
Erika Kuijpers, Judith Pollmann, Johannes Muller and Jasper van
der Steen (dir.), Memory before Modernity. Practices of Memory in Early
Modern Europe, Leiden, Brill, p. 251-267.
Sources et bibliographie 401

Brown, Andrew (2011), Civic Ceremony and Religion in Medieval Bruges, c. 1300-
1520, Cambridge, Cambridge University Press.
Brumfitt, John-Henry (1958), Voltaire historian, Oxford, Oxford University
Press.
Brunner, Otto, Conze, Werner, Koselleck, Reinhart (1975), Geschichtliche
Grundbegriffe. (Historisches Lexikon zur politisch-sozialen Sprache in Deutschland,
Stuttgart, Klett-Cotta, 1972-1997, Bd. 2, p. 593-719.
Buchon, Jean (éd.) (1838), Les Chroniques de Sire Jean Froissart, Paris, Société
du Panthéon Littéraire.
Bulst, Neithard (1987), « ‘Jacquerie‘ und ‘Peasant‘s Revolt‘ in der französischen
und englischen Chronistik », in Hans Patze (éd.), Geschichtsschreibung und
Geschichtsbewusstsein im späten Mittelalter, Sigmaringen, Akademie, p. 791-819.
Bunge, Mario (2013), « Prólogo. Un sudamericano en París », in Gabriel
Andrade, El posmodernismo. ¡Vaya timo !, Pamplona, Laetoli, p. 7-9.
Burke, Peter (1966), « A Survey of the Popularity of Ancient Historians,
1450-1700 », History and Theory, V (2), p. 135-162.
Burke, Peter (1989), « History as Social Memory », in Thomas Butler (éd.),
Memory, History, Culture and the Mind, Oxford, Blackwell.
Burke, Peter (1997), Varieties of Cultural History, Ithaca, Cornell University
Press, p. 43-59.
Burke, Peter (1999), « ­L’image de Charles Quint : ­construction et
interprétations », in Hugo Soly (coord.), Charles Quint, 1599-1558. ­L’empereur
et son temps, Arles, Actes Sud.
Burke, Peter (2006), ¿Qué es la historia c­ ultural ?, Barcelona, Paidós [orig. 2004].
Burke, Peter (2016), El sentido del pasado en el Renacimiento, seguido de El
sentido del anacronismo, de Petrarca a Poussin, Madrid, Akal [orig. 1969].
Buylaert, Frederik (2010), « Memory, Social Mobility and Historiography.
Shaping Noble Identity in the Bruges Chronicle of Nicholas Despars
(† 1597) », Revue Belge de Philologie et ­d’Histoire, 88, p. 377-408.
Cabanel, Patrick (2007), « La guerre des camisards entre histoire et mémoire :
la perpétuelle réinvention du témoignage », Dix-Huitième Siècle, 39 (1),
p. 211-227.
Cabanel, Patrick, Joutard, Philippe (dir.) (2002), Les Camisards et leur
mémoire, 1702-2002, Montpellier, Presses du Languedoc.
Callard, Caroline (2012), « La ruine et son fantôme : histoires de Bicêtre »,
in Anne-Marie Cocula, Michel Combet (éd.), Châteaux en ruines, Pessac,
Ausonius.
Callard, Caroline, Crouzet-Pavan, Élisabeth, Tallon, Alain (dir.) (2014),
La Politique de ­l’histoire en Italie. Arts et pratiques du réemploi (xive-xviie siècles),
Paris, PUPS.
402 LA MÉMOIRE DES RÉVOLTES EN EUROPE À L’ÉPOQUE
­­ MODERNE

Callinicos, Alex (2011), Contra el posmodernismo, Buenos Aires, CEICS-


Ediciones Razón y Revolución [orig., 1990].
Campbell, Peter (2004), « Conspiracy and Political Practice from the ancien
régime to the French Revolution », in Barry Coward, Julian Swann
(éd.), Conspiracies and Conspiracy Theory in Early Modern Europe. From the
Waldensians to the French Revolution, Aldershot, Ashgate, p. 197-221.
Canal Sánchez-Pagín, José María (1980), « Fray Prudencio de Sandoval,
obispo e historiador (Familia y estudios) », Príncipe de Viana, no 158-159,
p. 161-190.
Canellas, Ángel (1986), « El historiador Jerónimo Zurita », in Jerónimo Zurita.
Su época y su escuela, Zaragoza, Institución « Fernando el Católico », p. 7-22.
Carew-Reid, Nicole (1993), Les Fêtes florentines au temps de Lorenzo il Magnifico,
Firenze, Istituto nazionale di studi sul Rinascimento.
Cargnelutti, Liliana (1991), Nota introduttiva in Archivum Civitatis Utini,
vol. 2, Udine, Del Bianco, p. x-xi.
Carlton, Charles (1998), « Civilians », in John Kenyon and Jane Ohlmeyer
(éd.), The Civil Wars. A Military History of England, Scotland and Ireland,
Oxford, Oxford University Press, p. 272-305.
Carr, E. H. (2011), ¿Qué es la Historia ?, Richard J. Evans (introd.), Barcelona,
Ariel [orig., 1961].
Carrasco Martínez, Adolfo (2013), « El estoicismo y la ­cultura política
europea : 1570-1650 », in Antonio Cabeza Rodríguez y Adolfo Carrasco
Martínez (éd.), Saber y gobierno. Ideas y práctica del poder en la Monarquía
de España (siglo XVII), Madrid, Edición Actas, p. 19-65.
Carretero Zamora, Juan Luis (2002), « Las Cortes en el programa ­comunero :
¿reforma institucional o propuesta revolucionaria ? », in Fernando Martínez
Gil (coord.), En torno a las Comunidades de Castilla. Actas del ­congreso
internacional Poder, c­onflicto y revuelta en la España de Carlos I, Cuenca,
Universidad de Castilla-La Mancha, p. 233-278.
Carruthers, Mary (1990), The Book of Memory. A Study of Memory in Medieval
Culture, Cambridge, Cambridge University Press.
Carter, Charles H. (1964), « Belgian ‘­Autonomy’ under the Archdukes,
1598-1621 », The Journal Modern History, 36, p. 245-269.
Caruth, Cathy (1996), Unclaimed Experience. Trauma, Narrative, and History,
Baltimore – London, The Johns Hopkins University Press.
Casalena, Maria Pia (2012), Sismondi biographe : l­’histoire italienne dans
la Biographie universelle et ­l’Encyclopédie des gens du monde, Paris, Honoré
Champion.
Casalena, Maria Pia (2016), Libertà, progresso e decadenza : la storiografia di
Sismondi, Bologne, Bolonia University Press.
Sources et bibliographie 403

Casanova, Giorgio (1983), La Liguria centro-occidentale e ­l’invasione franco-


piemontese del 1625, Genova, Erga.
Casella, Laura (1988), « Al servizio di Venezia. Ruolo militare e potere
nobiliare nelle lettere di Girolamo Savorgnan (1508-1528) », in Guerre,
Stati e città. Mantova e l­ ’Italia padana dal secolo xiii al xix, Mantova, Arcari,
p. 41-51.
Casella, Laura (éd.) (1999), Le due nobiltà. Cultura nobiliare e società friulana
nei dialoghi di Romanello Manin (1726), Roma, Bulzoni.
Casella, Laura (2003), I Savorgnan. La famiglia e le opportunità del potere,
Roma, Bulzoni.
Casella, Laura (2004), « Tiberio Deciani e Antonio Belloni, figure della
­cultura giuridica udinese del Cinquecento », in Marco Cavina (éd.),
Tiberio Deciani (1509-1582), Alle origini del pensiero giuridico moderno, Udine,
Forum, p. 37-50.
Casella, Laura (2009), « Girolamo Savorgnan, ­condottiero », in Cesare Scalon,
Claudio Griggio, Ugo Rozzo (éd.), Nuovo Liruti. Dizionario Biografico dei
friulani, vol. 2. ­L’età veneta, t. III, p. 2258-2265.
Casella, Laura (2011), « Dalla città al feudo. I Caimo e altre famiglie udinesi
(secoli xvi-xvii) », in Elisa Novi Chavarria, Vittoria Fiorelli (éd.), Baroni
e vassalli. Storie moderne, Milano, Franco Angeli, p. 342-367.
Casella, Laura (2012), « Un laboratorio politico di ­confine : la Patria del
Friuli prima d­ ell’Italia (secc. xviii-xix) », in Angela De Benedictis, Irene
Fosi et Luca Mannori (éd.), Nazioni d­ ’Italia. Identità politiche e appartenenze
regionali fra Settecento e Ottocento, Roma, Viella, p. 151-178.
Casella, Laura (2013), « Noblesse de frontière. Espace politique et relations
familiales dans le Frioul à ­l’époque moderne », Mélanges de ­l’École française
de Rome. Italie et Méditerranée modernes et c­ontemporaines, 125-1, https://
mefrim.revues.org/1007
Casella, Laura (2015), « Da una corte ­all’altra. Le lettere di Romolo Quirino
Amaseo alla moglie Violante (sec. xvi) », in Chiara Continisio, Marcello
Fantoni (éd.), Testi e ­contesti. Per Amedeo Quondam, Roma, Bulzoni,
p. 127-149.
Casoni, Filippo (1800), Annali della Repubblica di Genova del secolo decimosettimo,
Genova, Casamara, IV.
Cassina, Elvio (1974), « La libellistica ­contro le ­congiure genovesi del primo
seicento », in Genova, la Liguria e ­l’Oltremare tra Medioevo ed Età Moderna.
Studi e ricerche d­ ’archivio, Genova, Bozzi, p. 237-265.
Castañeda y Alcocer, Vicente (1920), Los cronistas de Valencia, Valencia,
Real Academia de la Historia.
Castañeda Tordera, Isidoro (2008), « La proyección de las Comunidades.
404 LA MÉMOIRE DES RÉVOLTES EN EUROPE À L’ÉPOQUE
­­ MODERNE

Memoria, represión y olvido », in Miguel F. Gómez Vozmediano (coord.),


Castilla en llamas. La Mancha c­omunera, Ciudad Real, Almud ediciones,
p. 255-316.
Castillo Gómez, Antonio, Amelang, James, Serrano Sánchez, Carmen
(éd.) (2010), Opinión pública y espacio urbano en la Edad Moderna, Gijón,
Ediciones Trea.
Castillo Vegas, Jesús Luis (2013), « La formación del pensamiento ­comunero.
De Fernando de Roa a Alonso de Castrillo », in István Szászdi León-
Borja y María Jesús Galende Ruíz (coord.), Imperio y Tiranía. La dimensión
europea de las Comunidades de Castilla, Valladolid, Universidad de Valladolid,
Fundación Villalar-Castilla y León, p. 83-110.
Cauchies, Jean-Marie (2010), Ordonnances de Philippe le Bon pour le ­comté de
Hainaut, 1425-1467, Brussels, FOD Justice.
Caudle, James J. (inédit), Measures of Allegiance. Sermon Culture and the Creation
of a Public Discourse of Obedience and Resistance in Georgian Britain, 1714-1760,
Diss. phil. defended in 1995 at Yale University, New Haven / Connecticut.
Cecere, Domenico (2013a), Le armi del popolo. Conflitti politici e strategie di
resistenza nella Calabria del Settecento, Bari, Edipuglia.
Cecere, Domenico (2013b), « Contre les “tyrans”. Luttes judiciaires et troubles
anti-seigneuriaux en Calabre au xviiie siècle », Revue ­d’Histoire Moderne et
Contemporaine, 60 (3), p. 7-30.
Cecere, Domenico (2015), « Tiranni e cervelli torbidi. Contestazioni della
giurisdizione feudale nel Regno di Napoli tra xvii e xviii secolo », in
Rossella Cancila, Aurelio Musi (éd.), Feudalesimi nel Mediterraneo moderno,
Palermo, Mediterranea, II, p. 469-486.
Celesia, Emanuele (1864), La c­ ongiura del c­ onte Gianluigi Fieschi : memorie storiche
del secolo xvi cavate da documenti originali ed inediti, Genova, Tipografia del
Regio Istituto d­ e’ Sordo-muti.
Certeau, Michel de (2006), La escritura de la historia, México, Universidad
Iberoamericana / Departamento de Historia / Instituto Tecnológico y de
Estudios Superiores de Occidente [orig., 1975].
Challet, Vincent (2002), Mundare et auferre malas erbas : la révolte des
Tuchins en Languedoc (1381-1384), thèse de doctorat, Paris-I Panthéon-
Sorbonne, dactyl.
Challet, Vincent (2003), « Au miroir du Tuchinat : relations sociales et
réseaux de solidarité dans les ­communautés languedociennes à la fin
du xive siècle », Cahiers de Recherches Médiévales (xiiie-xive siècles), no 10,
p. 71-87.
Challet, Vincent (2006a), « Au cœur de la révolte : les ­conflits paysans et
leur résonance en milieu urbain en Languedoc à la fin du Moyen Âge », in
Sources et bibliographie 405

François Clément et al. (éd.), Espaces ­d’échanges en Méditerranée. Antiquité


et Moyen Âge, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, p. 149-162.
Challet, Vincent (2006b), « ­L’exclusion par le nom : réflexions sur la
dénomination des révoltés à la fin du Moyen-Âge », in L ­ ’Exclusion au Moyen
Âge, Lyon, Cahiers du Centre ­d’Histoire Médiévale, p. 373-388.
Challet, Vincent (2010a), « ­Peasants’ Revolts Memories : Damnatio memoriæ
or Hidden Memories », in Lucie Dolezalova (éd.), The Making of Memory
in the Middle Ages, Leiden, Brill, p. 397-413.
Challet, Vincent (2010b), « Tuchins and Brigands de Bois : Peasant Communities
and Self-Defence Movements in Normandy During the Hundred Years
War », in Linda Clark (éd.), The Fifteenth Century, vol. 9 : English and
Continental Perspectives, The Boydell Press, Woodbridge, p. 85-99.
Challet, Vincent (2011), « Al arma ! Al arma ! Prises d­ ’armes et recours aux
armes à ­l’époque médiévale : entre autodéfense et revendication de liberté »,
Annales de Bretagne et des Pays de ­l’Ouest, t. 118, p. 21-33.
Challet, Vincent (2014), « Un village sans histoire ? La ­communauté de
Villeveyrac en Languedoc », in Jan Dumolyn et al. (éd.), The Voices of the
People in Late Medieval Europe. Communication and Popular Politics, Turnhout,
Brepols, p. 123-138.
Challet, Vincent (2015a), « Les fourches sont-elles vraiment patibulaires ? Les
fourches et leur c­ ontraire à partir de quelques exemples languedociens »,
Criminocorpus, Les Fourches Patibulaires du Moyen Âge à l­ ’Époque moderne.
Approche interdisciplinaire. URL : http://criminocorpus.revues.org/3033.
Challet, Vincent (2015b), « Une reconstruction mémorielle. Écritures
et réécritures du Petit Thalamus de Montpellier », in E. Anheim et al.
(éd.), ­L’Écriture de ­l’histoire au Moyen Âge. Contraintes génériques, ­contraintes
documentaires, Paris, Garnier, p. 277-291.
Champion, J.A.I. (2014), The Pillars of Priestcraft Shaken : The Church of England
And Its Enemies, 1660-1730, Cambridge Studies in Early Modern British
History, Cambridge, Cambridge University Press.
Chappey, Jean-Luc (2013), Ordre et désordres biographiques. Dictionnaires, listes
de noms, réputation, des Lumières à Wikipédia, Paris, Champ Vallon.
Chaulet, Rudy (2010), « Pedro Mexía, lecteur et utilisateur des sources
antiques dans son Histoire impériale et césarienne (1545) », Cahiers des études
anciennes, XLVII, p. 503-527.
Chedgzoy, Kate (2007), W ­ omen’s Writing in the British Atlantic World. Memory,
Place and History, Oxford, Oxford University Press.
Chiffoleau, Jacques (2007), « Le crime de Majesté, la politique et
­l’extraordinaire. Note sur les collections érudites de procès de lèse-majesté
du xviie siècle français et sur les exemples médiévaux », in Yves-Marie
406 LA MÉMOIRE DES RÉVOLTES EN EUROPE À L’ÉPOQUE
­­ MODERNE

Bercé (éd.), Les Procès politiques (xive-xviie siècle), Rome, École française de
Rome, p. 577-662.
Christie, Ian R. (1962), Wilkes, Wyvill and Reform. The Parliamentary Reform
Movement in British Politics, 1760-1785, London, Macmillan & Co.
Ciappelli, Giovanni (2009), Memoria, famiglia, identità tra Italia ed Europa
­nell’età moderna, Bologna, Il Mulino.
Cicchetti, Angelo (2002), I libri di famiglia in Italia. II. Geografia e storia,
Roma, Edizioni di Storia e letteratura.
Cicchetti, Angelo, Mordenti, Raoul (1985), I libri di famiglia in Italia.
I. Filologia e storiografia letteraria, Roma, Edizioni di storia e letteratura.
Clavero Salvador, Bartolomé (1986), Tantas personas ­como estados : por una
antropología política de la historia europea, Madrid, Tecnos.
Claydon, Tony (1996), William III and the Godly Revolution, Cambridge Studies
in Early Modern British History, Cambridge, Cambridge University Press.
Cohn, Samuel K. (2010), « Revolts of the late middle ages and the peculiarities
of the English », in Survival and discord in medieval society : essays in honour
of Christopher Dyer, Turnhout, Brepols, p. 269-285.
Coirault, Patrice (1942), Notre chanson folklorique, Livre 1. ­L’objet et la méthode,
Paris, Auguste Picard.
Colás Latorre, Gregorio (1995), « Bartolomé Leonardo de Argensola y la
rebelión aragonesa de 1591 », in Bartolomé Leonardo de Argensola,
Alteraciones populares de Zaragoza. Año 1591, Zaragoza, Institución « Fernando
el Católico », p. 7-79.
Collins, James (2016), La Monarchie républicaine. État et société dans la France
moderne, Paris, Odile Jacob.
Comparato, Vittor Ivo (1987), « Il modello político olandese in Italia durante
la prima metà del Seicento », in V.I. Comparato (éd.), Modelli nella storia
del pensiero político, Florencia, Leo S. Olschki, p. 145-165.
Contamine, Philippe (2006), « Froissart, chroniqueur des “menues gens” »,
in Michel Zink et Odile Bombarde (éd.), Froissart dans sa forge, Paris,
Académie des Inscriptions et Belles Lettres, p. 33-47.
Corbellini, Roberta (1998), « Udine capitale della Patria del Friuli : la
costruzione di ­un’identità cittadina per un ruolo di governo », in Marco
Bellabarba, Reinhard Stauber (éd.), Identità territoriali e ­cultura politica
nella prima età moderna / Territoriale Identität und Politische Kultur in der
Frühen Neuzeit, Bologna, il Mulino – Berlin, Duncker & Humblot,
p. 239-254.
Corens, Liesbeth, Peters, Kate, Walsham, Alexandra (éd.) (2016), The
Social History of the Archive : Record Keeping in Early Modern Europe, Oxford,
Oxford University Press.
Sources et bibliographie 407

