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INTERVENTION LOGOPÉDIQUE CHEZ

LES PERSONNES ÂGÉES


(E 5007)
CHAPITRE 1 : VIEILLISSEMENT - ASPECTS GÉNÉRAUX

Les interventions logopédiques chez les personnes âgées sont présentes dans
différents endroits :

- Le milieu hospitalier
- La maison de repos
- Le milieu associatif

Nous pouvons imaginer une augmentation de la demande logopédique auprès de


cette population dans les prochaines années. En effet, entre 2001 et 2015, nous avons
constaté que la pyramide de population s’était inversée. Concrètement, l’espérance
de vie augmente tandis que le nombre de naissance diminue. Cette tendance tend
à se développer dans les années à venir.

ASPECTS SENSORIELS, MOTEURS, MÉDICAUX, PSYCHIATRIQUES,


RELATIONNELS ET SOCIAUX

LES ASPECTS SENSORIELS

De manière générale, au cours d’un vieillissement qualifié de « réussi », les capacités


sensorielles diminuent.

LA VISION

DÉGÉNÉRESCENCE MACULAIRE LIÉE À L’ÂGE

La dégénérescence maculaire liée à l’âge est observée chez plus de 15% des
personnes âgées d’au moins 65 ans, et chez plus de 25% des personnes âgées d’au
moins 75 ans.

Cette dégénérescence se caractérise par une perte progressive de l’acuité visuelle,


une déformation des objets et des formes, une altération de la vision des couleurs ainsi
que par une apparition d’une zone obscure ou vide dans le champ de vision.

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La dégénérescence maculaire est importante à prendre en compte dans la pratique
logopédique, car la zone centrale étant détériorée, la personne ne parvient plus à
reconnaitre les visages.

CATARACTE

En France, 20% des personnes âgées de 65 ans et plus en sont atteintes. Ce chiffre
atteint 60% chez les plus de 85 ans.

La cataracte se caractérise par une vision trouble qui s’accompagne de difficultés


dans la vision de nuit, d’une sensibilité accrue à l’éblouissement et d’une réduction
de l’intensité des couleurs.

Le cristallin est au cœur du problème.

GLAUCOME

Le glaucome touche 1 personne de 70 ans sur 10.

Le glaucome se caractérise par une altération de la vision périphérique due à la


destruction progressive du nerf optique.

L’apparition du glaucome rend dès lors la conduite dangereuse.

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L’AUDITION

Dans le vieillissement dit « réussi », la perte progressive de l’audition est appelée


« presbyacousie ».

Cette diminution peut être causée par des altérations progressives et naturelles de
l’oreille interne. Plusieurs niveaux peuvent dès lors en être la cause comme la structure,
la circulation sanguine, le nerf auditif ou encore les cellules ciliées dont le but est de
réceptionner les sons. La presbyacousie peut aussi être causée par une altération de
la manière dont le cerveau traite les sons et la parole.

La perte auditive liée à l’âge évolue lentement et peu passer inaperçue.


Effectivement, il a été montré que près de ¾ des personnes de 60 à 79 ans qui étaient
atteintes d’une perte auditive mesurable l’ignoraient.

Plusieurs symptômes sont liés à la presbyacousie comme : des difficultés pour entendre
les sons aigus, des difficultés à entendre lorsqu’il y a un bruit de fond, penser que les
autres marmonnent, ne pas entendre la sonnette ou la sonnerie du téléphone ou
encore se plaindre de tintements, de bourdonnements ou de sifflements dans les
oreilles.

En ce qui concerne l’incidence, la presbyacousie concerne 1 personne sur 4 chez les


55-64 ans, 1 personne sur 3 chez les 65-74 ans et 1 personne sur 2 chez les 75 ans et
plus. Pour autant, malgré le fait que cette diminution touche de nombreuses
personnes, le dépistage est défectueux laissant place à un défaut de prise en charge.
En effet, 2/3 des personnes âgées possédant des troubles auditifs ne sont pas
appareillées.

Toutefois, un lien entre la perte d’audition et le déclin cognitif a été mis en avant.
Concrètement, les personnes ayant une perte auditive présenteraient un déclin des
fonctions cognitives plus important que les personnes sans trouble auditif. Par ailleurs,
ce déclin serait bien plus important pour les personnes non appareillées.

LE GOÛT

Au cours d’un vieillissement réussi, le seuil de perception gustative augmente avec


l’âge. En d’autres termes, les goûts doivent être plus prononcés pour qu’ils soient
perçus. Par exemple, la perception du sucré est divisée par 2 et la perception du salé
est divisée par 11. Cela veut donc dire que les personnes âgées doivent mettre 11 fois
plus de sel pour le percevoir.

À noter également que la diminution du goût peut être un marqueur du vieillissement


naturel, mais il peut aussi être un signe précurseur d’une affection dégénérative telle
que la maladie d’Alzheimer.

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L’ODORAT

Le vieillissement réussi se caractérise également par une perte progressive de l’odorat


à partir de 65 ans ; on parle d’« hyposmie ».

De manière générale, la diminution des capacités olfactives et gustatives entraine des


conséquences importantes. Concrètement, les personnes âgées perdent de l’intérêt
pour les activités culinaires et connaissent une diminution de leur appétit. Cela peut
dès lors amener des situations de dénutrition voire une fonte musculaire, un risque de
chute, des infections, des difficultés de cicatrisations ou encore des maladies déjà
existantes qui s’aggravent.

Finalement, la diminution de ces capacités peut souvent entraîner une dépression


chez les personnes âgées.

LES ASPECTS MOTEURS

LES MOUVEMENTS

De manière générale, les aspects moteurs se modifient au cours du vieillissement.

On constate notamment un certain ralentissement chez les personnes âgées dans


leurs mouvements.

De plus, ils sont sujets à de nombreuses pertes d’équilibre entraînant un risque de chute
important. Ces pertes d’équilibre peuvent amener le syndrome de désadaptation
psychomotrice qui se caractérise par une association de troubles de la posture et de
la marche ainsi que d’anomalies psycho-comportementales. En fait, la personne
adopte la position d’un véliplanchiste par peur de retomber.

Concrètement, la chute chez une personne âgée peut amener du stress pouvant aller
jusqu’à une diminution des activités.

LA DÉGLUTITION

La diminution motrice chez les personnes âgées amène également des troubles de la
déglutition ; on parle de « presbyphagie » dès lors que ces troubles sont liés au
vieillissement naturel.

La presbyphagie est causée par de multiples changements tels que l’atrophie de la


masse musculaire, un ralentissement de toutes les phases de la déglutition, une

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réduction de la production salivaire, une perte de dents, une diminution de la
sensibilité ainsi qu’un retard de déclenchement du réflexe de déglutition.

En bref, les phénomènes de déglutition sont ralentis ce qui rend l’activité moins
naturelle. Par exemple, il peut être difficile pour les personnes âgées de boire un verre
d’eau d’une traite.

Il est primordial de différencier les personnes avec une presbyphagie de celles qui ont
un trouble de la déglutition. Autrement dit, il est important de différencier le
pathologique de ce qui ne l’est pas.

LES ASPECTS MÉDICAUX

Le vieillissement réussi se caractérise par des modifications d’un point de vue médical.

On constate une diminution de l’homéostasie qui permet normalement la régulation


de l’organisme de manière générale (la température, le taux de sucre, etc.). Ainsi,
l’adaptation générale est plus difficile chez les personnes âgées.

La pharmacocinétique diffère de celle des jeunes. En fait, les effets des médicaments
sont différents chez les personnes âgées. Ils peuvent être plus faibles ou plus forts par
exemple.

Également, au cours du vieillissement réussi, les pathologies se multiplient.


Concrètement, une personne âgée peut combiner une dépression (1 personne sur 3)
et des problèmes cardiaques (6 personnes sur 10) par exemple. Dès lors, les
combinaisons de plusieurs maladies peuvent compliquer la prise en charge
notamment au niveau des médicaments qui peuvent mal se combiner. À noter que
les maladies les plus présentes chez les personnes âgées sont : la dépression, la
démence, les maladies musculaires, l’hypertension et les maladies cardiaques.

Enfin, les personnes âgées développent une présentation atypique des maladies ce
qui veut dire qu’ils ne développent pas forcément les symptômes classiques des
maladies. Généralement, ils sont admis pour une altération de l’état général, un état
confusionnel, de la fatigue, une faiblesse musculaire, une perte d’appétit ou une
chute. Ainsi, les symptômes sont vagues et peu précis. L’hétéroanamnèse est donc
primordiale afin de recueillir le plus d’information possible. Le fait que les symptômes
ne soient pas ceux classiquement observé, il existe un risque accru de poser un
diagnostic tardif et de proposer un traitement tardif ce qui peut dès lors rendre le
pronostic plus sombre et une évolution plus défavorable.

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LES ASPECTS PSYCHIATRIQUES

Les symptômes dépressifs chez les personnes âgées sont moins flagrants que ceux
chez les plus jeunes. Il est donc nécessaire d’être vigilant. Par exemple, la dépression
se caractérise par une diminution insidieuse des activités et des centres d’intérêts, par
une perte d’appétit ou encore par des difficultés de sommeil.

De manière générale, le taux de décès par suicide est 3 fois plus élevé chez les
personnes âgées or, ce risque est sous-estimé dans cette population.

La dépression et l’isolement social sont deux facteurs de risque au suicide chez les
personnes âgées. Heureusement, des facteurs de protection existent comme les liens
familiaux, la résilience, la religion, le milieu socio-économique s’il est favorable ou
encore la facilité d’accès aux soins.

LES ASPECTS RELATIONNELS ET SOCIAUX

Enfin, au cours du vieillissement, les aspects relationnels et sociaux sont également


impactés.

En effet, la place dans la famille change au moyen d’une inversion progressive des
rôles. En général, les enfants prennent soin du parent.

Également, le passage à la retraite modifie le rôle au sein de la société ce qui peut


dès lors amener un sentiment d’inutilité. Ce changement entraine aussi une diminution
des ressources financières ainsi qu’un potentiel isolement social.

La succession de deuils favorise aussi cet isolement social.

Finalement, il est difficile de trouver le point de départ des changements relationnels


et sociaux. Pour autant, l’isolement est généralement le résultat d’un cercle vicieux
qui est provoqué par la force des choses.

CONCLUSION

Pour conclure, tous les aspects non cognitifs que nous venons de détailler (déficits
sensoriels, vieillissement moteur, aspects médicaux, symptômes psychiatriques et
aspects relationnels et sociaux) peuvent influencer les aspects cognitifs en les
aggravant notamment. Par exemple, une personne âgée qui n’entend plus va
rapidement s’isoler et ne plus parler ; les aspects non cognitifs ont eu un impact sur le
langage.

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Par ailleurs, ils influencent également la prise en charge qu’elle soit logopédique ou
autre. Il est donc primordial d’être sensibilisé à ces aspects et de pouvoir les détecter
en consultation.

LE CONCEPT DE FRAGILITÉ DE LA PERSONNE ÂGÉE

DÉFINITION

Le concept de fragilité de la personne se schématise comme suit :

Il est nécessaire de dépister les personnes en situation de préfragilité ou de fragilité


afin d’éviter des complications.

LA FRAGILITÉ PHYSIQUE

Au départ, la définition de la fragilité reposait sur les critères de Fried principalement


centrés sur les aspects physiques. Concrètement, au moins 3 critères devaient être
présents parmi la perte de poids, la lenteur de la marche, la faiblesse, la fatigue et la
réduction de l’activité physique. La fragilité chez la personne âgée renvoie donc ici à
une idée de fragilité physique et est définie comme un syndrome médical rendant
la personne vulnérable. Autrement dit, ces indicateurs physiques suivent une
approche biomédicale exclusivement physique pour le concept de fragilité.

Plusieurs gériatres s’accordent concernant la prise en charge de cette fragilité


physique.

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• La fragilité physique est un syndrome médical avec de multiples causes qui est
caractérisé par une force diminuée, une endurance diminuée et une réduction des
fonctions physiologiques qui augmentent la vulnérabilité d’un individu pour
développer une dépendance plus importante ou un risque accru de mortalité.

• La fragilité physique peut être prévenue ou traitée en faisant de l’exercice, en se


supplémentant en calories et en protéines, en prenant de la vitamine D ou en
réduisant la polymédication par exemple. Il est ici nécessaire de comprendre que
cette fragilité s’observe également chez les personnes obèses.

• La fragilité physique peut être évaluée au moyen de tests simples et rapides de


screening qui ont été développés et validés.

• Le dépistage d’une fragilité physique doit être systématique pour toutes les
personnes âgées de plus de 70 ans ainsi que pour ceux ayant connu une perte de
poids significative sur l’année liée à une maladie chronique. À noter que ce dépistage
devrait être systématique également pour les personnes présentant des problèmes
cardiaques, des problèmes rénaux, un cancer ou encore un diabète. Dès lors, ce
diagnostic peut être utilisé pour juger du caractère approprié ou non d’un traitement
invasif.

UNE APPROCHE MULTIDIMENSIONNELLE

Puis, au fur et à mesure du temps, la notion de fragilité intègre progressivement les


indicateurs cognitifs, les dimensions psychologiques ainsi que les dimensions sociales.
Ces dernières sont d’ailleurs particulièrement importantes pour intervenir en amont du
processus de fragilisation.

Désormais, la définition de la fragilité est passé d’une approche biomédicale à une


approche globale multidimensionnelle.

À noter que la notion de fragilité se caractérise par une idée de réversibilité et par une
logique préventive. En d’autres termes, une personne n’est pas fragile toute sa vie.

Cette idée de multi-dimensionnalité concernant la fragilité nécessite, selon


Rockwood, un regroupement de 70 indicateurs de nature très différente dont des
indicateurs d’ordre psychologique et cognitif. Néanmoins, ce système est assez lourd
à porter et ne permet pas de distinguer fragilité, comorbidités et incapacités.

Studenski à quant à lui développer 39 indicateurs qu’il a classé en deux groupes.


D’une part, les indicateurs de fragilité intrinsèque dans lesquels sont présents la force,
l’équilibre, la nutrition, l’endurance, la neuromotricité et la mobilité. D’autre part, les
indicateurs globaux de fragilité qui contiennent l’apparence, le recours au système
de santé, la complexité médicale, la santé perçue, les activités de la vie quotidienne,
l’état émotionnel et le statut social. Cet instrument se situe à mi-chemin entre
l’approche physique de Fried et l’approche multidimensionnelle de Rockwood.
Effectivement, Studenski cherche à identifier les indicateurs essentiellement

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physiques/intrinsèques de fragilité ce qui fait sens avec la vision de Fried. Mais, il
adopte une approche beaucoup plus large qui intègre les maladies ou les
incapacités par exemple comme le fait Rockwood.

Nous retiendrons la définition de la fragilité proposée par Michel affirmant qu’il s’agit
d’un syndrome résultant d’une réduction multisystémique des réserves fonctionnelles,
limitant les capacités de l’organisme à répondre à un stress même mineur.

Voici quelques exemples de stress mentionnés dans la précédente définition :


maladie, décès du conjoint, déménagement, perte d’un animal de compagnie, vol
de sac-à-mains, etc.

FACTEURS DE RISQUE ET CONSÉQUENCES

La fragilité est sujette à plusieurs facteurs de risques.

L’âge est l’un de ces facteurs. En effet, les personnes âgées de 80 à 84 ans et vivant
dans leur domicile ont davantage de risque d’être fragile.

En ce qui concerne les autres facteurs de risque, nous trouvons : la comorbidité, les
faibles contacts sociaux, la dépression, la détérioration cognitive, un IMC bas, la non-
consommation d’alcool, le tabagisme ou encore les troubles visuels.

L’ensemble de ces facteurs de risque peut amener de nombreuses conséquences


comme la perte d’autonomie, un fardeau pour l’entourage, un recours à des aides,
une entrée en institution ou encore une mortalité accrue 5 ans après la détection de
la fragilité.

En ce qui concerne la prévalence, la fragilité physique concerne 4 à 17% des


personnes âgées de 65 ans et plus.

À noter que cette prévalence est davantage élevée chez les femmes, chez les
personnes âgées de plus de 80 ans et lorsqu’une fragilité psychosociale est également
présente.

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DÉPISTAGE ET PRÉVENTION

LE DÉPISTAGE

Le dépistage et les interventions précoces permettent d’améliorer la qualité de vie et


de réduire les coûts pour la société.

En général, le dépistage d’une fragilité est réalisé par les équipes de gériatrie en milieu
hospitalier. Cela favorise un dépistage au sein d’une équipe multidisciplinaire avec
l’idée d’intervenir sur les facteurs de risque.

Plusieurs outils de dépistage ont été élaborés :

- FRAIL
- Cardiovascular health study frailty screening scale
- Gérontopôle frailty screening tool
- ISAR (outil utilisé à l’hôpital d’Érasme)
- SHERPA

Voici quelques questions tirées de ces outils : Êtes-vous fatigué ? ; Vivez-vous seul ? ;
Rencontrez-vous des difficultés de mobilité depuis les 3 derniers mois ? ; Avez-vous
besoin d’une aide à domicile ? ; Avez-vous été hospitalisé ces 6 derniers mois ? ;
Prenez-vous plus de 3 médicaments par jour ?

Le dépistage passe également par l’utilisation d’échelles pluridisciplinaires comme


des échelles de kinesthésie ou d’ergothérapie par exemple.

LE PROGRAMME DE SOINS GÉRIATRIQUE

Nous allons particulièrement nous intéresser au programme de soins gériatrique


implanté dans le milieu hospitalier et qui a permis la création de plusieurs services dont
la gériatrie.

Ce programme de soins pour le patient gériatrique est axé sur un processus


pluridisciplinaire depuis le diagnostic vers le suivi du patient en passant par la thérapie
et la réadaptation fonctionnelle. Ce travail multidisciplinaire est effectué par un
médecin gériatre, un infirmier, un kinésithérapeute, un ergothérapeute, un logopède,
un assistant social, un psychologue, un diététicien et un neuropsychologue.

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Le programme de soins en question se compose entre autres d’une hospitalisation
gériatrique et d’un hôpital de jour gériatrique (HDJG). L’objectif de ce dernier est
d’éviter l’hospitalisation.

De manière générale, l’évaluation gériatrique globale se déroule en 3 étapes.


D’abord, a lieu un repérage (screening) à l’aide d’instruments standardisés pour
identifier les patients fragiles présentant un haut risque de déclin fonctionnel. Ensuite,
l’évaluation globale du patient se déroule. Cela permet d’obtenir une idée globale
des problèmes présents chez ce patient. Par exemple, un patient peut arriver pour
une jambe cassée et finalement repartir avec un dépistage de fausses routes.
Finalement, a lieu l’implémentation des soins appropriés si des problèmes
gériatriques sont identifiés.

LES CONSÉQUENCES

La fragilité chez les personnes âgées entraine de nombreuses conséquences.

Elle peut augmenter la présence de symptômes anxiodépressifs ou amener un risque


de malnutrition.

Également, la fragilité chez la personne âgée peut entrainer un risque de maltraitance


ou de négligence (exemple : non prise en compte de la personne, de ses choix, de
ses besoins).

CONCLUSION

Pour conclure, il est important de prendre en compte tous les aspects du vieillissement
pour comprendre ce qu’il se passe au niveau des difficultés langagières.

En tant que futurs logopèdes, il est également important d’être sensibilisé à ces
aspects afin de pouvoir les détecter en consultation et en tenir compte lors des prises
en charge proposées.

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VIEILLISSEMENT « RÉUSSI »

L’ILE D’OKINAWA AU JAPON

Au japon, l’île d’Okinawa recense un nombre de personnes centenaires en bonne


santé supérieur à celui des autres pays.

Il est donc intéressant de comprendre quels sont les secrets de ce phénomène.

Les chercheurs ont mis en évidence quatre facteurs essentiels :

- L’alimentation
- L’activité physique
- L’auto-assistance
- Le système d’entraide mutuelle / notion de groupe

L’alimentation des habitants de l’île d’Okinawa se compose tout d’abord d’aliments


dits miracles qui ont de grands apports énergétiques. On y trouve notamment la
Goya, la patate douce ou encore le tofu. Puis, l’alimentation contient peu de viande
et de produits laitiers en comparaison du poisson et du soja notamment. Également,
les Japonais boivent peu d’alcool et privilégient l’eau fraîche et le thé. Enfin, ils
adoptent une manière de manger et de cuisiner particulière. Concrètement, ils
utilisent majoritairement des cuissons vapeurs qui ne nécessitent pas l’utilisation de
matière grasse et qui favorise une meilleure conservation des propriétés nutritives. Pour
ce qui est de la manière de manger, ils mangent lentement et en groupe.

L’activité physique est très présente chez les habitants de l’île d’Okinawa du fait de
leur emploi en lien avec l’agriculture. Il s’agit également d’une population qui marche
beaucoup. Dès lors, cette activité physique apporte des bienfaits cardiaques et des
sensations de bien-être, elle améliore le sommeil et diminue les risques de diabète et
d’ostéoporose.

