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Le classicisme en musique et la transition vers

le romantisme avec Beethoven

I- Le classicisme au niveau de la forme dans la musique


instrumentale :

1- Le mouvement et le contraste :
La période dite classique correspond généralement à la deuxième moitié de 18ème
siècle, et vient bien évidemment à la suite de la période dite baroque. Cependant, on peut
déceler une évolution continue de la forme dans la musique instrumentale à partir de la
renaissance sur la base des notions de mouvements et de contraste.
En effet, la suite de danses (dans la renaissance puis au baroque) est une forme
musicale fondée sur la succession de différentes danses, de manière à créer le maximum de
différence lors du passage d’une danse à l’autre au niveau du caractère et de la vitesse.
Progressivement, l’élément de la danse disparait pour ne laisser que le « mouvement » avec
comme principale caractéristique la vitesse. On arriva ainsi à l’idéal paradigmatique de trois
mouvements successifs selon l’ordre : rapide, lent, rapide dans la musique baroque dans des
formes telles la sonate ou le concerto.
Il s’agit là certainement d’une spécificité occidentale, puisque c’est le contraste et la
rupture qui rythment l’évolution de la macro-forme, ce qui trahirait éventuellement une
certaine influence du théâtre.
La vitesse est également associée aux différents caractères : dramatique, contemplatif,
plein d’humour, héroïque, pathétique …. Et c’est bien dans la période classique et ses grandes
formes instrumentales que ces principes esthétiques et formels se sont le plus clairement
épanoui.

2- Les grands genres instrumentaux de la période classique :


La sonate : Composition en trois mouvements pour un instrument généralement
(rapide, lent, rapide généralement)
Le quatuor ou autres compositions pour petit ensemble instrumental, sur le même
schéma formel que la sonate (cette catégorie s’appelle musique de chambre). La forme la plus
connue est celle du quatuor à cordes (deux violon, violon alto et violoncelle).
Le concerto : toujours sur le même principe de succession des mouvements,
cependant, le concerto met en exergue un seul instrument en face à tout l’orchestre, de même
que les capacités d’un instrumentiste virtuose. On parle ainsi de concerto pour piano et
orchestre, pour violon et orchestre etc.
La symphonie : forme la plus complexe et la plus révélatrice de la maitrise du
compositeur. Contrairement aux formes précédentes, elle se compose de quatre mouvements.
Rapide, lent, danse de vitesse moyenne (généralement le menuet), rapide. C’est une grande
œuvre pour tout l’orchestre (d’où l’appellation d’orchestre symphonique).
3- La structure sonate : (Faire la différence avec le genre sonate.)
Il s’agit précisément de la structure du premier mouvement de tous les genres précités,
et donc du schéma formel suivi dans la construction de ce mouvement. Il est toujours d’usage
de parler de trois phases lors du premier mouvement :
- L’Exposition des deux thèmes principaux du mouvement (éventuellement précédés
par une petite introduction). Encore une fois, le principe du contraste est
respecté car ces deux thèmes sont de vitesse et de caractère différents.
- Le Développement : phase la plus mouvementée et la plus instable. Généralement
l’un des deux thèmes est sujet à de fortes transformations : décortication,
changement de caractère, de dynamique, de couleur ; l’autre thème est présenté
mais n’est pas forcément transformé.
- La Reprise : elle suit le schéma de l’exposition mais acquiert un caractère
beaucoup plus conclusif. Cette dernière phase a acquis une dimension de plus en
plus grande et indépendante au fil du temps.

II- Beethoven (1770-1827) et la transition vers le romantisme :


1- Présentation générale :
Figure emblématique de la musique et de la culture occidentale, Beethoven est une
réelle charnière entre classicisme et romantisme. Il présente avec Hayden et Mozart l’apogée
du classicisme, tout en ouvrant la porte aux sensibilités romantiques. Maître incontestable de
la musique instrumentale, il a excellé principalement dans la sonate (notamment pour piano),
dans le concerto, dans la musique de chambre avec ces quatuors et bien évidement dans la
symphonie. Trois périodes principales se distinguent dans l’évolution du style de ce grand
génie :
Première période : Purement classique
Deuxième période : à partir de la troisième symphonie
Troisième période : à partir de la 9ème symphonie

2- Les prémices du romantisme dans les symphonies de Beethoven :


Les symphonies de Beethoven nous renseignent facilement sur son évolution, de
même que sur les débuts du romantisme, que ce soit au niveau de l’expressivité ou de la
forme. Ainsi, seront abordées sous cet angle ses symphonies les plus célèbres.
- Troisième symphonie dite « Héroïque » :
Beethoven fût un grand admirateur de Napoléon et des idéaux de la révolution
française. Ainsi, il dédia initialement cette symphonie au premier consul de France, avant de
savoir que ce dernier s’est proclamé Empereur. Très déçu, le compositeur retira cette
dédicace.
Le deuxième mouvement est une « Marche funèbre » : sorte de chant de condoléance
pour les victimes des guerres qui déchiraient l’Europe. La tristesse et la déchirure vont de
pair avec l’apaisement ; la douleur collective s’exprime à travers l’individu.
Le troisième mouvement n’est plus le menuet, cette danse paisible, joyeuse et douce.
Désormais, c’est le « scherzo » qui prend sa place avec son énergie troublante et son humour
sarcastique. D’ailleurs, cela va devenir une tradition qui va persister même dans les
symphonies du 20ème siècle.

