Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
Matériaux :
résistance à la corrosion
et au vieillissement
Réf. Internet : 42373 | 6e édition
III
Cet ouvrage fait par tie de
Corrosion Vieillissement
(Réf. Internet ti570)
composé de :
Sur www.techniques-ingenieur.fr
• Saisissez la référence Internet pour accéder directement aux contenus en ligne
• Retrouvez la liste complète des ressources documentaires
IV
Cet ouvrage fait par tie de
Corrosion Vieillissement
(Réf. Internet ti570)
Gérard BÉRANGER
Professeur honoraire des Universités, Membre de l'Académie des technologies
Jacques PAGETTI
Professeur honoraire des universités, Responsable de la commission
Traitements de surface au CEFRACOR (Centre français de l'anticorrosion)
Sur www.techniques-ingenieur.fr
• Saisissez la référence Internet pour accéder directement aux contenus en ligne
• Retrouvez la liste complète des ressources documentaires
V
Les auteurs ayant contribué à cet ouvrage sont :
Sur www.techniques-ingenieur.fr
• Saisissez la référence Internet pour accéder directement aux contenus en ligne
• Retrouvez la liste complète des ressources documentaires
VI
Matériaux : résistance à la corrosion et au vieillissement
(Réf. Internet 42373)
SOMMAIRE
Corrosion par les gaz à haute température des métaux et alliages réfractaires COR378 39
Altération par l'eau des verres borosilicatés. Exemple des verres nucléaires COR450 69
Sur www.techniques-ingenieur.fr
• Saisissez la référence Internet pour accéder directement aux contenus en ligne
• Retrouvez la liste complète des ressources documentaires
VII
Vieillissement des composites à matrice organique. Outils de modélisation AM5322 113
Sur www.techniques-ingenieur.fr
• Saisissez la référence Internet pour accéder directement aux contenus en ligne
• Retrouvez la liste complète des ressources documentaires
Matériaux : résistance à la corrosion et au vieillissement
(Réf. Internet 42373)
Q
1– Matériaux métalliques Réf. Internet page
Corrosion par les gaz à haute température des métaux et alliages réfractaires COR378 39
Sur www.techniques-ingenieur.fr
• Saisissez la référence Internet pour accéder directement aux contenus en ligne
• Retrouvez la liste complète des ressources documentaires
Y
Q
QP
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corSQP
QQ
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corSQP
Q – le choix des familles d’alliages. Ce choix est en effet souvent plus difficile
que celui de l’alliage lui-même au sein d’une famille d’alliages donnée. Or il
n’est que très rarement traité dans les ouvrages focalisés sur les mécanismes,
la science ou la stricte technique. À cet égard, on notera d’ailleurs que, parado-
xalement, les alliages les plus résistants sont en fait les moins employés, car
ils sont exclus de bon nombre d’emplois par d’autres alliages moins coûteux.
Des emplois types pour chaque famille seront donc donnés ;
– le choix d'utiliser des métaux passivables. Même si cela peut paraître un
truisme, l’utilisation de métaux passivables résulte par définition du choix
d’utiliser ce type de propriété technique. Historiquement, il est vrai que ces
alliages ont été développés pour des marchés et des applications où il n’y avait
guère d’alternative. Néanmoins, dès lors que ces alliages furent devenus non
seulement commercialement disponibles, mais véritablement banalisés, leur
utilisation s’est ensuite étendue à des applications où leur usage ne découlait
plus d’aucune obligation technique. Et là encore, cet éclairage omniprésent
dans la corrosion contemporaine n’est que très rarement et très superficielle-
ment traité dans la plupart des ouvrages précités.
Ainsi, ce qui s’est longtemps traduit par des généralités économiques un peu
convenues dans une tradition de culture peut être un peu trop exclusivement
scientifique et technique, se trouve en réalité au cœur de ce que l’on appelle
aujourd’hui le management de la corrosion.
