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Les approches en analyse du discours

• L’approche énonciative
• L’approche énonciative est, à proprement parler, un dépassement de la méthode
structurale qui se base sur l’immanence du texte ou l’analyse de celui-ci s’effectue en
dehors de toutes considérations externes.
• L’approche énonciative renvoie aux travaux de E. Benveniste, c’est le représentant
titulaire de cette approche.
• Cette approche réactive la notion de parole sous le nom de discours en l’opposant au
récit.
• Le discours se caractérise par l’emploi de la première personne et le présent de
l’indicatif où les marques de subjectivité, les déictiques, renvoient au locuteur.
• Le récit par la 3ème personne + le passé simple où les événements semblent se raconter
d'eux-mêmes.
Champ définitoire de l’énonciation
• « L’énonciation sera pour nous l’activité langagière exercée par celui
qui parle au moment où il parle ». Anscombre et Ducrot (1976, p. 18)
• « Il nous incombe d’aller au-delà du point où Saussure s’est arrêté
dans l’analyse de la langue comme système signifiant » (Benveniste,
1966 : I-219).
• C’est chez Benveniste (1902-1976) que l’on retrouve la définition
originelle et devenue canonique de l’énonciation: « L’énonciation est
cette mise en fonctionnement de la langue par un acte individuel
d’utilisation ». (1974: 80)
Les linguistiques énonciatives: ses objectifs
Les linguistiques énonciatives ont pour fondement commun :
Une critique de la langue.
Une volonté d’étudier les faits de parole.
La production des énoncés par les locuteurs dans la réalité de la
communication.
Le programme théorique de la linguistique de la parole est
explicitement mentionné mais aussitôt écarté par Saussure dans le
C.L.G.
Linguistique de la langue VS linguistique de
la parole
• « Ce sont là vraiment deux univers différents, bien qu’ils embrassent
la même réalité, et ils donnent lieu à deux linguistiques différentes,
bien que leurs chemins se croisent à tout moment. Il y a d’un côté la
langue, ensemble de signes formels, dégagés par des procédures
rigoureuses, étagées en classes, combinées en structures et en
systèmes, de l’autre, la manifestation de la langue dans la
communication ». (Benveniste, 1966:130).
Catherine Kerbrat-Orecchioni: les critiques de la
linguistique de la langue
C’est une linguistique du code, auquel doivent être ramenés tous les
faits de la parole.
Deux critiques:
1) Le code n’a aucune réalité empirique (car il existe des dialectes, des
sociolectes et de idiolectes, etc. , en bref une grande variété dans les
usages de la langue.
2) Il faut s’interroger sur la manière dont le code se manifeste en
discours, au moyen d’un modèle de production et d’interprétation.
« Dans cette perspective, l’unité supérieure qu’atteint l’analyse, c’est
la phrase ».
Critique: il existe des « règles de combinatoire transphrastique » qui
doivent permettre de rendre compte du fonctionnement d’unités
supérieures à la phrase.
« Le mécanisme de production du sens est relativement simple; on lui
reconnaît un double support ».
- Le signifiant lexical
- Certaines constructions syntaxiques.
Critique : en fait, toutes les unités linguistiques peuvent participer à la
construction du sens, unités phonétiques, graphiques, rythmiques,
textuelles même.
• «Lorsqu’on envisage le problème de la « parole »,
c’est-à-dire du code en fonctionnement, c’est dans le
cadre du fameux schéma de la communication
(Jakobson) où celle-ci apparaît comme un tête-à-tête
idéal entre deux individus libres et conscients, et qui
possèdent le même code; communication par
conséquent transparente, toujours réussie. »
• Critique : il s’agit là d’une conception idéaliste qui
passe sous silence les ratés de la communication, ses
incessants réglages, les phénomènes inconscients qui
la déterminent. La parole est une activité humaine et
doit être abordée sous un angle pratique.
« Postulat de l’immanence, enfin, qui affirme la possibilité et
la nécessité méthodique d’étudier « la langue en elle-même et
pour elle-même », en évacuant radicalement
l’extralinguistique.
Critique : on ne peut évacuer le référent de l’étude des
phénomènes langagiers (c’est tout particulièrement le cas des
déictiques) ni ce qui est de l’ordre des contextes.
Le passage du champ structuraliste au champ
énonciatif
Le structuralisme développe et approfondit la théorie de la langue
jusqu’aux années 70, moment où émergent des travaux qui,
s’inscrivent explicitement dans le second programme, se concentrent
sur l’énonciation.
Cette approche ne doit pas être radicalement opposée à la linguistique
de la langue puisqu’elle en tire une partie de ses origines: Bally,
Benveniste et Culioli par exemple sont des grammairiens formés dans
le champ structuraliste
La linguistique de l’énonciation, à ses débuts, consistera en effet à
repérer et analyser :
Les marques de l’énonciation dans la parole.
Ces marques sont des outils de la langue ayant pour fonction
d’inscrire dans l’énoncé la subjectivité du locuteur.
Hétérogénéité constitutive vs hétérogénéité montrée (1982).