Cornette, Joël (2016), La Bretagne révoltée de 1675 et de 2013. Colère rouge et


­concordance des temps, Porspoder, Centre d­ ’Histoire de Bretagne.
Costantini, Claudio (1978), La Repubblica di Genova ­nell’età moderna, Torino,
UTET.
Costes, René (1920), « Pedro Mexía, chroniste de Charles-Quint », Bulletin
hispanique, vol. 22, no 1, p. 1-36.
Cottret, Monique (2009), Tuer le tyran ? Le tyrannicide dans l­ ’Europe moderne,
Paris, Fayard.
Cremonini, Cinzia (2016), « Les généalogies crédibles de Pompeo Litta entre
tradition et innovation », in Stéphane Jettot, Marie Lezowski (dir.), The
Genealogical Enterprise : Social Practices and Collective Imagination in Europe
(15th-20th century), Peter Lang, p. 300-319.
Cressy, David (1989), Bonfires and Bells. National Memory and the Protestant
Calendar in Elizabethan and Stuart England, London, Sutton Publishing.
Croix, Alain (2002), « La révolte des bonnets rouges : De ­l’histoire à la
mémoire », ArMen, 131 (6), p. 2-11.
Crouzet, Denis (1990), Les Guerriers de Dieu : la violence au temps des guerres
de religion (vers 1525-1610), Seyssel, Champ Vallon.
Crouzet-Pavan, Élisabeth (2005), Enfers et Paradis : l­’Italie de Dante et de
Giotto, Paris, Albin Michel.
Crouzet-Pavan, Élisabeth (2007), Renaissances italiennes 1380-1500, Paris,
Albin Michel.
Cuart Moner, Baltasar (1994), « La historiografía áulica en la primera mitad
del s xvi : los cronistas del emperador », in Juan Antonio González
Iglesias, Carmen Codoñer Merino (coord.), Antonio de Nebrija, Edad
Media y Renacimiento, Salamanca, Ediciones Universidad de Salamanca,
p. 39-58.
Cuart Moner, Baltasar (2001a), « Juan Ginés de Sepúlveda, cronista del
Emperador », in José Martínez Millán (coord.), Carlos V y la quiebra del
humanismo político en Europa (1530-1558), vol. 3, Madrid, Sociedad Estatal para
la Conmemoración de los Centenarios de Felipe II y Carlos V, p. 341-368.
Cuart Moner, Baltasar (2001b), « Jovio en España. Las traducciones castellanas
de un cronista del emperador », in J. L. Castellano Castellano,
Sánchez-Montes González (coord.), Carlos V, Europeismo y universalidad,
Madrid, vol. 5, p. 197-224.
Cubitt, Geoffrey (2007), History and Memory, Manchester : Manchester
University Press.
Cuesta Domingo, Mariano (2004), « Alonso de Santa Cruz, cartógrafo y
fabricante de instrumentos náuticos de la Casa de Contratación », Revista
Complutense de Historia de América, no 30, p. 7-40.
408 LA MÉMOIRE DES RÉVOLTES EN EUROPE À L’ÉPOQUE
­­ MODERNE

Dahlgren, E.W. (1892), Map of the World by the Spanish Cosmographer Alonzo
de Santa Cruz, 1542, Stockholm, Staff-General.
­D’Alessio, Silvana (2003), Contagi. La rivolta napoletana del 1647-1648 :
linguaggio e potere politico, Firenze, CET.
­D’Alessio, Silvana (2007), Masaniello. La sua vita e il mito in Europa, Roma, Salerno.
­Dall’Aglio, Stefano, Richardson, Brian, Rospocher, Massimo (éd.) (2016),
Voices and Texts in Early Modern Italian Society, London, Routledge.
Dauzat, Albert (1938), « Contribution à la littérature orale de la Basse-
Auvergne », ­L’Auvergne littéraire (92), p. 41-42.
Davies, R. R. (1997), The Revolt of Owain Glyn Dŵr, Oxford, Oxford University
Press.
De Angelis, Laura (2014), « La classe dirigeante de Florence au tournant
du xive et xve siècle », Revue française de science politique, 2014/6, vol. 64,
p. 1123-1127.
De Benedictis, Angela (2006), « Narrare storie, difendere diritti : ancora
su tumulto o resistenza », in Cecilia Nubola, Andreas Würgler (éd.),
Operare la resistenza. Suppliche, gravamina e rivolte in Europa (secoli xv-xix),
Annali d­ ell’Istituto storico italo-germanico in Trento. Quaderni, Bologna,
il Mulino, p. 29-50.
De Benedictis, Angela (2013a), Tumulti. Moltitudini ribelli in età moderna,
Bologna, il Mulino.
De Benedictis, Angela (2013b), « “According to Bartolo”, “according to
Baldo”. Archives of Knowledge for the Study of Revolt », in Angela De
Benedictis, Karl Härter (éd.), Revolten und politische Verbrechen zwischen
dem 12. und 19. Jahrhundert, Frankfurt am Main, Vittorio Klostermann,
p. 17-40.
De Potter, Frans, Broeckaert, Jan (1864), Geschiedenis van de gemeenten van
de provincie Oost-Vlaanderen, Ghent, Annoot-Braeckman.
De Saint Victor, Jacques (2009), « Sismondi entre républicanisme et
Risorgimento », Revue française d­ ’Histoire des Idées politiques, no 30, 2e semestre,
p. 253-275.
De Salis, Jean (1932), Sismondi (1773-1842) : la vie et ­l’œuvre d­ ’un cosmopolite
philosophe, Genève, Slatkine. Rééd. : Genève, Slatkine, 1973.
Della Torre, Raffaele (1846), « Congiura di Giulio Cesare Vachero, a cura
di C.L. Bixio », Archivio storico italiano, III, p. 545-653.
Delille, Gérard (2003), Le Maire et le Prieur. Pouvoir central et pouvoir local en
Méditerranée occidentale, Paris – Rome, EHESS – École française de Rome.
Delinière, Jean (2004), Weimar à l­’époque de Goethe, Paris, ­L’Harmattan.
Demaria, Giacinto (1892), Carlo Emanuele II e la c­ongiura di Raffaele Torre,
Novara, Fratelli Miglio.
Sources et bibliographie 409

Demets L., Dumolyn J. (2016), « Urban Chronicle Writing in Late Medieval


Flanders : the Case of Bruges during the Flemish Revolt of 1482-1490 »,
Urban History, 43, p. 28-45.
Denoel, Stéphanie (2005), « Liège. Les fortifications médiévales », in Julien
Maquet (éd.), Le Patrimoine médiéval de la Wallonie, Namur, Institut du
Patrimoine Wallon, p. 443-444.
De Ridder, Bram (2013), « De Akte van Afstand als pacificatiestrategie tijdens
de Nederlandse Opstand (1597-1600) », in Handelingen der Koninklijke
Zuid-Nederlandse Maatschappij voor Taal- en Letterkunde en Geschiedenis, 65,
p. 209-221.
De Schepper, Hugo (2014), “Belgium dat is Nederlandt” : Identiteiten en
identiteiten besef in de Lage Landen (1200-1800), Breda, Stichting Uitgeverij
Papieren Tijger.
Descimon, Robert, Ruiz Ibáñez, José Javier (2005), Les Ligueurs de ­l’exil. Le
refuge catholique français après 1594, Seyssel, Champ Vallon.
Deseure, Brecht, Pollmann, Judith (2013), « The Experience of Rupture and
the History of Memory », in Erika Kuijpers, Judith Pollmann, Johannes
Müller et Jasper van der Steen (dir.), Memory before Modernity : Practices
of Memory in Early Modern Europe, Leiden, Brill, p. 315-329.
De Vivo, Filippo (2009), Information and Communication in Venice : Rethinking
Early Modern Politics, Oxford, Oxford University Press.
Diago Hernando, Máximo (2007), « El factor religioso en el c­ onflicto de
las Comunidades de Castilla (1520-1521). El papel del clero », Hispania
Sacra, LIX, 119, p. 85-140.
Di Lenardo, Lorenzo (2009), « Amaseo Gregorio, cronista », in Cesare Scalon,
Claudio Griggio, Ugo Rozzo (éd.), Nuovo Liruti. Dizionario biografico dei
friulani. vol. 2, ­L’età veneta, t. I (A-C), Udine, Forum.
Di Napoli, Mariano (1989), « ­L’immagine della c­ ongiura in alcuni testi storici
di età moderna », Annali della Scuola Normale Superiore di Pisa, Classe di
lettere e filosofia, 19 (4), p. 1433-1450.
Dobson, Richard Barrie (1970), The P ­ easant’s Revolt of 1381, Londres, McMillan.
Domínguez Ortiz, Antonio, Vincent, Bernard (1985), Historia de los moriscos :
vida y tragedia de una minoría, Madrid, Alianza Editorial.
Dommanget, Maurice (1971), La Jacquerie, Paris, Maspero.
Donagan, Barbara, 2008, War in England 1642-1649, Oxford, Oxford
University Press.
Dooley, Brendan, Baron, Sabrina A. (éd.) (2001), The Politics of Information
in Early Modern Europe, London – New York, Routledge.
Dorado, Ana-Isabel (2014), « Propaganda c­ ontra el poder absoluto en 1837 :
José Muñoz Maldonado », Bulletin of Hispanic Studies, vol. 91, p. 365-382.
410 LA MÉMOIRE DES RÉVOLTES EN EUROPE À L’ÉPOQUE
­­ MODERNE

Doria, Giorgio, Savelli, Rodolfo (1980), « “Cittadini di governo” a Genova :


ricchezza e potere tra Cinque e Seicento », Materiali per una storia della
­cultura giuridica, 10.
Dreyfürst, Stephanie (2014), Stimmen aus dem Jenseits : David Fassmanns
historisch-politisches Journal „Gespräche in dem Reiche derer Todten“(1718-1740),
Berlin, Walter de Gruyter (Frühe Neuzeit vol. 187).
Dubois, Claude-Gilbert (1972), Celtes et Gaulois au xvie siècle. Le développement
littéraire d­ ’un mythe nationaliste, Paris, Vrin.
Duby, Georges (1973), Le Dimanche de Bouvines : 27 juillet 1214, Paris, Gallimard.
Duby, Georges (1988), Hommes et structures du Moyen Âge, La société chevaleresque,
Paris, 1988.
Duchesnau, François (1982), La Physiologie des Lumières. Empirisme, Modèles,
Théories, La Haye / Boston / Londres, Martinus Nijhoff.
Duchet, Michèle (1971), Anthropologie et Histoire au siècle des Lumières, Paris,
Albin Michel.
Duerloo, Luc (2014), El archiduque Alberto. Piedad y política dinástica durante
las guerras de religión, Madrid, Centro de Estudios Europa Hispánica.
Duke, Alastair (2009), Dissident Identities in the Early Modern Low Countries,
Farnham.
Dumolyn, Jan (2007), « The Terrible Wednesday of Pentecost : Confronting
Urban and Princely Discourses in the Bruges Rebellion of 1436-1438 »,
History, 92, p. 3-20.
Dumolyn, Jan, Haemers, Jelle (2012), « A Bad Chicken was Brooding :
subversive speech in Late Medieval Flanders », Past and Present, vol. 214,
p. 45-86.
Dumolyn, Jan, Haemers, Jelle (2014), « Political Poems and Subversive Songs.
The Circulation of ‘Public P ­ oetry’ in the Late Medieval Low Countries »,
Journal of Dutch Literature, 5, p. 1-22.
Dumolyn, Jan, Haemers, Jelle (2015), « “A Blabbermouth Can Barely
Control His Tongue” : Political Poems, Songs, and Prophecies in the Low
Countries (Fifteenth-Sixteenth Centuries », in Thomas Cohen, Lesley
Twomey (dir.), Spoken Word and Social Practice. Orality in Europe (1400-
1700), Brill, Leiden, p. 280-299.
Dumolyn, Jan, Haemers, Jelle (2016), « Takehan, Cokerulle, and Mutemaque.
Naming Collective Action in the Later Medieval Low Countries », in Justine
Firnhaber-Baker, Dirk Schoenaers (éd.), The Routledge Handbook of
Medieval Revolt, London, Routledge, sous presse.
Dunthorne, Hugh (2013), Britain and the Dutch Revolt 1560-1700, Cambridge,
Cambridge University Press.
Dupront, Alphonse (1976), L.A. Muratori et la société européenne des pré-Lumières,
Sources et bibliographie 411

Firenze, Olschki, Biblioteca ­dell’edizione nazionale del carteggio di L.A


Muratori.
Duquenne, Frédéric (2010), « Des ‘républiques c­ alvinistes’ avortées ? La
­contestation des échevinages à Douai et Arras en 1577 et 1578 », in Monique
Weis (éd.), Des villes en révolte. Les « républiques urbaines » aux Pays-Bas et en
France pendant la deuxième moitié du xvie siècle, Turnhout, Brepols, p. 53-63.
Durán, Eulalia (1982), Las Germanies als Països Catalans, Barcelona, Curial.
Egío, José Luis, (2013), « La República de los suizos de Josias Simler (1576). Corpus
civitatis helvético y léxico federal en la modernidad temprana », Revista de
estudios histórico-jurídicos Pontificia Universidad Católica de Valparaíso, no 35,
2, p. 729-746.
Eichel-Lojkine, Patricia (dir.) (2010), Autour de Claude de Seyssel. Écrire
­l’histoire, penser la politique en France à ­l’aube des temps modernes, Rennes,
Presses Universitaires de Rennes.
Elliott, John H. (2012), History in the Making, New Haven and London,
Yale University Press.
Erdélji, Gabriella (2013), « Tales of a Peasant Revolt. Taboos and Memories
of 1514 in Hungary », in Judith Pollmann et al. (éd.), Memory before
Modernity. Practices of Memory in Early Modern Europe, Brill, Leiden –
Boston 2013, p. 93-110.
Esteban Estríngana, Alicia (2005), Madrid y Bruselas. Relaciones de gobierno
en la etapa postarchiducal (1621-1634), Leuven, Leuven University Press.
Esteban Estríngana, Alicia (2009), « Haciendo rostro a la fortuna. Guerra,
paz y soberanía en los Países Bajos (1590-1621) », in Bernardo J. García
García (dir.), Tiempo de paces. La Pax Hispánica y la Tregua de los Doce Años
(1609-2009), Madrid, Fundación Carlos de Amberes / Sociedad Estatal
de Conmemoraciones Culturales, p. 77-123.
Esteve, Cesc (2008), « Orígenes, causas e inventores en la historiografía del
Renacimiento », Talia Dixit, 3, p. 77-103.
Esteve, Cesc (2014), « Teorías de la prosa histórica en la temprana modernidad »,
Criticón, 120-121, p. 117-136.
Esteve, Cesc (2017a), « Autocensura e historiografía en tiempos de los Austrias.
Presentación », Manuscrits. Revista d­ ’Historia Moderna, 35, p. 13-18.
Esteve, Cesc (2017b), « “Contenerse en los límites de la prudencia”. Autocensura
y discurso histórico en la temprana modernidad », Manuscrits. Revista
­d’Historia Moderna, 35, p. 103-124.
Fagioli Vercellone, Guido (1990), « Denina », Dizionario biografico degli
Italiani, Milano, Treccani, vol. 38, p. 723-732.
Falco, Giorgio, Forti, Fiorenzo (éd.) (1964), Dal Muratori al Cesarotti, Opere
di Ludovico Antonio Muratori, Milano-Napoli, Riccardo Ricciardi, 2 t.
412 LA MÉMOIRE DES RÉVOLTES EN EUROPE À L’ÉPOQUE
­­ MODERNE

Farge, Arlette, Revel, Jacques (1988), Logiques de la foule. L ­ ’affaire des enlèvements
­d’enfants, Paris 1750, Paris, Hachette.
Fenocchio, Gabriella (2012), Alfieri, Bologna, Il Mulino.
Fentress, James, Wickham, Chris (1992), Social Memory, Oxford,
Blackwell.
Fentress, James, Wickham, Chris (2008), Social Memory. New Perspectives
on the Past, Oxford, Basil Blackwell (2d edition).
Ferguson, Wallace Klippert (2009), La Renaissance dans la pensée historique,
Paris, Payot & Rivages.
Fernández Albaladejo, Pablo (2002), « “Materia de España” y “edificio”
de historiografia. Algunas c­ onsideraciones sobre la década de 1540 », in
Fernando Martínez Gil (coord.), En torno a las Comunidades de Castilla.
Actas del ­congreso internacional Poder, c­ onflicto y revuelta en la España de Carlos I,
Cuenca, Universidad de Castilla-La Mancha, p. 109-130.
Fernández Álvarez, Manuel (1999), Carlos V, el César y el Hombre, Madrid,
Espasa Calpe.
Fernández-Santamaría, José Antonio (2007), Juan Ginés de Sepúlveda. La
guerra en el pensamiento político del Renacimiento, Madrid.
Feros, Antonio (2002), El Duque de Lerma : realeza y privanza en la España de
Felipe III, Madrid, Marcial Pons.
Ferrero Micó, Remedios (2013), « Las Germanías desde la perspectiva jurídica
y política », in István Szászdi León-Borja, María Jesús Galende Ruíz
(coord.), Imperio y tiranía. La dimensión europea de las Comunidades de Castilla,
Valladolid, Ediciones Universidad de Valladolid, p. 177-195.
Fiorese, Flavio (2004), « Introduzione », dans Rolandino, Vita e morte di
Ezzelino da Romano, éd. Flavio Fiorese, Milano, Mondadori.
Fontana, Alessandro (1999), « Du droit de résistance au devoir ­d’insurrection »,
in Jean-Claude Zancarini (éd.), Le Droit de résistance (xiie-xxe siècle), ENS
Éditions, Fontenay Saint-Cloud, p. 15-33.
Forner Tichell, Vicente (1922), Familia de los Viciana : estudios histórico-
críticos, Valencia, Hijo de F. Vives Mora.
Foucault, Michel (1975), Surveiller et punir. Naissance de la prison, Paris,
Gallimard.
Fox, Adam (1999), « Remembering the past in early modern England : oral
and written traditions », Transactions of the Royal Historical Society, 6th series,
24, p. 233-256.
Franceschi, Franco, Taddei, Ilaria (2012), Le città italiane nel Medioevo : xii-
xiv secolo, Bologna, Il Mulino.
François, Étienne, Schulze, Hagen (éd.), Deutsche Erinnerungsorte, Munich,
Beck, 2003.
Sources et bibliographie 413

