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Gestion du risque

1 La banalisation de la perception du risque


Nous vivons dans un monde instable. Un phénomène naturel, comme l’incertitude climatique, peut être à lui seul
un élément important de destabilisation de groupes sociaux. Le fonctionnement du monde économique et financier en-
gendre, lui aussi, par son fonctionnement même, de fortes instabilités. L’annonce de statistiques provisoires puis défini-
tives causent sans cesse des remous qui peuvent avoir des conséquences considérables sur notre vie quotidienne.
Face à ces risques, des outils permettant de limiter l’exposition à des changements brutaux sont apparus : le monde
de la finance les a particulièrement développés et utilisés. Les marchés à terme et d’options ont connu un développement
spectaculaire qui n’a été possible que grâce à l’émergence de techniques quantitatives, qui donnent une base rationnelle
aux procédés d’évaluation et surtout de couverture.
La gestion financière devient essentielle non seulement pour les banquiers, professionnels de la finance et gestion-
naires de fonds, mais aussi pour les entreprises elles mêmes. Celles-ci doivent se couvrir contre les risques de change (le
commerce internationnal se fait en dollar) ou de variation de prix de matières premières. L’évolution récente du secteur
de l’énergie vers des pratiques de marché, liée à une décision politique de déréglementation, est un exemple frappant de
cette situation. Dans les domaines de l’assurance, des télécommunications et de l’environnement, la gestion du risque est
essentielle.
Il n’est pas facile pour les entreprises de s’adapter à ce nouveau contexte. Toutes proportions gardées, la situation
ressemble à celle de la mise au point des calculateurs de moteurs automobiles de nouvelles générations. L’introduction
de nouveaux actionneurs implique la nécessité d’un nombre de réglages beaucoup plus grand. C’est dans ces situations
de saut technologique que l’on a le plus besoin d’expertise. Celle-ci doit savoir prendre en compte des outils élaborés de
modélisation de l’aléa, et aussi les aspects spécifiques des industries concernées.
Nous pensons que l’INRIA possède les compétence techniques qui lui permettent de soutenir avec efficacité une
activité de recherche utile à l’industrie dans le domaine du contrôle du risque.

.2 Utilité économique de la gestion du risque.


2.1 L’activité des marchés financiers
Le développement des mathématiques financières date de 1973, suite à la dérèglementation des marchés de change.
L’activité s’est d’abord développée autour des questions d’évaluation d’options, d’abord aux États-Unis puis en Europe.
Les produits optionnels sont apparus sur les marchés financiers pour contrebalancer la grande volatilité des taux d’intérêt
et des taux de change et sont aujourd’hui utilisés de façon intensive par les entreprises.
La pratique d’instruments financiers de plus en plus complexes (options, produits de taux d’intérêt . . . ) conduit à une
utilisation de techniques avancées d’analyse stochastique et numérique dans les établissements financiers. Ces établisse-
ments sont demandeurs de contacts avec le monde de la recherche. Cet intérêt se traduit par des collaborations avec des
universitaires renommés, la réalisation de contrats de recherche et le recrutement, au meilleur niveau, de mathématiciens
appliqués dans les équipes de recherche et développement des banques.
L’activité économique étant par essence risquée, l’évaluation et le contrôle de ce risque sont une nécessité. Cet aspect
de l’activité financière, non spéculative, vise à développer des outils d’échange de risque.

2.2 Dérégulation de secteurs de l’énergie


La dérégulation de secteurs de l’énergie (électricité et gaz) constitue un important enjeu financier pour les entreprises
concernées. Par exemple, la dérégulation du secteur électricité européen a permis d’une part l’apparition de marchés spot
organisés mais aussi de marché à terme. Actuellement, ces derniers sont essentiellement constitués d’échanges de gré à
gré mais dans un avenir proche, des marchés à terme organisés et profonds devraient aussi apparaître. EDF dispose d’un
portefeuille important d’actifs de production mais aussi d’un important portefeuille de clients, diffus ou éligibles, ayant
chacun leurs caractéristiques de prix de fourniture et de consommation. L’apparition de ces marchés constitue pour EDF
une opportunité de profit et un nouvel outil de couverture de ses risques financiers par une optimisation conjointe des
actifs de production et des interventions sur les marchés financiers.

2.3 Gestion du risque en assurance et réassurance


Ces secteurs doivent gérer des risques considérables (par exemple de type catastrophe naturelle). Les problématiques
concernent particulièrement le contrôle de la probabilité de ruine des assureurs et la mise en réseau du risque avec des
assurances prises par les assureurs y compris des assurance mutuelles. Ce type d’activité est très développé dans les pays
comme l’Allemagne, la Suisse, les pays scandinaves.

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Il est indispensable pour la société de gérer ces risques sous peine de voir certains secteurs de l’économie se bloquer
(on peut penser aux évènements récents concernant l’assurance des chirurgiens).