QR
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corSQP
■ En conclusion de cette nécessaire mise au point introductive, il prétendre que la recherche scientifique serait un préalable
ressort que de par la conjonction entre, d’une part, une certaine incontournable à l’innovation industrielle, et en elle-même, elle ne
difficulté dans la relation à l’argent du milieu universitaire français constitue d’ailleurs pas plus un gage d’innovation.
d’après guerre et, d’autre part, une très nette propension à vouloir Par contre, les connaissances scientifiques actuelles s’avèrent un
« éclairer le monde » (et spécialement le monde de l’industrie), la outil extraordinairement efficace au service de l’innovation. Ainsi
fameuse exception française a finalement abouti à la consécration dans le présent exemple, la science de la corrosion nous permet
d’une appellation qui se voulait certes d’inspiration scientifique, désormais de court-circuiter toute cette longue et coûteuse étape
mais qui, avec le recul, n’est pas forcément la meilleure pour bien
Q
des « essais et erreurs », car on peut grâce à elle prévoir à l’avance
comprendre les règles d’utilisation de cette catégorie d’alliages. toutes les combinaisons de métaux à éviter, et toutes celles à
En anglais par exemple, et bien que la même étymologie existe recommander. Ainsi, l’acquisition somme toute récente de cette
grammaticalement, l’expression « passivatable metals » reste par- science de la corrosion n’est ni le début ni la fin de l’histoire, mais
faitement incomprise de tout le monde, y compris des spécialistes juste le commencement d’une nouvelle histoire.
de corrosion.
■ Au XXe siècle, les problèmes de corrosion ont ainsi vu leur
C’est pourquoi nous utiliserons ici en parallèle l’appellation tra-
importance grandir considérablement, et spécialement durant ses
ditionnelle française et la transposition de l’appellation
quatre dernières décennies. Que ce soit par les coûts directs occa-
anglo-saxonne, et l’on dira plutôt incorrodable lorsqu’il s’agira du
sionnés non seulement par la réparation périodique des dommages
pourquoi, et passivable lorsqu’il s’agira du comment.
et les conséquences des avaries, mais aussi, ne l’oublions pas, par
On notera d’ailleurs que, bien évidemment, ni l’un ni l’autre ne tous les efforts de prévention que l’on a su mettre en œuvre, ou
sont des caractères universels, mais ce sont néanmoins ceux visés bien encore à travers les risques que pourraient engendrer
dans les applications pour lesquelles ces vocables sont employés. certaines avaries majeures vis-à-vis de la sécurité des personnes ou
Cette évolution du langage montre également que si, à travers la de l’environnement, et dont les conséquences ont également un
durabilité, le temps qui passe est toujours au cœur de la probléma- coût (même s’il n’est pas que monétaire), la corrosion a alors pris
tique corrosion, il est également très présent dans l’évolution de un poids économique qui ne peut plus être négligé par personne.
nos modes de pensée sur la corrosion. Et comme dans bien des Les estimations chiffrées sont toujours difficiles, mais elles
domaines, un rapide regard sur le passé aidera à mieux atteignent régulièrement des milliards d’Euros par an dans les prin-
comprendre le présent, et donc à mieux maîtriser les risques de cipaux pays industrialisés où de telles estimations ont été tentées.
corrosion et leur prévention. De telles moyennes à l’échelle de toute une nation n’ont naturelle-
ment aucun sens pour les acteurs individuels que nous sommes
tous, à titre professionnel aussi bien que privé. Néanmoins, elles
2. Évolution des problèmes expriment une certaine convergence des besoins, un peu comme
dans une étude de marché, et ce sont donc elles qui ont induit et
de corrosion induisent encore la réponse de l’industrie à ces besoins.
