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Fiscalité locale des entreprises :

Fiscalité locale des entreprises : un échec français


un échec français
CET, CFE, CVAE, IFER, TASCOM, TLPE, VT… Derrière cette litanie d’acronymes
se cache un millefeuille méconnu du grand public : celui de la fiscalité locale des
entreprises. Fruit de plus de trente années de politiques de décentralisation, ce
millefeuille « caché » n’a eu de cesse de s’épaissir dans l’opacité la plus totale ; si
bien qu’aujourd’hui, la fiscalité économique locale pèse plus que l’impôt sur les
sociétés.

Ce faisant, cette note se propose dans un premier temps de revenir sur le serpent
de mer français de la réforme territoriale, épine dorsale de la fiscalité locale et que
nos propositions – pour être cohérentes et efficaces – ne pourront ni contourner
ni évacuer. Dans un second temps, nous plongerons dans les abysses de la fiscalité
économique locale où l’obscurité est passée reine au fil des vagues successives
de décentralisation. Enfin, sans prétendre proposer un schéma optimal tant les
scénarii envisageables sont multiples, les 20 propositions que nous formulons
ambitionnent, à cette aune, à la fois de réviser l’organisation territoriale de la
République tout en rationalisant le maillage fiscal local qui en découle au profit
à la fois des collectivités et des entreprises avec, en ligne de mire, la nécessaire
préservation de la soutenabilité des finances publiques.

Fiscalité locale
Préface de Dominique Perben – Ancien ministre
Avant-propos de Geoffroy Roux de Bézieux – Président du MEDEF
Introduction de Jean-Luc Monteil – Président du MEDEF Provence-Alpes-Côte

des entreprises :
d’Azur
Entretien avec Pascal Saint-Amans – Directeur du centre de politique
et d’administration fiscales de l’OCDE
Postface de Bertrand Badré (ancien directeur général de la Banque mondiale)
& Denis Badré (ancien sénateur) un échec français
Regard européen de Günther H. Oettinger – Commissaire européen au budget
et aux ressources humaines

L’avenir n’est pas ce qui va arriver mais ce que nous allons en faire.
Nouveau Cap - Note #2

Avec le soutien de Réflexions pour l’action


2019

16, place du général de Gaulle - CS 50013 – 13231 Marseille cedex 1


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Note #2
Fiscalité locale
des entreprises :
un échec français
Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

Créé fin 2017 et incubé par le MEDEF Provence-Alpes-Côte d’Azur, Nouveau Cap
est un think tank dédié aux territoires et se fixant pour ambition d’être un espace
de réflexions producteur d’idées novatrices et affranchies de toute logique
partisane, prêtes à l’emploi pour l’action.

Basé à Marseille, profondément ancré dans la réalité des territoires et attaché


à leur développement économique, Nouveau Cap réunit des représentants de
la société civile issus des horizons les plus variés. À travers ses publications
et ses évènements, ce think tank aspire à contribuer au débat démocratique
et à l’amélioration des politiques publiques au service de l’intérêt général
en produisant et en diffusant des propositions concrètes à l’ensemble de la
société : élus locaux et nationaux, partenaires sociaux, acteurs économiques,
associations, monde universitaire, médias, etc.

« L’avenir n’est pas ce qui va arriver mais ce que nous allons en faire. » 
Henri BERGSON

Comité d’étude
PRÉSIDENT

Boris PERDIGON 
Entrepreneur, ancien président de l’Union
pour l’Entreprise des Hautes-Alpes

MEMBRES

Gérard BONNET  Ancien président du Conseil Économique, Social et


Environnemental Régional de Provence-Alpes-Côte d’Azur
Sylvie BRUNET Professeure associée à Kedge Business School et présidente
de la section du travail et de l’emploi du Conseil Économique,
Social et Environnemental
Thierry DEBAILLE Rédacteur en chef de Businews
François GARÇON Historien et maître de conférences
à l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne
Bruno JONCHIER  Délégué régional de l’APEC Provence-Alpes-Côte d’Azur / Corse
Thierry LEMERLE Directeur de Pôle Emploi Provence-Alpes-Côte d’Azur
Jean-Luc MONTEIL  Entrepreneur, président du MEDEF Provence-Alpes-Côte
d’Azur et président de la commission Adhérents du MEDEF
Marc POUZET  Président du Conseil Économique, Social et Environnemental
Régional de Provence-Alpes-Côte d’Azur
Danièle PRIEUR Avocate et ancienne présidente du réseau Altafemina
Marc REYNAUD Ancien directeur général des services du
Conseil départemental des Alpes-Maritimes
Basile SIRCOGLOU  Ancien vice-président d’Aix-Marseille Université en charge
des partenariats avec le monde de l’entreprise

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Fiscalité locale des entreprises : un échec français

« La France est un pays extrêmement fertile :


on y plante des fonctionnaires et il y pousse des impôts. »

Georges CLEMENCEAU

Si Nouveau Cap est incubé par le MEDEF Provence-Alpes-Côte d’Azur, ses publications et les opinions qui y sont
formulées ne sauraient être imputées au MEDEF.

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Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

Préface
par Dominique Perben

Notre architecture administrative est perçue comme complexe. Elle est, en effet,
le résultat d’une longue histoire. Nos communes, d’abord, sont les héritières de
nos anciennes paroisses de l’Ancien Régime. Chaque village, autour de son église,
constitue la communauté humaine de base dont l’origine remonte à plusieurs
siècles. Ceci explique l’attachement viscéral à ces entités parfois de très petite taille.

La centaine de départements que nous connaissons aujourd’hui ont été, pour


l’essentiel, dessinés à la Révolution pour à la fois casser les particularismes provin-
ciaux, assurer une unité nationale d’esprit jacobin et permettre une administration
du territoire correspondant aux possibilités de déplacement du début du XIXème
siècle. Les préfets, nommés par le pouvoir central, en assuraient l’administration.

La IIIème République a permis, sur cette architecture, le développement des


libertés locales grâce à la mise en place de conseils élus. Cette organisation,
en deux échelons, fonctionna jusqu’à la Seconde Guerre mondiale, grâce à une
fiscalité assez simple basée sur les taxes foncières, la taxe d’habitation et la
taxe professionnelle.

La valeur des bases était fixée par les services fiscaux de l’État et les taux des
impôts par les conseils élus. La taxe professionnelle payée par les entreprises
ne pouvait pas évoluer de manière différente des taxes payées par les habi-
tants. Cette fiscalité incitait les élus à accueillir volontiers à la fois de nouveaux
habitants et de nouvelles entreprises.

Avec le développement économique qui suivit la deuxième guerre mondiale, et


afin de faciliter les efforts de planification et de programmation des investisse-
ments publics, une vision régionale s’est progressivement imposée. Ce furent
d’abord les CODER – conférences de développement économique régional –
puis les établissements publics régionaux et enfin les régions de plein exercice.
Cette création des régions, de tailles moyennes, visait à permettre une meilleure
adéquation entre espaces économiques et territoires de gestion administrative.

Enfin, au cours des années 1980, le morcellement municipal s’est révélé incom-
patible avec le nécessaire développement de nouveaux services à la population :
ramassage et traitement des déchets, accueil de la petite enfance, équipements
sportifs et culturels de proximité par exemple. C’est pourquoi, grâce à des
mesures incitatives financièrement se sont mises en place les nouvelles struc-
tures intercommunales qui pour la plupart ont mis en commun les recettes des
taxes professionnelles payées par les entreprises. C’est à l’occasion de ce déve-
loppement que le lien entre taxe professionnelle et taxe d’habitation a disparu,
entraînant bien souvent un alourdissement de la fiscalité sur les entreprises.

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Fiscalité locale des entreprises : un échec français

En quarante ans, entre les années 1960 et 2000, deux systèmes historiquement
très différents se sont donc superposés. Départements et communes d’une part.
Régions et intercommunalités d’autre part, sans qu’un effort de simplification
n’ait été entrepris. Par ailleurs, en 1981 et 1984, lors des grandes lois de
décentralisation, des compétences importantes de l’État avaient été transférées
aux collectivités locales à structures inchangées. En effet, le transfert des
compétences ne s’est pas accompagné d’une réforme des collectivités bénéficiaires
de ces nouvelles compétences. Pourtant, une réforme des structures aurait été
nécessaire pour accompagner cet accroissement des responsabilités.

C’est cette évolution historique, rapidement rappelée, qui est à l’origine de la com-
plexité de notre système d’administration locale. Cette complexité rend bien sûr
la vie des responsables d’entreprises difficile dans leurs relations avec les pouvoirs
publics. La multiplication des « guichets » et la difficulté à bien connaître le rôle de
chacun sont une gêne incontestable dans la gestion des projets. Qui maîtrise le fon-
cier, qui décide des réseaux divers, qui peut financer des formations pour les futures
embauches ? Autant de questions que doivent se poser les entreprises.

Cette situation n’a pas échappé aux responsables politiques, pourtant les réformes
mises en place ont été souvent contradictoires. De multiples rapports – évoqués
dans la note de Nouveau Cap – en ont fait les constats et suggéré des pistes de
réformes. Rapport Mauroy en 2000, rapport Balladur en 2009 notamment.

La majorité politique de 2007-2012 a voté une réforme rapprochant régions et


départements en répartissant d’une manière plus claire les compétences entre
ces deux échelons. L’objectif était, à long terme, l’absorption du département
par les régions et le renforcement des intercommunalités. En 2012, cette ré-
forme a été stoppée par la nouvelle majorité qui a suivi ensuite d’autres projets.

Établissement de très grandes régions dont la taille rend illusoire la dispari-


tion des départements, élargissement des intercommunalités et simplification
des compétences des unes et des autres. À ces réformes à caractère institu-
tionnel et administratif s’est ajoutée une réduction drastique des transferts
financiers de l’État vers les collectivités locales et une réforme de la taxe pro-
fessionnelle qui prive dorénavant les collectivités locales de la maîtrise du taux
de cet impôt sur les entreprises devenu beaucoup trop lourd. Cette dernière
phase historique explique les tensions que l’on observe dans les relations entre
État et collectivités locales depuis quelques années.

Où en est-on arrivé aujourd’hui ? À quel schéma est-on parvenu ?


De très grandes régions en charge de définir des stratégies de développement
économique et de soutenir les efforts de formation et de recherche. Des dépar-
tements, de plus en plus concentrés sur la gestion des prestations sociales et
soucieux d’assurer un certain équilibre entre monde urbain et monde rural.

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Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

Des intercommunalités qui structurent de plus en plus la vie communale et


assurent pour l’essentiel la gestion des services de proximité à la population.

Mais au-delà de ce bilan provisoire, on voit se dessiner une nouvelle évolu-


tion. Notre système administratif territorial va de plus en plus se diversifier.
L’ensemble du territoire ne sera plus demain organisé de la même manière
sur tout l’Hexagone. D’ores et déjà une petite dizaine de métropoles a vu le
jour. Elles ont vocation à absorber progressivement, sur leur territoire, les
compétences du département.

Parmi elles, Lyon et Marseille ont des règles de fonctionnement particu-


lières. Demain l’Alsace va renaître via la fusion de ses deux départements
et récupérer une partie des compétences de la région Grand Est à laquelle
elle appartient. J’ai la conviction que demain, d’autres départements vont se
rapprocher et probablement essayer de négocier avec leur région des déléga-
tions de compétences. Ainsi une réelle flexibilité va se développer dans notre
paysage uniforme. Ce sera sans doute un bien pour coller au maximum au
terrain et aux spécificités locales. Ce ne sera certainement pas un atout pour
rendre notre système administratif plus lisible.

En conclusion, je dirais volontiers que notre pays a réussi sa décentralisation


dans la mesure où le dynamisme de ses élus et une relative aisance financière
des années 1980 à 2010 ont permis un niveau élevé d’aménagements et d’équi-
pement du territoire. La contrepartie a été un alourdissement significatif de
la fiscalité locale, en particulier sur les entreprises et une complexité crois-
sante de notre organisation administrative. La détérioration de la situation
financière des collectivités locales va sans doute pousser à une répartition plus
claire des compétences et à une relative simplification des structures.

Dominique PERBEN
Avocat
Ancien Garde des Sceaux, ministre de la Justice
Ancien ministre de la Fonction publique, de la Réforme de l’État et de la Décentralisation

Dominique PERBEN
Licencié en sciences économiques de l’Université de Lyon, diplômé de Sciences Po Paris et ancien élève de l’École nationale
d’administration, Dominique Perben occupe différents postes dans la préfectorale en qualité de sous-préfet ainsi qu’au sein
de la DATAR avant de devenir en 1977 chef de cabinet de Norbert Ségard, secrétaire d’État aux PTT. De 1982 à 1986, il est
ensuite directeur général des services de la région Rhône-Alpes. En 1983, il est élu maire de Chalon-sur-Saône et sera réélu
aux 1ers tours en 1989, 1995 et 2001. Il est par ailleurs élu député de Saône-et-Loire en 1986 et réélu en 1993, 1995, 1997
et 2002 avant de devenir député du Rhône de 2007 à 2012. Investi dans la vie publique locale, il sera en outre conseiller
régional de Bourgogne (1992-1993) et premier vice-président du conseil général du Rhône chargé de la vie associative et de
l’innovation sociale (2004-2011). Dominique Perben occupe en parallèle différentes fonctions ministérielles dans les gouver-
nements Balladur, Juppé, Raffarin et de Villepin. Il sera ainsi successivement ministre des DOM-TOM (1993-1995), ministre de
la fonction publique, de la réforme de l’État et de la décentralisation (1995-1997), Garde des Sceaux (2002-2005) et ministre
des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer (2005-2007). Désormais avocat au barreau de Paris, Dominique
Perben a exercé au sein du cabinet Boken de 2010 à 2017 avant de rejoindre le cabinet Betto Seraglini en qualité d’associé.

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Fiscalité locale des entreprises : un échec français

Avant-propos
par Geoffroy Roux de Bézieux

Il y a des premières places dont on se passerait bien. En plus de disposer


du millefeuille territorial le plus imposant d’Europe et par voie de consé-
quence du plus grand nombre de mandats électifs sur le Vieux continent
(devançant même les États-Unis), en plus d’être championne de la zone
OCDE en termes de dépenses publiques, la France détient depuis trois
ans la médaille d’or européenne en matière de prélèvements obligatoires
rapportés au PIB.

Complexe, opaque et souvent méconnue, la fiscalité locale est loin d’être


étrangère à ce record dont personne ne peut s’enorgueillir. Pour preuve,
sur le plan strictement économique, l’addition de l’ensemble des taxes
et impôts supportés par les entreprises dans nos territoires est devenue
supérieure à l’impôt sur les sociétés et trop souvent déconnectée de leur
capacité contributive. Émiettée en une myriade de prélèvements parfois
enchevêtrés entre plusieurs niveaux de collectivités, assise sur une grande
diversité d’assiettes et de taux, la fiscalité économique locale est un second
millefeuille adossé au millefeuille territorial qui obère la compétitivité
de nos entreprises et creuse chaque jour un peu plus l’écart avec nos
partenaires européens. Au-delà de son poids, c’est aussi la structure de la
fiscalité qui doit être revue. Rappelons en effet que deux tiers de la fiscalité
locale économique reposent sur les facteurs de production, pénalisant ainsi
nos entreprises.

Serpent de mer des finances publiques tricolores depuis les prémices de


la décentralisation avec ses moments forts et ses éclipses, la refonte de
la fiscalité locale est aujourd’hui à l’agenda du nouvel exécutif. À l’orée
de son mandat, devant l’Association des Maires de France, le président
de la République s’est en effet engagé à conduire une réforme de grande
ampleur à l’horizon 2020, promettant néanmoins de ne pas toucher au
millefeuille administratif. Or, si une idée largement répandue veut que les
vagues successives de décentralisation auraient transféré aux collectivités
territoriales des dépenses immaîtrisables, force est de constater que l’idée
ne résiste pas à l’épreuve des faits : moins de la moitié des transferts verti-
caux de compétences expliquerait la croissance continue des dépenses des
administrations locales enregistrée depuis trente ans.

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Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

Pour éviter le rendez-vous manqué et comme le préconise la note de


Nouveau Cap, révision du millefeuille fiscal doit dès lors rimer avec
refonte du millefeuille territorial ; l’un n’allant pas sans l’autre au risque
d’accoucher d’un ersatz de réforme alors que la situation actuelle exige un
véritable « big-bang ».

Si les promesses de réforme fiscale – voire de « révolution » – figurent


en bonne place dans les programmes présidentiels depuis de nombreuses
années, nos responsables politiques semblent éprouver des difficultés, une
fois au pouvoir, à joindre la parole aux actes. La fiscalité locale demeure, ce
faisant, un maquis illisible que seuls quelques rares exégètes parviennent
à déchiffrer et qui pèse lourdement sur la vitalité de notre économie. C’est
donc une réforme ambitieuse qui doit être conduite !

Geoffroy ROUX DE BÉZIEUX


Président du MEDEF

Geoffroy ROUX DE BÉZIEUX


Geoffroy Roux de Bézieux, président-fondateur de Notus Technologies, est président du MEDEF. Diplômé de
l’ESSEC et d’un DESS à l’Université Paris-Dauphine, il effectue son service national dans les Forces Spéciales
(Commandos Marine) avec lesquelles il intervient en Afrique et au Liban. Il est aujourd’hui capitaine de vaisseau de
réserve. Il fut successivement le président-fondateur de The Phone House et OMEA Telecom (Virgin Mobile) avant
de créer en janvier 2015 Notus Technologies (Oliviers & Co, Le Fondant Baulois...), groupe dont il est actuellement
le président-fondateur. De 2013 à 2018, il a exercé les fonctions de vice-président délégué du MEDEF avant d’en
devenir le président en juillet 2018. Président de l’association Croissance Plus de 2005 à 2008, Geoffroy Roux
de Bézieux fut également président de l’Unédic de 2008 à 2010. Il est également vice-président du conseil de
surveillance du groupe PSA et administrateur de la société Parrot.

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Fiscalité locale des entreprises : un échec français

Introduction
par Jean-Luc Monteil

CET, CFE, CVAE, IFER, TASCOM, TLPE, VT… Derrière cette litanie
d’acronymes se cache un millefeuille méconnu du grand public : celui de la
fiscalité locale des entreprises. Fruit de plus de trente années de politiques
de décentralisation, ce millefeuille « caché » n’a eu de cesse de s’épaissir
dans l’opacité la plus totale ; si bien qu’aujourd’hui, la fiscalité économique
locale pèse plus que l’impôt sur les sociétés1.

Parce qu’elle permet le financement de l’intérêt général et des services


publics afférents qui forment le ciment de notre société, la fiscalité est
naturellement légitime et indispensable. Elle constitue même le privilège
des pays développés et démocratiques. Disons-le donc tout net : au même
titre que les particuliers, la contribution des entreprises à cet effort natio-
nal ne saurait faire débat. Cependant, dans les pas de la courbe éponyme
développée par l’économiste Arthur Laffer2, il apparaît inique et même
contre-productif que celle-ci progresse à des rythmes effrénés, déconnec-
tés des réalités économiques. Entre 2013 et 2016 par exemple, la fiscalité
locale des entreprises a progressé de 7,3  % contre seulement + 0,7 % pour
l’inflation et + 3 % pour la croissance sur la même période3.

Longtemps reléguée au deuxième plan des débats politiques parce que


généralement dotée d’une rentabilité électorale négative, la fiscalité s’est
néanmoins ancrée ces dernières années au cœur du débat public, jusqu’à
s’imposer comme un thème majeur des trois dernières élections prési-
dentielles. Nonobstant, la fiscalité supportée localement par les acteurs
économiques demeure un sujet relativement peu exploré, dissimulé dans
les méandres du millefeuille territorial. De par son dynamisme, son impact
sur la compétitivité de nos entreprises – et, par ricochet, sur la vitalité de
notre économie – s’avère pourtant majeur et préoccupant. Il s’inscrit, de
surcroît, au sein d’une gouvernance publique territoriale éclatée et exces-
sivement complexe qui, en dépit de la kyrielle de réformes qu’elle a connue
ces dernières années, n’est pas parvenue à se rationaliser véritablement.

1
 ’impôt sur les sociétés s’est établi à 35,7 Mds € en 2017 alors que la fiscalité locale pesant sur les entreprises repré-
L
sentait la même année 49,3 Mds € (soit un différentiel de 13,6 Mds € et un total cumulé de 85 Mds €).
2
Modélisation économique, la courbe d’Arthur Laffer est fondée sur l’idée que la relation positive entre croissance
du taux d’imposition et croissance des recettes des pouvoirs publics s’inverse dès lors que le taux d’imposition
devient trop élevé.
3
MODAAL Conseil, MEDEF. Actualisation du baromètre de la fiscalité locale des entreprises. Janvier 2018.

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Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

Ce faisant, cette note se propose dans un premier temps de revenir sur


l’antienne de la réforme territoriale, épine dorsale de la fiscalité économique
locale et que nos propositions – pour être cohérentes et efficaces – ne
pourront ni contourner ni évacuer. Dans un second temps, nous plongerons
dans les abysses de la fiscalité locale où l’obscurité est passée reine au fil
des vagues de décentralisation qui se sont succédé. Enfin, sans prétendre
proposer un schéma optimal tant les scénarii envisageables sont multiples,
les 20 propositions que nous formulons ambitionnent, à cette aune, à la fois
de réviser l’organisation territoriale de la République tout en rationalisant le
maillage fiscal local qui en découle au profit à la fois des collectivités et des
entreprises avec, en ligne de mire, la nécessaire préservation de la soutena-
bilité des finances publiques.

Jean-Luc MONTEIL
Président du MEDEF Provence-Alpes-Côte d’Azur
Président de la commission Adhérents du MEDEF

Jean-Luc MONTEIL
Issu de la filière de l’apprentissage (CAP, BEP, BTH d’hôtellerie), Jean-Luc Monteil est également diplômé d’Aix-
Marseille Université et de Kedge Business School. Entrepreneur, il est aujourd’hui à la tête de 6 sociétés et emploie
près de 60 salariés dans les secteurs du courtage en crédit immobilier, de la promotion immobilière, de l’hôtellerie,
de la viticulture, de la presse écrite et du conseil en gestion de patrimoine. En parallèle, il s’est investi très tôt dans
la vie économique des Alpes-de-Haute-Provence, notamment en présidant la Jeune Chambre Économique de
Manosque. Il a ensuite été président de l’Union des entreprises des Alpes-de-Haute-Provence (UDE 04) de 2007
à 2012. Depuis 2013, il préside le MEDEF Provence-Alpes-Côte d’Azur et siège à ce titre au Conseil exécutif du
MEDEF dont il fut également vice-président de la Commission Logement de 2013 à 2018 ainsi que membre
du Comité financier depuis 2015. Suite à l’élection de Geoffroy Roux de Bézieux à la présidence du MEDEF le
3 juillet 2018, Jean-Luc Monteil a été nommé président de la commission Adhérents et a intégré le bureau de
l’organisation nationale. Jean-Luc Monteil est enfin vice-président de l’Association de gestion du fonds paritaire
(AGFPN) depuis le 11 janvier 2018.

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Fiscalité locale des entreprises : un échec français

I
Le millefeuille territorial français

Le millefeuille vu du ciel

Au cours de son histoire, la France s’est dotée d’un appareil administratif


territorial important, obéissant à la construction d’une nation moderne et
centralisée. C’est ainsi qu’à partir du Moyen-Âge, la monarchie s’est efforcée
de tisser son autorité sur « un agrégat inconstitué de peuples désunis », selon la
célèbre formule de Mirabeau4. Bien plus tard, rompant avec sa tradition jaco-
bine héritée de l’Ancien Régime, consolidée par la Révolution puis approfondie
par le Consulat, l’État s’est ensuite engagé à l’orée des années 1980 dans un
double processus de décentralisation5 et de déconcentration6, multipliant ce
faisant les niveaux administratifs et les acteurs publics territoriaux, et donnant
naissance à un millefeuille dont il apparaît désormais bien ardu de démêler
l’écheveau. En d’autres termes, comme l’affirme le politologue Edward Page,
spécialiste des politiques publiques à la London School of  Economics, en
France « le langage de la décentralisation est devenu très complexe »7.

Par conséquent, vu du ciel, un brouillard épais semble aujourd’hui flotter


au-dessus de la carte administrative hexagonale. Le maillage institutionnel
tricolore repose en effet, au 1er janvier 2018, sur :
• 35  357 communes8 (soit 40 % des municipalités de l’Union européenne9 et
davantage qu’aux États-Unis)
• 1 263 intercommunalités (dont 22 métropoles)
• 101 départements
• 18 régions (dont 5 d’outre-mer)

4
Pour une rétrospective chronologique des grandes étapes de l’histoire de l’administration décentralisée de la France,
voir notamment la thèse de doctorat en droit public de Jean-Baptiste Bouet : « L’administration décentralisée du terri-
toire : choix et perspectives ouverts sous la Vème République » (soutenue en 2006 à l’université d’Angers).
5
La décentralisation est un processus d’aménagement de l’État unitaire qui consiste à transférer des compétences
administratives de l’État vers des collectivités locales distinctes de lui (communes, départements, régions, collectivités
à statut particulier et collectivités d’outre-mer). Ces collectivités jouissent de la personnalité morale, de moyens et de
compétences propres, donc d’une certaine autonomie locale (source : www.vie-publique.fr).
6
La déconcentration est un processus d’aménagement de l’État unitaire qui consiste à implanter dans des circonscrip-
tions locales administratives des autorités administratives représentant l’État. Ces autorités sont dépourvues de toute
autonomie et de la personnalité morale. Aujourd’hui, sont des autorités déconcentrées : les préfets (départements,
régions), les recteurs (académies), etc. (source : www.vie-publique.fr).
7
PAGE, Edward. Dictionnaire des politiques territoriales. Sous la direction de Romain Pasquier, Sébastien Guigner et
Alistair Cole. Presses de Sciences Po, 2011.
8
Dont près de 32 000 comptent moins de 2 000 habitants et 18 783 moins de 500 habitants.
9
D’après l’OCDE, il existe en moyenne en France 58 communes pour 100  000 habitants (contre 18 en moyenne dans
l’Union européenne).

13
Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

La France détient ainsi le triple record européen du nombre de collectivités,


du nombre d’habitants par communes (le plus bas avec 1 892) ainsi que du
ratio de collectivités pour 1 000 habitants (le plus élevé avec 0,58). Par voie
de conséquence, elle est aussi médaille d’or en Europe en termes de mandats
électifs. En outre, à ce millefeuille local important issu de la décentralisation
s’ajoute une couche non moins étoffée composée des services déconcentrés
de l’État qui se fondent peu ou prou sur les mêmes divisions territoriales
que les collectivités précitées10 et concentrent 95 % des agents de la fonction
publique d’État ; un ratio unique en Europe et dans l’OCDE11 et complexi-
fiant encore un peu plus le maillage administratif qui quadrille l’Hexagone
et ses territoires ultra-marins12.

Si la déconcentration a précédé la décentralisation13, le législateur s’est efforcé


depuis trente ans d’articuler – avec plus ou moins de succès – le développement
des services de l’État dans nos territoires et les compétences transférées aux
collectivités ; la refonte de l’organisation déconcentrée de l’État apparaissant
en effet comme un corolaire indispensable à la décentralisation. Loin de se
réduire à une stricte opposition doctrinale entre jacobinisme et girondisme, et
ne pouvant se résumer à un simple mouvement d’émancipation des pouvoirs
locaux, la décentralisation est donc en réalité aussi « l’affaire de l’État »14.
Ce principe de co-animation de l’action publique locale est ainsi institué aux
termes de l’article 1er de la loi du 6 février 1992 : « l’administration territoriale
de la République est assurée par les collectivités territoriales et par les services décon-
centrés de l’État »15. Ce que l’on peut dès lors qualifier de « double représen-
tation » – via des services déconcentrés auxquels s’ajoutent des services des
collectivités territoriales – s’avère en fin de compte « spécifique à la France »
d’après l’OCDE16.

10
L’administration territoriale de l’État compte 101 préfectures et 233 sous-préfectures.
11
 HOENIG, Jean-Claude. Territorial administration and political control. Decentralization in France. Public administration,
T
volume 83, n°3, août 2005.
12
COLE, Alistair. Decentralization in France: central steering, capacity building and identity construction. Cardiff University,
School of European studies, French politics, 2006.
13
Les départements ont été créés par le décret de l’Assemblée constituante du 22 décembre 1789 tandis que l’adminis-
tration préfectorale – représentante du gouvernement – a vu le jour via la loi du 17 février 1800 (28 pluviôse an VIII).
Les communes, quant à elles, datent de l’Ancien Régime.
14
DAVEZIES, Laurent, MORVAN, Yves. Pour une grammaire de la décentralisation. Terra Nova, 15 novembre 2016.
15
Depuis la mise en œuvre de la révision générale des politiques publiques (RGPP) initiée en 2007 et suite au décret du
16 février 2010, les services déconcentrés de l’État – placés sous l’autorité du préfet (à l’exception des rectorats) – se
composent de huit directions régionales (direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consomma-
tion, du travail et de l’emploi ; direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement ; direction
régionale de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale ; direction régionale de l’alimentation, de l’agriculture et
de la forêt ; direction régionale des affaires culturelles ; direction régionale des finances publiques ; rectorat d’acadé-
mie ; agences régionales de santé) et de trois directions départementales (direction départementale de la protection
des populations ; direction départementale de la cohésion sociale ; direction départementale des territoires). Ces
services déconcentrés regroupent 95% des agents de la fonction publique d’État.
16
OCDE. Faire face aux défis de la décentralisation en France. Stéphanie Jamet, Document de travail du Département
des Affaires économiques n°571, 2007.

14
Fiscalité locale des entreprises : un échec français

La décentralisation en débat

Par-delà les tares dont certains la parent démesurément ou les vertus


que d’autres lui trouvent abusivement, la décentralisation – pour en
apprécier objectivement l’efficacité – doit être appréhendée de manière
dépassionnée, sans indignité ni excès d’honneur. Ainsi, comme le
souligne avec précaution l’OCDE, le passage vers un État moins
centralisé constitue un exercice difficile – qui plus est dans un pays
traditionnellement unitaire tel que le nôtre, longtemps perçu comme
l’un des plus jacobins au monde17 – et les promesses d’efficacité
des politiques publiques territoriales ne sont pas nécessairement
garanties18. Cette prudence s’arrime à une carence en matière d’assises
théorique et empirique solides de la décentralisation, vaste mouvement
mondial qui a essaimé dans toutes les démocraties19, promu par des
institutions internationales telles que la Banque mondiale, le FMI, le
PNUD ou l’OCDE20, mais qui ne se résume pour l’heure qu’à un simple
antidote au raisonnement centralisateur jugé obsolète ; constat imposé
comme un postulat non discutable.

Parlant à son sujet de « confusion conceptuelle »21, le politologue Aaron


Schneider, enseignant à l’université de Denver, met quant à lui en avant
la variété de définitions et de réalités empiriques qui entourent la décen-
tralisation comme un halo opaque, ainsi que les difficultés de mesure de
son efficacité. Dans le même sens, à l’aune d’un comparatif établi sur 25
ans dans 95 pays, les économistes Ruben Enikolopov et Ekaterina Zhu-
ravskaya nous révèlent que la décentralisation peut induire des consé-
quences économiques et sociales totalement différentes selon les pays
et, a fortiori, en fonction de l’organisation des administrations locales
qu’ils ont mises en place22. Dans ce sillage et ponctuant les précautions
précitées de l’OCDE, le géographe Gérard-François Dumont l’affirme
dès lors sans détour : « les conséquences de la décentralisation n’ont guère
fait l’objet d’une véritable évaluation politique »23. Un diagnostic partagé

17
KUHLMANN, Sabine. Decentralisation in France: the « Jacobin » state stuck between continuity and transformation.
Komparativna javna uprava, god. 11, 2011.
18
OCDE. Faire face aux défis de la décentralisation. Études économiques de l’OCDE, 2007/13, n° 13.
19
KUHLMANN, Sabine. Decentralisation in France: the « Jacobin » state stuck between continuity and transformation.
Komparativna javna uprava, god. 11, 2011.
20
BARDHAN, Pranab. Decentralization of governance and development. Journal of Economic Perspectives, 2002.
21
SCHNEIDER, Aaron. Decentralization: conceptualization and measurement. Harvard University, Studies in compara-
tive international development, volume 38, issue 3, 2003.
22
ENIKOLOPOV, Ruben, ZHURAVSKAYA, Ekaterina. Decentralization and political institutions. Journal of public economics,
2007.
23
DUMONT, Gérard-François. Géopolitique des territoires français : décentralisation versus recentralisation. Diploweb,
15 septembre 2018.

15
Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

par Jean-Paul Faguet, économiste à la London School of Economics,


qui estime qu’en dépit du foisonnement de littérature sur le sujet, il
existe en réalité peu d’études globales – à l’exception de celle citée
supra – sur les réels effets positifs ou négatifs de la décentralisation24, et
ce alors que celle-ci apparaît aujourd’hui comme durablement installée
dans les paysages institutionnels à travers le monde. En effet, d’après
l’OCDE, en 2016, les gouvernements infranationaux25 représentaient
au niveau international pas moins de 40 % des dépenses publiques glo-
bales, 63 % des dépenses de personnel, 57 % de l’investissement public,
32 % des recettes fiscales et 21 % de la dette publique26.

Or, comme l’explique la politologue Pippa Norris, chercheure à


l’université d’Harvard, à rebours de ses promoteurs les plus illustres
tels que Tocqueville, Rousseau, Montesquieu ou Madison ainsi que de
la doxa contemporaine ambiante, les détracteurs de la décentralisation
– assurément moins nombreux que ses thuriféraires – lui reprochent
de conduire dans la pratique à une forme de « balkanisation »
territoriale, fragilisant de la sorte l’unité de l’État-nation tout en
accélérant les inégalités économiques et sociales locales27. Sont
également pointés du doigt par les sceptiques, les surcoûts de gestion
créés par la juxtaposition d’échelons administratifs, l’alourdissement
de certaines procédures de décision, les difficultés de coordination
entre acteurs locaux, sources de retard dans l’exécution de l’action
publique et de financements croisés, ainsi que les possibles dérives
clientélistes des exécutifs territoriaux en quête de réélection28.

Dans le sillon tracé par Pippa Norris, prenant appui sur la théorie du
fédéralisme budgétaire, l’économiste Rémy Prud’homme considère
quant à lui que seul l’État central, via son activité redistributive, est en
mesure de lutter contre les inégalités ; la décentralisation augmentant
quant à elle les disparités territoriales au profit des seules grandes
aires urbaines29. Voyant dans la décentralisation une perte d’efficacité
de l’action publique, le chercheur du Massachusetts Institute of
Technology estime ainsi que l’État centralisé est bien plus à même de

24
FAGUET, Jean-Paul. Decentralization and governance. Economic organisation and public policy discussion papers,
London School of Economics and Political Science, 2011.
25
 elon l’OCDE, il existe aujourd’hui près de 141 000 gouvernements infranationaux dans les 34 pays de la zone.
S
Notons que plus de la moitié se situent en France et aux États-Unis.
26
OCDE. Gouvernance pluri-niveaux et finances publiques. 2018.
27
NORRIS, Pippa. Federalism and decentralization. Cambridge University Press, 2008.
28
Idem
29
PRUD’HOMME, Rémy. The dangers of decentralization. The World Bank Research Observer, volume 10, n°2, 1995.

16
Fiscalité locale des entreprises : un échec français

réaliser des économies d’échelle et de travailler en proximité avec les


citoyens – à travers ses services déconcentrés notamment – que les
collectivités territoriales. Laurent Davezies, économiste et enseignant
au CNAM, va peu ou prou dans le même sens. Prenant Tocqueville
à contre-pied et soulignant que la décentralisation recouvre en réa-
lité des phénomènes très hétérogènes, il estime que celle-ci « éloigne
les citoyens des politiques plus qu’elle ne les rapproche »30. Le philosophe
Marcel Gauchet prolonge cette analyse en considérant la « proximité »
prétendument inhérente à la décentralisation comme « un leurre […]
qui ne se vérifie pas »31; arguant au final que celle-ci « a globalement échoué
par rapport à ses intentions officielles »32.

À l’inverse, cette litanie de griefs se heurte entre autres au « théorème


de la décentralisation » qui considère, dans les pas notamment de la
pensée de Pierre-Joseph Proudhon, que « l’offre décentralisée d’un service
public local particulier est plus efficace, à coûts d’information donnés, qu’une
offre centralisée car elle permet la prise en compte des disparités locales de
préférences concernant les services publics locaux »33. Pour ses avocats, la
décentralisation permet dès lors de rapprocher les gouvernants des
gouvernés et « de mieux prendre en compte l’hétérogénéité spatiale des préfé-
rences des citoyens »34. Une partie de la littérature économique va dans le
même sens, estimant que la proximité géographique entre citoyens et
élus locaux combinée au jeu électoral contraignent ces derniers à offrir
des services publics de meilleure qualité au moindre coût ; engendrant
– en théorie – une meilleure maîtrise des finances publiques locales35.
Pranab Bardhan, économiste à l’université de Berkeley, souligne en
outre que la compétition entre administrations infranationales stimule
l’économie et favorise la mobilité des agents économiques36. Enfin, sur
le plan stricto sensu politique, Raymond Aron voyait en la décentralisa-
tion une forme de respiration démocratique nécessaire : « plus grande
est la surface de la société couverte par l’État, moins celui-ci a des chances
d’être démocratique »37.

30
La Gazette des communes. Tout le monde croit savoir ce qu’est la décentralisation. 20 février 2017.
31
Acteurs publics. Interview de Marcel Gauchet. 8 mars 2016.
32
Idem
33
MADIÈS, Thierry, PATY, Sonia, ROCABOY, Yvon. Les stratégies fiscales des collectivités locales. De la théorie à la réalité.
Revue de l’OFCE, n°94, 2005/3.
34
FRÈRE, Quentin, VÉDRINE, Lionel. Le théorème de la décentralisation s’applique-t-il aux collectivités locales françaises ?
Un test empirique sur les compétences intercommunales. INSEE, 2017.
35
FMI. Fiscal decentralization and fiscal policy performance. IMF working paper 17/64, Département des finances
publiques, mars 2017.
36
BARDHAN, Pranab. Decentralization of governance and development. Journal of economic perspectives, 2002.
37
ARON, Raymond. Démocratie et totalitarisme. Folio, 1987.

17
Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

Les étapes de la décentralisation

Acte I : vers une République (enfin) girondine


Si la Constitution du 4 octobre 1958 qui régit notre Vème République a, dès
ses origines, reconnu les collectivités locales38, ce n’est qu’à l’orée des années
1980 que la décentralisation a véritablement pris son essor après l’échec du
référendum de 1969 sur la régionalisation et la réforme du Sénat39. Dans
les pas de la pensée tocquevillienne40 et dans un contexte d’épuisement du
modèle jacobin, partant du postulat que l’État centralisateur n’était plus en
mesure de répondre efficacement aux enjeux locaux et consacrant ainsi les
ambitions décentralisatrices amorcées lors des deux décennies précédentes,
les lois Defferre41 de 1982/1984 en constituent indiscutablement le premier
acte, posant la première pierre de « la décolonisation de la province » selon la
fameuse métaphore – volontairement excessive – de Michel Rocard.

Cet acte I s’est traduit notamment par le transfert de compétences (action sociale,
urbanisme, formation professionnelle, gestion des collèges et lycées, transports,
etc.)42 jusqu’alors dévolues aux préfets, représentants du gouvernement dans les
territoires, aux différents élus locaux 43. Les régions, créées en 1956 sous la forme
d’établissements publics placés sous l’autorité de l’État, ont été quant à elles
érigées en véritables collectivités44 et confiées – à l’instar des départements45 – à
des exécutifs politiques46. La fonction publique territoriale a également été créée
en 1984 pour accompagner ces mouvements de décentralisation47.

Les multiples alternances politiques qui ont suivi n’ont pas remis en question les
lois Defferre et le changement de paradigme qu’elles ont introduit dans l’action
publique locale. Agissant comme des contre-feux à la tendance jacobine tricolore,

38
Le général de Gaulle avait notamment déclaré lors d’un discours prononcé le 25 mars 1968 : « l’effort multiséculaire
de centralisation administrative ne s’impose plus pour assurer la cohésion nationale ».
39
 ’échec de ce référendum poussera le général de Gaulle à démissionner de la présidence de la République le 27 avril
L
1969.
40
Alexis de Tocqueville considérait que la décentralisation constituait un remède aux dérives potentielles de la démo-
cratie, en ce sens qu’elle permet de lutter contre la dépolitisation en offrant la possibilité aux citoyens d’être associés
aux affaires publiques locales.
41
Ces lois se composent notamment de la loi du 2 mars 1982 relative aux droits et libertés des communes, des dé-
partements et des régions à laquelle s’additionnent 40 lois et 300 décrets pris entre 1981 et 1986 pour organiser les
transferts de compétences.
42
Entre 1982 et 1986, la décentralisation a fait l’objet de 40 lois et 300 décrets.
43
VLAHOS, Nick. The politics of subnational decentralization in France, Brazil, and Italy. York University, Journal of public
deliberation, volume 9, issue 2, article 15, 2013.
44
L’article 59 de la loi du 2 mars 1982 précise : « Les régions sont des collectivités territoriales. Elles sont administrées par
un conseil régional élu au suffrage universel direct ».
45
À l’origine conçus comme des outils de déconcentration, les départements sont devenus des échelons décentralisés
via la Constitution du 27 octobre 1946. Si la loi du 10 août 1871 avait consacré l’élection au suffrage universel des élus
des conseils généraux, ce n’est en revanche qu’en 1982 que les préfets ont cessé d’en constituer l’autorité exécutive.
46
Ce n’est toutefois qu’en 1986 qu’ont eu lieu les premières élections régionales. Notons que les communes et les
conseils départementaux, créés en 1789, étaient déjà des collectivités territoriales à part entière avant l’adoption des
lois Defferre.
47
La fonction publique territoriale a vu le jour via la loi du 26 janvier 1984.

18
Fiscalité locale des entreprises : un échec français

elles les ont au contraire approfondies : qu’il s’agisse des lois des 3 et 6 février
1992 consacrant les prémices du statut d’élu local et créant les communautés de
communes et de villes48, ou des lois des 19 janvier et 12 juillet 1999 révisant pour
la première le mode de scrutin régional et visant pour la seconde à renforcer
l’échelon intercommunal en créant inter alia les communautés d’agglomération.

