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I
• DOES NOT
ÇmCULATE
ENCYCLOPÉDIE
DE LA MUSIQUE ET
DICTIONNAIRE DU CONSERVATOIRE
DEUXIÈME PARTIE
TECHMQl E - ESTHÉTIQIE — PÉDAGOGIE
ENCYCLOPÉDIE
DE LA MUSIQUE
ET
DICTIONNAIRE DU CONSERVATOIRE
Fondateur ; Directeur :
DEUXIÈME PARTIE
TECHNIQUE — ESTHÉTIQUE — PÉDAGOGIE
• • • •
OKCIIESTRATION
MUSIQUE LITURGIQUE DES DIFFÉRENTS CULTES
ESERVED
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nOTTO BETAKtN
t'tiOM THt~ LIBKAKV
PARIS
LIBRAIRIE DELAGRAVE
15, RUE SOUFFLOT, 15
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100
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V 7
public; à une prédilection toujours plus accentuée peuvent se manifester que devant le fait même, qu'on
pour la musique instrumentale. ne peut faire naître à volonté.
L'orchesire moderne voit sans cesse sa palette s'en- Comment passer en revue, comment étudier cette
richir de tons nouveaux. multitude de gestes, compliqués lorsqu'ils ne sont
Behlioz et Wagner, pour ne citer que ces deux pas intuitifs, gesles qui n'ont parfois que la durée de
grands maîtres, lui ont donné une imporlaiice pré- l'éclair etqui, pourtant, ont une signification précise,
pondérante, et, à en juger d'après certaines œuvres qui sont le langage du chef d'orchestre, mais qui
toutes récentes, on ne peut prévoir où s'arrêtera ce n'existent que dans leur application effective, et dont
mouvemenl. D'autre part, l'enseignement instrumen- on ne comprend l'efficacité et la valeur qu'en en
tal progresse chaque jour; la virtuosité de nos exé- faisant l'expérience sur l'orchestre même.
cutants est poussée au plus haut degré; le composi- Quel orchestre se soumettrait à la répétition inces-
teur sait qu'il peut exiger tout ce que sa fantaisie et sante qu'exigerait l'étude de tel ou tel geste?
son imagination lui dictent; il sera compris par ses Les objections contre l'application d'un tel ensei-
interprètes, parce que le chef saura traduire toutes gnement sont sans nombre, et jusqu'ici, dans aucun
les audaces. Conservatoire, dans aucune école de musique, on n'a
Des connaissances pratiques très complexes et tenté de [l'instituer; nOus ajouterons qu'aucun des
toutes spéciales sont donc exigées aujourd'hui de grands chefs connus n"a puisé son art dans un ensei-
celui qui est l'intermédiaire nécessaire entre l'auteur gnement spécial; abstraction faite de la science mu-
et l'auditeur. Le sort d'une œuvre dépend entière- sicale qu'ils possédaient, ils n'ont dû leur habileté
ment de sa compréhension lucide et approfondie, de qu'à deux causes essentielles, indispensables le :
l'influence qu'il exercera sur ses artistes, de son don naturel et la pratique.
expérience (qui peut souvent être précieuse à l'au- Le musicien qui possède ce « don naturel », don
teur même), enlin de beaucoup de qualités que nous précieux et rare, éprouve une joie indicible à se
essayerons de préciser. trouver à la tète de son orchestre. Sans le moindre
Cet art de ditiger peut-il s'enseigner? embarras, comme une chose toute simple, il com-
Il y a quelques années, une enquêle fut ouverle à mande sa phalange d'artistes, ses gesles auront l'ai-
ce sujet, et beaucoup d'artistes consultés préconi- sance, la clarté, la décision d'actes naturels, comme
sèrent la création d'une classe de chef d'orchestre au s'il s'agissait d'un langage toujours parlé. Sa volonté
dont il se sert pour rendre claires et efficaces l'infi- porte un appoint tout particulièrement indispensable
nité des indications nécessaires à l'interprétalion à l'art du chef d'orchestre de théâtre, car ici le « don
d'une œuvre? nalurel » ne suffirait pas.
Pour' posséder un instrument, pour apprendre à Les exécutions théâtrales donnent trop souvent
en vaincre les difficultés, il faut le pratiquer cons- lieu, malheureusement, à des complications exigeant
tamment. Il en est de même de l'orchestre, et là se une adresse, une souplesse excessives, unies au plus
présente une véritable difficulté, une impossibilrté, grand sang-froid et au maximum de rapidité dans les
k. car on ne peut avoir un orchestre en permanence pour décisions.
1.34
»)
k
2130 ESCYCI.OPfHUE DE I.A MUSIQUE ET DICTIONNAIRE DU CONSERVATOIHE
Les massc's cliotalcs nioiipées trop loin du clief, sionnels, aupi'ès desquels on recueillera souvent de
échappant mômt; souvent tout à fait à son action di- très précieuses indications surdos points non traités,
recte, les delaillaiices possibles des aitisles du cliant, ou incomplètement traités, dans les livres d'ensei-
peuvent l'aire n;iilre des hésitations, des confusions gnement.
voisines de la calastrophe si le che! ne possède pas Parmi les instruments, il en est un qui ne figure
les qualités citées plus haut; de la spontanéité de sa pas dans les orchestres, mais dont un chef ne saurait
décision, de la netteté df ses gestes, dépend la situa- se passer : le piano.
tion; ces qualités, nous le lépélons, sont la consé- L'étude de réduction d'une partition au piano
la
quence d'une longue pratique. est le premier auquel doit se livrer le chef
travail
Comment arriver à posséder cette pratique? Là. d'orchestre lorsqu'il monte une œuvre nouvelle; c'est
réside une réelle difliculté, car, comme nous l'avons une pi'éparalion aux premières études et une grande
déjà dit, il est impossible d'avoir en permanence un aide pour arriver aux répétitions d'ensemble. Le
orchestre à la disposition du futur chef. piano sera également ulile pour guider le travail
Il faut donc s'empresser de saisir toutes les
occa- des chanteurs, et, de plus, le chef d'orchestre se
sions qui se présentent (les faire naître, si possible) tr'ouvera bien de pouvoir se passer de l'accompa-
mencer par des réunions peu nombreuses. lectures musicales incessantes; il doit meubler son
Il y aura fatalement, dans le début, des gaucheries,
esprit de toutes les manifestations de l'art, aussi bien
les attaques, des tloltements qui rendront l'exécu- forcer de saisir les caractéristiques du style propre à
tion molleet confuse; aussi, il faudra apporter la plus chacun d'eux. Ajoutons qu'il est bon qu'il soit fami-
grande attention h tous les mouvements, les analy- lier avec les langues italienne, anglaise et allemande,
compte de produit dans leur la littérature musicale étant très étendue, et ne ces-
ser et se rendre l'etfet
Enlin, la prépaiation la plus eflicace est celle qui de connaissances multiples. Cependant, jusqu'ici,
consiste dans l'exécution de la musique de chambre, nous ne nous sommes occupé que de la partie exclu-
lorsqu'on en est le directeur. Le premier violon d'un sivement musicale de sa tâche il faut y ajouter le
;
quatuor se trouve à la meilleure école pour devenir côté matériel d'organisation, de direction, qui n'est
un jour " chef doichestre ». pas sans renfermer de sérieuses difficultés et dont
Iest évident que toutes les remarques ci-dessus un chef consciencieux ne peut se dégager.
ne se rapportent qu'à la technique même de 1 "art du Cette dernière remarque
arque nous amène à traiter une
chef d'orchestre, c'est-a-dire au côté matériel, » exté- question souvent agitée et qui n'a pas encore reçu
rieur », pour ainsi dire, et que le « don naturel » et pe solution.
la « pratique », dont il vient d'être question, n'auront Un compositeur militant est-il dans les meilleures
qu'un elTet très relatif s'ils ne sont accompagnés de conditions pour remplir la tâche de chef d'orchestre
sérieuses connaissances musicales. de carrière? Malgré quelques exemples fameux, qui
Le chef d'orchestre doit être compositeur, ou tout vont à l'encontre de notre opinion, nous sommes
au moins connaître la composition; s'rl n'a pas fait pour la négative, et nous pensons qu'il faut opter
ses études complètes d'harmonie et de composition, dans ce sens. Si notre conviction formelle est que le
il ne pourra que difficilement suivre la pensée d'un chef d'or'chestre doit être capable de composer, nous
auteur et faire valoir son œuvre. Nous parlerons plus croyons non moins fermement qu'il faut qu'il soit
loin de l'identification du chef avec l'œuvre qu'il devra doué d'une souplesse d'appréciation, de jugement
faire inter-prétei'; ici, nous insisterons sur les con- exceptiçnnelle, afin de s'identifier à tous les styles, à
naissances de composition qu'un chef d'orchestre doit toutes les écoles et de pouvoir faire table rase de ses
absolument posséder; de plus, il devra s'être assi- idées personnelles pour épouser celles de l'auteur
milé les procédés de chaque école. qu'il interprète. Or, la première qualité d'un compo-
Armé de lasorte, il lui sera possible, même en l'ab- siteur étant la « personnalité ><, la hdélité à l'idéal
sence du maître, d'être son fidèle iiiterpr-ète il saura ;
qu'il a entrevu et vers lequel il aspire, il lui sera bien
saisirlamarchî de l'œuvre, il verra distinctement les difficili' de ne pas entrairrer l'interprétation de l'œu-
passages à nrettre en lumière et cerrx à laisser dans vre qu'il traduit dans le sens des tendances qui sont
la pénombre, il ne sera pas exposé à commettre des les siennes, et il aura de la peine à faire abstraction
contresens musicaux, enlin il aura la vision nette de ses principes, quelquefois intr-ansigeants.
de l'exécution désirée par l'auteur. La situation d'un tel clief se trouve donc en oppo-
Il est nécessaire que le chef d'orchestre ait des no- sition avec ce qui doit constituer la probité dans
tions pratiques sur le plus grand nombre d'instru- l'exécution des œuvres.
ments possible pour pouvoir, en toute connaissance Nous ne saurions mieux appuyer et justifier notre
de cause, exiger et obtenir tel ou tel effet particulier théorie qu'en rappelant qu'elle est conforme au sen-
.sans risquer de provoquer les contradictions des timent du plus grand chetd'orchestre des temps pré-
artistes qu'il a sous ses ordres. sents, Hans RrcHTER.
Comme il est impossible de connaître tous les ins- Comme nous l'avons dit plus haut, la théorie qui
truments, il sera bon d'augmenter les connaissances vient d'être exposée, et dont nous croyons la base
que l'on aura acquises dans les méthodes par des véritable, est sujette à exceptions. Avant tout, notre
conversations fréquentes avec les spécialistes profes- opinion est que le compositeur dirigeant ses œuvres,
THr.HMQUE, ESTHÉTIQUE ET PEDAGOGIE LART DE DIRIGER 21.3 1
lorsqu'il en a la possibilité', et qu'il sait le faire en la structure, les proportions lui sont connues, et il a
conservant la possession de lui-même, le sang-froid pu pénétrer la pensée qui a présidé à la conception de
indispensable, est absolument dans son rôle. Plus il l'œuvre; les idées musicales se sont classées en idées
pourra se prodiguer dans ce sens, plus sa direction mères et idées accessoires; il en connaît les dévelop-
sera précieuse, car il fixera ainsi et d'une façon cer- pements et il peut discerner à quels divers plans doi-
taine la tiadilion future, et tout chef d'orchestre vent s'échelonner les sonorités. Cette dernière
con-
professionnel devra accueillir' avec joie l'interven- naissanci' est capitale, car une erreur d'appréciation
tion du compositeur se substituant à lui et déter- dans ce sens peut causer un travestissement de la
minant les grandes lignes aussi l)ien que les détails pensée de l'auteur qui amènerait la ruine de l'œuvre
de son œuvre. Le même souci doit exister en ce qui concerne
les
Nous n'avons là qu'une approbation entière à mouvements.
donner. Si nous supposons que l'auteur a donné des
indi-
Mais lorsqu'il s'agit d'une direction permanente, cations métronomiques précises, c'est un devoir ab-
nous pensons différemment. solu pour lechef de s'y confoi-raer; dans ce cas, il se
Pour qu'un orchestre donne toute sa mesure, pour trouve allégé d'une responsabilité délicate^. Cepen-
qu'il soit " dans la muin » de son chef, il faut que dant, aussi précises que soient ces imlications elles
celui-ci se consacre tout entier à son rôle. rr'autorisent jamais à en déduir'e qu'il doit v avoir
Aucun des nombreux délails d'adminisiration ne immiiabilité dans la direction; nous aurons l'occa-
doit lui rester étranger; il lui faut apporter tous ses sion plus loin de parler' des dangers des exécutions
soins au recrutement de son personnel, au maintien strictement métronomiques.
de la dis ipline, parer aux diflicullés qui surpissent Une œuvre musicale a-t-elle un mouvement im-
trop souvent dans les r'éunions d'hommes et surtout muable, exclusif'.' .Nous ne le cr'oyons pas. De même
d'artistes..., et s'il chef d'orchesire de
s'agit d'ini quel'oreillpa rrne tolérance pourlujustesse, et qu'elle
théâtre, nous ne Unirions pas d'énuraérer les soucis admet la fausseté d'rm piano accordé selon les lois
matériels qui s'attachent à ce poste. du tempérament, de même la compréhension d'un
Comment un vrdi compositeur pourrait-il conser- chef-d'œuvre n'est pas compromise par une légère
ver sa liberté d'esprit, sa puissance de conception et moditication dans l'allure, si le sentiment vrai est
trouverle recueillement nécessaire à la création d'une observé. L'interprétation musicale orchestrale se
véritable œuvre d'art, au milieu de ces préoccupations complique d'ailleurs, quarrd il y a un soliste, de l'ac-
terre à terre si éloignées de ce qui doit être son but? tiorr même de l'interprète qui se soustrait difllcile-
Le premier, le plus important travail du chef d'or- ment aux influences extérieures, plus ou moins
chestre est l'étude appi'ofondie de la partition qu'il étrangères à l'œuvre interprétée, et qui en modifie
doit l'aire exécuter. Les connaissances sérieuses que souvent l'exécution.
nous réclamons de |lui doivent le guider dansia com- 11 n'y a pas lieu (selon moi) de s'émerveiller sur la
préhension de l'œuvre et du style qu'elle comporte, concordance de deux exécrrtions d'une même œuvre
mais, s'il veut en donner une interprélalion parlaile, dirigées par le même chef et durant le même temps
il faut qu'il se l'assimile au point d'arriver à s'en croire à une seconde près, car si le chef est un être sensitif
l'an leur. et vibrant, il lui sera impossible d'observer cette rec-
11 se livrera d'abord à une analyse scrupuleuse titude chi'onométrique.
delà partition, portant aussi bien sur la composition Une certaine élasticité est quelquefois ordonnée
elle-même que sur- tous les détails de l'orchestration; pour être absolument lidele; c'est au rhef de savoir
puis il procédera à la réduction au piano. La tâche en user pour le bien de l'œuvre. Mais il reste évident
est souvent ardue, quelquefois impossible, par suite qu'il serait coupable s'il s'écartait trop de l'indication
de la complication, de la polyphonie des u-uvres mo- métronomique inscrite.
dernes; il faut quand même s'aider de ce moyen Si, au contraire, le mouvement est simplement
porrr mieux connaître l'ouvrage l'œil sirpplée faci-
: donné par les indications ilalieunns dont on se sert
lement à ce que la tr'anscription ne peut aborder, et habituellement, dont les termes ont une certaine
l'impression auditive est presque complète. valeur conventioimelle, on bien encore par des indi-
Lorsque cette étude a été faite avec conscience, cations françaises ou allemandes, lesquelles se rap-
l'œuvre est devenue familière; les grandes ligues portent plus souvent au caractère à donner à l'œuvre
aussi bien que les détails se sont précisés, et le chef
2. I"est re cas de M. Vincent n'iNnv qui précise ainsi les mouTe-
commence à voir quel sera le travail de l'orchestre; m<'nts de sa partition de Feruaal :
L'auteur emploie quatre mouvements généraux /ent^ modéré, :
1. t"n ;mleur,a dir Bf.iii.h)/. ne peut guère Olre accusé de conspirer
animé, vif, dont chacun se subdivise en mouvements secondaires.
contre son propre ouvrage combien y en a-t-il pourtant qui, s'imai^i-
L'échelle ci-dessous donne le rapport de ces mouvementé aux oscil-
;
rarement nuancés, est un ieu en comparaison de celle d'un opéra, ou Modéré 1*8
d'une œuvre quelconque où se trouvent des récitatifs, des airs et de Assez modéré 96
nombreux dessins d'orchestre précédés de silences non mesurés. Modérément animé .. 104
Assez anime 112
L'exemple de Beethoven, q^e je viens de citer, m'amène a dire tout
Animé I 211
de suite que. si la direction d'un orchestre me parait f'Tt difficile Très animé 152 ou battu a la brève 76
pour un aveugle, elle est sans contredit impossible pour un sourd, Assez vif 176 — _
:
jg
qu'elle qu'ait pu être d'ailleurs son habileté technique avant de perdre Vif -200 — — 100
le sens de l'ouïe. Voir aussi Trailé d'instrumentation, in fine, l'Art Très vif 2S2 — — 126
du chef d'orchestre. Ici il y a précision absolue.
2132 ENCYCLOPÉDIE DE LA MUSIQUE ET DICTIONNAIRE DU CONSERVATOIRE
qu"à l'allure inèiiu', alors l'iiiitialive du chef est abso- niable qu'il en est un que Wagner devait certainement
lue, et il devra l'aire appel i\ toule sa sensibilité d'ar-
préférer !
tiste pour ne pas loinber dans l'erreur. Il récoltera Eu lésunié, nous pensons que Berlioz a émis
alors le fruit des lectures musicales que nous avons l'idée juste lorsqu'il a dit chef n'a pas été à : « Si le
conseillées plus haut; plus on connail d'oeuvres d'un même de l'ecevoir directement les inslructions du
maître, plus facilement on pénétre sa pensée, ne lût- compositeur, ou si les mouvements n'ont pu lui être
elle (|ue 1res sui'oinctement expiiniée. L'étude préli- transmis par la tradition, il doit recourir aux indi-
minaire de la partition C' nduira le chef dans la vé- cations du métronome et les liien étudier, la plupait
ritable voie, car il est rare que, au cours d'un mor- des maîtres ayant aujourd'hui le soin de les écrire
ceau, il ne trouve pas telle mesure, tel dessin carac- en ti'te et dans le courant de leurs morceaux. Je ne
téristique qui " commandent » le mouvement; c'est veux pas dire par là qu'il faille imiter la régularité
à la sagacité du chef d'orchestre de les découvrir. mathématique du métronome, toute musique exé-
Un musicien expérimenté doit pouvoir se guider cutée de la sorte serait d'une raideur glaciale, et je
facilement d'après les indications italiennes; mais il doute même qu'on puisse parvenir à observer pendant
beaucoup de tact, les compositeurs dillerant
lui faut
un certain nombre de mesures cette plate uniformité;
souvent d'appréciation dans l'allure à donner à une mais le métronome n'en est pas moins excellent à
désignation. .Nous pensons que les temps sont pro- consulter pour connaître le premier mouvement et
ches où ces termes disparaîtront complèlemenl, leur ses altérations principales. » Et plus loin « Sans — :
manque de précision ne pouvant répondre aux exi- doute, personne ne sera embarrassé pour distinguer
gences de la musique moderne. un larnoà'nn presto... si le presto est à deux temp*, un
Il nous souvient d'avoir entendu un
amusant col- conducteur un peu sagace, à l'inspection des traits
loque entre un chef d'orchestre et un compositeur, et des dessins mélodiques que le morceau contient,
ce dernier se plaignant qu'on ne prît pas son mou- arrivera même à trouver le degré de vites'^e que
vemenl. Le chef iinit par lui dire « Mais, Monsieur, :
l'auteur a voulu. Mais si le largo est à quatre temps,
pourquoi avez-vous indiqué Alleijro moderato? C'est d'un tissu mélodique simple, ne contenant qu'un
Allegio non troppo qu'il fallait écrii'e » !
petit nombre de notes dans chaque mi;sure, quel
Nous avouons ne saisir que difllcilement la nuance moyen aura le malheureux conducteur pour décou-
qui peut exister entre ces deux désignations... La vrir le mouvement vrai, et de combien de manières
même incertitude existe pour la ligne de démarca- ne pourra-t-il pas se tromper? Les divers degrés de
tion qui sépare un Alli'gretto moderato d'un Andan- lenteur qu'on peut imprimer à l'exécution d'un pareil
tino con moto. largo sont très nombreux; le sentiment individuel
Les désignations très simples sont même sujettes du chef d'orchestre sera, dés lors, le moteur unique,
à de 1res dilférentes appréciations ainsi, les termes :
et c'estdu sentiment de l'auteur et non du sien qu'il
de Mimietto, Menuetto, Tempo dl minuelto ont donné s'agit. Les compositeurs doivent donc, dans leurs
lieu à des discussions intéressantes qui prouvent œuvres, ne pas négliger les indications métronomi-
combien la question « mouvements » est compliquée. ques, et les chefs d'orchestre sont tenus de les bien
S'il est vrai que Beethoven, abandonnant le mé- étudier; négliger cette étude est, de la part de ces
tronome, après s'en être servi, ait dit " Cet instru- :
derniers, un acte d'improbité. »
ment est inutile; celui qui ne < sent » pas ma musi- Lorsqu'une œuvre a été étudiée avec l'attenlion la
que ne la rendra pas mieux avec les indications du plus grande, tous les mouvements étant fixés, ainsi
métronome, » il n'est pas moins vrai que le métro- que leurs fluctuations, lesditTérenls plans arrêtés, la
nome peut faire éviter de grosses erreurs. Wagner, conception générale devenue tellement claire que,
qui rejeta également le métronome, raconte' qu'il comme nous le disons plus haut, le chef est arrivé à
entendit l'ouverture de Tunnhtiuser durer vingt mi- se croire l'auteur même de l'œuvre qu'il interprète,
nutes lorsqu'elle n'en doit durer que douze. Avec l'ins- le moment est venu de mettre « la musique sur les
L'auteur de Tristan s'est cependant servi quelquefois C'est alors que se révèlent les qualités du chef ou
du métronome, seulement pour ses premières œu- bien son infériorité.
vres. Dans le Ring, dans les Maîtres, il n'y a pas Diriger est peu de chose, savoir faire travailler est
d'indications métronomiques, et cette abstention est tout.
compréhensible; dans une seule page, il y a cinq, Il faut supposer que le chef a sous ses ordres une
six et même^plus, fluctuations du mouvement; le ré un ion d'arli s te s disciplinés et attentifs, ayant la plus
métronome serait inapplicable. Le chef doit saisir grande confiance en lui ; l'absence d'une de ces con-
ces changements et pouvoii- les rendre sans qu'on ditions frapperait d'avance tout travail de stérilité-.
les lui dicte. Mais il est parfois regrettable que le chef a su, par son caractère, par sa person-
Si le
ture des MtiUres Chanteurs, il esl cependant présu- ne l'eiifTP pas la personnalité des artistes doit disparaître complète-
;
ment pour liisser la place à celle du chef d'orchestre, qui doit respec-
I. L' Art de diriyer {Arwuaire de Firtuelles, année 12", page 156^ ter lui-même celle île l'auteur.
TECIiyiQUE, ESTHÉTIQUE ET PÉDAGOGIE LART DE DIRIGER 2133
ne se trouve réalisé; c'est alors que commence son mesures, il doitconnaître et appliquer nombre d'indi-
travail, et il lui faut démêler cet éclieveau embrouillé. cations dont les unes ont pom' but l'exactitude et la
Patiemment, il prendra chaque passage et le détail- division des temps, la netteté des rythmes, et les autres
lera; s'il s'apil de difficultés tecliniques, des répéti- le caractère expressif des idées.
tions nombreuses et partielles seront nécessaires; s'il Gomme première condition, il faut que les gestes
s'apit de plans intervertis, il éclairera ses artistes et indiquent de la façon la plus compréhensible le sens
leur fera compieudre le rôle etl'importance de chaque des divisions ou subdivisions adoptées.
dessin. Si le chef est écouté comme il doit l'être, s'il La baguette directrice', tenue par la main droite
a dirigé habilement ses remarques, il éprouvera une dans une position élevée, doit presque toujours se
jouissance comparable à celle du statuaire qui, d'un mouvoir dans une ligne où se rencontrent les yeux
bloc fruste de terre, fait surgir l'expression même de des exécutants et le regard du chef.
la vie. L'influence du regard comme agent de direction
Il est bon que le chef sache que les artistes feront est de la plus haute importance. Dégagé de toute
toujours la note qu'ils ont sous les yeux, mais rien préoccupation par rapport à la lecture de la partition
au delà. La musique moderne, aux eli'ets complexes, que l'on suppose apprise par coeur, le chef ne doit
à l'instrumentation si variée, ne permet pas au senti- pour ainsi dire pas quitter des yeux son personnel;
ment personnel de l'exéculant de se manifester. Les les artistes se sentiront ainsi guidés, soutenus, et
artistes de l'orchestre se rendent si bien compte de leur attention en sera doublée.
cela, qu'ils se tiennent généralement sur une prudenle Il s'établira entre le dirigeant et les interprètes
réserve et... ils attendent la parole du chef. C'est une espèce de courant magnétique qui ne devra
donc à celui-ci de les guider, c'est à lui d'unilier les jamais s'interrompre; par lui, les indications les
elforts, de donner la confiance dans l'exécution, dans plus fugitives seront inslantanénient saisies, etle chef
l'application de nuances souvent contradictoiies, et pourra vraiment dire qu'il joue de Vorchestre, car sa
surtout de faire entrer dans l'esprit de chacun le pensée sera transmise à cet obéissant et vibrant cla-
sens de l'œuvre qu'il interprète. vier avec la rapidité de l'éclair. Il lui suflira de vou-
Les observations doivent être concises et d'une loir pour obtenir; et, encore une fois, si ses ^'estes
grande clarté, sans craindre cependant les expres- sont souples, clairs et précis, il n'est aucun effet qu'il
sions imagées qui éclairent souvent une exécution. ne puisse réaliser les sforzati subits aussitôt éteints,
:
Le chef obtiendra plus de ses artistes par l'urbanité les accords plaqués^/' tombant d'un bloc, les pizzi-
et la courtoisie que par la brutalité et le manque cati sans bavures, les piano se transformant en
d'égards; mais il doit avoir une fermeté inébranlable, pianissimo à peine perceptibles, etc.
et faire toujours respecter sa volonté. Le chef a encore une aide précieuse dans la main
En revanche, il ne doit demander que des choses gauche; il pourra s'en servir utilement lorsqu'il
possibles, sansquoiil s'exposeàdiminuerson autorité; s'agira de .souligner une indication donnée par la
de là, l'importance des études préparatoires qui l'a- baguette ou pour contenir un élan inopportun, etc.;
mèneront bien armé aux répétitions. Il faut se garder mais il se souviendra que l'efficacité de ce concours
de recommencerdes passages sans uneraison valable, de la main gauche sera d'autant plus grande qu'il
sans un but dé (i ni, car les artistes se figureraient que le n'y aura fait appel que plus rarement. Il faut donc
chef" travaille sur leur dos ». Cela le discréditerait ra- bien se garder de diriger avec les deux bras, comme
pidement, outre la perte de temps qui en résulterait. cela se voit très fréquemment.
Au contraire, lorsque les artistes ont la claire Et cela nous amène à dire quelques mots de l'atti-
vision que le chef sait où il les mène, ils se donnent tude générale du chef devant le public. Il est certain
complètement, et si le travail amène un résultai dont que, lorsqu'une œuvre a été consciencieusement tra-
ils se rendent compte, leur confiance et leurattention vaillée, l'exécution n'est plus qu'un jeu*, et les indi-
redoublent, ce qui facilite les études. cations de la direction pourraient être réduites au
En résumé, le chef d'orchestre doit posséder les minimum, chef et artistes se comprenant à demi-
qualités d'un conducteur d'hommes, tâche toujours mot. .Néanmoins, ce serait un tort de croire que le
difficile, plus paiticulièrement délicate lorsqu'il chef, lors de»l'exécution publique, puisse s'abandon-
s'agit d'artistes. ner; il au contraire, rendre plus visible encore
lui faut,
pour ses les sentiments à exprimer, alin
artistes
LES GESTES DU CHEF D ORCHESTRE d'entretenir cette flamme qui rend les exécutions
vivantes.
Ces lignes n'étant que des réflexions sur l'arl de Pour les auditeurs, il est évident que lorsque l'or-
diriger et non un traité de cet art (traité qu'il nous chestre est caché, comme à Bayreuth, la mimique
semble impossible de rédiger pour les raisons don- du chef lui est absolument indifférente, et qu'il juge
nées plus haut), nous ne croyons pas devoir aborder l'exécution d'après la seule audition, ce qui devrait
les dilTérentes manières de batlre la mesure : outre toujours être. Malheui'eusement, dans les concerts, où
que la représentation graphique des mouvements le chef est au premier plan, il est impossible d'empê-
de la baguette conductrice ne peut reproduire la cher que les regards ne se fixent sur lui, et l'auditoire
vérité des gestes, leur multiplicité est trop grande
pour pouvoir être détaillée ici. Dans ['Art de dirùjer 1. Lorsqu'il s'agit de diriger un 1res petit nombre d'artistes, on peut
de Berlioz, on trouvera quebiues indications très parfaitement se passer de bâton, mais pour les grandes exécutions
intéressantes à ce sujet, mais forcément très incom- comprenant des masses chorales, un personnel nombreux, la baguette
(bâton ou archet) devient indispensable; les mouvements donnés seu-
plètes. Le chef doit deviner ou acquérir par la pra-
lement avec le doigt, la main ou le bras seraient d'une lourdeur ex-
tique celte infinité de gestes destinés à traduire avec trême et ne pourraient ÔLre vus que par un très petit nombre d'ar-
précision, clarté et vérité d'expression la pensée de tistes placés sur les premiers rangs.
En se conformant aux règles (familières à tout façon claire et visible pour tous dans la main d'un chef expi^rimenté,
;
musicien) qui servent à déterminer les différentes la baguette a un véritable langage d'une clarté absolue.
2l;i'i ENCYCLOPEDIE DE LA MVSIQVE ET DICTIOyNAIIŒ PU CONSERVATOIRE
resseni irait uni' impression lâcheuse s'il y avait une Dans la musique moderne, préférable de
il est
contradii'tioii trop flafj;taiite entre l'apparence de ses battre (discrètement) les silences des Hécits », et de «
gestes et les senlinients exprimés par la musiiiue. ne point procédei' comme dans l'ancienne musique,
Le chef d'orchestre de concert est un trail d'union où le chef se contentait de lever le bras au moment
entre l'orchestre et les auditeurs; son altitude, ses d'un .accord, ne faisant pas un geste pendant des
;;esles ne doivent pas être en contradiction avec les mesures entières de silences pour l'orchestre. Cette
sentiments exprimés par son orchestre; ils doivent, vieille méthode était praticable avec la manière d'é-
pour ainsi dire, les coninieiiter, les rendre visibles. crire du temps, et en tenant compte que les par-
La nécessité d'établir celte corrélation est cause ties d'oichestre contenaient toujours, pendant les
que purlois les chefs dépassent la limite, et tombent IlKécits », la musique vocale avec les paroles; il n'y
dans une exaf^eration déplorable, surtout à l'époque avait alors nulle crainte d'erreur. Aujourd'hui, cette
actuelle, où les chefs d'orchestie se rendent compte façon d'agir donnerait des mécomptes certains et
de leur importance. Alors, on assiste à des f.'ymnas- serait très dangereuse.
tiques folles qui n'ont absolument rien à faire avec Il est des cas où il est nécessaire de régler les
l'art, et il est triste de constater que le public fait coups d'archet, d'autres où il vaut mieux laisser
parfois un chaleureux accueil à de lelles singeries, libre cours à l'initiative des artistes. Exemples — :
emploi de tous les instruments à vent et ii percus- Chaiiaan, en luer tous les habitants sans exception,
sion. et s'installer à leur place, nous représentent donc
Sans doute, les musiques militaires ont souvent, bien un peuple guerrier comme je l'ai dit, et la
ont presque toujours établi les règles d'emploi, de trompette était alors un instrument beaucoup plus
mélange et de proportions des instruments ;i souille militaire que religieux, bien qu'elle fût employée
humain et nous devrons souvent cousuller leur orga- dans les grandes cérémonies du culte.
nisation et leurs règlements pour nous guider dans Nous retrouvons la trompette ou plutôt les trom-
notre travail. Mais, de même qu'elles ont commencé pettes, car il en était de diverses formes, de diffé-
par des chants et par des instruments à cordes, tels rentes longueurs, et dont les sonneries étaient cer-
que lyres, luths, harpes et psaltérions, ce qui sort tainement très distinctes les unes des autres, chez
de notre sujet, de même les règlements militaires les Egyptiens, les Grecs et les Romains.
modernes ne sont jamais allés jusqu'à autoriser L'emploi en est toujours le même
signaux, son- :
l'emploi de tout le matériel artistique dont la facture neries et peut-être fanfares, pris dans le sens ici
actuelle peut permettre l'usage. L'histoire de la mu- A'airs, de morceaux de marche ou de réjouissance
sique militaire, exclusivement, serait donc ou trop ou militaire, et quelquefois participation à de certaines
pas assez étendue pour remplir notre sujet. cérémonies religieuses.
Nous diviserons notre étude en trois périodes : Chez les Grecs, nous trouvons un nouvel instru-
La première, la plus longue en années et la plus chapitre xxxi, verset 27,
1.
courte, la plus pauvre en résultats, ira de l'antiquité 2. Chapitre xix, versets 13, 16 et 19.
secours des lèvres, de même. Hâte doit s'entendre, Des Uoraains, nous allons jusqu'au ix' siècle pour
à cette époque, de tout instrument dont le son est trouver trace d'un instrument nouveau le trombone :
produit pur un sifllet, un simple trou ou une ancbe ou sacquebule, dont on croit reconnaître le dessin
simple ou double et les diverses notes obtenues par dans un manuscrit de cette époque à la bibliothè-
des trous ouverts ou fermés par les doigts de l'Ins- que de Boulogne; mais il nous faudra attendre
trumentisle. C'est en somme déjà les deux séries encore longtemps avant d'en constater officiellement
modernes cuivre et boU.:
l'emploi.
La tlûte apparaît dès la guerre de Troie', ei, dès Le xii' siècle nous rapporte des croisades les cym-
lors, elle ne cesse plus d'être employée partout en : bales et les timbales (nacairesi.
marche, au combat, dans les cérémonies religieuses, En 1347, les Anglais nous font connaître le tam-
dans les luttes, dans les jeux, pour accompagner les bour au siège de Calais, et Froissart nous dit, dans
chants, les danses, les poèmes, les orateurs mêmes. ses Chroniques, à propos de l'entrée du roi Edouard
C'est que la tlûte se prêtait mieux que la trompette, dans cette ville Et entrèrent en la ville à si
: >•
ou bien un chalumeau, on pouvait en obtenir des évidemment des instruments de des haut- la famille
effets fort dilîérents. bois, comme ces muses ne sont autres que des cor-
Les syrinx et les tlûtes à bec, avec leurs sous purs nemuses ou pipes, instruments nationaux qui sont
et cristallins, convenaient parfaitement à tous les encore employés de nos jours dans les corps écossais.
chants ainsi qu'à tous les accompagnements dont les A partir de cette époque, l'harmonie commence à
accents devaient être doux, discrets ou intimes, se répandre dans les compositions chorales; les mu-
tandis que les chalumeaux, dont les sons étaient vrai- en plusieurs parties, et, pour
siciens divisent les voix
semblablement plus âpres, plus rugueux que ceux de soutenir chacune de ces parties, les faiseurs d'ins-
nos hautbois modernes, devaient faire le meilleur truments s'ingénient à créer en famille complète
efl'et en tête des troupes partant en expédition, ou chacun des instruments connus; c'est ainsi qu'au
dans l'accompagnement des cliœurs nombreux, là début du xvi" siècle, nous trouvons le matériel ins-
où les flCites à bec devenaient insutTisantes. trumental à vent composé à peu près ainsi qu'il suit :
. . i
,
l'autre genre de jli'itef,, suivant les circonstances, les Les flûtes k bec ou tintes douces ou d'An- I
gleterre (famille)
besoins ou même les ressources, et si l'on employait /
un genre plutôt qu'un autre pour telle ou telle fonc- Les douçaines (famille)
La musette
tion ditférente d'une même séance artistique, le Les hautbois (famille)
choix en devait être fait pour des fragments entiers, Les pommers (famille)
et, je le répète, sans dialogue de timbres. D'ailleurs, Les chalemies ou chalemelles (famille).
TIMBBE VIBRANT,
Les bombardes (famille)
à part les danses ou les exercices de gymnastique,
Les cromornes (famille)
de course ou autres, le chant, le chant seul devait Le cervelas
primer, et l'orchestre, le dessin orchestral, tel que Le rackett
nous le concevons, n'existait pas l'instrument n'avait Les bassons ou fagots (famille).
;
pour mission que de doubler le chant note pour note Les chalume.iux (famille)
TIMBRE DOOX.
Les louruebouts (famille)
afln de le guider. S'il en était autrement, aucun
texte, jusqu'à ce jour, n'est veim en faire mention. Les trompettes
TIMBRE CLAIR.
Les trombones ou sacquebules
Les Grecs étaient plus aitistes que belliqueux et
Les cors, cornets d'appel, oliphants,
ils avaient plus de tlûtes que de trompettes; les
cornets de chasse
Romains, qui étaient plus belliqueux qu'artistes, Les clarons et claronoeaux TIMBRK DOUX.
paraissent avoir employé plus de trompettes que de Les cornets à bouquin i
ralemeiit employés, sont compris partout le monde), pommers, les chalemies, les bombardes, les cromornes,
pour que le timbre cristallin (biseau,
lis bois, dis-je, lerackell, les bassons, les chalumeaux, les
le cervelas,
flûte), le timbre doux (anche simple, clarinette) et le tournpbouts et cetix encore que j'oublie ou néglige>
timbre vibrant (anche double, hautbois), et, pour les la tâche est plus complexe et plus simple à la fois-
cuivres, que le timbre clair (tube cylindrique, trom- Plus complexe, parce qu'il est difficile de parler de
pette) et le timbre doux (tube conique, tuba, bugle, toutes ces familles d'instruments, sur lesquelles on
saxhorn), moins la qualité des sons qui, comme plé- n'a que des renseignements très vagues; plus simple,
nitude, rondeur, égalité, pureté et justesse, étaient parce que, envisageant que la plupart de ces instru-
maintenant.
loin d'être ce qu'ils sont ments n'ont de diti'érent que le nom donné dans tel
Varigot à trois trous semble n'avoir eu, dès cette ou tel pays, dans telle ou telle province, ou bien
époque, que le seul emploi qu'il a encore de nos jours qu'il n'y a entre eux qu'une légère dill'érence de
dans la France méridionale accompagné du tam- : forme, sans que le principe et conséquemment le
bourin, laire danser la jeunesse en longues faran- timbre ne soient en rien cbangés, il est possible de les
doles. synthétiser dans le seul type qui les résume tous, et
L'arigot à six trous ou flajol, de même que son qui a seul survécu.
descendant le flageolet, ne parait pas avoir jamais Les douçaines ou douciiies ont été quelquefois te-
eu de rûle dans les orchestres autre que celui de nues, par confusion, pour des flûtes douces, mais, le
remplacer, à défaut, \& petite jHite. plus souvent. Il faut entendre, sous ce nom, des ins-
Le fifre, qui n'est qu'une petite lli^l.e sans clés, truments à anclie double, c'est-à-dire, des hautbois.
était employé, en nombre, avec les lambours en tête La musette indique assez souvent un petit hautbois,
des régiments sous François 1*=', et peut-être déjà bien que la vraie musette soit une cornemuse avec
sous Louis XI, comme il l'est encore de nos jours en soufflet attaché à la ceinture et manœuvré avec le
Allemagne. bras. La petite musette, dont je parle ici, est quel-
D'une octave au-dessus de la grande llftte, c'est-à- quefois désignée sous le nom de hautbois pastoral, et
dire sonnant comme un quatre pieds d'orgue', le alors il ne peut y avoir de confusion.
fifre, dont les sons perçants manquent souvent de A la famille îles hautbois se rattachent, de même,
justesse, ne pouvait être employé pour l'accompa- les pommers, les chalemies ou chalemelles, les b(nn-
gnement de la voix qu'il dépassait à l'aigu et, pour bardes et les cromornes.
cette raison encore, il ne pouvait figurer dans l'oi- Le ct-rvelas et le rackett, qu'on représente sous la
chestre. forme d'un cylindre percé de quelques trous, et dont
La flûte sonnant en huit pieds d'or-
traoersiire, l'une des bases laisse sortir un tube court terminé
gue, était à l'unisson des voix de femmes; donc, elle par une anche de basson, paraissent ou plutôt pa-
aurait dû avoir sa place marquée dans les orchestres rait (car il n'y a là encore qu'un instrument unique
des xvi» et xvii« siècles, mais tous les essais qui sous deux noms différents) avoir été l'ancêtre du
ont été tentés pour construire des tlûtes altos et bas- basson.
ses (12 et 16 pieds d'orgue) n'ont jamais donné de Les chalumeau.r ont été désignés tantôt pour des
bons résultats, et c'est là sans doute qu'il faut cliei- tantôt pour des hautbois, et antôt pour des
fliites,
clier la raison du délaissement dans lequel on per- instruments à anche simple (c/artne^c primitive dont
sistait à laisser ce bel instrument, les musiciens les deux gammes n'avaient pas de liaison).
d'alors ne semblant vouloir admettre à l'orchestre A cette clarinette primitive, doivent se rattacher
que des instruments constitués en famille, c'est-à- les tournebouts, autant qu'il est possible d'en juger
dire offrant la possibilité de reproduire à l'unisson par 1 s dimensions qu'on donne de ces instr'uments
le quatuor vocal. et parla gravité des registres qu'on leur attribue.
La fliite à bi-c (droite) remplissait ces conditions; Toutefois, quand il s'agit du rapport des longueurs
on en faisait de toutes tailles, et d'aucunes, parait-il, d'instruments aux gravités des registres que l'on
avaient jusqu'à cinq pieds de haut, de sorte que, les trouve dans les ouvrages de l'époque, on ne saurait
bras n'étant pas assez longs pour permettre d'attein- apporter trop de circonspection; en voici un exem-
dre aux derniers trous de notes, le secours des pieds ple :
de l'instrumentiste était admis pour obtenir les notes Da.ns V Histoire de l' Instrumentation de H. Lavoix
graves. ,. fils, ouvrage récompensé par l'Institut, je lis à la
Aussi, la flûte à bec fut-elle, par excellence, l'ins- page PR.troRius donne à la flûte une famille
9't : «
trument à vent de tous les concerts; ses sons pleins aussi nombreuse que variée. Depuis AcnicoLA, le re-
de douceur pouvaient accompagner toutes les voix gistre grave s'est enrichi de deux instruments, et le
sans jamais les couvrir et, tout en s'alliant parfaite- vieux théoricien compte neuf instruments dili'érents,
ment au timbre des instruments à cordes, ils pou- depuis la basse jusqu'au soprano, depuis les grandes
vaient aussi lui servir d'opposition dans les morceaux basses avec serpentin, jusqu'au petit flageolet à trois
de dansé qui commençaient à garnir et à varier la trous*. Voici comment il les classe :
plupart des programmes. (< Le petit i\ùtel{klein flottlein), une octave plus
1°
Pour les douçaines, la musette, les hautbois, les haut que le cornet^;
2"' La flûte discant, une quarte plus bas;
CI
octave plus bas qu'ils ne sont écrits, etc. Par extension et pour ne
mière;
pas compliquer cette question déjà si embrouill>*e du diapason des o" Laflùte ténor, une quinte plus bas que la qua-
i<
» H, ou
fa,
^-i pieds, les instruments de tonalités intermédiaires
mi ou mi\^; ainsi y 2 pieds d'orgue voudra dire seulement que l'ins-
trument sonne plus bas que le 8 pieds et plus haut que le i6 pieds.
comme soi,
2.