■ Ce développement global des besoins en résistance à la
2.1 Une longue histoire corrosion a ainsi entraîné le développement progressif d’un très
grand nombre de matériaux qui n’existaient pas auparavant, et en
Les hommes se sont trouvés confrontés à des problèmes de particulier, d’alliages métalliques. En retour, ce développement
corrosion depuis apparemment fort longtemps. Ainsi, les Romains des matériaux a multiplié les cas de figures, et augmenté par là
avaient déjà identifié et résolu certains problèmes de corrosion même le nombre et la diversité des problèmes. Il en résulte qu’à
galvanique dans la construction navale en bois. l’heure actuelle la résolution et la nature même des problèmes de
corrosion sont intimement liées aux choix des matériaux. Cela ne
Exemples : le musée maritime de Paestum près de Naples signifie d’ailleurs pas que la résistance à la corrosion soit néces-
comporte une salle consacrée au VIe siècle avant J.-C., et une autre sairement le paramètre déterminant dans le choix d’un matériau
au IIIe siècle avant J.-C. Or sur les techniques de clouage des donné. Un tel choix doit en effet permettre de remplir au meilleur
planches en bois de la coque, on ne voit dans la première que de gros compte une ou plusieurs fonctions technologiques, et il est bien
moignons de rouille, qui sont ici le reliquat de clous en acier plantés à évident que dans ces conditions, les propriétés mécaniques des
travers une rondelle d’appui en cuivre, alors que dans la deuxième, matériaux, leurs propriétés de mise en œuvre, leur prix ou leur dis-
les rondelles et les clous intacts sont tous les deux en cuivre. Les ponibilité sont bien souvent des paramètres tout aussi détermi-
Romains ne savaient donc pas le pourquoi ni de cette corrosion, ni de nants dans le choix que leur seule résistance à la corrosion.
sa solution, mais ils avaient néanmoins trouvé la solution.
À noter aussi que n'ayant pas ces informations, un auteur britan-
nique a attribué de son côté la découverte de cette corrosion galva- 2.2 Une perpétuelle évolution
nique à la Royal Navy au 18e siècle (arsenal de Plymouth, protection
des coques en bois contre les vers à l'aide de revêtements en tôles La lutte contre la corrosion est une discipline scientifique et
de cuivre clouées). Depuis, des archéologues français ont également technique en perpétuelle évolution. Le moteur d’un tel mouvement
prétendu que cette innovation avait en réalité été copiée sur des réside dans les mutations permanentes des autres technologies.
prises de guerre de navires corsaires français. Par autres, on entend à la fois ce qui engendre de nouveaux pro-
blèmes de corrosion, ou ce qui permet de résoudre les anciens de
Mais comme il n'y a jamais eu de clous qu'en fer ou en cuivre
manière différente. On peut donc avancer que, sauf cataclysme
écroui, ces paternités indépendantes sont certainement vraies toutes
économique, il n’y aura sans doute jamais de situation totalement
les trois. Il s'agit là en effet d'une découverte technologique majeure
stabilisée.
pour toute marine, aussi bien de guerre que de commerce, et elle
n'est donc pas le fruit du hasard. Pour autant, on observe également que la nature même de cette
évolution a elle aussi évolué. Les 30 glorieuses, c’est-à-dire les
■ Dans ces exemples, on notera d’ailleurs que l’innovation empi- trente années de forte croissance qui ont suivi la Seconde Guerre
rique est pilotée par l’usage, et qu’il n’est donc pas besoin pour cela mondiale ont engendré des bouleversements rapides et profonds,
ni de recherche ni d’un quelconque prérequis scientifique. Comme avec l’irruption d’industries entièrement nouvelles (exemple :
pour la sélection naturelle dans l’évolution du vivant, il s’agit là tout nucléaire, aérospatiale), et en corollaire, la création de familles
bêtement d’un processus rétroactif, par élimination spontanée de complètes de matériaux totalement inédits. À cette époque, les
tout ce qui marche le moins bien. Il est ainsi tout à fait abusif de recherches originelles sur la corrosion portaient tout naturellement
QS
Q
QT
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corSQR
QU
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corSQR
Q
Dans cet article, nous traiterons de la résistance à la corrosion dans les
milieux les plus corrosifs tels que les acides (sulfurique, chlorhydrique, fluo-
rhydrique, bromhydrique, nitrique, phosphorique ainsi que quelques acides
organiques), les milieux basiques. Nous montrerons que les alliages de nickel
sont résistants à la corrosion localisée (piqûres et corrosion caverneuse) dans
les solutions salines et en particulier l’eau de mer. Enfin nous présenterons les
caractéristiques de résistance à la corrosion sous contrainte dans des
conditions reconnues comme très difficiles, par exemple les solutions chloru-
rées chaudes, ou les solutions acides en présence de sulfure d’hydrogène.