Acte II : la décentralisation gravée dans le marbre de la Constitution


Témoignant des progrès continus de la trajectoire girondine empruntée
depuis les années 1980, l’acte II de la décentralisation impulsé par le gouver-
nement de Jean-Pierre Raffarin49 est intervenu via l’adoption de la loi consti-
tutionnelle du 28 mars 200350 qui, symboliquement, grave dans le marbre de
la Constitution – aux termes de son article 1er – le caractère « décentralisé »
de la République51. Adoptée aux forceps et se situant incontestablement dans
la continuité de la décentralisation amorcée durant le premier septennat de
François Mitterrand52, cette révision du pacte fondamental formalise par
ailleurs la notion de chef de file, ouvre le recours au référendum d’initia-
tive locale, permet la possibilité de l’expérimentation législative et rénove
l’architecture des finances locales53. De plus, sans qu’il n’apparaisse expressis
verbis dans le texte constitutionnel, le nouvel article 72-2 de la Constitution
est venu inscrire dans la loi fondamentale le principe de subsidiarité qui
prévaut en droit communautaire : « les collectivités territoriales ont vocation à
prendre les décisions pour l’ensemble des compétences qui peuvent le mieux être mises
en œuvre à leur échelon ». Cependant, la portée de cet article emprunté au
corpus juridique européen – qui va dans le sens d’une meilleure répartition
des compétences entre État et administrations locales – doit être nuancée.
En effet, comme le précise Julien Barroche, maître de conférences en droit
public à l’INALCO, le terme « vocation » de l’article ne constitue pas une
obligation juridique pour les acteurs concernés mais plutôt un objectif non
contraignant54, de telle sorte qu’il ne tranche pas définitivement le nœud
gordien de la clarification des compétences. En effet, « l’État reste compétent
pour tout : ni la Constitution, ni la loi ne listent ses compétences, sauf a contrario
de celles qu’il a confiées par la loi aux collectivités locales »55.

48
Les communautés de villes ont été supprimées par la loi dite « Chevènement » du 12 juillet 1999.
49
 e Premier ministre a présenté cet acte II de la décentralisation comme la « mère des réformes  » lors de son discours
L
de politique générale prononcé devant l’Assemblée nationale le 3 juillet 2002. Pour Jean-Pierre Raffarin, cette
réforme territoriale visait notamment à raffermir la démocratie et à réformer l’organisation de l’État. Privilégiant la
concertation, l’ancien président du Conseil régional de Poitou-Charentes et sénateur a dès lors mis en place des
assises régionales des libertés locales.
50
Dite « loi relative à l’organisation décentralisée de la République ».
51
Article 1er de la Constitution : « La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle assure
l’égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d’origine, de race ou de religion. Elle respecte toutes les
croyances. Son organisation est décentralisée ».
52
LAFORE, Robert. La décentralisation de l’action sociale. L’irrésistible ascension du « département providence ». Revue
française des affaires sociales, 2004/4.
53
Les lois organiques d’août 2003 puis de juillet et août 2004 mettent en œuvre ces évolutions.
54
BARROCHE, Julien. La subsidiarité française existe-t-elle ? VIIème congrès de l’Association française de droit constitu-
tionnel (Cinquantenaire de la Vème République), Université Panthéon-Assas, Paris, 26 septembre 2008.
55
LAMBERT, Alain. Les relations entre l’État et les collectivités locales. Décembre 2007.

19
Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

À cette révision constitutionnelle s’ajoute la loi du 13 août 200456 qui attribue


de nouvelles compétences aux collectivités (aides aux entreprises, logement,
réseau routier national, ports et aéroports, etc.) jusqu’alors détenues par
l’État. Ces transferts – ayant pour conséquence d’accroître les dépenses des
collectivités – se sont traduits dans la pratique par des transferts d’ordre
financier (13 Mds €) et humain (130 000 fonctionnaires)57. Les régions sont
ainsi confortées dans leur action économique et les départements dans le
domaine social.

Néanmoins, comme le met en exergue l’Institut Montaigne, cet acte II


de la décentralisation « n’a pas atteint les objectifs d’efficience, de lisibilité et
de légitimité de l’action publique qui lui étaient initialement dévolus »58. Au
contraire, fruit de la superposition des strates, il a entraîné une inflation
des dépenses publiques locales et des recrutements de personnel à tous
les échelons tout en confortant les possibilités d’interventions concur-
rentes des collectivités, induisant ce faisant lourdeurs administratives et
surcoûts de gestion59. De surcroît, il n’a pas accru l’autonomie financière
des administrations publiques locales (APUL) et n’a pas non plus simplifié
la fiscalité locale.

Dès 2000, dans un rapport remis au Premier ministre Lionel Jospin, Pierre
Mauroy, ancien locataire de Matignon et maire de Lille, avait pourtant
déjà tiré la sonnette d’alarme : « on est passé en vingt ans d’un principe de
décentralisation par blocs de compétences à un système de partenariat dans lequel
tout le monde fait tout »60. Neuf ans plus tard, à travers une étude en forme
de bilan sur la conduite par l’État de la décentralisation61, la Cour des
comptes ne dit pas autre chose par la voix de Philippe Seguin : « la décen-
tralisation a multiplié les niveaux de décisions, les structures administratives et les
doublons »62. Le premier président d’alors de l’institution de la rue Cambon
illustrant ensuite son propos, non sans indignation : « 19 aéroports sont
gérés par les régions, 29 par les départements, 61 par les intercommunalités et
41 par les communes. Comment voulez-vous avoir une politique cohérente ? »63.

Dans son rapport sur les relations entre l’État et les collectivités locales64
remis au Premier ministre dans le cadre du lancement de la RGPP65, Alain

56
Dite « loi relative aux libertés et aux responsabilités locales ».
57
Vie publique. Loi du 13 août 2004 relative aux libertés et aux responsabilités locales. 2 novembre 2004.
58
Institut Montaigne. Décentralisation : sortons de la confusion. Repenser l’action publique dans les territoires. Janvier 2016.
59
Idem
60
MAUROY, Pierre. Refonder l’action publique locale : rapport au Premier ministre. Décembre 2000.
61
Cour des comptes. La conduite par l’État de la décentralisation. Rapport public thématique, octobre 2009.
62
La Tribune. Séguin pointe les failles de la décentralisation. 29 octobre 2009.
63
Le Figaro. Bilan accablant pour la décentralisation. 28 octobre 2009.
64
LAMBERT, Alain. Les relations entre l’État et les collectivités locales. Décembre 2007.
65
Révision générale des politiques publiques.

20
Fiscalité locale des entreprises : un échec français

Lambert, ancien ministre du Budget et sénateur, revient sur cet enche-


vêtrement des missions à la fois vertical (État-collectivités) et horizontal
(entre collectivités) en distinguant quatre types de compétences, à savoir :
les compétences « conjointes » (codétenues par plusieurs acteurs publics),
« partagées » (fractionnées entre plusieurs acteurs), « parallèles » (recon-
nues à plusieurs acteurs) ou concurrentes (revendiquées par plusieurs
acteurs)66. Une situation qui a pour corolaire d’entraver l’efficacité de l’ac-
tion publique locale en en ralentissant le mode de fonctionnement eu égard
à la multiplicité des centres décisionnels, tout en générant par capillarité
une inflation des dépenses publiques.

Dans le sillage des conclusions dressées par Alain Lambert, le rapport de la


commission pour la libération de la croissance présidée par Jacques Attali
affirmait à l’unisson en 2008 : « la décentralisation est devenue un facteur de
confusion, tant les compétences partagées sont nombreuses et paralysantes, et géné-
ratrices de coûts supplémentaires, notamment de fonctionnement. Les redondances
et chevauchements de compétences entre les divers échelons territoriaux créent à la
fois un éclatement de la responsabilité, la paralysie de la décision et la déroute de
l’administré »67. Une situation qui, comme le soulignait la même année le
rapport parlementaire des députés Didier Quentin et Jean-Jacques Urvoas,
obère « la compétitivité de notre économie »68 et contrevient à la « maîtrise de
nos finances publiques »69. Et les magistrats financiers de la Cour des comptes
de conclure sans équivoque : « la décentralisation n’a jusqu’à présent conduit
ni à une baisse des dépenses publiques, ni à une maîtrise de la fiscalité locale »70.

Loi du 16 décembre 2010 : un millefeuille rationalisé mais davantage


jacobin ?
Dans ce contexte, s’inscrivant dans une longue série de rapports (Mauroy
et Mercier en 2000, Cour des comptes en 2005 et 2009, commission Attali
en 2008, comité Balladur en 2009), le président de la République Nicolas
Sarkozy déclarait ainsi à l’orée de son quinquennat : « le moment est
venu de poser la question des échelons de collectivités locales dont le nombre et
l’enchevêtrement des compétences est une source d’ineffıcacité et de dépenses
supplémentaires. La compétitivité de notre économie est capitale. Elle ne peut
supporter un poids excessif de dépenses publiques »71. Ce faisant, sous cette
impulsion, la loi du 16 décembre 2010 entendait donner un nouvel élan

66
LAMBERT, Alain. Les relations entre l’État et les collectivités locales. Décembre 2007.
67
ATTALI, Jacques. Rapport de la Commission pour la libération de la croissance française. Remis au président de la
République. Janvier 2008.
68
QUENTIN, Didier, URVOAS, Jean-Jacques. Rapport d’information sur la clarification des compétences des collectivités
territoriales. Assemblée nationale, rapport n°1153, octobre 2008.
69
Idem
70
Cour des comptes. La conduite par l’État de la décentralisation. Rapport public thématique, octobre 2009.
71
Extrait du discours de Nicolas Sarkozy à Toulon le 25 octobre 2008.

21
Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

au paysage institutionnel local en en rationalisant l’architecture. Sans pour


autant supprimer les départements72, le texte a introduit en revanche la
création du « conseiller territorial », élu siégeant à la fois au conseil dépar-
temental et au conseil régional, ainsi que la spécialisation des compétences
entre ces deux instances infra-étatiques en supprimant la symbolique clause
générale de compétences73. Refusant de céder aux sirènes du dogmatisme,
la loi a ainsi choisi de donner vie à la logique de spécialisation fonctionnelle
pour ces deux échelons tout en maintenant cette clause symbolique pour les
communes. Une distinction inédite qui constitue, comme l’exprime le rapport
d’information du sénateur Antoine Lefèvre, « une remise à plat pragmatique de
l’articulation entre la clause générale et la logique des blocs de compétences »74.

La loi du 16 décembre 2010 a créé par ailleurs un nouvel échelon à travers


les métropoles75 – référence, comme le souligne le politologue Maurice
Olive, jusqu’ici absente du lexique des institutions publiques76 – et prévu
en outre que les délégués des établissements publics de coopération inter-
communale (EPCI) soient dorénavant élus au suffrage universel direct.
Elle a favorisé également la fusion des communes contiguës et proposé
celle des régions et départements (sans que cela soit néanmoins suivi
d’effets par la suite). Comme le met en relief l’OCDE, ce texte a suscité un
vent de critiques paradoxal de part et d’autre de l’échiquier politique ; qui
lui reprochant de faire un pas supplémentaire vers la décentralisation, qui
l’accusant de re-centraliser la politique territoriale de la France77.

L’État dans les territoires : l’autre millefeuille

Chantier récurrent, la réforme de l’organisation territoriale de l’État a


coïncidé avec les étapes successives de la décentralisation, sans pour autant
parvenir à se rationaliser complètement78. En dépit d’un train de mesures
important mis en œuvre ces dernières années à travers notamment la
RGPP (2007)79, la RéATE (2009)80 puis la MAP (2012)81 jusqu’au plan

72
 ors de la remise officielle du rapport de la commission Attali le 23 janvier 2008, le président Nicolas Sarkozy s’est
L
désolidarisé de la proposition n°260 formulée par la commission visant à supprimer les conseils départementaux :
« je ne crois pas que les Français sont prêts à renoncer à la légitimité historique des départements ».
73
Elle est en revanche maintenue pour les communes.
74
LEFÈVRE, Antoine. Rapport d’information au nom de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation
sur la clarification de la répartition des compétences entre l’État et les collectivités territoriales. Sénat, 2 février 2011.
75
Pour les zones urbaines de plus de 500 000 habitants.
76
OLIVE, Maurice. Métropoles en tension. La construction heurtée des espaces métropolitains. ERES, Espaces et
sociétés, n°160-161, 2015/1.
77
OCDE. Multi-level governance reforms. Overview of OECD country experiences. Mai 2017.
78
BANNINK, Duco, OSSEWAARDE, Ringo. Decentralization: new modes of governance and administrative responsibility.
Administration and society, 2012.
79
Révision générale des politiques publiques.
80
Réforme de l’administration territoriale de l’État.
81
Modernisation de l’action publique.

22
Fiscalité locale des entreprises : un échec français

« Action Publique 2022 » lancé par l’actuel gouvernement, l’atlas de l’État


dans nos territoires demeure pléthorique ; fruit d’une longue tradition
centralisatrice dont la France semble ne pas parvenir à se départir. Or,
comme le souligne la Cour des comptes, « l’organisation territoriale de l’État
demeure trop complexe et insuffisamment efficiente »82, poursuivant sans équi-
voque qu’elle « ne permet pas un fonctionnement suffisamment efficace de cha-
cune des administrations ni une application optimale des politiques publiques »83.
Dans une circulaire en date du 24 juillet 2018, le Premier ministre évoque
quant à lui « la confusion qui entoure le partage des compétences entre État et
collectivités et la perception d’une dilution des responsabilités »84. Le rapport
d’information sénatorial Raffarin-Krattinger en conclut dès lors que « cette
situation est source de gaspillages et d’inefficacité de l’action publique, alors même
que celle-ci est perçue comme étant de plus en plus complexe »85. Un autre rapport
sénatorial, conduit par l’ancien Garde des Sceaux Michel Mercier, estime
quant à lui que l’architecture actuelle de l’État ne résulte ni plus ni moins
que d’un « climat de méfiance envers les collectivités locales »86.

En définitive, regroupant 95 % des agents de la fonction publique


d’État, les services déconcentrés87 et les opérateurs publics88 n’ont,
force est de le reconnaître, pas été allégés à la hauteur nécessaire.
Pour preuve, comme le révèle le rapport de la commission présidée
par Michel Pébereau sur la dette publique, les effectifs de l’État ont
progressé de 14 % entre 1982 et 2003, soit 310 000 agents publics
supplémentaires89. Un constat confirmé par le politologue Patrick Le
Lidec qui regrette que « l’État continue d’intervenir et de payer des agents
dans les domaines dans lesquels il est censé s’être dessaisi de toute compétence
au profit des collectivités »90.

Le contraste apparaît d’autant plus saisissant lorsqu’il est mis en miroir


avec l’élargissement des compétences du bloc territorial. Ainsi, parce
qu’il semble vouloir à tout prix conserver une présence et un rôle pour

82
Cour des comptes. L’organisation territoriale de l’État. Juillet 2013.
83
Idem
84
Circulaire du Premier ministre en date du 24 juillet 2018 concernant l’organisation territoriale des services publics.
85
KRATTINGER, Yves, RAFFARIN, Jean-Pierre. Rapport d’information sur l’avenir de l’organisation décentralisée de la
République. Sénat, rapport n°49, 8 octobre 2013.
86
MERCIER, Michel. Rapport d’information au nom de la mission commune d’information chargée de dresser le bilan
de la décentralisation et de proposer les améliorations de nature à faciliter l’exercice des compétences locales.
Sénat, 28 juin 2000.
87
Les services déconcentrés de l’État comprennent 101 préfectures et 233 sous-préfectures.
88
Citons par exemple Pôle Emploi ou l’ADEME, opérateurs de l’État représentés dans nos territoires.
89
PÉBEREAU, Michel. Rompre avec la facilité de la dette publique. Pour des finances publiques au service de notre
croissance économique et de notre cohésion sociale. Rapport remis au ministre des Finances. 2005.
90
LE LIDEC, Patrick. Le jeu du compromis : l’État et les collectivités territoriales dans la décentralisation en France.
Revue française d’administration publique, n°121-122, 2007/1.

23
Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

des compétences pourtant partagées voire totalement décentralisées –


allant bien au-delà des fonctions régaliennes –, l’État continue d’interve-
nir dans les territoires dans des domaines extrêmement variés : sécurité,
justice, fiscalité, agriculture, sport, culture, environnement, économie,
aménagement, tourisme, commerce extérieur, cohésion sociale, etc.
Dans un discours prononcé à la Sorbonne le 5 octobre 2012 lors de
l’ouverture des États généraux de la démocratie territoriale, le président
de la République, François Hollande, l’affirmait sans équivoque : « trente
ans après la décentralisation, chacun constate que l’État continue d’intervenir
dans l’exercice des responsabilités locales. Il le fait parfois légitimement quand
il s’agit de contrôler la légalité des actes qui sont votés par les collectivités.
Il intervient également dans des domaines qui ont été transférés, ajoutant ainsi
de la confusion, de la contradiction, de l’incompréhension »91.

Ce faisant, comme le pointe du doigt la Cour des comptes, la difficile


articulation entre services des collectivités et services de l’État entraîne
des doublons, génère des financements croisés et des surcoûts et, de
la sorte, nuit à la qualité du service rendu aux usagers (citoyens et
entreprises confondus)92. Autrement dit, le diagnostic de l’institution
de la rue Cambon est limpide : « l’excessive complexité de l’organisation
de l’État et l’entrecroisement des compétences accentue les inconvénients du
‘millefeuille’ des collectivités territoriales »93. Confrontés au quotidien
aux différents services publics locaux, les Français dressent le même
diagnostic puisque, selon un sondage Ipsos réalisé en 2017, 85 %
d’entre eux considèrent qu’il y a trop de doublons entre les services
déconcentrés de l’État et les collectivités locales94.

Symbole de cette gestion hasardeuse de la carte préfectorale souvent


étrillée par la Cour des comptes et par la presse, en 2015, le ministère
de l’Intérieur comptait 128 préfets sans affectation territoriale ; un
chiffre supérieur au nombre de préfets alors en poste (127)95. Moralité,
comme l’avertit le rapport de Michel Mercier précité, « l’État n’a pas
encore tiré toutes les conséquences de la décentralisation »96, demeurant
encalminé dans un rôle ambigu.

91
 ie publique. Déclaration de M. François Hollande, Président de la République, sur la réforme des collectivités locales.
V
5 octobre 2012.
92
Cour des comptes. L’organisation territoriale de l’État. Juillet 2013.
93
Idem
94
Ipsos. Les Français et le service public local. Février 2017.
95
Le Figaro. Un rapport dénonce le grand nombre de préfets sans affectation territoriale. 26 novembre 2015.
96
MERCIER, Michel. Rapport d’information au nom de la mission commune d’information chargée de dresser le bilan
de la décentralisation et de proposer les améliorations de nature à faciliter l’exercice des compétences locales.
Sénat, 28 juin 2000.

24
Fiscalité locale des entreprises : un échec français

Lois MAPTAM et NOTRe : reculer pour mieux avancer ?


L’alternance politique de 2012 est venue détricoter une partie des avan-
cées introduites par la loi du 16 décembre 2010. Le conseiller territorial,
création mort-née de la précédente majorité, fut supprimé dès 201397 par la
nouvelle législature de l’Assemblée nationale tandis que la loi MAPTAM98,
adoptée le 27 janvier 2014, a quant à elle rétabli la clause générale de
compétences. Dans ce cadre, afin d’harmoniser les politiques publiques
locales entre chaque collectivité, celle-ci a créé la conférence territoriale de
l’action publique (CTAP), présidée par le président du conseil régional99.
De surcroît, dans un souci de clarifier les champs d’action du bloc territorial
mais à rebours du rétablissement de la clause générale de compétences, la
loi MAPTAM attribue des chefs de filât aux collectivités : le développement
économique aux régions, l’action sociale aux départements100 et la mobilité
durable aux communes101. Suivant les recommandations formulées cinq ans
plus tôt par le comité Balladur102, elle a également créé le Grand Paris et pré-
cisé, aux termes de son article 31, le statut et les attributions de onze autres
métropoles103 en les élargissant aux communautés d’agglomérations de plus de
400 000 habitants (contre un seuil de 500 000 auparavant)104 tout en conférant
un statut particulier à la métropole lyonnaise, érigée en modèle de simplifica-
tion institutionnelle. Consacrées par le texte comme les principaux épicentres
de la croissance économique, les métropoles se sont vues aussi adjoindre une
mission de solidarité vis-à-vis des territoires qui les entourent105.

Enfin, dernière pierre à l’édification de la décentralisation, la loi NOTRe106


du 7 août 2015 a poursuivi, dans les pas de la loi MAPTAM, l’ambition de
clarifier les compétences des collectivités. Après en avoir redessiné la carte

97
 e conseiller territorial a été supprimé par la loi du 17 mai 2013.
L
98
Loi du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles.
99
Créée par la loi MAPTAM, la conférence territoriale de l’action publique est une instance de coordination à
l’échelon régional. Elle a vocation à débattre sur tout projet visant à coordonner les interventions des puissances
publiques locales sur son territoire dans le cadre de conventions territoriales d’exercice concerté (CTEC) qui ont
pour objet de désigner un chef de file et des partenaires parmi les collectivités ou établissements concernés par
une action publique. Présidée par le président du conseil régional, la CTAP est composée des présidents des
conseils départementaux, des présidents des EPCI de plus de 30 000 habitants, d’un représentant des EPCI de
moins de 30 000 habitants ayant leur siège dans chaque département ainsi que d’un représentant pour chaque
catégorie de communes dans chaque département.
100
En 2015, 64% des dépenses départementales étaient consacrés à l’aide sociale, pour un montant estimé entre
33 et 38 Mds €. Les conseils départementaux assuraient ainsi 50,3% des dépenses d’aide et d’action sociale de
l’ensemble du pays.
101
LETY, Philippe. Réforme territoriale en France : les communes et les syndicats intercommunaux. Allemagne
d’aujourd’hui, 2015/2, n°2.
102
Comité pour la réforme des collectivités locales. « Il est temps de décider ». Rapport au président de la République.
5 mars 2009.
103
Au 1er janvier 2018, la France compte 22 métropoles : Aix-Marseille, Bordeaux, Brest, Clermont-Ferrand, Dijon,
Grenoble-Alpes, Lille, Lyon, Metz, Montpellier, Nancy, Nantes, Nice, Orléans, Paris, Rennes, Rouen, Saint-Étienne,
Strasbourg, Toulon, Toulouse et Tours.
104
Institut Montaigne. Décentralisation : sortons de la confusion. Repenser l’action publique dans les territoires.
Janvier 2016.
105
Sciences Po. Les environnements territoriaux des métropoles : quelles stratégies de coopération au service du
développement local ? Analyse comparée des systèmes de Lille, Nantes et Toulouse. École urbaine de Sciences Po,
septembre 2018.
106
Loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République.

25
Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

en 2014107 – non sans susciter un torrent de critiques de part et d’autre de


l’échiquier politique (voir encadré infra) – pour en faire des territoires de taille
comparable, voire supérieure, à leurs homologues européens108, la loi NOTRe
est venue renforcer le rôle des conseils régionaux dans le paysage institu-
tionnel territorial. Sans leur en donner la totale exclusivité pour autant109,
elle leur attribue le leadership en matière de développement économique, et
ce via un schéma désormais prescriptif 110. Une situation susceptible, selon
Gérard Marcou, enseignant à l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, de
« créer les conditions d’un conflit institutionnel avec les métropoles »111. Également
compétentes pour la gestion des lycées, de l’apprentissage ou de la formation
professionnelle, les régions sont aussi devenues cheffes de file en matière d’en-
vironnement et d’aménagement du territoire112. Afin qu’elles puissent faire
face à leurs nouvelles compétences et aux besoins d’investissements qui en
découlent, la part de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE)
qu’elles perçoivent est alors passée de 25 % à 50 % au 1er janvier 2017, au détri-
ment des départements. Aussi, petite révolution constitutionnelle, les régions
se sont vues octroyer un pouvoir réglementaire, jusqu’alors uniquement du
ressort du gouvernement113.

En outre, dans une optique de spécialisation et d’économies, le texte supprime


à nouveau la clause générale de compétences pour les conseils régionaux et
départementaux114. Rescapés in extremis de l’examen parlementaire115 mais néan-
moins dépossédés de leurs compétences économiques et transports au profit des
régions et des métropoles, les départements sont dès lors appelés à recentrer
leurs activités sur l’action sociale et la solidarité territoriale. Le tourisme demeure
en revanche une compétence partagée par toutes les collectivités.

Aux côtés des régions, les structures intercommunales apparaissent comme les
grandes bénéficiaires des transferts de compétences prévus par la loi NOTRe
et incarnent par la même occasion le second pilier de la rationalisation du

107
 oi du 16 janvier 2015 relative à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant
L
le calendrier électoral.
108
Cour des comptes. Les finances publiques locales. Rapport sur la situation financière et la gestion des collectivités
territoriales et de leurs établissements publics. Octobre 2017.
109
L’article 3 de la loi NOTRe permet aux métropoles, aux communes et à leurs groupements de participer également
au financement des entreprises « dans le cadre d’une convention passée avec la région ».
110
Les régions doivent, dans ce cadre, élaborer un schéma régional de développement économique, d’innovation et
d’internationalisation (SRDEII).
111
MARCOU, Gérard. Développement économique : la région, chef de file ? École nationale d’administration, Revue
française d’administration publique, n°156, 2015/4.
112
Les régions doivent, dans ce cadre, élaborer un schéma régional d’aménagement, de développement durable et
d’égalité des territoires (SRADDET).
113
Acteurs publics. Le projet de loi sur la réforme territoriale. 23 avril 2014.
114
Elle demeure en revanche maintenue pour les communes.
115
Lors de son discours de politique générale prononcé le 8 avril 2014, le Premier ministre, Manuel Valls, avait fait part de
sa volonté de supprimer les conseils départementaux à l’horizon 2021. Grâce notamment à l’activisme des sénateurs,
ces derniers ont finalement survécu.

26
Fiscalité locale des entreprises : un échec français

millefeuille territorial116. Au-delà du resserrement de la carte intercommu-


nale117 piloté par les préfets118 et qui a permis de réduire de 39 % en un an le
nombre d’EPCI à fiscalité propre119 (passant de 2 062 à 1 266 sur la période
2016-2017)120, les intercommunalités héritent, dans un souci de mutualisation,
de nouvelles attributions obligatoires : le tourisme, la collecte et le traitement
des déchets, la gestion des milieux aquatiques ainsi que les aires d’accueil
des gens du voyage. À compter du 1er janvier 2020, elles seront de surcroît
responsables de l’eau et de l’assainissement à la place des municipalités.

Redécoupage des régions : is big (really) beautiful ?

Au 1er janvier 2016, la France métropolitaine est passée de 22 à 13 régions.


Ainsi, sept conseils régionaux résultent de la fusion de deux ou trois
régions préexistantes tandis que six d’entre elles demeurent iden-
tiques. Ayant fait couler beaucoup d’encre, ce redécoupage – dont la
carte originelle était issue du gouvernement d’Edgar Faure sous la
IVème République – n’apparaissait sur le papier pas forcément saugrenu
et dénué de bonnes intentions, à savoir réduire le millefeuille territo-
rial et agrandir nos régions afin que celles-ci soient plus homogènes
et compétitives par rapport à leurs consœurs européennes tout en
réalisant des économies d’échelle121.

Résultats : la population moyenne des régions est passée de 3,03 M


d’habitants en 2015 à 5,17 M en 2016 et leur superficie moyenne a qua-
siment doublé, passant de 25 500 km² à 44 600 km² 122. Si les conseils
régionaux tricolores issus du redécoupage sont dorénavant de taille
comparable – voire supérieure – à celles des autres régions du Vieux
continent, ils n’en demeurent pas moins que leurs budgets n’ont pas
connu d’évolution sensible et qu’ils n’ont reçu aucune compétence nou-
velle de l’État. En d’autres termes, si le design a changé, l’organisation
institutionnelle régionale n’a presque pas bougé d’un iota. Impossible

116
Cour des comptes. Les finances publiques locales. Rapport sur la situation financière et la gestion des collectivités
territoriales et de leurs établissements publics. Octobre 2017.
117
 ’article 33 de la loi NOTRe a fait passer le seuil minimal de constitution d’une intercommunalité de 5 000 à
L
15 000 habitants.
118
Conformément à la loi NOTRe, les préfets ont été chargés de mettre en œuvre de nouveaux schémas départe-
mentaux de coopération intercommunale (SDCI) afin de redécouper la carte des intercommunalités.
119
Selon la Cour des comptes, les EPCI à fiscalité propre comptent aujourd’hui en moyenne 28 communes (contre
17 en 2016) et une population de 52 300 habitants (contre 31 800 en 2016).
120
Cour des comptes. Les finances publiques locales. Rapport sur la situation financière et la gestion des collectivités
territoriales et de leurs établissements publics. Octobre 2017.
121
OCDE. Multi-level governance reforms. Overview of OECD country experiences. Mai 2017.
122
Cour des comptes. Les finances publiques locales. Rapport sur la situation financière et la gestion des collectivités
territoriales et de leurs établissements publics. Octobre 2017.

27
Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

dans ce contexte d’espérer réellement rivaliser avec leurs consœurs


européennes comme le proclamait l’exposé des motifs du projet de loi
relatif à la délimitation des régions.

Aussi, comme le souligne notamment le démographe et historien


Hervé Le Bras, le redécoupage des régions – « fait sur un coin de table
à l’Élysée »123  – a été dessiné sans réelle concertation des élus locaux,
des spécialistes voire de nos concitoyens (par le biais d’un referendum).
Lors de l’examen du texte au Sénat à l’été 2014, les parlementaires
du Palais du Luxembourg, vent debout contre le projet et la
méthode, avaient ainsi soulevé l’absence d’analyse des conséquences
économiques, financières, sociales et environnementales, des coûts et
bénéfices financiers attendus ainsi que de l’évaluation des conséquences
sur l’emploi public.

Autrement dit, les nouvelles frontières régionales ont été sacrifiées


sur l’autel de la précipitation et des équations politiques picrocholines
plutôt que pensées dans le temps long en fonction des bassins d’em-
ploi, des liens financiers entre territoires, des flux de déplacements
domicile-travail des actifs, des réseaux routiers et ferroviaires, des
proximités culturelles, etc. En somme, plutôt que de tailler au coup de
rabot, il eût fallu coudre dans la dentelle cette recomposition régio-
nale en redessinant au passage la carte des départements, restée in fine
inchangée. En effet, comme le révèle une étude de France Stratégie
sur la cohérence économique des nouveaux conseils régionaux, « cer-
tains départements ont des liens économiques ou financiers plus forts avec une
région autre que celle à laquelle ils appartiennent »124. De plus, symbole de
ce redécoupage effectué à la hussarde et des déséquilibres inhérents
qui en découlent, certaines régions ne disposent aujourd’hui d’aucune
métropole sur leur territoire alors que d’autres en comptent plusieurs !

Enfin, la thèse des grandes régions et des économies d’échelle affé-


rentes semble avoir, deux ans plus tard, pris un sacré coup. Alors que
le secrétaire d’État à la réforme territoriale André Vallini tablait – sans
ciller – sur des gains annuels pharaoniques de 12 à 25 Mds €, la littéra-
ture spécialisée semble bien plus réservée (« les économies d’échelle atten-
dues apparaissent marginales »125) voire pessimiste (« l’expérience montre

123
Europe 1. Redécoupage des régions : « ça a été fait sur un coin de table ». 5 avril 2016.
124
France Stratégie. Réforme territoriale et cohérence économique régionale. La note d’analyse, n°29, mai 2015.
125
 ONNET-PINEAU, Élisabeth. La réforme régionale en France : une occasion manquée ? EchoGéo, 19 avril 2016.
B

28
Fiscalité locale des entreprises : un échec français

que les coûts croissent avec la taille »126). Rappelant que les marges de
manœuvre des collectivités en termes de rationalisation des dépenses
sont dans la pratique relativement limitées, François Mouterde, ensei-
gnant à Sciences Po Paris et à l’ÉNA, va plus loin : « il est hallucinant
de vouloir faire croire que la fusion des régions serait source d’économies »127.
Notons par ailleurs que, contrairement à la volonté initiale du gouver-
nement128, le nombre de conseillers régionaux est resté inchangé alors
que les régions ont été divisées par deux129.

Par surcroît, le fétichisme de la taille semble oublier les petits Länder


allemands de Brême, de Hambourg, de la Sarre ou du Schleswig ainsi
que les petites provinces italiennes de Ligurie et Molise, pas moins
dynamiques que les nouveaux géants français moins dotés financiè-
rement ainsi qu’en compétences. En d’autres termes, comme l’affirme
Hervé Le Bras : « ni le nombre d’habitants ni la surface d’un territoire ne
font la puissance d’une région »130. Un constat prolongé à la lumière du
comparatif européen réalisé par la Fondation iFRAP (« le dynamisme
d’un territoire n’est pas forcément lié à sa taille »131) ainsi que par le rap-
port d’information sénatorial Raffarin- Krattinger (« la comparaison des
régions françaises avec ses homologues européennes démontre que la puissance
économique d’une région n’est pas liée à sa démographie ou à sa superficie
mais repose sur les compétences exercées et les moyens dont elle dispose »132).

Loi NOTRe : un bilan en demi-teinte


Comme évoqué supra, le triptyque de la réforme territoriale mise en œuvre
en 2014 et 2015 avait pour optique de simplifier l’architecture de notre
paysage institutionnel local en clarifiant les compétences de chaque éche-
lon, en rationnalisant les cartes communale et intercommunale ainsi qu’en
parachevant l’affirmation des métropoles et des régions (en réduisant le
nombre de ces dernières, et ce tout en renforçant leurs responsabilités
par rapport à celles des départements) ; substituant de la sorte, dans un

126
Sénat. Compte rendu des auditions organisées par la commission spéciale. 24 juin 2014.
127
 a Gazette des communes. Fusion des régions : des économies accessoires face à l’ampleur des enjeux. 9 mai 2014.
L
128
Alors que le projet de loi initial prévoyait de plafonner le nombre de conseillers régionaux à 150 par région (passant ainsi
au total de 1 757 à 1 509, soit une diminution de 15%), les députés ont finalement adopté un amendement au cours de
la navette parlementaire pour que le nombre de conseillers régionaux reste inchangé.
129
OCDE. Multi-level governance reforms. Overview of OECD country experiences. Mai 2017.
130
Le Monde. Une réforme nécessaire mais bâclée. 5 juin 2014.
131
Fondation iFRAP. Régions : les pistes pour une vraie réforme. Société civile n°150, octobre 2014.
132
KRATTINGER, Yves, RAFFARIN, Jean-Pierre. Rapport d’information sur l’avenir de l’organisation décentralisée de la
République. Sénat, rapport n°49, 8 octobre 2013.

29
Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

glissement institutionnel imprégné des théories du New Public Manage-


ment133, le couple communes/départements au duo métropoles/régions134.

Quatre ans plus tard, sans constituer un ersatz de réforme, le bilan apparaît
néanmoins globalement contrasté et tranche avec le succès dont, le texte
définitivement voté, l’exécutif d’alors s’était empressé de s’enorgueillir.
En effet, lors de la présentation annuelle du rapport sur les finances
publiques locales le 11 octobre 2017, Didier Migaud, premier président de
la Cour des comptes, affirmait sans ambiguïté : « la réforme territoriale récente
n’a que partiellement simplifié l’architecture institutionnelle locale et la répartition
des compétences entre les collectivités qui demeurent d’une grande complexité »135.
Un récent rapport parlementaire sur la décentralisation n’est pas moins
critique : « la juxtaposition des lois MAPTAM et NOTRe n’a pas aidé à la
lisibilité »136 ; les députés regrettant en conclusion que la dernière réforme
territoriale « ait recréé des baronnies sans réflexion sur des projets de territoire »137.
Les maires, quant à eux, portent également un regard sévère puisque, d’après
une enquête du CEVIPOF parue en novembre 2018, 75 % d’entre eux jugent
de manière négative les changements introduits par la loi NOTRe138.

Dans les faits, contrairement à la volonté initiale affichée par le Premier


ministre Manuel Valls dans son discours de politique générale prononcé
devant l’Assemblée nationale le 8 avril 2014139, les conseils départementaux
n’ont finalement pas été supprimés140. Leurs compétences ont néanmoins été
vidées de leur substance puisque les volets « transports » et « développement
économique », pans importants de leurs missions, ont été confiés aux régions
ainsi que, dans une moindre mesure, aux métropoles ; les départements se
concentrant dès lors sur l’action sociale et la solidarité territoriale.

133
 é au début des années 1980 au Royaume-Uni et en Nouvelle-Zélande avant d’essaimer dans l’ensemble des pays de
N
la zone OCDE, le New Public Management est fondé sur des théories d’origines diverses (sciences économiques, ma-
nagement, public choice notamment). Dit sommairement, la pierre angulaire théorique du New Public Management
réside dans l’application de méthodes managériales et de gestion issues du secteur privé aux administrations publiques
afin de les rendre plus efficientes. Pour une évaluation internationale (8 pays dont la France) de l’application du New
Public Management, voir notamment l’ouvrage de référence des politologues Geert Bouckaert et Christopher Pollitt
paru en 2000 aux presses de l’université d’Oxford : « Public management reform: a comparative analysis ».
134
DURANTHON, Arnaud. L’institution départementale à l’heure métropolitaine : quelles perspectives ? Assemblée des
départements de France, août 2018.
135
La Tribune. Nouvelles régions. Une réforme territoriale inachevée. 21 septembre 2018.
136
CESARINI, Jean-François, VIALA, Arnaud, VUILLETET, Guillaume. Rapport d’information sur la préparation d’une
nouvelle étape de la décentralisation en faveur du développement des territoires. Assemblée nationale, 31 mai 2018.
137
Idem
138
CEVIPOF. Les maires de France : entre résignation et incertitude. Enquête 2018. Sciences Po, Observatoire de la
démocratie de proximité, AMF-CEVIPOF, novembre 2018.
139
Cette ambition du Premier ministre reprenait en réalité la proposition n°260 formulée en 2008 par la commission
Attali visant à supprimer les conseils départementaux en l’espace de dix ans.
140
Pour une rétrospective de l’histoire du département, voir notamment les articles du politologue et géographe
Philippe Estèbe (« Le département insubmersible. Entre modernité territoriale et archaïsme politique ») ainsi que de la
politologue Marie-Ange Grégory (« Le département : une « vieille institution » qui a résisté au temps et aux critiques »).

30
Fiscalité locale des entreprises : un échec français

Contrairement encore à l’ambition initiale de clarification formulée par


l’exécutif, la clause générale de compétences – antienne de la vie publique
locale mue en pomme de discorde partisane, supprimée par le gouvernement
Fillon en 2010 puis réhabilitée par le gouvernement Ayrault en 2014 – n’a
finalement pas totalement disparu. Ainsi, la loi prévoit in fine le maintien
de compétences partagées dans de nombreux domaines (tourisme, culture,
sports, égalité femme-homme, etc.) tandis que les communes conservent
leurs capacités d’intervention dans tous les domaines d’intérêt public,
héritage de la loi municipale de 1884. De plus, la mission de solidarité
territoriale assignée aux conseils départementaux leur confère une lati-
tude extrêmement large ; une instruction ministérielle du 22 décembre
2015 les autorisant à intervenir au-delà de leurs compétences propres :
« la solidarité territoriale des départements a vocation à s’exprimer à travers leur
capacité à financer des opérations ne relevant pas strictement de leurs compétences
d’attribution »141.

La suppression de la clause générale de compétences inscrite dans la


loi NOTRe apparaît dès lors bien cosmétique et dissimule en réalité la
persistance du millefeuille. En effet, une grande partie des compétences
des administrations locales reste exercée sur plusieurs strates – voire
partagée avec l’État ou des opérateurs publics – générant de facto des flux
de financements croisés et des surcoûts de gestion. La Cour des comptes
livre ainsi une conclusion assassine : « la répartition des compétences n’a guère
été simplifiée […] l’objectif de rationalisation des interventions des collectivi-
tés et de moindres enchevêtrements de leurs compétences n’est que partiellement
atteint »142. En d’autres termes, la portée de la logique de spécialisation
des compétences des collectivités demeure aujourd’hui encore bien limitée.

Par ailleurs, si la réforme a ramené à 18 le nombre de régions (contre 27


précédemment143), elles ne peuvent être comparées en termes tant de bud-
get que de compétences à leurs consœurs européennes. À titre d’exemple,
le budget de la Bavière en Allemagne correspond au double du budget de
l’ensemble des régions tricolores144. Aussi, Standard & Poor’s nous rappelle
que l’acte II de la décentralisation engagé par le gouvernement Raffarin à
l’aube des années 2000 avait eu un impact bien plus important que la loi
NOTRe ; les budgets régionaux progressant de 10 % par an sur la période

141
 our des comptes. Les finances publiques locales. Rapport sur la situation financière et la gestion des collectivi-
C
tés territoriales et de leurs établissements publics. Octobre 2017.
142
Idem
143
En application de la loi du 16 janvier 2015 relative à la délimitation des régions.
144
Cour des comptes. Les finances publiques locales. Rapport sur la situation financière et la gestion des collecti-
vités territoriales et de leurs établissements publics. Octobre 2017.

31
Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

2004-2008145. Nains financiers, les conseils régionaux apparaissent dès


lors comme des « colosses aux pieds d’argile »146 selon la formule de Romain
Pasquier, directeur de recherche au CNRS. En effet, derrière les slogans
régionalistes scandés à l’époque par la majorité, force est de reconnaître
que la loi NOTRe n’a octroyé aucune compétence nouvelle en provenance
de l’État vers les régions, et ne leur a conféré ni moyens financiers substan-
tiels supplémentaires ni pouvoir fiscal élargi. De plus, comme l’avance la
Cour des comptes, les transferts horizontaux de compétences initiés par la
loi NOTRe ont été, jusqu’alors, réalisés a minima au regard des ambitions
prévues par le texte. Pour preuve, les transferts aux métropoles n’ont pour
l’heure représenté que 160 M € tandis que ceux des départements vers les
régions dépassent à peine 2 Mds €147.

De surcroît, tant vantées par le gouvernement lors de l’examen du projet de


loi par le Parlement, les économies d’échelle générées par la réforme sont pour
l’heure inexistantes148. A contrario, comme le constate Standard & Poor’s, il
est fort probable que les fusions se traduisent par des coûts supplémentaires
dans les années à venir : « nous n’anticipons pas de larges économies d’échelle
ni d’optimisation importante des dépenses du fait des fusions pouvant modifier la
trajectoire budgétaire et l’endettement à moyen terme des régions » conclut sans
équivoque l’agence de notation149. Françoise Larpin, associée en charge du
secteur public local chez KPMG, va même plus loin : « d’expérience, aucune
fusion n’a fait la preuve qu’elle créait des économies »150. Dans ce sillon, l’OCDE
souligne qu’en raison « de la complexité et de l’inertie du système ainsi que de la
faible responsabilisation des collectivités territoriales »151, la décentralisation à
la française n’a pas atteint les gains d’efficacité et d’économies budgétaires
attendus. Resserrant la focale sur les EPCI, Françoise Navarre, maître de
conférences à l’Institut d’urbanisme de Paris, l’affirme à son tour : « contrai-
rement à ce qui était escompté, la montée en charge des regroupements intercommu-
naux ne s’est pas accompagnée d’économies budgétaires. Au contraire, la taille du
secteur public local a crû et avec elle, les taux de taxation »152.