- Cinquième symphonie :
Le thème du premier mouvement de cette symphonie est certainement parmi les plus
célèbres de la musique classique. Certains aiment le considérer comme le thème du Destin,
bien que Beethoven n’eut laissé aucune note concernant ce sujet. Il est cependant indéniable
que l’acharnement rythmique du motif et la force avec laquelle il attaque l’émotion des
mélomanes est unique. En outre, ce motif -du moins sa pulsation rythmique- reste
omniprésent pendant tout le mouvement, donnant l’illustration parfaite de l’idéal d’organicité
dans la construction d’une œuvre d’Art.
Cette symphonie est très originale également puisqu’il n’y a pas d’arrêt entre le
troisième et le dernier mouvement. L’entrée triomphante de ce dernier mouvement est
préparée à la fin du troisième, dans un jeu de « perspective » sonore et émotionnelle tout à fait
inédit pour l’époque.
Si le premier mouvement traduirait l’attitude psychique de lutte (contre les coups du
destin), le dernier met en valeur une volonté humaine, victorieuse et jubilante jusqu’à
l’exaltation.

- Sixième symphonie dite « pastorale » :


Œuvre écrite parallèlement à la cinquième, elle présente une magnifique Ode à la paix
trouvée dans la nature (mouvements 1,2 et 5) de même qu’à la gaité paysanne (mouvement 3).
En outre, par son déchaînement (tempête du 4ème mouvement), cette nature symbolise l’état
d’âme absolument tourmenté, éventuel reflet de la situation dramatique du compositeur
confronté désormais à sa surdité.
Cette symphonie comporte ainsi cinq mouvements au lieu de quatre, de même que les
trois derniers sont liés entre eux, sans pause. Le dernier mouvement (beau temps après la
tempête) n’est pas un final héroïque ou victorieux comme dans les symphonies précédentes,
mais plutôt l’expression d’une paix retrouvée et d’une lumière grandiose et enivrante.

- Neuvième symphonie :
Le quatrième mouvement de cette œuvre gigantesque est célèbre par « l’Hymne à la
joie » sur un poème de Schiller. Le chant choral et soliste est introduit dans la symphonie, fait
inédit jusqu’à lors. Il s’agit d’un hymne à une joie universelle sans frontières ni limites. A
noter que le début du thème célèbre de ce mouvement est officiellement l’Hymne de l’union
européenne.
Le début du premier mouvement donne l’impression d’une lumière transcendante qui
descend du ciel, ou d’une révélation divine d’une lourde vérité. Les rôles des deuxième et
troisième mouvements -selon l’ordre classique- sont permutés ici, puisque le mouvement lent
succède au scherzo et non le contraire.
Le scherzo commence par un thème puissant et énergétique, avant l’apparition d’un
deuxième thème rappelant l’ambiance pastorale de la sixième symphonie pastorale. Le
troisième mouvement est une longue méditation qui se profile très progressivement, où le
temps devient presque figé, dans un contraste absolu avec le final.

3- Synthèse :
Les traits du romantisme se trouvent indéniablement au niveaux suivants :
- Sur le plan formel : le nombre de mouvements dans la sixième (5 au lieu de 4) ; le
passage sans pause entre les deux derniers mouvements de la cinquième et les trois
derniers mouvements de la sixième ; la permutation du mouvement lent et du
scherzo dans la neuvième. Ces changements sont suggérés par la logique d’écriture
propre à Beethoven et à ses besoins expressifs. Il n’a donc point hésité à bousculer
le moule classique dans une optique très individuelle.
- Les dimensions expressives et esthétiques nouvelles : En effet, la musique va de la
plus la plus fragile sensibilité jusqu’à la brutalité crue. La palette expressive de la
période classique se voit extrêmement dilatée, et pour cela, le compositeur a usé de
tous les moyens techniques nécessaires.
- La réaction à l’époque : il a pris position vis-à-vis de Napoléon par exemple, et a
été inspiré jusqu’à devenir peut-être l’un des principaux porte-parole de l’esprit
révolutionnaire titanesque de son époque. Cependant, ce serait injuste de réduire
Beethoven à ce type d’expression uniquement, car il fait preuve d’un lyrisme et
d’une tendresse -non moins romantiques d’ailleurs- dans d’autres œuvres comme
dans la « Lettre à Elise » ou dans le premier mouvement de la sonate dite « au clair
de lune ».

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