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Analyse des caractéristiques du comportement

financier de l’Entrepreneuriat Marocain : Cas des


PME.

OUBDI LAHSEN
ENCG – Agadir. Université Ibn Zohr
Équipe de Recherche en Finance, Innovation et Système d’information (ERFISI)
Laboratoire en Entrepreneuriat, Finance et Audit (LaREFA)
Département : Gestion

1
Résumé

Conscient du rôle indéniable des PME dans le développement économique, le gouvernement


marocain s’est fait le protagoniste, au cours des années 90, de nombreuses initiatives visant à
instaurer des procédures de financement destinées à cette catégorie d’entreprises. Dans
l’ensemble, les résultats de ces mesures restent mitigés.

La présente communication vise d’une part, à identifier les pratiques de financement


existantes dans les PME marocaines et, d’autre part de proposer un schéma explicatif de leur
comportement en matière de financement. Pour ce faire nous avons réalisé une enquête après
de 50 PME concentrées sur l'axe Salé–Casablanca.

Le manque de ressources longues est un problème récurrent aux entreprises marocaines, ce


qui contribue aux blocages au développement de l’entrepreneuriat et à la création d’entreprise.
C’est d’ailleurs l’une des faiblesses du système de financement marocain, qui a toléré le
financement bancaire sous forme d’emprunt à court terme, comme mode de financement
unique et privilégié des PME.

Mots clés : Comportement Financier, entrepreneuriat, Fonds propres, autofinancement,


endettement, autonomie financière, ouverture du capital, PME.

2
La théorie du développement nous apprend que la croissance d’une économie passe,
notamment par son financement. Historiquement, les modes de financement sont apparus de
façon progressive et dans un ordre chronologique qui a permis l’émergence successive d’un
régime d’autofinancement, puis de la finance directe et enfin de l’intermédiation financière1.

Ainsi, une entreprise ne peut décoller et se développer que dans la mesure où elle dispose de
capitaux suffisants et affecte ses ressources en respectant un certain nombre de règles, faute
de quoi, elle s’expose à la détérioration de ses comptes 2. Le problème financier dans
l’entreprise reste, malgré de nombreuses recherches qui lui ont été consacrées, une approche
difficile et un domaine trop vaste pour être saisi sous tous ses aspects.

Or, le manque de ressources longues est un problème récurrent à toutes entreprises, quelles
soient moyennes ou grandes, qui se manifeste à tous les stades de leurs développements. C’est
d’ailleurs là une des faiblesses du système de financement marocain, qui a toléré le
financement bancaire sous forme d’emprunt à court terme, comme mode de financement
unique et privilégié des entreprises.

La connaissance d’un comportement passe par la « description de son rôle et de son


importance à l’intérieur de l’ensemble structuré qui représente le schéma de préférence ou
d’adaptation de l’unité de décision3 ». Pour mieux analyser le comportement de financement
des PME, il nous a fallu l’insérer dans le cadre du financement global de l’économie
marocaine mais nous risquons de s’éloigner de notre problématique principale. Ainsi, une
analyse descriptive des déterminants de financement nous permet de comprendre les
motivations des choix financiers des PME en matière de financement.

1
Cohen «Gestion financière de l’entreprise et développement financier »Édition EDICEF, 1991, P92
2
A. Choinel et G. Royer « Le marché financier : Structure et acteurs » C.F.P.B. Édition revue de la banque, 1990
3
L. Mahérault « Comportements financiers des entreprises familiales : approche théorique et empiriques »thèse
Doctorat en sciences de gestion, Université Grenoble II, 1996.

3
1 L’entrepreneuriat marocain : Une réalité complexe

En théorie des organisations, l’entrepreneur est à la fois un acteur économique, un vecteur


social et souvent individu animé de valeurs. La figure4 suivante schématise cette complexité.