145
 tandard & Poor’s. Nouvelles régions françaises : un profil de crédit toujours favorable dans un contexte européen.
S
22 septembre 2015.
146
PASQUIER, Romain. Les Régions dans la réforme territoriale. Des colosses aux pieds d’argile ? Cahiers français n°391,
2016.
147
Cour des comptes. Les finances publiques locales. Rapport sur la situation financière et la gestion des collectivités
territoriales et de leurs établissements publics. Octobre 2017.
148
Dans un entretien au Figaro daté du 8 mai 2014, le secrétaire d’État à la réforme territoriale André Vallini affirmait que
la loi NOTRe permettrait de réaliser un gain annuel de « 12 à 25 milliards d’euros ».
149
Standard & Poor’s. Nouvelles régions françaises : un profil de crédit toujours favorable dans un contexte européen.
22 septembre 2015.
150
La Gazette des communes. La fusion des régions n’aura pas d’impact financier. 24 septembre 2015.
151
OCDE. Faire face aux défis de la décentralisation. Études économiques de l’OCDE, 2007/13, n° 13.
152
NAVARRE, Françoise. Les métropoles, aux prises avec leurs réalités fiscales ? Géographie, économie, société,
volume 19, 2017/4.

32
Fiscalité locale des entreprises : un échec français

Malgré ces écueils, l’un des points positifs de la réforme réside toutefois à
ce jour dans la rationalisation de la carte intercommunale mise en œuvre
sous l’égide des préfets : le nombre d’EPCI ayant été réduit, comme nous
l’avons évoqué plus haut, de 39% depuis la mise en œuvre de la loi NOTRe.
Le mouvement de fusion des communes, favorisé par la loi du 16 mars 2015,
demeure quant à lui à nos yeux plus timide avec seulement 517 municipalités
nouvelles créées en 2015 et 2016153 ; une évolution permettant néanmoins à
la France de passer sous la barre symbolique des 36 000 communes en 2018.
Si un rapport parlementaire parle d’ « engouement »154 pour les communes
nouvelles et si les magistrats de la Cour des comptes évoquent quant à eux
un « mouvement sans précédent de fusions de communes »155, force est de recon-
naître que celui-ci demeure en-deçà des enjeux lorsqu’il est lu à la lumière
des réformes engagées par nos voisins européens (voir encadré infra).

En somme, annoncée en fanfare et si elle va certes dans le bon sens en


déplaçant le centre de gravité de la décentralisation vers le couple métro-
poles-régions, la dernière réforme territoriale – dissoute dans l’évitement
des coûts politiques156 – est encore très loin d’avoir atteint les objectifs
qu’elle s’était assignée en matière de clarification des compétences et de
rationalisation du millefeuille territorial notamment. De surcroît, comme
le souligne avec sagacité l’OCDE, le rôle de l’État demeure prépondérant
de par la mosaïque de services déconcentrés157 dont il dispose aux niveaux
départemental et régional ainsi qu’en toile de fond via son contrôle sur la
fiscalité locale158. Aussi, alors que l’OCDE pointe le fait que dans la majorité
de ses pays membres décentralisation et réforme fiscale vont habituellement
de pair, la France fait quant à elle figure d’exception ; transférant toujours
plus de compétences aux collectivités sans pour autant revoir un système
fiscal jugé à l’unisson de plus en plus inadapté et insuffisant159, et ce alors
que notre Constitution garantit – aux termes de son article 72-2 – cette
compensation depuis 2003160.

153
 our des comptes. Les finances publiques locales. Rapport sur la situation financière et la gestion des collectivités
C
territoriales et de leurs établissements publics. Octobre 2017.
154
GATEL, Françoise, MANABLE, Christian. Les communes nouvelles, histoire d’une révolution silencieuse. Raisons
et conditions d’une réussite. Sénat, Délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation, rapport
d’information n°563, avril 2016.
155
Cour des comptes. Les finances publiques locales. Rapport sur la situation financière et la gestion des collectivités
territoriales et de leurs établissements publics. Octobre 2017.
156
LE LIDEC, Patrick. La relance de la décentralisation en France. De la rhétorique managériale aux réalités politiques
de « l’acte II ». Politiques et management public, volume 23, n° 3, 2005.
157
D’autres pays de la zone OCDE disposent néanmoins de représentations de l’État dans les territoires analogues à
nos services déconcentrés : Estonie, Finlande, Grèce, Hongrie, Italie, Pologne, Suède, etc.
158
OCDE. Multi-level governance reforms. Overview of OECD country experiences. Mai 2017.
159
Idem
160
Article 72-2 de la Constitution : « Tout transfert de compétences entre l’État et les collectivités territoriales s’accom-
pagne de l’attribution de ressources équivalentes à celles qui étaient consacrées à leur exercice. Toute création ou
extension de compétences ayant pour conséquence d’augmenter les dépenses des collectivités territoriales est
accompagnée de ressources déterminées par la loi ».

33
Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

Vu de plus haut, avatar du jacobinisme, l’État semble parfois reprendre


d’une main ce qu’il a concédé de l’autre pour mieux enserrer de son
étau les collectivités. Dans une note pour Terra Nova, les économistes
Laurent Davezies et Yves Morvan abondent dans ce sens : « le pouvoir
central n’hésite pas à re-centraliser insidieusement certaines décisions pour
mieux contrôler les effets de la décentralisation »161. Un constat partagé par
Arnaud Duranthon, maître de conférences en droit public à l’université
de Strasbourg : « si l’État reconnaît la singularité juridique et politique des
collectivités territoriales, celles-ci restent cependant l’objet de réformes inscrites
à son agenda. S’il entend leur laisser le bénéfice d’un principe de libre admi-
nistration, ce n’est que selon des limites très fortes »162. De la même manière,
Patrick Le Lidec, politologue à Sciences Po Paris et chargé de recherche
au CNRS, considère que « l’État organise son retrait des territoires pour
mieux les gouverner à distance et restaurer son autorité »163. Pour résumer,
loin de se libérer complètement de la figure tutélaire de l’État, les collec-
tivités en sont parfois réduites à jouer les supplétives. Dit autrement, si
dans les discours la réforme territoriale est devenue, au fil des décennies,
une arlésienne de la vie politique hexagonale, d’aucuns considèrent que
l’on assiste – ici et là – à une sorte de « décentralisation centralisée »
selon la formule empruntée à Gérard-François Dumont164.

Cette analyse mérite néanmoins d’être nuancée en remobilisant notamment


la thèse du « jacobinisme apprivoisé » avancée par le sociologue Pierre
Grémion dans les années 1970. En effet, loin de se cantonner à l’image si
souvent rebattue d’un modus operandi centralisateur, les relations entre État
et collectivités font apparaître dans la pratique un « jacobinisme » fait de
négociations, d’arbitrages et de transactions, où les pouvoirs locaux – que
Pierre Grémion qualifie, sans en flétrir le rôle, de « pouvoir périphérique » –
ne sont pas faibles par rapport aux représentants du pouvoir central ;
donnant naissance ipso facto à un « système de régulations croisées »165.

161
 AVEZIES, Laurent, MORVAN, Yves. Pour une grammaire de la décentralisation. Terra Nova, 15 novembre 2016.
D
162
DURANTHON, Arnaud. L’institution départementale à l’heure métropolitaine : quelles perspectives ? Assemblée des
départements de France, août 2018.
163
LE LIDEC, Patrick. Le jeu du compromis : l’État et les collectivités territoriales dans la décentralisation en France. Revue
française d’administration publique, n°121-122, 2007/1.
164
DUMONT, Gérard-François. Géopolitique des territoires français : décentralisation versus recentralisation. Diploweb,
15 septembre 2018.
165
GRÉMION, Pierre. Autour du périphérique. Politix, volume 2, n°7-8, octobre-décembre 1989.

34
Fiscalité locale des entreprises : un échec français

Des voisins européens en pointe sur la rationalisation


de leur organisation territoriale

Alors que la France peine à dégraisser son « mammouth territorial »,


préférant le lifting au coup de rabot, la majorité de nos voisins euro-
péens ont en revanche procédé ces dernières décennies à des réformes
en profondeur de leur carte administrative locale166. Ainsi, en l’espace
de trente ans, l’Allemagne a divisé par deux le nombre de ses municipa-
lités en fusionnant une grande partie d’entre elles pour n’en conserver,
in fine, que 11 220 pour une population de 82 millions d’habitants167.
De la même manière, en vingt ans, la Suède et la Belgique sont passées
de 2 532 à 290 communes pour la première et de 2 739 municipalités
à 589 pour la seconde168. En Grèce, le nombre de communes a quant à
lui été divisé par trois dans le cadre d’une réforme territoriale de grande
ampleur. Outre-Manche, le législateur britannique a supprimé en 2014
deux échelons administratifs (les régions et les comtés), réduisant
drastiquement le nombre de ses collectivités locales. En Italie, si Matteo
Renzi n’est pas parvenu à les supprimer, le Parlement a vidé de sa
substance un échelon administratif pourtant historique : les provinces,
réduites à l’état de simple division géographique169. En quarante ans, le
Danemark a pour sa part divisé par dix le nombre de ses communes et
par cinq le nombre de ses régions. Enfin, aux Pays-Bas, la loi plafonne
désormais à 25 000 le nombre minimal d’habitants par municipalité170.

Par conséquent, alors que la France compte un mandat électif


pour 104 habitants, l’on en recense par exemple seulement un pour
2 336 administrés en Irlande ou un pour 2 603 au Royaume-Uni. Pis, le
taux de représentation hexagonal est quatre fois et demi supérieur au
taux des États-Unis pour une population américaine pourtant cinq fois
plus importante. En somme, comme le soulignent Isabelle Chatry, ana-
lyste à l’OCDE, et Vincent de Briant, enseignant-chercheur à l’univer-
sité Paris-Créteil, la France apparaît, malgré la loi NOTRe, fortement
en retard dans la rationalisation de sa carte territoriale en comparaison
« aux autres pays européens qui l’ont amorcée dans les années 1970 »171.

166
 our un tour d’horizon précis des réformes territoriales menées au sein des États membres de l’Union européenne,
P
voir la publication du Conseil des Communes et Régions d’Europe : « La décentralisation à la croisée des chemins.
Réformes territoriales en Europe en période de crise. Octobre 2013 ».
167
KESSLER, Denis. Stop aux ronds-points. Challenges, 10 février 2014.
168
Idem
169
La Tribune. Millefeuille administratif : ce qu’ont fait nos voisins. 10 avril 2014.
170
Idem
171
Le Monde. Le « millefeuille » territorial attaqué partout en Europe. 12 avril 2014.

35
Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

La dynamique métropolitaine au détriment du reste des territoires ?


Les lois MAPTAM et NOTRe, dernières pierres à l’édification de la décen-
tralisation, ont induit des changements importants dans l’organisation
territoriale de la France. L’affirmation des métropoles172 – vaste mouvement
mondial et ultime émanation de la décentralisation – en est l’un des traits
saillants, constituant « la nouvelle référence de l’action publique territoriale »173
selon la formule de Maurice Olive. Or, si la bonne performance de ces
grandes aires urbaines174 devenues les mètre-étalons du bloc territorial
constitue sans nul doute un atout indispensable pour l’économie tricolore,
leur capacité à entraîner le reste des territoires dans une dynamique positive
est un enjeu tout aussi capital. Dit autrement, depuis plusieurs années, on
assiste à bas bruit à un « décrochage » entre les territoires métropolitains –
plus riches et plus dynamiques – et les zones rurales – plus pauvres – selon
Hugo Bevort, directeur des stratégies territoriales au Commissariat général
à l’égalité des territoires (CGET)175.

Pour preuve, en raison de la redistribution spatiale des lieux de création de


valeur, on observe dans l’Hexagone depuis le début des années 1980 « un
regain des inégalités de PIB par habitant entre les régions »176. Plus précisément,
entre 2000 et 2010, la croissance française a été générée aux trois quarts au
sein des quinze principales métropoles tandis que le PIB par habitant y est en
moyenne 50 % plus élevé que dans le reste du pays. Représentant seulement
2,5 % du territoire mais regroupant 43 % de la population, elles concentrent
44 % de la fiscalité locale des entreprises perçue sur toute la France177, 46 %
des emplois, 51 % du PIB, plus de la moitié (55 %) des diplômés de l’ensei-
gnement supérieur et de la masse salariale nationale178 ainsi que 70 % des
brevets179. Dans ce sillage, signe de leur dynamisme et de l’atonie du reste
des territoires hexagonaux, les métropoles ont représenté plus de 70 % des
créations nettes d’emplois privés entre 2007 et 2014180.

Explication de cette disparité : comme le met en relief France Stratégie dans


le sillon notamment des travaux menés sur le sujet par le laboratoire de

172
 our des éléments de définition de l’action métropolitaine ainsi qu’un retour sur sa genèse, voir notamment
P
l’article d’Alain Bourdin, sociologue et professeur à l’Institut français d’urbanisme : « L’action métropolitaine.
Version française. ERES, Espaces et sociétés, n°160-161, 2015/1 ».
173
OLIVE, Maurice. Métropoles en tension. La construction heurtée des espaces métropolitains. ERES, Espaces et
sociétés, n°160-161, 2015/1.
174
Selon le Commissariat général à l’égalité des territoires, 83 % de la population française vit aujourd’hui dans une
grande aire urbaine (dont 59 % au sein d’un pôle urbain).
175
Le courrier des maires et des élus locaux. Inégalités territoriales : malgré les actions locales, le « fossé » se creuse
depuis dix ans. 22 novembre 2018.
176
Terra Nova. La nouvelle question territoriale. 3 septembre 2014.
177
MODAAL Conseil, MEDEF. Actualisation du baromètre de la fiscalité locale des entreprises. Janvier 2018.
178
France Stratégie. Dynamique de l’emploi dans les métropoles et les territoires avoisinants. La note d’analyse, n°64,
novembre 2017.
179
Conseil Économique, Social et Environnemental. Pour une réforme globale de la fiscalité locale. Avril 2018.
180
Commissariat général à l’égalité des territoires. Dynamiques et inégalités territoriales. Juillet 2016.

36
Fiscalité locale des entreprises : un échec français

recherche ÉconomiX181, les métropoles profitent davantage de la tertiairisa-


tion, de l’économie de la connaissance et des NTIC. En 2011, elles concen-
traient ainsi 85 % des ingénieurs de l’informatique, 75 % des professionnels
de l’information et de la communication et 69 % du personnel d’études et
de recherche182. À rebours, les villes de moins de 100 000 habitants ainsi
que les territoires de zones rurales sont plutôt positionnés sur des activités
en perte de vitesse (agriculture, industries vieillissantes, etc.) et ont, ce
faisant, fortement souffert de l’érosion du système productif et industriel
ainsi que de la crise économique de 2007-2008. Dans une étude publiée en
juillet 2018, le CGET confirme sans équivoque cette nouvelle géographie
économique tricolore : « durant les quarante dernières années, l’emploi a surtout
progressé dans les grands pôles urbains et dans leurs couronnes. Il a augmenté dans
les petits et moyens pôles urbains jusqu’à la crise de 2007-2008, mais baisse depuis
dans ces territoires »183. Dès lors, les potentiels effets d’entraînement des
métropoles – tant vantés par les économistes et les acteurs publics – appa-
raissent aujourd’hui « peu visibles » d’après France Stratégie184, engendrant
ipso facto une France à plusieurs vitesses. En somme, comme l’avertit Jean
Pisani-Ferry, économiste et ancien commissaire général de France Stratégie,
« il ne faut pas que les métropoles deviennent des isolats de prospérité »185.

Forces motrices de la croissance, polarisant les activités de services à haute


valeur ajoutée ainsi que la population active la plus qualifiée, les métropoles
semblent dès lors ne pas parvenir à irriguer de leur dynamisme économique,
social et démographique les autres territoires français, moins attractifs et
moins compétitifs. A contrario, comme le met en lumière Terra Nova dans
une note dédiée, elles auraient tendance à accroître les inégalités entre
territoires186. Le rapport d’information des sénateurs Jean-Pierre Raffarin
et Yves Krattinger va plus loin en évoquant le risque d’émergence d’un
« sous-prolétariat territorial »187 pour qualifier ces aires échappant au giron
des métropoles. Foulant au pied la théorie du « ruissèlement territorial »,
le philosophe Marcel Gauchet parle quant à lui des « métropoles et des déserts
français »188, considérant – par-delà le slogan – que « la désertification menace

181
BRUNETTO, Marc, LEVRATTO, Nadine. Analysis of the job creation process in metropole areas: a spatial perspective.
EconomiX working papers n°36, 2017.
182
France Stratégie. Dynamique de l’emploi dans les métropoles et les territoires avoisinants. La note d’analyse, n°64,
novembre 2017.
183
Commissariat général à l’égalité des territoires. L’équilibre entre les territoires urbains et ruraux. Audition du CGET à
l’Assemblée nationale dans le cadre d’une mission flash. 26 juillet 2018.
184
France Stratégie. Dynamique de l’emploi dans les métropoles et les territoires avoisinants. La note d’analyse, n°64,
novembre 2017.
185
Caisse des Dépôts et Consignations. Jean Pisani-Ferry : « Il ne faut pas que les métropoles deviennent des isolats de
prospérité ». 7 octobre 2016.
186
Terra Nova. La nouvelle question territoriale. 3 septembre 2014.
187
KRATTINGER, Yves, RAFFARIN, Jean-Pierre. Rapport d’information sur l’avenir de l’organisation décentralisée de la
République. Sénat, rapport n°49, 8 octobre 2013.
188
GAUCHET, Marcel. La désertification menace des zones entières du territoire français. Médiacités, 29 janvier 2018.

37
Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

des zones entières du territoire français »189. Engagé à l’échelle internatio-


nale – une publication de l’OCDE publiée en 2015 et intitulée « Le siècle
métropolitain »190 l’illustre avec clarté –, le phénomène de métropolisation
ne devrait pourtant pas décélérer, bien au contraire. Selon une étude menée
par les Nations unies, la population urbaine tricolore devrait dépasser 85 %
à l’horizon 2030 (contre 76 % en 2000 et environ 83 % aujourd’hui), et ce au
détriment des zones rurales191.

Comparatif du poids des collectivités territoriales en Europe

Part des
Part Part
Niveaux de Nombre de dotations
dans les dans la
Pays collectivités collectivités par de l’État
dépenses dette
locales niveau dans les
publiques publique
ressources
• Länder (16)
Allemagne 3 • Kreise (237) 45,7  % 36,4 % 27 %
• Communes (11 220)

• Communautés
autonomes (17)
Espagne 3 50,7 % 30,2 % 32 %
• Provinces (50)
• Communes (8 115)

• Régions (18)
France • Départements (101)
(données 4 • Intercommunalités 18 % 11 % 35 %
2017) (1 263)
• Communes (35 357)

• Régions (20)
• Provinces (107)
Italie 4 • Unions de 29,8 % 9 % 45 %
communes (466)
• Communes (8 071)

• Provinces (12)
Pays-Bas 2 32,4 % 13,5 % 71 %
• Communes (403)

• Régions (4)
Royaume-
3 • Councils (107) 28,3 % 6 % 71 %
Uni
• Communes (406)

• Régions (21)
Suède 2 49,3 % 27,7 % 26 %
• Communes (290)

• Cantons (26)
Suisse 3 • Districts (148) 61,7 % 43,7 % 23 %
• Communes (2 352)

(Source : rapport d’Alain Lambert et de Martin Malvy remis au président de la République, avril 2014)

189
Idem
190
OCDE. Le siècle métropolitain. Comprendre l’urbanisation et ses conséquences. 2015.
191
United Nations. World population prospects. Key findings and advance tables. 2015.

38
Fiscalité locale des entreprises : un échec français

Le millefeuille territorial vu par les Français

D’ordinaire plus girondins que jacobins, les Français portent néanmoins


un regard ambivalent sur la décentralisation. Alors que 92 % d’entre
eux « font confiance aux collectivités locales pour améliorer leur quotidien »192,
qu’ils sont 84 % à considérer que les APUL sont de meilleures garantes
des services publics que l’État193, et que, par ricochet, 66 % considèrent
qu’il est nécessaire de « donner plus de pouvoir aux collectivités »194
(+ 3 points depuis 2016), ils sont en parallèle 51 % à juger ces dernières
« inefficaces » (contre seulement 3 % à les estimer « très efficaces »)195. Une
prime est toutefois donnée aux communes, échelon le plus plébiscité du
millefeuille territorial ; 34 % des Français interrogés considérant qu’il
s’agit en effet de la strate la plus efficace, suivie des intercommunalités
(27 %) puis des départements (23 %) et des régions (16 %)196.

Concernant ces dernières, nos concitoyens dressent un bilan partagé


de leur redécoupage intervenu en 2015 ; 41 % affichant leur satisfaction
contre 43 % d’insatisfaits197. Par ailleurs, un sondage réalisé en 2017
par OpinionWay met en relief le flou qui – dans l’esprit des Français –
entoure l’étendue des compétences réelles des conseils régionaux.
Ainsi, une part significative des interviewés leur attribue des missions
dans lesquelles ils n’interviennent pas, ou sinon à la marge. Signe de
la méconnaissance de cette institution mue en locomotive territoriale
lors du dernier quinquennat, 73 % d’entre eux estiment par exemple
que les régions prennent part à l’action sociale, à l’aide aux personnes
âgées et aux personnes handicapées (72 %), à la protection de l’enfance
(69 %) ou de la famille (64 %) ; des compétences pourtant dévolues
aux conseils départementaux. En outre, deux ans après le vote de
la loi NOTRe, les Français ne semblent pas percevoir d’évolution
majeure dans le rôle des régions puisqu’ils sont 53 % à affirmer que
leur influence n’a pas évolué et 26 % à estimer qu’elle a même diminué
(contre 19 % considérant qu’elle a progressé)198.

192
 SA. Ce que pensent les Français de la réforme territoriale. Juin 2014.
C
193
Ipsos. Les Français et le service public local. Février 2017.
194
Fondation Jean-Jaurès, La revue civique, Viavoice. L’observatoire de la démocratie. Janvier 2018.
195
EY. Sondage exclusif : les Français mitigés sur l’efficacité des collectivités locales. Juin 2017.
196
Idem
197
BVA. Élections régionales 2015. Les Français et leurs nouvelles régions. Octobre 2015.
198
OpinionWay. Les Français et l’action des Régions. Septembre 2017.

39
Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

Afin d’accroître la performance du bloc territorial, 61 % de nos conci-


toyens considèrent qu’une meilleure articulation avec les services
déconcentrés de l’État (afin d’éviter les doublons notamment) consti-
tue la première des priorités. En revanche, ils sont 43 % à placer en
tête de ce classement la nécessité de mieux clarifier les compétences
des collectivités et 39 % à citer en premier lieu la rationalisation du
millefeuille territorial. Par effet pendulaire, comme le souligne EY,
70 % des Français sondés estiment que « les transferts de compétences se
traduisent par des surcoûts et des hausses d’impôts »199.

À RETENIR

• À l’échelle internationale, en 2016, les collectivités locales représentaient


au total 40 % des dépenses publiques globales, 63 % des dépenses de
personnel, 57 % de l’investissement public, 32 % des recettes fiscales et
21 % de la dette publique.
• Avec 35 357 communes (soit 40 % de l’Union européenne), la France
détient plus de municipalités qu’aux États-Unis.
• 1 8 783 communes françaises comptent moins de 500 habitants.
• La France détient le record d’Europe du ratio de collectivités pour
1 000 habitants (avec 0,58).
• Le nombre d’EPCI est passé de 2 062 à 1 266 sur la période 2016-2017
(soit -39 %).
• 92 % des Français font confiance aux collectivités locales « pour améliorer
leur quotidien ».
• 85 % d’entre eux considèrent qu’il y a trop de doublons entre les services
déconcentrés de l’État et les collectivités.
• Les métropoles ont représenté plus de 70 % des créations nettes d’emplois
privés entre 2007 et 2014.
• Alors que la France compte un mandat électif pour 104 habitants (soit
4,5 fois plus qu’aux États-Unis), l’on en recense seulement un pour 500
en Allemagne et un pour 2 603 au Royaume-Uni.
• Depuis la mise en œuvre de la loi NOTRe, les transferts aux métropoles
n’ont pour l’heure représenté que 160 M € tandis que ceux des dépar-
tements vers les régions dépassent à peine 2 Mds €.
• 75 % des maires jugent de manière négative les changements introduits
par la loi NOTRe.
• Deux ans après la mise en œuvre de la loi NOTRe, 53 % des Français
considèrent que l’influence des régions n’a pas évolué et 26 % estiment
qu’elle a même diminué.

199
EY. Pour 7 Français sur 10, décentralisation rime avec augmentation d’impôts. Avril 2013.

40
Fiscalité locale des entreprises : un échec français

La situation financière des collectivités locales

Un contexte financier global plus positif depuis 2014 mais qui demeure
préoccupant
Selon la Cour des comptes, les collectivités portent, en comptabilité nationale,
9 % de la dette publique200 et représentent 18 % de la dépense publique201,
contre 38 % pour l’État et 44 % pour les administrations de la sécurité sociale202.
Leurs dépenses globales – s’établissant à 225 Mds € en 2017 dont 181,1 Mds €
de fonctionnement203 – constituent 10,1 % du PIB, contre 17 % en moyenne
dans la zone OCDE204. Toujours d’après les magistrats financiers de la rue
Cambon, si tous les indicateurs ne sont pas au vert, force est de constater que
la situation financière des collectivités territoriales s’est nettement améliorée
depuis 2013-2014 et semble poursuivre cette tendance depuis lors, concourant
ainsi au redressement général des finances publiques.

Dit autrement, le meilleur équilibre de leurs dépenses ainsi que de leurs


recettes observé depuis bientôt quatre ans a permis de redresser leur santé
financière globale, détériorée depuis le début des années 2000. La preuve
en est donnée notamment par le déficit des collectivités locales, résorbé de
près de moitié en 2014 et dont le solde est revenu quasi à l’équilibre l’année
suivante (- 0,1 Md €) avant de repasser dans le vert en 2016 (+ 3 Mds €)205.
En 2017, si le solde diminue sous l’effet de la reprise des investissements,
celui-ci reste positif (+ 0,8 Md €), permettant aux collectivités territoriales
de dégager une trésorerie supérieure à 40 Mds €206.

Dans ce sillon, si elles ont certes augmenté de 2,5 % l’an passé207, les
dépenses des APUL avaient reculé de 1,1 % en 2016, tandis que leurs recettes
(230 Mds €) avaient quant à elles légèrement progressé (+ 0,2 %), leur per-
mettant ce faisant de dégager une capacité de financement inédite depuis la
fin des années 1990, de l’ordre de 4,2 Mds € (contre 1,1 Md € en 2015). Dans
ce contexte, leur épargne (41,5 Mds € en 2017) progresse de 2,2 %, et ce après

200
 our rappel, d’après la Cour des comptes, la dette publique totale s’est hissée en 2017 à 2 218 Mds € (soit 96,8%
P
du PIB) contre « seulement » 1 701 Mds € en 2010 (soit 85,3% du PIB). Rappelons également que si en France les
collectivités portent 9% de la dette publique, la moyenne pour les échelons infranationaux s’établit à 21% au sein de
la zone OCDE.
201
Pour rappel, selon la Cour des comptes, les dépenses publiques ont représenté 56,4 points de PIB en 2017 contre
56,6 en 2016 (-0,2). Rappelons aussi que si en France les collectivités représentent 18% des dépenses publiques
totales, la moyenne de la zone OCDE se hisse à 40% (soit plus du double) contre 33% au sein de l’Union européenne.
202
Cour des comptes. Les finances publiques locales. Rapport sur la situation financière et la gestion des collectivités
territoriales et de leurs établissements publics. Octobre 2017.
203
Conseil Économique, Social et Environnemental. Pour une réforme globale de la fiscalité locale. Avril 2018.
204
OCDE. Panorama des régions de l’OCDE. 2013.
205
INSEE. Les comptes des administrations publiques en 2017. N°1698, mai 2018.
206
La Banque postale. Les finances locales. Note de conjoncture, septembre 2017.
207
La part des dépenses des APUL dans le PIB a néanmoins diminué, poursuivant la réduction entamée en 2013-2014
(source : Observatoire des finances et de la gestion publique locales, juillet 2018).

41
Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

une augmentation de 4,4 % en 2016208. Ce meilleur équilibre financier amorcé


en 2013-2014 rompt dès lors avec trois décennies de hausse ininterrompue de
l’endettement ainsi que des dépenses – en progression moyenne de 5 % par an
entre 1983 et 2013 et passant de 8,6 à près de 12 points de PIB –209.

En valeur, les dépenses totales des APUL avaient en effet suivi une courbe
fortement haussière, passant de 56 Mds € en 1983 à 225 Mds € en 2017210.
En définitive, comme nous le détaillerons infra, et s’il ne faut pas occulter
les difficultés persistantes, force est de reconnaître que les collectivités
locales ont aujourd’hui regagné des marges de manœuvre financières leur
permettant de mieux faire face aux transferts de compétences engagés par
la loi NOTRe notamment et d’appréhender plus sereinement les nouvelles
réformes à venir. Néanmoins, dans son dernier rapport sur la situation et
les perspectives des finances publiques, la Cour des comptes a récemment
tempéré ce portrait flatteur : « les APUL ont cessé de contribuer à la réduction
du déficit public en 2017, à rebours du mouvement engagé depuis 2013 »211.

Des dépenses locales plus dynamiques que la décentralisation


La tendance expansive des dépenses des administrations publiques locales s’ex-
plique notamment par les conséquences des actes successifs de décentralisation.
Comme nous l’avons décrit plus haut, depuis trente ans, des compétences signifi-
catives ont en effet été transférées totalement ou partiellement par la loi de l’État
vers les collectivités dans des domaines allant du développement économique à
l’aménagement du territoire en passant par la formation professionnelle, le loge-
ment, les politiques de solidarité, les collèges et lycées ou encore les transports
routiers et ferroviaires. Dans ce contexte, les dépenses des APUL n’ont cessé de
croître pour atteindre 225 Mds € en 2017 (soit 10,1 % du PIB contre 8,6 % en 1983),
représentant ainsi 18 % de l’ensemble des dépenses des administrations publiques
(contre 10,9 % en 2009)212. Néanmoins, en dépit de cette tendance à la hausse,
la France reste – sur le Vieux continent – l’un des pays où la part des dépenses
publiques locales demeure la plus faible rapportée au PIB puisque celle-ci s’avère
deux à trois plus élevée en Allemagne, en Belgique, en Espagne et en Suède213.

Par ailleurs, d’après la Cour des comptes, seule la moitié de l’augmentation des
dépenses locales serait en réalité imputable aux transferts de compétences214 ;

208
La Banque postale. Les finances locales. Note de conjoncture, septembre 2017.
209
 our des comptes. Les finances publiques locales. Rapport sur la situation financière et la gestion des collec-
C
tivités territoriales et de leurs établissements publics. Octobre 2017.
210
Gouvernement. Transferts financiers de l’État aux collectivités territoriales. Annexe au projet de loi de finances
pour 2018.
211
Cour des comptes. La situation et les perspectives des finances publiques. Juin 2018.
212
Conseil Économique, Social et Environnemental. Pour une réforme globale de la fiscalité locale. Avril 2018.
213
Cour des comptes. Les services déconcentrés de l’État. Clarifier leurs missions, adapter leur organisation, leur
faire confiance. Décembre 2017.
214
Cour des comptes. Les finances publiques locales. Rapport sur la situation financière et la gestion des collec-
tivités territoriales et de leurs établissements publics. Octobre 2017.

42
Fiscalité locale des entreprises : un échec français

41 % de cette progression étant in fine intervenue « à champ de compétences


constant, c’est-à-dire hors décentralisation » confirme l’Institut Montaigne215.
En d’autres termes, les dépenses des APUL ont, depuis le début des années
1980, progressé à un rythme annuel moyen bien plus rapide que celui du
PIB (5,1 % contre 4 %) ainsi que des autres administrations publiques216 et
surtout déconnecté de la réalité de la décentralisation, et ce sans que l’État
ne revoie en profondeur ni son périmètre d’intervention ni sa masse salariale.

Au total, comme le met en exergue le rapport parlementaire Quentin-Urvoas,


la progression des dépenses publiques locales et nationales engendre deux
effets possibles : « soit une augmentation de la pression fiscale, soit un alourdisse-
ment de la dette publique, dont la gestion est de plus en plus coûteuse. Dans les deux
cas, la confiance des investisseurs et le dynamisme de notre économie s’en trouvent
diminués »217. Et les députés d’en arriver à la conclusion suivante : « dans un
contexte de concurrence internationale renforcée, l’économie française est donc pénalisée
par rapport aux très nombreux pays qui ne connaissent pas un tel enchevêtrement de
compétences dans leurs échelons d’administration locale »218.

Évolution des dépenses de fonctionnement et de personnel


des collectivités territoriales (2007-2017)

Montant des dépenses (en Mds €)


200
179,1 178,5 181,1
177,1
180 172,9
168
159,1 162,7
156,7
160 150,6
142,6
140

120

100
80
62,4 63,7 64,3 65,6
56,3 58,2 60,1
60 51,2 53,5 54,9
47,6
40

20

0
07

08

09

10

11

12

13

14

15

16

17
20

20
20

20

20

20
20
20
20

20

20

Dépenses de Dépenses
(Source : La Banque postale, Direction des études) fonctionnement de personnel

215
Institut Montaigne. Décentralisation : sortons de la confusion. Repenser l’action publique dans les territoires. Janvier 2016.
216
Gouvernement. Transferts financiers de l’État aux collectivités territoriales. Annexe au projet de loi de finances pour 2018.
217
QUENTIN, Didier, URVOAS, Jean-Jacques. Rapport d’information sur la clarification des compétences des collecti-
vités territoriales. Assemblée nationale, rapport n°1153, octobre 2008.
218
Idem

43
Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

Une envolée des dépenses de fonctionnement et de personnel


La gestion locale est donc ici clairement pointée du doigt. En effet, parallèle-
ment à leur forte progression, les dépenses publiques territoriales ont connu
– depuis les prémices de la décentralisation – une profonde mutation dans
leur composition ; se traduisant entre autres par une forte réduction des
dépenses d’investissement au profit des dépenses de fonctionnement. Ces
dernières sont ainsi passées de 38 % des dépenses totales des collectivités
en 1983 à près de 60 % en 2016, devenant le premier poste de dépenses des
APUL et progressant à un rythme annuel de l’ordre de 3 % depuis 2010
(contre seulement 1,5 % pour les recettes de fonctionnement)219. Un « rythme
insoutenable » pour Didier Migaud220. Dans le même temps, comme nous le
verrons ci-après, les dépenses d’investissement ont reculé de 25 % à 16 %
des dépenses totales sur la même période. En 2017, les dépenses de fonc-
tionnement se sont élevées à 181,1 Mds € (contre 178,5 Mds € en 2016), en
progression de 1,5 % par rapport à l’exercice précédent certes, mais à un
rythme moins élevé que les années passées (+ 2,4 % entre 2010 et 2015)221.

En resserrant la focale, on observe que ce sont les dépenses de personnel qui


ont connu l’évolution la plus dynamique au sein des dépenses de fonctionne-
ment, expliquant plus de la moitié de leur progression. Pour preuve, près de
35 000 agents publics locaux ont été recrutés en moyenne chaque année entre
1990 et 2010 par le bloc territorial222, et ce hors vagues supplémentaires de
décentralisation223. Au total, selon l’INSEE, 440 000 nouveaux agents ont
intégré la fonction publique territoriale (soit une augmentation de 44 %
sur la période 1998-2011), dont moins de 50 000 au titre des transferts de
compétences224. En parallèle, les effectifs de l’État ont progressé de 14 %
entre 1982 et 2003, représentant 310 000 agents publics supplémentaires225,
et la masse salariale de celui-ci a crû de 3,61 Mds € (soit + 4,26 %)226 entre
2017 et 2019227, et ce malgré le gel du point d’indice.

Plus précisément et à titre d’exemple, le nombre de fonctionnaires des


intercommunalités est passé de 120 000 en 1998 à 233 000 en 2008, tandis
que sur la même période le nombre d’agents communaux progressait de 8 %,

219
Sénat. L’évolution des finances locales à l’horizon 2017. Délégation sénatoriale aux collectivités locales et à la
décentralisation, note de synthèse, 12 novembre 2014.
220
Le Figaro. La Cour des comptes épingle les dépenses des collectivités locales. 14 octobre 2013.
221
La Banque postale. Les finances locales. Note de conjoncture, septembre 2017.
222
La fonction publique territoriale compte 1,895 million d’agents en 2016 hors contrats aidés (soit 34,8 % de
l’emploi public).
223
Institut de l’entreprise, Institut Montaigne. Mettre enfin la fiscalité au service de la croissance. Septembre 2013.
224
Notons qu’en parallèle, selon la Cour des comptes, l’État a engagé 400 000 nouveaux fonctionnaires entre
1980 et 2006.
225
PÉBEREAU, Michel. Rompre avec la facilité de la dette publique. Pour des finances publiques au service de
notre croissance économique et de notre cohésion sociale. Rapport remis au ministre des Finances. 2005.
226
Selon le projet de loi de finances pour 2019, la masse salariale de l’État s’établit à 88,3 Mds € hors pensions
(soit 19% du budget général).
227
DI FOLCO, Catherine. Avis sur le projet de loi de finances pour 2019. Tome VI. Fonction publique. Sénat,
22 novembre 2018.

44
Fiscalité locale des entreprises : un échec français

sans nouvelles attributions de compétences de l’État. Entre 2003 et 2015,


cette hausse dépassait même 20 % pour le bloc communal228 et avoisinait
respectivement 15 % et 100 % pour les conseils départementaux (+ 14,7 %) et
régionaux (+ 94,5 %), soit une augmentation globale de 20,3 % de l’ensemble
des effectifs de la fonction publique territoriale en seulement douze ans229. Sur
la période 1982-2006, cet effet haussier s’est élevé à 62,8 %230. L’économiste
Christian Saint-Étienne précisant que seulement « moins d’un tiers de la hausse
des effectifs » des collectivités trouve sa justification dans les nouvelles missions
conférées par l’État aux administrations territoriales231. En des termes plus
feutrés, la Cour des comptes ne dit pas autre chose : « s’il existe un lien général
entre la décentralisation et la montée en puissance de la fonction publique territoriale,
il est en revanche difficile d’établir une corrélation parfaite entre les transferts de
compétences et la progression des effectifs de chaque niveau de collectivité »232.

Sur la période 2008-2016, les dépenses de personnel ont ainsi augmenté de


25 %, passant en huit ans de 64 Mds € à 80 Mds €233. En 2017, poursuivant
cette accélération, les frais de personnel ont crû de 2,8 %, après un tassement
(+ 0,9 %) en 2016234. Une dynamique partagée par toutes les collectivités et
largement supérieure à l’évolution – relativement stable – des effectifs des
fonctions publiques d’État et hospitalière.

Évolution des effectifs de la fonction publique territoriale (2003-2015)

Part dans
Effectifs en Variation
le total de Progression
milliers au Évolution moyenne
la fonction des effectifs
31 décembre 2003 2015 2003- annuelle
publique 2003-2015
hors 2015 2003-
territoriale (en %)
décentralisation 2015
en 2015
Bloc
1 197,4 1 440,7 + 243,3 82,1 % + 20,3 % + 1,55 %
communal
Conseils
185,1 212,4 + 27,3 12,1 % + 14,7 % + 1,15 %
départementaux
Conseils
13,1 25,9 + 12,8 1,5 % + 94,5 % + 5,84 %
régionaux
Autres 78,2 75,2 – 3 4,3 % – 3,84 % – 0,33 %
Total fonction
publique 1 473,8 1 754,2 + 283,4 100 % + 20,3 % + 1,55 %
territoriale

(Source : Direction générale des collectivités locales)

228
Le bloc communal comprend l’ensemble des municipalités et des intercommunalités.
229
 ouvernement. Transferts financiers de l’État aux collectivités territoriales. Annexe au projet de loi de finances pour 2018.
G
230
Cour des comptes. La conduite par l’État de la décentralisation. Rapport public thématique, octobre 2009.
231
Challenges. Il faut réorganiser les collectivités locales. Christian Saint-Étienne, 6 mars 2014.
232
Cour des comptes. La conduite par l’État de la décentralisation. Rapport public thématique, octobre 2009.
233
Gouvernement. Transferts financiers de l’État aux collectivités territoriales. Annexe au projet de loi de finances pour 2018.
234
Observatoire des finances et de la gestion publique locales. Les finances des collectivités locales en 2018. État des
lieux. Juillet 2018.
45
Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

Tour d’horizon des fonctionnaires dans l’OCDE

Représentant 19,9  % de la population active (contre 15,5  % dans


l’OCDE)235, 5,5 millions de personnes travaillent actuellement dans les
trois versants de la fonction publique tricolore : fonction publique d’État236
(2,39 M soit 44 % des agents), fonction publique territoriale237 (1,89 M
soit 35 %) et fonction publique hospitalière238 (1,16 M soit 21 %). Au sein
de ce triptyque figurent également 940 211 contractuels, soit 17,2 % du
total en 2015 (contre seulement 14,3 % en 2005)239. Selon le ministère
de l’Action et des Comptes publics, la France compte dès lors 72 agents
pour 1 000 habitants. Un taux d’administration situé dans la moyenne
haute des pays de l’OCDE240, devant le Royaume- Uni, l’Allemagne, la
Belgique et les États- Unis notamment mais derrière le quatuor des pays
nordiques (Danemark, Finlande, Norvège et Suède)241. Si, à rebours des
idées préconçues, la France n’est pas sur le podium, Véronique Grousset,
journaliste au Figaro, souligne toutefois que « notre retard demeure très subs-
tantiel par rapport à ce que la plupart des nations industrialisées ont accompli :
de la Nouvelle- Zélande au Canada en passant par les pays scandinaves, mais
aussi par l’Autriche et l’Italie, on ne compte plus les gouvernements qui se sont
courageusement attelés à la réforme de leurs fonctions publiques »242. Pour preuve,
l’Allemagne a engagé un plan de rationalisation de grande ampleur sur la
période 1991- 2008 ; les effectifs de la Fédération ayant diminué de 29 %
en vingt ans contre - 39 % pour les communes et - 24 % pour les Länder243.

Par ailleurs, contrairement à une grande partie des pays des zones euro
et OCDE, l’Hexagone a fait le choix du statut ainsi que de la garantie
de l’emploi à vie et, comme le révèle France Stratégie, « a moins recours
à l’externalisation » que ses voisins244. En d’autres termes, l’ « exception
française » en la matière réside dans son très fort taux de fonctionna-
risation des agents publics qui se hisse à 81 % contre seulement 36 %
en Allemagne, 15 % en Italie, 13 % au Danemark, 10 % en Suède et

235
 elon l’OCDE, la part des fonctionnaires dans la population active s’élève à : 10,6  % en Allemagne ; 15,7 %
S
en Australie ; 17,7 % au Canada ; 6,5 % en Corée du Sud ; 13,1 % en Espagne ; 14,4 % aux États-Unis ; 22,8 % en
Finlande ; 16,4 % en Israël ; 13,7 % en Italie ; 6,7 % au Japon ; 30,5 % en Norvège ; 9,7 % en Nouvelle-Zélande ;
18,3 % au Royaume-Uni ; 26 % en Suède et 9,7 % en Suisse.
236
Régie par la loi du 11 janvier 1984.
237
Régie par la loi du 26 janvier 1984.
238
Régie par la loi du 9 janvier 1986.
239
Ministère de l’Action et des Comptes publics. Fonction publique. Chiffres-clés 2017. Rapport annuel. 2017.
240
Idem
241
France Stratégie. Comment la France se compare-t-elle en matière d’emploi public ? Note de synthèse,
décembre 2017.
242
Le Figaro. Fonctionnaires : ce que les autres pays ont fait. 31 août 2012.
243
Fondation iFRAP. Fonction publique : une comparaison franco-allemande. Société civile n°105, septembre 2010.
244
France Stratégie. Comment la France se compare-t-elle en matière d’emploi public ? Note de synthèse,
décembre 2017.