QV
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corSQR
Alloy 400
Alloy 600, 690 Fe Cr
Hastelloy D-205
Cr Si
Cu
Q
Nickel
Fe
Cr 200, 201 Alloy B-2
Mo
Alloy 825 Mo
Hastelloy B-3
Hastelloy G-3, G-30
Cr
Mo
Moins Cr
Hastelloy
Égal Cr Hastelloy C-4,
Plus Mo Hybrid-BC1
C-22, C-2000
Moins
Mo Inconel 686
Plus Cr
Alloy 625 Alloy C-276 Hastelloy
G-35
Moins
Alloy 59
Mo
Allcorr
Alloy 2120MoN
Figure 1 – Synoptique des alliages de nickel utilisés pour leur résistance à la corrosion aqueuse
1.1 Nickel non allié et faiblement allié rieures à 320 oC. Les deux nuances combinent une bonne résis-
tance à la corrosion à une excellente ductilité et une bonne
(Ni) conductivité thermique. Elles sont très utilisées en génie chimique
Le nickel est utilisé non allié ou faiblement allié sous forme cor- ou thermique pour la réalisation d’échangeurs de chaleur. L’addi-
royée. Il existe en particulier deux versions connues sous les tion de titane et d’aluminium permet de réaliser un durcissement
appellations commerciales Ni 200 et Ni 201. Les deux nuances structural dans la nuance 301, par formation de composés intermé-
sont pratiquement du nickel pur à 99,5 %. Les éléments résiduels talliques de type γ ′ [Ni3(Al, Ti)] (tableau 1). Cette nuance offre
sont constitués de fer, cuivre, manganèse et silicium. Les deux donc, en plus de la résistance à la corrosion, des caractéristiques
nuances se différencient par leur teneur en carbone. La nuance Ni mécaniques élevées. Dans l’industrie chimique, les applications du
200 contient environ 0,08 % de carbone tandis que la nuance Ni nickel non allié ou faiblement allié sont nombreuses, particulière-
201 voit cette teneur limitée à 0,02 %. Du fait de cette faible teneur ment dans les milieux caustiques, l’eau, les acides non oxydants,
en carbone, la nuance 201 résiste à la formation de carbures à les milieux fluorés, l’extrusion des matières plastiques, sans
haute température et peut être utilisée à des températures supé- oublier de nombreuses applications électriques et magnétiques.
Nickel 200 N02200 2.4066 99,5 0,1 0,2 0,2 0,08 0,2 – –
Nickel 201 N02201 2.4068 99,5 0,1 0.2 0,2 0,01 0,2 – –
Duranickel 301 N03301 96,5 0,1 0,3 0,2 0,2 0,5 4,4 0,6
QW
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corSQR
1.2 Alliages nickel-cuivre (Ni-Cu) considérable dans la production d’électricité à partir de l’énergie
nucléaire comme matériaux de générateurs de vapeur, le second
Le premier alliage de nickel breveté par Ambrose Monell en ayant remplacé le premier pour pallier certains problèmes de
1905 fut un alliage Ni-Cu encore utilisé de nos jours sous l’appella- fissuration [3]. Dans les milieux aqueux, ils peuvent trouver certai-
tion Monel 400 [1]. À sa suite, toute une famille d’alliages Ni-Cu a nes applications en particulier dans les acides très oxydants (acide
été développée au cours du XXe siècle. Les alliages Ni-Cu sont nitrique) ; par contre, dans les autres acides minéraux ou organi-
constitués d’une base nickel d’environ 66 % et d’une addition de ques, l’oxygène dissous n’est pas suffisant pour permettre la pas-
cuivre de 30 % en moyenne. Les autres éléments présents sont sivation de ces alliages. L’alliage 600 peut aussi être une
Q comme précédemment le fer, le manganèse et le silicium. Il existe alternative au Ni 200 en milieu caustique lorsque celui-ci est limité
trois nuances principales : une nuance en solution solide (alliage par ses caractéristiques mécaniques. En effet, l’apport de chrome
400), une nuance à durcissement structural (alliage K-500) et une augmente considérablement les caractéristiques mécaniques
version à usinabilité améliorée (alliage 405). La nuance K-500 (tableau 7).