Freedman, Paul (1999), Images of the Medieval Peasant, Stanford, Stanford


University Press.
Froeschle-Chopard, Marie-Hélène (1999), « Religion », in Vincenzo
Ferrone, Daniel Roche (dir.), Le Monde des Lumières, Paris, Fayard,
p. 229-238.
Frugoni, Arsenio et Chiara (2013), Une Journée au Moyen Âge, Paris, Les
Belles Lettres.
Fubini, Riccardo (1994), « La c­ ongiura dei Pazzi : radici politico-sociali e
ragioni di un fallimento », in Italia quattrocentesca. Politica e diplomazia
­nell’età di Lorenzo il Magnifico, Milano, p. 87-106.
Fubini, Riccardo (1996), Quattrocento fiorentino : politica, diplomazia, ­cultura,
Pisa, Pacini.
Fubini, Ricardo (2014), « Le régime de Côme de Médicis au moment de son
arrivée au pouvoir (1434) », Revue française de sciences politiques, 2014/6,
vol. 64, p. 1139-1156.
Fulda, Daniel (1996), Wissenschaft aus Kunst. Die Entstehung der modernen deutschen
Geschichtsschreibung 1760-1860, Berlin, New York, Walter de Gruyter.
Fumaroli, Marc (2010), « Essai introductoire » dans Baltasar Gracián, ­L’Homme
de Cour, ed. Sylvia Roubaud, Paris, Gallimard, 2010.
Gaillard, Victor (1856), Archives du Conseil de Flandre, Ghent, De Busscher.
Galasso, Giuseppe (1994), Alla periferia d­ ell’impero. Il Regno di Napoli nel
periodo spagnolo (secc. xvi-xvii), Torino, Einaudi.
Galasso, Giuseppe (2005), Napoli spagnola dopo Masaniello, Edizioni di Storia
e Letteratura (3rd edition).
Gallo, Francesca F. (2011), « La c­ ongiura di Macchia : mito, storia,
racconto », in Antonino Giuffrida, Fabrizio ­D’Avenia, Daniele
Palermo (éd.), Studi storici dedicati a Orazio Cancila, Palermo,
Mediterranea, p. 879-926.
Gamberini, Andrea, Petralia, Giuseppe (éd.) (2007), Linguaggi politici
­nell’Italia del Rinascimento, Roma, Viella.
Gantet, Claire (2001), La Paix de Westphalie (1648). Une histoire sociale, xviie-
xviiie siècles, Paris, Belin.
García Cárcel, Ricardo (1973), « Las Germanías de Valencia y la actitud
revolucionaria de los gremios », Estudis : Revista de historia moderna, no 2.
García Cárcel, Ricardo (1975), Las Germanías de Valencia, Barcelona,
Península.
García Cárcel, Ricardo (2002), « Comunidades y Germanías. Algunas
reflexiones », in F. Martínez Gil (coord.), En torno a las Comunidades de
Castilla. Actas del c­ ongreso internacional Poder, c­ onflicto y revuelta en la España
de Carlos I, Cuenca, Universidad de Castilla-La Mancha, p. 209-229.
414 LA MÉMOIRE DES RÉVOLTES EN EUROPE À L’ÉPOQUE
­­ MODERNE

García García, Bernardo J. (1996), La Pax Hispánica : política exterior del


duque de Lerma, Leuven, Leuven University Press.
García García, Bernardo J. (2002), « Ganar los corazones y obligar a los
vecinos. Estrategias de pacificación de los Países Bajos (1604-1610) », in
Manuel Herrero Sánchez, Ana Crespo Solana (coord.), España y las 17
provincias de los Países Bajos : una revisión historiográfica (xvi-xviii), Córdoba,
Universidad de Córdoba, vol. 1, p. 137-166.
García García, Bernardo J. (2008), « La Pax Hispánica. Una política de
­conservación », in José Martínez Millán, María Antonietta Visceglia
(dir.), La monarquía de Felipe III, Madrid, Fundación Mapfre-Tavera, vol. 4,
p. 1215-1315.
García Hernán, Enrique (2004), « Construcción de las historias de España
en los siglos XVII y XVIII », in Ricardo García Cárcel (coord.), La
­construcción de las Historias de España, Madrid, Fundación Carolina, Marcial
Pons, p. 127-193.
García Hernán, Enrique (2006), « La España de los cronistas reales en los
siglos XVI y XVII », Norba. Revista de Historia, vol. 19, p. 125-150.
García Martínez, Sebastián (1983), « Estudio preliminar », in Viciana,
Rafael Martín de, Crónica de la ínclita y coronada ciudad de Valencia, Valencia,
Universidad de Valencia, vol. 1, p. 24-222.
García Pinilla, Ignacio J. (2013), « El humanista ante la historia oficial : la
podadera en el De rebus gestis a Francisco Ximenio Cisnerio de Alvar Gómez
de Castro », in Eugenia Fosalba, María José Vega (éd.), Textos castigados.
La censura literaria en el Siglo de Oro, Berna, Peter Lang, p. 173-187.
Gascón Pérez, Jesús (1995), Bibliografía crítica para el estudio de la rebelión
aragonesa de 1591, Zaragoza, Centro de Documentación Bibliográfica
Aragonesa / Institución « Fernando el Católico ».
Gascón Pérez, Jesús (1999), « 1591-1991 : cuatro siglos de historiografía
sobre las “alteraciones” de Aragón », Stvdia Historica. Historia Moderna,
20, p. 241-268.
Gascón Pérez, Jesús (2010), Alzar banderas c­ ontra su rey. La rebelión aragonesa
de 1591 c­ontra Felipe II, Zaragoza, Prensas Universitarias de Zaragoza /
Institución « Fernando el Católico ».
Gascón Pérez, Jesús (2013a), « El ideario político de Jerónimo Zurita. Una
aproximación », in Isabel Falcón (coord.), El Compromiso de Caspe (1412),
cambios dinásticos y ­constitucionalismo en la Corona de Aragón, Zaragoza, Obra
Social de Ibercaja, p. 343-350.
Gascón Pérez, Jesús (2013b), « Epígonos de la rebelión. Los cronistas de
Aragón y sus escritos sobre 1591 », Revista de Historia Jerónimo Zurita, 88,
p. 117-143.
Sources et bibliographie 415

Gascón Pérez, Jesús (2017), « “Mejor me será que calle”. Formas de autocensura
en los escritos aragoneses sobre la rebelión de 1591 », Manuscrits. Revista
­d’història moderna, vol. 35, p. 41-59.
Gatto, Ludovico (1992), Medioevo Voltairiano, Roma, Bulzoni.
Gauvard, Claude (1991), De grace especial. Crime, État et Société en France à la
fin du Moyen Âge, Paris, Publications de la Sorbonne.
Gauvard, Claude (éd.) (2008), ­L’Enquête au Moyen Âge, Rome, École Française
de Rome.
Gauvard, Claude, Zorzi, Andrea (éd.) (2015), La Vengeance en Europe, xiie-
xviiie siècle, Paris, Publications de la Sorbonne.
Geary, Patrick (1994), Phantoms of Remembrance : Memory and Oblivion at the
End of the First Millennium, Princeton, Princeton University Press.
Genette, Gérard (2004), « Récit fictionnel, récit factuel », in Fiction et diction,
Paris, Seuil [1979].
Gensburger, Sarah (2011), « Réflexion sur l­’institutionnalisation récente
des memory studies », Revue de Synthèse, Springer Verlag / Lavoisier, 132-VI
(3), p. 1-23.
Gensburger, Sarah, Lavabre, Marie-Claire (2005), « Entre “devoir de
mémoire” et “abus de mémoire” : la sociologie de la mémoire c­ omme tierce
position », in Bertrand Müller (dir.), Histoire, mémoire et épistémologie. À
propos de Paul Ricœur, Lausanne, Payot, p. 76-95.
Gentile, Marco (éd.) (2005), Guelfi e Ghibellini ­nell’Italia del Rinascimento,
Roma, Viella.
Gentile, Marco (2009), Fazioni al governo. Politica e società a Parma nel
Quattrocento, Roma, Viella.
Geyl, Pieter (1960), Noord en Zuid : eenheid en tweeheid in de Lage Landen,
Utrecht, Het Spectrum.
Gibson, William (2002), The Church of England 1688-1832. Unity and Accord,
London, Routledge.
Gilly, Patrick (2004), « Le discours politique florentin à la Renaissance :
autour de ­l’“humanisme civique” », in Jean Boutier, Sandro Landi,
Olivier Rouchon (dir.), Florence et la Toscane, xive-xixe : les dynamiques d­ ’un
État italien, Rennes, PUR, p. 323-343.
Gil Pujol, Xavier (2012), « Pensamiento político español y europeo en la
Edad Moderna. Reflexiones sobre su estudio en una época post- »whig » »,
in María José Pérez Álvarez y Laureano Rubio Pérez (coord.), Campo y
campesinos en la España Moderna : ­culturas políticas en el mundo hispano, vol. 1,
Madrid, Fundación Española de Historia Moderna, p. 297-320.
Ginzburg, Carlo (1980), « Signes, traces, pistes. Racines d­ ’un paradigme de
­l’indice », Le Débat, 1980/6, no 6, p. 3-44.
416 LA MÉMOIRE DES RÉVOLTES EN EUROPE À L’ÉPOQUE
­­ MODERNE

Ginzburg, Carlo (1999), « Alien voices », in Id., History, Rhetoric, and Proof,
Hanover – London, University Press of New England, p. 71-91.
Glickman, Gabriel (2013), « Political Conflict and the Memory of the
Revolution in England 1689 – c. 1750 », in Stephen Taylor, Tim Harris
(éd.), The Final Crisis of the Stuart Monarchy. The Revolutions of 1688-1691
in their British, Atlantic and European Contexts, Studies in Early Modern
Cultural, Political and Social History, vol. 16, Woodbridge 2013, p. 243-271.
Goldie, Mark (1980), « The Revolution of 1689 and the Structure of Political
Argument. An Essay and an Annotated Bibliography of Pamphlets on
the Allegiance Controversy », Bulletin of Research in the Humanities 83,
p. 485-491.
Gómez Vozmediano, Miguel Fernando (2010), « Historia versus memoria :
La revuelta ­comunera en las ciudades de Córdoba y Sevilla y su eco en la
corografía barroca », in István Szászdi León-Borja (coord.), Monarquía
y revolución : en torno a las Comunidades de Castilla, I Simposio internacional
de Historia c­omunera, Valladolid, Fundación Villalar, p. 195-234.
Gonthier, Nicole (1998), Le Châtiment du crime au Moyen Âge, Rennes, Presses
Universitaires de Rennes.
González Alonso, Benjamín (1980), « Consideraciones en torno al “proyecto
de ley perpetua” de las Comunidades de Castilla », in V Simposio Toledo
renacentista, Toledo 24-26 abril 1975, II, Publicaciones del centro universitario
de Toledo, p. 123-143.
Grasland, Claude (1990), « Chansons et vie politique à Paris sous la Régence »,
Revue ­d’Histoire Moderne et Contemporaine, 37 (4), p. 537-570.
Gregg, Edward (1980), Queen Anne, London, Routledge & Kegan Paul.
Grell, Chantal (1996), « Le modèle antique dans l­’imaginaire du ­complot
en France au xviie siècle », in Yves-Marie Bercé, Elena Fasano Guarini
(éd.), Complots et c­onjurations dans ­l’Europe moderne, Rome, École française
de Rome, p. 163-176.
Grendi, Edoardo (1993), « ­L’ascesa dei Balbi genovesi e la ­congiura di Gio.
Paolo », Quaderni storici, XXVIII, 84, p. 775-814.
Griesse, Malte (2017), « Popular Memory and Early Modern Revolts in Russia :
From Razin to Pugačev », in Éva Guillorel, David Hopkin, William
G. Pooley (dir.), Rhythms of Revolt : European Traditions and Memories of
Social Conflict in Oral Culture, Farnham, Ashgate, p. 196-214.
Griffin, Martin I. J. (1992), Latitudinarianism in the Seventeenth-Century Church
of England, ­Brill’s Studies in Intellectual History, vol. 32, Leiden, Brill.
Grijp, Louis Peter (2010), Het Nederlandse lied in de Gouden Eeuw, Amsterdam,
Meertens Institute.
Groenveld, Simon (2009), Het Twaalfjarig Bestand, 1609-1621 : de
Sources et bibliographie 417

jongelingsjaren van de Republiek der Vereenigde Nederlanden, La Haya, Haags


Historisch Museum.
Guenée, Bernard (1980), Histoire et ­culture historique dans ­l’Occident médiéval,
Paris, Aubier.
Guerci, Luciano (1978), Condillac storico : storia e politica nel Cours ­d’études
pour l­’instruction du Prince de Parme, Napoli, R. Riccardi.
Guilcher, Jean-Michel (1989), La Chanson folklorique de langue française. La
notion et son histoire, Paris, Atelier de la danse populaire.
Guillorel, Éva (2010), La Complainte et la plainte. Chanson, justice, ­cultures en
Bretagne (xve-xviiie siècles), Rennes-Brest, Presses universitaires de Rennes-
Dastum-Centre de Recherche Bretonne et Celtique.
Guillorel, Éva, Hopkin, David (dir.) (2017), « Oral Cultures and Traditions
of Social Conflict : An Introduction to Sources and Approaches », in Éva
Guillorel, David Hopkin, William G. Pooley (dir.), Rhythms of Revolt :
European Traditions and Memories of Social Conflict in Oral Culture, Farnham,
Ashgate, p. 1-42.
Haemers, Jelle (2004), De Gentse opstand (1449-1453). De strijd tussen rivaliserende
netwerken om het stedelijke kapitaal, Kortrijk, UGA.
Haemers, Jelle (2007), « Philippe de Clèves et la Flandre. La position d­ ’un
aristocrate au cœur ­d’une révolte urbaine (1477-1492) », in Id., Hanno
Wijsman, Céline Van Hoorebeeck (éd.), Entre la ville, la noblesse et
­l’État : Philippe de Clèves (1456-1528), homme politique et bibliophile, Turnhout,
Brepols, p. 21-99.
Haemers, Jelle (2009), « Factionalism and State Power in the Flemish Revolt
(1477-1492) », Journal of Social History, 42, p. 1009-1039.
Haemers, Jelle (2011), « Social Memory and Rebellion in Fifteenth-Century
Ghent », Social History, 36 (4), p. 443-463.
Haemers, Jelle (2014), « Governing and gathering about the ­common welfare
of the town. The petitions of the craft guilds of Leuven, 1378 », in Hipólito
Rafael Oliva Herrer et al. (éd.), La ­comunidad medieval c­ omo esfera publica,
Sevilla, SUP, p. 153-169.
Haemers, Jelle (2016), « Révolte et requête. Les gens de métiers et les ­conflits
sociaux dans les villes de Flandre (xiiie-xve siècle) », Revue Historique, 677, p. 27-55.
Haffemayer, Stéphane (dir.) (2013), L ­ ’Écriture et la mémoire des révoltes et
révolutions, Les Cahiers du CRHQ, no 4.
Haffemayer, Stéphane (dir.) (2015), Révoltes et révolutions à l­’écran. Europe
moderne, xvie-xviiie siècles, Rennes, PUR.
Haffemayer, Stéphane et al. (2016), Images et révoltes dans le livre et l­’estampe
(xive – milieu du xviiie siècle), Paris, Bibliothèque Mazarine & Éditions des
Cendres.
418 LA MÉMOIRE DES RÉVOLTES EN EUROPE À L’ÉPOQUE
­­ MODERNE

Hammer, Karl, Voss, Jürgen (1976), Historische Forschung im 18. Jahrhundert :


Organisation, Zielsetzung u. Ergebnisse (Pariser historische Studien), Bonn,
L. Rohrscheid Verlag.
Hamon, Philippe (2014), « Aux armes, paysans ! Les engagements militaires
des ruraux en Bretagne de la fin du Moyen Âge à la Révolution », Mémoires
de la Société ­d’Histoire et d­ ’Archéologie de Bretagne, t. XCII, p. 221-244.
Hamon, Philippe (2015), « La défaite ou le chaos. Les paysans bas-bretons
à la bataille pendant les guerres de la Ligue sous le regard du chanoine
Moreau », in Ariane Boltanski, Yann Lagadec et Franck Mercier (dir.),
La Bataille. Du fait ­d’armes au c­ombat idéologique, xie-xixe siècle, Rennes,
Presses universitaires de Rennes, p. 143-156.
Harari, Yuval (2004), Renaissance military memoirs. War, History and Identity,
1450-1600, Woodbridge, Boydell and Brewer.
Harder, Hermann (1981), Le Président de Brosses et le voyage en Italie au
xviiie siècle, Genève, Slatkine.
Harline, Craig E. (1987), Pamphlets, Printing and Popular Culture in the Early
Modern Dutch Republic, La Haye, Martinus Nijhoff.
Harris, Tim (1993), Politics under the Later Stuarts. Party Conflict in a Divided
Society, 1660-1715, London, Longman.
Harris, Tim (2006), Revolution. The Great Crisis of the British Monarchy, 1685-
1720, London, Lane.
Hartog, François (2003), Régimes ­d’historicité. Présentisme et expériences du temps,
Paris, Éditions du Seuil.
Hartog, François (2007), Regímenes de historicidad. Presentismo y experiencias
del tiempo, México, Universidad Iberoamericana [orig. 2003].
Harvey, I. M. W. (1991), Jack C ­ ade’s Rebellion of 1450, Oxford, Oxford
University Press.
Harvey, Ian (1997), « Was there Popular Politics in Fifteenth-Century
England ? », in Richard Britnell, Anthony Pollard (éd.), The McFarlane
Legacy, Stroud, Alan Sutton, p. 155-174.
Heller, Henry (2003), Anti-Italianism in Sixteenth-Century France, Toronto,
University of Toronto Press.
Henken, Elissa R. (1996), National Redeemer. Owain Glyndŵr in Welsh Tradition,
Cardiff, University of Wales Press.
Herrero Sánchez, Manuel (2000), El acercamiento hispano-neerlandés (1648-
1678), Madrid, Editorial CSIC.
Herrero Sánchez, Manuel (2005), « La Monarquía Hispánica y la cuestión
de Flandes », in P. Sanz Camañes (éd.), La Monarquía Hispánica en tiempos
del Quijote, Ciudad Real, 2005, p. 501-527.
Herrero Sánchez, Manuel (2009), « Las Indias y la Tregua de los Doce Años »,
Sources et bibliographie 419