L’auto-assistance est également une dimension très présente chez les Japonais. Cela
renvoie à l’idée d’être en mesure de vérifier son propre état de santé. Concrètement,
il s’agit de porter un regard critique sur sa propre santé physique, mentale, sociale et
spirituelle. De manière générale, une vision positive est adoptée ce qui est primordial
pour favoriser un vieillissement optimal.

Enfin, l’entraide mutuelle renvoie à l’importance de la communauté. L’individualisme


se fait rare dans la culture japonaise.

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FACTEURS QUI INFLUENCENT LE VIEILLISSEMENT RÉUSSI

De manière générale, le vieillissement est influencé par la génétique, l’environnement


et les maladies. Pour autant, il n’est possible d’agir que sur l’environnement qui
comprend le mode de vie, le lieu de vie ainsi que les conditions socio-économiques.
Il semble en effet plus difficile d’agir sur la génétique et les caractéristiques propres à
l’espèce (vieillissement des organes, vieillissement hormonal ou vieillissement cellulaire
et moléculaire) ou sur les maladies chroniques pouvant survenir.

En découle alors, de manière plus précise, le trépied préventif mis en place par Aquino
dans le but de favoriser un vieillissement réussi.

En fait, le trépied préventif comprend trois pôles sur lesquels nous pouvons travailler :

- La nutrition
- L’exercice physique
- La culture du lien social

Néanmoins, même si en agissant sur ces trois pôles, nous cherchons à optimiser et à
augmenter nos chances d’un vieillissement prospère, cela ne veut pas dire qu’une
maladie d’Alzheimer ne va pas arriver. Nous devons garder en tête que nous ne
pouvons pas avoir une prise sur tous les aspects.

À noter également qu’au-delà de ces pôles, nous devons pousser les personnes âgées
à faire des choses avec plaisir. Nous ne devons pas les obliger à faire des choses mais
nous devons plutôt agir de manière générale.

LA NUTRITION

Le premier pôle du trépied préventif concerne la nutrition. Il est recommandé


d’augmenter les apports en protéines (exemple : viande, poisson, œufs) afin de lutter
contre la perte de masse musculaire.

Au-delà des modifications physiologiques qu’entrainent la nutrition, il est aussi


important de faire attention à cet aspect dans la vie quotidienne car des
modifications sociales peuvent aussi en découler. En effet, la qualité des repas peut
varier selon les personnes en charge des courses et selon la nature et la fréquence de
l’aide qu’elles proposent. Par exemple, la consommation de viande d’une personne
âgée peut être limitée si c’est son fils qui s’occupe des courses 1 fois par mois parce
qu’il ne vit pas à proximité.

Ainsi, les personnes isolées présentent un risque de dénutrition plus élevé. L’envie de
se faire à manger est généralement diminuée.

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Pour autant, la dénutrition amène une perte au niveau des capacités de défense
contre les maladies infectieuses ainsi qu’une fonte musculaire favorisant dès lors le
risque de chutes et de fractures.

EXERCICE PHYSIQUE

La pratique d’une activité physique améliore la condition cardiorespiratoire, la force


musculaire, la puissance musculaire et indirectement l’équilibre. Cette pratique
entretient un lien direct avec l’autonomie de la personne. En effet, l’appauvrissement
des fonctions précédemment mentionnées peut entrainer des limitations physiques
nécessaires aux activités quotidiennes. En d’autres termes, l’absence d’activité
physique peut rapidement amener une perte de la marche et de l’équilibre risquant
alors l’arrêt des sorties.

Concrètement, il est recommandé de pratiquer des activités cardiorespiratoires


modérément vigoureuses telle que la marche rapide. Également, il est conseillé
d’effectuer un entraînement axé sur la force et sur la puissance dans un but de
préserver la masse musculaire et la capacité de travailler les groupes musculaires ; les
efforts ne doivent toutefois pas être trop violents. Enfin, l’activité physique doit contenir
des exercices d’équilibre et d’étirement.

Il semble intéressant de préciser que des études ont démontré l’effet bénéfique de
l’exercice physique sur les aspects cognitifs.

CULTURE DU LIEN SOCIAL

La culture du lien social joue un rôle important dans le vieillissement. En effet, il a été
montré que le risque de mortalité diminuait chez les personnes âgées avec de
nombreuses relations sociales. De plus, il existe une corrélation entre les résultats aux
bilans de santé et au support social. Enfin, les personnes âgées qui reçoivent un soutien
émotionnel possèdent une ligne de base plus élevée quant à leurs performances
cognitives.

Concrètement, plus la personne entretient des contacts sociaux, plus elle est amenée
à réfléchir. Autrement dit, les interactions sociales impliquent des composantes
cognitives qui soutiennent l’investissement cognitif. Dès lors, ces interactions
contribuent à l’amélioration des fonctions cognitives.

L’entretien du lien social constitue un facteur très protecteur face au vieillissement.

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FACTEURS QUI FAVORISENT LE VIEILLISSEMENT RÉUSSI

Le vieillissement dit réussi se caractérise par plusieurs éléments :

- Ne pas se sentir déprimé


- Avoir une bonne satisfaction de vie
- Effectuer un travail rémunéré ou être bénévole
- Pratiquer des activités de loisir
- Posséder une implication familiale importante
- Pratiquer des exercices physiques ou du sport
- Être autonome
- S’alimenter de manière diversifiée

À noter qu’il existe un autre facteur sur lequel nous pouvons agir et qui favorise ce
vieillissement réussi : l’âgisme.

L’âgisme renvoie aux stéréotypes et aux discriminations liés à l’âge.

Il semble nécessaire de préciser que ce phénomène est même présent chez les
professionnels de santé sans que cela soit volontaire. Dès lors, l’âgisme se manifeste
par un tutoiement spontané ou par le manque d’écoute car le patient n’a plus toute
sa tête par exemple.

Pourtant, l’âgisme influence l’estime de soi et les comportements des personnes


âgées. En effet, ils ont tendance à adhérer aux définitions négatives d’eux-mêmes et
à perpétuer les stéréotypes dirigés contre eux.

Il est vrai que les personnes âgées sont plutôt transparentes dans la société alors
qu’elles constituent de réels bénéfices financiers liés au bénévolat. Effectivement, sans
ces bénévoles, la société serait obligée d’embaucher pour réaliser ce travail.
Également, au cours des cursus universitaires de soin, il n’existe que peu de cours
spécifiques à cette population.

Le vieillissement est souvent perçu comme une période de déclin physique et cognitif
mais les données montrent que le bien-être ainsi qu’une conception positive du
vieillissement constituent des facteurs de protection importants contre les effets de
l’âge sur l’organisme.

Il est donc nécessaire d’adapter l’environnement aux particularités du vieillissement


en optimisant le bien-être et la qualité de vie ainsi qu’en prévenant afin de réduire les
expressions problématiques du vieillissement cérébral et cognitif.

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FACTEURS QUI RÉDUISENT LES DIFFICULTÉS DU VIEILLISSEMENT

Comme nous l’avons expliqué précédemment, les facteurs qui permettent de réduire
les expressions les plus problématiques des difficultés rencontrés par les personnes
âgées sont inscrits dans le trépied préventif.

Pour rappel, on y retrouve la culture du lien social, la pratique d’une activité physique
et le fait de manger équilibré.

Une étude a été menée dans le but de comprendre la manière la plus efficace pour
intervenir sur ces facteurs. Pour cela, trois groupes ont été créés : le premier reçoit des
informations sur les facteurs du trépied préventif, le deuxième se voit fixer des objectifs
pour modifier les comportements en lien avec l’activité physique, cognitive, sociale
et l’alimentation, et, le troisième groupe se voit également fixer des objectifs mais
avec un suivi bimensuel proposé.

Après un an, il en est ressorti que les meilleurs résultats sont ceux obtenus par les
groupes 2 et 3 mais que le troisième groupe n’est pas significativement meilleur.

Par conséquent, cette étude a démontré l’importance de fixer des objectifs plutôt
que de simplement informer.

Enfin, d’un point de vue social et politique, il est important de favoriser l’accès aux
mesures de prévention et aux moyens d’aide afin de réduire l’isolement et la
pauvreté. Pour cela, nous devons donner les outils aux personnes âgées afin qu’elles
puissent maintenir certaines activités comme l’accès à l’informatique, l’accès aux
transports pour faire des sorties culturelles ou encore l’accès aux conférences.

Il est également important de favoriser l’engagement social des personnes âgées.


Concrètement, il est possible d’envisager des relations intergénérationnelles
(exemple : accompagnement des devoirs dans des écoles, cours d’alphabétisation)
ou bien de les intégrer dans des structures destinées à la population générale
(exemple : association sportive, culturelle). Cela permet d’une part d’éviter un
clivage, le développement de ghettos ou de stéréotypes et d’autre part, de mettre
en place des activités qui permettent de prendre du plaisir, de se développer
personnellement et de jouer un rôle valorisant.

ASPECTS COGNITIFS

Avec l’âge, certaines de nos facultés sont moins performantes qu’auparavant.


Néanmoins, la diminution des capacités cognitives n’implique pas forcément la
présence d’une maladie ; nous sommes ici toujours dans le cadre du vieillissement

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normal lié à l’âge. Ces effets normaux peuvent tout de même être gênant dans la vie
quotidienne.

Pour étudier le vieillissement cognitif, plusieurs types d’études existent.

D’abord, il est possible de réaliser une étude transversale dans laquelle nous allons
comparer une cohorte de jeunes et une cohorte de personnes âgées. Cependant,
ce type d’étude laisse place à l’effet de cohorte. En fait, les deux populations ont
grandi dans des cultures et des éducations différentes ce qui peut alors biaiser les
résultats. Par exemple, si l’on propose une épreuve de reconnaissance de visage, les
deux cohortes vont certainement reconnaitre des visages selon la génération

Puis, il existe aussi l’étude longitudinale au cours de laquelle nous sélectionnons les
mêmes participants que nous étudions à différents moments de leur vie ; l’effet de
cohorte disparait donc. Cependant, ce type d’étude est baisé par la réduction de
l’échantillon ; il s’agit de l’effet d’attrition.

En résumé, l’effet de cohorte renvoie à l’idée de différences d’éducation, de culture,


d’environnement ou encore de statut médical ce qui entraine des différences entre
les groupes qui peuvent être interprétées à tort comme étant liées au vieillissement. À
noter que cet effet maximise les effets du vieillissement.

Et, l’effet d’attrition renvoie à l’idée que les sujets qui restent le plus longtemps dans
l’étude sont les plus motivés et souvent ceux qui sont en meilleure santé et qui ont le
meilleur fonctionnement cognitif. Les effets du vieillissement sont donc minimisés.

D’autres biais méthodologiques existent et peuvent impacter l’étude du vieillissement.

La variabilité interindividuelle, qui se matérialise par des écart-types très élevés dans
l’étude, rend la mise en évidence de certains effets difficile alors qu’on a le sentiment
qu’ils existent bel et bien.

La présence de comorbidités, qui consiste en l’association de troubles sensoriels et


moteurs, de symptômes psychiatriques ou encore de pathologies responsables de
lésions cérébrales, est bien plus fréquente chez les personnes âgées. Ainsi, il est difficile
de statuer sur l’origine des changements observés (exemple : vieillissement cognitif ou
problèmes auditifs ?).

SYSTÈMES MNÉSIQUES

Pour rappel, il existe plusieurs systèmes de mémoire. D’une part, il existe la mémoire de
travail qui comporte la boucle phonologique, le calepin visuo-spatial et
l’administrateur central. D’autre part, il existe la mémoire à long terme qui se compose

18
de la mémoire épisodique, de la mémoire sémantique, de la mémoire procédurale
et du système de représentation perceptive.

Dans le vieillissement dit réussi, la mémoire de travail et la mémoire épisodique sont les
éléments touchés en premier.

LA MÉMOIRE DE TRAVAIL

La mémoire de travail est un système mnésique dédié au traitement et au maintien


temporaire des informations nécessaires à la réalisation d’activités cognitives diverses.

La capacité et la durée de stockage sont limitées.

Selon le modèle de Baddeley, la mémoire de travail nécessite le fonctionnement


coordonné d’un ensemble de sous-composantes : l’administrateur central, la boucle
phonologique, le buffer épisodique et le registre visuo-spatial.

Pour évaluer la mémoire de travail il est possible de proposer une tâche d’empans
verbal (exemple : chiffres) ou visuo-spatial (exemple : Block tapping test) ou bien de
proposer une tâche de manipulation de l’information au moyen d’empan inverse, de
situation de double tâche (exemple : Brown Peterson) ou de mise à jour (exemple :
PASAT).

Dans le vieillissement, les tâches doubles nécessitant à la fois le stockage et le


traitement de l’information sont plus difficile.

Ainsi, l’administrateur central semble être plus sensible au vieillissement que la boucle
phonologique et le registre visuo-spatial. Ces difficultés sont interprétées comme la
conséquence d’une diminution des ressources de l’administrateur central notamment
en termes attentionnels. Les effets de l’âge sur l’efficacité de la mémoire de travail
seraient également liés à la vitesse à laquelle sont effectuées des opérations simples
de traitement.

Dès lors, l’atteinte normale de l’administrateur central, et de manière générale de la


mémoire de travail, amène des conséquences importantes dans la vie quotidienne
(exemple : gestion d’une double tâche).

LA MÉMOIRE ÉPISODIQUE

La mémoire épisodique est une mémoire du système mnésique à long terme. En effet,
la mémoire à long terme se divise en mémoire déclarative (mémoire épisodique +

19
mémoire sémantique) et en mémoire non déclarative (mémoire procédurale +
conditionnements classiques + apprentissages non associatifs + amorçage).

La mémoire épisodique est un système mnésique dédié au stockage à long terme


d’épisodes personnellement vécus dans un contexte spatio-temporel particulier.

Il s’agit de la première structure mnésique touchée. En général, les personnes âgées


rapportent des idées telles que « Je ne sais plus ce que j’ai fait la veille » ou encore
« Je ne sais plus ce que ma fille m’a raconté ».

Pour évaluer la mémoire épisodique, il est possible de proposer des tâches avec des
mots (exemple : RL/RI) ou des images (exemple : test des portes).

De manière plus spécifique, le rappel libre permet de mettre en évidence des


différences entre les personnes âgées et les jeunes ; c’est à ce niveau que les
difficultés sont observables. Pour le rappel indicé, l’effet d’âge diminue par rapport
au rappel libre. La reconnaissance n’est généralement pas marquée par l’effet
d’âge.

Généralement, les sujets âgés rencontreraient des difficultés à mettre en œuvre des
stratégies efficaces de récupération. Par conséquent, les performances peuvent
s’améliorer si nous aidons à la récupération.

Entre l’encodage, le stockage et la récupération, l’effet marqué du vieillissement se


trouve à l’étape de la récupération.

À savoir que pour la maladie d’Alzheimer, la difficulté se situe entre l’encodage et le


stockage.

FONCTIONS EXÉCUTIVES

Pour rappel, les fonctions exécutives constituent l’ensemble de processus cognitifs


de haut niveau qui interviennent lors de situations complexes ou nouvelles, en
particulier lorsque les habiletés cognitives surapprises ne sont plus suffisantes.

Ces fonctions exécutives sont en lien avec l’efficacité du fonctionnement au


quotidien et donc avec l’autonomie.

Les fonctions exécutives regroupent :

- La flexibilité - La coordination de tâches doubles


- L’inhibition - La mise à jour

20
LA FLEXIBILITÉ

Voici plusieurs exemples qui illustrent la flexibilité mentale.

Le patient ne répond pas à l’infirmière s’il regarde son épouse. / Il paraît perdu lorsque
plusieurs personnes interviennent dans une conversation. / Lorsque le sujet d’une
conversation change, le patient reste bloqué sur le thème précédent et a du mal à
s’investir dans une autre idée. (persévérations verbales) / Le patient lave sa figure de
manière répétée et ne passe pas aux autres parties du corps. (persévérations
motrices) / Lorsqu’on l’interrompt, il a du mal à poursuivre l’activité qu’il était en train
de faire. / Lorsqu’il y a des obstacles sur son trajet habituel, il éprouve des difficultés à
prendre un autre itinéraire.

Ce sont les persévérances motrices et verbales qui sont les plus marquées par le
vieillissement.

La flexibilité est la capacité de déplacer rapidement et efficacement le foyer


attentionnel entre différents aspects des stimuli à traiter ou entre les activités cognitives
différentes.

Pour évaluer la flexibilité, il existe le Trail Making Test ou le Wisconsin Card Sorting Test
par exemple.

De manière générale, les performances sont plus faibles chez les sujets âgés dans ce
type de test mais cela ne veut pas dire qu’ils ne savent pas du tout les réaliser.

L’INHIBITION

Voici plusieurs exemples qui illustrent l’inhibition.

Ne pas savoir s’empêcher de faire ou de dire quelque chose qui n’est pas socialement
adéquat ou approprié à la situation. / Dire ce qui me vient à l’esprit à voix haute. /
Elle ne respecte pas les tours de parole et coupe tout le temps la parole. / Familiarité
et tutoiement de personnes qu’elle ne connaît pas ou peu. / Alimentation excessive,
hypersexualité, dépenses excessives. / Tendance à chipoter, utiliser ou de prendre les
objets à sa portée. / Lire tout haut ce qui lui tombe sous les yeux.

Pour évaluer l’inhibition, nous pouvons d’une part nous attarder sur les aspects
verbaux en proposant le test de Stroop, souvent utilisé, ou le test de Hayling plus rare.
D’autre part, nous pouvons nous intéresser aux aspects moteurs en proposant une
tâche de go/no go.

21
Dans le vieillissement normal, les processus inhibiteurs intentionnels sont
spécifiquement altérés par rapport aux processus inhibiteurs automatiques.

LA COORDINATION DE TÂCHES DOUBLES

L’attention divisée est la faculté de traiter en parallèle plusieurs informations et de


gérer l’allocation des ressources attentionnelles entre plusieurs activités simultanées.

La maîtrise de la coordination de doubles tâches est importante au quotidien.

À noter que cette notion est semblable à cette de la mémoire de travail mais, dans
l’attention divisée la durée est plus longue.

Les personnes âgées sont souvent en difficulté avec l’attention divisée.

LA MISE À JOUR

En ce qui concerne la mise à jour dans le vieillissement normal, nous observons une
diminution des capacités.

À noter que cette diminution est indépendante des capacités de stockage en


mémoire de travail.

HYPOTHÈSES

Deux hypothèses cohabitent dans le monde scientifique en ce qui concerne le déclin


des fonctions exécutives.

D’un côté, le déclin des fonctions exécutives s’explique par l’idée d’un
dysfonctionnement au niveau du cortex préfrontal. En fait, il a été observé des
modifications cérébrales morphologiques et fonctionnelles au niveau du cortex frontal
ainsi qu’une altération des performances aux tests évaluant les fonctions exécutives.
Or, les fonctions exécutives sont essentiellement dirigées par la région préfrontale du
cortex. Donc, ce dysfonctionnement préfrontal entraîne une diminution du contrôle
exécutif et/ou des capacités d’inhibition.

22
D’un autre côté, le déclin des fonctions exécutives s’explique par l’idée qu’en réalité
ce ne sont pas directement les fonctions exécutives qui sont altérées mais qu’il s’agit
plutôt de fonctions bien plus générales. En fait, le ralentissement de la vitesse de
traitement, la diminution des capacités attentionnelles et la diminution des ressources
disponibles en mémoire de travail impactent les fonctions exécutives.

FONCTIONS LANGAGIÈRES

Avant d’énumérer les modifications langagières liées à l’âge, il est important de


préciser les éléments qui restent stables voire qui s’améliorent.

Parmi ces éléments nous trouvons :

- Le vocabulaire qui reste stable mais qui peut aussi s’accroitre en raison d’une
accumulation tout au long de la vie
- Le raisonnement verbal qui reste stable
- La phonologie qui est préservée
- La capacité narrative qui s’améliore
- La formulation, la syntaxe et la grammaticalité qui sont préservées même si les
personnes âgées produisent des structures grammaticalement plus simples
- La compréhension de phrases simples qui est préservée

À noter que pour les aspects grammaticaux et compréhensifs, la mémoire de travail


est fortement impliquée. Or, comme nous l’avons expliqué précédemment, il s’agit
d’une structure qui décline avec l’âge. Ainsi, la mémoire de travail influence des
facteurs généraux qui ont des impacts sur les fonctions langagières.

D’autres éléments connaissent quant à eux des modifications.

La fluence est touchée par le vieillissement normal.

Concrètement, la fluence sémantique résiste mieux que la fluence phonologique


même si les deux diminuent avec l’âge.

Une étude a démontré que des performances faibles en fluence sémantique


prédisent la survenue d’un trouble neurocognitif majeur de type Alzheimer 12 ans
avant son diagnostic.

À noter que si nous constatons de meilleurs performances en tâche de fluence


phonologique plutôt qu’en fluence sémantique, il est nécessaire de nous inquiéter car
il peut s’agir d’un marqueur de la maladie d’Alzheimer.

La dénomination est également impactée par le vieillissement normal.