Figure 1:Les appartenances de l'entrepreuneur

Valeurs et sens de
Interactions l’action Interactions
Entrepreneuriale

Système Système
communautaire Entrepreneur communautaire

Interactions
Interactions
Motivations
économiques
propres

Ce schéma mis en évidence des interactions des facteurs qui structurent les motivations,
valeurs et objectifs de l’entrepreneur. Dans cette perspective, le comportement financier ne
peut être saisi qu’à partir de l’étude du processus décisionnel complexe dans lequel il s’insère.
Au Maroc, c’est le Dirigeant propriétaire qui assume le rattachement des différentes décisions
et fonctions à l’ensemble.

Appartenant à une famille, l’entrepreneur de la PME marocaine, gère, participe à la


production et cherche toujours à réaliser ses projets en toute discrétion et liberté en faisant

4
WAGUE. M « Entrepreneuriat et inefficience des comportements financiers dans les PME-PMI en Afrique
subsaharienne » Faculté des sciences juridiques et économiques, Université de Nouakchott.

4
appel à un capital non personnel (de l’un des proches de la famille) afin d’éviter la perte du
contrôle de l’affaire. Ces fonds sont généralement non rémunérés, ce qui explique l’absence
d’une politique de «distribution de dividendes ». La réussite entrepreneuriale se réduit donc à
la préservation et l’accroissement la richesse de la famille. Ce statut éloigne le comportement
financier des PME des grandes entreprises5.
2 Les caractéristiques de l’entrepreneur marocain

Pour tenter de cerner les motifs d’une telle politique de financement des entreprises
marocaines et notamment les PME, nous avons côtoyé de manière répétée et organisée, un
grand nombre d’entrepreneurs des PME pour comprendre leurs comportements financiers.

Cette étude6 a porté sur un échantillon d’entreprises (moyennes et/ou petites) ayant fait l’objet
d’une enquête sur les pratiques de financement durant la période septembre–novembre 2015.
Seules 50 entreprises industrielles et/ou commerciales réalisant un chiffre d’affaire supérieur à
50 millions, dont le capital social dépasse les 5 millions de DHS et employant entre 50 et 200
personnes ont été retenues par cette étude.

L’ensemble des PME enquêtées appartiennent à 4 grands secteurs d’activité : Agro-


alimentaire (42%), la pêche (30%), Distribution (16%) et Chimie et parachimie (12%). En
moyenne, l’age des entrepreneurs interrogés est de 42 ans. Pour ce qui est de la formation
académique, les dirigeants possèdent un niveau d’instruction moyen. En effet, 76% d’entre
eux disposent au moins d’un diplôme secondaire et 14% ont complétés leurs études
universitaires.

Cependant, seulement 7 entrepreneurs ont une formation de base en gestion alors que la plus
forte concentration (35 entrepreneurs) se trouve dans le domaine technique. Enfin, la

5 OUBDI. L (2004) « Financement des entreprises marocaines par le marché financier: étude du comportement
financier des sociétés cotées à la bourse de Casablanca, Doctorat, Université Mohammed V, Rabat-Agdal
6
Malgré le caractère anonyme et confidentiel des réponses, ce type d’approche pose le problème de la sincérité
des répondants

5
caractéristique commune à toutes ces PME se rapporte à la structure de propriété du capital.
En effet, notre enquête prouve que la concentration du capital caractérise la plus part des
entreprises interrogées puisque 90 % des dirigeants marocains détiennent plus de 70 % du
capital.

Tableau 1 : Caractéristiques personnelles des entrepreneurs- dirigeants.


Nombre de réponse Fréquence (en %)
L’âge 50 100%
25-35 ans 6 12
35-45 ans 33 64
46-60 ans 11 22
Plus de 60 ans 9 18
Formation Académique 50 100%
Primaire 12 24
Secondaire 31 62
Universitaire 7 14
Spécialités 50 100%
Gestion 7 14
Technique 35 70
Autres 8 16
Part détenue du capital (en %) 50 100%
Moins de 16 0 0
16 - 50 2 4
50 - 70 3 6
70 - 100 45 90
Total 50 100 %
Source : Notre enquête

Ces entreprises présentent donc des traits spécifiques au niveau de l’intensité capitalistique,
de la structure financière et de croissance. Il s’agit globalement des entreprises familiales dont
les dirigeants sont propriétaires. Ce caractère entrepreneurial a d’importantes conséquences :
 La proximité entre patrimoines sociaux et familiaux ;
 Confusion de la détention du capital et de la direction

6
 Concentration des pouvoirs et des responsabilités ;
 Un management spécifique et traditionnel basé sur le verbal ;
 Et des relations d’agences particulières.
3 L’impérieuse nécessité des ressources propres des PME marocaines.