• Cette conception du sujet hétérogène est particulièrement exploité


dans les années 80 par Jacqueline Authier-Revuz qui élabore le couple
hétérogénéité constitutive vs hétérogénéité montrée (1982).
• Le sujet est constitutivement hétérogène dans la mesure où il est
traversé par sa propre division, par le social, par le discours d’autrui,
par de nombreuses formes d’extériorité.
• Mais il (le sujet) peut aussi montrer son hétérogénéité dans son
discours : il se livre à une sorte de mise en scène particulière des
différentes voix qui le traversent, et l’on parle alors de polyphonie.
• Les travaux de Ducrot sur la polyphonie sont aux aussi fondés sur la
contestation de l’unicité du sujet parlant.
L’appareil formel de l’énonciation :
E. Benveniste
• Benveniste appelle « appareil formel de
l’énonciation », « les marques de fonctionnement de la
langue » qui s’attèlent à montrer dans des énoncés
verbales produits individuellement l’existence d’une
subjectivité des locuteurs.
• «En tant que réalisation individuelle, l'énonciation peut
se définir, par rapport à la langue, comme un procès
d'appropriation. Le locuteur s'approprie l'appareil
formel de la langue et il énonce sa position de locuteur
par des indices spécifiques, d'une part, et au moyen de
procédés accessoires, de l'autre. (Benveniste 1974: 82).
La situation d’énonciation
Deixis est un mot grec qui signifie « ostension, le fait de
montrer » et qui est employé pour désigner
l’identification langagière des paramètres de la situation
d’énonciation.
Les formes concernées sont appelées déictiques,
recouvrant généralement à la fois les indicateurs
personnels et spatio-temporels bien que Benveniste
n’emploie le terme que pour les derniers.
Le terme embrayeur
Jakobson emploie le terme embrayeur, traduction de l’anglais
shifter, emprunté à Jespersen (1922).
Il le définit ainsi: « tout code linguistique contient une classe
spéciale d’unités grammaticales qu’on peut appeler les
embrayeurs : la signification générale d’un embrayeur ne peut
être définie en dehors d’une référence au message » (Jakobson
1963: 178).
Les déictiques personnels
Benveniste a montré que les pronoms de 1ère et 2ème personne ont un
statut différent de ceux de 3ème personne, justement parce qu’ils
constituent des marques de la situation d’énonciation.
En effet, je et tu ne peuvent désigner que les protagonistes de
l’énonciation (la personne qui parle et celle à qui on parle) alors que il
est la personne dont on parle, n’appartient pas à la situation
d’énonciation (c’est selon Benveniste la « non-personne ».
Les personnes 1 et 2 n’ont de réalité que dans le discours et n’ont pas
de signifié stable et universel: « Quelle est donc la « réalité » à laquelle
se réfère je et tu? uniquement une « réalité de discours », qui est chose
très singulière » (Benveniste, 1966: 252).
Cela amène Benveniste à proposer les définitions suivantes:
• « Je signifie ″la personne qui énonce la présente instance du discours
contenant je″ » (1966: 228).
• « [...] on obtient une définition symétrique pour tu, comme l’individu
allocuté dans la présente instance de discours contenant l’instance
linguistique tu ». (Benveniste 1966: 253).
•Les formes appelées traditionnellement « pronoms personnels »,
« démonstratifs » nous apparaissent maintenant comme une classe
d’ « individus linguistiques », qu’il s’agisse des personnes, des
moments, des lieux, par opposition aux termes nominaux qui renvoient
toujours seulement à des concepts.
•Or le statut de ces « individus linguistiques » tient au fait qu’ils
naissent d’une énonciation, qu’ils sont produits par cet événement
individuel (...). Ils sont engendrés à nouveau chaque fois qu’une
énonciation est proférée, et chaque fois ils désignent à neuf.
Les déictiques spatio-temporels
«Ce sont des indicateurs de la deixis, démonstratifs, adverbes, adjectifs,
qui organisent les relations spatiales et temporelles autour du « sujet »
pris comme repère : « ceci, ici, maintenant », et leurs nombreuses
corrélations « cela, hier, l’an dernier, demain »,etc.
Ils ont en commun ce trait de se définir seulement par rapport à
l’instance du discours où ils sont produits, c’est-à-dire sous la
dépendance du je qui s’y énonce. » (Benveniste 1966: 262).

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