Le Petit Monde de Georges Dandin Compressed

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Le petit monde de Georges Dandin

Avec une maison, un mouton, une terrible bourrasque, un soleil


factice, un grand miroir et quelques êtres humains.

A partir de Georges Dandin de Molière.


Mise en scène : Nicole Stankiewicz
Un projet de l’ASBL ASBL.

1
Point de départ - un personnage
En 2016, j’étais en dernière année de mise en scène à l’INSAS et je décidai de monter comme
projet de fin d’études le début de Georges Dandin de Molière.

C’était parti d’un souvenir. Mes pensées me ramenaient sans cesse à un petit personnage, vu sur
une scène il y a bien longtemps, à Nice, dans un des premiers spectacles que j’aie jamais vus
au théâtre. Ce personnage errait face au public et se parlait à soi-même en s’appelant par son
nom, disant des choses comme : “Ah Georges Dandin, Georges Dandin, vous avez fait la sottise la
plus grande du monde. . . Vous l’avez voulu, vous l’avez voulu, Georges Dandin. . . Allons, Georges
Dandin, il vaut mieux quitter la place.”

Je suis partie de ma fascination pour ce personnage à la fois drôle et déchirant de solitude et de


mélancolie. Aussi lucide que naïf. Qui se regarde vivre comme de l’extérieur et qui finit par “se
jeter dans l’eau la tête la première”.

Je me mis à l’imaginer vivant dans une petite maison, avec un mouton dans son jardin, à qui il don-
nerait à manger de la salade en sachet plastique en marmonnant “Ah Georges Dandin, Georges
Dandin...”.

L’histoire de Georges
Georges Dandin est un riche paysan qui a épousé une jeune fille de la noblesse, Angélique, croy-
ant ainsi accéder lui-même au monde doré de l’aristocratie. En réalité, ça tourne au cauchemar.
Sa nouvelle famille ne manque pas une occasion de lui rappeler “qui il est”, d’où il vient et le peu
qu’il vaut.

Le jour où Georges Dandin apprend


que sa femme le trompe, il se saisit de
l’occasion pour essayer d’exister dans
ce petit monde, d’y prendre une place.

A chaque acte, il essaie de prouver à


ses beaux-parents qu’il est cocu, mais
il finit toujours par devoir présenter des
excuses à tout le monde, à genoux.

2
Note d’intention
Plus que raconter une histoire, je souhaiterais donner à sentir un petit monde composé de “présences
sensibles” entretenant entre elles toutes sortes de relations.

Plus que représenter une société inégalitaire du passé et/ou d’aujourd’hui, je voudrais m’intéresser
à la structure même du mépris, à ce que c’est qu’une relation humaine faite de mépris, faite du
sentiment de l’inégale valeur des êtres.

J’aimerais travailler sur le malaise physique, le corps mal à l’aise, le corps maladroit, ainsi que sur
ce qui se passe alors au niveau des yeux. Que fait le sentiment de puissance ou d’impuissance
au regard, à la qualité du regard ?

J’aimerais interroger la relation que l’on entretient avec soi-même. Entre jouissance de soi et al-
iénation, adéquation à sa propre identité et sentiment d’étrangeté, de bizarre distance. Comment
le rapport à soi s’entrelace-t-il aux relations aux autres, au temps et à l’espace ? Comment ceci
s’exprime-t-il dans l’impalpable d’une qualité des gestes et des regards mais aussi dans le soin
concret que l’on prend de son corps ? Se repeigner, se brosser les dents, tout faire pour disparaître,
ou au contraire pour briller de mille feux.

Plus que d’adultère et de jalousie, je voudrais que le spectacle parle d’angoisse.

Car il me semble que c’est de cela que parle la pièce de Molière au fond. Georges Dandin est
trompé par sa femme, il essaie de le prouver mais personne ne veut rien voir ni entendre. Il a
l’impression alternativement d’être devenu fou et de vivre dans un monde de fous. Il perd pied,
sa réalité vacille. C’est une plongée dans l’angoisse d’un personnage englué dans sa vie, et pris
de vertige face à un monde délirant.

3
Scénographie - Apocalypse contre Cocon
Dans la dramaturgie de la comédie classique, l’espace est neutre, invisible, et il n’y a que du temps,
du temps qui s’enchaîne à un rythme effréné. Au contraire, notre spectacle est avant tout fait
d’espaces, qui sont à la fois des lieux concrets et des métaphores.

On a d’une part un Monde extérieur apocalyptique mais que traversent avec panache des per-
sonnages audacieux, et d’autre part, le Cocon ambigu d’un “chez-soi” qui n’offre que peu de ce
qu’il promet en termes de douceur, de bonheur, et de protection.

Au centre, la maison de Georges.