Étant considérées comme la cheville ouvrière de la croissance et du développement


économique, les PME occupent actuellement le premier rang des préoccupations économiques
au Maroc. L’une des explications de l’intérêt particulier porté à ces entreprises, est d’être
considérée comme l’un des pôles de création de l’emploi et un instrument privilégié du
développement régional voire même national. Ces unités économiques, caractérisées par leur
prépondérance numérique et par un dynamisme et une activité entrepreneuriale considérables,
confrontent des difficultés financières dues essentiellement à la faiblesse de ses ressources
propres. Ce besoin en fonds propres apparaît lors de la création et/ou au cours de la phase de
croissance.
3.1 Besoin de financement à la naissance.

Dés la création de son entreprise, le dirigeant se heurte aux problèmes du financement de son
projet. Au fur et à mesure de la croissance de son affaire il doit veiller sans cesse au
renouvellement de ses fonds propres afin que sa capacité d’endettement soit en mesure de
financer ses programmes d’investissements. A ce stade, l’entrepreneur ne peut ou n’a pu
compter que sur ses ressources personnelles (apports variés, vente de biens personnels…) ou
celles de ses associés ou de sa famille. Il ne peut en général obtenir de crédit que s’il offre à
ses créanciers (surtout les banquiers) des garanties personnelles.
3.2 Phase de la croissance.

Pour poursuivre son exploitation et accroître son activité, l’entreprise a besoin de capitaux
propres. Si elle génère une rentabilité suffisante, elle financera ses besoins principalement par
ses fonds sécrétés, en l’occurrence l’autofinancement ce qui lui permettra de survivre. Dans
un premier stade de sa croissance, elle doit tirer profit des concours courants qui lui sont
accordés au niveau de son activité (crédits fournisseurs, crédits d’escomptes…) Au fur et à
mesure de son développement, elle accède facilement aux différents types de crédit à court
terme (découvert bancaire . . .) si elle fait preuve d’une bonne gestion et si sa rentabilité est

7
suffisante. Il ressort d’une enquête réalisée en France7 que des besoins en fonds propres
apparaissent lors :
 De l’extension des capacités de production (extension se réalisant par un
agrandissement des installations actuelles ou par leur transfert) ;
 De la création d’une nouvelle unité de production ;
 De la conquête d’un nouveau marché ;
 Du lancement d’un nouveau produit.

L’acuité de l’insuffisance des fonds propres constatée dans ces périodes d’investissements
physiques est justifiée par un décalage financier entre les encaissements effectués sur une
courte période et une suite de recettes étalées dans le temps.

4 Fondements analytiques des Déterminants du choix des modes de financement des


PME.

Afin de compléter notre démarche sur le comportement financier des PME, nous avons voulu
savoir quels sont les critères de base qui motivent les dirigeants de choisir les moyens de
financements les plus adéquats. Nous avons demandé aux entrepreneurs de classer par ordre
d’importance les critères de choix de leurs sources de financement.

Tableau 2. Déterminants du mode de financement des entreprises enquêtées


Critère du choix Nombre de réponses Fréquence (en %)
L’autonomie financière 26 52
Le maintien de la solvabilité 10 20
Coûts respectifs 7 14
Actifs à financiers 4 8
La durée de la dette 3 6
Total 50 100
Source : Notre enquête

7
A. MARION : « Insuffisance des fonds propres dans la MEI en croissance », R.F.G, 1977, PP.25-35

8
Le tableau 2 montre que plus de 70 % des entreprises de l’échantillon sont directement
concernées par la recherche de l’autonomie financière et le maintien de la solvabilité comme
critère principal de choix d’une source de financement. De même, le coût de financement
préside dans le choix entre dettes ou fonds propres pour le financement de l’investissement.