3.
Le galoubet.
Ce flûtet sonne donc comme 4 pieils d'orgue = unisson du fifre.
2138 ENCYCLOPÉDIE DE LA MVSIQUE ET DlCTIUNNAllŒ DU CONSERVATOIHE
« 6» L:i lliite liarytoii (lHissel-[lijtL']une, quinte plus 8° Flûte contrebasse en sî|,, une octave plus bas
bas'; elle a unr clef appelée foiilaiinclle; que la sixième :
première :
-ç effet
e ffet
p p
I
rt ^ etiet
u
3
:i° La tlûte discant en fa, une quarte plus haut que
le cornet :
o
Çr effet
«• effet
du cornet
4° Flûte alto
mière :
en iit, une octave plus bas que la pre-
g
m ^
«^ effel
5°La tlûte ténor en sol, une quarte plus bas que
1
^^^
la quatrième :
^ effet
<?
:
effet
Ik*
que la
la quatrième •
7»
sixième
La
^^
flûte
:
basse en
«
si
effet
^
:
m Ç©^-
f£«t.
1. II
*
semt/e bien que r'est
-fëT
>'ous aurions donc encore un écart de deux sons, mais je ne puis me défendre d'un certain scep-
octaves et une seconde entie les registres des flûtes ticisme devant ces bassons ultragraves, comme de-
extrêmes, et si nous admettons la longueur de 20 vant les trombones contrebasses dont je parlerai tout
pouces pour la tlùte discant en sol, nous aurons un à l'heure, et que citent ces mêmes vieux auteurs, qui
huitième en plus pour la flùle discant en fa, dont la me semblent avoir pris plus d'une fois leurs désirs
g pour des réalités, ou bien n'avoir su se défendre de
précédente sera les -; la tlûte discant en fa aura
quelque confusion dans leurs écrits.
donc 22 pouces et demi; la flûte ténor 4o pouces, et Quoi qu'il en soit, cette famille pouvait ainsi ré-
la contrebasse 90 pouces; soit une longueur
flûte pondre aux idées instrumentales de l'époque, et en
d'environ deux métrer quarante-cinq rentimètres. remplir tous les desseins: doubler le quatuor vocal
N'oublions pas qu'il ne s'agit pas de cordes et ou exécuter les danses ou compositions instrumen-
d'ondulations transversales, mais de tuyaux el d'on- tales écrites alors toujours en contrepoint, c'est-à-
dulations longitudinales, et que, dans ce cas, le dia- dire dans le pur style choral du temps, les deux haut-
mètre des tuyaux a peu d'influence sur la gravité bois doublant les soprani, le pommers soutenant
des sons. D'ailleurs, le regretté Cavaillé-Coll, dont l'alto, et les deux bassons se chargeant de renforcer
nul ne songe à contester la haute compétence, en a les parties de ténor et de basse, ce qui pourrait très
fixé la formule ainsi dans un rapport présenté à l'A- bien avoir semblé justifier, pour les artistes des xvi«
cadémie des Sciences de Paris, le 23 janvier 1860 :
et xvii» siècles, ce terme de contrebasson, afin d'éviter
d'accabler l'instrumentiste chargé de la partie grave
sous la dénomination froissante de deuxième basson.
Tuyaux cylindriques :L=-— (20^). Pour les cuivres, la tâche apparaît plus facile, les
instrumems pouvant s'employer musicalement étant
ouL = --D-. très peu nombreux.
Formule dans laquelle L=;^ la longueur cherchée. Les trompettts, qui sont parvenues à l'honneur de
V ^ la vitesse du son. la participation au personnel des maisons royales,
Les litres et tambours; Voici donc, dès lo39, les trombones employés très
Les trompettes et timbales; musicalement et très poétiquement en Italie, pendant
Les trombones. le même temps qu'ils étaient artistiquement joués
Chacun de ces groupes jouait, séparément ou
trois en Angleterre par les musiciens de Henri VIII et, en
alternativement, de la musique composée ou arran- France, dans les fêtes données par' François 1°'.
gée spécialement pour leurs moyens. Ces instruments formaient également, d'après le
Je l'ai déjà dit, l'orchestration, l'emploi des instru- P. MERSEN.NEetPR.KTORrus, Une famille composée de la
ments, consistait à cette époque à doubler les voix façon suivante :
bourrée, chacone, passepied, gigue, allemande ou actuel de notre étude, on ne demandait aux familles
toute autre, puisque c'est par des danses que la mu- d'instruments que de pouvoir' doubler les voix hu-
sique instrumentale a commencé de prendre sa maines? Or, le trombone ténor descend au :
des tons de rechange du cor de chasse qui se trans- tion spéciale à chacun de ces groirpements, trois
forme en cor d'harmonie. solutions pouvaient se produire : 1° le chant joué
Enfin, en 169(1, Denner nous donne la clarinette, et en unisson ou en oc-
le matériel instiumenlal se trouve aussi complet qu'il tave par tous les mu-
peut l'être pour terminer cette première période; siciens; i° les parties
l'addition de quelques clés aux instruments de bois copiées comme je l'ai
vient préparer la belle évolution de la période pro- dit plus haut sur la
chaine. partie de clavecin sui-
Mais, en examinantla formationdes familles d'ins- vant la tessiture de
truments, il ne faut pas oublier que l'objet princi- l'instrument mais ,
pal do, ce travail est l'étude de la formation des deux sarrs aucun souci du
formes de l'orchestre composé exclusivement d'ins- timhr-e; 3° enfin le
truments à vent, formes connues de nos jours sous les chant joué par les
si distinctes de ce vocable.
2142 KNCYCLOFÈOIE DE LA MUSIQUE ET DICTIONNAIRE DU CONSERVATOIRE
lldultiiiis ol tainboui-s pour les inousiiue^taires. existence ofllcielle et ne dépendaient que du chef du
Les liautliois, moins aif,'us (|iieles lilies, plus aptes régiment; ces orchestres se créaient par mode, par
que les liompeLles à jouer les airs, danses et rondes imitation, et aussi par la force des choses, par be-
populaires, eureiil du succès et lurent introduits soin d'expansion artistique qui a fait croître, perfec-
dans les ré^inieuls par les colonels tiers d'ajoutera tionner et prospérer- sans cesse, et malgré toutes les
leurs tambours réKulieis, leur bande parti-
lil'res el restrictions ministérielli'S, cette forme par excellence
on adjoisnit à ces hautbois
culière de hautbois. Puis, de la musique instrumentale populaire.
des bassons ou des serpents, mais on ne trouvait N'ayant point d'organisations régulières et sem-
pas toujours les artistes qu'on désirait, et l'on blables, les compositeurs ne pouvaient point orches-
complétai! le petit corps de musique par des cornels trer leurs œuvres, mêmes celles écrites spécialement
à bou(iuin ou des trombones; enlîn, les carinettes pour ces musiques, et c'est ce qui explique que le
vinrent peu à peu remplacer les cornets à bouquin et recueil des maixh-'t et balterifs df tamhours. avec les
s'ajonler aux hautbois. airs de fifres et hautbois, rassemblé en 1705 par
Tous ces échanges, Ions ces remplacements, dans Philidor l'aîné et conservé à la bibliothèque de la
les orchestres militaires d'inslruments à vent, se Tai- ville de Versailles, présente ces airs écrits à quatre
saient sans principes, sans règle, sans direction, sans parties, ce qui constitue une partition, mais sans
ordre surtoul, car ces orchestres n'avaient aucune aucune désignation d'instruments' :
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air de la Marctie
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Française pour les
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Hautbois fait par M. de I.ulty pour M. te
t m
C. de Sery (note de Ptiitidor).
II y a lieu de faire sur cette partition les remar- le basson ou le serpent, ou encore le trombone, mais
général, vers la lin du xviii" siècle, les corps de de fort jolies, depuis les petites marches appelées
musique étaient assez pauvrement organisés, eu pas redoublés, jusqu'aux grandes marches solennelles;
ils avaient aussi des œuvres de coupe classique et
égard surtout à ce qu'ils devmrent par la suite. Les
parties y étaient ainsi distribuées, savoir deux haut- : jusqu'à de véritables symphonies pour instruments
bois, denxclarinetti-s, deux cors et deux hnsf^ons. Plus à vent.
lard, on adjoignit quelquefois à ces instruments une : C'est qu'en France, à part Lulli qui avait écrit
régiments possédaient des musiques à hautbois, à armée; si beaucoup de ces œuvres ont disparu ou
bassons et à cijmbales; puis, qu'un peu plus tard, les ont été transformées par plusieurs réorchestrations
musiques d'infanterie ajoutèrent aux instruments successives appropriées aux diverses ressources ins-
précédents les clarinettes, les cors et la grosse trumentales survenues au cours du xix' siècle, nous
caisse enfin, que l'effectif des musiciens des Gardes
;
en pouvons retrouver les plus beaux spécimens dans
Françaises avait été porté en 1764 à 19 exécutants, le catalogue de musique de chambre des grands
exemple qui était suivi par les régiments d'infante- maîtres et lians le répertoire des deux sociétés de
rie en 1783'. musique de chambre pour instruments à vent, dont
donc des corps de musique constitués et prêt s
Voici les auditions font chaque année le régal des ama-
A LA FIN DU DIX-NEUVIÈME
2 hautbois. 2 cors.
2 clarinettes. 2 bassons.
Ainsi, nous trouvons en Fiance, à la veille de la
hévoluliou, soit vers 1780, les musiques militaires Sérénade en si\> majeur
composées à peu près ainsi : pour :
2 haiillmis. 1 cors.
hautbois. bassons,
cymbales, 2 clarinettes. 2 bassons.
elarinetles.
grosse caisse. 2 clarinettes altos. 1 contrebasson.
cors.
2 cors.
pour :
2 killill'Ois.
1 .fîùie, 1 on 2 trowpcltes.
2 ha ulbois. 2 cors. Dans l'œuvre de Beethoven :
2 cornets. I limliale.
i trompettes.
transcriptions et arranrjemeiits sur des opéras ou des /*«.< rciUiublé iiiHUiâre fiuRTNiiR.
Le Ctimp de Sutory (ouverture militaire) Docard.
opéras-comiques :
.
vent.
ainsi 1° Pas redoublé, i° Mnrclic nulilaire, 3^' Alle-
:
Aux noms précédents des auteurs de partitions, de nouveaux noms; ce sont ceux de .: fBLA.NCtMANN,
nous trouvons à ajouter ceux-ci : Bendeu, Jancoirt, le professeur de basson du Conser-
Briatte, Fessy, Soland, Basch, Brunet qui se mon- vatoire, qui dirigeait l'une des meilleures musiques
tra toujours en tète du progrès, Borrel, Viallon et de la Garde .Nationale de Paris; Sarrus l'inventeur
Léon Chic, qui débute ici avec deux partitions sur La du sarrusophone; de Camas, Ernst, Quantin, Bonnot,
Promise, et que nous ne retrouverons plus que dix Remault.
ans plus tard;il doimera alors, d'une façon continue, Pour les années suivantes, nous pouvons sans
les plus excellentes productions durant un demi- doute nous dispenser de dénombrer les compositions
siècle. militaires; non pas que les compositions des élèves
L'année 1840 nous apporte : du Gymnase soient sans valeur, bien loin de là,
car beaucoup de ces compositions peuvent supporter
10 pas redoublée. 1 ijuadrille.
1 marche. 3 fanlaisies originales. aisément, sinon avec avantage, toutes comparaisons
2 barcarolles. 2 ouvertures originales. avec beaucoup de compositions de nos chefs de mu-
1 valses. 1 fantaisie sur // Giurainenlo de
sique actuels; mai s, main tenant que nous savons quel
1 fandango espagnol. Mercadante.
était, dans son ensemble, le répertoire militaire d'a-
Nous ne trouvons dans le supplément qu'une fan- lors, nous pouvons nous borner à signaler les prin-
taisie sur Ernani de Verdi. cipales des compositions de ce répertoire, les noms
Si la production des pas redoublés diminuait, les des nouveaux venus parmi les compositeurs ou les
traductions d'opéras diminuaient aussi, et, malheu- transcripteurs, et suivre d'une façon toute particu-
reusement, les fantaisies, les ouvertures originales, lière le mouvement des transcriptions et des arran-
les valses et barcarolles n'étaient pas de nature à gements de la musique civile des maîtres; cette der-
élever le niveau artistique des programmes exécu- nière constitue, en somme, la partie importante de
tés dans les concerts publics. l'évolution de l'orchestration pour harmonie et pour
Ces concerts justifiaient bien leur titre de concerts fanfare qui nous occupe.
militaires, et l'on pouvait lire des progammes ainsi Kn 1848, nous trouvons un pot-pourri sur LaStra-
composés : iiierû de Bellini, une grande fantaisie pour piston
2150 E.\r.YCLOPÈniE DE LA MUSIQUE ET DICTIONNAIRE DU CONSERVATOIRE
suv de Sella de MKiir.,\nANïF,, mit scène drania-
'/.aire .Nous avons vu, dès le début de cette deuxième pé-
du Faust de Si'Ohr, toiiles trois arrangées par
liqiie riode qui nous occupe, tout le parti que les Alle-
Hkrh; et une deuxième suite sur le Giurainenlo de mands savaient tirer de deux hautbois, de deux cla-
Mercadante par Bemier. rinettes,de deux cors et de dei^x bassons; la Société
Nous ajoutons les noms de IIknhicet et de Raf- de musique de chambre pour instruments à vent fait
FARA. entendre chaque année, à Paris, ou dans ses tournées
Kn 1849, nous n'avons que deux arrangements : artistiques, les purs chefs-d'œuvre qu'on écrivait il
une mosaïque sur .Idrusalcm de Verdi par Brbpsant, y a plus d'un siècle pour cet orchestre réduit. Sans
et l'ouverturede Séniinimis de llossmi par Bonnot. doute, cela n'avait pas grande puissance pour être
Je relève dans les compositions inililaires, Génère, entendu en plein air, mais c'était de la musique et de
une bonne ouverture de Gurtner, que celui-ci réor- la meilleure; quelques années plus tard d'ailleurs,
cheslra entièrement en 1H82 pour le concours de sous le premier Empire, l'adjonction de deux flûtes, le
musique de (ienève, et Le Samonnel de Bonnot, doublement des hautbois, des clarinettes, petites et
polka pour petite tlûte qui se joue encore. glandes portées à quatorze ou seize, les bassons dou-
L'année 1830 ne nous apporte absolument rien. Nous blés et renforcés encore de deux serpents, ce qui, je
entrons dans la plus mauvaise période, cependant l'avoue, n'ajoutait rien de bien musical, les cors dou-
que de jeunes chefs de musique, qui devaient devenir blés, l'appoint de deux trompettes, de deux ou trois
dexcelle[its collaborateurs, commençaient à don- trombones et de la batterie, devaient déjà donner
ner leurs productions. !\ous relevons les noms de : un orchestre appréciable, sinon puissant et capable
Antony, Labro, Mohb, qui allait s'illustrer en formant d'aborder les transcriptions de musique sympho-
la musique des Guides sur les indications de Sax, nique.
Mazeroux, Rinkly, Schwartz, Schillé et Vie. En elTet, les clarinettes et les bassons pouvaient
En 18S1, nous ne relevons qu'une fantaisie con- former une famille chargée de remplacer le quatuor
certante sur la Somnambule de Bellini par Bender. à cordes, les flûtes, hautbois, trompettes, cors et
En revanche, Gurtner nous donne Le Grondeur, Jupi- trombones conservant leurs parties de symphonie,
ter et Le Ihtron, Irois pas redoublés qui devinrent la caisse roulante preiiant le rythme de la partie
célèbres et furent joués partout. de timbales, la caisse claire, la grosse caisse et les
J'inscris les noms nouveaux de Bousquet, Bo>,'- cymbales soulignant les forti'; il ne restait que le
HOMME, RouniN et SOURILLAS. rôle de la clarinette, qui, ne pouvant que rester à la
De 18.52 jusque vers la fin de 1857, rien. Pas une clarinette, manquait de diversité de timbre avec la
transcription, pas un arrangement, rien que le réper- clarinette-violon. Cependant, tel quel, cet orchestre
toire militaire composé de pas redoublés, de marches, pouvait déjà se suflire, musicalement parlant; je
de polkas, de valses, de schottischs, de quadrilles, n'en veux pour preuve que VOiiverture pour Harmo-
de barcarolles, boléros et mazurkas; quelques mar- nie, écrite par Mendelssobn en 1828, et destinée à un
ches et pas redoublés funèbres semblent souligner orchestre semblable, quoique comprenant deux p.ir-
cet abandon de la musique des maîtres, et pour- ties de clarinettes altos en plus.
tant, de nouveaux collaborateurs, parmi lesquels deux Mais, en 18^10, nos musiques militaires possédaient
au moins de la plus grande valeur Douard et Sel-
: tous les instruments à pistons cornets, trompettes,
:
LENicK, viennent prépaier leur effort; mais les temps cors, trombones même, et ce n'en était pas mieux, et
nouveaux n'étaient pas encore venus. eiilin tous les cuivres à timbre doux dits saxhorns,
J'ajoute aux deux noms que je viens de citer ceux sauf la contrebasse en si h qui n'apparaît qu'en 18.Ï6.
de Altamira, Aurert, Buot, Bourdeau, père des
: L'orchestre était donc puissant et presque complet
célèbres bassonnistes, Bru, Bretonnière, Cousin, eu égard à ce qu'il est aujourd'hui, et de nos jours
CoLL, Gbarpentier, Dalbaret, Declercr, Frisnais, encore, la majeure partie des musiques militaires
JosNEAu, JoNAS, Lerou.x, l'un des meilleurs chefs de allemandes n'en ont pas plus, sauf toutefois des cla-
l'armée, père de M. Xaviei' Leroux, grand prix de rinettes altos ou plus souvent des clarinettes basses;
Rome, dont tous les musiciens admirent Le Cliemi- mais ces clarinettes basses, il n'était pas impossible
neau, Labric, Loustalot, Lauiable, de Momigny, Nicoui de les introduire dans les musiques françaises, puis-
NlESSEL, PeNAS, et'i'RAUT. qu'on en trouve la partie écrite dans les partitions
On cherche, sans la trouver, une cause à cette abs- de (JANDNEH, de LucE, de Henricet, de Savart, de
tention de toute musique sérieuse; les chefs de Bousquet et, sans doute, de bien d'autres si ces cliefs
;
musique et les solistes qui sortaient du Gymnase mi- de musique écrivaient pour clarinette basse, c'est
litaire étaient, bien qu'on en ail dil, d'excellents mu- donc qu'ils en disposaient et qu'on pouvait en dispo-
siciens, et les BERR,les Brepsant, les Buot, les Dias, ser. Je me souviens, au surplus, d'en avoir vu, à mes
les Garrouste, les Gandneb, les Gurtner, les Klosé, débuts (1872), comme élève musicien au 28* de
les NiEssEL, pour n'en ciler que quelques-uns, ont ligne, une ou deux parmi les vieux instruments de
laissé une réputation ou des œuvres (compositions ce régiment; pourquoi ne s'en servait-on plus? Je l'i-
ou ouvrages d'enseignement) qui témoignent que ces gnore. Je ne puis donc que répéter ici que je cherche
musiciens étaient de la meilleure race; les Antony, sans la trouver la cause de l'abstention de toute
les Brunet, les Bonnot, les Léon Chic, les Douard, les musique sérieuse dans les partitions parues de 1850
Félix Leroux, dont le souvenir est resté si vivace à la à 1857.
musique d'artillerie de Vincennes, les Mohr, les Re- Quoi qu'il en soit, voici la famille des sd.rofihones,
nault, les Sellenick ont assez prouvé, dans les années sinon entière, du moins en ses quatre principaux
suivantes, par les excellentes partitions sur les œu- individus soprano, alto, ténor et baryton, admise
:
vres des maîtres de leur temps qu'ils nous ont lais- dans les harmonies de régiment, et figurant sur toutes
sées, leur goût et leur talent, pour qu'on ne puisse les partitions; tout aussitôt, un effort considérable
imputer cette abstention à leur manque de savoir. de rénovation musicale va se dessiner pour trans-
Kst-ce donc dans la composition instrumentale former le répertoire des musiques militaires.
de leur orchestre qu'il faut chercher cette cause? C'est Brunet, honneur lui en soit rendu, qui corn-
: :
tais roi d'Ao. Adam; puis, Bonnot donne l'ouverture Giraltia (Ad. Adam), fanlaisie.
de Manon Lescaut d'AuBER Renault donne l'ouver- ;
Les PaïUins de Viuielte (Ad. Adam), fantaisie.
L'Ëluile du Nord (iMeterbeeb),
ture de La Poupée de Nurembenj d'AoAM; Brunet l'<= Tantaisie.
L'Etoile du Nord, 2e fanlaisie.
vient terminer l'année avec une mosaïque sur Ifaydée
d'AuBER et le (rio de La Favorite de Donizetti. De ScewARTZ :
L'année 18.Ï8 commence avec quatre partitions Anna Bnlenn (Do.mzetii), fantaisie.
sur Les Drinjonsde Villars : l'ouverture, une première
mosaïque, une deuxième mosaïque et un pas redou- Il y a lieu de remarquer ici que, pour la première
blé, toutes quatre de Dallée. fois, on ose traduire la musique forte et puissante
C'est le premier pas redoublé sur des motifs de Meyerbeer. L'orcliestre d'harmonie dispose main-
d'opéra que nous rencontrons; mais, maintenant tenant de toutes les ressources instrumentales néces-
que l'élan esl donné, nous eu verrons bien d'autres i
saires à de pareilles transcriptions.
en raison de celte mode, car c'en est une, de Varran- Un seul nouveau collaljoraleur Ernest André. :
se faisait déjà dans les orchestres symphoniques des Les Noces de Figaro (Mozakt), U" fantaisie.
grands bals de Paris. Les Xoces de Figaro, 2' fantaisie.
De Renault :
De Sellenick :
De Brunet :
Gustave III (Acber), 1'^'' pas redoublé, Les Noces de Figaro (Mozart), mosaïque.
Gusliive m, 2'- pas redoublé. La Fiancée (AuBrvB), fantaisie.
Fru Diavolo (Aober), fantaisie.
De Léon Chic :
De BouÉ
Jennii Bell {kvBBR), ir' fantaisie.
Jenny Bell, 2' fantaisie. Le Bouquet de valses (pot- pourri sur V Invitation
il la valse et les opéras en vogue).
De JosNEAU :
De Léon Chic :
D'Antony :
Credo (Chf.rdbini).
Le Comte Ory (Rossini), duo.
Quelques nouveaux collaboraleurs Malgeant, :
De Forestier, aîné.
BouÉ, Deneai'x, Heumerlé, Coquetehre, Labitzki,
Le Trouvère (Verdi), ire fantaisie.
WlTTMANN.
De Flori :
Maintenant que nous nous sommes bien rendu
Les Vêpres siciliennes (Verdi), ouverture. comple de la nouvelle orientation du répertoire,
et que nous avons pris connaissance des noms des
On le voit, le mouvement en avant ne pouvait artisans de ce répertoire, je vais, pour abréger, sup-
être plus nettement dessiné. primer la division par année, et me borner à signa-
Quatre nouveaux collaborateiirs seulement : Fo- ler les partitions qui eurent le plus de succès, et
restier aîné, Flori, Hertzog et Dallée. surtout qui contribuèrent à l'amélioration constante
En 1859, nous trouvons : du épertoire et des principes directeurs de l'orches-
I
DeGuRTNER :
pes, j'essayerai de les expliquer plus loin. De même,
Robert le Diable (Meyerbeer), fantaisie.
je ne citerai, parmi les collaboraleurs, que ceux
Ba-ta-clan (J. Offenbach), fantaisie.
qui ont le plus conlribué à cette amélioration et à
D'Antony : ces progrés.
Fra Diavolo (Aober), ouverture.
La Muette de Portici, ouverture (Aubeb) BKC.-iET.
Le Domino noir (Auber), ouverture.
Les Hussards de Berchiny, ouverture (Adam) Renadlt.
Hobert le Dial'le, fantaisie (Meyerbeer) L. Chic.
De Flori :
Marche Tuniue de Mozart Denbac.x.
Marlha (Flotow) , ouverture. Moïse, fet i" mosaïques (Rossini) Bonnot.
Le Pardon de Ploermel, mosaïque (Meyerbeer). Jancodrt.
De Renault :
Hommage aux Braves de l'armée d'Italie (l'une des
Marlha (Flotow), fantaisie. plus belles marches funèbres qui soient Gcrtner.
2152 ENCYCLOPÉDIE DE LA MUSIQUE ET DICTIONNAIRE DU CONSERVATOIRE
Les Amollira lif Cris/iiii , oiivurliin' (nii Co.nnink) . . Hknadi.t. Im Juive fantaisie (IIalévy) Dodard.
(imiliiiimi' Tell, oiiVL'rliiri' (Kossini) Seli,bnh:k. Le l'hillre, ouverture (Adbku) Bhunet.
ScMlliT iliirscli (Mkykrmkkh) L. Chu:. I^tt Miietle de Porlici, fantaisie (Adbi-:r) Buonut.
te iifrrai'ii/. ouverture (Acbkr) Broniît. Le Roi il'l'relol, ouverture (Adam) Ch. Ddport.
La Circaxsifniw, ouVL'rlure (Aubish) Flori. Gitillanme Tell, fantaisie (Hossini) L. Cmc.
La Circussieiine, n'vui> faïUaisic L. Chic. Le Muletier de Tolède, ouverture (Adam) L. Chic.
La Circassifiiiie, polka Id. Les Hoces de Jeaiiiietle, fantaisie (V. Massé) ... E. Anhhé.
La Circax&ii'nue, pas redoublé Id. Eriiani, fantaisie (
Vurdt) .Sei.lenick.
Baydee, ouverture (Aoder) E. André.
Je ne cite ces quatre partitions que pour indiquer Lara (Maillabt), f» mosaïque, 2'' mosaïque,
toul ce que nos arrangeurs, même Léon Cmc, liraient quadrille, polka-mazurka, polka, cinq parti-
tions, par Renault.
d'un opéra :
Oliêron, fantaisie (Webkr) Sullenick.
Giildlliée. faiilaisie (V. Massé) E. André. Zaïnpa, fantaisie (Hérold) Duread.
Le Toréditor, ouverture ^Adam) Coabd. Les Vêpres siciliennes, fantaisie (Veiidi) Seli.enick.
Lucie lie Lamermuor, sextuor (Donizetti) ...... L. Chic. Le bien et ta Bai/adire, ouverture (Auber) Renadlt.
Le Barbier de Sérille, quinlette (Rossmi) L. Chic, Sémirumis, ouverture (Rossim) Bodb.
La Truriala, fantaisie ( Verdi) ,
. Bonnot.
Ici, je suis obligé de m'arrêter un inslaiit pour Fior d'Aliza, fantaisie (V. Massé) Duread.
faire une remarque imporlante. Le Lae des Fées, ouverture (Acber) Labit.
// Trnratore, mosaïque (Verdi) Bonnot.
J'ai grosse dilTérence qui e.xistait
sij^ualé déjà la
L'Ambassadrice, ouverture (Auber) Babret.
entre l'ouverlure qui était transcrite intégralement, Le Jeune Henri, ouverture (Mehul) Coard.
sauf la tonalité et l'instrumentation, et la fantaisie La Fêle du riltage voisin, ouverture IBoieldied). . L. Chic.
Roméo jGoonod)
et Julietle, fantaisie Sellenick.
dont les motifs étaient arrangés, coupés, variés, sou-
Mignon, fantaisie (A. Thomas) Renault.
dés avec des motifs créés suivant le caprice de l'ar- La Sirène, ouverture (Aubek) Labit.
arangeur.
L'ne autre différence séparait encore la transcrip- Mais nous voici parvenu à 1868, et l'année piécé-
tion du morceau syinphoniqne, et l'arrangement des dente, l'Kxposition universelle de Paris avait fourni
motifs chantés de l'opéra; alors que les traductions l'occasion de réunir plusieurs des meilleures musi-
de traits d'orchestre se faisaient à leurs diapasons ques militaires de l'étranger, dont nous allons pou-
réels relatifs avec la tonalité choisie, sauf impossibi- voir comparer les diverses organisations, et comme
lité absolue dans l'aigu, les traductions de chant composition instrumentale, et comme nombre, car il
s'etïectuaienl le plus souvent à l'octave de la voix est utile de ne pas séparer ces deux facteurs, au
chantée du théâtre; ainsi, une romance de soprano moins dans la moyenne du nombre, si l'on veut se
était rendue à l'octave aiijiie sur la petite clarinette, rendre compte de la valeur d'une partition ou de
l'accompagnement restant dans son registre normal l'elfet à produire soit à la lecture, soit en raison de
;
la cavatine du ténor, du baryton ou même quelque- la confection de cette partition. En effet, il est évi-
fois de la 6((sse, mais cependant plus rarement, était dent que, si l'on dispose de 4, de 8 ou de 16 clari-
exécutée sur le cornet, toujours nécessairement une nettes pour exécuter les deux ou les trois parties
octave plus haut que cela aurait dû être. C'est ainsi écrites pour cet instrument, soutenues ou non par
que l'air du baryton « Enfin me voilà seul » des
:
des saxophones, par des clarinettes altos ou basses
Noces (le Jeannette, dans une fantaisie d'Ernest André, et en opposition avic des cornets, des trompettes et
est transcrit en entier au cornet, dont la tessiture et des bugles plus ou moins renforcés, on obtiendra
le timbre n'ont absolument rien qui puisse rappeler des effets bien dillérents; l'exécution sera bonne ou
la voix du baryton. mauvaise, suivant que l'équilibre des sonorités sera
Dans les deux partitions que je viens de citei' sur bien ou mal établi.
Lucie et sur le Barbier, qui sont signées cependant Voici donc, présentée en un tableau, pour faciliter
de Léon Chic, un maître incontesté dans l'art de la les comparaisons, la composition des musiques en
transcription pour musique militaire, le soprano est présence au concours inleinationa! do musiques mi-
rendu à Voctave par \'d petite clarinette, le ténor est litaires de 1867, d'après E. Neukomm; il y a incontes-
rendu à la double octave par le sa.rophone soprano ou tablement quelques erreurs, mais elles sont trop
la clarinette solo, le baryton est rendu à \'ortaV'' par légères pour modilier sensiblement le sens général
le cornet qui devrait interpréter le soprano, la basse des comparaisons. (Voirie tableau à la page suivante.)
chantante est rendue à 'unisson, mais sur le trom- Le morceau imposé était l'ouverture à'Oberon.
bone qui devrait interpréter le ti'nor, et enfin la basse Les morceaux joués par chacune des musiques
d'opéra est rendue sur le saxhorn baryton qui de- étaient donc ;
vrait interpréter le baryton, ou sur le saxhorn basse Prussiens Obéron et Le Propticte, fantaisie.
:
qui est alors dans son emploi normal. Tout cela Badois Obéron et Loreleij, finale (Mendelssohn).
:
ensemble, dans un sextuor ou dans un quintette! Et Bavarois Obéron et Lohengrin, introduction et cliceur des
:
Fiançailles.
l'exemple que je donne de ces deux partitions n'est Autrichiens Obéron et Guillaume Tell, ouverture.
:
mais la coutume ordinaire, et c'est pour cette raison Hollandais Obéron et Faust, fantaisie.
:
peuvent toujours se jouer sans le moindre change- Garde de Paris Obéron et Lolienijria, chœur et marche des
:
années suivantes doivent être presque toutes aban- Nous voyons, d'abord, par les cinq premières des
données à cause de ce défaut capital. musiques présentes, qu'il n'était pas impossible de
Léon Chic a, d'ailleurs, eu le grand mérite de jouer de la musique sérieuse sans saxophones, ainsi
marcher avec son temps, et de donner par la suite que je l'ai dit plus haut, et que l'apparition des
des partitions qui sont et resteront des modèles de saxophones en 1857 n'est pas suffisante pour expli-
goût et de savoir. quer l'abandon de toute transcription pendant les
Je reprends ma revue des principales partitions : sept années précédentes.
TECHNIQUE, ESTHÉTIQUE ET PÉDAGOGIE DE L'ORCHESTRATION MILITAIRE 2.53
Petite flule
. - . .
concerts dans les villes environnantes, à titre d'es- altos, i", i' et 3=. basses,
banjtona, I't et 2°. coittrefnisse en iiii\i.
sai, partirent le lundi de Pâques 1838, de Bagnères-
de-Bigorre, pour aller chanter dans toutes les villes Quelques années plus tard, on pouvait ajouter la
de France d'abord, puis en Belgique, en Angleterre, contrebasse sJh-
en Russie, en Hollande, en Danemark, en Suède, Tous ces instruments étaient du même système et
en Norvège, en Autriche, en Italie, en Turquie, en pouvaient être enseignés par un même et unique
Grèce, en Asie, en Afrique et en Amérique; voyage professeur; un musicien qui avait appris à jouer
artistique héroïque de dix-sept années consécutives, de l'un d'eux pouvait passer à la pratique d'un autre
auquel on ne voudrait pas croire si l'on n'était sur quelconque de ces instruments, si la conformation
de sa paifaite authenticité, voyage qui étahlil un de ses lèvres le permettait, avec quelques jours d'é-
courant musical populaire inimaginalile et déter- tude seulement pour accoutumer son oreille à la
mina la création de nombreuses sociétés chorales. nouvelle intonation. (C'est le terme employé pour
Ce courant musical populaire une t'ois créé, il fal- indiquer le changement de diapason ou de tonalité
lait l'affermir, en tirer les fruits, et, pour cela, il fal- d'un instrument à un autre.) Enfin, ou poussait la
lait un apôtre; cet apôtre vint; ce fut Eugène Delà- simplification jusqu'à écrire toutes les parties, même
porte qui, muni d'une simple lettre d'introduction celles de basse, de contrebasse et de trombones, en
du ministre de l'intérieur auprès des préfets, partit une clé unique la clé de sol. :
le sac au dos, le bâton à la main, de ville en ville, Un compositeur-éditeur, Tilliard père, fil plus :
de village en village, arrivant ici, réunissant la jeu- comprenant que, dans beaucoup de campagnes,
nesse de l'endroit, cherchant et trouvant un amateur, dans les lycées et collèges qui, à cette époque, parti-
le formant s'il n'existait pas, lui montrant à faire ses cipaient, eux aussi, à ce mouvement musical univer-
cours, à former, à instruire, à diriger la Jeune so- sel en France, par la création de petites fanfares
ciété musicale, qu'elle fût une chornle, une fanfare pour égayer les promenades des élèves et les fêles
ou une harmonie, et, le bon fonctionnement de cetle intimes des établissements scolaires; comprenant,
société assuré, reprenant son sac et son bâton pour dis-je, que lacomposition instrumentale que je viens
aller plus loin continuer son apostolat. d'indiquer était encore trop compliquée pour ces
Tout le monde ne pouvait pas chanter, et puis, il commença la publication
petites fanfares, Tilliard
fallait une salle pour faire entendre une chorale, et de compositions et d'arrangements dits pour harmo-
les salles de concerts sont rares au village, l/iutro- nie ou fanfare, et comportant les parties séparées
duclion des instruments à pistons et leur perfec- suivantes:
tionnement en Fiance vint à point pour simplilîe4'
petite ftùte, rè\,. !<;' alto niifi.
la question des sociétés instrumentales. En etl'et,
petite ctiirinelte mi^. 2" tttlo mi \/.
avant les instruments à pistons, il fallait, à l'elfel de ire clariuetlc si^, !'• tianjlon si[t.
constituer la moindre musique, des clarinettes, des 2° ctarijietle si\j. 2' l>arijton si\}.
l"r piston (cornet) tromt'One ut.
tassons, des biii/les à clés, des cors, des trombones à si\r. l*"""
tèmes différents qui exigeaient une étude spéciale 2« bug te si\,. basse soto si [j
pour chacun d'eux et autant de professeurs spéciaux petit tiugle m/b- basse si\f.
trompettes mi )p. contrebasse mi [i.
qu'il y avait d'espèces d'instruments. Avec les ins-
l'^r eor ou sajîtiorn mi\^. contrebasse si\y.
truments à pistons, cette complexité disparaissait, et 2* eor ou saxtiorn min. flatterie {grosse caisse et caisse).
tous les instruments étant d'un seul et unique sys-
tème, un seul artiste pouvait suffire à enseigner le Il ajouta même, plus tard, les parties de saxofjho-
cornet, le bugle, le trombone, les alto, baryton, nes, soprano, alto, ténor et bar ij ton.
basse et contrebasse qui n'avaient pas encore pris Cela avait ainsi l'air d'être orchestré pour musique
leur dénomination de saxhorns, mais qui existaient d'harmonie complète; il n'en était rien. Tous les
déjà sous les noms les plus divers, comme je l'ai morceaux de cette publication étaient orchestrés
démontré en traitant du principe des instruments à réellement pour :
vent. La trompette et le cor offraient plus de diffi- 1er cornet. |e' banjtoa.
vants :
ténor chargé de la partie la plus grave des trombones, ce qui semble
confirmer, dans une certaine mesure, les doutes que j'ai exprimés plus
((irnets, l" et 2=. pelil Inif/le. haut à propos des conLrebassons et des trombones basse et contre-
iromltones il pislotts,i",2<' el3'. bugles, !«, 2«, quelquefois 3". basse.
2ir.G ENCYCI.ni'ÈDIE DE LA MUSIQUE ET DICTIONNAIRE DU CONSEliVATOlRE
opéias: elle a d'ailleurs progressé coninie lessociélés aux allos et aux basses; on réservera les parties d'ac-
aux(|iielles elle s'adressait, el s'est enrichie, depuis, compagnement ou d'orchestre au bugle solo,
traits
d'œuvres plus complètes; mais je n'ai à m'occuper aux premiers bugles, à l'alto sulo, aux bai-ytons et à
ici que des di^buls. la basse solo.