Il toque de temps en temps à la porte mais sa
femme ne le laisse pas entrer. Georges erre
dans le jardin, cette zone d’entre-deux, intérieur-
extérieur éclairé au soleil factice de trois néons.
Dans un coin, il y a Colin le mouton.
Il croit parfois entendre des bruits dans son dos,
et quand il se retourne d’un coup, il surprend des
messagers qui se faufilent pour porter des billets
doux à sa femme.

Au-delà du jardin, c’est la tempête.

Georges scrute parfois cet Ailleurs menaçant à l’aide


de jumelles. Chaque fois que des personnages ar-
rivent, on les voit progresser péniblement à travers
une terrible bourrasque, dans les éclairs et le ton-
nerre.
Concrètement, à l’Insas, les personnages arrivaient par
un couloir qui longeait le fond de la salle, et on les voyait
lutter contre le vent à travers de grandes fenêtres.

Dans un coin, le vestibule.

Les personnages s’y jettent pour échapper à la


bourrasque. Ouf, ils sont au chaud. Ils enlèvent
leurs manteaux et se pomponnent avec soin au
miroir en papotant.

Les beaux-parents finissent toujours par s’embrasser passion-


nément, sous le regard admiratif et mal à l’aise de Georges.
4
Tempo
Suspendre à volonté le rythme endiablé de la comédie

Les moments d’arrivée dans la bourrasque et les moments d’errance de Georges dans son jardin
permettent de trouer l’intrigue, de freiner d’un coup le tempo, d’interrompre l’enchaînement
acharné des scènes et des gags pour permettre des moments de flottement, des instants plus
suspendus et mélancoliques, une atmosphère plus contemplative et méditative.

Le regard des spectateurs peut basculer dans une vision plus microscopique et l’attention peut se
porter sur la présence des corps, les petits gestes, les regards. Ces moments créent des brèches
temporelles qui peuvent nous permettre d’explorer un type d’atmosphère et de comique plus
poétique et étrange. Où se nouent aussi des relations intéressantes avec les objets.

Playtime, Jacques Tati. M. Hulot regarde comment le coussin de cet étrange fauteuil reprend
lentement sa forme.

5
Type de jeu
Naïveté

Plus que le “caractère”, la “psychologie” ou le “gestus social”, c’est la sensibilité de ces personnages
qui m’intéresse. Et surtout leur incroyable naïveté.

Nous cherchons une présence à la fois brute et candide, à fleur de peau. Une sur-émotivité des
personnages, qui s’exprime de manière discrète ou flamboyante, mais jamais ni réaliste, ni psy-
chologique, ni grotesque, ni satirique.

Sur-émotivité flamboyante

Les personnages de puissants, comme


les beaux-parents, ne cessent de
s’offusquer et de s’indigner.
Ce sont des drama queen. Toutes
les aventures émotionnelles que leur
fait vivre l’intrigue n’est au fond pour
eux qu’un jeu, et ils tirent un plaisir
d’exprimer leur colère avec panache.
Cruella d’Enfer : toute la colère et la mauvaiseté des person-
nages de dessins animés. Des émotions extrêmes exprimées
d’une manière anti-réaliste / psychologique.

Sur-émotivité discrète

Georges Dandin est le personnage le


plus sensible de la pièce, celui qui
souffre le plus, et celui dont la colère
peut le moins s’exprimer devant les
autres.
L’émotion est chez lui présente sur le
mode du feu sous la glace.

Le visage de Buster Keaton, impassible et si émouvant.

6
Monde injuste et puissance d’agir
Durant toute la pièce, Georges se débat. Il veut agir, il veut changer la situation dans laquelle il
se trouve. Il croit à la parole : il essaie de raisonner sa femme, de raisonner ses beaux-parents,
de leur parler sincèrement. Il croit à l’intelligence, il croit à la vérité. Il croit que s’il rassemble des
preuves, que s’il arrive à montrer la vérité, à mettre le pouvoir face aux faits, à les mettre devant
le fait accompli, et bien quelque chose se produira. Des décisions seront prises. Justice sera faite.
La vie changera. Le bonheur pourrait advenir.

Mais dans cette histoire où il est une victime, Georges est aussi responsable de ses propre mal-
heurs. Il a épousé une femme qui ne l’aimait pas, sans se soucier de son avis. Et il ne comprend
pas en quoi cela pourrait ne pas lui convenir. Georges est aussi sourd à sa parole que les autres
personnages le sont à la sienne.

Les véritables responsables (et bénéficiaires) de cette situation, ce sont les beaux-parents. Ce
sont les vrais méchants de notre conte. Mais le problème au fond, ce n’est pas eux. Ce n’est pas
Angélique. Ce n’est pas Georges. C’est le petit monde dans lequel ils vivent. Tout le monde y a
tort, tout le monde y a raison, et tout y est intriqué dans tout.