46
Fiscalité locale des entreprises : un échec français

9 % au Royaume- Uni245. Ces pays, ancrés dans un modèle dualiste, ont


dès lors massivement recours aux contrats de droit privé, réservant
le statut de droit public essentiellement aux fonctions régaliennes
(police, justice, diplomatie, défense, etc.). Autrement dit, « la France est,
avec l’Espagne, l’un des seuls pays d’Europe dans lequel les agents employés
par des opérateurs publics pour l’exécution du service public administratif
relèvent presque exclusivement d’un régime de droit public »246. Or, comme
le révèle un sondage réalisé en janvier 2017 par OpinionWay, 57 % des
Français se montrent « favorables à la suppression de l’emploi à vie pour les
fonctionnaires » (dont 26 % de « très favorables »)247.

En Suède et au Canada, par exemple, les agents publics sont à l’instar de la


France recrutés sur concours mais l’emploi à vie n’y est pour autant plus
garanti et les règles qui leur sont applicables sont largement similaires à
celles auxquelles sont assujettis les salariés de droit privé248. L’Italie, quant
à elle, qui avait transposé initialement le modèle hexagonal de fonction
publique, a procédé au cours des années 1990 à un véritable aggiornamento.
Changeant radicalement le régime qui prévalait jusqu’alors en combinant
extinction progressive de la fonction publique de statut et rationalisation
du nombre de ses agents, les réformes de 1993 puis de 1997- 1998 ont
considérablement réduit la part de fonctionnaires bénéficiant du statut à
la française ; la majeure partie des employés publics italiens (85 %) étant
désormais soumis au droit commun du travail249. En outre, en 2002, la
Suisse a décidé par voie référendaire l’abrogation définitive du statut de
fonctionnaire. S’ils conservent certaines particularités, les agents publics
helvétiques sont dorénavant essentiellement soumis à un contrat se rap-
prochant très fortement du droit privé250.

Enfin, en matière de rémunération des agents publics, conséquence


de son administration pléthorique, la France se situe dans le ventre
mou du classement OCDE. Comme le précise l’IREF, qu’ils soient en
bas ou en haut de l’échelle, les fonctionnaires hexagonaux sont ainsi
moins bien rémunérés que leurs homologues allemands, australiens,
américains, canadiens, espagnols, finlandais et sud- coréens251.

245
 e Figaro. Fonctionnaires : ce que les autres pays ont fait. 31 août 2012.
L
246
SILICANI, Jean-Ludovic. Livre blanc sur l’avenir de la fonction publique : faire des services publics et de la
fonction publique des atouts pour la France. Avril 2008.
247
OpinionWay. L’intérêt des Français pour des réformes structurelles. Janvier 2017.
248
SILICANI, Jean-Ludovic. Livre blanc sur l’avenir de la fonction publique : faire des services publics et de la
fonction publique des atouts pour la France. Avril 2008.
249
Institut Montaigne. Pour une fonction publique audacieuse et « Business friendly ». Mars 2014.
250
Fondation iFRAP. La suppression du statut de fonctionnaire en Suisse. 24 juillet 2009.
251
IREF. Fonction publique française : le dernier dinosaure. Juin 2014.

47
Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

Une diminution des concours financiers de l’État ?


À cette hausse des dépenses de fonctionnement se conjuguerait, depuis
plusieurs années, un recul sensible des concours financiers de l’État vers
les collectivités territoriales. Ces derniers – 38,9 Mds € l’an dernier inscrits
en recettes de fonctionnement – ont ainsi diminué de 5,6 % en 2017 par
rapport à 2016 (contre - 8 % l’année précédente)252. Principale composante
de ces transferts avec 62,2 % du montant total en 2017 d’après l’INSEE, la
dotation globale de fonctionnement (DGF)253 – 26,96 Mds € en 2018 contre
36,6 Mds € en 2015 et 40,12 Mds € en 2014 – ne cesse de se contracter
depuis 2013 (plus de 30 % de réduction en cinq ans)254. Selon le projet de loi
de finances pour 2019, la DGF pour le bloc communal et les départements255
devrait néanmoins demeurer stable avec 26,95 Mds €256.

Au total, sur la période 2008-2017, celle-ci a toutefois fondu de plus du quart


de son montant, enregistrant – après un dernier pic en 2013 à 41,5 Mds € –
une courbe fortement négative à partir de 2014 ; la réduction annuelle
s’accélérant dès 2015 pour s’établir autour de 10 % par an257. Notons que le
recul de la DGF a davantage impacté les communes et leurs groupements
(- 7,1 % en 2016), principaux récipiendaires de ce transfert vertical258, que les
régions et les départements259.

Cependant, afin d’éviter les analyses en trompe l’œil, comme l’affirment le


CESE et l’Institut de l’entreprise, force est de reconnaître que la hausse de
la fiscalité locale a plus que compensé la réduction de la DGF260 et qu’in fine
« l’ensemble du financement de l’État est resté quasi stable » (de 100,9 Mds € en
2012 à 100,1 Mds € en 2016) du fait de la croissance de la fiscalité transférée
(de 27,4 Mds € en 2012 à 31,7 Mds € en 2016) et de la mission Relation avec
les collectivités territoriales (de 2,7 Mds € à 3,8 Mds €)261.

252
Fondation iFRAP. La suppression du statut de fonctionnaire en Suisse. 24 juillet 2009.
253
Créée en 1979, la dotation globale de fonctionnement est la plus importante contribution de l’État aux collectivités
territoriales, lesquelles peuvent ensuite l’employer librement.
254
Institut Montaigne. Décentralisation : sortons de la confusion. Repenser l’action publique dans les territoires.
Janvier 2016.
255
Rappelons que, depuis 2018, les conseils régionaux ne perçoivent plus de DGF, remplacée par une fraction
de la TVA.
256
Assemblée nationale. Projet de loi de finances pour 2019. Commission des finances, de l’économie générale
et du contrôle budgétaire, n°1255, 24 septembre 2018.
257
Sénat. L’évolution des finances locales à l’horizon 2017. Délégation sénatoriale aux collectivités locales et à la
décentralisation, note de synthèse, 12 novembre 2014.
258
En 2018, les communes et groupements de communes perçoivent 68% du total (soit 18,3 Mds €) et les dépar-
tements 32% du total (soit 8,6 Mds €). Les régions, en revanche, n’en sont plus récipiendaires.
259
Sénat. L’évolution des finances locales à l’horizon 2017. Délégation sénatoriale aux collectivités locales et à la
décentralisation, note de synthèse, 12 novembre 2014.
260
Conseil Économique, Social et Environnemental. Pour une réforme globale de la fiscalité locale. Avril 2018.
261
Institut de l’entreprise. Dépense publique : l’état d’alerte. Réviser et réduire la dépense publique pour renouer
avec la prospérité. Les notes de l’Institut, février 2017.

48
Fiscalité locale des entreprises : un échec français

Répartition de la baisse de la DGF entre catégories de collectivités (2015-2017)

En Mds E Bloc communal Départements Régions Total


2015 2,071 1,148 0,451 3,67

2016 2,071 1,148 0,451 3,67

2017 1,035 1,148 0,451 2,634

(Source : Direction générale des collectivités locales)

Une dette en croissance depuis trente ans


Aussi, en plus de l’effet de ciseau conjuguant hausse des dépenses locales
et stagnation voire réduction des concours financiers de l’État, les collec-
tivités territoriales souffrent d’un endettement croissant. En effet, malgré
un léger recul entre 1997 et 2002 et si la « règle d’or »262 à laquelle elles
sont soumises leur défend d’emprunter pour financer leurs dépenses de
fonctionnement263, les APUL ont toutefois vu leur encours de dette forte-
ment progresser depuis le 1er acte de décentralisation (+ 150 Mds € en trois
décennies), s’établissant à 182 Mds € en 2017, soit moins de 10 % du stock
total national et du PIB et un niveau d’endettement relativement modéré en
comparaison internationale. En parallèle, leurs recours à l’emprunt s’est fixé
à près de 14 Mds € la même année, soit le niveau le plus bas depuis dix ans
selon Standard & Poor’s264.

Ayant évolué depuis 1983 à un rythme annuel moyen supérieur aux dépenses
d’investissement (+ 4,32 % contre + 3,26 %), la dette des collectivités terri-
toriales équivaut désormais à près de 80 % de leurs recettes (soit six points
de plus qu’en 2002)265. Dans ce contexte, leur capacité de désendettement266
s’est fortement dégradée, passant de 3,2 ans en 2003 à 4,4 ans en 2012 puis
5,2 ans en 2016267.

262
 a « règle d’or » des dépenses locales découle du principe d’équilibre budgétaire et, dans la pratique, signifie que les
L
emprunts des collectivités territoriales ne peuvent financer que des dépenses d’investissement et que les annuités
en capital de la dette doivent être remboursées par des ressources propres (et non par de nouveaux emprunts).
263
Le recours à l’emprunt est autorisé uniquement pour le financement de la section d’investissement.
264
Standard & Poor’s. Collectivités françaises : l’investissement sans l’endettement ? 3 octobre 2018.
265
Gouvernement. Transferts financiers de l’État aux collectivités territoriales. Annexe au projet de loi de finances pour
2018.
266
La capacité de désendettement est un ratio exprimant en nombre d’années la solvabilité financière des collectivités
territoriales. Il rapporte l’encours de la dette à l’épargne brute (ou capacité d’autofinancement).
267
Conseil Économique, Social et Environnemental. Pour une réforme globale de la fiscalité locale. Avril 2018.

49
Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

Évolution de l’encours de la dette de l’ensemble des collectivités locales (1983-2016)

En Mds€
200
Progression de la dette des
180 APUL de +93,5 Mds€
de 2002 à 2016
160

140
120

100
80
60

40

20
0

2012
20 13
2014
2015
16
20 01
2002
20 03
2004
2005
2006
20 07
2008
20 9
200
20 11
19 4
19 5
96
19 7
19 8
20 99
20 0
19 7
19 8
19 9
19 0
19 91
19 2
19 3
19 3
19 4
19 5
86

9
8

9
9

9
8
8

9
8

0
8

9
8

1
0
9
19

19
19

(Source : INSEE)

Des dépenses d’investissement liées au cycle électoral


Avec près de 70 % du stock total en 2016, les collectivités territoriales sont
le premier investisseur public268. Suivant un caractère cyclique épousant le
rythme du calendrier électoral local, les dépenses d’investissement (hors
remboursement de la dette) des APUL n’ont eu de cesse de fluctuer ces der-
nières années, passant de 40,8 Mds € en 2003 à 56,8 Mds € en 2007 avant de
redescendre à 54,1 Mds € en 2014 et 47 Mds € en 2015. Après trois années de
baisse consécutives (- 7,7 % en 2014, - 8,4 % en 2015 et - 3 % en 2016), repré-
sentant une contraction cumulée d’environ 10 Mds € en trois ans, celles- ci
sont reparties à la hausse en 2017, atteignant 48,3 Mds € (soit + 6,1 % par
rapport à l’exercice précédent)269.

Tirée par une meilleure gestion des fonds européens270 ainsi que l’achève-
ment des nouvelles régions et des intercommunalités, cette progression
concerne aussi bien les subventions (+ 4,9 % en 2017 contre - 8,3 % en
2016) que les dépenses d’équipement (+ 5,7 % après + 2,4 % l’an passé)271.
Représentant 61 % de l’investissement local en 2017272, le bloc communal a
enregistré une hausse de 8,2 % (29,6 Mds €), contre + 7,3 % pour les régions.

268
Pour rappel, au sein de la zone OCDE, les collectivités territoriales représentaient en moyenne 57 % de l’inves-
tissement public en 2016.
269
Gouvernement. Transferts financiers de l’État aux collectivités territoriales. Annexe au projet de loi de finances
pour 2018.
270
Rappelons que, depuis 2014, les conseils régionaux ont récupéré des services déconcentrés de l’État la gestion
des fonds européens (FEADER, FEDER, FSE).
271
Gouvernement. Transferts financiers de l’État aux collectivités territoriales. Annexe au projet de loi de finances
pour 2018.
272
Les régions et les départements représentent respectivement 20% et 19% de l’investissement public local en 2017.

50
Fiscalité locale des entreprises : un échec français

Les départements, en revanche, poursuivent leur décélération avec leur hui-


tième année consécutive de contraction de l’investissement (- 5,7 % en 2017).
Note positive : d’après Standard & Poor’s, suite au rebond enregistré en 2017
(+ 6,1 %), l’effort d’investissement des collectivités locales devrait se maintenir
à hauteur de 7 % en 2018 et 2019 ; une croissance dopée pour bonne part par
le bloc communal (+ 8 % en moyenne annuelle)273.

Évolution de l’investissement local (1982-2016)

25%
– 14,5 pts Année électorale Variation en N+1 Variation en N
20% – 8,8 pts

15% – 10,9 pts

10%
– 13,5 pts
5% – 5,4 pts – 3,5 pts

– 0,0 pt – 5,0 pts


0%
1982
1983
1984
1985
1986
1987
1988
1989
1990
1991
1992
1993
1994
1995
1996
1997
1998
1999
2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
2010
2011
2012
2013
2014
2015
2016
–5%
+ 0,2 pt – 3,1 pts
–10% – 4,8 pts
– 1,1 pt
(Source : INSEE)

Zoom sur les collectivités territoriales


Bloc communal

Après une légère baisse en 2016 (- 0,2 %), les dépenses de fonctionnement du


bloc communal sont reparties à la hausse en 2017 (+ 1,4 %) avec 92,4 Mds €.
Représentant un peu plus de la moitié des dépenses de fonctionnement
(50,5 % en 2016), les frais de personnel (+ 3,2 %) ont tiré cette hausse ainsi
que, dans une moindre mesure, les achats et charges externes (+ 1,3 %).
En parallèle, leurs recettes de fonctionnement – provenant pour majeure
partie des impôts locaux et des concours financiers de l’État – ont elles aussi
progressé (+ 1,9 % soit 109,2 Mds €) après une année 2016 atone (- 0,3 %).
Nonobstant, elles s’avèrent plus dynamiques pour les intercommunalités
(+ 5,9 %) que pour les municipalités (+ 0,5 %).

Avec 29,6 Mds € en 2017, les dépenses d’investissement ont quant à elles


progressé de 8,2 %, et ce après trois années de diminution. Cette hausse
concerne aussi bien les municipalités (+ 8,5 %) que les groupements à fisca-
lité propre (+ 7,4 %). En légère hausse, la dette du secteur communal se fixe,
enfin, à 90,16 Mds €274.

273
Standard & Poor’s. Collectivités françaises : l’investissement sans l’endettement ? 3 octobre 2018.
274
 bservatoire des finances et de la gestion publique locales. Les finances des collectivités locales en
O
2018. État des lieux. Juillet 2018.

51
Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

Départements

L’année 2017 a constitué pour les conseils départementaux une année pivot
puisque, conséquence de la loi NOTRe, les compétences qu’ils exerçaient hier
dans les domaines des transports scolaires et non urbains ont été transférées
aux régions. Effets directs, les départements ont affiché pour l’exercice 2017
une diminution de leurs dépenses et de leurs recettes de fonctionnement.
Les premières ont baissé de 0,2 %, se hissant sous la barre des 60 Mds €,
tandis que les recettes de fonctionnement ont quant à elles diminué de 0,1 %
à hauteur de 66 Mds €, bien que dopées par la forte croissance des produits
fiscaux (+ 4,4 %).

D’après la Banque postale, hors transferts de compétences aux régions, les


dépenses de fonctionnement des conseils départementaux auraient crû de
1,7 %, portées principalement par les dépenses en matière d’action sociale
orientées à la hausse (+ 2,1 % en 2017 par rapport à 2016)275. Les dépenses de
personnel, en revanche, demeurent relativement mesurées (+ 1,2 % en 2017).

Côté investissements, aucun signe d’infléchissement depuis huit ans : - 1,1 %


en 2017 pour les dépenses et - 6 % pour les recettes276. La dette des conseils
départementaux poursuit enfin sa décélération amorcée en 2016 (- 2 %)277.

Régions

Sous l’effet de la loi NOTRe et des transferts de compétences afférents en pro-


venance des départements, les volumes d’intervention des conseils régionaux
ont été largement redimensionnés depuis 2017. Outre les transports scolaires
et routiers non urbains278, les régions se sont vues confier un rôle majeur en
termes de développement économique et d’aménagement du territoire. Dans ce
contexte, avec un budget total (hors remboursements de la dette) de 31,4 Mds €
en 2017, elles assurent 13,7 % des dépenses locales (contre seulement 5,4 % en
1986)279 ; une évolution consacrant leur montée en puissance budgétaire.

Néanmoins, sur le plan strictement financier, les régions françaises demeurent


des « nains » territoriaux en comparaison à leurs pairs européens. Avec
4,5 Mds € en 2015, la région Île-de-France se classe ainsi, selon Standard &
Poor’s, seulement au 45ème rang européen en matière budgétaire280. Autre

275
 a Banque postale. Les finances locales. Note de conjoncture, septembre 2017.
L
276
Observatoire des finances et de la gestion publique locales. Les finances des collectivités locales en 2018.
État des lieux. Juillet 2018.
277
Idem
278
Ces dépenses nouvelles « Transports » sont évaluées à 2,2 Mds €. Rappelons, par ailleurs, que les régions
étaient déjà en charge de la gestion des transports régionaux de voyageurs (TER).
279
La Banque postale. Les finances locales. Note de conjoncture, septembre 2017.
280
Standard & Poor’s. Nouvelles régions françaises : un profil de crédit toujours favorable dans un contexte
européen. 22 septembre 2015.

52
Fiscalité locale des entreprises : un échec français

symbole évocateur : une fois additionnés, les budgets annuels des 18 conseils
régionaux tricolores (31,4 Mds € en 2017) pèsent à peine plus lourds que celui
de la communauté flamande (28,4 Mds €) ainsi que de la Catalogne (23,3 Mds €)
ou de la Lombardie (23,1 Mds €). Surtout, ils sont deux fois inférieurs au bud-
get de la seule région Rhénanie-du-Nord-Westphalie (61,4 Mds €)281.

Des budgets régionaux multipliés par 5,6 depuis 1986 mais qui demeurent modestes

600 Développement économique


Base Transports scolaires et non urbains
100 13,7 %
550
en Transferts des personnels TOS des lycées***
1986
500 Aides aux entreprises
pour l’apprentissage
Expérimentation 12,2 %
450 des TER**
Généralisation
400 des TER

350 Élargissement
de la compétence
formation professionnelle
300 et apprentissage 10 %

250
9,8 %
9,2 %
200
Lycées
150
5,4 % : poids des dépenses régionales dans les dépenses locales
100
19 6
19 7
19 8
19 89
19 0
19 91
19 2
93
19 4
19 95
19 6
19 7

20 4
19 8
20 99
20 0
20 01
2002
20 03
2004
2005
20 6
20 7
2008
2009
200
20 11
2012
20 13

2015
2016
17
0
9
8

9
8

9
8

0
9

1
9

1
19

19

* Dépenses hors remboursements de la dette, déflatées du prix du PIB


** Trains express régionaux
*** Personnels, techniciens, ouvriers et de service

(Source : La Banque postale , Direction des études)

Plus précisément, les régions ont vu leurs dépenses de fonctionnement


(21,1 Mds € en 2017) augmenter de 10,2 % par rapport à 2016. En revanche,
comme le précise l’Observatoire des finances et de la gestion publique locales,
en neutralisant lesdits transferts précités, la hausse se hisse seulement à
+ 1,3 %282. Au sein des dépenses de fonctionnement, les frais de personnel –
qui en représentent 17 % – sont également orientés à la hausse (+ 3,5 % par
rapport à 2016) ; résultat entre autres de la revalorisation du point d’indice,
de la hausse des cotisations employeurs et de la mise en place des mesures
« carrières et rémunérations »283. Les recettes de fonctionnement ont elles
aussi progressé en 2017 à hauteur de 10,6 % (26,5 Mds €), tirées notamment

281
Idem
282
Observatoire des finances et de la gestion publique locales. Les finances des collectivités locales en 2018. État des
lieux. Juillet 2018.
283
La Banque postale. Les finances locales. Note de conjoncture, septembre 2017.

53
Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

par le dynamisme des impôts locaux (+ 41,2 %). Une hausse qui a permis d’en-
registrer une forte augmentation de l’épargne brute (5,4 Mds €, soit + 12,1 %).

Aussi, après une nette contraction observée en 2016 (- 6,1 %) interrompant la


croissance entamée en 2011, l’investissement régional a connu un regain en
2017, s’élevant à 9,7 Mds € hors remboursement de dette (soit + 7,3 % en un an)
et constituant dès lors 20 % des dépenses des collectivités284. En 2016, les dé-
penses d’investissement représentent ainsi 32 % des dépenses totales des régions,
contre 23 % pour le bloc communal et 13 % pour les départements285. D’après
un comparatif établi par la Fondation iFRAP sur la période 2016-2017286, ces
dépenses d’investissement fluctuent fortement d’une région à une autre. Les
régions Bretagne (+ 57 % en 2017 par rapport à 2016), Auvergne-Rhône-Alpes
(+ 46 %) et Bourgogne-Franche-Comté (+ 26 %) figurent sur les premières
marches du podium, suivies de près par la région Provence-Alpes-Côte d’Azur à
la quatrième place avec + 23 %. Les régions Hauts-de-France (- 20 %)287, Pays de
la Loire (-11 %) ou encore Nouvelle-Aquitaine (- 10 %) ont, quant à elles, vu leurs
dépenses d’investissement refluer sur l’exercice 2016-2017288.

La dette des conseils régionaux a elle aussi poursuivi une tendance à la


hausse (+ 2,8 %)289, s’établissant à 26,8 Mds € en 2017. Leur taux d’endet-
tement passant ainsi en une année de 105 % à 109 %290, et ce alors que les
recours à l’emprunt épousent sur la même période une tendance à la baisse
(- 2 %). Dans ce contexte, après plus de dix ans de forte détérioration, la
capacité de désendettement des régions s’améliore291.

Derrière le millefeuille territorial, le millefeuille électif français

Sous la carte administrative pléthorique de la France se cache un record


mondial : celui du nombre de mandats électifs. En effet, d’après la Fonda-
tion iFRAP, en additionnant le nombre de parlementaires (577 députés,
348 sénateurs et 74 eurodéputés), de maires (35 357), de conseillers dépar-
tementaux (4 108), régionaux (1 880) et municipaux (521 661) ainsi que
d’élus intercommunaux (80 400), la France compte plus de 645 000 élus ;
soit environ un mandat électif pour 104 habitants.

284
Fondation iFRAP. Régions : les dépenses passées au crible. Société civile, n°194, octobre 2018.
285
 égions de France. Les chiffres clés des Régions. Septembre 2017.
R
286
Fondation iFRAP. Régions : les dépenses passées au crible. Société civile, n°194, octobre 2018.
287
D’après la Fondation iFRAP, la diminution des dépenses d’investissement dans la région Hauts-de-France
s’explique par « un engagement de redressement budgétaire de la collectivité : cette contraction concerne
l’administration générale, l’enseignement supérieur, les lycées et les transports ».
288
Fondation iFRAP. Régions : les dépenses passées au crible. Société civile, n°194, octobre 2018.
289
Il s’agit de la plus faible évolution depuis 2002.
290
Observatoire des finances et de la gestion publique locales. Les finances des collectivités locales en 2018.
État des lieux. Juillet 2018.
291
Idem

54
Fiscalité locale des entreprises : un échec français

Une fois encore, le « pays aux 36 000 communes » fait figure d’exception
en Europe et dans la zone OCDE. Le taux de représentation français est
ainsi 4,5 fois supérieur à celui des États-Unis qui compte un mandat électif
pour 614 habitants (contre un mandat pour 500 habitants en Allemagne et
un mandat pour 2 603 habitants au Royaume-Uni)292. Symbole notoire, un
électeur sur 85 est conseiller municipal dans l’Hexagone. S’il convient de
préciser qu’une grande partie de ces élus est bénévole, la facture totale des
indemnités atteint tout de même environ 2 Mds € par an.

À RETENIR

• Les collectivités locales portent 9 % de la dette publique et représentent


18 % de la dépense publique.
• Leurs dépenses globales – s’établissant à 225 Mds € en 2017 – représentent
10,1 % du PIB (contre 8,6 % en 1983 et 17 % en moyenne dans la zone OCDE).
• Seulement 41 % de l’augmentation des dépenses locales seraient en
réalité imputables aux transferts de compétences.
• Près de 35 000 agents publics ont été recrutés en moyenne chaque
année entre 1990 et 2010 par les collectivités territoriales.
• Les effectifs de l’État ont progressé de 14 % entre 1982 et 2003 (soit
310 000 fonctionnaires supplémentaires).
• Le taux de fonctionnarisation des agents publics français se hisse à
81 % contre seulement 36 % en Allemagne, 15 % en Italie, 10 % en Suède
et 9 % au Royaume-Uni.
• 57 % des Français se montrent « favorables à la suppression de l’emploi
à vie pour les fonctionnaires » (dont 26 % de « très favorables »).
• Avec près de 70 % du stock total, les collectivités territoriales sont le
1er investisseur public.
• En 2017, le bloc communal représentait 61% de l’investissement local
total contre 20% pour les régions et 19% pour les départements.
• En 2016, les dépenses d’investissement représentaient 32 % des
dépenses totales des régions, contre 23 % pour le bloc communal et
13 % pour les départements.
• Si la DGF stricto sensu a fondu de 20 % entre 2012 et 2016, l’ensemble
des concours financiers de l’État sont restés quasi stables sur la période
(passés de 100,9 Mds € en 2012 à 100,1 Mds € en 2016).
• Bien qu’ils aient été multipliés par 5,6 depuis 1986, une fois additionnés,
les budgets annuels des 18 conseils régionaux français (31,4  Mds € en
2017) pèsent à peine plus lourds que celui de la communauté flamande
(28,4 Mds €) ainsi que de la Catalogne (23,3 Mds  €) et sont deux fois inférieurs
au budget de la seule région Rhénanie-du-Nord-Westphalie (61,4 Mds €).

292
Fondation iFRAP. Mandats politiques. Passer de 645 000 à 114 000 élus. Société civile, n°173, novembre 2016.

55
Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

La fiscalité des collectivités locales

La fiscalité locale est naturellement le reflet de notre organisation institu-


tionnelle territoriale. Dans ce contexte, de par son empilement de strates
administratives et l’étendue de leurs compétences, le bloc territorial tricolore
a engendré au fil des décennies un système fiscal extrêmement complexe et
opaque. Une situation kafkaïenne qui résulte surtout de l’absence de spécialisa-
tion des impôts par type de collectivités ainsi que de l’immixtion croissante de
l’État. En d’autres termes, selon Isabelle Chatry, analyste à l’OCDE, « une telle
dispersion du pouvoir fiscal est unique au sein de l’OCDE »293. Dans son rapport
dédié paru en avril 2018, le CESE dresse un constat encore plus tranchant : « le
système de fiscalité locale est aujourd’hui très majoritairement jugé comme obsolète »294.

La fiscalité locale hexagonale repose sur trois taxes dites « ménages » mais
qui ne sont pas sans incidence sur les acteurs économiques (taxe d’habita-
tion, taxe foncière sur les propriétés bâties et taxe sur les propriétés non
bâties) ainsi que sur les impôts exclusivement assujettis aux entreprises
(CVAE, CFE, IFER, TASCOM, etc.). En 2016, l’agrégation de l’ensemble
de ces impôts et taxes – sur lesquels les élus locaux disposent de certaines
marges de manœuvre en termes de taux et d’assiette sans pour autant
avoir totalement les coudées franches – représentait un montant global de
82  Mds €295. Cependant, comme le note l’Institut Thomas More et comme
nous le préciserons infra, « en France les recettes liées à la fiscalité locale sont
relativement faibles en part de PIB et représentent une part limitée de l’ensemble des
impositions et prélèvements obligatoires »296.

Les ressources des collectivités locales


En 2016, les ressources totales des collectivités se sont hissées à 230 Mds €,
représentant ainsi 19 % des ressources de l’ensemble des administrations
publiques et 11,3 % du PIB297 (la moyenne de la zone OCDE se fixant à 17 %
en 2013)298. Sur ce total, les taxes et impôts locaux en constituent plus d’un
tiers et leur poids n’a eu de cesse de progresser depuis cinq ans, passant de
32 % des recettes globales en 2012 à 36 % en 2016. En valeur, ces derniers
sont ainsi passés de 72 Mds € en 2012 à 82 Mds € en 2016299.

293
Acteurs publics. Isabelle Chatry : « Il n’existe ni modèle unique ni recette magique de fiscalité locale au sein
de l’OCDE ». 12 juillet 2018.
294
Conseil Économique, Social et Environnemental. Pour une réforme globale de la fiscalité locale. Avril 2018.
295
Gouvernement. Transferts financiers de l’État aux collectivités territoriales. Annexe au projet de loi de finances
pour 2018.
296
Institut Thomas More. Réforme territoriale. Quelles collectivités ? Quelles compétences ? Quels moyens ? Analyse
comparative des réformes conduites dans 9 pays européens. Note de benchmarking n°17, décembre 2014.
297
Conseil Économique, Social et Environnemental. Pour une réforme globale de la fiscalité locale. Avril 2018.
298
OCDE. Panorama des régions de l’OCDE. 2013.
299
Gouvernement. Transferts financiers de l’État aux collectivités territoriales. Annexe au projet de loi de finances
pour 2018.

56
Fiscalité locale des entreprises : un échec français

Répartition des recettes de fonctionnement des collectivités territoriales (2017)

En Mds€
1,8
Régions
(26,5 Mds€) 7,1 11,2 4,1 2,3
2,2
Départements
(66,0 Mds€) 21,3 25,9 8,3 8,3

Groupements à 1,6
fiscalité propre
11,3 5,3 6,8 5,0
(29,9 Mds€)
2,4
Communes 45,0 6,7 11,7 13,4
(79,2 Mds€)

0% 10 % 20 % 30 % 40 % 50 % 60 % 70 % 80 %

Impôts locaux Autres impôts et taxes DGF Autres concours financiers de l’État Autres

(Source : Direction générale des collectivités locales)

Plus largement, les recettes de la fiscalité directe et indirecte de l’ensemble des


collectivités tricolores s’élevaient en 2017 à 133,8 Mds €, en hausse de 3,8 %
par rapport à 2016 (128,8 Mds €)300. Selon l’Inspection générale des finances
(IGF), elles devraient atteindre 138 Mds € en 2018301, soit une couverture de
plus de 65 % des ressources globales des APUL (contre 52 % en 2016 tandis
que la moyenne de l’OCDE se fixe à 45 %)302. En d’autres termes, bien qu’elle
ne soit pas un pays fédéral et que ses entités infranationales ne jouissent pas
de l’autonomie fiscale, « la France est l’un des pays européens où la part de la
fiscalité dans les ressources des collectivités locales est la plus importante »303.

La fiscalité locale représente dès lors 5,8 % du PIB304 ; un niveau légèrement


inférieur à la moyenne de l’Union européenne (6,4 %) ainsi qu’à celle de la
zone OCDE (7,1 %) mais supérieur à celle des pays dits « unitaires » ou
« moyennement décentralisés » (4,7 %)305. En revanche, en Allemagne et au
Canada, deux États fédérés306, ces taux s’établissent respectivement à 12,3 %
et 16,3 % du PIB307. Dans l’Hexagone, les prélèvements obligatoires locaux
ont crû d’un point de PIB sur la période 2000-2013 (passant de 5 % à 5,8 % de
la richesse nationale)308. Une progression à tous les échelons puisque, de 1993

300
Observatoire des finances et de la gestion publique locales. Les finances des collectivités locales en 2018. État des
lieux. Juillet 2018.
301
Gouvernement. Rapport sur la refonte de la fiscalité locale. Mission « Finances locales », mai 2018.
302
Acteurs publics. Isabelle Chatry : « Il n’existe ni modèle unique ni recette magique de fiscalité locale au sein de
l’OCDE ». 12 juillet 2018.
303
CHARLOT, Sylvie, PATY, Sonia, PIGUET, Virginie. Intercommunalité et fiscalité directe locale. Économie et statistique,
n°415, 2008.
304
Fondation iFRAP. Pour une nouvelle fiscalité locale. Société civile, n°191, juin 2018.
305
Acteurs publics. Isabelle Chatry : « Il n’existe ni modèle unique ni recette magique de fiscalité locale au sein de
l’OCDE ». 12 juillet 2018.
306
La moyenne des États fédérés de la zone OCDE s’élève à 8,8% du PIB en 2016.
307
Acteurs publics. Isabelle Chatry : « Il n’existe ni modèle unique ni recette magique de fiscalité locale au sein de
l’OCDE ». 12 juillet 2018.
308
Institut Montaigne. Dépense publique : le temps de l’action. 15 propositions pour redonner sens et efficacité à la
dépense publique. Mai 2015.

57
Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

à 2008, le produit de la fiscalité locale a augmenté – en euros constants – de


56 % au sein du bloc communal, de 100 % dans les départements et de 268 %
dans les régions309.

Or, comme l’affirme l’Institut Montaigne, « cette hausse tient certes pour partie
au transfert par l’État de nouveaux impôts au titre de la décentralisation ; elle tient
surtout à la hausse de la fiscalité propre des collectivités locales »310. Cependant,
nuançant la responsabilité des exécutifs territoriaux, EY nous rappelle que
«  la fiscalité locale demeure le seul levier financier dont disposent les collectivités
locales pour faire face à la baisse des dotations de l’État et maintenir leur budget »311.
En définitive, alors qu’une partie de la littérature économique considère que
la « décentralisation fiscale » a tendance à engendrer une baisse de la fiscalité
– en raison notamment du jeu électoral et de la plus grande proximité des élus
locaux avec les citoyens –, force est de constater qu’à l’aune du cas français,
cette assertion est loin de se vérifier312.

Les ressources des collectivités locales européennes

En Europe, si les degrés de décentralisation des systèmes politico-


administratifs et, en cascade, les architectures institutionnelles infra-
étatiques varient fortement d’un pays à l’autre selon qu’il soit de nature
fédérale ou de type unitaire, le financement des collectivités territoriales
est lui aussi relativement hétérogène. Ainsi, en Grèce, au Royaume-Uni
et aux Pays-Bas, près de 70 % des recettes des collectivités sont issus de
subventions et dotations versées directement par l’État aux différents
échelons locaux. Au Danemark, ce taux atteint 60% ; les régions danoises
– non autorisées constitutionnellement à lever l’impôt – ne disposant par
exemple d’aucune recette fiscale propre313.

A contrario, comme le souligne l’OCDE, la fiscalité représentait en 2012


plus de 60 % des ressources des collectivités locales en Allemagne,
en Espagne, en Islande ainsi qu’en Suède, et respectivement 54 % et
45 % en Autriche et en Italie314 (contre 67 % en France en 2016315).

309
Idem
310
Ibid.
311
EY. Observatoire des politiques budgétaires et fiscales. Points clés et perspectives. Janvier 2018.
312
FMI. Fiscal decentralization and fiscal policy performance. IMF working paper 17/64, Département des finances
publiques, mars 2017.
313
LAMBERT, Alain, MALVY, Martin. Pour un redressement des finances publiques fondé sur la confiance mutuelle et
l’engagement de chacun. Rapport remis au président de la République, avril 2014.
314
OCDE. Panorama des régions de l’OCDE. 2013.
315
Gouvernement. Rapport sur la refonte de la fiscalité locale. Mission « Finances locales », mai 2018.

58
Fiscalité locale des entreprises : un échec français

Néanmoins, au sein de cet échantillon, force est de constater que certains


États ont fait le choix d’octroyer aux collectivités un pouvoir marginal
voire nul en matière d’autonomie fiscale. C’est le cas notamment de
l’Allemagne où l’assiette et le taux des taxes des 16 Länder comme
des 11 220 municipalités sont fixés uniquement par le pouvoir fédéral.
En Autriche et en Italie, si les collectivités sont également habilitées à
lever leurs propres impôts, le taux et l’assiette sont en revanche définis
au niveau central, et ce dans le respect de certains plafonds imposés par
le législateur. À l’inverse, en Espagne, les communes disposent d’un
pouvoir discrétionnaire sur près des deux tiers de leurs ressources (contre
40 % pour les communautés autonomes et 15 % pour les provinces)316.
En Nouvelle-Zélande enfin, les collectivités sont totalement maîtresses
des bases et des taux de leur fiscalité317. Autrement dit, un système
politique fédéral ainsi qu’un niveau conséquent de recettes fiscales
locales ne sont pas nécessairement synonymes d’une plus grande
autonomie fiscale.

Notons par ailleurs qu’en Allemagne et en Espagne, près de la moitié


du produit de la fiscalité locale provient de l’impôt sur le revenu, et ce
alors que celui-ci ne joue aucun rôle dans la fiscalité locale tricolore.
Ce taux se hisse de surcroît à 64 % en Suisse et 85 % en Finlande318.
La France, en revanche, est le seul État européen où coexistent quatre
taxes avec assiette foncière (CFE, TFPNB, TFPB, TH), dont trois
sont supportées par les entreprises319.

316
 AMBERT, Alain, MALVY, Martin. Pour un redressement des finances publiques fondé sur la confiance mutuelle et
L
l’engagement de chacun. Rapport remis au président de la République, avril 2014.
317
Acteurs publics. Isabelle Chatry : « Il n’existe ni modèle unique ni recette magique de fiscalité locale au sein de
l’OCDE ». 12 juillet 2018.
318
Conseil Économique, Social et Environnemental. Pour une réforme globale de la fiscalité locale. Avril 2018.
319
UIMM. Les impôts sur la production et les produits : une approche économique. Mai 2018.

59
Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

Ressources des collectivités territoriales en 2016

En Mds €
250
131,6 Mds € de recettes fiscales,
197,0 soit 67 % de leurs ressources
200

150

100
54,8 50,3
50 41,2
26,5

0
Recettes de dont dont dont dont autres
fonctionnement concours fiscalité fiscalité impôts et
des collectivités de l’État locale des économique taxes (DMTO,
territoriales « ménages » locale TEOM, taxes
communales)
(Source : Direction générale des collectivités locales)

Autonomie financière vs. autonomie fiscale : un débat plus que jamais


d’actualité
Introduite dans la Constitution lors de la réforme du 28 mars 2003320, la
notion d’autonomie financière des collectivités territoriales se distingue du
principe d’autonomie fiscale. En effet, si la première renvoie à la libre admi-
nistration des APUL et, de jure, à leur autonomie en matière d’affectation de la
fiscalité perçue321, le second implique un pouvoir de création ou de suppression
de taxes ainsi que de modulation d’assiette ou de taux. Contrairement à la
première notion, ce principe – qui regroupe l’ensemble des ressources fiscales
sur lesquelles les élus locaux disposent d’une marge de manœuvre – n’a dès
lors, comme le déplore GénérationLibre, aucune existence juridique propre322
et se heurte à la prise en charge croissante par l’État de la fiscalité locale323.

Le think tank, qui milite pour une plus grande autonomie fiscale des collec-
tivités, chiffre à seulement 107 Mds € en 2016 (sur un total de 230 Mds €) les
recettes sur lesquelles les administrations locales jouissent d’une véritable

320

Article 72-2 de la Constitution : « Les collectivités territoriales bénéficient de ressources dont elles peuvent dispo-
ser librement dans les conditions fixées par la loi. Elles peuvent recevoir tout ou partie du produit des impositions
de toutes natures. La loi peut les autoriser à en fixer l’assiette et le taux dans les limites qu’elle détermine. Les
recettes fiscales et les autres ressources propres des collectivités territoriales représentent, pour chaque catégorie
de collectivités, une part déterminante de l’ensemble de leurs ressources. La loi organique fixe les conditions dans
lesquelles cette règle est mise en œuvre. Tout transfert de compétences entre l’Etat et les collectivités territoriales
s’accompagne de l’attribution de ressources équivalentes à celles qui étaient consacrées à leur exercice. Toute
création ou extension de compétences ayant pour conséquence d’augmenter les dépenses des collectivités ter-
ritoriales est accompagnée de ressources déterminées par la loi. La loi prévoit des dispositifs de péréquation
destinés à favoriser l’égalité entre les collectivités territoriales ».
321
L’Institut Montaigne en propose la définition suivante : « l’autonomie financière consiste, pour les collectivités,
à disposer d’une proportion, fixée par la loi, de ressources propres au sein de leurs ressources totales ». Michel
Bouvier, professeur émérite à l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne et spécialiste des finances publiques,
résume quant à lui l’autonomie financière en ces termes : « l’autonomie financière se définit comme une
autonomie de gestion assortie d’une autonomie fiscale limitée ».
322
GénérationLibre. Oser le « pacte girondin ». Pour une autonomie fiscale des collectivités territoriales. Novembre 2017.
323
OCDE. Faire face aux défis de la décentralisation en France. Stéphanie Jamet, Document de travail du Département
des Affaires économiques n°571, 2007.

60
Fiscalité locale des entreprises : un échec français

liberté de taux et d’assiette, sans pour autant pouvoir créer de nouvelles taxes
ni en supprimer. Néanmoins, sur cette fraction de ressources dites « libres », les
collectivités demeurent corsetées par un encadrement strict – via des plafonds
notamment324 – de l’État. Comme le révèle le CESE, ce corset est plus ou moins
fort selon les échelons. Ainsi, le bloc communal apparaît comme la collectivité
disposant de la plus grande latitude fiscale car « la moitié de ses ressources totales
vient des impôts locaux, sur lesquels il dispose d’un certain pouvoir »325. En revanche,
les régions et les départements jouissent de peu de marges de manœuvre.

En vertu de l’article 34 de notre Constitution, la création, la modification


ou la suppression d’un impôt restent autrement dit la prérogative du Parle-
ment. Tributaires de la « main invisible » de Paris puisque des pans entiers
de la fiscalité leur échappent, les collectivités et leurs élus apparaissent ainsi
cantonnés à un rôle de « second ordre » ; engendrant cahin-caha une forme
de « dépolitisation »326. La décentralisation à la française demeure dès lors
marquée par un rôle central de l’État. Ainsi, comme l’affirme la mission
flash de l’Assemblée nationale sur la réforme des institutions, lorsque les
collectivités « ont la faculté de fixer le taux ou l’assiette d’un impôt, ce n’est que
parce que le législateur a bien voulu la leur déléguer explicitement, mais pas parce
qu’elles disposeraient d’une autonomie fiscale »327. En définitive, les vagues
successives de transferts descendants de compétences – consacrant toujours
plus l’autonomie de gestion des administrations infra-étatiques – ne se sont
pas accompagnées d’une véritable autonomie fiscale. En effet, si la loi du 10
janvier 1980 portant sur l’aménagement de la fiscalité directe locale a posé
les premiers jalons en la matière, les grandes lois Defferre de décentrali-
sation ont reculé en ne dotant pas les collectivités d’une pleine autonomie
fiscale, constituant pour certains « l’acte manqué de la plus grande réforme
décentralisatrice de la Vème République »328.