in Bernardo J. García García (dir.), Tiempo de paces. La Pax Hispánica


y la Tregua de los Doce Años (1609-2009), Madrid, Fundación Carlos de
Amberes / Sociedad Estatal de Conmemoraciones Culturales, p. 193-229.
Herrero Sánchez, Manuel (2015), « Paz, razón de estado y diplomacia en
la Europa de Westfalia. Los límites del triunfo del sistema de soberanía
plena y la persistencia de los modelos policéntricos (1648-1713) », Estudis.
Revista de Historia Moderna, 41, p. 43-65.
Herrero Sánchez, Manuel (2017a), « Líneas de análisis y debates c­ onceptuales en
torno al estudio de las repúblicas y el republicanismo en la Europa moderna »,
in Manuel Herrero Sánchez (éd.), Repúblicas y republicanismo en la Europa
Moderna (siglos XVI-XVIII), Madrid, Fondo de Cultura Económica, p. 17-89.
Herrero Sánchez, Manuel (2017b), « La Monarquía Hispánica y las repúblicas
europeas. El modelo republicano en una monarquía de ciudades », in Manuel
Herrero Sánchez (éd.), Repúblicas y republicanismo en la Europa Moderna
(siglos XVI-XVIII), Madrid, Fondo de Cultura Económica, p. 273-327.
Herrero Sánchez, Manuel, Álvarez-Ossorio, Antonio (2011), « La
aristocracia genovesa al servicio de la Monarquía Católica : el caso del
III marqués de Los Balbases (1630-1699) », in Manuel Herrero Sánchez,
Rocío Ben Yessef, Carlo Bitossi y Dino Puncuh (éd.), Génova y la
Monarquía Hispánica (1528-1713), Génova, Atti de la Società Ligure di
Storia Patria, vol. I, p. 331-365.
Hespanha, Antonio Manuel (1993), « Revueltas y Revoluciones », in Id.,
La gracia del derecho. Economía de la Cultura en la Edad Moderna, Madrid,
Centro de Estudios Constitucionales, p. 295-321.
Hill, Brian W. (1967), The Growth of Parliamentary Parties, 1689-1742, London,
Allen & Unwin.
Hill, Brian W. (1996), The Early Parties and Politics in Britain, 1688-1832,
British Studies series, London, Macmillan.
Hindle, Steve (2000), « A sense of place ? Becoming and belonging in the
rural parish », in P. Withington, A. Shepard (éd.), Communities in Early
Modern England, Manchester.
Hobsbawm, Eric, Ranger, Terence (éd.) (1983), The Invention of Tradition,
Cambridge, Cambridge University Press.
Holenstein, André, Maissen, Thomas, Prak, Maarten (éd.) (2008), The
republican alternative : the Netherlands and Switzerland ­compared, Amsterdam,
Amsterdam University Press.
Holmes, Geoffrey S. (1973), The Trial of Doctor Sacheverell, London, Eyre
Methuen.
Holmes, Geoffrey S. (1975), Religion and Party in late Stuart England, London,
The Historical Association.
420 LA MÉMOIRE DES RÉVOLTES EN EUROPE À L’ÉPOQUE
­­ MODERNE

Holmes, Geoffrey S. (1987), British Politics in the Age of Anne, London, The
Hambledon Press.
Holt, Mack (1986), The Duke of Anjou and the Politique Struggle during the Wars
of Religion, Cambridge, Cambridge University Press.
Hoppit, Julian (2002), A Land of Liberty ? England 1689-1727, The New
Oxford History of England, Oxford, Oxford University Press.
Horwitz, Henry (1977), Parliament, Policy and Politics in the Reign of William III,
Manchester, Manchester University Press.
Hughes Ann, (1986), « Parliamentary Tyranny ? Indemnity Proceedings and
the Impact of the Civil War », Midland History, 11, p. 49-78.
Hughes, Ann, (1987), Politics, Society and Civil War in Warwickshire, 1620-
1660, Cambridge, Cambridge University Press.
Hughes, Ann, (2006), « “A lunatick revolter from loyalty” : the Death of
Rowland Wilson and the English Revolution », History Workshop, 61,
p. 192-204.
Hughes, Ann (inédit), « The Accounts of the Kingdom : memory, c­ ommunity
and the English Civil War », in Liesbeth Corens, Kate Peters and
Alexandra Walsham (éd.), The Social History of the Archive : Record Keeping
in Early Modern Europe, Past and Present Supplement 11, Oxford.
Hugon, Alain (2011), Naples insurgée, 1647-1648. De l­ ’événement à la mémoire,
Rennes, Presses Universitaires de Rennes.
Hugon, Alain, Merle, Alexandra (éd.) (2016), Soulèvements, révoltes, révolutions
dans ­l’empire des Habsbourg ­d’Espagne, Madrid, Casa de Velázquez.
Huygebaert, Nicolas (1960), « Abbaye de Saint-André-les-Bruges », in
Monasticon Belge. 3. Province de la Flandre occidentale, Liège, CNRHR,
vol. 1, p. 86-87.
Isnardi, Felice (1878), La Congiura di Gian Paolo Balbi, opera postuma pubblicata
ed illustrata da Antonio Isnardi, Genova, Armanino figli & Casabona.
Israel, Jonathan I. (1997), La república holandesa y el mundo hispánico (1606-
1661), Madrid, Nerea.
Jäger, Stephan (2003), « Die Beredsamkeit des Prinzen von Oranien oder
Friedrich Schillers ästhetische Erfindung modernen Geschichtsdenkens », in
Herrmann Britta (hrsg. von), Ästhetische Erfindung der Moderne ? : Perspektiven
und Modelle 1750-1850, Würzburg, Königshausen & Neumann (Stiftung
für Romantikforschung Bd. 17), p. 95-114.
Jäger, Stephan (2011), Performative Geschichtsschreibung : Forster, Herder, Schiller,
Archenholz und die Brüder Schlegel, Berlin/Boston, de Gruyter (Hermaea
Bd. 125).
Jardine, Lisa (2008), Going Dutch : How England Plundered ­Holland’s Glory,
New York, HarperCollins.
Sources et bibliographie 421

Jarque Martínez, Encarna (2013), « Los “paracronistas” aragoneses en los


siglos XVI y XVII », Revista de Historia Jerónimo Zurita, 88, p. 171-198.
Jerez, José Joaquín (2007), Pensamiento político y reforma institucional durante
la guerra de las Comunidades de Castilla (1520-1521), Madrid, Marcial Pons.
Jettot, Stéphane, Aubert, Gauthier (dir.) (2017), « Récits et discours sur les
révoltes et révolutions dans ­l’Europe du xviie siècle », Dix-septième siècle,
2017, 2, p. 195-302.
Jones, David L. (1988), A Parliamentary History of the Glorious Revolution,
London, Her ­Majesty’s Stationery Office.
Jouanna, Arlette (1989a), Le Devoir de révolte. La noblesse française et la gestation
de ­l’État moderne (1559-1661), Paris, Fayard.
Jouanna Arlette (1989b), « Un programme politique nobiliaire : les Malcontents
et l­ ’État (1574-1576) », in Philippe Contamine (dir.), L´État et les aristocraties
(France, Angleterre, Écosse), xiie-xviie siècles, Paris, École Normale Supérieure,
p. 247-277.
Jouanna, Arlette (1998), Histoire et dictionnaire des guerres de religion, Paris,
Robert Laffont.
Jouhaud, Christian (1990), « Révoltes et ­contestations d­ ’Ancien Régime »,
in J. Julliard (éd.), ­L’État et les c­ onflits, Paris, Éditions du Seuil, p. 17-99.
Jouhaud, Christian, Ribard, Dinah, Schapira, Nicolas (2009), Histoire,
Littérature, Témoignage. Écrire les malheurs du temps, Paris, Gallimard.
Joutard, Philippe (1977), La Légende des camisards, une sensibilité au passé,
Paris, Gallimard.
Joutard, Philippe (1983), Ces voix qui nous viennent du passé, Paris, Hachette.
Joutard, Philippe (2013), Histoire et mémoires. Conflits et alliance, Paris, La
Découverte.
Joutard, Philippe, Poujol, Jacques, Cabanel, Patrick (dir.) (1987), Cévennes
terre de refuge, Montpellier, Presses du Languedoc.
Jullien de Pommerol, Marie-Henriette (1953), Albert de Gondi, maréchal
de Retz, Genève, Droz.
Justice, Steven (1994), Writing and Rebellion. England in 1381, Berkeley,
University of California Press.
Kagan, Richard L. (1999), « Los cronistas del emperador », in P. Navascués
Palacio (coord.), Carlos V Imperator, Madrid, Lunwerg Editores,
p. 183-211.
Kagan, Richard L. (2001a), « Clio y la Corona : escribir historia en la España
de los Austrias », in Richard L. Kagan, Geoffrey Parker (coord.), España,
Europa y el mundo atlántico : homenaje a John H. Elliott, Madrid, Marcial
Pons, p. 113-150.
Kagan, Richard L. (2001b), « La propaganda y la política : las memorias del
422 LA MÉMOIRE DES RÉVOLTES EN EUROPE À L’ÉPOQUE
­­ MODERNE

Emperador », in Carlos V. Europeismo y universalidad. La figura de Carlos V,


vol. 1, p. 209-216.
Kagan, Richard L. (2002), « Carlos V a través de sus cronistas : el momento
­comunero », in Fernando Martínez Gil (coord.), En torno a las Comunidades
de Castilla. Actas del c­ongreso internacional Poder, ­conflicto y revuelta en la
España de Carlos I, Cuenca, Universidad de Castilla-La Mancha, p. 147-157.
Kagan, Richard L. (2010), Los Cronistas y la corona. La política de la historia en
España en las Edades Media y Moderna, Madrid, Centro de Estudios Europa
Hispánica / Marcial Pons [orig. 2009].
Kalifa, Dominique (2016), « Introduction. Dénommer le siècle : “chrononymes”
du xixe siècle », Revue ­d’histoire du xixe siècle, no 52, p. 9-17.
Kansteiner, Wulf (2002), « Finding meaning in memory. A methodological
critique of collective memory » History and Theory, 41, p. 179-197.
Kattenberg, Lisa (inédit), Lessons from the Low Countries. The Theoretical and
practical impact of historical experience on Habsburg Theories of State, 1590-
1650, Tesis doctoral inédita, Universidad de Ámsterdam.
Kenyon, John P. (1963), « The Birth of the Old Pretender », History Today,
vol. 13, p. 418-426.
Kenyon, John P. (1977), Revolution Principles. The Politics of Party, 1689-1720,
The Ford Lectures Delivered in the University of Oxford, 1975-1976,
Cambridge, Cambridge University Press.
Kermina, Françoise (2002), Les Montmorency : grandeur et déclin, Paris, Perrin.
Kesselring, Krista J. (2007), The Northern Rebellion of 1569 : Faith, Politics,
and Protest in Elizabethan England, Basingstoke, Palgrave Macmillan.
Kimich, Dorothee (2002), Wirklichkeit als Konstruktion : Studien zu Geschichte
und Geschichtlichkeit bei Heine, Büchner, Immermann, Stendhal, Keller und
Flaubert, München, Wilhelm Fink.
Klapisch-Zuber, Christiane (2006), Retour à la cité : les magnats de Florence,
1340-1440, Paris, éditions de l­’EHESS.
Kline, K. Lee (2000), « On the Emergence of Memory in Historical Discourse »,
Representations, 69, p. 127-150.
Knights, Mark (2004), Representation and Misrepresentation in Later Stuart
Britain, Oxford, Oxford University Press.
Knights, Mark (éd.) (2012), Faction displayed. Reconsidering the Impeachment
of Dr Henry Sacheverell, Parliamentary history, vol. 31, pt. 1, London,
Wiley-Blackwell.
Köhler, Alfred (2001), Carlos V : 1500-1558. Una biografía, Madrid, Marcial
Pons.
Koopmans, Joop (éd.) (2005), News and Politics in Early Modern Europe,
Leuven, Peeters.
Sources et bibliographie 423

Koselleck, Reinhart (1990), Le Futur passé : ­contributions à la sémantique des


temps historiques, Paris, Éditions de ­l’EHESS.
Kuijpers, Erika et al. (2013), Memory before Modernity : Practices of Memory in
Early Modern Europe, Leiden, Brill.
LaCapra, Dominick (2016), « Trauma, History, Memory, Identity : what
remains ? », History and Theory, vol. 55, issue 3, p. 375-400.
Lacey, Andrew (2003), The Cult of King Charles the Martyr, in Studies in Modern
British Religious History, vol. 7, Woodbridge, Boydell Press.
Lafond, Jean (1996) « ­L’imaginaire de la ­conjuration dans la littérature
française du xviie siècle », in Yves-Marie Bercé, Elena Fasano Guarini
(éd.), Complots et c­onjurations dans ­l’Europe moderne, Rome, École française
de Rome, p. 117-135.
Landi, Sandro (2006), Naissance de l­ ’opinion publique dans l­ ’Italie moderne : sagesse
du peuple et savoir de gouvernement de Machiavel aux Lumières, Rennes, PUR.
Langford, Paul (1989), A Polite and Commercial People. England, 1727-1783,
The New Oxford History of England, Oxford, Oxford University Press.
Laurent, Donatien, Nassiet, Michel (2017), « Songs as Echoes of Rebellion
in Early Modern Brittany », in Éva Guillorel, David Hopkin, William
G. Pooley (dir.), Rhythms of Revolt : European Traditions and Memories of
Social Conflict in Oral Culture, Farnham, Ashgate, p. 121-148.
Lavergne, Cécile, Perdoncin, Anton (2010), « La violence à ­l’épreuve de la
description », Traces. Revue de Sciences humaines, 19, p. 5-25.
Le Coadic, Ronan (2015), « ­Brittany’s New ‘Bonnets ­Rouges’ and their
Critics », in Liam Anton Brannelly, Gregory Darwin, Patrick McCoy
et Kathryn ­O’Neill (dir.), Proceedings of the Harvard Celtic Colloquium, 34,
Cambridge, Harvard University Press.
Lecuppre-Desjardins, Élodie (2010), « Des portes qui parlent. Placards, feuilles
volantes et c­ ommunication politique dans les villes des Pays-Bas à la fin
du Moyen Âge », Bibliothèque de l­’École des Chartes, t. 168, 2010, p. 151-172.
Legon, Edward (inédit), Remembering Revolution : Seditious Memories in England
and Wales, 1660-1685 (Ph.D thesis, University College, London, 2015).
Levèvre, Joseph (1923), « Les ambassadeurs ­d’Espagne à Bruxelles sous le
règne de l­ ’Archiduc Albert (1598-1621) », Revue belge de philologie et ­d’histoire,
2 (1), p. 61-80.
Le Goff, Jacques (1986), Storia e Memoria, Torino, Einaudi.
Lerner, Marc H. (2017), « Competing Memories of a Swiss Revolt : the Prism
of the William Tell Legend », in Éva Guillorel, David Hopkin, William
G. Pooley (dir.), Rhythms of Revolt : European Traditions and Memories of
Social Conflict in Oral Culture, Farnham, Ashgate, p. 90-120.
Le Roux, Nicolas (2009), Les Guerres de Religion 1559-1629, Paris, Belin.
424 LA MÉMOIRE DES RÉVOLTES EN EUROPE À L’ÉPOQUE
­­ MODERNE

Le Roy Ladurie, Emmanuel (1979), Le Carnaval de Romans. De la Chandeleur


au Mercredi des cendres 1579-1580, Paris, Gallimard.
Levi, Giovanni, « Prólogo », in Manuel Herrero Sánchez (éd.), Repúblicas
y republicanismo en la Europa Moderna (siglos XVI-XVIII), Madrid, Fondo
de Cultura Económica.
Lombardi, Giovanni (2000), Tra le pagine di S. Biagio. L ­ ’economia della stampa
a Napoli in età moderna, Napoli, ESI.
López Vela, Roberto (2004a), « Las Comunidades : ¿lucha por la libertad o
“feudalismo ­concejil” ? El debate sobre la “revolución” en la historiografía
de la Restauración », Investigaciones Históricas : época moderna y c­ ontemporánea,
24, p. 105-138.
López Vela, Roberto (2004b), « De Numancia a Zaragoza. La ­construcción del
pasado nacional en las historias de España del Ochocientos », in R. García
Cárcel (coord.), La c­ onstrucción de las historias de España, Madrid, Fundación
carolina, Marcial Pons, p. 195-299.
Lorenzini, Daniele (2010), « Para acabar ­con la verdad-demostración. Bachelard,
Canguilhem, Foucault y la historia de los “regímenes de verdad” », Laguna.
Revista de Filosofía, 26 (marzo), p. 9-34.
Losada, Ángel (1949), Juan Ginés de Sepúlveda a través de su « Epistolario » y
nuevos documentos, Madrid, C.S.I.C.
Luce, Siméon (1894), Histoire de la Jacquerie, Paris, Champion.
Lyon, Harriet (2016), « The Fisherton Monster. Science, Providence, and
Politics in Early Restoration England », Historical Journal, 60, 2.
Madan, Falconer F. (1978), A Critical Biography of Dr. Henry Sacheverell, William
A. Speck (éd.), University of Kansas Publications, Library series, vol. 43,
Lawrence/Kan., University of Kansas Libraries.
Maier, Bruno (1989), « Introduzione », in Maier, Bruno (éd.), Alfieri : Tragedie,
Milano, Garzanti, p. vii-lxxii.
Maire Vigueur, Jean-Claude (1995), « Révolution documentaire et révolution
scripturaire : le cas de ­l’Italie médiévale », Bibliothèque de ­l’École des Chartes,
vol. 153, p. 177-185.
Maire Vigueur, Jean-Claude (2003), Cavaliers et citoyens : guerre, c­onflits et
sociétés dans l­’Italie ­communale xiie-xiiie siècles, Paris, éditions de l­’EHESS.
Maire Vigueur, Jean-Claude (dir.) (2013), Signorie e cittadine n­ ell’Italia
­communale, Roma, Viella.
Maiso González, Jesús (1994-1995), « La Historia de España de Juan de
Ferreras », Estudis castellonencs, no 6, p. 771-784.
Manzano Baena, Laura (2011), Conflicting Words. The Peace Treaty of Münster
(1648) and the Political Culture of the Dutch Republic and the Spanish Monarchy,
Leuven, Leuven University Press.
Sources et bibliographie 425