J'ai promis d'indiquer les principes directeurs de S'il s'agit d'un quatuor, les deux voix de femmes
l'orcliestralion poui- harmonie et pour fanfare; il est seront interprétées par le bugle solo et le meilleur
bien enlendu que Je no parlerai que des principes des premiers bugles, ou par le bugle solo, et l'alto
généralement admis maintenant, el non de ceux solo, selon la tessiture delà deuxième voix de femme;
d'aulrefois qui n'auraient f.'uère d'utilité pratique. si elle est possibb;, la deuxièrrre combinaison ser'a
J'ai dit pins haut que Tilliard orchestrait pour d'une meilleur-e sonorité que la première; les deux
deux deux bari/lons eluneou deux
ciJincts, dcii.r altos, voix d'hommes seront rendues par le premier bary-
deux bugics qu'il aurait fallu el non pas
basse:<; c'est ton et la basse solo, ou, s'il s'agit d'un ténor léger,
deux carnets pouravoir la faiiiille complèle des sax- par l'alto solo et la basse solo ou le baryton. Les au-
horns et obtenir le timbre doux des cuivres à perce tr'es parties seront char-gées de l'accompagnement
coni(ine du bas en haut d(' l'échelle et avec une quelle qu'en soit la difficulté, car ici, les qualités de
étendue maximum de qualre octaves et une quarte, son et surtout de style des parties représentant les
du sol grave de la contrebasse en si]p à I'm/ aigu voix doivent primer la question de mécanisme des
traits de l'accompagnement.
du huyle :
M on pourait même
La transcription d'une cavaline, d'un duo ou d'un
trio se traite
cipes,
évidemment d'après
comme nous
les mêmes
n'avons qu'un seul timbre à notre
prin-
l'effectif de la société) el pas un seul bugle. Aujour- tion de la symphonie, du piano ou de l'orgue. Dans
d'hui, les choses ont changé et les bugles se rencon- l'un quelconque de ces Irois cas, comme nous ne
trent partout. disposons que d'une seule et unique famille, il ne
Je suppose donc complète la famille des saxhorns. saurait être question de traduire d'après la partition
s'agit de la transcription d'un chœur sans ac-
S'il d'orchestre symphoniqrie; cette traduction ne peut
compagnement, la chose est toute simple, et nous en s'elfectuer que sur la partie de piano ou d'orgue
revenons au procédé du xv' siècle la partie de so- :
(originale ou réduction d'orchestre), et il n'y aura
prano sera transcrite aux premiers bugles, la partie qu'à répartir dans les meilleures conditions d'équi-
d'alto (femme) ira aux deuxièmes bugles, le ténor aux libre sonore possible les diverses parties superposées
allos, le barylon aux barytons, et la. partie de basse des deux portées du Cependant, il y a, ici,
clavier'.
restera aux basses. Les contrebasses ne joueront pas. une dans tous les groupements
difficulté qui subsiste
S'il s'agit de la transcription d'un chœur avec de fanfare; souvent, la ligne mélodique dépasse à
accompagnement (accompagnement de dessins et de l'aigu l'étendue des bugles, d'autant plus que si,
rythme différents du choeur), si les parties d'accompa- théoriquement, tous les instruments à pistons, en
gnement comportent des dessins plus simples que les dehors des cors et des trompettes, peuvent monter
parties de chœur, les voix de femmes seionl trans- à l'ut aigu 8" harmonique, dans la pratique, surtout
crites aux premiers bugles divisés, les voix de ténors dans les petites sociétés, on rre peut demander aux
aux barytons, et les voix de basses aux basses; les bugles de dépasser le la :
Pour vaincre relte diflicnlté, il n'y a qu'un moyen: Mais, bien que les parties de trompettes, cors et
abaisser d'une octave le trait, ou mieux, une partie trombones fussent des parties spéciales et dilféren-
du Irait trop aigu pour être exécuté tel quel sur le tes des parties des saxhorns, le fond de l'orchestra-
bugle. Evidemment, cela ne va pas sans poi'ter dom- tion reposait encore uniquement, et pour les mêmes
mage à l'effet du trait ainsi transposéà l'octave infé- raisons, sur les deux cornets, les premier et deuxième
rieure; de plus, si l'on transpose tout le trait, une altos, les deux barytons et la basse. Les auties ins-
partie de ce trait passera sous une ou deux parties truments venaient ajouter quelques effets surcefond,
de l'accompagnement; si, au contraire, on n'en trans- mais il n'y avait jamais d'effet particulier, et se suf-
pose que la partie surélevée, on risque de dénaluier fisant par soi-même, de trombones, de trompettes,
le sens mélodique de la phrase; c'esl pourquoi, il ni de cors. IJ'ailleurs, les compositeurs de ce réper-
faut apporter aux mutations de re genre beaucoup toire savaient fort bien que les sociétés pour les-
de surtout éviter de faire ces mutations sur
tact, et quelles ils écrivaient n'avaient jamais ni cors ni trom-
les temps ou les parties fortes des temps; il en
forts pettes; tropheureusesquand elles pouvaient disposer
est de ces mutations comme des respirations bien : d'un ou de deux trombones; leur procédé consistait
placées, elles passent inaperçues; placées maladroi- à écrire les parties indispensables aux saxhorns et
tement, elles rompent tout le charme et brisent le cornets, à mettre toujours aux cornets les passages
sens musical de l'œuvre. obligés des parties de trompettes (pr'océdé toujours
Vers le même temps, nu autre éditeur, Marc.ceri- eu usage), h mettre encore aux cornets les passatres
TAT père, commençait la publication de morceaux essentiels des parties de bugles, à écrire au premier
destinés égalementaux petites sociétés en formation, et au deuxième alto les notes caratéristiques des
mais cependant d'un degré plus élevé (]ue ceux de accords; le troisième alto, toujours doublé par le
ïiLLiARD. Pour former ce répertoire, il lit appel à deuxième baryton, était à peu piés inutile, et pres-
des musiciens connaissant parfaitement les petites que jamais joué, attendu que les sociétés possédant
fanfares et se rendant bien compte de ce qu'il était trois a tos préféraient, avec raison, conlier à ce troi-
possible de leur demander d'efforts sans les décou- sième alto partie de premier cor, qui était en réa-
la
rager; et puis aussi, et surtout, n'ignorant pas le lité écrite dans ce but; enfin, la partie de premier
peu de science musicale de tous ces chefs de fanfare baryton portail, avec la mention à défaut, les fr'ag-
improvisés, qui ne savent pas plus l'haimonie que les ments en solo de la partie de premier trombone.
règles de la transposition, et qui ne connaissent à Le vice de tous ces arrangements hybrides est
peu près bien que l'instrument dont ils jouent (le pis- justement d'encombrer les parties principales des
ton, le plus ordinairement), modestes collaboiateurs passaires essentiels ù défaut des instruments pour
d'une grande œuvre, qui apportaient seulement à lesquels sont primitivement écrits; tout ce qui est
ils
celte œuvre une immense bonne volonté. écrit à défairt lient la [dace de ce qui devrait être
Ces'corapositeurs appelés par MAnr.i'EiuTAT ''uient réellement écrit pour l'instrument principal, qui
surtout Ulancheteai', dont nous avons déjà trouvé
: est ainsi réduit au rôle peu artistique de » bouche-
le nom dans l'édition Gautrot pour l'aufares de cava- trou i>.
leiie, et qui, je crois, sans pouvoir l'afllrmer, était Résultat : toutes ces compositions, qui ont rendu,
ou avaitété chef de musique dans l'armée; Ziiir.LER, je le répète, les plus grands services aux petites
chef d'e musique de cavalerie; E. .Marie, chef de la sociétés en formation, ne produisent et ne peuvent
fanfare de la darde nationale; Michel Bléceu, qui produire d'effet que dans le milieu pour lequel
sortait du Gvmnase militaire, dont l'un des frères fut elles ont été écrites. (Jiiant à les faire exécuter par
chef de musique au 109» de ligne, et dont l'antre, le des harmoiries, malgré les parties de tli'iteet de cla-
plus jeune, me disait un jour en [daisantant, non rinettes qu'elles corrtienrient, il vaut mieux n'eu pas
sans une légère pointe d'ironie » Je suis le seul de
: parler.
ma l'aniille qui n'ait pu faire un chef de musique, .l'en ai dit assez, je crois, pour faire comprendre
je n'ai pu que devenir colonel. » Il était devenu, en toute la sincérité et toute l'amidenr du regret que
effet, l'un des colonels les plus distingués de l'armée j'exprimais plus haut, de la disparition du répertoire
française. Un peu plus tard, Millot, chef de musique écrit spécialement pour fanfare et édité par les mai-
au 67» de ligue, vint aussi apporter son importante sons Riffet-Crami'On et Gactrot; là, point de à dé-
et précieuse collaboration. faut, et surtout, point de parties entièrement dou-
Dans cette édition, comme dans celle de Iilliard, blées sur d'autres; toutes les parties qui figuraient
comme dans toutes les éditions françaises d'ailleurs, sur la partition étaient des parties réelles, concou-
à l'exception des éditions spéciales pour fanfarp, de rant toutes à l'elfet complet de lirrstrumenlation
Buffet-Crampon et de Galtrot, chaque composition annoncée.
comprenait toutes les pai ties nécessaires aux mu- L'éiiitiou Gautrot était divisée in trois séries :
siques d'harmonie, sauf les parties de hautbois, de petite fanfare, moyenne fanfare et grande fairfare.
grande (Ifite et de saxophones, qui ne furent ajoutées C'étaitune excellerrte division, parce qir'elle indiquait
iiue beaucoup plus tard; mais l'orchestration réelle que l'instrumerrtation compi'enait des familles plus
n'était laite que pour fanfare et ne comportait que ou moins complètes d'instruments, mais cette divi-
les instruments suivants : sion en série indiquait sirrtnrrt que, dans la pensée
premier cornet, troisième hugle. de l'aulerir, sa composition était destinée à être
second cornet, premier alto, interprétée par irn personne correspondant à la qua-
1
petit /lugle.
premier hmjle.
conlre/msse
tambour.
si;/,
Petite fanfare. — La petite fanfare comprend les
seconii btinjton.
bord les parties de trompettes, puis ce qu'il y a
secoitii tromlioiie.
troisit'me Iromlmiie. Oamte. d'essentiel aux llùtes et aux hautbois, laissant seu-
premier bugle. coutrehasfie mi[>. lement les tr'aits de clarinettes aux bugles.
second bugle. coHlreliasse si [i.
ICvidemment, il n'y a pas beaucoup de variété
premier alto. caisse Claire.
dans les timbres, mais c'est déjà beaucoup mieux
S'il s';if;it dp l;i transcription d'un chœur à quatre que ce que nous avons vu dans les éditions précé-
voix sans accoinpaj,'neim'iil, on niettia la partie de dentes.
soprano aux cornets et aux premiers bugles; les
mezzo-sopranos ou contraltos iront aux deuxièmes iloyenne fanfare.
bufjles et aux altos, les lénors aux premiers et se-
Les mêmes instruments que pour la petite fanfare
conds Il oinliones et au premier baryton, elles basses
plus les cors.
seront interprétées par le troisième trombone, le
deuxième baryton et les basses. Les contrebasses ne
Pour tout ce qui regarde les transcriptions de
chœurs et de pièces vocales, je n'ai plus rien à ajou-
joueront pas.
ter, au moins pour le moment, et, pour les transcrip-
S'il s'agit d'un chœur avec accompagnement, l'in-
terprétation devient toute dillèrente; le chœur sera
tions symphoniques, il y a peu d'observations nou-
velles à faire.
rendu par les seuls cuivres clairs premières voix :
seront accolées, ici, au contraire, on devra varier premier cornet. alto solo.
les timbres suivant le caractère de chaque voix; la second cornet. premier et deuxième altos.
première trompette. premier finn/ton.
règle, sauf de rares exceptions, est de représenter
seconde trompette. deuxième lnirijLon.
le soprano par le cornet, le contralto par le bugle, premier et troisième cors. basse solo.
le ténor par le trombone, le baryton par le saxhorn second et qnalriime cors. première basse.
baryton, et la basse par le saxliorn basse ou tuba premier trombone. seconde bosse.
second et troisième tromtnines. contrebasse mi ^.
(appelé encoie quelquefois par les instrumentistes
(jnatriémc tromtioae. contrebasse si\^.
I' i(uatre cylindres ». petit t'utfle. timbales.
S'il s'agit d'une transcription syraphonique, les Itugle solo. tambour.
saxhorns recevront la mission d'exprimer tout le premier hugie. grosse caisse et cymbales.
second et troisième higles.
travail des instruments à archet, les bugles, ne
pouvant suivre les violons dans l'aigu, seront souvent Sans doute, on doit se demander pourquoi je
forcés de recevoir les mutations d'octave dont j'ai place toujours les cors entre les trompettes et les
déjà parlé; les traits d'alto à cordes dépassant à trombones. Il est certain que la famille des timbres
l'aigu ou au grave l'étendue du saxhorn alto seront clairs ne se compose que des cornets, des trompettes
achevés par les barytons ou par les bugles selon le surtout et des trombones, et que les cors, dont les
cas; mais, si l'on veut que ces soudures ne soient sons se marient cependant très bien avec ceux des
pas choquantes, il faut avoir le soin de faire prendre trombones dans le piano, constituent, en réalité,
l'instrument qui doit continuer ou finir le trait, une famille à part; ils devraient donc être placés à
quelques notes avant que l'instrument précédent part également. Ce n'est qu'une question matérielle
cesse de joiiei'; il est encore prudent de ne pas faire d'écriture qui a fait prendre l'habitude aux compo-
cette soudure dans les notes extièmes de l'un ou de siteurs de leur donner cette place. En effet, les par-
l'autre instrument, afin que le changement de dia- ties de trompettes, les trompettes en mî'h ou en fa,
pason passe inaperçu. dont nous avons seulement à nous occuper pendant
Les trombones conserveront naturellement toutes la deuxième période, comportent fréquemment des
les parties des trombones de la partition sympho- notes avec lignes supplémentaires en dessous de la
nique, et pourront quelquefois accentuer certains portée; or, le premier trombone a, le plus souvent,
tutti de basses en se joignant aux saxhorns; toute- des notes avec des lignes supplémentaires en dessus
fois, il faut prendre garde de chercher la puissance de la portée, ce qui rend l'écriture matérielle de ces
et de ne trouvei' que de la brutalité; enfin, dans deux parties, qui devraient être voisines, à peu près
les piano et les mezzo-f'orte, les trombones rece- impossible. On pourrait y obvier en écrivant les
vront les parties de bassons et de cors en ce qui n'est trompettes à la manière des saxhorns, avec le
TECHNIQUE, ESTHÉTIQUE ET PÉDAGOGIE DE L'ORCHESTRATION MILITAIRE 2159
quatrième harmonique sur le Uoisièrae interligne, comme précédemment, réparti aux saxhorns, et les
comme le Skllenick, mais ce système n'a
faisait traits de violons pourront être reproduits intégrale-
jamais prévalu, et tout le monde écrit et lit le qua- ment jusqu'à Vut'^ (ut de la deuxième ligne supplé-
trième harmonique sur la première ligne supplé- mentaire supérieure, clé de sol) grâce aux petits
mentaire en dessous de la portée, clé de sol. On bugles et aux bugles solos; si ces traits montent
pourrait encore éviler l'inconvénient d'écriture de plus haut, on fera la mutation d'octave en deux fois;
ces deux parties voisim-s en écrivant le premier d'abord, les premiers bugles, puis les bugles solos et
trombone en clé d'u* troisième ligne, comme on les petits bugles, ou même en trois fois premiers :
faisait autrefois pour le trombone alto, et comme on bugles, bugles solos, petits bugles, ce qui sera encore
peut le voir dans toutes les partitions de Mendelssohn; meilleur.
mais l'emploi de la clé d'ut quatrième ligne est déjà Les parties de trombones aux trombones.
fort rare dans les partitions pour musique militaire, Les parties de cors, aux cors.
à cause du trop petit nombre de musiciens de l'ar- Les parties de trompettes, aux trompettes.
mée sachant lire cette clé, surtout depuis la sup- Les parties de bassons, aux trombones, si ces
pression du Gymnase militaire et des classes mili- derniers ne sont pas occupés par leurs propres par-
taires du Conservatoire (1867). de tenues, de temps ou de contre-
ties, et s'il s'agit
Ne pouvant se servir d'aucun de ces deux moyens, temps; aux barytons, s'il s'agit de traits, gammes
on a pensé que le plus simple était de séparer ces arpèges, etc.
deux parties par les parties de cors qui, n'employant Les parties de flûtes, aux cornets, qui les rendront,
qu'assez rarement les lignes supplémentaires, per" bien entendu, une octave plus bas.
mettent d'écrire les parties de trompettes et de Les parties de hautbois, aux trompettes, s'il n'y a
trombones sans aucune gêne, et c'est ainsi que cette pas de traits, aux cornets, si ces parties sont mouve-
habitude a été prise. mentées.
Nous trouvons, dans la tète de partition que je Les parties de clarinettes, à deux bugles solos.
viens d'indiquer, une partii* spéciale de bugle solo Je répète que je ne donne ici que des idées direc-
qui n'a point ici la signifiiation habituelle; cette trices, conséquemmenl générales, et sujettes à de
partie n'indique nullement qu'il y aura un solo de très nombreuses exceptions suivant tous les cas par-
bugle, ni même que cette partie ne devra être jouée ticuliers qui peuvent se présenter; je me propose
que par un seul bugle; tout au contraire, elle doit de revenir sur ce sujet dans la prochaine'
d'ailleurs,
être exécutée dans les grandes fanfares par deuxi troisième et dernière période.
par trois et même par quatre bugles solos si le pu- Bien que la fanfure doive n'être composée que
pitre des bugles est assez nombreux; c'est une partie d'instruments dits de cuivre, c'est-à-dire à embou-
en quelque sorte supérieure à celle des premiers chure, peu à peu les chefs de fanfare ont introduit
bugles, qui doit être exécutée par une proportion les saxophones dans leur matériel sonore, sous pré-
d'artistes pouvant varier du cinquième au quart de texte que ces instruments sont construits en cuivre.
l'ensemble des premiers bugles, et qui, s'unissant Les saxophones sont bien construits en cuivre, en
aux petits bugles pour exécuter les traits ascendants, elfet, mais ce ne sont pas moins des instruments
alors que les premiers bugles font les mutations à anche, qui doivent être considérés comme appar-
d'octave obligées, contribue à en atténuer le mauvais tenant à la famille des bois, au même titre que la
elfet. Nous retrouverons plus loin une distinction tlùte; elle aussi est en métal, et pourrait être cons-
semblable pour la partie dite de clarinette solo dans truite en cuivre.
les grandes harmonies. Quoi qu'il en soit, et bien que le mécanisme, l'em-
Nous trouvons encore, dans notre tête de partition, bouchure, le doigté de ces instruments soient entiè-
une partie d'alto solo et une partie de basse solo; rement différents de ceux des instruments à pistons
ces parties sont surtout destinées à recevoir les traits de nos jours, toutes les fanfares, petites, moyennes
mélodiques qui se trouvent dans leurs registres, et, ou grandes, ont des saxophones, et quelquefois dans
pour cette raison, elles ont souvent à jouer des traits une proportion telle qu'elles deviennent de vérita-
ou des fragments de traits qui se trouvent dans des bles fanfares mixtes ou demi-harmonies.
notes inférieures à celles des autres instruments de Dans le cas le plus ordinaire, les saxophones ne
leur pupitre. sont pas assez nombreux pour équilibrer les cuivres
Des chœurs, quatuors, trios, duos ou solos, je n'ai et former une unité de timbre par eux-mêmes; noyés
rien de nouveau à dire. au milieu des saxhorns, ils s'y fondent, et améliorent
Dans la traduction des pièces symphoniques, des la sonorité générale sans en changer le timbre d'une
grandes ouvertures, la certitude d'avoir des trom- façon appréciable.
pettes et un quatuor de cors nous permettra de Je me borne donc à indiquer les règles générales
rechercher plus de couleur encore; je m'empresse de leur emploi dans les fanfares, sans distinction de
cependant d'ajouter qu'il en est de l'orchestration force de ces fanfares.
comme de la peinture. Hien n'est plus difficile que Dans les chœurs sans accompagnement, les saxo-
de faire un tableau d'une seule couleur, ton sur ton, phones doivent compter en silence tout du long.
c'est-à-dire un tableau où les contours d'un dessin Dans les chœurs accompagnés, ils joueront avec
bien marqué ne doivent se distinguer que par des les saxhorns et même, si cet accompagnement doit
nuances très voisines d'une même couleur; rien n'est rappeler l'idée de l'orgue, et si la famille des saxo-
plus difficile également que d'obtenir une exécution phones est complète du soprano au baryton, ils tien-
vraiment intéressante de timbres (la couleur musi- dront seuls, ou seulement aidés des contrebasses, le
cale) avec les seuls instruments de cuivre qu'il faut rôle de l'accompagnement, le reste des saxhorns
connaître d'une manière très approfondie si l'on comptant des silences.
veut être à même d'en pratiquer l'emploi avec quel- Dans le cas de chœurs sans accompagnement,
que sûreté. alternant avec des reprises d'orgue ou de quatuor
Tout ce qui vient du quintette à cordes sera, à cordes, dans les nuances piano ou mezzo-forte.
-2160 ESCYCLOPÉDIE DE LA MUSlfjVE ET DlCTIO.\NMRE DU COMSERVATOIRË
on pourra eiiroi'e employer les saxoiilioiies isolés. Itix ans après (1848), Eugène Delaportf. va de ville
Dans transcriptions sytiiphoniques, les parties
les en ville, et de village en village, consolider et lixer'
de haiilliois seront bien placées aux saxophones l'uîuvre immense de Holland, amvre insoupçonnée île
Nous avons vu naitie cette conception dans les De 1880 à 19iio, les chorales n'augmentent plus, le
débuts des sociétés instrumentales populaires, et sa mouvement ascensionmd des fanfares se ralentit,
réalisation dans les éditions TiLLiARoet Maroueritat; tandis que le nombre dis harmonies augmente sen-
mais ce système d'orchestration, qui était très mau- siblement.
vais pour harmonie, avait au moins l'avantage d'être Eu 1912, au concours international de Paris, il y
bon fiour lan'are, puisque la partition était écrite avait 190 sociétés françaises, se décomposant ainsi :
breuses que cela n'avait pas grande importance; en ont dépassé la moitié du nombre des fanfares.
outre, elles avaient la ressource de l'édition Bliffet- Le nombre des harmonies airgmentant, il est na-
Crami'ON dont elles pouvaient choisir les œuvres les turel que l'orchestration des partitions qui leur sont
plus faciles ou les moins compliquées, et de l'édition destinées doive être plus soignée. 11 serait même tout
Gai'trot qui, de même que pour les fanfares, avait à fait logique que, comme autrefois chez Bl'ffet-
disposé ses partitions poiir petites, moyennes et Cbampon et chez Gautrot, l'orchestration harmonie
grandes harmonies. fût tout à lait distincte de l'orchestration fanfare, et
Il n'est peut-être pas inutile, afin de comprendre ce ne sont certes pas les compositeurs spéciaux qui
l'évolution nécessaire de rorchestration pour instru- s'y opposeraient, tout au contraire; mais il faut
ments à vent, de résumer ici en quelques ligues le compter avec les éditeurs qui se refusent à faire les
mouvement de la musique populaire en France. frais de deux éditions pour un seul morceau, ou d'une
Kin du xvui" siècle, formation des musiques mili- édition pour une œuvre qui ne s'adresse qu'à une
taires et, par imitation, de quelques musiques de partie de leur clientèle et non à la totalité. C'est là
gardes nationales. un bien mauvais calcul, parce que la clientèle har-
Première moitié du xixe siècle, évolution constante monie rtnii-a par abandonner ces éditions bon mar-
des musiques militaires et comme nombre d'instru- ché, mais qui ne répondent pas à ses besoins, sans
mentistes et comme nature, système et propoTlions satisfaire la clientèle fanfare avec une orchestra-
d'instruments par corps de musique. Perfectionne- tion bâtarde qui, voulant tout concilier, ne répond
ment des flûtes, hautbois et clarinettes et adoption à rien.
des instruments à pistons. Ahandorrnant l'orchestration purement fanfare,
Dans les seules grandes villes et dans quelques doublée simplement en harmonie, on procède géné-
centres industriels du Nord, maintien des musiques ralement ainsi :
à défaut ou en fanfare ou encore clarinette, et en ins- tralto et basse ou baryton) aux cuivres doux (bugle
crivant au-dessus de cliacun des fragments de la vraie et basse ou baryton). Les bois compteront.
partie la mention : obligi'. Si la transcription traite un chœur accompagné,
Quelquelois, mais déjà plus rarement, on écrit la le chœur sera aux enivres jusqu'aux barytons inclu-
partition harmonie comme elle doit être écrite, puis sivement, et les bois, soutenus des basse et contre-
on ajoute une partie spéciale de cornet, unedebugle basse, recevront tout l'accompagnement. Cependant,
et une d'alto suivies de la mention fanfare. si le chœur doit être cOupé par des rentrées de trom-
Enfin, un procédé spécial aux éditions belges, le pettes et trombones, les saxhorns seuls recevront
moins mauvais, consiste à écrire la partition d'har- les parties du chœur, et les cornets et trombones se-
monie avec les parties de premier et de second bu- ront réservés pour lesdiles rentrées.
gle tiarmonie et de remplacer en fanfare ces deux Dans le cas des quatuors, trios, duos ou solos, l'ac-
parties par les parties spéciales de petit bugle, bugle compagnement des cordes va aux bois et basses; les
solo, premier bugle, deuxième et troisième bugle. tenues ou dessins de cors ou de bassons vont aux
Tons ces procédés sont mauvais. altos, et mieux aux barytons, quelquefois aux trom-
1° Parce (|iie la tonalité qui convient le mieux pour bones; les dessins de clarinettes vont aux bugles,
l'harmonie, eu égard au rapport de la transcription ceux do fhUes ou de hautbois aux cornets, mais en
des parties de violons aux clarinettes, est rarement ayant soin de ne jamais ou presque jamais employei'
la même que celle qui conviendrait le mieux pour le même timbre que l'instrument ou les instruments
la fanfare, eu égard à la transcription de ces mêmes chargés des parties chantantes.
parties de violons aux biigles. Dans le cas d'un solo, mais d'un solo seulement,
2° Parce que, ne pouvant compter sur les saxo- on peut confier une cavatine de soprano à la clari-
phones qui ne doivent Jamais être obligés en fanfare, nette solo, une canlilène de contralto au saxophone
les transcripleurs doublent toujours ces instruments alto; le duo de ces deux voix pourrait encore se faire
par les barytons et altos; ceci alourdit la sonorité et à la rigueur sur ces deux instruments, mais avec
paralyse les saxhorns dans l'emploi (]ui devrait en beaucoup de discrétion de la pari du saxophone,
être fait pour des parties complémentaires de la par- sous peine d'écraser ou d'annihiler la clarinette. He-
tition symplionique; ces dernières ne peuvent ainsi présenter une voix par un instrument de cuivre, et
être exprimées. une autre voix par un instrument de bois, dans un
3" Parce qu'il est impossible de rendre, avec une duo, était un procédé souvent employé, il y a un demi-
partie de cornet et une partie de bugle, même avec siècle; aujourd'hui, ce même procédé serait consi-
toutes les parties de bugles des éditions belges, tous déré comme une faute grossière.
les lins détails qu'on rencontre souvent dans les par- S'il s'agit d'une transcription symphonique, choi-
ties de tlùtes, hautbois et clarinettes dialoguant avec sir des œuvres simples, renfermant peu ou pas de
les violons. détails de tîntes, de hautbois on de clarinettes, qui
Si l'on comprend, par harmonie, une harmo-
;5e<t(e ne sauraient être rendus convenablement dans une
mais devant
nie aux ressources des plus restreintes, harmonie de composition insirumeutale aussi res-
jouer néanmoins un répei toire écrit spécialement treinte. Ces réserves faites, voici comment on pro-
pour elle, j'en tend s : pour toutes les petites haimonies cède.
d'une façon générale, il faudrait l'instrumenterainsi : Les cordes vont aux bois.
Les flittes, si le passage est bien à découvert, iront
une phte petite ou fintnde nn premier buqlc.
à la flûte et à la clarinette solo; sinon, elles seront
une première clarinette, nu second bugle.
une seconde clarinette, un premier alto. baissées d'une octave, et portées aux cornets, de
un aaxophone alto, un second alto. même que les hautbois et les trompettes.
un Riixophone ténor, un premier hnrijton.
Les clarinettes de la partition symphonique iront
un premier cornet, un second barijlnn.
un xeconii cornet, une basse.
aux bui'les, les clarinettes de l'harmonie étant réser-
nn premier trombone, une contrebasse en mi i
vées pour interpréter les violons.
un second trombone. Les cors et bassons, comme il est dit plus haut,
dans le cas du quatuor.
Et l'on devra se borner à orchestrer des œuvres
dont tous les détails peuvent être exprimés avec ces Moyenne liarnioiiie.
seules parties obligées.
Les parties de :
Ici, nous considérerons comme parties obligées,
troisième trombone,
en plus de celles désignées plus haut pour la petite
petite clarinette,
saxopfione soprano, troisième alto, harmonie, les instruments suivants :
les saxophones doivent être considérés comme des devront encore ne rien contenir d'obligé.
instiuments de bois, ne serait-ce que pour leur La partie de petite clarinette pourra contenir les
anche). Les quatre voix du chœur devront être con- passages en solo, à découvert, de deuxième ou même
tenues dans les cuivres clairs (cornets et trombones), de première grande flûte d'orchestre.
Le saxophone soprano remplacera le hautbois
je
Pour les
l'ai dit
diverses transcriptions, procéder
au sujet de la petite harmonie, en tenan
comme
136
2162 ESCYCLOI'ICDIE DE LA MUSIQUE ET DICTIOSNAIHE DU CONSERVATOIRE
compte des qneUiues iiisliunieiils obligés fu plus. mieux les remplacer par d'autres instruments, comme
je l'indiquerai en étudiant la troisième période.
Les bassons doivent être transcrits tanlût aux
(liranile harmonie.
saxophones ténors, tantôt aux saxhorns barytons ou
aux trombones, suivant les cas, suivant aussi que les
La partition devra contenir les parties suivantes :
disposition instrumentale qu'ont été écrites les ma- pupitre faible; se joignant aux instruments à anche
gnifiques transciiptions que j'ai citées. pour souligner un forte, se liant aux cors pour en
Pour la iranscriplion d'un cliœur sans accompa- compléter les accords, suppléant une clarinette solo
gnement, mettre les parties chorales aux cornets et qui ne serait pas entendue dans le grave, remplaçant
trombones, d'une part, aux Imgles, altos barytons un basson ou un cor solo absent; n'ayant, par eux-
et basses, d'autre part, les bois, trompettes, cors et mêmes, aucun instrument de la symphonie à repré-
contrebasses coinplent. senter en propre, le transcripleur habile sait en tirer
Pour transcription d'un chœur accompagné, on
la parti en les employant à propos pour augmenter la
les musiques d'ini'anlerie, ces fanfares et ces har- d'une seule main, et c'est là une qualité précieuse
monies furent des orchestres de plein air modèles, pour des cavaliers, tandis que tous les instruments
et les meilleures musiques civiles ne pouvaient pré- de bois, tliite et saxophones compris, doivent être
tendre qu'à s'en rapprocher le plus possible. Depuis tenus constamment des deux mains.
(872, et malgré dévouement inlassable des chefs
le Le groupimenl fanfare a encore sa raison d'être
de musique, nos harmonies militaires réorganisées quand il permet de former une société musicale dans
(c'est le terme ironique du décret du S octobre 1872) un village ou dans une petite ville dépourvue des
sur de nouvuiles bases, puis modifii'es par une infi- ressources musicales nécessaires à la formation ou
nité de détails successifs qu'il serait horsde propos à l'entretien d'une harmonie.
de rappeler ici, nos harmonies militaires, dis-je, ont 11 est enlin justifié quand le groupement
encore
perdu peu à peu de leur valeur d'autrefois; il y a de artistique doit ne comporter qu'un personnel tout
1res rares exceptions pour quelques musiques, se à fait restreint, comme c'est le cas pour les fanfares
recrutant dans le Nord, au moyen de musiciens tout de chasseurs à pied ou d'infanterie coloniale; encore
formés qui, à leur ari'ivée au régiment, n'ont qu'à est-il bon de remarquer que les chasseurs à pied
se metlre an pupilro pour reprendre la partie laissée emploient presque toujours des saxophones, ce qui
en soullraiice pai' le camarade libéré. n'est pas réglementaire pour eus, et (jne les musi-
Pendant ce temps, les fanfares et les harmonies ques d'infanterie coloniale, qui devraient être com-
civiles de progiesseï', et un certain
ont continué posées comme celles di-s chasseurs à pied, emploient
nombre de celles-ci peuvent désormais servir de non seulement des saxophones, mais encore des cla-
modèles et d'exemples aux harmonies militaires. rinettes, des hautbois et des flûtes, ce qui en fait de
Cependant, trois musiques de l'armée ont échappé véritables harmonies.
au désastre ce sont, comme je l'ai dit, les musiques
: Le cas de Lu Sirène et de toutes les grandes fan-
des Dépôts des Equipages dp la Flotte de Hrest el de fares civiles est tout autre.
Toulon, et la musique de la Garde Républicaine à Le nombre des artistes composant le personnel de
Paris qui, toutes trois, ont conservé les avantages La Sirène est de cent trente-huit. Ce n'est pas là un
du décret du 16 août 1834, en y ajoutant même quel- personnel restreint.
ques améliorations comme nombre d'artistes et Le siège de cette société est à Paris; ce n'est donc
comme composition inslrunientale. pas l'impossibilité de recruter flûtes, hautbois et cla-
Pour indiquer la tendance des idées nouvelles en rinettes qui empêche La Sirène de se Iransibrmer
matière île composition instrumentale, je vais don- en harmonie.
ner celles de la grande fanfare La Sirène de Paris et Est-ce enfin la difficulté des morceaux à interpré-
de l'haimonie de la Garde Républicaine. ter qui l'arrête'.' Hien moins encore, car voici quelques
œuvres de son répertoire, et il est tout à fait liors de
Faufare La Siréae de Paria (en 1922). doute que l'exécution en serait infiniment plusaisée
Siirruso/fhones sopranos (tr'Ois). Petit lingle (un). en harmonie qu'en fanfare.
haryton (un).
Sarrusii/tftoiie Bngles sotos (dix-huit). iH'^iivres faisant partie du répertoire de La Sirène :
ici, pour la première fois, que nous rencontrons cet les choses les plus difficiles.
instrument dans une fanfare, c'est-à-dire, dans un Il faut admirer la bravoure de ces artistes, applau-
groupement qui est censé n'employer que des ins- dir à la somme de travail accompli pour vaincre
truments de cuivre. toutes les diflicultés, mais reconnaître que l'art et
Nous avons encore lieu de faire une autre re- l'interprétation de la pensée des maîtres n'y gagnent
maripie : riHU. Transcrire pour harinonie des œuvi'es sympho
Le groupement qualifié fanlare avait sa raison niques constitue déjà une moditication de la concep
d'être pour les musiques de cavalerie. En effet, la tion première de ces œuvres, modification bien rare-
plupart des instruments à pistons peuvent, à la ment avantageuse, mais qui a sa très grande utilité
rigueur, être tenus, au moins pour un instant, au double point de vue de l'éducation musicale
2164 EXCyCLOI'ÊDIE DE LA MUSIQUE ET DICTIONNAIRE DU CO.XSEliVATOIRE
populaire l't tic l;i ilécentialisatioii, de la vulj,'arisa-
Petite flûte .
TECHNIQUE. ESTHÉTIQUE ET PÉDAGOGIE DE L'ORCHESTRATION MILITAIRE ^165
La paitition se présenterait alors ainsi sensiblement les mêmes, sur des portées communes.
et.ie n'ignorepas qu'il existe des partitions sur les-
Pelilc nU' »" "'
en
quelles on peutlire.entêledes deuxième et troisième
/liile
PeWCADif/ en («ib
Premier cornet en si b
Second Cornet en sib
Trompettes en sib ûu «/
Trompettes en mi b ou fa timbre clair
trois octaves
É du-o-
son timbre, pure-
Trompettes basses en sij, ou itt (perce cylin- ment dans les deu.v octaves supérieures,
cristallin
Trom'ione sopranino dit en ut (si pj drique).
s'étoffepeu à peu en descendant l'octave inférieure
Trombone soprano dit en s/)/ //«j
Trombone alto ilit en mib (réi/j jusqu'à se rapprocher du timbre du saxophone so-
Trombone ténor dit en ut lsi[,) prano ou du saxophone alto, mais avec beaucoup
Trombone basse dit eu sol /'a^ (
moins de force. Toutefois, il taut tenir compte qu'en
Trombone contrebasse ilit en »/ ('si h '
bo f*
iar:
îliii; ENCYCLOPÉDIE DE LA MUSIQUE ET DICTIONNAIRE DU CONSERVATOIRE
Comme pour la grande (liMeiles notes yiaves sunl deux seuls imlividus, et elle paraît manquer d'alto*
peu employt^es taule d'une snnoiilé sullisante. et de basses. Cependant, il n'est pas impossible de
L'emploi de la petite (lùte en n!- était parfaite- produire lelTet d'une famille absolument complète
ment justifié avec l'ancien système à ciixj clés, sys- dans un passage particulier. J'ai fait remarquer (|ue
tème avec lecjuel il élait diflicile de jouer dans les les sons graves de la grande flûte se rapprochent
tonalilés liemolisi'es, mais, depuis l'adofjtion du sys- du timbre des sons du saxophone, mais avec moins
tème RoKiui, il est incompiéliensifile qu'on ne cherche de force et de puissance; il suffirait donc d'équili-
pas à réaj^ii- poui- (généraliser l'emploi de la petite brer la puissance des différents éléments jouant
tlûte en ut. ensemble dans un passage à découvert pour donner
An point de vue de l'étendue, il est plus aisé d'at- l'illusion d'une famille très homogène ainsi com-
teindie le s/ aifju sur la pelile lliUe en ut que d'at-
1. posée :
be- 1>Q
\f-&
iffet fiffet
* du -Q ou du «-
PII ,tii1
\p Ijorni ^1' I" "
É :^axi
Toutefois, les notes aiguës doivent être bien mau- Étendue du hautbois en mi\^ :
* duu
Pour le hautbois en mil,, j'avoue bien humblement Le hautbois en ut est, avec le basson, le plus par-
que je n'en connais pas une seule application; j'en faitreprésentant des instruments à timbre vibrant
dirai la raison probable un peu plus loin. (anche doublet; c'est celui de tous les instruments à
TECHNIQUE, ESTHÉTIQUE ET PÉDAGOGIE DE L'ORCHESTRATION MILITAIRE 2167
tel qu'il est de nos jours, peut tout permettre; il n'en employé inditféremment pour exprimer la joie ou la
reste pas moins le plus difficile et le plus délicat à douleur; il peut remplacer la musette dans l'expres-
bien jouer de tous les instruments à vent. sion d'une scène pasi orale, il peut suppléer le cor
Le hautbois d'amoitr ou haatbnis en la est très peu anglais pour chanter une langoureuse cantilène, et,
connu; il n'est encore, comme jp l'ai dit, qu'une pièce mieux que ce dernier, il saura être vigoureusement
d'exposition ou, tout au plus, un instrument d'ama- dramatique; il remplit donc parfaitement la condi-
teur. tion primordiale pour l'orchestre en général et l'or-
clifstre d'Iiar particulier. En est-il de même
monie en
Son étendue est celle-ci :
duo
£ÊEe±
é du o
pleure sur le sacrifice de sa fille dans La .Juive, ou
l'immense mélancolie du pâtre éloigné de tout con-
tact humain, comme au début du dernier acte de
Si l'onpeut dire que le cor aw/lais est un hdutbois Tristan et Iseult, ce timbre, cette langueur déton-
à plus forte raison peut-on dire que le haut- neraient de la plus étrange façon dans toute œuvre
en fa,
bois-baryton est un cor anglais en ut, car le carac- gaie ou simplement virile.
du cor anglais, que le caractère de ce dernier par- joués par des hautboïstes, il n'y a aucun inconvénient
ticipe de celui du hautbois. Au reste, même méca- à les employer dans le solo quand la traduction ou
nisme, même doigté, mais écaitecnent des doigts un le sujet le comportent^.
disposer (le ces instruments coûteux, et non pour les harmonies ordi-
I. Un artiste peut, avec une anche faible, en donner l'illusion. naires qui ont tout juste les instruments indispensables.
21GS ENCYCLOPÉDIE DE LA MUSIQUE ET DICTIONNAIRE DU CONSERVATOIRE
La l'amille des hautbois, ainsi rAdiiile à un seul et non d'une octave, comme on le croit généralement;
spécimen, peut être foit lieureusenient complétée mais, grâce à son i^tendue considérable (trois octaves
par les bassons. et une quinte), il rejoint aisément le hautbois et
fait famille avec celui-ci, depuis quatre siècles, dans
' Itassoiis.
des conditions d'accord, de sonorité et de timbre
Le husson dit en ut, mais en réalité en fa, suivant qui ont été sans cesse en s'aniéliorant.
le principe f^énéral de doigté des instruments en L'étendue compléta de ces deux instruments donne
bois, est d'une douzième plus grave que le hautbois, cinq octaves moins une Jiote :
,^o||oll«it©^?
,ej©l|^o'
I Hautbois
banEs^tt^^»^
avec une octave et demie de notes communes. des instruments entre eux. Or, pour les instruments
Si nous retranchons, dans la pratique de la mu- à vent, quatre modes de mise en vibration de la
sique d'harmonie, les six notes les plus élevées de colonne d'air priment tout 1° l'embouchure (ancien
:
chaque instrument, il nous restera encore une éten- bouquin), pour les instruments de caivre (trompettes,
due complète de quatre octaves et une quarte avec cornels, cors, trombones, saxhorns ou tubas); 2° le
une octave de notes commîmes, ce qui est plus que biseau (Unies); 3° l'anche simple (clarinettes, saxo-
suffisant pour l'aire les soudures et relier chacun des phones); 4° l'anche double (hautbois, bassons, sar-
deux timbres à l'autre. rusophones); ce mode de mise en vibration de la
On fait aussi des bassons en mi\<, mais les trois colonne d'air a tellement d'importance que c'est bien
notes gagnées à l'aigu ne compensent pas l'absence plus aux formes spéciales de l'anche du hautbois ou
des trois notes perdues au grave. de l'anche du basson qu'aux longueurs des différents
Le coiitrebasson en bois, que la maison Evettr est instrumentsde toule cette famille, qu'il faut attribuer
parvenue à mettre tout à fait au point, et en lui le caractère spécial de chacun d'eux.
conservant le vrai timbre du basson, prolonge l'éten- En effet, dans cette question, il est utile de tenir
due complète des instruments à timbre vibrant compte des quatre facteurs suivants :
Sarriisophoiies. I M
ffil
Les sarrusophones, qu'on est souvent tenté de
croire proches parents des saxophones, n'ont de
commun avec ceux-ci que le métal dont ils sont faits;
les saxophones sont, comme je l'ai dit, des ophi-
cléides qui ont échangé l'embouchure des instru-
FiG. 1102. — Anches.
a, hautbois garniede liè^e; ô, liautbois à collier; c, liautbois à coulisse;
ments de cuivre contre des becs de clarinette, tandis
d, hautbois à vis; e, cor angtnis; /', musette.
que les sarrusophones sont des hautbois-bassons en
cuivre. En elfet, la similitude du doigté n'a aucune Pour que les qualités de son fussent égales, il
importance, puisque ce doigté est toujours le même serait nécessaire que les quatre facteurs fussent tou-
dans son principe, qu'il s'agisse d'une tlûte, d'un jours dans les mêmes rapports; or, jusqu'à présent
hautbois, d'un basson ou d'une clarinette, tandis tout au moins, aucun instrumentiste ne s'est spécia-
que la perce et surtout le mode de mise en vibration lisé sur la musette, pas plus que sur le cor anglais
de la colonne d'air constituent, par excellence, les ou le hautbois baryton, et ce sont toujours des
différences de timbre et les véritables apparentements hautboïstes qui ont joué l'un quelconque de ces ins-
TECHNIQUE, ESTHÉTIQUE ET PËDAGnniE DE L ORCHESTRATION MILITAIRE 2169
truments; d'où il résulte que les deuxième et troi- De même, pour les autres sarrusophones vis-à-vis
sième facteurs restent immuables, alors que les pre- du basson, sauf toutefois l'unité du doigté qui est,
mier et quatrième subissent des variations. surle sarrusophone, du système général il se trouve, ;
Pour permettre aux deuxième et troisième l'acteurs parconséquenl, aisément accessible cnmine mi>canisme
de tirer parti du quatrième, on. est obligé (incon- aux flûtistes, aux hautboïstes, aux saxophonistes et
sciemmeiil, carje ne crois pas que ces considérations même aux clarinettistes; mais, c'est de cette unité
aieni déjà été exprimées), on est obligé, dis-je, de de doigté, justement, que vient l'erreur commune
ne maintenir qu'une demi-pi'oporlion entre le pre- de croire que l'on peut faire un excellent sarruso-
mier et le quatrième l'acteur, d'où naissent les consé- pboniste du premier saxophoniste venu. videm- I
qfiences que l'anche de la muselle reste trop longue menl, le saxophoniste a vile fait d'exécuter sa partie
et trop résista nie pour la longueur de l'instrument, sur sou nouvel instrument, et l'on met les sons
ce qui produil des sons manquant de distinction exécrables qu'il eu obtient sur le compte du sarru-
(durs); que l'anche du hautbois a la longueur et la sophone, lequel n'en peut mais; que l'on place cet
lésistance normales, ce qui produit des sous réunis- instrument dans les mains d'un hautboïste ou d'un
sant les qualités les plus souples et les meilleures; bassonnisfe, et l'on entendra de tout autres sons.
et enlin, que les anches des hautbois d'amour, cor De là découle cette conséquence pour avoir de
:
anglais et hautbois baryton sont trop courtes et de bons sarrusophones on doit les faire jouer par des
trop faible résistance eu égard aux longueurs de ces hautboïstes pour les sopranino, soprano, alto et
instruments, ce qui produil des sons mous, très même ténor, et par des bassonnistes pour les ténor,
pathétiques, mais man()uant de brio. baryton, basse et contrebasse; mais ici, deux nou-
Je dois à la vérité, cependani, de dire que J'ai velles difficultés se présentent 1° D'ahnrd, les haut-
:
entendu chez M. I.orf.e, l'Iiabile facteur spécialiste, boïstes sont rares, puis ils ont en main un instru-
un hautbois baryton dont les très beaux sons, plus ment de toute beauté, susceptible des nuances les
souples que ceux du cor anglais, pourraient en faire pins délicales et de l'expression de sentiments les
un excellent instrument d'orchestre intermédiaire plus divers; il est en ut, c'est-à-dire de tonalité
entre le hautbois et le basson. norniale lui permettant de tenir brillamment sa
L'anche de basson a cetle forme (flg. 110:i) fort place au salon comme au concert, à l'orchestre sym-
différente, comme on voit, de l'anche de phonique comme à celui d'harmonie; il faudrait
hautbois; elle semble avoir, au point de donc vraiment beaucoup d'abnégation à ces instru-
vue de la résislance à la pression des lè- mentistes pour les décider à aliandonner ce magni-
vres, les qualités opposées à celles de cette fique instrument et à prendre un instrument en sih
deinière; |e veux dire qu'ici, les sons les ou en ï«th qui, aurait-il toutes les qualités du haut-
plus mous sont obtenus avec les anches du bois, ce qui est bien loin rl'ètre confirmé, ne trou-
format le plus petit, comme il ressort, verait toujours, de par sa tonalité, qu'un emploi
parait-il, des essais qui ont été faits pour localisé dans l'orchestre de plein air, harmonie ou
son adaptation sur des cors anglais et des fanfare. 2" Les bassonnistes sont plus rares encore,
hautbois barytons, essais qui ont dû être et, si leur instrument a moins de finesse et de déli-
abandonnés par suite de l'impossibilité catesse que le hautbois, n'en est pas moins très
il
d'obtenir avec ces anches des octaves jus- recherché pour l'orchestre de symphonie, où il tient
tes. Au contraire, cette anche donne de très bons une place de tout premier ordre, et pour l'orchestre
résultats lorsqu'on eu agrandit le format. d'harmonie, où il rend, pour qui sait l'employer, des
Les anches des sarrusophones sopranino et so- services très appréciables.
prano sont exactement des anches de musette et de une nouvelle complication survient encore du
Ici,
hautbois. Les anches de tous les autres sarruso- faitdu doigté qui, appris en nt sur le basson qui est
phones sont des anches de liassons proportionnelle- en fa. ne correspond plus au doigté du sarrusophone
ment plus petites ou plus grandes, suivant les tona- qui est appris, lui, suivant le système général comme
lités. tous les instruments transpositeurs. Cette raison
Quand je dis proportUmnellernent, je ne veux pas seule suffirait à détourner les bassonnistes d'un ins-
dire proportions exactes avec la longueur des ins-
:
trument qui, avant par lui-même moins de qualités
truments, mais je prends le mot dans le sens que et moins de ressources que le leur, les contrain-
j'ai indiqué pour les anches de hautbois. drait encore au changement d'appellation de tout
En voici les représentations :
leur doigté, en les localisant, sauf de très rares ex-
ceptions, au seul orchestre d'harmonie ou de fanfare.