En d’autres termes, comme l’affirme Michel Bouvier, professeur émérite à


l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne et spécialiste des finances publiques, « le
pouvoir fiscal local n’est pas un pouvoir normatif »329. Sans remettre en question le
principe de libre administration des APUL, cette dissociation entre autonomie
de gestion et autonomie fiscale, gravée dans le marbre de notre Constitution,
apparaît néanmoins désuète dans le contexte actuel où se conjuguent affirmation

324
 ’est le cas par exemple du taux des droits de mutation à titre onéreux (DMTO) plafonné à 4,8% pour les
C
conseils départementaux.
325
Conseil Économique, Social et Environnemental. Pour une réforme globale de la fiscalité locale. Avril 2018.
326
NAVARRE, Françoise. Les métropoles, aux prises avec leurs réalités fiscales ? Géographie, économie, société,
volume 19, 2017/4.
327
Assemblée nationale. Mission « flash » sur l’autonomie financière des collectivités territoriales. Délégation aux
collectivités territoriales et à la décentralisation, rapport n°912, 9 mai 2018.
328
DA ROCHA CAPELA, Anthony. De la taxe professionnelle à la contribution économique territoriale : étape de la
refonte des finances locales. Sciences Po Toulouse, 2011.
329
Conseil constitutionnel. Le Conseil constitutionnel et l’autonomie fiscale des collectivités territoriales : du quiproquo
à la clarification. Nouveaux cahiers du Conseil constitutionnel, n°33, octobre 2011.

61
Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

du bloc territorial et retrait progressif de l’État. Dit autrement, comment


mettre en place une décentralisation de plus en plus poussée sans concéder en
contrepartie l’autonomie fiscale aux administrations locales ?

Cependant, nuançant ce diagnostic, le Conseil des prélèvements obligatoires


considère – à l’appui d’un comparatif réalisé par l’OCDE – que les collectivités
tricolores disposent en réalité « d’un pouvoir fiscal important »330. Certes loin
derrière les États-Unis, la France se situe en revanche à un niveau comparable
à l’Espagne et à la Belgique et se classe surtout devant l’Allemagne, l’Italie et
le Royaume-Uni. En effet, dans ces États fédérés, la législation fiscale demeure
l’apanage quasi-exclusif du législateur et l’autonomie fiscale des collectivités
y est très réduite. La France, pays de tradition unitaire, s’inscrit naturellement
dans ce même contexte mais les marges de manœuvre fiscales des APUL y
sont tout de même, selon le Conseil des prélèvements obligatoires, bien plus
élevées331. De surcroît, les collectivités hexagonales jouissent d’une plus
grande marge de manœuvre que leurs consœurs allemandes ou italiennes
s’agissant de la fiscalité locale pesant sur les entreprises, et ce bien que l’auto-
nomie fiscale de nos administrations infranationales ait été fortement limitée
par la réforme de la taxe professionnelle332.

Comme l’affirme avec justesse Nicolas Marques, chercheur associé à l’Institut


économique Molinari, « en dépit du mouvement de décentralisation, les liens
entre l’État et les collectivités n’ont jamais été coupés en France »333. Malgré
tout, le débat sur l’autonomie fiscale des collectivités demeure d’actualité.
En témoignent notamment la mise en place de la « Mission flash » sur l’auto-
nomie financière des collectivités territoriales par l’Assemblée nationale en
mai 2018 – laquelle préconise entre autres de consacrer dans la Constitution
l’autonomie fiscale des collectivités334 – ainsi que la proposition de résolution
présentée par le député de la Marne Charles de Courson le 7 juin 2018 visant
à promouvoir l’autonomie fiscale des collectivités territoriales ; proposition
finalement rejetée par la majorité au prétexte qu’elle « pourrait conduire à
une concurrence dommageable entre collectivités et, donc, à un accroissement des
inégalités »335 selon Christophe Castaner, alors secrétaire d’État chargé des
relations avec le Parlement.

330
Conseil des prélèvements obligatoires. Fiscalité locale et entreprises. La cohérence de la fiscalité locale des
entreprises au sein de la fiscalité globale des entreprises. Février 2014.
331
Idem
332
Ibid.
333
MARQUES, Nicolas. Pour une fiscalité locale indépendante et lisible. Institut économique Molinari, 17 octobre
2018.
334
Assemblée nationale. Mission « flash » sur l’autonomie financière des collectivités territoriales. Délégation aux
collectivités territoriales et à la décentralisation, 9 mai 2018.
335
Caisse des Dépôts et Consignations. La majorité s’oppose à une plus grande autonomie fiscale des collectivités.
21 juin 2018.

62
Fiscalité locale des entreprises : un échec français

Évolution du ratio d’autonomie financière des collectivités locales (2003-2015)

Ratio constaté Bloc communal Départements Régions


2003 60,8 % 58,6 % 41,7 %

2007 62,0 % 66,0 % 53,2 %

2011 64,9 % 67,4 % 54,3 %

2015 68,6 % 70,9 % 62,5 %

2016 70,0 % 72,9 % 64,3 %

(Source : Délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation de l’Assemblée nationale)

À RETENIR

•E  n 2016, les ressources totales des collectivités locales se sont hissées


à 230 Mds €, représentant 19 % des ressources de l’ensemble des
administrations publiques françaises et 11,3 % du PIB (contre 17 % en
moyenne dans la zone OCDE).
• Les recettes de la fiscalité directe et indirecte de l’ensemble des collec-
tivités locales se sont établies à 133,8 Mds € en 2017, en hausse de 3,8 %
par rapport à 2016 (128,8 Mds €).
• La fiscalité locale représente en France 5,8 % du PIB ; un niveau légè-
rement inférieur à la moyenne de l’Union européenne (6,4 %) ainsi qu’à
celle de la zone OCDE (7,1 %).
• De 1993 à 2008, le produit de la fiscalité locale a augmenté de 56 % au
sein du bloc communal, de 100 % dans les départements et de 268 %
dans les régions.
• En 2016, les recettes fiscales représentaient 67 % des ressources totales
des collectivités territoriales.
• Le ratio d’autonomie financière des régions est passé de 41,7 % en
2003 à 64,3 % en 2016.

63
Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

II
La fiscalité locale des entreprises

Une fiscalité complexe et opaque


Complexe et composite, assise sur différentes bases et atomisée en une my-
riade de taxes auxquelles s’ajoutent de nombreuses exceptions, la fiscalité
économique locale est, de par son morcellement et son opacité intrinsèques,
difficile à appréhender. Son impact sur les entreprises est dès lors très mal
connu et difficile à évaluer. Fondée à l’origine sur des assiettes facilement
localisables, elle s’est – au fil des étapes successives de décentralisation –
largement complexifiée, ajoutant un millefeuille fiscal au millefeuille
territorial. Au surplus, comme le souligne Françoise Navarre, sa cohérence,
son efficacité et son équité ne sont guère avérées, bien au contraire336. Didier
Migaud porte un regard tout aussi sévère, considérant que la fiscalité locale
qui pèse sur les entreprises présente « le défaut de ne plus être adaptée à la
situation économique et sociale contemporaine »337.

Englobant l’ensemble des impositions directes338 ou indirectes339 pesant


sur les entreprises au titre d’une implantation locale et conjuguant impôts
fonciers, impositions assises sur le travail et sur la production ou encore
taxes d’urbanisme, la fiscalité économique locale est une mosaïque opaque
comprenant notamment :

• La contribution économique territoriale (CET) : remplaçant la taxe


professionnelle, la CET est composée de la cotisation sur la valeur ajoutée
des entreprises (CVAE) et de la cotisation foncière des entreprises (CFE).
La première est un impôt assis sur la valeur ajoutée des entreprises (dont le
chiffre d’affaires excède 500 000 € hors taxe) partagé entre les régions (50 %),

336
NAVARRE, Françoise. Les métropoles, aux prises avec leurs réalités fiscales ? Géographie, économie, société,
volume 19, 2017/4.
337
L’Express. La fiscalité locale sous le feu des critiques. 6 mai 2010.
338
La fiscalité directe locale comprend quatre taxes principales : la taxe d’habitation (TH) en voie de suppression
partielle ou totale, la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB), la taxe foncière sur les propriétés non
bâties (TFPNB), la contribution économique territoriale (CET), elle-même composée de la CVAE et de la CFE)
et des taxes annexes ou assimilées (imposition forfaitaire des entreprises de réseau (IFER), taxe spéciale sur
les surfaces commerciales (TASCOM), taxe d’enlèvement des ordures ménagères (TEOM), taxes de balayage,
redevance des mines et redevances sur les pylônes électriques, etc.) ainsi que le versement transport. Ces
taxes sont perçues au profit des collectivités territoriales et de divers établissements publics.
339
La fiscalité indirecte locale représente une part non négligeable des ressources fiscales des APUL. Cette part
est variable selon les catégories de collectivités territoriales bénéficiant de cette fiscalité. Très hétérogène,
cette fiscalité peut toucher aussi bien la consommation d’un bien (ex : électricité) ou d’un service (ex : abat-
toirs), l’acquisition d’un bien immeuble (droits de mutation) et ses aménagements fonciers (taxe d’aménage-
ments), l’occupation/l’exploitation du domaine privé (taxe de séjour) ou public, certaines activités (divertisse-
ments, loisirs, publicités, etc.) en compensation de certaines nuisances subies mais choisies par la collectivité
compte tenu des rentrées financières qu’elle apporte. La fiscalité indirecte est souvent considérée comme
étant une fiscalité d’empilement. À une taxe principale, une collectivité de niveau supérieur peut décider de
lever une taxe additionnelle. La fiscalité indirecte locale se compose notamment de : TSCA, DTOM, TCFE, etc.

64
Fiscalité locale des entreprises : un échec français

le bloc communal (26,5 %) et les départements (23,5 %). La seconde est assise


sur la valeur locative des biens passibles d’une taxe foncière et est collectée
au seul profit du bloc communal (voir encadré infra).
• L’imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux (IFER) : créée
en 2010 suite à la suppression de la taxe professionnelle, l’IFER vise
uniquement les entreprises dont l’activité est exercée dans les secteurs
de l’énergie, des transports ferroviaires et des télécommunications. En
fonction de leurs composantes (éoliennes, hydroéoliennes, transformateurs
électriques, etc.), le produit des recettes de l’IFER est attribué au bloc
communal ainsi qu’aux conseils départementaux et régionaux.
• La taxe spéciale sur les surfaces commerciales (TASCOM) : héritière
de la taxe d’aide au commerce et à l’artisanat, la TASCOM est un impôt
dû par les établissements commerciaux permanents, quels que soient les
produits vendus dont le chiffre d’affaires dépasse 460 000 € et dont la sur-
face de vente excède 400 m². Depuis 2011, le produit de la TASCOM est
uniquement destiné au bloc communal.
• La taxe d’enlèvement des ordures ménagères (TEOM) : taxe locale
instaurée en 1926, assise sur les valeurs locatives et payée par tout type
de propriétaires (particuliers et entreprises), elle est destinée à financer la
collecte des déchets ménagers. Son produit est affecté au bloc communal
uniquement.
• La taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) : impôt direct dû
par les propriétaires ou usufruitiers de propriétés bâties et perçu par les
conseils départementaux (53 %) ainsi que par le bloc communal (47 %).
• La taxe foncière sur les propriétés non bâties (TFNB) : impôt qui pré-
sente les mêmes caractéristiques que la TFPB mais qui ne bénéficie, depuis
2011, qu’au bloc communal.
• Le versement transport (VT) : contribution locale des entreprises (à partir
de 11 salariés) permettant de concourir au financement des dépenses d’inves-
tissement et de fonctionnement des transports publics urbains. Recouvré par
l’URSSAF au titre des cotisations sociales, le VT est reversé aux autorités
organisatrices de transports (communes, départements, régions, etc.).

65
Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

Répartition de la fiscalité directe locale des entreprises selon la nature des taxes (2017)

IFER
3%
1,5 Md €
TFPB (estim.)
VT 22 %
17 % 10,7 Mds €
8,6 Mds €

TASCOM
2%
0,9 Md € TEOM (estim.)
4%
2,2 Mds €
CVAE
36 %
17,6 Mds € CFE
16 %
7,7 Mds €

Total : 49,3 Mds € en 2017


(Sources : Observatoire des finances et de la gestion publique locales, MODAAL Conseil)

S’y ajoute un foisonnement d’autres taxes dont le poids ainsi que le rende-
ment sont souvent beaucoup plus marginaux :

• La taxe locale sur les enseignes et publicités extérieures (TLPE) :


impôt instauré de façon facultative par le bloc communal et dû par l’exploi-
tant du dispositif publicitaire, le propriétaire ou celui dans l’intérêt duquel
le dispositif est réalisé. Son montant varie selon les caractéristiques des
supports publicitaires et la taille de la collectivité.
• La taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques
(TICPE) : remplaçant la TIPP créée en 1928, la TICPE est un impôt pré-
levé sur les produits pétroliers et d’autres produits énergétiques transféré
ensuite aux départements (54 %) et aux régions (45 %).
• Les taxes pour frais de chambres consulaires : perçues pour permettre
le financement des chambres consulaires (CCI, CMA, etc.), ces taxes sont
constituées de deux taxes additionnelles à la CFE et la CVAE.
• La taxe d’aménagement : instituée depuis le 1er mars 2012, la taxe
d’aménagement s’applique lors de la délivrance de permis de construire et
permet principalement le financement des équipements publics (réseaux,
voiries) communaux et intercommunaux.
• Les droits de mutation à titre onéreux (DMTO) : comprenant les droits
d’enregistrement et la taxe de publicité foncière, les droits de mutation sont
dus à l’occasion d’une « mutation », c’est-à-dire lorsqu’un bien change de
propriétaire. Ils sont attribués pour plus des trois quarts aux départements
et moins du quart aux municipalités.

66
Fiscalité locale des entreprises : un échec français

Ce faisant, compte tenu de la grande diversité des assiettes d’imposition


(valeur locative, valeur ajoutée, masse salariale, etc.), les entreprises
– comme les collectivités – souffrent d’une absence de visibilité sur l’impact
réel de la fiscalité économique locale.

La France championne de la pression fiscale et de la dépense publique…


mais pas de la qualité de vie

Difficile de prétendre réformer le système de fiscalité locale hexagonal


sans le replacer dans son contexte global et ses enjeux macroécono-
miques. Ainsi, déjà habituée du podium, la France détient depuis trois
ans la médaille d’or européenne en matière de poids de la fiscalité,
ayant ravi la première place au Danemark qui la talonne néanmoins
toujours de près aux côtés de la Belgique. En effet, d’après Eurostat,
en 2017, le pourcentage d’impôts et de cotisations sociales supportés
par les ménages et les entreprises atteignait dans l’Hexagone 48,4 % du
PIB (tandis qu’il se hissait à 47,6 % en 2016, contre 47,3 % en Belgique,
46,5 % au Danemark, 44,9 % en Suède, 43,4% en Finlande, 42,4 % en
Italie, 41,8 % en Grèce ou encore 23,5 % en Irlande, dernière du clas-
sement)340. Au sein de l’Union des 28, la moyenne se hissait à 40,2 %
selon l’agence européenne (contre 39,9 % en 2016)341 et s’établissait à
41,4% dans la zone euro, soit sept points de moins qu’en France342. En
regardant de plus près, ce « bon » classement tricolore s’explique en
partie par le poids des cotisations sociales qui s’élèvent à 18,8 % du PIB
en 2016. En plus d’être championne européenne, la France détient éga-
lement la meilleure d’or de la zone OCDE. En effet, parmi les 36 États
membres de l’organisation internationale, l’Hexagone se classe en tête
en termes de prélèvements obligatoires en 2017, douze points au-dessus
de la moyenne du club des pays les plus industrialisés343. Notons que,
d’après la Cour des comptes, en valeur absolue, les prélèvements obliga-
toires se sont hissés à hauteur de 1 033,9 Mds € en 2017344.

De surcroît, l’écart entre les taux des prélèvements obligatoires fran-


çais et européens s’est largement creusé de 2008 à 2015, passant de
4,4 à 6,7 points de PIB. Une progression qui s’enracine dans la forte

340
Eurostat. La fiscalité en 2017. Le ratio recettes fiscales/PIB dans l’UE atteint 40,2 %. 28 novembre 2018.
341
 urostat. La fiscalité en 2016. Le ratio recettes fiscales/PIB en légère hausse tant dans l’UE que dans la zone euro.
E
7 décembre 2017.
342
Idem
343
OCDE. Statistiques des recettes publiques. 1965-2017. 2018.
344
Cour des comptes. La situation et les perspectives des finances publiques. Juin 2018.

67
Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

dynamique fiscale tricolore enregistrée ces dernières années ; les taux


de prélèvements obligatoires ayant bondi au début des années 2010
– sous l’effet de la crise économique notamment – après avoir oscillé
entre 42 % et 43 % la décennie précédente345. Autrement dit, comme le
souligne le think tank Coe-Rexecode, « la ‘surcharge’ globale de prélève-
ments obligatoires en France est de 14 % par rapport à la moyenne de la zone
euro (soit environ 125 Mds €), et de 18 % par rapport à l’Allemagne (soit
156  Mds €) »346. Une pression fiscale qui, selon EY, n’est pas sans nuire
à l’attractivité de l’économie française ; les investisseurs étrangers
plaçant la fiscalité en tête des handicaps de notre compétitivité (43 %),
devant la simplification administrative (41 %) ou le niveau du coût du
travail (38 %)347. Un frein à la compétitivité de nos entreprises que les
rapports Attali348 en 2008 et Gallois349 en 2012 avaient, entre autres,
vigoureusement pointé du doigt.

Concernant la ventilation de la fiscalité, les prélèvements obligatoires


bénéficiant aux administrations de la sécurité sociale représentent
d’après l’INSEE 54,3 % du montant global (soit 24,2 % du PIB), contre
30,1 % pour l’État (soit 13,7 % du PIB) et « seulement » 13,5 % pour
les collectivités territoriales (soit 6,2 % de la richesse nationale)350.
Au final, près de 85 % des prélèvements obligatoires sont destinés au
financement des administrations de l’État et de la sécurité sociale.

Par ailleurs, lien de cause à effet, détrônant la Finlande, la France est


devenue en 2016 championne d’Europe de la dépense publique. Avec
56,4 % du PIB en 2017351, le montant des dépenses publiques hexago-
nales est supérieur de plus de quinze points à la moyenne de l’OCDE
fixée à 41 % et de douze points par rapport à l’Allemagne (44 %)352,
tiré pour grande partie par les dépenses sociales qui en représentent,
selon le FMI, 46,5 % du total (contre 26 % pour l’État et 20,5 %
pour les collectivités locales)353. Comme le met en exergue l’Institut

345
Coe-Rexecode. Les écarts de prélèvements obligatoires entre la France et la zone euro. Document de travail
n°64, septembre 2017.
346
Idem
347
EY. Baromètre de l’attractivité. Retour gagnant ? 2018.
348
ATTALI, Jacques. Rapport de la Commission pour la libération de la croissance française. Remis au président
de la République. Janvier 2008.
349
GALLOIS, Louis. Pacte pour la compétitivité de l’industrie française. Rapport remis au Premier ministre. 5 novembre
2012.
350
INSEE. L’économie française. Édition 2017.
351
France Stratégie. Baisser le poids des dépenses publiques : les leçons de l’expérience des pays européens.
La note d’analyse, n°67, mai 2018.
352
OCDE. Panorama des administrations publiques. 2017.
353
FMI. From containment to rationalization: increasing public expenditure efficiency in France. IMF working paper,
2016.

68
Fiscalité locale des entreprises : un échec français

Montaigne, sur la longue durée, dictée par les contraintes du modèle


social français, la part des dépenses publiques dans le PIB n’a cessé
de progresser, passant de 35 % de la richesse nationale au début des
années 1960 à 51,7 % en 2001 pour frôler aujourd’hui 57 %354 ; de quoi
accréditer la déclaration du ministre de l’Économie Bruno Le Maire
prononcée en juin 2017 (« la France est droguée à la dépense publique »355).
Or, en dépit de leur niveau très élevé, les prélèvements obligatoires ne
suffisent pas à couvrir ces dépenses, in fine largement financées par
l’endettement public ; la dette hexagonale s’établissant à 2 299,8 Mds €
au deuxième trimestre 2018 (soit 99 % du PIB). Rappelons au passage
que, depuis 1974, la France n’a plus connu d’excédent public. Dans
ce contexte, l’OFCE nous fait remarquer que les charges d’intérêts
payées sur la dette publique constituent l’un des postes importants de
progression de la dette publique356. De plus, France Stratégie révèle
que « de nombreux rapports et études mettent en évidence que malgré des
dépenses publiques plus importantes que chez nos voisins, notre pays n’obtient
pas de meilleurs résultats pour beaucoup de politiques publiques, voire en
obtient de moins bons »357.

Autrement dit, parcellaire et restrictive, la simple lecture statistique de


la pression fiscale et du poids de la dépense publique ne saurait suffire
et doit être mise en miroir avec la qualité de vie des contribuables.
Aussi, parce que la littérature économique ne donne pas d’indications
claires sur les « bons » niveaux de la fiscalité et des dépenses publiques,
et parce que la seule approche du PIB par habitant ne l’explique pas
complètement, l’OCDE a développé en 2011 le « Better Life Index »,
un outil permettant de mesurer au sein de ses États membres la « qua-
lité de vie » ressentie des citoyens, appréhendée sous le prisme de plu-
sieurs thématiques : qualité des services publics, logement, éducation,
environnement, santé, sécurité, revenus, etc.

Ce faisant, à la lumière des travaux de l’OCDE, on ne saurait établir


un quelconque lien entre pression fiscale, dépenses publiques et sentiment de
bien-être. Ainsi, en 2017, la France – championne d’Europe des prélè-
vements obligatoires et des dépenses publiques – se classe légèrement
en-deçà de la moyenne en termes de satisfaction de vie avec 6,4 /10

354
Institut Montaigne. 1 151 milliards d’euros de dépenses publiques : quels résultats ? Février 2014.
355
L’Express. « La France est droguée à la dépense publique », estime Bruno Le Maire. 26 juin 2017.
356
OFCE. Dépenses publiques : quels enjeux pour le prochain quinquennat ? Policy brief n°17, 19 avril 2017.
357
France Stratégie. Baisser le poids des dépenses publiques : les leçons de l’expérience des pays européens. La note
d’analyse, n°67, mai 2018.

69
Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

(contre 6,5 dans la zone OCDE)358. Le Danemark, vice-champion du


Vieux continent, est en revanche bien au-dessus avec 7,5 /10. Idem
pour la Belgique, sur la troisième marche du podium fiscal européen,
avec 6,9 /10. Parmi les États où la pression fiscale et le poids des
dépenses publiques sont beaucoup moins forts que dans les trois pays
précités, l’Allemagne (7 /10), le Canada (7,3), les États-Unis (6,9),
les Pays-Bas (7,4) et la Suisse (7,5) disposent d’un taux de bien-être
largement supérieur au taux français359.

De quoi faire réfléchir nos responsables politiques – trop souvent


prisonniers d’une vision colbertiste de la gouvernance publique et
keynésienne de la politique économique – sur le périmètre des admi-
nistrations publiques et le poids de la fiscalité afférente qui, à l’aune des
classements et statistiques susmentionnés, obèrent la compétitivité de
nos entreprises et amenuisent le pouvoir d’achat de nos concitoyens.

Une fiscalité locale des entreprises en nette progression


Les recettes de la fiscalité directe et indirecte portant sur les ménages et les
entreprises de l’ensemble des APUL se sont élevées en 2017 à 133,8 Mds €360
(contre 131,6 Mds € en 2016), soit 65,4 % du total de leurs recettes de fonc-
tionnement (197 Mds €)361. Plus précisément, le produit de la fiscalité directe
locale s’est quant à lui établi à 90,7 Mds € en 2017362, enregistrant une hausse
de 2,9% par rapport à l’exercice précédent (soit + 2,5 Mds €) ; contre + 2,6 %
en 2016 et + 4,2 % en 2015363. Or, comme l’affirme la direction générale des
collectivités locales, « cette croissance est tirée par les impôts économiques »364 en
progression de 4,4 % (soit + 1,2 Md €) avec notamment :
• + 4,3 % pour la CVAE365 ;
• + 25,1 % pour la TASCOM366 ;
• + 1,6 % pour la TEOM367.

358
OCDE. Comment va la vie ? Mesurer le bien-être. 2017.
359
Idem
360
Le produit de la fiscalité locale uniquement « directe » s’est en revanche établi à 88,1 Mds € en 2016 et
90,7 Mds € en 2017 (voir graphique page 72).
361
Gouvernement. Les enjeux d’une refonte de la fiscalité locale. Mission « Finances locales », janvier 2018.
362
Selon la DGCL, les produits de la fiscalité directe locale (90,7 Mds € en 2017) proviennent des taxes « ménages »
pour 62%, des impôts économiques pour 30% et des taxes annexes pour 8%.
363
Direction générale des collectivités locales. La fiscalité directe locale en 2017. Bulletin d’information statistique,
n°124, juin 2018.
364
Idem
365
La CVAE représente 1/5 de la fiscalité directe locale.
366
Selon la DGCL, le produit de la TASCOM est passé de 753 M € en 2016 à 942 M € en 2017.
367
Selon la DGCL, le produit de la TEOM – à destination du seul bloc communal – a atteint 6,8 Mds € en 2017.

70
Fiscalité locale des entreprises : un échec français

Sur la même période 2016-2017, les taxes ménages n’ont en revanche


augmenté « que » de 2,2 %368. Pour rappel et à titre de comparaison, d’après
l’INSEE, la croissance française s’est quant à elle établie à + 2,3 % en 2017
après + 1,2 % en 2016 et + 1,1 % en 2015369.

En 2017, selon la dernière édition du baromètre de la fiscalité locale des


entreprises réalisée par MODAAL Conseil pour le MEDEF, la fiscalité
économique locale s’est quant à elle établie à 49,3 Mds €370, représentant
dès lors d’après l’IGF plus de 40 % du total de la fiscalité servant au
financement des collectivités territoriales371 et 12,8 % des prélèvements
obligatoires totaux pesant sur les entreprises françaises372. Un chiffre – en
valeur absolue – largement supérieur à l’impôt sur les sociétés puisque
l’IS atteignait 33,5 Mds € en 2016373 puis 35,7 Mds € en 2017374, soit un
différentiel de 13,6 Mds € et un total cumulé de 85 Mds €.

Autrement dit, les entreprises tricolores contribuent à hauteur de près de


la moitié de la fiscalité locale ; le produit de la CET (additionnant CVAE et
CFE) en constituant à lui seul près de 50 %375. Surtout, comme le précise le
CESE, l’impact global de la fiscalité économique locale représenterait 3,1 %
de la valeur ajoutée marchande et 2,4 % de la valeur ajoutée totale produite
par les entreprises en 2016376.

Selon l’IGF, au sein des 49,3 Mds € précités, le produit des impositions éco-
nomiques directes locales – incluant uniquement la CFE, la CVAE, les IFER
et la TASCOM – s’élevait à 26,5 Mds € en 2016, soit 21% du produit total de
la fiscalité locale ; le reste étant constitué – pour 30,1 Mds € en 2016 – de la
fiscalité locale indirecte touchant entreprises et ménages : DMTO, TEOM,
taxes communales, etc. En miroir, la fiscalité directe pesant exclusivement sur
les particuliers s’est établie à 54,8 Mds €, représentant ce faisant 43 % du total
en 2016377, tandis que les concours financiers de l’État se sont hissés la même
année à 41,2 Mds €. De plus, comme le fait remarquer la Fondation iFRAP, les

368
 irection générale des collectivités locales. La fiscalité directe locale en 2017. Bulletin d’information statistique,
D
n°124, juin 2018.
369
INSEE. Le PIB progresse de 0,2 % au deuxième trimestre 2018. Informations rapides, n°199, 27 juillet 2018.
370
MODAAL Conseil, MEDEF. Actualisation du baromètre de la fiscalité locale des entreprises. Étude sur la période
2015 à 2017 à partir des données REI. Décembre 2018.
371
Gouvernement. Rapport sur la refonte de la fiscalité locale. Mission « Finances locales », mai 2018.
372
Conseil des prélèvements obligatoires. Fiscalité locale et entreprises. La cohérence de la fiscalité locale des entre-
prises au sein de la fiscalité globale des entreprises. Février 2014.
373
Assemblée nationale. Projet de loi de finances pour 2016. N°3096.
374
Gouvernement. Projet de loi de finances pour 2019. Dossier de presse. 24 septembre 2018.
375
Conseil des prélèvements obligatoires. Fiscalité locale et entreprises. Cartographie de la fiscalité locale des entreprises.
Novembre 2013.
376
Conseil Économique, Social et Environnemental. Pour une réforme globale de la fiscalité locale. Avril 2018.
377
S’y ajoutent également la taxe d’enlèvement des ordures ménagères (TEOM) pour 6,7 Mds € ainsi que les taxes
annexes pour 0,1 Md € supportées également par les entreprises.

71
Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

deux tiers de la fiscalité supportée localement par les entreprises proviennent


d’impôts « de production »378, présentant la particularité de frapper les agents
économiques indépendamment des résultats d’exploitation ; qu’il y ait autre-
ment dit réalisation ou non de profits379.

Après avoir connu une nette diminution (- 29 %) suite à la suppression de la


taxe professionnelle en 2010, la fiscalité économique locale n’a cessé de croître
depuis 2012, enregistrant une croissance de 10,1 % sur la période 2011-2014.
En 2015, le produit global des impôts économiques a poursuivi cette courbe
haussière avec + 4,1 % puis + 4,57 % l’année suivante380. Entre 2016 et 2017, la
fiscalité locale économique a de surcroît augmenté de 4,2% tandis que sur la
période 2013-2016, elle a suivi un effet haussier de 7,3 %381. Des progressions
supérieures à celles de l’inflation (+ 0,7 % entre 2013 et 2016) ainsi que de la
croissance (+ 3,0 % sur la même période) et tirées par la quasi-totalité des taxes.

Répartition des recettes fiscales directes par niveau de collectivité (2017)


En %
1% 2% 1%
Ensemble
(90,7 Mds €) 25 % 36 % 8% 19 % 8%

Régions
(9,5 Mds €) 93 % 7%
2%
Départements
(18,6 Mds €) 76 % 22 %

2% 1%2%
Bloc
communal 36 % 30 % 12 % 7% 11 %
(62,6 Mds €)

0% 10 % 20 % 30 % 40 % 50 % 60 % 70 % 80 % 90 % 100 %

Taxes ménages
TH (22,3 Mds €) FB (32,7 Mds€) FnB (1,1 Md€)

Taxes économiques
CFE (7,7 Mds €) CVAE (17,6 Mds €) IFER (1,5 Md €) TASCOM (0,9 Md €)

TEOM + Taxes annexes (6,9 Mds €)

(Source : Direction générale des collectivités locales)

378
 omme le soulignent l’Inspection générale des finances ainsi que la Fondation iFRAP, les « impôts de produc-
C
tion » pèsent sur les facteurs de production des entreprises indépendamment de la quantité ou de la valeur
des biens et services produits ou vendus, et quels que soient in fine leurs résultats d’exploitation.
379
Fondation iFRAP. Pour une nouvelle fiscalité locale. Société civile, n°191, juin 2018.
380
Direction générale des collectivités locales. Le guide statistique de la fiscalité directe locale. Statistiques fiscales
sur les collectivités locales. 2016.
381
MODAAL Conseil, MEDEF. Actualisation du baromètre de la fiscalité locale des entreprises. Décembre 2018.

72
Fiscalité locale des entreprises : un échec français

La fiscalité locale vue par les TPE

Malgré son opacité, loin d’être indolore, la hausse de la fiscalité locale


observée ces dernières années n’a pas échappé aux dirigeants de TPE.
Un sondage réalisé en novembre 2018 auprès d’un échantillon d’artisans,
commerçants et professions libérales le met en relief avec acuité : pour
57,09 % des sondés, la fiscalité locale est en hausse (contre 39,17 % la jugeant
stable et seulement 3,74 % la considérant en baisse)382. Dans le détail, la
moitié des entrepreneurs interrogés (50,15 %) évalue la progression de la
fiscalité supportée localement entre 5 % et 10 % sur la période 2017-2018, et
ce alors que l’inflation se hissait à 2,73 %. Ils sont de surcroît 12,89 % à évo-
quer une hausse comprise entre 10 % et 20 %383. La suppression programmée
de la taxe d’habitation semble susciter – à raison – de fortes inquiétudes
auprès des entrepreneurs sondés ; ils sont en effet 85,17 % à estimer qu’elle
engendrera une hausse de la taxation de leurs activités professionnelles384.

Évolution des principales taxes locales sur les entreprises (2011-2014)

+ 8,3 %
18 000 000

16 000 000

14 000 000

12 000 000 + 13,1 %

10 000 000
+ 10,2 %
8 000 000

6 000 000

4 000 000 + 8,5 %


+ 8,4 %
+ 17,0 %
2 000 000

0
at B
n)

at M
n)

FE

ER

M
VA
im FP

im O

O
io

io

IF

SC
st TE
st T

TA
(e

(e

2011 2012 2013 2014

(Sources : MODAAL Conseil, MEDEF)

382
 FM Business. Fiscalité locale : les inquiétudes des entreprises. 19 novembre 2018.
B
383
Idem
384
Ibid.

73
Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

Une myriade de « petites taxes » à rationaliser

Au-delà de son poids qui la classe systématiquement sur les podiums


des zones euro et OCDE385, la France dispose d’un maquis fiscal unique
en Europe. En effet, avec une centaine de prélèvements obligatoires,
elle se distingue nettement de l’Allemagne qui en recense moitié moins
(environ 55 selon Eurostat). Or, parmi la kyrielle de taxes auxquelles
sont assujettis ménages et acteurs économiques français figurent de
nombreuses « petites taxes », parfois ubuesques et souvent archaïques,
dont le rendement s’avère faible, la gestion administrative coûteuse et
la charge fiscale non négligeable pour ceux qui la supportent386.

Un rapport de l’Inspection générale des finances paru en 2013 le


démontre avec acuité : le nombre de taxes pesant sur les particuliers et
sur les entreprises dont le rendement est inférieur à 100 M € culmine
ainsi à 192 dans l’Hexagone contre 24 en Italie, 17 en Belgique, 3 en
Allemagne et 0 au Royaume-Uni ou aux Pays-Bas387. Ces 192 « petites
taxes » représentent dès lors à elles seules un montant cumulé
de 5,3 Mds €, soit seulement 0,9 % du produit total des impôts388.
De surcroît, comme le souligne EY, la France ne parvient pas à
enrayer sa frénésie en matière de création fiscale. En effet, en 2018,
huit taxes ont été créées contre seulement trois supprimées389.
Une tendance à la baisse certes – en 2012 quinze taxes avaient été
créées contre seulement une supprimée – mais qui ne témoigne pas
d’une véritable rationalisation du maquis fiscal390.

De plus, d’après la Fondation iFRAP, sur un total de 192, les collectivités


locales sont récipiendaires de 41 petites taxes, soit un produit de seulement
1,179 M € et 22,1 % du total391. Parmi elles, 29 « micro taxes » affichent un
rendement annuel inférieur à 500 000 €392. Par la voix de Gérald Darmanin
et suite au rapport Bur/Richard sur la refonte de la fiscalité locale remis
au gouvernement en mai 2018393, l’exécutif s’est néanmoins récemment
engagé à supprimer une vingtaine de ces taxes via le projet de loi de

385
 Y. Observatoire des politiques budgétaires et fiscales. Points clés et perspectives. Janvier 2018.
E
386
Chambre de Commerce et d’Industrie de Paris. 30 milliards de « petites taxes » sur les entreprises à rationaliser.
Juin 2012.
387
Inspection générale des finances. Les taxes à faible rendement. Rapport n°2013-M-095-02, tome 1, février
2014.
388
Idem
389
EY. Observatoire des politiques budgétaires et fiscales. Points clés et perspectives. Janvier 2018.
390
Idem
391
Fondation iFRAP. Pour une nouvelle fiscalité locale. Société civile, n°191, juin 2018.
392
Inspection générale des finances. Les taxes à faible rendement. Rapport n°2013-M-095-02, tome 1, février 2014.
393
Gouvernement. Rapport sur la refonte de la fiscalité locale. Mission « Finances locales », mai 2018.

74
Fiscalité locale des entreprises : un échec français

finances pour 2019, tablant sur une économie de 400 M € sur deux ans.
La mission Bur/Richard préconise notamment de supprimer la taxe de
balayage (108,9 M € par an), les taxes communales et départementales
sur les remontées mécaniques (54 M €), la surtaxe sur les eaux minérales
(20,1 M €) ou encore la taxe dans le domaine funéraire (5 M €)394.

Bloc communal

Sur les 106,99 Mds € de recettes de fonctionnement du bloc communal


en 2016, la fiscalité directe locale en a représenté plus de la moitié avec
60,9  Mds €395, enregistrant une hausse de 8,97 % sur la période 2013-2016.
Les communes et les intercommunalités captent ainsi 69 % du total du
produit de la fiscalité locale des collectivités396. En resserrant la lentille du
microscope, force est d’observer que la fiscalité économique – principale-
ment constituée de la CET397 (CVAE + CFE398) – ne représente en 2017 que
22 % de cette enveloppe globale (soit 13,8 Mds €)399, contre 23,5% en 2011
et 41,5% en 2009400. Au sein de la CET, la CVAE a contribué à hauteur de
4,7 Mds € en 2017 et la CFE pour 7,7 Mds € (en hausse, pour cette dernière,
de 3,2% sur la période 2016-2017)401.

À l’inverse, la part des taxes sur les ménages402 au sein des ressources fiscales
directes des municipalités et des groupements intercommunaux (41,9 Mds €
en 2017)403 a rapporté près de la moitié des recettes de fonctionnement du
bloc communal ; la taxe d’habitation y contribuant, à elle seule, à hauteur de
20,43 % avec 21,9 Mds € 404. Cependant, avec 54 % du total en 2014 (contre
55 % deux ans plus tôt), plus de la moitié du produit de la fiscalité économique
de l’ensemble des APUL revient au bloc communal405. Tirée notamment par
la CET, celle-ci a augmenté de 5,85 % en quatre ans, passant de 12,47 Mds €
en 2013 à 13,2 Mds € en 2016 pour atteindre 13,8 Mds en 2017406.

394
Idem
395
 elon la DGCL, ce chiffre s’élève à 62,6 Mds € en 2017.
S
396
Direction générale des collectivités locales. La fiscalité directe locale en 2016. Bulletin d’information statistique,
n°117, juillet 2017.
397
La contribution économique territoriale (CET) représente 19% de la fiscalité directe du bloc communal.
398
La cotisation foncière des entreprises (CFE) est le seul impôt économique sur lequel les municipalités ont conservé
un pouvoir de taux.
399
Direction générale des collectivités locales. La fiscalité directe locale en 2017. Bulletin d’information statistique,
n°124, juin 2018.
400
Gouvernement. Les enjeux d’une refonte de la fiscalité locale. Mission « Finances locales », janvier 2018.
401
Direction générale des collectivités locales. La fiscalité directe locale en 2017. N°124, juin 2018.
402
Les taxes sur les ménages comprennent la taxe d’habitation, la TFPB et la TFNB.
403
Direction générale des collectivités locales. La fiscalité directe locale en 2017. Bulletin d’information statistique,
n°124, juin 2018.
404
Gouvernement. Les enjeux d’une refonte de la fiscalité locale. Mission « Finances locales », janvier 2018.
405
MODAAL Conseil, MEDEF. La fiscalité locale des entreprises en France. Analyse pour les 13 nouvelles régions. 2015.
406
Direction générale des collectivités locales. La fiscalité directe locale en 2017. Bulletin d’information statistique,
n°124, juin 2018.

75
Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

Enfin, notons que le bloc communal jouit d’une autonomie fiscale relative-
ment importante – plus élevée que les régions et les départements – puisqu’il
dispose d’une grande latitude sur la moitié de ses ressources fiscales407.

Départements

En 2016, s’élevant à 22,3 Mds €, la fiscalité directe locale ne représente que


34 % des recettes des conseils départementaux408. Sur la période 2011-2016,
les impôts économiques ont néanmoins progressé de 12,9 %, passant de
7,35 Mds € à 8,45 Mds €409. Les DMTO, la TFPB et les IFER410 ont parti-
culièrement tiré cette croissance, en augmentant respectivement de 33,38 %,
13,37 % et 12,5 % entre 2013 et 2016411. La CVAE, quant à elle, n’a progressé
que plus modérément depuis 2011412. En 2017, celle-ci ne représentait plus que
22 % des recettes départementales, soit 4,1 Mds € sur un total de 18,6 Mds €413.

La fiscalité directe des départements (2011-2016)

En Mds€
24
22,3 %
21,2 % 1%
21 20,4 % 20,5 %
1%
19,2 % 1% 1%
18,3 %
18 1%
1%

15 62 %
61 %
60 % 61 %
60 % 60 %
12

39 % 38 % 39 % 38 % 38 % 37 %
3

0
2011 2012 2013 2014 2015 2016

(Source : Direction générale des collectivités locales) CVAE FB IFER

407
 onseil Économique, Social et Environnemental. Pour une réforme globale de la fiscalité locale. Avril 2018.
C
408
Gouvernement. Les enjeux d’une refonte de la fiscalité locale. Mission « Finances locales », janvier 2018.
409
Direction générale des collectivités locales. Le guide statistique de la fiscalité directe locale. Statistiques fiscales
sur les collectivités locales. 2016.
410
Le produit des IFER s’est hissé à 281 M € en 2017 pour les départements.
411
Direction générale des collectivités locales. Le guide statistique de la fiscalité directe locale. Statistiques fiscales
sur les collectivités locales. 2016.
412
Notons que la quote-part de la CVAE dévolue aux départements est passée, consécutivement à l’entrée en
vigueur de la loi NOTRe, de 48,5 % à 23,5 % au 1er janvier 2017.
413
Direction générale des collectivités locales. La fiscalité directe locale en 2017. Bulletin d’information statistique,
n°124, juin 2018.

76
Fiscalité locale des entreprises : un échec français

Régions

Dans le cadre de la mise en place de la loi NOTRe, les ressources financières


des régions ont fait l’objet d’une mutation substantielle puisque depuis 2017,
ces dernières reçoivent 50 % des recettes de la CVAE contre 25 % aupara-
vant (retenus sur la quote-part dévolue aux départements passée de 48,5 %
à 23,5 %) et ne perçoivent plus, à compter de 2018, de DGF (laquelle est
remplacée par une fraction de TVA pour un montant évalué à 4,12 Mds €)414.

Aussi, il convient de souligner que les conseils régionaux perçoivent unique-


ment des impôts économiques. S’établissant à 9,5 Mds € en 2017415, le produit
de ces derniers a crû de 1 % en 2016 par rapport à 2015, représentant ce faisant
21,11 % de leurs recettes totales de fonctionnement. La CVAE – en hausse de
4,6 Mds € en 2017 par rapport à l’an passé – constitue la part la plus importante
de la fiscalité directe régionale avec 93 % des recettes globales. Un poids tiré par
la région Île-de-France qui concentre, à elle seule, 37 % des impôts économiques
et 33 % de la fiscalité régionale globale. Les IFER, en revanche, n’atteignent que
658 M € en 2017 pour les régions contre 659,5 M € en 2016, constituant de fait
une fraction très marginale des recettes des conseils régionaux.

