Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
Jesus Christ 02
Jesus Christ 02
II
L’ANNÉE DOUCE
Les Noces de Cana, la Pêche miraculeuse. — Nicodème. la Samaritaine. — Malades
guéris, Tempête apaisée, Démons vaincus. — L’Hémorroïsse. la Fille de Jaïre. — Le
Paralytique de la Piscine, Magdelaine.
En lui disant que les convives n’ont plus de vin, Marie comme la suite
le prouve, lui demande un miracle. C’est donc à la nature divine qu’elle
s’adresse, et c’est la nature divine qui lui répond : « Femme, qu’y a-t-il de
commun entre vous et moi ? » Car, encore que Marie soit la mère de
l’Homme-Dieu, et par une suite de l’indissolubilité des deux natures, la
mère de Dieu, néanmoins elle n’est pas la mère de la divinité, et il n’y a
rien de commun entre elle et le Dieu dont l’heure n’est pas encore venue.
Plusieurs, faute de réflexion, s’étonnent de ce qu’ils appellent la dureté de
ce langage. Jésus devait plutôt des lumières au monde que de vaines ca-
resses à sa mère. Mais qui leur persuade qu’en lui exprimant ses pensées
souveraines, il ait manqué de douceur et de respect ?
Marie ne témoigne aucun étonnement, ni aucune inquiétude de n’être
point exaucée. Elle avertit les serviteurs de faire ce que Jésus leur dira.
Elle connaît la puissance de sa prière. Et en effet, Jésus s’y soumet aussi-
tôt, accomplissant le miracle qu’elle a désiré. Il commente ainsi lui-même
par avance, dans le premier acte public de sa mission, cette profonde pa-
role qu’il dira du haut de la croix, quand sa mission sera terminée :
« Homme, voilà ta Mère ; » voilà celle qui me priera incessamment pour
toi et à qui j’obéirai toujours, jusqu’à changer l’ordre de la nature et le
cours des choses.
Par un complet changement de substance, l’eau devient un vin exquis,
Ce miracle est l’effet de la simple volonté de Dieu, de sa parole inté-
rieure, non articulée. La parole de l’homme signifie seulement ; celle de
Dieu opère en même temps qu’elle signifie ; elle crée ce qu’elle dit. La
terre n’était point, le ciel n’était point, la mer n’était point : Dieu parle,
ces choses existent. La même parole qui a fait ce qui n’était point, fait
que ce qui est demeure, ou tombe, ou se transforme ; elle peut faire que
sans tomber ni se transformer, il soit changé. Suivant la volonté de Dieu,
toute matière et toute partie de la matière peut ou retomber au néant, ou
descendre à un degré quelconque d’inconsistance, ou s’élever au degré de
consistance qu’il veut lui donner. Il la suspend, il la pénètre, il en change
les qualités, bref, il en fait ce qu’il veut qu’elle soit, et elle est ce qu’il lui
commande d’être. Dieu a cette coutume, dit saint Ambroise, d’agir par
changement de substance quand il veut montrer qu’il est l’auteur de la
nature : la baguette est changée en serpent, le rameau desséché refleurit,
l’eau des fleuves devient du sang, les flots divisés stationnent en murailles
liquides, le fer nage à la surface des fontaines, la poignée de farine et la
goutte d’huile ne peuvent tarir, les eaux amères sont potables. L’Écriture
est pleine de semblables merveilles, pour que nous connaissions que tout
est de la main de Dieu et que tout lui obéit.
90 JÉSUS-CHRIST VIVANT
mation, un autre miracle : par lui, les impudiques seront chastes, les or-
gueilleux deviendront humbles et doux, ceux qui tremblent devant le
monde seront remplis de courage pour confesser Dieu. Car il arrivera
une plus grande merveille, et le vin de Cana n’est encore que la figure du
vrai breuvage. Écartons ce dernier voile : nous voyons apparaître le mys-
tère des mystères: l’Eucharistie. Le premier acte de la vie publique de Jé-
sus est donc la prophétie de ce qui fait l’objet même de sa mission ; il
prépare la foi au sacrement qui en sera le couronnement et le miracle in-
compréhensible et immortel. Il a voulu par là, dit un Père, nous donner
une marque anticipée du pouvoir par lequel il devait plus tard, dans
l’institution de l’Eucharistie, changer le vin en son sang, puisque en effet,
le vin qui est consacré est un vrai sang, comme l’eau changée à Cana fut
aussitôt réellement du vin.
Il est écrit de ce vin du calice, qu’il fait « germer les vierges »; parce
que sa vertu, éteignant toute flamme terrestre, allume dans les âmes
l’ardeur immortelle du souverain amour. Quoique le vin de Cana n’en fût
que la figure, Jésus ne laissa pas d’y attacher sa grâce. Non-seulement
ceux à qui il l’avait donné crurent en lui, mais, d’après la tradition, plu-
sieurs le suivirent. L’époux devint l’apôtre saint Simon; l’épouse demeura
près de la sainte Vierge. La présence à leurs noces de Jésus et de Marie
avait glorifié l’affection dans laquelle ils s’étaient unis ; la grâce de la chas-
teté virginale récompensa ces cœurs purs. Ils s’aimèrent de l’amour plus
saint qui, sacrifiant tout à Dieu, reçoit de Lui en retour un charme éter-
nellement durable et sacré.