Et maintenant que je me suis arrêté plus que je
ne me l'étais prorais sur cette question des anches
et des difficultés qui s'y rattachent, je reviens à la
famille des sarnisophones.
Le siipranino en m;' h est l'équivalent de la musette
avec des sons plus gros, ce qui le rend tout à fait
inutilisable en harmonie et bien difficilement utili-
sable en fanfare, où la nécessité de l'exécution des
— traits dans l'aigu peut seule le faire excuser.
FtG. 1104, AncheB de sarrusophones.
a, soprano; liarvton; c, basse; d, contrebasse mi]^;
Son étendue est celle-ci :
h,
e, contrebasse si]p.
be
Ilva de soi, dès l'instant qu'on se sert d'une anche
de hautbois pour jouer le sarrusophone soprano,
que l'on éprouvera, ipso facto, les mêmes difficultés
dubo ïirt^
que l'on rencontrerait à jouer le hautbois lui-même.
2170 ENCYCLOPÉDIE PE I.A MVSIQVE ET DICTIONNAIRE DU CONSERVATOIRE
Touterois, je suis persuadé i|ue les altistes capa- et l'étendue théorique du sarrusophone ténor si'^
bles do monler au-dessus du ré ou du ?ni|i aij^us éc|uivalent du hautbois baryton :
\f^
i dubo
Effet
m TrJK
t^
^ff^ ^ l^«
* dubo du
Comme pour le sopranino, je suis obligé à des ré-
\f-»
é du bo
I
TfT. i ,
m
*
dub^
serves sur la possibilité de faire sortir les dernières
notes du rej^istre suraigu et, sortiraient-elles, sur Le ^arrnsophone basse en sih est l'équivalent du
leur utilisation dans la musique d'ensemble. basson et, joué par un bassonnisle, c'est un magni-
l,'a/(oen mi h est l'équivalent du cor anglais, mais lique instrument aux sons pleins, ronds et d'une
comme on le joue avec une anche de forme anche de excellente vibration; cet instrument, comme tous
basson, au lieu de l'anche de cor anglais forme anche ceux qui vont suivre, peut rendre les plus grands
de hautbois, les sons s'en ressentenl, et probablement services dans les musiques d'harmonie, et il serait
la juslesse aussi; l'occasion d'entendre ces instru- fort désirable que l'emploi en fût généralisé. Mal-
ments et de les entendre dans de bonnes conditions, heureusemenl, j'ai dit plus haut les dificultés de
c'est-à-dire joués par des hautboïstes, n'est pas assez recrutement de bons instrumentistes, à cause des
fréquente pour pouvoir alTirmer quoi que ce soit à difficultés de l'anche, non pour la faire parler, —
ce sujel; mais, sij'ai bonne mémoire, la grande fan' lous les saxophonistes y parviennent aisément, —
fare La Sirène, dont j'ai déjà parlé, possédait autrefois mais pour en obtenir de jolis sons, ce qui est tout
toute la famille des sarrusophones, et ne se sert plus autre chose. Voici son étendue; il sonne comme un
depuis plusieurs années que des sopranos, barytons, trente-deui pieds d'orgue eu égard à son écriture :
sultats, soit, dans l'espèce, à deux modèles qui ne du contrebasson en ut. Son étendue est celle-ci :
l>o
9Q- d-ul>0
du bo É du|^
ce que serait un basson en si^ (un ton plus grave que le basson ordi-
naire). Mais son pavillon n'aviint pas l'cnortne développement de telui
du basson, il ne |)eul comme lui des-cemlre encore de sept demi-tons,
après le doigté général des sept trous bouchés.
TECHNIQUE, ESTHÉTIQUE ET PÉDAGOGIE DE L'ORCHESTRATION MILITAIRE 2171
Écrit en clé de sol, il sonne comme un soixante- l'oreille la mieux exercée, si la (lùte reste chargée
quatre pieds d'orgue. Cetle écriture en clé de sol d'un d'un dessin mélodique particulier.
instrument aussi grave est éminemment illogique; Pour qu'il en soil autrement, il faut que les par-
elle n'a pour but que de permettre aux inslrumen- ties de clarinettes jouent infiniment piano et avec
lisles de passer à l'un ou à l'autre de ces instru- des nuances de plusieurs degiés inférieures à celles
ments sans les contraindre à l'étude d'une nouvelle qui sont indiquées sur les parties copiées ou gravées;
clé (clé de fa). Avec des musiciens mieux instruits, c'est la l'une des grandes supériorités de la musique
on pourrait et l'on devi'ait écrire cet instrument de la (iarde Républicaine, de pouvoir, par une
discipline excellente et un sens artistique parfait de
\,^
chacun des instrumentistes collaborant étroitement
avec leur chef de musique, laisser entendre un dessin
auisi il sonnerait alors de tliUe. de hautbois ou même de clarinette isolée,
au-dessus ou même au milieu de leur ensemble ;
dufcf mais retrouver une telle discipline, une communion
comme un seize pieds d'orgue. aussi étroite entre la direction et l'exécution et
Celte remarque devrait être faite également pour surtout un talent aussi parfait du moindre des
tous les sarrnsophones graves étudiés précédenmienl, exécutants, qui rende possible celte communion et
ainsi que pour les saxophones et les clarinettes graves cette discipline, est chose extrêmement rare et trop
que nous verrons plus loin. exceptionnelle pour qu'un transcripteur puisse écrire
Il nous reste maintenant à examiner l'emploi de de telles finesses de détail, à moins d'écrire spé-
cette échelle vibrante de tout près de six octaves cialement pour un orchestre connu dont on peut
d'étendue. escompter d'une façon ceitaine la perfection du
D'une part haulbois, bassons et contrehassons
:
rendement.
d'une seule tonalité {ut), avec les cor anglais et Pour le hautbois, la différence de timbre étant
haulbois baryton pour les solos expressifs et, d'autre plus marquée, l'inconvénient est un peu moindre,
part les sarrnsopliunes sopranos, barytons, basses
:
mais reste encore considérable à cause du volume
et contrebasses à tonalilés dilFérentes (si[i et ini^i), de son d'un hautbois eu égard à la puissance du
doublant dans loute son étendue la famille des haut- volume de son de toutes les clarinettes réunies; ce
bois-bassons, avec des sons plus forts, plus puis- serait peut-être alors l'occasior. de substituer un bon
sants, mais moins délicats. sarrusoplione soprano au hautboi>, si l'excellent
S'il s'agit de la transcription de passages d'or- recrutement de l'orchestre rendait cette substitution
chestre symphoniqup à découvert, les hautbois et possible.
bassons gardent leurs parties respeclives de l'un à Quant à la clarinette, la similitude absolue du
l'autre orchestre; mais si le passage n'est pas entii"'- timbre avec les autres clarinettes chargées des parties
rement découvert, on peut les renforcer des saiTuso- de violons, rend la transcription exacte seulement
phones correspondants. possible lorsque les parties de violons, transciites aux
Une autre considération doit encore entrer dans autres clarinettes, ne dépassent pas l'importance de
ce doublement, si l'on dispose de bons sarrusopho- simples dessins d'accompagnement.
nistes; c'est celle de la sonorité du lieu où l'on joue. Une idée générale doit d'ailleurs primer toutes
C'est ainsi que l'on pourrait réserver aux seuls haut- autres considérations dans la transcription d'une
bois et bassons les passables délicats, si le concert a œuvre symphonique :c'est la recherche de l'effet
lieu dans une salle ou sous un kiosque, et aux seuls que le compositeur primitif a voulu obtenii par le
sarrusophones, si le concert a lieu sur une place ou choix de l'instrument auquel il a confié l'expression
dans un endroit dont l'acoustique laisse à désirer. de sa pensée; si l'on Juge qu'il a choisi cet instru-
L'une des grandes diflicultés de l'orchestration ment parce que celui-ci lui paraissait plus propie
pour harmonie consiste dans le fait suivant :
qu'aucun autre à donner l'impression voulue, il faut
Dans un orchestre à cordes, le timbre particulier conserver ce même instrument dans la transcription;
de la fliite, du hautbois ou de la clarinette sera tou- mais si l'on Juge, au contraire, qu'il n'a choisi cet
jours perçu et distingué au milieu de toute la masse instrument que pour faire une opposition de timbre
des violons, surtout si le dessin mélodique est par- au timbr'' précédent, au timbre suivant ou au timbre
ticulier pour chaque timbre; il en est de même concurrent, il ne faut pas hésitera rechercher, dans
pour le basson vis-à-vis des violoncelles, ou des vio- la transcription, une opposition de timbre corres-
travail des cordes passe aux clarinettes et aux saxo- tendu que, dans cette étude, je ne puis donner
phones outre que le timbre d'une lUUe est de beau-
;
que des idées générales sujettes à de nombreuses
coup plus rapproché du timbre de la clarinette que exceptions.
de celui du violon, la puissance de son de lallûteest En dehors des passages à découvert, où il est pos-
moins grande en harmonie, à cause du plein air, sible de conserver les timbres et les eti'ets de l'or-
qu'en symphonie, tandis que, malgré le plein air, chestre symphonique, il arrive assez rarement que l'on
un enseirible d'une vingtaine de clarinettes reste traite les hautbois et les bassons eu famille, et cela
infiniment plus puissant, surtout dans l'aigu, qu'un est regrettable; mais la présence des quatre instru-
ensemble de violons même supérieur en nombre; de ments n'est pas encore assez régulière pour que les
telle sorte que la flùle, qui peut aider utilement les Iranscripteurs en fassent état. On traite donc les
clarinettes, si elle prend le même dessin mélodique deux hautbois en parties oOlifjées et les deux bassons
que ces dernières, disparaît complètement, même à en parties ad libitum, ce qui veut malheureusement
2\r> ENCYCLOPÉDIE DE LA MUSIQUE ET DICTIONNAIRE DU CONSERVATOIRE
dire qu'on ne les traite pas en parties réelliis, et il Néanmoins voici son étendue théorique :
o
fffstr
dia «•
lorsqu'on n'a pas toute la famille, sont les sarruso- L'étendue pratique est celle-ci :
Clarinettes.
Mais il est convenu qu'en harmonie, on ne doil souci du talent de l'artiste est justement d'adoucir
pas dépasser le sol aigu, ce qui ramène l'élendue ces sons de la série aiguë qui n'a pas, celle-ci, de
pratique à ceci : nom particulier.
Les gammes diatoniques et chromatiques, les
arpèges dans tous les Ions se font le plus aisément
du monde du gr-ave à l'aigu ou de l'aigu au grave;
^ du D
£Éfeb
du -ô-
une seule précarrtion est néi^essaire dès qu'il y a
plus de trois dièses ou plus de trois bémols dans la
tonalité, c'est de prendre la clé de si ou celle de do
natrrrels à gauche pour les arpègf^s ou à droite pour
Voici maintenant quelques considérations appli- les gammes, commandées qu'elles sont par les clés
cables à toutes les clarinettes quelle qu'en soit la de f/oif et re# on Je ré\, et miU; mais ceci est l'af-
tonalité. faire de l'irrstrumentiste, qui doit connaître ce détail;
Le liralire, qui se transforme insensiblement du les trilles s'exécutent sur tous les degrés, et toutes
grave à l'aigu, se divise cependant en trois séries de les articulations peuvent se pratiquer'; mais ce qu'il
sons ayant chacune un caractère particulier; la pre- faut éviter plus qu'il est possible, ce sont les traits
le
mière, appelée chalumeau, estvibranle, moins assu- tournarrt et retournant dans la série de notes que
rément que le basson, mais vibrante néanmoins j'ai qualiliée « série ingrate », comprise entre le fa
avec quelque chose de mysiérieux dans son expres- et le si ou le do du médium :
ê du o
TJrn
bû bfl.
duTJ
^^ m "Su"
d-u ©
Clarinette basse. —
La clarinette basse en sib est
au contraire excellente sous tous les rapports, et son
usage se répand de plus en plus; déjà, beaucorrp de du O
sociétés du Nord en emploient une, deux et même
du O
trois et, si le prix n'en était pas aussi élevé, on en
pourrait prévoir une extension rapide. dont il faut retrancher, par prudence, au moins une
Voici son étendue : tierce à l'aigu.
8174 ENCrCLOPÈUIE DE LA MUSIQUE ET DICTIONNAIRE DU CONSERVATOIRE
On construit aussi des clarinettes altos et di's cla- celui de servir de base ou il'assise à tout l'édiPice ins-
rinettes basses desi-eiulant nu mii', a" ''' et même à trumental en compagnie du contrebasson, des sar-
\'ut; mais on ne peut écrire pour ces instruments de l'usopbones cnnliebasses, des contrebasses en cuivre
construction exceptionnelle, à moins de connaître (saxhorjis, tubas ou trombone contrebasse) et des
d'avance et l'irislrunienl et l'instrumentiste qui devra contrebasses à cordes si l'on veut.
I, 'étendue de la clarinette contreiiasse est celle-ci
exécnler la partie écrite, et alors ou peut se per- :
pose
nérales.
ici ne sauraient utilement soitir des règles gé-
4 duo
^'ffFt-
m _bii_
Clarinette contralto. —
i.a clarinette contralto mi |. du. ©-
Petite clarinette
itl
mi b
Grande clarinette
si b
Clarinette alto
mi i>
Clarinette basse
si t»
Garinetle contralto
mi b
Qarinettecontrebasst œ
^
si b
217(, ENCYCLOPÉDIE DE LA MUSIQUE ET DICTIONNAIRE DU CONSERVATOIRE
tioii laiiliM an\ darinettfs fiasses, tantôt aux clari- de un peu plus loin, dépendante qu'elle
la refjorier
cription, une l'araille de clarinettes composée à peu Le aaxùphonc sopranino en m,i\> n'est usité que
près ainsi :
dans les très grandes fanfares, où l'absolue nécessité
d'obtenir quelques sons aigus dépassant le pouvoir
12 petites clarinettes. 10 clarinel/es liasses.
des instruments de cuivre semble en lustifier l'em-
10 grandes ctarineltes. 5 ctarineltes eaiitrallas.
8 eitirinettes altos. 8 clarinettes contrebasses. ploi. En harmonie, il est tout k fait inusité, à cause
de la mauvaise qualité de ses sons, ainsi que de ses
Kl, pour les raisons de timbre et de mécanisme diflicultés de justesse.
que l'fxpliquais tout à l'heure, ce ne serait encore Son étendue est celle-ci :
6 peliles clariitelles
B iiraniles clarinettes
(
I
chargées de la partie
des premiers violons.
dubo
pffefc
É •I
du bo
6 (jraiides clarinettes j
chargées de la partie
4 clarinettes allas I
des seconds violons.
Le saxophone soprano en ii\i, dont l'emploi en
4 iiraiides ctarineltes ,
charsées de la partie
4 ctarineltes altos harmonie est contesté par certains chefs de musique,
j^^ .,(^,^^5 ^H^^^
2 clarinettes liasses i
y occupe cependant une place fort utile quand il est
8 ctarineltes liasses ,
chargées de la partie bien joné, et il n'est pas aussi diflicile à bien jouer
3 clarinettes contraltos des violoncelles. qu'on veut le dire, surtout depuis qu'on l'a allongé
2 clarinettes contraltos i
chargées dw la partie pour lui permettre le st'b grave, allongement qui a
8 clarinettes conlrelnisse-i, ) des contrebasses à cordes. beaucoup amélioré tous les saxophones comme so-
norité et. comme timbre; l'essentiel est de mettre le
Ce serait déjà beaucoup moins simple, mais on saxophone soprano dans les mains d'un bon musi-
aurait grande chance d'obtenir une belle sonorité cien; c'est ce qu'on néglige souvent de l'aiie, et là
se rapprochant sensiblement de celle du quintette réside la principale cause du discrédit de cet ins-
à cordes d'un orchestre symphonique. On aurait truinent.
encore la disposition de deux effets très spéciaux, en Son étendue est celle-ci :
b«-
Itûl^ 1-ê- tt«''9 \9:
d^l-o \o. Jtol'f llf-
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TECHNIQUE, ESTHÉTIQUE ET PÉDAGOGIE DE LORCHESTRATION MILITAIRE il77
Son étendue esl celle-ci les ressources du saxophone alto, et il est parvenu
aie faire monter toute une octave plus haut ;
»-»
fro
•'dubO
Comme pour le
du
saxophone soprano,
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VI ,clé de si b médiuin
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^'"î^cIé
x^clédem^ljaigu
viiisClidere aigu
IX .clé de mi b aigu
xi.fiedEfe aigu"
vii.pelilpclédottave
AU .grandtclédoctave
Hota. Us àet/f.
Ijernters /jarmomçt/t^
ne peurent être obtenus 5ur les sanopljones dont Ij 5'palette est fermée automatiquement par la 6'
La plupart de ces doigtés sont d'ailleurs logiques, Son étendue théorique est celle-ci :
celle-ci :
du. t>^
D'autre part, M. Dlh'aqiueb, artiste de la musique trument aux sons pleins et ronds, qui n'a contre son
de la Garde Républicaine, fait construire par la usage général que de coûter cher, et surtout d être
maison Couesnon et C'= un saxophone descendant lourd et peu portatif.
au soi et réalisant trois octaves pleines :
Son étendue est celle-ci :
'
du boouâufao
du dul^-ooudu b-cv
»T
Écrit en clé de sol, il sonne comme un seize pieds Écrit en clé de sol. il sonne comme un trente-deux
d'orgue. pieds d'orgue.
11 est tout naturel de penser que l'invention de Le saxophone contrebasse en mi u n'est fabriqué, à
M. DuPAQuiKB est applicable à tous les saxophones, ma connaissance, que par la maison Evette; il coûte
quel qu'en soit le diapason. 000 francs', el pèse plus encore que le précédent;
Le saxophone baryton en mi h a deux clés de moins c'est dire que, malgré le grand intérêt qu'offrent ses
à l'aigu qjie les deux précédents et se rattache, pour
l'étendue, au saxophone soprano. Prix d'avant guerre.
Le saxophone ténor est l'instrument dont le timbre mières clarinettes'; la partie de deuxième violon
se rapproche le plus de celui du basson. sera donnée au tiers restant des grandes clarinettes,
Enlln, le saxophone baryton se substitue aussi bien dénommées secondes clarinettes, au saxophone so-
qu'il est possible au violoncelle, dont il n'a malheu-
prano et aux saxophones altos; la paitie d'alto à
reusement pas toute l'étendue. cordes sera donnée aux saxophones ténors et, le cas
D'autre part, les timbres des saxophones s'assem- échéant, à la ou aux clarinettes altos; la partie de
blent surtout par tonalité; c'est ainsi que le sop»-ano, violoncelle sera donnée aux saxophones barytons
le ténor et le saxophone basse, tous trois en si h, cas échéant, à la ou aux clarinettes basses;
et, le
seraient plus parfaits que tous autres, associés aux on
enlin, la partie de contrebasse sera donnée, si
flûtes pour en compléter la famille. Au contraire,
en possède, aux saxophones basse et contrebasse,
les aitos et les barytons, unis quand l'étendue du
aux clarinettes contraltos et contrebasses et aux
trait ne s'y oppose pas, rendent très bien un ensem-
contrebasses à cordes, qui sont admises dans un
ble de violoncelles; souvent, soit pour les unir, soit
certain nombre d'harmonies, et même tolérées dans
pour les renforcer, on y joint les saxophones ténors; quelques grandes fanfares.
l'elTel en est très bon, mais cependant moins pur.
Le plus souvent, on adjoint au groupe des clari-
Une suite d'accords jouée par l'ensemble de tous nettes-saxophones, les flûtes qu'on unit aux petites
les saxophones, sans mélange d'aucun autre instru-
et premières clarinettes, et les hautbois qu'on joint,
ment, donne l'illusion de l'orgue. suivant le cas, aux premières ou aux secondes cla-
Mais, c'est comme complément de la famille des
rinettes, quelquefois aux unes et aux autres, en les
clarinettes que les saxophones rendent les services
divisant; c'est la meilleure solution, quand elle est
les plus signalés et les plus fréquents. Sans doute, le
possible, parce qu'ainsi les liautbois ne dominent
mieux serait d'avoir toute la famille des clarinettes pas, se fondent mieux dans les clarinettes et, par
et de l'avoir assez nomhreuse pour lui permettre de
leur timbre vibrant, rapprochent davantage le timbre
représenter à elle seule le groupe entier des instru-
général du timbre des violons.
ments à cordes de la symphonie; le timbre en serait Mais pourquoi, dira-t-on, préconiser l'emploi des
plus homogène, mais, comme je l'ai fait remarquer
clarinettes altos et basses si les saxophones peuvent
plus haut, cela coûterait cher et exigerait un per-
suflire?... C'est que, si le saxophone peut être appelé
sonnel nombreux. Cette dernière considération de- des sociétés
la clarinette du pauvre (sous-entendu :
Grande clarinette
Qarinette alto
Clarinette basse
Qarinette contralto
Clarinette contrebasse
Saxophoiu soprano
Saxtiphone alto
Sauphône ténor
Saxophnncl)aryton
Saxophone "basse
Saxophone contrebasse
3180 ENCYCLOPÉDIE DE LA MUSIQUE ET DICTIONNAIRE DU CONSERVATOIRE
Iractloii de lèvres pour jouer de ccl instrument, que Etendue théorique :
Etendue tiiéorique :
duj
ICtendue pratique
^5
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^ du-»
Ét/ewdue
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RfffiL
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TECHNJQVE. ESTHÉTIQUE HT PÉDAGOGIE DE L'ORCHESTRATION MILITAIRE 2181
seize pieds d'orgue. lie celle du trombone font que les harmoniques éle-
Etendue théorique (notalion normale) : vés ne sont plus obtenus, et que les sons 2 sont
au contraire émis avec assez de facilité; c'est en
somme un trombone k pistons.
Ici, la notation est toujours normale; mais, écrite
WM ^ r.
. :
m Hllfo-
en clé de sol, la trompette basse sonne comme u»
seize pieds d'orgue.
Etendue :
fffefcr
du«o
dutj^
àuji.©<tu«
âuj?>° La trompette basse en si[> est ou bien une trompette
basse en tit, à laquelle on ajoute un c ton » qui la
Ecrite en notation conventionnelle, elle sonne met en si U, ou bien une trompette basse construite
comme un huit pieds d'orgue. directement en sip; elle a la même longueur de tube
que le trombone à pistons en si», ou que le trombone
à coulisse dit en ut, à la première position.
$ àujo ou-»
"ffjpt
$ duJtoo^"
Etendue :
Petite trompette p
en ut
Petite trompette
en sil>
Grande trompette
en fa
Grande trompette
en mit»
Grande trompette
enut
Trompette basse
enut
, Trompette basse
" - ,^ en si l>
2182 ENCYCLOPÉDIE DE LA MUSIQUE ET DICTIONNAIRE DU CONSEHVATOIHB
Nous y voyons que la petite Irompelle moderne en Mais, dans la pratique, il faut retrancher près
lit n'a rien ga^né à l'aigu sur l'ancienne trompette d'inieoctave au grave, tandis qu'un très bon instru-
en fn; on pourrait même assurei' qu'elle a perdu, mentiste peut ajouter une note à l'aigu :
partie de son timbre, et beaucoup de puissance. que j'ai déjà données {Encyclopédie, t. III, page 1420),
Ces observations s'appliquent exactement à la pe- le doff ou ré grave n'existe pas pratiquement, et
[y
tite trompette ensib par rapport à l'ancienne trom- que, sur le trombone, le rei) grave est déjà trop haut.
pette en mi [>. Le trombone à pistons ténor en si[> est en tout sem-
Quant au,\ rapports des anciennes grandes trom- blable au précédent, sauf que le tube est d'un hui-
pettes en ut avec les trompettes basses modernes, tième plus long; il a, de ce fait, les proportions et
nous voyons qu'ils sont assez dilférenls comme éten- longueur exactes du trombone à coulisse à la pre-
due; de plus, l'ancienne trompette était construite, mière position, et serait préférable au trombone à
perce et embouchure, surtout en vue d'obtenir les pistons en ut; malheureusement, il exige la trans-
harmoniques aigus, et les sons graves avaient peu position des parties de trombones, et ce détail
que la trompette basse est surtout
d'éclat, tandis de copie ou d'édition double des parties de trom-
construite en vue des sons graves qui ont toute l'am- bones est cause de sa non-adoption, tout au moins
pleur désirable. en France.
Enfin, nous constatons encore que les trompettes Son étendue est :
duo
Le trombone à pistons ténor en ut est l'équivalent de
S dul!"
Hll JjrrH i- ,
t
).
du
la trompette basse; mais il a une perce un peu plus
forte et une embouchure un peu plus profonde et de Le trombone à pistons contrebasse en ut est d'une
grain légèrement plus large, ce qui lui permet de rece- longueur de tube double de celle du trombone ténor
voir un quatrième piston, grâce auquel il rejoint et, de plus, d'une perce plus large, ce qui le rend
ses
sons 1 (fondamentales). très lourd et fatigant à jouer; aussi, est-il très peu
Bien que plus grave d'une tierce mineure que employé.
le
trombone alto, comme il s'écrit en clé de Ecrit en clé de fa, sonne comme un
fa il il seize pieds
sonne comme un huit pieds d'orgue. d'orgue.
Son étendue est :
daO '\
du ^-o- j.j^
TECHNIQUE, ESTHÉTIQUE ET PÉDAGOGIE DE L'ORCHESTRATION MILITAIRE 21S3
£fËE±
m ranc Le trombone à coulisse ténor est en s( b (donne le
si^0 à la première position), mais, appris en sons
"~-
du O -^ réels, il est dit en ut. Écrit en clé de
fa et en clé
A'ut quatrième ligne, il sonne comme un huit pieds
Pour les trombones basse
et contrebasse â pistons, d'orgue.
il serait très facile rendre de beaucoup plus
de les Etendue :
légèrement la branche d'embouchure des saxhorns altos ténor, à l'état a la même étendue
normal, et il
des timbres-clairs à pistons, et je pourrais me borner le son réel et, écrit en clé de fa, il sonne toujours
ici à mentionner les seuls trombones ténors à cou- comme un huit pieds d'orgue^.
lisse, mais nous ne devons pas oublier que nous n'étu- Son étendue est, dans la réunion de ces deux sys-
dions pas seulement, en cette troisième période, les tèmes, de :
Etendue
*
:
m An lypl^n Po fl du aie
du \f*
etdu' 1)0
Le trombone à coulisse soprano est en fa (donne le 2. A l'heure où j'écris ces lignes, M. Legav, devenu l'associé de la
fa à la première position); il s'apprend en sons réels maison Delfaux, poursuivant l'étude du perfectionnement de la
îles trombones â coulisse, construit un trombone basse dont
et, par conséquent, sonne comme un huit pieds famille
la mécanique, allongée pour donner un mi ou un mi[,, permettra fie
d'orgue. compléter la gamme au grave des sons 2 aui fondamentales (notes
du. \r»^
m rau.
d'orgue. du.0^
1. XoiT Encyclopédie, tome III, p. 14o0. de cinq octaves pleines, d'un timbre pur et absolument homogène.
iWi ENCYCLOPÉDIE DE LA MUSIQUE ET DICTIONNAIRE DU CONSERVATOIRE
Kl
S
TECHNIQUE. ESTHÉTIQUE ET PÉDAGOGIE DE L'ORCHESTRATION MILITAIRE 2185
les trompettes en ut et en fa se doublent presque etjusqu'à quarante bugles, contre trois ou quatre
absolument comme étendue. cornets.
Pour bien nous rendre compte du rôle du cornet J'ai dit'
que, si l'on avait eu l'idée de créer la
dans Tinstrumentation, et de l'immense popularité petite trompette moderne dès l'invenlion des pistons,
qu'il eut au cours de la deuxième période, que nous le cornet ne serait jamais sorti du bal où il avait
avons étudiée, nous devons nous reporter pour commencé d'établir sa réputation, et n'y serait peut'
quelques instants en arriére. être même
jamais entré; c'est qu'on lui reproche
En 1814, lorsque Blijhmel et Stœi.zel inventèrent son timbre commun, trivial, manquant de noblesse
le système des pistons, ils ne pensaient qu'aux trom- et de distinction, deux qualités
qu'on se plait, au
pettes et aux cors, afin de pouvoir obtenir instanta- contraire, à reconnaître à la trompette^.
nément les changements de tons de ces instruments Il serait bien diflicile d'affirmer, dès
maintenant,
qui n'étaient qu'assez rarement les interprètes mé- que le cornet disparaîtra dans un temps donné de
lodiques des morceaux dans lesquels ils tifiuraieiit; tous les orchestres sérieux, mais, déjà, des tentatives
ce rôle d'instruments chanteurs était surtout rempli ont été faites dans ce but, et je vais en citer trois.
par les flûtes, les hautbois, les clarinettes, les trom- En 1004, M, G. Parés, chef de la musique delà
bones, les bassons et, quelques années plus tard, Garde Hépublicaine, et M. Gav, chef de la musique du
par les ophieléides et surtout par leurs sopranos, les 119" de ligue, donnèrent des petites trompettes
à
bugles à clés, plus connus sous le nom de " trom- tous leurs cornettisies, sauf aux deux solistes, qui
pettes chromatiques ». tinrent à conserver leur cornet.
A cette époque, tous les postillons de diligences En 1903, le signataire de ces lignes, alors chef de
se servaient, pour faire préparer leurs relais, d'une musique au 24" régiment d'infanterie, lit une expé-
sorte de petite trompette moins cylindrique et moins rience plus complète encore, en décidant même son
longue que la vraie trompette employée alors, mais soliste à se servir de trompette.
la petite
moins conique que le bugle à clés ou ancien cornet Dans ces trois musiques de
la garnison de Paris,
à bouquin. l'expérience fut concluante, et les parties de cornets
Qui eut l'idée d'adapter les pistons à ce cornet de exécutées sur les trompettes ne perdaient absolu-
poste"?Halary? Périnf.t? un étranger'.' je n'en vois ment rien du point de vue interprétation; elles
mention nulle part. Mais un fait subsiste, c'est que gagnaient au contraire noblesse, distinction, clarté
lecornet à pistons était créé, instrument suscep- et pureté de timbre, s'alliant intimement aux autres
tible, avec les deux pistons qu'il avait alors, de trompettes chargées des parties de trompettes et aux
faire le chant v comme la claiinelte »; c'était là trombones.
la grande affaire, le grand événement, bien plus Quel que puisse être l'avenir du cornet comme
que la nouvelle voix introduite dans l'orchestre; le instrument, la conception des deux parties de cor-
nouveau liiubre n'était rien, la possibilité de faire le nets est utile et difiérente de la conception des par-
chant comme la clarinette » était tout. Aussi, tous
<( ties de trompettes que l'on rencontre dans la musique
l'es musiciens voulurent-ils jouer du « piston », et sympbonique; Il sera entendu, dans lesconsidérations
l'on créa des t'anl'ares composées de u pistons» pour que le me propose de formuler tout a l'heure, que
plus de la moitié de leur effectif. ces parties de cornets n'impliquent point l'instrument
Cet engouement était bien naturel dans un temps proprement dit, et qu'elles doivent être comprises
où les cuivres ne possédaient, comme instrument de ainsi parties de cornets, ou mieiu de petites trom-
:
chant, que le bugle à clés (ophioléide soprano) dont pettes, et que, lorsque je parlerai des parties de
les sous, fort inégaux, laissaient beaucoup à désirer. trompettes, je sous-entendrai de petites trompettes
:
La grande trompette à pistons était encore à peu ou m(ei(.i' de grandes trompettes, ou mieux encore de
près inconnue en France, et. l'aurait-on connue trombone piccolo ou soprano à coulisse.
comme on la connaît aujourd'hui, il aurait encore Et maintenant, revenons à notre tableau des éten-
été impossible de lui demander l'exécution des traits dues d'instruments à timbre clair Nous y voyons
rapides dans l'aigu, pour la raison que, bien qu'elle que la trompette basse est entièrement doublée par
donne les mêmes notes que le cornet, elle donne ces le trombone ténor, et que, poui cette raison, son
notes dans les harmoniques élevés; il faut donc à emploi est inutile en harmonie, comme en fanfare,
l'instrumentiste une sûreté et une souplesse de lèvres sauf dans les fanfares composées exclusivement de
considérables pour ne pas produire à chaque instant trompettes.
la note « à côté '. Pour éviter cette dilliculté, il n'y Le trombone alto a été abandonné presque par-
aurait eu évidemment qu'à raccourcir la trompette, tout, à cause de lamaigreur de ses notes graves; il
et à lui faire jouer les mêmes notes dans les har- pourrait cependant rendre des services dans la
moniques moyens, comme taisaient les cornets et transcription en harmonie des œuvres dramatiques
comme font les petites trompettes modernes. Mais, pour ténor léger, qui sont rendues avec trop de
pour cela, il aurait fallu y penser, et il devait s'é- puissance sur le trombone ténor.
couler encore plus d'un demi-siècle avant que le Enfin, et c'est là la remarque importante à faire,
Christophe Colomb des trompettes trouvât le moyen nous constatons que la série complète des trombones
de faire tenir son œuf debout. à coulisse pourrait remplacer tous les cornets, trom-
Le bugle abandonna enûu ses clés et les échangea pettes et trombones à pistons.
contre des pistons, mais la vogue était au cornet, et Dans les transcriptions pour orchestres de plein
les musiciens croyaient déchoir en condescendant à air, harmonie ou fanfare, les cornets, ne jouant que
prendre le bugle. Aussi, l'on voyait de petites fan- peu ou point de rôle dans l'orchestre sympbonique,
fares posséder dix ou douze cornets et seulement un
ou deux bugles; aujourd'hui, les choses ont changé, i. Voir : Beoliuz, Traité d'Instrumentation et d'Orcliestr.ation,
et les grandes fanfares possèdent trente, trente-cinq pages 197 et I9S.
(JEVAEKT, Nouveau Traité d'huîrumentutimt. pjiges 284,285. et 286.
Ch.-W. Wipor, Technique de l'Orchestre moderne, page 91.
1. Eyic]jclvi)€die , t. lli, p. I45i. Lavighac, La Musique et les Musiciens, pago t40.
218fi EycrcLOPÈniE pe la musique et dictionnaire nu conservatoire
sont siirloiil des instnimeiits de remplacement. trombone alto à l'une des trompettes, ou encore au
Ilsdoivent tout d'abord, sauf dans les grands orches- cornet, si cette partie est indispensable et qu'on ne
tres où l'on est assuré d'avoir les trompettes néces- soit pas suffisamment certain de la présence des
saires, lecevoir, soit comme remplacement, soit trompettes dans l'orchestre pour lequel on écrit la
comme renforcement, les parties de trompettes, puis transcription.
les parties ou traits de flûtes ou de hautbois (pour ces Dans transcriptions des parties des chanteurs,
les
derniers, les trompettes sont préférables), partout où la partie de Wnor revient au premier trombone; s'il
les fliUes ou liauthois risqueraient de disparaître au s'agit d'un chœur, toutes les parties de voix d'hom-
milieu des clarinettes; bien entendu, ces traits doi- mes seront réparties entre les trombones, de façon
vent ôtre le plus souvent baissés d'une octave, ce qui à former le chœur complet avec les cornets (voix de
n'olfre pas un grand inconvénient, le timbre domi- femmes).
nant et clair du cornet suffisant à le faire ressortir; Les trombones peuvent encore recevoir les parties
pourtant, dans certains cas, il est prudent de s'assu- de bassons, quand les dessins conviennent au méca-
rer que ces traits, formant des neuvièmes ou des nisme de la coulisse, et s'ils se tiennent dans une
retards doublés par la fondamentale ou par la note tessiture moyenne ou grave; c'est un moyen de don-
retardée dans les parties inférieures, ne viennent pas, ner du relief à un dessin qui ne serait par remarqué,
dans leur transcription au cornet et dans leur abais- s'il était maintenu à son instrument d'origine, ou
sement d'octave, former des secondes avec la fonda- qui serait noyé dans la sonorité générale, s'il était
mentale ou la note retardée; on doit alors examiner transcrit à l'un des saxophones.
s'il ne vaut pas mieux laisser le trait à la flûte, quitte
^
TECHNIQUE, ESTHÉTIQUE ET FÊUAGOGIE DE L'ORCHESTRATION MILITAIRE 2187
De celle manière, les notes du cor écrites en clé sonnent en de.^soii^ de l'écriture, comme un douze
de fa sonnent en dessus de l'écriture, comme un six pieds. L'étendue pratique pour les artistes cornistes
pieds d'orgue, tandis que oelles écrites en clé de sol d'orchestre symphoniqite peut être établie ainsi :
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du « duo
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* duo
m en si b ou ut et si h la basse ou cor-tuba à quatre pis-
tons en si b ou ut et si b-
;
m duK^-
iF.ff H
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o ||
T. ffii ii
I»
(
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y H ii \ '
Comme il s'écrit en clé de sol, il sonne comme un la lecturedes parties de cors en fa telles quelles, et
seize'pieds d'orgue. pour porter presque jusqu'à la similitude le rappro-
Construit à quatre pistons, il peut donner des notes chement du timbie du cor.
plus graves encore, ma»s on ne doit guère compter Ce moyen consiste simplement à tenir le qua-
sur leur sonorité et sur leur puissance. trième piston toujours abaissé, et à jouer avec les
C'est de tous les instruments de cuivre celui qui se trois autres pistons la partie de cor telle qu'elle
rapproche le plus du cor comme étendue et comme est écritedans la nouvelle tonalité ainsi obtenue.
son; comme étendue, il monte tout aussi haut que En elfet, le quatrième piston abaisse l'instrument
le cor en fa et que le cornophone alto, et il descend d'une quarte juste; cet instrument, élant en sil?,
tout autant que le cor; comme son, bien qu'il soit devient en fa, le quatrième piston abaissé c'est- ;
entendu qu'un cor ne peut être remplacé que... par à-dire qu'il a alors exactement la même longueur
un autre cor, le cornophone ténor se rapproche de de tube qu'un véritable cor en fa; seulement, les
ce dernier plus et mieux qu'aucun autre saxhorn, et trois premiers pistons, construits pour la longueur
même que le cornophone alto; son seul inconvénient ou la tonalité de si h, deviennent trop courts pour la
est d'exiger la transposition des parties de cors, car longueur ou tonalité de fa. Afin de compenser cette
il n'est ni assez commun, ni assez généralement ditférence, il faut tirer la coulisse du premier pis-
employé pour que les transcripteurs écrivent les par- ton d'environ 56 miliraètres, celle du second piston
ties spéciales qui lui seraient nécessaires. d'environ 28 miliraètres, et enfin celle du troisième
Mais voici un moyen que j'indique pour permettre piston d'environ 84 millimètres. Les trois pistons
'jisd EST.YCLOPÉniE DE I.A ^fns/QVE ET DJCTlOiMVAfRE DU CONSERVATOIRE
auronl ainsi leur longueur proportionnelle, et l'on les saxhorns qui vont suivre, est au contraire em-
pourra jouer avec toute la justesse d'un véritablo ployé dans tous les orchestres de plein air; mais s'il
cor, oïl donnant des sons qui se rapprocheront très est utile, s'il est indispensable dans les harmonies, il
seiisiLiIement de ceux de cet instrument. est l'âme même des fanfares, où il tient lieu des cla-
Il peut arriver que, soit parce que le lubeintérieur rinettes de l'harmonie et des violons de la sympho-
des coulisses est trop court, soil, surtout pour If nie; aussi, alorsque cinq ou six bugles constituent
deuxième piston, paice que la courbure de la cou- un maximum pour une grande harmonie, on voit
lisse est prononcée trop loin, que le tirage delà cou- certaines grandes fanfares atteindre et même dépas-
lisse ne puisse s'elFecluer à la loiif^ueur indiquée; ser le nombre de quarante représentants de cet ins-
dans ce cas, il y a lieu de faire construire une, deux trument.
ou trois coulisses spéciales qu'on ajuste pour jouer Ecrit en clé de sot, il sonne comme un huit pieds
les parties de cors, et qu'on échange avec les cou- d'orgue.
lisses normales pour jouer les parties du baryton. Son étendue est celle-ci :
9 b-o da
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E£feb
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E&n: -sr
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autt-»
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du^ d.u<
Malheureusement, la nonchalance de la plupart des
musiciens qui jouent cet instrument est telle, qu'il
Je donne là l'étendue qu'un artiste peut atteindre;
faut retrancher de celle étendue une quarte à l'aigu
pour ail musicien ordinaire, il faudrait retrancher
et une quarte au grave.
une quarte dans le grave et une tierce à l'aigu.
