Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
Aparté à méditer « Est-ce juste la conséquence d’une perte, ou bien celle d’une stratégie
mise en œuvre avec justesse pour moins souffrir ? »
insiste le psychiatre Jean Maisondieu
La maladie d’Alzheimer est une maladie dégénérative incurable du tissu cérébral qui entraîne la
perte progressive et irréversible des fonctions mentales et notamment de la mémoire. Une atteinte
chronique du cerveau liée au dépôt de protéines anormales ne pouvant être considérée comme ne
faisant pas partie du processus normal du vieillissement et aboutissant à un état démentiel. La
dégénérescence, c’est-à-dire la détérioration inexorable est la conséquence d’un dysfonctionnement
métabolique* conduisant à la diminution du nombre de neurones. La présence de plaques séniles,
c’est-à-dire des regroupements de cellules altérées, caractérise biologiquement cette maladie. La
maladie d’Alzheimer détruit progressivement les cellules nerveuses vitales et entraîne une
diminution du volume du cerveau.
En d’autres mots, les dommages causés par la maladie augmentent avec le temps, les cellules
nerveuses du cerveau se détériorent et disparaissent. Les dommages causés aux cellules du cerveau
ne peuvent être réparés.
Les origines
Les origines de la maladie d’Alzheimer demeurent inconnues. Il a été avancé de nombreuses
théories, mais aucune d’entre elles n’est totalement ni satisfaisante ni vérifiée.
En deux mots, la maladie d’Alzheimer résulte de la rencontre de deux processus dégénératifs
différents, qui se conjuguent pour provoquer la détérioration et la mort des cellules nerveuses du
cerveau :
– Le premier processus correspond au dysfonctionnement d’une protéine dont on ne connaît pas
encore bien le rôle. Cette protéine étant présente dans toutes les cellules de toutes les espèces, on
peut deviner que ce rôle est important. Dans le tissu cérébral, cette protéine est vraisemblablement
un facteur de survie des neurones. Au cours de la maladie d’Alzheimer, des amas se forment en
plaques dites séniles*, et finissent par envahir la totalité du cortex cérébral qui se trouve être la
partie périphérique des deux hémisphères du cerveau et le lieu de l’intelligence supérieure qui
caractérise l’espèce humaine. Le cortex cérébral est le siège des fonctions neurologiques élaborées.
Il s’agit de l’intelligence, du mouvement volontaire, de la conscience, de la sensibilité, etc.
12
3 généralités
– Le deuxième processus correspond à l’agrégation d’une protéine nommée protéine Tau, sous
forme de filaments anormaux dans les cellules nerveuses. Les substances nécessaires au
fonctionnement du neurone ne pouvant plus être acheminées jusqu’au corps cellulaire, le neurone
finit par mourir.
Il a été montré que ces deux processus de détérioration, fréquents au cours du vieillissement, se
combinent et provoquent l’altération de la presque totalité des cellules nerveuses impliquées dans la
mémoire et les fonctions intellectuelles supérieures. La maladie affecte aussi l’humeur, les
émotions, le comportement et la capacité d’accomplir les activités normales de la vie quotidienne.
À ce jour, la maladie d’Alzheimer est incurable et son évolution est irréversible. La progression de
la maladie varie d’une personne à l’autre et dépend en partie de l’âge du patient au moment du
diagnostic et de son état de santé général. L’espérance de vie de la personne atteinte est en moyenne
de 8 à 12 ans.
L’ensemble des données de la littérature concernant la nature et la localisation des lésions permet de
proposer un schéma d’ensemble qui illustre le déroulement des mécanismes des lésions à l’origine
de la maladie d’Alzheimer. Ils indiquent que l’atteinte des neurones gagne progressivement les
différents territoires de l’écorce du cerveau, territoires connectés entre eux.
C’est à cet endroit même que les informations envoyées par d’autres parties du corps sont analysées
et interprétées. En fin d’évolution de la maladie d’Alzheimer, c’est l’ensemble du cortex, c’est-à-
dire de la couche supérieure du cerveau, qui sera touché.
Ainsi, au fur et à mesure du développement de la maladie, on observe la mort de millions, puis de
milliards de neurones, entraînant l’apparition progressive des troubles de mémoire, de la disparition
de tous les processus menant à la connaissance, aboutissant à l’état de démence.