L’antagonisme croissance–indépendance financière nous semble au cœur de la spécificité des


comportements financiers des PME et cela de façon différente selon le secteur d’activité.
Ainsi, les motivations des dirigeants des PME sont telles que le problème de la croissance et
de l’indépendance se présente à eux comme un dilemme permanent. Tentés de promouvoir la
croissance, ses risques les inquiètent : perte de contrôle, difficultés financières, disparité de
l’autonomie. Il en découle un respect de l’ordre hiérarchique de financement en fonction des
désirs des responsables financiers : l’entreprise finance d’abord ses investissements par des
ressources internes avant de s’orienter vers les financements externes.

Tableau 3. Classement des sources de financement par ordre d’utilisation


CLAF Rang 1 (en %) Rang 2 (en %) Rang 3(en %)
Autofinancement 94 % 28 % 0%
Dettes 6% 68 % 4%
Émission d’actions 0% 4% 96 %
Source : Notre enquête
Les résultats de dépouillement nous permettent de lever trois remarques importantes :
 L’autofinancement apparaît comme le principal mode de financement des projets
d’investissements ;
 Le financement par dette à terme constitue la seconde source de financement avec prés de
68% des répondants ;
 Enfin, le capital–actions d’origine externe est habituellement le dernier recours des
entreprises étant donné qu’il implique une répartition de la propriété et du pouvoir
décisionnel au sein de la société.

Il ressort donc que la majorité des PME préfèrent se financer par des fonds propres, même si
elles sont sous capitalisées, et ce pour garder leur autonomie de décision et de gestion. Or, la
logique financière de ces entreprises montre que l’endettement demeure le mode de
financement le plus utilisé. Sa structure met en évidence la domination du crédit à court

9
terme, ce qui explique la préférence du court terme au détriment de l’engagement à long
terme.

L’endettement des entrepreneurs étant vécu comme contrainte externe. Il n’est pas souhaité
par eux au nom de l’autonomie financière en raison de son coût. Les facteurs qui déterminent
ce choix sont multiples : baisse des résultats liée à la hausse des coûts des matières premières,
faiblesse de l’offre en capitaux propres extérieurs, structure traditionnelle du capital, souvent
familiale des entreprises.

Tableau 4. Les motivations des chefs d’entreprises à l’endettement


PLED Nombre de réponse Fréquence (en %)
Coût de la dette est faible 0 0%
Financement interne est insuffisant 40 80 %
Absence de moyens alternatifs 6 12 %
Maximiser la rentabilité des actionnaires 4 8%
Total 50 #
Source : Notre enquête

Il ressort de ce tableau que l’attitude des dirigeants face à l’endettement apparaît hétérogène.
En effet, la facilité d’obtention des crédits ne constitue nullement le critère du choix de
financement, elle demeure toutefois un critère d’une grande importance puisque certaines
PME recensées, nous en fait état des problèmes posés par les formalités bancaires. Cependant,
l’orientation vers la dette est due principalement à la carence des ressources internes (80% des
interrogés) et non pas parce que le coût de l’emprunt bancaire ou du marché est faible.

Par ailleurs, il semble que les dirigeants sont conscients que le coût de la dette n’est pas faible
puisque cette rémunération se traduit par la sortie de fonds de trésorerie. Ce comportement
s'explique par :
 Des choix personnels liés aux préférences financières des dirigeants–propriétaires. Ainsi,
l’autofinancement est préféré car il ne génère pas de coût à l’entreprise.
 La préférence du court terme au circuit à long terme et
 L’absence de neutralité fiscale entre les modes de financement. Ainsi 60% des interrogés
préfèrent recourir à l’endettement en raison de la déductibilité fiscale. Ce résultat nous

10
permet d’avancer que la fiscalité marocaine présente une certaine discrimination entre les
ressources de financement puisque l’endettement est toujours préféré à l’autofinancement,
lui-même plus avantageux que l’émission d’actions.