23
L’accès lexical est ce qui pose le plus de problèmes chez les personnes âgées ce qui
rend la plainte du manque du mot très fréquente. Cette difficulté concerne d’abord
les noms puis les substantifs, les adjectifs et enfin les verbes. Cela a pour conséquence
d’augmenter légèrement les paraphasies et l’utilisation de termes passe-partout.

Concrètement, c’est l’usage actif du lexique qui est atteint tandis que l’usage passif
est préservé. Autrement dit, la compréhension lexicale reste stable. En fait, les
personnes âgées rencontrent des difficultés pour activer et pour sélectionner le bon
mot au bon moment ce qui gêne la récupération explicite du mot et qui entraînent
des difficultés dans les situations conversationnelles nécessitant rapidité et efficacité.

Toutefois, le rôle de la mémoire de travail intervient dans les aspects lexicaux ; se pose
alors la question de la présence de difficultés au niveaux des processus langagiers ou
au niveau de la mémoire de travail.

Ces difficultés sont modérées dans un vieillissement naturel ce qui veut dire que les
facilitations (indiçage) sont quasiment toujours efficaces et que les erreurs sont
majoritairement de l’ordre visuel.

À noter qu’il existe des facteurs additionnels non langagiers qui augmentent les
déficits langagiers. Parmi ces facteurs nous trouvons la diminution des capacités
attentionnelles, la fatigabilité accrue ou encore la diminution des capacités
sensorielles. Cela peut dès lors avoir comme conséquence une réduction des
activités.

Il semble finalement nécessaire d’évoquer l’effet de contexte.

Effectivement, la richesse lexicale et la complexité grammaticale augmentent dans


les activités de loisirs et les conversations de fond, mais diminuent dans les discussions
courtes de manière générale.

Il peut donc être intéressant d’enregistrer le discours de la personne dans différents


types d’activité (loisirs vs travail) et dans différents types de conversation (bavardages
vs de fond) afin d’obtenir un échantillon de parole écologique.

À noter que par rapport aux jeunes, les personnes âgées utilisent un vocabulaire plus
riche et des structures grammaticales plus complexes au travail et qu’ils utilisent un
vocabulaire plus riche dans les discussions courtes.

CONCLUSION

Le vieillissement cognitif se caractérise par la diminution de plusieurs éléments.


D’abord, les fonctions mnésiques diminuent notamment en raison d’une altération de
l’administrateur central en mémoire de travail et des processus de récupération en

24
mémoire épisodique. Puis, les fonctions exécutives sont également diminuées et plus
spécifiquement la flexibilité, l’inhibition intentionnelle, la gestion de double tâche, la
mise à jour ainsi que les fonctions attentionnelles. Enfin, les fonctions langagières sont
également impactées avec une diminution de la compréhension de phrases
complexes, de l’accès lexical ou de la fluence verbale.

Deux approches explicatives à ces modifications coexistent.

L’approche analytique émerge l’idée selon laquelle il est possible de trouver dans les
architectures cognitives un élément spécifique de traitement qui serait affecté par
l’âge. Par exemple, un trouble de la mémoire s’expliquerait par un déficit au niveau
d’une composante spécifique comme l’administrateur central ou par un déficit au
niveau d’un processus spécifique comme la récupération en mémoire épisodique.

L’approche globale propose l’idée selon laquelle il existe plutôt un petit nombre de
facteurs généraux explicatifs qui interviennent avec l’âge sur les différents
composantes de traitement impliquées dans les performances cognitives. Par
conséquent, d’après cette approche, le vieillissement s’interprète plus en termes
d’une modification des ressources de traitement disponibles qu’en termes d’atteintes
de mécanismes cognitifs spécifiques. Par exemple, les difficultés langagières sont
souvent liées à une diminution des ressources en mémoire de travail.

CHAPITRE 2 : VIEILLISSEMENT DIFFICILE

L’idée du vieillissement difficile suit l’idée d’un continuum entre un trouble


neurocognitif majeur (anciennement « démence ») et un trouble neurocognitif mineur
(anciennement « trouble cognitif léger).

Le trouble neurocognitif majeur est un ensemble de symptômes acquis qui entraînent


une perte d’autonomie. Il ne s’agit pas d’une maladie mais d’un syndrome. Par
exemple, l’aphasie primaire progressive est un trouble neurocognitif mineur lorsqu’il
n’y a pas de perte d’autonomie, mais elle peut évoluer vers un trouble neurocognitif
majeur par la suite.

Le trouble neurocognitif mineur est associé à un risque d’évolution élevé même si tous
n’évoluent pas vers un trouble neurocognitif majeur. Les premiers symptômes peuvent
être mnésiques ou non.

25
RÉSERVE COGNITIVE

Dans la réalité, il existe une grande variabilité interindividuelle entre les pathologies
neurodégénératives. Autrement dit, la relation entre le degré d’atteinte cérébrale et
les manifestations cliniques qui en découlent varie considérablement d’un patient à
l’autre.

Par exemple, une étude a montré que certaines personnes présentaient un profil
cognitif normal alors que durant l’autopsie il a été mis en avant la présence d’un stade
avancé de la maladie d’Alzheimer.

Cette variabilité s’explique majoritairement par la présence de nombreux facteurs


protecteurs qui renvoient à l’idée de la réserve cognitive.

DÉFINITION

La réserve cognitive renvoie à l’idée que toutes les activités entreprises au cours de
l’existence ont des effets bénéfiques sur le cerveau, quelle que soit la nature de ces
activités.

Elle permet de rendre compte de la plasticité cérébrale du sujet âgé, qui s’exprime
alors sous la forme d’une résistance aux effets délétères du vieillissement.

Dès lors, plus la réserve cognitives est élevée, plus la personne est protégée des
symptômes. Pour autant, la réserve cognitive n’empêche pas le développement des
marqueurs neurologiques comme les plaques séniles par exemple. Donc, les individus
qui possèdent une réserve cognitive élevée, malgré des altérations neuronales
associées à l’âge ou à la maladie, continuent à fonctionner de manière optimale
dans la vie quotidienne grâce à leur habileté à recruter plus efficacement les réseaux
neuronaux.

Par exemple, lors d’un manque du mot, la personne avec une réserve cognitive faible
possède peu d’options alternatives pour remplacer le terme attendu ; le manque du
mot va donc se marquer sur le plan communicationnel. En revanche, la personne
avec une réserve cognitive élevée est capable de contourner cette difficulté en
utilisant une périphrase ou en employant un synonyme ; la communication reste donc
intacte.

Ainsi, une réserve cognitive élevée permet de compenser les difficultés et de mener
une vie normale. Néanmoins, les difficultés sont remarquées bien plus tardivement.

Effectivement, une étude a montré qu’en présence d’une réserve cognitive faible, les
capacités cognitives diminuent plus vite et les symptômes propres à la maladie
d’Alzheimer s’expriment plus vite.

26
Pour ce qui est d’une réserve cognitive élevée,
les stratégies compensatoires sont plus
longtemps présentes mais, lorsque les
symptômes apparaissent, de grosses difficultés
au niveau des capacités cognitives surviennent
et l’évolution est bien plus rapide.

Par conséquent, la réserve cognitive constitue


un facteur de protection qui retarde l’apparition
des symptômes.

MODÈLES EXPLICATIFS

Il existe deux modèles pour expliquer l’idée de réserve cognitive.

D’une part, le modèle passif propose l’idée que la réserve cognitive dépend de
caractéristiques anatomiques. Ce modèle renvoie donc au concept de réserve
cérébrale. En fait, d’après ce modèle, l’apparition des manifestations cliniques
consécutives à des atteintes cérébrales est modulée par des différences
interindividuelles sur le plan de l’anatomie (exemple : volume cérébral, nombre de
neurones ou de synapses). Ainsi, les individus porteurs d’un nombre de neurones et de
synapses plus élevé, possèderaient une plus grande réserve cognitive, pourraient
tolérer des lésions cérébrales plus importantes avant que se manifestent les signes
cliniques.

D’autre part, le modèle actif propose l’idée que la réserve cognitive repose sur
l’accès à des processus cognitifs et/ou à des réseaux cérébraux optimaux et
compensatoires. Ce modèle renvoie donc au concept de réserve cognitive. En fait,
d’après ce modèle, les individus varient quant à leur capacité à activer les processus
cognitifs et/ou les réseaux neuronaux optimaux lorsqu’ils réalisent une tâche cognitive.
Ainsi, les individus porteurs d’une plus grande réserve cognitive pourraient compenser
les dommages des lésions cérébrales en faisant appel à des réseaux neuronaux ou à
des stratégies cognitives plus efficaces, flexibles ou alternatifs. Ce modèle rejoint en
fait les modèles plus généraux liés au concept de plasticité cérébrale.

INTÉRÊT DANS LA CLINIQUE

La prise en compte de la réserve cognitive dans la clinique est nécessaire à plusieurs


niveaux.

D’abord, au niveau sociétal, cela permet d’identifier les facteurs pouvant contribuer
au développement de la réserve cognitive.

27
Puis, au niveau individuel, cette prise en compte permet de meilleurs interprétations
ainsi que de meilleurs prédictions des profils cognitifs.

Enfin, le fait de prendre conscience de la réserve cognitive, permet d’être sensibilisé


quant au choix des normes à utiliser. En effet, nous devons utiliser les normes avec
prudences car un patient avec une réserve cognitive élevée mais qui obtient des
performances normales ou juste à la limite inférieure de la norme signifie peut-être la
présence d’un certain déclin.

Ainsi, mesurer la réserve cognitive permettrait de mieux estimer le stade


d’avancement de la maladie et de pronostiquer son évolution dans le but de prévoir
une prise en charge plus adaptée.

En ce qui concerne les mesures, plusieurs critères sont questionnés :

- Le critère scolarisation renseigne sur le niveau de scolarité atteint


- Le critère travail renseigne sur le type et le nombre d’emploi effectué
- Le critère loisir renseigne sur toutes les activités effectuées en dehors des
horaires de travail ou d’école à partir de 18 ans

Il semble ici intéressant de préciser que le bilinguisme favoriserait le niveau de la


réserve cognitive.

À la suite de ces renseignements, nous pouvons calculer un score indicatif de réserve


cognitive. À noter que plus le score est élevé plus la réserve cognitive est importante.

En bref, il est nécessaire de ne pas se limiter à comparer un individu aux données


normatives mais plutôt de prendre en compte d’autres facteurs englobant le niveau
d’activité réalisé tout au long de la vie (exemple : éducation, profession, loisirs,
langues).

AFFECTIONS NEURODÉGÉNÉRATIVES

Il existe plusieurs types de classifications en fonction de l’étiologie, de la


neuropathologie, des symptômes cliniques, etc. Dans le cadre de ce cours nous allons
utiliser la classification sur base de l’étiologie. Dès lors, se distinguent les affections
neurodégénératives des autres étiologies (exemple : vasculaire, infectieuse, curable,
maladies neurologiques).

Les affections neurodégénératives sont des maladies qui provoquent une


détérioration progressive du fonctionnement des cellules nerveuses, pouvant
conduire à la mort cellulaire. Ainsi, elles affectent progressivement le cerveau et se

28
caractérisent par une série de symptômes, notamment cognitifs menant à une perte
d’autonomie dans les activités de la vie quotidienne.

En d’autres termes, la modification cellulaire amène une série de symptômes


décrivant un syndrome, soit un trouble neurocognitif majeur.

De manière plus précises, les affections neurodégénératives touchent le métabolisme


des protéines. En fait, les protéines se dégradent moins ce qui entraine alors une
accumulation de déchets dans le cerveau. Ces déchets sont en réalité des marqueurs
présents sur les protéines qui vont permettre d’identifier chacune des maladies
neurodégénératives.

Par exemple, dans le cadre de la maladie d’Alzheimer, deux modifications de


protéines sont considérées comme des facteurs causaux spécifiques à la maladie.
D’une part, les plaques séniles qui sont des agglomérations de protéines amyloïde.
D’autre part, les dégénérescences neurofibrillaires qui sont des altérations
intracellulaires de la protéine tau. Ainsi, dans d’autres maladies neurodégénératives
on retrouve d’autres types de protéines atteintes et d’autres dépôts qui servent à leur
identification.

En bref, selon la maladie les modifications cellulaires sont différentes. Pour autant, nous
n’avons pas accès à ces modifications tant que la personne est vivante. Par
conséquent, nous pouvons nous baser uniquement sur les symptômes.

TROUBLES TROUBLES
TROUBLES COGNITIFS COMPORTEMENTAUX ET NEUROLOGIQUES ET
PSYCHIATRIQUES GÉNÉRAUX
Réflexes anormaux –
Troubles affectifs – Syndrome parkinsonien –
Mémoire – Langage – Hallucinations – Idées Troubles de la marche –
Praxies – Habiletés visuo- délirantes – Troubles du Déficits moteurs ou
constructives – Fonctions comportement sensitifs – Mouvements
exécutives – Attention – alimentaire et du sommeil anormaux – Troubles des
Gnosies – Anxiété – Irritabilité – mouvements oculaires –
Négligence Épilepsie -
Amaigrissement
À noter que nous ne posons jamais de diagnostic de certitude mais uniquement des
diagnostics de probabilité.

Il est nécessaire de comprendre la différence entre une maladie et un syndrome.

Une maladie peut donner plusieurs syndromes selon l’endroit de l’agglutination des
protéines (exemple : cortex préfrontal, lobe temporal). Ainsi, la maladie d’Alzheimer
peut se développer en atrophie corticale postérieure ou en aphasie primaire
progressive de type logopénique selon les protéines agglutinées.

29
Un syndrome peut avoir plusieurs maladies comme origine. Ainsi, l’aphasie primaire
progressive peut être originaire d’une maladie d’Alzheimer ou d’une
dégénérescence fronto-temporale par exemple.

Le rôle des logopèdes et des neuropsychologues et donc d’identifier les syndromes.

LA MALADIE D’ALZHEIMER

TABLEAU CLINIQUE

TROUBLES COGNITIFS

D’un point de vue cognitif, la maladie d’Alzheimer se caractérise par des difficultés
d’encodage au niveau de la mémoire épisodique. En fait, les oublis se font au fur et
à mesure ce qui poussent les patients à poser plusieurs fois les mêmes questions ou à
répéter les mêmes histoires. Ce déficit d’encodage de l’information nouvelle
engendre un véritable syndrome amnésique.

Également, les patients sont désorientés aussi bien d’un point de vue temporel que
spatial.

À noter que les souvenirs anciens ainsi que les connaissances générales sur le monde
sont les mieux préservés.

Au niveau exécutif, des difficultés discrètes apparaissent de manière précoce.

On peut remarquer des préférences pour les routines, des difficultés marquées en
situation de double tâche ou encore des capacités de jugement relativement
préservées mais moins souples.

Au niveau du langage écrit, les aptitudes à écrire se détériorent, tendent à devenir


dysorthographiques et s’accompagnent d’une dysgraphie spatiale.

Les aptitudes à lire restent quant à elles plus longtemps préservées.

Au niveau des mathématiques, le calcul arithmétique et la connaissance des


nombres sont souvent perturbés.

Ces difficultés en entraînent d’autre notamment en ce qui concerne la manipulation


de l'argent.

30
Au niveau du langage oral, il est possible d’observer un manque du mot ainsi que des
troubles de la compréhension pour les phrases complexes.

Le langage reste tout de même fluent voire logorrhéique.

En ce qui concerne l’évolution, le débit de parole diminue avec la présence de


manque du mot et de phrases inachevées. Dans certains cas la maladie d’Alzheimer
se développe en aphasie logopénique.

En ce qui concerne les fonctions attentionnelles, celles-ci semblent préservées au


début mais progressivement le patient semble distrait et peu concentré.

Enfin, d’un point de vue praxique et gnosique, aucun trouble majeur n’est présent au
début. Ce n’est que par la suite que des difficultés surviennent notamment au niveau
de l’habillage.

TROUBLES COMPORTEMENTAUX ET PSYCHIATRIQUES

En ce qui concerne les modifications comportementales dans la maladie


d’Alzheimer, elles ne sont pas présentes dès le début des premiers symptômes.

En général, le premier signe comportemental est l’apathie qui consiste à ne plus avoir
envie de faire des choses.

La maladie d’Alzheimer s’accompagne souvent d’un déni ou d’une anosognosie. Le


déni renvoie à l’idée que le patient est conscient de ses difficultés mais qu’il ne veut
pas les reconnaitre alors que dans le cas d’une anosognosie, le patient n’a pas
conscient de ses difficultés. En réalité, les patients souffrant de la maladie d’Alzheimer
sont parfois quand même un peu conscients des difficultés qu’ils rencontrent, même
si c’est davantage l’entourage qui est plus conscient des changements plutôt que le
patient lui-même.

Au niveau psychiatrique, les modifications surviennent généralement après les


modifications comportementales.

Les patients deviennent plus irritables et plus anxieux. Ils peuvent aussi développer un
syndrome dépressif même si en réalité il est difficile de savoir si la maladie d’Alzheimer
favorise l’apparition de la dépression ou si c’est la dépression qui favorise la venue de
la maladie.

31
Puis, au cours de l’évolution de la maladie, il est possible de constater de la
désinhibition, des hallucinations ou des idées délirantes par exemple. Ce sont en
général ces comportements qui sont difficiles à gérer pour les proches.

TROUBLES NEUROLOGIQUES ET GÉNÉRAUX

Dans le cadre de la maladie d’Alzheimer, l’examen neurologique (exemple :


motricité, réflexes) reste normal assez longtemps.

CRITÈRES DIAGNOSTIQUES

Le DSM-IV a développé les critères nécessaires à un diagnostic de la maladie


d’Alzheimer.

D’abord, des déficits cognitifs multiples apparaissent et se traduisent par une


altération de la mémoire ainsi que par la présence soit d’une aphasie (troubles du
langage) et/ou d’une apraxie (troubles de activités motrices en l’absence de déficit
moteur) et/ou d’une agnosie (troubles de la reconnaissance et de l’identification
d’objets en l’absence d’un trouble perceptif) et/ou d’une perturbation des fonctions
exécutives.

Puis, les déficits précédemment mentionnés sont à l’origine d’une altération


significative du fonctionnement social ou occupationnel ; autrement dit, ils sont à
l’origine d’une diminution de l’autonomie. Également, ils représentent un déclin
significatif par rapport au niveau de fonctionnement antérieur.

L’évolution de ces déficits est progressive.

À noter que ces déficits cognitifs ne sont pas dus à d’autres maladies du système
nerveux central connues pour provoquer des troubles progressifs de la mémoire et de
la cognition, à des maladies générales connues pour être à l’origine d’un syndrome
démentiel ou encore à des troubles consécutifs à l’exposition de substances.
Également, les troubles n’apparaissent pas exclusivement durant un état confusionnel
et ils ne s’expliquent pas mieux par une autre affection.

Il semble intéressant de préciser qu’une mise à jour de ces critères a été proposée.

Premièrement, il existe en réalité différentes expressions de la maladie sur le plan


cognitif. Concrètement, il existe la forme amnésique qui est la forme la plus commune
mais il existe aussi des formes non amnésiques. Parmi elles, on trouve des troubles visuo-
perceptifs (atrophie corticale postérieure), des troubles exécutifs (variante frontale de
la maladie d’Alzheimer) ainsi que des troubles du langage (variante langagière de la

32
maladie d’Alzheimer => aphasie logopénique). En fait, la forme dépend des difficultés
qui apparaissent en premier.

Deuxièmement, les critères apportent l’intérêt des biomarqueurs avec notamment


l’imagerie cérébrale ou l’analyse du liquide céphalo-rachidien.

OUTILS UTILISÉS

En ce qui concerne les examens nécessaires au diagnostic, il est courant de proposer


un bilan neuropsychologique ainsi qu’un examen du langage dès que les difficultés
apparaissent. D’autres examens complémentaires peuvent également être proposés
dans le but d’exclure d’autres affections qui peuvent expliquer les symptômes.

EXAMEN COGNITIF

L’examen cognitif peut se traduire par l’administration de tests de dépistage comme


le MMSE, l’ACE ou la MOCA. Ces tests ne permettent pas la pose d’un diagnostic.

Généralement, l’examen cognitif débute avec l’évaluation de la mémoire


épisodique.

Pour rappel, l’atteinte de l’encodage ou du stockage témoigne la présence d’une


maladie d’Alzheimer. L’atteinte de la récupération témoigne quant à elle d’un
vieillissement normal, d’une dépression ou d’une maladie à corps de Lewy par
exemple.

Plusieurs tests existent afin d’évaluer la mémoire épisodique dont le Rappel


Libre/Rappel Indicé à 16 items. Il est nécessaire de préciser que la réalisation de
l’évaluation cognitive doit se matérialiser sur les deux versants réceptifs (visuel et
verbal) d’autant plus lorsqu’un doute persiste quant aux capacités langagières du
patient.

Au cours du RL/RI, le patient atteint de la maladie d’Alzheimer échoue à toutes les


étapes. En effet, étant donné qu’il n’est pas en capacité d’encoder et de stocker de
nouveaux items, la récupération n’est pas possible dans ce type de tâche.