La notion de démence
La démence est un état d’affaiblissement du siège de l’esprit, de la pensée et de la conscience,
global et progressif, dû à la maladie, frappant l’ensemble des facultés psychiques, altérant
l’affectivité, l’activité de la personne ainsi que sa conduite sociale . Dans le cas particulier de la
maladie d’Alzheimer, le terme d’état démentiel est utilisé pour une personne qui présente un
trouble de la mémoire associé à un trouble du langage, du geste ou de la reconnaissance (aphasie,
apraxie ou agnosie) ainsi qu’une perte d’autonomie sur une des activités de base de la vie
quotidienne qui font référence.
Ces activités de la vie quotidienne qui font référence sont au nombre de 4 et constituent l’échelle
des IADL* de M.P. Lawton.
La capacité d’utiliser le téléphone et les moyens de transports et de gérer son argent et la prise des
médicaments.
On compte quatre stades dans la maladie d’Alzheimer dont le premier est le stade pré-
symptomatique : avant qu’elle ne soit visible, la maladie s’installe progressivement, sans symptôme
pendant des années. Pendant cette période, le cerveau est capable de compenser les lésions qui se
créent. Pour faire simple, la capacité de compenser est la faculté du cerveau à conduire les
informations par des « itinéraires bis ». C’est lorsque les capacités de compensation sont dépassées,
que les symptômes apparaissent.
13
3 généralités
Le premier stade dit « stade léger » de la maladie d’Alzheimer est estimé d’une durée entre deux
et quatre ans.
À ce stade, l’aidant naturel tente de se persuader que les symptômes sont liés au vieillissement
seulement et non à la maladie d’Alzheimer. Il est conforté dans cette démarche par les propos tenus
par la personne malade qui elle, nie farouchement ses troubles.
Au cours de vos autres lectures vous pourrez le trouver sous le terme de stade initial ou stade
précoce. Il s’applique à toute personne quel que soit son âge qui présenterait des déficits légers
attribuables à la maladie d’Alzheimer. Lorsqu’on se casse un bras ou une jambe, en général on sait
immédiatement à quoi s’en tenir. Il n’en est rien pour la maladie d’Alzheimer. Les symptômes
apparaissent lentement, progressivement, rien de spectaculaire au début. Bien entendu, on constate
des changements par rapport au comportement habituel et on s’en irrite parfois. Ça commence par
des pertes de mémoire, des oublis, des omissions, des erreurs de dates et de lieux, des difficultés de
compréhension, des inversions de chiffres, des distractions inhabituelles.
Durant cette période il est observé des oublis répétés de conversations ou d’événements récents, des
problèmes d’expression ou de compréhension. Les mêmes questions sont posées de façon répétée.
Écrire ou utiliser certains objets devient difficile. Des phases de dépression peuvent apparaître ainsi
que des changements de personnalité et des troubles moteurs légers. La personne ressent la
nécessité d’avoir des notes ou des rappels pour se souvenir quoi faire pendant la journée. À ce
stade, les personnes conservent la plupart de leurs capacités et ne requièrent qu’une aide minimale.
Quand elles sont parfois conscientes des changements qui touchent leurs capacités, elles sont en
mesure de renseigner leur entourage sur ce qu’elles vivent et ressentent. Puis, des objets
commencent à disparaître sans laisser de trace, les communications téléphoniques se mettent à
poser des problèmes. Les portes de l’appartement ou de la voiture sont laissées grandes ouvertes,
les lumières ne sont plus éteintes, les robinets ne sont plus fermés, etc. Mais au début tout au moins,
on le met sur le compte d’une distraction, d’une fatigue passagère ou des années qui passent. Plus
tard, lorsque les signes deviennent plus évidents ou plus fréquents on a tendance à adopter la
politique de l’autruche. Les perspectives sont si effrayantes que consciemment ou pas, on trouve
toujours une bonne raison pour renvoyer au lendemain l’examen sérieux de la situation.
(Vous trouverez dans ce guide un chapitre détaillé, consacré à chacun des stades « léger », chap. 13,
« modéré » chap. 19 et « avancé » chap. 33).
Le stade modéré de la maladie d’Alzheimer est estimé de deux à dix ans. À ce stade de la maladie,
on observe un déclin accru des facultés intellectuelles et fonctionnelles de la personne atteinte.
