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Summary : Launched in 1988, the Bamako Initiative was considered as a policy aimed at
revitalizing the primary health care strategy while strengthening equity in access to health
care. A decade later, two research initiatives conducted in Mali and Uganda, and later in
Burkina Faso, concluded that a) this policy did very little to improve or increase access to
(1) Université Laval, département de médecine sociale et préventive, Cité Universitaire, Québec, Canada.
health care among the most deprived and excluded vulnerable population groups, b) this
policy only served to marginalize certain population groups already disenfranchised due
to the emphasis on financial sustainability and viability of health care organisations, and c)
the exemption mechanisms for alleviating the burden of payment and financial barriers for
the poorest represent a technically feasible solution, while one not socially advocated.
The current state of affairs requires that in order to give impetus to the principles of equity
and the initial goals of the Bamako Initiative, African states should implement incentives,
NGOs should consider planning as a tool for social change and donors need to ensure
investments which are centred upon and prioritise principles of equity.
Processus
d'implantation de l'IB Effet de redistribution
Equité d'accès
Frais aux usagers aux soins
même communauté [21]. Les liens vaient au Mali (Safo en milieu rural,
logiques entre les frais aux usagers et Bamako en milieu urbain) et deux
l’équité forment le modèle théorique autres en Ouganda (Apac en milieu ru-
schématisé par la figure 1 [13]. ral, Kampala en milieu urbain). L’ana-
lyse comparative est intéressante
Les deux recherches ont utilisé la
puisque d’un côté le Mali a officielle-
stratégie de l‘étude de cas descriptive
ment adhéré à l’IB depuis le début, et
[27] puisqu’il s’agissait d’éclairer un
de l’autre, l’Ouganda n’encourage que
processus décisionnel et de répondre
depuis récemment la mise en place de
aux questions types du pourquoi et du
mécanismes de recouvrement des
comment. La rigueur des résultats
coûts sans officiellement adhérer à
provient de la triangulation des outils
l’IB.
et des sources d’évidences établies
par une analyse croisées de plusieurs Au niveau des instruments de col-
cas. lecte de données, il a été utilisé l’ob-
servation directe, six entrevues de
La recherche initiale a retenu le de-
groupes, auprès du personnel de
vis de « cas multiples avec niveaux
santé (2) et des membres de comité
d’analyse imbriqués ». Elle a été réali-
de gestion (4) et 113 entrevues indivi-
sée par une équipe canado-africaine
duelles semi-structurées auprès d’uti-
en association avec des organisations
lisateurs de services (82), de non uti-
non gouvernementales (ONG) (2) parti-
lisateurs (15), du personnel de santé
cipant au programme canadien d’im-
(5), des membres de comité de ges-
munisation internationale (PCII2). Les
tion (2) ou de décideurs (9). Le recru-
projets sélectionnés pour cette re-
tement des utilisateurs de services
cherche devaient, d’une part, faire
s’est fait à la sortie du centre de
partie du programme, et d’autre part,
santé de façon aléatoire, alors que les
disposer d’un volet de recouvrement
personnes n’utilisant pas les services
des coûts. Ensuite, nous voulions
ont été identifiées à l’aide des utilisa-
nous assurer que des sites à la fois ru-
teurs et d’informateurs-clés.
raux et urbains et des établissements
sanitaires à caractère privé et public La recherche centrée sur l’exemp-
pouvaient être retenus tant du côté tion du paiement, rendue nécessaire
francophone qu’anglophone sur le par les résultats de la recherche initia-
continent africain. Deux sites se trou- le, s’est déroulée au Burkina Faso
(2) La coopération avec des ONG est relativement rare dans le domaine de la recherche académique
et cette initiative a été saluée lors de la 8e conférence canadienne de santé internationale, en novembre
2001 à Ottawa.
DOUZE ANS APRÈS L’INITIATIVE DE BAMAKO : CONSTATS ET IMPLICATIONS 41
POLITIQUES POUR L’ÉQUITÉ D’ACCÈS AUX SERVICES DE SANTÉ
DES INDIGENTS AFRICAINS
Recherche
Recherche Mali et Ouganda Burkina Faso
Équité
Phénomènes Recouvrement Processus Effet d’accès aux Équité d’accès
étudiés des coûts d’implantation de redistribution services aux soins
sables des COGES de débloquer des sée en commun accord avec les mem-
sommes afin d’aider les indigents à bres des comités de gestion. Mais
avoir accès aux soins, nous avons ju- précisons immédiatement que ces
gé nécessaire de voir comment évo- médicaments sont donnés gratuite-
luaient les comptes d’exploitation des ment (3) car ils ont été également don-
dépôts de médicaments essentiels nés aux dispensaires. En aucun cas,
génériques (DMEG) entre 1994 et nous avons trouvé de DMEG utilisant
2000. L’étude économique, auprès de son stock renouvelé par le finance-
six DMEG du district, dont la métho- ment communautaire pour donner des
dologie et les résultats détaillés sont MEG gratuitement. En outre, rien n’est
présentés par ailleurs [22], montre systématique et la compassion et l’al-
bien que personne ne connaît réelle- truisme de la part du personnel de
ment l’état des comptes de résultats. santé sont ponctuels et réalisés au
De surcroît, malgré cette méconnais- cas par cas. Concernant la solidarité
sance de la nature des résultats finan- entre les usagers, il ne semble pas que
ciers (pertes ou bénéfices), les mem- cela soit de coutume dans la région.