5 Analyse Empirique Des Facteurs Expliquant L’insuffisance Des Fonds Propres Des
Entrepreneurs

L’insuffisance des ressources propres est une caractéristique de la quasi–totalité des


entreprises de l’échantillon (92 % des interrogés). Cette situation les places dans une position
critique qui empêche leur développement. Le but de cette section est de dégager d’une
manière empirique les facteurs expliquant l’insuffisance des fonds propres des PME de notre
échantillon.
5.1 L’insuffisance des fonds propres et l'effet–secteur

Le secteur d’activité constitue une première approximation du risque d’activité. A l’intérieur


d’un même secteur, les PME affrontent le même environnement économique (concurrence et
compétitivité) et technologique ce qui devrait se traduire par des ratios d’endettement voisins
à l'intérieur d’un même secteur et des différences intersectorielles sensibles. En effet, les
réponses des dirigeants révèlent un évident conformisme aux pratiques des secteurs. Ils
évoquent souvent la tendance générale du secteur pour justifier leurs niveaux d’endettement.

Ainsi, d’après notre enquête, l’autofinancement, comme composante principale des fonds
propres, est la technique la plus facile à réaliser. Plus de 94 % des PME interrogées l’utilisent
comme source privilégiée pour financer leur croissance et leur développement. Or, force est
de constater que 86 % de la population enquêtée réclament que sa part est insuffisante dans
leurs plans de financement. Cette insuffisance de ressources propres n’est pas spécifique mais
c’est une caractéristique générale à tous les secteurs d’activité.

5.2 Les facteurs justifiants l’absence des fonds propres des PME
En plus de la sous capitalisation et la réticence vis à vis du marché financier, la faiblesse de
l’autofinancement permet également d’expliquer le handicap des ressources propres des
sociétés de notre échantillon.

11
Tableau 5. Les facteurs qui bloquent l’autofinancement

CIAU Nombre de réponse Fréquence (en %)


Pression fiscale 30 60
Dégradation de résultats 18 36
Distribution de dividendes 2 4
Total 50 100 %
Source : Notre enquête

5.2.1 Les raisons de l’insuffisance de l’autofinancement des entreprises locales

Les obstacles internes à l’accroissement de l’autofinancement des entreprises enquêtées


résultent de l’importance de la fiscalité et de la dégradation des résultats.

A. L’importance de la fiscalité réduit les possibilités d’autofinancement

L’impact de la fiscalité sur les modes de financement apparaît rarement au cours des débats
sur les reformes de la fiscalité. Pourtant, les explications théoriques des choix de financement
des entreprises ont mis l’accent sur l’importance de cette variable fiscale.

En plus de la discrimination du système fiscal marocain8 qui autorise la déductibilité des


charges financières, sa complexité (accru par différents régimes de faveur) fait que
l’autofinancement disponible après prélèvement fiscal est loin de refléter la capacité réelle de
la PME à s’autofinancer. Ainsi, la pression fiscale est un facteur limitant les possibilités
d’autofinancement des entreprises marocaines en générale et de la PME en particulier (soit
60% des répondants).

8
Malgré la mise en place récemment de livres de procédures fiscales.

12
Cette amputation résulte de trois causes :
 L’importance des prélèvements consécutifs au paiement de l’impôt sur les sociétés (35%
du résultat net dans le cas d’une S.A) ;
 La déductibilité fiscale des intérêts
 Le mode de détermination du bénéfice imposable (bilan non réévalué) ;
 L’anticipation des prélèvements de l'État (le versement des acomptes).

B. La dégradation des résultats bloque le recours aux fonds sécrétés

En plus de la fiscalité, la faiblesse des résultats semble un facteur essentiel qui entrave les
possibilités d’autofinancement des PME (36% répondants). Toutefois, le comportement des
dirigeants montre la tendance à affecter la grande partie des bénéfices aux réserves. La
tentation est d’autant plus grande d’utiliser ses bénéfices à l’accroissement du patrimoine
personnel et familial. Il semble plus juste de parler de la « technique de prélèvements ». Ainsi,
les entrepreneurs interrogés ont tendance à pratiquer une politique de rétention systématique
des bénéfices.