La raison en est la suivante la branche d'embou-
:
Cet instrument, étant à quatre pistons, peut être
chure, perpendiculaire au pavillon, devrait être tenue
employé comme le cornophone ténor pour l'exécu-
horizontalement et bien droite en face des lèvres de
tion d'une partie de cor en fa; mais seulement
l'exécutant, conformément au principe de tenue du
comme quatrième cor, à cause de ses sons trop
cornet et du bugte, de sorte que l'embouchure puisse
gros et trop lourds pour pouvoir se prêter à imita-
prendre son point d'appui sur la lèvre supérieure,
tions de toute autre partie.
tout en ménageant la liberté de souplesse et d'élas-
ticité de la lèvre inférieure. Or, les inslrunientisles
Saxhorns.
trouvent infiniment plus commode de tenir leur ins-
trument appuyé sur la poitrine plutôt que devant eux,
; Le ou saxhorn sopi'ano en mi h est sur-
petit bwjle
en l'air; il en résulte que la branche d'embouchure
tout un instrument employé dans les fanfares pour
y est très inclinée de haut en bas, et que l'embouchure
tenir le rùle de la petite tliile qui fut tolérée autrefois,
prend son point d'appui sur la lèvre inférieure, ne
mais qui est proscrite maintenant à peu près par-
laissant de liberté qu'à la lèvre supérieure; or celle-
tout de ces formations.
ci n'a ni la souplesse ni l'élasticité qui seraient né-
Ecrit en clé de sol, il sonne comme un six pieds
cessaires pour obtenir aisément tous les harmoniques
d'orgue.
graves et aigus de l'instrument.
Sonétenduethéorique est
née la réputation imméritée du saxhorn
:
De là est
alto d'être un inslrument bâtard ou mal venu, mal
proportionné.
fiffctr
Le remède à cette situation est pourtant bien sim-
du ple; il consiste à donner une courbure suffisante à la
auf-i branche d'embouchure, de façon que l'embouchure
se présente dans une position normale aux lèvres de
Mais capables de la pratiquer dans son
les artistes l'exécutant, alors que l'instrument est tena dans la
entier sont rares, etil est prudent de ne pa sdépasser positron préférée des instrumentistes.
les limites suivantes :
Cette modilication peut paraître simple et facile à
réalis-er; il faut croire qu'il n'en est rien, car voici
bientôt ti-ente ans que je la conseille à tous les fac-
teurs qu'il m'a été donné de connaître, et tous m'ont
répondu qu'on a l'habitude de faire les altos avec la
branche d'embouchure perpendiculaire au pavillon,
Le petit bugle est quelquefois employé dans tes et que courber la branche d'embouchure nuirait à la
grandes harmonies; toutefois, sa présence h'y est forme esthétique de l'instrument !
guère justifiée que dans les pas redoublés et darts Le saxhorn baryton en si h est à l'octave grave du
tes morceaux à eiîéV tels que les grandes marches. bugle, et comme il s'écrit également en clé de sol, il
Le bugle ou saxhorn contralto en si K ainsi que tous sonne comme un seize pieds d'orgue.
TSCHNIQUE, ESTHÉTIQUE ET PÉDAGOGIE DE L'ORCHESTRATION MILITAIRE 21S9
Son étendue est celle-ci : Nos chefs de musiques militaires ne sont d'ail-
leurs pas seuls à commettre cette erreur, car c'en est
une, et nos chefs d'orchestre symphonique, ainsi que
les compositeurs modernes, font preuve du même
sentiment ou de la même erreur lorsqu'ils donnent
pour appui et pour base un tuba ou saxhorn basse au
dujt-ë- pupitre des trombones, car ceux-ci ont un timbre
qui ne se lie nullement à celui du saxhorn basse;
Cet instrument possède une voix très sympathi- combien il serait préférable, tant qu'on n'aura pas
que, caractérisant bien sa qualification de « bary- trouvé un trombone basse ou contrebasse à coulisse
ton », voix grave sans aucune lourdeur; elle forme vraiment pratique, d'employer un trombone à pis-
la liaison oblifj;ée des sons du saxhorn alto avec tons à grosse perce, mais toujours cylindrique, en ut
les sons puissants et larges du saxhorn basse. à quatre pistons dit trombone basse, ou en fa ou ut
Immédiatement après le cornophone ténor, le grave dit trombone basse ou contrebasse, quitte à
saxhorn baryton est l'instrument le plus apte à rem- en faire modifier la forme comme je l'ai indiqué,
placer le cor, surtout s'il est construit à quatre pis- atin d'en rendre la tenue et le jeu plus pratiques. On
tons, car, dans ce cas, on peut lui demander l'emploi aurait alors une base et un appui de même timbre
du quatrième piston dans l'émission des harmoniques et d'un effet excellent.
même aigus, ce qui rapproche son timbre de celui Ecrit en clé de fa, le saxhorn basse sonne comme
du cor, ou mieux, lui appliquer les principes que j'ai un huit pieds d'orgue, et il possède l'étendue théo-
indiqués plus haut pour le cornophone ténor. rique extraordinaire suivante :
RossiNi.
On ne saurait trop réagir contre celte pratique bû
anti-artistique qui prive ainsi sans raison la famille
fTT
des saxhorns de l'une de ses meilleures voix, sinon
de sa meilleure.
du -
f.^ ^P ^ l
m
Le sa.iiiorii basse, de même diapason que le bary- du b'
ton, mais de pins grosse perce, a des sons larges,
puissants et bien appropriés à son rôle de basse de
à la condition que les notes graves ne soient de-
l'orchestre cuivre; il est un peu cotonneux et lourd
mandées que dans un mouvement lent ou très mo-
quand il ne sert qu'à soutenir les anches, et il serait
déré, et qu'il n'y ait pas de
)(?|. grave impossible à
souvent prétérable, dans ce cas, de lui substituer les
obtenir juste.
saxophones barytons seuls ou joints aux clarinettes
Quant à l'étendue pratique courante, elle doit être
basses. Trop souvent, les traductions de symphonies
limitée ainsi :
ou de fragments de symphonies des grands maîtres
manquent de cachet artistique et de légèreté néces-
saire, par celte unique cause de la présence perpé-
tuelle des saxhorns basses de la première à la der- ^ fpTT*"
m
nière mesure delà partition, quel que soit le timbre "3^:^ du. !>-<
Basson —
IK^;
Sarrusophone
baryton
Clarinette
basse
Saxophone
baryton
Tronibone
ténor
Saxhorn
basse
TECHNIQUE, ESTHÉTIQUE ET PÉDAGOGIE DE LORCHESTRATION MILITAIRE 2191
Contrebasson IF*^
Sarrusophone
basse Sil>
SaiTUSophone
contreba ssemi t>
Sarrusophone
contreliasse sip
Clarinette
contralto mi ^
Clarinette
contrebasse
ou_pédale si \>
Saxoplione
basse si \f
Saxxjphone
contrebasse mil»
Trombone basse
Trombone
contrebasse
Saxhorn
contrebasse mitij
Saxhorn
contrebasse sLb
Contrebasse
à cordes
(tolérée)
2192 ENCYCLOPÉDIE DE LA MUSIQUE ET DICTIONNAIRE DU CONSERVATOIRE
ou bien encore d'un roulement » vifjoiiieiix
(jaritit <• Sur les instiuments à pistons, la « série ingrate »
la sonorité générale. En dehors de ce rôle, la grosse est surtout produite par le rapprochement des notes
caisse est encore chargée des imitations du canon et
des roulements lointains du tonneiTe.
don, pour
Les cymbales forment raccom[iagnemcnt ohligé Je
la grosse caisse, sauf dans les elîets spéciaux que
l"on indique alors sur la partie de la grosse caisse :
sJli, r(' et fa if :
* rffo~
Ftf^
de bémols et surtout de dièses, non parce que le petites clariucltes. Iicltt btigic.
les concours orphéoniques, des plus faibles aux plus celle du choix de la tonalité dans les traductions de
fortes, dans les dix degrés ci-après : l'orchestration symphonique en orchestration d'har-
monie ou de fanfare.
3= division, X'^ section. Ifc division, 20 section, J'ai dit que l'on peut jouer dans tous les tons avec
3e division, 2"^ section. f division, 1'= section,
les instruments modernes, mais il ne s'ensuit pas
3* division, 1^''
section. division supérieure, 2"^ section,
2« division, 2*^ section. division supérieure, 1"^ section, qu'on doive prendre au hasard la première tonalité
2« division, l'" section. division d'excellence. qui se présente à l'esprit ou sous la plume; on ne
saurait oublier que le personnel des harmonies et
Les « précautions » d'écriture que j'ai indiquées des fanfares ne se recrute, sauf de très rares excep-
pour naturellement,
les petites sociétés s'atténuent tions, que parmi des travailleurs de toutes classes,
progressivement, avec l'élévation du degré de classe- lesquels ne peuvent donner à la musique que les
ment des corps de musique. Mais ce n'est guère que courts loisirs du soir, après le labeur de chaque jour,
pour les groupements capables d'affronter les con- et qu'ils ne sauraient jamais posséder, en tout état
cours en division supérieure, que Ton peut tout de cause, une éducation musicale comparable à celle
écrire sans préoccupation de tonalité et avec l'assu- des artistes professionnels d'orchestres à cordes. Mos
rance que les secondes parties pourront exécuter à musiques militaires ne sont, elles aussi, composées
peu près tout ce qu'on leur conliera; néanmoins, il que de ces mêmes musiciens amateurs, qui, pendant
y a toujours avantage, pour la sûreté et la pureté de leurs années de service, font surtout l'exercice, des
l'exécution, à considérer que les deuxièmes parties marches, des tirs, des grandes manœuvres, des répé-
sont les pupitres de début des jeunes musiciens titions, des concerts, alors qu'ils ne se livrent que bien
encore inexpérimentés, qui viennent alimenter le rarement à des études musicales individuelles.
recrutement des sociétés les plus fortes, et à ne leur Indépendamment de cetle réserve, il y a la rela-
confier que des traits relativement faciles, eu égard tion qui doit être aussi rapprochée que possible
aux difficultés générales de l'œuvre à interpréter. entre la tonalité primitive et la tonalité choisie
De même que pour l'orcheslre symphonique, il pour la traduction.
est toujours bon, quel que soit le nombre de musi- Quand il s'agit de la traduction d'œuvres de chant,
ciens jouant d'un même insliumeni, de n'écrire que de fragments d'opéras, d'oratorios, etc., le rapport
deux parties pour chaque nature d'instrument, saut' du chant primitif et de la tonalité réelle de l'instru-
pour les trombones qu'on écrit constamment à (rois ment ou des instrumi'iits chargés de remplacer la ou
ou à quatre parties (trois parties sont préférables); les voix doit être aussi exact que possible; l'étendue
mais, pour réagir contre la tendance des musiciens à des instiuments ne s'y oppose jamais pour les vois
jouer la première partie à deux lorsqu'ils sont trois de basse et de baryton, et peu souvent pour la voix
à un pupitre, il n'est pas mauvais d'indiquer deuxième de ténor; mais, lorsqu'il faut traduire les voix de
et troméme en tète de la seconde partie. Je ne donne femmes, les cornets ou bugles sont le plus souvent
pas cette indication comme offrant une garantie trop limités à l'aigu, rt l'on est contraint de baisser
absolue, mais elle offre tout au moins l'avanta^je de toute la transcription, atiii de rendre les notes aiguës
permettre au conxpositeur ou au transcripteur d'in- des parties des voix de téinmes accessibles aux so-
diquer son intention et sa volonté d'assurer la pléni- pranos des cuivres. Ue là, ce principe Dans les tra-
:
tude de sonorité des deuxièmes parties. On fera ductions d'oeuvres chantées, on doit se guider,
Kjependant une exception pour les pupitres de cor- pour la tonalité à prendre, sur la transcription la
nets et de bugles, où la première partie doit être jouée plus rapprochée possible de la voix de femme la
à deux, afin de permettre le repos nécessaire des plus aiguë pour le cornet.
solistes. Pour les transcriptions purement syniphoniques,
Lorsqu'il est indispensable d'écrire plus de deux il y a d'abord lieu de ipmaïquer que le nom de la
parties pour les clarinettes en harmonie et pour les tonalité énoncée est pi esque toujours en désaccord
bugles en fanfare (ce qui se présente dans les tra- avec celui de la tonalité réelle.
ductions de « violons divisés »), ou lorsque la lon- Premièrement, paice que l'énoncé de la tonalité
gueur et la difficulté d'un trait de violon n'en per- primitive sert souvent de titre aux œuvres purement
mettraient pas ou n'en permettraient qu'avec peine symphoniques des grands maîtres et que, si l'on
l'exécution à des instruments à. vent, on doit répartir transcrit par exemple i'Ourerture en ré de Schubert
ceux-ci de la manière suivante, en trois parties :
ou la Symphonie en la de Beethoven, on ne saurait
chanjierces deux dénominations, quelles que soient
En harmonie, Eh fanfare.
pour les transcriptions.
les tonalités choisies
petites: clarinettes, petit bugle, Secondement, parce que, en harmonie comme en
clarinettes soto^. bugles sntos.
premiers hugles. fanfare, on ne désigne jamais la tonalité réelle, et
premières clarinettes.
secondes clarinettes. seconds bugles. que toute expression de tonalité s'entend de la tona-
lité écrite pour les instruments en sit», qui sont les
Ilappartient au chef de musique de renforcer les instruments les plus nombreux dans ces deux genres
clarinettes solos ou les bugles soios d'une ou de d'orchestre.
plusieurs unités, afin d'équilibrer la sonorité de cha- Si l'on écoutait le principe qui se présente de
cune des parties. suite à l'esprit sur ce sujet, on transcrirait toutes
138
2194 ENCYCLOPÉDIE DE LA MUSIQUE ET DICTIONNAIRE DU CONSERVATOIRE
les œuvres symphoniques dans le Ion réel priiiiitif, de leur instrument sans laisser à l'auditeur cette
c'est-à-dire exart pour l'oreille, et un Ion plus haut impression de l'eflort dépensé, toujours si nuisible
pour l'œil qui lit la partition d'harmonie ou de fan- au sentiment de charme qu'on doit rechercher dans
l'are (orchestres dits en si|'). la majorité des exécutions musicales.
Une première objection se présente pour les tona- 11 y a donc souvent un véritable avantage, pour
lités primitives dont l'armature porte deux, trois, l'impression produite sur l'auditeur, à laisser la
quatre et cinq dièses. Comme les instruments ensî|i transcription dans le ton écrit de la partition primi-
devraient avoir deux dièses supplémentaires afin de tive, ce qui en baisse l'audition d'une seconde ma-
rendre ces tonalités réelles, les transcriptions se jeure, mais ce qui permet le plus souvent d'en con-
présenteraient avec quatre, cinq, six et sept dièses server tous les etîets de composition et d'orchestra-
à l'armature, sans préjudice des doubles dièses qui tion dans les dispositions relatives imaginées par
seraient amenés par la moindre modulation mi- l'auteur primitif, et ce qui atténue enfin sensible-
neure. ment la dureté inhérente aux instruments à vent,
Une seconde objection vient de ce que les clari- eu égard à la douceur des instruments à archet.
nettes étant en si[i doiveni, à notes égales pour l'o- Je n'ignore pas que les habitués des grands con-
jouer des notes écrites à la seconde majeure
reille, certs, les purs musiciens des sphères élevées, au
supérieure de celles des violons; de telle sorte que, moins quelques-uns de ceux-ci, prétendent qu'ils ne
chaque fois que, dans une ouverture ou dans un frag- peuvent reconnaître une ouverture ainsi abaissée
ment symphonique, les violons ont un fa^ ou un sol d'un ton ou même d'un demi-Ion, alors qu'ils ont
dans l'oreille la tonalité réelle de l'orchestre sym-
- oa phonique. A cela, je n'hésite pas à répondre d'abord
que les amateurs qui ont la chance de pouvoir tou-
aigu, les clarinettes ne pouvant
jours entendre, à leur gré, les chefs-d'œuvre de la
musique, ne sont nullement forcés de venir assister
à des concerts d'orchestres d'harmonie ou de fanfare ;
lorsque, dans le but d'éviter l'armature chargée en Blanche, et même le Barbier de Séville, ne doivent
dièses et avec l'idée de donner plus de relief à la plus jamais être joués, sous prétexie qu'il sont enten-
transcription, le transcripteur élève sa transposition dus de nos jours dans un diapason plus élevé que
écrite d'une tierce mineure; ceci relève l'audition celui de l'époque de leur conception, et si les Hugue-
d'un demi-Ion réel, mais interdit toutes les répéti- nots, le Prophète, la Fille du Régiment, le Désert, la
tions de thèmes à l'octave de la partition primitive, Damnation dcFaust, Rigoletto, etc., doivent être désor-
anémiant ainsi toutes les parties brillantes de l'œuvre ;
mais rayés de tout répertoire parce qu'on les chante
résultat tout opposé à celui que recherchait le traduc- aujourd'hui plus bas qu'à leur création. Mais, à ce
teur. compte-là, il faudrait également rayer des grands
On trouve beaucoup d'exemples de cette transpo- concerts toutes les anivres des Mozart et des Beetho-
supérieure dans les transcrip-
sition écrite à la tierce ven, y compris la Neuvième Symphonie, car il n'est
tions d'œuvres dont la tonalilé primitive est en sol pas douteux que notre diapason actuel diffère beau-
majeur ou mi mineur (transcrites ensih majeur ou du la allemand de la fin du xviii' et du commence-
sol mineur pour éviter les trois dièses de la majeur ment du xix" siècle.
et/'aff mineur), en ré majeur ou si mineur (trans- .\ monavis, le meilleur guide pour choisir et dé-
crites en /(( majeur ou ré mineur pour éviter les lerminer la tonalilé d'une transcription estconstilué
quatre dièses des tonalités réelles), en la majeur ou par l'exameu de l'étendue, de la tessiture, dirait un
fa^ mineur (transcrites en do majeur ou en la mi- chanteur, des traits du premier violon et du violon-
neur). celle, eu égard aux meilleures conditions de leur
11 y a encore une autre raison de ne pas toujours traduction par les premières clarinettes et les basses;
maintenir la tonalité réelle, et surtout de ne pas la remonter la tonalité, c'est le plus souvent dépasser à
surélever, raison qui ne parait pas avoir été suffi- l'aigu l'étendue de la clarinette et exiger des trans-
samment observée par un certain nombre de trans- positions d'octave; baisser celte tonalité, c'est risquer
cripteurs. de rencontrer les mêmes inconvénients au grave
Les sons du violon, si élevés, si aigus qu'ils pour les saxhorns basses et les saxophones barytons
soient, ne sont jamais durs, tandis que, pour tous qui, pour longtemps encore, doivent être considérés
les instruments à vent, les sons aigus ne peuvent être comme les représentants des violoncelles.
obtenus, surtout par plusieurs instruments à la fois, En fanfare, les deux « instruments traducteurs »
s^ns une certaine dureté; il existe bien peu de corps guides seront constitués par les premiers bugles et
âe musique possédant un pupitre de clarinettes ou
de bugles capable de monter dans la région aiguë ). Encyclopédie, t. III, p. 1466.
TECHNIQUE, ESTHÉTIQUE ET PÉDAGOGIE DE L'ORCHESTRATION MILITAIRE 2195
soit un
total de trente et un musiciens.
ne m'attarderai pas à délimiter une liarmonie
Je
moyenne dont le personnel s'étagera forcément de
façon très variable, selon les ressources locales on
momentanées, entre la petite harmonie et Vharmonie
complète, laquelle doit être composée au moins de :
2 /lûtes.
2196 nNcrchopÈniE de la musique et dictionnaire du conservatoire
par le tromlione contrebasse, contrebasse naturelle sidéré, encore pour un certain nombre d'années,
des ndvTi's clairs. comme un obstacle à la (généralisation d'orchestres
Nous obliendiioMS de la sorte un orchestre aux utilisant à peu près toutes les ressources de la fac-
timbres aussi variés que possible, mais il nous faut, ture moderne.
pour atteindre ce résultat, qualre-vin^t-quinze ins- Une autre cause de retard de la généralisation de
trumentistes, et ce n'est qu'un minimum. Il est vrai l'emploi de ces ressources réside dans le prix élevé
qu'au commencement du xw" siècle, une musique des nouveaux instruments car si nous établissons
;
composéi' de trente exécutants eût paru formidable, le devis du matériel instrumental d'un orchestre
etque, de nos jours, la moindre harmonie commence constitué sur les bases ci-dessus, nous trouvons pour
à ce^chillre. Né.Tnmoins, ce chitl're de (|uatre-vingt- respectable de 28000 francs
la totalité le chilîre très
qainze ailisles ne laisse pas que de devoir ètie con- environ', devis établi sur les catalogues de maisons
^
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TECH SIQUE, ESTHÉTIQUE ET PÉDAGOGIE DE L'ORCHESTRATION MILITAIRE 2197
garanties de bonne fabrication, entrent pour plus de 9000 francs. J'ai compris dans
donnant toutes
comme sonorité et comme justesse, prix donnés ce devis un cor anglais et un hautbois baryton pour
pour les inslruments seuls et non compris les acces- les solos, mais je n'ai compté ni sariiisophone alto,
soires tels que sacs, étuis, boites, etc. ni sarrusophoue ténor, ni clarinette contralto, ni
Si nous admettons que les musiciens jouant les saxophone contrebasse, dont l'admission entraîne-
instruments usuels hautbois, basson même,
: tlûte, rait un personnel encore plus nombreux et un devis
SOPRANO. 1
«5 CONTRAL 'i
= TENOR. 3
o.
o
B BARYTON. 4
fis
es
<
* -BASSE. 5
C. BASSE. 6
TROMPETTES. 7
PISTONS.
TROMBONES.
SOPRANO. 12
rOUTBALT»'
œ TENORS.
g 16
O
x
^ BARVFOtf. 17
BASSE.
C.BASS.Mi h. 20
C.BASS.Si l'.2l
BATTERIE». Î'J .
Trio du Comtr Ory de Hassiyi pour grandte fanfare, par 6-. Pi»«iie«. N» 45i dK Vlnsfrumenta^iliHm Gadïhot ainé.
.
,And»nt«- ( J'r 80 )
SOPR: Si i». (
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ALTO Wi l> . 2
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o TENOR Si t. 3
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BARYT: Ml t>.4
TROMPET : M; b. f,
PISTONSSi b.
TROMBONES.
SOPRANO. (2
Ml b.
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TENORS Mi b.
<6
BAB VT: Si b. (7
BASSE Si b.
C. BASSE Mi b.
C. RASSE Si b.
BATTERIE
Scène du Comt» Ory de Rossini, par I,. Girard. N» 497 de l'tiislrnmeittal-édilion Gaotrot aî.nh et Ce
TECHNIQUE, ESTHÉTIQUE ET PÉDAGOGIE DE L'ORCHESTRATION MILITAIRE 2199
ton, par exemple, afin de les adapter aux clarinettes 1° Qu'un certain nombre d'harmonies convinssent
alto et basse, en transposant la partie de saxhorn d'établir leur composition instrumentale suivant un
contrel>asse à l'usage des contrebassons, sarruso- type unique, et d'en observer les proportions agran-
phones basse et contrebasse, clarinette contrebasse dies ou rapetissées à la mesure du nombre de leur
et saxophones basse et contrebasse, etc., mais les personnel exécutant;
instruments modernes employés ainsi ne font qu'a- 2» Trouver un éditeur disposé à faire graver les
méliorer le timbre général de l'orchestre sans don- parties séparées, ainsi que les partitions et conduc-
ner aucun des effets spéciaux qui leur sont propres; teurs des compositions et transcriptions écrites en
il est donc indispensable, si l'on veut que les orchestres vue de ce type unique de composition instrumentale
modernes d'aujourd'hui ou de demain donnent tout adopté pour composer l'orchestre d'harmonie mo-
leur charme et toute leur puissance, de les mettre en derne.
possession de partitions écrites en vue de l'exploita- En dehors de ces deux condilions, il ne peut rien
tion de toutes leurs ressources instrumentales. être fait de sérieux car si chaque groupe musical
;
Or, pour permettre de constituer une série conve- s'enrichit de nouveaux instruments, au hasard ou
retite FLUTE.
pt.ecijARl NETTE.
HAUTBOIS.
i^f CLARINETTE.
2^* à°
tO
2200 ENCYCLOPÉDIE OU LA MUSIQUE ET DICTIONNAIRE DU CONSERVATOIRE
suivant, le goût de son cliet' pour tel ou tel
particuliei- deux moyens I» un congrès des chefs de musique
;
tions d'orchestration courante (type 1860), ou qu'ils témoin l'adoption du nouveau diapason en 18!>9 et la
écrivent eux-mêmes les partitions modernes, en se réglementation instrumentale des musiques d'infan-
conformant strictement à leur composition instru- terie du 26 mars 1860. Mais ici, à moins d'événements
mentale particulière; mais alors, on rencontre les bien imprévus, nous n'avons à nous leurrer d'aucun
inconvénients suivants ou bien le chef de musique,
: espoir chimérique; cela corlterait cher et exigerait un
d'ailleurs chef d'orchestre (batteur de mesure) par- personnel plus nombreux. IN'en parlons pas.
fait, n'a pas toute la compétence nécessaire pour (^uant à la deuxième condition, elle ne me parait
bien écrire une partition, ou bien, ayant cette com- pas plus pratiquement réalisable que la première,
pétence, mais résidant en province, il ne peut disposer dont elle dépend d'ailleurs.
de la partition symphoniijue primitive et indispen- En elfet, comment demander à un éditeur de faire
sable. Au surplus, si nous admettons que la partition graver h, ses frais une par'tition écrite spécialement
a pu être bien établie, cette partition, parce qu'elle poirr un groupe musical ayant une composition ins-
n'est pas gravée et par suite de sa disposition instru- trumentale particulière?
mentale pai'ticulière, se trouve localisée au seul La plupart des éditeurs, je l'ai déjà dit au cours
groupe musical pour lequel elle a été écrite. Dans de l'étude de la deuxième période, ne veulent éditer
ces conditions, aucune extension, aucune propagation une partition que si elle est arrangée pour harmonie
ne peuvent avoir lieu. et pour fanfare. Ce sont des commerçants, et non pas
Pour obtenir la réalisation de la première condi- des artistes. On ne peut leur en vouloir. D'autres ne
tion ci-dessus énoncée (unité de composition instru- consentent à graver une œuvre pour harmonie seule
mentale des groupes musicaux), je ne vois guère que que si les frais d'édition en sont ou en peuvent être
fir?i,i)TE.
HAi;TBOiS.
p'.'clarinetie.
CbARIMETTES.
PISTONS Sii.
TR0!I1>ETTES Mil.. 15
ALTOS.
BAiVYTONS.
TtlOMBONES.
BASSE.
C. BASSE M.b. ta
V^.BaSSE Sib. „
iJir/fo Appiissiontte de Beethoven Irajiscrit pour tiaroionie par L. Gburu. N" 251 de l'édition Gaotrot aîné.
TECHNIQUE, ESTHÉTIQUE ET PÉDAGOGIE DE L'ORCHESTRATION MILITAIRE 2201
couveris par un comité d'orpanisalion de concours journal de musique militaire fTin IS4.'5 ou commen-
musical; enlin trois ou quatre éditeurs, tout au plus, cement de 184'f). Ce journal, ou plus exactement ces
en Fiance, consentent à graver à leurs irais, sans partitions, étaient écrites par les chefs de musiques
restriction, les orchestrations pour harmonie seule; militaires, et le remboursement des frais d'édition
mais encore faut-il que ces orchestrations puissent était assuré à l'éditeur par l'abonnement souscrit par
être exécutées « sans vides » par les harmonies du toutes les musiques de l'armée. C'est là encoie une
type de 1860. raison de plus de regretter que les musiques mili-
Tant qu'il n'y aura pas d'unité dans la composition taires, qui étaient et devraient toujours être le meil-
instrumentale des grandes harmonies, on ne saurait leur élément de progrès des musiques populaires en
rien demander de plus aux éditeurs; c'est donc celle France, aient non seulement cessé de progresser,
unité qu'il faudrait réaliser tout d'abord... et ensuite? mais soient retournées par l'abaissement du rang
Ensuite, on ne trouvera pas d'éditeurs tant que les des musiciens militaires, par la diminution de leur
harmonies modernes ne seront pas en nombre sulli- ell'eclif, par la suppression des musiciens de carrière,
sant pour assurer une vente assez importante pour par le lenifis de service de plus en plus court, par
couvrir les frais d'édition, plus le bénéfice légitime beaucoup d'autres raisons trop longues à énumérer
de l'éditeur-commerçanl. ici, à un étal très inférieur à ce qu'elles étaient de-
P^''FLÎJT1S.
HAUTBOIS.
P^''CLaR!METTE
l'?««CLARINETTES
SOPRANO.
ALTO.
TENOR.
00 BARYTON.
TROMPETTES M.>. 10
1*.''8?PIST0NS Sil>
CORS Mib.
P^BUGLE Mit».
BUGLES Sit>.
ALTOS Mit». I
BARYTONS Sib. i?
««.'«* 5«.TR0MB0NES."
BASSE 8it>.
C. BASSE Hil>
c Basse sib.
, BATTERIE.
mêmes besoins et des intérêts identiques. Je me soprano et les altos sont désignés saxhorns ténors».
((
garde bien de dire que l'enteiite des sociétés civiles Dans la ti'auscription d'une scène du Comte Ory de
est impossible, je dis seulement qu'elle est assez RossiNi par L. Girard (p. 2198), d'une ou deux années
difficile k obtenir, mais je veux croire, dans leur plus récente, les sarrusophones ne figurent pas,
intérêt comme dans celui des concerts populaires, mais nous trouvons la famille des saxophones ins-
qu'elle finira par se faire, qu'elle se fei'a certainement tallée; les saxhorns altos y sont encore qualifiés
d'une manière ou d'une autre, parce qu'elle est téyiors.
indii^pensalde à la marche du pioi;ri'S, qui ne saurait Ici le u° 945 n'est pas de la même série et est sen-
être retenu bienlongtemps sur place dans l'enlise- siblement de la même époque. Seule remarque à
ment d'une simple question d'édition. faire la petite clarinelle tient la place de la grande
:
Pelile FLUTE. »
Pflile CLARINETTE. %
CLARIFETTE Soloel
ïè™ CLARIÎ^ETTE.
9V" CLARINETTE, i
HAUTBOIS. B
BASSONS. 6
'
PISTONS Si I. 1
CLAIRONS Si l!. 8
CORS Lab 10
^
CORS
^
F.1 Piston». 11
H
mHh^^_il^ rt^ m ^m
^^ m ^m ^ ^m ^m
TROMBONNES.
>. . /
J^^ .i
OPHICLÉIDE el4 CjliDdres, 15
G. BASSE. u
Batterie.. 15
Pag-Type composé pour «es élèves sur les deux molifs donnés en 1851 par M. Cakafa, par J. Viallon. N» 326,
Édition T. B. (Boffbt-Crampom [EvutteJJ.
. . ..
l^foi..
Pf Tlûle en RÉ b
Pf Clarinette oiMl b.
r.'ClarinetteenSI b;,
2?Clarmetlecn Sib.
lYetZ*" Haultois
Saxophone Sop?en SI b.
Saxophone Teoor en SI b
SaooophoneBaryton enMib
2 Cornets i PUtons en SI b
3?et 4'TrcJinpette6 en MI b.
iVelZ'TromljoneB.
3?el 4* Tromhones
SaxhoxmSopranoen^ab.
&ixhorniCflratr3lto enSl b.
Saxhorns Alto en MI b.
SaxhoinsBasse en âl b.
Tambours
C'Clatire et C^ Roulanle.
Grosse Caisse
Cymljales et Triangles
l^fols
Retraite composée et dédiée au l" Régiment de Grenadiers de la Garde Impériale par Léon Maonikr.
Album de Crimée. N" 5. S.ix éditeur.
220'i ENCYCLOPÉDIE DE LA MUSIQUE ET DICTIO.ViVAIRE DU CONSEKVATQIHE
Hûtes.
2''!*fi''." ClariuBtteil
enSIb.
'
Soptano.
-1
Ténor.
m
'>Baii<e.
SaxTxomljas
enMIb.
2'' Cors.
l-et
Bsrytoin
enSIt».
Cornets à Pistons
cnSIb.
Tro-mp elles
en TA.
V.et 2î TroTiibonflS
3^ Trombone.
4 Cylindres.
Contre Basse
enMIb-
l'.'Conlre-BaSâe
enSLb.
2''.'Contre.BaSSe
en SI b grave.
Caisse claire.
Crosse Caisse
et CymbalïS
Marche du Taimhimser Aa K. Wal.mîb, par Ad. Sisli-emi;, olu'f di; musique du 2' Régiment de Volligcurs
de la Garde Impériale. Édileur Dcrxnd, Schœsemebk et C».
TECHNIQUE, ESTHÉTfÇVE ET PÉDAGOGIE DE L'ORCHESTRATION MILITAIRE 2205
relégués entre les baiytons et les basses. Crimée de Léon Magnier (18.'i4-18oo), a tout à fait la
Voilà (p. 2201) une pailition écrite directement disposition instrumentale moderne, sauf en ce que
pour harmonie, où il y a lieu de remarquer que les les hautbois sont placés entre les clarinetles et les
bugles ont des parties d'accompagnement écrites aii- saxophones au lieu d'être placés entre les Uûles et
dessits des parties de cornet qui ont le chant, et la petite clarinette.
tiennent le rôle de deuxirrae clarinette qui, elles, Pour terminer cette période préparatoire aux par-
jouent avec les premières. titionsmodernes, je place [p. 2204) cette curieuse
Ici (p. 2202), nous avons une partition écrite à partition de Ad. Sellenik,où les saxhorns sont placés
l'effet de servir de modèle de composition pour les en dessus des cornets, trompettes et tromliones. A
élèves du Gymnase musical militaire en ISiil, et où remarquer que les trompelles sont écrites une octave
les hautbois et bassons sont placés entre les clari- plus haut que la coutume de tous les autres compo-
nettes et les cornets (il n'y a pas encore de saxo- siteurs ou orchestrateurs.
l'KTlTK KI.ITK..,
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220(1 ENCYCLOPÉDIE DE LA MUSIQUE ET DICTIONNAIRE DU CONSERVATOlIiE
^ iïïïT=:n
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.
La partition du maître transcripleur Krnesl André p. 2206, se montre en avance sur son époque d'édition',
(p. 2203), avec les parties supplémentaires de la et est difjne de ligureren têle des partitions modernes.
Ouverture Gigue.
Allegro Moderato (as^ez retenu.) (J:69)
G^f PlUTE
P'f FLUTE. 2
I"."CJLARINETTES 3
4
CLARINETTES.
HAUTBOIS.
SOPRANO.
ALTO.
TENOR.
BARYTON.
v: 2"^. PISTONS
CORS RE b.Cadlib>14
TROMBONES.
5*:
2?
v* SAX MI \>
18 (^
l!'2':SAX CoulraUos. jy
SAX ALTO . 20
SAX BARYTON. 21
BASSES.
C BASSE Mlb. 23
C. BASSE SU. 24
B.ATTERIÉ . 2?.
Le Romiin d'Arleiiiuii de J. Massenet, par Léon Chic. N» 1601 édition P. Gocm.\s et Ci'' (Evette).
Cette partition, parue cinq années plus tard, montre bien l'orchestration moderne type des [musiques
militaires.
I. Vers 1878.
2208 ENCVl-.I.OPÈniE DE LA MUSIQUE ET DICTIONNAIRE OU CONSERVATOIRE
Grande Flùle
en UT
Petite riule
en RÉ b
Hautbois
en UT
?l' Clarinette
enMIb
Qarinetl*
solo SI )>
r." Clarinette
en SI b
2? Clarinette
ejiSI b
f Soprano
« en SI b
ë Alto en MI b
J<
Ténor en SI b
(0
^. Baryton
\ en. Ml b
Timl>ales
en FA DO
Pistons
en SI b
Trompette
en FA
Cors en FA
Trombones
Petil Bugle
Ml t>
Buoles
enSll»
Altos enMIb
I" Baryton
enSIb
Zt Baiy ton
en SI \> I
Basse Solo
enSlb
Basse enSlb
C^« Basse
enMIb
C^* Basse
en SI b
"
Batterie
Ottverlitre de Guillaume Tellàe Rossinj. Partition inédiitc par M. -A. Soyer d'apri;s la partition d'orchestre
éditée par Léon Grus.
.
Grande Flûte
Petite Flûte.
Hauttois-
Clarineltes
eiv LA
Cors en SOL.
Cors en MI.
Trompettes
«n Ml.
Bassons -
Trombones.
Timbales
en MI.
Cirabales.
Triangles.
Grosse Caisse.
Violons.
Altos.
:i'." Violoncelle
Solo.
2' Violoncelle
Solo.
SlVioloncelle
Solo.
4° Violoncelle
Solo.
SfViolojicelle
Solo.
Basses
rjpiennes.
Ici, nous voyons le cas d'une transcription dont le plione alto au grave. Une claiinelte basse pourrait
solo de violoncelle doit être exécuté par deu.K ins- faire tout le solo, mais le timbre serait plus éloigné
truments soudés l'un à l'autre, faute d'un manque du tim'ire du violoncelle.
d'étendue au saxophone baryton à i'aif^u et au sa.xo-
Copijri(jlil by Librauie Delagrave, I9i7, 139
2210 ESCYCLonÉDIE DU LA MUSIQUE ET DICTIONNAIRE DU CONSEItVATOIliE
2? C" FLUTE en UT Z
HAUTBOIS en UT 3
l'^'CLARlNETTE S I l> 6
2f CLARINETTE S 1
1»
">
2? BASSE Slt 14
C. BASSE WLlt 15
Au
C.
liord
BASSE
lie la
SI l>
Mer, rêverie de
16
Em. Ddnkleu
^
iiour iiimluor à cordes (A. Costaliat
_^
édili'ur), Iranscril ]niur iiuisiqne niililaire
par Henri Soïer (Ad. Foooebay éditeur).
Transciiptioii d'un quatuor à cordes. Tous les cui- par les clarinettes et saxophones ou sanusopliones
vres ont été supprimés, sauf les saxhorns basses et liasses et contrebasses.
contrebasses, qui seraient remplacés avec avantage
La Fidie en Êgijple, Ouvcrlure de II. liERi.mz (Richaci.t éditeur), transcrite puur Musiqur-d'liarmunie par .M. -A. Soïer
(A. FouGEEAï éditeur) :
2 a'^.^GRANDE FLÛTE UT
3 H AUX ROI S UT
, PETITES CLARINETTES
*
Mil,
, :: CLARINETTES SOLI
5 Slt
7 i'If^CLARINETf'iS SI 1,
SA.K0PHONE SOPRANO
**
Slb
.. SAXOPHONE BARV.TON
^^
.Mil»
12 BASSE Sll»
13 CONTREBASSE .M 1 b
14 CONTREBASSE SI l>
TECHNIQUE, ESTHÉTIQUE ET PÉDAGOGIE DE L'ORCHESTRATION MILITAIRE 2211
Modeialo un pocolen(o(J=»»)
r Fini.'.
2'.''-
HmI.'.
Hautbois.
Cor anglais.
m
Vii'Iiiiis.
^"' ii
—
s
*^
Hl m 't nnr
m ^^m^ I I M I
,r'^J^[^
j t},
-, -
Altt-is.
Tempo I
4. GRANDES FLUTES Dt
HAUTBOIS
BA&SONS (ad. Ui )
TROMPETTEi EA^
PETIT BUGLE Mk
W BU OLE Sib
2 ALTOS Mit
2 BARYTONS 3i^
BASSES Slk
C. BASSES Mib.
CAÎiSE ROULANTE - ^ à-
Sjmjihoiiic l'anltisli'iue d'Hector Berlioz, Iraiiscritij p;u' Gabriel Parés (Fernaiid Andriei- et C''^ cdilcurs).
5
hautbois UI 3
Cor anglais FA . .4
Soprano slb. . 10
Altos vab . n
Ténors aib . il
Bsryton Mlb 13
Basson DT .
1S
Trompettes KJij . . 16
Pistons Slb
Batterio 33
Temps (te Guerre de Fernand Liî Borne, transcrit et édité par R. Cn.iNDON te Buiailles.
I
HISTOIRE DE L'ORCHESTRATION
Par MM. Gabriel PIERNÉ
MEMBRE Dr l/lNSTITTT, (:H1:F n'ORCHIiSTRI". m'.S COSCKRTS COLONNE
et Henry WOOLLETT
COMPOSITEUR ET CRMlQriî MrslCAÏ,, r-AI-BKAT IiK l'iNSTUTT
Première partie.