Notons enfin que les régions disposent de peu de marges de manœuvre concer-
nant la fiscalité qu’elles perçoivent (CVAE, IFER, TICPE, taxes sur les certificats
d’immatriculation des véhicules, etc.). En effet, elles ne peuvent moduler le taux de
la CVAE et, eu égard à leur spécialisation, n’ont plus la main sur la taxe foncière et
la taxe d’habitation dévolues aux communes416. Leur pouvoir fiscal, extrêmement
marginal, se cantonne dès lors à une partie de la TICPE et aux cartes grises.

Répartition de la fiscalité locale des entreprises par collectivités (2014)

Régions
13 %

Bloc communal Départements


54 % 33 %

(Sources : MODAAL Conseil, MEDEF)

414
Gouvernement. Les enjeux d’une refonte de la fiscalité locale. Mission « Finances locales », janvier 2018.
415
Direction générale des collectivités locales. La fiscalité directe locale en 2017. N°124, juin 2018.
416
Conseil Économique, Social et Environnemental. Pour une réforme globale de la fiscalité locale. Avril 2018.

77
Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

La taxe professionnelle est morte, vive la CET !

Mise en place par la loi du 29 juillet 1975, décriée pour son impact
économique négatif de nature à pénaliser les investissements ainsi que
son caractère complexe et inique417, la taxe professionnelle (TP) a été
remplacée au 1er janvier 2010 par la contribution économique terri-
toriale (CET), agrégation de deux impôts : la cotisation sur la valeur
ajoutée (CVAE)418 et la cotisation foncière des entreprises (CFE)419.
Comme le souligne un rapport d’information du Sénat, durant plus
de trente ans, la TP a constitué la ressource fiscale la plus importante
de l’ensemble des strates des collectivités territoriales, représentant
30,3 Mds € en 2009 dont 26,4 Mds € supportés par les entreprises (le
reste étant compensé par l’État)420. Complexe à administrer, assise sur
une assiette composite reposant sur les immobilisations ainsi que sur
les biens passibles de la taxe foncière, elle avait pour écueil de renché-
rir les coûts de production et pénaliser les secteurs à forte intensité
capitalistique421. En bout de chaîne, la TP concourait dès lors à la dété-
rioration de la compétitivité de nos entreprises. Sa réforme – maintes
fois repoussée – apparaissait donc indispensable.

La CET se distingue nettement de sa prédécesseure. Alors que le


produit de la CVAE est éclaté entre plusieurs collectivités (communes,
EPCI, départements et régions), la CFE est destinée en revanche aux
seules communes422. D’après le Conseil des prélèvements obligatoires,
de par l’allègement fiscal et la simplification qu’il représente pour les
entreprises, le remplacement de la TP par la CET « a globalement atteint
son objectif de compétitivité »423.

417
OCDE. Multi-level governance reforms. Overview of OECD country experiences. Mai 2017.
418
La CVAE est basée sur la valeur ajoutée générée par les entreprises. Son taux est fixé par le législateur.
419
La CFE est assise sur les bases foncières des entreprises dont le taux est fixé par les collectivités.
420
GUENÉ, Charles. Rapport d’information au nom de la mission commune d’information sur les conséquences
pour les collectivités territoriales, l’État et les entreprises de la suppression de la taxe professionnelle et de son
remplacement par la contribution économique territoriale. Sénat, rapport n°611, juin 2012.  
421
Conseil Économique, Social et Environnemental. Pour une réforme globale de la fiscalité locale. Avril 2018.
422
Idem
423
Conseil des prélèvements obligatoires. Fiscalité locale et entreprises. Mai 2014.

78
Fiscalité locale des entreprises : un échec français

À RETENIR

• En 2017, les prélèvements obligatoires ont atteint en France 48,4 % du


PIB (contre 47,6 % en 2016), soit le record d’Europe et de la zone OCDE.
• Avec 56,4 % du PIB en 2017, le montant des dépenses publiques trico-
lores est supérieur de 15 points à la moyenne de l’OCDE (41 %) et de 12
points par rapport à l’Allemagne (44 %).
• Le nombre de taxes dont le rendement est inférieur à 100 M € culmine en
France à 192 contre seulement 24 en Italie, 17 en Belgique, 3 en Allemagne
et 0 au Royaume-Uni ou aux Pays-Bas.
• Le produit global de la fiscalité directe locale s’est établi à 90,7 Mds €
en 2017 (en hausse de 2,9 % par rapport à 2016).
• Ces 90,7  Mds € proviennent des taxes « ménages » pour 62 %, des
impôts économiques pour 30 % et des taxes annexes pour 8 %.
• Au total, la fiscalité locale économique s’est établie à 49,3  Mds € en
2017, contre 35,7 Mds € pour l’IS (soit un différentiel de 13,6 Mds € et
un total cumulé de 85 Mds €).
• La fiscalité locale économique a crû de 10,1 % sur la période 2011-2014
puis de 7,3 % sur la période 2013-2016 et de 4,4 % entre 2016 et 2017.
• Les 2/3 de la fiscalité locale économique proviennent d’impôts « de
production ».
• Représentant 3,2 % du PIB en 2016 (contre 1,6 % dans la zone euro)
pour un montant total de 72,1  Mds €, les impôts de production ont
augmenté de 19,9 % sur la période 2007-2016 contre 14,2 % pour le PIB.
• La CVAE – en hausse de 4,6 Mds € en 2017 par rapport à 2016 – constitue
la part la plus importante de la fiscalité directe des régions (93 % de
leurs recettes).
• Les impôts de production sont en France deux fois supérieurs à
la moyenne de l’Union européenne et sept fois plus élevés qu’en
Allemagne.
• Sur la période 2011-2016, les impôts économiques des départements
ont progressé de 12,9 %, passant de 7,35 Mds € à 8,45 Mds €.
• Avec 54 % en 2014, plus de la moitié du produit total de la fiscalité
locale économique revient au bloc communal (contre 33 % pour les
départements et 13 % pour les régions).

79
Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

AnnexeS

Cette annexe présente la troisième édition du baromètre de la fiscalité


locale des entreprises réalisé par MODAAL Conseil pour le MEDEF424.

Les différentes taxes prises en compte

Commune EPCI Département Région Commentaires

Taxe foncière sur Revenu cadastral x taux d’imposition


les propriétés (fixé par les collectivités locales)
bâties, non bâties Fonction Fonction Fonction
(TFPB / TFNB) du taux du taux du taux
Cotisation foncière Valeur locative x taux
territoriale (CET)

Recouvrée
des entreprises municipal ou taux par l’État
Contribution
économique

(CFE) EPCI puis répartie

Cotisation sur la Taux national (fonction du chiffre d’affaires) x VA


valeur ajoutée 23,5 % 50 %
(CVAE) 26,5 %
(péréquation) (péréquation)
Taxe d’enlèvement Commune ou EPCI Pour toute
propriété
sur les ordures (voire syndicat de soumise à taxe
ménagères (TEOM) communes) foncière

Taxes spéciales
sur les surfaces Surface de vente
Commune ou EPCI > 400 m2 et CA
commerciales HT > 460 000 E
(TASCOM)
Impositions
forfaitaires sur Ciblée sur les
Répartition (% variable selon les rubriques de l’IFER) entreprises de
les entreprises de réseau
réseau (IFER)

La taxe versement transport fait l’objet d’un focus à part.


Le versement transport est perçu par l’Autorité
Organisatrice des Transports (AOT) compétente
sur le territoire : il peut s’agir d’une commune,
d’une intercommunalité, d’un syndicat mixte, d’un
Versement Recouvré
département, d’une région... par l’AOT
transport (VT)
Masse salariale x taux AOT sur la commune
(s’applique uniquement aux entreprises de plus
de 11 salariés. Jusqu’à 2015, le VT s’appliquait aux
entreprises de plus de 9 salariés).

424
MODAAL Conseil, MEDEF. Actualisation du baromètre de la fiscalité locale des entreprises. Décembre 2018.

80
Fiscalité locale des entreprises : un échec français

D’autres taxes locales ne sont pas prises en compte dans l’analyse, soit que
leur poids est marginal, soit que leur champ d’application est ciblé (ou non
récurrent), soit encore que les données ne sont pas disponibles.

Ne sont ainsi pas pris en compte :


• les droits de mutation ;
• la taxe locale sur les enseignes et publicités extérieures (TLPE) ;
• les taxes pour frais de chambres consulaires ;
• la taxe d’aménagement ;
• les taxes indirectes (TIPP, TFCA, etc.) ;
• la taxe d’apprentissage (pour les régions) ;
• la taxe sur les locaux à usage de bureaux (en Île-de-France). En 2015, elle
s’élevait à 800 M €, soit un surplus de 175 € par salarié en moyenne sur
l’Île-de-France.

Une progression importante, très supérieure à l’inflation et la croissance


Sur la période 2013-2016, la fiscalité locale économique a augmenté de 7,3 %,
alors que les taux de croissance et d’inflation ne progressaient respective-
ment que de 3 % et 0,7 %425.

Entre 2011 et 2014, la déconnection est encore plus importante ; la fiscalité


locale sur les entreprises progressant de 10,1 % contre + 1,1 % pour la crois-
sance et + 3,4 % pour l’inflation.

425
 our rappel, d’après l’INSEE, la croissance française s’est établie à + 2,3 % en 2017 après + 1,2 % en 2016 et + 1,1 %
P
en 2015.

81
Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

Taux d’évolution de la fiscalité locale des entreprises, de l’inflation


et de la croissance (variation du PIB en volume) sur la période 2015-2017

En %
8%
7,3 %
7%

6%

5%
4,2 %
3,9 %
4%
3,4 %

3% 2,9 %
2,4 %
2,2 %
2%
1,5 %
1,2 % 1,2 %
1,0 %
1%
0,2 %
0%
2015/2016 2016/2017 2015/2017

Inflation PIB en volume FLE par salarié (approche OFGL) FLE (approche OFGL)

Montant des taxes au fil des ans et pourcentage d’évolution 2015/2016

France
18 000 000
+ 1,4 %

16 000 000

14 000 000

12 000 000
+ 4,6 %
10 000 000

+ 3,3 %
8 000 000 + 2,7 %

6 000 000

4 000 000
+ 1,6 %
2 000 000 + 1,8 %
+ 2,2 %
0
TFPB TEOM CFE CVAE TASCOM VT IFER
(estim.) (estim.)

2013 2014 2015 2016

Une évolution du montant total de fiscalité locale des entreprises de + 2,6 %


en 2015 (+ 2,5 % hors VT).

82
Fiscalité locale des entreprises : un échec français

Un montant moyen de fiscalité par salarié de 2 641 € (versement trans-


port compris), en progression de 1,4 % en 2016 par rapport à l’exercice
précédent :

Carte de la fiscalité locale

Fiscalité par salarié,


y compris versement transport

< 2 077 €
[ 2 077 € - 2 301 € ]
[ 2 301 € - 2 504 € ]
[ 2 504 € - 2 748 € ]
> 2 748 €

La fiscalité par salarié a fortement augmenté ces dernières années :


• + 5,5 % entre 2013 et 2016 ;
• en 2016, elle représente 2 641 € par salarié. À titre indicatif, en 2015, le
salaire net médian s’élevait à 1 797 € par mois en France (INSEE).

Par rapport au niveau national, la fiscalité par salarié s’avère légère-


ment supérieure dans les métropoles, cachant ainsi des disparités :
• une CVAE par salarié plus importante qu’au niveau national, traduisant
la part importante des entreprises des métropoles dans la production de
valeur ajoutée ;

83
Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

• une fiscalité des taxes assises sur valeurs locatives moins élevée que sur
l’ensemble du territoire, traduisant le fait que les territoires plus ruraux
taxent davantage le foncier (poste important des recettes des collectivités) ;
• un impact beaucoup plus élevé du versement transport sur les métropoles
dont les enjeux de mobilités urbaines sont très conséquents.

Comparaison territoriale de la fiscalité par salarié en 2016 et ses postes majeurs

3 500
3 105 Île-de-France France

3 000
2 641

2 500

2 000

1 500
1 187 1 132
1 032
944
1 000 807

440
500

0
FLE/salarié CVAE/salarié FLE assise sur VT/salarié
VL/salarié

84
Fiscalité locale des entreprises : un échec français

Régions

Comparaison des principaux postes de fiscalité locale


des entreprises sur les différentes régions

3 500

3 105
3 000
2 717 2 720 2731
2 641 2 607 2 668
2 542 2 572 2512
2 500 2 462
2 314 2374
2 287
2 109 2 067 2054
2 000 1 904

1 500

1 000

500

0
e- e-F ce

ut ne ce

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Pa orm ine

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Co
s- -A

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ôt

M
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G
ys

an
R

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ve

Fr
tr
a

lp

ou

e-
Ce
-A

N
ce
uv

go
en
A

ur
ov

Bo
Pr

FLE VL par salarié CVAE par salarié VT par salarié Reste par salarié
(TASCOM et IFER)

85
Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

Part du montant de fiscalité locale des entreprises par région (2016)

Bourgogne-
Franche-Comté DOM
3% 2%

Centre Val-de Loire


3% Corse
0%
Bretagne
3%
Pays de la Loire
5% Île-de-France
30 %
Normandie
5%

Nouvelle-Aquitaine
7%

Grand-Est Auvergne
7% Rhône-Alpes
12 %

Provence-Alpes-
Côte d’Azur Hauts-de-France
7% 8%
Occitanie
8%

86
Fiscalité locale des entreprises : un échec français

Montant de fiscalité, nombre de salariés et fiscalité par salarié

Île-de-France
16 000 000 14 247 443 3 500
13 924 050
13 468 061 13 333 632
14 000 000 3 077 3 105
3 006 2 968 3 000

12 000 000
2 500

10 000 000
2 000
8 000 000
1 500
6 000 000
4 524 855 4 587 876
4 479 677 4 492 072
1 000
4 000 000

500
2 000 000

0 0
2013 2014 2015 2016

Total fiscalité (k€) Nb de salariés URSSAF Fiscalité par salarié (€)

Comparaison territoriale de la fiscalité par salarié en 2016 et ses postes majeurs

3 500
3 105 Île-de-France France

3 000
2 641

2 500

2 000

1 500
1 187 1 132
1 032
944
1 000 807

440
500

0
FLE/salarié CVAE/salarié FLE assise sur VT/salarié
VL/salarié

Ô En Île-de-France, le montant de la fiscalité locale économique a


progressé de 6,9 % sur la période 2014-2016 contre + 6,5 % en France.
Ô La fiscalité locale par salarié a quant à elle augmenté de 4,6 % sur la
période 2014-2016 (idem qu’au niveau national) et de 0,9 % en 2016 par
rapport à 2015 (contre + 1,4 % en France).

87
Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

Montant de fiscalité, nombre de salariés et fiscalité par salarié

Provence-Alpes-Côte d’Azur
3 500 000 3 428 350
3 339 774 3 500
3 153 102 3 208 687
3 000 000
3 000

2 640 2 668
2 500 000 2 513 2 560
2 500

2 000 000 2 000

1 500 000 1 500


1 254 858 1 253 451 1 265 270 1 285 166

1 000 000 1 000

500 000 500

0 0
2013 2014 2015 2016

Total fiscalité (k€) Nb de salariés URSSAF Fiscalité par salarié (€)

Comparaison territoriale de la fiscalité par salarié en 2016 et ses postes majeurs

3 500
Provence-Alpes-Côte d’Azur France

3 000
2 668 2 641

2 500

2 000

1 500 1 259
1 132
944
1 000 844

429 440
500

0
FLE/salarié CVAE/salarié FLE assise sur VT/salarié
VL/salarié

Ô En Provence-Alpes-Côte d’Azur, le montant de la fiscalité locale économique


a progressé de 6,8 % sur la période 2014-2016 contre + 6,5 % en France.
Ô La fiscalité locale par salarié a quant à elle augmenté de 4,2 % sur la
période 2014-2016 (contre + 4,6 % en France) et de 1,1 % en 2016 par
rapport à 2015 (contre + 1,4 % au niveau national).

88
Fiscalité locale des entreprises : un échec français

Montant de fiscalité, nombre de salariés et fiscalité par salarié

Auvergne-Rhône-Alpes
6 000 000 3 500
5 637 616
5 421 625
5 140 996 5 249 497
5 000 000 3 000

2 542 2 500
2 417 2 475
4 000 000 2 369

2 000
3 000 000

1 500
2 169 682 2 171 920 2 190 226 2 217 754
2 000 000
1 000

1 000 000
500

0 0
2013 2014 2015 2016

Total fiscalité (k€) Nb de salariés URSSAF Fiscalité par salarié (€)

Comparaison territoriale de la fiscalité par salarié en 2016 et ses postes majeurs

3 500
Auvergne-Rhône-Alpes France

3 000
2 641
2 542
2 500

2 000

1 500
1 153 1 132
1 000 914 944

440
500 327

0
FLE/salarié CVAE/salarié FLE assise sur VT/salarié
VL/salarié

Ô En Auvergne-Rhône-Alpes, le montant de la fiscalité locale économique a


progressé de 7,4 % sur la période 2014-2016 contre + 6,5 % en France.
Ô La fiscalité locale par salarié a quant à elle augmenté de 5,2 % sur la période
2014-2016 (contre + 4,6 % en France) et de 2,7 % en 2016 par rapport à 2015
(contre + 1,4 % au niveau national).

89
Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

Montant de fiscalité, nombre de salariés et fiscalité par salarié

Nouvelle-Aquitaine
3 500 000 3 500
3 171 726
3 080 121
3 000 000 2 907 753 2 941 873
3 000

2 500 000 2 500


2 279 2 314
2 150 2 182
2 000 000 2 000

1 500 000 1 370 441 1 500


1 352 666 1 348 040 1 351 700

1 000 000 1 000

500 000 500

0 0
2013 2014 2015 2016

Total fiscalité (k€) Nb de salariés URSSAF Fiscalité par salarié (€)

Comparaison territoriale de la fiscalité par salarié en 2016 et ses postes majeurs

3 500
Nouvelle-Aquitaine France

3 000
2 641
2 500 2 314

2 000

1 500
1 132
1 029
1 000 944
835

440
500
272

0
FLE/salarié CVAE/salarié FLE assise sur VT/salarié
VL/salarié

Ô En Nouvelle-Aquitaine, le montant de la fiscalité locale économique


a progressé de 7,8 % sur la période 2014-2016 contre + 6,5 % en France.
Ô La fiscalité locale par salarié a quant à elle augmenté de 6,1 % sur la pé-
riode 2014-2016 (contre 4,6 % en France) et de 1,6 % en 2016 par rapport
à 2015 (contre + 1,4 % au niveau national).

90
Fiscalité locale des entreprises : un échec français

Métropoles

Montant de fiscalité, nombre de salariés et fiscalité par salarié

Métropole du Grand Paris


12 000 000 3 500
10 073 400 10 208 563
9 598 855 3 143 3 144
3 020 3 000
10 000 000

2 500
8 000 000
2 000
6 000 000
1 500

4 000 000 3 178 465 3 205 090 3 246 817 1 000


3 148 140

2 000 000 500

NR NR
0 0
2013 2014 2015 2016

Total fiscalité (k€) Nb de salariés URSSAF Fiscalité par salarié (€)

Comparaison territoriale de la fiscalité par salarié en 2016 et ses postes majeurs

3 500
3 144 3 105 Métropole du Grand Paris Paris Île-de-France France
3 009
3 000
2 641
2 500

2 000

1 500
1 285 1 350
1 197 1 132
1 032 991
1 000 944 940 897
807
650
500 440

0
FLE/salarié CVAE/salarié FLE assise sur VT/salarié
VL/salarié

Ô Au sein de la métropole du Grand Paris, le montant de la fiscalité


locale économique a progressé de 6,4 % sur la période 2014-2016 contre
+ 6,9 % en Île-de-France et + 6,5 % en France.
Ô La fiscalité locale par salarié a quant à elle augmenté de 4,1 % sur la
période 2014-2016 (contre 4,6 % en France) et a été stable (0,0 %) en 2016
par rapport à 2015 (contre 1,4 % au niveau national).

91
Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

Montant de fiscalité, nombre de salariés et fiscalité par salarié

Métropole de Lyon
1 500 000 3 000
1 409 136
1 314 649
1 254 331
2 516 2 500
1 200 000 2 389
2 317

2 000
900 000

1 500

600 000 536 119 541 364 550 293 559 987
1 000

300 000
500

0 NR NR 0
2013 2014 2015 2016

Total fiscalité (k€) Nb de salariés URSSAF Fiscalité par salarié (€)

Comparaison territoriale de la fiscalité par salarié en 2016 et ses postes majeurs

3 500
Métropole de Lyon Rhône Auvergne-Rhône-Alpes France

3 000

2 542 2 641
2 516 2 456
2 500

2 000

1 500
1 153 1 132
930
1 000 927 914944 933 929

622
552
500 440
327

0
FLE/salarié CVAE/salarié FLE assise sur VT/salarié
VL/salarié

Ô Au sein de la métropole de Lyon, le montant de la fiscalité locale


économique a progressé de 12,3 % sur la période 2014-2016 contre
+ 10,8 % dans le département du Rhône, + 7,4 % en AURA et + 6,5 % en
France.

92
Fiscalité locale des entreprises : un échec français

Ô La fiscalité locale par salarié a quant à elle augmenté de 8,6 % sur la
période 2014-2016 (contre + 4,6 % en France) et de 5,3 % en 2016 par
rapport à 2015 (contre + 1,4 % au niveau national).

Montant des taxes au fil des ans et pourcentage d’évolution 2015/2016

Métropole Aix-Marseille Provence


500 000
+ 4,7 %
450 000

400 000

350 000
+ 2,3 % + 6,1 %
300 000
+ 1,0 %
250 000

200 000

150 000
+ 2,6 %
100 000

50 000
+ 0,5 % + 10,6 %
0
TFPB TEOM CFE CVAE TASCOM VT IFER
(estim.) (estim.)

2014 2015 2016

Ô Au sein de la métropole d’Aix-Marseille Provence, le montant de la


fiscalité locale économique a progressé de 7,3 % sur la période 2014-2016
contre + 7,3 % dans le département des Bouches-du-Rhône, + 6,8 % en
Provence-Alpes-Côte d’Azur et + 6,5 % en France.
Ô La fiscalité locale par salarié a quant à elle augmenté de 4,5 % sur la
période 2014-2016 (contre + 4,6 % en France) et de 2,2 % en 2016 par
rapport à 2015 (contre + 1,4 % au niveau national).

93
Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

Montant des taxes au fil des ans et pourcentage d’évolution 2015/2016

Toulon Métropole
80 000

70 000 – 3,8 %

60 000
+ 0,9 %
– 1,1 %
50 000

40 000 – 0,1 %

30 000

20 000
– 1,9 %

10 000
– 2,7 %
+ 4,6 %
0
TFPB TEOM CFE CVAE TASCOM VT IFER
(estim.) (estim.)

2014 2015 2016

Ô Au sein de la métropole de Toulon, le montant de la fiscalité locale


économique a progressé de 3,3 % sur la période 2014-2016 contre + 5,6 %
dans le département du Var, + 6,8 % en PACA et + 6,5 % en France.
Ô La fiscalité locale par salarié a quant à elle augmenté de 0,4 % sur la
période 2014-2016 (contre + 4,6 % en France) et a diminué de 3,3 % en
2016 par rapport à 2015 (contre + 1,4 % au niveau national).

94
Fiscalité locale des entreprises : un échec français

Montant des taxes au fil des ans et pourcentage d’évolution 2015/2016

Métropole Nice Côte d’Azur


140 000

+ 3,8 %
120 000

100 000
+ 1,6 %

+ 4,7 %
80 000 + 0,6 %

60 000

40 000
+ 2,6 %
+ 12,6 %
20 000

+ 0,9 %
0
TFPB TEOM CFE CVAE TASCOM VT IFER
(estim.) (estim.)

2014 2015 2016

Ô Au sein de la métropole Nice Côte d’Azur, le montant de la fiscalité


locale économique a progressé de 6,5 % sur la période 2014-2016 contre
+ 7 % dans le département des Alpes-Maritimes, + 6,8 % en Provence-
Alpes-Côte d’Azur et + 6,5 % en France.
Ô La fiscalité locale par salarié a quant à elle augmenté de 3 % sur la
période 2014-2016 (contre + 4,6 % en France) et de 1,7 % en 2016 par
rapport à 2015 (contre + 1,4 % au niveau national).

95
Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

Départements

Montant des taxes au fil des ans et pourcentage d’évolution 2015/2016

Alpes-de-Haute-Provence
45 000

40 000 + 1,3 %

35 000

30 000 + 2,6 %
+ 3,7 %

25 000

20 000

15 000

10 000
+ 0,2 % + 1,6 %
5 000
+ 6,3 % + 7,3 %

0
TFPB TEOM CFE CVAE TASCOM VT IFER
(estim.) (estim.)

2013 2014 2015 2016

Ô Au sein du département des Alpes-de-Haute-Provence, le montant de la


fiscalité locale économique a progressé de 5,4 % sur la période 2014-
2016 contre + 6,8 % en Provence-Alpes-Côte d’Azur et + 6,5 % en France.
Ô La fiscalité locale par salarié a quant à elle augmenté de 0,7 % sur la
période 2014-2016 contre + 4,2 % en Provence-Alpes-Côte d’Azur et
+ 4,6 % en France.

96
Fiscalité locale des entreprises : un échec français

Montant des taxes au fil des ans et pourcentage d’évolution 2015/2016

Alpes-Maritimes
300 000

– 0,7 %

250 000

200 000

+ 4,7 %

+ 2,8 %
150 000
+ 3,5 %

100 000

+ 5,6 %
50 000

+ 9,5 % + 1,4 %
0
TFPB TEOM CFE CVAE TASCOM VT IFER
(estim.) (estim.)

2013 2014 2015 2016

Ô Au sein du département des Alpes-Maritimes, le montant de la fiscalité


locale économique a progressé de 7 % sur la période 2014-2016 contre
+ 6,8 % en Provence-Alpes-Côte d’Azur et + 6,5 % en France.
Ô La fiscalité locale par salarié a quant à elle augmenté de 3,8 % sur la
période 2014-2016 contre + 4,2 % en Provence-Alpes-Côte d’Azur et
+ 4,6 % en France.

97
Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

Montant des taxes au fil des ans et pourcentage d’évolution 2015/2016

Bouches-du-Rhône
600 000

500 000 + 4,5 %

400 000

+ 2,4 %
+ 6,1 %
300 000
+ 1,1 %

200 000

+ 2,5 %
100 000

+ 0,9 % + 11,6 %
0
TFPB TEOM CFE CVAE TASCOM VT IFER
(estim.) (estim.)

2013 2014 2015 2016

Ô Au sein du département des Bouches-du-Rhône, le montant de la fiscalité


locale économique a progressé de 7,3 % sur la période 2014-2016 contre
+ 6,8 % en Provence-Alpes-Côte d’Azur et + 6,5 % en France.
Ô La fiscalité locale par salarié a quant à elle augmenté de 4,6 % sur la
période 2014-2016 contre + 4,2 % en Provence-Alpes-Côte d’Azur et
+ 4,6 % en France.

98
Fiscalité locale des entreprises : un échec français

Montant des taxes au fil des ans et pourcentage d’évolution 2015/2016

Hautes-Alpes
35 000
+ 1,3 %

30 000

25 000
– 1,1 %

20 000
+ 2,9 %

15 000

10 000

5 000 – 7,3 %
– 1,5 %
+ 7,9 % + 11,3 %
0
TFPB TEOM CFE CVAE TASCOM VT IFER
(estim.) (estim.)

2013 2014 2015 2016

Ô Au sein du département des Hautes-Alpes, le montant de la fiscalité


locale économique a progressé de 3,8 % sur la période 2014-2016 contre
+ 6,8 % en Provence-Alpes-Côte d’Azur et + 6,5 % en France.
Ô La fiscalité locale par salarié a quant à elle augmenté de 2,8 % sur la
période 2014-2016 contre + 4,2 % en Provence-Alpes-Côte d’Azur et
+ 4,6 % en France.

99
Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

Montant des taxes au fil des ans et pourcentage d’évolution 2015/2016

Var
180 000

– 1,4 %
160 000

140 000

+ 1,9 %
120 000

100 000 + 0,6 %

80 000
– 0,0 %
60 000

40 000 – 0,7 %

20 000 + 0,0 % + 20,2 %

0
TFPB TEOM CFE CVAE TASCOM VT IFER
(estim.) (estim.)

2013 2014 2015 2016

Ô Au sein du département du Var, le montant de la fiscalité locale


économique a progressé de 5,6 % sur la période 2014-2016 contre + 6,8 %
en Provence-Alpes-Côte d’Azur et + 6,5 % en France.
Ô La fiscalité locale par salarié a quant à elle augmenté de 3 % sur la
période 2014-2016 contre + 4,2 % en Provence-Alpes-Côte d’Azur et
+ 4,6 % en France.

100
Fiscalité locale des entreprises : un échec français

Montant des taxes au fil des ans et pourcentage d’évolution 2015/2016

Vaucluse
140 000

120 000 – 0,0 %

100 000

+ 1,0 % + 1,5 %
80 000

60 000

40 000
+ 6,0 %

+ 1,6 %
20 000
+ 1,0 %
+ 7,3 %
0
TFPB TEOM CFE CVAE TASCOM VT IFER
(estim.) (estim.)

2013 2014 2015 2016

Ô Au sein du département de Vaucluse, le montant de la fiscalité locale


économique a progressé de 6,1 % sur la période 2014-2016 contre + 6,8 %
en Provence-Alpes-Côte d’Azur et + 6,5 % en France.
Ô La fiscalité locale par salarié a quant à elle augmenté de 5,1 % sur la
période 2014-2016 contre + 4,2 % en Provence-Alpes-Côte d’Azur et
+ 4,6 % en France.

101
Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

Méthodologie, sources et retraitement des données du baromètre

Les données fiscales sont issues de l’administration fiscale : données


REI pour 2016 et état 1389, état 1253/1259 (compensation relais TP)
pour les années antérieures.

La taxe foncière sur les propriétés bâties pesant sur les entreprises
a été approchée (les bases ne distinguant pas les parts relatives des
personnes privées et des entreprises) : estimation de la base des entre-
prises par déduction (en déduisant la part des bases correspondant à la
taxe d’habitation).

La même démarche a été adoptée pour la taxe d’enlèvement des ordures


ménagères (TEOM).

Certaines taxes donnent lieu à dégrèvement (CVAE). L’affectation


de ces dégrèvements n’étant pas connue sur les différentes échelles
retenues pour le baromètre (départements, intercommunalités), le
montant de fiscalité locale retenue intègre ces dégrèvements. Ce qui
veut dire que les montants affichés reflètent ce qui est effectivement
perçu par les collectivités territoriales.

La taxe versement transport qui est appliquée sur les territoires dotés
d’autorité organisatrice du transport (AOT) et dont l’impact peut
être très fort (jusqu’à 2,85 % de la masse salariale des entreprises d’au
moins 11 salariés pour l’année 2016) a été prise en compte par rapport
au département de rattachement de l’AOT. Si une AOT est présente
sur deux départements, le montant de VT est rattaché au département
de référence.

S’agissant de l’indice des taux appliqués aux valeurs locatives pour la


CFE, TFPB et la TEOM, il convient de noter qu’un abattement de
30 % est appliqué sur les valeurs locatives des immobilisations indus-
trielles. Si l’indice est bien pertinent pour comparer les politiques des
territoires, il ne peut être utilisé tel quel pour identifier le montant de
fiscalité portant sur les valeurs locatives.

Les données relatives à l’imposition IFER sont incomplètes pour la


déclinaison infrarégionale (et pour certaines natures d’IFER). Au
niveau départemental, l’IFER est disponible hors part régionale.

102
Fiscalité locale des entreprises : un échec français

Nos propositions

En l’espace de trente ans, la décentralisation a sécrété une confusion institu-


tionnelle que ses concepteurs n’avaient certainement pas anticipée, pénalisant
aussi bien nos concitoyens et nos entreprises que le fonctionnement même
des services publics. Point archétypal de ce maelström indéchiffrable, le
millefeuille fiscal local français se caractérise par un empilement de taxes
auquel s’ajoute un enchevêtrement entre niveaux de collectivités, et ce sans
nécessaire connexion avec leurs compétences. Sa complexité kafkaïenne fait
dès lors l’objet d’un consensus aujourd’hui bien établi. Ainsi, comme le résu-
mait en 2009 avec clarté le comité Balladur pour la réforme des collectivités
locales, « il en résulte une perte d’efficacité pour l’action publique et pour les usagers
des services publics, un coût élevé pour le contribuable et un manque de transparence
pour l’électeur »426.

Or, comme nous l’avons constaté au fil de ces pages, si elle ne suscite pas un
enthousiasme débordant dans l’opinion et peut même réveiller des craintes
pavloviennes chez certains élus, la refonte de ce système « multi-couches »
constitue pourtant un enjeu majeur, indispensable à la fois au passage à
l’âge adulte de notre bloc territorial ainsi qu’à la compétitivité de nos
entreprises. Sans s’enfermer dans une stricte vision comptable et donc loin
de se borner uniquement à des considérations d’ordre technique, ce débat
– éminemment politique – ne saurait éclipser ni la nécessaire réforme de
notre millefeuille territorial sur lequel est adossé le millefeuille fiscal, ni
la question de fond qui a trait à l’adéquation entre recettes et compétences
des collectivités ; une question généralement occultée lors des vagues
successives de décentralisation au cours desquelles le législateur a mani-
festement préféré le saupoudrage à la spécialisation, ajoutant ainsi de la
confusion à l’éparpillement, de l’incohérence à l’illisibilité.

En effet, parce qu’une partie des compétences des administrations locales


reste exercée sur plusieurs strates voire partagée avec l’État ou des opérateurs
publics – générant de facto des flux de financements croisés et des surcoûts de
gestion –, il n’est pas rare, comme nous l’avons vu plus haut, qu’un même impôt
local soit partagé entre communes, intercommunalités, départements et/ou
régions ; diluant ce faisant l’identification de la responsabilité de la pression
fiscale locale. S’il apparaît patent que la simplification du millefeuille fiscal est
indispensable, la reconnexion entre nature des impôts et types de compétences
constitue, quant à elle, un impératif tout aussi nécessaire et naturellement
corrélé, surplombant le seul débat sur la simplification.

426
Comité pour la réforme des collectivités locales. « Il est temps de décider ». Rapport au président de la République.
5 mars 2009.

103
Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

De la même manière, la carte administrative tricolore se doit de répondre à


la nouvelle géographie des inégalités qui se dessine depuis plusieurs années
sous la pression notamment de la dynamique métropolitaine. Dépassant le
principe de péréquation, il en va de l’essence même de la décentralisation et
de la concordance entre production de services publics et spécificités terri-
toriales. Parce que l’uniformité est susceptible de constituer un obstacle à
l’efficacité de l’action publique, la décentralisation exige donc dans la pratique
du « sur-mesure ». Sans une prise de conscience réelle et une action détermi-
née, les mutations en cours tracent inexorablement le visage d’une France
duale – avec le lot d’inégalités territoriales qu’elle suppose – où se côtoient des
aires urbaines aux avant-postes de la mondialisation et de l’autre des terri-
toires beaucoup plus distanciés voire éclipsés, réceptacles des mécanismes de
péréquation et des transferts sociaux, portés essentiellement par l’économie
résidentielle. En toile de fond, l’enjeu du maintien voire du renforcement de notre
contrat social se pose ainsi avec acuité. En effet, si la réflexion sur la refonte de la
fiscalité locale économique est indissociable de la question de la compétitivité
des entreprises tricolores dans la globalisation ou celle du redressement de notre
balance commerciale, elle renvoie aussi lato sensu aux enjeux de demain quant
aux nouveaux équilibres sociaux français. Le mouvement des « gilets jaunes »
qui secoue notre pays depuis cet automne met en relief avec force ces enjeux et
la souffrance sociale dans laquelle ils s’enracinent.

En parallèle, la question du positionnement des collectivités vis-à-vis de


l’État doit impérativement être posée ; les premières ne pouvant pour l’heure
s’affranchir du second, dont la voilure des concours financiers se réduit
pourtant à vitesse grand V depuis plusieurs années. La suppression pro-
gressive de la taxe d’habitation427 par l’actuel gouvernement en constituant
le point d’orgue. Autrement dit, il s’agit de redéfinir le « qui fait quoi » local
et d’inventer une nouvelle grammaire des relations État-collectivités, gage
d’une décentralisation (enfin) mature, émancipée de la tutelle encombrante
de son créateur.

Meilleure gestion des finances publiques locales et des ressources humaines,


meilleure répartition des compétences, meilleure efficacité de l’action
publique territoriale, redéfinition des relations avec l’État, réforme et
réduction de la fiscalité locale économique, simplification administrative,
hausse des investissements et co-construction de la norme ; telles sont les

427
 a taxe d’habitation est un impôt perçu uniquement par le bloc communal (municipalités et intercommu-
L
nalités à fiscalité propre) pour un produit total de 23,7 Mds € en 2017, soit 22 % de leurs recettes de fonction-
nement (21 % pour les communes et 25 % pour les EPCI). Pour une analyse de l’impact de cette mesure, voir
notamment l’article des économistes Pierre Madec et Mathieu Plane réalisé pour l’OFCE : « Exonération de
taxe d’habitation : quel impact de la réévaluation des seuils ? ».

104
Fiscalité locale des entreprises : un échec français

principales ambitions d’une réforme en profondeur de notre millefeuille


administratif. Cette réforme, pour être menée à bien, devra dépasser les
conservatismes qui ont trop longtemps figé notre société, jusqu’à refroidir
voire éteindre tout espoir de changements de grande ampleur et refermer
tout débat.

Placées sous le signe d’un volontarisme sans œillères ni pessimisme, les


20 propositions que nous formulons infra ne se résignent pas à l’inaction.
Sans ignorer l’essentiel – à savoir que l’« État-providence » est plus que jamais
à bout de souffle –, elles ambitionnent au contraire de conjurer l’ « exception
française » en faisant de notre millefeuille territorial et fiscal une organisation
simplifiée et agile, délestée de ses scories et mise enfin pleinement au service
de nos concitoyens et de nos entreprises, et ce en passant d’une logique de
big bang permanent à une logique du cousu main. Dans l’esprit de la « Big
Society »428 théorisée en 2010 par David Cameron429 et du « Localism
Act »430 adopté un an plus tard431, ce « pacte girondin » vise à opérer une
révolution copernicienne de notre manière d’appréhender l’action publique,
et ce en redonnant confiance et marge de manœuvre aux élus locaux et à la
société civile pour faire de la démocratie « par le bas ». Seul remède pour
sortir la France de ses immobilismes et la remettre en mouvement !

428
 urant sa campagne en 2010, David Cameron a présenté un projet de société baptisé « Big Society » partant
D
du constat de l’érosion de l’État-providence britannique (« Welfare State ») et visant notamment à redonner
sa place à la société civile ainsi qu’à toutes les cellules qui la composent : entreprises, associations, familles,
communautés religieuses, sociétés philanthropiques, etc. Ce faisant, par un système de contractualisation
avec l’administration centrale, ce projet ambitionnait de confier davantage de pouvoir de décisions aux éche-
lons locaux, aux citoyens et au secteur privé dans des domaines variés tels que la sécurité, l’environnement,
les services locaux ou la propreté. Comme le souligne l’Institut de l’entreprise, « l’originalité du discours sur la
Big Society consiste à chercher un remède à ces maux dans les ressorts de la société elle-même, plutôt que
dans le renforcement de l’État ou l’accroissement de la dépense publique ».
429
Institut de l’entreprise. Royaume-Uni, l’autre modèle ? La Big Society de David Cameron et ses enseigne-
ments pour la France. Notes de l’Institut, mars 2014.
430
Voté fin 2011, le « Localism Act » a pour objectif d’octroyer davantage de pouvoirs qui étaient précédemment
administrés par le gouvernement central britannique aux autorités locales, aux entreprises sociales ainsi qu’à
la société civile dans son ensemble.
431
Communities and Local Government. A plain English guide to the Localism Act. 2011.

105
Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

Pour une organisation territoriale de la République plus autonome et rationalisée

Proposition n°1

Fusionner les communes de moins de 1 000 habitants et faire de l’échelon


municipal le maillon fort de notre architecture territoriale
Épicentre de l’organisation administrative locale auquel est accolée une
image d’Épinal qui estampe l’identité de l’action publique territoriale et
à laquelle les Français sont viscéralement attachés432, la France dispose
– avec ses 35 357 communes – d’un maillage municipal supérieur à celui
des États-Unis, représentant à lui tout seul 40 % des communes de l’Union
européenne. Ainsi, en moyenne, une municipalité tricolore compte environ
1 800 habitants contre 5 500 en Europe et 55 000 au Danemark, record
sur le Vieux continent433. De surcroît, symbole notoire du millefeuille
municipal français, près de 32 000 communes comptent moins de 2 000
habitants et 18 783 en recensent moins de 500. Une anomalie que l’inter-
communalité n’est pas parvenue à corriger, venant au contraire – comme
l’explique l’OCDE – « ajouter un niveau supplémentaire à une organisation
territoriale déjà complexe »434. Or, nombreux sont nos voisins européens à
avoir fortement rationalisé leur carte communale ces dernières décennies.
L’Allemagne est ainsi passée en trente ans de plus de 30 000 municipalités
à seulement 11 220 aujourd’hui, la Finlande a divisé par trois le nombre de
ses communes tandis que la Belgique l’a divisé par quatre et la Suède par
dix435. Or, dans le sillon des préconisations formulées par l’OCDE depuis
plusieurs années436 et à l’appui des statistiques réalisées par la DGCL, la
Fondation iFRAP affirme que la fusion des 18 783 communes de moins de
500 habitants représente un potentiel d’économies de 1,36 Md €437.

Dans ce contexte, à la lumière des réformes engagées par la majorité des


pays de l’OCDE et eu égard à l’essor combiné de l’intercommunalité et du
fait métropolitain, nous proposons de fusionner les communes de moins de
1 000 habitants (à l’exception de celles situées en zone de montagne). Cette
réforme permettrait de rationaliser en profondeur la carte territoriale

432
 elon un sondage Ipsos réalisé en 2016, 73 % des Français interrogés se disent attachés aux communes et à
S
leurs compétences.
433
OCDE. Études économiques de l’OCDE. Évaluation et recommandations : France 2013. 2013.
434
Idem
435
Rappelons que l’Allemagne compte aujourd’hui 11 220 communes pour 83 millions d’habitants, l’Italie en
recense 8 071 pour 60 millions d’habitants, l’Espagne 8 115 pour 47 millions d’habitants, le Royaume-Uni
406 pour 66 millions d’habitants, la Suisse 2 352 pour 8,4 millions d’habitants, la Suède 290 pour 10 millions
d’habitants, etc.
436
À travers plusieurs de ses rapports, l’OCDE a plaidé pour la suppression des petites communes françaises afin
d’assainir les finances publiques et rationaliser l’organisation territoriale hexagonale.
437
Fondation iFRAP. Pourquoi il faut fusionner les petites communes et « mutualiser » les plus grosses. 20 janvier 2016.