Le test des portes permet également d’évaluer la mémoire épisodique mais en se


basant sur le versant visuel sans faire intervenir le langage. Il s’agit en fait d’une
épreuve de reconnaissance. On s’attend à ce que l’encodage, le stockage et donc
la récupération ne soit pas adéquate durant la réalisation de cette tâche.

Ensuite, au niveau de l’examen du langage, certaines épreuves sont des épreuves


clés à administrer dans le cas d’une maladie d’Alzheimer étant donné qu’elles sont
liées à des compétences altérées dès le début de la maladie. Parmi ces épreuves on

33
trouve la dénomination, l’évocation lexicale sémantique ainsi que l’évaluation des
traitements sémantiques.

Pour rappel, le principal symptôme de la maladie est l’anomie (=manque du mot). De


plus, sont aussi présentes des difficultés de récupération lexicale en langage spontané
avec une réduction de la production de mots, une diminution de la diversité lexicale,
une augmentation de la fréquence des mots utilisés ainsi qu’une réduction des
informations pertinentes dans le contenu. Pour autant, la maladie ne se caractérise
pas par des changements dans les traits grammaticaux.

Au niveau de l’évolution de la communication, la maladie débute avec une aphasie


anomique. Concrètement, cette étape est marquée par des difficultés plus
importantes lors de situations moins familières, par des aptitudes lexicales et
sémantiques plus fragiles par rapport aux aptitudes syntaxiques et phonologiques qui
sont mieux préservées, ainsi que par la présence de paraphasies et de problèmes de
compréhension. Puis, l’aphasie évolue vers une aphasie transcorticale sensorielle au
cours de laquelle la communication devient difficile avec la présence de
persévérations. Finalement, cette aphasie laisse place à une aphasie globale qui se
traduit par une production et une compréhension altérée.

De manière plus générale, l’évolution de la communication est marquée d’abord par


l’atteinte des aspects généraux du discours avec notamment une diminution du
nombre d’idées produites ainsi qu’une diminution de la cohérence globale par
rapport à la cohérence locale. Par la suite, la communication est marquée par
l’atteinte des aspects spécifiques du discours touchant la compétence narrative, la
gestion des tours de parole ainsi que les procédures de réparation. Enfin, la
communication est caractérisée par l’atteinte de la communication non verbale.

Dès lors, le fait de mieux connaître les difficultés de communication associées à une
maladie d’Alzheimer permet de proposer un soutien adapté autant à la personne
qu’à son entourage.

EXAMENS COMPLÉMENTAIRES

Parmi les examens complémentaires, il existe le scanner cérébral dont l’objectif est
d’exclure un AVC ou un hématome sous-dural par exemple.

Il est également possible de faire une prise de sang afin d’exclure la présence de
maladies thyroïdiennes ou un déficit au niveau de la vitamine B12 par exemple.

Dans le cas des affections dégénératives, d’autres examens complémentaires sont


possibles comme une IRM, une imagerie fonctionnelle ou une ponction lombaire.

À noter que l’imagerie fonctionnelle peut prendre la forme d’un PET scan lorsque nous
sommes face à une présentation typique de la maladie ou lorsque nous sommes face
à une dégénérescence lobaire de type aphasie primaire progressive. L’imagerie

34
fonctionnelle peut aussi prendre la forme d’un DAT scan afin de visualiser les noyaux
gris centraux. Si ce DAT scan est positif alors un diagnostic de syndrome parkinsonien
est posé (exemple : maladie de Parkinson, paralysie supranucléaire progressive,
maladie à corps de Lewy).

Pour ce qui est de la ponction lombaire, cela permet d’analyser le liquide


céphalorachidien. En fait, cela permet d’analyser le taux de protéines tau et amyloïde
qui sont des marqueurs pathologiques chez environ 85% des patients Alzheimer.
Attention toutefois que l’excès de protéines amyloïde est observé chez 10 à 30% de
sujets âgés qui ne sont pas atteints de la maladie.

DÉGÉNÉRESCENCE FRONTO-TEMPORALE VARIANTE COMPORTEMENTALE

La dégénérescence fronto-temporale résulte d’une tauopathie (accumulation de


protéines tau).

Il s’agit de la deuxième affection neurodégénérative la plus courante après la


maladie d’Alzheimer.

En général, elle survient chez des sujets assez jeunes qui ont moins de 65 ans.

Il existe plusieurs présentations à cette dégénérescence : la présentation


comportementale (perturbation frontale) qui est la plus fréquente (75% des cas) et la
présentation aphasique (perturbation temporale) qui se subdivise en plusieurs types
(aphasie primaire progressive non fluente, sémantique et logopénique).

TABLEAU CLINIQUE

TROUBLES COMPORTEMENTAUX ET PSYCHIATRIQUES

Dans le cas d’une DFT variante comportementale, les perturbations résultent d’une
altération frontale. Par conséquent, les premiers symptômes à apparaitre sont de
l’ordre des perturbations comportementales.

En fait, comme il n’y a pas de troubles cognitifs et de modification visible à l’imagerie


cérébrale, les patients sont généralement orientés vers une prise en charge
psychiatrique étant donné que les changements comportementaux soudains ne sont
pas compris.

Concrètement, les modifications comportementales et psychiatriques sont les


suivantes.

35
D’abord, on observe un non-respect des convenances sociales, une conduite
désinhibée, une rigidité mentale, une inflexibilité, des conduites stéréotypées et
persévératives, une négligence physique, une anosognosie, une hyperphagie, une
hyperoralité, une hypersexualité ou encore des modifications des préférences
alimentaires.

De plus, il existe la présence de symptômes affectifs tels que de l’indifférence, un


manque d’intérêt ou encore un manque d’empathie et de sympathie y compris
auprès des proches.

Il semble nécessaire de préciser que les modifications comportementales peuvent


être de deux modes : sous forme de désinhibition ou d’apathie.

TROUBLES COGNITIFS

Par la suite, apparaissent des troubles cognitifs.

Parmi eux, on observe un syndrome dysexécutif qui se traduit par l’altération des
performances dans les tests exécutifs ainsi que par la présence de réactions impulsives
et de persévérations dans les autres tests avec une distractibilité accrue.

Également, dans la DFT variante comportementale, la mémoire épisodique est


altérée notamment au niveau du processus de récupération.

À noter que l’orientation spatiale ainsi que les praxies sont préservées.

Au niveau langagier, il est possible d’observer une réduction et un appauvrissement


du discours de manière générale. Concrètement, la fluence diminue, des
persévérations sont présentes et le manque du mot est peu important. En fait, au
début il y a peu de modifications mais par la suite, l’évolution vers un mutisme est
possible.

Au niveau physique, les perturbations surviennent tardivement. Les signes physiques


résultant d’une altération frontale sont les suivants : perturbations des réflexes
archaïques, des conduites d’urination et des troubles moteurs.

CRITÈRES DIAGNOSTIQUES

Plusieurs critères doivent être présents pour poser le diagnostic d’une DFT variante
comportementale.

D’abord, il doit y avoir le critère de la maladie neurodégénérative. Pour cela, nous


devons observer une détérioration progressive du comportement et/ou de la
cognition.

36
Puis, le diagnostic d’une DFT variante comportementale est posé s’il y a au moins 3
symptômes parmi les suivants qui sont présents de façon persistent, récurrente et non
occasionnelle. Les symptômes possibles sont les suivants :

- Une désinhibition comportementale précoce qui se caractérise par un


comportement social inapproprié, une perte des convenances sociales ou par
des actes impulsifs avec un manque de tact
- Une apathie ou une inertie précoce
- Une perte précoce d’empathie ou de sympathie qui se caractérise par une
réponse diminuée aux besoins et aux sentiments des autres ou par une
diminution de la sociabilité
- Des comportements compulsifs/ritualisés, persévératifs ou stéréotypés
précoces
- Une hyperoralité et des changements alimentaires qui se manifestent par des
changements des goûts alimentaires, de la gloutonnerie, de la
surconsommation d’alcool ou de cigarettes ou par une exploration orale avec
une consommation de non comestibles
- Un profil neuropsychologique avec des déficits des fonctions exécutives, une
préservation relative de la mémoire épisodique et une préservation relative des
fonctions visuospatiales

Enfin, en plus d’un déclin fonctionnel constaté, les résultats d’imagerie rapportent une
atrophie frontale (et/ou temporale) antérieure via le scanner ou l’IRM ainsi qu’un
hypométabolisme frontal (et/ou temporal) antérieur via le PET.

À noter que les déficits ne sont pas mieux expliqués par une autre pathologie non
dégénérative ou médicale, les modifications comportementales ne sont pas mieux
expliquées par un trouble psychiatrique et les biomarqueurs n’indiquent par une
maladie d’Alzheimer ou une autre pathologie neurodégénérative.

En résumé, voici le consensus de Lund et Manchester datant de 1994 en ce qui


concerne les critères diagnostiques cliniques.

Au niveau des troubles du comportement, on observe un début insidieux et une


évolution progressive, une négligence physique précoce, une perte précoce des
convenances sociales, des signes précoces de désinhibition, une hyperoralité, des
comportements stéréotypés et des persévérations ainsi qu’une distractibilité et une
impulsivité.

Au niveau des symptômes affectifs, on observe une dépression, de l’anxiété ainsi


qu’une indifférence émotionnelle.

Au niveau des troubles du langage, on constate une réduction progressive du


discours, des stéréotypies, des écholalies ainsi que des persévérations.

Au niveau spatial et praxique, les capacités sont préservées.

Au niveau des signes physiques, des réflexes primitifs, des incontinences ainsi que des
troubles au niveau des conduites sphinctériennes sont notables.

37
Au niveau de l’investigation, l’EEG est normal, l’imagerie cérébrale morphologique
et/ou fonctionnelle met en avant des anomalies antérieures et, la neuropsychologie
montre la présence de perturbations importantes aux tests du lobe frontal.

LA COGNITION SOCIALE

Dans le tableau clinique de la dégénérescence fronto-temporale variante


comportementale, il est intéressant d’évoquer la cognition sociale.

La cognition sociale renvoie à l’ensemble des compétences et des expériences


cognitives et émotionnelles qui régissent les relations et rendent compte des
comportements de l’être humain avec son entourage familial et social. En fait, de
manière plus concrète, il s’agit des règles de bienséance présentes dans la société.

Il a été montré que les patients avec DFT obtiennent des performances plus faibles
dans les tests évaluant la cognition sociale par rapport à des patients Alzheimer ou
contrôles.

La cognition sociale s’évalue au moyen du test des faux pas ou par le « mind in the
eyes test ». À noter tout de même que ce dernier test est difficile même pour des sujets
sains.

Dès lors, la présence d’altération de la cognition sociale peut expliquer les


modifications précoces dans la DFT. Pour autant, le diagnostic différentiel avec une
pathologie psychiatrique telle la dépression bipolaire par exemple peut être difficile.

APHASIE PRIMAIRE PROGRESSIVE

Comme nous l’avons expliqué précédemment, la dégénérescence fronto-temporale


possède plusieurs présentations : la présentation comportementale et la présentation
aphasique (perturbation temporale) qui se subdivise en plusieurs types (aphasie
primaire progressive non fluente, sémantique et logopénique).

Les critères diagnostiques de l’APP selon Mesulam sont les suivants. D’abord, il existe
un début insidieux suivi d’une aggravation progressive en ce qui concerne le manque
du mot/trouble de la compréhension aussi bien dans le discours spontané que dans
l’examen formel du langage. Puis, toutes les limitations des activités de la vie
quotidienne doivent être expliquées par le trouble du langage pendant au moins 2
ans. Également, pendant les deux premières années, il n’y a pas d’apathie, de
désinhibition, d’oubli des événements récents, de troubles visuo-spatiaux, de déficit
de reconnaissance visuelle ou encore de troubles sensorimoteurs. Il est cependant
possible de constater de l’acalculie ainsi qu’une apraxie idéomotrice. Ensuite, après
deux ans, l’aphasie reste au premier plan même si d’autres symptômes apparaissent

38
et, l’aphasie évolue plus vite que les autres déficits. Enfin, l’imagerie exclut une cause
spécifique.

APHASIE PRIMAIRE PROGRESSIVE NON FLUENTE/AGRAMMATIQUE

L’APP non fluente/agrammatique se manifeste par un agrammatisme et/ou par un


discours hésitant qui demande de l’effort et qui contient des erreurs phonétiques ainsi
que des déformations en raison de troubles arthriques.

De plus, on observe des troubles de la compréhension des phrases de complexité


syntaxique élevée, une préservation de la compréhension des mots uniques ainsi
qu’une préservation des connaissances sur les objets.

En ce qui concerne les troubles arthriques, les productions des patients vont toujours
dans le sens de la simplification (exemple : /talad/ pour « salade »). L’articulation est
couteuse et demande donc de nombreux efforts. Il est pertinent de préciser que les
troubles arthriques sont sensibles à la dissociation automatico-volontaire ce qui signifie
que les performances sont meilleures dans une situation automatique.

L’imagerie peut conforter le diagnostic en mettant en avant une atrophie, une


hypoperfusion et un hypométabolisme prédominant au niveau fronto-insulaire
postérieur gauche.

APHASIE PRIMAIRE PROGRESSIVE FLUENTE

L’APP fluente/sémantique est une APP fluente avec des troubles de la


compréhension des mots.

Concrètement, cette aphasie se caractérise par un manque du mot en dénomination


et par un trouble de la compréhension du mot isolé.

Également, on constate une perte des connaissances sur les objets surtout pour ceux
qui ont une fréquence faible, une dyslexie ou dysgraphie de surface, une préservation
de la répétition ainsi qu’une préservation de la grammaire et des aspects moteurs du
langage.

L’aphasie primaire progressive fluente entraînent aussi des modifications de la


personnalité et du comportement comme de l’égocentrisme, une rigidité mentale,
une maniaquerie, une diminution du répertoire comportemental, des comportements
compulsionnels, de l’indifférence avec un manque d’empathie, de la parcimonie,
une perte de notion de danger ainsi que de la désinhibition.

L’imagerie peut conforter le diagnostic clinique en mettant en avant une atrophie,


une hypoperfusion et un hypométabolisme prédominant au niveau temporal
antérieur.

39
À noter que lorsqu’il y a une modification au niveau temporal droit, la personne
rencontre des difficultés pour identifier les visages.

APHASIE PRIMAIRE PROGRESSIVE LOGOPÉNIQUE

L’APP logopénique se caractérise par la présence d’un manque du mot aussi bien
dans le discours spontané qu’en situation de dénomination ainsi qu’un trouble de la
répétition de phrases.

De plus, on constate des paraphasies phonémiques, une préservation de la


compréhension des mots uniques et des connaissances sur les objets, une préservation
des aspects moteurs du langage ainsi qu’une absence d’agrammatisme franc.

L’imagerie peut conforter le diagnostic clinique en mettant en avant une atrophie,


une hypoperfusion et un hypométabolisme prédominant au niveau péri-sylvien ou au
niveau pariétal postérieur gauche.

ÉVOLUTION ET SYNTHÈSE

L’aphasie primaire progressive non fluente évolue généralement vers des troubles
exécutifs, arthriques ou encore moteurs.

L’aphasie primaire progressive variante sémantique évolue généralement vers des


troubles du comportement et des agnosies associatives.

L’aphasie primaire progressive logopénique évolue généralement vers une aphasie


primaire progressive non fluente ou variante sémantique, vers un syndrome
amnésique épisodique ou alors elle peut rester longtemps stable.

De manière synthétique, si l’on constate un tableau d’aphasie logopénique avec un


trouble au niveau des répétitions de phrases, nous devons penser à la maladie
d’Alzheimer.

Cependant, le diagnostic de maladie d’Alzheimer est très peu probable dès qu’il y a
des troubles arthriques, si le discours est non fluent et agrammatique ou encore s’il y a
une perte sémantique et/ou un trouble de la compréhension du mot isolé.

40
MALADIE À CORPS DE LEWY

La maladie à corps de Lewy se caractérise par la présence de lésions


caractéristiques appelées « corps de Lewy » qui affectent les neurones du cortex
cérébral.

Cette affection neurodégénérative se traduit par la présence de 3 types de


symptômes. D’abord, la personne développe des hallucinations surtout visuelles qui
sont précoces, complexes et tenaces. Les hallucinations en question sont souvent des
personnes ou des animaux et alertent l’entourage qui vient alors consulter. Puis, il y a
un syndrome extrapyramidal qui se traduit essentiellement par des chutes. Au cours
de l’examen neurologique, des signes de Parkinson sont dès lors observables. Enfin,
cette maladie se caractérise par d’importantes fluctuations cognitives. En fait, la
personne passe très rapidement d’un état relativement normal à un état très perturbé
parfois même à plusieurs reprises dans la même journée.

Associés à ces symptômes, les patients souffrent souvent de troubles du sommeil avec
notamment de l’agitation ou des insomnies et tiennent des propos à tendance
paranoïaque.

Sur le plan cognitif, on constate une combinaison de troubles corticaux et sous-


corticaux. Concrètement, il existe un syndrome dysexécutif sévère se traduisant par
un déficit de récupération en mémoire épisodique, un déficit de flexibilité, d’inhibition
ou encore de planification. De plus, est présent un déficit au niveau des habiletés
visuo-constructives qui apparait de manière précoce. En effet, généralement les
atteintes neurologiques sont situées dans le cortex postérieur ce qui altère d’abord les
perceptions visuelles.

Pour autant, la mémoire épisodique est moins atteinte que dans le cadre de la
maladie d’Alzheimer. Et, la présence de difficultés dans les tâches de dénomination
s’explique par une origine gnosique plutôt que par un manque du mot.

En ce qui concerne la médication, il est primordial d’éviter les neuroleptiques et les


sédatifs notamment en raison du syndrome extrapyramidal. En revanche, les patients
répondent positivement aux médicaments cholinergiques proposés aux patients
Alzheimer.

41
MALADIES DÉGÉNÉRATIVES ASSOCIÉES À DES TROUBLES MOTEURS PRÉCOCES

Les maladies dégénératives associées à des troubles moteurs précoces se


caractérisent par des symptômes moteurs précoces comme :

- Des signes de parkinsonisme (bradykinésie, rigidité, tremblements)


- Des troubles de la marche (marche à petits pas, chutes fréquentes)
- Des mouvements anormaux (chorée, dystonie)

Parfois, la dysarthrie fait également partie des symptômes précocement observables.

En fait, de manière générale, ces maladies correspondent au tableau clinique d’une


atteinte sous-corticale.

Dès lors, on constate un ralentissement psychomoteur généralisé et précoce, des


troubles de la motivation et de l’initiation (apathie, aboulie), des troubles moteurs
(dysarthrie, trouble de la marche, parkinsonisme, mouvements anormaux) ainsi que
des troubles affectifs (tendance dépressive ou euphorique, tassement émotionnel).

Sur le plan cognitif, on constate une prédominance des troubles attentionnels et


exécutifs qui se caractérisent par un ralentissement important. Il est ici important de
préciser que parfois cette lenteur laisse penser que les personnes sont plus démentes
qu’elles ne le sont en réalité ; il est donc nécessaire de prendre en compte ce
paramètre lors de l’examen.

Également, il existe une perturbation fréquente de la mémoire notamment au niveau


de la récupération. À noter que l’indiçage apporte un effet bénéfique.

Enfin, le langage, le calcul, les gnosies ainsi que les praxies sont relativement bien
préservées.

D’un point de vue neurologique, ces maladies résultent d’une atteinte d’un système
fonctionnel qui réunit les lobes frontaux et les noyaux gris de la base, ou bien, les
connexions entre les deux.

CHORÉE DE HUNTINGTON

La chorée de Huntington est une maladie héréditaire à transmission autosomique


dominante. Ainsi, un test génétique est nécessaire.

L’apparition des premiers symptômes se situe aux alentours des 40 ans.

42
Ces symptômes sont les suivants : troubles moteurs (mouvements anormaux appelées
« chorées »), troubles cognitifs (symptômes de type sous-corticaux auxquels s’ajoutent
des troubles de la mémoire procédurale) ainsi que des troubles psychiatriques.

Parfois, cette affection neurodégénérative apparait de manière plus tardive ce qui


amène un tableau clinique atypique qui s’apparente à celui d’une dégénérescence
fronto-temporale.

MALADIE DE PARKINSON IDIOPATHIQUE AVEC TROUBLE NEUROCOGNITIF


MAJEUR

La maladie de Parkinson idiopathique se caractérise par des tremblements ainsi que


par des troubles cognitifs à des degrés divers mais qui sont rarement suffisant pour
parler de trouble neurocognitif majeur.

Pour autant, 20 à 30% des personnes développeront un trouble neurocognitif majeur


surtout s’ils possèdent une forme tardive de parkinsonisme.

Il est ici intéressant de préciser que les performances aux tests cognitifs peuvent être
influencés par les troubles moteurs ou par la médication par exemple.

SYNDROMES PARKINSONIENS ATYPIQUES

Il existe deux syndromes parkinsoniens atypiques.