Maravall, José Antonio (1975), La c­ ultura del Barroco. Análisis de una estructura
histórica, Barcelona, Ariel.
Marchal, Guy (2001), « De la mémoire c­ ommunicative à la mémoire c­ ulturelle.
Le passé dans les témoignages ­d’Arezzo et de Sienne (1177-1180) », Annales.
Histoire, Sciences Sociales, 56, p. 563-589.
Márquez Villanueva, Francisco (2001), « Nuevas de corte. Fray Antonio de
Guevara, periodista de Carlos V », in José Martínez Millán (coord.),
Carlos V y la quiebra del humanismo político en Europa (1530-1558), Madrid,
vol. 2, p. 13-28.
Marrou, H.-I. (1999), El ­conocimiento histórico, Barcelona, Idea Books [orig. 1975].
Martí Grajales, Francisco (1892), El doctor Gaspar Juan Escolano. Cronista
del Reino y predicador de la Ciudad. Bio-bibliografía premiada c­ on un objeto de
arte en los Juegos Florales de « Lo Rat Penat » celebrados en veintiocho de julio
de 1892, Valencia.
Martines, Lauro (dir.) (1972), Violence and civil disorder in Italian cities 1200-
1500, Berkeley, University of California Press.
Martines, Lauro (2001), Strong Words. Writing and Social Strain in the Italian
Renaissance, Baltimore, Johns Hopkins University Press.
Martines, Lauro (2003), April Blood. Florence and the Plot against the Medici,
Oxford, Oxford University Press.
Martines, Lauro (2005), La c­ ongiura dei Pazzi : intrighi politici, sangue e vendetta
nella Firenze dei Medici, Milano, Oscar Mondadori, 2005.
Martínez Bermejo, Saúl (2010), Translating Tacitus. The reception of T ­ acitus’s
works in the vernacular languages of Europe, 16th-17th centuries, Pisa, Pisa
University Press.
Masson, Christophe (2013), « La guerre des Awans et des Waroux. Une
“vendetta” en Hesbaye liègeoise (1297-1335). Deuxième partie », Le Moyen
Âge, 119, p. 403-448.
Mastellone, Salvo (1972), Venalità e machiavellismo in Francia (1572-1610).
­All’origine della mentalità politica borghese, Firenze, Olschki.
Mastellone, Salvo (1985), « I repubblicani del Seicento ed il modello politico
olandese », Il pensiero politico, XVII/2, p. 145-163.
Mata Carriazo, Juan de (1945), « Estudio introductivo », in Pedro Mexía,
Historia del Emperador Carlos V, Madrid, Espasa Calpe.
Mazzini, Ubaldo (1904), « Per la storia delle ­congiure ­contro Genova »,
Giornale Storico e Letterario della Liguria, V, p. 405-432.
McIlvenna, Una (2015), « The power of Music : The Significance of
Contrafactum in Execution Ballads », Past and Present, 229 (1), p. 47-89.
McVeagh, John (ed.) (2009), ­Defoe’s Review, vol. 7, 1710-1711, London, Pickering
& Chatto.
426 LA MÉMOIRE DES RÉVOLTES EN EUROPE À L’ÉPOQUE
­­ MODERNE

Méchoulan, Henry (2007), « République et monarchie chez Mariana », in


Yves Charles Zarka (dir.), Monarchie et république au xviie siècle, Paris, PUF,
« Fondements de la politique », p. 261-276.
Mellet, Paul-Alexis (2007), Les Traités monarchomaques (1560-1600), Genève, Droz.
Meloni, Ilaria (2007), « I masnadieri. Andrea Maffei mediatore tra Schiller
e Verdi », Atti d­ ell’Accademia roveretana degli Agiat, 257, VII, p. 417-437.
Menant, François (2005), ­L’Italie des c­ommunes (1100-1350), Paris, Belin.
Merle, Alexandra (2012), « La fondation des premières monarchies dans le
Tractado de república ­d’Alonso de Castrillo (1521) », in Georges Martin,
Araceli Guillaume-Alonso, Jean-Paul Duviols (dir.), Le Monde hispanique.
Histoire des fondations, Paris, Presses de l­’Université Paris-Sorbonne, coll.
« Iberica », 25, p. 51-62.
Merle, Alexandra (2014), « El De Rege de Juan de Mariana (1599) y la
cuestión del tiranicidio : ¿un discurso de ruptura ? », in Discursos de ruptura
y renovación : la formación de la prosa áurea, editado por Philippe Rabaté
y Francisco Ramírez Santacruz, Criticón, no 120-121, Toulouse, Presses
universitaires du Mirail, p. 89-102.
Merle, Alexandra (2015), « Le débat sur la résistance au tyran dans la
littérature politique espagnole des Comunidades de Castille à la fin du
règne de Philippe II », Atlante. Revue ­d’Études romanes, 2, p. 90-115.
Merle, Alexandra (2017), « Autocensura en torno a la dimensión política
de las Comunidades de Castilla », Manuscrits. Revista d­ ’Història Moderna,
35, p. 19-40.
Merle, Alexandra y Alicia Oïffer-Bomsel (éd.) (2017), Tacite et le tacitisme
en Europe à l­’époque moderne, Paris, Honoré Champion.
Minois, Georges (1997), Le Couteau et le Poison : l­ ’assassinat politique en Europe
(1400-1800), Paris, Fayard.
Mirot, Léon (1905), Les Insurrections urbaines au début du règne de Charles VI
(1380-1383), Paris, Albert Fontemoing.
Mistral, Frédéric (1968), Lou trésor dou Félibrige, Aix-en-Provence (3e éd.).
Morán Martín, Remedios (2013), « Entre líneas : la Historia de Carlos V
de Juan Ginés de Sepúlveda y su visión de las Comunidades », in István
Szászdi León-Borja y María Jesús Galende Ruíz (coord.), Imperio y
Tiranía. La dimensión europea de las Comunidades de Castilla, Valladolid,
Universidad de Valladolid, Fundación Villalar-Castilla y León, p. 437-454.
Morel-Fatio, Alfred (1913), Historiographie de Charles Quint, Paris, Honoré
Champion.
Morrill, John (1998), Revolt in the Provinces : The People of England and the
Tragedies of War, London, Routledge. (a revision of Revolt of the Provinces,
first published in 1976).
Sources et bibliographie 427

Morsel, Joseph (2016), « Traces ? Quelles traces ? Réflexions pour une histoire
non passéiste », Revue historique, 2016/4, no 680, p. 813-868.
Möser, Justus (1944), « Der jetzige Hang zu allgemeinen Gesetzen und
Verordnungen ist der gemeinen Freiheit gefährlich » (1775), in Patriotische
Phantasien, 4 Teile (1774-1786) Teil II. Sämtliche Schriften historisch-kritische
Ausgabe in 14 Bänden (dir. Ludwig Schirmeyer, Werner Kohlschmidt et
al.), Oldenburg, G. Stalling, Bd. 5.
Moss, Alan (2016), « Comparing ruins. National Trauma in Dutch Travel
Accounts of Seventeenth Century », in Lotte Jensen (éd.), The Roots of
Nationalism. National Identity Formation in Early Modern Europe, 1600-1815,
Amsterdam, Amsterdam University Press, p. 217-234.
Muir, Edward (1993), Mad blood stirring : Vendetta and Factions in Friuli during
the Renaissance, Baltimore and London 1993.
Muldrew, Craig (1998), The Economy of Obligation. The Culture of Credit and
Social Relations in Early Modern England, Basingstoke, Palgrave.
Müller-Seidel, Walter (1990), « Verschwörungen und Rebellionen in Schillers
Dramen », in A. Aurnhammer et al. (dir.), Schiller und die höfische Welt,
Tübingen, De Gruyter, p. 422-446.
Munt, Annette (1997), « The Impact of the the Rampjaar on Dutch Golden
Age Culture », A Journal of Low Country Studies, XXI, 1, p. 3-51.
Musi, Aurelio (1992), « Non pigra quies. Il linguaggio politico degli Accademici
Oziosi e la rivolta napoletana del 1647-1648 », in Eluggero Pii (éd.), I
linguaggi politici delle rivoluzioni in Europa, xvi-xix secolo, Firenze, L. Olschki.
Musso, Riccardo (2007), « La tirannia dei cappellazzi. La Liguria tra xiv e
xvi secolo », in G. Assereto, M. Doria (éd.), Storia della Liguria, Roma-
Bari, Laterza, p. 43-60.
Mussy, Luis G. de, Valderrama, Miguel (2010), Historiografía postmoderna.
Conceptos, figuras, manifiestos, Santiago de Chile, RIL Editores.
Muto, Giovanni (2008), « Fidelidad politica y ­conflictos urbanos en el reino de
Napoles (siglos XVI-XVII) », in José Ignacio Fortea, Juan Eloy Gelabert
(éd.), Ciudades en ­conflicto (siglos XVI-XVII), Madrid, Junta de Castilla y
Leon, p. 371-395.
Muto, Giovanni (2010), « “Fieles y rebeldes”. Lenguaje y resistencia politica
en el Napoles del siglo XVI », in Julián J. Lozano Navarro, Juan Luis
Castellano (éd.), Violencia y c­ onflictividad en el universo barroco, Granada,
Editorial Comares, p. 141-172.
Muto, Giovanni (2012), « 1649 : Napoli tra repressione e rilegittimazione »,
in Biagio Salvemini, Angelantonio Spagnoletti (éd.), Territori, poteri,
rappresentazioni ­nell’Italia di età Moderna, Bari, Edipuglia, p. 127-139.
Naegle, Gisela (2012), « Les châtiments de Toulouse et ­d’Arras : ­comparaison
428 LA MÉMOIRE DES RÉVOLTES EN EUROPE À L’ÉPOQUE
­­ MODERNE

des deux villes rebelles au xve siècle », in Patrick Gilli, Jean-Pierre


Guilhembet (éd.), Le Châtiment des villes dans les espaces méditerranéens
(Antiquité, Moyen Âge, Époque moderne), Turnhout, Brepols, p. 365-372.
Narbona Vizcaíno, Rafael (2001), « La ciudad de Valencia y las Germanías »,
in Ernest Belenguer Cebrià (coord.), De la unión de coronas al imperio de
Carlos V, vol. 2, p. 309-334.
Nassiet, Michel (1990), « Émeutes et révoltes en Bretagne pendant la guerre
­d’Indépendance (1487-1490) », in Actes du 114e Congrès national des Sociétés
savantes (Paris, 1989), Section ­d’histoire médiévale et de philologie, Paris, CTHS,
p. 137-156.
Nassiet, Michel (2000), Parenté, noblesse, et États dynastiques, xve-xvie siècles,
Paris, Éditions de ­l’École des Hautes Études en Sciences sociales.
Nassiet, Michel (2001), La Violence, une histoire sociale (France, xvie-xviiie siècles),
Seyssel, Champ Vallon.
Nassiet, Michel (2009a), « Les luttes anti-seigneuriales dans ­l’Ouest aux
xvie-xviie siècles », in Ghislain Brunel et Serge Brunet (dir.), Haro sur
le seigneur ! Les luttes anti-seigneuriales dans ­l’Europe médiévale et moderne,
Toulouse, Presses universitaires du Mirail, p. 45-59.
Nassiet, Michel (2009b), « Bonnets rouges et bonnets bleus (1675), les enjeux
de la liberté armorique », in Dominique Le Page (dir.), 11 questions d­ ’Histoire
qui ont fait la Bretagne, Morlaix, Skol Vreizh, p. 155-179.
Negredo del Cerro, Fernando (2008), « Teoría política y discurso eclesiástico.
Una visión desde la pastoral barroca », in Francisco José Aranda Pérez,
José Damião Rodrigues (coord.), De re publica Hispaniæ. Una vindicación
de la c­ultura política en los reinos ibéricos en la primera modernidad, Madrid,
Silex, p. 265-292.
Nenner, Howard (1995), The Right to be King. The Succession to the Crown of
England, 1603-1714, Studies in Modern History, London and Chapel Hill/
NC, Macmillan.
Neufeld, Matthew (2013), The Civil Wars after 1660. Public Remembering in
late Stuart England, Woodbridge, the Boydell Press.
Neveux, Hugues (1997), Les Révoltes paysannes en Europe xive-xviie siècle, Paris,
Hachette.
Nieto Soria, José Manuel (2007), Medievo ­constitucional. Historia y mito político
en los orígenes de la España ­contemporánea (ca. 1750-1814), Madrid, Akal.
Nieto Soria, José Manuel (2011), « La gestación bajomedieval del derecho de
resistencia en Castilla : modelos interpretativos », Cahiers ­d’études hispaniques
médiévales, no 34, p. 17-27.
Niggemann, Ulrich (inédit), Revolutionserinnerung in der Frühen Neuzeit.
Refigurationen der ‘Glorious R ­ evolution’, in der politischen Kultur Großbritanniens
Sources et bibliographie 429

(1688 – c. 1760), Habilitation thesis defended in 2015 at University of


Marburg.
Niggemann, Ulrich (2013), « ‘You Will See Who They Are that Revile,
and Lessen Your … Glorious ­Deliverance’ : The ‘Memory ­War’ about
the ‘Glorious ­Revolution’ », in Erika Kuijpers et al. (éd.), Memory before
Modernity : Practices of Memory in Early Modern Europe, Leiden, Brill.
Nora, Pierre (1984-1992), Les Lieux de mémoire, Paris, Gallimard.
Nora, Pierre (1989), « Between History and Memory : les lieux de Mémoire »,
Representations, 26, p. 7-24.
Norbedo, Roberto (2009a), « Azio Giovanni Antonio, cronista », in Cesare
Scalon, Claudio Griggio, Ugo Rozzo (éd.), Nuovo Liruti. Dizionario
biografico dei friulani. vol. 2, ­L’età veneta, t. I (A-C), Udine, Forum.
Norbedo Roberto (2009b), « Belloni, Antonio, notaio, umanista », in Cesare
Scalon, Claudio Griggio, Ugo Rozzo (éd.), Nuovo Liruti. Dizionario
Biografico dei friulani, vol. 2, ­L’età veneta, t. I, Udine, Forum, p. 439-445.
Oexle, Otto (1982), « Liturgische Memoria und historische Erinnerung. Zur
Frage nach dem Gruppenbewusstsein und dem Wissenschaft der eigenen
Geschichte in den mittelalterlichen Gilden », in Norbert Kamp, Joachim
Wollasch (éd.), Tradition als historische Kraft. Interdisziplinäre Forschungen
zur Geschichte des Früheren Mittelalters, Berlin, De Gruyter, p. 323-340.
Okie, Laird (1991), Augustan Historical Writing. Histories of England in the
English Enlightenment, Lanham/NY, University Press of America.
Oliva Herrer, Hipólito Rafael (2007), « La circulation des idées politiques
parmi les élites rurales », in François Menant, Jean-Pierre Jessenne
(éd.), Les Élites rurales dans ­l’Europe médiévale et moderne, Toulouse, Presses
universitaires du Mirail, p. 179-193.
Oliva Herrer, Hipólito Rafael (2014), « Viva el rey y la c­ omunidad !
Arqueología del discurso político de las Comunidades », in Id. et al. (coord.),
La ­comunidad medieval ­como esfera pública, Sevilla, Servicio de Publicaciones
de la Universidad de Sevilla, p. 315-355.
Olivari, Michele (2002), Fra trono e opinione. La vita politica castigliana nel
Cinque e Seicento, Venecia, Saggi Marsilio.
Ortalli, Gherardo (1979), Pingatur in palatio : la pittura infamante nei secoli
xiii-xvi Roma, Jouvence.
Ortalli, Gherardo (1992), « Ezzelino : genesi e sviluppi di un mito », in
Giorgio Gracco (dir.), Nuovi studi ezzeliniani, Roma, Istituto storico italiano
per il Medioevo, p. 609-625.
Pacini, Arturo (1990), « I presupposti politici del secolo dei genovesi : la
riforma del 1528 », ASLSP, XXX.
Pacini, Arturo (1996), « “El ladrón de dentro casa” : c­ ongiure e lotta politica
430 LA MÉMOIRE DES RÉVOLTES EN EUROPE À L’ÉPOQUE
­­ MODERNE

a Genova dalla riforma del 1528 al tradimento di Gian Luigi Fieschi », in


Yves-Marie Bercé, Elena Fasano Guarini (éd.), Complots et ­conjurations
dans ­l’Europe moderne, Rome, École française de Rome, p. 597-658.
Pacini, Arturo (1999), La Genova di Andrea Doria n­ ell’impero di Carlo V,
Firenze, Olschki.
Pacini, Arturo (2003), « La Repubblica di Genova nel secolo xvi », in
D. Puncuh (éd.), Storia di Genova. Mediterraneo, Europa, Atlantico, Genova,
Società Ligure di Storia Patria.
Pacini, Arturo (2010), « La ­congiura Fieschi », in Gli anni di Genova, Roma-
Bari, Laterza, p. 95-122.
Pagliai, Laetitia, Sofia, Francesca (dir.) (2011), Sismondi e la nuova Italia,
Firenze, Polistampa.
Parker, Geoffrey (1989), España y la rebelión de Flandes, Madrid, Nerea.
Pazzagli, Carlo (2000), Sismondi e la Toscana del suo tempo (1795-1838), Siena,
Protagon Editori Toscani.
Peck, Imogen (2013), « Collaborators not Cavaliers : Popular Politics in the
Northern Counties of England, 1647-1659 », Northern History 50 (1), p. 39-53.
Pennington, Donald (1961), « The Accounts of the Kingdom, 1642-1649 »,
in F.J. Fisher (éd.), Essays in the Economic and Social History of Tudor and
Stuart England, Cambridge.
Pérez Ortega, Manuel Urbano (2008), « Una leyenda romántica de solera,
“Dorotea o el Cántaro Milagroso” de José Muñoz Maldonado, Vizconde
de San Javier », Sumuntán : anuario de estudios sobre Sierra Mágina, no 26,
p. 259-270.
Petti Balbi, Giovanna (2003), « Tra dogato e principato : il Tre e il
Quattrocento », in Storia di Genova. Mediterraneo, Europa, Atlantico, Genova,
Società Ligure di Storia Patria, 2, p. 233-324.
Pincus, Steven C. A. (1995), « From Butterboxes to Wooden Shoes : The
Shift in English Popular Sentiment from Anti-Dutch to Anti-French in
the 1670s », The Historical Journal, 38, p. 333-361.
Pincus, Steven C. A. (2009), 1688. The First Modern Revolution, New Haven /
Connecticut, Yale University Press.
Pirenne, Henri (1933), « Le ­conflit Liégeois-Bourguignon et le Perron
Liégeois », in Annales du XXIXe Congrès de la Fédération archéologique et
historique de Belgique, Liège, Poncelet, p. 3-12.
Pittock, Murray G. H. (1994), Poetry and Jacobite Politics in Eighteenth-Century
Britain and Ireland, Cambridge, Cambridge University Press.
Pittock, Murray G. H. (1998), Jacobitism, Basingstoke, Macmillan.
Pizzorno, Diego (2015a), « Il cannone e l­ ’eversione. La minaccia sabauda nei
primi tre decenni del Seicento », in G. Assereto, C. Bitossi, P. Merlin
Sources et bibliographie 431

