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RESONANCE ET PERCEPTION
DES HARMONIQUES ATURELLES
Julien GILI
1
Avant-propos
L’élan qui a motivé ce travail pourrait se résumer à une curiosité permanente qui
s’est amplifiée au fur et à mesure que je creusais le sujet des vibrations sonores et de
l’acoustique naturelle. L’étude des musiques du monde et des instruments peu
communs m’a fait prendre conscience que dans les cultures les plus éloignées, aussi
bien historiquement que géographiquement, on retrouve des points communs
surprenants, des coïncidences qui, au fond ne sont sans doute pas le fruit du hasard.
Parmi ces principes universels, je me suis particulièrement penché sur le phénomène de
la résonance et celui de la série des harmoniques naturelles. Je tenterai de les
rapprocher dans ce mémoire en mettant en évidence leurs effets et leurs utilisations.
Il n’y a pas de réel commencement à cette curiosité, mais plutôt une série de
découvertes plus ou moins importantes qui, par étapes, m’ont encouragé à en savoir
toujours plus. La première phase significative fut franchie grâce au travail de
l’ethnomusicologue Trân Quang Hai, qui m’a d’ailleurs accordé un précieux entretien.
Dans un documentaire vidéo réalisé par Hugo Zemp, il présente ses recherches sur
le chant diphonique. Ce chant, qui fait entendre deux sons simultanément, m’a
particulièrement intéressé et l’approche pédagogique de T.Q.Hai m’a encouragé à le
développer sur ma propre voix. Après environs deux ans de travail vocal, j’ai ainsi pu
réellement ressentir qu’il m’était impossible d’émettre d’autres notes, d’autres
intervalles que ceux constituant la série des harmoniques.
Parallèlement, en observant quotidiennement mon comportement ainsi que celui
des autres, je m’étais souvent fait la réflexion que l’écoute de la musique et des sons
influençait particulièrement notre humeur, notre mentalité, notre corps (etc.). Après
m’être intéressé à ces effets, la question de la santé est devenue incontournable. C’est
pourquoi, en toute logique, je me suis penché sur ce que l’on appelle aujourd’hui la
« musicothérapie ». Mais, avec déception, je constatais que cette étude, bien que
déclinée selon plusieurs pratiques, ne s’appuie que trop souvent sur des musiques
occidentales classiques, des musiques new age et des chansons de variétés. Je ne fus pas
étonné de voir que ces médecins, à la culture musicale très restreinte, pouvaient être si
sectaires. De plus, je n’étais pas spécialement attiré par cette idée de « guérir » ou de
« soigner » par la musique (comme les auteurs S.Halpern et L.M. Savary, par exemple,
2
prétendent le faire1). Mon intérêt se portait simplement sur les effets produits par les
sons, les vibrations et la musique. J’ai effectivement cherché à savoir si l’on peut être
malade à cause d’un son, d’une musique ou des harmoniques. Je voulais savoir, plus
généralement, si elles peuvent susciter en nous un effet particulier. Or, constater et
comprendre comment les vibrations sonores agissent sur notre être (physique et
mental), aussi bien dans un sens positif que négatif, est à distinguer, selon moi, de la
musicothérapie actuelle. Par ailleurs, il se trouve que certains musicothérapeutes, plus
ou moins reconnus, se sont penchés sur le phénomène des harmoniques naturelles ce
qui correspondait plus précisément à mes objectifs de travail. Je me suis donc attelé à
l’étude de leurs pratiques, en tentant de comprendre leur origine, leur intérêt et leur
fonctionnement.
1
S.Halpern et L.M. Savary, Guérir par les sons, Genève, Reuille, 1986.
3
Introduction
Depuis quelques années, un phénomène collectif s’est progressivement
développé en Occident autour d’un intérêt particulier, voire d’une fascination,
concernant la mise en résonance des harmoniques, les musiques et les instruments qui
l’utilisent2. Pourquoi ces intervalles si singuliers soulèvent-ils autant d’intérêt ?
Pourquoi la plupart des instrumentistes qui jouent avec cette série dans leurs musiques
traditionnelles sont-ils tant impliqués soit dans un contexte naturel (bergers,
montagnards, forestiers, etc.), soit dans un contexte sacré (religions, rituels,
shamanisme) ? Pourquoi voit-on parallèlement apparaître des thérapies alternatives qui
utilisent les mêmes instruments, les mêmes phénomènes sonores ? Peut-on tirer profit
des propriétés de la série des harmoniques pour se recentrer au niveau de notre santé
émotionnelle et psychologique, mais aussi au niveau corporel, musculaire, organique,
comme certains chercheurs et thérapeutes l’affirment ? Est-il possible d’établir un
rapport entre ces harmoniques et d’autres phénomènes que l’on peut observer dans la
nature, selon un aspect symbolique parfois très marqué (en référence avec le nombre
d’or, la spirale d’ADN, les figures géométriques de Chaldni, les clichés du Dr Emoto),
selon une relation avec le domaine sacré de certaines cultures, ou plus généralement à
travers celui de la spiritualité, évoqué dans un très grand nombre d’ouvrages ?
Ce premier travail, qui en appellerait d’autres, ne prétend pas traiter toutes ces
questions, mais tente de les aborder par la présentation et la description des
phénomènes, des techniques, et des instruments qui utilisent la série des harmoniques
naturelles et leur résonance. Pour certains sujets, il s’appuie sur les articles de
l’encyclopédie Wikipédia3 (même si j’ai bien conscience du caractère réducteur de cette
référence récurrente) mais aussi sur une sélection d’ouvrages et de disques spécialisés.
De plus, mon étude se base également sur les informations que j’ai pu recueillir auprès
de différents praticiens4 et sur des terrains divers5.
2
On voit effectivement apparaître de plus en plus de festivals réunissant des passionnés des harmoniques,
en France, Le Rêve de l’Aborigène, par exemple organisé par l’association Vent du Rêve . Ce festival de
didgeridoo, guimbarde et chants diphoniques a lieu près de Poitiers, à Airvault, le premier week-end de
Juillet et réunit depuis quatre ans plus de 2000 personnes. Ce type de festival est également observable en
Suisse, en Allemagne, aux Etats-Unis, au Japon etc.
3
Informations recueillies sur le site : www.wikipédia.com. N’étant pas de formation « scientifique » je
n’ai pas pu directement aborder de manière efficace les divers ouvrages en acoustique ni même
interpréter les informations des acousticiens qui ont tenté de m’aider. L’lencyclopédie ainsi que les cours
de M. Laliberté, R. Jacobsohn, G. Beller. présentent certains sujets de manière plus accessible.
4
J’ai pu rencontrer des musiciens (Jérôme Desigaud, Pierre-Yves Voisin, Steve Kindwahl, Lewis Burn,
Tserendavaa, etc.), des acousticiens (Philipe Bougon, Jacques Dudon etc.), des ethnomusicologues (Trân
4
Mes recherches sont basées sur les études et témoignages de musiciens,
acousticiens, scientifiques, psychologues, ethnomusicologues et autres passionnés ayant
travaillé aussi bien sur la résonance du son, de la musique et de leurs effets, que sur le
phénomène des harmoniques naturelles. Le sujet aborde la perception et la
reconnaissance d’un ensemble de sons ne pouvant suivre que les intervalles de la série
des harmoniques. Une musique d’harmoniques ; celle de la guimbarde, de l’arc en
bouche, des chants diphoniques, des trompes naturelles comme le cor des Alpes etc.
J’ai été amené à distinguer les harmoniques au sens mélodique (en relation avec
les intervalles qui les séparent), des harmoniques au sens plus spectral du terme, qui
créent des timbres et, par conséquent, d’autres effets. Lorsque je parle d’effets, c’est,
d’une part, sur un plan de sensibilité sur le corps par le phénomène de résonance
(certaines études comme celles de John Beaulieu, ou bien Philippe Barraqué, que l’on
peut éventuellement juger empiriques, font correspondre les notes avec les organes, les
méridiens, les chakras etc.), et, d’autre part, sur un plan plus mental qui concerne la
psychologie de l’auditeur, notamment en psycho-acoustique.
Je commencerai par exposer, dans le premier chapitre, les phénomènes de la
résonance et de la série des harmoniques. Le second chapitre visera à approfondir les
systèmes de perception et de réceptivité des différentes fréquences et vibrations
sonores. Je tenterai, au cours des troisième et quatrième chapitres, de dresser une liste,
que j’espère aussi complète que possible, assortie de définitions des instruments et
techniques vocales utilisant fondamentalement et mélodiquement les harmoniques. Je
ferai un rappel, dans un cinquième et dernier chapitre, des diverses approches de la
musicothérapie classique pour enfin analyser les différentes pratiques thérapeutiques et
symboliques des harmoniques et de leurs musiques, en relation avec certaines croyances
et traditions issues notamment d’Asie (acupuncture, yoga etc.). Je proposerai
également, pour illustrer ce travail, un ensemble de graphiques, tableaux, photographies
(etc.), ainsi qu’une sélection d’extraits sonores présentés sur un CD en annexe.
Quang Hai, John Wright…), des musicothérapeutes (Anne-Marie Duvivier, Michel Bon, Oriane Robidou,
Jonathan Cope, Barbara Blakmore etc.) ainsi que beaucoup d’autres passionnés des harmoniques et de
leur résonance.
5
J’ai assisté au festival Le Rêve de l’Aborigène (op. cit.) à quatre reprises, ainsi qu’aux Noces
Harmoniques (dernier week-end de d’Août 2005, au Thoronet) organisées par Jaques Dudon. J’ai
également pu observer l’utilisation des instruments à cordes sympathiques en Inde (principalement à
Bénarès, voyage en Avril 2001) la pratique de plusieurs instruments au Viêt-Nam (bols sacrés,
guimbardes H’mong, Dàn Bàu etc. voyage en Juillet 2003) ainsi que celle du didgeridoo et du
shakuhachi au Japon
(Kyoto, voyage en Juillet 2004).
5
I Les lois naturelles du son
Les travaux de Fourier7 nous apprennent que tout phénomène périodique peut
être décomposé en une série de fréquences, composée d'une fondamentale et des
fréquences composant celle-ci.
6
XIIe s. Berger (armonie) « sons agréables » / harmonique, Oresme, lat. harmonicus, du gr. harmonikos,
1361
7
Voir annexe 1 p. 2, Les personnages historiques des harmoniques, Joseph Fourier
6
Partons d’une fréquence simple :
Ce son très particulier est appelé un son « pur » ; i représenté par la sinusoïde
sur l’oscilloscope par exemple. Je n’ai pu trouver aucun instrument acoustique capable
de produire un tel son ; le diapason émet un son relativement proche mais semble
encore se distinguer de celui très cru que produit l’oscilloscope. Les sons que nous
connaissons dans la nature et en musique possèdent en général une fréquence
fondamentale qui est enrichie par au moins une autre fréquence additionnée. En
acoustique, on parle alors de son « impur ».
Un son est donc composé par :
7
C’est à dire que chaque fréquence composante est un multiple entier de la fréquence
fondamentale :
f 0 (2 f 0,3 f 0,..., 3/2 f 0, 1/3 f 0, ...)
Un son composé d’harmoniques possédant une hauteur fixe est alors considéré
comme étant « musical ». Dans tous les autres cas, on parle uniquement de partiels. Par
exemple, les instruments à percussion, instruments qui n'ont généralement pas de
hauteur fixe, ne comportent que des partiels. Les « transitoires d’attaque » (observées
par Carl Stumpf dans les années 1930), c'est-à-dire des composantes du son qui ne sont
pas entretenues, tel un claquement, un choc, le crissement de la colophane sur la corde
d'un violon au tout début du son, sont tous des phénomènes que l’on appelle également
inharmoniques et qui ne peuvent se décomposer qu'en partiels (2,576 f 0, 5,404 f 0, ...).
Cette distinction entre partiels et harmoniques fait naître à l’oreille les phénomènes
d’harmonicité et d’inharmonicité :
Nous verrons que, dans la pratique, la plupart des instruments acoustiques
participe de ces deux phénomènes et mettent en évidence leur relativité8.
8
(fondamentale) jouée à la clarinette ne comportera que les harmoniques 3, 5, 7, 9 (etc.),
le résultat à l’oreille donnant ce timbre si particulier. Un son de hautbois, par contre,
serait plus riche en harmoniques que de son fondamental9. Les quatre formes d’ondes
les plus couramment utilisées en électroacoustique analogique sont, dans l’ordre de
croissance de leur richesse harmonique : sinusoïde, triangle, dent de scie et carré.
On remarquera que plus la courbe possède des angles, plus le son est chargé en
harmoniques.
Depuis la « théorie physiologique de la musique » d’Helmholtz11, ce qu’on
appèle le spectre harmonique révèle l'ensemble des fréquences qui déterminent le
timbre de chaque instrument. La décomposition spectrale des sons est formée, comme
nous l’avons déjà vu plus haut, d’harmoniques, pour les sons musicaux, ou de partiels,
pour tous les autres.
8
Voir chapitre III : Les instruments harmoniques.
9
Maela & Patrick PAUL, Le chant sacré des énergies, présence, 1893.
10
R.E.Jacobsohn manuel d’initiation à l’Ingénierie du Son, Université Paris 8, Département Musique.
11
Voir annexe 1 p. 2, Les personnages historiques des harmoniques, Hermann Von Helmholtz.
9
13. La série des harmoniques :
Ce que l’on appelle aujourd’hui « la série des harmoniques » décrit la suite
linéaire formée par les intervalles de chaque harmonique. Son aspect consonant (en ce
qui concerne les premiers harmoniques) en ferait une référence universelle en matière
d’échelle musicale. Certains ouvrages, comme celui de Maela et Patrick Paul, ont choisi
de présenter cette série en prenant l’exemple d’une corde tendue mise en vibration. Le
repérage de ces rapports peut se faire par le découpage de cette corde en segments
proportionnels:
« Prenons une corde fixée en ses deux extrémités (comme celle d’un violon). La
vibration de la corde (mais le fait est identique dans un tuyau), en arrivant à
l’extrémité, se réfléchie et revient sur elle-même. La superposition des vibrations issues
de la source et des vibrations réfléchies, donne naissance à des ‘‘ondes
stationnaires’’. »
« Les ondes (incidentes et réfléchies) vibrent au maximum dans le ‘‘ ventre’’ : ce sont les ondes stationnaires. Elles se neutralisent
au nœud (la corde reste fixe). »
10
« Les fréquences doubles, triples, quadruples, sont des harmoniques du son
fondamental. Si on laisse la corde vibrer librement, et si on l’attaque à un endroit
quelconque, elle produira simultanément un son fondamental et ses harmoniques.»12
12
Textes et schémas issus de l’ouvrage de Maela & Patrik Paul, Le chant sacré des énergies, op. cit.
11
manifestation sonore de la fréquence fondamentale, c’est à dire le déclenchement du
son, et le reste, la ligne, un espace théoriquement infini sur lequel s’accumulent les
rapports de plus en plus fins des harmoniques.
Cette représentation, comme celle qui peut être dressée sur une portée, met en
évidence le fait que les intervalles se resserrent et se multiplient à chaque nouvelle
octave supérieure. On est alors amené à penser que cette série suit une progression
logarithmique. Or, selon une unité de mesure différente, on peut également constater
une progression linéaire, comme nous le précise R.E.Jacobsohn dans son manuel
d’initiation à l’ingénierie du son. Voici effectivement un autre exemple de
représentation, non pas selon la déclinaison des intervalles, mais plutôt en faveur de
l’unité des fréquences et du diapason occidental actuel (440 Hertz) qui décline les
harmoniques de manière linéaire. Choisissons donc comme note fondamentale un La 0,
égal à 55Hz et qui constituerait le premier harmonique appelé « H1 »14.
13
Jocelyn GODWIN: Les harmonies du ciel e de la terre, Albin Michel, 1994.
14
L’abréviation H1,H2,H3 (etc.) pour désigner les harmoniques est utilisée en acoustique et en
ethnomusicologie, notamment par Trân Quang Hai dans ses travaux sur le chant diphonique. Je suivrai
cet exemple dans la présente étude car cette notation très pratique permet de désigner chacune des
12
reconnaître. Cette étude m’a amené à penser que leur manifestation si particulière n’est
pas comparable aux notes ou aux intervalles. Les harmoniques ont besoin, selon moi,
lorsqu’on les utilise consciemment, d’une appellation appropriée. Pouvoir nommer
clairement cette perception propre à chaque harmonique en toutes circonstances est
bien plus commode avec ces simples abréviations (H1, H2, H3 …) car les autres
systèmes (échelle de fréquences, intervalles, notes tempérées plus ou moins altérées) ne
sont pas toujours précis ou transposables. Ainsi, lorsque l’on mentionne qu’un
instrument joue sur H4, H5 et H8 par exemple, il faut comprendre qu’il s’agit des
intervalles de tierce, de quinte et d’octave, ou bien, par rapport à une note (fréquence)
fondamentale, par exemple Do, il serait question des notes, Mi, Sol et Do.
En faisant correspondre à la valeur ajoutée (par exemple : 55 Hz) une distance
fixe en segments de droite, j’ai retracé sur le papier les rapports des harmoniques sous
la forme d’une spirale (1+1, 2+1, 3+1 etc. selon un angle de 90°, voir annexe 4 p.174 :
spirale de la série des harmoniques). Cette visualisation permet de mieux se rendre
compte de la progression linéaire des fréquences, malgré la différence des intervalles.
On peut en effet remarquer que la spirale conserve la même distance à chaque cycle.
Pour représenter ce phénomène théoriquement infini, nous disposons donc
d’une vision linéaire qui fait s’accumuler des intervalles toujours plus petits d’une part,
et une vision en spirale d’autre part qui, au contraire, va s’élargir à partir de la
fondamentale et qui désignera les harmoniques selon des proportions toujours plus
grandes. La représentation qu’en fait Alain Daniélou dans son traité de musicologie
comparée15 souligne le même phénomène. Elle présente les harmoniques accumulées
selon une superposition de lignes qui correspondent aux octaves supérieures et attribue
à chaque harmonique un nom de note et une fréquence.
« En partant d’une note donnée, la troisième octave ne contient que quatre
harmoniques différents, mais la huitième en contient 128 et la seizième 32.768 . Les
harmoniques les plus proches du son fondamental sont les seules que l’oreille humaine
perçoive aisément, en tant qu’intervalles ; les harmoniques supérieures forment un
ensemble de son confus qui ne sont perçus que comme une couleur qu’ils donnent au
son.
harmoniques, en conservant leurs rapports respectifs, quelle que soit la fréquence fondamentale (do=32
Hz, la=440 Hz, etc.).
15
Alain Daniélou, Traité de musicologie comparée, Hermann, 1959.
13
L’intervalle entre deux harmoniques consécutifs représente toujours une
différence de fréquence égale à la fréquence du son fondamental, c’est à dire 32
vibrations par seconde pour les harmoniques d’Ut dans l’échelle des physiciens (Ut =
puissance de 2). Mais comme nous l’avons déjà remarqué, notre oreille ne perçoit pas
les différences de fréquences égales comme équivalentes (on pourrait aisément
concevoir un organe auditif autrement constitué qui le ferait), mais seulement des
rapports. Les intervalles de l’échelle des harmoniques nous apparaissent donc tous
comme différents, devenant de plus en plus petits à mesure que la fréquence augmente
(que le son est plus élevé). Cette échelle s’encombre très vite d’intervalles basés sur des
chiffres premiers supérieurs à 5 et qui forment des intervalles qui dépassent nos limites
de discrimination et ne peuvent donc être utilisés mélodiquement. Nous donnons ici, en
partant de l’Ut des physiciens, c’est à dire Ut0 = 32, un tableau des premiers trente
deux harmoniques dans l’ordre ou ils apparaissent ; les harmoniques en italique sont
ceux qui ne sont pas pratiquement utilisés en musique. »
• Une autre, tirée du site « khoomei»17 qui présente la série sur deux portées
selon une fondamentale Do = 65,4 Hz.
16
Voir chapitre II, Le cerveau traite, consonances / dissonances.
17
http://khoomei.com/harmonic.htm
14
• La représentation suivante est similaire mais prends pour fondamentale un La
55 Hz, ce qui permet de faire une comparaison avec l’exemple de R. E.
Jacobsohn cité plus haut.
• Enfin, le site de tunesmithy, dans une étude appelé « Why two notes of the
harmonic series sound well together » (pourquoi deux notes de la série des
harmoniques sonnent bien entre elles), propose des représentations (voir annexe
8 p.176 : Représentations de la série des harmoniques) avec des harmoniques
marquées par des points de couleurs, ordonnés sur des portées18. Ces points
sont parfois placés volontairement entre les lignes et les interlignes, afin de se
démarquer des notes de la gamme tempérée. Le site met à disposition des
extraits sonores (format MIDI) qui illustrent ces représentations (voir annexe
CD : série des harmoniques midi).
Les propriétés de l'onde sonore ont été mises en valeur par les Grecs qui ont été
les premiers « expérimentateurs » des relations numériques entre longueur de la corde
vibrante et hauteur du son. Dans cette expérience, la vibration est mathématiquement
reliée à la hauteur du son par des valeurs numériques. De façon totalement empirique,
les pythagoriciens ont découvert cette notion essentielle de rapport entre fréquences, à
l'aide de cette corde tendue le long d'un résonateur, instrument qui sera appelé par la
suite, monocorde. Cet instrument aurait donc été un des premiers dispositifs de
« recherche musicale ».
18
Notons qu’aucune clé ne figure, peut-être pour souligner le fait que la note fondamentale n’a pas besoin
d’être nommée, car le même phénomène est observable pour chaque fréquence.
19
Image tirée du livre de John Beaulieu, Music and Sound in the Healing Arts, Station Hill Press, 1987.
15
142. Les résonateurs d’Helhmoltz (XIX ème siècle)
Dans sa « Théorie physiologique de la musique » Helmholtz présente une
nouvelle théorie de la perception, en s’appuyant sur la mise en évidence des
harmoniques d’un son périodique et le calcul de leur intensité au moyen de résonateurs.
20
Images recueillies en Septembre 2005 sur le site :
http://www.inrp.fr/she/instruments/instr_aco_resonnateurs.htm
16
143. Les sonagraphes et sonagrammes (XXème siècle)
Issu de recherches sur la parole, la conception du sonagraphe remonte aux
années 1940. Créé dans les laboratoires de la compagnie de téléphone Bell (Bell
Laboratories) cet instrument de mesure fut le plus important pour appréhender la
visualisation de la décomposition du spectre sonore. Seul le sonagraphe, appareil de
représentation graphique de la totalité des dimensions du phénomène sonore (temps -
fréquence - amplitude) permettait de suivre un spectre évolutif, c'est-à-dire dont
l'intensité de chaque harmonique variait dans le temps.
Un sonagramme représente l’image de la décomposition d'un spectre sonore en
fréquences harmoniques ou inharmoniques.
17
sensibles21. De ce principe universel découle une série d’autres intervalles
fondamentaux qui vont constituer une base pour l’élaboration de différentes échelles
musicales. Les intervalles de la série des harmoniques dans une octave peuvent donc
être utilisés comme un moyen de reconstruire cette « gamme naturelle ».
Or il existe plusieurs façons de procéder au découpage de longueur d’une corde
(ou d’un tuyau), ce qui entraîne plusieurs types de gammes naturelles. La construction
de ces gammes consisterait donc à diviser l'octave, de la manière la plus régulière
possible, en utilisant pour intervalles les rapports rationnels (au sens mathématique du
terme) les plus simples possibles. Ces rapports sont manifestés par les harmoniques qui
renvoient à une infinité de proportions. Les intervalles des harmoniques formeraient un
premier élément déclinant tous les rapports musicaux. Ainsi, selon Alain Daniélou :
« Tous les rapports sonores possibles sont compris théoriquement dans la série
indéfinie des harmoniques. Il n’existe donc pas de combinaison harmonique ou
mélodique qui ne soit impliquée dans la structure même d’un son unique, puisque la
série des harmoniques n’est autre que la série des nombres. »22
L’auteur met alors également en évidence le fait qu’il est possible de retrouver tous les
intervalles musicaux selon les rapports des harmoniques entres elles :
« Bien que la série des harmoniques contienne implicitement tous les intervalles
utilisables en musique, la plupart sont surtout un rapport entre harmoniques et non
avec le son fondamental. Ils ne constituent pas à proprement parler une gamme
musicale. Ainsi le ton majeur (Ut Ré = 9/8) est-il le rapport du huitième au neuvième
harmonique, le ton mineur (Ré Mi = 10/9) le rapport du neuvième au dixième
harmonique, le demi ton mineur (25/24) est le rapport du vingt-quatrième au vingt-
cinquième harmonique, etc. Le demi-ton tempéré peut- être exprimé par l’intervalle du
1.000.000.000 e au 1.059.463.094e harmonique. »23
Les intervalles ainsi étudiés sont souvent présentés sous la forme d’une fraction. Un
système très fiable qui est utilisé notamment par Daniélou. Il existe une infinité de
rapports de type n/m (n et m étant des nombres entiers) donnant des valeurs comprises
entre 1 (la tonique ou fondamentale) et 2 (l'octave). Pour définir les intervalles naturels,
il a donc fallu choisir, dans cet ensemble infini de possibilités, les rapports les plus
appropriés.
21
Cité par R.E. Jacobsohn , initiation à l’ingénierie du son, op. cit. p. 26.
22
Alain Daniélou, Traité de musicologie comparée, Hermann, 1959, p.32.
23
Idem.
18
Sur le monocorde, par exemple, le rapport entre la longueur totale et le segment de
corde pincée établit des relations qui correspondent à des intervalles musicaux :
1/2 = octave ; 2/3 = quinte ; 3/4 = quarte ; 4/5 = tierce majeure ; 5/6 = tierce mineure
Les gammes naturelles proposées par Pythagore et Zarlino (voir annexe 1 p.164
: Les personnages historiques de harmoniques.) constituent des références importantes
dans l’évolution de la musique occidentale. Elles sont assez complexes et ne
correspondent pas directement au phénomène étudié dans ce mémoire, c’est pourquoi
elles ne seront que survolées.
19
Cette méthode a été largement contestée pour les raisons suivantes24 :
• les sons obtenus sont des harmoniques de plus en plus complexes du son
fondamental.
• l’intervalle de la quarte qui est pourtant issu d’un rapport harmonique très
simple (4/3) est absente.
• le problème du comma : au bout du cycle des 12 quintes empilées, l’octave n’est
finalement pas exactement retrouvé : la différence entre le Si # et le Do
détermine cet intervalle que l’on nomme alors « comma pythagoricien », ce qui
interdit certaines combinaisons de notes et certaines modulations. Ce problème
était, à cette époque, résolu faute de mieux, par ce que l’on appelle en
musicologie la « quinte du Loup».
• certains intervalles très intuitifs (et particulièrement la tierce majeure par
exemple : Do / Mi) ne seraient pas générés de façon parfaite, et sonneraient, en
réalité, assez faux.
D'où les tentatives des théoriciens pour mettre en œuvre d'autres méthodes, basées sur
d'autres considérations. Gioseffo Zarlino (1517–1590) élabore ainsi à son tour une des
multiples gammes naturelles possibles en reconnaissant une place plus importante à
l'intervalle de tierce « juste ». On appelle alors « comma syntonique » l'intervalle
existant entre la tierce majeure « juste » (5/4 = 1,25) et la tierce pythagoricienne (34/26 =
1, 265625) : sa valeur correspond à 81/80, soit 1,0125 légèrement inférieure au comma
pythagoricien. Par ailleurs, l’encyclopédie précise que dans la gamme proposée par
Zarlino, on trouve un ton majeur et un ton mineur de valeurs différentes dans
l'intervalle entre ces deux tons : cet écart vaudrait également 81/80, c'est pourquoi il est
aussi appelé « comma zarlinien ».
Voici une réduction simplifiée à 7 notes des deux gammes naturelles ainsi comparées :
24
Informations recueillies en septembre 2005 sur le site : www.wikipedia.com
20
UT RE MI FA SOL LA SI UT
Pythagore 1 9/8 81/64 4/3 3/2 27/16 243/128 2
Zarlino 1 9/8 5/4 4/3 3/2 5/3 15/8 2
La majeure partie des systèmes de formation des gammes naturelles joue sur la
succession d’intervalles harmoniques plus ou moins simples qui, une fois empilés,
créent des modes relativement complexes. Mon expérience auprès de Philippe Bougon,
qui travaille sur les modes anciens, m’a fait comprendre que ces gammes naturelles
s’éloignent parfois bien loin de leur origine : la série des harmoniques. La gamme qui,
selon moi, serait la plus naturelle, pourrait se résumer aux harmoniques allant de H8 à
H16. Dans son traité de musicologie comparée, Alain Daniélou aborde cette même
gamme en la déclinant de la manière suivante :
« Les intervalles harmoniques sont, dans un certain sens les plus naturels. Si
nous prenons comme base l’Ut, et en considérant seulement les seize premiers
harmoniques parmi lesquels huit sont des notes distinctes et les autres des octaves
supérieures, nous obtenons une gamme de huit tons formés par des intervalles
suivants25 »
Il s’agirait alors des harmoniques : H1, H2, H3, H4, H5 et de leurs multiples par
3 et par 5 : H9, H15 et H25. Le 7è harmonique (sib = 7/4) est donc mis à l’écart. Son
rapport naturel de 7/4 = 1.75 est alors perçu comme une dissonance et remplacé par les
25
Alain Daniélou, Traité de musicologie comparée, op. cit.