Même si, à cette étape, elle peut encore avoir plus ou moins conscience de sa condition, sa mémoire
et ses autres facultés intellectuelles continuent de se détériorer. Les pertes de mémoire constantes
ont un impact sur le quotidien. Les troubles du sommeil, les troubles émotionnels et
comportementaux s’aggravent et empirent sous l’effet du stress déclenché par certains changements
que la personne malade peut ressentir. Les troubles moteurs et la perte de coordination des
14
3 généralités
mouvements nécessitent une aide permanente aux gestes de base de la vie quotidienne (comme se
laver, s’habiller, etc.). Elle n’arrive plus à surmonter seule ses problèmes et a désormais besoin
d’assistance pour accomplir de nombreuses activités de la vie courante.
Le stade avancé ou sévère de la maladie est estimé entre un et plus ou moins trois ans :
À cette étape, la personne devient incapable de communiquer verbalement ou de prendre soin
d’elle-même. Elle a besoin d’un soutien, d’une assistance totale et de soins 24 heures par jour.
L’objectif des soins à ce stade est de continuer à soutenir la personne atteinte pour lui assurer la
plus grande qualité de vie possible. La perte des repères temporels amène le mélange du passé et du
présent. La personne malade n’arrive plus à reconnaître les personnes proches ou des lieux
familiers. Elle présente une perte sévère ou totale de la capacité à s’exprimer oralement. La
mobilité est très réduite (voire inexistante). Il existe des difficultés à avaler, incontinence,
hallucinations, délires et troubles du comportement. Le décès survient généralement après une
infection ou une pneumonie.
Moins usitée, votre médecin peut utiliser, toutefois, une autre échelle que celle-ci pour faire le
diagnostic de la maladie d’Alzheimer, avec une grille d’analyse allant jusqu’à sept stades étalés sur
une durée de huit à dix ans en moyenne. Même si cela est rare, certaines personnes peuvent vivre
pendant vingt ans avec la maladie d’Alzheimer.
15
3 généralités
Le médecin vient parfois prescrire un traitement antidépresseur que les spécialistes appellent
« traitement d’épreuve ». D’une durée de six mois celui-ci permet de faire la différence entre
dépression et maladie d’Alzheimer si les symptômes ont persisté.
Il peut être difficile de distinguer les 5e et 6e stades de la maladie d’Alzheimer. Dans ces derniers
stades de la maladie, les tâches quotidiennes simples deviennent extrêmement difficiles à effectuer.
16
3 généralités
intellectuelles.
Les symptômes peuvent chevaucher plus d’un stade et en estomper les limites. Pour autant, suivant
les personnes, votre parent malade pourra ne jamais manifester certains comportements.
La maladie d’Alzheimer peut être une maladie effrayante pour vous et votre parent. Mais pouvoir
en identifier les stades et les troubles qui y sont rattachés vous permettra de ne pas être surpris par
l’urgence, de prévoir et d’ajuster vos réactions et vos soins à ses besoins.
Les médicaments utilisés dans la maladie d’Alzheimer sont actuellement les anticholinestérasiques
prescrits comme modérateurs des manifestations de la maladie aux stades léger (1) et modérément
sévère (6). Ils ralentissent les changements de la capacité de penser et de parler de la personne
malade.
17
3 généralités
Les autres médicaments utilisés, mais non systématiquement, sont les antidépresseurs,
anxiolytiques, hypnotiques, antiépileptiques et antipsychotiques. Leurs prescriptions dépendent de
la présence ou non de certains troubles psycho-comportementaux, de leur fréquence et du
retentissement qu’ils peuvent avoir sur votre parent ou sur sa prise en charge. Il est donc impératif
de les reconnaître et d’en parler aux médecins qui seuls restent prescripteurs.
– M. D a dit lors d’un groupe de parole : « Les médicaments même s’ils ne sont pas performants
pour la guérison ont un rôle toutefois sécurisant pour l’aidant, ils ouvrent un espoir réconfortant,
on espère quelque chose… » « Il faut qu’il y ait des traitements à administrer au malade même s’ils
ne sont pas la potion magique. »
À ce jour, la maladie d’Alzheimer est incurable, mais des traitements et l’adoption de certains
modes de vie peuvent en ralentir la progression. On s’attend toutefois toujours à ce que de
nouveaux traitements capables de stopper sa progression voient le jour d’ici cinq ans.
18