(éd.), Genova e Torino. Quattro secoli di incontri e scontri, nel bicentenario


­dell’annessione della Liguria al Regno di Sardegna, Società Ligure di Storia
Patria, Genova, p. 99-119.
Pizzorno, Diego (2015b), « Il dissidio sabaudo-genovese nel xvii secolo :
guerre, ­congiure e battaglie propagandistiche », Rivista Storica Italiana,
2, p. 567-594.
Pizzorno, Diego (inédit), La cura del « serviggio pubblico ». Gli Inquisitori di Stato
a Genova : il percorso ordinario di una magistratura straordinaria, colloque Per
una ricognizione degli “stati ­d’eccezione”. Emergenze, ordine pubbllico e apparati
di polizia in Europa, Messina, 2013.
Place, Conyers, The True English Revolutionist, Or, the Happy Turn, Rightly
Taken, London, W. Taylor, 1710.
Pollmann, Judith (2007), « Brabanters do fairly resemble Spaniards after all.
Memory, propaganda and identity in the Twelve Y ­ ears’ Truce », in Judith
Pollmann, Andrew Spicer (éd.), Public opinion and changing identities in
the Early Modern Netherlands, Leiden, Brill, p. 211-227.
Pollmann, Judith (2010), « No ­man’s land. Reinventing Netherlandish
identities, 1585-1621 », in Judith Pollmann, Robert Stein (éd.), Networks,
Regions and Nations : Shaping Identities in the Low Countries 1300-1650,
Leiden, Brill, p. 241-261.
Pollmann, Judith, Kuijpers, Erika (2013), « On the Early Modernity of
Modern Memory », in Judith Pollmann et al. (éd.), Memory before Modernity.
Practices of Memory in Early Modern Europe, Leiden – Boston, Brill, p. 1-26.
Pollmann, Judith, Kuijpers, Erika, Muller, Johannes, Van der Steen,
Jasper (dir.) (2013), Memory before Modernity. Practices of Memory in Early
Modern Europe, Leiden-Boston, Brill.
Porter, Gerald, « Melody as a Bearer of Radical Ideology : English Enclosures,
« The Coney Warren » and Mobile Clamour » (2017), in Éva Guillorel,
David Hopkin, William G. Pooley (dir.), Rhythms of Revolt : European
Traditions and Memories of Social Conflict in Oral Culture, Farnham, Ashgate,
p. 238-261.
Potter, Lois (1999), « The Royal Martyr in the Restoration. National Grief and
National Sin », in Thomas N. Corns (éd.), The Royal Image. Representations
of Charles I, Cambridge, Cambridge University Press, p. 240-262.
Poutrin, Isabelle (2012), Convertir les musulmans. Espagne, 1491-1609, Paris, PUF.
Povolo, Claudio (2015a), « Feud and Vendetta : Customs and trial rites in
Medieval and Modern Europe. A legal-anthropological approach », Acta
Historiae, 23, p. 195-244.
Povolo, Claudio (2015b), Furore. Elaborazione di u­ n’emozione nella seconda metà
del Cinquecento, Verona, Cierre Edizioni.
432 LA MÉMOIRE DES RÉVOLTES EN EUROPE À L’ÉPOQUE
­­ MODERNE

Prak, Maarten (2006), « Corporate politics in the Low Countries : guilds


as institutions, 14th to 18th centuries », in Id. et al. (éd.), Craft Guilds in
the Early Modern Low Countries. Work, Power and Representation, Aldershot,
Ashgate, p. 74-106.
Prevenier, Walter (1985), « De charmes van de diplomatie : centraliserende
hertogen van Bourgondië in de (machts-)balans met een autonomistisch
Gents stadspatriciaat, 1379-1438 », Naamkunde, 17, p. 293-300.
Prüfer, Thomas (2012), Die Bildung der Geschichte : Friedrich Schiller und die
Anfänge der modernen Geschichtswissenschaft, Köln-Weimar, Böhlau (Beiträge
zur Geschichtskultur, Bd. 24).
Quazza, Romolo (1926), La guerra per la successione di Mantova e del Monferrato
(1628-1631), Mantova, Mondovi.
Quazza, Romolo (1930), Genova, Savoia e Spagna dopo la ­congiura del Vachero,
Bene Vagienna, Russo.
Radstone, Susannah, Hodgkin, Katharine (2005), Memory Cultures, Brunswick
N.J., Transaction Publishers.
Radstone, Susannah, Schwarz, Bill (2010), Memory. Histories. Theories.
Debates, New York, Fordham University Press.
Ragone, Franca (1998), Giovanni Villani e i suoi ­continuatori : la scrittura delle
cronache a Firenze nel Trecento, Roma, Istituto Palazzo Borromini.
Ramón Palerm, Vicente (1998), « Cervantes y la retórica clásica : estado de
la cuestión », in Antonio López Eire, Juan Miguel Labiano Ilundain,
Antonio M. Seoane Pardo (éd.), Retórica, política e ideología. Desde la
Antigüedad a nuestros días. Actas del II Congreso Internacional. Salamanca,
noviembre, 1997, Salamanca, Logo : Asociación Española de Estudios sobre
Lengua, Pensamiento y Cultura Clásica, vol. 2, p. 91-96.
Ramón Palerm, Vicente (1999), « Plutarco, Cervantes y el arte de escribir
historia », in José Guillermo Montes Cala, Manuel Sánchez Ortiz de
Landaluce, Rafael Jesús Gallé Cejudo (éd.), Plutarco, Dioniso y el vino.
Actas del VI Simposio Español sobre Plutarco. Cádiz, 14-16 de mayo de 1998,
Madrid, Ediciones Clásicas, p. 393-397.
Rancière, Jacques (1998), La Parole muette. Essai sur les ­contradictions de la
littérature, Paris, Hachette, coll. « Littératures ».
Raviola, Blythe Alice (2003), Il Monferrato gonzaghesco : istituzioni ed élites di
un micro-Stato (1536-1708), Firenze, Olschki.
Readman, Paul (2005), « The Place of the Past in English Culture c. 1890-
1914 », Past & Present, no 186, Feb. 2005, p. 147-199.
Redondo, Augustin (1976), Antonio de Guevara et ­l’Espagne de son temps. De
la carrière officielle aux œuvres politico-morales, Genève, Droz.
Redondo, Augustin (éd.) (2000), La Prophétie c­ omme arme de guerre des pouvoirs
xve-xviie siècles, Paris, Presses de la Sorbonne Nouvelle.
Sources et bibliographie 433

Reich, Wendy (1971), « The Uses of Folklore in Revitalization Movements »,


Folklore, 82 (3), p. 233-244.
Reinder, Michel (2008), Printed Pandemonium. The Power of the Public and the
Market for Popular Political Publications in the Early Modern Dutch Republic,
Rotterdam, Universidad de Rotterdam.
Ribot García, Luis Antonio (2015), « Ira regis o clementia. El caso de Mesina
y la respuesta a la rebelión en la Monarquía de España », in Bernardo
García García y Antonio Álvarez-Ossorio (éd.), Vísperas de sucesión.
Europa y la Monarquía de Carlos II, Madrid, Fundación Carlos de Amberes-
Edición Doce Calles, p. 129-157.
Ricciardelli, Fabrizio, Zorzi, Andrea (éd.) (2015), Emotions, Passions and
Power in Renaissance Italy, Amsterdam, Amsterdam University Press.
Richardson, Roger C. (1977), The Debate on the English Revolution Revisited,
London and New York, Routledge.
Richer-Rossi, Françoise (2008), « La vision de l­ ’Espagne ­d’Andrea Navagero
ambassadeur vénitien auprès de Charles Quint (1524). Lieux ­communs et
discours politique », in François Delpech (éd.), ­L’Imaginaire du territoire en
Espagne et au Portugal (xvie-xviie siècles), Collection de la Casa de Velázquez
(105), Madrid, p. 3-18.
Ricœur, Paul (1983), Temps et récit, vol. 1 : ­L’intrigue et le récit historique, Paris,
Éditions du Seuil.
Ricœur, Paul (2000), La Mémoire, l­’histoire, ­l’oubli, Paris, Éditions du Seuil.
Ricœur, Paul (2015), Historia y verdad, Buenos Aires, Fondo de Cultura
Económica [orig. 1955].
Ríos Saloma, Martín F. (2011), La Reconquista. Una ­construcción historiográfica
(siglos XVI-XX), UNAM / Marcial Pons Historia.
Rittersma, Rengenier (2009), Egmont da capo. Ein mythogenetische Studie,
Münster, Waxmann (Niederlande-Studien Bd. 44).
Rivero Rodríguez, Ángel (2004), « El mito ­comunero y la identidad nacional
española », in Antonio Álvarez-Ossorio Alvariño, Bernardo J. García
García (coord.), La Monarquía de las Naciones. Patria, nación y naturaleza
en la Monarquía de España, Fundación Carlos de Amberes, p. 723-737.
Robert, Philippe de (2002), « Une guerre sainte ? Les camisards et la tradition
biblique », in Patrick Cabanel et Philippe Joutard (dir.), Les Camisards
et leur mémoire, 1702-2002, Montpellier, Presses du Languedoc, p. 53-61.
Robine, Marc (1994), Anthologie de la chanson française : des trouvères aux grands
auteurs du xixe siècle, Paris, Albin Michel.
Roccatagliata, Antonio (1873), Annali della Repubblica di Genova ­dall’anno
1581 a­ ll’anno 1607, Genova, Canepa.
Roche Daniel, (2000), A History of Everyday Things, Cambridge, Cambridge
University Press.
434 LA MÉMOIRE DES RÉVOLTES EN EUROPE À L’ÉPOQUE
­­ MODERNE

Roche, Daniel (2003), Humeurs vagabondes : de la circulation des hommes et de


­l’utilité des voyages, Paris, Fayard.
Roche, Daniel (2011), Les Circulations dans ­l’Europe moderne : xviie-xviiie,
Paris, Fayard.
Rodríguez Pérez, Yolanda (2002), « Los neerlandeses en el teatro de la
primera fase de la guerra de Flandes (1568-1609) », in Ana Crespo Solana,
Manuel Herrero Sánchez (éd.), España y las 17 provincias de los Países
Bajos. Una revisión historiográfica (siglos XVI-XVIII), Córdoba, Universidad
de Córdoba, Tomo 2, p. 811-831.
Rodríguez Pérez, Yolanda (2008), The Dutch Revolt through Spanish Eyes :
Self and Other in Historical and Literary Texts of Golden Age Spain (c. 1548-
1673), Oxford, Peter Lang.
Rodríguez Villa, Antonio (1904), Ambrosio Spínola, primer marqués de los
Balbases. Ensayo biográfico, Madrid.
Roman, Joseph (1890), Documents sur la Réforme et les Guerres de Religion en
Dauphiné, Grenoble, Breynat.
Rose, Craig (1999), England in the 1690s. Revolution, Religion and War, History
of Early Modern England, Oxford, Blackwell.
Rosina, Tito (1962), La c­ ongiura del Catilina genovese, Liguria ispiratrice, Ceccardo
Roccatagliata Ceccardi, Roma, Canesi.
Rospocher Massimo, Salzberg Rosa (2010), « El vulgo zanza : spazi, pubblici,
voci a Venezia durante le Guerre ­d’Italia », Storica, 48, p. 83-120.
Ross, Lia (2009), « Anger in the City. Who was in Charge of the Paris
Cabochien Revolt in 1413 ? », in Albrecht Classen (éd.), Urban Space in
the Middle Ages and the Early Modern Age, Berlin, De Gruyter, p. 433-462.
Rovito, Pier Luigi (1986), « La rivoluzione costituzionale di Napoli (1647-
1648) », Rivista Storica Italiana, 98 (2), p. 367-462.
Rubini, Dennis (1967), Court and Country, 1688-1702, London, Rupert
Hart-Davis.
Rubinstein, Nicolai (1971), Il governo di Firenze sotto i Medici : 1434-1494,
Firenze, La nuova Italia.
Rudé, George (1962), Wilkes and Liberty. A Social Study of 1763 to 1774, Oxford,
Oxford University Press.
Ruiz Ibáñez, José Javier (2000), « Théories et pratiques de la souveraineté
dans la Monarchie hispanique : un c­ onflit de juridictions à Cambrai »,
Annales, 55, 3, p. 623-644.
Ruiz Ibáñez, José Javier, Pérez Tostado, Igor (coord.) (2015), Los exiliados
del rey de España, Madrid, Fondo de Cultura Económica.
Salomé, Karine (2010), ­L’Ouragan homicide : ­l’attentat politique en France au
xixe siècle, Seyssel, Champ Vallon.
Sources et bibliographie 435

Salvi, Costantino (1933), Carlo Emanuele II e la guerra c­ontro Genova d­ ell’anno


1672, Roma, Ufficio storico del ­comando del corpo di stato maggiore.
Salvador Esteban, Emilia (2001), « La Germanía de Valencia : una
aproximación interpretativa », in Francisco Sánchez-Montes González,
Juan Luis Castellano (coord.), Carlos V, europeísmo y universalidad, vol. 2,
p. 537-552.
Sánchez González, R. (2008), « La Historiografía de las Comunidades »,
in M.F. Gómez Vozmediano (coord.), Castilla en llamas. La Mancha
­comunera, Ciudad Real, Almud ediciones, p. 15-32.
Sánchez León, Pablo (2002), « La ­constitución histórica del sujeto ­comunero :
orden absolutista y lucha por la incorporación estamental en las ciudades
de Castilla, 1350-1520 », in Fernando Martínez Gil (coord.), En torno a
las Comunidades de Castilla : actas del Congreso internacional Poder, Conflicto
y Revuelta en la España de Carlos I, Cuenca, Universidad de Castilla-La
Mancha, p. 159-208.
Santoro, Marco (1986), Le secentine napoletane della Biblioteca Nazionale di
Napoli, Roma, Ist. Poligr. e Zecca dello Stato.
Sanz Camañes, Porfirio (2004), « Las relaciones entre el Teatro y la Política en la
creación de imágenes y propaganda sobre Flandes en la España del Barroco »,
in Francisco José Aranda Pérez (coord.), La declinación de la monarquía
hispánica, Cuenca, Universidad de Castilla La Mancha, vol. 1, p. 957-989.
Savelli, Rodolfo (1980), « La pubblicistica politica genovese durante le guerre
civili del 1575 », Atti della Società Ligure di Storia Patria, XX, II.
Savelli, Rodolfo (1981), La Repubblica oligarchica. Legislazione, istituzioni e ceti
a Genova nel Cinquecento, Milano, Giuffrè.
Saviane, Renato (1987), « Egmont, ein politischer Held », Goethe Jahrbuch
104, p. 47-71.
Sawyer, Andrew (2010), « Medium and message. Political prints in the
Dutch Republic, 1568-1632 », in Judith Pollamnn, Andrew Spicer (éd.),
Public opinion and changing identities in the Early Modern Netherlands. Essays
in honour of Alastair Duke, Leiden, Brill, p. 163-187.
Sbriccoli, Mario (1974), Crimen laesae maiestatis. Il problema del reato politico
alle soglie della scienza penalistica moderna, Milano, Giuffré.
Schaff, Adam (1974), Historia y verdad (Ensayo sobre la objetividad del ­conocimiento
histórico), México, Grijalbo [orig. 1970].
Schaub, Jean-Frédéric (2000), « Révolutions sans révolutionnaires ? Acteurs
ordinaires et crises politiques sous ­l’Ancien Régime (note critique) »,
Annales, 55, 3, p. 645-653.
Schaub, Jean-Frédéric (2004), La Francia española. Las raíces hispanas del
absolutismo francés, Madrid, Marcial Pons.
436 LA MÉMOIRE DES RÉVOLTES EN EUROPE À L’ÉPOQUE
­­ MODERNE

Schmitt, Jean-Claude (1979), Le Saint Lévrier. Guinefort, guérisseur d­ ’enfants


depuis le xiiie siècle, Paris, Flammarion.
Schmitt, Jean-Claude (1994), Les Revenants, les vivants et les morts dans la société
médiévale, Paris, Gallimard, « Bibliothèque des Histoires ».
Schoenaers, Dirk (2012), « The Middle Dutch Translation of F ­ roissart’s
Chronicle (c. 1450) : Historiography in the Vernacular and the Ruling
Elite of Holland », Dutch Crossing, 36, p. 98-113.
Schochet, Gordon J. (1996), « The Act of Toleration and the Failure of
Comprehension : Persecution, Nonconformity, and Religious Indifference »,
in Dale Hoak, Mordechai Feingold (éd.), The World of William and
Mary. Anglo-Dutch Perspectives on the Revolution of 1688-1689, Stanford/
Cal., Stanford University Press, p. 165-187.
Schulin, Ernst (1995), « Schillers Interesse an Aufstandsgeschichte », in
Otto Dann et al. (dir.), Schiller als Historiker, Stuttgart, Weimar, Metzler,
p. 137-155.
Schwoerer, Lois G. (1981), The Declaration of Rights, 1689, Baltimore, Johns
Hopkins University Press.
Schwoerer, Lois G. (1990), « Celebrating the Glorious Revolution, 1689-
1989 », Albion : A Quarterly Journal Concerned with British Studies, vol. 22,
p. 1-20.
Schwoerer, Lois G. (1992), « Introduction », in Id. (éd.), The Revolution
of 1688-1689. Changing Perspectives, Cambridge, Cambridge University
Press, p. 1-20.
Sciacca, Enzo (2005), Principati e repubbliche. Machiavelli, le forme politiche
e il pensiero francese del Cinquecento, Florencia, Centro Editoriale Toscano.
Seco Serrano, Carlos, « estudio introductorio », in Prudencio de Sandoval,
Historia de la vida y hechos del emperador Carlos V, Madrid, Atlas, 1955-1956.
Sharp, Andrew (éd.) (1998) The English Levellers, Cambridge, Cambridge
University Press.
Sharpe, Kevin (2000), « ‘So hard a text ?’ : Images of Charles I, 1612-1700 »,
The Historical Journal, vol. 43, p. 383-405.
Sharpe, Kevin (2013), Rebranding Rule. The Restoration and Revolution Monarchy,
1660-1714, New Haven / London, Yale University Press.
Shepard, Alexandra (2015), Accounting for Oneself : Worth, Status and the Social
Order in Early Modern England, Oxford, Oxford University Press.
Skinner, Quentin (2009), Les Fondements de la pensée politique moderne, Paris,
Albin Michel, « Bibliothèque de ­l’évolution de ­l’humanité ».
Skinner, Quentin (2001), Machiavel, Paris, Éditions du Seuil, « Points essais ».
Skinner, Quentin, Van Gelderen, Martin (éd.) (2000), Republicanism : a
shared European heritage, Cambridge, Cambridge University Press.
Sources et bibliographie 437