Claudine, une messagère pleine de ruse

Au coeur de Georges Dandin, il y a la question de l’action, la question


de ma petite vie telle que prise dans un monde injuste et complexe
qui est à la fois système et chaos. Que puis-je faire ? Par quel bout
puis-je attraper ma puissance d’agir ?

Sachant que la situation – la mienne comme celle du monde – est


toujours d’emblée embrouillée et que l’option de repartir à zéro, de
faire peau neuve, de repartir d’une page blanche, ne nous est jamais
donnée.

7
L’équipe
ASBL ASBL
En 2017, l’équipe de Georges Dandin a répondu à un appel à projet du TTO, qui cherchait une
“troupe résidente pour son Café-Théâtre”. Pour nous, c’était une occasion rêvée de nous lancer
dans un projet collectif de laboratoire du comique. Le deal avec le TTO était clair : liberté presque
totale contre autogestion presque totale. De l’accueil du public au bar, en passant par la commu-
nication et la régie technique, nous devions tout gérer et ne serions pas rémunérés (autrement
que par notre billetterie et notre bar). Nous sommes devenues le collectif ASBL ASBL et en deux
ans, nous avons fabriqué sept créations : Hahacademy !, Refroid, Des Hommes et des Flics, Moulin,
Intrigues et Secrets, Ténèbres Ténèbres et Partouze Pastorale – Matériau(x). Autant d’occasions de
mener une expérimentation sur des formes théâtrales et des types de jeu, sur toutes sortes de
manières de travailler en collectif et sur la cohérence globale d’un projet artistique. En effet,
chercher ce que pouvait bien être notre “Café-Théâtre”, c’était chercher des formes artistiques
et une manière de travailler accordées à une certaine situation de production. Une situation com-
pliquée à cause de l’absence de moyens mais qui nous offrait une liberté grisante et une expéri-
ence collective rare et exaltante. Nous cherchons aujourd’hui un nouveau lieu dans lequel con-
tinuer notre laboratoire, en parallèle des créations que portent par ailleurs les différents membres
de notre collectif.

Nicole Stankiewicz – Mise en scène et Jeu


Après des études universitaires (ENS et Université Paris 3), elle se forme au
Conservatoire du 8ème (Paris) puis à l’INSAS en mise en scène. Diplômée en
2016, elle participe depuis à différents projets, comme comédienne, met-
teuse en scène ou assistante. Elle joue dans La colonie et Origine de Sil-
vio Palomo (La Balsamine), We should be dancing d’Emilienne Flagothier
(Théâtre de Liège /Festival Emulation, MARS, Objectif Danse 2019) et Le
palace de Rémi de Judith Longuet-Marx (Mains d’oeuvres / Wet Festival).
Elle est l’assistante d’Elena Doratiotto et Benoît Piret sur Des caravelles et
des batailles (Festival de Liège, MARS, Doms).
Elle jouera Georges Dandin - Léonard Cornevin (qui jouait Georges à l’Insas et dont le visage figure
sur les photos) étant pris par d’autres aventures.

Emilienne Flagothier - Assistante à la mise en scène, Dramaturgie et Jeu


Emilienne a 26 ans mais en est au moins à sa huitième réincarnation ter-
restre. À l’INSAS elle met en scène des montages de textes de Cioran, Es-
chyle, Racine, Queen, des évangiles de Marie-Madeleine ou des specta-
cles muets. À sa sortie, elle écrit un mémoire intitulé l’Esthétique du Nul –
réflexions sur un genre théâtral contemporain et une philosophie de vie. Elle
joue depuis 2016 dans le Thinker’s Corner de Dominique Roodthoof et sera
prochainement dans Vita Siyo ya watoto de Frédérique Lecomte à Goma
(RDC) puis au KVS. En 2019, elle met en scène We should be dancing (Festi-
val Emulation, MARS, Objectif Danse 2019).

Wilhem de Baerdemaeker - Jeu


Egalement issu de l’INSAS. Il a travaillé avec le collectif Ersatz (Basilic - Metz)
ainsi qu’avec le collectif Schlemil. Il joue dans La colonie de Silvio Palomo
(La Balsamine). Il fait de l’impro depuis toujours, consacre une partie de
son temps à l’écriture, et travaille pour le Dispositif Relais à mi-temps, co-
dirigeant également les spectacles que monte chaque année cette asbl
(BRASS, etc.).