106
Fiscalité locale : un échec français

hexagonale et de mettre un terme aux « surcoûts » que génèrent ces petites


administrations publiques. Si le législateur a, à plusieurs reprises depuis
2010438, prévu des incitations financières pour encourager les fusions de
communes, force est de constater que celles-ci demeurent marginales. C’est
pourquoi, nous préconisons de fixer par la loi un seuil minimal d’habitants
(fixé à 1 000)439 par municipalité en incitant, ce faisant, à la création de
communes nouvelles.

Proposition n°2

Transférer aux métropoles les compétences des départements


Au 1er janvier 2015, la loi MAPTAM a créé la métropole de Lyon, fruit
de la transformation de la communauté urbaine lyonnaise réunissant
59 communes et se substituant, de jure, sur le périmètre métropolitain au
département du Rhône, replié sur son territoire non urbain. En effet, la
nouvelle métropole exerce désormais l’ensemble des compétences dévolues
au conseil départemental rhodanien (action sociale, voirie, collèges, etc.) et
constitue, ce faisant, l’unique exemple en France de transfert de la totalité
des attributions d’un département à une autre collectivité sur son périmètre.

Cette illustration de simplification du millefeuille territorial incarne,


selon nous, l’exemple à suivre et que nous préconisons dès lors de du-
pliquer pour les 21 autres métropoles françaises. Promesse de campagne
d’Emmanuel Macron, ces fusions permettraient – au-delà de la nécessaire
rationalisation de la carte départementale – d’éviter les doublons, de
procéder à des économies d’échelle et de mieux coordonner les politiques
publiques locales suite à la logique de spécialisation introduite par les lois
MAPTAM et NOTRe. Aussi, afin de respecter au mieux la diversité des
réalités territoriales et dans l’esprit d’une décentralisation cousue main, les
fusions que nous proposons pourraient soit laisser coexister métropole et
département (modèle lyonnais), soit se traduire par une fusion complète de
ces deux structures440.

438
Il s’agit de la loi du 16 décembre 2010 et de la loi du 16 mars 2015.
439
À titre de comparaison, en Suède, depuis 1964, la loi a fixé un seuil minimal de 5 000 habitants par commune.
440
Notons au passage qu’en vertu de l’article 72 de la Constitution, la substitution de la métropole au

département n’est pas constitutive d’une inconstitutionnalité. En revanche, la disparition totale des conseils
départementaux nécessiterait quant à elle une révision constitutionnelle.

107
Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

Proposition n°3

Rétablir le « conseiller territorial » fusionnant élus régionaux et


départementaux
Le millefeuille territorial tricolore a corrélativement accouché d’un autre
millefeuille : celui des élus locaux. En additionnant le nombre de parlemen-
taires, de maires, de conseillers départementaux, régionaux et municipaux ou
encore d’élus intercommunaux, la France compte plus de 640 000 mandats
politiques, soit un mandat pour 104 habitants. Un taux de représentation
4,5 fois supérieur à celui des États-Unis qui compte un mandat pour 614 ha-
bitants (contre un mandat pour 500 habitants en Allemagne et un mandat
pour 2 603 habitants au Royaume-Uni). Symbole notoire, un électeur sur 85
est conseiller municipal dans l’Hexagone. S’il convient de préciser qu’une
grande partie de ces élus est bénévole, la facture totale des indemnités at-
teint tout de même 2 Mds € par an.

Réforme initialement mise en place par la loi du 16 décembre 2010 suite aux
conclusions du comité Balladur sans pour autant n’avoir jamais vu le jour,
le « conseiller territorial » envisageait de fusionner élus départementaux et
régionaux afin de mieux coordonner l’action publique locale. Dans l’optique
de réduire le « millefeuille électif » tout en s’orientant vers une logique de
couple de collectivités, nous préconisons dès lors de rétablir le « conseiller
territorial », élu pour cinq ans au scrutin uninominal majoritaire à deux
tours. Afin d’entrer en cohérence avec notre proposition n°2 formulée supra,
le rétablissement de cet élu siégeant au sein de deux assemblées ne concer-
nerait naturellement que les territoires non métropolitains.

Proposition n°4

Limiter à 2 mandats consécutifs l’ensemble des mandats locaux


En plus du « millefeuille électif » décrit plus haut, la professionnalisation
de la vie politique constitue l’un des attributs saillants de la vie démocra-
tique française, souvent regardé avec circonspection depuis l’étranger ainsi
que par nos concitoyens. Dès lors, à la suite de l’interdiction du cumul des
mandats introduite en janvier 2014 et afin de favoriser l’accès de nouveaux
élus aux différentes charges publiques et ainsi mettre fin à la tradition des
« carrières politiques » qui a tendance à bloquer l’émergence de nouveaux
profils, nous proposons de limiter le cumul des mandats locaux à seulement
deux mandats successifs, complets et identiques.

108
Fiscalité locale des entreprises : un échec français

Alors que la loi pour la confiance dans la vie politique promulguée le


15 septembre 2017 prévoit une limitation à trois mandats, le président de
la République est, quant à lui, soumis à une limitation à seulement deux
mandats successifs depuis la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008.
Parce qu’il apparaît indispensable de faire « respirer » notre démocratie
en en renouvelant à intervalles réguliers son personnel politique tout
en réduisant le « millefeuille électif » français, nous proposons dès lors
d’élargir cette disposition aujourd’hui propre au chef de l’État à l’ensemble
des mandats électifs locaux ; à l’exception néanmoins des communes de
moins de 10 000 habitants qui font pour bonne part face à une forme de
« crise de vocation »441 des élus, récemment mise en exergue par une enquête
du CEVIPOF442.

Proposition n°5

Supprimer la fonction publique territoriale


La fonction publique statutaire, dotée de la garantie de l’emploi à vie, est
aujourd’hui minoritaire en Europe et dans la zone OCDE. La France se
singularise ainsi par son faible recours aux contractuels (17,2 % du total en
2015), ses trois fonctions publiques et son taux élevé de fonctionnarisation
de ses agents publics établi à 81 % contre seulement 36 % en Allemagne,
15 % en Italie, 13 % au Danemark, 10 % en Suède et 9 % au Royaume-
Uni. Ces pays, ancrés dans un modèle dualiste, ont dès lors massivement
recours aux contrats de droits privé ou public à durées déterminée ou
indéterminée ; réservant le statut de fonctionnaire assorti de l’emploi à
vie essentiellement aux missions régaliennes (police, justice, diplomatie,
défense, etc.). La Suisse, quant à elle, est même allée plus loin en décidant
en 1999 – via une votation – d’abroger le statut de fonctionnaire443.

Or, représentant 35 % de l’emploi public total, forte de 1,89 million


d’agents, la fonction publique territoriale n’a eu de cesse de s’épaissir de-
puis sa création en 1984, et ce bien souvent en totale déconnection avec les
transferts de compétences. En effet, près de 35 000 agents publics locaux
ont été recrutés en moyenne chaque année entre 1990 et 2010 par le bloc
territorial, expliquant en grande partie la forte progression des dépenses

441
 ’après une enquête du CEVIPOF parue en novembre 2018, 55 % des maires de communes de moins de
D
500 habitants envisagent l’abandon de leur mandat (contre 28 % pour les maires des municipalités de 5 000 à
10 000 habitants et seulement 9 % pour celles de plus de 30 000 habitants).
442
CEVIPOF. Les maires de France : entre résignation et incertitude. Enquête 2018. Sciences Po, Observatoire de
la démocratie de proximité, AMF-CEVIPOF, novembre 2018.
443
Le Point. Le jour où les Suisses mirent fin à leur fonction publique… 18 juin 2018.

109
Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

de fonctionnement des collectivités. En outre, même si celui-ci est crois-


sant, le recours aux contractuels y demeure lacunaire (18,8 % en 2017)444
comparé à nos voisins européens et de la zone OCDE.

Dans ce contexte, trente-cinq ans après sa mise en œuvre, nous proposons


de supprimer la fonction publique territoriale. Si naturellement le statut
des fonctionnaires territoriaux actuellement en poste resterait inchangé,
chaque nouveau recrutement par une collectivité devra désormais s’opérer
sur la base du droit commun par le biais d’un contrat de travail semblable à
celui des salariés du secteur privé. Une mesure qui permettrait de réduire
le nombre de fonctionnaires et donc, corrélativement, de rationaliser les
dépenses de notre sphère publique et a fortiori des collectivités locales.

Une proposition, en outre, de nature à responsabiliser davantage les titu-


laires de charges publiques au sein de nos collectivités. En effet, comme
l’ont notamment mis en lumière la Fondation iFRAP et Sofaxis dans plu-
sieurs de leurs travaux respectifs, l’absentéisme dans la fonction publique
territoriale a progressé de 28 % en dix ans445 et de 3 % entre 2016 et 2017446.
Il se révèle ainsi bien supérieur à celui observé dans le secteur privé. Aussi,
prenant en exemple la ville d’Amiens, l’iFRAP révèle que les fonction-
naires titulaires s’arrêtent presque quatre fois plus (49,3 jours) que leurs
homologues contractuels (13,7 jours). Ce même enjeu de responsabilité
se pose également concernant la question du temps de travail. Alors que
l’obligation annuelle est fixée à 1 607 heures, un rapport commandé en
2016 par Manuel Valls, alors Premier ministre, révèle que la moyenne
s’établit à seulement 1 584 heures au sein de nos collectivités locales447.
Des durées effectives de travail inférieures à la durée légale et qui sont dès
lors génératrices de surcoûts élevés pour les collectivités448.

444
DI FOLCO, Catherine. Avis sur le projet de loi de finances pour 2019. Tome VI. Fonction publique. Sénat,
22 novembre 2018.
445
Fondation iFRAP. Temps de travail et absentéisme : un tournant gouvernemental bienvenu mais bien tardif…
25 avril 2017.
446
Sofaxis. Regard sur les premières tendances 2017 des absences pour raison de santé dans les collectivités
territoriales. Juin 2018.
447
LAURENT, Philippe. Rapport sur le temps de travail dans la fonction publique. Rapport remis au Premier ministre,
mai 2016.
448
D’après la Cour des comptes, à titre d’exemple, la communauté d’agglomération de Carcassonne a payé en
2013 plus de 15 000 heures non travaillées pour un coût moyen estimé à 350 000 €, soit l’équivalent de près
de dix temps plein et environ, 3 % de la masse salariale.

110
Fiscalité locale des entreprises : un échec français

Proposition n°6

Simplifier l’organisation administrative locale en matière d’aides


économiques en donnant plus de poids aux régions ainsi qu’aux
organisations consulaires et patronales
Innovation majeure introduite par les lois Defferre, le 1er acte de la
décentralisation a permis aux collectivités locales d’intervenir en faveur du
développement économique. Or, avant la loi du 13 août 2004 qui conféra
aux régions un rôle de coordination en la matière puis la loi NOTRe
qui, en 2015, consacra leur chef de filât, force est de reconnaître que
les dispositifs territoriaux en faveur des entreprises ont été largement
multipliés et sédimentés, sans hiérarchie entre les collectivités ni limites
précises entre les domaines d’intervention. Autrement dit, les aides des
collectivités au développement économique avaient tous les atours du
millefeuille. Millefeuille auquel se greffent par surcroît les interventions de
l’État via ses services déconcentrés ainsi qu’un cortège d’opérateurs publics
ou parapublics tels que les chambres consulaires, la Caisse des Dépôts et
Consignations ou encore Bpifrance, etc. Évalués au total entre 2 500 et 5 000
par la Cour des comptes449, ces dispositifs économiques recouvriraient un
champ global d’intervention annuelle estimé à près de 110 Mds €. Or, et
l’Inspection générale des finances450 et la Cour des comptes451 ont, à travers
deux enquêtes distinctes, pointé du doigt le déficit de priorisation de ces
interventions, leur manque de lisibilité et d’évaluation ainsi que la mauvaise
articulation régnant entre la myriade d’acteurs publics parties prenantes.

Dans ce contexte, à l’aune du nouveau paysage institutionnel dessiné par les


lois MAPTAM et NOTRe, une reconsidération totale des dispositifs d’aides
aux entreprises s’impose avec acuité. S’inscrivant dans le cadre de la récente
clarification des compétences entre collectivités et en vertu du rôle moteur
en la matière joué désormais par les régions, nous préconisons de rationaliser
la carte des agences économiques des collectivités locales en engageant une
réflexion de fond sur leur organisation, leur gouvernance et leurs missions.
Le millefeuille des agences de développement économique doit en effet
être refondé, en renforçant le leadership des régions ainsi qu’en incluant
davantage les organisations consulaires et patronales car qui mieux que les
entrepreneurs pour accompagner les entreprises dans nos territoires !

449
Inspection générale des finances. Pour des aides simples et efficaces au service de la compétitivité. Rapport
n°2013-M-016-02, juin 2013.
450
Idem
451
Cour des comptes. Les aides des collectivités territoriales au développement économique. Rapport public
thématique, novembre 2007.

111
Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

Proposition n°7

Permettre aux collectivités locales d’adapter certaines normes à leurs


spécificités territoriales
Les lois successives de décentralisation ont fixé un cadre uniforme, et ce
quels que soient les territoires concernés. Cette uniformité apparaît au-
jourd’hui de plus en plus inadaptée face à la diversité de nos territoires et de
leurs besoins. L’action publique locale ne peut en effet disposer des mêmes
carcans dans une commune rurale de moins de 500 habitants, au cœur d’une
métropole ou au sein d’une ville périurbaine d’outre-mer. La mise en œuvre
de politiques publiques territoriales différenciées – décidées moins par le
législateur à Paris que par les collectivités elles-mêmes dans leurs territoires
respectifs – semble ainsi aller dans le sens de l’Histoire et suivre la volonté
exprimée récemment par le président de la République, à savoir celle d’une
«  décentralisation sur-mesure »452 fondée sur « l’intelligence des territoires »453
que nous appelons également de nos vœux et qui irrigue l’esprit de cette
note et de nos propositions.

Dans ce contexte, dans les pas de la faculté d’adaptation normative déjà


octroyée aux régions et départements ultra-marins aux termes de l’article 73
de notre Constitution, nous proposons de permettre aux collectivités
métropolitaines d’appliquer les lois et les règlements auxquels elles sont
assujetties de manière différenciée pour tenir compte de leurs contraintes
et caractéristiques propres. Cette extension à l’ensemble du bloc territorial
de la spécificité des collectivités d’outre-mer permettrait ainsi de libérer
l’initiative et l’innovation des élus locaux et de mieux adapter l’action
publique aux particularités des territoires et aux attentes de leurs habitants.

Proposition n°8

Accélérer et amplifier la rationalisation de l’organisation territoriale


de l’État
Résultat des politiques de déconcentration amorcées à l’orée des années
1960 et renforcées par la réforme de 1992, la présence de l’État dans les
territoires apparaît aujourd’hui pléthorique, et ce en dépit de la série de
réformes (RGPP, RéATE, MAP) engagées ces dernières années afin de la

452
 xtrait du courrier du président de la République adressé à l’ensemble des maires de France le 16 novembre 2018.
E
453
Idem

112
Fiscalité locale des entreprises : un échec français

rationaliser. Malgré cela, avec ses 101 préfectures et 233 sous-préfectures


auxquels s’additionnent les 128 préfets sans affectation ainsi que la kyrielle
de directions régionales et départementales afférentes, l’organisation ter-
ritoriale de l’État souffre d’obésité au regard de la carte des collectivités
locales sur laquelle elle se superpose et des compétences toujours plus ac-
crues dont les lois de décentralisation ont doté ces dernières. Or, comme le
rappelait en 2005 le rapport Pébereau, les effectifs de l’État ont progressé
de 14 % entre 1982 et 2003, soit 310 000 agents publics supplémentaires454.

Parce qu’il n’a plus le monopole de l’intérêt général, il convient ce faisant


de revoir d’urgence et en profondeur l’atlas et le périmètre d’intervention
de l’État afin de réduire le millefeuille qui prévaut toujours et d’éviter les
doublons – encore trop nombreux – avec les collectivités dont il doit être
un partenaire et non un jumeau. En effet, la porosité des frontières entre
compétences de l’État et compétences des administrations locales obère
l’efficacité de l’action publique et nuit à la compétitivité des entreprises
ainsi qu’à la maîtrise des finances publiques. Si de multiples réflexions ont
d’ores et déjà été menées depuis plusieurs décennies afin de redéfinir et
redimensionner les missions de l’État face à l’essor de la décentralisation455
et parallèlement de la construction européenne, force est de constater
qu’aucun véritable aggiornamento n’a été mis en œuvre de manière effective
par les pouvoirs publics.

Dans ce contexte, faisant suite au rapport « Action publique 2022 » de juin


2018, la circulaire du Premier ministre du 24 juillet 2018 va dans la bonne
direction en jetant les bases d’un État plus adapté à la décentralisation,
délesté de son embonpoint, « sans redondance inutile et coûteuse » pour re-
prendre les termes d’Édouard Philippe456. Néanmoins, afin de concevoir la
réforme la plus efficace et cohérente possible, il convient d’élargir la focale
sur l’ensemble des services et opérateurs de l’État dans les territoires et
sur leur méthode de gestion interne. Les réflexions doivent dès lors se
concentrer à la fois sur la révision du périmètre de l’État et sur ses relations
avec les collectivités, mais également sur les nécessaires mutualisations des
fonctions support des services déconcentrés. Aussi, si le rôle de l’État doit

454
PÉBEREAU, Michel. Rompre avec la facilité de la dette publique. Pour des finances publiques au service de
notre croissance économique et de notre cohésion sociale. Rapport remis au ministre des Finances. 2005.
455
Citons pêle-mêle et de manière chronologique mais non exhaustive les rapports Guichard (1976), Hoeffel (1991),
Hauswirth (1995), Mauroy (2000), Mercier (2000), Pébereau (2005), Mariton (2005), Didier-Urvoas (2008),
la commission Attali (2008), le comité Balladur (2009), les rapports Krattinger-Gourault (2009), Hervé (2011),
Lefèvre (2011), Krattinger-Raffarin (2013), Lambert-Malvy (2014), Gatel-Manable (2016), Collombat (2016),
Cesarini-Viala-Vuilletet (2018) ainsi que les nombreux travaux de la Cour des comptes et de think tanks qui traitent
de près ou de loin de ces enjeux.
456
Circulaire du Premier ministre en date du 24 juillet 2018 concernant l’organisation territoriale des services publics.

113
Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

être réaffirmé dans les domaines régaliens, il doit à l’inverse être fortement
allégé pour ses autres missions compte tenu de l’intervention croissante
des collectivités locales. En définitive, il s’agit moins d’organiser un désen-
gagement de l’État que de redéfinir en profondeur ses finalités.

Proposition n°9

Confier aux CTAP et à un collège d’entrepreneurs associé une mission


annuelle de simplification normative en faveur du développement
économique territorial
Aujourd’hui, environ 400 000 normes régissent le quotidien des collectivi-
tés territoriales et les corsètent dans un carcan juridique parfois coûteux
et souvent nuisible au développement économique. En 2017, selon le
Conseil national d’évaluation des normes, pas moins de 36 lois ont été
promulguées, 1 776 décrets publiés, 8 913 arrêtés signés et 1 300 circu-
laires diffusées457. Cette « incontinence normative » – selon la formule choc
employée par Jean-Claude Boulard458, ancien maire du Mans et auteur d’un
rapport sur le sujet avec Alain Lambert459 remis au Premier ministre en
septembre 2018 – tétanise dès lors l’initiative locale et génère une facture
estimée à 1 Md € par an460. Or, comme l’affirment avec force Jean-Claude
Boulard et Alain Lambert dans l’introduction de leur analyse, la France
se meurt d’un juridisme excessif et d’un droit érigé en réponse à tous les
problèmes ; une « croyance folle »461 source en cascade d’une avalanche de
dysfonctionnements qui entrave la liberté d’action des élus locaux et obère
la compétitivité de nos entreprises.

Pour renverser la vapeur et enrayer ce « fléau normatif », nous proposons dès


lors de confier aux conférences territoriales de l’action publique ainsi qu’à un
collège d’entrepreneurs locaux une mission de simplification normative. Ces
missions – dont les travaux seraient rendus publics via un rapport annuel
– auraient pour objectif de proposer aux exécutifs territoriaux des mesures
concrètes visant à simplifier le millefeuille normatif local.

457
BOULARD, Jean-Claude, LAMBERT, Alain. Mission pour la simplification des normes applicables aux collecti-
vités territoriales. Rapport remis au Premier ministre, 13 septembre 2018.
458
Décédé dans la nuit du 31 mai au 1er juin 2018, Jean-Claude Boulard n’a pu aller au terme de la mission.
459
Président du Conseil national d’évaluation des normes (CNEM), Alain Lambert est également vice-président
du conseil départemental de l’Orne, ancien sénateur et ancien ministre du Budget (gouvernement Raffarin).
Avec Didier Migaud (aujourd’hui premier président de la Cour des comptes), il est considéré comme l’un des
pères fondateurs de la LOLF (loi organique relative aux lois de finances).
460
BOULARD, Jean-Claude, LAMBERT, Alain. Mission pour la simplification des normes applicables aux collecti-
vités territoriales. Rapport remis au Premier ministre, 13 septembre 2018.
461
Idem

114
Fiscalité locale des entreprises : un échec français

Proposition n°10

Faire des intercommunalités de véritables outils de mutualisation au


service des usagers
- 39% en un an ! Suite à la mise en place de la loi NOTRe (qui a fait passer
le seuil minimal de 5 000 à 15 000 habitants462), le nombre d’EPCI est
passé, sous la houlette des préfets, de 2 062 à 1 266 entre 2016 et 2017463.
Un modèle de rationalisation sur le papier et dont la précédente majorité
peut s’enorgueillir mais qui masque en réalité des effets pervers, pointés
du doigt à l’unisson par les magistrats financiers de la Cour des comptes,
les spécialistes des questions territoriales comme par les élus eux-mêmes.
Ainsi, comme l’affirme Françoise Navarre, maître de conférences à l’Insti-
tut d’urbanisme de Paris, « contrairement à ce qui était escompté, la montée en
charge des regroupements intercommunaux ne s’est pas accompagnée d’économies
budgétaires. Au contraire, la taille du secteur public local a crû et avec elle, les
taux de taxation »464. Aussi, en plus de ne pas avoir supprimé de couche au
millefeuille, la réforme territoriale a in fine créé des « mégastructures »
que les élus à la manœuvre jugent hors-sol, déconnectés des réalités du
terrain465. Pour preuve, l’on recense aujourd’hui 280 intercommunalités de
plus de 50 000 habitants (contre 233 en 2016) et 157 rassemblant plus
de 50 communes (contre trois fois moins en 2016)466. Si cet objectif de
rationalisation – indéniablement atteint par les préfets – apparaît louable
dans l’esprit, le resserrement de la carte intercommunale a, dans les faits,
atténué le lien de proximité avec les contribuables (citoyens et entreprises)
et compliqué l’intervention des EPCI d’après la Cour des comptes467.

Sans redessiner l’atlas des intercommunalités afin de privilégier la stabilité


à la graphomanie qui caractérise habituellement le législateur français,
nous préconisons toutefois de faire des EPCI de véritables outils de mu-
tualisation dotés d’une « logique client » vis-à-vis des contribuables sur le
modèle des groupements d’intérêt économique. La mutualisation ne doit
plus être uniquement un « choix politique » – comme le met en exergue
un rapport conjoint de l’Inspection générale des finances et de l’Inspection

462
Article 33 de la loi NOTRe.
463
Cette diminution s’est concentrée sur les communautés de communes (dont le nombre a reculé de 45 %).
464
NAVARRE, Françoise. Les métropoles, aux prises avec leurs réalités fiscales ? Géographie, économie, société,
volume 19, 2017/4
465
Les Échos. Intercommunalité : les ratés de la réforme territoriale. 22 novembre 2017.
466
Cour des comptes. Les finances publiques locales. Rapport sur la situation financière et la gestion des collectivités
territoriales et de leurs établissements publics. Octobre 2017.
467
Idem

115
Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

générale de l’administration468 – mais un impératif automatique de bonne


gestion devant à aboutir une plus grande qualité des services rendus aux
usagers ainsi qu’à une rationalisation des dépenses publiques locales. Il est
nécessaire, pour ce faire, de dépolitiser les intercommunalités – structures
de moyen et non organes politiques – tout en renforçant le lien communal,
maillon majeur de l’architecture territoriale.

Pour une fiscalité locale des entreprises plus simple et compétitive

Proposition n°11

Établir un « Pacte de confiance » entre les collectivités locales et les


entreprises
Sujet transversal par nature, la question de la fiscalité locale constitue
un enjeu majeur à la fois pour les collectivités territoriales et pour l’État
mais aussi naturellement pour les contribuables (citoyens et entreprises).
Le dynamisme avec lequel celle-ci a progressé ces dernières années ainsi
que l’opacité de son épais millefeuille et sa déconnection avec les compé-
tences des collectivités en font dès lors un sujet de premier plan, que la
suppression de la taxe d’habitation programmée au cours du quinquennat
ne fait que renforcer avec davantage de célérité.

Dans ce contexte, dans l’optique d’une plus grande co-construction des


politiques fiscales locales ainsi que, lato sensu, des stratégies économiques
territoriales, nous proposons d’établir un « pacte de confiance » entre les
entreprises et les collectivités locales. Fondé sur une relation partenariale
au service de la création de richesses et d’emplois, ce pacte aurait voca-
tion à systématiser l’implication des entrepreneurs dans l’élaboration des
textes régissant la fiscalité locale afin de mieux maîtriser cette dernière
et l’adapter aux réalités territoriales tout en veillant à sanctuariser les
dépenses d’investissement. En rupture avec les modus operandi passés, cette
démarche partenariale public/privé permettrait dès lors de co-construire
de manière intelligente et transparente la fiscalité locale de demain, as-
seyant ainsi sa légitimité et renforçant sa compétitivité.

468
Inspection générale de l’administration, Inspection générale des finances. La mutualisation au service des communes,
des intercommunalités et de leurs établissements. Mai 2015.

116
Fiscalité locale des entreprises : un échec français

Proposition n°12

Mettre en place un « moratoire fiscal »


En 2013, l’économiste Philippe Aghion, professeur au Collège de France,
plaidait dans les colonnes des Échos pour « un moratoire fiscal »469, enjoi-
gnant le président de la République d’alors à ne plus créer (ni augmenter)
d’impôt tout en compensant chaque dépense publique supplémentaire par
une réduction de dépense équivalente. Or, comme nous l’avons évoqué
plus haut, la France est championne d’Europe en matière de prélèvements
obligatoires et de dépenses publiques.

À cette pression fiscale – qui fragilise notre contrat social plus qu’elle ne
le raffermit – s’ajoute un millefeuille de taxes et impôts, autre singularité
nationale, qui complexifie le quotidien de nos entreprises. Or, comme le
souligne EY, la France ne parvient pas à enrayer sa frénésie en matière de
création fiscale. En effet, en 2018, huit taxes ont été créées contre seulement
trois supprimées470. Une tendance à la baisse certes – en 2012 quinze taxes
avaient été créées contre seulement une supprimée – mais qui ne témoigne
pas d’une véritable rationalisation du maquis fiscal. Dans le sillon de Philippe
Aghion, nous militons dès lors pour un « moratoire fiscal » se traduisant,
dans la pratique, par la fin des créations de taxe supplémentaire.

Proposition n°13

Renforcer le poids des régions et des métropoles en leur transférant


100 % de la CVAE
La loi NOTRe l’a gravé dans le marbre : les régions constituent désor-
mais les collectivités cheffes de file en matière économique. Ce leadership
s’enracine dans le SRDEII – schéma prescriptif – ainsi que dans la
mission conférée aux conseils régionaux d’octroyer des aides directes aux
entreprises471. Afin que ces derniers puissent faire face à ces nouvelles
compétences, la part de la CVAE472 dont ils sont récipiendaires – et qui

469
AGHION, Philippe. Il faut un moratoire fiscal. Les Échos, 13 novembre 2013.
470
EY. Observatoire des politiques budgétaires et fiscales. Points clés et perspectives. Janvier 2018.
471
 xtrait de l’article 3 de la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République
E
(NOTRe) : « Le conseil régional est seul compétent pour définir les régimes d’aides et pour décider de l’octroi
des aides aux entreprises dans la région. Dans le cadre d’une convention passée avec la région, la métropole
de Lyon, les communes et leurs groupements peuvent participer au financement des aides et des régimes
d’aides mis en place par la région ».
472
Le produit total de la CVAE s’est établi à 17,6 Mds € en 2017.

117
Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

représente pas moins de 93 % de leurs recettes – est ainsi passée de 25 %
à 50 % en 2017 (soit près de 9 Mds €), au détriment des départements
dépossédés de leurs missions d’appui aux entreprises473. Néanmoins, le
législateur n’a pas concédé aux régions l’exclusivité en la matière ; la loi
NOTRe permettant aux métropoles, aux communes et à leurs groupe-
ments de participer également au financement des entreprises « dans le
cadre d’une convention passée avec la région »474. De plus, en cas de désaccord
avec les projets de schémas régionaux, les métropoles ont la possibilité
d’adopter leurs propres documents stratégiques.

Dans ce cadre, poursuivant la logique de spécialisation engagée par la loi


NOTRe et afin de mettre en adéquation compétences et fiscalité, nous pro-
posons de réserver la CVAE au couple région-métropoles. Ayant perdu de sa
pertinence, la fraction dévolue aux départements se transformerait alors en
transferts d’impôt national (ex : TVA et/ou CSG). Dans ce contexte nouveau,
la part de la CVAE dédiée aux conseils régionaux passerait de 50 % à 70 %475
tandis que celle octroyée au bloc communal de 26,5 % à 30 % (la fraction de 3,5
points supplémentaires étant réservée exclusivement aux métropoles). Cette
nouvelle ventilation fiscale engendrerait ainsi une augmentation non négli-
geable des recettes fiscales (+ 3,49 Mds € pour les régions et + 0,9 Md € pour
les métropoles selon nos estimations)476 pour ces deux échelons mus en moteurs
du développement économique local par les dernières réformes territoriales.

Proposition n°14

Favoriser l’autonomie fiscale des régions en leur permettant de moduler


le taux de la CVAE
Si l’autonomie financière des collectivités locales a été consacrée dans la Consti-
tution477 via la réforme de 2003, ces dernières ne bénéficient pas de l’autonomie
fiscale. Pis encore, l’érosion de leurs recettes propres observée ces dernières an-
nées ne fait que renforcer la dépendance croissante des administrations locales
vis-à-vis des transferts de l’État478. De surcroît, le grand chantier de la réforme

473
 es conseils départementaux ne conservent que des capacités dérogatoires d’intervention dans le tourisme,
L
l’agriculture ou la forêt.
474
Extrait de l’article 3 de la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (cf. supra).
475
Pour rappel, la CVAE constitue la part la plus importante de la fiscalité directe perçue par les régions,
représentant 93 % de leurs recettes totales en 2017.
476
Nos estimations se fondent sur le fait qu’en 2017, le produit de la CVAE s’est établi à 17,6  Mds €. Dans ce
contexte, en se basant sur une CVAE stable, la nouvelle ventilation que nous proposons permettrait par
projection de faire passer la CVAE perçue par les régions de 8,84 Mds € à 12,32 Mds € (soit + 3,49 Mds € en
un an) et de 4,38 Mds € pour le bloc communal à 5,28 Mds € (soit + 0,9 Md €).
477
Article 72-2 de la Constitution.
478
GUENGANT, Alain. La constitution peut-elle garantir l’autonomie financière des collectivités territoriales ?
Revue d’économie régionale et urbaine, 2004/5.

118
Fiscalité locale des entreprises : un échec français

de la fiscalité locale ouvert par l’actuel gouvernement et dont la suppression


progressive de la taxe d’habitation constitue la tête de gondole fait planer la
perspective d’un affaiblissement du pouvoir fiscal des collectivités, allant ainsi à
contre-sens de la décentralisation effective dont la France a besoin. À l’étranger,
bien que les modèles varient fortement d’un pays à l’autre, certaines collectivités
– notamment en Europe du Nord – disposent d’une autonomie fiscale forte, leur
permettant de fixer assiettes et taux d’imposition locale.

Dans ce contexte, parce que nous considérons que l’érosion de l’autonomie


fiscale des régions observée ces vingt dernières années ne va pas dans le sens
d’une plus grande stimulation économique entre les territoires, nous préconi-
sons dès lors de laisser aux exécutifs régionaux la possibilité de moduler les
différents taux de la CVAE, et ce sans pour autant pouvoir franchir un seuil
maximal fixé par le législateur afin de se prémunir contre toute inflation fiscale.

Proposition n°15

Réduire le poids et la structure des impôts locaux sur la production


Selon la Fondation iFRAP, les deux tiers de la fiscalité supportée localement
par les entreprises proviennent d’impôts dits « de production »479 (CVAE,
CFE, TFPB, etc.)480, c’est-à-dire avant même que celles-ci aient réalisé les
moindres chiffres d’affaires et bénéfices. Prises ensemble, à savoir en agré-
geant les fiscalités nationale et locale sur la production, le montant global se
hisse dès lors en 2016 à 72,1 Mds €481 (contre 60,1 Mds en 2007 ; un chiffre
représentant le double de l’impôt sur les sociétés482). Une situation qui
place les entreprises tricolores dans une position extrêmement défavorable
par rapport à leurs concurrentes européennes puisque, comme le souligne
l’OFCE, les impôts sur la production sont en France deux fois supérieurs à
la moyenne de l’UE et sept fois plus élevés qu’en Allemagne483. Autrement
dit, véritable exception hexagonale puisque la France est l’un des deux seuls
pays européens – aux côtés de la Suède – où le poids des impôts de pro-
duction atteint de tels sommets484, cette « fiscalité avant chiffre d’affaires »
pénalise notre compétitivité et, a fortiori, nuit au développement d’un vaste
tissu français d’ETI sur le modèle du Mittelstand d’outre-Rhin.

479
Fondation iFRAP. Pour une nouvelle fiscalité locale. Société civile, n°191, juin 2018
480
Plus précisément, les quatre impôts sur la production payés par les entreprises sont la CVAE (13,3 Mds en 2016) et la
CFE (6,5 Mds €) formant la contribution économique territoriale (CET) à laquelle s’ajoutent la taxe sur le foncier bâti
(12,1 Mds €) et le versement transport (7,2 Mds €).
481
DUBIEF, Yves, LE PAPE, Jacques. La fiscalité de production. Rapport remis au Ministre de l’Économie et des Finances,
avril 2018.
482
L’impôt sur les sociétés s’est établi à 35,7 Mds € en 2017.
483 
OFCE. Impôt sur les sociétés : état des lieux et effets différenciés de la réforme. Policy brief n°38, 16 octobre 2018.
484
Les impôts de production représentent 3,2 % du PIB en France contre 1,6 % en moyenne dans la zone euro.

119
Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

Or, sur la période 2007-2016, les impôts de production – représentant 3,2 %


du PIB en 2016 contre 1,6 % en moyenne dans la zone euro – ont progressé
plus rapidement que la richesse nationale (19,9 % pour les premiers contre
14,2 % pour le PIB sur la période)485. Ce faisant, comme le met en relief le
rapport Dubief-Le Pape consacré à la fiscalité de production, entre 2007 et
2016, malgré la suppression de la taxe professionnelle intervenue en 2010,
les impôts sur la production ont augmenté de 11,9 Mds € en valeur absolue ;
une hausse tirée notamment par le dynamisme de la taxe sur le foncier bâti
(+4,3 Mds € sur la période), du versement transport (+2,17 Mds €) ainsi
que de la contribution économique territoriale (+19,8 Mds) venue remplacer
la TP et additionnant CVAE et CFE486. De surcroît, alors qu’au Royaume-
Uni seuls deux impôts représentent 80 % du produit total des impôts de
production (contre cinq en Allemagne et en Italie), il faut dans l’Hexagone
treize impôts pour obtenir 80 % de la collecte globale. Une diversité des
prélèvements qui confine, une fois encore, au millefeuille. Dans ce double
contexte et dans un souci d’amélioration de la compétitivité de nos entre-
prises (notamment de nos PMI et ETI), nous préconisons dès lors de réduire
fortement les impôts de production ainsi que d’en alléger la structure.

Proposition n°16

Supprimer les taxes locales au rendement trop faible


Selon un rapport de l’Inspection générale des finances, le nombre de taxes
pesant sur les particuliers et sur les entreprises dont le rendement est
inférieur à 100 M € culmine en France à 192 contre 24 en Italie, 17 en
Belgique, 3 en Allemagne et 0 au Royaume-Uni ou aux Pays-Bas487. Au
sein de cet échantillon, les collectivités locales sont récipiendaires de
41 taxes, soit un produit de seulement 1,179 M €. Parmi elles, 29 « micro
taxes » affichent un rendement annuel inférieur à 500 000 €. Or, comme
le souligne la Cour des comptes488, le coût pour l’État (via la DGFiP) de la
gestion de la fiscalité directe locale s’élève à 4 Mds € par an.

Dans ce contexte et dans le prolongement de la mission Bur/Richard489


ainsi que du rapport de la CCI Paris Île-de-France490, nous préconisons dès

485
 UBIEF, Yves, LE PAPE, Jacques. La fiscalité de production. Rapport remis au Ministre de l’Économie et des Finances,
D
avril 2018.
486
Idem
487
Inspection générale des finances. Les taxes à faible rendement. Rapport n°2013-M-095-02, tome 1, février 2014.
488
Cour des comptes. La gestion de la fiscalité directe locale par la DGFiP. Janvier 2017.
489
Gouvernement. Rapport sur la refonte de la fiscalité locale. Mission « Finances locales », mai 2018.
490
Chambre de Commerce et d’Industrie de Paris. 30 milliards de « petites taxes » sur les entreprises à rationaliser.
Juin 2012.

120
Fiscalité locale des entreprises : un échec français

lors de supprimer les 29 micro taxes locales au rendement trop faible et


qui génèrent des coûts directs et indirects à la fois pour les administrations
publiques comme pour les entreprises contribuables.

Proposition n°17

Instituer un forfait mobilité « domicile-travail » pour les salariés habitant


en zones peu ou non desservies par les transports en commun financé par
un mécanisme de péréquation régionale du versement transport
En 2017, les entreprises ont contribué à hauteur de 8,6 Mds € au financement
du transport collectif via le versement transport (taxe représentant 17 %
du total de la fiscalité locale économique). Or, remboursant déjà 50 % des
abonnements de transport dans les grandes villes, celles-ci paient au final
deux fois. De surcroît, comme l’a illustré le mouvement des « gilets jaunes »
à ses prémices, ces 8,6 Mds € bénéficient quasi-exclusivement aux personnes
en zones urbaines desservies par de vastes réseaux de transport collectif, et
ce au détriment des Français pénalisés par des trajets longs et coûteux, sans
autre choix que l’utilisation de la voiture individuelle (notons qu’en France
la distance moyenne de transport domicile/travail est de 26 km). Le monde
rural étant particulièrement touché par ce phénomène croissant et cette
opposition latente entre « France urbaine » et « France rurale ».

Dans ce contexte, nous préconisons de créer un forfait mobilité « domicile-


travail » pour les salariés habitant en zones peu ou non desservies par les
transports en commun financé par un mécanisme de péréquation régionale
du versement transport et pris en charge de manière partagée entre les
collectivités locales, l’État (via une exonération de charges) et les entreprises.

Proposition n°18

Rendre plus accessibles les données publiques en matière de fiscalité


locale afin de mieux comparer les collectivités
La loi NOTRe puis la loi pour une République numérique du 7 octobre
2016 ont fait de l’open data pour l’État, les établissements publics et les col-
lectivités locales de plus de 3 500 habitants la règle et non plus l’exception.
Sont ainsi désormais accessibles au grand public l’ensemble des documents
administratifs d’intérêt général qui revêtent un intérêt économique, social,
sanitaire ou environnemental.

121
Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

Si ces mesures vont dans le bon sens – à savoir celui d’une puissance pu-
blique plus ouverte et transparente –, force est de constater qu’en matière de
fiscalité locale, d’importants progrès restent encore à réaliser tant l’opacité
règne entre les différents services publics parties prenantes. Par le biais
d’une politique d’open data volontariste, nous proposons dès lors de rendre
plus accessibles les données publiques concernant la fiscalité locale au sein
des collectivités territoriales afin de permettre aux contribuables (citoyens
et entreprises) d’en constater de manière simple et rapide les évolutions.

Proposition n°19

Consacrer une réunion annuelle de la CTAP à la fiscalité locale


Adoptée le 27 janvier 2014, la loi MAPTAM a notamment donné nais-
sance à la conférence territoriale de l’action publique (CTAP). Outils de
coopération entre collectivités locales, les CTAP ont – comme le souligne
un récent rapport de l’Inspection générale de l’administration491 – été
appréhendées de manières différentes selon les régions ; tantôt perçues
comme une instance de dialogue essentielle, tantôt comme une simple
grand-messe. Néanmoins, sous l’égide du président du conseil régional,
la CTAP réunit à intervalles réguliers les principaux acteurs publics
territoriaux (départements, EPCI, communes, etc.) et présente le mérite
d’exister ; bien que son efficacité varie selon les territoires.

Dans ce contexte, afin de se prémunir contre les augmentations tous


azimuts réalisées sans concertation et dans un souci de mieux lier impôts
et compétences, nous proposons de consacrer une réunion annuelle de la
CTAP à la fiscalité locale.

Proposition n°20

Confier au Sénat l’élaboration d’un rapport annuel sur l’évolution de la


fiscalité locale
Sur la période 2013-2016, la fiscalité locale économique a augmenté de 7,3 %,
alors que les taux de croissance et d’inflation ne progressaient quant à eux res-
pectivement que de 3 % et 0,7 %. Entre 2011 et 2014, la déconnection est encore
plus importante ; la fiscalité locale pesant sur les entreprises progressant de

491
Inspection générale de l’administration. Délégation de compétences et conférence territoriale d’action publique,
de nouveaux outils au service de la coopération territoriale. Rapport n°16119-R, mai 2017.

122
Fiscalité locale des entreprises : un échec français

10,1 % contre + 1,1 % pour la croissance et + 3,4 % pour l’inflation. Parmi les
raisons souvent avancées par les exécutifs territoriaux pour expliquer ces
hausses figurent en première place les effets de la décentralisation. Or, de
nombreux rapports (Cour des comptes492, Institut Montaigne493, CESE494,
Assemblée nationale495, etc.) l’affirment à l’unisson : les transferts de compé-
tences de l’État vers les collectivités, engagés depuis une trentaine d’années,
ne sauraient suffire à expliquer une telle hausse de la fiscalité locale.
Au demeurant, comme le souligne le rapport parlementaire conduit par
Hervé Mariton, on peut légitimement s’étonner de la disparité des niveaux
de progression des impôts locaux « si l’explosion de la fiscalité locale est une
conséquence inéluctable de la décentralisation »496.