21
rapports de 27/16 = 1,6875 (selon Pythagore soit 3 quintes accumulées) ou 9/5 = 1,8
(selon Zarlino) afin de faire entendre une septième mineure plus consonante et
utilisable en musique. L’intervalle du 11è harmonique : 11/8 = 1,375 présente le même
problème et semblerait d’autant plus rejeté par les musiciens qu’il peut être comparé à
l’intervalle du triton considéré dès le Moyen-Age, comme musicalement proscrit, et ce
jusqu’au XIXème siècle où on le décrivait comme « l’intervalle du diable » (si contre fa
es diabolus in musica27). Dans la gamme tempérée, le Fa# fondé sur le rapport 7/5 =
1,4 est une note beaucoup plus consonante que les valeurs déduites par Pythagore :
729/512 = 1,422838125 et Zarlino : 45/32 = 1,40625.
26
Voir chapitre II, le cerveau traite, consonances et dissonances.
27
Information recueillie suite à une conversation téléphonique avec Jean-Paul Rigaud, spécialiste en
chant de la Renaissance et du Moyen-Age.
22
C’est d’ailleurs derrière ce spectre harmonique et son infinie liberté d’intervalles
que Schoenberg justifie certaines de ses œuvres parfois surprenantes comme Erwartung
(1909). Ses oeuvres trouvent à travers les harmoniques des excuses formidables pour
déployer ses dissonances. Il dira à ce propos que « Selon le spectre harmonique, il n’y a
pas de dissonances, il n’y a que des consonances éloignées » 28.
28
Phrase dictée par Mr Martin Laliberté lors du cours de « Mutation technologique » consacré aux
musiques atonales.
23
sorte ». Pour ce qui est des obstacles solides, la vibration émise serait renvoyée sous
forme de « vagues » cohérentes (écho) ou au contraire, de façon aléatoire
(réverbération). Nous nous intéresserons davantage au premier cas qui concerne le
phénomène de la résonance. R. Jacobsohn en fait cette description :
« Cette résonance est l’augmentation de l’amplitude des oscillations d’un
système électrique ou mécanique excité par une force externe, périodique dont la
fréquence est égale à la fréquence propre du système. »
Autrement dit, il serait possible d’exciter un solide avec un matériau sonore en faisant
coïncider leurs fréquences respectives. Selon Jocelyn Godwin, « c’est le comportement
normal de la matière sous l’influence d’ondes. Le résultat est le produit d’une
accumulation d’énergie pendant un certain laps de temps. » 29
Nous pouvons établir un rapport entre les harmoniques naturelles et le
phénomène de la résonance ; il est évident, lorsque l’on observe, par exemple, les
expériences d’Helmholtz, que certaines structures physiques répondent distinctement à
une onde sinusoïdale de fréquence particulière, alors appelée « fréquence propre du
résonateur ». C’est manifestement ce qui se produisait avec les résonateurs qu’il faisait
vibrer et sonner avec des sons. Ces sphères de verre évidées, munies de deux cols
courts diamétralement opposés étaient dirigées vers une source sonore. Une
harmonique de fréquence égale à la fréquence propre du résonateur était alors amplifiée
et mise en évidence par celui-ci. L’encyclopédie Wikipédia souligne à ce sujet un
phénomène intéressant dont nous reparlerons plus loin, notamment dans l’étude des
instruments à cordes sympathiques : « la trace sonore de cette harmonique était même
conservée prisonnière un court instant après l’arrêt de l’émission de la source
sonore. »
Ce phénomène ne serait pas observable qu’au niveau sonore. La résonance, qui
est avant tout un phénomène physique, toucherait également d’autres domaines. Ainsi,
on parlerait également de la « résonance des marées », de la « résonance orbitale », ou
encore de la « résonance dans des circuits électroniques ». On trouve plusieurs
utilisations du phénomène, comme celle des récepteurs de radio et de télévision qui, par
l'intermédiaire d’une antenne, captent toutes les ondes électromagnétiques émises par
les nombreuses stations. Pour écouter une seule station, on doit accorder la fréquence
propre du circuit RLC avec la fréquence de l'émetteur en choisissant une station ou une
29
Jocelyn Godwin, Les harmonies du ciel e de la terre, op. cit.
24
chaîne particulière. L'imagerie par résonance magnétique (IRM) utilise quant à elle la
résonance des protons d'un organisme pour fabriquer des images. Le corps humain étant
composé d'une grande quantité d'eau, en plaçant le corps dans un intense champ
magnétique, on excite les protons contenus dans ses molécules d’eau grâce à une
émission électromagnétique (radio fréquence), jusqu'à les mettre en résonance. On
mesure ensuite les énergies rendues par les protons lors de l'arrêt de l'excitation avec
une antenne. Un ordinateur interprète les informations reçues et les traduit sous la
forme d’une image. Le micro-onde utiliserait également la résonance en agissant sur les
molécules d’eau contenues dans les aliments.
La théorie entière est très complexe et sera donc résumée pour ce travail. Ce qui
est important de souligner ici est le rapport entre la fréquence d’une vibration émise,
son intensité et le résultat laissé par la résonance. La formule physique est très
simplement exposée dans l’encyclopédie Wikipédia. Pour un système possédant une
fréquence de résonance Ω, l'intensité des oscillations I, quand le système est soumis à
une oscillation ω, est donnée par l'équation :
Il s’agirait d’une fonction dite de « Lorentz », que l'on peut retrouver dans de
nombreuses applications physiques relatives aux oscillations. Γ est un paramètre
dépendant de l'oscillateur harmonique.
25
L'amplitude A vaut ainsi :
Plus la fréquence de ω est proche de celle de Ω, plus l'intensité des oscillations est
grande.
L’encyclopédie illustre alors cette théorie par un exemple très parlant :
« Ainsi, par exemple, une cantatrice capable d'émettre un son (vibration sonore)
à la fréquence adaptée peut briser un verre de cristal. »
Je m’étais interrogé sur ce phénomène que je considérais comme une simple
rumeur. J’ai alors cherché des séquences filmées d’expériences qui pourraient illustrer
cet exemple, notamment par le biais d’internet. De très courtes durées, ces extraits
vidéos ne permettent pas de vérifier quoi que ce soit (voir annexes : CD / documents
vidéos / wineglass.avi) de plus, les sites qui les hébergent n’abordent pas la question
des propriétés du verre, ou du matériau susceptible de résonner selon cette voix. La
précision du verre « en cristal » demande certaines explications. Qui n’a pas déjà fait
l’expérience de faire entrer en résonance un verre à pied (pas nécessairement en cristal)
en le frottant régulièrement avec son doigt sur le bord préalablement humidifié ? On
peut alors entendre un son qui semble planer autour du verre. Mais l’intérêt de mon
étude est de découvrir, plus précisément, les effets d’un son quelconque (ou d’une
harmonique) sur un corps tout aussi quelconque, sans qu’il n’y ait véritablement de
contact physique entre l’émetteur et le récepteur.
26
Afin donc de mettre en résonance un objet, les paramètres du son seraient ainsi :
un timbre, qui contiendrait peu d’harmoniques, une durée, plutôt longue afin que l’objet
puisse avoir un certain temps d’adaptation pour entrer en résonance (aussi court soit-il),
une amplitude : un volume plutôt fort, une hauteur : accordée avec la fréquence propre
du matériau, et enfin une distance : afin que les ondes sonores puissent accéder
physiquement à l’objet avant d’épuiser leur énergie.
L’apparition de la résonance serait relative à la forme physique de l’objet: on a
vu par exemple qu’avec les résonateurs d’Helmholtz, la forme sphérique ouverte en
deux endroits était particulièrement efficace. Cette forme contiendrait également la
notion d’épaisseur du matériau (le pied plus épais du verre brisé reste intacte par
exemple) mais aussi la masse ; le module élastique ; la structure cristalline ; le mode de
vibration caractéristique du solide (phonon) et son arrangement moléculaire. Ce sont
les principaux paramètres que Philippe Bougon m’a aidé à mettre en évidence et à
prendre en compte (sans parler d’autres paramètres que je n’ai su remarquer ou
comprendre).
Jacques Dudon (Atelier d’Expérimentation Harmonique), que j’ai pu rencontrer
lors du festival des « Noces Harmoniques » en Août 2005, m’a également aidé à mieux
comprendre ce phénomène en me précisant qu’un objet résonnant, mécanique,
acoustique, ou électromagnétique, possédait en général plus d'une fréquence de
résonance (en particulier les harmoniques de la résonance la plus forte). En pratique la
fréquence principale de résonance est proche et légèrement supérieure à sa fréquence
propre.
30
Jocelyn Godwin, Les harmonies du ciel e de la terre, op. cit.
27
« Dans les cordes de luth, si on en pince une, celles qui sont plus élevées qu’elle
d’une octave ou d’une quinte tremblent et résonnent d’elle même »31.
On peut en faire l’expérience également avec un piano en libérant les
étouffoirs ; jouer une note permet d’entendre, au relâchement de la touche, certaines des
cordes, ainsi libérées et mises alors en résonance. Ce sont uniquement les cordes dont la
fréquence correspond aux harmoniques de la corde frappée qui se mettent en résonance,
on dit qu’elles « vibrent par sympathie ». La série est alors relativement audible.
Dans l’histoire de la musique occidentale, les interprétations de ce phénomène
sont multiples, allant du phénomène acoustique observé scientifiquement jusqu’à des
manifestations symboliques et mystiques (c’est le cas notamment avec Robert Fludd),
en passant par la philosophie, comme le souligne Luc Breton32 en citant G. de
Venise pour son approche du phénomène : « La sympathie ressemblance apparaît
finalement au principe même de l’Harmonie du monde car ‘‘toute chose entre elles
même et par réciproque accords se répondent’’ ».
Raymond Court33, décline trois formes de sympathies en fonction des
différentes approches du phénomène et selon des personnages historiques :
o la sympathie - ressemblance (Ficin)
o la sympathie - mécanisme (Descartes34)
o la sympathie - altérité (Max Scheler)
31
Texte de Descartes dans son abrégé de musique : Compendium musicae (1618), recueilli dans
l’ouvrage de J.Godwin, les harmonies du ciel et de la terre, op. cit.
32
Luc Breton, « Les instruments à cordes dans l’occident chrétien » in Amour et sympathie, l’ensemble
Baroque de Limoges, 1995.
33
Raymond Court « Musique et sympathie » in Amour et sympathie, op. cit.
34
Voir annexe 1 p. 164 : Les personnages historiques des harmoniques, Descartes.
28
certains de ces instruments sont encore largement utilisés au sein de leur tradition
musicale35.
35
Voir aussi chapitre III, Instruments à cordes sympathiques.
29
En 1940, des bourrasques intermittentes provoquèrent des vibrations de torsion
du pont de Tacoma Narrows (USA) d'une amplitude telle que le pont s'effondra. Des
précisions sont présentées sur un site intitulé : « pont et résonance »37. Le pont aurait
d’abord vibré en mode transversal avec une fréquence d’environs 36 hertz et une
amplitude de 1,5 pieds. Mais, plus tard, il se serait mis dans un nouveau mode de
vrillage, avec une torsion en deux segments pour une fréquence d’environ 14 hertz. Ce
nouveau mode a causé l’effondrement du pont sous l’effet de la résonance provoquée
par le vent, par un mécanisme appelé « vortex ». Une fois que le pont a commencé à se
tordre, le vent a continué à le conduire vers la résonance, et l’amplitude de la vibration
a augmenté pour finalement dépasser les limites de résistance du pont (voir annexes :
CD / documents vidéos / tacoma.avi).
262. La résonance des vagues :
Dans un autre domaine, on parle aussi de la résonance de la houle des vagues
qui provoque le roulis des navires. Ceux-ci sont construits de telle sorte que leur
période propre vis-à-vis des oscillations dues au roulis soit nettement supérieure à la
période moyenne de la houle : l'amplitude des oscillations forcées est alors faible,
quelle qu'en soit la fréquence.
36
J’ai rencontré Philippe Bougon à Aix en Provence, lors d’un stage sur l’harmonisation par les bols
chantant, le didgeridoo et le chant diphonique.
30
Elles se manifesteraient aussi bien mécaniquement, au moyen d’appareils (hélicoptères,
tanks, marteau-piqueurs, machines industrielles…) qu’acoustiquement. Or elles sont
inaudibles à l’oreille humaine et extérieures aux bandes passantes des amplificateurs et
enceintes traditionnels. Pour que le corps puisse être en contact avec ces vibrations très
lentes, il est donc nécessaire de concevoir des machines qui soient capables de les
reproduire. Selon Bernard Auriol38, certains organes vestibulaires (utricule, saccule,
canaux semi-circulaires) seraient sensibles à de très basses fréquences et pourraient
provoquer certains effets d’ordre psychologique : « mal des transports et troubles
digestifs de 0 à 2 Hz ; dorsolombalgies, déplacements vertébraux, surventilation, baisse
d’acuité visuelle (etc.) concernant les fréquences de 4 à 10 Hz39 . La tête dans son
ensemble, entrerait en résonance entre 10 et 20 Hz. Entre 25 et 40 Hz, puis entre 60 et
90 Hz, c’est l’œil qui se prend à souffrir »40.
Les chercheurs anglais John Barker et Mark Newbold, qui travaillent sur les
effets des vibrations acoustiques, indiquent que les « très basses fréquences »
commencent à être dangereuses en dessous de 14 Hz et sont extrêmement dangereuses
à 7 Hz.
Nous verrons dans le Vème chapitre comment certaines thérapies, comme celle
de Marie-Louise Aucher, ont su retourner ce phénomène pour en tirer profit et comment
certains sons pourraient, au contraire, être perçus positivement et utilisés comme un
moyen de « soigner le corps » et de « diminuer le stress ». Plusieurs appareils à infra-
basses auraient ainsi été conçus par ailleurs pour diminuer cette tension. Leur principe
serait basé sur l’injection d'une onde rectangulaire de fréquence comprise entre 3 et 14
Hz. Un utilisateur de l’inducteur alpha témoigne : « Pendant la courte expérience qui
n'a duré que 20 minutes environ je n'avais jamais ressenti un niveau de relaxation
comparable. »
On pourrait dès lors penser que ces pratiques et ces interprétations seraient dues
à un amalgame entre plusieurs modes de fréquences et de résonance. Sur le plan des
pulsions électriques, par exemple, les vibrations auraient de tout autres effets. Un article
intitulé « Ondes Cérébrales »41 décrit les très basses fréquences en fonction des ondes
37
Informations recueillies en Septembre 2005 sur le site : www.ac-nice.fr/physique/Oscillateur/pont.html
38
Bernard Auriol, la clef des sons, érès, 1994
39
Idem (Delhaye, 1968 ; Woods, 1970)
40
Bernard Auriol, idem (Benitte, 1965)
41
Observé en Septembre 2005 sur le site : http://www.midi-plus.com/Sommeil_Profond.htm#projet
31
émises par le cerveau lors des « états modifiés de conscience » comme l’hypnose, la
relaxation ou le sommeil.
42
Document vidéo : « Zen, ici et maintenant, partout et toujours » de Arnaud Desjardins.
32
II Capacité à percevoir les sons
Quels sont nos moyens de percevoir les vibrations sonores ? Quels sont nos
moyens de les ressentir, de les traduire, de les interpréter, de les intégrer ou de les
rejeter, ou bien encore de les manifester par telle ou telle action, telle ou telle réaction?
Nous avons manifestement notre corps, nos oreilles, notre système nerveux et notre
cerveau. Ce sont les organes qui réagissent principalement à la réception, la perception
et l’interprétation d’un message sonore. Mais nous verrons comment la peau ainsi que
tous les autres organes du corps peuvent aussi participer à cette communication. Nous
avons vu comment les fréquences infra-basses peuvent agir sur le corps, et nous savons
aussi que les harmoniques d’un son peuvent s’étendre vers les aigus, au delà de nos
capacités de perception. Or, si nous ne les percevons pas consciemment, nous pourrions
être amenés à les recevoir, inconsciemment.
Ce chapitre cherche à mettre en évidence le fait que l’on entendrait pas qu’avec les
oreilles ; pensée qui, dans certaines musicothérapies ou bien dans certaines cultures
du monde (c’est le cas de l’Inde par exemple), est considérée comme un fait
véritable. Rappelons, avant de nous intéresser aux moyens de perception que
possède notre corps, les propriétés que possède tout évènement sonore.
43
Issu du manuel de Ricardo E. Jacobsohn, Initiation à l’Ingénierie du Son, op. cit.
33
Ces paramètres sont identifiables par l’oreille ou plutôt par les oreilles, car
comme le fait remarquer A.Tomatis, « s’il est vrai qu’il existe deux oreilles répondant
à des structures anatomiques semblables et obéissant à des lois acoustiques analogues,
il n’en est pas moins vrai qu’elles se différencient essentiellement dans leur fonction
autorégulatrice. En effet, l’une d’entre elle est privilégiée et mérite le nom d’oreille
directrice. C’est elle seule qui permet de contrôler, de viser le son. Elle est à droite
chez le droitier, à gauche chez le gaucher »44. Or le spécialiste explique également que
cette oreille directrice n’est pas pour autant indépendante. L’oreille opposée, quant à
elle, tiendrait un rôle important dans la notion de relief, et de directivité d’un son. En
suivant cette remarque, et pour l’étude actuelle qui peut concerner des écoutes dont la
source serait plus ou moins éloignée du corps, j’ajouterai, comme paramètre du son,
l’élément de la spatialisation qui permet de qualifier la localisation de l’émetteur par
rapport au sujet récepteur (droite, gauche, haut, bas, éloigné, proche voire directement
en contact avec la peau, etc.).
La spatialisation pourrait donc être appelée relief, elle serait mesurée en fonction de la
distance et évaluée sur trois dimensions.
En suivant ces données, il est évident qu’un long son fort, proche, grave et
feutré aura un impact totalement différent de celui d’un son court, faible, lointain, aigu
et strident. Comme nous serons amenés dans cette étude à définir la qualité de
plusieurs sons ainsi que leur effets, je propose une notation qui nous permettra de
donner un aperçu des conditions d’écoute de certaines musiques. Observons grâce aux
tableaux suivants, deux exemples volontairement opposés des qualifications d’un son
perçu. Ce système, bien qu’approximatif, permettra de distinguer et de regrouper les
différents instruments et musiques étudiés selon une condition d’écoute relativement
neutre.
44
Alfred Tomatis, l’oreille et la voix, R.Laffont, 1987.
34
Exemple d’un son qui fait sursauter45 :
Son surprise
Volume faible O fort
Hauteur grave O O O aigu
Timbre feutré O perçant
Durée court O O long
Spatialisation proche O lointain
1. L’oreille capte
45
Pour des raisons de commodité, j’ai rassemblé selon deux directions (indiquées par les flèches), les
qualifications relatives à chaque paramètre du son. Les cases marquées par un petit cercle désignent ainsi
sur quatre niveaux des conditions d’écoute générale pour chaque évènement sonore. Ainsi, le « Volume »
de la « berceuse » par exemple sera « plutôt faible ». Il est possible que plusieurs cases de la même ligne
soient marquées, comme c’est le cas pour la « Hauteur » du « son surprise » : les trois marques indiquent
donc que le son émis se répand globalement sur des registres allant du « moyennement grave » à l’
« aigu ».
46
Bernard Auriol, la clé des sons, Shaw, 1974, p. 19.
35
12. L’oreille moyenne
A travers le fonctionnement de l’oreille moyenne, nous voyons se manifester le
phénomène de la résonance : la vibration, captée par le pavillon, parcours le conduit
médian jusqu’au tympan, une membrane souple qui vibre alors par sympathie selon les
oscillations de l’air et qui marque l’entrée dans la zone de l’oreille moyenne. C’est ainsi
que nous pouvons constater très concrètement le phénomène qui nous intéresse au sein
même du corps humain. Cette zone est reliée à l’arrière gorge par la trompe d’Eustache
et permet notamment par la déglutition ou par les bâillements, d’ajuster les variations
de pression atmosphérique du milieu extérieur. Or l’activité de l’oreille moyenne
concerne essentiellement le rôle des trois osselet : le marteau, lié par son manche au
tympan, l’enclume et l’étrier qui lui est solidaire de la membrane qui obture ce qu’on
appelle « la fenêtre ovale» (une ouverture de 3 mm² recouverte d’une membrane)47 .
L’étrier va alors transmettre la vibration à un organe de mécano-réception en forme
hélicoïdale de deux tours et demi, appelée cochlée.
47
Voir annexe 12 p. 180 : schéma de l’oreille.
36
Chaque vibration, perçue par une oreille en bonne santé, observe ce processus
d’analyse et de transformation. C’est un organe qui fonctionnerait sans relâche. Nous
percevrons toujours et à chaque instant des sons. En ce sens, j’affectionne
particulièrement l’idée qui souligne que « l’oreille n’a pas de paupières ». Les oreilles
reçoivent donc en continu des informations vibratoires, des pressions et dépressions
d’air au niveau des tympans. La résonance ce fait donc au niveau des tympans mais
aussi au niveau de la membrane de Reisner. De plus nous sommes encore une fois
amenés à penser qu’elles ne sont pas les seules à le faire. La peau pourrait aussi être
considérée comme une sorte de membrane qui, elle aussi, transmet des informations
électriques au cerveau par l’intermédiaire des neurones du système nerveux.
2. Le corps ressent
48
Marie-Louise Aucher, les plans d’expression, épi.1983.
49
Dictionnaire le petit Larousse illustré, définition du mot : « toucher ».
37
organes seraient alors des instruments de perception des sons. La psychophoniste
Marie Louise Aucher 50 explique :
« L’homme à l’état d’écoute perçoit par son corps entier les vibrations qui lui
parviennent, et son système nerveux conduit jusqu’aux centres de l’audition, puis au
cerveau les perceptions captées. Cette réception sensorielle va se faire surtout par le
truchement du tact, l’un des sens dont nous n’usons guère que très grossièrement, faute
d’entraînement musical sonore. »
Il existe des exercices, notamment à travers la pratique du yoga, qui visent à
aiguiser nos sens de perception, en développant une certaine « hyper-sensibilité » de nos
organes sensoriels. On peut par exemple concevoir qu’un non-voyant finit par atteindre
un niveau de perception de l’ouïe et du toucher plus sensible que celui d’un voyant. Ces
exercices pourraient se résumer à une attention accrue, ainsi qu’une grande
concentration portée au niveau d’un sens en particulier ou bien de plusieurs à la fois.
J’ai personnellement appris, depuis environs 5 ans, à travailler en ce sens, notamment
avec l’aide du kinésiologue51 O. Fraysse, et en fonction de différents instruments et
sources sonores. J’ai pu conclure que, pour ressentir un son au niveau tactile,
l’événement sonore doit répondre à des critères particuliers.
Voici une représentation graphique d’un exemple de son facilement perceptible
au niveau tactile52 :
Son tactile
Volume faible O O fort
Hauteur grave O O aigu
Timbre feutré O O O O perçant
Durée court O O O O long
Spatialisation proche O lointain
Le son devra donc être diffusé avec un volume assez important et la source
devra être plutôt proche de l’auditeur, ou même d’une partie de son corps. Les sons
graves sont plus aisés à ressentir, mais on peut supposer que les sons plus aigus peuvent
également être perçus plus subtilement par le corps.
50
Le terme « psychophoniste », est utilisé par M.L.Aucher : il est dérivé de la « psychophonie » qui
correspond aux recherches thérapeutiques sur le chant et la résonance de celui-ci dans le corps même du
chanteur.
51
La kinésiologie est une médecine qui est basée sur les maux du corps en relation avec l’état psychique
et émotionnel du patient ; elle utilise volontiers le patrimoine des médecines traditionnelles chinoises et
indiennes et par le « test musculaire » permet de communiquer directement avec les cellules du corps.
38
Il existe, dans divers ouvrages comme ceux de M.L. Aucher, et d’autres encore
n’ayant pas spécialement de lien direct avec la musique et la perception des sons53,
plusieurs petits exercices qui permettraient d’aiguiser notre perception du toucher.
L’idée souvent développée est de relâcher le système intellectuel et critique avant de
commencer l’expérience, puis de se concentrer sur une partie de notre corps, la main
pour prendre un exemple simple, et, dans un environnement calme, tenter de ressentir
quoi que se soit en s’approchant très lentement d’une surface comme une table, sans
jamais réellement la toucher. Certains peuvent alors ressentir la chaleur de leur propre
corps réfléchie, globalement très perceptible, ainsi que d’autres sensations plus
subjectives et personnelles s’éloignant quelque peu de notre sujet actuel. Les livres qui
abordent ce sujet décrivent le phénomène de manière plus ou moins scientifique. Il
navigue ainsi entre le milieu ésotérique qui parle « d’aura » (déclinée sous plusieurs
couches de perception et souvent en relation symbolique avec divers états
psychologiques et émotionnels) et un milieu plus scientifique, comme dans l’ouvrage
de Cyril W. Smith & Simon Best54 qui met en évidence des phénomènes
électromagnétiques. Barbara Ann Brennan, dont l’approche scientifique du phénomène
est tout aussi prononcée, parle dans son ouvrage de « Chant d’Energie Universelle » :
« Il sature tout l’espace, tous les objets animés et inanimés, connecte tous les
objets et s’écoule de l’un à l’autre. Sa densité est inversement proportionnelle à la
distance de sa source. Il obéit aussi aux lois d’induction harmonique et de résonance
sympathique. On observe ce phénomène lorsqu’on heurte un diapason. Si un autre
diapason se trouve à proximité, il se met à vibrer à la même fréquence et produit le
même son. » 55
On retiendra les travaux de recherche dites « scientifiques » du russe Semyon
Kirlian qui, en 1939, a mis au point un système pour photographier cette « aura » en
noir et blanc. De nos jours, grâce aux progrès technologiques, des chercheurs ont mis
au point un matériel qui permet de reproduire, selon le même principe, des images en
couleurs et en animations56. Cet exemple est souvent utilisé en musicothérapie pour
convaincre les plus septiques et les plus insensibles.
52
Lorsqu’une ligne entière est marquée, cela signifie que l’évènement sonore peut être émis de manière
indifférente selon le paramètre concerné. Ainsi, selon l’exemple, un « son tactile » peut être facilement
perçu avec n’importe quel timbre et aussi bien selon une durée brève que longue.
53
Par exemple l’ouvrage de David Servan-Schreiber, Guérir, Robert Laffont, 2003.
54
Cyril W. Smith & Simon Best, L’homme élecrto-magnétique, Marco Pietteur, 2002.
55
Brennan Barbara Ann, Le pouvoir bénéfique des mains, Paris, éditions sand, 1993.
56
Voir aussi annexe 20, p. 31 : photos kirlian d’une pomme tranchée et d’une feuille coupée.
39
Appareil kirlian et photographies de l’aura Photographie kirlian
des pieds et des doigts57 d’une feuille d’arbre58
57
Images recueillies en Octobre 2005 sur le site : http://www.kleurenpunctuur.nl/prod.htm
58
Idem sur le site : http://home.earthlink.net/~johnrpenner/Articles/Auras.html
59
Tels que : John Beaulieu, M.L.Aucher, O.Robidou, J.Cope etc.
60
Voir aussi chapitre IV, les instruments harmoniques, bol en métaux.
40
22. Les basses amplifiées et le corps
C’est donc dans le phénomène du son amplifié que l’on peut nettement
expérimenter la sensation tactile du son. Les organisateurs de concerts de musique
amplifiée sont souvent amenés à sonoriser une vaste salle ou bien un espace extérieur
important, afin que le public (ou récepteur) puisse profiter de l’événement sonore dans
de bonnes conditions. Les ingénieurs du son comme Tony Lheureux61 travaillent pour
que la sonorisation d’un public soit optimisée selon les nombreux paramètres comme le
vent (en extérieur) ou la température, les obstacles de la salle, la réverbération naturelle
(etc.) Le niveau d’écoute pour l’auditeur dépend également du bruit ambiant de la salle
qui, dans certains concerts, est très élevé. On peut d’ailleurs observer, depuis les
dernières décennies, une tendance à sur-sonoriser. J’ai pu recueillir, dans différents
types de concerts, les témoignages d’auditeurs, d’ailleurs généralement âgés de plus de
30 ans, qui constatant de plus en plus ce phénomène. « Le son est trop fort ». Les
organisateurs distribuent même parfois des protections auditives au public dans leurs
propres concerts62. Or, une majorité du public semble toutefois manifester un réel
plaisir à cette sur-sonorisation. Comme je l’ai compris, lors d’un stage dans les studios
de Opus Systèmes, il s’agirait d’un procédé qui viserait à apporter un certain
dynamisme au concert, (l’ingénieur du son ou le Dj joue véritablement avec le volume
sonore tout le long du concert ou d’un même morceau). Peut-être cette sur-sonorisation
reflète-t-elle un nouvel intérêt collectif et social, conscient ou non, pour la sensation
tactile du son.