Le mot quidésisiie aujourd'hui la réunion concer- la chanson qu'il improvise sur un llageolet.
tante d'un certain nombre d'instruments de musique Chez les Grecs, plus individualistes que les Egyp-
vient du grec. Mais cliez les anciens ce lerme ne si- tiens, et plusexclusivement soucieux do la beauté
gnifiait pas, comme cliez nous, le groupement des des lignes, les instruments durent se perfectionner
musiciens. L'orcliestre, c'était la partie du théâtre, en vue de mélodies plus parfaites, mais aussi dimi-
en forme de demi-lune, comprise entre la scène et nuer comme nombre etoomme intensité pittoresque :
les gradins des spectateurs, où les cliu'urs, accompa- la trompette, la cithare, la flùle et la lyre suffirent
gnés de flûtes et de citliares, évoluaient autour de à leurs besoins. S'ils aimèrent les cliœurs, ils ne con-
l'autel de Dionysos. liaient aux diverses voix, semble-1-il, que des dessins
Vers l'époque de la Renaissance, dit RiEMANNdans mélodiques parallèles, et l'on pourrait gager que leurs
son Diclionnaire de musique, lors des tentatives de ensembles instrumentaux durent se borner, eux
reconstitution de la tragédie antique, tentatives qui aussi, à des mouvements semblables, moins poly-
aboutirent cà la création de l'opéra, le terme d'o)- phoniques, moins touffus, moins richement colorés
chestre passa en premier lieu à l'espace qu'occupeni que ceux des Asiatiques ou des riverains du Nil.
les instrumentistes accompagnateurs, entre la scène Mais ce sont ici de simples conjectures. Nous devi-
et le public, puis au groupe des instrumentistes eux- nons vaguement quelques mélodies des anciens par
mêmes. une solniisation pleine d'imprécisions et de lacunes;
Si l'orchestre grec fut, de la sorte, l'aïeul et le par- nous connaissons leurs instruments grâce aux des-
rain du nôtre, c'est un ancêtre dont nous savons fort criptions de leurs historiens et de leurs poéte^, aux
peu de chose. Nous possédons cependant sur la mu- représentations de leurs sculpteurs et de leurs pein-
sique dans l'antiquité des renseignements iconogra- tres. Nous ne savons rien de leur instrumentation
phiques et littéraires nombreux, quelques-uns plus proprement dite, puisque, nulle pari, on n'a trouvé
vénérables même que ceux de l'ilellade. Les Egyp- la notation des chants simultanés qu'ils purent con-
tiens, par exemple, ce peuple dont le pinceau et le (ler à leurs citharistes, à leurs tibiciniens, à leurs
burin furent si bavards, ont représenté, sur leurs mo- linccinateurs; puisque rien d'eux n'est venu jusqu'à
numents, leurs sarcophages et leurs papyrus, maintes nous qui ressemble le moins du monde à une parti-
réunions musicales. Ici, ce sont des flûtistes et des lion musicale.
harpistes jouant côte à côte, tandis que deux hommes, Cette ignorance où nous demeurons au sujet de
accroupis comme eux, leur marquent la mesure en l'orchestration dans les temps antiques n'est guère
battant des mains. Là, c'est la caricalure célèbre moindre en ce qui concerne les périodes romane et
d'un concert d'animaux un âne jouant de la harpe
:
,
gothique. Ici encore, les docnmenis peints et les des
un lion de la lyre, un crocodile du lambourah et un criptions des écrivains abondent sur les ensembles
singe de la tlùte double. musicaux du x' au xv" siècle. Mais ces groupes con-
Les documents de cette nature abondent en Kgypte ; certants,munis d'agents sonores de toutes natures,
il fallait s'y attendre. Un empire, dont la vie publique que nous voyons sculptés aux tympans et aux cha-
et l'administiation furent si fortement organisées, ne pitaux des églises ou finement enluminés sur les
pouvait manquer de tenter tous les groupements, pages des vieux manuscrits, ne nous apprennent
les groupements musicaux comme les autres. C'est qu'une chose avec certitude le grand nombre et
:
2210 ËNCVr.l.OPKniE PE LA MVSIQUE ET DICTlOXNMIiE DU CONSEnVATOÏIiE
l'exlrCmo diveisité di's insliuiiifiiitsile musique pen- M. l.Avoix énumère dans son savant ouvrage, démon
d;uil le moyeu apte. trent combien le goiH de la musique instrumentale
Avec ses dofimes venus lie rOrient, lecliiislianisme et lies ensembles orchestraux s'était répandu vers la
a ramené le ^joiU des peuples vers l'exaltalion senti- lin du moyen âge. Il y avait, d'ailleurs, plusieurs
mentale, vers des formes d'art mulliples et toullues, siècles déjà que la musique i-eligieuse utilisait non
et nous allons retrouver dans l'Iùirope médiévale nn seulement les ressources de l'orgue pour' accompa-
arsenal de sonnriti's plus considérable même (\w gner les voix, mais encore celles des cithares et des
celui de l'K^'ypIe ou de l'Assyrie. violes. Avec les mystéi'es, ces inslnimints s'étaient
Aux nombreux instrumenis à cordes pincées déri- introduits dans la cathédrale, et quand l'oraloiio,
vés de la lyre et de la citbare antiriues, à la petile sortant de l'église, s'installa sur la place voisine,
harpe lra|uie des bardes, moins éléyante, mais plus le nombre des accompagnateurs ne fit que croître
maniable que la mai:adis hellénique, sont venus s'a- pronrptement.
jouler les insirumenis à archet ou à l'roltement con- Un des plus anciens drames sacrés dont le chant
linn, le cvowlh, sorle de violon celtique, et VonjU- noté soit parvenu jusqu'à nous, le D'iniel Liuhis, exé-
iiistruin ou vielle à roue, tous deux d'origine septen- cuté pour la première fois vei'S 1230, se jouait aux
trionale; et si les croisades n'ont pas développé, sons de nombreux instruments. Le manuscrit de Beau-
autani ([u'oii le prétendait naguère, le goiit musical vais, air jour d'hui à Padoue, donne à cet égard des
des seigneuis féodaux, elles iniroduisirent du moins indications certaines. " Tout urr orchestre, écrit
chez eux plusieurs instrumenis de cuivre. Ainsi, M. Choiquet, dans l'ouvrage cité plus haut, accom-
d'année en année, la complexité des orchestres va pagnait certaines parties du drame de Daniel. Ce
s'accentuani comme celle des cathédrales et, vers le n'était plus seulement l'orgue (|ui soutenait la voix
XV siècle, la multiplicité des moyens expressifs mis des chanteurs, mais une famille entière d'instru-
en œuvre dans les concerts ne le cède aucunement à ments à cordes. IVous pensons même que, dans le
l'exubérance de l'aichiteclure religieuse. condiiclus, les parties harmoniques étaient confiées
11 faut lire, dans Histoire de la musique ilrnmatiqiie
\' aux instr'umentistes, car nous n'admettons pas qu'au
de M. (iusiave (".houquet, l'éiiuniération des inslru- XI-.'" siècle les déchanteurs fussent assez habiles pour
raents dont se sert à cette époque « la Confrérie des improviser une basse et une partie de second ténor
Ménestrels, joueurs d'instruments tant hauts que sur un chant noté, su: tout en marchant procession-
bas ». Instruments à vent orguelte ou orgue porta-
; nellement et en chantant en chœur. »
tif, régale ou orgue positif, cors et tromiieltes désignés La plupart des auteurs qui se sont occupés de la
sous vingt noms diti'érenis suivant leurs variétés de musique au moyen âge supposent néanmoins que
forme, fifres et /h'ites de toutes sortes, hautbois, cro- ces orchestres n'arrivaient à produire qu'une sono-
mornes, zarcomures, vèzes et loures. Instruments à rité barbare et grossière. Une telle opinion parait
corde croivl, rote, viéle à archet, d'où naîtront la
: injuste et peu fondée. Sans doute, la polyphonie
viole et l'alto, ruLièbe et rebec, dont les perfectionne- orchestrale ne devait ressembler que de tort loin à
ments donneront le violon moderne, luth et arclii- ce qu'elle est devenue depuis, à la suite des progrés
liith, parents de la mandore, de la mandoline et du réalisés parla polyphonie vocale de l'école flamande,
théorbe, guitare, cisire, cithare, harpe, clavicorde, etc. et, désormais, nous serions quelque peu choqués de
La famille des instruments à percussion est dix fois la marche parallèle que les instruments imitant le
plus riche alors qu'aujourd'hui, c'est un déborde- dcchunt des voix, ou diaphonie, devaient suivre à des
ment de tambours, de sonnailles et de castagnettes; intervalles de quarte ou de quinte. Il est probable
et l'on compte encore par douzaines d'autres instru- que, le plus souvent, le rAle des accompagnateurs
ments mal définis, dont le nom ou l'image sont par- consistait à suivre rigoureusement les parties vocales
venus jusqu'à nous. et à remplacer même celles de ces parties qui ve-
11 est certain qu'une telle pléthore d'engins musi- naient à manquer. Mais il n'y a là qu'une simplicité
caux devait bien moins servir à des solistes qu'à des un peu fruste et non point l'anarchie cacophonique
exécutions d'ensemble. C'est ce que montrent, en dont on parle avec trop de dédain.
effet, les enluminures dont nous parlions tout à 11 ne faudrait pas se hâter, quand il s'agit de leur
l'heure. Bals ou tournois, offices religieux ou céré- orchestration, de commettre à l'égard des gothiques
monies civiles, peu importe ce que repiésentent ces la même injustice que l'on commit autrefois vis-à-
peintures consciencieuses partout, nous y voyons
;
vis de leur architecture et de leurs mélodies. On s'est
même abondance de musiciens gonflant, grattant, aperçu, tour à tour, combien leurs admirables cons-
pinçant ou frappant à qui mieux mieux leurs innom- tructions furent parfaitement logiques dans leur
brables appareils sonores. « Pour les imagiers et les fouillis apparent, et les recherches des Bénédictins
miniaturistes, écrit Lavoix, dans son llistoired'' l'inf- nous ont fait connaître, les premières, à quel point le
irtcmentalion, la cour du Hoi des rois, dans laquelle chant liturgique du moyen âge fut délicat, élégant et
ils cherchaient à réaliser leur idéal de magnilicence tendre. Comment pourriorrs-nous supposer qu'à une
et de splendeur, possédait un nombre d'instruments époque si soucieuse des expressions artistiques ar-
prodigieux et par la quantité et par la variété. » dentes et profondes, l'armée d'instruments que nous
De leur côté, les docuraenis écrits ne sont pas citons plus haut n'aurait servi qu'à produire un
moins explicites. Au xii" siècle, par exemple, le cu- vain bruit, sans coloris expressif, sans résultats dé-
rieux Dictionnaire de Jean de (îarlande rapporte ce terminés, sans nul profit de pittoresque ou de beauté
qui suit « Dans les maisons riches, j'ai vu des joueurs
: pour les mystères, les jeux et les cér'émonies du
de lyre et de flûte, j'ai vu des vièleurs avec leurs culte. L'orgue, très perfectionné déjà dès le xi" et le
vièles, d'autres musiciens avaient un sistre, une xii= siècle, donnait aux musiciens un moyen trop
gigue, un psaltérion, unechironie,nne citole, un tam- facile d'étudier les effets d'une polyphonie instru-
bour et des cymbales, j'ai vu aussi des courtisans et mentale et, d'autre part, les progrés de la notation
des danseuses qui jouaient avec des serpents... » lît musicale permettaient d'écrire chaque partie d'une
les listes des musiques particulières de princes, que façon trop précise, pour qu'on n'ait pas réglé parfai-
TECHNIQUE, ESTHÉTIQUE ET PÉDAGOGIE HISTOIRE DE L'ORCHESTRATION 2217
tement l'orchesiralion de diverses pleines |iopiilaires, au Louvre, en 1904, il suffisait de comparer avec les
comme leDaniel Lndus. le .Juif vole on la Complainte peintures antérieures f|ui l'avoisinaienl , certaine
des triiis Marie Kl quand nous voyons dans Vllixtoire tapisserie du temps de Charles IX repiésentant la
d'Adam, par exemple, trois orchestres dilTéreiils, mascarade de .Médicis aux am-
offerte par Catherine
l'orgue régale pour le ciel, les violes et les cithares, bassadeurs « polacres » ou polonais, venus en Krance
les Ihltes et les tronipettes pour la terre, enfin les au-devant du duc il'.\u|ou, pour comprendre quel
instriimenls à percussion sinistres ou bizarres, pour abime sépare, au point de vue artistique, ces deux
les triples ti'éteaux des mys-
s'échelonner sur grandes périodes le mo\en âge et la Uenaissance,
:
l'enfer,
nous ne pouvons croire que, dans cel
tères forains, et comment sceptre de l'art venait de passer des
le
arrangement, qui fait penser à la fois au Requiem mains françaises aux mains italiennes.
de lÎEBLioz et à ParsifaI, il n'y ait pas eu quelque La musique, naturellement, suivit la même évolu-
rechrrche, enfantine peut-être, mais très précise et tion, et quand, l'orchestration toulftie et piobable-
;i
très nettemeni réaliséi-, de ce coloris musical et de ment assez fantaisiste des gothiques, succéda la ré-
ce pittoresque expressif que les Grecs ignoraient el serve, pour ne pas dire la timidité un peu monotone
dont les Celti-s furent toujours férus. des nouveaux compositeurs, il n'est pas étrange que
Nous parlions tout à l'heure de Brrlioz. Toute l'Italie envoyât ses musiciens régenter le monde,
question d'époque mise à part, il dut y avoir proba- comme elle y envoyait ses peintres, après avoii- elle-
blemenl, chez les instrumentistes du moyen âge, celte même appris la lechnique des deux arts près des
recherche piédoniinaiite des eli'ets de timbre sur les Flamands méticuleux et chercheurs.
effets d'harmonie qui caractérise le génie très fran- Ainsi la polyphonie orchestrale devait se dilfuser
çais du musicien de la Damnation. chez les Germains et chez nous, romanisés par les
Mais, encore une fois, c'est ici le terrain des pures Latins subtils, alors qu'elle dérivait réellement et
hypothèses, et nous ne devons pas nous montrer plus exclusivement de la polyphonie vocale, née sur un sol
téméraires que d'autres, fOlt-ce dans un sens oppose. celtique.
Malheureusement, aucune trace péremptoire de l'or- Nous ne possédons pas les parties d'orchestre du .
chestration médiévale n'est venue jusqu'à nous, elles Liidus Dianœ, qui date de IJiOl, ni du Ballet des Po-
compositions dramatiques de celte époque dont lacres,œuvre de Holand de Lassus. La plus ancienne
nous connaissons parfaitement la mélodie, comme pièce dont nous connaissions l'accompagnement ins-
le Daniel ou comme le délicieux et agreste Jeu de trumental est le Ballet comique de la Beine 11 fut
Robin et de Marion du trouvère Adam de la Halle, représenté à la cour' de France le lo octobre liiSl, à
ne nous ont pas livré, parla moindre ligne d'accom- l'occasion du mariage du duc de Joyeuse avec Made-
pagnement, le secret de leur instrumentation. Nous moiselle de Vaudemont, sœur de la reirre Louise de
ne le connaîtrons probablement jamais, puisque c'est Lorraine. Lt nous ne devons pas nous étormer qu'à
au XVI» siècle seulement que nous trouvons enfin gra- cette date, l'idée première, l'or^donnance et la musi-
vées des parties d'instruments concertants, et que que du curieux spectacle fussent l'œuvre d'irrr Italien,
nous pouvons reconstituer leuis ensembles, alors le sieur Baltasari.ni, plus connu sous le surnom de
des représentations religieuses, les spectacles pro- des scènes formant tableau s'y enchaînent les unes
fanes, pantomimes ou ballets masqués, entrèrent aux autres, el un ballet, puisque les principaux épi-
peu à peu dans les habitudes des cours et des riches sodes de sa fable dramatique amènent des danses et
demeures. L'une des plus curieuses « mùnieries » de des mascarades. »
Il ne nous appartient pas d'analyser ici le sujet du
ce genre est devenue célèbre dans l'histoire sous le
nom de Bal des Ardents; elle remonte aux dernières Ballet comique, où évoluent, suivant la mode de l'é-
années du xiv' siècle. C'est la soirée où Charles VI poque, maints personnages contemporains mêlés au
et cinq de ses seigneurs, déguisés en hommes sau- balaillon mythologique, Circé, nymphes, Mercure,
vages et revêtus d'étoupe, prirent feu par l'impru- .Minerve et Jupiter, dont on devait faire un si grand
dence d'un valet du duc d'Orléans qui, pour satisfaire abus pendant près de trois siècles, en atlendarrl que
à la curiosité de son maître, les éclaira de trop près la grosse caisse irrévérencierrse d'OpFENRACH ache-
avec une torqhe. Dans cette fatale mascarade, la mu- vât de discréditer tout l'Olympe, el que les tubenda
sique jouait certainement un rôle, car la miniature Walhall vinssent le remplacer. Nous sortirions même
du manuscrit de l'roissart qui se trouve à la Bihlio- de notre sujet si nous voulions étudier la partition
thèque nationale et qui représente l'accident, nous au point de vue de ses lignes mélodiques, souvent
montre des instrumentistes dans une tribune. L'un intéressantes, ou de sa contexture harmonique, mé-
d'eux porte une espèce de hautbois, tandis que son lange de correction élégante, de radotages insipides
voisin alarmé brandit une trompette. et d'audaces inconscientes. Ce qui nous intéresse
dante que celle des siècles précédents, mais d'une musique, différents uns des autres. Une grotte
les
ligne plus précise et d'un tour plus raffiné. bocagère, sur laquelle trônait Pan, prêt à jouer de la
Lorsque l'exposition des Primitifs français eut lieu llCite, cachait un autre concert d'orgues douces. "Ils
221s ENCYCLOPEDIE DE LA MUSIQUE ET DICTIONNAIRE DU CONSERVATOIRE
purent ainsi, dil encore M. CnnrcinKT, faiie entemlre nous sont parvenues (car à cette époque on n'impri-
des voix répercnssives », (l'harmonieux échos, dont
II mait pas encore sur une seule page les mélodies super-
\c délicieux chieur de Lkisring, o Filii, souvent chanté posées d'un chœur ou d'un accompagnement), et que
au Conservatoire, nous donne une idée avanta- nous nous reportions aux définitions de notre avant-
;^euse. » propos, voici comment se caractériseraient les deux
Il y avait là incontestablement une recherche de éléments symplioniques du Ballet de lu lieine :
pittoresque, disons mieux, un souci de « l'efTet >, qui Pour l'orchestration proprement dite, répartition
dénoie assez l'intervention du goût italien, pompeux rigoureuse des parties instrumentales parallèlement
et roublard. Mais il ne l'audiait pas en conclure aver aux parties vocales sur lesquelles elles étaient sim-
Irop d'eiilhoiisiasme à la hcnulr de ces accompagne- plement calquées;
ments, plus compliqués que riches. Pour l'instrumentation, emploi des groupes de
Si nous examinions de près la partition de cette chai]ue timbre successivement et non simultané-
oi'uvre, reconstituée d'après les parties séparées qui ment :
1"VI0L0N
Superius f^i' rr»r rT^D rp r Jf pff
J,j^^
2f VIOLON
2* Superius
i^^ fil 0-0-
i^ ^^ ^^
3! VIOLON
Contra ^ î
'
r î rr ^ JJ »J J'^
ALTO
Ténor
^^ f^ * =s i ^^ T=F
—
Tt—à sf
BASSUS i^^ P ^ .\ \^ ,\
.
1
^
effet, dans cette partition, nous voyons,
Partout, en Italiens n'était en somme que la copie, jusqu'en ses
comme dans l'exemple ci-dessus, les cinq parties artifices de contrepoint, de la musique vocale, dont
dont se composait alors tout ensemble vocal repro- ils avaiejit appris en Elandie les premiers secrets.
duites textuellement par cinq parties instrumentale?. D'autre part, cette habitude d'iiarmonies pseudo-
Si les instruments accompagnateurs sont des violes, vocales à cinq parties ne permettait pas les mélanges
les premiers superius, les seconds sh/j^j'ius, les contra de timbres. A peine si l'on osa, dès lors, faire doubler
(premiers, seconds et troisièmes violons), les ténor par une flûte et, un peu plus tard, par un hautbois
(altos) et les bassus (basses) suivent pas à pas res- les premiers superius. Quand on employait des trom-
pectivement les parties de premiers et de deuxièmes pettes, on écrivait à cinq parties pour elles comme
sopranos, de contraltos, de ténors et de basses. Et la pour les violes; quand on employait des trombones,
même division se produit dans les autres familles c'étaient des quintettes de trombones, sans que ceux-ci
instrumentales, quand l'auteur substitue leur ac- se mêlassent aux violons, ni les violons aux trom-
compagnement à celui des cordes. Ainsi, l'orchestre pettes. Tout au plus, dans certains cas particuliers
n'enrichit en aucune Façon le chœur des voix hu- où l'on voulait produire beaucoup de 6r((i<, faisait-on
maines, il le double simplement. Et ce ne sera que marcher les divers groupes ensemble, mais toujours
beaucoup plus tard qu'on osera confier aux accom- parallèlement les uns aux autres. Dans le Ballet de
pagnateurs des dessins individuels et véritablement la Reine, par exemple, nous voyons exceptionnelle-
quintuples, qui se maintiendront à travers tout le vertus dont deux jouant du luth; entrée de Minerve
xvu' siècle, jusqu'à ce que Corelli, au début du avec instruments très doux, chant avec trompettes ou
xvui', instaure la polyphonie instrumentale à quatre chant avec orgues douces.
voix, que les chefs-d'œuvre d'H.\ENDEL et de Bach A côté de ces divertissements de cour et des grands
fixeront définitivement dans nos habitudes musicales. chœurs d'église, la musique de chambre commençait
Ainsi, nous le disions plus haut, l'orchestration des à entrer aussi dans les mœurs. En 1570, Charles IX
TECHNIQUE, ESTHÉTIQUE ET PÉDAGOGIE HISTOIRE DE L'ORCHESTRATION 221!»
avait accoidé à Jean-Antoine de Haif et à Joacliim- ceau à açcoiiiiiagner ou a exécuter, ils s'ingénièrenl
Thibaiitile Courville le privilège de fonder une aca- à qui mieux mieux pour improviser soit un élégant
démie de poésie et de musique. Et, tandis que les fleurtis, soit un accompagnement figuré. La chose
membres de la Pléiade organisaient des l'êtes comme en vint à ce point qii'Agoslino Agazzari écrivait au
celle dont nous venons de parler, on entendait chez xvii' siècle : « placer et classer toutes les
S'il fallait
Baïf des œuvres légères, toujours dans le goût ita- œuvres qui dans une seule église de
se ohanlenl
lien madrigaux, ricercari, canzoni et cnnzonette da
: Rome où on fait profession de concerter, on n'au-
suonare et da caniare. Le principe orchestral de ces rait pas assez de la bibliolhèque d'un légiste. »
petites pièces était le même que celui des ballets : Dans la musique vocale, cet amour de l'ornemen-
répartition harmonique absolument conl'orme aux tation allait se poursuivre en Italie presque jusqu'à
parties du clianl. Ce système facilitait la tâche des nos jours. La justesse de l'accent poétique et la re-
compositeurs et, de plus, olfrait aux amateurs dési- cherche de lignes pures, qui, durant tout le x\i° siècle,
reux de prendre part à l'exécution vocale l'avantage avaient prédominé dans les chants, firent bientôt
de guider chacun d'eux pour sa partie, les premiers place à la monodie vocale ornée jusqu'à l'outrance
sopranos n'ayant qu'à suivre les notes que leui' fai- et pathétique jusqu'à l'emphase. Kt si LuLi.i, Hameau et
sait le premier superius les deuxièmes sopranos
,
Gluck, sous l'influence du génie français fait de me-
celles des deuxièmes superius, el ainsi de suite. sure et d'éléganle sobriété, résistèrent à celte mode
Tout cela était un peu rudimentaire sans doute, du chant passionné, les compositeurs ultramonlains,
mais cependant le goût orchestral progressait par voire trop souvent le divin Mozart, l'adoptèrent et
l'usage même que l'on faisait des instruments, si le transmirent jusqu'à son épanouissement suprême
que M"" de Limeuil se fit v sonner aux violons » interruption les parties instrumentales el vocales.
pour s'encourager à la mort. Fétis l'a fait observer très justement, il ne faut pas
Au lemple, on accompagnait à l'orchestre les psau- confondre la basse chiffrée avec la basse continue.
mes de Marot; et si l'Eglise catholique inlerdisait Les chilTres, sorte de résumé de la partition, permet-
quelquefois, pour les chants religieux, l'intervention taient à ceux qui lisaient ou exécutaient la basse
des instruments autres que l'orgue, elle les autorisait continue d'avoir d'un seul coup d'œil l'enchaînement
à d'autres moments, suivant la tournure d'esprit de des accords - la basse proprement dite, qui s'écri-
;
de prnviiicc, est le siirvivanl ten:icc do eette vieille cère des générations précédentes.
liadilioM. fut-il, suivant les théories de 'l'aine, le produit
Au point do vue de l'iiarinonie, l'inventinn de la d'un milieu et d'un tournant d'histoire favorables'.'
basse conlimio fixait le seiilinient de la tonalité. Le ou liien son génie lui permit-il de pressentir et de
senliment tonal, dont l'invention de Viadana n'était réaliser presque l'intime union de la poésie et de la
que la ci)nsé(]nence naturelle, avait pour origine les musique, sans sacrifice de l'une ni de l'autre, union
travaux des musiciens au xv» et au xvi» siècle. " On que (ii.ucK et Wagne^^u devaient immortaliser plus
sentait que c'était là, dit encore M. Lavnix, le prin- lanf? Il est probable que ces deux causes extrinsèque
cipe et la liase de toute la science hainioniqne de et intrinsèque se comliinèrent chez Claude Montevf.bdi
l'avenir... Au-dessus de la basse continue, les instru- pour produire le magnilique résultat que l'on va
ments raélanjjeaient leurs timbres; elle, elle persis- voir. Disposant d'un riche orchestre, au moment où
tait sans repos ni trêve <i marquer les notes princi- les exécutants élaient devenus relativement très
pales (lu ton. Les résultats de l'invention nouvelle habiles, où l'on avait élagué déjà quel(|ues accents
ne tardèrent pas à se faire sentir. C'est à dater de ce sonores encombrants, sans renoncer aux timbres
moment que commence l'accompagnement, c'est- pittoresques ', où l'on avait trouvé le moyen de cons-
à-dire de soutenir les voix [lar des dessins
l'art truire solidement les ensembles symplioniques grâce
rytlimique<i et liarmoniques appropriés à la mélodie à la basse continue, sans répudier délinilivement,
et indépendants de la lisne vocale; c'est aussi à la au profit de la voix, l'élégante fantaisie instrumen-
même date qu'il faut rattacher la première période tale du contrepoint alla mente, il réalisa ce chef-
de l'instiumentation moderne. » Kt, un peu plus d'œuvre, VOrfeo.
loin, le même auteui- ajoute: o C'est à l'époque de MoNTEvERDi naquit en lri07, et mourut en 164^. 11
l'invention de celte basse qu'on peut lapporlei' l'o- ne nous reste de son lenvre qu'une scène dramatique
riijinedes deux écoles instrunienlales, italienne et itililulée Le Couronnement île l'oppcc, un splendide
allemande, qui se partagèrent pendant tant d'années lamento île l'Arianna, daté de 1 608, et quelques frag-
l'empire de la musique l'une donna naissance à ; ments remarquables du ballet des /Jojoie ingrate, fort
l'orchestre dramatique, l'autre à l'orchestre synipho- heureusement, VOrfeo nous est parvenu tout entier,
nique. » avec son orchestration complète. Il parut en 1607,
Mais si l'invention de la basse continue, jointe très peu d'années, par conséquent, après le traité de
aux conquêtes libératrices de Valla mente, on aurait basse continue de Viadana. Ouvrage admirable au
tort de l'oublier, permettait le développement de point de vue de l'expression mélodique, et rempli de
l'instrumentation, elle risquait en même temps de trouvailles harmoniques riches et nouvelles, ce drame
l'étioler. C'était une arme à double tranchant, un lyrique nous intéresse surtout ici par son orcheslra-
peu le sabre de M. Prud'homme. tion, et c'est peut-être aussi par ce ciMé que se révè-
Les Italiens prisaient avant tout la voix liiiinnine. lent avec le plus d'éclat les tlons extraordinaires de
On sait jusqu'où cet amour les entraîna et, naturel- ; MoNfKVEIlDI.
lement, ils estimèrent que l'accompagnement avait Lorsque l'on veut apprécier à sa valeur le génie
peu de valeur et que cet accessoire ne saurait être d'un grand artiste du passé, ce n'est point d'ordi-
trop modeste, trop effacé. La basse continue leur naire la simple étude de ses productions qui peut en
offrait à ce point de vue des avanlages merveilleux. donner une juste idée, mais plutôt la comparaison
Bientôt, ils en arrivèrent à ne se servir, pour ainsi avec ce qui le précède et souvent avec ce qui le suit
dire, que d'elle, avec un quatuor discret. Kt dans immédiatement. A cet égard, un simple coup d'œil
toute l'école italienne, l'orchestration étouffée par la jeté sur le passage précédemment cité du ballet de
virtuosité vocale va demeurer sans intérêt pour nous Baltasarini, qui date, nous l'avons dit, de 15S1, puis
pendant de longues années. avec le passage du San Ales.iio, qui date de 163't et
que l'on trouvera plus loin, comparés aux cinq frag-
ments qui suivent, empruntés à VOrfeo, suflil pour
Monleverili (1 567.1 643). convaincre de quelles trouvailles étonnantes, de
quflles inventions, de quelle audace Montevrbdi
Mais, avant que s'accomplisse cette fâcheuse évolu- était capable.
tion, entre l'expression symphonique, un peu sèche, A
vrai dire, il ne monire pas ilans toutes les par-
et tout d'un bloc de la Uenaissance, et l'élégance ties de son œuvre ce souci de la couleur instrumen-
menteuse et superlicielle où allait tomber la " gui- tale qui en fait le précurseur direct des grands sym-
tare » orchestrale, un homme devait donner quel- phonistes. Voici, par exemple, la Toccata qui sert
ques ouvrages, où s'allièrent la grâce ornementale d'ouverture à Orfeo :
i. Voiiîi, d'aprèsun ouvrap;ede Atlemanno Benei.i i lanagramme d'An- comme tu veux, pourtant pas trop haut, afin qu'elle puisse le sup-
nibale Mesune, ek've de Ercole BoTTnu^Ani et qui se lit passer pour porter sans casser... » Les cordes suivantes se réglaient ensuite
fauteur du livre // Dfsiderio, édité a Venise fn Iû94), la composi-
:
d'a|»ri-sce premier essai.
tion liabitiiclle d'un orchestre symphnnique a celle époque : Les huit à onze cordes des luths étaient accordées suivant ces prÏR-
1 cl;ivecin. — 1 épineUe. — Des violes. — Ues tiouilnu.es. — -1 ror- cijies un peu élastiques On conçoit que l'accord des orchestres pou-
!
cause de l'imperfection des instruments qu'à cause de l'inhabileté des rendre plus sonores, baissant celui des trombones, bassons, bassa-
exécutants. nelli, bombardons, et violone, pour que leurs sons graves sortent
Cette question de la justesse était assez difficile à résoudre, de par mieux '?
la diversitédes timbres peu apparentés, de par aussi la difficulté de Un des orchestres les plus célèbres de l'Italie, celui du duc de Fer-
lenr accord, réglé trop souvent de façon fort empirique. L'n livre de rare, se composait de :
HansGeRLE, .\fusica Teutsck{l'à^l), noua donne ce détail amusant sur Cornets. — Trombones. — Doueiaes (Uûtes à becu — PitTarotli
la manière d'accorder les violes : (hautbois). — Violes. — Rebecs. — Luths. — Cithares. — Harpes. —
« Tu montes la quinte (c'est la cinquième corde, la plus haute) Clavecin. — Orgue.
TECHNIQUE, ESTIIÈriQVE ET FÊnAGDGfE HISTOIRE DE L'ORCHESTRATION 2221
Clarino
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^ Vulgano (eine Trompeté)
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|ileiiieiit les uns les autres. Mais, dans la première acte, est joué dans les mêmes conditions tradition-
repiiso, di'piiis la mélodie siipérieur-e, e.xéculéo par nelles par cinq Irombones, l'un d'eux exécutant la
Si ces passages olîrent déjà une liberté et une ri- 1 cluriiio 1 trompette aiguë.
'^ Irinnhe .stirdiite ( î dans la par-
chesse d'écriture qui les l'endent supérieurs à toute
tition (*) [^S^trumpettes avec sourdines.
la musique du xvi= siècle, il ne faudrait pas s'en
tenir à leur examen pour juger de l'évolution réali-
Voici déjà une énumération assez éloquente, et,
sée par MoNTEVERDi dans le domaine du coloris ins-
loind'employer ces timbres au hasard, Monteverdi
trumental. Regardons plutôt la composition com-
prendra toujours soin de préciser les instruments
plète de son orchestre, telle que la donnent ordinai-
qui doivent accompagner tel ou tel récitatif, exé-
rement les traités d'orchestration :
cuter telle ou telle ritournelle. .Xous venons d'en voir
2 yrainvriiibitti 2 clavecins.
des exemples très simples. La première ritournelle
2 coiit'ebassi de riitia 2 coiiIrebLisses de viole. du deuxième acte présente la combinaison beaucoup
10 violes da braccit) 10 violes de bras. plus compliquée de I clavecin, 2 chitarroni, i vio-
:
(1" Strophe)
Ritornello
VieLINO
VIOLINO
«uminc nous venons de te voir pour la toccata cX le prélude du troi- peltc basse conlinuo, etc.
i- me acte, exi^'e dans chaque famille un instrniiicnt de plus que ceux
TECHNIQUE, ESTHETIQVE ET PÉDAGOGIE HISTOIRE DE L'ORCHESTRATION 2223
(2'.' Strophe)
Ritornello
1
b , r-^
DUOI CORKETTI
2224 ESC.VCLOPÈDIE PK LA MUSIQUE ET OICTIO.V.VAIHE PU COS'SEliVXTOlRE
Ce sont dos des iu-coin|i.ii;iietnenls res-
riau'iiiO[its on avait ima^'iné de jiouirir les sonorités
f,'rrle. ,\lois,
pectifs de la première, de la deuxième, de la troi- par l'emploi il'un insiruinent polyphone qui réalisât
sième, de la qiialrièine et de la ciiii|iiième sliophe les harmonies dont le canlinuo formait la base.
du yraiid aii' d'Uiplièe, se lameiilatil d'avoir repeniii Un ne prenait d'ailleuis pas la peine de chiU'rer
Eurydice. L'air proprement dit, alisoliimerit indé- les accords sur les notes de la basse continue. Les
pendant des instrumentales, est un eliel-d'œn-
lifjnes Italiens méprisaient celle indication, la partition
. vre d'èmolioii, de style, de heanté donloiireuse et même leur semblail inutile, la promptitude el la
patlii'tiipie. Mais ce qui nous importe à nous, c'est finesse de leur oreille y suppléaienl. Mais on ne s'é-
rai;iompa;;nement lui même, si varié, si vivant, si toiHiera pas que, dans ces conditions, il l'alb'it huit
libre,qui clianje de coloris de sirophe en strophe, el ou dix années d'exercice pour arriver à bien accom-
nulle part li- j.'énie d'un compositeur n'éclate par une pagner. D'ailleurs, l'artiste qui tenait Vnrgano di le-
iiivention plus personnelle ni plus poélique. gno (OU le gramcembalum], et plus tard le clavecin
En rej;ardanl de près raccotn|ia;;nemenl de ces qui le remplaça, était le plus souvent le compositeur
strophes, on apereoil que la première emprunte sa lui-même.
couleur à l'emploi de ileux violons, la seconde à celui Cette tradition se perpétua si-bien, ([u'au commen-
de deux cornels à bouquin, la troisième à celui des cement du XIX» siècle, les chefs d'orchestre italiens,
harpes, la quatrième à celui des violons et de ia basse tout en battant la mesure, réalisaient encore, de la
de bias, la cinquième enlin à celui de toute la t'a- main gauche, les harmonies sur un clavecin placé
mille des violes. Il semble que, dans ce dernier cas, près de leur pupitre.
les archets se sul'lisaient à eux-mêmes, tandis que, Au xviii" siècle, les instruments et le continua di-
dans les quatre premières strophes, nous voyons le vorcèrent, et le clavecin remplissant les silences de
conlimto invariablement exécuté par deux rliilarroni l'orchestre continua tout seul, jusque dans les opéras
et réalisé par un orijaiio iti tcgno. de .MozAHT et plus lard même, à soutenir le rccilalivn
Nous avons suflisammenl expliqué reni|iloi du cnn- S'cco du chanteur.
linuo pour n'avoir pas autrement à nous étendre sur Nous ne nous attarderons pas à étudier les succes-
le rôle que les c/u'/a;'ro«i jouaient dans celle orches- seurs de MoNTKVEHDi antérieurs à Lulli. En France,
tration. le Ballet comiiine semblait présager la rapide éclosion
Quant à Vorgano di leçjtv^, son intervention consa- de l'opéra ballet; il n'eut pas de suite directe. Mais,
cre définitivement ici l'habitude qui va se poursuivi-e si l'on veut augmenter encore l'admiration que l'on
deux cents ans, el que nous retrouverons jusque chez éprouve en pi'ésence de la partition de l'Orfco, pour le
Mozart el les Italiens qui le suivirent. Les deux vio- génie de son auteur, il suffit de jeter un coup d'œil
lons ou les deux cornets de Monteverdi, comme d'ail- sûr le fragment que voici, emprunle au San Al'Ssio
leurs les quekiues insiruments à vent ou à cordes de Landi, qui dale de 1634, et qui passe pourtant pour
timidement employés par ses successeurs, eussent le plus remarquable ouvrage de son temps :
Laindi, Siiifunta jier Introdiiiioiie del Prologo dello dinma inasicalc di S. Alessio [I63i) :
rrrTfQi-,^ irf ;
ARPE
Lauti
Tiorbe
Violoni
9^^ ^ ^
33=
m
BASSO CONTO 6 î
TnTTTTf-^ P
Cenibali
serait injuste de ne pas mentionner ses deux prédé- entre Vorchestralion et Vinstrumeiitation proprement
cesseurs immédiats Caubert et Cavalli. 11 élimina
:
dite. Nous avons, si l'on s'en souvient, défini l'orc/ies-
le premier de ces auteurs de la scène française, vers tration <c la simple répartition des différentes parties
1672, avec loute l'ardeur jalouse et vaniteuse de son d'une œuvre polyphonique entre les divers agents
grand talent et de son vilain caractère, et il avait sonores, abstraction faite de tout souci de couleur»,
commencé par être le collaborateur de l'auti'H pour et nous avons réservé plus spécialement le nom
les ballets de Serse, composé en I6G0, lors du mariage d'instrumentation à o l'utilisation orchestrale des
de Louis XIV, et d'Ercole amante (1662), opéras qui qualités pittoresques et expressives particulières à
obtinrent un succès considérable. chaque sorte d'instruments ".
Il n'y a pas lieu de s'appesantir sur Cavalli, au A la faveur de cette distinction, il est facile de
point de vue spécial qui nous occupe. M. Iîikmann s'entendre ni Cambert ni Lulli n'atteignirent ii la
:
considère les oeuvres de cet Italien comme ayant richesse d'instrumentation de Monteverdi, mais l'un
réalisé un réel progrès sur celles de Montevkrdi; ce et l'autre réalisèrent de sensibles progrés dans l'or-
jugement a de quoi surprendre. S'il est peut-être chestration.
exact en ce qui concerne la composition générale et C'est àCambert que semble revenir le mérite de
la disposition des scènes, il semble au contraire ab- la priorité. Avec la pastorale d'/sse (I6Ij9), Pomonc
solument erroné dès que l'on envisage rorchestratiori (1671) et les Peines et les Plaisirs de l'Amour (1672), il
fort peu intéressante de ce musicien. créa presque délmilivement en France l'orcheslre
Cambert mérite que l'on examine son apport avec diamatique en l'établissant sur la base solide du
plus de soin. Mais, avant de parler des règles que lui quatuor à cordes.
d'abord, et Lulli plus tard, réalisèrent dans l'ail Comme on le voit dans ri;xemple ci-dessous, em-
d'écriie pour l'orchestre, il est essentiel, si l'on veut prunté à l'Ouverture des Peines et des Plaisirs d>f VA-
bien se comprendre, de rappeler la distinction que mnur, le quatuor se compose, chez lui, de premiers
nous avons établie, dans notre premier chapiire. dessus, deuxièmes dessus, violes et basses :
f
^ ^M orPif-pr-pir-p fpi ï-pr' '
wH^-^H-^T-à:^-
^ ffi J.J^i.
p'f^ r^^r r'p'r r ^
Le collaborateur de ijuinaull, né à Florence en It'i32, qu'il devait fournir à l'Académie de musique pour
mort a Paris en 16S7, élargit un peu les moyens em- occuper à lui seul presque tons les programmes ne
ployés par Cambert. Son^orchestre ne comptait que lui laissait-elle pas le temps de s'attarder à des re-
vingt ou vingt-cinq musiciens, dont le groupe fon- cherches harmoniques ? Ces deux hypothèses sont
damental resta le quatuor ou plutôt le quintette des également plausibles. Mais, d'autre part, on conçoil
arcliets. Chez lui, les cordes comprennent, en effet, sans peine cette sorte de dédain pour les effets d'or-
cinq parties au lieu de^qualre, comme chez Cambert, chestre, si l'on songe à l'idéal esthélique que pour-
les dessus de violons, petits violons français à quatre suivait le maître florentin, moins peut-être par tem-
cordes,, remplaçant désormais les premiers dessus pérament ([ue par un malin souci de capter les suf-
222G ENCYCLOPÉDIE DE LA MUSIQUE ET DICTIONNAIIŒ DU CONSERVATOIRE
fiaf;es de la cour et des lieaiix-esprits de son temps. Lulli, quelques remarques suffiront à en donner
Sous Louis XIV, le yoùt était avant tout littéiaiie, une assez juste idée.
nul lie l'ignore. Si l'on e.\if,'eait du mélodiste qu'il Les Llùtes, les hautbois et les bassons ont, dans
respectAl scrupuleusement, les valeurs syllabiques, tous ses opéras, des ritournelles pour eux seuls, ce
la prosodie et le sentiment des vers, on demandait qui devait singulièrement reposer les auditeurs du
surtout au symphoniste de la discrétion; on luienertt continuel ronllement des cordes. Mais d'ordinaire il
voulu d'apporter le moindre trouble à l'audition des n'employait ces instruments qu'au redoublement des
paroles. C'est pourquoi les cinq parties qnaliliées autresparties.il est même fort cuii(mx d'observer que
« violons n sur la partition faisaient presque unique- les « tenues » harmoniques des instruments à vent
ment les trais de tous ces accompagnements. Mais il n'ont été trouvées au théâtre que par Marc-Antoine
est juste de remarquer que la manière de les traiter CuARi'ENTiER, qui les employa fréquemment, et que
est en grand progrès chez Lulli sur la façon lourde Lulli n'ait point soupçonné un procédé si précieux.
et perpétuellement ronronnante dont on utilisait Les tlùtes dont il se servit étaient généralement
antérieurement la niasse des cordes. Son harmonie droites et à bec. Quand il voulait des llùtes d'Allema-
n'est pas uniformémeiil compacte, il y a du jeu dans gne, ou flûtes traversières, il le mentionnait spécia-
les parties, de l'air, et à la lecture de ses chels-d'œu- lement sur sa partition. Dans la scène de la Nuit du
vie, on éprouve déjà, par endroits, l'impression de la Triomphe lie /'Amour (1681), on rencontre précisément
partition d'orchestre telle que nous la concevons une entrée > de ces flûtes soutenues par le conli-
('
aujourd'hui. D'ailleurs, dès la première moitié du nuo, et succédant à un poétique prélude joué par le
.Kvn» siècle, (ju jouait assez bien du violon pour quatuor « eu sourdine ".
qu'en 1638 le P. Merse.nne pût écrire, avec un Dans le prologue de Tliisbé, deux trompettes et
enthousiasme un peu excessif: « Les beautés et les des timbales s'adjoignent au quatuor et alter-
geniillesses ([ue l'on pratique dans cet instrument nent avec deux hautbois accompagnés au eon-
sont en si grand nombre qu'on le peut préférer à tinuo. ^fous trouvons également dans Alccste (1674)
tous les autres, caries coups de son archet sont par- l'adjonction aux cordes de trompettes, timbales,
fois si ravissants que l'on n'a point de plus grand hautbois et bassons. C'est que, comme dit Gevaerï,
mescontentement que d'en entendre la fin, particu- Illes trompettes forment l'une des sonorités carac-
lièrement lorsqu'ils sont meslez des tremblemens et téristiques de l'instrumentation ancienne, invariable-
des tlattemeiis de la main gauche qui contraignent ment accordées au diapason d'ut ou de Klles sont
?•('.
les auditeurs de confesser que le violon est le roy presque toujours accompagnées de timbales ». Nous
desinslrumens. d les voyons employées de la sorte au prélude du cin-
Pour ce qui est de l'emploi des autres timbres par quième acte de Proserpiiie (1680) ;
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J-J- LLU i. j' J J
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Trompettes
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Baisse continue
TECHNIQUE, ESTHÉTIQUE ET PÉDAGOGIE HISTOIRE DE L'ORCHESTRATION ;227
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de la parlie de timbales. 11 est donc inlinimeiit pro- s'il suflît de mentionner, dans le prologue de son
bable, contiairement à ce qui a été dit, qu.e cette Issé (1607^ la « charge de guerre » et l'air d'Hespé-
basse sur des notes naturelles, tonique et dominante, ride où l'orchestre venait dialoguer avec la voi.ï et
était exécutée par un instrument de même famille renforcer l'expression du texte, .Marc-Antoine Ghar-
que les autres, soit par une trompette basse, soit par ENTIER fut, au contraire, très remarquable au point de
l'
un trombone, ce dont nous ne pouvons donner ce- vue qui nous intéresse. Son orchestre, plein et sonore
pendant une preuve certaine. devint beaucoup plus expressif que celui de Lulli.