Dans ce contexte, de par le dynamisme et l’opacité qui la caractérisent, nous


proposons de confier à la délégation aux collectivités territoriales et à la
décentralisation du Sénat la réalisation d’un rapport annuel rendu public sur
l’évolution de la fiscalité locale. Élaboré avec l’appui de l’Observatoire des
finances et de la gestion publique locales497 ainsi que des chambres régionales
et territoriales des comptes498, ce rapport permettrait de mettre en exergue
chaque année la carte territoriale de la fiscalité et, ce faisant, de porter
la lumière sur les collectivités où les impôts progressent et celles où ils
diminuent. Une manière de mieux identifier les administrations responsables
de la pression fiscale ainsi qu’à l’inverse les « bons élèves » en la matière
et, pour le contribuable (citoyens et entreprises), de mieux désépaissir le
brouillard fiscal local. Ce rapport serait remis chaque année au président de
la République ainsi qu’au président du Sénat.

492
Cour des comptes. Les finances publiques locales. Rapport sur la situation financière et la gestion des collectivités
territoriales et de leurs établissements publics. Octobre 2017.
493
Institut Montaigne. Décentralisation : sortons de la confusion. Repenser l’action publique dans les territoires. Janvier 2016.
494
Conseil Économique, Social et Environnemental. Pour une réforme globale de la fiscalité locale. Avril 2018.
495
MARITON, Hervé. Rapport sur l’évolution de la fiscalité locale, de ses conséquences sur le pouvoir d’achat des mé-
nages et sur la vie des entreprises, ainsi que sur les conditions d’une responsabilité mieux assumée des décideurs.
Assemblée nationale, n°2092, 10 février 2005.
496
Idem
497
L’Observatoire des finances et de la gestion publique locales (OFGL) regroupe dix élus du Comité des finances
locales et des représentants des administrations centrales (DGCL, DB, DGFiP et CGET), sous la présidence du
président du Comité des finances locales. Dans le cadre de ses travaux à l’attention notamment du gouvernement,
l’OFGL bénéficie du concours de fonctionnaires territoriaux et de fonctionnaires de l’État.
498
Émanations territoriales de la Cour des comptes, les chambres régionales et territoriales des comptes (CRTC)
exercent depuis 1982 une triple compétence sur les collectivités locales et leurs établissements publics : jugement
des comptes des comptables publics, examen de la gestion et contrôle des actes budgétaires. Elles participent
également à l’évaluation des politiques publiques.

123
Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

Entretien
Avec Pascal Saint-Amans

Quel regard portez-vous sur le système fiscal local français ?

Par rapport à la moyenne observée dans les pays de l’OCDE, on note que
les recettes fiscales françaises sont plus décentralisées et que le contrôle des
autorités locales sur l’assiette des impôts locaux est supérieur en France. Un
élément positif est que les impôts récurrents sur la propriété, considérés
comme « pro-croissance », sont nettement plus utilisés en France que dans
les autres pays l’OCDE, alors que les « impôts partagés » – dont l’assiette et
les barèmes sont uniformes et le produit réparti entre différents niveaux de
collectivité – sont relativement peu développés.

Toutefois, la situation est particulièrement complexe en France en raison


du partage de la fiscalité locale entre quatre niveaux de gouvernement diffé-
rents. Exceptés dans quelques pays comme par exemple les États-Unis, une
telle dispersion du pouvoir fiscal est unique au sein de l’OCDE.

Quelles réformes « modèles » nos partenaires de la zone OCDE ont-ils


engagées ces dernières années ?

Un certain nombre de pays de l’OCDE ont augmenté le partage de leur utili-


sation des impôts récurrents sur la propriété, que l’on considère comme de «
bonnes taxes » dans la mesure où elles promeuvent une utilisation plus efficace
du territoire et qu’elles créent moins de distorsions économiques que d’autres
types de taxe, comme par exemple celles frappant le capital. Une autre direction
importante dans laquelle vont les réformes est la clarification de la répartition
des responsabilités en matière de services publics entre les différents niveaux de
gouvernement, en les alignant davantage avec la « capacité de payer » propre à
chaque niveau de gouvernement ou leur capacité à collecter les recettes fiscales.

Qu’en est-il de l’autonomie fiscale des collectivités territoriales dans la


zone OCDE ?

Il n’y a pas de modèle unique au sein de l’OCDE. Cependant, de manière


générale, notre analyse soutient l’idée d’un alignement entre l’autorité qui
collecte et l’autorité qui dépense, ce qui promeut une dépense publique plus
efficace. Lorsque les collectivités locales dépensent de l’argent qu’elles ne
recouvrent pas elles-mêmes, elles prennent souvent des décisions qui ne
sont pas optimales. En France, une meilleure cohérence dans la désignation
des responsabilités serait bénéfique.

124
Fiscalité locale des entreprises : un échec français

Au sein de la fiscalité locale, quel est le poids de la fiscalité dite


« économique » chez nos voisins ?

L’impôt sur le bénéfice des sociétés est un impôt partagé avec les niveaux
locaux de gouvernement dans plusieurs pays de l’OCDE, et de nombreuses
collectivités locales bénéficient d’une surtaxe prélevée sur l’impôt sur le
revenu des personnes physiques prélevé au niveau national, et bénéficient
également d’une partie de la TVA. En outre, des formes d’impôts locaux
sur les entreprises demeurent encore dans certains pays limitrophes comme
l’Allemagne, l’Italie et l’Espagne, où le partage des recettes fiscales entre
autorités locales peut être important.

Comme indiqué précédemment, si la France avait une plus grande cohérence


entre les différents niveaux de gouvernement dans l’attribution des recettes
fiscales ainsi que des responsabilités, l’efficacité de sa fiscalité locale en serait
certainement améliorée.

Pascal SAINT-AMANS
Directeur du centre de politique et d’administration fiscales de l’OCDE

Pascal SAINT-AMANS
Licencié en histoire, diplômé de Sciences Po Paris et ancien élève de l’École nationale d’administration, Pascal Saint-
Amans a occupé différentes fonctions au sein du Ministère des finances avant de rejoindre l’OCDE. À la direction de la
législation fiscale, il a été successivement en charge du suivi des travaux de l’Union européenne en matière de fiscalité
directe, de la législation en matière de fiscalité patrimoniale et des fusions scissions puis en charge de la négociation des
conventions fiscales bilatérales et des procédures amiables en matière fiscale. Au titre de sa mobilité, Pascal Saint-Amans
a également été directeur financier de la Commission de régulation de l’énergie entre 1999 et 2002 où il a eu la responsa-
bilité d’accompagner la mise en place d’une bourse de l’électricité et d’établir les règles d’une nouvelle tarification. Entré à
l’OCDE en septembre 2007 en qualité de chef de la division chargée de la coopération internationale et de la compétition
fiscale, il a pris ses fonctions de directeur du centre de politique et d’administration fiscales en 2012. À ce titre, il a joué
un rôle clé dans l’avancement de l’agenda de la transparence fiscale de l’OCDE dans le cadre du G20. En octobre 2009,
Pascal Saint-Amans a par ailleurs été nommé chef de la division du Forum mondial créée pour assister le Forum mondial
sur la transparence et l’échange de renseignements en matière fiscale, auquel participent plus de 100 pays.

125
Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

Postface
Par Bertrand et Denis Badré

Favoriser l’insertion locale de l’entreprise

La fiscalité locale est l’un de ces sujets essentiels qui est toujours abordé
avec difficulté. Animés à l’origine des meilleures intentions, les réformateurs
ont souvent fini par laisser derrière eux quelque chose de plus compliqué et
d’inachevé. Les appels à une remise en ordre en cohérence avec une décen-
tralisation rendue plus légitime, plus lisible et plus efficace se multiplient.
Le chantier des territoires est ouvert. La contribution de Nouveau Cap est
la bienvenue.

Le niveau communal est le plus pertinent pour mettre en œuvre le « principe


du consentement à l’impôt », base de toute organisation de la société et tout
spécialement de la démocratie. C’est évident pour qui traite de la fiscalité des
ménages : on peut très bien demander au citoyen-contribuable s’il est prêt à
payer plus d’impôt pour rendre plus facile la prise en charge de ses enfants
par une crèche. Même si c’est moins directement explicitable, c’est aussi vrai
pour ce qui est de la fiscalité des entreprises. Celles-ci demandent à être ac-
cessibles pour leur personnel comme pour leurs clients et leurs partenaires,
pour leurs approvisionnements comme pour l’expédition de leur production.
Elles sont intéressées par les conditions d’accueil qui peuvent être offertes à
leurs salariés sur place ou à proximité : logement, commerces, restauration,
équipements scolaires, culturels, sportifs ou de loisir. Toutes peuvent tirer
profit d’une bonne insertion dans le réseau économique de proximité et le
tissu social local. Celles qui génèrent des nuisances, enfin, sont, bien sûr,
tout naturellement appelées au dialogue avec leurs voisins. Souvent, une
entreprise demande à être exonérée de taxe d’élimination des ordures ména-
gères au motif qu’elle peut assumer ce « service » par elle-même. Et elle ne
comprend pas que cela lui soit généralement refusé alors que la loi le permet.
C’est tout le problème du jeu « collectif » qui est posé, avec ses dimensions
d’économie financière et d’organisation sociale.

Que l’on soit en milieu rural ou urbain, l’accès par les transports en commun
est désormais une question centrale. Un aménagement local réussi est celui
qui assure le meilleur équilibre à l’ensemble « emploi-logement-transports ».
Toute la réflexion sur les gares de demain ou sur l’interopérabilité en matière
de moyens de communications le manifeste. Les réflexions qui ont conduit à

126
Fiscalité locale des entreprises : un échec français

concevoir le Grand Paris-Express le démontrent. Si la fiscalité communale


concerne l’entreprise, de nombreux financements d’équipements locaux
sont désormais à rechercher au niveau intercommunal ou métropolitain. La
réforme de la taxe professionnelle de 2010 voulait au départ éviter la course
vers les villes offrant les taux les plus bas. Le mouvement actuel d’unifica-
tion des taux à des échelles intercommunales semble bien plus fécond en ce
qu’il amène les acteurs locaux à travailler ensemble à la bonne échelle pour
rechercher la meilleure cohérence territoriale. Cette démarche va d’ailleurs
s’imposer avec les possibilités offertes par le numérique et le développement
de nouvelles formes d’activités comme le télétravail.

La fiscalité locale des entreprises peut-elle être « juste » ?

La recherche de la bonne assiette pour l’impôt économique local a toujours


constitué un excellent sujet de thèse… Faut-il faire payer davantage les
« grosses » entreprises sur la base du chiffre d’affaires ou les « riches »
sur la valeur ajoutée ? Doit-on favoriser les « industries lourdes », indis-
pensables mais qui ont dû mobiliser et doivent donc rémunérer davantage
de capitaux ou les entreprises de main d’œuvre ? Faut-il taxer les actifs, le
stock-outil, les salaires ou la production ? Si la question de la rémunération
du capital ou du travail se pose, c’est immédiatement à travers le levier fiscal.
Faut-il encourager les jeunes entreprises innovantes et jusqu’où ? La part
« salaire » de la TP ayant été supprimée il y a près de vingt ans, celle-ci a été
subtilement remplacée en 2010 par un « panier », pour ne pas dire un cock-
tail, d’un peu tout cela : des impôts spécifiques comme la TASCOM ou les
IFER, une contribution foncière dont le taux reste local et une contribution
sur la valeur ajoutée au taux national, fixé par tranches de chiffres d’affaires.

Ces questions sont classiques, comme le débat éternel qui revient à propos
de la « fin » de la taxe d’habitation sur un sujet sur lequel Bercy n’a jamais
été très ouvert : dégrèvement ou compensation ? Comme est classique la
situation qui conduit l’État à arrêter des politiques nationales sur le dos des
collectivités locales. Comme est éternelle la question de la révision des bases
des valeurs locatives… Le résultat en est une lente mais sûre et assez irré-
sistible complexification d’un système déjà illisible et une érosion régulière
des marges de manœuvre des collectivités territoriales, donc une évidente
recentralisation. Colbert n’est pas mort ! Les initiatives locales, elles, ne sont
pas vraiment encouragées…

127
Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

Il est de ce point de vue intéressant de regarder sans a priori les réponses


apportées par nos voisins et les réformes en profondeur apportées par
chacun d’entre eux ces dernières années. Les questions posées sont souvent
les mêmes.

Deux sujets particuliers d’ordres différents nous semblent enfin devoir


aujourd’hui nous faire vraiment réfléchir : le foncier et le climat. En milieu
urbain, le foncier est devenu une ressource très coûteuse. Les sièges sociaux
comme les administrations migrent vers les banlieues, voire des régions ou
des pays plus lointains. On en vient même à faire payer le stationnement
en surface plus que celui en parkings souterrains. La meilleure valorisation
de l’espace devient une priorité. Nous connaissons une commune dont le
terrain de football est en plein centre-ville. Financièrement, elle aurait pu
faire mieux. Mais elle a considéré que les facilités offertes ainsi aux familles
étaient sans prix ! Notre société sera durable si entreprises, particuliers et
pouvoirs publics peuvent faire ensemble les bons choix d’utilisation d’un
espace devenu très précieux.

Nous terminons par le « climat ». C’est bien localement que doit s’amplifier
la lutte contre la dégradation du climat. Cela peut passer par des engage-
ments sur des projets dans les domaines de la qualité de l’eau et de l’air, sur
la transition énergétique, sur la place de la nature en ville et sa valorisation
et sa protection dans nos campagnes, mais également dans la lutte contre
les nuisances sonores ou les éclairages nocturnes inutiles. De nombreuses
initiatives locales sont lancées auxquelles les entreprises sont évidemment
appelées à participer en lien avec les collectivités territoriales. Inutile d’insis-
ter ici sur les responsabilités qui sont les leurs propres. De grandes marges
de progrès existent au sein de chaque entreprise, sur chacun de ces sujets.
N’attendons pas que soient stabilisés les débats engagés afin que la fiscalité
locale encourage les démarches vertueuses ou pénalisent celles qui le sont
moins. L’entreprise doit être citoyenne.

Le débat est lancé. Il est d’importance et doit être mené à son terme avec
réalisme et ambition. Cette note y contribue.

Bertrand BADRÉ
Président et fondateur de « Blue like an orange sustainable capital »
Ancien directeur général de la Banque mondiale

Denis BADRÉ
Vice-président de Grand Paris Seine Ouest
Ancien sénateur

128
Fiscalité locale des entreprises : un échec français

Bertrand BADRÉ
Titulaire d’une maîtrise d’histoire obtenue à l’Université de La Sorbonne, diplômé de Sciences Po Paris et de HEC,
ancien élève de l’École nationale d’administration, Bertrand Badré débute sa carrière à l’Inspection générale des
finances où il mène de nombreuses missions d’audit, de contrôle et de conseil. En 1999, il rejoint la banque Lazard
à Londres puis à New-York avant de devenir associé à Paris en 2004. Il intègre, en 2003, la cellule diplomatique du
président Jacques Chirac à l’Élysée et devient son représentant personnel adjoint chargé de l’Afrique. À ce titre,
il participe notamment à l’organisation du Sommet du G8 à Évian, prépare l’adoption du Plan d’Action pour l’Eau
ainsi que le partenariat entre le G8 et le Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD). En 2007,
Bertrand Badré rejoint le groupe Crédit Agricole en tant que directeur financier avant d’exercer les mêmes fonctions
au sein de la Société Générale de 2012 à 2013. De 2013 à 2016, il est directeur général et directeur financier de la
Banque mondiale. Dans ce cadre, il a eu l’occasion de participer au G7 et au G20 et de représenter aussi l’institution
au sein du Conseil de stabilité financière (FSB). Investi au sein du World Economic Forum, intervenant régulier
dans différentes universités comme Oxford ou Georgetown, Bertrand Badré a créé en 2016 « Blue like an Orange
Sustainable Capital  », un fonds d’investissement qui vise à combiner performance économique et impact social.
Il est également l’auteur de nombreux ouvrages dont « Money Honnie : si la finance sauvait le monde » préfacé par
Emmanuel Macron.

Denis BADRÉ
Diplômé de l’École Polytechnique et de l’École nationale du génie rural, des eaux et des forêts, Denis Badré travaille
d’abord dans la protection contre les avalanches à Grenoble avant de devenir conseiller technique puis directeur
de cabinet de plusieurs secrétaires d’État à l’Agriculture entre 1978 et 1981 (Pierre Méhaignerie, Jacques Fouchier
et Jacques Blanc). Il dirige ensuite l’École nationale du génie rural, des eaux et des forêts (1981-1986) avant de
prendre la tête de l’administration au ministère de l’Agriculture (1986-1989) puis de devenir directeur général de
l’Assemblée permanente des Chambres d’Agriculture (1989-1993) et enfin directeur général de l’administration et du
développement au ministère de l’Environnement (1994-1995). Conseiller régional d’Île-de-France de 1992 à 1996,
Denis Badré est élu en 1995 maire de Ville-d’Avray (Hauts-de-Seine), commune dont il était déjà auparavant adjoint
au maire. La même année, il devient sénateur des Hauts-de-Seine ; mandat qu’il occupera jusqu’en 2011. Au Sénat,
il sera notamment vice-président de la commission des Finances et vice-président de la commission des Affaires
européennes. Élu en 1996 conseiller général du canton de Chaville, il est réélu en 2001 à la mairie de Ville-d’Avray.
En 2016, il est élu conseiller métropolitain délégué au budget de la métropole du Grand Paris. Denis Badré est
aujourd’hui vice-président chargé des finances de Grand Paris Seine Ouest et vice-président de la Commission
Finances de France Urbaine. Il est enfin l’auteur de deux ouvrages dont « L’attente d’Europe » publié en 2004.

129
Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

Regard européen
Par Günther H. Oettinger

La politique fiscale constitue l’un des leviers les plus importants de la


politique nationale. Non seulement elle est le moyen de financer des
politiques publiques, mais elle a aussi un impact important sur l’attractivité
des territoires et leur capacité à attirer des investissements.

Le consentement à l’impôt est pourtant aujourd’hui mis à mal par des


systèmes fiscaux de plus en plus complexes et de moins en moins adaptés
à la réalité économique. Depuis quelques années déjà, la Commission eu-
ropéenne a fait de l’objectif d’une fiscalité plus juste une priorité politique.
Une fiscalité plus juste, c’est une fiscalité efficace mais également plus simple
et claire pour répondre aux préoccupations des particuliers et des acteurs
économiques.

Concernant l’exemple particulier de la fiscalité locale des entreprises, et sans


préjuger des objectifs et moyens qu’il appartient à chaque État membre de
fixer souverainement, ce rapport de Nouveau Cap illustre parfaitement la dif-
ficulté de maintenir du sens pour les contribuables dans un environnement
fiscal opaque, complexe, enchevêtré où de multiples taxes et impôts coha-
bitent et s’ajoutent les uns aux autres. Les entreprises – premiers acteurs de
ce système – s’y perdent, tirent la sonnette d’alarme et attirent l’attention
sur leurs difficultés à appréhender les objectifs et la rationalité derrière ce «
millefeuille fiscal local ».

À notre niveau, en Europe, nous avons investi beaucoup de temps et de


ressources pour mettre en œuvre nos engagements en vue d’une fiscalité
plus juste et plus efficace. Nous pouvons dire aujourd’hui, même s’il reste
naturellement beaucoup à faire, que nous avons déjà bien avancé. Ces
développements contribuent également à mieux assoir les ressources
propres de l’Union européenne qui permettent le financement du budget
communautaire.

130
Fiscalité locale des entreprises : un échec français

Pour commencer, nous avons construit un cadre commun solide en


matière de transparence fiscale. Les États membres ont accepté d’échanger
de manière articulée et en temps opportun les informations sur leurs
décisions anticipées, les comptes des multinationales, les informations
anti-blanchiment, les comptes financiers et les schémas des intermédiaires.
Ainsi, la coopération administrative entre pays européens se trouve à la fois
simplifiée et renforcée.

Nous avons également consolidé nos défenses communes contre certaines


formes d’optimisation fiscale agressive. La mise en œuvre des directives sur
la lutte contre l’évasion fiscale offrira un niveau minimum commun de pro-
tection contre l’évasion fiscale dans le marché intérieur. La mise en œuvre
d’un cadre clair et uniforme apporte la cohérence dont nous avons besoin
pour éviter les actions unilatérales, les conflits juridiques et les lacunes dans
notre marché unique. Pour les entreprises, il s’agit d’un enjeu de certitude
juridique et de concurrence équitable au sein de l’Union européenne.

Nos travaux pour moderniser et simplifier la TVA en Europe sont également


extrêmement importants pour les entreprises du continent. Le système de
TVA actuel était censé n’être que temporaire et ses faiblesses endémiques
deviennent de plus en plus probantes. Il est complexe et lourd pour les
acteurs économiques. Il est exposé aux fraudes. Et il n’est pas adapté à
l’économie numérique moderne. C’est pourquoi la Commission a proposé
une réforme radicale du système TVA qui devrait améliorer et simplifier la
vie des entreprises européennes.

Enfin, le projet le plus ambitieux pour l’Europe est la relance de l’Assiette


Commune Consolidée pour l’Impôt des Sociétés (ACCIS). L’ACCIS est
l’incarnation d’un système fiscal moderne à la fois compétitif, simple et juste
dont l’objectif est de rendre l’environnement fiscal européen plus attrayant
pour les entreprises et les investisseurs.

À notre niveau, nous avons donc pris conscience de la nécessité – pour


atteindre notre objectif d’une fiscalité plus juste – d’offrir un cadre fiscal
rationnel et cohérent dans lequel les règles sont simples, transparentes et
claires pour tous. À cet égard, nous n’avons eu de cesse de recueillir les idées
et le vécu des acteurs de terrain dont l’expérience concrète de la fiscalité
nous est précieuse et indispensable.

131
Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

En matière de fiscalité locale, face au constat dressé par Nouveau Cap, nous ne
pouvons qu’encourager les États membres à investir le temps et les moyens
nécessaires pour rétablir – dans la concertation avec les acteurs concernés
sur le terrain – une fiscalité locale cohérente, moderne, simple et efficace
qui s’inscrive dans le cadre de leurs objectifs en matière de décentralisation.
C’est à ce prix qu’ils pourront rendre du sens à la fiscalité locale et s’assurer
de la confiance renouvelée et de la cohésion des citoyens et des entreprises.

Günther H. OETTINGER
Commissaire européen au budget et aux ressources humaines

Günther H. OETTINGER
De nationalité allemande, Günther H. Oettinger est diplômé en droit et en économie de l’Université de Tübingen (Allemagne).
Il exerce ensuite durant deux ans la profession d’expert-comptable puis d’avocat au sein d’un cabinet de conseil. En 1979,
il est élu pour la première fois député à l’assemblée de l’arrondissement de Ludwigsburg, puis devient membre du conseil
municipal de Ditzingen l’année suivante. En 1984, il intègre le Parlement régional de Bade-Würtemberg et est désigné
président du groupe parlementaire de la CDU, fonction qu’il occupera durant quatorze ans. Entre 2005 et 2010, il est
ministre-président de Bade-Würtemberg ; mandat qu’il quitte en février 2010 afin d’intégrer la Commission Barroso en
tant que Commissaire européen à l’énergie. Quatre ans plus tard, soutenu par Angela Merkel, il est nommé Commissaire
européen à l’économie et à la société numériques (novembre 2014-décembre 2016) avant d’être désigné en janvier 2017
Commissaire européen au budget et aux ressources humaines au sein de la nouvelle Commission Juncker.

132
Fiscalité locale des entreprises : un échec français

Les chiffres clés

18 %
9 %
et représentent
Les collectivités de la dépense publique (contre 38 %
locales portent pour l’État et 44 % pour les
de la dette publique administrations de la sécurité sociale).

92 %
des Français « font confiance aux
collectivités locales pour améliorer
leur quotidien ».

Seuls 41 % de l’augmentation des dépenses locales sont


imputables aux transferts de compétences de l’État vers les collectivités.

Sur la période 1998-2011,

440 000 agents
ont intégré la fonction publique territoriale, dont moins
de 50 000 au titre des transferts de compétences.

81 %
La France détient un taux contre seulement 36 % en Allemagne,
de fonctionnarisation 15 % en Italie, 10 % en Suède
de ses agents de et 9 % au Royaume-Uni.

133
Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

Les budgets additionnés des 18 conseils


régionaux français représentent 31,4 Mds €
en 2017 contre 28,4 Mds € pour la seule communauté flamande
et 61,4 Mds € pour la région Rhénanie-du-Nord-Westphalie.

Avec près de 70 % du stock total,


les collectivités territoriales sont le 1er investisseur public.

L’impôt sur les sociétés s’est établi à 35,7 Mds €


49,3 Mds €
en 2017 alors que
la fiscalité locale pesant
sur les entreprises
représentait la même année

7,3 %
Sur la période 2013-2016, contre seulement + 0,7 %
la fiscalité économique pour l’inflation et + 3 %
locale a progressé de pour la croissance.

Le nombre de taxes pesant sur les particuliers et sur les


entreprises dont le rendement est inférieur à 100 M € s’élève à

192
en France contre 17 en Belgique,
3 en Allemagne et
0 au Royaume-Uni.

134
Fiscalité locale des entreprises : un échec français

Glossaire

AOT : autorité organisatrice de transports


APUL : administration publique locale
CESE : Conseil Économique, Social et Environnemental
CESER : Conseil Économique, Social et Environnemental Régional
CET : contribution économique territoriale
CFE : cotisation foncière des entreprises
CVAE : cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises
DGCL : direction générale des collectivités locales
DMTO : droits de mutation à titre onéreux
EPCI : établissement public de coopération intercommunale
IFER : imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux
IS : impôt sur les sociétés
M : million(s)
Md / Mds : milliard / milliards
OCDE : organisation de coopération et de développement économiques
PIB : produit intérieur brut
TASCOM : taxe spéciale sur les surfaces commerciales
TEOM : taxe d’enlèvement des ordures ménagères
TFPB : taxe foncière sur les propriétés bâties
TH : taxe d’habitation
TICPE : taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques
TLPE : taxe locale sur les enseignes et publicités extérieures
TP : taxe professionnelle
TVA : taxe sur la valeur ajoutée
UE : union européenne
VT : versement transport

135
Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

Table des matières

Préface de Dominique Perben.......................................................................................6


Avant-propos de Geoffroy Roux de Bézieux.............................................................9
Introduction de Jean-Luc Monteil ........................................................................... 11

I. Le millefeuille territorial français.............................................................. 13

Le millefeuille vu du ciel.......................................................................................... 13
Encadré « La décentralisation en débat »........................................................... 15

Les étapes de la décentralisation.......................................................................... 18


•A  cte I : vers une République (enfin) girondine................................................ 18
• Acte II : la décentralisation gravée dans le marbre de la Constitution.......... 19
• Loi du 16 décembre 2010 :
un millefeuille rationalisé mais davantage jacobin ?.................................... 21
Encadré « L’État dans les territoires : l’autre millefeuille ».......................... 22
• Lois MAPTAM et NOTRe : reculer pour mieux avancer ?...................... 25
Encadré « Redécoupage des régions : is big (really) beautiful ? »............... 27
•L  oi NOTRe : un bilan en demi-teinte................................................................. 29
Encadré « Des voisins européens en pointe sur la rationalisation
de leur organisation territoriale »........................................................................ 35
•L  a dynamique métropolitaine au détriment du reste des territoires ?...... 36
Tableau « Comparatif du poids des collectivités territoriales en Europe »..... 38
Encadré « Le millefeuille territorial vu par les Français »............................ 39
À retenir........................................................................................................................ 40

La situation financière des collectivités locales............................................. 41


• Un contexte financier global plus positif depuis 2014
mais qui demeure préoccupant............................................................................ 41
•D es dépenses locales plus dynamiques que la décentralisation................... 42
Graphique « Évolution des dépenses de fonctionnement
des collectivités territoriales (2007-2017) »................................................... 43
•U ne envolée des dépenses de fonctionnement et de personnel................... 44
Tableau « Évolution des effectifs de la fonction publique
territoriale (2003-2015) »..................................................................................... 45
Encadré « Tour d’horizon des fonctionnaires dans l’OCDE ».................. 46

136
Fiscalité locale des entreprises : un échec français

•U  ne diminution des concours financiers de l’État ?....................................... 48


Tableau « Répartition de la baisse de la DGF
entre catégories de collectivités (2015-2017) »............................................. 49
• Une dette en croissance depuis trente ans........................................................ 49
Graphique « Évolution de l’encours de dette de l’ensemble
des collectivités locales (1983-2016) »............................................................. 50
• Des dépenses d’investissement liées au cycle électoral.................................. 50
Graphique « Évolution de l’investissement local (1983-2016)................... 51
• Zoom sur les collectivités territoriales............................................................... 51
Graphique « Des budgets régionaux multipliés par 5,6
depuis 1986 mais qui demeurent modestes »................................................. 53
Encadré « Derrière le millefeuille territorial,
le millefeuille électif français »........................................................................... 54
À retenir........................................................................................................................ 55

La fiscalité des collectivités locales..................................................................... 56


• Les ressources des collectivités locales.............................................................. 56
Graphique « Répartition des recettes de fonctionnement
des collectivités territoriales (2017) ».............................................................. 57
Encadré « Les ressources des collectivités locales européennes ».......... 58
Graphique « Ressources des collectivités territoriales
en 2016 (Mds €) ».................................................................................................... 60
• Autonomie financière vs. autonomie fiscale :
un débat plus que jamais d’actualité.................................................................... 60
Tableau « Évolution du ratio d’autonomie financière des collectivités
locales (2003-2015) »............................................................................................. 63
À retenir........................................................................................................................ 63

II. La fiscalité locale des entreprises............................................................... 64

•U
 ne fiscalité complexe et opaque......................................................................... 64
Graphique « Répartition de la fiscalité locale des entreprises
selon la nature des taxes (2017) » ..................................................................... 66
Encadré « La France championne de la pression fiscale
et de la dépense publique… mais pas de la qualité de vie »....................... 67
•U
 ne fiscalité locale des entreprises en nette progression............................. 70
Graphique « Répartition des recettes fiscales directes par niveau de
collectivité (2017) »................................................................................................ 72

137
Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

Encadré « La fiscalité locale vue par les TPE » ............................................. 73


Graphique « Évolution des principales taxes locales
sur les entreprises (2011-2014) » ...................................................................... 73
Encadré « Une myriade de « petites taxes » à rationaliser »  ................... 74
Graphique « La fiscalité directe des départements (2011-2016) » ............ 76
Graphique « Répartition de la fiscalité locale des entreprises
par collectivités (2014) » ...................................................................................... 77
Encadré « La taxe professionnelle est morte, vive la CET ! » ................... 78
À retenir ....................................................................................................................... 79

ANNEXES........................................................................................................................... 80

Nos propositions.....................................................................................................103
Pour une organisation territoriale
de la République plus agile et rationalisée............................................................106
• N°1 : Fusionner les communes de moins de 1 000 habitants et faire
de l’échelon municipal le maillon fort de notre architecture territoriale............... 106
• N°2 : Transférer aux métropoles les compétences des départements.................... 107
• N°3 : Rétablir le « conseiller territorial » fusionnant élus régionaux
et départementaux................................................................................................................. 108
• N°4 : Limiter à 2 mandats consécutifs l’ensemble des mandats locaux.................. 108
• N°5 : Supprimer la fonction publique territoriale......................................................... 109
• N°6 : Simplifier l’organisation administrative locale en matière
d’aides économiques en donnant plus de poids aux régions ainsi
qu’aux organisations consulaires et patronales............................................................. 111
• N°7 : Permettre aux collectivités locales d’adapter certaines normes
à leurs spécificités territoriales.......................................................................................... 112
• N°8 : Accélérer et amplifier la rationalisation de l’organisation
territoriale de l’État.............................................................................................................. 112
• N°9 : Confier aux CTAP et à un collège d’entrepreneurs
associé une mission annuelle de simplification normative
en faveur du développement économique territorial................................................... 114
• N°10 : Faire des intercommunalités de véritables outils
de mutualisation au service des usagers..................................................................... 115

Pour une fiscalité locale des entreprises plus simple et compétitive............. 116
• N°11 : Établir un « Pacte de confiance » entre les collectivités
locales et les entreprises...................................................................................................... 116
• N°12 : Mettre en place un « moratoire fiscal ».............................................................. 117
• N°13 : Renforcer le poids des régions et des métropoles
en leur transférant 100 % de la CVAE............................................................................. 117
• N°14 : Favoriser l’autonomie fiscale des régions en leur permettant
de moduler le taux de la CVAE......................................................................................... 118

138
Fiscalité locale des entreprises : un échec français

• N°15 : Réduire le poids et la structure des impôts locaux sur la production........ 119
• N°16 : Supprimer les taxes locales au rendement trop faible.................................... 120
• N°17 : Instituer un forfait mobilité « domicile-travail » pour les salariés
habitant en zones peu ou non desservies par les transports
en commun financé par un mécanisme de péréquation régionale
du versement transport........................................................................................................ 120
• N°18 : Rendre plus accessibles les données publiques en matière
de fiscalité locale afin de mieux comparer les collectivités......................................... 120
• N°19 : Consacrer une réunion annuelle de la CTAP à la fiscalité locale................ 122
• N°20 : Confier au Sénat l’élaboration d’un rapport annuel
sur l’évolution de la fiscalité locale.................................................................................... 122

Entretien avec Pascal Saint-Amans.....................................................................124


Postface de Bertrand et Denis Badré...................................................................126
Regard européen de Günther H. Oettinger.......................................................130

Chiffres clés.................................................................................................................133
Glossaire......................................................................................................................135
Bibliographie..............................................................................................................140
Comité d’étude...........................................................................................................153

139
Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

Bibliographie

Acteurs publics. Isabelle Chatry : « Il n’existe ni modèle unique ni recette magique de fiscalité
locale au sein de l’OCDE ». 12 juillet 2018.

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Assemblée nationale. Projet de loi de finances pour 2019. Commission des finances, de
l’économie générale et du contrôle budgétaire, n°1255, 24 septembre 2018.

Assemblée nationale. Projet de loi de finances pour 2018. N°3096.

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BARROCHE, Julien. La subsidiarité française existe-t-elle ? VIIème congrès de l’Asso-


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BONNET-PINEAU, Élisabeth. La réforme régionale en France : une occasion manquée ?


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BOULARD, Jean-Claude, LAMBERT, Alain. Mission pour la simplification des


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BRUNETTO, Marc, LEVRATTO, Nadine. Analysis of the job creation process in


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BVA. Élections régionales 2015. Les Français et leurs nouvelles régions. Octobre 2015.

140
Fiscalité locale des entreprises : un échec français

Caisse des Dépôts et Consignations. La majorité s’oppose à une plus grande autonomie
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Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

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Fiscalité locale des entreprises : un échec français

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Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

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Institut Montaigne. 1 151 milliards d’euros de dépenses publiques : quels résultats ? Février
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Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

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Fiscalité locale des entreprises : un échec français

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Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

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MODAAL Conseil, MEDEF. Actualisation du baromètre de la fiscalité locale des entreprises.


Étude sur la période 2015 à 2017 à partir des données REI. Décembre 2018.

MODAAL Conseil, MEDEF. La fiscalité locale des entreprises en France. Analyse pour les
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OFCE. Dépenses publiques : quels enjeux pour le prochain quinquennat ? Policy brief n°17,
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OFCE. Impôt sur les sociétés : état des lieux et effets différenciés de la réforme. Policy brief
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PRUD’HOMME, Rémy. The dangers of decentralization. The World Bank Research


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QUENTIN, Didier, URVOAS, Jean-Jacques. Rapport d’information sur la clarification


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Sénat. Compte rendu des auditions organisées par la commission spéciale. 24 juin 2014.

Sénat. L’évolution des finances locales à l’horizon 2017. Délégation sénatoriale aux collecti-
vités locales et à la décentralisation, note de synthèse, 12 novembre 2014.

SILICANI, Jean-Ludovic. Livre blanc sur l’avenir de la fonction publique : faire des services
publics et de la fonction publique des atouts pour la France. Avril 2008.

Sofaxis. Regard sur les premières tendances 2017 des absences pour raison de santé dans les
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Standard & Poor’s. Collectivités françaises : l’investissement sans l’endettement ? 3 octobre 2018.

Standard & Poor’s. Nouvelles régions françaises : un profil de crédit toujours favorable dans un
contexte européen. 22 septembre 2015.

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THOENIG, Jean-Claude. Territorial administration and political control. Decentralization


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Vie publique. Déclaration de M. François Hollande, Président de la République, sur la réforme


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VLAHOS, Nick. The politics of subnational decentralization in France, Brazil, and Italy.
York University, Journal of public deliberation, volume 9, issue 2, article 15, 2013.

150
Fiscalité locale des entreprises : un échec français

SOUTENEZ NOUVEAU CAP !

Le soutien des entreprises, des pouvoirs publics et des particuliers


est essentiel au développement et à la pérennisation des activités de
Nouveau Cap.

Think tank des territoires axé sur la compétitivité économique dans un esprit
décentralisé, Nouveau Cap a vocation à publier fréquemment des notes et
organiser des débats publics avec notamment des personnalités politiques ou
issues du monde de l’entreprise.

Afin de faire entendre nos propositions, chacune de nos publications est


transmise à un réseau de plus de 2 000 décideurs :
• Membres du gouvernement
• Parlementaires
• Présidents de conseils régionaux et départementaux
• Préfets de région et de département
• Maires de grandes villes et présidents de métropoles
• Partenaires sociaux
• Dirigeants d’entreprises
• Think tanks
• ONG
• CCI et MEDEF territoriaux
• Monde universitaire
• Médias nationaux et locaux, etc.

Rejoignez-nous !

CONTACTS

Julien Gonzalez-Lambert | Délégué général


julien.gonzalez@nouveau-cap.org | 04 91 57 71 64

Kevin Figuière | Directeur de la communication


kevin.figuiere@nouveau-cap.org | 04 91 57 71 82

Anthony Escurat | Directeur des études


anthony.escurat@nouveau-cap.org | 04 91 57 71 62

nouveau-cap.org

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Nouveau Cap • Le think tank des territoires.

NOUVEAU CAP,
LE THINK TANK DES TERRITOIRES

Créé fin 2017 et incubé par le MEDEF Provence-Alpes-Côte d’Azur,


Nouveau Cap est un think tank dédié aux territoires et se fixant pour
ambition d’être un espace de réflexions producteur d’idées novatrices et
affranchies de toute logique partisane, prêtes à l’emploi pour l’action.

Basé à Marseille, profondément ancré dans la réalité des territoires


et attaché à leur développement économique, Nouveau Cap réunit des
représentants de la société civile issus d’horizons variés. À travers ses
publications et ses évènements, ce think tank aspire à contribuer au débat
démocratique et à l’amélioration des politiques publiques au service de
l’intérêt général en produisant et en diffusant des propositions concrètes
à l’ensemble de la société : élus locaux et nationaux, partenaires sociaux,
acteurs économiques, associations, médias, etc.

Les publications de Nouveau Cap reposent sur trois axes de travail principaux :

Croissance économique
Développement des territoires
Modernisation de l’action publique

• La croissance économique orientée vers la compétitivité de toutes nos


entreprises – TPE/PME, ETI et grands groupes – pour favoriser la création
d’emplois, l’émancipation individuelle et la cohésion nationale
• Le développement de nos territoires dans une vision décentralisée et
plurielle de la réussite et de l’excellence françaises
• La modernisation de l’action publique afin de permettre à la France de
se doter d’un État et de collectivités territoriales agiles au service de nos
concitoyens et de nos entreprises

152
Comité d’étude
PRÉSIDENT

Boris PERDIGON  ntrepreneur, ancien président de l’Union pour


E
l’Entreprise des Hautes-Alpes
MEMBRES

Gérard BONNET  Ancien président du Conseil Économique, Social et


Environnemental de Provence-Alpes-Côte d’Azur
Sylvie BRUNET Professeure associée à Kedge Business School et
présidente de la section du travail et de l’emploi du
Conseil Économique, Social et Environnemental (CESE)
Thierry DEBAILLE Rédacteur en chef de Businews
François GARÇON Historien et maître de conférences
à l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne
Bruno JONCHIER  Délégué régional de l’APEC
Provence-Alpes-Côte d’Azur/Corse
Thierry LEMERLE Directeur régional de Pôle Emploi
Provence-Alpes-Côte d’Azur
Jean-Luc MONTEIL  Entrepreneur, président du MEDEF
Provence-Alpes-Côte d’Azur et président
de la commission Adhérents du MEDEF
Marc POUZET  Président du Conseil Économique, Social et
Environnemental de Provence-Alpes-Côte d’Azur
Danièle PRIEUR Avocate et ancienne présidente du réseau Altafemina
Marc REYNAUD Ancien directeur général des services du Conseil
départemental des Alpes-Maritimes
Basile SIRCOGLOU  Ancien vice-président d’Aix-Marseille Université en
charge des partenariats avec le monde de l’entreprise

Un think tank incubé par  Avec le soutien de

Note rédigée par :


Anthony Escurat
Revue par : Nouveau Cap
Kevin Figuière , Julien Gonzalez-Lambert , Olivier Robert 16, place du général de Gaulle
Recherche documentaire : CS 50013
Anthony Escurat 13231 Marseille – cedex 1
Tél : +33 (0)4 91 57 71 62
Conception :
www.nouveau-cap.org
www.lightcomm.org
contact@nouveau-cap.org
Février 2019 @Nouveau_Cap

153
Les publications de nouveau cap
Fiscalité locale des entreprises :

Fiscalité locale des entreprises : un échec français


un échec français
CET, CFE, CVAE, IFER, TASCOM, TLPE, VT… Derrière cette litanie d’acronymes
se cache un millefeuille méconnu du grand public : celui de la fiscalité locale des
entreprises. Fruit de plus de trente années de politiques de décentralisation, ce
millefeuille « caché » n’a eu de cesse de s’épaissir dans l’opacité la plus totale ; si
bien qu’aujourd’hui, la fiscalité économique locale pèse plus que l’impôt sur les
sociétés.

Ce faisant, cette note se propose dans un premier temps de revenir sur le serpent
de mer français de la réforme territoriale, épine dorsale de la fiscalité locale et que
nos propositions – pour être cohérentes et efficaces – ne pourront ni contourner
ni évacuer. Dans un second temps, nous plongerons dans les abysses de la fiscalité
économique locale où l’obscurité est passée reine au fil des vagues successives
de décentralisation. Enfin, sans prétendre proposer un schéma optimal tant les
scénarii envisageables sont multiples, les 20 propositions que nous formulons
ambitionnent, à cette aune, à la fois de réviser l’organisation territoriale de la
République tout en rationalisant le maillage fiscal local qui en découle au profit
à la fois des collectivités et des entreprises avec, en ligne de mire, la nécessaire
préservation de la soutenabilité des finances publiques.

Fiscalité locale
Préface de Dominique Perben – Ancien ministre
Avant-propos de Geoffroy Roux de Bézieux – Président du MEDEF
Introduction de Jean-Luc Monteil – Président du MEDEF Provence-Alpes-Côte

des entreprises :
d’Azur
Entretien avec Pascal Saint-Amans – Directeur du centre de politique
et d’administration fiscales de l’OCDE
Postface de Bertrand Badré (ancien directeur général de la Banque mondiale)
& Denis Badré (ancien sénateur) un échec français
Regard européen de Günther H. Oettinger – Commissaire européen au budget
et aux ressources humaines

L’avenir n’est pas ce qui va arriver mais ce que nous allons en faire.
Nouveau Cap - Note #2

Avec le soutien de Réflexions pour l’action


2019

16, place du général de Gaulle - CS 50013 – 13231 Marseille cedex 1


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Note #2

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