Les enceintes disposées lors de certains événements sont parfois démesurées ou
en nombre important (concerts, soirées à Dj, festivals musicaux, free party, installations
sonores expérimentales, etc.). La puissance des amplificateurs et des enceintes se
compte alors en kilo watt et l’on parle de « mur de son », soit une série d’enceintes
gigantesques poussées à un volume pour certains insupportable à l’oreille nue. Mais
alors pourquoi ?
Connaissant bien ce même phénomène dans des milieux très variés, ainsi que
l’esprit général des personnes qui y participent, l’effet induit par les fréquences basses
pourraient, selon moi, être un élément de réponse car, une fois amplifiées, elles
semblent attirer l’intérêt du public, à travers ces membranes monstrueuses. J’ai pu
d’ailleurs constater, dans plusieurs soirées de ce type, un phénomène comportemental
61
Tony Lheureux, « la sonorisation » in le livre des techniques du son, Denis Mercier, fréquences, 1998.
41
plutôt révélateur : les auditeurs se regroupent devant les enceintes comme devant une
scène, sous forme de rangs, et lorsqu’une personne du premier rang libère sa place, la
personne située dernière s’avance pour pouvoir profiter à son tour (car il semble alors
beaucoup apprécier) du contact direct avec le son. Certaines personnes du public
attendent ainsi leur tour pour prendre, si l’on peut dire, une « douche sonore ».
Il pourrait s’agir, comme beaucoup de personnes le pensent, d’un comportement
anormal, comme c’est parfois le cas lors de ces manifestations, au quel cas d’autres
critères entreraient en jeu. Mais n’excluons
pas pour autant l’hypothèse d’une autre
forme d’attirance peut-être plus sensible et
instinctive. Les enceintes qui diffusent ces
fréquences basses à même le corps semblent
attirer l’auditeur réceptif, toujours plus
proche d’elles, comme si son corps y était
aimanté. Exemple d’un « mur de son »
Ceci est remarquable pour certains styles de musique. Il s’agit le plus souvent
de musiques binaires, répétitives et très dansantes (les musiques techno : house,
hardtech, trance etc.) ou des musiques plus calmes mais dont le volume reste très élevé
(Reggae, Dub, trip-hop, ambiante, électro etc.). Notons également que le public du rap,
de la drum’n bass et surtout du ragga manifeste également cette attirance pour les
basses, leurs répétition et, pourrait-on dire, leur « texture ». Certaines musiques
expérimentales contribuent volontiers à ce phénomène lors de leur représentation,
parfois dans des galeries d’art sonore63. Aussi bien dans les courants minimalistes que
maximalistes, la perception tactile du son donne naissance à de nouvelles installations
sonores. On remarquera que ces styles de musiques correspondent aux critères établis
dans le tableau concernant l’exemple du « son tactile ».
Sans parler seulement des musiques amplifiées, les basses d’un orchestre
(cordes et cuivres) tiendraient, semble-t-il, un rôle comparable. Il semble tout à fait
envisageable d’écouter n’importe quel type de musique de manière tactile, sachant que
62
C’était le cas par exemple lors du 16eme Festival de Marne, Choisy-le-Roi, octobre 2002.
63
Par exemple, la représentation expérimentale de Richard D. James, au Palais de Tokyo en Février 2004
qui répartissait une vingtaine d’enceintes dans plusieurs galeries, et faisait entendre en continue plus
d’une heure de sons éléctro-ambiante au volume relativement poussée. Le public était silencieux et
attentif, certaines personnes s’allongeaient près des enceintes pour mieux apprécier les sons.
42
pour obtenir un résultat satisfaisant, une protection auditive est toutefois conseillée
(pour s’aider à écouter avec la peau, plus que pour se protéger réellement du volume),
ainsi qu’un choix de musique qui contiendrait des fréquences basses.
L’écoute tactile des harmoniques peut être une très bonne occasion d’en faire
l’expérience. Une forte fondamentale assez grave et ses harmoniques conviendraient
parfaitement à ce type d’expérience ; c’est d’ailleurs dans cette optique que, lors de
leurs séances d’écoute, des musicothérapeutes comme Oriane Robidou visent une
certaine « harmonisation » du corps64.
En approfondissant le thème des vibrations tactiles du son, je me suis demandé
si, avec cette sensibilité tactile et par d’autres moyens plus matériels, il nous était
possible d’aller jusqu’à reconnaître véritablement une mélodie sans l’entendre, mais
uniquement en la ressentant tactilement, par l’intermédiaire d’un matériau résonateur.
Dans cette approche, le son tactile prend alors une dimension de contact réel avec le
corps.
64
Sujet développé dans le chapitre V.
65
Jonathan Sterne, The Audible Past, cultural origins of sound reproduction, duke, 2003.
43
l’eau, à travers le bois, les murs (etc.). La structure filtre le son et retransmet une image
sonore relativement fidèle à la vibration source. Voici quelques exemples de la vitesse
de propagation des sons audibles d’une fréquence comprise entre 15 Hz et 15 Khz à une
température de 20°C66 :
Célérité du son
Matériaux
en (m/s)
Air 343
Eau 1480
Glace 3200
Verre 5300
Plomb 1200
PVC (mou) 80
Béton 3100
Hêtre 3300
Richard Waters, permet de jouer de la musique dans l’eau et en faisant résonner des
harmoniques naturelles.
66
Tableau issu de l’encyclopédie Wikipédia.
67
Voir chapitre III, les instruments harmoniques modernes.
44
Quoi qu’il en soit, l’expérience de poser la main sur une surface vibrante peut
nous faire comprendre à quel point le toucher est capable de traduire une information
sensible des vibrations. La communication d’une vibration sonore pourrait donc aussi
se faire par le contact réel, grâce à une matière conductrice, comme le bois ou le métal,
qui serait capable de transmettre les vibrations tactilement. A défaut de l’usage des
tympans, la propagation du son à travers des matières conductrices solliciterait d’autres
moyens de perception. Nous pouvons par exemple remarquer que notre corps est très
réceptif et sensible aux vibrations par le contact avec les ongles, les dents et parfois
même, mais plus subtilement, par les cheveux. Peut-être serait-ce parce qu’ils
appartiennent aussi bien à l’anatomie externe qu’interne? Nous pouvons d’ailleurs
illustrer cette pensée avec l’exemple populaire de Beethoven qui, devenu sourd et
habitué à sa représentation mentale de la musique, avait recours à la perception
vibratoire appelée « vibro-tactile » par le Professeur Guberna, à l'origine de la Verbo-
Tonale69. Ainsi, pour vérifier la musicalité de ses créations, le compositeur mordait une
pièce de bois reliée à la table d'harmonie du piano, et sa tête s'emplissait de vibrations
par conduction osseuse. Certains musiciens utilisent le diapason acoustique en le
plaçant sur une partie osseuse du corps ou bien même sur les dents, afin de ressentir la
fréquence plus nettement et de manière interne.
Nous pouvons également, afin de mieux comprendre les rapports entre le corps
et le son, nous intéresser aux sensations de personnes qui ne peuvent écouter et ressentir
les sons que de manière tactile.
68
Informations et photos recueillies sur le site de Richard Waters en Septembre 2005 :
http://www.richardawaters.com/waterphone
69
Informations recueillies dans le mémoire de Martine Boyer : la musique chez les enfants sourds, le 26 /
10 /05 sur le site : http://atelieroptiona.free.fr/moires/mabo.html
45
• une surdité de perception, qui correspond à une atteinte de l'oreille interne ou
des voies nerveuses souvent importante et provoquant des troubles du langage.
• une surdité mixte, dont les causes, origines et sièges auront une incidence vis à
vis du son musical.
Il faut savoir que le sourd de naissance et le devenu sourd, en tenant compte de l'âge
d'apparition de la surdité, ont des cultures musicales différentes.
Le degré de surdité est calculé en faisant la moyenne des pertes à 500Hz, 1000Hz,
2000Hz. On prend la valeur précise à chaque fréquence, puis on les additionne et on
divise par 3. Les réactions aux vibrations sonores, selon les cas peuvent alors varier
considérablement. La notion d’espace est également très importante, les ressentis pour
un même volume variant considérablement selon que l’on soit plus ou moins proche de
la source sonore.
Voici le témoignage de Martine Boyer, qui partage ses expériences avec des
enfants sourds dans le domaine de la perception de la musique :
« Lorsque les vibrations du son ne passent pas par l'oreille, elles peuvent être
perçues à travers une résonance de la boîte crânienne ou d'une autre partie du corps.
Le corps tout entier peut être impliqué. La personne sourde peut recevoir des
46
vibrations à travers le massif osseux spongieux de la mastoïde ou par les membres
inférieurs, ou à la hauteur du plexus par exemple. La sensation vibratoire doit exister
pour donner la dimension sensorielle au son.
C'est ainsi que lors de la séance d'écoute au Centre Grosselin j'ai pu voir que
certains enfants mettaient les mains ou leurs orteils sur les hauts parleurs, d'autres se
servaient d'un conducteur comme le ballon de baudruche, des cônes en carton ayant
servis dans les usines de bobinages de fils.
Avec le groupe de 7 enfants de 6 à 13 ans, sourds et en difficulté scolaire de
Florence Moleux, nous proposons de s'installer autour d'une table où un
magnétophone est posé. Les enfants sont invités à écouter un morceau musical et pour
faciliter leur écoute on leur a donné des ballons de baudruche, des cônes. Ils savent
d'où vient la source sonore mais ne sont pas satisfaits : ils veulent ressentir le son. Ils
mettent les mains sur les haut-parleurs, prennent les ballons qu'ils approchent des
haut-parleurs posent leurs mains ou leur oreille, de la même façon ils expérimentent
avec les cônes ; ils sont en recherche pour une meilleure écoute, ils établissent un
contact avec la musique. Quand ils ont trouvé leur meilleur confort d'écoute, ils
prennent la véritable dimension de leur ressenti et accompagnent la musique qu'ils
entendent de frappes de mains, de balancements, de mouvements corporels.
Prenons une autre séance vue dans une classe lors d'un stage. Le groupe est
composé de 5 enfants sourds profonds et sévères de grande section maternelle. Les
enfants sont dans une salle aménagée spécialement pour l'activité musicale et
disposant d'un plancher vibrant. La salle est dans une semi-pénombre. Les enfants vont
écouter une cassette vidéo des "Tambours du Bronx". Chacun s'installe selon son
ressenti : l’un reste debout, alors que les autres s'allongent en s'étirant comme s'ils ne
voulaient épargner aucun muscle, aucune partie du corps et ils écoutent en regardant
la cassette. Un des enfants réagissait à chaque changement de rythme, d'intensité ; sa
tête se rentrait dans ses épaules quand les musiciens manifestaient leur colère, son
visage se crispait quand il a entendu l'orage, et une sérénité est apparue lors des
sonorités douces. Deux autres frappent sur le plancher en même temps que les
musiciens et leurs gestes reproduisent ce qu'ils entendent. Les autres vivent la musique
visuellement.
47
Troisième expérience.
Les enfants sont dans une salle bien aménagée, de bonne acoustique, à la décoration
qui rappelle les musiques que l'on écoute (en l'occurrence, ici, tapis au décor naïf
africain) et un matériel hi-fi de bonne qualité. La pièce est mise dans le noir, des gants
blancs ont été distribués, la musique est mise en route et les enfants traduisent leur
écoute par une expression corporelle axée aux mains, bras et doigts. La magie est
totale, les enfants s'expriment. Les mouvements sont amples, les doigts bougent
rapidement quand la musique est forte, et ils se recroquevillent pour exprimer le doute,
des nuances de crescendo et de decrescendo peuvent apparaître chez certains mais
l'adulte a une télécommande et quand il stoppe la musique les enfants font la statue, le
silence est marqué par l'inaction.
Analysons le jeu des boites de graines. Il faut remplir des petits pots (style yaourts) de
sucre en poudre, de sucre en morceaux, de cailloux, de grosses pâtes en quantité égale
dans ces boîtes destinées à former une paire et bien refermer. Visuellement les boîtes
doivent se ressembler. Chaque enfant essaie de reconstituer une paire en secouant les
boîtes. Ce jeu est très intéressant car la sensation tactile et l'audition s'aident. Mais
nous avons constaté qu'il faut donner des graines, des objets qui se différencient très
nettement car des enfants sourds perçoivent difficilement des différences de ton peu
importantes»70.
Ces expériences nous montrent combien les enfants sourds, selon leur degré et
domaine d’handicap, sont réceptifs aux vibrations sonores et à la sensation musicale.
Les mélodies sont moins bien ressenties que les rythmes évidemment, mais, pour
certains, il y a une réelle distinction des intensités et des registres de fréquences
graves/aiguës.
70
Témoignage recueilli le : 26 / 10 /05, sur le site : http://atelieroptiona.free.fr/moires/mabo.html
48
de « vibro-acoustique » et fait office d’un type très particulier de musicothérapie et de
thérapie par le son.
Le soundbeam project71, de John Barker et Mark Newbold, regroupe quatre appareils :
les soundbed, soundchair, soundbox et la minibox (qui est une version plus petite de la
sound box).
71
Informations recueillies et traduites du document pdf disponible sur : http://www.soundbeam.co.uk/
49
un amusement précieux et même essentiel qui apporte des changements bénéfiques sur
la santé et le comportement. » 72
524. Volumes ?
Les volumes plutôt faibles seraient préférables pour des effets physiques
agréables et relaxants. Dans tous les cas, les inventeurs précisent qu’il faut commencer
par installer un certain confort, avec un volume à zéro, puis augmenter progressivement
le volume en observant les réactions, jusqu’à un niveau d’écoute et de vibration
72
Informations recueillies et traduites du document pdf disponible sur : http://www.soundbeam.co.uk
73
Idem.
74
Voir aussi chapitre V.
50
physique confortable. Cela permet de juger quand et pendant combien de temps
l’utilisateur pourra rester seul en contact avec l’appareil (mais non sans surveillance).
Presque invariablement, les premiers niveaux d’écoutes deviendront rapidement trop
forts pour l’utilisateur et auront besoin d’être abaissés.
525. Combien de temps ?
Le temps optimal d’une séance de vibroacoustique varierait considérablement
d’un utilisateur à un autre. Presque tous les utilisateurs du Horizon Trust Departement
of Vibroacoustic Therapy trouvent que 20-30 minutes suffisent ; temps recommandé
également par Olav Skille. A l’école Lambert de Stratford-on-Avon, en Angleterre,
certains utilisateurs, parmi les chercheurs du professeur Phil Ellis, ont apprécié des
séances de 45 minutes et plus. Un observateur doit regarder attentivement le visage de
l’utilisateur et relever tout signe d’inconfort. Il est mentionné également que personne
ne doit utiliser les appareils vibroacoustiques sans surveillance.
Encore une fois, il est parfaitement envisageable d’utiliser ces appareils en ne
diffusant que des harmoniques naturelles. Nous verrons comment, en combinant ce
genre de technique avec les effets des harmoniques, on peut obtenir des résultats encore
plus convaincants. Or, au delà du corps, qui ne fait que recevoir les informations, par
ses sens, ses organes, nous avons un système bien plus complexe qui va relativiser et
influencer fortement les effets des vibrations, notamment harmoniques, sur le corps.
3. Le cerveau traite
Nous verrons dans cette partie une approche occidentale de la cognition du son
et du travail d’analyse du cerveau que les chercheurs ont su mettre en évidence. Ce
sujet est très complexe et, malgré les progrès de la science, beaucoup de questions
semblent être encore à éclaircir. C’est pourquoi nous n’entrerons pas dans les détails
pour nous intéresser plutôt à certaines fonctions basiques, comme la répartition des
informations perçues, ou les concepts de dissonance et de consonance, qui
correspondent plus précisément au sujet des harmoniques et qui nous permettrons
d’autre part, de mieux comprendre l’aspect psychologique de la perception musicale et
des différentes thérapies par le son.
51
31. Perception et cognition75
Les musiques qui nous intéressent dans cette étude sont majoritairement
instrumentales ou sans message textuel volontaire. Nous verrons que les techniques
vocales qui permettent l’émission isolée et organisée des harmoniques empêchent
généralement toute formulation de mots articulés. Elles n’utilisent pas à proprement
parler de langage. C’est alors au niveau de l’hémisphère droit que va se situer la
réception de la plupart des musiques que nous allons étudier et qui font entendre
distinctement des harmoniques. Toutefois, au sein d’un même morceau de tradition
vocale (musique populaire mongole, chant tibétains etc.), ont peut effectivement
entendre des textes, souvent récités plus que chantés ; mais il faudra que l’auditeur soit
capable de comprendre la langue en question pour que l’hémisphère gauche se mette
réellement à travailler.
75
Informations recueillies dans l’ouvrage de Bernard Auriol, la clef des sons, op. cit.
76
Bernard Auriol, la clef des sons, op. cit.
52
face insulaire de la première circonvolution temporale, enfouie dans la scissure de
Sylvius ».
La radiation auditive et sa terminaison dans le gyrus temporal transverse, ses rapports avec la
radiation optique sur une coupe frontale schématique de l’hémisphère gauche.
313. L’isosonie
On peut également ajouter à cela l’isosonie phénomène décrivant la perception
par le cerveau de deux sons de même intensité, mais de fréquences différentes à des
volumes différents. Le graphique ci-dessous représente les courbes d'égale intensité
sonore perçue pour l'appareil auditif humain.
On observe que, globalement, l'oreille perd une grande partie de sa sensibilité
dans les basses fréquences.
Ces courbes ont été tracées pour une population moyenne. Même si elles
traduisent assez fidèlement les variations de sensibilité de l’oreille, il existe de grandes
disparités entre les individus. Plusieurs facteurs influencent directement
l'audition comme l'expérience des musiciens ou des ingénieurs du son, par exemple,
mais aussi l'exposition au bruit, l'âge (etc.).
77
Schéma recueilli en novembre 2005 sur le site : www.wikipédia.fr
54
314. Les harmoniques dans le timbre
Je n’ai malheureusement pas trouvé de travaux qui traitent précisément de la
perception cognitive des harmoniques en temps que sons isolés, pouvant former une
mélodie. Intéressons nous donc à ce qui pourrait s’en approcher le plus : la perception
des timbres. Comme nous l’avons déjà vu, c’est en effet à travers le spectre sonore que
les harmoniques se manifestent indirectement. A ce sujet, nous pouvons nous pencher
sur les travaux du Laboratoire d'Acoustique Musicale. Suite aux travaux d’Helmohltz
(notamment ceux concernant les partiels inharmoniques), et de Carl Stumph (nous
avons aussi parlé des transitoires d’attaques) ceux du LAM, dirigé par Emile Leipp
dans les années 70, ont montré que bien des composantes du son (nommée alors
« discrètes » et « continues ») ne sont en fait que des composantes psychologiques,
psychoacoustiques, qui ne prennent place qu’au niveau cérébral, neuronal de la
reconnaissance du timbre. L’étude des modes de jeu de certains interprètes révèlerait
par exemple que la phase stationnaire est continuellement différenciée et varie
perpétuellement au cours de l’exécution d’une oeuvre. Beaucoup de composantes
timbrales seraient donc des éléments vivants, dynamiques : même si notre oreille ne
peut les reconnaître intuitivement, elle saurait le faire inconsciemment. D’autres
éléments, physiquement simples à décrire, ne sont qu’intuitivement perçus comme
influençant notre perception du timbre, et l’importance de leur rôle au sein du champ de
cette reconnaissance est difficile à appréhender. La brillance, les formants, par exemple,
mais aussi le vibrato ou la texture sonore.
A ce sujet, Bernard Auriol explique l’incroyable capacité que possède le cerveau
à dégager des informations intéressantes alors même qu’un microphone capterait un
ensemble sonore parfaitement noyé. Ceci serait lié à la capacité de réduire plus ou
moins au silence les régions spectrales les plus riches en bruit et d’utiliser le reste, grâce
à la redondance, quand elle existe. Le cerveau aurait-t-il donc une préférence pour
« l’harmonicité » (les sons musicaux) qu’il distinguerait de «l’inharmonicité » (les
bruits) ? Rien ne nous permet réellement de le dire, nous pouvons juste constater qu’il
en fait une distinction. Auriol met également en évidence le phénomène inverse qui est
celui de la reconstruction de la partie signifiante dans ce qui a été éliminé :
« Un témoignage nous est connu qui se multiplie de tous les patients soumis à
l’audition de musique filtrée. Ils reconnaissent parfaitement des œuvres dont ils
entendent essentiellement les harmoniques au-delà de 8000 Hz ! L’esprit semble – et
55
il le fait – reconstruire les fondamentaux, tellement bien que la restitution ultérieure
des graves aboutis à des sons tous nouveaux pour le sujet.»78
78
Bernard Auriol, la clé des sons, op. cit.
79
The new Grove, Dictionary of MUSIC & MUSICIANS, Stanley Sadie, 1980.
56
tierce mineure = 6/5 et le ton majeur = 9/8. C’est donc à partir des intervalles
purs, issus des harmoniques H2, H3 et H5, qu’apparaît au cerveau la notion de
consonance.
Comme nous l’avons déjà vu, les harmoniques H7 et H11, bien que faisant
partie des premiers harmoniques, sont perçus comme dissonants, et ce parce que leur
rapports n’est pas formé avec des nombres premiers supérieurs à 5 (ou leur multiples).
Ainsi la septième majeure H15 = 15/8 c’est à dire : 5x3/2²(3), est perçue comme une
consonance alors que H7 = 7/4, qui n’est divisible ni par 2, 3 ou 5, sera perçue comme
une dissonance. Cette considération du cerveau possèderait certaines limites : le
nombre 3 ne peut être multiplié au delà du cinquième degré et le nombre 5 ne peut
l’être au delà du troisième. Les puissances de 2 sont limitées diversement selon les cas.
Helmholtz a tracé, selon la pureté de ces intervalles, une courbe de consonance en
fonction d’une note fondamentale (note constante qui sert de référence pour différents
intervalles que l’on appelle alors « bourdon »).
57
accorder. Ils sont représentés, sur le schéma, par les pics de la courbe. Notons que les
battements sont d’autant plus grands que l’intervalle qu’ils avoisinent est pur. Ainsi
autour de l’octave et de l’unisson, la courbe présente les battements les plus
perceptibles ; on peut aisément entendre ce frottement de fréquences en accordant deux
cordes d’un instrument (comme la guitare) selon ses harmoniques.
80
Schéma issu du livre de François Auboux, L’art du raga, la musique classique de l’Inde du Nord,
Minerve, 2003.
81
Courants de musiques électroniques récent utilise de manière extrême, des sons ou des bruits simples
ou complexes souvent issue de machines diverses, par exemple les musiques de Rioji Ikeda (+/-
58
considérée, dans la musique savante arabo-persane, comme une note juste intégrée dans
un mode précis ; certaines oreilles y trouverons du charme et d’autre une dissonance.
Cet intervalle pourrait d’ailleurs être manifesté sur la courbe, par le petit creux entre le
Ré et le Mib. Prenons maintenant l’exemple du cor des Alpes qui utilise uniquement la
série des harmoniques naturelles pour jouer ses mélodies. Bien que ces intervalles
soient unanimement considérés comme « faux » par des musiciens classiques (plus
précisément à cause de H7), ils n'en constituent pas moins une référence musicale qui
serait utilisée par les habitants de ces vallées pour le chant82.
C’est précisément ce qui nous intéresse dans cette étude, car il existe encore des
instruments de ce type, intégrés dans une culture musicale dont l’esthétique semble
obéir aux lois acoustiques d’une gamme naturelle qui serait composée des harmoniques
et qui utiliserait leur mise en résonance.
83
Le film est disponible en vidéo au CNRS audiovisuel, 1, Place Aristide-Briand, 92795 Meudon, Voix
du Monde (1997) est distribué par Harmonia Mundi.
84
Selon Trân Quang Hai , l’appellation « chant diphonique » a été instaurée par Emile Leipp et Gilles
Léothaud en 1971.
85
Le terme diplophonie, d’origine médicale, désigne l’existence simultanée de deux sons de hauteur
différente dans le larynx.
86
Chant à deux formants.
87
Le terme de « voix guimbarde » a été utilisé en 1973 par Roberte Hamayon et Mireille Helffer.
60
1.2 Une seule appellation pour plusieurs phénomènes
Au cours des années 1980, les interprétations, les imitations et les évolutions, de
ces techniques vocales ont donné naissance à une approche occidentalisée du
phénomène, ainsi qu’à de nouveaux styles ; approche qui rassemble toutes ces
appellations par celle plus générique et plus commode, de « chant harmonique »88. Ce
dernier terme est tout à fait vernaculaire et s’emploie plus de manière commerciale que
scientifique. Par commodité, il représenterait une famille plus vaste incluant toutes les
variantes des différents chants diphoniques observés en ethnomusicologie, ainsi que
toutes les techniques vocales utilisant des harmoniques, de façon à ce que l’on puisse
les distinguer et les dissocier d’une ou plusieurs note fondamentale chantée et du reste
du spectre. Il inclurait également les phénomènes de résonance de la voix, notamment à
travers ces harmoniques, comme c’est le cas, par exemple, pour ce qu’on appelle le
« chant en résonance89 » pratiqué dans les anciennes églises cisterciennes. J’utiliserai de
manière générale le terme de « chant diphonique », lorsqu’il s’agira de parler des
techniques vocales déjà étudiées en ethnomusicologie ; je choisirai le terme de « chant
harmonique » pour parler du phénomène pratiqué en Occident sous cette appellation,
mais aussi pour désigner, de manière générale, plusieurs techniques vocales apparentées
aux chants diphoniques.
Par conséquent, il est possible de reproduire volontairement une mélodie formée ainsi
par les harmoniques du bourdon.
88
Cette appellation souligne un problème de non-sens selon les ethnomusicologues (tout chant possédant
des harmoniques) mais qui s’utilise malgré tout par les chanteurs-spécialistes et chanteurs-thérapeutes
(David Hykes, Philippe Barraqué, Patrick Torre etc.). On peut supposer que ce terme est issu d’une
simplification du titre de la vidéo de T.Q.Hai et de Hugo Zemp : ainsi, le « chant des harmoniques »
deviendrait le « chant harmonique ».
61
Les chants diphoniques sont connus et étudiés en Occident depuis les travaux
d’Aksenov qui, en 1964 a publié un article considéré d’après T.Q.Hai, comme : « le
premier article sur le chant diphonique d’une grande valeur scientifique »90. Les
traductions en allemand et en anglais de cet article ont donné lieu en Occident à de
multiples autres études et recherches comme celle de G.Léothaud qui, en 1989,
explique ce phénomène vocal dans sa genèse acoustique du chant diphonique dont
voici un extrait :
« L’appareil phonatoire, comme tout instrument de musique, se compose d’un
système excitateur, ici le larynx, et d’un corps vibrant chargé de transformer l’énergie
reçue en rayonnement acoustique, le conduit pharyngo-buccal. Le larynx délivre un
spectre harmonique, le son laryngé primaire, déterminé en fréquence, d’allure
homogène, c’est à dire dénué de formants notables - donc de couleur vocalique - et
dont la richesse en harmoniques varie essentiellement en fonction de la structure
vibratoire des cordes vocales. (...)
Cette fourniture primaire traverse les cavités pharyngo-buccales, y subissant
d’importantes distorsions : le pharynx et la bouche se comportent donc comme des
résonateurs d’Helmholtz, et cela pour toutes les fréquences dont la longueur d’onde est
supérieure à la plus grande dimension de ces cavités.(...) Les paramètres déterminant
la fréquence propre des cavités phonatoires peuvent varier dans des proportions
considérables grâce au système articulateur, notamment par la mobilité de la
mâchoire, l’ouverture de la bouche et la position de la langue. Celle-ci surtout peut
diviser la cavité buccale de deux résonateurs de plus petit volume, donc de fréquence
propre plus élevée. En d’autres termes, les cavités buccales peuvent continuer a se
comporter en résonateurs d’Helmholtz même pour des harmoniques très aiguës du
spectre laryngé, ceux dont la longueur d’onde est petite, en tout cas inférieure à la
longueur du conduit pharyngo-buccal.
L’émission diphonique consiste pour le chanteur à émettre un spectre riche en
harmonique, puis à accorder très finement une cavité phonatoire sur l’un des
composants de ce spectre, dont l’amplitude augmente ainsi fortement par résonance ;
89
Terme utilisé notamment par Igor Reznikoff, qui reprend les techniques de chants diphoniques pour
faire résonner les voûtes des églises.
90
D’après les informations exposés par Trân Quang Hai dans son article Recherches introspectives sur le
chant diphonique et leurs applications recueilli sur le site : http://tranquang.free.fr
62
par déplacement de la langue, le volume buccal peut varier, donc la fréquence propre,
et sélectionner de cette façon différents harmoniques »91.