bres des COGES ont décidé d’aug- Les mutuelles, qui sont une forme de
menter, en moyenne, 2,7 fois plus les solidarité ou à tout le moins l’organisa-
dépenses que les recettes et ce, sans tion du partage des risques entre ses
prendre en compte la baisse de l’utili- adhérents, ne sont en place dans le
sation des services dû à l’implantation district que depuis deux ou trois ans. Il
du paiement des consultations en ad- est clair que l’ampleur de la prise en
dition de celui des médicaments es- charge demeure très faible, et ce, pour
sentiels. Á cette constatation, il faut trois raisons. D’abord à cause du très
ajouter que si l’on s’en tient à la même petit nombre de cotisations qui rend
période de comparaison (94/96 vs très difficile voire impossible la viabi-
99/2000), la trésorerie a augmenté lité financière d’une telle structure. En-
dans des proportions importantes. suite, parce que les risques couverts
sont faibles au regard du montant de
On cherche avant tout à pérenniser la cotisation qui demeure importante
la formation sanitaire car on a tout à (300 F CFA/mois). Enfin, parce que
fait compris que tant l’État que les près de deux ans après la mise en
bailleurs de fonds sont dans une pha- place de ces mutuelles, on n’a pas
se de désengagement. Clairement, noté d’augmentation significative du
comme un sociologue de l’Université recours au service médical.
de Ouagadougou le précisait [20], on
constate une tendance évidente à la Une solution envisagée par certains
thésaurisation chez les gestionnaires est celle de la gratuité pour les plus
communautaires. pauvres. Pour les uns il s’agira d’avoir
des « produits gratuits pour les mal-
Les mécanismes de solidarité heureux » pour les autres, c’est une
exonération qui est à proposer. Dans
À propos des mécanismes en place ce dernier cas, cet infirmier nous ex-
au niveau des CSPS, nous avons relevé plique que cette solution est viable et
la distribution gratuite de certains mé- envisageable : « si nous nous tenons à
dicaments. Cette pratique, dans les ceux que nous avons identifié comme
formations périphériques a été organi- indigents, je pense que notre comité
(3) Nous n’avons pas pu vérifier ces affirmations car aucun système de comptabilisation des dons n’est
en place.
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POLITIQUES POUR L’ÉQUITÉ D’ACCÈS AUX SERVICES DE SANTÉ
DES INDIGENTS AFRICAINS
quand ce n’est pas leurs consulta- fortement les équipes cadres de dis-
tions. Malgré les baisses de consulta- tricts et les membres des COGES à se
tions dans les CSPS ayant mis en pla- préoccuper de l’exclusion permanen-
ce la tarification des actes [22], les te. Le niveau central, même dans un
responsables locaux n’ont pas freiné processus de décentralisation, se doit
leurs dépenses et n’ont pas hésité, de gérer et définir les objectifs straté-
quant il le fallait, à débourser des giques. En adhérant à l’IB, les États
sommes importantes pour le fonction- africains se sont prononcés pour une
nement du centre ou du district : deux plus grande équité [17] et pour des ré-
poids, deux mesures ! Pour prendre en formes prenant en compte les indi-
charge les indigents, il nous faut des gents [19]. Les États doivent organiser
critères et de l’argent. Pour construire des mesures incitatives (principale-
une morgue ou participer au finance- ment fondées sur l’éthique et l’autorité
ment du plan de développement du [5]), résultant de modalités organisa-
district des liquidités sont mobilisées tionnelles, afin d’influencer les déci-
alors que l’on ne sait pas si le DMEG sions des acteurs et d’être le garant
réalise des bénéfices ou des déficits. des valeurs de justice distributive.