8
Jenna Hasse – Jeu
Diplômée de l’Insas en 2014, elle alterne sa pratique entre le jeu et la mise
en scène, au théâtre et au cinéma. Au théâtre, elle a notamment joué dans
L’Echange de Claudel mis en scène par Raoul Teuscher (Genève et Lau-
sanne). Au cinéma, elle joue dans Sott’Acqua d’Audrey Bersier (Festival Pre-
mier Plan, Angers), On avait dit qu’on irait jusqu’en haut de Tizian Büchi (FIFF
Namur), La douleur d’Emmanuel Finkiel et Mes provinciales de Jean-Paul
Civeyrac. Après son premier court-métrage, En août (présenté à la Quinzaine
des réalisateurs en 2014 et ayant reçu plusieurs prix), elle réalise Soltar en
2016. Aujourd’hui, elle termine un moyen-métrage documentaire et prépare son premier long-
métrage en tant que réalisatrice.

Lucas Meister - Jeu


Diplômé de l’Insas en 2015. Depuis, il a joué dans We want more (Transquin-
quennal, Kaaitheater), L’absence de guerre d’Olivier Boudon (Théâtre Océan
Nord), Zone protégée d’Aymeric Trionfo (Les Tanneurs), Sould I leave or should
I stay de Simon Thomas (La Balsamine), Mouton noir de Clément Thirion, La
ville des zizis d’Eline Schumacher (XS Festival-Théâtre national, Théâtre des
Tanneurs, MARS) et We should be dancing d’Emilienne Flagothier.

Adèle Vandroth - Jeu


Après une licence en philosophie, Adèle se forme à l’Insas. Elle travaille
notamment avec Vincent Sornaga pour Chiméria Farce apocalyptique et Le
chef du Popo, et avec Ingrid Von Wantoch Rekowski pour Bug ( Brigittines,
Centre Pompidou). L’an prochain, elle travaillera sur les oeuvres de Ballard
avec Renaud Cagna. En parallèle, elle se forme à la danse contemporaine,
prend régulièrement des stages (Danse Buto, Danse théâtre, Danse Gaga,
Suzuki) et est également professeur de théâtre (Coté Village et Festival Mimouna).

Aurélien Leforestier - scénographie et costumes


Diplômé de l’INSAS en mise en scène, il poursuit ses recherches à l’EHESS
(Paris) où il travaille sur les représentations de la nature dans la scéno-
graphie théâtrale. Co-dirige avec Zelda Soussan le LUIT – Laboratoire Ur-
bain d’Interventions Temporaires, qui mène des travaux à la fois de l’ordre
des specific sites, des projets en territoire et des productions théâtrales
(MARCHÉ NOIR, À Venir, La Pastorale du périph’). Comme scénographe, il
travaille pour Thymios Fountas (Sauvez Bâtard) et la compagnie LAÏKA (Le
Palace de Rémi). Il joue dans We Should Be Dancing d’Emilienne Flagothier, À Venir de Zelda Sous-
san et dans de nombreuses performances (Boris Dambly, Carole Douillard, Yves-Noël Genod, So-
phie Perez & Xavier Boussiron, . . . ). Il présente la performance VOLCANS au PIF#4 (Balsamine).

Judith De Laubier (création lumières)


Diplômée de l’INSAS en 2015, elle est cofondatrice de la compagnie LAÏKA
résidente à Mains d’oeuvres. En 2015, elle met en scène le livre I de L’Idiot
de Dostoïevski. En 2015-2016, la compagnie travaille sur trois performances
courtes qui traitent des relations entre humanisme et nouvelles technolo-
gies : Si un chien l’a fait, alors pourquoi pas moi ?, La Capsule (amour et ISS)
et Les Internets etc. En 2018, Le Palace de Rémi est créé à Mains d’ijuvres.
Le prochain projet de la compagnie, Tourisme, sera créé en 2020-2021.
Elle travaille aussi comme créatrice lumière sur les spectacles d’Aurélien
Leforestier et de Clémentine Colpin et comme assistante sur Darius, Stan et
Gabriel contre le monde méchant de Claude Schmitz. Elle est stagiaire lumière de Jérémie Papin
sur Orfeo de Jeanne Candel et Samuel Achache et Saïgon de Caroline Guiela Nguyen.

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Calendrier et partenaires
Répétitions
• 21-26 octobre 2019 : au KJbi (Bruxelles)

• 4-8 novembre 2019 : au Théâtre Varia (Bruxelles)


• une semaine en mars 2020 : lieu à confirmer
• 8 au 12 juin 2020 : à La Barcarolle, St-Omer (France)

• 2020 - 2021: deux ou trois semaines de résidence

Présentations d’étapes
• 7 novembre à 18h et 8 novembre à 17h45, au Théâtre Varia (Bruxelles)
• en mars 2020 (à confirmer)

• 12 juin 2020, à La Barcarolle (St-Omer, France)

Représentations
• 2020 - 2021 : série prévue à La Barcarolle, à St-Omer, France. (coproduction en pré-achat)

Contact
stankiewicz.nicole@gmail.com
+32 473 28 72 76
+33 6 21 91 47 62

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