Une technique bien maîtrisée permet une sélection très précise de chaque
harmonique et fait alors entendre un son clair. Tout réside non seulement dans la qualité
du timbre du son fondamental émis par les cordes vocales (qui doit être très riche en
harmoniques), mais aussi grâce aux nombreuses techniques très fines faisant appel au
système respiratoire, aux muscles de la gorge, à la cavité buccale et aux résonateurs de
la tête et du reste du corps.
91
D’après le dossier de H.Zemp et T.Q.Hai, « recherches expérimentales sur le chant diphonique » in
cahier des musiques traditionnelles, N.4 la voix. Atelier d’ethnomusicologie, Genève, 1991, p. 28.
92
Nous pouvons observer la mélodie ‘‘A la claire fontaine’’ dans la partie supérieure, et le bourdon
accompagné d’autres harmoniques moins prononcées dans la partie inférieure. Le sonagramme est issu du
programme : R.S frequency.
63
2. Les chants diphoniques traditionnels
93
Cité par T.Q.Hai (1973).
94
Information recueillies dans l’article de H.Zemp et T.Q.Hai, « recherches expérimentales sur le chant
diphonique » in cahier des musiques traditionnelles, op. cit.
64
(résonateur) en deux cavités d’une résonance plus petite. Les mouvements maîtrisés de
la langue peuvent reproduire ainsi des mélodies, générées par les harmoniques du son
fondamental. Le répertoire sigit désigne des chants populaires transmis oralement chez
les paysans musiciens des plaines de Mongolie et de Sibérie. T.Q. Hai explique que la
plupart de ces chants présentent des mélodies jouées sur les harmoniques H9, H10 et
H12, parfois sur H8, H9, H10, H12, H13, avec un bourdon plus ou moins marqué.
Selon la virtuosité du chanteur, les harmoniques aiguës peuvent résonner très fortement,
ce qui dissimule par conséquent le son de la fondamentale (extrait de chant sigit sur le
CD, plage 09). Dans cet extrait, on peut remarquer une sorte de « bourdon
harmonique » très aigu situé entre deux et trois KHz. Il a été parfois dit qu’une
troisième voix pouvait être produite. Selon T.Q.Hai, qui confirme le phénomène grâce
aux sonagrammes, on ne peut pas dire que la troisième voix soit contrôlée. Elle
résulterait plus de la personnalité de l’exécutant que d’une technique particulière.
Thomas Clément96 parle de chant « triphonique » et explique qu’il est possible
lorsqu'un son très grave est émis (par exemple, à une fréquence de 70 hertz), que le
chanteur puisse alors créer deux formants qui sélectionneront chacun une harmonique.
Par exemple, on peut chanter en mode triphonique avec un formant dans la zone de
fréquence comprise entre 400 et 1 000 hertz, et un autre dans la zone au-dessus de 2
000 hertz. On remarque en effet que certains chanteurs vont presque jusqu’à éliminer le
son fondamental au profit des deux formants. T.Q.Hai recommande les performances
des chanteurs Mongush, Mergen, Tumat Kara-ool, Chuldum-ool Andrej.
Si les recherches en ethnomusicologie ont pu percer et approfondir le secret
acoustique de ces phénomènes, on ne parle manifestement pas des effets voulus ou
constatés par ce chant. Lors du festival « le Rêve de l’Aborigène »97 j’ai eu la chance de
rencontrer plusieurs chanteurs et musiciens Mongols ; je leur ai alors posé la question
directement. Lors d’un court entretien avec un jeune chanteur qui était invité en France
avec sa troupe par l’intermédiaire de l’association franco-mongole « Archipel
Nomade » (en Vendée), j’ai pu communiquer avec le chanteur par des mélodies de
chant sigit (ma médiocre imitation l’a d’ailleurs beaucoup amusé) car il ne comprenait
que quelques mots de français. Malgré la présence d’un traducteur, je n’ai pu obtenir de
95
L’appellation « double cavité » est employée par T.Q.Hai pour désigner la technique de chant
diphonique khoomei expliquée par G.Léothaud dans la citation.
96
La voix en corps / Une réconciliation, Revue "SOMATO", Octobre '98.
97
Festival de didgeridoo, guimbarde et chant diphonique, organisé depuis 2001 tous les premiers week-
end de Juillet par l’association parisienne Vent du Rêve à Airvault, près de Poitiers, op. cit.
65
vraie réponse quand au sujet des effets des harmoniques sur ce chanteur et ses
auditeurs. Selon lui, le chant khoomei serait à la base un chant religieux, proche de la
nature, des plaines, des steppes et des chevaux ; il peut être mis en rapport avec le
shamanisme pratiqué en Mongolie, mais plus généralement, le chant diphonique est un
divertissement, qui accompagne le quotidien des paysans mongols et touvains. Ces
derniers se produisent de plus en plus en concert en Europe et aux Etats-Unis, où ils
rencontrent un énorme succès afin de faire entendre leur chant si « mystérieux » et si
apprécié par les oreilles occidentales. La fascination pour cette technique
« impressionnante » et « étrange » est le premier sentiment que j’ai pu noter chez les
auditeurs intéressés. Notons d’ailleurs que de plus en plus d’occidentaux se mette à
tenter de reproduire ces techniques. Plusieurs personnes de mon entourage se sont à leur
tour entraînées à faire résonner ces harmoniques après avoir constaté que moi-même je
pouvais y parvenir. Ne serait-ce pas là une autre forme de résonance sympathique ? Sur
ce même principe, de nombreux musicothérapeutes et artistes se sont mis à intégrer
dans leurs pratiques ce chant qui, prononcé avec des mots sacrés de diverses religions98,
revêt d’autant plus une certaine valeur « mystique ».
Si des effets positifs existent, d’autres, par ailleurs bien moins appréciables,
peuvent se faire sentir. Pour arriver à un résultat aussi saisissant, les chanteurs mongols
et touvains doivent charger le son fondamental chanté le plus possible en harmoniques.
Le son doit être chanté relativement fort, presque crié mais avec un certain contrôle,
celui du souffle.
Cette technique les oblige à contracter fortement les muscles de la gorge et de
l’abdomen, mettant alors en vibration forte leurs résonateurs corporels, si bien qu’ils
avouent ne pas pouvoir chanter trop longtemps tant la technique est éprouvante. J’ai
appris récemment que le célèbre chanteur mongol Tserendavaa avec qui j’ai suivi un
stage d’initiation au chant, aurait été victime d’un accident pour avoir trop forcé sur ses
capacités. Le chant sigit provoque donc, chez le chanteur, des tensions fortes que l’on
peut d’ailleurs retrouver, à une autre échelle, chez certains auditeurs : les fréquences les
plus aiguës peuvent être perçues de manière stridente, agaçante, ou assourdissante.
Ce qui ponctue les mélodies, c’est la respiration. Le chanteur est parfois
encouragé à faire durer son chant le plus longtemps possible, ce qui ralentit
98
Les travaux de Philippe Barraqué par exemple marient la kabbale, le soufisme, le shamanisme, le yoga
(etc.) avec les chants diphoniques.
66
considérablement sa pulsation cardiaque. En fonction du rythme de la mélodie, les
inspirations sont parfois prises rapidement, alors que les expirations sont plus souvent
faibles en débit d’air et plutôt longues. J’ai personnellement ressenti des effets
d’étourdissement lors de longues séances de chant sigit, dus manifestement à cette
respiration inégale et à l’ampleur des vibrations qui résonnent dans le crâne. Le
chanteur doit donc respecter certaines limites pour mieux pouvoir apprécier cet état
d’ivresse.
68
prière. Parfois, une note est tenue plus longtemps et fait
résonner une tierce majeure et une octave au dessus de la
fondamentale. Or, nous ne savons pas réellement de quel
harmonique il s’agit. Je pensais, comme l’explique l’ouvrage
Bouddhisme Tibétain99, que la tierce majeure entendue était
issue d’une technique de gorge similaire au kargiraa des
mongols, chant où la note fondamentale entendue n’est en fait
que le reflet de l’octave supérieur réellement chanté par les
cordes vocales. Dans ce cas, l’harmonique entendue correspond à la première tierce :
H5 (c’est par ailleurs, lorsque je chante sur le même ton, l’harmonique la plus grave
que je puisse émettre). Or, après en avoir discuté avec T.Q.Hai au Musée de l’Homme,
j’ai compris qu’il pouvait en être autrement : l’ethnomusicologue pense plutôt que la
fondamentale entendue est bien la fondamentale chantée. Les moines seraient ainsi
capables d’atteindre des notes extrêmement graves avec leurs cordes vocales réelles et
sans artifice (sic). Ce qui est saisissant, c’est l’ampleur avec laquelle ils parviennent à
faire gronder la note bourdon ; c’est alors l’harmonique H10 qui résonnerait. En
chantant cette note réelle, extrêmement grave, et en prononçant la voyelle « O » avec la
bouche allongée et les lèvres arrondies, ils parviennent a une technique de chant
diphonique tout à fait singulière. Lorsque le groupe entier chante cette syllabe
prolongée, chaque moine semble prendre des rythmes respiratoires différents selon le
principe de tuilage100, afin de pouvoir prolonger l’harmonique commune (extrait de
chants tibétains du monastère Gyüto sur le CD, plage 11).
Des instruments rituels (cymbales, trompes, tambourins, cloches etc.) sont
utilisés en plus des chants et apportent une structure supplémentaire aux récitations.
Dans la symbolique tibétaine, on dit que le chant des moines Gyüto correspond à
l’élément Feu.
99
Ivan Vandor, musique du Bouddhisme tibétain, Buchet Chastel, 1976, Chapitre Musique vocale.
69
223. Effets des chants tibétains
Comme nous l’avons vu, ces chants ont un caractère sacré très profond et sont
liés à une cérémonie complète qui comporte bien d’autres aspects comme le lieu, la
durée de la récitation, les vêtements, les autres instruments, le pouvoir qui est attribué
aux tantras, les paroles sacrées, ainsi que la foi religieuse qui anime chaque chanteur.
Ainsi, parler de l’effet des chants sacrés en dehors de tout contexte religieux semble
délicat ; je n’ai pu trouver de témoignage d’aucun moine qui aurait pu expliquer (selon
lui) la portée de ces chants. Nous ne pouvons donc nous intéresser qu’aux effets
observés sur les auditeurs. De manière générale, les occidentaux semblent assez
réceptifs, au regard de la progressive commercialisation (notamment dans les
boutiques ésotériques) d’une série de disques de ces chants traditionnels, pour la
détente et comme support à la relaxation, la méditation.
Le phénomène semble aller plus loin encore. Certains
moines, comme les chanteurs mongols que j’ai pu rencontrer, se
déplacent en effet dans le monde entier pour des représentations
en concert (sic). Si les disques et les concerts apaisent et
procurent une certaine sérénité à certains occidentaux, d’autres
n’y semblent pas du tout réceptifs. Bien que sacrés, l’aspect de beuglement de taureau
que revêtent parfois ces chants peuvent les rendre sans intérêt ou réellement
repoussants pour certains auditeurs.
Les facteurs qui semblent faire toute la différence dépendraient de la sensibilité
de l’auditeur au contexte social et religieux de ces chants, ainsi que sa réceptivité ou sa
disponibilité à l’écoute.
100
Système observé en ethnomusicologie, et connu des compositeurs et orchestrateurs symphoniques.
70
ces chanteurs afin de constituer les ensembles polyphoniques de quatre registres : du
grave vers l’aigu (bassu, contra, boghe, falsittu). Un chanteur se spécialise dans une
partie correspondant à la tessiture naturelle de sa voix.
101
Bernard Lortat-Jacob, « savoir les chanter, pouvoir en parler » in Cahiers de musiques traditionnelles
vol.3 : musique et pouvoir, Genève, GEORG, 1990.
71
un sonagramme, un formant sur la fréquence du Mi3. Ajoutons à cela une troisième
voix sur la note Mi2 (boghe) qui va alors renforcer d’autant plus ce formant, car
possédant également, parmi ses harmoniques, le même Mi3 (H2/Mi2 = Mi3). La
composition de ces chants est ainsi fondée sur des harmonies, avec une utilisation
systématique de l’accord parfait majeur en position fondamentale et en position
renversée. Avec de nombreuses quintes et quartes parallèles, le phénomène du formant,
et donc de la quintina, va se manifester sous forme de mélodie et recréer une cinquième
voix distincte, parfaitement audible (dans une zone 700-1000 Hertz) et visible au
sonagraphe.
102
Bernard Lortat-Jacob, « savoir les chanter, pouvoir en parler » in Cahiers de musiques traditionnelles.
op. cit. p.16.
72
acoustiques. Cependant, Trân Quang Hai les distingue nettement et nous explique la
nuance :
« Il faut donc faire la distinction entre le chant diphonique (chant créant une
mélodie d’harmoniques) et le chant à résonance harmonique (chant accompagné par
moments par des effets harmoniques)»104
Ce qui, dans notre travail, pourrait rassembler les deux phénomènes, serait les
effets souvent similaires qu’il peut déclencher sur l’auditeur. La quintina est un
phénomène plutôt impressionnant lorsqu’on parvient à bien la percevoir. Et si les
chants des hommes qui la produisent présentent des timbres et des successions
d’accords qui ne séduisent pas forcément, le son produit par la résonance des
harmoniques est néanmoins parfois considéré comme miraculeux. Bernard Lortat-Jacob
indique d’ailleurs au cour de son article, qu’en Sardaigne, la quintina est parfois
interprétée comme étant la voix de la sainte vierge105.
103
Document recueilli au sein de l’article de Bernard Lortat-Jacob, « savoir les chanter, pouvoir en
parler » in Cahiers de musiques traditionnelles, op. cit.
104
Propos de T.Q.Hai recueillis dans son article « Recherches introspectives sur le chant diphonique et
leurs applications » op. cit.
105
Bernard Lortat-Jacob, « savoir les chanter, pouvoir en parler » in Cahiers de musiques traditionnelles,
op. cit.
73
242. Afrique du Sud
En Afrique du Sud, les Xhosa pratiquent également le chant diphonique, surtout
chez les femmes. Une chanteuse se serait inspirée du bruit du coléoptère placé devant la
bouche et utilisé comme bourdon. Cette technique s’appelle umngqokolo ngomqangi
(ngomqangi est le nom du coléoptère) imitant l’arc musical umrhube. Elle modulait la
cavité buccale pour faire varier les harmoniques produits. Dave Dargie106 a découvert
ce type de chant diphonique chez les Xhosa en Afrique du Sud en 1983.
243. Formose
A Formose (Taiwan), les Bunun, une des minorités ethniques taiwanaises,
chantent les voyelles dans une voix très tendue et font sortir quelques harmoniques dans
un chant à l’occasion de la récolte des millets (Pasi but but). Est-ce bien un style de
chant diphonique semblable à celui pratiqué par les Mongols et les Touvains ? Faute de
documents sonores et écrits, les ethnomusicologues ne peuvent poursuivre leurs
recherches.
Les harmoniques apparaissent dans certains types de chants où l’émission des
voyelles est prolongée et avec un timbre très chargé. En Sardaigne encore, mais dans un
contexte différent de la quintina, j’ai remarqué une voix extrêmement grave dans des
polyphonies populaires, et dont la technique semble très proche de celle du kargiraa.
T.Q.Hai reconnaît ces techniques également à travers le chant bouddhique japonais
shomyo, certains chants bulgares, ainsi que des chants polyphoniques d’Europe de l’Est.
106
Présenté par Trân Quang Hai, dans son article « Recherches introspectives sur le chant diphonique et
leurs applications » op. cit.
74
3. Approches des chants diphoniques en Occident
Les moines de Cluny, d’après J.Godwin auraient effectivement construit leurs églises
selon « des proportions musicales afin d’enrichir leur plain-chant et les mettre en
relation avec les dimensions cachées du son »107.
Jean-Yves Haymoz, de l’association Pro Bonio Monte, fait une description du phénomène acoustique
de l’église cistercienne de Bonmont :
107
Godwin Jocelyn, Les harmonies du ciel e de la terre, op. cit.
108
Pro Bonio Monte - association des amis de l'abbaye cistercienne de Bonmont - 1275
Chéserex – en Suisse, J.-P. Felber, P.-R. Monbaron, A. Rochat, J. Haldy et P. Tanner. Texte recueilli
en Octobre 2005 sur le site : http://www.probonomonte.ch/abbaye/acoustique_pbm.html
75
on pourrait définir la musique de chanteurs comme David Hykes109 ou Iegor
Reznikoff110. Dans le chant diphonique, nous avons vu que les mélodies étaient
effectuées par les harmoniques à partir d’un son fondamental chanté à la manière d’un
bourdon ; or dans le chant en résonance, la note fondamentale est amenée à faire elle
même des mélodies. Les intervalles de chaque note qui composent ces mélodies
(fondamentales) seraient comme guidés par la résonance des voûtes. En effet, lorsqu’on
est amené à chanter une mélodie dans une église cistercienne, pour obtenir une
résonance sur chaque note fondamentale (ainsi que leurs harmoniques respectives), on
doit employer des rapports d’intervalles précis qui correspondent aux modes anciens.
Les voûtes seraient donc sensibles aux intervalles naturels. C’est grâce à Philippe
Bougon que j’ai pu comprendre l’univers du chant en résonance. En effectuant des
recherches précises entre les modes anciens et les voûtes des églises cisterciennes, il est
parvenu à établir des liens entre cette résonance des différents modes (Tellurique,
Lunaire, Solaire et Lumière) selon certains endroits de l’église et le long de la nef. J’ai
eu la chance, grâce à lui, de pouvoir essayer mon chant diphonique dans les églises
cisterciennes de Silvacane et du Thoronet, et si je n’ai pas entièrement compris ses
explications concernant les modes anciens, j’ai su, instinctivement selon lui, reproduire
ces modes aux rapports naturels (extrait d’une improvisation vocale inspirée du chant
en résonance de David Hykes sur le CD, plage 24).
Avec Philippe Bougon, nous avons recueilli plusieurs témoignages parmi les
différentes personnes qui ont été amenées à nous entendre. Avant même que nous
allions leur demander, ils sont venu nous faire part de leurs émotions. Si le chant
diphonique paraît souvent impressionnant aux oreilles occidentales, la résonance d’un
tel lieu procure un aspect d’autant plus profond.
109
David Hykes, The harmonic Choir, Ocora, 1989.
110
Iegor Resnikoff, Le Chant de Fontenay, le souffle d’or SARL.
76
participe à l’expansion d’une nouvelle mode « harmonique » qui toucherait l’Europe,
les Etats Unis, l’Australie, ainsi que le Japon. A l’aide du sonagraphe, il a développé de
nombreuses techniques vocales spectaculaires en imitant les techniques que nous
venons d’aborder.
Lors de mon entretien avec lui, qui s’est déroulé sur son lieu de travail, au
Musée de l’Homme, en Mars 2003, il m’a fait une démonstration de l’ambitus de sa
voix qui a manifestement été entraînée à descendre dans les graves, uniquement avec
les cordes vocales (sans aucune technique de travestissement vocal), aussi loin que pour
les chants kargiraa. Le chercheur suppose ainsi que les moines de Gyüto chantent en
voix réelle.
T.Q.Hai a également fait des expérimentations sur les rapports entre la
fréquence fondamentale et la voix harmonique : il parvient par exemple à faire varier le
bourdon tout en conservant un formant sur la même fréquence, ou bien en effectuant un
mouvement contraire entre fondamentales et harmoniques.
77
Expérimentation d’un mouvement contraire entre bourdon et mélodie d’harmoniques, par Trân Quang
Hai. Technique à deux cavités. Voix fortement nasalisée. Contraction pharyngienne et abdominale.
Echelle diatonique ascendante des fondamentaux du La1 (110 Hz) au La2 (220 Hz) et redescendante.
Echelles d’harmoniques en mouvement contraire, descendante de H19 au H4 et remontante à H19111.
Il m’a fait part d’un concours en Sibérie dont il présidait le jury112 et qui
réunissait les chanteurs diphoniques les plus virtuoses. Il aurait ainsi pu concourir avec
ces chanteurs traditionnels en effectuant trois fois de suite une mélodie traditionnelle au
cours d’une seule expiration ou encore en écrivant un mot avec les harmoniques de sa
voix (sic). L’exploit n’est véritablement qu’un jeu avec le sonagraphe. J’ai compris que
ce n’est réellement possible qu’avec les lettres qui s’écrivent de gauche à droite comme
N, M, U, V, W, mais aussi I et L (le Y et le J sont plus difficiles). Par un clin d’œil
humoristique, il propose (car c’est bien plus commode) de ne présenter que « le
minimum de cette technique » qu’il m’a également fait partager, et qu’à mon tour j’ai
pu réalisé. Ainsi il fait apparaître sur le sonagraphe le mot « M I N I M U M ».
111
Sonagrammes issus de l’article de H.Zemp et T.Q.Hai, « recherches expérimentales sur le chant
diphonique » in cahier des musiques traditionnelles, op. cit.
112
Ce concours est également abordé lors d’une interview de T.Q.Hai par Michel Giroud, Regards, 1998.
78
Nous voyons par cet exemple que le chant diphonique peut être appréhendé de
diverses manières (et même très ludique) en Occident. Ainsi, lors des différents stages
proposés dans ce domaine, comme on peut le voir sur la vidéo de Hugo Zemp et
comme j’ai pu en faire moi-même l’expérience avec Tserendavaa, le chant diphonique
est un jeu qui encourage l’expression de la voix par l’extériorisation de ses voyelles
prolongées et de ce timbre très âpre. C’est généralement très amusant de s’observer les
uns les autres, entre stagiaires, émettre des sons qui peuvent nous faire paraître ridicules
dans un premier temps, mais qui avec un peu d’encouragement, nous invitent à nous
extérioriser véritablement en nous amusant.
C’est d’ailleurs tout l’intérêt d’une thérapie active par le chant113 et c’est ce qui rend
cette pratique utile aux personnes atteintes de bégaiements par exemple. Au delà de
l’aspect ludique, lorsque les chanteurs occidentaux parviennent à un semblant de
résultat, ils ressentent très souvent une grande satisfaction due au succès, d’une part,
mais peut être aussi due à un effet de résonance plus subtile qui s’opèrerait sur le corps
du chanteur lui même, comme certains musicothérapeutes l’admettent. Nous
observerons cet aspect thérapeutique du chant diphonique plus en détail au cours du
cinquième chapitre.
113
Nous verrons dans le chapitre cinq les différents aspects de la musicothérapie dont la distinction entre
thérapie active et réceptive.
79
IV Les instruments harmoniques et leurs effets
11. Définition
Le mouvement de fascination créé par la découverte des chants diphoniques a
conduit certains musiciens occidentaux à utiliser des instruments reposant sur un
principe et un effet similaire, et avec lesquels ils pourraient ressentir cette même
émotion. J’ai moi-même cherché à rassembler le plus d’instruments possibles de ce
type ; mais encore faut-il pouvoir définir de quoi il est réellement question. Quel est
donc le point commun entre un didgeridoo, un bol tibétain, une guimbarde et un
sarangi ? S’il fallait redonner115 une définition aux « instruments harmoniques » selon
le récent mouvement musical, je les présenterais en m’appuyant sur le phénomène du
chant diphonique. J’inclurais alors, dans cette famille, tout instrument qui, à partir
d’une note fondamentale audible ou non, impose comme unique échelle une succession
de notes organisées selon les intervalles de la série des harmoniques naturelles. Or,
cette définition ne décrit, en réalité, qu’un certain type d’instruments que l’on pourrait
qualifier de « strictement harmoniques » ; en Occident, c’est le cas du cor de chasse, par
114
Je n’ai réellement pu trouver en France qu’un seul cas de musicothérapie qui emploie délibérément, à
l’écrit le terme « d’instrument harmonique », il s’agit de Oriane Robidou. Sur le site : www.voyelle.net.
Nous verrons par la suite que ces termes sont surtout utilisés oralement dans un milieu précis.
115
Car l’appellation est en effet déjà employée pour parler de certains instruments occidentaux classiques
et populaires, voir paragraphe suivant.
80
exemple, ou bien de la trompette sans piston que l’on appelle aussi « trompette
naturelle ». Alain Daniélou en fait mention dans son traité de musicologie comparée :
« Certains instruments à vent, les cors et les trompettes en particulier, ne peuvent
donner que les harmoniques de leur fondamentale »116. Seulement il n’existe que très
peu d’instruments « strictement harmoniques ». Les conditions nécessaires à l’émission
d’une série d’harmoniques sont très précises et généralement, l’instrument finissant par
être jugé très pauvre, subit rapidement un aménagement par divers mécanismes
humains.
116
Alain Daniélou, Traité de musicologie comparée, op. cit.
117
Nous verrons dans le Vème chapitre comment ces instruments et leur musique peuvent être
symboliquement interprétés et ainsi mis en relation avec, entre autres, la nature et le sacré.
118
Définition de l’encyclopédie Wikipédia.
81
ce cadre, issu de la notion d’harmonie et correspond à l’art de succéder les accords ; ces
instruments sont utilisés généralement pour accompagner d’autres instruments
mélodiques. Cela n’a donc rien à voir avec ce qui nous intéresse, car nous ne sommes
pas dans l’harmonie mais dans les harmoniques.
Peut-on dire que ce terme est bien employé ? Peut-on dire qu’il est mal
employé ? Selon un raisonnement d’acousticien, il paraît évident comme pour le
« chant harmonique » que tout instrument qui produit un son musical peut être qualifié
d’instrument harmonique, dans le sens où les sons qu’il fait entendre comportent des
harmoniques, rendant cette appellation injustifiée (comme nous l’avons vu pour le
chant harmonique), ce qui ne fait guère progresser notre recherche. Lorsque j’ai
interrogé des ethnomusicologues ou des acousticiens, le sujet paraissait les déranger.
Selon eux, le terme est mal employé ; il renvoie à un milieu trop « fantaisiste » pour
être reconnu scientifiquement. Bien que n’ayant pas été officiellement nommés au
cours d’une étude sérieuse, plusieurs de ces instruments donnent lieu à des
regroupements, des festivals, des stages, des recherches, de nouvelles lutheries et de
nouvelles thérapies.119
119
Nous verrons dans ce chapitre ainsi que dans le chapitre suivant comment et par qui ces instruments
sont utilisés.
82
J’utiliserai ainsi, au risque d’encourager cette confusion, l’appellation « instruments
harmoniques » comme elle est employée oralement dans les milieux où les passionnés
occidentaux les utilisent.
Dans un son inharmonique, les partiels sont généralement plus hauts que les
multiples entiers du fondamental, et ce, d'autant plus que leur rang est élevé120. Cette
caractéristique affecte le timbre du son, et se vérifie par l'examen de son spectre
harmonique. Ce phénomène peut donner l'illusion de plusieurs hauteurs simultanées,
comme pour la cloche. La distinction d’une frontière entre les instruments harmoniques
et inharmoniques pourrait être comparée à la mise en vibration autour d’une note
justement accordée dans la résonance. Les instruments qui suivent ne sont donc pas
« harmoniques » du point de vue des acousticiens, et ne sont pas toujours non plus
« strictement harmoniques » du point de vue de la définition basée sur leur gamme
naturelle. En revanche, ils sont en relation avec la résonance de certaines harmoniques,
mais aussi avec un aspect naturel et simple de la musique (aucun n’est tempéré par
exemple) déclenchant chez les personnes qui y sont sensibles une certaine émotion.
120
Informations recueillies dans l’encyclopédie Wikipédia.
83
2. Liste des instruments harmoniques
21. Idiophones
211. La guimbarde
La guimbarde est un instrument harmonique par
excellence : une fréquence fondamentale, et d’innombrables
variations dues aux harmoniques. Le souffle intervient mais
ce n’est pas réellement un instrument à vent ; le son est émis
par le pincement d’une lamelle qui vibre entre deux fines
parois en métal (plus généralement) ou parfois en bambou.
Comme pour le chant, c’est le corps de l’instrumentiste, et plus particulièrement tous
les résonateurs de la boîte crânienne, qui vont amplifier le son et faire ressortir si
clairement les harmoniques. La fondamentale est relative à la forme de la lamelle
(taille, poids etc.) ; les changements de timbre et la variation des harmoniques sont
directement reliés au système phonatoire et à la cavité buccale.
La question de l’origine de l’instrument reste encore posée. D’après le livre de
John Wright et Geneviève Dournon les guimbardes du musée de l'homme, édité en
1978, la guimbarde n'est considérée comme autochtone ni en Afrique, ni en Amérique
du Sud. On y trouve des arcs musicaux qui utilisent la bouche, mais les premières
guimbardes auraient été amenées par les colons. J’ai eu l’occasion de rencontrer John
Wright, qui m’a confié que l’origine de la guimbarde en Europe remonterait au 16éme
siècle. Le plus plausible serait une origine asiatique, au sens large. Sans doute avec des
instruments végétaux, en bois ou en bambou, éventuellement en os. La guimbarde
84
aurait transité de l'Asie/Pacifique vers le Nord (Sibérie, Mongolie...), puis vers les pays
Scandinaves, puis serait repartie vers le Sud, en Europe centrale et occidentale.