Smyth, Adam (2011), Autobiography in Early Modern England, Cambridge,


Cambridge University Press.
Soen, Violet (2009), « Estrategias tempranas de pacificación de los Países
Bajos (1570-1598) », in Bernardo J. García García (dir.), Tiempo de
paces. La Pax Hispánica y la Tregua de los Doce Años (1609-2009), Madrid,
Fundación Carlos de Amberes / Sociedad Estatal de Conmemoraciones
Culturales, p. 61-75.
Sofia, Francesca (dir.) (2001), Sismondi e la civiltà toscana, Firenze, Olscki.
Sokal, Alan, Bricmont, Jean (1999), Imposturas intelectuales, Barcelona,
Paidós [orig. 1997].
Solano, Fernando (1986), « La escuela de Jerónimo Zurita », in Jerónimo Zurita.
Su época y su escuela, Zaragoza, Institución « Fernando el Católico », p. 23-53.
Soll, Jacob (2014), The Reckoning : Financial Accountability and the Making and
Breaking of Nations, London.
Scott, Jonathan, (2000), E ­ ngland’s Troubles : Seventeenth Century English Political
Instability in European Context, Cambridge, Cambridge University Press.
Sottocasa, Valérie (2002), « La Révolution, nouvel épisode des guerres de
religion ? Le modèle cévenol », in Patrick Cabanel, Anne-Marie Granet
et Jean Guibal (dir.), Montagnes, Méditerranée, Mémoires. Mélanges offerts à
Philippe Joutard, Grenoble-Aix-en-Provence, Musée Dauphinois-Publications
de l­’Université de Provence, p. 123-136.
Sottocasa, Valérie (2004), Mémoires affrontées. Protestants et catholiques face à
la Révolution dans les montagnes du Languedoc, Rennes, Presses universitaires
de Rennes.
Speck, William A. (1970), Tory and Whig. The Struggle in the Constituencies
1701-1715, London, Macmillan.
Spellman, William M. (1993), The Latitudinarians and the Church of England,
1660-1700, Athens/GA, University of Georgia Press.
Steen, Jasper van der (2015), Memory Wars in the Low Countries (1566-1700),
Leiden, Brill.
Stefanutti, Andreina (2006), « Giureconsulti friulani tra giurisdizionalismo
veneziano e tradizione feudale », in Laura Casella, Michael Knapton
(éd.), Saggi di storia friulana, Udine, Forum, p. 69-82.
Stella Nera (Ansaldo, Giovanni) (1933a), « La colonna infame », Raccoglitore
Ligure, IV, II, 20 aprile 1933-XI.
Stella Nera (Ansaldo, Giovanni) (1933b), « Ancora la ­congiura di
G. C. Vachero », Raccoglitore Ligure, VI, II, 20 giugno 1933-XI.
Stella Nera (Ansaldo, Giovanni) (1934), « Da Arciduca… a cioccolataio »,
Il Raccoglitore Ligure, III.
Sterchi, Bernhard (2005), Uber den Umgang mit Lob und Tadel. Normative
438 LA MÉMOIRE DES RÉVOLTES EN EUROPE À L’ÉPOQUE
­­ MODERNE

Adelsliteratur und politische Kommunikation im burgundischen Hofadel, 1430-


1506, Turnhout, Brepols.
Stewart, Laura (2016), Rethinking the Scottish Revolution : Covenanted Scotland,
1637-1651, Oxford, Oxford University Press, p. 229-234.
Stoyle, Mark (2003), « Memories of the Maimed : the testimony of Charles ­I’s
former soldiers, 1660-1730 », History, vol. 88, p. 204-226.
Straka, Gerald (1962), « The Final Phase of the Divine Right Theory in
England, 1688-1702 », The English Historical Review, vol. 77, p. 638-658.
Suárez Varela, Antonio (2007), « Celotismo c­ omunal. La máxima política
del procumún en la revuelta ­comunera », Tiempos Modernos, 15 (2007/1).
Suárez Varela, Antonio (2013), « La mala sedición. Una aproximación al
discurso anticomunero », in István Szászdi León-Borja, María Jesús
Galende Ruíz (coord.), Imperio y Tiranía. La dimensión europea de las
Comunidades de Castilla, Valladolid, Universidad de Valladolid, Fundación
Villalar-Castilla y León, p. 147-176.
Süssmann, Jurij (2000), Geschichtsschreibung oder Roman ? : zur Konstitutionslogik
von Geschichtserzählungen zwischen Schiller und Ranke (1780-1824), Stuttgart,
Franz Steiner Verlag (Frankfurter Historische Abhandlungen Bd. 41).
Tabacco, Giovanni (1973), « Muratori medievista », Rivista storica italiana,
LXXXV, p. 200-216.
Taddei, Ilaria (2001), Fanciulli e giovani : crescere a Firenze nel Rinascimento,
Firenze, Olschki.
Taddei, Ilaria (2004), « Le système politique florentin au xve siècle », in Jean
Boutier, Jean, Sandro Landi, Olivier Rouchon (dir.), Florence et la Toscane,
xive-xixe : les dynamiques ­d’un État italien, Rennes, PUR, p. 421-439.
Taddei, Ilaria (2013), « Florence au xve siècle, “Une nouvelle Athènes” sur
­l’Arno », in Marie-Claire Ferries, Maria Paola Castiglioni, Françoise
Letoublon (dir.), Forgerons, élites et voyageurs ­d’Homère à nos jours. Hommages
en mémoire d­ ’Isabelle Ratinaud-Lachkar, Grenoble, PUG, p. 341-362.
Tamburlini, Francesca, Vecchiet, Romano (éd.) (2004), Vincenzo Joppi 1824-
1900, Atti del Convegno di Studi, Udine 30 novembre 2000, Udine, Forum.
te Brake, William (1993), A plague of insurrection. Popular Politics and Peasant
Revolt in Flanders, 1323-1328, Philadelphia, University of Pennsylvania Press.
ter Braake, Serge (2009), « Parties and factions in the late middle ages : the
case of the Hoeken and Kabeljauwen in The Hague (1483-1515) », Journal
of Medieval History, 35, p. 97-111.
Thofner, Margit (2007), A c­ommon art : Urban ceremonial in Antwerp and
Brussels during and after the Dutch Revolt, Leiden, Brill.
Thomas, Antoine (1914), « Dans les jardins d­ ’Arpaillargues, en 1397. Dernier
écho de la Touchinerie du Bas Languedoc », Annales du Midi, p. 232-241.
Sources et bibliographie 439

Thomas, Catherine (2008), « Les ambassades flamandes dans les cours


européennes (1598-1621) : une reconnaissance de souveraineté ? Le cas des
négociations du traité de Londres de 1604 », Revue du Nord, 90, p. 687-700.
Thomas, Werner (2011), « Jerónimo Gracián de la Madre de Dios, la corte de
Bruselas y la política religiosa en los Países Bajos meridionales (1609-1614) »,
in René Vermeir, Maurits Ebbe, Raymond Fagel (éd.), Agentes e identidades
en movimiento. España y los Países Bajos (siglos XVI-XVII), Madrid, Sílex.
Thompson, Andrew C. (2006), Britain, Hanover and the Protestant Interest,
1688-1756, Studies in Early Modern Cultural, Political and Social History,
Woodbridge, Boydell Press.
Thornton, Tim (2006), Prophecy, Politics and the People in Early Modern
England, Woodbridge, Boydell Press.
Tollebeek, Jo et al. (2008), België, een parcours van herinnering, Amsterdam,
Bert Bakker.
Topolski, Jerzy (1997), « La verdad posmoderna en la historiografía », in
Carlos Miguel Ortiz Sarmiento, Bernardo Tovar Zambrano (éd.),
Pensar el pasado, Santafé de Bogotá, Universidad Nacional de Colombia /
Archivo General de la Nación, p. 171-187.
Torres Sanz, David (2013), « Las Comunidades de Castilla en la opinión de los
­contemporáneos », in István Szászdi León-Borja, María Jesús Galende
Ruíz (coord.), Imperio y Tiranía. La dimensión europea de las Comunidades
de Castilla, Valladolid, Universidad de Valladolid, Fundación Villalar-
Castilla y León, p. 17-34.
Traverso, Enzo (2005), Le Passé, mode ­d’emploi : histoire, mémoire, politique,
Paris, La Fabrique.
Trebbi, Giuseppe (1998), Il Friuli dal 1420 al 1797. La storia politica e sociale,
Udine, Casamassima.
Trevor-Roper, Hugh R. (1962), Archbishop Laud 1573-1645, London,
Macmillan.
Trio, Paul (2010), « Moordende c­ oncurrentie op de memoriemarkt. Een eerste
verkenning van het fenomeen jaargetijde in de Lage Landen tijdens de
late middeleeuwen (circa 1250 tot 1550) », in Jeroen Deploige et al. (éd.),
Herinnering in geschrift en praktijk in religieuze gemeenschappen uit de Lage
Landen, 1000-1500, Brussels, KVAB, p. 141-155.
Turchetti, Mario (2013), Tyrannie et tyrannicide de ­l’Antiquité à nos jours,
Paris, Classiques Garnier.
Valderas, Alejandro (2000), Bibliografía histórica leonesa : Juan de Ferreras
García (1652/1735), Universidad de León.
Valladares, Rafael (1998), La rebelión de Portugal. Guerra, c­ onflicto y poderes en
la Monarquía Hispánica (1640-1680), Valladolid, Junta de Castilla y León.
440 LA MÉMOIRE DES RÉVOLTES EN EUROPE À L’ÉPOQUE
­­ MODERNE

Valladares, Rafael (2000), « Heredero de quién. Luis XIV y el legado de


Felipe II », in Alfredo Alvar Ezquerra (coord.), Imágenes históricas de
Felipe II, Alcalá de Henares, Centro de Estudios Cervantinos.
Vallance, Edward (2006), The Glorious Revolution. 1688 – B ­ ritain’s Fight for
Liberty, London, Little, Brown Book Group.
Vallerani, Massimo (2004), « Il c­ omune c­ ome mito politico. Immagini e
modelli tra Otto e Novecento », in Enrico Castelnuovo, Giuseppe Sergi
(dir.), Arti e storia nel Medioevo, t. IV, Il Medioevo al passato e al presente,
Torino, Einaudi.
Vallès Borràs, Vicente (2000), « La Germanía (1519-1522). Un movimiento
social en la Valencia del Renacimiento », in Conflictos y represiones en el
Antiguo Régimen, Valencia, Universitat de Valencia.
Van der Poel, Diewke, et al. (2004), Het Antwerps Liedboek, Tielt, Lannoo.
Van Bruaene, Anne-Laure (1998), De Gentse Memorieboeken als spiegel van
stedelijk historisch bewustzijn, 14de tot 16de eeuw, Ghent, MGOG.
Van Gent, Michel (1994), Pertijelike saken. Hoeken en Kabeljauwen in het
Bourgondisch-Oostenrijkse tijdperk, The Hague, SHHR.
Van Herwaarden, Jan (1981), « The War in the Low Countries », in John
Palmer (éd.), Froissart : Historian, Woodbridge, Boydell and Brewer, p. 101-117.
Varanini, Gian Maria (1993), « Enrico da Egna », Dizionario biografico degli
Italiani, Milano, Treccani, vol. 42, p. 360-363.
Venturi, Franco (1976), Settecento Riformatore, II la ­chiesa e la repubblica dentro
i loro limiti, Torino, Einaudi.
Vermeir, René (2009), « Je ­t’aime, moi non plus. La nobleza flamenca y
España en los siglos XVI-XVII », in Bartolomé Yun Casalilla (éd.), Las
redes del Imperio. Élites sociales en la articulación de la Monarquía Hispánica,
1492-1714, Madrid, Marcial Pons, p. 313-337.
Veyne, Paul (1972), Cómo se escribe la historia. Ensayo de epistemología, Madrid,
Fragua [orig. 1971].
Viaene, Antoon (1958), « Mijn here van Lelidam. De held van de vreselijke
woendag te Brugge », Biekorf, 59, p. 225-235.
Villard, Renaud (2007), « La queue de ­l’âne : dérision du politique et violence
en Italie dans la seconde moitié du xve siècle », in Élisabeth Crouzet-
Pavan, Jacques Verger (dir.), La Dérision au Moyen Âge : de la pratique
sociale au rituel politique, Paris, PUPS, p. 205-224.
Villard, Renaud (2008), Du bien ­commun au mal nécessaire : tyrannies, assassinats
politiques et souveraineté en Italie vers 1470-vers 1600, Rome, École Française
de Rome.
Villari, Rosario (2010), Politica barocca. Inquietudini, mutamento e prudenza,
Laterza, Roma – Bari.
Sources et bibliographie 441

Villari, Rosario (2012), Un sogno di libertà. Napoli nel declino di un impero,


1585-1648, Milano, Mondadori.
Viñaza, Conde de la [Cipriano Muñoz y Manzano] (1904), Los Cronistas de
Aragón, Madrid, Imprenta Hijos de M. G. Hernández [éd. facs., 1986].
Visceglia, Maria Antonietta (1998), Identità sociali. La nobiltà napoletana nella
prima età moderna, Milano, Unicopli.
Vismara, Paola (2007-2008), « Érudition et c­ ulture en Italie au tournant des
xviie et xviiie siècles : Lodovico Antonio Muratori », Annuaire de l­ ’EPHE,
SHP, 140e année, p. 326-332.
Vitale, Vito (1955), Breviario della storia di Genova. Lineamenti storici ed
orientamenti bibliografici, Genova, Società ligure di storia patria.
Vollmer, Hendrik (2013), The Sociology of Disruption, Disaster and Social
Change, Cambridge, Cambridge University Press.
Von Lobstein, Franz (1973), Settecento calabrese ed altri scritti, Napoli, Fausto
Fiorentino.
Von Ostenfeld-Suske, Kira (2012), « Writing Official History in Spain :
History and Politics, c. 1474-1600 », in The Oxford History of Official Writing,
1400-1800, vol. 3, Oxford, Oxford University Press, p. 428-448.
Vovelle, Michel (1984), « La Marseillaise », in Pierre Nora (dir.), Les Lieux
de mémoire, t. I : La République, Paris, Gallimard, p. 85-136.
Wachtel, Nathan (1971), La Vision des vaincus. Les Indiens du Pérou devant la
Conquête espagnole 1530-1570, Paris, Gallimard.
Walsh, John, Taylor, Stephen (1995), « Introduction. The Church and
Anglicanism in the “long” Eighteenth Century », in John Walsh, Colin
Haydon, Stephen Taylor (éd.), The Church of England, c. 1689 – c. 1833.
From Toleration to Tractarianism, Cambridge, Cambridge University Press,
p. 1-64.
Walsham, Alexandra (2012), « History, Memory, and the English Reformation »,
The Historical Journal, vol. 55, issue 04, p. 899-938.
Walter, François (2004), Les Figures paysagères de la nation : territoire et paysage
en Europe, 16e-20e siècle, Paris, éd. de l­ ’EHESS, « Civilisations et sociétés ».
Walter, John (2016), Covenanted Citizens, Oxford, Oxford University Press.
Watts, John (2007), « Les ­communes : le sens changeant ­d’un mot au cours
du xve siècle », in Vincent Challet et al., La Société politique à la fin du
xve siècle dans les royaumes ibériques et en Europe, Paris-Valladolid, Publications
de la Sorbonne / Presses de l­’Université de Valladolid, p. 197-216.
Weckerlin, Jean-Baptiste (1903), Chansons populaires du pays de France, vol. 1,
Paris, Heugel.
Wheeler, James Scott (1999), The Making of a World Power : War and the
Military Revolution in Seventeenth-Century England, Stroud, Sutton Publishing.
442 LA MÉMOIRE DES RÉVOLTES EN EUROPE À L’ÉPOQUE
­­ MODERNE

White, Hayden (1973), Metahistory : The Historical Imagination in Nineteenth-


Century Europe, Baltimore, The Johns Hopkins University Press.
White, Hayden (2001), Metahistoria. La imaginación histórica en la Europa del
siglo XIX, México, Fondo de Cultura Económica [orig. 1973].
White, Hayden (2003), El texto histórico c­omo artefacto literario y otros escritos,
Barcelona, Paidós / Instituto de Ciencias de la Educación de la Universidad
de Barcelona [orig. 1978].
Whittle Jane and Griffiths Elizabeth, (2012), Consumption and Gender in
the Early Seventeenth Century. The World of Alice le Strange, Oxford, Oxford
University Press.
Whyte, Nicolas (2007), « Landscape, memory and custom : parish identities
c. 1550-1700 », Social History, 32.
Whyte, Nicola (2009), Inhabiting the Landscape. Place, Custom and Memory,
1500-1800, Oxford, Windgather Press.
Williams, Glanmor (1979), Religion, Language and Nationality in Wales, Cardiff,
University of Wales Press.
Wilson, Kathleen (1989), « Inventing Revolution : 1688 and Eighteenth-
Century Popular Politics », The Journal of British Studies, vol. 28, p. 349-386.
Wilson, Kathleen (1992), « A Dissident Legacy : Eighteenth-Century Popular
Politics and the Glorious Revolution », in James R. Jones (éd.), Liberty
Secured ? Britain before and after 1688, The Making of Modern Freedom,
Stanford/Cal., Stanford University Press, p. 299-334.
Wilson, Kathleen (1998), The Sense of the People. Politics, Culture and Imperialism in
England, 1715-1785, Past and Present Publications, Cambridge, Cambridge
University Press, p. 206-236.
Wilson, Peter (2013), « Atrocities in the Thirty Years War », in Micheal
­O’Siochru and Jane Ohlmeyer (eds.), Ireland, 1641. Contexts and Reactions,
Manchester, Manchester University Press, p. 153-175.
Wood, Andy (2007), The 1549 Rebellions and the Making of Early Modern
England, New York, Cambridge University Press.
Wood, Andy (2013), The Memory of the People. Custom and Popular Senses of the
Past in Early Modern England, Cambridge, Cambridge University Press.
Wood, Andy (2014), « ‘Some banglyng about the c­ ustomes’ : popular memory
and the experience of defeat in a Sussex village, 1549-1640 », Rural History,
25, p. 1-14.
Woolf, Daniel (2003), The Social Circulation of the Past : English Historical
Culture, 1500-1730, Oxford, Oxford University Press.
Woolrych, Austin (2002), Britain in Revolution 1625-1660, Oxford, Oxford
University Press.
Wyffels, Carlos (1966), « Nieuwe gegevens betreffende een XIIIde-eeuwse
Sources et bibliographie 443