5.2.2 Les obstacles opposants aux fonds d’émission

La faiblesse des apports externes de capital caractérise l’ensemble du système productif


marocain et fait que les fonds propres participent de moins en moins au financement des
entreprises. D’après notre enquête, aucune entreprise interrogée n’a envisagé de procéder à
l’augmentation du capital comme technique de financement. Les causes qui les empêchent
pour réaliser une telle opération les plus souvent invoquées sont l’insuffisance des
disponibilités personnelles (pour 48% des répondants), la nécessité de conserver
l’indépendance financière (pour 68% des répondants) et enfin des obstacles liés aux
procédures et coûts de l’émission (pour 12%). Au total, cette carence s’explique aussi bien par
des raisons d’ordres socioculturels que décisionnels.

A. Facteurs d’ordres socioculturels


Les origines de cette situation particulière résultent d’abord des réticences d’ordre
socioculturel qui induisent une gestion statique du patrimoine en termes d’actifs et non en
termes de flux :

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 Mentalité patriarcale et goût prononcé pour le secret des affaires du coté des chefs
d’entreprises,
 Préférence pour l’immobilier et méfiance pour le placement en actions chez les
épargnants.
 La dilution et la perte du contrôle (28% des interrogés) constituent des obstacles majeurs à
la réalisation de l’augmentation du capital

En plus, Même si la société anonyme est la nature juridique des entreprises de notre
échantillon, la concentration financière est très forte entre les mains d’une même famille ce
qui explique leur réticence devant l’accès au marché boursier9 et l’ouverture de leur capital
par crainte de perte de contrôle. Le comportement des entrepreneurs marocains correspond
plus à un souci de préservation du patrimoine familiale et de participer à la croissance globale
de la richesse qu’à celui de la recherche d’une maximisation de valeurs. Toutefois, l’arbitrage
entre la perte d’indépendance et le maintien d’une certaine autonomie de décision, tranché en
faveur de la deuxième alternative, pèse sur le développement de certaines PME et sur la
satisfaction de leurs besoins de financement.

B. Facteurs d’ordres décisionnels


Les décisions en matière financière dans les PME restent très liées au dirigeant propriétaire.
Elles sont considérées par ces derniers comme une de leurs prérogatives absolues. A ce titre,
les dirigeants ne se permettent pas d’en déléguer leurs pouvoirs aux cadres et ce pour les
raisons suivantes :
 Les obstacles psychologiques du dirigeant souvent habitué à tout décider ;
 Confusion de son patrimoine de celui de son affaire.

9
Aucune entreprise de notre échantillon n’est cotée en bourse de valeur de Casablanca.

14
CONCLUSION

Parmi les problèmes qui se posent aujourd’hui à l’économie marocaine quant au financement
est celui des moyens de financement des investissements des entreprises privées. Le mode de
financement des PME marocaines a évolué dans le sens d’une plus grande diversité et d’un
rééquilibrage progressif des sources de financement.

Le manque de ses ressources est un problème récurrent aux PME, qui se manifeste à tous les
stades de leurs développements. Ce problème est aussi bien d’ordre financier, juridique
qu’économique :
 C’est d’abord un problème financier pour les entreprises, surtout de taille moyenne ou
petite, dont le taux de croissance est tel que leur autofinancement ne suffit pas pour
financer leur développement ;
 Il est aussi un problème juridique : Les PME ont, dans leur majorité un caractère fermé.
Les dirigeants hésitent à ouvrir leur capital à des partenaires extérieurs, craignant une
menace de leur pouvoir ;
 Enfin, il reste que le problème de financement en fonds propres est un problème
économique puisqu’en dépend l’équilibre industriel de notre pays.

Au terme de cette analyse :


 Il apparaît que les comportements organisationnels au sein des PME marocaines sont
« générateurs d’inefficience explicatifs du manque d’essor d’un véritable
entreprenariat10 ».
 Il ressort que la mentalité et les habitudes des dirigeants – propriétaires s’opposent à la
relation de mandat du fait de leur trop grand attachement à l’exercice du contrôle de
l’affaire.

10
WAGUE. M « Entrepreneuriat et inefficience…. » op cit

15
Bibliographie

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16

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