Instrument populaire, instrument de berger, la guimbarde est principalement un
instrument rythmique qui fait jouer un grand nombre d’harmoniques et offre des
variations techniques surprenantes. Son jeu est très sensible ; chaque micro-mouvement
de la bouche et du système respiratoire va entraîner une sélection particulière de
certaines harmoniques. Le souffle est un élément important dans le jeu de la
guimbarde : il permet d’effectuer certaines variations d’intensité et de timbre, et ajoute
ainsi au pincement souvent régulier de la languette, des effets rythmiques d’une grande
richesse et d’une grande variété. Avec des techniques très précises, on peut faire en
sorte d’accentuer certaines harmoniques plus que d’autres. La maîtrise de celles-ci rend
possible, comme pour le chant diphonique, la reproduction volontaire des mélodies. La
voix peut également être utilisée, et permet de multiplier les effets sonores. Plus on fait
chanter les harmoniques aiguës, plus la technique de l’instrumentiste doit être fine. En
Inde du Sud, les guimbardes sont parfois jouées en duo, trio et quatuor, leur accordage
est sélectionné selon l’intervalle des premières harmoniques d’une tonalité donnée
(bourdon délivré par le ou la tempura121). La superposition des harmoniques ainsi créée
apporte un relief impressionnant dans la pièce musicale (extrait d’un trio de guimbardes
sur le CD, plage 05).
En Mongolie, les joueurs de guimbarde utilisent l’instrument pour entrer en
communication avec la nature dont ils imitent certains bruits. L’extrait proposé sur le
CD plage 04, fait entendre un joueur de guimbarde yakoute (appelée khomou en
Yakoutie), qui donne un aperçu de la diversité des sons imités de la nature (gouttes
d’eau, chants d’oiseaux, galop du cheval etc.).
« Le chuintement du vent mais aussi le bruissement des herbes hautes, le
clapotis de la rivière, le chant des oiseaux et les cris des animaux sont autant de
sources d’inspiration pour le chasseur ou le berger des régions montagneuses. Le
répertoire de Narantsogt est capable d’imiter le coucou adulte, le jeune coucou, deux
coucous qui se répondent, la huppe ordinaire, le pigeon ramier, le grand coq de
Bruyère, et avec sa flûte ‘‘cuur’’, le tétras-lyre, parmi beaucoup d’autres imitant aussi
bien les hommes que les animaux. Bien sûr ces imitations sont actuellement dépouillées
121
Instrument à corde de la musique classique indienne qui forme la base harmonique des ragas. Le
morceau de guimbardes carnatiques plage 05 sur le CD, fait entendre une tempura électronique qui
constitue un repère tonal constant par la note sa (fondamentale du raga), ses octaves et sa quinte.
85
de toute connotation shamanique. Cependant, on ne peut nier la place importante du
coucou dans la mythologie des autres peuples altaïques ».122
Guimbarde
Volume faible O fort
Hauteur grave O O O aigu
Timbre feutré O perçant
Durée court O O long
Spatialisation proche O O lointain
122
Texte extrait de l’article de Bernard Lorat-Jacob « La dimension orphique de la musique mongole », in
Cahiers de musiques traditionnelles vol. 3, musique et pouvoir, Genève, GEORG, 1990.
86
1743, l’Irlandais Richard Puckeridge imagine non plus de les frapper avec des
baguettes, mais d’en frotter les bords avec les doigts mouillés. Les verres étaient alors
posés sur une table. Benjamen Franklin découvre cet instrument dénommé orgue
angélique, puis plus tard, verres musicaux et séraphin – dont le compositeur Glück
joue - à l’occasion d’un concert donné par le virtuose anglais Delaval. »123
On accorde les verres musicaux selon leur volume et leur contenance en eau, ce
qui détermine la fréquence de la fondamentale. Les joueurs de verres accordent leurs
instruments en fonction de la pièce à exécuter, il est tout à fait possible de reproduire
une gamme dodécaphonique classique. Toutefois, l’accordage selon les harmoniques
naturelles semble plus adapté à cet instrument, car il peut mettre ainsi en valeur la
résonance naturelle qui se produit comme pour les cordes sympathiques.
Le glass harmonica possède des disques en verre, trempant dans un bassin d’eau
et tournant sur eux-mêmes ; ceux-ci sont frottés par le bout des doigts de
l’instrumentiste. Ces disques étaient sculptés selon une forme qui correspondait à
chaque note fondamentale avec un accordage proche de celui du clavecin (non tempéré)
et permettaient ainsi d’interpréter plusieurs œuvres des grands compositeurs baroques et
classiques.
Verre frotté
Volume Faible O fort
Hauteur Grave O O O aigu
Timbre Feutré O O perçant
Durée Court O O long
Spatialisation proche O lointain
Il est remarquable qu’un timbre comme celui du glass harmonica peut émouvoir par sa
clarté et sa pureté, tout comme il peut déclencher un certain malaise. Le timbre de cet
instrument aurait un potentiel presque dangereux.
« ‘‘Son doux et pur’’ ... 1762 baptisé Glass Harmonica ... Paganini : ‘‘ quelle
céleste voix’’... dictionnaire instrumental : ‘‘sons d’une douceur presque céleste, mais
(...) peuvent causer des spasmes’’. Traité des effets de la musique sur le corps humain
(J.M.Roger, 1803) ‘‘son timbre mélancolique nous plonge dans un profond abattement
123
Informations recueillies dans le livret du disque de Thomas Bolch, Glass Harmonica, Naxos, 2001.
87
(...) au point que l’homme le plus robuste ne saurait l’entendre pendant une heure sans
se trouver mal.’’»124
Cela soulève la question du temps d’écoute, et par conséquent les différents
effets ressentis selon la répétition d’un événement sonore et le niveau d’accoutumance
propre à chaque auditeur.
124
Informations recueillies dans le livret du disque de Thomas Bolch, Glass Harmonica, Naxos, 2001.
125
Eva Rudy Jansen, bols chantants, Binkey Kok, 1990.
88
Pour conserver la résonance, la vitesse de rotation n’est pas plus déterminante qu’un
bon rapport entre la régularité du mouvement et la pression exercée. Il est possible, une
fois le bol apprivoisé, de changer le sens de rotation tout en conservant la vibration.
Un bol possède une note fondamentale basse qui est remarquable lorsqu’on
frotte avec une mailloche recouverte de cuir. Les sons frappés, avec des mailloches en
bois, sollicitent les harmoniques aiguës. Lorsqu’on joue du bol, on remarque que ces
harmoniques vont et viennent, parfois, suite à des mouvements involontaires, si bien
qu’on a souvent l’impression d’inviter le bol à chanter. Tenter de le maîtriser
totalement semble improbable. Comme chaque bol possède un spectre qui lui est
propre, ses harmoniques principales (pour les plus audibles) décrivent son identité. Pour
s’entraîner à faire vibrer fortement un bol de taille moyenne, on peut y ajouter de l’eau,
et observer visuellement les vibrations qui se dessinent sous forme de petites ondes à la
surface de l’eau. Ces mouvements suivent la rotation de la mailloche frottée en quatre
points équidistants. Lorsqu’on change le sens de rotation, les quatre points d’ondes
changent également de sens. Une fois la vibration maîtrisée, on peut alors augmenter la
pression et, proportionnellement, la vitesse de rotation, tout cela de manière très subtile
et continue, afin de ne pas perdre la vibration en cours.
Les passionnés disent que le jeu de cet instrument reflète nos sentiments et nos
émotions. J’ai moi-même parfois eu le sentiment que le bol était capricieux ; il faut
savoir lui parler, pour qu’il nous laisse entendre sa résonance et pour qu’on puisse, par
la suite, augmenter celle-ci. Avec une vibration très intense, on remarque que l’eau qui
est placée au centre du bol réagit en conséquence: elle s’agite fortement et va même
jusqu’à jaillir hors du bol sous forme de petites gouttelettes frémissantes.
Bols en métaux
Volume faible O O fort
Hauteur grave O O O aigu
Timbre feutré O O O O perçant
Durée court O (frappé) O O (frotté) long
Spatialisation proche O O O lointain
Si la pratique religieuse utilise les bols dans les temples d’Asie, les adeptes
d’Occident l’interprètent à travers l’ésotérisme et la thérapie sonore comme support
89
pour la méditation. Le son du bol permet de focaliser l’attention sur une vibration riche
en harmoniques, résonnant en nous-mêmes à travers le corps, comme un frisson.
Certains sont utilisés par les musicothérapeutes pour des séances de « massage sonore »
avec des dizaines de bols. J’ai moi-même fait plusieurs fois cette expérience avec ma
propre collection de bols et sur plusieurs personnes qui ont toutes ressenti des
impressions relaxantes et très agréables. Selon la pratique d’Oriane Robidou, avec qui
j’ai pu suivre un stage « d’harmonisation par le son des bols chantants », on différencie
les bols dit « consonants » des bols « dissonants » selon le degré de consonance de leurs
harmoniques. Les intervalles vont générer à l’oreille des réactions très subjectives,
variables selon les individus (et selon le contexte général). Un bol harmonique (rapports
simples) est dit « consonant » et aura alors un effet « relaxant » ; un bol inharmonique
(rapports complexes) va être considéré comme dissonant, et aura donc un effet
« dynamisant ».
Les bols en métaux sont très efficaces pour se sensibiliser à la vibration tactile.
En approchant la main (par exemple) à quelques centimètres de la paroi d’un bol en
vibration, on ressent très distinctement cette pression de l’air qui vibre en déclenchant
parfois des frissons, et une impression d’apaisement, de douceur, mais aussi parfois de
picotement, de fourmillement pouvant être amusants pour certains et désagréables pour
d’autres.
Anneke Huyser126 raconte que pour les « vrais » bols (tibétains), il est question
d’un mélange des 7 métaux (or, argent, mercure, cuivre, fer, étain et plomb) dont le
dosage précis crée une alchimie sacrée.
126
Anneke Huyser, le bol chantant, Binkey Kok, 1999.
127
Festival le « Rêve de l’Aborigène », par l’association Vent du Rêve, op. cit.
90
du cuivre, mais d’autres métaux y seraient ajoutés) avec deux sortes de poignées
soudées sur les bords intérieurs de la bassine.
Le principe est très simple, on verse de l’eau dans le bol jusqu’à environ sa
moitié, on se place devant, et après avoir trempé ses mains dans l’eau, on peut
commencer à jouer de l’instrument en frottant les paumes et les doigts humides contre
les poignées. Les sons qui sont alors produits sont un festival d’harmoniques et
semblent varier de manière aléatoire ; comme pour les bols chantants, on peut
difficilement les contrôler. La fondamentale, un son plutôt grave, est obtenue en frottant
la paume creusée dans le sens de la poignée, les aigus étant plus distincts lorsque les
mains sont ouvertes et que l’on ne frotte qu’avec le bout des doigts. L’intensité du son
dépend de la pression du frottement, bien que l’on puisse aussi avoir quelques
surprises ! Il est particulièrement difficile d’essayer de faire ressortir volontairement
une harmonique précise volontairement (hormis la fondamentale) ; tout se passe comme
si les harmoniques se révélaient d’elles-mêmes sans être sensibles aux mouvements
grossiers de nos mains. L’eau placée au centre du bol est également en vibration ; elle
ondule en quatre points du bol vers le centre et très rapidement lorsque la vibration
s’intensifie, elle jaillit comme une petite fontaine. Le phénomène, déjà observable avec
les bols en métaux, est ici d’autant plus flagrant qu’il est facilement réalisable.
Bol taoïste
Volume faible O O fort
Hauteur grave O O O O aigu
Timbre feutré O O O perçant
Durée court O long
Spatialisation proche O O lointain
Instrument très mystérieux, les informations sont rares quant à son utilisation
originelle. Les interprétations actuelles penchent vers la thérapie par les sons, en accord
étroit avec la médecine traditionnelle chinoise ; certains perçoivent cet instrument
comme le reflet sonore de notre être, dans le sens où l’on ne peut réussir à le faire
réellement chanter que dans un état de lâcher-prise, comparable à la méditation. Le bol
réagit aux mouvements purement instinctifs du corps, des bras, des mains et des doigts ;
l’instrumentiste lui-même, complètement détaché de son propre jeu, se laisse porter par
les vibrations. C’est une sorte de cercle vertueux : un premier frottement, et la vibration
91
créée va déclencher un effet chez l’instrumentiste qui va réagir par d’autres
mouvements de manière intuitive, et relancer d’autres vibrations, etc. Il est possible de
placer le bol sur un résonateur (grande bassine retournée ou calebasse) comme j’ai pu le
noter lors de son exposition128, ce qui a pour but d’amplifier certaines fréquences et de
laisser respirer le son sous le bol. J’ai pu en faire moi-même l’expérience ; mais je
conseillerais plutôt de s’asseoir en tailleur le plus proche possible des bords du bol, (les
pieds et les chevilles, placés à quelques millimètres de celui-ci sans le toucher pour
autant) et si possible à même le sol. On ressent alors très concrètement les vibrations
conduites par le sol dans les cuisses, les fesses et le bas du dos ; c’est une sensation très
spéciale.
Concernant sa fonction, les interprétations sont variées ; il aurait été utilisé pour
la Saint-Jean comme moyen de communication entre plusieurs villages ; la coutume
parle également de « purification » de l’eau ou du village tout entier (sic). Mais si un
128
Le musicien Narayana était installé sur le terrain du festival « le Rêve de l’Aborigène » (op. cit.) et
présentait un bol taoïste disposé sur un tapis en extérieur ; les visiteurs intrigués pouvaient s’essayer à
l’instrument.
129
J’ai du improviser ce terme pour nommer ce mystérieux instrument dont je n’ai pu trouver davantage
d’informations.
130
M. Lalanne-Cassou est un musicien très impliqué dans le jeu des guimbardes Touva (très rares en
Europe) avec qui j’ai eu l’occasion de discuter des phénomènes dus aux harmoniques durant le festival
« le Rêve de l’Aborigène » en 2005.
92
instrument de signalisation doit être entendu d’un village à l’autre, il doit pouvoir
sonner avec une importante intensité, à la manière d’un cor des Alpes ou d’une conque.
Je n’ai pas encore eu l’occasion d’en faire l’expérience personnellement, mais si le
résultat est comparable à celui du bol taoïste, je pense que très prochainement les
musicothérapeutes vont s’approprier la technique et l’utiliser pour « harmoniser » les
corps, les objets et les lieux.
Les formes de type cymbale: la forme est très ouverte et le métal est conçu pour être
très riche en harmoniques. Elles ont la puissance des cuivres et leur timbre est
surchargé de partiels et d’harmoniques aiguës, indissociables à l’oreille. Elles sont
utilisées pour donner une ponctuation musicale ou un rythme, et leur effet peut être
parfois très fort ; le timbre est saturé d’harmoniques dont les rapports sont extrêmement
complexes. Ce sont des instruments inharmoniques qui ont malgré tout une forte
résonance, ainsi qu’une valeur sacrée dans certaines musiques rituelles comme au
Tibet.
Les formes de type bol : observent une résonance plus identifiable avec malgré tout
plusieurs harmoniques superposées, qui varient selon la baguette utilisée ou l’endroit
percuté. Cette forme résonne très bien encore une fois avec différents types de métaux ;
une simple casserole peut sonner de manière très claire et avec des harmoniques dont le
rapport est simple. En fait, tout bol dont la fabrication est industrielle, symétrique et
précise aura des harmoniques aux rapports simples et consonants, en revanche les bols
qui ont été martelés par l’homme, présentent des imperfections qui se manifestent, au
niveau sonore, par des rapports d’harmoniques plus ou moins complexes. Parmi les
bols chantants d’Asie, les Japonais sont réputés comme étant les plus fins et les plus
harmoniques. J’en possède quatre de petite taille ; trouvés dans une boutique à Kyoto,
ils semblent avoir été fabriqués industriellement et sont effectivement très consonants.
93
Les formes de type cloche : Leur forme et leur matière invitent le son à résonner le plus
longtemps possible. Dans nombre de cultures, leur symbolisme est très fort, souvent
associé au sacré et au religieux. Les cloches sont utilisées dans toutes les églises
chrétiennes et dans tous les temples d’Asie. Le rapport des harmoniques (mais il
s’agirait plutôt de partiels comme nous l’avons déjà vu) varient selon la qualité des
cloches, généralement fondues ; leur symétrie est relative. Tout l'art du fondeur consiste
donc à réaliser une cloche dont les harmoniques sont accordées, afin d'obtenir la plus
belle sonorité. Les premières harmoniques (graves) sont souvent plus stables que les
aiguës, mais elles ne sont pas à l’abri des interférences qui peuvent intervenir, au cours
de la résonance, sous forme de frottements ou de rythmes.
Les formes de type tube : la fréquence propre d’un tube résonne lorsqu’on percute
celui-ci ; en l’ouvrant quelque peu, il est possible d’accentuer le rendu sonore. C’est le
principe des carillons, ces instruments qui sonnent au contact du vent (bambou ou
métal), souvent utilisés en musicothérapie ainsi que dans le Feng Shui131 comme des
instruments « d’harmonisation » ayant le pouvoir d’éloigner les « mauvaises ondes ».
Leur son est généralement apaisant, et le fait que ce soit le vent lui-même qui en soit le
déclencheur, ajoute une touche naturelle à l’instrument qui séduit généralement
beaucoup. Les bambous ont un son plutôt étouffé et complexe alors que les tubes de
métal, généralement fabriqués industriellement, sonnent durablement et avec des
rapports d’harmoniques simples.
Les formes de type plaque : comme les vibraphones dont les harmoniques résonnent
longtemps après l’attaque, et donnent un effet comparable à celui des verres frottés. Ces
instruments sont très utilisés en musicothérapie pour leur son pur, mais aussi pour leur
facilité d’accès.
131
Pratique d’origine chinoise qui attribut entre autres, un sens particulier à la disposition des objets et de
leur symbolique dans un espace afin de pouvoir favoriser ou non la circulation de différentes énergies
subtiles.
94
22. AEROPHONES
132
Nous utiliserons le terme « naturel » pour parler des instruments qui demandent généralement peu
d’aménagements humains. Leur musique est d’ailleurs très souvent en rapport intime avec la nature ou le
sacré, nous serons amenés à développer cette idée dans le prochain chapitre.
95
jouées ; cependant, certains parviennent à faire sonner un grand nombre d’harmoniques,
comme dans l’exemple d’une corne Touva proposé sur le CD, piste : 02.
Corne & conque
Volume Faible O fort
Hauteur Grave O O O aigu
Timbre Feutré O perçant
Durée Court O long
Spatialisation Proche O lointain
La conque est considérée en Inde comme un instrument sacré ; elle est une des
armes de Vishnou, l’un des trois grands dieux de l’Hindouisme. Les notes qu’elle fait
résonner prennent une certaine ampleur ; il est ainsi préférable d’en jouer en extérieur et
dans un large espace naturel, pour en apprécier l’effet.
Cor de chasse
Volume faible O O fort
Hauteur grave O O aigu
Timbre feutré O O perçant
Durée court O O long
Spatialisation proche O O lointain
96
d’orchestre. La trompette sans pistons a de nombreux ancêtres et de nombreuses
déclinaisons ; comme nous le précise Luc Breton, son histoire est étroitement liée aux
grandes cérémonies, mais aussi au christianisme : « La ‘‘descendance d’Adam133’’
représenté dans la ‘‘Mère des Hystoires’’ (Paris, 1488) nous montre le Verbe créateur
sous les traits de l’ancien des Anges. Le Verbe éternel, lieu des possibles, dont aucune
idée, au sens platonicien, peut ne pas procéder, est ici entouré d’anges musiciens dont
la signification est considérable. En haut, deux d’entre eux sonnent des instruments à
vent : Shofar et ‘hassar, soit un cor à deux tons et une trompette métallique comparable
aux trompes d’argent qui devaient accompagner l’Arche d’Alliance dans l’Ancien
Testament. Ces deux instruments manifestent la puissance divine, tout comme le son qui
plonge les Hébreux dans la terreur lorsque Moïse monte au Sinaï et reçoit les Tables
de la Loi. Cor et trompe ne font que produire ces sons harmoniques, sans qu’il y ait de
rapport visible avec des nombres, comme c’est le cas sur une corde vibrante. »134
La symbolique religieuse de la trompette naturelle place une fois de plus à un
rang sacré la famille des instruments aux harmoniques naturelles.
133
Voir annexes 13 p. 181, Les trompes naturelles shofar et ‘hassar, image recueillie dans « Amour et
sympathie » op. cit. p.25.
134
Texte recueilli de l’article de Luc Breton, « Les instruments à cordes dans l’occident chrétien » in
Amour et sympathie, l’ensemble Baroque de Limoges, 1995.
135
Image recueillie sur : http://www.cmtra.org/entretiens/archivelettres/lettre32/CorAlpes.html
97
L’instrument se joue également en groupe et construit alors des accords constitués
d’harmoniques. La note qui fait entendre H11 (fa#-) ne semble pas déranger les
musiciens ni les auditeurs de cette tradition.
2215. Le didgeridoo
Le didgeridoo est un instrument à vent utilisé initialement par les aborigènes du
nord de l'Australie. Son usage est très ancien ; l’ethnomusicologue Alice Moyle estime
qu’il a plus de 2000 ans, d’après des représentations dessinées sur des pierres
anciennes. Le Didgeridoo, qu'on peut également écrire didjeridoo ou didjeridu, est un
mot d'origine onomatopéique, inventé par les Occidentaux. Les aborigènes nomment
cet instrument différemment en fonction de son origine. Lloyd C.L. Hollenberg
explique, dans son article The acoustic of the didjeridu136, que l’instrumentiste fait
partie intégrante de l’instrument, dans le sens où il y fait intervenir sa propre voix en
interaction avec le bourdon de l’instrument ; avec des chants, des cris d’animaux, et
d’autres effets respiratoires. Le didgeridoo est fabriqué à partir d'une branche d'arbre,
de l'eucalyptus traditionnellement, creusée naturellement dans toute sa longueur par des
termites. Aujourd'hui, les didgeridoos sont souvent faits en bambou, mais peuvent être
façonnés à partir de branches de la plupart des essences d'arbres, creusées à la main ou à
la machine, obtenant ainsi un long tube qui laisse passer l'air d'un bout à l'autre de
l'instrument. Le didgeridoo mesure normalement entre un mètre et un mètre cinquante,
mais on peut en trouver également de plus de deux mètres cinquante de long.
Traditionnellement, il décoré par des peintures représentant des scènes de la mythologie
aborigène, ou des motifs claniques
L
’embouchure est souvent recouverte de cire d'abeille pour mieux s'adapter à la forme de
la bouche. Pour jouer du didgeridoo, le musicien fait vibrer ses lèvres comme pour un
cor ou une trompette. Une des particularités du didgeridoo, réside dans le fait que la
plupart des joueurs utilisent la technique dite du « souffle continu », ou « respiration
circulaire ». Celle-ci permet de maintenir constamment un souffle d'air et de pouvoir
136
Lloyd C.L. Hollenberg, “The acoustic of the didjeridu” in The didgeridoo Phenomenon , David
Lindner, Traumzeit-Verlag, 2004.
98
jouer de l’instrument sans s'arrêter pour l'inspiration. La variation du volume d'air dans
les joues ainsi que les contractions du diaphragme permettent des accentuations
rythmiques.
Les harmoniques du didgeridoo peuvent se faire entendre de deux manières
différentes : par amplification, à partir de mouvements des lèvres et surtout de la langue
(ce qui se traduit par un balayage des harmoniques du bourdon lui-même), et par la
technique de l’« overtone » qui permet de faire résonner les harmoniques supérieures de
la fréquence fondamentale, en faisant vibrer les lèvres plus rapidement. Ce sont deux
techniques qui mettent en valeur la série des harmoniques de façon bien distincte, l’une
se situe dans le timbre même du bourdon, et l’autre double la fréquence de ce bourdon
pour en faire résonner les harmoniques supérieures (extraits de musiques du didgeridoo
proposé sur le CD, piste : 14). Les recherches sur l’acoustique du didgeridoo sont très
délicates, en raison des différents diamètres, tailles et formes naturelles ; les premières
ont été menées pas Neville Fletcher et Graham
Wiggins en 1995. Elles nécessitent l’utilisation
d’outils informatiques et, jusqu’à nos jours, les
informations se précisent et s’accélèrent grâce
aux machines de plus en plus performantes.
Mais comme le précise Lloyd C.L. Hollenberg,
cela ne nous permettra d’observer qu’une partie
réduite du phénomène, complète au sens
matériel, mais insuffisante pour approcher la
nouvelle vague culturelle et les appréciations
traditionnelles.
137
Les overtones du didgeridoo
Didgeridoo
Volume faible O fort
Hauteur grave O O O aigu
Timbre feutré O perçant
Durée court O long
Spatialisation proche O lointain
137
Figure issue de l’article de Lloyd C.L. Hollenberg, “The acoustic of the didjeridu” in The didgeridoo
99
Fig.1 : tube cylindrique
Phenomenon op. cit. Cette figure représente les oscillations des notes fondamentales ainsi que des 4
premiers overtones, le digeridoo utilisé est un simple tube cylindrique, l’embouchure étant située sur la
gauche ; à droite, les points plus ou moins serrés, représentent les zones de pression.
138
Figure issue de l’article de Lloyd C.L. Hollenberg, “The acoustic of the didjeridu” in The didgeridoo
Phenomenon op. cit.
139
Terme très utilisé dans le milieu d’une génération d’Occidentaux qui, au vu des conditions de la
société
actuelle, appelle à un retour aux sources naturelles, dans la musique mais aussi à travers une certaine
idée de l’écologie et d’une vie communautaire.
100
la conduction des vibrations se fait alors continuellement dans de nombreuses parties
du corps. Je n’ai pu trouver d’ouvrage qui présente le phénomène acoustique à travers
ses applications traditionnelles en Australie ou bien à travers ses effets en Occident.
Les informations que j’ai pu recueillir auprès d’associations140 et de joueurs de
didgeridoo, tant aborigènes141 qu’occidentaux, indiquent que l’instrument était utilisé
traditionnellement pour soigner certaines maladies, et pour purifier le corps, mais aussi
les habitations et voire les villages. On parlerait de « digeridoothérapie ». L’instrument
est originellement issu d’un contexte très naturel, intégré dans des rituels, au cours
desquels les aborigènes forment des cercles en chantant des paroles sacrées, sur des
rythmes parfois très complexes.
140
Comme l’association Aix Elan, Art aborigène d’Australie (www.aix-elan.org), l’association Vent du
Rêve, à Paris (http://ventdureve.blogspot.com).
141
J’ai rencontré lors du festival « le Rêve de l’Aborigène » en 2005, plusieurs joueurs aborigènes, dont
Lewis Burn, qui réside actuellement aux USA, (http://www.lewisburns.com).
142
Le terme est employé par exemple sur le site : http://perso.wanadoo.fr/jp.minchin/vents.html (consulté
en Octobre 2005).
143
H1 et H2 sont vraisemblablement difficiles voire impossibles à faire résonner, car elles demandent un
souffle très faible en débit d’air et pourtant très fort en pression mais surtout très régulier.
101
oblique, il est possible de recréer une gamme uniquement constituée des harmoniques
de la fréquence du tube et celles de sa quinte (extrait de l’ambitus d’une flûte
harmonique en aluminium proposé sur le CD, piste : 22).
Flûte harmonique
Volume faible O O fort
Hauteur grave O O O aigu
Timbre feutré O O perçant
Durée court O long
Spatialisation proche O O O lointain
2221. La seijfloyte
Dans la tradition musicale de Norvège, on joue de la flûte harmonique : la
seijfloyte, un simple tube en bois possédant un conduit d’air aménagé afin de faciliter le
jeu entre la fondamentale et la quinte par le fait de boucher ou de laisser ouvert
l’extrémité de la flûte. Un petit trou de jeu supplémentaire n’altérant la fréquence que
de quelques commas est essentiellement utilisé pour les fioritures. C’est une flûte dont
le registre est plutôt aigu (extrait de musique de Seijfloyte proposé sur le CD, piste:
08).
Seijfloyte
Volume faible O O fort
Hauteur grave O O aigu
Timbre feutré O O perçant
Durée court O long
Spatialisation proche O O lointain
102
2222. La Fujara
La Fujara est une autre flûte harmonique que l’on trouve dans les Balkans, et
plus précisément en Slovaquie. Elle se présente en deux parties : le corps, une pièce de
bois généralement de plus d’un mètre qui contient quatre trous de jeu et l’aménagement
du conduit d’air ainsi que l’embouchure qui y est reliée
permettant à l’instrumentiste de pouvoir se rapprocher
des trous de jeu malgré la grande taille de l’instrument. Il
se tient verticalement, et demande une position de doigté
particulière (les trous sont bouchés avec les phalanges et
non avec la pulpe des doigts) pour pouvoir accéder aux
trous de jeu. On peut considérer cette flûte comme
harmonique, malgré ses 4 trous de jeu, car le principe
reste le même ; il est question de varier l’intensité du souffle pour faire varier les
harmoniques. L’instrument est suffisamment complet pour être joué avec un seul
doigté. Cela dit, si l’on tolère, dans le cas de la Seijfloyte, le fait de boucher l’extrémité
de la flûte pour varier les harmoniques de la quinte, on peut très bien calculer les
intervalles naturels, comme la quinte ou la tierce majeure, en perçant des trous de jeu,
afin de pouvoir les jouer avec leur harmoniques respectives.