D’une part, la paralysie supranucléaire progressive se caractérise par des troubles


précoces de la station et de la marche (chutes fréquentes et spectaculaires) ainsi que
par une paralysie des globes oculaires.

Ce syndrome se caractérise également par les mêmes syndromes que ceux du


tableau clinique d’atteinte sous-corticale.

Concrètement, le patient est lent et souffre d’un syndrome dysexécutif entraînant des
troubles d’équilibre important. C’est d’ailleurs pour ce motif que les personnes
consultent.

D’autre part, la dégénérescence cortico-basale est une atteinte dégénérative qui


touche à la fois les noyaux gris centraux et le cortex fronto-pariétal.

En fait, un des membres supérieur devient progressivement maladroit. Concrètement,


de manière unilatérale, sont présents des troubles sensitifs avec des mouvements
incontrôlés.

43
Dès lors, cette atteinte entraîne des troubles praxiques qui se traduisent par des
difficultés pour boutonner une chemise ou faire ses lacets par exemple. Également les
troubles visuo-constructifs peuvent être importants.

Ici, par rapport à la paralysie supranucléaire progressive, le syndrome de trouble


neurocognitif majeur apparait de manière plus tardive ; plusieurs tableaux cliniques
seront dès lors possibles. Parmi ces tableaux cliniques on trouve celui de l’apraxie
progressive, le syndrome frontal, l’apraxie de la marche ou encore l’aphasie primaire
progressive non fluente (=> dysarthrie).

PATHOLOGIES NON DÉGÉNÉRATIVES

TROUBLES NEUROCOGNITIFS MAJEURS D’ÉTIOLOGIE VASCULAIRE

L’étiologie vasculaire est la deuxième cause de trouble neurocognitif majeur après


les affections dégénératives.

Dans un certain nombre de cas, les lésions vasculaires cérébrales peuvent aboutir à
un tableau clinique neurocognitif majeur :

- Tableau clinique sous-cortical


- Tableau de trouble neurocognitif majeur mixte fréquent (exemple : maladie
d’Alzheimer et étiologie vasculaire)

Le tableau clinique sous-cortical regroupe les troubles précoces de la marche, des


incontinences urinaires, une paralysie pseudo-bulbaire, une dysarthrie, des rires et des
pleurs spasmodiques, des troubles de la déglutition.

L’évolution de ces troubles se fait par paliers.

DELIRIUM

Le delirium, anciennement appelé « état confusionnel aigu » n’est pas un trouble


neurocognitif majeur.

Il s’installe de manière rapide, se caractérise par des symptômes fluctuants, son


étiologie est souvent connue et il est réversible.

Il est nécessaire d’éviter les examens dans ce cas car les résultats seraient
catastrophiques.

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À noter que la présence d’épisodes fréquents de délirium peut constituer un
précurseur d’un trouble neurocognitif majeur.

En comparaison au délirium, le trouble neurocognitif majeur s’installe de manière


insidieuse et progressive et les symptômes sont permanents.

CHAPITRE 3 : DIVERSITÉS DES PRISES EN CHARGE DANS LE


VIEILLISSEMENT

PRISES EN CHARGE CENTRÉES SUR LA COMMUNICATION

Le vieillissement engendre des particularités à différents niveaux pour les interventions.


En fait, le plan physique (diminution des facultés sensorielles), le plan affectif
(dépression), le plan relationnel et familial (dépendance) ainsi que le plan social
(isolement, difficultés financières) étant impactés, le prise en charge se doit d’être
globale plutôt que spécifique.

PRISES EN CHARGE DANS LES APP

Il existe trois catégories de prise en charge dans le cas d’une APP :

- Approche cognitive de rééducation


- Interventions participatives
- Méthodes compensatoires ou de suppléance

APPROCHE COGNITIVE DE RÉÉDUCATION

L’approche cognitive de rééducation consiste à mettre en évidence les difficultés


puis de proposer des entraînements intensifs associés à des tests pour mesurer
l’efficacité de ces entraînements.

Voyons les résultats amenés par la littérature scientifique.

45
APP VARIANTE SÉMANTIQUE

Ici, les difficultés mises en avant seraient l’anomie et les difficultés de compréhension
des mots isolés. Dès lors, un entraînement intensif portant sur l’association, la
catégorisation ou encore la description serait proposé. Des tests sémantiques de
production et de compréhension seraient administrés pour mesurer l’efficacité de
l’entraînement.

Le réapprentissage des concepts perdus est possible notamment via l’apprentissage


sans erreurs.

Plusieurs facteurs influencent ce réapprentissage comme la nature familière des


concepts ou encore l’information résiduelle en mémoire sémantique.

Néanmoins, l’amélioration ne porte souvent que sur les items travaillés pendant
l’entraînement. Autrement dit, il n’y a pas de généralisation mais plutôt un
réapprentissage items spécifiques.

De plus, les effets disparaissent rapidement après la fin de la prise en charge.

Ainsi, l’approche cognitive semble être intéressante pour le réapprentissage de mots


importants pour les activités de la vie quotidienne, mais l’absence de généralisation
et le maintien restreint représentent des limites importantes.

APP VARIANTE NON FLUENTE ET VARIANTE LOGOPÉNIQUE

Ici, les difficultés mises en avant seraient l’anomie, l’agrammatisme, les difficultés
phonologiques ainsi que les difficultés de compréhension. Un entraînement portant sur
de la dénomination d’images avec la possibilité d’apporter des indices
phonologiques serait proposé au moyen du logiciel « Moss talk word » par exemple.

La thérapie Semantic Feature Analysis (SFA) est dédiée aux APP non fluentes. Son but
est d’améliorer la dénomination via l’activation des représentations sémantiques.
Toutefois, seule une amélioration sur les items entraînés est observable ; il n’y a aucune
généralisation.

La thérapie Phonological Component Analysis (PCA) a pour but d’améliorer la


dénomination via l’activation des traits phonologiques. Ici, il est possible d’observer
une amélioration de la dénomination des items entraînés ainsi qu’un maintien des
effets du traitement sur une période de quatre semaines à un an. Également, une
généralisation sur les items non traités est présente.

46
INTERVENTIONS PARTICIPATIVES

L’objectif des interventions participatives est d’améliorer l’efficacité


communicationnelle dans le discours via l’utilisation des capacités langagières
résiduelles afin d’améliorer la qualité de vie.

En fait, elles visent à renforcer l’usage des capacités de communication c’est-à-dire


l’expression des pensées et des sentiments, mais aussi à développer les échanges
avec l’entourage dans le but de généraliser au quotidien.

Dès lors, ici il n’y a pas d’apprentissage d’items précis.

Voyons ce qu’avance la littérature scientifique.

APP VARIANTE SÉMANTIQUE

Il a été proposé au patient de participer à des activités sociales. Cela a permis de le


sensibiliser aux tours de parole, de l’encourager à utiliser divers modes de production
ou encore à donner son opinion. Cette thérapie a nécessité également un
entraînement avec sa conjointe.

Après deux ans de thérapie, une détérioration des capacités de production est
notable. Mais, le patient est capable de véhiculer un message de façon efficace en
combinant divers modes de communication et, il participe aux conversations. Cela
évite donc l’état de frustration et de retrait.

APP VARIANTE NON FLUENTE ET VARIANTE LOGOPÉNIQUE

Il a été proposé une tâche de compréhension de paragraphes courts et de


production orale ou écrite de courtes phrases. Puis, après avoir vu des scènes illustrées,
le patient devait les dessiner de mémoire. Il y a eu aussi un travail en collaboration
avec son époux.

De plus, une autre activité a été proposée. Elle consistait à visionner des programmes
télé afin de susciter la discussion et d’améliorer la compréhension du discours.

De manière générale, les habiletés de communication se sont améliorées dans les


deux activités proposées.

Ainsi, les interventions participatives présentent un caractère écologique qui permet


alors de maintenir une communication fonctionnelle. Néanmoins, l’implication de

47
l’entourage est nécessaire ce qui peut rendre la mise en place d’une telle prise en
charge difficile et, l’efficacité est difficile à mesurer.

MÉTHODES COMPENSATOIRES OU DE SUPPLÉANCE

L’objectif des méthodes compensatoires ou de suppléance est de pallier les


difficultés majeurs dans le quotidien.

Voyons ce que l’on trouve dans la littérature scientifique.

APP VARIANTE SÉMANTIQUE

Pour pallier les difficultés dans le quotidien, une étude a proposé à un patient qui
rencontrait des difficultés pour se remémorer les noms de ses collègues, d’utiliser un
carnet de notes. Puis, le patient s’est entraîné à utiliser un smartphone qui permet
d’inscrire les caractéristiques des personnes rencontrées afin d’obtenir leur identité.

Concrètement, ARCUS est une application personnalisée qui consiste à avoir à


disposition un répertoire virtuel et ouvert de noms propres permettant d’effectuer des
recherches en utilisant les indices personnels établis par le patient lui-même.

De cette étude il en ressort que le patient en question a utilisé l’application bien plus
souvent que son carnet de notes. En fait, au fil des années, il a aménagé son
smartphone pour chaque problème qu’il pouvait rencontrer (exemple : recherche sur
les encyclopédies en ligne).

APP VARIANTE NON FLUENTE ET VARIANTE LOGOPÉNIQUE

Une étude a mis en évidence que le fait de décrire une image avec le langage
gestuel faisait ressentir une meilleure aisance au patient que lorsqu’il utilisait un
dispositif de synthèse vocale (exemple : Dynavox).

Une autre étude a montré que l’utilisation d’un carnet de communication reprenant
les informations personnelles de la patiente dont elle était susceptible de parler
fréquemment permettait de maintenir des effets encourageants à long terme. Cela
a toutefois nécessité la formation des membres de la famille.

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Les méthodes compensatoires nous questionnent dès lors sur l’apport des nouvelles
technologies.

Les nouvelles technologies, en l’occurrence les tablettes et les smartphones,


permettent le développement d’approches écologiques adaptées aux besoins de la
personne dans ses activités quotidiennes et professionnelles.

L’utilisation de ces outils génère de nombreux avantages : l’utilisation non


stigmatisante en public, la facilité pour prolonger le travail en dehors des séances, la
généralisation en augmentant le nombre d’items par rapport à un carnet de
communication ou encore l’efficacité.

Leur utilisation amène aussi quelques inconvénients : la nécessité d’avoir un


apprentissage et une adaptation individualisée, le prix coûteux de posséder un tel
outil ou encore le danger de se couper des interactions sociales et de s’isoler.

Par conséquent, l’utilisation des nouvelles technologiques est intéressante mais les
méthodes compensatoires ne doivent pas s’y limiter.

Pour utiliser les nouvelles technologies, 3 étapes sont nécessaires :

1. Identifier le mode de communication optimal pour la personne


2. Identifier avec la personne ses objectifs et ses intérêts personnels
3. Choisir la technologie qui répond le mieux aux besoins et entraîner la personne
dans le but d’atteindre une utilisation optimale

EN PRATIQUE

APP VARIANTE SÉMANTIQUE

En pratique, la prise en charge d’une APP variante sémantique passe par la prise en
compte des besoins de la personne afin d’améliorer son autonomie et sa qualité de
vie.

Néanmoins, il faut garder en tête que la prise en charge s’inscrit dans un contexte
dégénératif et que par conséquent nous devons mettre en place des objectifs avec
un impact direct et rapide sur le quotidien de la personne.

Idéalement, la prise en charge devrait combiner les trois méthodes que nous venons
de détailler de la manière suivante : réapprendre des mots soigneusement choisis,
intégrer une approche participative pour favoriser l’implication de la personne dans
la communication et, intégrer une approche compensatoire pour pallier les difficultés
rencontrées dans le quotidien.

49
Dans l’APP variante sémantique, nous savons que l’égocentrisme sémantique
apparait à un certain moment. En fait, le patient se centre sur lui-même, il manque
d’empathie et il adopte un monologue égocentré.

Cet égocentrisme apparait même dans les exercices car le patient rencontre des
difficultés pour admettre et pour intégrer d’autres représentations (exemple : la
louche travaillée en rééducation ne correspond pas à la louche qu’il utilise à la
maison).

Dès lors, au début nous devons privilégier un travail portant sur les généralisations
(exemple : appariement par identité, similitudes et différences) pour progressivement
partir du vécu du patient en utilisant ses propres objets par exemple.

En ce qui concerne le monologue égocentré, spontanément mais à contre temps, les


patients parlent de leurs problèmes ou de leurs expériences. S’ils s’arrêtent poliment
lorsque l’examinateur prend la parole pour recentrer le débat, ils reprennent
rapidement le même discours, insensibles aux remarques de l’entourage. Ce
monologue égocentré est particulièrement marqué lorsque l’examinateur converse
avec le conjoint. Le patient semble écouter poliment, mais spontanément ou lorsqu’il
est invité à donner son opinion, il aborde un sujet complètement différent et hors
propos, centré sur sa propre existence.

APP VARIANTE AGRAMMATIQUE ET LOGOPÉNIQUE

Dans la littérature scientifique les deux variantes ne sont pas toujours différenciées alors
que l’APP non fluente résulte d’un déficit du traitement syntaxique et de planification
des gestes articulatoires et que l’APP variante logopénique résulte d’une répercussion
d’un déficit de mémoire de travail sur le traitement syntaxique et sur la répétition de
phrases. Par conséquent, le manque du mot est prédominant dans l’APP logopénique
alors que c’est l’agrammatisme et l’apraxie verbale qui le sont dans l’APP non fluente.

Les approches conventionnelles de rééducation des troubles du langage semblent


efficaces mais ici le caractère dégénératif laisse émerger la notion d’urgence.

Ainsi, il est nécessaire de mettre en place des stratégies de compensation de manière


précoce avant la diminution trop importante des capacités communicationnelles. La
prise en charge ne doit pas se baser uniquement sur le réapprentissage des fonctions
langagières atteintes, mais elle doit aussi renforcer les fonctions langagières
préservées ce qui évite de mettre le patient en situation d’échec trop souvent. Et, il
est nécessaire d’estimer les atteintes à moyen et à long terme.

En bref, il est important de mettre en place des approches directement orientées vers
les besoins de la personne dans le but d’améliorer ou de maintenir son autonomie
dans le quotidien.

50
Voici quelques pistes d’intervention :

- Inclure l’entourage
- Proposer une thérapie qui fait sens pour le patient
- Combiner les 3 approches même si la mesure de l’efficacité est difficile
- Prise en charge spécifique vers une prise en charge globale incluant l’anxiété,
les troubles cognitifs, les troubles moteurs, la perte d’autonomie et le burn out
de l’entourage

APPROCHE ÉCOSYSTÉMIQUE (T. ROUSSEAU)

La thérapie écosystémique de la communication a été développée par Thierry


Rousseau.

Son objectif repose sur le maintien de la communication et du lien le plus longtemps


possible en adaptant la communication de l’entourage dès le stade modéré.

Pour rappel, la communication dans la maladie d’Alzheimer est altérée comme suit.

On observe une désintégration du langage avec un manque du mot de plus en plus


marqué.

Au niveau des aspects généraux du discours, on constate une altération de la


transmission de l’information, de l’efficacité marquée par une diminution du nombre
d’idées produites, de la cohésion lexicale et de la cohérence qui se manifeste par des
changements de sujets, des éléments qui ne s’enchainent pas ou encore des
contradictions.

Au niveau des aspects spécifiques du discours, il existe une altération de la


compétence narrative qui nécessite alors l’aide des proches, de la gestion des tours
de parole et des actes de langage qui peuvent être potentiellement préservés si les
patients disposent d’un temps suffisamment long pour répondre, des procédures de
réparation et, du contexte de communication.

On observe aussi une atteinte de la communication non verbale qui peut tout de
même faciliter la communication en l’occurrence la communication gestuelle.

Par ces altérations, le comportement de l’interlocuteur est important. Il est


recommandé d’éviter de souffler ou de soupirer quand on ne comprend pas quelque
chose et d’éviter de faire comme si on avait compris.

Dès lors les processus de communication utilisés sont les suivant :

- Une simplification des actes de langage en adoptant un discours bref

51
- Une diminution des actes demandant un traitement cognitif actif qui se traduit
par l’utilisation moindre de questions
- Une diminution de l’intérêt à la communication car quand le patient parle il
n’a pas toujours un feedback positif
- L’apparition de comportements visant à mettre fin à la communication

Dans cette approche, les patients sont évalués d’un point de vue pragmatique et
écologique.

En fait, au moyen d’une grille d’évaluation (GECCO), on évalue leurs capacités de


communication dans une optique thérapeutique. On filme le patient dans 3 situations
de communication : une entrevue dirigée, une tâche d’échange d’informations de
type PACE et une discussion libre.

En filmant le patient dans trois situations différentes, on peut alors comparer et analyser
les actes de langage utilisés, absents, inadéquats et compris. Cela permet de dresser
un profil de communication du patient puis d’aider l’entourage à adapter son
comportement de communication aux difficultés spécifiques du patient.

Puis, nous proposons un questionnaire aux aidants (QCA) afin de mesurer la fréquence
d’utilisation des actes de langage (exemple : votre proche pose des questions
auxquelles on répond oui/non) ainsi que la fréquence de causes de l’inadéquation
du discours (exemple : votre proche utilise des mots ou des expressions qui n’existent
pas et qui empêchent de le comprendre).

Concernant la prise en charge, nous intervenons auprès du patient et auprès de


l’entourage.

Nous modifions notre discours pour permettre au patient de comprendre et d’utiliser


les actes de langage le plus longtemps possible. Par exemple, nous proposons des
thèmes facilitateurs (exemple : la météo), nous facilitons et permettons l’émission
d’actes de langage encore maîtrisés, nous évitons les facteurs inhibiteurs ou bien nous
faisons en sorte que le patient puisse s’appuyer sur le discours de son interlocuteur
pour construire le sien.

Voici quelques exemples de conseils proposés :

- Si les actes adéquats sont plus nombreux lors de l’entrevue dirigée : échanger
avec le proche en posant des questions
- Si les actes adéquats sont plus nombreux lors de la tâche d’échange
d’informations : discuter avec le proche à partir de supports (exemple : photos,
journal, images)
- Si les actes adéquats sont plus nombreux lors de la discussion libre : laisser le
proche s’exprimer sur un sujet de son choix

52
PRISE EN CHARGE PSYCHOSOCIALE

BIEN-ÊTRE ET QUALITÉ DE VIE

Les interventions psychosociales cherchent à adapter l’environnement aux


particularités du vieillissement.

Concrètement, au niveau individuel l’objectif est d’optimiser le bien-être et la qualité


de vie de la personne tandis qu’au niveau sociétal l’objectif est de prévenir pour
réduire les expressions problématiques du vieillissement cérébral et cognitif.

Le bien-être et la qualité de vie sont des notions subjectives pour lesquelles plus il
persiste une approche individualisée et personnalisée, plus il y a de chances pour que
le bien-être et la qualité de vie soient optimales.

Il est nécessaire de sélectionner des activités cognitives signifiantes pour la personne


et d’adapter les interventions en fonction de ses difficultés spécifiques rencontrées
dans la réalisation de ces activités.

Afin d’appuyer sur l’approche individualisée, nous allons conseiller de reprendre une
activité (exemple : tricot, peinture) en lien avec un objectif stimulant (exemple :
tricoter un gilet pour la naissance d'un arrière-petit-enfant), de maintenir une activité
(exemple : rouler à vélo, garder ses petits-enfants après l’école) ou encore de
maintenir de la communication dans un contexte précis.

En fait, par ces moyens, on cherche en réalité à maintenir un sentiment d’utilité et un


rôle social.

RÉAPPROPRIATION DE SOI

Dans la prise en charge psychosociale, le processus de réappropriation de soi est


également important.

Il se compose de 5 éléments :

- Être en relation
- Espoir et optimisme concernant le futur
- Sentiment positif d’identité
- Un sens à la vie
- Un sentiment de contrôle de son existence

53
Dès lors, il est important d’intégrer ces composantes dans les objectifs d’interventions
individualisées.

Une étude a par ailleurs montré qu’il existe une amélioration significative du bien-être
plus importante lorsque la prise en charge est centrée sur le rôle de la personne
(exemple : en tant qu’épouse, que grand-père) que lorsqu’elle est centrée sur les
symptômes des troubles neurocognitifs majeurs.

Pour favoriser ce processus de réappropriation de soi, une étude a montré


l’importance d’intervenir sur le bilan de vie. En effet, cela aurait un effet bénéfique sur
le bien-être, l’humeur, la mémoire et la communication.

En pratique nous pouvons proposer la tenue d’un album, d’une biographie, de


témoignages, de lettre du futur ou encore de directives anticipées.

APPROCHE MONTESSORI ADAPTÉE AUX PERSONNES ÂGÉES

L’approche Montessori a pour objectif de favoriser l’engagement des personnes


dans des activités porteuses de sens et procurant un rôle social.

Les activités doivent être choisies en fonction de l’histoire de vie et des intérêts de la
personne.

Elles doivent permettre d’exploiter les capacités résiduelles et préservées en passant


par des techniques d’apprentissage sans erreurs, en sensibilisant la mémoire de travail
et en insistant sur l’organisation des étapes et du matériel.