“democratische” stedelijke opstand : de Brugse Moerlemaye (1280-1281) »,


Bulletin de la Commission Royale d­ ’Histoire, 132, p. 37-142.
Xhayet, Geneviève (1994), « Lignages et ­conscience lignagère au pays de
Liège pendant la guerre des Awans et des Waroux (ca. 1295-1335) », in
Actes du 4e ­congrès des Cercles francophones d­ ’Histoire et d­ ’Archéologie, Liège,
Région Wallonne, vol. 2, p. 319-333.
Xhayet, Geneviève (1997), Réseaux de pouvoir et solidarités de parti à Liège au
moyen âge (1250-1468), Genève, Droz.
Zablia, Marino (2013), « Tipologie del tiranno nella cronastica bassomedievale »,
in Andrea Zorzi (dir.), Tiranni e tirannide nel Trecento italiano, Roma,
Viella, p. 171-185.
Zancarini, Jean-Claude (éd.) (1999), Le Droit de résistance (xiie-xxe siècle),
Fontenay Saint-Cloud, ENS Éditions.
Zeller, Berthold (­comp.) (1888), Charles VIII, la guerre folle, le mariage breton,
1485-1491, Paris, Hachette.
Zorzi, Andrea (1994a), « « Ius erat in armis », faide e ­conflitti tra pratiche
sociali e pratiche di governo », in Giorgio Chitollini, Anthony Molho,
Pierangelo Schiera (dir.), Origini dello Stato : processi di formazione statale in
Italia fra medioevo ed età moderna, Bologna, Il Mulino, p. 609-629.
Zorzi, Andrea (1994b), « Rituali e cerimoniali penali nelle città italiane (xiiie-
xvie) », in Jacques Chiffoleau, Agostino Paravicini Bagliani, Lauro
Martines (dir.), Riti e rituali nei società medievali, Spoleto, Centro italiano
di studi ­sull’alto Medioevo.
Zorzi, Andrea (2009), « I ­conflitti ­nell’Italia ­comunale. Riflessioni sullo
stato degli studi e sulle prospettive di ricerca », in Id. (dir.), Conflitti, paci
e vendette n­ ell’Italia ­comunale, Firenze, Firenze University press, p. 7-41.
Zorzi, Andrea (2013), « La questione della tirannide n­ ell’Italia del Trecento »,
in Id. (dir.), Tiranni e tirannide nel Trecento italiano, Roma, Viella, p. 11-36.
Zuilen, Vincent van (2005), « The politics of dividing the nation ? News
Pamphlets as a Vehicle of Ideology and National Consciousness in the
Habsburgs Netherlands (1585-1609) », in Joop W. Koopmans, News and
Politics in Early Modern Europe (1500-1800), Leuven-París-Dudley, MA,
Peeters, p. 61-78.
INDEX DES NOMS PROPRES
RÉSUMÉS

Jesús Gascón Pérez, « “La verdad sencilla y desnuda de los sucesos de


Aragón”. Memoria, olvido y proyecto político en las obras sobre la rebelión
de 1591 ­contra Felipe II »

Les Aragonais qui ont écrit sur la rébellion de 1591 prétendent, c­ omme
Lupercio de Argensola, exposer « la vérité simple et nue des événements
­d’Aragon ». Cependant, dans leurs discours est perceptible un processus
sélectif de mémoire et d­ ’oubli, visant à appuyer un projet politique c­ oncret.
Ce travail explore ce processus, influencé par les limites du métier d­ ’historien,
par la situation difficile après le ­conflit et par le changement de paradigme
historiographique enregistré à l­’époque.

Anne-Lise Richard, « Entre interprétations et omissions. Les Germanías de


Valence dans quelques textes historiographiques espagnols de l­’époque
moderne au xixe siècle »

Cette ­contribution ­confronte plusieurs interprétations des Germanías de


Valence, dans des récits castillans et valenciens du xvie au xixe siècle, en
mettant en valeur une évolution ­concernant ­l’identification des responsables
et de la nature de ­l’événement. ­D’abord attribuée à un peuple violent dressé
­contre ­l’autorité royale, la révolte est progressivement perçue ­comme un
moyen de ­s’affranchir face à une noblesse toute-puissante, le peuple devenant
le porte-parole de cette volonté ­d’indépendance.

Alexandra Merle, « Interprétations et échos des Comunidades de Castille de


­l’historiographie à la réflexion politique en Espagne à ­l’époque moderne »

Cette c­ ontribution met en évidence la corrélation entre historiographie


et littérature politique à propos des Comunidades de Castille : tandis que les
interprétations du soulèvement dans les chroniques espagnoles de ­l’époque
moderne occultent un pan des aspirations des révoltés et les principes théoriques
448 LA MÉMOIRE DES RÉVOLTES EN EUROPE À L’ÉPOQUE
­­ MODERNE

présents dans leurs revendications, la place de cet événement dans la réflexion


politique sur les révoltes est particulièrement discrète et souvent limitée à des
emplois ­convenus, j­usqu’à l­’essor du libéralisme.

Marion Bertholet, « Écritures, mémoires et usages politiques ­d’une révolution


manquée. La ­conjuration des Pazzi et la révolte des Florentins (1478) dans
­l’historiographie des Lumières à Sismondi »

Au xviiie siècle, le c­ omplot des Pazzi était utilisé par les auteurs des
Lumières pour dénoncer la violence d­ ’une époque, durant laquelle, des princes
aussi légitimes que les Médicis pouvaient être la proie des plus odieux calculs
politiques. Sismondi, au début du xixe siècle, introduit une nouvelle lecture :
celle du tyrannicide. Les Pazzi souhaitaient rendre la liberté à leur cité asservie
politiquement et redonner à leurs c­ oncitoyens les moyens ­d’agir pour la res
publica.

Éric Leroy du Cardonnoy, « Clio, une muse mineure ? ou ­l’Histoire du


soulèvement des Pays-Bas de Friedrich Schiller »

Au cours de la brève période (1788-1790) où Schiller se c­ onsacre à la


discipline historique, il met en place une réflexion sur la liberté et le despo-
tisme. L­ ’esthétisation de l­ ’histoire est selon lui nécessaire, car la c­ onnaissance
scientifique et le beau ou ­l’art ont des affinités structurelles, ­conférant à
­l’histoire son caractère éducatif. ­L’Histoire du soulèvement témoigne ­d’une mise
en forme possible de ­l’histoire et c­ onstitue un maillon dans ­l’évolution de
­l’historiographie en Europe aux xviiie et xixe siècles.

Laura Casella, « Mémoire de la révolte et mémoires de famille. La « crudel


zobia grassa » (1511) dans les livres de famille du xvie siècle : brève histoire
des manuscrits et des éditions »

Cette c­ ontribution traite de la transmission de la mémoire d­ ’une des plus


sanglantes révoltes italiennes du xvie siècle, la « crudel zobia grassa », survenue
à Udine le 27 février 1511. De nombreux écrits qui rapportent cet épisode
dans les décennies suivantes font partie des livres de familles rédigés par
les victimes de la violence. Ces sources sont en même temps des narrations
historiques publiques et privées, entremêlant la mémoire familiale et la
chronique politique.
Résumés 449

Ann Hughes, « Taking Account and Making Memories in the English Civil
War »

­ ’étude des archives ­comptables c­ onstituées à la suite des destructions


L
occasionnées par la guerre civile anglaise permet de restituer la manière dont
une partie significative de la population a interprété et préservé la mémoire
des années 1640. Dans le cadre d­ ’une procédure étatique destinée à dédom-
mager les victimes des affrontements, les ­communautés locales ­s’impliquèrent
activement dans la production ­d’un récit détaillant les préjudices subis, tant
matériels que psychologiques.

Stéphane Jettot, « De la dissimulation à la ­commercialisation. Les mémoires


familiales de la première révolution anglaise (1660-1740) »

À travers l­’exemple du souvenir de la révolution anglaise de 1640 est


analysé le passage progressif ­d’une mémoire c­ onfinée dans le for privé des
familles à des opérations de publication sélective. Dans un premier temps,
les ­contemporains se livrent à une censure mutuelle de leurs souvenirs. Puis
le renforcement de la métropole londonienne ­comme le principal centre
politique et ­culturel c­ onduit à la publication de ­compilation de dictionnaires
généalogiques facilitant l­’expression de mémoires antagonistes. »

Vincent Challet, « Entre oubli et résurgence. Le souvenir des révoltes


paysannes dans l­’Occident médiéval »

La mémoire des rébellions paysannes, ordinairement souterraine, ­n’apparaît


que réinvestie par un nouvel épisode de ­contestation réactivant une gamme de
gestes, de mots et ­d’attitudes. Les ­communautés villageoises fonctionnaient
­comme autant de microsociétés mémorielles entrecroisant dans leurs souve-
nirs le rappel de vastes rébellions et celui de séditions plus localisées dans
un entrelacs de fragments mémoriels et de ­conduites pragmatiques. Elles se
forgeaient ainsi une « mémoire insurgée », élément essentiel de leur identité.

Jan Dumolyn et Jelle Haemers, « “We Will Ask for a New Artevelde”. Names,
Sites, and the Memory of Revolt in the Late Medieval Low Countries »

Après les c­ onflits urbains survenus dans les Pays-Bas à la fin du Moyen Âge,
les autorités, les princes tout ­comme leurs sujets et les révoltés façonnèrent divers
450 LA MÉMOIRE DES RÉVOLTES EN EUROPE À L’ÉPOQUE
­­ MODERNE

récits autour des défaites ou des victoires. Ce chapitre montre ­l’importance de


­l’évocation des noms (ceux des principales révoltes urbaines, de leurs meneurs
ou des factions), et celle des espaces où se déroulèrent les ­conflits, instruments
privilégiés de ces politiques mémorielles.

Éva Guillorel, « La mémoire ­comme moteur de la révolte. Réflexions autour


du rôle subversif des traditions orales dans ­l’Europe moderne »

En quoi la transmission de traditions orales évoquant le souvenir de révoltes


passées peut-elle influencer ­l’irruption ou le déroulement de soulèvements
ultérieurs ? En quoi la mémoire orale peut-elle être un acteur et parfois même
un des moteurs de la révolte, en se faisant ­l’écho ­d’événements subversifs
passés ? Cette question est abordée à travers des exemples européens basés
sur des traditions diverses – chansons, légendes et prophéties – entre la fin
du Moyen Âge et la Révolution française.

José Luis Egío, « “Restaurar el reino de Francia en su antiguo esplendor”.


Percepción y fundamentación histórica en la sublevación de los malcontents
(1574-1576) »

­L’usage de ­l’histoire fut fondamental dans la justification du soulèvement


des « Malcontents ». Dans les écrits analysés (tels que ceux de Gentillet, qui
par ailleurs attaque les ­compétences de Machiavel ­comme « polyhistor ») le
soulèvement est c­ omparé à la Ligue du Bien public (1465) ou à la Guerre folle
(1485-1488), tandis que les révoltes populaires des Maillotins et des Chaperons
blancs (1380-1383) sont évoquées pour souligner par ­contraste les objectifs
« restaurateurs » des révoltés.

Alberto Rodríguez Martínez, « Negociación, sublevación y c­ oncierto.


Memoria e imagen de la revuelta de Flandes en los Países Bajos meridionales
durante la negociación de la Tregua de los Doce Años (1598-1609) »

Après 1598, le rapprochement diplomatique initié par les archiducs avec les
Provinces Unies fut suivi de près en Espagne, et au Conseil d­ ’État ­s’exprimèrent
des préoccupations au sujet des c­ ontacts entre les sujets catholiques des Pays-Bas
des Habsbourg et les rebelles néerlandais. La mémoire des anciens épisodes de
révolte et la peur ­d’un nouveau soulèvement général aux Pays-Bas ont toujours
été à la base de la réticence des c­ onseillers devant la négociation avec l­ ’ennemi.
Résumés 451

Manuel Herrero Sánchez, « La memoria de la revuelta de Flandes en la toma de


decisiones y en la acción política de la Monarquía Hispánica entre 1630 y 1700 »

Le but de ce chapitre est de souligner l­ ’impact c­ onsidérable que la mémoire


de la révolte des Pays-Bas a eu sur la pratique quotidienne du gouvernement
dans la monarchie hispanique tout au long du xviie siècle. Les événements
révolutionnaires renforcèrent le maintien du respect des privilèges locaux dans
le reste des domaines placés sous la juridiction du roi catholique et agirent
­comme un facteur déterminant pour maintenir le modèle de gouvernement
polycentrique de cette structure impériale.

Diego Pizzorno, « The Ever-impeded Revolt. The Seventeenth-century


Genoese Conspiracies and their Memory »

Le coup d­ ’État est un fil rouge dans l­’histoire de Gênes. Le dernier coup
réussi, celui de Doria en 1528, a donné à la République une structure qui,
malgré ­l’insurrection de Fieschi (1547) et une guerre civile (1575-1576), a
trouvé sa stabilité. Cet essai ­contient deux exemples antithétiques de mani-
pulation effectuée au xviie siècle par ­l’oligarchie génoise sur la mémoire des
épisodes insurrectionnels : le coup de Leveratto, couvert par l­’oubli, et celui
de Vachero, voué à la damnatio memoriæ.

Domenico Cecere, « History in the service of order. The memory of popular


revolts in the public domain and in judicial practices (Kingdom of Naples,
17th – 18th Century) »

Après ­l’étouffement de la révolte antiespagnole qui ravagea ­l’Italie du Sud


en 1647-1648, le spectre de Masaniello c­ ontinua de hanter la c­ onscience des
groupes privilégiés. À travers ­l’examen des récits des émeutes et des traités de
certains juristes, l­’article analyse les raisons pour lesquelles les protestations
populaires survenues dans le Royaume de Naples ­jusqu’à la fin du xviiie siècle
furent souvent perçues, en référence à la révolte de Masaniello, ­comme des
éclats de fureur plébéienne.

Ulrich Niggemann, « Contested Memories. The Revolutions of the Past in


Eighteenth-Century Britain »

Ce chapitre analyse ­l’utilisation de la mémoire des deux révolutions


anglaises (1640 et 1688-1689) dans le ­contexte des affrontements politiques
452 LA MÉMOIRE DES RÉVOLTES EN EUROPE À L’ÉPOQUE
­­ MODERNE

et religieux du xviiie siècle. Les partis whig et tory ont mobilisé les souvenirs
de ces révolutions pour se discréditer mutuellement auprès des monarques.
Après 1760, ces oppositions partisanes c­ ommencent à ­s’étioler avec l­ ’émergence
de mouvements réformateurs qui c­ onduisent à la réhabilitation de certains
segments de la révolution de 1640 aux dépens de celle de 1688-1689.
TABLE DES MATIÈRES

A. Merle, S. Jettot et M. Herrero Sánchez


Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7

Première partie
­L’ÉCRITURE DE LA RÉVOLTE
LES USAGES POLITIQUES
DE ­L’HISTORIOGRAPHIE

Jesús Gascón Pérez


“La verdad sencilla y desnuda de los sucesos de Aragón”.
Memoria, olvido y proyecto político
en las obras sobre la rebelión de 1591 ­contra Felipe II . . . . . . . . . 25
Anne-Lise Richard
Entre interprétations et omissions.
Les Germanías de Valence dans quelques textes
historiographiques espagnols de l­’époque moderne
au xixe siècle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 41
Alexandra Merle
Interprétations et échos des Comunidades de Castille
de ­l’historiographie à la réflexion politique
dans ­l’Espagne moderne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 65
454 LA MÉMOIRE DES RÉVOLTES EN EUROPE À L’ÉPOQUE
­­ MODERNE

Marion Bertholet
Écritures, mémoires et usages politiques
­d’une révolution manquée.
La ­conjuration des Pazzi et la révolte des Florentins (1478)
dans ­l’historiographie des Lumières à Sismondi . . . . . . . . . . . . . . 91
Éric Leroy du Cardonnoy
Clio, une muse mineure ?
ou ­l’Histoire du soulèvement des Pays-Bas
de Friedrich Schiller . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 119

Deuxième partie
MÉMOIRES PUBLIQUES,
MÉMOIRES PRIVÉES
LES ARCHIVES FAMILIALES
DE LA RÉVOLTE

Laura Casella
Mémoire de la révolte et mémoires de famille.
La crudel zobia grassa (1511)
dans les livres de famille du xvie siècle :
brève histoire des manuscrits et des éditions . . . . . . . . . . . . . . . 143
Ann Hughes
Taking Account and Making Memories
in the English Civil War . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 171
Stéphane Jettot
De la dissimulation à la c­ ommercialisation.
Les mémoires familiales de la première révolution anglaise
(1660-1740) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 191
Table des matières 455

Troisième partie
ORALITÉS ET TRANSMISSIONS
LES EFFETS SUBVERSIFS
DE LA REMÉMORATION

Vincent Challet
Entre oubli et résurgence.
Le souvenir des révoltes paysannes dans l­’Occident médiéval . . . 215
Jan Dumolyn et Jelle Haemers
“We Will Ask for a New Artevelde”.
Names, Sites, and the Memory of Revolt
in the Late Medieval Low Countries . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 231
Éva Guillorel
La mémoire ­comme moteur de la révolte.
Réflexions autour du rôle subversif
des traditions orales dans ­l’Europe moderne . . . . . . . . . . . . . . . 251
José Luis Egío
“Restaurar el reino de Francia en su antiguo esplendor”.
Percepción y fundamentación histórica
en la sublevación de los malcontents (1574-1576) . . . . . . . . . . . . . 269
456 LA MÉMOIRE DES RÉVOLTES EN EUROPE À L’ÉPOQUE
­­ MODERNE

Quatrième partie
LA MÉMOIRE DE LA RÉVOLTE
DANS L­ ’ACTION POLITIQUE

Alberto Rodríguez Martínez


Negociación, sublevación y ­concierto.
Memoria e imagen de la revuelta de Flandes
en los Países Bajos meridionales durante la negociación
de la Tregua de los Doce Años (1598-1609) . . . . . . . . . . . . . . . . 291
Manuel Herrero Sánchez
La memoria de la revuelta de Flandes
en la toma de decisiones y en la acción política
de la Monarquía Hispánica entre 1621 y 1700 . . . . . . . . . . . . . . 309
Diego Pizzorno
The Ever-impeded Revolt.
The Seventeenth-century Genoese Conspiracies
and their Memory . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 333
Domenico Cecere
History in the service of order.
The memory of popular revolts
in the public domain and in judicial practices
(Kingdom of Naples, 17th-18th century) . . . . . . . . . . . . . . . . . . 351
Ulrich Niggemann
Contested Memories.
The Revolutions of the Past in Eighteenth-Century Britain . . . . 367

Sources et bibliographie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 383


Index des noms propres . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 445
Résumés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 447

Vous aimerez peut-être aussi