2.4 Gestion des risques dans les réseaux de télécommunications.


Les opérateurs de télécommunication doivent développer des outils pour mieux gérer leur comportement dans un
milieu compétitif. Il s’agit par exemple d’etudier les politiques d’anchères pour savoir comment réagir à des appels
d’offre. D’autre part les opérateurs sont confrontés à des problèmes de tarification qui doivent prendre en compte non
seulement le comportement de leurs clients mais aussi celui de leurs concurrents et des clients futurs potentiels qu’on
souhaite attirer, ainsi que les risques du marché.
D’autres aspects de risques existent dans la sécurisation des réseaux qui consiste à assurer le fonctionnement de ceux-
ci en cas d’incident tel qu’une coupure de ligne, ou la planification des capacités au cours du temps, pour laquelle les
modèles s’apparentent à ceux des options en finance."
la gestion de centres d’appel est un autre exemple significatif de problèmes de recherche opérationnelle dans lequel
il faut faire face à une demande aléatoire et des risques d’engorgement.

2.5 Gestion du risque pour l’environnement


Dans tous les problèmes concernant la modélisation des écoulements et du transport dans le sous-sol, que ce soient
des problèmes de simulation de réservoirs pétroliers, d’hydrogéologie, ou de stockage de déchets, une des difficultés
essentielles provient du fait que les coefficients des équations sont mal connus du fait de l’hétérogénéité du sous-sol. Les
ingénieurs produisent alors des modèles statistiques de ces coefficients et la solution du problème est alors proposée sous
la forme d’un nuage de solutions des équations représenté par une densité de probabilité (pdf). Ces solutions sont le plus
souvent calculées par la méthode de Monte-Carlo.
Une alternative pourrait être d’étudier des équations aux dérivées partielles à coefficients stochastiques, mais cette
méthode se heurte au caractère non-linéaire des équations, ce qui a empêché jusqu’ici son application pratique.
Dans le cas d’études de sûreté, telles qu’on en fait dans les problèmes de déchets, en plus de l’incertitude sur les
coefficients, on est aussi amenés à prendre en compte différents scénarios auquels il faut associer des probabilités, parfois
très faibles. Là encore la méthode de Monte-Carlo se révèle très utile.
Le problème de la méthode de Monte-Carlo est qu’elle coûte cher car dans le cas qui nous préoccupe chaque si-
mulation demande la résolution d’un système d’équations aux dérivées partielles souvent non-linéaires. L’objectif de la
recherche consiste alors à construire des ensembles de simulations aussi petits que possible, mais qui donnent malgré tout
des résultats significatifs.

2.6 Gestion des risques sismiques


Propagation des ondes sismiques en milieu hétérogènes

2.7 Compatibilité électromagnétique


Comment differents elements rayonnants interagissent-ils ? Quels sont les risques effectivement courus par un avion
de ligne quand un téléphone portable est utilisé ?

2.8 Gestion des risques dans le contrôle aérien


Les partenariats avec Eurocontrol, agence européenne pour le contrôle aérien, méritent d’être développés.

2.9 Gestion des risques climatiques


Les techniques de prévision, souvent basées sur l’intégration numérique de modèles physiques, sont essentielles.

3 Les atouts de l’INRIA dans le domaine du risque


Les techniques mathématiques qui permettent d’aborder le domaine du risque sont à la base liées aux probabilités
(processus stochastiques, calcul stochastique, théorie et statistique des évènements extrèmes, ...), au contrôle stochastique,
et à la théorie des jeux. Le contrôle robuste, ou H-infini, est une méthode basée sur une modélisation du risque par un
"adversaire" : on souhaite optimiser une utilité sous les "pires" des comportements possibles de l’adversaire. Le contrôle
"risk sensitive" permet de tenir compte de divers degrés d’aversion pour le risque. Ces méthodes sont liées à la théorie
des jeux à somme nulle. Dans la théorie des jeux dynamiques, la source du risque peut être en pratique un comportement

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d’autres agents ou concurrents. La théorie des jeux non-coopératifs permet de modéliser les situations de compétition ;
l’étude d’équilibres peut alors permettre de prédire le comportement des compétiteurs.
Les techniques évolutionnaires sont souvent un excellent outil pour caler des modèles complexes aux données réelles,
généralement bruitées et incomplètes.
Les problèmes sont souvent mal modélisés et il est important de gérer aussi l’incertitude des modèles.
En particulier, pour les problèmes correspondants à une minimisation d’energie, on peut introduire une perturbation
dans le modèle même. Ceci permet de définir des simulations robustes au sens du pire des cas. Par exemple en calcul des
structures on pourrait définir la pire des déformations en fonction d’une erreur de modélisation.
Les outils de résolution font appel à l’ensemble des méthodes numériques : résolution numérique d’équations aux
dérivées partielles, résolution de problèmes d’optimisation, statistique.
L’INRIA a des équipes de recherche déjà actives dans ces domaines techniques et qui pour beaucoup ressentent
l’intérêt de cette nouvelle problématique du risque.

Conclusion. La gestion du risque correspond à un besoin important de la société, et se décline sous différents
aspects. Beaucoup de projets de l’INRIA sont concernés par ce thème. Il nous parait utile de faire émerger le contrôle du
risque comme un des thèmes fédérateurs et prioritaires de l’INRIA.

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