Fujara
Volume faible O O fort
Hauteur grave O O O aigu
Timbre feutré O O perçant
Durée court O O long
Spatialisation proche O lointain
103
En Amérique latine, j’ai pu identifier d’autres types de flûtes harmoniques,
notamment la flûte yapurutu du sud de la Colombie, suivant le même principe que la
fujara Slovaque (extrait de musique de yapurutu proposé sur le CD, piste : 07).
2223. Le Shakuhachi
La flûte Shakuhachi du Japon, n’est pas à proprement
parler une flûte harmonique, car, comme la fujara, elle
possède des trous de jeu. Cependant son embouchure
exceptionnelle lui donne un son très riche en harmoniques.
C’est une flûte droite en bambou et à encoche comme la
quena du Pérou, à la différence que son encoche est tournée
non pas vers l’intérieur mais vers l’extérieur. Son timbre est
donc très caractéristique, très profond. Importé de Chine,
(ancêtre : dong xiao) elle n’était jouée que par certains moines
Zen au cours de méditations du souffle (suizen). Cette pratique (qui n’était pas
réellement considérée par les moines comme de la musique) se faisait dans les temples,
mais aussi en rapport très intime avec la nature (en forêt, en montagne, près d’un
ruisseau, d’une cascade etc.).
144
Général militaire japonais qui dirigeait les samouraïs ; la chute du Shogun marque le retour de
l’empereur au pouvoir (la restauration Meiji).
104
J’ai pu me procurer une flûte ancienne145 chez un luthier de Kyoto, et j’ai alors
découvert après de nombreuses heures de jeu, que si l’on prête attention simplement au
timbre de la flûte, avec une seule et même note, on peut percevoir des harmoniques aux
rapports simples. C’est lorsqu’on tente de concentrer précisément le souffle sur
l’encoche, sans mettre en vibration la fondamentale elle même, que l’on peut entendre
des variations d’harmoniques déclenchées de manière involontaire. Par cette technique
extrêmement précise au niveau du positionnement du souffle et du débit d’air, qui doit
être très lent et pourtant relativement fort en pression, les harmoniques chantent d’elles-
mêmes, il est théoriquement possible de les contrôler afin de jouer volontairement une
mélodie mais la précision requise est telle que cela semble vraiment irréalisable. La
musique semble alors aléatoire et rejoint ainsi le type de jeu du bol chantant ou du bol
taoïste. Elle invite l’instrumentiste à se concentrer sur son interaction avec les
harmoniques et sur sa respiration (extrait de musique des harmoniques du shakuhachi
proposé sur le CD, piste : 26). Le tableau suivant est dressé uniquement pour le jeu
harmonique du shakuhachi :
Shakuhachi
Volume faible O fort
Hauteur grave O O aigu
Timbre feutré O perçant
Durée court O long
Spatialisation proche O lointain
23. MEMBRANOPHONES
Un tambour harmonique ?
Je ne pense pas qu’il existe un tambour par lequel il serait possible de faire
résonner les harmoniques de la vibration fondamentale d’une même peau. Le seul
tambour qui ferait entendre distinctement au moins deux harmoniques à partir du son
fondamental (fréquence de la peau), serait, je pense, le tabla indien. Cette percussion
digitale dont la richesse sonore et la tradition musicale sont remarquables, offre un
nombre de frappes élevé et des variations de timbres très variées. La fréquence de la
peau elle-même, lorsqu’elle est bien accordée, résonne sur la frappe dite « tun » qui est
145
Les flûtes de moines sont très rares, même au Japon on ne trouve presque que des shakuhachi
modernes.
105
déclenchée par l’index au centre de la membrane, sur la pastille noire. Or, lorsqu’on
frappe fortement et très précisément avec le même index sur le bord de la membrane,
presque sur la partie qui recouvre le bois de la caisse, on obtient le son « na » qui
résonne une sixte majeure au dessus du « tun ».
En termes d’intervalle harmonique, il pourrait s’agir de : tun = H8 et na =
H13. Ces notes sont amenées à résonner bien plus que les autres frappes, et que la
plupart des autres percussions qui ne font entendre que des sons inharmoniques.
Les tablas sont considérés comme des instruments sacrés dans la musique
classique d’Inde du Nord. Ils se marient très bien en Occident avec les instruments
harmoniques ; ils sont utilisés fréquemment, par exemple, pour accompagner des
morceaux au didgeridoo, à la guimbarde, au chant diphonique (etc.).
24. CORDOPHONES
241. L’arc en bouche
Cet instrument ne présente qu’une seule corde tendue sur
un arc de bois, frappée avec une baguette. Les harmoniques sont
amplifiées et sélectionnées un peu comme avec la guimbarde,
grâce à la cavité buccale de l’instrumentiste, dont la bouche
ouverte est placée à proximité de la corde. L’arc en bouche est
considéré en ethnomusicologie comme étant le premier instrument
à corde : il serait dérivé de l’instrument de chasse. Il existe des
techniques de frappe avec la baguette qui font également varier les harmoniques :
percussions plus ou moins fortes et effectuées à différents endroit sur la corde, plus on
s’éloigne du centre de la corde, plus on sollicite les harmoniques aiguës. Le jeu de la
baguette tiens un rôle essentiellement rythmique.
Comme pour la guimbarde, l’instrumentiste travaille avec précision les
multiples mouvements de sa cavité buccale : ouverture des lèvres, de la mâchoire,
position de la langue, utilisation volontaire des résonateurs de la gorge, du nez etc. Il est
possible de chanter tout en jouant, ou bien encore de frotter la corde avec un archet
mais c’est en frappant la corde et en se concentrant sur les minutieuses techniques de
résonance buccale que l’on discerne mieux le phénomène de cette musique des
harmoniques. L’arc en bouche est notamment joué traditionnellement en Centrafrique,
comme dans l’extrait proposé sur le CD, piste : 03.
106
Arc en bouche
Volume Faible O fort
Hauteur Grave O O aigu
Timbre feutré O O perçant
Durée court O O long
Spatialisation proche O lointain
242. Le monocorde
Le monocorde, comme nous l’avons déjà vu, est un instrument dont l’unique
corde a permit l’étude des harmoniques. Selon Luc Breton, le monocorde était utilisé
depuis l’antiquité « comme support à la spéculation philosophique, Pythagore lui-
même, dit-on, aurait recommandé à ses disciples, sur son lit de mort: ‘‘travaillez le
monocorde !’’ ». Or, si son utilisation a eu une approche très mathématique dans
l’antiquité grecque, elle fut très religieuse par la suite. L’instrument était également
utilisé dans la chrétienté par Boèce et St Augustin, et à leur suite, par tous les moines
médiévaux, sous forme de monocorde régulateur du chant.
Monocorde
Volume faible O fort
Hauteur grave O O O aigu
Timbre feutré O O perçant
Durée court O O long
Spatialisation proche O O lointain
146
Jonathan Cope est un musicothérapeute d’origine anglaise et spécialisé dans les sons harmoniques et
les instruments qui les produisent. (www.soundforhealth.com).
147
Cité dans l’article de Luc Breton « Les instruments à cordes dans l’Occident chrétien » in Amour et
sympathie, op. cit.
107
un lien entre « Ciel et Terre »148, (voir annexe 14 p. 182) associé selon plusieurs
symboles : l’élément Terre figure, sous le chevalet, puis l’Eau, l’Air et le Feu, viennent
ensuite les planètes parmi lesquels le soleil prend la place du centre de la corde (H2) et
enfin le Ciel Empyrée, marqué par une rangée d’étoiles, qui illustre, comme le précise
Luc Breton, trois divisions attribuées aux neuf hiérarchies angéliques (Séraphins,
Chérubins, Trônes, Dominations, Principautés, Puissances, Vertus, Archanges et
Anges).
dàn bàu
Volume faible O fort
Hauteur grave O O aigu
Timbre feutré O O perçant
Durée court O long
Spatialisation proche O lointain
148
Notion employée par Luc Breton ; le « Ciel et la Terre » doivent être entendus ici comme étant des
principes naturels sacrés, tels qu’on peut les trouver dans la culture traditionnelle chinoise.
108
Le dàn bàu a été aménagé par un système électro-acoustique, ce qui permet de
percevoir encore plus distinctement les harmoniques. Il n’est pas encore très connu en
Occident mais pourrait bien être l’un des prochains centres d’intérêt des passionnés
d’harmoniques et autres musicothérapeutes.
149
François Auboux, l’art du Raga, minerve, 2003.
109
d’après ce sentiment qu’en Occident, on baptisa la vièle à cordes sympathiques, « viole
d’amour ». Je ferai une brève présentation des principaux instruments à cordes
sympathiques d’Occident, d’Inde et de Scandinavie.
150
Texte cité par C. Besnainou et M. Castellengo dans l’article « De la résonance, une étude acoustique
du phénomène sympathique » in Amour et sympathie, op. cit. Filippo Bonanni parle de la trompette
marine dans son Gabinetto armonico, Rome, 1723 LXIV, Trompette Marine.
151
Randle Holme III (1627-1699) : historien, généalogiste, peintre, franc-maçon, maire de Chester, et
contemporain de M.Prin.
152
Texte cité par C. Besnainou et M. Castellengo dans l’article « De la résonance, une étude acoustique
du phénomène sympathique » in Amour et sympathie, op. cit.
110
Trompette marine
(Estimations)
Volume faible O O fort
Hauteur grave O O aigu
Timbre feutré O O perçant
Durée court O long
Spatialisation proche O lointain
252. Le baryton
Appelé aussi viola di Bardone ou Bardone, le baryton est un instrument à cordes
du XVIII siècle (voir annexe 16 p.185). Il a plus ou moins la taille d'un violoncelle et
son accord est : La, Ré, Fa, La’, Ré’, Fa’. Soit les notes d’un accord parfaitement adapté
à la recherche de la résonance. En plus des six cordes de jeu, se trouvent, à l'arrière du
manche creux, sept à neuf cordes sympathiques. L'accord de ces cordes est en principe
diatonique. La douceur du son le faisait apprécier en période pré-classique. Joseph
Haydn composa pour son maître le prince Nicolas Esterhazy, qui jouait lui-même avec
passion du baryton, plus de 170 oeuvres (solos, trios et divertissements). Après 1800,
l'instrument est presque tombé dans l'oubli.
Baryton
Volume faible O fort
Hauteur grave O O O O aigu
Timbre feutré O O O O perçant
Durée court O O long
Spatialisation proche O O lointain
153
Informations recueillies dans l’article de C. Besnainou et M. Castellengo « De la résonance, une
étude acoustique du phénomène sympathique » in Amour et sympathie, op. cit.
111
253. Le violon d’amour
Le violon d'amour est un violon muni de quatre cordes sympathiques en laiton
passant sous les cordes en boyau et la touche (voir annexe 16 p.185). C’est une version
simplifiée de la viole d’amour, difficile à jouer avec ses sept cordes.
254. Le sarangi
Le sarangi est considéré comme l'instrument à cordes frottées le plus
important de la tradition classique hindoustani de l'Inde. Il comporte
un large manche sans frète et habituellement trois cordes en boyaux,
plus une en métal (l’équivalent de la chanterelle du violon) jouées
principalement avec les ongles, et non avec le bouts des doigts.
L'instrument comporte un grand nombre de cordes sympathiques en
métal, couramment onze, parfois plus de trente. Il est employé,
traditionnellement, surtout comme accompagnement du chant, mais depuis les exploits
du virtuose Ram Narayan, il est considéré comme un véritable instrument soliste.
Les instruments à cordes frottées dans cette région du monde sont innombrables
et présentent presque tous des cordes sympathiques. On trouve par exemple en
Afghanistan un instrument similaire appelé rabab. Au Rajasthan, la vièle populaire et
cousine du sarangi s’appelle le kamayatcha. J’ai également découvert dans une région
rurale de l’Inde aux alentours de Gwalior, un instrument similaire qui accompagne les
chants populaires ; il s’agit de la ravanahatta, vièle à une corde en crin et 14 cordes
sympathiques, dont une corde basse et une corde rythmique. En l’expérimentant, j’ai
accordé chaque corde selon la gamme naturelle qui correspond aux harmoniques de H8
à H16 pour en écouter la résonance. Puis j’ai décidé de ne plus jouer sur la corde de jeu
selon les intervalles imprécis pincés par la main gauche, pour ne jouer finalement
qu’avec la corde frottée à vide et le timbre produit. Les variations de résonances des
harmoniques se font selon la force, la vitesse de l’archet et sa position sur la corde, plus
ou moins éloignée du chevalet. J’ai tenté par la suite de frotter directement les cordes
112
sympathiques pour les entendre résonner entre elles, dans une sorte de musique
d’harmoniques instinctive et aléatoire ; j’en propose un aperçu sur le CD, piste : 25.154
La hardingfele
Volume Faible O O Fort
Hauteur Grave O O O Aigu
Timbre Feutré O O O Perçant
Durée Court O O long
Spatialisation Proche O O O lointain
154
l’extrait fait entendre par moment des sons très aigus de grelots ; en effet la ravanahatta qui est un
instrument très rythmique au Rajasthan, possède traditionnellement une série de petits grelots fixés sur
l’archet, qui marquent la pulsation du rythme selon des aller-retours dynamiques. Sur cet extrait (qui
s’éloigne nettement du jeu traditionnel), les grelots ont été laissés libres de sonner selon un rythme
instinctif et non-mesuré.
155
Photo recueillie sur le site : http://www.asza.com/afganreb.shtml
156
Article de R. Sevag « La Hardingfele » in Amour et sympathie, op. cit. p.273.
113
Les différents accordages portent des noms bien particuliers qui relèvent parfois
du surnaturel : par exemple le troll-stille (accord du charme magique), ou bien le
huldre-stille (accord de la nymphe). Si la hardingfele procure les effets de charme
habituels des instruments à cordes sympathiques elle présente aussi un aspect
mythologique qui lui est propre, comme nous l’indique Reidar Sevag :
114
pression exercé pendant le frottement. C’est un instrument qui a une puissance telle que
l’on peut sentir tactilement ses vibrations en approchant les mains à quelques
centimètres de la paroi du bol.
Bol en cristal
Volume faible O fort
Hauteur grave O O aigu
Timbre feutré O O perçant
Durée court O O O long
Spatialisation proche O O lointain
Des musiciens comme Tillmann Rainer vont s’en servir pour recréer une
véritable pièce musicale, mettant en avant leurs vertus thérapeutique. Leur but est
d’apaiser les tensions et le stress accumulés dans un organisme. C’est un son qui
« décape », comme le précise la musicothérapeute Oriane Robidou au cours de ses
stages de sensibilisation aux instruments harmoniques. Son pouvoir est dit effectif,
selon la théorie qu’à chaque être humain, correspond un potentiel de résonance qui lui
est propre, et qu’en soumettant à un individu un instrument dont la vibration correspond
à la fréquence de résonance de cette personne, il est possible de soigner certains
maux157.
157
Nous verrons plus précisément, au cours du chapitre V, comment les musicothérapeutes harmoniques
travaillent selon cette théorie.
115
cristal est donc avant tout un instrument thérapeutique qui aide à éliminer les tensions
et le stress du corps, tout en stimulant la force vitale interne. »158
314. le Waterphone
Le Waterphone a été inventé et breveté par Richard Waters. Il est constitué de
plusieurs tiges d’acier inoxydable et de bronze monolithique, et reprend le principe
d’émission du son selon la résonance des harmoniques par friction, comme pour le
Cristal Baschet. Il est tenu par un poignée centrale et frotté avec les mains et les doigts
humides. Il peut également être utilisé avec un archet ou être percuté avec des maillets.
Les tiges sont accordées différemment selon les modèles. Il fait partie des rares
instruments qui utilisent de l’eau à l’intérieur même de leurs résonateurs, afin de
déformer les tonalités suite à l’inclinaison de l’instrument. Le son qu’il produit a été
comparé au chant des baleines ; Richard Waters aurait employé avec succès plusieurs
Waterphones pour appeler différents cétacés. Ils sont également très facile d’accès,
comme pour le bol taoïste, tout le monde peut s’y essayer et créer des sonorités sans
trop de difficulté. (Voir annexe 18 illustrations p. 188.)
158
Texte recueilli en Octobre 2005 sur le site : http://www.crystalsanctuary.com/Mine_fr_eng/accueil.htm
116
32. Des percussions harmoniques
321. Le hang159
Le hang est un instrument à percussion très
récent (janvier 2000) qui se joue avec les mains. Il a
été développé par Félix Rohner et Sabina Schärer dans
la fabrique d'instruments Panart à Berne (hang en
dialecte bernois signifie "main"). Inspiré du steel-drum
ou steel-pan de Trinidad et du udu pot indien, (connu aussi sou le nom de « gatham »)
Le hang est le résultat de 25 années d'expériences acquises dans la construction de
steelpans et de recherche en acoustique et en métallurgie de ces jeunes instruments de
Trinidad.
Le hang comprend neuf notes : une au centre et huit autres réparties en cercle.
Les tonalités standards sont en gammes majeures, mineures, blues ou pentatoniques,
mais le fabriquant précise que des systèmes d'accordage personnalisé peuvent être
choisis librement à la commande. Chaque timbre est constitué de trois sons
harmoniques qui peuvent être obtenus différemment en fonction de la technique de
frappe. La fondamentale peut être étouffée avec le majeur de la main gauche et les
harmoniques peuvent être obtenues en frappant avec le pouce de la main droite sur les
côtés de la note.
Lorsqu'on joue plus fort, on peut amener les autres notes à entrer en résonance
par sympathie, ce qui enrichit considérablement le timbre. La note basse au centre est
accordée une quinte ou une quarte en-dessous de la note la plus grave de la gamme. Si on la
joue en étouffant le métal, on obtient un son grave qui est produit par la vibration de l'air contenu dans la cavité de
l'instrument (comme avec le udu). On peut varier la note en fermant l'ouverture avec les genoux ou avec une main.
159
Photo et informations recueillies en novembre 2005 sur le site de l’instrument : www.hang.ch.
160
Vidéo recueillie sur le site : http://www.hang.ch/
117
322. Percussion harmonique
Il existe certainement des instruments anciens comme nouveaux faisant résonner
les harmoniques d’une fréquence propre par percussion. J’ai découverts par exemple,
lors du festival « les Noces Harmoniques »161, un instrument dérivé d’une cruche en
terre cuite qui aurait été comme éventrée, enroulée sur elle-même et résonnant
fortement lorsqu’on la frappe à mains nues. Les variations sur les harmoniques sont
possibles en frappant sur différents endroits de la cruche (voir annexes 18 p. 188). Cet
instrument à été créé pour ses sonorités harmoniques, ou plutôt pour ses sons qui
résonnent mais qui ne sont probablement que des partiels.
161
Organisé par Jacques Dudon, « les Noces Harmoniques » rassemblent dans le hameau des Camailles,
au Thoronet, les passionnés de musiques micro-tonales et harmoniques.
162
C’était le cas lors d’un concert du Festival d'Antibes-Juan-Les-Pins, le 19 Juillet 1999 dans la Pinède
Gould où le percussionniste Ciro Battista utilisait l’instrument au sein d’un groupe de jazz aux côtés de
Herbie Hancock.
163
Sarah Hopkins à baptisé ces tuyaux whirlies. Nous verrons comment elle utilise ces instruments dans
le chapitre suivant.
118
à laver peuvent également être utilisés. Certains de ces tuyaux peuvent émettre des
harmoniques.
Il est effectivement possible de les faire résonner selon leur fréquence propre
(ou siffler sur une de leur harmoniques), en les faisant tourner à la manière d’une
rhombe ou d’un lasso. Après quelques tests, ma conclusion fut que tout dépend du
diamètre, de l’épaisseur, de la souplesse, de la forme des dentelures et de la longueur du
tuyau. Selon ces paramètres, le volume, la fréquence fondamentale et l’ambitus des
harmoniques vont varier.
164
Photo prise lors du festival « les Noces Harmoniques » en Août 2005. Avec Jérôme Desigaud, nous
avons découpé plusieurs longueurs de ces tuyaux pour en faire des instruments de sons harmoniques et de
danse ; de nombreux enfants (mais aussi des adultes) sont instinctivement venus s’amuser avec ces tuyaux
qui semblaient beaucoup leur plaire.
119
« do », pour en distinguer les échelles issues de la superposition des harmoniques d’un
degré parent :
H8 La Do Ré Fa Sol
H7 Sol Sib Do Mib Fa
H6 Mi Sol La Do Ré
H5 Do Mi Fa#- La Si
H4 La Do Ré Fa Sol
H3 Mi Sol La Do Ré
H2 La Do Ré Fa Sol
Degrés –> VI I II IV V
120
Un rythme est envisageable dans la mesure où les mouvements des bras (surtout des
poignets) sont naturellement irréguliers et donnent des accents notamment lorsque le
tuyau doit remonter dans sa trajectoire circulaire ; on donne instinctivement une force
plus importante, ce qui a tendance à créer automatiquement un rythme. Il est possible
d’exagérer ce rythme pour en faire une base musicale sur laquelle vont pouvoir
improviser d’autres tuyaux par exemple. La maîtrise du rythme est aussi difficile que
celle de la sélection volontaire des harmoniques, c’est un travail fin et épuisant, surtout
pour les harmoniques aiguës.
La rotation à main nue de ces tuyaux ne peut déclencher que les harmoniques
des trois premières octaves ; les intervalles plus resserrés au sein du quatrième octave
(H8/H16) offrent des combinaisons plus complexes entre les tuyaux de fondamentales
différentes. Pour accéder à ces harmoniques plus aiguës, j’ai eu l’idée de faire résonner
les tuyaux grâce au vent lui même ; or, pour trouver un vent régulier, la solution la plus
simple était encore de monter en voiture et de placer le (les) tuyau(x) face au vent, par
la fenêtre. La main droite du passager tient l’extrémité qui reçoit l’air à environ 30 cm
de la fenêtre, la main gauche maintient l’extrémité qui émet le son vers l’intérieur du
véhicule. Le son reste le même mais semble beaucoup plus épuré du fait qu’il n’y a plus
aucun rythme : l’air pénètre dans le tube très régulièrement, c’est ainsi que je me suis
rendu compte de l’importance de la vélocité du son, relative aux à-coups et aux défauts
des mouvements circulaires à main nue. Les harmoniques H8, H9 et H10 sont
particulièrement puissantes en volume et commencent à être presque dérangeantes à
l’oreille. Les harmoniques se déclenchent donc les unes après les autres selon la vitesse
du véhicule ; or, sur certaines vitesses, que je qualifierais d’intermédiaires, on entend
un oscillement entre deux harmoniques avec un silence étouffé.
Plus l’harmonique sollicitée est aiguë, plus la période intermédiaire est longue.
Au delà d’une certaine vitesse, je n’ai pu réussir a déclencher l’harmonique H 11, peut-
être à cause de l’inclinaison de « l’embouchure » qui exigerait davantage de précision
ou bien à cause de la période intermédiaire qui n’atteint pas la vitesse suffisante pour
déclencher cette harmonique.
121
Harmoniques Km/h
H10 150
H9 130
H8 120
H7 90
H6 80
H5 70
H4 60
H3 40
H2 30
Tuyaux harmoniques
Volume faible O O O O fort
Hauteur grave O O aigu
Timbre feutré O O perçant
Durée court O O long
Spatialisation proche O O lointain
122
332. Harpes éoliennes
La harpe éolienne trouverait son origine chez Anathanasius Kircher165 qui
aurait cherché, en la construisant, à mettre en évidence les phénomènes de sympathie.
Avec cet instrument tout à fait particulier, c’est le souffle du vent qui devient
l’interprète. Le principe est relativement simple : il suffit de tendre une ou plusieurs
cordes face au vent, de leur prévoir une caisse de résonance afin d’amplifier le son, et
de laisser le vent déclencher la vibration de la corde pour l’entendre résonner. Cette
vibration n’est pas déclenchée par force mais par sympathie :
le rapport entre la vitesse du vent et la fréquence propre de la
corde dépendent de la mise en résonance de celle-ci. Plus les
cordes sont courtes, plus il faut les rapprocher pour conserver
l’interaction entre elles. Quand le vent fait vibrer les cordes,
selon leur diamètre, elles émettent soit la note fondamentale,
soit une ou plusieurs harmoniques. C’est le vent qui crée ce
son riche qui monte, s’amplifie puis redescend en changeant
de tonalité. Ce chant surprend bien souvent par son côté
changeant et doux à l’oreille. Harpe éolienne de
Robert Valkenburgh166
harpe éolienne
Volume Faible O fort
Hauteur Grave O O O O aigu
Timbre Feutré O perçant
Durée Court O long
Spatialisation Proche O Lointain
Au début des années 1990, Roger Winfield met au point plusieurs harpes
éoliennes au design très moderne, reprenant les systèmes de lutherie des guitares et
basses électriques avec donc, cette fois-ci, des cordes en métal amplifiées par des
micros. Son disque « windsong, the Sound of Aeolian Harps » fait entendre des sons
sans attaque, qui sont le résultat de la résonance des cordes par différents vents (nord,
sud, est, ouest). La notice du disque ne décrit pas l’accordage. On peut se demander si
ce résultat est seulement l’effet du vent ou bien si les sons ont été traités et mis en
165
D’après le livre Amour et sympathie, le baryton à corde une méthode de recherche en lutherie, Pierre
Jaquier, op. cit. p.116. voir annexes p.18.
123
évidence en studio selon plusieurs registres (extrait des harpes éoliennes proposé sur le
CD, plage : 19).
Cithare harmonique
Volume faible O O fort
Hauteur grave O O aigu
Timbre feutré O O perçant
Durée court O long
Spatialisation proche O O lointain
166
Robert Valkenburgh à fabriqué plusieurs models d’harpes éoliennes et les à exposées au festival de
Berck sur Mer en 2000 (photo recueillie en Octobre 2005 sur le site : www.windgallery.com/wind.htm).
167
Harmoniques du temps, Pierre Jean Croset, Radio France, 1988.
124
On pourrait trouver encore beaucoup d’autres instruments de ce genre plus où
moins connus ou aboutis, car, comme nous avons pu le constater, le domaine de la
résonance et des harmoniques est très vaste et laisse libre cours à de nombreuses
inventions sonores et musicales. On pourrait effectivement parler aussi des instruments
de Jacques Dudon168 et de Harry Partch169 qui travaillent sur la micro-tonalité et le
tempérament juste ; de musiciens et luthiers comme Jérôme Desigaud, qui pratique
notamment le chant diphonique, le didgeridoo, d’autres instruments à bourdon et qui a
fait d’un simple guidon de vélo en métal, une flûte harmonique exceptionnelle ; des
artisans comme Michelle Marcus-Deardon qui a fabriqué une multitude de flûtes
harmoniques en terre cuite. Alain Daniélou a même conçu un instrument électronique
avec un clavier qui permet de jouer les sons des harmoniques : le Sémantic. Mais nous
tâcherons de nous limiter à l’étude des instruments acoustiques.
168
Jacques Dudon participe à la recherche micro-tonale en France avec son association l’Atelier
d’Exploration Harmonique (http://aeh.free.fr); il a également créé le festival « les Noces Harmoniques »
qui ont lieu tous les ans depuis l’an 2000.
169
Harry Partch a mis au point de nombreux instruments à « intonation juste » selon les rapports des
gammes naturelles, comme le zoomoozophone et le Harmonic Canon.
125
L’orgue à feu conçu par Pierre Joulain
met en résonance des tubes thermiques qui laisse parfois échapper des harmoniques
Arcs en bouche
modernes
Flûte harmonique/tambour
170
Lors d’une représentation au festival des « Noces Harmoniques » de 2005, le musicien qui figure sur
la photo faisait du chant diphoniques contre la membrane transparente de l’instrument.
126
V Effets des musiques harmoniques et thérapie
par les sons harmoniques
Ce chapitre vise à mettre en évidence les effets des sons et de la musique sur
l’organisme humain, et plus particulièrement ceux des harmoniques naturelles. J’ai pu
observer des effets dus aux harmoniques selon deux niveaux : un intérêt particulier
manifesté par divers publics en général, et une approche thérapeutique plus
approfondie. Avant d’entrer dans le vif du sujet, je propose de faire un rappel sur les
bases de la musicothérapie dite « classique ». J’ai regroupé dans ce rappel plusieurs
notions qui pourront être nécessaires à l’étude de l’approche « harmonique » de la
musicothérapie.