Voici quelques principes propres à l’approche Montessori :

- Inviter à participer à l’activité, demander son aide


- Laisser des choix dans les activités
- Toujours veiller à la réussite de la personne
- Proposer des degrés d’assistance et de complexité croissants
- « Ne fais pas à ma place ce que je peux faire moi-même »

PRISE EN CHARGE PSYCHOÉDUCATIVE/ACCOMPAGNEMENT DES


AIDANTS PROCHES

Dans cette partie du cours, nous allons évoquer quelques pistes d’intervention auprès
des aidants proches.

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1ères situations : les questions répétitives

« Je dois constamment lui répéter la même chose et cela devient usant. On dirait qu’il
le fait exprès ! Parfois, j’ai tellement envie de m’énerver ».

à On peut expliquer la cause des questions répétitives en évoquant les difficultés


mnésiques, l’anxiété et le stress.

« Mon mari me demande toute la journée ce qu’on va manger pour le souper. Cela
m’épuise de lui répéter toujours la même chose ».

à On peut conseiller d’afficher tous les menus prévus en faisant attention de toujours
mettre le menu au même endroit.

« Lorsque André a un rendez-vous à l’hôpital il pose sans cesse la même question et


demande quand est-ce. Il se prépare très longtemps à l’avance ».

à On peut essayer de comprendre ce qui angoisse André. On peut conseiller de ne


pas le prévenir trop longtemps à l’avance. On cherche ensemble la cause avec
l’aidant et on y répond pour apaiser le patient.

2èmes situations : face aux comportements

« Julia est persuadée que sa fille qui lui rend visite tous les jours lui vole ses bijoux ».

à On peut conseiller la fille d’accompagner sa maman pour chercher les bijoux en


formant une équipe. Il est important de ne pas prendre pour soi la situation. Il faut
essayer de rester calme.

« Robert pense qu’on le poursuit dans l’appartement, que quelqu’un essaie de


l’attraper, cela le tracasse énormément ».

à On peut conseiller aux aidants de répondre à Robert qu’eux ne voient pas les
personnes mais qu’ils comprennent que voir quelqu’un chez lui doit lui faire peur. En
fait, on ne conseille pas d’aller dans le sens de la personne ni de la contredire.

« Mon papa veut continuellement appeler sa sœur décédée depuis quelques


années ».

à On peut conseiller aux aidants de questionner le père sur ce qu’il aimerait dire à sa
sœur. Il n’est pas forcément judicieux de rappeler à chaque fois le décès de la
personne au risque d’accentuer le stress, l’anxiété ou l’irritabilité.

Dans le vieillissement difficile, nous devons essayer de comprendre les émotions et


la réalité subjective de la personne âgée. Pour cela, on essaie de rentrer dans le jeu
du patient en validant ses émotions.

Dans le délirium en revanche, nous devons essayer de remettre le patient dans la


réalité en le différenciant du jour et de la nuit, en lui mettant ses lunettes et/ou ses
appareils auditifs, etc…

55
CARACTÉRISTIQUES DE L’AIDANT PROCHE

La famille représente l’aide de première ligne.

85% des patients présentant des troubles neurocognitifs majeurs sont pris en charge
par un proche à domicile.

L’aidant proche dispose généralement de peu d’informations à propos de la maladie


et manque cruellement d’expérience pour apporter des soins à ce type de patient.

Il est donc fréquemment exposé à des situations stressantes et difficiles à gérer.

Un aidant est une personne qui vient en aide, à titre non professionnel, à une personne
âgée dépendante de son entourage, pour les activités de la vie quotidienne.

Il s’agit de celui ou de celle qui au quotidien et sur une période dépassant 12 mois va
répondre aux besoins grandissants de la personne qu’il accompagne.

Voici quelques pourcentages en ce qui concerne la population des aidants :

- 69% des aidants sont des femmes


- 69% des aidants ont plus de 50 ans
- 39% des aidants ont plus de 65 ans
- 51% des aidants sont les conjoints
- 25% des aidants sont les enfants
- 90% des aidants sont présents au moins 1 fois par semaine dont 63% sont
présents quotidiennement
- Les aidants sont dans leur rôle en moyenne depuis 4 ans

Le choix de l’aidant peut dépendre de caractéristiques personnelles qui ne laissent


pas toujours le choix (exemple : être une fille, célibataire, vivant à proximité, travaillant
dans le domaine du soin). Mais, l’aidant peut aussi se désigner lui-même ; il occupe
donc une place privilégiée qui est difficile à quitter ensuite.

En général, persistent les notions de dettes, de devoir et de don.

Le rôle d’aidant peut amener des incidences sur la santé physique et psychique en
raison de plusieurs causes : isolement, temps au quotidien, caractère invisible de la
pathologie, pas d’espoir de guérison, culpabilité, ambivalence des sentiments,
inversion de l’ordre des générations, peu de reconnaissance de l’aide fournie ou
encore manque de coopération.

56
La notion de fardeau est souvent présente chez les aidants.

En fait, il existe la notion de fardeau objectif mais surtout subjectif qui est en lien avec
le temps passé à s’occuper de la personne par rapport à sa qualité de vie.

Plusieurs facteurs de stress peuvent alors survenir. Ils sont directs (exemple : agressivité)
ou indirects (exemple : difficultés financières).

LES CARACTÉRISTIQUES DES PATIENTS ET DES AIDANTS QUI INFLUENCENT LE


FARDEAU SUBJECTIF ET LA DÉPRESSION CHEZ LES AIDANTS

Plusieurs caractéristiques propres aux patients influencent le fardeau subjectif et la


dépression chez les aidants.

Concrètement, la présence de troubles du comportements plus importants que les


troubles cognitifs représente une caractéristique majeure. Parmi les comportements
en question ce sont majoritairement la dépression, l’agitation et l’apathie qui font
partis des caractéristiques évoquées. À noter que 86% des problèmes rencontrés sont
en rapport avec les changements comportementaux liés à la maladie.

Certaines caractéristiques des aidants influencent leur fardeau subjectif et la


dépression :

- Le coping de l’aidant centré sur les émotions plutôt que sur les problèmes
- Les traits de personnalité de l’aidant (neuroticisme VS optimisme)
- Les compétences de l’aidant en lien avec le fait de se sentir compétent, le
sentiment d’efficacité personnelle et le sentiment de maîtrise

Certaines caractéristiques des patients et des aidants influencent le fardeau


subjectif et la dépression chez les aidants.

En fait ce sont les caractéristiques de la relation entre le patient et son proche qui
influencent. Concrètement, les difficultés mais aussi les bénéfices de la relation d’aide
entrainent un renforcement du lien, une valorisation de l’estime de soi, le sentiment
d’utilité ou encore la possibilité d’offrir en retour ce que l’on a reçu enfant.

Lorsque l’aidant passe la main au moment d’une entrée en institution notamment, les
aidants naturels vivent encore un niveau important de fardeau subjectif.

Ils ont un sentiment de culpabilité, d’échec et de dévalorisation.

Il y a en général une dégradation des capacités cognitives du proche institutionnalisé.

57
Il y a une perte des aspects positifs de la relation d’aide amenant dès lors un
changement du sens du rôle d’aidant.

L’accompagnement des aidants ne doit pas s’arrêter lors de l’entrée en institution de


son proche.

Plusieurs recommandations sont amenées en ce qui concerne les interventions non


pharmacologiques :

1. Proposer un support et une formation des aidants informels accompagnés


d’interventions à domicile. Cela favorise l’humeur, le bien-être et la qualité de
vie de l’aidant.
2. Proposer une formation du personnel soignant en institution. Cela amène des
effets aussi sur les résidents et diminue l’usage des contentions.
3. Proposer un programme d’activité physique à domicile ou en institution.
4. Proposer un entraînement cognitif. Les résultats sont assez divergents sur ce
point.

Il est intéressant de préciser l’idée que le support et la formation des aidants informels
sont plus efficace s’ils :

- Proposent un soutien de longue durée aux aidants proches. Il s’agit de la seule


intervention qui permet de reculer l’institutionnalisation du patient.
- Proposent des prises en charge multidimensionnelles
- Sont effectués par un personnel spécifiquement formé
- Se composent d’interventions individualisées, flexibles et adaptées pour
répondre au mieux à leurs besoins

LA PSYCHOÉDUCATION

La psychoéducation est un programme centré sur la compréhension de la maladie


ainsi que sur la manière de prendre soin de soi et du patient.

Le but de la psychoéducation est alors de transmettre des techniques spécifiques afin


de comprendre et d’atténuer la détresse mentale de l’aidant proche.

Généralement ce dispositif est organisé en groupes.

Concrètement, on apprend aux proches d’une part à éviter les situations de double
tâche (exemple : contexte bruyant, demander une chose à la fois) et d’autre part à
utiliser des situations de reconnaissance plutôt que de rappel (exemple : « qui a
appelé ? Maurice ou Anne ?).

58
L’objectif de l’accompagnement individualisé est d’aider le proche aidant dans sa
compréhension de la maladie, des symptômes associés et d’offrir des solutions pour
des problèmes spécifiques.

En fait, l’objectif est de cibler les difficultés spécifiques à chaque patient et à chaque
situation.

En réalité, devenir aidant ça s’apprend : partager ses préoccupations – apprendre à


faire face aux difficultés – mieux communiquer pour vivre des moments agréables
avec son proche – utiliser ses forces et ses expériences de vie pour prendre soin de
son proche – mettre à contribution sa famille et les membres de son entourage –
connaître les ressources de son milieu, y faire appel et préparer l’avenir – ses
apprentissages et ses accomplissements.

Le respect de ces étapes amène des résultats positifs sur plusieurs aspects de la qualité
de vie des aidants :

- Plus confiants dans leurs capacités à composer avec leur nouveau rôle
- Se perçoivent comme plus efficaces et mieux préparés à prodiguer des soins
- Plus capables de planifier leur situation future
- Meilleure connaissance des services disponibles
- Usage plus fréquent de stratégies de résolution de problèmes et de recadrage
cognitif pour composer avec leurs difficultés quotidiennes
- Apprentissage de stratégies pour mieux communiquer avec leur parent âgé et
pour faire appel plus facilement aux ressources

Pour conclure, il est important d’inclure les aidants dans la prise en charge des
personnes âgées présentant un vieillissement cognitif difficile.

Chaque vieillissement difficile s’inscrit dans une histoire de vie et de famille unique qu’il
est nécessaire de prendre en compte.

59
CHAPITRE 4 : TROUBLES DE LA DÉGLUTITTION CHEZ LA
PERSONNE ÂGÉE

MODIFICATIONS LIÉES À L’ÂGE : PRESBYPHAGIE

Le vieillissement amène des modifications chez les personnes âgées à différents


niveaux.

D’abord, des modifications sont observables au niveau des grandes fonctions de


l’organisme.

Concrètement, le système nerveux se caractérise par une diminution du contrôle


moteur et de l’adresse, par des troubles sensoriels ou encore par un ralentissement
des fonctions cognitives (exemple : troubles de la mémoire, de l’attention, diminution
des capacités d’apprentissage).

Le système locomoteur est marqué quant à lui, par une diminution de la force
musculaire et de l’habileté motrice avec une amyotrophie globale.

Enfin, au niveau du système respiratoire, l’efficience respiratoire diminue avec l’âge


et, la durée de l’apnée augmente pendant la déglutition.

Puis, le vieillissement entraîne des modifications au niveau des structures.

Au niveau de la cavité buccale, les muqueuses sont plus vulnérables et leurs pouvoirs
de cicatrisation sont diminués. L’os alvéolaire tend à s’atrophier ce qui provoque
généralement des problèmes au niveau des dentiers. Les lèvres tendent à s’invaginer
et leur tonus diminue favorisant dès lors le bavage.

Pour ce qui est de la mâchoire, il est possible d’observer une disparition osseuse ainsi
qu’une diminution de la mobilité de l’articulation temporo-mandibulaire ce qui va
alors impacter la mastication.

Le pharyngo-larynx se modifie au moyen d’une ossification des cartilages laryngées


affectant sa mobilité. Également, il existe une diminution de la pression du sphincter
supérieur de l’œsophage qui doit normalement s’ouvrir pour laisser cheminer les
aliments du pharynx à l’œsophage.

Finalement, des modifications sont présentes au niveau des fonctions associées au


mécanisme de déglutition.

60
En effet, la respiration, l’odorat et le goût sont fortement impactés par le vieillissement.
Concernant l’odorat, les capacités de discrimination, de dénomination et de
mémorisation des odeurs diminuent. Pour le goût, il y a une perte de 60% des
bourgeons situés dans la bouche ce qui rend les saveurs difficilement identifiables et
différenciables. Ainsi, ces modifications favorisent le désintérêt pour l’alimentation
risquant même l’anorexie.

Les modifications touchent les trois temps de la déglutition.

Pendant le temps oral : mise en bouche des aliments difficile, bavage, mastication
plus longue et moins efficace, bol alimentaire difficile à gérer en raison d’un manque
de salive, mouvements de la langue réduits, défaut de contention postérieure ce qui
entraîne des fuites précoces, seuil de détection des stimuli plus élevé, réflexe de
déglutition déclenché plus tardivement, plaisir de manger diminué.

Pendant le temps pharyngé : retard du déclenchement du temps pharyngé,


ossification des cartilages laryngés ce qui rend le larynx moins mobile laissant donc
plus de stases alimentaires dans la gorge, élévation laryngée diminuée, trouble de la
relaxation du sphincter supérieur de l’œsophage, durée d’ouverture du sphincter
diminuée. Par conséquent, la durée totale du temps pharyngé augmente, la quantité
de stases alimentaires dans les vallécules et dans les sinus piriformes est plus importante
et, le risque de fausse route augmente.

Pendant le temps œsophagien : le péristaltisme diminue et le sphincter inférieur de


l’œsophage devient moins efficace ce qui entraîne un risque de reflux gastro-
œsophagien.

Pour conclure, la déglutition est moins efficace. Lorsque la personne âgée compense
bien ses difficultés et qu’elle ne fait pas de fausse route, on parle de « presbyphagie ».
lorsque des fausses routes sont présentes, on parle de « dysphagie ». Autrement dit, la
fréquence et l’importance des fausses routes jouent le rôle de curseur entre la
presbyphagie et la dysphagie.

DYSPHAGIE

DÉFINITION

La dysphagie est décrite comme des difficultés à avaler. En fait, il s’agit d’un trouble
du transfert de la nourriture de la bouche vers l’estomac en passant par le pharynx et
l’œsophage.

La dysphagie n’est pas à confondre avec l’odynophagie qui renvoie à l’idée d’avoir
mal lorsque l’on avale (exemple : lorsque l’on est malade).

61
Généralement, la dysphagie s’accompagne de fausses routes aussi appelées fausses
déglutition ou encore l’idée d’avaler de travers. Toutefois, il ne faut pas forcément
avaler de travers pour être dysphasique (exemple : ne plus savoir avaler et donc
garder le bolus en bouche ou le recracher).

La dysphagie peut être constante ou intermittente ; il est donc nécessaire d’évaluer


le patient régulièrement.

Elle ne peut concerner que certains aliments distinguant alors les liquides et les solides.

Il existe différents degré de gravité pouvant aller de légère à sévère.

La dysphagie peut survenir aux différents temps de la déglutition (avant, pendant,


après).

L’apparition peut être brutale dans le cas d’un AVC par exemple ou plutôt progressive
ce qui est souvent le cas en gériatrie.

La fausse route constitue le symptôme majeur de la dysphagie.

POURQUOI UNE PRISE EN CHARGE ?

La dysphagie concerne plusieurs pathologies :

- Les atteintes neurologiques (exemple : AVC, tumeurs, maladies dégénératives,


maladies neuromusculaires)
- Les affections ORL (exemple : cancer de la sphère ORL, post-chirurgie ORL)
- Post-intubation (intubation >48h)
- Seniors (dénutrition, syndrome inflammatoire, médication)
- Reflux gastro-œsophagien (n’est pas à une cause à proprement parler mais s’il
est important alors il irrite et provoque beaucoup de toux)
- Chirurgies de la colonne cervicale

La fonction de déglutition est très importante au sein de la journée. Effectivement,


nous déglutissons jusqu’à 2400 fois en 24 heures.

Les conséquences suites à une dysphagie sont importantes.

Dans le cas d’une déglutition à risque, la conséquence principale est l’aspiration aussi
bien au niveau de la salive que du reflux gastrique. Cela entraîne des épisodes de
désaturation, de pneumopathie et dégrade la qualité de vie.

Dans le cas d’une déglutition inefficace, la conséquence principale est la dénutrition


ce qui provoque une perte de poids et de la déshydratation.

62
De manière générale, la dysphagie prolonge la durée d’hospitalisation ; il est donc
nécessaire de dépister le trouble de manière efficace.

DÉPISTAGE

Dans le domaine de la dysphagie, plusieurs tests de dépistage ont été mis au point.

Parmi ces tests il existe le BJH-SDS, le Water Swallow Test, le MBSS, le TOR-BBST ou encore
le GUSS par exemple.

Pour autant, la plupart de ces évaluations utilise l’eau non-épaissie alors que les semi-
liquides sont moins risqués pour le patient. De plus, aucun de ces tests ne propose une
évaluation objective de la déglutition que ça soit au moyen du test au bleu (FEES) ou
de la vidéo (VFS) pour tous les patients. Également, ces outils étudient essentiellement
des populations neurologiques et particulièrement ceux qui ont subi un AVC. Enfin, la
mise en place de ces outils n’est pas toujours aisée et nécessite parfois une formation
payante.

Dès lors, les professionnels d’Érasme ont souhaité créer et valider un test de dépistage
utilisable par tout le personnel soignant qui comblerait les lacunes des tests actuels. Et,
ce test permettrait de sélectionner les patients qui ont besoin d’une évaluation
logopédique plus approfondie.

Par conséquent, plusieurs recommandations sont à tenir en compte pour créer ce test
de dépistage : il ne faut pas proposer de questionnaire, il faut inclure des observations
cliniques et un test de déglutition, il faut proposer différentes viscosités et, il faut
comparer les résultats au gold standard (FEES et VFS).

Dans le domaine de la dysphagie, la sensibilité est plus importante que la spécificité


en ce qui concerne les tests de screening.

Pour rappel, la sensibilité renvoie à l’idée que le test est positif quand la personne est
atteinte et, la spécificité renvoie à l’idée que le test est négatif quand la personne
n’est pas atteinte.

Concrètement, en matière de dépistage, les patients à risque sont soumis à un test de


screening de la dysphagie. S’il est négatif, on considère que le patient peut manger
seul ou que nous devons lui donner à manger. Si le test est positif, d’abord est
proposée une évaluation nutritionnelle généralement effectuée par une
diététicienne. Puis, on effectue une évaluation logopédique plus complète. De là, si
l’on estime que le risque de dysphagie est élevé on propose une prise en charge

63
logopédique, sinon une personne sensibilisée à la dysphagie est réquisitionnée pour
surveiller.

Pour conclure, il est primordial d’identifier les paramètres et les signes cliniques
pertinents en unité de gériatrie.

Le fait que le test dispose d’une bonne sensibilité, le dépistage des patients
dysphagiques aux semi-solides et aux liquides est efficace.

Il est possible de proposer un régime en attendant l’évaluation complète de


logopédie.

Il semble ici intéressant de préciser que la présence d’une pneumonie droite


accentue le risque de la dysphagie car la trachée est orientée vers la droite.

INTERVENTION LOGOPÉDIQUE : PARTICULARITÉS DU PATIENT


GÉRIATRIQUE

L’intervention logopédique peut être curative ou compensatoire. Si elle est curative,


le but de l’intervention est de récupérer la fonction ; si elle est compensatoire on
cherche à adopter des stratégies de contournement.

Dans tous les cas, le principal objectif de la prise en charge logopédique est de
maintenir la fonction de déglutition.

En fait, nous devons prévenir les fausses routes et les infections respiratoires en
proposant l’alimentation orale la plus sure et la plus efficace possible.

La prise en charge concerne idéalement tous les patients diagnostiqués


dysphagiques. Mais en réalité, nous devons prendre en compte l’état général et
cognitif de la personne ainsi que la présence de conscience et de compréhension
des troubles.

Il est également nécessaire d’éduquer l’entourage.

D’un point de vue purement organisationnel, on préconise généralement 2 à 3


séances de 30 minutes de logopédie par semaine si l’objectif est curatif même si
généralement les personnes âgées tiennent 20 minutes. Si l’objectif est compensatoire
alors on propose de réévaluer l’évolution de l’état général tout en faisant attention
aux fluctuations présentes.

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Voici quelques exemples d’exercices spécifiques proposés en logopédie : imitation
de la déglutition, mastication, motricité et tonus de la langue, contrôle du bolus
alimentaire, stimulation du réflexe de déglutition, respiration.

De manière générale, nous travaillons de manière collaborative et active.

ADAPTATION DE L’ENVIRONNEMENT

La prise en charge logopédique consiste également à adapter l’environnement du


patient.