La trompette s'employait même parfois comme La Médée de ce maître français (169.3) renferme de
inslrumenl de viituosité, et dialoguait alors avec un nombreux divertissements et des morceaux sympho-
chanteur soliste ou avec une voix inslrumenlale. niques qui dénotent un musicien d'une réelle valeur.
Enlîn, la batterie, très variée dans les ballets, tam- On y rencontre un chœur de coulisses, etTet alors
bours de basque, casta;,'nettes, tambours, était em- entièrement nouveau en France, un autre chœur,
ployée par Lulli comme ne faisant point partie de i( Que d'épais bataillons sur ces rives descendent »,
l'orchestre réglementaire. llaU'ectait ces instruraenls où les bassons jouent un rôle particulièrement ca
à des effets spéciaux, et si, par hasard, il employa ractéristique au milieu des trompes, des hautbois
un quintette de trompes de chasse dans le premier des violons et des timbales, un air italien accompa-
intermède de la Princesse d'Elide, il prit soin de les gné par un triode flûtes, et plusieurs autres combi-
laisser sur la scène et de ne point les mélanger à la naisons également intéressantes et pittoresques.
niasse de ses accompagnateurs couturaiers. Cependant, l'éternelle évolution se poursuivait
Cependant, nous trouverions en cherchant bien comme toujours, grâce aux trouvailles de chacun,
dans quelques-unes de ses partitions quelques rares fût-ce d'auteurs secondaires. Brossard utilisait la
tentatives de couleur locale emploi de musettes et
: harpe dans une cantate, et depuis 1700, grâce à
guitares [Princesse d'Elide), desifUets {Arts) et même MOiNTÉcLAiR, la contrebasse italienne, moins chargée
d'enclumes sur la scène (/sis). de cordes et d'une sonorité beaucoup plus intense
Nous n'avons pas ici à étudier le très réel et très que la basse de viole, était entrée à l'Opéra. Marin
puissant génie musical de Lllli. Mais, chose étrange Marais allait l'employer dans Alcyone en 1706, d'une
et qui montre à quel point les divers dons naturels, manière fort heureuse. Avant d'en venir à notre
dans une même branche d'art, sont peu solidaires grand Rameau, il convient de citer ce que M. Lavoix
les uns des autres, si, parmi les successeurs de ce dit de la « tempête » renfermée dans cette Alcyone ;
maître, aucun jusqu'à Hameau ne l'égala par la no- son analyse fixe un moment curieux dans l'histoire
2228 ENcyci.opÈniic im la misiove et diction s mhe du <:o.\sEnvATOiiŒ
de L'orchestre de " ce inoroenii ?e
riiisti-iiiiienlation. que nous avons cités plus haut, et vous verrez que, s'
compose de bassons, violons, li;uite-contre, tailles, la courbe mélodique y est plus riche et le rythme
basses el contrebasse de violon, plus une caisse plus inilépendant du texte que chez Lulli, la diffé-
roiilaiile; la contrebasse soutient l'édilice musical rence entre les deux maîtres n'est pas essentielle. La
avec basse-contre par un trémolo en croches et en
la meilleure preuve que l'auteur de Castor et Pollux
triples croches, la basse de viole suit le mouvement était plus près du florentin naturalisé Versaillais que
harmoniiiuede la basse ;\ l'octave ou à la double oc- des Italiens du xvia" siècle, c'est précisément que
tave dans un rythme saccadé dontl'elfet est des plus les arietles de la Serva Padrona de Pergolèse paru-
vi;,'oiiri'ux. De temps en temps, elle est chargée d'un rejit aux Parisiens du temps du Louis XV une véri-
dessin d'Iiarnionie oblique comme de rapides gam- table oasis musicale à côté des mornes splendeurs
mes ilfscendantes exécutées sur un trémolo tle de la déclamalion française. Si donc Rameau fut un
deuxii'me renversement de l'accord de septième do- grand homme de théAtre, etil le fut, —
c'est àson —
minante, i.a taille, dans la partie qui lui est propre, orchestration el à son orcheslralion presque seule
dessine obstinément le même rythme saccadé; la qu'il doit la gloire dont ses contemporains d'abord
baule-contre des violons tantôt marche à la tierce et les nôtres ensuite, après un siècle et demi d'oubli,
supérieure de la taille, tantôt à la tierce inférieure l'ont justement couvert.
des dessus, tandis que les premiers violons, dans la Le plus rapide, le plus superficiel coup d'oeil sur
région aigui', simulent les sifllemenls de la tempête. une parlilion d'orchestre de Rameau révèle le pas
Un beau chœur de matelots, toujours soutenu par la énorme franchi par la musique dramatique sous l'im-
même instrumentation, complète ce tableau. Pen- pulsion de cet audacieux novateur. Tout de suite, les
dant tonte cette page, un tambour dont la peau peu lignes chargées de notes, les ti'aits fréquents et va-
tendue rend un son sourd, exécute un roulement riés, la diversité des rythmes el des dessins d'accom-
non interrompu; quant à l'harmonie, elle est des pagnement, le dialogue des parties instrumentales
plus simples, et c'est à son instrumentation que la et, plus peut-être que tout autre signe, l'allégement
tempête d'Alcyone doit toute sa valeur. » fréquent de la basse continue indiquent une sensibi-
liti'- acoustique singulièrement affinée, une technique
de LuLLi, et l'homme qui allait réaliser dans l'art de a trouvé la musique de cet opéra un peu difficile à
l'orchestration un progrés décisif, Jean - Philippe exécuter, mais par l'habileté des simphonistes et des
Rameau, bien que né en 168.3, n'était pas encore par- autres musiciens, la difficulté n'a pas empêché l'exé-
venu, au tiers du xvni» siècle, à faire représenter une cution. » Quand les écrivains du xviii' siècle parlaient
seule de ses œuvres dramatiques. Il avait cinquante de la « fertilité en images » de la musique de Ra-
ans lors(|ue, en premier grand ouvrage,
1733, son meau, ils faisaient allusion à ces descriptions orches-
Uippoljjlc et Aricie, fut exécuté à l'Opéra de Paris. Dès trales, ignorées des lullistes, cl dont nous donnerons
l'abord, on parla de révolution musicale, etle nom de tout à l'heure quelques exemples caractéristiques.
l'érainent organiste et claveciniste dijonnais, du savant Nous n'avons pas à revenir sur la cnmposilion de
théoricien de V Harmonie réduite à ses principes rialti- l'orchestre avant Rameau. Les insiruments à venl,
rels, que tous les amateurs de musique connaissaient nous le savons, se réduisaient aux llùtes, hautbois
déjà, s'imposa tout de suite à la foule. On discuta et bassons doublant la plu part du temps quelques par- jj
passionnément le premier de ses opéias el ceux qui lies de viole; les cuivres, cors, trompettes, etc., n'ap- vl
le suivirent de présles huhs (jalante^ (l'?33), Castor
: paraissent qu'exceptionnellement dans l'orchestra-
et Pollux (1737), Dardanus (1739), Zornastre (1719). tion. Les cordes étaient représentées par la famille
11 ne nous appartient pas d'étudier ici dans leurs dé- des violons, plus ou moins divisés, pour lesquels
tails ces quelques années de lutte, puis de triomphe Rameau persistera d'ailleurs ii écrire le plus souvent
incontesté, suivies, à l'arrivée des Bouffons italiens cinq parties, et auxquels nous avons vu adjoindre,
en 1752, d'un i[ijuste et brusque abandon, tl cepen- au commencement du xviii" siècle, à l'instigation de
dant, celte page d'histoire musicale n'est, en réalité, MoNïÉGLAiR, la contrebasse italienne, ou violonar.
qu'une phase de l'histoire de l'orchestration. Si 11a- Encore, les violonars n'étaient-ils employés que dans
HEAf déconcertait les lullistes et les choquait par l'accompagnement des chœurs, et, détail exquis, le
ses chants plus mouvenienlés et plus libres que ceux vendredi seulement-.
de ses prédécesseurs, la colère que soulevaient ses Tel quel, l'orchestre de l'Opéra de Paris comptait
œuvres chez les esprits réactionnaires de son temps, en 1713 quarante-sept symphonistes ». En 1768,
c<
était due suitout ii la richesse et à la vigueur toutes c'est-à-dire après Rameau, et un peu avant l'arrivée
nouvelles de son orchestre. Et si, comme le dit de Gluck, il en employait cinquante-six.
Ch. Malherbe, « il fallait animer la déclamation de Pour appuyer de quelques exemples les progiès
LuLLi dont la noblesse paraissait trop souvent lan- opérés parle maître bourguignon, nous examinerons
guissante et froide, la simplicité pauvre et plate, di- surtout sa partition d'ilippolyte et Aricie. La prio-
minuer la part du récit et accroître celle du chant rité en date de celte œuvre el sa grande richesse
proprement dit, s'inspirer de 1' « aria •., dont les d'effets nous la font préférer à tonte autre. Nous aj^i-
compositeurs italiens faisaient alors un si brillant rons souvent de même pour la plu|iarl des musiciens.
usage», Hameai', sans doute, satislit dans une cer-
taine mesure à ce progrès, qui n'est point l'objet de
2. L.i f iniille lies violons d;ins la pi-cniière moitié du xvino ?ièrle
notre étude, mais il ne lu Ht pas entièrement. Lisez comprenait ;
sans accompagnement les parties vocales des opéras les premiers seeands dessus, écrits en clef de
et ,vo/ l''«;
1. Le tambour, pour souligner le ilécli,iînenietit de l'orage, avaîtété les taille-'!, écrites en clef d'ut 2" ou 3";
déjà employé par Colasse, élève el continuateur clans Thr-
tle Lui,li, tes quintes, écrites en clef d'ut 3e ;
tis et PélC'i'. les ôt!sses <lc viule à 5 ou à 4 cordes, êcritts en clef de fn l".
>
puisque ce n'est pas l'étude complète de leurs œu- « Sur ces bords fortunés Je fais régner la paix »,
vres que nous entreprenons ici, mais simplement nous présente une disposition toule nouvelle. Deux
l'examen des transformations qu'ils réalisèrent dans Hilles accompagnent la voix, et le conlinuo est, comme
la science orclieslrale. toujours, réalisé au clavecin; mais, au lieu d'être exé-
Jusqu'à ces dernières années, l'étude des partitions cuté par une basse de viole ou par tout autre instru-
de Ramkau (comme d'ailleurs l'étude des partitions ment grave, il est remonté aux hautes-conti-e (se-
de Li'LLi) présenlait d'assez grandes difficultés, les conds violons actuels). Il en résulte un allégement
éditions anciennes étant pleines de fautes et d'omis- considérable de la symphonie, une coloration fraîche
sions. Les éditeurs du temps, par économie sans et douce, un sentiment de légèreté inconnu jusqu'a-
doute, se contentaient d'indications sommaires, sup- lors. Cet ell'et, que Gcuck employa si souvent depuis,
primant parfois les parties interméiliaires, soit aux constituait une première trouvaille géniale et une
voix, soit dans l'orchestre. Dans l'édition Miciiaelis, courageuse rupture avec des traditions deux fois
les réduclions pour |iiano et chant avaient été ell'ec- centenaires. Le cinquième acte offre une autre dis-
tuées au moyen de ces partitions ei'ronées ou incom- position analogue dans l'air de la Bergère « Rossi-
:
plètes avec une pauvreté et une léj.;èreté fâcheuses. gnols amoureux », où la voix, également contrepoin-
Fort heureusement, nous possédons une édition ré- tée par un chant de llùte solo auquel s'adjoint aussi
cente' des chefs-d'œuvre de Rameau, établie et revi- le violon solo, a pour basse le continu" des seconds
sée avec soin par des compositeurs modernes, d'après violons réalisé au clavecin. Il fit fureur en son temps,
les manuscrits du maître et d'après les parties d'or- et fut, pour ainsi dire, l'aïeul de ces duos, si nom-
chestre des archives de l'Opéra, documents séiieux breux depuis lois, entre la chanteuse légère et la
qui ont pi>rmis de reconstituer ces vieux ouvrages tlùte, scènes de folie ou de valses chantées, dont abu-
dans leur forme oiiginale. sèrent les opi'ras italiens et que MEYEiiREEii reprit
Ouvrons donc la parlilion d'orchestre d'Hippoh/lf avec succès dans le célèbre ariosodu Pardon de Ploer-
et Aricic. Des le début du l'rolo;iue, le solo de Diane, met « Ombie légère qui m'est si chère
: >> :
seule
VIOLONS
Une Bergère
Ro_pon_
^
i>l=M "1-' i
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I
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Tonnerre
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HAUTBOIS
BASSONS
VIOLONS
ALTOS
B.C.
(fl
W.
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H
X
2332 ENCYCLOPÉDIE DE LA MIISKJIIE ET DICTIONNAIRE DU CONSERVATOIRE i
1 y a ici une l'iappaiLte do ryllinies et
iliveisilé Lx trio, iMie maiiifi'station sonore autrement inté-
da Uaqucs,el s'il permis de considérer la miisi-
était ressante que n'importe quelle œuvre théâtrale anté-
cal ilé comme unpliéiiomùnc parliciilier, on dehors rieure.
de la puissance ou de la grâce expr'essive, il faut Au troisième acte, nous emprunterons lefréraisse-
av mer que nous trouverions dans l'orchestration de meul des flots :
(Assez vite)
BASSONS
1*^:^ VIOLONS
divises
2"?^ VIOLONS
ALTOS i ^
Div.
ii'. r
violoncelles
r r t r t ^^
BASSES
du petit, Choeur
B.C. ^ /•
J J i- ^^
TECHNIQUE, ESTHÉTIQUE ET PÉDAGOGIE HISTOIRE DE L'ORCHESTRATION 2233
Ecriti' suiv;uit le même |)riiicipe de Irès grande l'autre,une reclierciie ciois?ante dejvariété rytlimi-
unité loiiale que le torinei-re du premier acte, celte i|ue.Réunir tout ensemble îles battements d'altos et
page descriptive présejile, à un degi'é plus alliiiéqiie de contrebasses, des roulements à la tierce de bas-
FLUTES
l'^r VIOLONS
2"!?^ VIOLONS
CLARINETTES
r.''&2'!.'^C0RS
PARTIES
11"'* S"."*
BASSONS
TOCSIN
et,BASSES
?M ENCYCLOPÈniE DE LA MUSIQUE ET DICTION;^ AI HE DU CONSERVATOIRE
sons et de violoncelles, quelle subtilité et quel sur- de LuLLi, que ses partitions oU'reiit, dans quelques
prenant besoin de pittoresque en l'an de grâce 17331 endroits, l'aspect des symphonies classiques. Avec
Reconnaissons pourtant que, si cette palette était Rameau, ce caractère se généralise et s'accentue.
delà chargée d'une couleur abondante, de beaux 1,'emploi plus continu des instruments à vent, leur
blancs et de noirs vigoureux, et que si le pinceau groupement par familles constituant une masse qui
du maître y puisait avec ardeur des oppositions tantôt dialocue avec la masse des cordes, et tantôt
assez intenses d'onilire et de lumière, dfi violence et s'unit k elle, la variété obtenue par des mariages
de charme, ses teintes demeuraiei* néanmoins de timbres plus nombreux et plus imprévus, une
quelque peu monotones. Le dessinateur chez lui pri- polyphonie plus fréquente, une tendance à ce que
mait toujours le coloriste, en ce sens que les etl'ets l'on est convenu d'appeler l'écriture horizontale, par
de son instrumentation, pour pleins et variés qu'ils opposition avec les harmonies des maîtres antérieurs
lussent, manquaient souvent de caractèi'e propre, disposées toutes verticalement sur le papiei' à mu-
de cette sensibilité dans l'appropriation du timbre sique, voilà, plus encore peut-être que ses curieuses
au sentiment en jeu, ou au décor extérieur, que recherches de pittoresque, les vrais titres de Rameau
Gluck poussera jusqu'au miracle, et qui, de nos jours, à l'admiration de la postérité. II était moins difficile
a conduit les lUisses aux confins de la névrose. de faire accompagner par deux bassons un air de
Regardons, par exemple Ici-dessus), le Feu d'arti- Thésée, d'introduire des cors dans une scèni' de
fice d'Acanthe et Ci<phise. pastorale héroïque donnée chasse, ou même d'entreprendre la traduction mu-
en i~'6i, à l'occasion de la naissance du duc de liour- sicale des t;rands spectacles de la nature, que de
tîogne. créer une pâte syniphonique constante, qui, par la
Cette page oli're des intentions plastiques presque justesse de sa recette, servit de modèle initial à tous
puériles fusées volantes et chute des boules lumi-
:
les compositeurs de tbé.'itre, une pâte linemenl tri-
neuses; en réalité, sa sonoiité ne diffère pas beau- turée, ni trop tluide, ni trop épaisse, capable d'obéir
coup de celle du Tonnerre d'Hippolyt-' et Arici>'. à toutes les exigences mélodiques, tournant bien
.Nous dirons, si vous le voulez, que la couleur locale sous le pinceau et chargeant les fonds avec richesse
n'apparaît pas encore nettement dans la musique sans boucher l'atmosphère vocale. Echafauder les
de Rameau, pas plus qu'elle ne se manifestait dans la masses orchestrales suivant les exigences du timbre,
peinture de ses contemporains '. masquer leplus souvent leur défaut d'homogénéité,
.Mais, malgré tout, le progrès réalisé est colossal;
utiliser parfois leurs divergences dans un juste équi-
seul un génie pouvait risquer ainsi l'évolution de la libr(> du souci descriptif, fait de variété, et du souci
musique dramatique. Nous avons déjà dit, à propos architectural, l'ait de logique et de cohésion; il ne
fallait pas seulement pour une telle besogne un
1. Rappetons cependant que Kasieaii introitiiisit lepremier les cla-
rinettes a l'orchestre de
artiste délicat, ni un esprit chercheur, Il làllait un
l'Ilpt-ra. Il y a dans Aciuillif cl Céphise un
curieui passage de clarinetles et cors. Cit..ns aussi dans Hippolijte ri musicien. Rameau parut, et le génie dramaticiue de
Aricie l'emploi très passager du (lageolet et de la musette, iiutriiments Gluck, si grand soit-il, ne doit pas nous taire oublier
dont Lci.Li et .V. ScAnLAXTl font (['gaiement usa-'C. la délicieuse sensibilité de son prédécesseur.
TECHNIQUE, ESTHÉTIQUE ET PÉDAGOGIE HISTOIRE DE L'ORCHESTRATION Î235
opéra national, c'est une question que nous n'avons Dès avant Lulli, nous l'avons vu, Cambert avait
ici. Ce dont nous sommes certains,
tenté d'écrire à quatre parties pour les cordes. Mais
pas à résoudre
que l'intérêt instrumental de leurs oeuvres était l'usage ne s'en élait pas maintenu, et Philidor Uii-
c'est
entièrement nul. Personne aujourd'hui ne songerait mènie, après avoir adopté le quatuor dans Erne-
linde, revient dans d'autres pièces, dans plusieurs
à défendre cet orcliesti'e-puilare. Néanmoins, Iîa.meau
conserva des admirateurs en France (en dépil du suc- endroits de Thémistocle notamment, à la fâcheuse et
cès de la Serva Padrona et de ses pareilles), et les pâteuse répartition des cinq parties de violons.
compositeurs français continuèrent, jusqu'à l'arrivée En revanche, la partition de ce dernier opéra, et
de Gluck, à défendre la déclamation luUiste et la c'est le second point que nous tenions à signaler,
richesse symphonique iustaurée par Rameau. Trois est tout à fait remarquable par la précision et la
musiciens de thi-àtre priment les autres pendant ces beauté de son graphisme. La disposition des instru-
vingt-cinq années ce sont Moi^idonvillk, Dauvekc.me
:
ments est modiliée. C'est ainsi que nous voyons,
et surtout Pihlidor, dont quelques opéras rempoi- dans l'Ouverture, en haut les timbales, au-dessous
lèrenl un assez vif succès [Ernelindi' en 1769, Pcif.cr les trompettes, les cors, les hautbois, les violons, les
Il y a dans cette
violes et enfin les basses et bassons.
en 1780, Tkémistocle en 178b), et qui vaut que nous
examiniiins ses œuvres quelques instants, pour deux disposition une certaine recherche de groupement
motifs principau.'c son écriture à quatre parties
:
logique par familles d'abord les instrumenis à per-
:
pour les cordes, et le soin, tout à fait exceptionnel à cussion isolée, puis la famille des cuivres, celle des
son époque, avec lequel il notait ses partitions. bois, enfin le quatuor. La contrebasse fait par en-
Au sujet de l'adoption du quatuor, (Ievaert écrit <lroits une parlie'indépendante des violoncelles. Les
dans son Trnitr d'nrchesti-ntioii : " Dans les ripieni, Ions des instruments transpositeurs sont nettement
les ensembles de tout le groupe, l'harmonie à cinq mentionnés. Bref, il y a une précision, un soin maté-
est peu à peu délaissée pour le quatuor, qui laisse riel fort appréciables. L'exemple suivant suffira pour
plus de jeu aux mouvements des parties intérieures s'en convaincre. Il est emprunté au curieux dialogue
(le l'harmonie, qui donne plus de nerf à la sonorité. du troisième acte de Thémistncle, entre Mamlane et
Kniin, la polyphonie des instruments à cordes, Xerxès, dialogue où la double modalité du chant et
auparavant aussi lourde dans ses allures que son de l'accompagnement accuse nettement le caractère
prolotype, le chœur des voix humaines, acquiert de des personnages :
FLUTES
VIOLONS
VIOLES
BASSONS
MA.NDANE
XERCES
BASSES
22:îf. BycrcLopËniE de là musique et dictionnaire du conservatoire
f" p f ' fi
On voit avec quelle rninuLie les nuances, les liai- nous doutons bien toutefois que la musique instru-
sons, les détachés, les coups d'archet sont indiqués mentale devait avoir chez eux plus d'importance que
dans cette œuvre. Un tel souci du détail témoigne de partout ailleurs. Et quand nous arrivons à la période
l'importance attribuée désormais à l'orchestre. Et si où les documents littéraires, iconographiques et
le coloris estmédiocre, du moins l'éciiture devient même musicaux commencent à nous renseigner
élégante et facile, le quatuor clair, l'ensemble clas- moins parcimonieusement sur les habitudes artisti-
sique, et dans les lutli, la partie rylhmique s'accentue ques du peuple allemand, nous constatons qu'il pos-
aux instruments à vent et à la batterie. sédait hien plus d'agents sonores que ses voisins.
Tous les éléments symphoiiiques du drame musi- Les Germains delà Henaissance, disent les historiens
cal sont prêts, et l'on n'attend pins que le Chevalier. de l'art, avaient gardé du moyen âge une grande di-
versité d'instruments de musique. Celte assertion,
basée sur de nombreuses estampes et sur les des-
L'ORCHESTRE EN ALLEMAGNE AVANT GLUCK criptions de fêtes, contirme les suppositions que
nous développions dans le précédent chapitre rela-
S'il nous fallait étudier les origines de l'orchestre tivement à l'orgie de timbres où dut se complaire la
en Allemagne antérieurement au xvii" siècle, nous musique delà période gothique, orgie très conforme
nous verrions contraints de renouveler toutes les aux tendances romantiques de l'art médiéval. Mais
hypothèses auxquelles nous dûmes recourir en ce la richesse instrumentale relative qui se conserva en
qui concerne le raoyenAgeetla lienaissance dans les Allemagne, et rien qu'en Allemagne, à travers
pays latins. Evidenimenl, la musique ayant toujours les xvii« et xvm" siècles, est surtout remarquable
tenu chez les Germains une place plus prépondérante parce qu'elle correspond très logiquement aux ten-
que partout ailleurs, les documents sur les dévelop- dances sociales d'une race encline aux gioupements,
pements de cet art sont aussi plus nombreux pour et respectueuse de toute hiérarchie, même sonore.
leur pays que pour le nôtre. Mais, en somme, ce que Résister au courant individualiste qui, chez les Ita-
nous connaissons de toutes les grandes phases de liens et les Français, se traduisait en musique par
leur histoire musicale, —iulluence des croisades, la déclamation littéraire et la monodie fatale aux
rôle des minnesinger, sortes de troubadours prin- progrès de l'orchestre, c'était préparer patiemment,
ciers du xni<^ siècle, et des meistersinger, ces savants avec lourdeur sans doute, mais avec sûreté, l'extra-
amateurs des époques suivantes, —
ne nous confère ordinaire explosion d'orchestre qui, de Gluck et de
aucune cerlilude sur le caractère de leurs orchestres Haydn à W.ic.NER et à Uicliard Strauss, devait être
archaïques. A constater les progrès de la facture des le suprême effort de la musique occidentale. Dans
instruments de musique, des orgues notamment, un pays où l'on aime à engendrer ensemble beau-
pendant ces longues périodes d'incubation, nous coup de sonorités, où la musique se mêle intime-
TECHNIQUE, ESTHÉTIQUE ET PÉDAGOGIE HISTOIRE DE L'ORCHESTRATION -im
meut il la vie corpoi'ative el s'assujellil sans peine à quels s'adonnaient ses compatriotes d'abord, les
:
toule ilisciiiliiie, ou aspire fatalement à la polypho- pièces pour instruments seuls et les airs à danser de
nie, pluralité de lignes (lans l'unilé lonale, et à
la toutes sortes; puis, les ouvrages où la voix humaine
syniplioiii.', pluralité detinilires dans l'unité orches- se mêle aux instruments; sans faire, du reste, aucune
trale. Il sullit d'ailleurs d'entendre par polyphonie
mention de la musique dramatique. Mais, comme le
(dans un sens un peu plus large) toule multiplicité dit .M. Lavoix, « il n'est pas sans intérêt de voir avec
de sons simultanés pour deviner que symidionie et quelle précision l'emploi des instruments était réglé
polyphonie sont nécessairement connexes, lit nous à cette époque ». Malheureusement, un tel examen
verrons bientôl que, si llAE.NDELel Bach orchestrèrent ne saurait se faire sans entrer dans des détails nom-
plus richement que leurs contemporains de France breux. Praetorus et, il faut bien l'avouer, tous les
et d'Italie, cette richesse ne dérivait pas d'un sens théoriciens de l'orchestre, même ceux de nos jours,
plus hn du coloris instrumental, loin de là, mais uni- sont à peu près logés à la même enseigne, Praeto-
quement d'une plus grande complexité liaimonique. rius n'expose guère dans son enseignement de prin-
l'our exprimer leurs pensées, les compositeurs alle- cipes généraux, mais plulùt des recettes et des
mands ayant eu besoin de nombreux agents sonores, exemples isolés ": Dans tel cas on ne peut faire
de tessiture et d'intensité diverses, il s'est trouvé que ainsi, mais il faut veiller à ce que... et mieux vau-
les timbres propres de ces agents ont survécu et se drait... » 11 est d'ailleurs à peu près impossible de pro-
sont perfectionnés, sans qu'ils fussent à l'origine céder autrement, puisque la facture instrumentale et
recherchés pour eux-mêmes. Ce qu'utilisaient Schutz le choix même des timbres de l'orchestre sont pure-
ou Bach, c'était bien plus la force trombone ou la ment empiriques. On peut néanmoins dégager deux
hauteur tliHe que le timbre trombone ou que le points principaux du Sijntaijma de Praetorius. D'a-
timbre fliUe. Mais ces timbres bénéhcièrent des bord, la préoccupation beaucoup plus grande de la
facultés mélodiques propres au trombone et à la flûte, hauteur et de la force des instruments que de leur
et lesentiment du coloris orchestral qu'un (incK et timbre proprement dit. Toute la science du vieux
un Weber pous'^eront si loin, naquit de la sorte sans théoricien revient à se demander « Cet instru-
:
qu'on y attachât beaucoup d'importance, grâce aux ment pourra-l-il monter jusque-là? n'y sera-t-il
exigences matérielles d'un art éminemment collecti- point liop criard.' ne couvrira-t-il pas la voix dans
viste. ces noies aiguës"? Cet instrument peut-il descendre
Bappelons-nous ce qu'était la musique d'orchestre jusqu'ici? n'y sera-t-il pas trop sourd? Souliendra-
en France au début du règne de Louis XIV, la pau- t-il assez les voix dans ces notes graves?... " Le
vreté d'une instrumentation où, timidemeid, quel- second point, c'est la tendance au groupement
ques hautbois ou quelques trompettes doublaient par famille. Des chœurs instrumentaux étendus et
des parties de violes, et regardons le frontispice du cohérents, voilà l'idéal. Idéal sans cesse contrecarré
Ciirrus triuinphalis de Uauch, imprimé en 1648 et par les limites d'étendue de chaque instrument et
dédié aux empereurs d'Allemagne. L'orchestre par ses variations d'intensité aux différents degrés
d'anges groupés dans cette gravure, sur des nuages de l'échelle sonore. Le problème était si diflicile
amoncelés, autour d'un ange organiste, qui réalise à résoudre que, dans ces groupements, on ne se
sans doute la basse continue, et de quatre anges chan- préoccupait guère de l'expression individuelle des
teurs, se compose précisément des instrumentistes timbres, mais uniquement, comme nous l'avons dit
exigés par le compositeur pour l'exécution de sa plus haut, de leurs qualités de résonance, et c'était
musique. Quelle différence d'idéal entre les deux déjà faire beaucoup de chercher à ce que leschoîurs
pays! Ici ce n'est pas seulement toute une famille instrumentaux sonnassent bien et avec une homogé-
de violes que forment les célestes virtuoses; on voit néité suftisante. Praetorius étudia consciencieuse-
encore entre leurs mains une tlùle,un trombone, des mentces premières données théoriques, et nous allons
cornets, un basson, douze trompettes, deux timbales, voir Schutz les mettre en praliqueavec une habileté
un thèorbe, qui dévide probaljlement le continuo et, que dépasseront à peine Haendel et Bach.
pour compléter ce tintamarre, dont l'hôtel de Hani- Après ceci, l'on comprendra plus facilement com-
i)0uillet eût réprouvé le barbarisme, trois coule- ment et pourquoi Heinrich Schutz, en latin Sagitta-
vi'ines vomissent des torrents de fumée,... car le urus, compositeur né eir )38o et mort en 1672, fut
Currua triiimphalis comportait même une partie de lin excellent orchestrateur. Schutz orchestra fort
Clcanon obligé ». Assurément, tous ces instruments bien parce qu'il écrivit avec richesse et pureté. Elève
n'étaient pas emplovés simultanément, mais groupés de Jean GABRrELi, il suivit les traditions de l'école
de diverses manières et si ce n'est pas là l'oichestre
; vénitienne, qui ne brillait point par la correction,
du Crt'piiscale des Dieur, ni même celui de la Sijm- mais qui visait à la nouveauté, à l'invention hardie. Il
phonie (nec chœurs, c'est du moins quelque chose de composa pour le théâtre des œuvres qui ne nous sont
sensiblement plus complexe que noire musique du point parvenues, et nous le connaissons surtorrt par
même temps. de nombreuses cantates écrites à plusieurs chœurs
Ce qui prouve, mieux que tous les raisonnements, et selon l'usage de ses maîtres, avec accompagnement
l'impoitance attribuée en Allemagne à la musique d'orgues et d'instruments de diverses espèces, vio-
insti'unuMilale, c'est que, dés 161.S, un compositeur lons, violes, cornets, trompettes, etc. Le style de
qui était en même temps un théoricien distingué, ces ouvr-ages est fugué, leur écriture admirable, net-
Michel SciiuLz, plus connu sous son pseudonyme tement polyphonique, chaque « partie > ayant son
latin de Praetorius, publiant sur la technique musi- allure propre et indépendante, l'harmonie ne se trou-
cale un grand ouvrage en ti'ois volumes, intitulé vant constituée que par la rencontre de divers mou-
S'jnhii/m'i musicum, en consacrait entièrement le vements mélodiques. La basse chiffrée, que Schutz
second tome à l'art orchestral c'esl le Th'alrum ins-
; introduisit en Allemagne en même temps que Sta-
truiueiiturum seu Sciographia. Il serait /astidieux Di'.LMAYER, Soutient naturellement toutrédifice sonore.
d'analyser un tel ouvrage. Praetorics y énumère Si l'on ne peut dire de Schutz, sans injustice pour ses
tous les genres de compositions instrumentales aux- prédécesseurs, qu'il fut le père de la musique aile-
1238 ENCYCLOPÉDIE DE LA MUSIQUE ET DICTIONNAIRE DU CONSERVATOIRE
ni;iiuli', l'ofce est du moins de
ie<',omKi\tre en (lui le diver'ses parties vocales, violes et flûtes, cornets,
[iiédécesseur de IUch. Sonéciiture, la manière
dii'ec-t trombones ou bassons renforcent et soutiennent les
dont ses idées sont présentées en l'oriiie d'exposition chants sans distinction de timbres. Quand une par-
de fugue, le caractère même de ses thèmes, leur dé- tie a été une fois accolée à un instrument donné, tous
veloppeinenl, le style et la consli'uction harmonique, deux marchent ensemble jusqu'au bout, lit l'on voit
tout chez lui présage le grand Sébastien. ti-ès bien, dans telle Si/iriphonic sacri'e, l'accompagne-
Si nous insistons sur ces qualités, alors que nous ment conlié 11(1 lihitum\kdeux violons o(( à deux lUUes,
ne devrions nous occuper que de l'orchestration ou à deux lill'aii, petits cornels aigus, tandis que la
seule, c'est que, pour employer une expression nia- basse est réalisée à l'orgue. Par endroits même, la
(héniati(|ue, cette orchestration n'est chez Schutz première partie de chant se trouve doublée par des
qu'une cfonction » de la polyphonie. Les diverses violons, tandis que la seconde l'est par un basson ou
parties instrumentales suivent note pour note les par un trombone :
Sinfonia
TROMBONE I
-^
owtTo violino alla Ottava
TROMBONE H
o\\'ero Violino alla Ottava
TROMBONE III
TROMBONE IV ^
BASSUS ^
BASSUS
pro Organo
^ J • * J '
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r-pfPCii;
^ • éAè J - J J' J J J J Ll
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TECHNIQI'E, ESTHÉTIQUE ET PÉDAGOGIE HISTOIRE DE L'ORCHESTRATION 2239
Dans l'exemple que nous donnons ici, sorte de celles des Italiens et des Français, et l'emploi bien
lilournelle empruntée à sa Xlll'-' Sijinplionie sacri'e, moins parcimonieux des instruments à vent indique
et composée pour quatre trombones el basse cbilfrée que l'orcheslre atliie déjà les Allemands du xyu»
à réaliser à l'oigue, Scbutz n'hésita point, on le voit, siècle, sinon comme palette descriptive, du moins
à écrire en têle de la première partie « Trombone : comme matière sympbonique.
I, ovcro riolino alla ottava, » et en tète de la seconde : ScuuTz mourut en 1672. Ueinhard Keiser naquit
« Trombone II, overo violino alla ottavu. » l'année suivante ; il devait introduire l'opéra en Alle-
CLARIMS
in n
TIMP
m D. m A
VIOLINI
CHORUS ^m i ^^U i
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Chorus
BASSI
6 ^
—
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^Lk -iTum j , ^^i^ j^i^
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p»#^«^t^^^£,ft .•.^•^e.
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S
Kkishr. .Iinlflrl, Arin
VIOLINO 1 .
VIOLINO 2.
VIOLINO 3.
VIOLINO 4.
VIOLA
VIOLONCELLI
ISABELLA
BASS. CONTR.
L'indépendance entre les parties vocales et les œuvres françaises de la même époque, nous
tral, les
parties instrumentales est plus grande ici que chez ne saurions nous le représenter, néanmoins, comme
ScHUTz. L'orchestre y est souvent traité comme les une brillanle exception à l'aridité symphonique du
divers claviers d'un orgun, opposition d'un clavier « grand siècle ».
de positif avec les anches du grand orgue. Par là
même, Kf.isrr offre des tentatives d'iustrunienlation
plus accusées que son prédécesseur. Bach et Uiteudel.
Dans l'air de .lodelet, le sextuor des violons en sour-
dine avec sa basse en pizzicali est une recherche En examinant dans le précédent chapitre les pro-
"Jd'elfetij ; dialogues entre les parties, dans le
et les grès de l'orcheslre en France, entre Lulli et Gluck,
passage emprunté à Crœ!:us, témoignent également nous rencontrâmes des musiciens de grande valeur,
d'un réel souci symphonique. Mais, malgré tout, ce dont Rameau fut le plus exquis; nous n'aperçiimes
ne sont là encore que des tâtonnements bien incer- parmi eux aucun génie comparable aux deux mer-
tains, et des essais de coloris mentionnés par une veilleux artistes allemands Jean-Sébastien Bach et
simple indication, comme, par exemple, sur une par- Haendel, qui, nés tous deux en 168j, moururent, le
lie de violons « oboe soli
: ou « senza oboe ", mar-
<> premier en 1750 et le second neuf ans plus tard.
quent une bien faible intuition des ressources expres- .Mais, par une conséquence étrange et pourtant cer-
sives du timhre. taine des lois de l'évolution, landis que les hommes
\ titre de curiosité, voici la tablature de Crœsii:, : de talent moindre qui se disputaient la scène de
l'Opéra de Paris, au cours du xvui" siècle, elTecluaient
3 cinrini en re (petiles Irompettes aiguus).
Troinpeltes.
d'incessants progrès au point de vue de l'instrumen-
Timbales. talion pittoresque et créaient petit à petit l'orchestre
lu/folo (flageolet). de théâtre moderne, il semble que Hakndel et Bach
Vifilini.
(Bach surtout à raison de sa perfection même) ne
Violette {viola-alto) écrites ea clef d'iil 3'.
Chorus. préparaient à peu prés rien pour l'avenir. Ils réa-
Bassi (basse continae avec chiffre!. lisaient une forme d'art, portée par eux à son apogée
Flûtes traversiéres (en solo ou doublaut parfois la voix). sous tous les rapports (celui de l'instrumenlation
Bassons (doublant p.ïrfois les basses).
Olioi (doublant parfois le5 violons.
comme les autres!, mais d'où rien de meilleur ne
pouvait sortir désormais. De même qu'en histoire
Nous allons voir tout à l'heure chez Bach et chez naturelle, on voit les espèces trop parfaitement adap-
IIaendel l'épanouissement de celle orchestration tées à un certain milieu vouées à une disparition
[lolyphonique, si riche Je valeurs et presque neutre fatale, de même les procédés d'orchestration de Bach
lie tons; mais il nous faut mentionner, avant de et de Haendel étaient trop étroitement appropriés à
i|uilter les primitifs de la musique allemande, une leurs conceptions polyphoniques pour être suscep-
pièce du nom de Pliihtheu, sorte d'oratorio d'un auteur tibles de transformations ultérieures. De telle sort»
inconnu et qui oljlint un grand succès au xvii' siècle. que celte espèce d'instrumentalion, dont nous venons
On la joua d'abord en 1643, puis, volée et déchirée, d'admirer chez Sghutz les manit'eslations premières,
elle fut réécrite et publiée en 1658. l'hilothea met en nous devons la considérer chez Haendel et Bach
scène, avec des chœurs, des personnages nomhreu.x comme triomphant dans une glorieuse impasse, et
et tout un orchestre, la lutte du bien et du mal non point comme ouviant une roule aux sympho-
Nous ne donnerons pas la tablature instrumentale de nistes futurs.
cet étrange ouvrage, lointain ancêtre de Tannhduser. Ces deux maîtres orchestrèrent parfaitement leur
C'est toujours le même mélange de violes et d'instru- genre particulier de musique, en ce sens qu'ils par-
ments à vent, avec des « ad libitum » déconcertants. vinrent à faire sonner à l'orchestre toutes les parties
Mais les observations de l'auteur à l'usage du musi- de leurs œuvres avec l'intensité .relative, l'homogé-
cien qui doit conduire la représentation sont des néité et la clarté voulues. Ils ne furent les précur-
plus curieuses : seurs de personne, parce que, morte leur écriture,
Les violes doivent marcher avec le Christ et les
(< moi te sera du même coup leur instrumentation.
anges. La violetla avec Miséricorde, Clémence, Kspoir Diffèrent-ils sensiblement l'un de l'autre au point
et l'hilothée dans les scènes de douleur. Les cornets de vue qui nous occupe? Oui et non. Non, si l'on
conviennent h .MuuJus et à Philothée joyeuse, les envisage les moyens qu'ils employèrent. Oui, si l'on
trombones au Christ justicier et à Justice, les théor- tient compte des idées musicales à l'expression des-
bes et les luths servent pour la symphonie gaie au quelles ils appliquèrent ces moyens. Quand M. La voix
premier acte et au troisième acte dans le chœur des écrit que l'orchestre de Bach est plus riche de timbre
lilles de Jérusalem, qui devront elles-mêmes avec que celui de Haendel, plus varié par le nombre et la
leurs instruments prendre part à la symphonie. Il diversité des instruments (ce qui est peut-être vrai),
faut chanter tantôt lentement, tantôt vite, suivant plus terme dans sa masse sonore, il s'attache beau-
les sentimenis des personnages. coup plus aux formes générales de leur musique
•cLe lieu où l'on re'présente ce drame ne doit pas qu'à leur instrumentation même. En réalité, leurs
tre très grand, ni les spectateurs très nombreux, deux orchestres sont également puissants. .A. la
car s'il faliail clianler fort, les voix ne pourraient masse instrumentale tout entière, au trio des trom-
résister à tant de fatigue, et si on chantait trop bas, pettesavec lequel marchent presque constamment les
on n'entendrait plus dans une vaste salle ou devant timbales, tous deux unissent la vois de l'orgue. Ces
un auditoire nombreux... » trompettes» écrites dans un registre très élevé, ab-
La Si'hola cantonim de Paris a donné, en 1906, des sorbent complètement la sonorité des violons et des
fi-agments de Philothea, dont elle possède une copie. hautbois, dont ils calquent le plus souvent les traits.