Telles furent les œuvres de ce grand jour de Cana, le premier jour de
la manifestation du Seigneur. Elles représentent ce que Jésus-Christ est
venu faire en ce monde : foi des disciples, commencement de l’Église,
intervention de Marie, communion des saints ; meilleur vin pour la fin du
repas, doctrine parfaite pour le dernier âge du monde, inauguré mainte-
nant ; eau changée en vin, Loi changée en Évangile, figure en vérité, let-
tre en esprit, terreur en amour. Ainsi Bossuet résume l’enseignement des
Pères. Par cet exposé, l’on voit combien Jésus demeure caché jusque
dans l’Évangile à qui le prétend trouver sans les lumières de l’Église ; et
l’on peut juger du respect qu’ont pour eux-mêmes les « historiens » qui se
contentent de dire, à propos de Cana, que Jésus se plaisait au mouve-
ment des fêtes privées, et qu’un de ses miracles fut fait pour égayer une
noce de petite ville.
De Cana, Jésus se rendit à Capharnaüm, où il prêcha. C’était une
bourgade opulente, située sur les confins de Zabulon et de Nephtali, à
l’endroit où le Jourdain se jette dans le lac de Génézareth. Cette partie de
la Galilée était appelée Galilée des Gentils, à cause des païens que les Ga-
liléens laissaient habiter parmi eux, ce qui les avait entraînés à une déca-
dence spirituelle si marquée que les Juifs les réputaient impurs : Terre de
II. – L’ANNÉE DOUCE 93
Zabulon et de Nephtali, qui confines à la mer, pays au-delà du Jourdain, Galilée des
nations ! Le peuple qui était assis dans les ténèbres a vu une grande lumière ; la lu-
mière s’est levée sur ceux qui étaient assis dans la région de l’ombre de la mort. Jésus
était cette lumière, et il vint dans cette ombre. Il leur disait : « Le temps
est accompli ; le royaume de Dieu approche ; faites pénitence et croyez à
l’Évangile. »
Une œuvre importante allait signaler son premier séjour chez les Ca-
pharnaïtes. Sa présence aux noces et la manifestation publique de sa
puissance ont honoré le mariage, source du genre humain ; un second
miracle va être fait pour constater l’établissement de l’Église et signifier
sa mission.
Jésus passait sur le bord de la mer. Il vit Simon et André qui jetaient le
filet ; car ils étaient pêcheurs, et après la première entrevue, racontée plus
haut, ils avaient repris leur profession, dont ils vivaient. Il leur dit : « Sui-
vez-moi. » De là, s’étant un peu avancé, il vit dans une barque Jacques,
fils de Zébédée, et Jean, son frère, pêcheurs aussi, travaillant à leurs filets,
et il les appela également. En ce moment, le peuple accouru pour
l’entendre, se pressait autour de lui. Il monta dans l’une des deux bar-
ques, qui était celle de Simon-Pierre, et ayant commandé à Simon-Pierre
d’éloigner un peu, du rivage, il s’assit et enseigna. Lorsque son discours
fut achevé, il dit à Simon-Pierre : « Conduis-nous en pleine eau, et jette le
filet. » – Maître, répondit Simon, toute la nuit nous avons fatigué pour ne
rien prendre ; mais, sur votre parole, je jetterai le filet. Et à ce coup ils
prirent tant de poissons que le filet menaça de rompre. Ils firent signe à
leurs compagnon de l’autre barque de les venir aider, et les deux barques
se trouvèrent tellement remplies que peu s’en fallait qu’elles ne coulas-
sent à fond. Alors Simon-Pierre se jetant aux pieds de Jésus, lui dit : —
Seigneur, éloignez-vous de moi, parce que je suis un pécheur ! Lui et ses
compagnons étaient épouvantés de ce miracle. Jésus dit à Simon : « Ne
craignez point, désormais vous serez pêcheurs d’hommes. » Et aussitôt,
ayant amené les barques au bord, ils quittèrent tout et le suivirent.
L’Église est fondée et prophétisée.
Les Apôtres sont gens de labeur, vivant du travail de leurs mains et
non pas des fruits de l’iniquité ; c’est ce qui les rend dignes de leur voca-
tion. Ils sont simples et sans lettres : la science leur sera donnée plus tard,
mais il faut d’abord que la foi soit l’effet de la puissance divine et non de
l’éloquence humaine. Appelés, ils obéissent aussitôt ; les enfants de Zé-
bédée laissent leur père : rien ne doit empêcher de suivre le Christ. Il y a
deux barques : celle où Jésus monte pour enseigner est celle de Pierre ; là
se disent les paroles qui enfantent la foi. De cette barque, Jésus enseigne
la foule ; de cette barque, il instruira les nations.
94 JÉSUS-CHRIST VIVANT
VI – LA PÊCHE MIRACULEUSE
D’après les cartons de Hampton-Court (Angleterre). — Jésus dit à Pierre : « Tu seras un
jour pêcheur d’hommes ». André se lève surpris. Dans la seconde barque Jean et Jac-
ques retirent les filets, tandis qu’un cinquième apôtre tient le gouvernail.
La barque s’éloigne un peu du rivage : il faut prêcher aux peuples avec
mesure, ne pas les attacher aux choses terrestres, ne les pas pousser trop
vers les régions du mystère ; il faut condescendre à l’infirmité de tous,
II. – L’ANNÉE DOUCE 95
pour attirer à la paix l’homme nageant dans les choses mobiles et amères
de cette vie.
NICODÈME. LA SAMARITAINE.