La musicothérapie réceptive :
En musicothérapie réceptive, on place un ou plusieurs auditeurs dans des conditions
d’écoute neutre et confortable. Le travail du thérapeute consiste à observer et analyser
les réactions psychologiques et physiologiques du (des) sujet(s). Le Dr Jacqueline
Verdeau-Pailles171, par exemple, soumettait à l’auditeur une fiche de renseignements
décrivant son identité, sa réceptivité à la musique, son environnement sonore au
quotidien, sa culture musicale, ses relations et conditions familiales (etc.). Elle tirait
ensuite un diagnostic en fonction du comportement de l’auditeur pendant l’écoute et en
fonction de ses réponses lors d’un entretien final. Selon ce type d’études, la
127
musicothérapie a pu établir des liens entre pathologies et musique ; on choisit ainsi une
sélection de compositeurs et d’œuvres en fonction des traitements : Haendel redonnerait
confiance en soi, Mozart serait anti-dépressif et Bach clarifierait la situation172 (etc.).
Les études, les recherches et les pratiques que j’ai pu aborder en musicothérapie
générale se limitent à l’écoute de musiques classiques occidentales ou de chansons de
variétés ; certains musicothérapeutes sont plus ouverts que d’autres dans leurs choix
musicaux, mais les pratiques se sont surtout développées en fonction d’une population
et d’une génération particulière et avec des pathologies bien précises : autisme,
névroses, psychoses, handicaps physiques, sensoriels et mentaux, toxicomanie,
alcoolisme, maladies psychosomatiques (cardiaques, respiratoires, spasmophilie) ; elles
s’appliquent également, comme nous l’avons vu, avec les sourds, mais aussi en soutien
dans les hôpitaux, auprès des grands brûlés ou des comateux.
La musicothérapie active :
La musicothérapie active met le patient en situation de créateur de sons et de
musique, un état qui vise à développer une confiance en soi par l’expression. Les
instruments mis a disposition sont généralement assez faciles d’accès et permettent une
satisfaction sonore immédiate. Le plus souvent, ce sont des percussions comme les
xylophones, les cymbales, les claves, les hochets, le tambourin, les timbales, les
carillons (etc.) ; les flûtes et les instruments à corde comme la harpe ou la cithare sont
parfois utilisés, mais demandent un minimum de connaissance préalable. Un coté
ludique est généralement développé, notamment pendant les thérapies de groupe, à
travers divers jeux musicaux. Cette forme de musicothérapie vise essentiellement à
soulager l’angoisse, améliorer la communication, notamment en levant les inhibitions,
et à rééduquer les handicapés moteurs, sensoriels ou linguistiques.
Les psychosynthèses :
La psychosynthèse, instaurée par Luigi Pereson173, ajoute à la musicothérapie
réceptive d’autres pratiques, comme le Rêve Eveillé Dirigé (R.E.D) de Desoille, la
171
Verdeau-Pailles Jacqueline, le bilan psycho-musical, Courlay, J.M. Fuzeau, 1981.
172
Ces exemples sont des généralités de la musicothérapie classique cités par Alexandre Koehler dans son
article « le son, la voix… et la musicothérapie » consulté en Septembre 2005 sur le site :
www.buddhaline.net
173
Dr L. Bence et M. Mereaux, guide pratique de musicothérapie, St-Jean-de-Braye, Dangle, 1987 p.28.
128
relaxation à induction multiple de Michel Sapir, le réflexe de relaxation de Benson, la
sophrologie de Thierry Loussouarn, ou bien les différentes techniques de respiration et
de méditation par le yoga, le zen (etc.). Les musicothérapies qui utilisent les
harmoniques et leur résonance sur diverses parties du corps, sont très souvent liées à
d’autres pratiques comme les assouplissements, les massages, le do in, le qi kong, des
jeux de vocalises, mais aussi l’utilisation du pendule. Ces pratiques sont généralement
attachées à un mode de pensée en relation avec des traditions anciennes ou sacrées.
Ce que je retiendrai du travail des musicothérapeutes classiques c’est leur
utilisation de musiques bien précises (mais parmi un choix souvent restreint174) pour
soigner des troubles divers, plus ou moins importants. La musique peut être un moyen
d’extérioriser ces troubles. Elle s’avère effectivement utile, par exemple, lors d’une
accumulation de stress qui exige parfois, par compensation, une vibration qui devra être
perçue de manière claire et calme, dans un environnement intime et confortable. Une
forte colère, en revanche, peut avoir besoin d’être accompagnée par une vibration forte
et agressive dans un environnement large et bruyant, de manière à pouvoir extérioriser
au mieux son sentiment. D’après les longues discussions que j’ai pu échanger avec le
musicothérapeute psychologue Michel Bon175, il s’agit là d’une catharsis au sens
psychothérapeutique du terme. Or, cette approche n’est que très rarement admise en
musicothérapie classique. Pour ce qui nous intéresse dans cette étude et avant de revenir
à la question des harmoniques proprement dites, je retiendrai donc les études qui ont
répertorié différents niveaux et contextes d’écoute ; j’aborderai enfin la distinction entre
la musicothérapie et la thérapie par le son. Les descriptions seront complétées
d’approches personnelles se basant sur mes expériences en musicothérapie analytique
transpersonnelle176, sous la direction de Michel Bon.
174
La musicothérapie classique semble effectivement très hermétique à certaines musiques : si certaines
pratiques tolèrent quelques musiques du monde (très souvent commerciales) et quelques musiques de
jazz, d’autres, dénoncent toute forme de musique rock, et ne peuvent généralement admettre qu’une
musique « non-classique » puisse être efficace sur le plan thérapeutique. Des musiques d’ambiance et de
synthétiseurs sont parfois accompagnées d’une douce voix qui invite l’auditeur à des exercices de
respiration et de relaxation.
175
Michel Bon, Mandala Sonores, Condé-sur-Noireau, Trismegiste, 2003.
176
Terme utilisé par Michel Bon dans son travail ; j’ai passé trois séjours d’une semaine avec ce
psychologue de la musique pour tenter de mieux comprendre la musicothérapie et apprendre à
développer une approche psychologique de la musique et du son, j’ai notamment assisté et participé à
plusieurs séances d’écoute, seul et en groupe.
129
Les niveaux d’écoute
La langue française fait une distinction entre « entendre » et « écouter » ; En
développant l’idée de cette distinction selon plusieurs niveaux, nous pouvons ainsi
constater des effets de portées différentes. Pierre Schaeffer a dénombré quatre niveaux
d’écoute distingués par les verbes : ouïr, entendre, écouter et comprendre qu’il illustre
par la phrase :
« Je vous ai ouïe malgré moi, sans que j’ai écouté à la porte, mais je n’ai pas
compris ce que j’entendais »177.
Nous pouvons ajouter à cela la perception inconsciente du son qui serait
observable dans l’état de sommeil profond, par exemple, et soulève ainsi la question de
la perception des vibrations sonores en temps que phénomène physiologique et non
psychologique. A l’opposé, nous ajouterons également une certaine capacité à plonger
dans un état de réceptivité à la musique et au son, qui dépasse la condition de
concentration. Marie-Louise Aucher, Philippe Barraqué, Oriane Robidou, Denis
Fargeot, et bien d’autres musicothérapeutes parlent d’un conditionnement d’écoute
privilégiant, à la place du mental (jugement) et de l’attention (concentration), un état
« d’ouverture d’esprit et de paix intérieure ». Il s’agit alors d’ « écouter en toute
conscience », c’est à dire ressentir pleinement le son en s’ouvrant psychologiquement et
sensiblement afin de l’intégrer comme une nourriture.
177
Phrase issue du traité des objets musicaux de Pierre Schaeffer, et recueillie dans l’ouvrage de
Jacqueline Assabgui, La Musicothérapie, Paris, Jacques Grancher,1990.
130
• Le contexte intérieur : être réceptif, dans un état où l’écoute de la musique va
pouvoir compenser un certain manque, atténuer un excès, ou amplifier un
sentiment agréable.
Nous devons également distinguer l’écoute selon la répétition de celle-ci par un même
auditeur. En effet, la première écoute d’une pièce musicale a généralement un impact
bien différent si on la compare à la deuxième, ou la dixième écoute. Remarquons
également que les effets de la musique peuvent être influencés par transmission, ce qui
présente encore un contexte bien particulier : lorsque nous faisons découvrir une
musique à une personne, nous l’influençons plus ou moins consciemment en y attachant
une partie de nous-mêmes (plus précisément une représentation de nous-même par
l’auditeur). Nous lui communiquons ainsi, en plus de la musique elle même, notre
propre sentiment pour cette musique. Selon cette pensée, selon les innombrables
contextes, intérieurs et extérieurs, et selon le choix du morceau et sa compatibilité avec
l’auditeur et sa pathologie, les effets de la musique ne peuvent être objectivement
répertoriés, tous ces facteurs étant très subjectifs et nécessitant une étude au cas par cas.
De nombreux tests sonores sur les genres minéral, végétal, et animal ont
démontré que certains sons et certaines musiques génèrent des effets très contrastés
(voir en annexe 2 : historique des tests sonores p.166 /173). Or, la musicothérapie se
distingue principalement de ces tests sonores de par son utilisation des effets de
différentes musiques, non seulement sur le corps, mais aussi sur les émotions de
l’auditeur. Remarquons dans ce sens que, sans qu’il soit question de vibration, une
personne qui détient les codes culturels pour déchiffrer sans peine une partition et
comprendre ainsi la musique qu’elle est amenée à lire, peut recevoir à travers son
oreille interne et son interprétation personnelle, des émotions provoquées par cette
musique muette. Des émotions peuvant être remarquables sans aucun recours au
moindre son, au sens physique du terme178. C’est pourquoi nous ferons une distinction
entre la musicothérapie (qui agit sur les émotions) et la thérapie par le son (qui agit sur
le corps). Nous verrons donc, par la suite, différentes techniques thérapeutiques
soniques utilisant les sons harmoniques pour soigner le corps. Notons par ailleurs que
178
Nous pouvons, pour illustrer cette idée, nous référer par exemple à une scène du film Farinelli, dans
laquelle le personnage de Farinelli sanglote d’émotion en lisant, dans le silence, une partition d’Haendel.
131
ces deux approches, bien qu’agissant sur des plans différents, sont très souvent
indissociables.
Les musiques qui mettent en évidence la résonance des harmoniques peuvent
aussi générer, comme nous avons pu le remarquer, des effets émotionnels et affectifs
auprès de publics très divers, notamment en Occident, où l’on peut constater un
véritable phénomène de mode.
179
Ces personnes vivent effectivement dans un respect de la nature, aussi bien dans l’alimentation, le
logement, les vêtements, la musique etc. J’ai pu apprécier leur compagnie dans la région d’Aix-en-
Provence par exemple avec Marie-Thérèse Marin du Bard, Philippe Bougon, Josiane Chartier, Oriane
Robidou, ou encore l’équipe de l’Exploration de Recherche Harmonique de Jacques Dudon aux hameaux
des Camailles (Thoronet).
132
en pleine nature. Avec son timbre particulier et son amplitude sonore, il crée une sorte
de lien communautaire entre plusieurs individus qui, dans une époque où haute
technologie et loi du marché sont omniprésentes, manifestent un retour aux valeurs
simples, naturelles et écologiques, notamment par l’ouverture d’esprit et le mélange des
cultures auxquelles il renvoit.
180
On compte en France plus d’un millier de personnes par an pour le festival « le rêve de l’aborigène »
et plus de 500 personnes pour « les Noces Harmoniques ». op. cit. Notons également les festivals en
Suisse : Rainbow creation, en Allemagne : Dreamtime Didgeridoo Festival ou aux USA : jammin’ tree
didgeridoo festival.
181
Texte figurant sur les prospectus de l’association vent du rêve à Paris, et sur le site officiel :
http://www.ventdureve.net/data/documents/flyerVDR2.pdf
182
Festival du didgeridoo, guimbarde et chant diphonique de l’association vent du rêve, op. cit.
183
On peut comparer cet esprit à celui des « rainbow », mouvement post-hippies qui rassemble dans la
nature plusieurs personnes autour du respect de la nature et des autres.
133
temps comme étant authentiques et traditionnels (car c’est généralement ce qui
intéresse ou séduit le plus les clients). Ainsi, par exemple, j’ai pu observer, chaque
année depuis l’été 2000, la pratique commerciale de Stéphane Voisin184 qui tient un
magasin ambulant d’instruments de musiques du monde. Son activité consiste a
rapporter de ses divers voyages dans le monde, des instruments traditionnels, plus ou
moins rares, pour les vendre en France. Les instruments les plus accessibles sont
généralement les plus prisés : guimbardes, bol chantants (du Viêt-Nam d’origine
industrielle, avec très peu d’harmoniques), didgeridoo etc. Stéphane Voisin propose
également des instruments à cordes sympathiques, comme la ravanahatta du Rajasthan.
Les concerts proposés par ce genre de festival mettent en scène des musiciens
traditionnels spécialement invités185, mais aussi de plus en plus d’artistes occidentaux
qui se sont inspirés des techniques traditionnelles et qui génèrent alors une musique
différente issue de cette fusion. Steve Kindwahl, par exemple, originaire des Etats Unis,
a produit plusieurs disques et concerts qui font entendre le jeu des guimbardes
traditionnelles d’Inde, du Viêt-Nam, etc. Ainsi, il joue de la guimbarde H’mong186
avec, non pas un, mais deux exemplaires à la fois, accordés sur la même fréquence et
pincés entre ses lèvres. Les deux languettes jouées parfois alternativement, créent un
effet qui fait cohabiter les harmoniques de deux fondamentales résonant à l’unisson
dans une sorte de réverbération naturelle (extrait proposé en annexes : CD plage 17).
184
La boutique « tradi-son » de Stéphane Voisin est basée en région Lyonnaise.
185
C’est le cas de la troupe mongole dont nous avons parlé (association « Archipel Nomade »), du
chanteur Tserendavaa ou encore de Lewis Burn (didgeridoo).
186
Le peuple H’mong vit dans les montages du Viêt-Nam, j’ai pu rencontrer plusieurs H’mong dans la
région de Sappa, au cours d’un voyage en 2002. Ils pratiquent la guimbarde en laiton notamment à des
fins de séduction et récitent avec le jeu de celle-ci, des poèmes charmeurs.
134
121. Un retour à la consonance naturelle
Parmi les mouvements d’intérêt esthétique de la musique, j’ai pu constater une
certaine tendance visant à remettre en question le système tonal actuel (tempérament
égal à 12 demi-tons) et son diapason (440 Hz). Ainsi, le travail de Philippe Bougon,
issu de ses recherches acoustiques sur les modes anciens et leurs résonances, manifeste
bien cette remise en question des valeurs de la musique issue du dodécaphone tempéré.
En comparant les fréquences des gammes tempérées et naturelles, il met en évidence la
complexité du système tempéré tout en rattachant le phénomène vibratoire naturel avec
son « symbolisme divin », plus approprié selon lui en termes de guérison par les sons
(voir annexe 25, p.197 : le divin et les gammes). C’est peut-être aussi dans cette même
intention, dans ce souci de l’origine, qu’on peut observer un intérêt grandissant pour les
musiques traditionnelles du monde, qui rassemblent des sonorités et des instruments
parfois bien éloignés de l’actuelle culture musicale occidentale. Cette tendance se
retrouve particulièrement dans les thérapies par le son harmonique ; elle semble
constituer d’ailleurs la base de celles-ci.
122. L’harmonisation188
En musicothérapie, mais aussi en kinésiologie, en relaxation ou encore en
sophrologie, le but recherché est très souvent appelé : « harmonisation ».
« L’Harmonie est la base de toute guérison. Au sens étymologique cela
représente l’action de joindre ensemble, des objets, des personnes, des concepts etc.
qui étaient préalablement séparés. »189 Les pratiques de thérapie par les harmoniques
établissent facilement un rapport entre l’harmonisation et les harmoniques. Elles
utilisent notamment la symbolique des proportions parfaites par le découpage du
monocorde, issu des pythagoriciens, et les mettent en relation avec le corps humain,
comme on peut le constater sur les illustrations de Robert Fludd (voir annexe 14 p.
182), ou bien sur les figures harmonieusement symétriques des travaux de Chaldni,
Hans Jenny et Emoto, qui suggèrent une dimension sacrée et mystique des sons (voir
187
Comme nous l’avons vu au cours du rappel sur la musicothérapie, les psychosynthèses définissent les
pratiques qui ajoute à la musicothérapie réceptive une autre pratique complémentaire, comme la
relaxation, le yoga, la radiesthésie etc.
188
Les informations concernant ce paragraphe sont issus des pratiques d’harmonisation par les sons
harmoniques tels que Jonathan Cope, Oriane Robidou, David Hykes, Philippe Baraqué, John Beaulieu,
Jill Purce etc.
189
traduction d’une citation de John Beaulieu, music and sound in the healing art, station hill press,
Element and music. New York, 1987 p.42.
135
annexe 2 p.166 / 173). Les relations avec la nature, que l’on a pu établir avec certains
chants diphoniques et certains instruments harmoniques, sont généralement mises en
évidence lors de la pratique thérapeutique.
190
Je souligne particulièrement le terme homonyme.
136
harmoniques sur le disque à l’intérieur de la pyramide de Kheops193, profitant ainsi de
l’énergie cosmo-tellurique du lieu qui favoriserait l’harmonisation.
Plusieurs thérapeutes fondent en effets leurs pratiques sur des théories que l’on
pourrait qualifier d’empiriques, ce qui n’empêche pas d’autres chercheurs, à l’approche
plus scientifique comme Philippe Bougon ou Trân Quang Hai, de pouvoir pratiquer
cette thérapie par les harmoniques et d’en constater les résultats.
191
Par exemple : Denis Fargeot, La voix tibétaine, chant harmoniques sacrés, collection reliance, 2003.
192
Par exemple : Epanouissement des Chakras, Bols chantants pour équilibrer les centres d’énergie,
Blinkey Kok, Pays-Bas, 2002.
193
C’est d’ailleurs le cas de l’extrait du bol en cristal et du chant diphonique thérapeutique plage 21sur le
CD. Informations et extrait sonore recueillis sur le site de crystal sanctuary : www.crystalsanctuary.com
194
Le mantram correspond à un raga chanté.
195
« La Musique » Cyril scott p.181.
137
gamme issue de la série des harmoniques avec les notes : sa re ga ma pa da ni sa qui
s’adaptent à toute fréquence fondamentale (voir annexe 3 p.174).
Ragas Traduction Sentiments
SHRINGARA (Volupté sexuelle) Béatitude spirituelle
HASYA (Bonne humeur) Humour
KARUNA (compassion) Tristesse, solitude
RAUDRA (courroux) Colère, fureur
VIRA (héroïsme) Héroïsme, grandeur
BHAYANAKA (crainte) Terreur, frayeur
BIBHATSA (dégoût) Dégoût
ADBHUTA (Etonnement) Joie, surprise
SHANTI (paix) Paix, repos, tranquillité
196
D’après Avalon et Sridha. 1983 / B. Auriol, la clé des son, op. cit. p.109.
197
François Auboux, l’Art du raga, minerve, 2003.
138
points principaux étant sont des centres d’énergie circulaires que l’on appelle chakras
(roue en sanskrit). Chaque chakra possède une position le long de la colonne vertébrale,
un nom, une couleur et un domaine émotionnel (il existe aussi beaucoup d’autres
relations qui varient selon les interprétations).
198
Description d’après Barbara Ann Brennan, le pouvoir bénéfique des mains, op. cit.
139
pratiqué par des moines tibétains pour atteindre l’illumination, un chant à pouvoirs,
une vibration qui pénètre jusqu’aux cellules. C’est le fameux chant qui guérit. »199
Dans le cadre des thérapies par les harmoniques, les chakras sont mis en
relation avec des fréquences vibratoires qui, lorsqu’ils sont accordés entre eux, sont
susceptibles de résonner ensemble et de déclencher alors l’harmonisation. Le chant
harmonique200 est utilisé pour harmoniser les chakras d’un patient dans certaines
approches de la musicothérapie. Il peut être effectué sur une personne passive et
réceptive, comme un massage sonore, et par un balayage des harmoniques selon
différents endroits du corps. Il est également utilisé en thérapie active, ou plutôt en
auto-thérapie par le chant, où le chanteur est émetteur et récepteur des harmoniques
qu’il produit. Nous verrons que les thérapies par le chant harmonique accordent aux
chakras des notes différentes selon les interprétations.
199
Texte de Trân Quang Hai issu de l’article « le chant diphonique : nouvelle thérapeutique », recueilli
sur le site : http://tranquang.free.fr
200
Il s’agit véritablement d’une technique occidentalisée du chant diphonique sigit, en thérapie par la
voix, il est généralement beaucoup plus doux au niveau du son fondamental.
201
Terme issu de la psychophonie, et employé par Marie-Louise Aucher pour qualifier son travail vocal.
Celui-ci s’est développé autour des relations entre le chant, les organes, les vertèbres, les méridiens etc.
202
Représentation de l’aura du chanteur selon Marie-Louise Aucher, Les plans d’expression, Schéma de
psychophonie, Paris, Epi, 1977.
140
Suite aux travaux de Marie-Louise Aucher, des correspondances entre les sons
chantés et reçus ont été mis en rapport avec les chakras, eux-mêmes mis en rapport
avec des couleurs, des émotions, mais aussi des planètes, des odeurs, des métaux, des
saisons etc. Des croyances populaires semblent s’être ainsi répandues dans le milieu
ésotérique (revues, conférences, stages etc.) et ont abouti à des suppositions parfois
bien improbables. On trouve notamment une correspondance très simple entre les
chakras et les notes de la gamme tempérée sur une octave. Cette interprétation bien
commode peut être utilisée dans un but généralement commercial, s’adressant à un
public prompt à se satisfaire d’une relation logique par rapport à ses repères culturels.
Si
La
Sol
Fa
Mi
Ré
Do
Système de correspondance des notes avec les chakras selon une interprétation populaire
La thérapie vocale peut avoir lieu malgré tout pour diminuer le stress, par exemple, car
l’exercice est efficace dès que le processus de guérison est déclenché et que le patient se
sent en confiance avec la pratique.
23. Oriane Robidou
Admettant qu’un lien existe entre les chakras et les sons, certains thérapeutes
des harmoniques et des chercheurs comme Philippe Bougon, ont acquis la conviction
que ce lien ne peut exister, et être réellement efficace, qu’avec l’utilisation d’intervalles
naturels, et non pas au moyen du système tempéré. Comme nous l’avons déjà vu à
travers une citation de Barbara Ann Brennan203, l’énergie universelle qui anime les
chakras obéit à des lois naturelles, et non pas en fonction d’une culture donnée. De
plus, selon la corpulence du patient, ainsi que son état psychologique, la note
141
fondamentale, qui correspond à son système énergétique global, peut varier. C’est
pourquoi, la relation entre harmoniques et chakras semble beaucoup plus envisageable.
Nous verrons malgré tout se décliner plusieurs interprétations. Oriane Robidou utilise,
pour ses séances d’harmonisation par le chant, un rapport avec les chakras en fonction
de la fréquence propre du patient et des intervalles naturels qui en découlent.
septième
sixte
quinte
quarte
tierce
seconde
fondamentale
système de correspondance des intervalles avec les chakras selon Oriane Robidou
Afin de trouver la note fondamentale qui correspond à une personne, Oriane
Robidou utilise plusieurs techniques : en faisant chanter du grave vers l’aigu le patient,
elle peut identifier une « note pivot » qui fait la jonction entre la voix de gorge et la
voix de tête. Elle utilise également un pendule qui va réagir en fonction de la note
concernée et précise que l’on peut également utiliser la technique du test musculaire
pratiquée en kinésiologie. Elle distingue ainsi deux notes fondamentales : la « note de
naissance », sensée correspondre à un individu toute sa vie, et la « note du moment »
qui varie autour de la note de naissance et qui correspond à un état plus précis de la
situation physique et psychologique du patient.
203
Voir chapitre II, Barbara Ann Brennan, le pouvoir bénéfique des mains, op. cit.
142
24. Philippe Bougon
La version de Philippe Bougon reprend le principe de la note fondamentale
attribuée à un patient tout en se rapprochant du point de vue de Marie-Louise Aucher.
On voit effectivement décliner plusieurs octaves selon les centres d’énergies.
Le chant harmonique est alors effectué sur tout le corps en commençant par la
plante des pieds pour la fondamentale (H1) puis le coccyx (H2), le cœur (H4), la gorge
(H8), et la couronne (H16).
H1
6
H8
H4
H2
H1
204
Oriane Robidou, texte issu d’un article parut dans le magazine « Objectif : notre santé » n°27 automne
2003.
143
voyelles chantées Harmoniques
«i» H12
«è» H10
«é» H9
«a» H8
«e» H6
«o» H5
« ou » H4
système de correspondance des harmoniques avec les chakras selon Trân Quang Hai
205
Texte de Trân Quang Hai, tiré d’un exposé de ces travaux sur le site : http://tranquang.free.fr
144
l’harmonisation sur leurs patients par « Le Chant Harmonique Sacré ». Les séances se
déroulent pendant des stages de découverte du chant harmonique en thérapie réceptive
et active ; plusieurs niveaux sont abordables. Afin de pouvoir se représenter l’efficacité
de la pratique, considérons le témoignage d’un stagiaire :
206
Témoignage d’un stagiaire de Véronique et Denis Fargeot, recueilli en Novembre 2005 sur le site :
http://www.yogaduson.fr/accueil.htm
145
3. Les thérapies par les instruments harmoniques
Les thérapies qui utilisent des instruments harmoniques sont généralement plus
rares que celles des chants harmoniques. On remarque tout de même une certaine
parenté dans les pratiques, dans la mesure où les sonorités d’instruments, tels que les
bols chantants par exemple, sont également associées aux chakras. Nous verrons que
les instruments peuvent agir plus précisément que la voix, ceux-ci étant alors destinés à
viser des endroits du corps, comme on peut le faire avec un didgeridoo, par exemple.
En ce sens, un lien avec la médecine traditionnelle chinoise est souvent établi, selon le
système de la circulation d’énergie à travers les méridiens et les points d’acuponcture
précisément répartis sur le corps.
207
Les diapason ne sont pas décrits précisément, on est amené à penser qu’ils sont accordés selon des
fréquences qui correspondent au système naturel et non pas tempéré comme le suggère la figure issu des
travaux de Philippe Bougon, voir annexe 26 p. 198.
146
incapables de résonner avec une partie de nous-mêmes ou de notre environnement,
alors nous devenons « dissonants » ou malades.
208
Traduction d’un paragraphe du livre de John Beaulieu, Music of the Healing Arts, New York, Station
Hill Press, 1987.
209
Ces méridiens relient et équilibrent les autres selon deux catégories (maître-cœur : yin / triple
réchauffeur : yang ).
210
Figure issue du livre de Marie-Louise Aucher, Les plans d’expression, op. cit.
147
appliquer très précisément les vibrations harmoniques212 sur les points correspondants
aux différents méridiens.
John Beaulieu explique que les proportions harmoniques du corps peuvent être
déterminées en divisant la distance (mesurée en pouces – inches en anglais) la plus
petite avec la distance la plus grande, en relation avec les fractions des intervalles
musicaux. Par exemple, dans le diagramme les harmoniques du corps (voir annexe 27
p. 200), la distance entre l’orteil et le coccyx est de 43.6 inches. Et la distance du
coccyx au sommet de la tête est de 32.5 inches. En divisant 32.5 par 43.6 on obtient la
proportion 0.745 ce qui, d’après Beaulieu, correspond musicalement à l’intervalle d’une
« quarte juste ». Or la valeur : 0,745 ne correspond, à priori, à aucun intervalle musical ;
il faut plutôt diviser 43.6 par 32.5 = 1,34 ce qui correspond effectivement à une quarte
dans le tableau des échelles du son (voir annexe 10 p.178 : tableau des proportions de
l’octave). C’est donc le calcul inverse qu’il faut effectuer pour obtenir les rapports en
211
Idem.
212
Le diapason ne possède que très peu d’harmoniques comme nous l’avons déjà vu, H1 et H2, le timbre
du son est très pur et proche de la sinusoïde.
148
question. L’analyse de Beaulieu se base sur l’alignement géométrique du corps
physique, ce qu’il indique comme une méthode de guérison pour rendre à un individu
« ses proportions de Sons Sacrés ». Ainsi, un bon observateur du corps pourrait repérer
à l’œil nu les éventuels déséquilibres. En kinésiologie par exemple, la contraction
involontaire des muscles d’un patient (épaules relevées par exemple) est effectivement
interprétée comme un signe de stress214. Le thérapeute apprend à associer ces postures à
des attitudes mentales et aux tendances pathologiques de certains organes. Connaissant
l’acuponcture, Beaulieu serait alors à même de pouvoir dynamiser certains points
affaiblis en énergie par les diapasons dont la fréquence correspond aux « proportions
harmoniques du corps ».
213
John Beaulieu, Music and Sound in the Healing Arts , Station Hill Press, 1987, p.89
214
J’ai pu observé ce type de pratique et de fonctionnement par l’intermédiaire du kinésiologue
O.Fraysse, dont le cabinet est situé à Toulouse.