Nous avons également montré com-
bien les trésoreries des DMEG de- B - Les agences d’exécutions (ONG,
meurent à un niveau important. OI…), doivent maintenant dépasser les
objectifs purement opérationnels. Ces
Ainsi, cette recherche à Kongoussi organisations sont maintenant deve-
s’appuyant sur les résultats de celle nues pour la plupart très efficaces ; les
du Mali et de l’Ouganda, nous permet hommes et les femmes qui les compo-
d’avancer que les CSPS ont large- sent sont de véritables professionnels.
ment les capacités financières de Les outils de planification de projets
prendre en charge les indigents que la sont au point depuis bien longtemps
communauté aura initialement identi- que ce soit les cadres logiques d’inter-
fiés sans aucun problème. vention créés au début des années 70
ou la méthode de planification par ob-
jectifs (4) de la coopération allemande
Conclusion et implications datant de 1983. Il nous semble que la
politiques logique technicienne et l’obsession de
Si nous revenons maintenant à l’efficacité ont pris le pas sur les va-
notre modèle théorique et à l’objectif leurs qui sous-tendent l’IB. Comme
d’équité qui sous-tend la philosophie nous le disions dans l’exorde de cet
de l’IB, nous pouvons nous question- article, l’IB va bien plus loin que la seu-
ner quant à l’impossible accès aux le gestion des MEG ou la construction
soins pour les indigents. Il nous paraît de nouveaux centres de santé. Il faut
maintenant prioritaire, 12 ans après la revenir à l’essentiel de la planification
mise en œuvre de l’IB, que l’équité re- opérationnelle ; que ce soit la vision de
vienne au devant de la scène et soit Henrik L. Blum abordée dans son ou-
mise au cœur de nos interventions (fi- vrage de référence aujourd’hui vieux
gure 2). de 20 ans : le changement social [3] ;
ou celle de Green dans un autre ouvra-
A - Les États africains doivent user ge célèbre à propos de l’objectif des
de leur pouvoir régalien pour inciter SSP : l’équité [14].
BAILLEURS AGENCES
DE FONDS D’EXECUTIONS
ETATS AFRICAINS
Un processus
Des effets de redistribution
d’implantation de l’IB
des revenus visant une meilleure
qui vise une meilleure
accessibilité des services
disponibilité des services
et une pérennité
Figure 2 : Les implications politiques pour une plus grande équité d’accès aux soins
C - Enfin, les bailleurs de fonds et doivent « mettre l’accent sur les popu-
notamment l’Agence Canadienne de lations les plus démunis […] favoriser
Développement Internationale (ACDI), l’équité [… et] viser un accès universel
devraient se sentir solidaires avec aux services essentiels [1, p. 12] »,
notre positionnement. Bien que l’ACDI nous avons montré l’existence d’un
affirme que ses programmes de santé décalage entre la discussion et les
50 V. RIDDE, J.-E. GIRARD
réalités de terrain. Dans ses finance- d’énoncer des principes, encore faut-il
ments, l’ACDI devrait veiller à ce que les faire respecter et évaluer leur état
ses principes directeurs d’équité d’avancement. Il n’est pas question ici
soient effectivement respectés, « …la de proposer une politique de condi-
réduction de l’inégalité devant la santé tionnement de l’aide, mais plutôt d’at-
relève donc avant tout d’un préalable tirer l’attention des décideurs sur le re-
de nature politique et non d’un simple centrage nécessaire des politiques
choix à caractère technique [11, de financement sur l’équité et la ré-
p. 33] », dit Fassin. Il ne suffit pas duction des inégalités.
REMERCIEMENTS
L’équipe de la recherche initiale était également composée en Ouganda de Narathius Asingwire et de
Achilles Ssewaya, au Mali de Djeneba Diarra Kouyaté et au Québec de Marie-France Allen. Le finan-
cement a été fourni par l’Association canadienne de santé publique (ACSP), à travers monsieur Jim
Chauvin, et les projets de terrain étaient mis en œuvre au Mali par « l’Entraide universitaire mondiale du
Canada » (EUMC) et en Ouganda par le « Canadian Physicians for Aid Relief » (CPAR). La recherche sur
l’exemption a bénéficié du soutien financier du Centre de Coopération Internationale en Santé et Déve-
loppement (CCISD Inc.) et du DMSP de l’Université Laval. Le secrétaire général de la santé au Burki-
na Faso, le Dr Mathias Somé, l’équipe cadre du district de Kongoussi ainsi que les organisations « Save
the Children Pays-Bas » et « Plan International » ont été d’un grand secours. Enfin, nous tenons à remer-
cier tous nos collègues professionnels de santé ainsi que l’ensemble de la population ayant participé
aux travaux de recherche, tant au Mali qu’en Ouganda et au Burkina Faso.
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