D’abord, au niveau de l’environnement direct, nous devons éviter les distractions et


toutes les sollicitations sonores et visuelles excessives. Nous devons aussi diminuer
l’anxiété liée à la prise alimentaire en prodiguant des encouragements et en
dédramatisant le moment du repas par des informations simples et claires. Nous
devons également accompagner le patient en se plaçant à son niveau dans le but
de favoriser une bonne installation.

L’installation idéale du patient est telle que les pieds sont posés au sol, un angle de
90° se forme entre le tronc et les hanches et, le dos et la tête sont alignés sur le corps.
Pour favoriser cette installation, nous pouvons installer un coussin derrière la tête. Si
cette position n’est pas possible et que la prise en charge se fait au lit du patient, alors
son dos doit être relevé.

Puis, nous pouvons choisir des ustensiles adaptées aux besoins du patient en
proposant un verre à échancrure nasale, une cuillère à café, un verre bec de canard,
etc. Le choix des ustensiles permet de respecter les caractéristiques du bolus. En fait,
cela permet de prendre une bouchée/gorgée à la fois, de prendre des petites
bouchées/gorgées, d’aller lentement, de bien respirer entre les bouchées, d’assimiler
les saveurs, les odeurs et la température des aliments qui stimulent les différents temps
de la déglutition.

Enfin, nous devons gérer le repas au moyen de plusieurs éléments : favoriser les
pauses pour permettre une bonne vidange pharyngée, fractionner les repas si
nécessaire pour diminuer la fatigabilité, inciter le patient à ne pas parler pendant le
repas, stimuler la mastication, encourager la déglutition à vide ou encore maintenir la
position assise 30 minutes après le repas.

MODIFICATIONS DE COMPORTEMENTS

La prise en charge logopédique passe également par la modification du


comportement de déglutition.

65
Pour cela, nous agissons soit sur les manœuvres qui permettent de changer la
physiologie de la déglutition et donc de diminuer le risque de fausses routes, soit sur
les postures qui permettent de diriger le flux alimentaire et de modifier les dimensions
pharyngolaryngées à travers le positionnement de la tête.

Il existe plusieurs manœuvres de déglutition :

La déglutition d’effort : assure une vidange valléculaire maximum en


augmentant le mouvement postérieur de la base de la langue. En fait, la force de
propulsion et la contraction pharyngée sont augmentée.

La déglutition supraglottique : fermeture précoces et volontaires des cordes


vocales et nettoyage laryngée par une toux systématique

La déglutition super-supraglottique : même idée que la déglutition


supraglottique avec en plus l'utilisation d'un point d’appui musculaire de contre-
résistance. En fait, ça renforce la fermeture précoce des cordes vocales avec
l’adduction des bandes ventriculaires.

La manœuvre de Mendelhson : augmentation de l’ascension laryngée pour


augmenter la durée d’ouverture du sphincter supérieur œsophagien.

Au niveau des postures de la tête, chacune est à utiliser selon la situation :

La flexion antérieure : fléchir la tête en posant le menton sur le sternum quand


il y a un retard du déclenchement du réflexe de déglutition pour allonger le trajet des
aliments, élargir les vallécules et protéger les voies aériennes.

La rotation de la tête du côté lésé : menton près de l’épaule quand il y a un


dysfonctionnement unilatéral du larynx/pharynx pour diriger le bol alimentaire du côté
sain en écrasant le sinus piriforme du côté de la rotation.

La rotation de la tête du côté sain : oreille près de l’épaule quand il y a une


faiblesse unilatérale orale ou pharyngée pour diriger le bolus vers le côté sain.

En gériatrie, la proposition de manœuvre nécessite une participation active du


patient ainsi qu’un apprentissage spécifique. Ainsi cela dépend des capacités
cognitives et du bon contrôle de la respiration que possèdent le patient.

Pour ce qui est des postures, le patient doit aussi participer activement et apprendre
de manière spécifique ce qui nécessite la présence de capacités cognitives intègres.
Et, le contrôle de la tête doit être assuré ce qui nécessite une bonne mobilité des
cervicales.

66
NUTRITION ENTÉRALE EN GÉRIATRIE

La nutrition entérale est propice au débat pour les seniors très âgés non déments ; la
discussion avec le patient est dès lors nécessaire. En revanche ce type de nutrition
n’est pas recommandable en cas de démence avancée ; l’alimentation plaisir est
dès lors préférable.

La vision de la famille est particulière dans le cas de la nutrition. En effet, la proposition


d’une alimentation plaisir ou l’arrêt de l’alimentation est une prise de décision difficile
pour les familles.

En fait, la nutrition et l’hydratation renvoient à des besoins fondamentaux (mourir de


faim ou de soif). Ces notions sont en lien direct avec des aspects sociaux, le confort
de vie des patients ou encore la prolongation de la vie des patients.

Se pose la question de l’abandon de la nutrition en phase terminale. Il existe


différentes techniques de réanimation comme la ventilation mécanique ou le support
hémodynamique qui permettent un arrêt thérapeutique plus acceptable pour la
famille.

La nutrition entérale par sonde naso-gastrique chez les patients âgés peut être
proposée en cas de dysphagie ou de refus d’avaler. Néanmoins, après 2 semaines il
y a 46% de risque de développer une pneumonie d’inhalation et il y a 61% de patients
qui s’agitent et/ou qui arrache leur sonde.

D’autres complications peuvent exister comme des ballonnements, des douleurs, des
nausées, des vomissements ou des diarrhées.

L’adaptation physiologique au jeûne passe par plusieurs phases.

D’abord, il y a un maintien de l’équilibre glycémique. Ensuite, il y a une perte de cet


équilibre.

Concrètement, l’équilibre glycémique se met en place puis se rompt avec le corps


qui se met au repos, avec la sensation d’euphorie qui se développe ainsi qu’avec
l’augmentation du seuil de la douleur.

La perte de l’équilibre glycémique s’accompagne d’une baisse du métabolisme des


protéines et du glycogène hépatique, d’une diminution des urines, des selles, des
sécrétions respiratoires ou encore de la toux ainsi que d’une réduction du
métabolisme de base.

De manière générale, les conséquences du jeûnes sont les suivantes : effet


anorexigène des cétones (effet coupe faim des protéines qui se développe lorsque le
corps utilise du gras pour créer de l’énergie), augmentation du seuil nociceptif (en lien

67
avec la douleur), sensation d’euphorie avec préservation des fonctions supérieures et
de la vigilance ou encore, petites doses d’hydrates de carbone amenant une faim
irrésistible.

Il est intéressant de préciser que 34% des patients ont ressenti une faim modérée au
début et 63% n’ont jamais ressenti de faim.

Le but ultime de tout traitement devrait tendre à une amélioration du pronostic, du


confort, du bien-être ou de l’état général du patient. Un traitement qui n’arrive pas à
procurer un tel bénéfice devra être considéré comme inutile.

Ainsi, la renutrition en fin de vie ne répond pas à ces exigences. Les inconvénients sont
davantage supérieurs aux bénéfices.

Nous allons étudier un exemple concret en lien avec la nutrition artificielle chez le
patient dément.

Pour rappel, la démence résulte en une perte progressive des capacités cognitives,
verbales et fonctionnelles. Or, la nutrition nécessite la reconnaissance de l’aliment,
l’association à la sensation de plaisir, l’adaptation pour le porter à la bouche, le goût,
la mastication et la déglutition.

Les familles ne sont pas toujours conscientes de l’évolution de la maladie en raison


d’une influence culturelle, religieuse ou symbolique.

En tant que professionnel de santé, nous devons informer de l’évolution naturelle de


la démence qui se manifeste par une perte de mobilité, une perte de la capacité de
communiquer ainsi que des difficultés d’alimentation (apraxie, agnosie, dysphagie).

La nutrition entérale chez les patients âgés déments sévères n’améliore pas la survie,
n’améliore pas l’état nutritionnel, n’améliore pas les escarres, augmente les sécrétions
bronchiques, augmente la contention et augmente les réhospitalisations.

La nutrition artificielle n’est pas recommandée pour les patients âgées atteints de
démence.

Une alimentation plaisir prudente n’est pas plus dangereuse qu’une nutrition
artificielle, en termes de décès, de pneumonie d’inhalation et de confort.

La nutrition artificielle entraîne de l’agitation, augmente le recours à la contention, à


l’hospitalisation et aux escarres.

Un effort tout particulier doit être fait pour optimaliser l’environnement et favoriser
l’alimentation plaisir par une approche individuelle.

68
En cas de décision de mise en place d’une nutrition entérale, il est nécessaire de
définir clairement l’objectif en concertation avec la famille ; définir de la mise en
place veut dire pouvoir décider également du retrait si l’objectif n’est pas atteint
après 1 ou 2 mois.

En ce qui concerne l’alimentation plaisir, plusieurs principes sont associés :

- Le repas est un moment de détente et non une tâche à réaliser le plus vite
possible.
- Environnement calme
- Préférences alimentaires du patient
- Pas de régimes restrictifs
- Adapter les textures
- Hydrater le repas améliore le goût des aliments

Pour conclure, la prise en charge ne relève pas uniquement de l’intervention


technique d’un professionnel comme la logopède. Elle est plus large et concerne
toutes les personnes qui approchent l’alimentation et la nutrition du patient
dysphagique.

L’éducation de l’entourage est très importante. Cette éducation doit concerner la


nature des troubles, le suivi du régime alimentaire ainsi que la compréhension des
stratégies d’adaptation mises en place.

ÉTAT CONFUSIONNEL AIGU

DÉFINITION

L’état confusionnel aigu est un dysfonctionnement cérébral de début brutal et dont


l’origine est multifactorielle.

Il s’agit d’un syndrome hétérogène qui se développe en raison d’interactions


complexes entre facteurs prédisposants et facteurs précipitants. En fait, ce
dysfonctionnement résulte d'une décompensation de la fonction cérébrale.

De manière générale l’état confusionnel aigu est un marqueur d’une vulnérabilité


cérébrale.

69
D’après les critères du DSM-V, l’état confusionnel aigu se caractérise par :

- Une perturbation de l’attention et de la conscience


- Une perturbation de la cognition : déficit mnésique, désorientation, trouble du
langage, trouble de perception
- Développement sur une courte période
- Changement aigu de l’état de conscience et de l’attention de base
- Tendance à fluctuer en intensité au cours d’une journée

Cet état est sous diagnostiqué chez les patients atteints de démence.

Il existe différents types d’état confusionnel aigu.

Le délirium hyperactif est caractérisé par une majoration de l’activité psychomotrice


(exemple : hypervigilance, agitation, irritabilité).

Le délirium hypoactif est caractérisé par une diminution de l’activité psychomotrice


(exemple : somnolence, apathie).

Le délirium mixte regroupe les symptômes d’hyperactivité et d’hypoactivité


psychomotrices intriqués.

Il existe plusieurs facteurs prédisposants : + 75 ans, troubles cognitifs, antécédent de


délirium, déficit fonctionnel, atteinte sensorielle, comorbidités (insuffisance cardiaque,
hépatique, rénale, respiratoire), dépression, antécédent d’AVC ou abus d’alcool.

Il existe plusieurs facteurs précipitants : médicaments et autres toxiques


(polymédication, sevrage, psychotropes, médications à effet anticholinergique),
chirurgie, anesthésie, atteinte neurologique aiguë (AVC, méningite, encéphalite),
maladies intercurrentes (infections, complications iatrogènes, désordres
métaboliques, fièvre, anomie, déshydratation, dénutrition, coma), l’environnement
(contention physique, admission aux urgences, aux soins intensifs, utilisation de
cathéters, immobilisation), douleur, rétention urinaire et fécale, stress émotionnel ou
privation de sommeil prolongée.

Il est important de prendre en considération le diagnostic différentiel :

DÉLIRIUM DÉMENCE PROBLÈME PSYCHIARTIQUE


Début brutal Début insidieux Début subaigu
Fluctuations Stable Stable
Conscience OK sauf si
Conscience perturbée Conscience OK
stade avancé

70
Hallucinations visuelles Hallucinations auditives
Hallucinations rares
fréquentes modérées
Activités psychomotrice Activité psychomotrice Activité psychomotrice
fluctuante fonctionnelle fluctuante
Discours désorganisé,
Discours ?? au début Discours variable
incohérent
Euphorique, triste ou
Humeur hostile Humeur souvent
irritable
Délires occasionnels,
Délires passagers Délires organisés
thème stable

La patientèle logopédique est souvent concernée.

L’état confusionnel aigu entraîne une dégradation temporaire de l’état de


conscience et de la vigilance ainsi que de la cognition.

Il est nécessaire de remettre le patient dans la réalité.

CHAPITRE 5 : LA DYSARTHRIE VS ANARTHRIE PRIMAIRE


PROGRESSIVE

LES DYSARTHRIES : RAPPEL (PAS EXAMEN)

DÉFINITION

La dysarthrie est un ensemble de troubles du contrôle moteur de la parole d’origine


neurologique, qui résulte d’une atteinte du système nerveux central ou périphérique.

Au sens plu large, il s’agit d’un dysfonctionnement articulatoire et/ou phonatoire


d’origine neurologique.

En fait, la dysarthrie est un trouble acquis de l’exécution motrice qui englobe les
atteintes limitées à un seul nerf crânien. À noter que les troubles mécaniques avec un
retentissement sur l’articulation sont exclus.

71
Voici un tableau qui différencie la dysarthrie de l’anarthrie :

DYSARTHRIE ANARTHRIE
Perturbation articulatoire constante Perturbation articulatoire variable
Pas de dissociation automatico-
Dissociation automatico-volontaire
volontaire
Peut s’accompagner de troubles
Pas de troubles linguistiques
linguistiques

CLASSIFICATION DES DYSARTHRIES

Il existe plusieurs types de dysarthrie.

DYSARTHRIE PARÉTIQUE (OU FLASQUE)

La dysarthrie parétique consiste en une atteinte des nerfs périphériques, de la


jonction neuromusculaire ou des muscles effecteurs de la parole.

Résonance :

- Nasonnement exagéré, émission nasale d’air au cours de la parole

Respiration :

- Inspiration et expiration parfois bruyantes

Articulation :

- Imprécise
- Points d’articulation intermédiaires => hypotonie, perte des traits distinctifs des
phonèmes
- Indifférenciation phonétique pour certains sons

Prosodie :

- Voix monotone
- Réduction de toutes les caractéristiques : intensité, hauteur, prosodie, débit

Voix :

- Hypophonie
- Voix rauque
- Faible intensité

72
DYSARTHRIE SPASTIQUE

La dysarthrie spastique peut résulter d’une atteinte bilatérale du motoneurone


central, d’atteintes pseudo-bulbaires ou d’un AVC.

Résonance :

- Hypernasalité

Respiration :

- Inspiration audible, tachypnée

Articulation :

- Imprécision des consonnes => production de cluster KO


- Distorsion des voyelles

Prosodie :

- Parole lente
- Monotonie
- Phrases courtes et laborieuses
- Rupture de hauteur
- Accentuation excessive

Voix :

- Forcée/étranglée
- Soufflée par intermittence
- Hauteur basse
- Raucité
- Peu modulable
- Monointensité

Cette dysarthrie s’accompagne aussi de rires et de pleurs spasmodiques.


Concrètement, le patient est neutre au niveau de l’émotion mais il a des rires ou des
pleures sans relation avec son état émotif.

DYSARTHRIE CÉRÉBELLEUSE (OU ATAXIQUE)

La dysarthrie cérébelleuse est la conséquence d’une atteinte du cervelet ou des


voies cérébelleuses.

Respiration :

- Reprises inspiratoires anarchiques

73
- Coordination pneumo-phonique KO => parole sur l’inspiration

Articulation :

- Dégradation intermittente de l’articulation


- Allongement des phonèmes
- Diadococinésies KO
- Distorsions des voyelles

Prosodie :

- Débit ralenti mais surtout très irrégulier


- Monotonie
- Pauses mal placées

Voix :

- Difficultés de contrôle de la fermeture laryngée => voix scandée, sourde,


irrégulière, explosive et saccadée
- Monointensité
- Raucité

Cette dysarthrie se caractérise par l’irrégularité au niveau du débit, de la hauteur et


de l’intensité.

Aussi, la présence de cette dysarthrie rend le contrôle de l’intensité faible impossible


et donc le chuchotement impossible.

DYSARTHRIE HYPOKINÉTIQUE (MALADIE DE PARKINSON)

La dysarthrie hypokinétique résulte en une atteinte des noyaux gris centraux avec
une akinésie.

Respiration :

- Inspiration audible
- Expiration bruyante

Articulation :

- Mouvements réalisés de façon incomplète => articulation floue et consonnes


imprécises

Prosodie :

- Monotonie
- Débit altéré (souvent accéléré)
- Palilalie
- Accélérations paroxystiques
- Pauses inhabituelles

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- Silences inappropriés

Voix :

- Faible intensité parfois presque inaudible


- Monointensité
- Perte des variations et de l’amplitude vocale
- Soufflée
- Rauque

Déglutition :

- Rigidification des muscles au cours de l’évolution


- Amimie

DYSARTHRIE HYPERKINÉTIQUE

La dysarthrie hyperkinétique résulte en une atteinte des noyaux gris centraux avec
des mouvements anormaux tels qu’une dystonie ou une chorée.

Articulation :

- Imprécision des consonnes


- Distorsion des voyelles
- Dégradation articulatoire

Prosodie :

- Monotonie
- Débit lent
- Silences inappropriés
- Allongement des pauses
- Diminution de l’accentuation
- Variations excessives en intensité

Voix :

- Rauque
- Forcée
- Monointensité
- Arrêts vocaux
- Mal timbrée

DYSARTHRIE MIXTE

La dysarthrie mixte résulte d’une atteinte de plusieurs systèmes neurologiques.

75
Respiration :

- Expiration courte
- Tachypnée
- Inspiration audible

Résonance :

- Hypernasalité
- Émission nasale audible

Articulation :

- Imprécision des consonnes


- Distorsion des voyelles
- Allongement des phonèmes

Prosodie :

- Monotonie
- Diminution de l’accentuation
- Débit ralenti
- Phrases courtes
- Allongement des pauses

Voix :

- Rauque
- Basse
- Forcée
- Soufflée
- Monointensité

LA DYSARTHRIE PRIMAIRE PROGRESSIVE : ENTITÉ NOSOLOGIQUE


DISTINCTE OU SIGNE D’UNE AUTRE MALADIE DÉGÉNÉRATIVE ?

Les données disponibles dans la littérature sont pauvres. Les termes employés sont
généralement confus : « aphasie primaire progressive », « apraxie primaire
progressive » ou encore « démence fronto-temporale ». Également, pour certains,
l’« apraxie de la parole progressive » consisterait en un variant supplémentaire aux 3
autres formes d’aphasies primaires progressives. Dès lors, la dysarthrie primaire
progressive représente-elle une entité nosologique distincte ou alors est-elle un signe
d’autres maladies dégénératives ?

76
ÉTUDE DE BROUSSOLLE ET AL. 1996

Titre de l’étude : « Slowly progressive anarthria with late anterior opercular syndrome :
a variant form of frontal cortical atrophy syndromes »

L’étude a suivi 8 patients âgés de 60,4 ans en moyenne sur plusieurs années. Parmi ces
patients, 2 possédaient une histoire familiale de démence d’Alzheimer probable sans
pour autant d’antécédents de dysarthrie ou d’aphasie primaire.

Chez tous les patients en phase initiale, plusieurs caractéristiques étaient présentes :

- Plainte isolée de troubles de la parole/de l’articulation avec apraxie de la


parole, dysarthrie, dysprosodie et apraxie bucco-linguo-faciale
- Pas d’aphasie
- Parfois des difficultés légères au niveau de la compréhension syntaxique
- Pas de troubles intellectuels avec un bilan neuropsychologique normal sauf
pour les fonctions exécutives
- Léger syndrome frontal qui apparait progressivement amenant de la lenteur
dans l’élaboration des stratégies, de la distractibilité, des persévérations

Après 4-5 ans, voici ce qui a été observé chez tous les patients :

- Augmentation des troubles de la parole => réduction du discours


- Dysgraphie avec la présence de duplications de lettres, une réduction de la
fluence et de la syntaxe
- Compréhension orale et écrite OK
- Majoration du syndrome frontal
- Pour les patients les plus avancés : apraxie motrice et rigidité
- Apparition de troubles du comportement pour deux patients en fin d’évolution
- Apparition de signes neurologiques : signes pyramidaux (exemple : rigidité,
Babinski, réflexes archaïques), difficultés de contrôle volontaire des muscles BLF
(=> dissociation automatico-volontaire), trouble de l’oculomotricité
- Aggravation et apparition d’autres troubles cognitifs

Après 6-10 ans, du mutisme est observé chez la plupart des patients.