Malgré la poésie du sujet et les indications de l'au- Et n'oublions pas la pesante basse au conlinuo, io\xé&
teur anonyme, cel ouvrage est, dit-on, monol one, et par les Inthset les théorbes, et qui alourdit impitoya-
s'il surpasse, au point de vue du sentiment orches- blement les œuvres de cette époque, lout en répan-
Copyrigtk bij Librairie Delagrave, 1921. 141
2»2 ENCYCLOl'ÈDIE DE LA MUSIQUE ET DICTIONMAIUE DU CONSERVATOIRE
dant sur ell'S le inoiioloiie eslompaj;e tle la réalisa- dans comme l'orgue avec jeux doux,
les liitti, traités
tion à l'orgue. jeux clairs, jeux éclatants, il est sensiblement le
Nous ne voyons dune pas quelle peut être en soi la même, à ceci près que B.vcii emploie les tlùtes et que
différence de puissance sonore entre les orchestres Haiîmoel s'en sert assez rarement. L'indépendance
de ces compositeurs féconds. M. Lavoix entre, du admirable de leur écriture désagrège, éparpille la
reste, dans nos vues, quand il recherche la cause de sonorité et l'épaissit quelquefois. Bach traite souvent
leur apparente diversité « L'orchestre de Haendel a
: son orchestre dans les ensembles comme un contre-
plus de souplesse et de grâce (?), il emprunte au style point à six, sept, huit parties, et nous voyons dts
dramali<iue une £;rande léfjèrelé' et on y trouve plus instruments de sonorité grêle, comme la tlilte, lut-
d'une l'ois des traits de coloris et d'expression que le ter, à eux seuls, avec une mélodie indépendante,
maître sévère qui a écrit la Passion n'a pas voulu contre d'autres instruments à timbre mordant ou
ou peul-èlre n'a pu mettre dans le sien. » éclatant. Cet enchevêtrement des parties diverses
C'est en elîpt l'écriture des deux maîtres qui diffé- confiées à des organes trop dilférents ne peut donner
rencie leur instrumentation, et nous nous retrouvons qu'une sonorité pâteuse. Aussi, la sensation éprou-
ici en présence d'un cas analogue à celui que nous vée, en opposant à celui de Haendel l'orchestre de
présentéi'ent leuis prédécesseurs directs Heinrich : Bach, est telle qrre, chez ce dernier, l'aisance, la vir-
ScHUTZ et Keiskr. tuosité extrême de l'écriture provoquent d'elles-mê-
Le style de Haendrl, dans ses opéras, permet à la mes une variété plus grande. La sonorité, le coloris
trame verlicaie une attache de combinaisons sono- ne sont peut-être pas différents, tout au moins dans
res plus facile que dans l'œuvre de Iîach. 1).\ch, dont les tutti, toujours enveloppés de la sonorité de l'or-
l'écriture est beaucoup plus serrée, plus fuguée, plus gue. Cependant, l'indépendance même des parties,
conliapunctique, otîre une trame essentiellement ho- leur' liberté de mouvement donnent à la lecture des
rizontale. Chez lui comme dans Schl'tz, telle partie partitions d'orchestre de Bach un attr'ait, une variété
vocale sera soutenue par une lipne instrumentale infinie, variété plus visuelle qu'airditive, il est vrai.
invariable, loule nouvelle combinaison de timbre ne Mais quelle écriture! Quel enchantement dans ces
pourrait que diflicilement s'y amorcer. Aussi, est-ce parties mélodiques si naturelles, si libres, de cour'-
dans le dialogue musical que nous voyous chez Haen- bes si gracieuses s'harmonisant si purement entre
del et chez Bach les effets d'orchestration les plus elles! Quelle habileté, que de souplesse, que de
identiques voix accompagnées par le quatuor dia-
: merveilles et surtout que de facilité dans tout cela!
loguant avec les trompettes et les timbales, etc. Dans Examinons inairrtenant avec quelques détails l'or-
les soli, la variété de ces accompagnements est d'ail- chestre de chacun d'eux.
leurs plus grande chez Bach ijue chez son rival. Chez Haendel, la dilTéierice de l'instrumentation
M. Lavoix dit encore « L'orchestre de Bach ne : est assez sensible, suivant que l'on envisage ses opé-
passa pas par les mêmes révolutions que celui de ras ou ses compositions sacrées. La nécessité de
Haendel; ce qu'il était lorsqu'il publia sa première laisser à découvert certaines parties vocales d'un
œuvre (1708), nous le retrouvons encore dans ses ouvrage dramatique le contraint à employer, pour
dernières cantates. » Cette observation est juste, son théâtre, un orchestre moins puissant que celui
mais c'est précisément parce que l'écriture de Bach de ses oratorios, destiné à soutenir de grandes
a toujours été la même, que la réalisation de sa masses vocales.
pensée musicale ne s'est jamais modiliée. H nous D'une façon géirérale, voici sa tablature :
harmonique des bois, mais presque toujours à dou- l'unisson d'une basse dell(Ue,sans basse ni clavecin.
bler les trompettes à l'octave grave. Il faut citer aussi la variante orchestrale des re-
Les trompettes, en revanche, sont employées très prises du chœur célèbre de Judas Marchat)i<r {lli'j] ;
fréquemment par llAF.NDFxet par Bach (on sait quelle « Lève la tête, peuple d'Israël, " où le chœnr des
était l'extraordinaire virtuosité des trompettistes à jeunes gens est d'abord soutenu par l'orgue seul, les
cette, époque); elles sont écrites à deux et trois par- voix dialoguant avec deux cors en sol (écrits bien
ties, et presque constamment accompagnées par les haut). Le même motif est ensuite interprété par le
timbales. chœur des jeunes filles « Chères compagnes, don-
:
Les (lûtes ont, dans leurs œuvres, un rôle élégant nons-nous la main, » soutenu par deux llûles traver-
ut gracieux. Le hautbois est loujours employé. Haen- sirres et l'orgue. Enfin, la troisième fois, cors, haut-
BET. avait une prf'ililection pour cet instrument, pour bois, flûtes, violons, violes, coiitiuuo et timbales à
lequel il écrivit de nombreux concertos. A cette épo- volonté accompagnent le chœur général.
que, comme le dit très bien M. La voix. « non seule- Dans Résurrcctiua (l~OS) un air de San Giovanni est
,
ment le hautbois était pastoral, mais encore il était délicieusement accompagné par la (liMe traversière,
guerrier; sa sonoiité aigre et éclatante le rendait dialoguant avec la viole de gambe, sur le continua
propre 5 la musique militaire; les vieilles bandes du Ihéorbe.
musicales de France, d'Angleterre et d'Allemagne Dans Sa((^(l'38), on rencontre nn air de David sou
se composaient presque uniquement de hautbois, et tenu par les instruments à cordes pincées, le théorbe,
la Marche des mousquetaires de Lulli est écrite pour la harpe, les violons et les basses en pizzicati.
ces instruments ». HAENDELy emploie aussi le carillon à clavier, sorte
Le basson a peu d'eli'et particulier et double pres- de glockenspiel, lorsque les femmes Israélites sor-
que toujours la l)asse. tent à la rencontre du jeune David, vainqueur du
Les timbales, nous l'avons déjà dit, accompagnent géant philistin, en chantant et en dansant an son
les trompettes et en aflirmenl le rythme. des tambourins et des triangles.
Le tambour, très rarement employé, apparaît néan- L'instrument est en fa (transpositeur), et sonne par
moins dans Justin et dans Josué (encore ne iigure- conséquent à la quarte supérieure de la note écrite.
t-il pas dans les éditions allemandes et anglaises). Il est d'abord combiné avec les premiers violons et
Enfin, l'orgue et les clavecins réalisent la basse l'orgue, puis se mêle aux chœurs et aux danses. Le
continue. Quelquefois pourtant, ces derniers instru- compositeur en abuse même un peu.
ments ont une parlie indépendante; dans Uinaido Mais Résurrection est de toutes ses œuvres celle
par exemple (1711). qui présente peut-être la plusgrande variété d'effets
Haendel ne se sert pas toujours de toutes ses forces instruinenlaux. .\i. Lavoix, en parlant de cet oratorio,
instrumentales. Dans la plupart de ses ouvrages, son dit avec raison : Uaïïnijwl tirait de puissants effets
.<
orchestre se compose exclusivement, outre les ins- du dialogue des masses instrumentales, et rien n'esi
truments à cordes, de deux hautliois doublant les plus solennel que les passages où trompettes et
premiers et seconds violons et parfois d'un ou deux trombones, alternant avec l'orchestre, répondent aux
cors. Dans les ensembles, la sonorité est renforcée lamentations du hautbois. Dans le chœur de Saut
par les troin|iettr's à deux parties (le piimipal' fai- c( ilow excellent ", les sonneries de trompettes, inter-
sant parfois la Iroisieme partie) et par les timbales. rompant l'accompagnement des violons, sont d'un
Lé quatuor est admirablement écrit et éclatant, le étonnant éclat. Sans pousser anssi loin que Kameai;
contiiiuo pesant. Les instruments tels que le haut- l'amour de la musique imilative, Haendkl ne la reje-
bois, la tlùle, la trompette sont aussi ti'aités en ,so/oet tait pas complètementet l'appelait quelquefois.àson
dialoguent avec le chant. aide pour rendre sou idée avec plus de vérité; c'est
,^;Da;is la deuxième partie de L'AUejio il l'eniiiero ainsi que, dans la Fétu d'Alexandre, au moment on
cd il Moderato (1740), il y a lieu de remarquer un ce prince, rendu furieux par l'orgie, mel le feu à Per-
dialogue entre le violoncelle solo et la voix. IJans ce sépolis, l'oichestre et les chœui's rendent d'une ni,T-
même ouvrage comme dans beaucoup d'autres d'ail- nière saisissante le tumulte d'un peuple efl'rayé. » Il
leurs, les trompeltes doublent les hautbois, qui, à y a quelque excès dans cette admiration ce pas- ;
leur tour, doublent h? violons. sage est peu de chose, à vrai dire, et ne constitue
iJans ï opérai, lusl in I7:!()), on rencontre à la scène iv
(
qu'unebienfaible tentalivede symphonie pittoresque.
ile l'acte premier un joli etfet de détail : la combi- Nous empruntons quelques exemples aux ouvrages
naison d'une tlûte jouani a l'imisson du hautbois, de 11ae.\'dkl. D'abord un air de J/(S<t;i [Giusiino) où l'on
une deuxième llùte, cl enlin une viole de gambe à veri-a le curieux agencement d'une trompette, de deux
hautbois et du quatuor :
All''gTO
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TROMBA r r fp r^ ^r r
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OBOE 1.
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VIOLINO I . 4^^^^^ ^
VIOLINO II .
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TECH.VIQUE, ESTHKTIQl'E ET PÉDAGOGIE HISTOIRE DE L ORCHESTRATION 224R
Résurrection nous l'oui-nit nii intéressant dialof;iie du violon solo, de deux viole< de pambe el de Ions
les instninienls :
H.ENDKi., La Resurrezionc
Adaçio
VIOLINO SOLO 1 m ^
VIOLA
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GAMBA ^^
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VIOL. 1T
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2i'>r, ENCYC.lMI'KniE DE LA MUSIQUE ET DICTIONNAIRE DU CONSERVATOIRE
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1res caraotérislique de l'orchestre sonore deHAENOEL, Arioso » (basse). Le dessin est confié à deu.K violes
«
avec ses Irois Irompet-tes et ses deux hautliois vigou- d'amour. Lu luth a une partie indépendante. Basse
reux (p. 2247). el conlinuo.
(alto). Viole de gambe solo et conlinuo-
Passons à l'orchestre de Bach. Voici d'abord les Aria
« >>
H.t:NDEL, Josiié :
TROMBA I.
TROMBA n.
TROMBA m.
TTMPANI
OBOE I.
OBOE II,
VIOLINO I. H
VIOLA
TUTTI BASSI
PIANO FORTE
(Réduction de
l orchestre)
î2'iS ENCYCLOPÉDIE DE LA MUSIQUE ET DICTIONNAIRE DU CONSERVATOIRE
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TECHNIQUE, ESTHÉTIQUE ET PÉDAGOGIE HISTOIRE DE L'ORCHESTRATION 224 9
2250 ENCYCLOPÉDIE DE LA MVSlQVE ET DICTIONNAIRE DU CONSERVATOIHB
FLAUTO TRAVERSO I.
FLAUTO TRAVERSO
OBOE DA CACCIA
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VIOLINO II.
VIOLA fîîi
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ORGANO e CONTINUO
TECHNIQUE, ESTHÉTIQUE ET PÉDAGOGIE HISTOIRE DE L'ORCHESTRATION 2251
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8252 ENCYCLOPÈniE DE LA MVSIQUE ET DICTIONNAIRE DU CONSERVATOIRE
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lunaisons. Bach utilise ainsi Ions les instruments dont J.^Voici maintenant composition des deux orches-
la
il dispose, et le caractère même de chaque agent so- tres de la Passion selon saint Mathieu :
22r.'i ESC.YCLOI'fi.niE DE LA MUSIQUE ET DICTIONNAIRE DU CONSERVATOIRE
lÎM H. /.(! Viisxinn ^l'iov siiiiil Mathieu
Coro I.II.
Flaulo
Ik'aversoI.II.
Oboe I.
Oboel
Viokno I.
Violino II.
Viola 1^ ^^ ^m
Soprano
Î^ Tî
Der du den
i^ y
Tem _
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É^
Gol_ies zer.
Alto 1^ . 1T î 1T ]T îî ^flî
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Der du den
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Flauto
Iraverso LII.
©boc
Oboe
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II.
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VioliiK) i. t
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ViohnoII.f ^^N^-fj^ « M «e ^^ jtfj-[3 ^j;C^
Viola
Soprano
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Cj ^^ ^ ^
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^^^^^
Der du den Tempel Gottes zerbrichst,und bau est
Alto in
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'^iM.i'ppc-ihiin'Mî V r'r^ r f r rff i^
Tenore rnrTf PC [1
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Basse
Der du den Tem. ..pel Got-tes zerbrichst, und bau
Organo e
Continue
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4
TECHNIQUE, ESTHÉTIQUE ET PÉDAGOGIE HISTOIRE DE L ORCHESTRATION 2255
2256 ENCYCLOPÉDIE DE LA MUSIQUE ET DICTIDNNAIRE OU CONSERVATOIRE
que Kacu l'occasion de tiailer et de concevoir l'or-
Premier orchestre. Deuxième orchestre.
cheslie iléi-oratif. Il en a donné quelques impressions
Klùte lruversli''i-c proriiuTC. FIlit c travorsièrc priMnière. (dans ./îi/e.s César notamment). Mais l'orchestre pro-
Kiùle traver-tiiTe deuxième, KliUe Iraversière deuxième. prement dit, le jeu des timbres, le pittoresque nais-
llaulbois premier. Hautbois premier.
sant de la fusion d'iuslrumenls divers, l'orchestre
Hautbois douxiéme. Haulb lis deuxicmo.
Violons preiniiM's. Violons premiers. traitéen instrument polyphone n'esl pas encore né.
Violons deuxièmes. Violons deuxièmes. L'instrumenlalion de ces deux grands hommes est
Premier chieur (soprano, allô, Deuxième chœur (soprano, allo monotone, lourde, monochrome, elle est à parti
ténors. Lasse. ténors, basse).
fiambes. Gambes.
pris, à compartiments, à tiroirs, à registres, comme
Orgaiw et coiUiiiuo. ûrgano et continua. l'orgue. Et elle ne pouvait être autrement. Nous
ci'oyons l'avoir assez montré.
Celte disposition spéciale permet à Bach de traiter Gluck va éclairer la lanterne splendidement. C'est
cliacun des chœurs avec son orclieslre parliciilier. avec lui que naîtra le coloris musical, cependant que,
Les clueurs el les orcheslres dialogueul. Ils ont par- dans le domaine de la musique pure, Haydn, en
fois dans l'ensemble une tàclie pai ticulièie. Parfois créant la symphonie, découvrira la vraie forme de
aussi, dans la symphonie, les deux orcliestres s'unis- la polyphonie instrumentale autonome, organisme
sent. Ue ce S3'stt'me, lî.^cu a tiré les plus heureuses nouveau, jeune et souple dont nous ne connaissons
combinaisons. L'ensemble en lui-même ne peut oITrir pas encore probablement les avatars suprêmes.
nue coloration orcliestrale très vive, mais la variété
naît des combinaisons et des alternances chorales
el instrumentales, ou de l'appui et de la large touche L'ORCHESTRE DE GLUCK
momentanée d'un orchestre sur l'autre. Les instru-
ments à timbres spéciaux, comme les hautbois d'a- Un jour, l'éditeur Corancez demandait à Gluck à
mour el de chasse, les gambes n'apparaissent que quoi tient au théâtre l'elTet foudroyant de la colère
dans les accompagnements de soli, etiaremenl dans d'Achille, dans Iphigénie en Aiilide. « Il faut avant
les ensembles. tout, lui répondit le compositeur, que vous sachiez
Les chœurs (chorals) à découvert sont soutenus à que la musique est un art très borné, et qui l'est
l'unisson de chaque partie par les llùles, liauibois et surlout dans la partie que l'on appelle mélodie. On
premiers violons pour les soprani, seconds violons chercherait en vain, dans la combinaison des notes
pour les alli, violes pour les ténors, oigne et contiauo qui composent le chant, un caractère propre à cer-
pour les basses. taines passions; il n'en existe point. Le compositeur
iNous retrouvons, dans cette œuvre, pour l'accom- a la ressource de l'harmonie, mais souvent elle-
pagnement des suli chantés, la même recherche et la même est insuflisanle. Dans le morceau dont vous
même variété dans le choix des instruments. Deux me parlez, toute ma magie consiste dans la nature
flûtes et continuo. Deux hautbois d'amour. L'n qua- du chant qui précède et dans le choix des instru-
tuor de bois deux llùles et deux hautbois de chasse
: ment^ qui l'accompagnent. Vous n'entendez depuis
dialoguant avec le chœur. Hautbois solo dialoguant longtemps que les tendres regrets d'iphigénie et ses
avec la voix, l'orchestre et les chœurs. Deux iiautbois adieux à Achille; les flûtes el le son lugubre des cors
scandant avec les accords de l'orgue un récitatif de y jouent le plus grand rôle. Ce n'est pas merveille si
ténor. vos or-eilles ainsi reposées, frappées subitement du
Premier violon concertant avec le quatuor. Deux son aigu de tous les instruments militaires réunis,
llùtes, les violes de gambe et l'orgue. Deux hautbois vous causent un mouvement extraordinaire, mouve-
de chasse, le violoncelle pizzicato. ment qu'il était, à la vérité, de mon devoir de vous
Un procédé une fois établi pour un récitatif, le faire éprouver, niais qui n'en lire pas inoins sa force
même procédé sera appliqué immédiatement dans principale d'un effet purement pliysique. »
l'air qui suit. L'exagération même de cette réponse montre quel
Bach semble se servir de ces effets instrumentaux riMe primordial Gllck attr'ibuail à l'orchestre dans
comme d'un clavier d'orgue dont il ne change les la musique de théâtre. El, puisqu'il attachait un tel
registres qu'avec un nouveau morceau. La formule prix à la valeur expressive des timbres, il suftit de
d'accompagnement est toujours une broderie en relire l'épitre dcdicaloiie d'Alcste pour comprendre
contrepoint ou canonique sur le chant, l'orgue se à quel point dut le lianter constamnieiit le souci d'une
réseivant exclusivement la partie harmonique. L'ins- instrumentation dramatique. « Je songeai, écrit- il
trumentation, dans le courant d'un moiceau, ne se dans cette préface célèbre, je songeai à réduire la
modilie point, et la variété ne vient que de la diffé- musique à sa véritable fonciion qui est de seconder la
rence des moyens employés dans les divers mor- poésie dans l'expression des sentiments eUles situa-
ceaux d'une même œuvre. tions de la Table, sans interr'oinpr'e l'action, ou la re-
Nous donnons encore deux exemples de l'orches- froidir par des ornements inutiles et superllus, et je
Iration de B.^ch. crus que la musique devait être à la poésie comme,
L'un d'eux, emprunté à la FerialNalivitatis Chrisli, dans un dessin correct et bien disposé, la vivacité
est un ensemble où entrent en jeu les trois trom- des couleurs et le contraste bien ménagé des lumières
pettes, les timbales, les flûtes, les hautbois el le et des oiubres qui servent à animer les ligures sans
quatuor (p. 2257). en allérer les contours. »
L'autre exemple, tiré de laFe)'ia//iYa<iiv(a((sC/()'is<i, Voici quelque chose de tout à failnouveatr et dont
olTre, avec la légère el délicate sinf'oiiia du début, un nous n'avons lencontré jusqu'ici aucun exemple, —
modèle de dialogue de timbres entre la première sinon peut-èlre chez iMonteveudi, —la participation
flûte et les piemiers violons, la deuxième llùteetles de l'orchestre à raclion dramatique, le renforcement
seconds violons avec la famille des hautbois d'amour des situations pathétiques parle coloris instrumental.
el de chasse p. 2260). Encore le pressentiment qu'eut MoMEVEiibr de la
Ln résumé, H.^e.ndel, homme de théâtre, avail plus puissance expressive du timbre se trouvait-il entravé
TECHNIQUE. ESTHÉTIQUE ET PEDAGOGIE HISTOIRE DE L'ORCHESTRATION "irol
Coro
TROMBA I.
TROMBA II.
TROMBA m .
TIMPAM en rÉ-LA
FLAitfTO tRAVERSO I.
OBOE I.
OBpE II.
VIOLINO I.
VIOLINO II,
VIOLA
SOPRANO
ALTO
TENORE
BASSO
FAGOTTO
ÔftGAKO e CONTINUO
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S258 ENCYCLOPEDIE DE LA MUSIQUE ET DlCTWNi\All{E DU CO.XSERVATOfltE
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2?60 ESCYCLOPÈDIE DE LA MUSIQUE ET DICTIONNAIRE DU CONSERVATOIRE
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FLAUTO TRAVERSO 1 .
OBOE d'aMORE I.
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<laiis ses applications par les lial)itudes liarmoiiiques passions diamaliques, la première créalion d'une vé-
Ce que le maître du vieil Orfco n'avait pu qu'es- assignait instinctivement à l'orchestre, lit-on dans
quisser avec l'illumination du génie, le maître du la préface d'Orphée de l'édition Pelletan, nous est
nouvel Orphée le réalisa le premier, en pleine con- founne par le simple examen de plusieurs morceaux
science volontaire. Son éducation italienne et ses composés à cette époque de sa vie. Car nous verrons
affinités françaises le dégagèrent de la polyphonie que tous les éléments constitutifs de l'air d'entrée
orchestrale où s'attardaient systématiquement les d'Orphée aux Champs-Klysées, avec son dessin obs-
grands Germains, Haeivdel et Bach. On raconte que, tiné dns violons eri triolets et le solo de hautbois
pendant un voyage de (jllxk à Londres, en 1746, on concertant sur la lente déclamation, se trouvent déjà
le présenta à Haendel qui habitait celte ville, et le dans un air A'Aniigone, opéia leprésenté à liome en
vieux maître d'outri'-Manche aurait dit, en parlant 1754. Urp/it'e constitue donc, dans l'évolution du gé-
de son jeune confrère: " Gluck entend le contre- nie de Gluck, une œuvre de ti ansition, mais en même
point comme mon cuisinier! » Au point de vue mu- temps une œuvre définitive, rar elle participe à la
sical pur, c'était peut-être une infériorité. Au point fois des qualités de l'une et de l'autre période à cha-
de vue orchestral, cette ignorance constituait un cune desquelles elle se rattache par des liens mul-
avantage que le compositeur du Messie ne pouvait tiples. '1
deviner, mais qui, seize ans plus lard, devait être Quoi qu'il en soit, c'est dans les cinq merveilleux
pour l'auteur d'Orf'eo ed Eurydice la source d'incom- opéras éclos durant la deuxième moitié de sa longue
parables trouvailles poétiques et descriptives. carrière que nous verrons éclati-r à chaque pas le
C'est seulement à l'âge de quarante-huit ans, en génie instrumental de Gluck. Autrefois, il était fort
1762, que Gluck écrivit sou premier chef-d'ceuvre, diflicile de l'étudier sûrement, jusqu'au jour où
Orphée, dont les deux premiers actes apparaissent, M"' Pelletan, avec une patience et une ardeur ad-
dans l'histoire de l'an, comme un phénomène en- mirables, réalisa l'édition délinitive qui permet
ièremenl nouveau l'intime union du cadre et des
:
aujourd'hui d'analyser aisément ces belles partitions,
22112 ENCYCLOPÉDIE DE LA MUSIQUE ET DICTIONNAIRE DU CONSERVATOIRE
à leur exécution. Non
et qui sert |jartoiil diisoriiiais de leurs accords implacables. Ainsi s'éclipsèrent,
seulement, les éditeurs anciens ne s'attacliaient pas par la volonté d'un grand artiste, moins préoccupé
à graver soif,'neusemeiit les partilions d'orchestre, d'arcliitectuie musicale que de vérité dramatique, les
mais, pour tinicK, la làclic était particulièrement vieux serviteurs de la tonalité devenus à la longue
ingrate, ce maiti'e bouillant et hroiiil Ion ayant toujours les tyrans de l'orchestre.
livré aux copistes des manuscrits d une incroyable A côlé de la suppression de ces quelques instru-
confusion et d'une insullisance d'indications désespé- ments, une adjonclion capitale apparaît, avec Gluck,
rante. On connaît là-dessus les doléances de Berlioz, dans l'opéra français l'emploi des trombones. Nous
:
qui, dans .1 Irarers chanis, a crié d'ailleurs avec tant avons vu le rôle très important que ce gioupe n'avait
d'enthousiasme son admiration pour l'auteur d'Al- cessé de remplir depuis le moyen âge dans la lourde
cesle : musique allemande. Mais à Paris, comme le dit la
« Les partilions de Gluck furejit toutes écrites avec préface de l'édition Pelletax, u selon toute probabi-
un incroyable laisser aller. Quand on en vint ensuite lité, les trombones furent introduits à l'Opéra à l'oc-
à les graver, le graveur ajouta ses fautes à celles du casion A'Alceste. Ce n'est qu'à partir de 1776 qu'on
manuscrit, et il ne parai! pas que l'auteur ait daigné vit CCS instruments compris dans les états d'orchestre
s'occuper alors de la correction des épreuves. Tantôt de ce théâtre. S'ils y avaient existé auparavant, il
les premiers violons sont écrits sur la ligne des se- est foit à présumer que Gluck ne s'en serait pas
conds, tantôt les altos, devant èlre à l'unisson des privé en écrivant Ipkigénie en Aididi'. A plus forte
basses, se trouveni, par suite d'un « col basso » né- raison, ne les aurait-il pas supprimés lorsqu'il refit
gligemment jelé, écrits à la double octave haute de pour la scène française l'Orfeo. où ils sont d'un si
celles-ci, et font, en conséquence, entendre parfois puissant elTet. La suppression des trombones dans
les notes de la basse au-dessus de celles de la mé- Alcesle était impossible. Bien qu'ils soient employés
lodie; l'auteur ici oublie d'indiquer le ton des cors, avec beaucoup plus de réserve dans la partition fran-
ailleurs il a négligé d'indiquer l'instrument à vent çaise que dans la partition italienne, leur rôle y est
qui doit exécuter une partie saillante; esl-ce une absolument indispensable. En obtenant l'introduction
flûte, un hautbois, une clarinette? On ne sait. Quel- de ces instruments dans l'orchestre, Gluck rendait
quefois, il écrit sur la ligne des contrebasses quel- un véritable service à la musique française. Aussi,
ques notes importantes pour les bassons, puis il ne vit-on bientôt les contemporains, PhiLidor, Floquet
s'occupe plus d'eux, et l'on ne peut savoir ce qu'ils et autres, enrichir leurs partitions de cette acquisi-
deviennent ensuite... tion nouvelle, ji
« ... Je n'en Unirais pas de décrire un tel désordre. L'introduction des trombones dans la musique de
Il y a même, dans la grande paitiliou française (d'.U- théâtre mérite qu'on y insiste, parce que l'apport de
cesle), par suite d'une faute de copie, une cacopho- cette sonorité si riche, si spéciale et dont Gluck a
nie d'instruments de cuivre digne de certaines parti- fait une adaptation surprenante, donne à ses œuvres
tions modernes. Alceste, Iphujénie en Tauride, VOrfeo italien, Alceste
« Gluck dit, dans une de ses lettres « Ma présence
: surtout, un coloris puissamment dramatique. Les
aux répétitions de mes ouvrages est aussi indispen- ressources de cet instrument, mises à la disposition
sable que le soleil à la création. » Je le crois bien, des prédécesseurs de Gluck, nous auraient fourni
mais elle l'eùl été un peu moins s'il se fût donné la peut-être des exemples de coloris tout dillérents;
peine d'écrire avec plus d'atlention, et s'il n'eût pas mais nul mieux que l'auteur d' Airelle ne pouvait,
laissé aux exécutants tant d'intentions à deviner et semble-t-il, employer ce timbre avec autant de va-
tant d'erreurs à rectifier. » riété, de giandeur et de dramatique à-propos. Et l'on
Aujourd'hui, tous les points obscurs de l'orches- peut dire que la puissance de sa sonorité prédesti-
tration de Gluck, sont à peu près dissipés, et nous nait en quelque sorte le trombone à magnilier, pour
pouvons nous rendre un compte très exact de sa ses débuts en France, les tragiques inspirations du
technique. Examinons donc tour à tour les agents chevalier.
sonores utilisés par lui, les recettes qu'il employa le L'utilisation des bassons est, en revanche, moins
plus souvent et les senliments qu'il parvint à expri- remarquable chez lui. « Le plus souvent, leur partie
mer au moyeu de son instrumentaliou si neuve. se confond avec celle des basses, dit l'édition Pelle-
Si l'on com.pare une partition de Gluck à celle de tan, et si, par instants, elle s'en sépare, c'est toujours
l'un de ses prédécesseurs Lulli, Hameau ou Haendel,
: sur la même partie qu'elle est indiquée. Dans la partie
le premier point qui frappe l'observateur, même le séparée originale, on a éciit presque toute la partie
moins attentif, c'est la suppression de la basse con- des basses. Le chef d'orchestre a désigne ensuite les
linue cliez l'auteur d'AIccste. Enlin ce « ronronne- morceaux ou les passages dans lesquels les bassons
ment » ininlerrompu, qui alourdit et rend si mono- devaient se taire. Il doit donc être permis de ré-
tones les partitions antérieures et dont nous avons soudre dans ce sens la question, tant de fois soule-
constaté tant de fois l'obstination malencontreuse vée, des bassons... » Parfois, cependant,Gluck a uti-
pendant plus de cent cinquante années, disparaît lisé aussi leur timbreavec beaucoup d'à-propos.
dérinitivemeut de la musique théâtrale. Ce n'est pas Pour n'en citer qu'un exemple, dans l'air d'Adméte :
seulement un allégement, c'est la liberté conquise : « Alcesle, au nom des Dieux! » le basson, dialoguant
liberté de la déclamation, liberté de l'harmonie, avec la flûte et le premier violon, prend un carac-
liberté des timbres eux-mêmes enlin désembrumés tère douloureusement expressif qu'il n'avait pas
de cet estompage incessant. connu jusque-là.
Avec la basse continue, ne disparaissent pas seu- La suppression de la basse continue aurait dû con-
lement les întruments comme le cliitarrone, destinés traindre Gluck à confier aux basses de son orchestre
uniquement à soutenir sur leur courbe fatidique tout un rôle nettement dilférent de celui que lui attri-
l'édilice sonore, mais encore les luths et les clavecins, buaient ses prédécesseurs. Mais aucun auteur ne peut
qui plaquaient sous tous les dessins instrumentaux trouver du jour au lendemain, même avec la com-
a réalisation du cojiimMo, enveloppant les mélodie* plicité du génie, des formes profondément nouvelles,
TECHNIQUE, ESTHÉTIQUE ET PÉDAGOGIE HISTOIRE DE L'ORCHESTRATION 2263
canse principale pour que nous ne puissions mieux avec quel admirable effet) dans le chœur des Scythes
faire que de le citer inléyralement. Si, dans les opé- à'Iphiijénic en Taurnle, les cymbales seules, sans
ras de Gluck, écrit-il, les basses trop simples «ne sont grosse caisse, que les routiniers de tous les pays
presque jamais dessinées d'une façon inléressanle, et croient inséparables. Dans un ballet du même opéra,
se bornent à soulenir l'harmonie en frappant d'une il employa avec le plus rare bonheur le Irianyte seul.
note contre note le rythme de la mélodie, aujour- Si nous passons aux instruments de l'harmonie,
d'hui, les coniposileurs habiles ne dédaignent plus nous verrons que Gluck les a très inégalement em-
aucune partie de l'orchestre, s'attachent à répandre ployés. Il a fort bien utilisé la llùte chaque fois qu'il
sur toutes l'intérêt et à varier les formes rythmiques se préoccupait uniquement de son timbre; à maintes
autant que possible. L'orchestre de Gluck en fjénéral reprises, il fit de cette sonorité fiole, délicate et pure
a peu d'éclat, si on le compare, non pas aux masses un emploi merveilleusement poétique. C'est ainsi,
grossièrement bruyantes, mais aux orchestres bien par exemple, qu'il s'en servit génialement dans la
écrits des vrais maîtres de notre siècle. Cela tient à marche religieuse d'Alcesle. « Ecoutez, nous dit tou-
l'emploi constant des instruments à timbre aigu jours Reulio/., ce morceau instrumental,... entendez
dans le médium, défaut rendu plus sensilile par la cette mélodie douce, voilée, calme, résignée, cette
rudesse des liasses, écrites fréquemment, au con- pure harmonie, ce rythme à peine sensible des bas-
traire, dans le haut, et dominant alors outre mesure ses dont les mouvements onduleuxse dérobent sous
le reste de la basse harmonique. On trouverail aisé- l'orchestre, comme les pieds des prétresses sous
ment la raison de ce système, qui ne fut pas, du leurs blanches tuniques prêtez l'oreille à la voix inso-
;
reste, exclusivement le partage de Gluck, dans la fai- lite de ces fliV.es dans le grave, à ces enlacements des
blesse des exc'cutanls de ce temps-là; faiblesse telle deux parties de violon dialoguant avec le chanl, et
que Vut au-dessus des portées faisait trembler les dites s'il y a en musique quelque chose de plus beau,
violons, le la aigu, les llùtes,et le ré les haulliois. dans le sens antique du mot, que cette marche reli-
D'un autre côté, les violoncelles paraissant (comme gieuse. L'instrumentation en estsimple, mais exquise;
aujourd'hui encore en Italie) un instrument de luxe il n'y a que les instruments à cordes et deux instru-
dont on tâchait de se passer dans les théâtres, les ments à vent. Et là, comme eu maint autre passage
contrebasses demeuraient chargées presque seules de ses œuvres, se décèle l'instinct de l'auteur; il a
de la partie grave; de sorte que, si le compositeur trouvé précisément les timbres qu'il fallait. Mettez
avait besoin de serrer son harmonie, il devait néces- deux hautbois à la place des fliltes, et vous gâterez
sairement, vu l'impossibilité de faire entendre assez tout. )'
les violoncelles et l'exlrênie gravité du son des contre" Il emploie moins heureusement ces mêmes instru-
basses, écriie cette partie très haut, afin de la rap- ments dans beaucoup de tutti, lorsqu'il ne songe
procher de celle des violons. point spécialement à leurs qualités expressives, quand,
« Depuis lors, on a senti en France et en Allemagne selon notre définition, il se préoccupe moins de l'ins-
l'absui'dité de cet usage, les violoncelles ontété intro- trumentation proprement dite que de l'orcliestralion.
duits dans l'orchestre en nombre supérieur à celui Il lui ariive alors de sacrifier ses tîntes, par exemple
des contrebasses, d'où il est résulté que les basses dans l'air d'Alceste « Ah! malgré moi, mon faible
:
de Gluck, dans plusieurs endroits de ses ouvi'ages, se cœur partage... », où elles succombent complètement
trouvent aujourtl'bni placées dans des circonstances sous la lourdeur des seconds violons.
essentiellement différentes de celles qui existaient Il en use exactement de même avec ses cors, les
de son temps, et qu'il ne faut pas lui reprocher l'exu- utilisant en perfectioncomme timbre, les écrivant
bérance qu'elles ont acquise malgré lui aux dépens mal dans ensembles, par exemple dans le pre-
les
Aulide de Gluck que la grosse caisse se fit entendre partout très habilement, dans l'A/cesie française, par
pour la première fois à l'Opéra de Paris, mais seule, des clarinettes.
sans cymbales ni aucun autre instrument à percus- Mais l'instrument qu'il utilisa peut-être avec le
sion. Elle figure dans le dernier chœur des Grecs, plus d'habileté, c'est le hautbois, dont il a fixé défi-
dont les premières paroles sont n Partons, volons à
: nitivement le caractère pathétique et douloureux,
la victoire! n Ce chœur est en mouvement de marche et qu'il fait toujours intervenir avec un admirable
et à reprises. Il servait au défilé de l'armée thessa- sentiment de son caractère, de son intensité propre
lienne. La grosse caisse y frappe le temps fort de et de sa puissance mélancoliquement perçante.
22i;'< ENCYCLOPÉDIE DE LA MUSIQUE ET DICTIONNAIRE DU CONSERVATOIRE
Coniiiicnt (;LiiCK,élaiildiiimé ces ressources orclies Uien ne peut mieux faire percevoir l'essence d'un
Irales et ces agents sonores, les mil techniqiiemenl tempérament véritablement orchestral que la genèse
en œuvre, c'est ce qu'il nous est impossible de dire de ce merveilleux passaf.'e. Voici comment Desnoihes-
ici, car il faudrait, sortant de notre programme, ïERnEs raconte l'anecdote: « Après une répétition
étudier sa composition tout entière. Il a cependant d'Armide, Gluck s'élail rendu au bureau de copie
introduit dans la musicine certaines recettes plus pour indiquer quelques erreurs. Il y rencontre M. Le-
particulièrement instrumentales qu'il est essentiel febvre, qui en était le chef, et avec lequel il était sur
lie mentionner. un certain pied de familiarité et d'amitié. 11 lui
C'est ainsi qu'il a fait des diverses sortes de notes demande si Armide est de son goiU, s'il y trouve
répétées un emploi particulièrement remarquable. quelque endroit qui lui aille moins, enfin son senti-
.\ous avons vu Rameau mesurer exactement dans le ment sur l'ouvrage. Lefebvre lui répond que, pour ce
tonnerre A'IUppobjte et Aricic les notes battues qu'il qui est de la musique, il n'y a qu'à louer. Mais quel-
conlie à ses instruments à cordes et les tigurer soi" que chose le chagrine. C'est cette pauvre Armide, si
gneuseraenl à raison de seize par mesure. Gluck, au inhumainement traitée par la Haine et qu'on accable
contraire, va introduire dans son orchestre (rois d'imprécations et d'épouvantables menaces; il ne
sortes de tremblenii'nts dilféreiits les uns des autres, voudrait pas voir achever l'acte sans que la pauvre
mais où le morcellement rythmique est abandonné femme, à terre, ne se relevât par' un appel à une di-
au sentiment des exécutants. vinité propice. D'autres eussent souri; le chevalier,
Berlioz les a très nettement déciits dans son étude très attentif h lamoindre indication, se dit que ce
sur Alceste : « Le récitatif « Arbitres du sort des hu- souhait du chef du bureau de copie ponrraitbieii être
mains dans lequel Alceste, agenouillée aux pieds
i> celui du public et n'ajourna pas an lendemain à lui
de la statue d'Apollon, prononce son terrible vœu, donner satisfaction. Il se mit tout aussitôt à rimer les
olîre cela de particulier, dans son instrumentation, quatre vers suivants qui devaient clore son troisième
que la voix y est presque constanimerit suivie à l'u- acte :
hautbois, deux clarinettes etdeuxcors, sur le trémolo Amour, puissant Amour, dissipe mon elîroi.
de tous les instruments à cordes. Ce mot trémolo Et prends pitié d'un cœur qui s'abandonne à toi.
(tremblé) n'indique pas dans les partitions de Gluck
ce frémissement d'orchestre qu'il a employé ailleurs Sous ces vers, les deux premiers psalmodiés avec
fort souvent et qu'on nomme trémolo, dan^ lequel effarement, les deux derniers délicieusement rou-
la même note est répétée aussi rapidement que pos- coules par la magicienne, il imagina, et c'était un
sible par une multilirde de petits coups d'archet. Il trait de génie, de placer celte note unique, ce ré pal-
ne s'agit ici que de ce tremblement du doigt de la pitant exécuté sur la deuxième corde à vide des vio-
main gauche appuvé sur la corde, et qui donne au lons; elle prend un caractère de vertige et d'égare-
son une sorte d'ondulation; Gluck l'indique par ce ment amoureux peu à peu avec une inef-
et s'apaise
signe, placé sur les notes tenues v./%/\.^v^/vy> et quel-
:
fable douceur Adorable de sentiments qu'on
conflit
quefoisaussi par le mot ap/)0;/wto (appuyé), lly a en- retrouve, un siècle plus tard, obtenu par un procédé
core une autre espèce de tremblement, qu'il emploie très analogue dans le final d'Anlarde Risisky-Kohsakow
dans les récitatifs, dont l'etfet est fort dramatique et qui, lors de la dernière reprise d'Armide, trans-
;
il le désigne par des points placés au-dessus d'une porta d'enthousiasme les auditeurs du xx' siècle.
Indépendamment de pareils procédés, extrême-
grosse note et couverts par une courbe ains ;••••• ment nouveaux au milieu du xviir» siècle, Gluck dut
Cela signifie que les archets doivent répéter sans ra- encore imaginer nombre de r'ecettes instr-umenlales,
pidité le même son d'une façon irrégulière, les uns de moyens expressifs pratiques... Malheureusement,
faisant quatre notes par mesure, d'autres huit, d'au- son extraordinaire paresse graphique, en nous livrant
tres cinq, ou sept, ou six, produisant ainsi une mul- de lui des partitions très incomplètes comme indica-
titude de rythmes divers qui, par- leur incohérence liorrs, nous laisse ignorer ce qu'il demandait sous ce
,
troublent profondéiuent toutTorchestre etrépandent rapport à ses " sinfonistes )>. Bkblioz, par exemple,
sur les accompagnements ce vague ému qui convi ent nous a transmis lun de ces trucs. De qui le tenait-il?
à tant de situations. >. Il a négligé de le dire, mais donnons-lui encore une
En dehors de ces tremblements ad libitum, Gluck fois la parole. Au dernier acte d'Alceste, le thème
s'est aussibeaucoup servi des tremblements mesu- i< Caron t'appelle, entends sa voix » est monotone
rés. L'un deux appartient au fameux monologue d'O- comme le chœrrr des dieux infernaux « Malheureuse, :
fois d.Tiis chaque mesure, démentent par leur agita- tonique. Il est toujours précédé et suivi de trois sons
tion les paroles du chanteur. Un autre tremblement de cor donnant la même note que la voix, mais d'un
plus remarquable encore c'est le ré obstiné des se- caractère mystérieux, rauqne, caverneux. C'est la
conds violons, qui se répète pendant vingt mesures conque du vieux nocher du Styx, retentissant dans
à la péroraison du troisième acte d'Armide, suivant les profondeurs du Tartare. Les notes naturelles
un dessin extraordinairement fiévreux. Il s'agit d'un (dites ouvertes) du cor sont fort loin d'avoir celle
andante à trois temps, durant lequel les archets bat- sonorité bizarrement lugubre que Gluck rêvait pour
tent régulièrement quatre doubles croches au pre- l'appel de Caron, et si l'on s'avisait de laisser les cor-
mier temps, quatre triples croches et deux doubles nistes exécuter tout simplement les notes écrites,
croches au second temps, et quatre doubles croches on commeltrait une grave erreur et une infidélité
au troisième temps de chaque mesure. On ne saurait capitale. tJLUcR ne trouva pas tout d'abord cet éton-
exprimer l'étrange frisson que communique à tout nant eH'et d'orchestre. Dans VAlceste italienne, il
le mouvement l'accélérat