149
le polychord de Marc Ramser
150
Jonathan Cope, qui a eu l’occasion d’essayer l’instrument, m’a confié que
l'expérience acoustique est saisissante. Les vibrations sont physiquement ressenties par
l’intermédiaire des diverses cordes dont le son agit directement sur le corps. Marc
Ramser rappelle que les « sons parfaits », sous-entendu ceux possédant des intervalles
naturels générés pas les harmoniques, peuvent « purifier les molécules d'eau pour
perfectionner la beauté et l'harmonie » (sic.). Nous pouvons supposer qu’il s’appuie
sur les travaux de Hans Jenny et d’Emoto, en affirmant ainsi que la thérapie se fait au
niveau cellulaire. Les « ouïes » de l’instrument, si l’on peut dire, ont été disposées selon
les chakras et les genoux d’une personne allongée.
215
Anneke Huyser, le bol chantant, Binkey Kok, 1999.
216
Cela nous renvoie à la perception tactile dont nous avons parlé au cours du chapitre II, notamment par
l’intermédiaire des basses amplifiées.
151
plusieurs fois217, j’ai remarqué que les bols très graves était généralement mieux
ressentis sous les pieds, le long des jambes et au niveau du bassin. On peut se permettre
d’approcher sans gêne le bol du corps et parfois même le mettre en contact direct. On
peut également utiliser les bols graves le long du dos en prenant soin de ne pas
s’approcher trop près de la tête. Les bols plus aigus sont appréciables au niveau du
buste et de la tête, en observant toujours une distance de sécurité, notamment au niveau
des oreilles qui sont très sensibles aux sons aigus et métalliques, et qui troublent
souvent la perception tactile des vibrations. Des protections auditives peuvent être très
utiles lors de ces séances.
Oriane Robidou pratique également
lors de ses stages, des séances de massage
sonore. nous avons vu lors du chapitre IV, que
les bols aux harmoniques complexes étaient
qualifiés de « dynamisants », ils auraient ainsi
la propriété de « disperser les énergies
stagnantes », alors que les bols consonants
(harmoniques aux rapports simples) sont plus
propices aux séances de relaxation. Oriane
utilise également des bols en cristal qui sont
très consonants et dont l’amplitude peut se
répandre dans une large pièce et ainsi
« harmoniser » les personnes qui s’y trouvent,
ainsi que lieu lui-même, comme elle le précise
au cours de la pratique.
Le didgeridoo peut également être un instrument de massage sonore efficace.
On peut effectivement diriger le pavillon de la trompe en direction d’une partie du
corps du patient (par exemple les jambes) et lui faire ressentir la vibration générale ainsi
que plusieurs harmoniques. La distance qui sépare l’instrument des différentes parties
du corps du patient varie selon la sensibilité tactile de celui-ci ; c’est pourquoi le
thérapeute doit toujours être très attentif, pendant le soin, à la moindre réaction du
217
Avant même d’avoir consulté les ouvrages qui décrivent cette pratique, j’avais plusieurs fois fait
l’expérience sur moi-même et sur d’autres personnes avec divers bols en métaux acquis dans des
brocantes et festivals spécialisés mais aussi au Japon et au Viêt-Nam. J’ai tâché de sélectionner une
gamme de bols plutôt consonants.
152
patient, afin d’ajuster, en fonction de celle-ci, les différents paramètres tels que le
volume, la distance, la durée etc.
Nous pouvons enfin considérer par exemple les tuyaux harmoniques comme
étant potentiellement des instruments de « massage sonore harmonique ». Selon la
méthode décrite dans le chapitre IV, en faisant circuler l’air à travers le tube et en
générant ainsi une harmonique, l’air rejeté peut très bien être dirigé vers une partie du
corps d’un patient. Le diamètre du tuyau étant d’environs 4 cm on obtient une précision
suffisante pour suivre le tracé d’un méridien d’acuponcture, par exemple. Or il faudrait,
pour obtenir un jet d’air conséquent, trouver un système de soufflerie (de préférence
silencieux) qui permette au patient de ressentir concrètement la vibration des
harmoniques.
153
qui fait des schémas, et en y rentrant un certain nombre de données concernant les
harmoniques il m'est sorti une spirale rappelant celle des nautiles, ces coquillages à la
géométrie très particulière et qui résistent si bien aux pressions extérieures. Le monde
des harmoniques avec ses manières de penser, de raisonner, contraste avec le monde
tempéré où tout est droit, égal... »
La dimension « sonique » (effet physique du son) paraît capitale dans les effets
et la perception des sons harmoniques et pourtant généralement peu approfondie par les
« thérapies harmoniques » (pour ce que j’ai pu en observer219). C’est pourquoi nous
devons également prendre en compte une dimension psychologique qui intervient
lorsque le musicien prend conscience du « pouvoir » de son instrument. Il semblerait
que ces deux dimensions soient étroitement liées, et que les thérapeutes utilisent cette
relation, consciemment ou non, au cour de leurs séances. Le terme « harmonique », les
photos des figures de Chaldni et Jenny, les cristaux d’Emoto, les symboles antiques
suggérés par les Pythagoriciens, le côté naturel et le côté sacré attachés à cette catégorie
d’instruments sont autant de sujets de « fascination » qui peuvent être amenés à
influencer considérablement un musicien au niveau psychologique. Ces arguments
peuvent également s’avérer très efficaces pour inciter un mélomane à s’essayer sur l’un
de ces instruments.
218
Jacques Mayoud et Jean-Pierre Yvert qui, en France sont des passionnés de flûtes harmoniques, forme
un duo avec différents types de ces flûtes.
219
Il est le plus souvent question de résonance par sympathie sur les organes ou les cellules du corps mais
tout cela reste globalement très superficiel. L’intuition est préférée à l’intellect et c’est sans doute pour
cela que ces pratiques, bien que pouvant être parfois très efficaces, ont du mal à trouver leur place dans le
milieu scientifique.
154
La thérapie active doit être, rappelons-le, à la portée des non-musiciens afin
qu’ils puissent jouir immédiatement du résultat sonore et, éventuellement, de leurs
effets soniques. Les instruments harmoniques sont en ce sens assez facile d’accès. C’est
pourquoi, en peu de temps, n’importe quelle personne pour peu psychologiquement
conditionnée à recevoir les bienfaits des vibrations harmoniques, peut véritablement
apprécier les effets générés par la pratique du bol en cristal, de la cithare harmonique
(toutes les cordes à l’unisson) ou bien encore des tuyaux harmoniques.
220
Informations recueillies sur le site de Sarah Hopkins : http://www.sarahhopkins.com
155
Les instruments sont alors décrits comme tels:
Des sets de tuyaux harmoniques ont été employés et appréciés par beaucoup
d'écoles, des groupes communautaires, des écoles spécialisées, des thérapeutes, des
compagnies de danse et des individus à travers le monde. L’approche thérapeutique de
Sarah Hopkins donne en effet à la pratique de ces instruments, une dimension
d’expression sonore mais aussi d’expression dans l’espace. Si l’on peut faire tourner
simplement un tuyau harmonique devant soi ou au-dessus de sa tête, en se concentrant
sur le jeu et les effets des harmoniques, on peut également concevoir de se
déplacer dans l’espace, en se laissant guider par les mouvements et les sons des
whirlies. On est alors amené à penser que la thérapie se renforce d’autant plus
lorsqu’elle est associée à une forme d’expression corporelle.
221
Diagramme qui ne peut être consulté que suite à l’achat d’un jeu de whirlies.
222
Informations recueillies sur le site des whirlies : http://www.harmonicwhirlies.com
223
Information recueillie par un vendeur du magasin où j’ai pu trouver l’instrument, Boch et Pich, basé à
Lyon, op. cit. Le spirit catcher est une sorte de longue crécelle en bois sur laquelle sont tendus plusieurs
élastiques qui, en tournant, se mettent en vibration et font résonner les harmoniques en fonction de la
vitesse de rotation.
224
Organisé par l’association AEH et dirigé par Jacques Dudon, op. cit.
225
La pratique qui consiste à faire tourner un objet régulièrement est apparenté à la danse et à la jonglerie
mais n’a pas été nommé distinctement en France. En Angleterre elle est appelée : spinning.
156
l’échelle des tuyaux 1 et 2 (voir tableau des tuyaux harmoniques, chapitre IV) et de
bâtons-rhombes. La performance a été effectuée en public, et sonorisée par cinq micros
disposés autour d’une scène.
Sans parler pour autant de thérapie, la pratique de ces instruments mariée aux
mouvements corporels a révélé certaines émotions, aussi bien auprès des musiciens-
danseurs qu’auprès du public227. On peut tout de même penser que cette activité mettant
l’accent sur le lien entre expression corporelle et production active des harmoniques
ouvre un champ à explorer, comme le suggère les travaux de Sarah Hopkins, au sein de
ses pratiques thérapeutiques.
226
Photo prise lors du festival « Les Noces Harmoniques » en Août 2005.
227
Un enregistrement vidéo et audio de la performance a été effectué par l’association AEH et devrait
être disponible par le biais du site officiel : http://aeh.free.fr/
157
Conclusion
228
Cette croyance pourrait se résumer à l’état psychologique et physiologique de l’auditeur quant à la
vibration sonore et la symbolique qu’elle véhicule. Elle peut être comparée à la foi religieuse à travers les
émotions qu’elle soulève et les conséquences qu’elle peut entraîner.
158
travers la conception du « système énergétique ». Il nous semble donc impossible de ne
pas tenir compte d’une dimension psychologique dans les effets de la musique et du son
sur le corps. Cette dimension représente une condition qui paraît d’ailleurs toute aussi
importante que celle qui concerne les effets purement soniques.
229
Musique principalement élaborée à partir du son et de ses différentes propriétés acoustiques, apparue
au début des années 1970 et représenté par des compositeurs comme Gérard Grisey, Tristan Murail,
Horatio Radulescu.
Bruno Giner décrit les différents aspects du son exploités dans ses compositions :
« Qu'il s'agisse de simulation de spectres, d'harmonies fréquentielles, de synthèse instrumentale, de
"résonances sympathiques", d'hybridation de transitoires ou de simulation instrumentale de procédés
électroniques, les axes de travail sont multiples, variés, mais ils puisent tous leur origine dans
l'introspection du son lui-même. »
230
issue de la techno généralisante, elle se décline pendant les années 1990, selon différents courants
musicaux (goa, psyche, full on, progressive etc.).
231
Issu de la Jamaïque (disques de reggae mixés avec des effets de reverbe, chorus, flanger etc.) le dub
prend en Occident une nouvelle route avec des groupes comme Hight Tone, Zenzile etc.
232
courant musical issu de la trance électronique (retour à l’acoustique) et des musiques ethniques,
représenté en France, par exemple, à travers des groupes comme High Light Tribe ou Meï Teï Sho.
159
(ordinateurs, appareils électroménagers, radiateurs électriques, néons, générateurs etc.)
émettent des vibrations qui sont considérées en musicothérapie (classique et
harmonique) comme néfastes pour l’organisme et la santé émotionnelle. Elles sont
d’ailleurs très souvent considérées par les thérapeutes comme étant la source principale
des pathologies dues au stress urbain. Or, si l’on prête une attention à certaines de ces
machines, on peut effectivement percevoir des sons qui résonnent en fonction d’une
vibration fondamentale (audible ou non ) et reconnaître, encore une fois, les intervalles
qui composent la série des harmoniques. On peut ainsi concevoir un certain esthétisme
sonore, allant à l’encontre des thérapies harmoniques, et soulignant d’autant plus
l’importance des conditions psychologiques dans le domaine de la perception des sons
et de leur effets. Nous pourrions, par exemple, confronter ces sons harmoniques avec
ceux que l’on trouve dans les instruments acoustiques, qui sont « si proches de la
nature »233 pour sans doute en déduire la validité d’autres conceptions esthétiques et
d’autres effets psychologiques. Mais c’est là une autre question.
233
La nature est ici entendue comme un symbole idéologique, pourtant on ne peut contester que les
harmoniques générés par des machines électroniques suivent le même phénomène naturel.
160
- ANNEXES -
161
Annexe 1
LES PERSONNAGES HISTORIQUES DES HARMONIQUES
162
même de sorte que les sons harmoniques possèdent une fréquence multiple de celle du son
fondamental.
163
Annexe 2
HISTORIQUE DES TESTS SONORES
Effet de la musique et du son sur le minéral :
Message de l’eau par le Dr.Emoto :
Formé par le Dr Lee H. Lorenzen (recherche sur la capacité de rétention et de
stockage d’information par les micro-clusters dans l’eau) le Dr. Mazaru Emoto et son
I.H.M. Général Research Institute ont photographié à la fin des années 90’, des
échantillons d’eau de natures différentes sous forme cristallisé : parmi leur travaux, un
test sonore a été soumis à plusieurs échantillons d’une même eau. Les premières
questions posées sont : « Est-ce que l’eau ‘‘entend’’ les sons ? » et « Comment jouer de
la musique à l’eau ? ».
« Après de nombreux essais et erreurs, nous avons décidé d’adopter la
procédure suivante : Mettre de l’eau distillée entre deux hauts parleurs et passer un
morceau entier de musique a un volume normal. Tapoter le fond de la bouteille d’eau
distillée et laisser reposer une nuit. Le lendemain, bien tapoter à nouveau avant de
congeler l’eau pour obtenir la distillation. Photographier les cristaux.234 »
Ces expériences ont été réalisées dans des conditions de laboratoire, dans un
contexte général très neutre, un même volume d’eau par échantillon, une même
distance par rapport aux haut-parleurs etc. Les interprétations des chercheurs sont
basées sur la formation d’un cristal plus ou moins parfait (figure hexagonale comme un
flocon de neige) qui indiquerait manifestement le type d’effet reçu. Un cristal bien
formé laisserait entendre une influence positive, alors qu’un échantillon dont le cristal
à été brisé ou troublé, sous-entendrait que l’audition à été mal perçue. Mais au-delà des
ces deux grandes directions, l’auteur précise que les résultats sont parfois de natures
différentes pour le même échantillon et pendant la même écoute : les points communs
de ces échantillons donnent alors des interprétations souvent très influencées par le
caractère de la musique (plutôt triste, serein, dansant, violent) par son titre, ou encore
par l’histoire de l’œuvre. Ainsi, le cristal de Heartbreak Hotel ressemblerait à un cœur
brisé etc.
234
Emoto Mazaru, Messages de l’Eau, Hado publishing, 2001.
164
PHOTOGRAPHIES DES TESTS SONORES D’EMOTO
Les cristaux sont présentés avec les morceaux correspondants à leur écoute.
165
Le Dr Emoto met en évidence ici que la réceptivité de la musique par les
molécules d’eau, affecterait tous les organismes vivants, dans le sens où ces derniers
sont constitués principalement d’eau. En parlant d’un œuf humain fertilisé par la
rencontre d’un spermatozoïde et de l’ovule, il explique : « à cet instant, il est constitué
de 95 % d’eau, autrement dit, ce n’est pratiquement que de l’eau. A l’âge adulte, l’eau
constitue encore 70 % du corps humain. »
Si l’eau est aussi sensible aux vibrations sonores que les expériences menées par
ces chercheurs le laissent entendre, elle pourrait alors participer à notre système de
perception des sons. Nous savons dès lors que tout sujet constitué d’eau va être
sensible, consciemment ou non, à la réception d’un événement sonore.
166
La Cymatique de Hans Jenny236
En 1967, le Docteur Suisse Hans Jenny publie le
livre : « Cymatics - The Structure and Dynamics of
Waves and Vibrations » dans lequel il décrit les formes
et les mouvements de diverses substances (sables,
spores, particules métalliques, eau, substances
visqueuses etc.) sur des plaques de métal ou autres
membranes mises en vibration. Il mit au point un
appareil appelé « tonoscope » lui permettant de sélectionner précisément la fréquence et
l’amplitude des sons émis.
Tout comme pour Chaldni deux siècles plus tôt, il put constater la formation des figures
géométriques, mais cette fois ci, avec le tonoscope, il lui était possible de contrôler le
développement de ces figures.
Ainsi nous pouvons remarquer, en six étapes, le développement d’une fréquence selon
son amplitude avec du sable (à gauche), et six fréquences différentes photographiées à
partir d’une goutte d’eau (à droite). Ces figures enchaînées correspondent à une
mélodie. Ci-dessous des clichés en couleur et sur le CD joint, un extrait vidéo de ces
expériences (voir annexes, CD : documents vidéos : cymatic.mov).
235
Informations recueillies sur l’encyclopédie musicale « the new grove » 17- Stanley Sadi ed. 1980.
236
Informations et images recueillies sur le site officiel : http://www.world-
mysteries.com/sci_cymatics.htm, le 06/11/05.
167
Effet de la musique et du son sur le végétal :
237
D’après Joscelyn Godwin, Les harmonies du ciel e de la terre, Albin Michel. 1994 , Tompkins et
Bird, The Secret Life of Plants, (La Vie secrète des plantes), tr. L. Flournoy, Paris, Robert Laffont, 1975.
238
Commentaire de J.Godwin, , Les harmonies du ciel e de la terre, op. cit.
239
D’après Joscelyn Godwin, Les harmonies du ciel e de la terre, op. cit. Dorothy Retallack, The Sound
of Music and Plants, Santa Monica, Californie, DE Vorss, 1973.
168
effets de certains styles de musique ; observons l’échelle des réactions qu’elle a
enregistrée :
Les plantes se
- La Paloma jouée sur des tambours d’aciers
détournent
- La musique pop à percussion ou « hard rock »
de la source sonore
Les résultats de ces expériences ont déclenchés des réactions très fortes pour
certains, défendant leurs styles musicaux, et pour d’autres qui se rangeaient défendaient
plutôt du côté des plantes cobayes. Quoi qu’il en soit, ces résultats sont à comparer avec
ceux du Dr Emoto. Ils semblent tous deux indiquer que les musiques classiques
occidentales auraient tendance à déclencher des effets positifs et qu’au contraire les
musiques « hard rock » et « heavy metal » (rythme et timbre très chargés) auraient des
répercutions plus néfastes sur le sujet récepteur. La musique populaire et médiatisée
suivraient les mêmes appréciations.
• Les chauves-souris utilisent les ultrasons avec leur système d’écholocation leur
permettant de se déplacer dans le noir total.
169
Le sonar des cétacés :
Dans le monde animal, certaines espèces utilisent naturellement les propriétés
du son par leur réfléchissement sur la matière comme un moyen de se repérer dans
l’espace. C’est le cas des cétacés, en général, qui possèdent un sens de l’audition
s’étendant bien au-delà des possibilités humaines. Joscelyn Godwin explique dans son
ouvrage que « puisque le son circule loin dans l’eau et se propage à une vitesse quatre
fois plus grande que sur terre, il est erroné de penser que l’océan est silencieux, ou de
considérer que ses habitants sont aussi muets que des poissons d’aquarium.»241
L’auteur précise ensuite que, tout comme pour les chauves souris qui repèrent
leurs proie grâce aux ultra-sons, les cachalot, épaulards, dauphins et marsouins utilisent
un organe qui localise les échos et transmet des données relatives à la distance, la taille,
la forme, l’espèce, et même, paraît-il, les intentions des autres animaux. Le système du
sonar nous permet de comprendre que les fréquences sonores, bien que non perçue par
l’oreille humaine, sont porteuses d’informations. Seuls certains organes sont capables
de déchiffrer ces hautes fréquences, mais selon certains paramètres, comme le volume,
elles pourraient avoir des répercussions sur les sujets ne possédant pas un tel organe.
Le sonar des dauphins, qui fonctionne par le recyclage et non l’expulsion d’air, leur
permettrait également d’imiter les paroles humaines et serait potentiellement si puissant
qu’ils pourraient s’en servir pour étourdir ou tuer les poissons dont ils se nourrissent.
Athanasius Kircher :
« Athanasius Kircher relate comment il a vu attiré des espadons par la musique
lors d’un voyage en Sicile en mai 1638. Les pécheurs attiraient leurs proies en faisant
sonner des cloches et en entonnant une certaine chanson - aucune autre ne faisait
l’affaire -, après quoi l’espadon se rapprochait assez pour être à porté de harpon. Au
début nous dit Kircher, il croyait que la chanson était une incantation, qui provoquait
l’effet voulu par l’entremise des démons. Mais après avoir réfléchi, il opta pour une
explication naturelle qu’il préféra à l’explication superstitieuse. L’expérience lui avait
appris que tout son se propage sphériquement depuis la source et que, lorsqu’il
rencontre divers obstacles, la plupart ne répondrons pas tandis que certains se mettront
en mouvement sympathique. Ainsi, comme pour l’expérience de deux luth, ou du pavé
dessellé que faisait vibrer une note d’orgue spécifique, il supposa que certains animaux
240
Informations recueillies dans l’encyclopédie Wikipédia.
170
répondait peut-être à des sons spécifiques, parce que quelque chose contenu dans leur
‘‘ esprit animaux ou fantaisie’’ vibrait en sympathie. Dans certain cas, dit-il, le
phénomène concerne une espèce toute entière ; tous les ours par exemple, adorent
écouter la flûte. Dans d’autres, c’est l’individu qui est concerné, comme lorsque nous
donnons des noms propres aux chiens, aux chevaux et aux autres animaux domestiques.
Kricher avait même entendu parlé d’un dauphin nommé Simon et d’une mainate appelé
Martin qui venaient toujours quant on les appelait par leur nom. Pourquoi les pécheurs
Siciliens n’auraient-ils pas découverts les sons avec lesquels les espadons sont, en
quelque sorte, accordés et auxquels, automatiquement, ils répondent ? »
Edith Lecourt242 :
241
Joscelyn Godwin, les harmonies du Ciel et de la Terre, op.cit. Savold David “how do whales catch
their dinner?” in sciences 85, t. VI, n°4 (mai 1985), p. 26.
242
Lecourt Edith, la pratique de la musicothérapie, Paris, ESF, 1977.
171
Annexe 3
FRISE DE LA SERIE DES HARMONIQUES : progression logarithmique en fonction des intervalles
Fondamentale 8v. 5te 8v . 3ce 5te 7è 8v. 2d 3ce 4te 5te 6te 7è 7è+ 8v.
1 2 4 8
Annexe 4
SPIRALE DE LA SERIE DES HARMONIQUES :
progression linéaire en fonction de la fréquence (incrément = 1)
1 2
Ut Ut
(32) (64)
1/1 2/1
2 3 4
Ut Sol Ut
4 5 6 7 8
Ut Mi Sol Sib- Ut
8 9 10 11 12 13 14 15 16
Ut Ré Mi Fa¼ Sol La- - Sib- Si Ut
16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 31 32
Ut Réb Ré Mib Mi Fa- Fa¼ Solb- Sol Lab- La- - La+ Sib- Sib¼ Si si¼ Ut
(512) (544) (576) (608) (640) (672) (704) (736) (768) (800) (832) (864) (896) (928) (960) (992) (1024)
16/8 17/16 9/8 19/16 5/4 21/16 11/8 23/16 3/2 25/16 13/8 27/16 7/4 29/16 15/8 31/16 2/1
173
Annexe 6
The new Grove, Dictionary of MUSIC & MUSICIANS, Stanley Sadie, 1980 (Traduction)
174
Annexe 7
REPRESENTATION DE LA SERIE DES HARMONIQUES
The first 12 partials of a harmonic series for the fundamental pitch A1 (ca. 55 Hz.).
175
Annexe 8
REPRESENTATIONS DE LA SERIE DES HARMONIQUES
176
Annexe 9
177
Annexe 10
TABLEAU DES PROPORTIONS DE L’OCTAVE
Dodécaphone Rapport
Cents Commas Harmoniques Naturelles Fréquence
Tempéré Arithmétique
Do 0 0 H1 1/1 1 262 Hz
178
Annexe 11
Déclinaison des octaves et de leur manifestation selon l’échelle des fréquences
Document issu de l’ouvrage de Maela et Patrick Paul, Le chant sacré des énergies, présence, 1893.
179
Annexe 12
SCHEMA DE L’OREILLE
180
Annexe 13
181
Annexe 14
182
Représentation d’un monocorde par R. Fludd
Luc Breton, Amour et sympathie,
Godwin J. ; Robert Fludd, London, Thames & Huston Ltd, 1979, planche 48, p.47.
183
Annexe 15
Trompette marine
Max Engel, Amour et sympathie, p.94
Giovanni Bracelli, 1599, in Georg Kinsky, katalog der Musikinstrumentenmuseen
von Wilhelm Heyer in Cöln (Paris, 1912).
184
Annexe 16
185
Hardingfele d’Andres Heldahl,
Amour et sympathie, p. 329, Bergen, 1892,
Collection de musique du Musée Historique de Bäle n°1972, 7608
186
Annexe 17
187
Annexe 18
Instruments harmoniques occidentaux modernes
188
Instruments harmoniques occidentaux modernes
189
Annexe 19
Joueur de guimbarde
190
Annexe 20
Résultat d'une expérience du biologiste de l’anglais Ruppert Sheldrake tendant à montrer l'existence des
« Champs Morphogénétiques ». La feuille de gauche est entière ; sur l'image de droite, on a découpé le sommet
de la feuille, la trace énergétique de la plante (en rouge) subsiste.
Images recueillies en Septembre 2005 sur le site : http://www.swordmagick.com/science/kirlian.html
191
Annexe 21
Représentation des chakras vus de profil
192
Annexe 22
193
Annexe 23
Systeme de résonance du corps humain par la Psychophonie
194
Systeme de résonance du corps humain par la Psychophonie
195
Annexe 24
COUPLE MERIDIEN ORGANE
12° 81/80 VESICULE Fond. Fondam. 1/1 7° Seconde 2187/1024 FOIE 19° 27/25
14° 256/225 ESTOMAC 2° Seconde 9/8 9° Tierce 6/5 RATE PANCREAS 21° 8000/6561
16° 32/25 GROS INTESTIN 4° Tierce 81/64 11° Quarte 27/20 POUMONS 23° 2187/1600
18° 36/25 INTESTIN GRELE 6° Quarte 729/512 1° Quinte 3/2 CŒUR 13° 243/160
20° 32000/19683 VESSIE 8° Sixte 8/5 3° Sixte 27/16 REINS 15° 128/75
22° 4000/2187 TRIPLE RECHAUFFEUR 10° Septième 9/5 5° Septième 243/128 MAITRE CŒUR 17° 48/25
24° 6561/6400 VAISSEAU CONCEPTION 12° Octave 81/80 13° Quinte 243/160 VAISSEAU GOUVERNEUR 25° 192/125
197
Annexe 25
LE DIVIN ET LES GAMMES
La3=440 Hz SEPTIEME=7/4=448 Hz
NORMALISE
SIXTE3=27/16=432 Hz
Sol3=391,9955
FREQUENCE
FREQUENCE EN
OCTAVE EN GAMME
GAMME Rang n QUINTE3=384 Hz
Do n NATURELLE
TEMPEREE Hz
Hz
65,406256 Do+1 6° 64
32,703294 Do 0 5° 32
16,351661 Do-1 4° 16
ON TEND 8,175365 Do-2 3° 8 ON VA
VERS LE 4,0879222 Do-3 2° 4 VERS LE
DIVIN # 1 2,0439268 Do-4 1° 2 DIVIN = 1
1,0219814 Do-5 0° 1
198
Annexe 26
199
Annexe 27
Les harmoniques du corps
200
Annexe 28
- Liste des plages du CD -
23. Flûte strictement harmonique : aperçu de l’ambitus d’une flûte sans trou de jeu.
Enregistrement au dans l’abbaye du Thoronet, 2003.
202
- BIBLIOGRAPHIE -
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Documents video :
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Instruments harmoniques
Rabab : http://www.asza.com/afganreb.shtml
Hang : http://www.hang.ch/
Harry Partch : http://musicmavericks.publicradio.org/features/feature_partch.html
Thomas Bloch : http://www.chez.com/thomasbloch/engCHRIS.htm
Harpe éolienne http://www.civilization.ca/arts/opus/opush01e.html
Bols cristal : http://www.crystalsanctuary.com/
Cor des Alpes : http://www.cmtra.org/entretiens/archivelettres/lettre32/
Fujara : http://www.fujara.sk/audio_samples.htm
http://www.alpinehorn.com/sons/
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Didgeridoo : http://www.aix-elan.org/
http://www.phys.unsw.edu.au/~jw/didjeridu.html
http://www.lewisburns.com/
Guimbarde : http://www.guimbardage.net/article.php3?id_article=2
http://guimbarde.ouvaton.org/
http://www.users.bigpond.com/apertout/Postma.htm
206
TABLE DES MATIERES
Avant-propos ........................................................................................................................................ 2
Introduction.......................................................................................................................................... 4
207
IV Les instruments de musiques harmoniques et leurs effets
1. Présentation
11. Définition .................................................................................................................................... 82
12. Une appellation justifiée ? ........................................................................................................... 83
13. Instruments harmonique ou instrument inharmonique ? ............................................................. 85
208
Remerciements :
209