En ce qui concerne les examens complémentaires, le scanner cérébral et l’IRM sont


normaux aux stade précoce mais, après 3-4 ans, il est possible d’observer une atrophie
corticale limitée au lobe frontal (=> cortex prémoteur et cortex sensori-moteur) ce qui
favorise dès lors l’augmentation de l’atrophie avec la progression de la maladie. Pour
ce qui est du PET scan, il y a un hypométabolisme asymétrique qui touche d’abord le
lobe frontal gauche de manière précoce par rapport à ce qui est visible sur l’IRM. Puis,
avec l’évolution, l’hypométabolisme tend à toucher aussi l’opercule droit et les cortex
temporaux et pariétaux avec éventuellement une atteinte du striatum et du thalamus.

En bref, les examens complémentaires sont normaux au stade précoce mais laissent
apparaitre de rapides altérations au niveau du lobe frontal qui s’étend avec la
maladie.

77
Dès lors, il est ici plus judicieux de parler de SPA (Slowly Progressive Anarthria) que de
dysarthrie étant donné que cela renvoie à un mécanisme complexe qui combine les
composants apraxiques, dysarthriques et moteurs.

SPA ou DFT : Au vu des caractéristiques cérébrales, la DFT ne peut pas être mentionné
étant donné qu’il ne s’agit pas du même profil au niveau comportemental, exécutif,
langagier et d’imagerie cérébrale.

SPA ou APP non fluente : Au vu de l’évolution de la parole, l’idée d’une APP non
fluente ne peut être retenue étant donné qu’il n’y a pas de trouble du langage à
proprement parlé, les critères de Mesulam ne sont pas présents et les données de
l’imagerie sont différentes.

ÉTUDE DE SOLIVERI ET AL. 2003

Titre de l’étude : « Progressive dysarthria : definition and clinical follow-up »

Il s’agit d’une étude rétrospective concernant des patients admis durant 5 ans pour
lesquels la dysarthrie progressive constituait le 1er signe pendant 2 ans.

Au total, 9 patients, âgés de 65 ans en moyenne, présentaient une hypomobilité


linguale ainsi qu’une dysprosodie. À noter que 7 d’entre eux ont ensuite développé
d’autres symptômes neurologiques comme une bradykinésie, une rigidité ou un
manque du mot.

Après la première évaluation, le diagnostic posé est peu clair. Différentes idées
émergent chez chaque patient : troubles du comportement, signes pseudo-bulbaires,
aphasie motrice, hypotrophie linguale, tremblement lingual et vocal, hyperréflexie ou
encore aphasie.

Après 1 an :

- 2 patients présenteraient finalement une dégénérescence corticobasale mis


en avant par une atrophie fronto-pariétale symétrique chez l’un et par une
atrophie pariétale symétrique chez l’autre.
- 1 patient présenterait une démence fronto-temporale mis en avant par une
atrophie fronto-tempo-pariétale prédominante à droite.
- 1 patient présenterait une aphasie primaire progressive de type non fluent
associée à une apraxie orofaciale
- 3 patients présenteraient une atteinte du motoneurone => SLA (+/- démence
et +/- aphasie)
- 2 patients présenteraient une atteinte isolée sans altération cognitive avec un
IRM normal

Ainsi, les patients avec une dysarthrie primaire progressive développent des
symptômes qui entrent dans le cadre d’autres maladies neurodégénératives.

78
Il est ici intéressant de mentionner le fait que deux patients rencontrent les signes
d’anarthrie lentement progressive mis en avant par Broussolle et al.

L’ANARTHRIE PRIMAIRE PROGRESSIVE

NOUVEAUX CRITÈRES DIAGNOSTIQUES

L’anarthrie primaire progressive n’est pas une aphasie progressive non fluente. Et, ses
symptômes ne sont pas associés à d’autres maladies neurodégénératives tels que la
dégénérescence corticobasale ou la paralysie supranucléaire progressive.

La prévalence n’a pas été étudiée.

Au niveau des caractéristiques cliniques, on relève :

- Des plaintes relatives à l’élocution et au débit de parole d’apparition insidieuse


et d’aggravation progressive pouvant conduire au mutisme
- Un ralentissement du débit
- Un défaut d’initiation motrice
- Des distorsions et des substitutions de phonèmes
- Des segmentations syllabiques et des tâtonnements articulatoires/ essais-erreurs
- Allongement de la durée des phonèmes
- Réduction du nombre de mots émis entre deux pauses
- Palilalie
- Davantage d’erreurs avec des phrases longues ou complexe

Il existe plusieurs sous-types d’anarthrie primaire progressive :

- La phonétique
- La prosodique
- La mixte

DIAGNOSTIC DIFFÉRENTIEL

Différence AnPP et dysarthrie : La dysarthrie est un trouble de la réalisation motrice


pour lequel il n’y a pas de substitution sonore ou pas plus d’erreurs avec la complexité
de l’énoncé. L’apraxie de la parole quant à elle n’est pas associée au caractère
hypophonique ou à l’hypernasalité que l’on peut trouver en cas de dysarthrie.

79
Différence AnPP et APP : L’APP entraîne des erreurs phonologiques, à l’inverse de la
dysarthrie qui se caractérise par des erreurs phonétiques, et, sans la présence de
troubles prosodies.

Il existe certaines maladies neurodégénératives dans lesquelles l’apraxie de la parole


est un symptôme.

SIGNES ASSOCIÉS

Plusieurs signes sont associés à l’anarthrie primaire progressive comme :

- L’apraxie bucco-faciale qui est présente dans 60% des cas et qui est corrélée
à la sévérité et à la durée de la maladie.
- De discrets signes pyramidaux dans les premières années d’évolution
(exemple : bradykinésie, rigidité)
- Des difficultés praxiques subtiles qui sont présentes dans 30% des cas surtout
pour les praxies idéomotrices complexes
- Des fonctions cognitives préservées jusqu’au stade tardif avec tout de même
un léger dysfonctionnement exécutif

BILAN LOGOPÉDIQUE

Au cours du bilan logopédique, plusieurs éléments doivent être évalués :

- Évaluer les fonctions langagières et l’élocution


- Évaluer la parole : énoncés complexes sur le plan moteur en situation
conversationnelle, répétition de mots et de phrases de plus en plus complexes
- Évaluer la grammaire

Il est intéressant d’utiliser l’échelle « apraxia of speech rating scale 3.0 » afin d’obtenir
une analyse quantitative de la présence et de la sévérité de 16 caractéristiques de
l’AOS.

DONNÉES RADIOLOGIQUES

Au niveau des données radiologiques, voici ce qu’il est possible d’observer :

- Dysfonctionnement des régions corticales et sous-corticales liées à la


planification, la programmation et la production de la parole. Ce
dysfonctionnement s’explique par une atrophie des aires frontales supérieures
bilatérales

80
- Atrophie de la substance blanche dans les régions prémotrices inférieures
- Structures sous corticales comme le striatum et le mésencéphale qui peuvent
être impliquées
- Hypométabolisme associé surtout lorsqu’il y a une atteinte supérieure et
latérale du cortex prémoteur

ÉVOLUTION

En ce qui concerne l’évolution de l’anarthrie primaire progressive, les troubles de


parole s’aggravent. Il y a la présence de signes pyramidaux légers à modérés
pendant les 5 premières années. L’évolution entraîne une dysphagie, de
l’incontinence et une dysarthrie.

Il existe deux profils d’évolution. Dans un cas, il y a un léger déclin cognitif, notamment
exécutif, associé à quelques éléments aphasiques. Dans l’autre cas, il y a une
majoration des caractéristiques extrapyramidales qui se manifeste par une rigidité
axiale, une lenteur des saccades voire une paralysie de la verticalité du regard ou
encore par une instabilité posturale voire des chutes.

À noter que si l’apparition est précoce et sévère, l’évolution est plus rapide.

CRITÈRES DIAGNOSTIQUES

CRITÈRES D’INCLUSION CRITÈRES D’EXCLUSION


• Début insidieux et aggravation • Le trouble de la parole est expliqué
progressive des troubles de la parole par d’autres atteintes neurologiques
• Apraxie de la parole unique ou non dégénératives ou par d’autres
dominante au moment de l’évaluation pathologies systémiques
• Dysarthrie peut être présente mais elle • Troubles cognitifs sont mieux expliqués
doit être moins sévère que l’apraxie de par un diagnostic psychiatrique
la parole • Dysarthrie jugée plus grave que
• Troubles du langage, s’ils existent, ne l’apraxie de la parole
doivent pas être au premier plan • Critères d’APP remplis
• Critères de maladies d’Alzheimer
typique ou atypique
• Critères du variant comportemental
de la DFT
• Critères de la paralysie supranucléaire
progressive
• Critères du syndrome cortico-basal
• Critères d’une atteinte du
motoneurone

81
LE BILAN

Dans le cas d’un bilan de dysarthrie primaire progressive, nous devons nous intéresser
à plusieurs aspects :

- Retracer l’historique : depuis quand, évolution, aggravation


- Interroger les autres sphères cognitives : langage, mémoire
- Interroger l’impact sur la prise de parole et sur la participation sociale
- Interroger sur l’utilisation des stratégies de contournement

À noter qu’en général le motif de la consultation est en lien avec la voix ou la parole.

LA BECD

Dans la partie de ce cours nous allons étudier la BECD (Batterie d’Évaluation Clinique
de la Dysarthrie).

Cette batterie permet d’obtenir un indice sur la sévérité de la dysarthrie (score


perceptif, score d’intelligibilité, test phonétique d’intelligibilité), de réaliser une analyse
perceptive (grille perceptive, GRBAS-I), de réaliser une analyse phonétique (répétition
de phonèmes/de mots simples/de mots complexes, test phonétique d’intelligibilité),
de réaliser un examen moteur (grille motrice) ainsi que de proposer une auto-
évaluation (VHI).

La grille perceptive se comporte de 35 critères classés en 6 catégories.

Chaque critère se voit attribuer un score allant de 0 à 4 ; 0 signifiant l’absence


d’anomalies et 4 signifiant la présence d’anomalie sévère ou quasi-permanente.

Le score perceptif est coté sur 20.

Plus le score est élevé, plus la dysarthrie est sévère.

Pour ce qui est du score d’intelligibilité, le patient tire à l’aveugle 10 cartes mots et
10 cartes phrases. Il les lit et la logopède retranscrit ce qu’il entend sans que la lecture
labiale n’entre en jeu.

Le nombre de mots et de phrases correctement compris par la logopède sont


comptabilisés et un score est attribué pour chacun.

Un second score est également attribué pour l’intelligibilité en langage spontané.

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Pour ce qui est du test phonétique d’intelligibilité, le patient lit des mots. La logopède
doit entourer le mot qu’elle a compris parmi une liste de 4 mots choisis selon leur
proximité phonétique et les différents contrastes présents.

Comme nous l’avons mentionné précédemment, le test phonétique se compose


d’une répétition de phonèmes isolés, de mots simples et de mots complexes.

Également, il se compose d’une analyse quantitative et qualitative ; l’analyse


quantitative reprend le nombre de phonèmes erronés.

En ce qui concerne l’examen moteur, sont évalués la respiration, le larynx, le


vélopharynx, la langue, les lèvres, les joues, les mâchoires, la face, les mouvements
alternatifs, les réflexes ainsi que la sensibilité tactile. À noter que cette évaluation se
fait aussi bien dans le domaine verbal que non verbal.

Chaque élément est coté « normal », « altération modérée » ou « altération sévère ».

Le VHI regroupe 30 questions réparties en 2 domaines : fonctionnel et physique.

Chaque question est cotée de 1 à 5 ; 1 étant « jamais » et 5 « toujours ».

À noter qu’un score supérieur à 30 met en avant un impact modéré et qu’un score
supérieur à 60 met en avant un impact sévère.

AVANTAGES INCONVÉNIENTS
Évaluation phonétique fouillée Analyse subjective
Examen moteur étendu
Permet d’établir un programme
thérapeutique
Évaluation du ressenti du patient

ÉCHELLE DE SÉVÉRITÉ

Une autre évaluation est possible ; il s’agit de l’échelle de sévérité clinique de la


dysarthrie qui a été adaptée de l’échelle de sévérité de l’aphasie.

En fait, un score entre 0 et 6 est accordé au patient :

0 : Parole absente ou inutilisable. Intelligibilité nulle.

1 : Parole en majeure partie inintelligible bien que quelques mots soient parfois
reconnaissables. La communication s’établit par gestes. L’interlocuteur doit deviner et
poser des questions.

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2 : Une conversation portant sur des thèmes familiers est possible si l’interlocuteur est
assez familiarisé avec le patient. Toutefois, les altérations arthriques sont d’une telle
importance que la teneur en informations est limitée pour l’interlocuteur moyen.

3 : Le patient est capable de discuter de presque tous les problèmes quotidiens.


Cependant, certaines difficultés spécifiques (exemple : Hypophonie, omissions de
sons, hypernasalité) perturbent ou limitent l’intelligibilité.

4 : Le patient est tout à fait intelligible, malgré la présence de discrètes altérations


arthriques.

5 : Le patient éprouve des difficultés subjectives que l’interlocuteur ne perçoit pas


nécessairement.

6 : Parole normale. Absence de plaintes de la part du patient.

ASPECTS ADMINISTRATIFS ET RÉÉDUCATION

D’un point de vue administratif, le bilan est remboursé s’il est suivi d’une prise en
charge.

Pour accorder le remboursement, la dysarthrie spastique ou flasque par exemple


entre dans le cas d’une lésion cérébrale tandis qu’une dysarthrie primaire progressive
n’est pas associée à une lésion mais plutôt à un trouble chroniques de la parole.

À noter que les aphasies primaires progressives ne sont pas remboursées.

Au niveau de la rééducation, nous devons renforcer ce qui est altéré afin de maintenir
les fonctions et de limiter la dégradation.

Concrètement, on travaille sur :

- La respiration costo-abdominale
- Le renforcement musculaire pour maintenir une meilleure articulation le plus
longtemps possible
- Les mouvements séquentiels
- Le travail au niveau de la voix

Généralement, les patients évoluent vers un mutisme et des troubles cognitifs. Il peut
être dès lors intéressant de mettre en place un carnet de communication en parallèle.

Pour conclure, la dysarthrie et l’anarthrie primaire progressive sont deux entités


distinctes.

Leur symptôme commun au début est un trouble de la parole.

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Si le patient est vite pris en charge, le trouble de la parole est léger ce qui rend la
distinction entre dysarthrie et anarthrie difficile.

Ainsi, il est important de suivre le patient afin de voir comment le trouble de la parole
évolue, s’il y a une dissociation automatico-volontaire (=> anarthrie), si une apraxie
bucco-linguale apparait ou encore si des autres troubles cognitifs surviennent.

Les examens complémentaires, notamment neurologiques sont primordiaux.

L’ensemble de ces éléments permet de proposer un diagnostic différentiel.

CHAPITRE 6 : LA MALTRAITANCE DES AÎNÉS, PARLONS-EN !

LES DROITS

En général, les aînés, les professionnels et l’entourage ne connaissent pas


suffisamment les droits des aînés.

Ils sont alors parfois bafoués « pour leur bien ».

En fait, dès qu’il s’agit d’un mineur, nous sommes dans l’obligation d’intervenir par
rapport à un majeur.

Pour autant, la notion d’aîné est différente selon chaque individu (exemple : 65 ans,
70 ans ?) et, certains paramètres aggravent la vulnérabilité de la personne et sont
donc à prendre en compte dans cette notion d’aîné.

Il est ici important de mentionner l’idée d’âgisme.

En fait, l’âgisme fait partie de notre vision sociétale à part entière (exemple : être
derrière une voiture qui n’avance pas et dire « ha ces vieux qui ne savent pas
conduire).

Il s’agit pourtant d’un vecteur important dans la maltraitance.

Comme nous l’avons précisé plus tôt, nous ne connaissons pas bien les droits des aînés.
Néanmoins, il est primordial de nous faire réfléchir et de nous faire nous poser des
questions afin de venir en aide aux personnes mais aussi afin de ne pas être dans une
situation de non-assistance de personne en danger.

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Par exemple, « Ont-ils le droit de me faire entrer en maison de repos contre mon
gré ? », « Ai-je le droit de fréquenter qui je veux ? » ou encore « Peut-on décider à ma
place de la gestion de mon argent ? » sont des questions à se poser.

Pour ce qui est de l’entrée en institution, certaines situations rendent le placement en


maison de repos contre son gré nécessaire si la personne se met en danger ou si elle
n’est pas en capacité de décider par exemple.

Pour le fait de fréquenter qui l’on veut, il n’existe pas de lois. En fait, cela relève plutôt
de l’éthique.

En ce qui concerne la gestion de l’argent, des examens doivent attester que la


personne n’est pas en capacité de gérer son argent car sinon chaque membre de la
famille peut réclamer le rôle du gestionnaire.

LA MALTRAITANCE

La maltraitance se situe à différents niveaux :

- Politique et sociétal : normes, règlements, âgisme


- Institutionnel et organisationnel : choix de la direction selon les croyances et les
normes, environnement
- Relationnel : entre aînés, famille et soignants

La maltraitance se définit de la manière suivante : Tout acte ou omission commis par


une personne ou un groupe de personnes qui, au sein d’une relation personnelle ou
professionnelle avec un aîné, porte ou pourrait porter atteinte physiquement,
moralement ou matériellement à cette personne.

La maltraitance peut être intentionnelle ou non (exemple : signes de fatigue ou


d’usure chez l’aidant), résulter d’un acte isolé ou répété et, peut prendre la forme
d’un ressenti.

Il est nécessaire de ne pas stigmatiser la maltraitance à une relation bourreau/victime.

En effet, il existe une balance entre bientraitance et maltraitance ce qui veut dire
que tout n’est pas toujours tout blanc ou tout noir. Parfois, la personne commet un
acte de maltraitance alors qu’elle pensait être dans la bientraitance.

Plusieurs paramètres sont à considérer dans la maltraitance.

En fait, il existe un croisement entre un axe dépendance/indépendance et un axe


autonomie/hétéronomie.

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L’idée d’autonomie renvoie à la capacité de décider soi-même.

L’idée de dépendance renvoie à la nécessité de recevoir de l’aide dans les faits


(exemple : pousser mon fauteuil).

La zone à risque est celle alliant la dépendance et l’autonomie mais cette zone est
encore plus à risque si la dépendance et l’hétéronomie s’allient.

En général, la situation de glissement la plus courante est de se dire « je vais décider


parce que je sais ce que tu ne dois pas faire ».

Au niveau de la prévalence, 70% d’actes de maltraitance se produisent au domicile.

Et, 75% des cas de maltraitances sont de l’ordre de l’intrafamilial tout en sachant que
généralement c’est la fille qui est pointée comme autrice des faits.

Il existe plusieurs formes principales de maltraitance :

- Psychologiques
- Financières
- Négligences
- Civiques
- Physiques

Maltraitances psychologiques :

Absence de considération – humiliation – langage irrespectueux/dévalorisant –


chantage affectif/interdiction – tutoiement intempestif – infantilisation – non-respect
de l’intimité – menace

Maltraitances financières :

Vol – détournement de pension ou de biens – héritage anticipé – vente forcée –


exploitation de l’aîné

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Négligences :

Manque d’écoute et d’attention – privation de soins/de liberté – refus de prévenir le


médecin – erreur de prescription

Maltraitances civiques :

Utilisation de la signature – procuration abusive – non-respect des choix – bafouer les


droits élémentaires

Maltraitances physiques :

Gifles/coups – brûlures – soins brusques – chutes provoquées – bousculades – abus


sexuels – contention injustifiée/non adaptée

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La maltraitance peut venir de plusieurs systèmes.

Le système familiale peut être l’auteur d’actes maltraitants lorsque le lieu de vie n’est
pas adéquat, s’il manque d’informations, s’il rencontre des problèmes personnels, s’il
a des inquiétudes ou s’il est isolé par exemple.

Le système professionnel peut aussi être source d’actes maltraitants pour différentes
raisons : burn-out, manque de supervision, manque de motivation, problèmes
personnels.

Le système propre à la personne peut également être source d’actes


maltraitants dès qu’il y a une dépendance, une démence, un mauvais caractère, de
l’isolement ou de la peur par exemple.

Nous pouvons proposer plusieurs pistes à l’aîné en situation de maltraitance :

- Réfléchir à la portée de nos actes pour lui


- Lui parler de notre inquiétude au sujet de la maltraitance observée
- Lui demander ce qu’il souhaiterait faire ou aurait besoin
- L’écouter, l’accompagner, respecter sa décision

Malgré ça, certains craignent que la personne maltraitante ne vienne plus les voir.
Ainsi, certaines situations viennent heurter nos valeurs.

RESPECT SENIORS

Dès lors, « Respect seniors » se voit remplir plusieurs missions pour palier à la
maltraitance envers les aînés.

Concrètement, les missions sont :

- Accompagner les situations => axe psychosocial


- Informer et sensibiliser => axe prévention

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- Former les professionnels => axe prévention
- Échanger les informations, les statistiques et les bonnes pratiques => axe
prévention

Ces interventions se font par téléphone et/ou par visite de terrain au domicile, à
l’hôpital ou en maison de repos.

Aucune limite de temps n’est imposée ; tout se fait au cas par cas.

L’intervention consiste en un accompagnement de l’aîné ou en un soutien aux


professionnels de première ligne.

À noter qu’il s’agit d’un service gratuit.

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