contient des petites quantités de titane (0,35 à 0,85 %) et d’alumi-
nium (2,3 à 3,25 %) (tableau 2). Ainsi à la suite d’un vieillissement
et la précipitation de phases intermétalliques, l’alliage peut offrir
une résistance mécanique élevée tout en conservant une grande
1.4 Alliages nickel-fer-chrome (Ni-Fe-Cr)
partie de la résistance à la corrosion. L’usinabilité améliorée de la et nickel-chrome-fer (Ni-Cr-Fe)
nuance 405 est obtenue par une teneur en soufre relativement éle-
vée (0,025 à 0,06 %). L’alliage 400 présente une bonne résistance Ces alliages base nickel contiennent des quantités importantes
mécanique, une bonne ductilité, une bonne soudabilité. Il est de fer (jusqu’à 30 %) ou de chrome (jusqu’à 30 %) (tableau 4). On y
connu pour sa résistance à la corrosion généralisée et à la fissura- trouve des alliages de type Ni-Fe-Cr (teneur en fer supérieure au
tion sous contrainte en milieu sulfurique (non oxydant), en milieu chrome) et de type Ni-Cr-Fe (teneur en chrome supérieure au fer).
fluorhydrique et en milieux alcalins. La version K-500 est générale- Le molybdène et le cuivre peuvent être aussi des éléments d’addi-
ment choisie pour la confection d’éléments de vannes, de pompes tion importants. Cette famille se situe à la frontière des alliages
et de boulonnerie. Cette famille d’alliages forme, avec les alliages base nickel et des aciers inoxydables. Les progrès de ces derniers
cupro-nickel présentés dans l’article « Propriétés du cuivre et de au cours des récentes années, avec l’apparition des alliages super-
ses alliages » [M 4 640], un ensemble de matériaux particulière- austénitiques, ont beaucoup réduit leur utilisation. Toutefois
ment utiles en milieu marin. l’alliage 825 (20 % chrome, 3 % molybdène) reste très utilisé pour
sa résistance en milieu sulfurique et sa résistance à la corrosion
sous contrainte et trouve de nombreuses applications dans l’indus-
1.3 Alliages nickel-chrome (Ni-Cr) trie pétrolière. Une version de l’alliage 825 à durcissement structu-
ral a aussi été commercialisée sous l’appellation 925. Les alliages
Dès 1907, deux alliages Ni-Cr ont été développés simultané- 825 et 925 se rencontrent particulièrement sur des applications
ment. L’idée était de mettre en solution, dans une base austéniti- puits de pétrole en partie grâce à leur bonne tenue en présence de
que nickel, une certaine quantité de chrome à l’exclusion de tout sulfure d’hydrogène (H2S). C’est aussi le cas de l’alliage G-50®. Les
autre élément d’addition. L’alliage 80Ni-20Cr initialement fabriqué alliages G et G-3 ne sont plus fabriqués et ont été remplacés par la
sera suivi d’une longue famille [2]. En fait, les alliages Ni-Cr sont nuance G-30 plus performante en particulier dans les milieux
plus employés à haute température que dans la corrosion phosphoriques et sulfuriques. On ne peut omettre dans cette
aqueuse. De nos jours, il existe deux alliages réellement impor- famille l’alliage 718 (à durcissement structural par précipitation)
tants pour ce type d’application : les alliages 600 et 690. Dans très utilisé dans les applications pétrolières par suite de ses
l’alliage 600, la teneur en nickel est de 72 % et celle en chrome de caractéristiques mécaniques très élevées après vieillissement
16 %, dans l’alliage 690 elles sont respectivement de 58 % mini- (E > 1 100 MPa). Pour mémoire, c’est aussi un alliage très utilisé
mum et de 29 % (tableau 3). Ces deux alliages ont une importance dans les industries aéronautiques.
QX
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corSQR
Alliage 825 N08825 2.4858 42 21,5 28 2 3 0,5 0,03 0,2 0,1 0,9
Alliage G-3 N06985 2.4619 44 22 19,5 2 7 1 (1) 0,015 (1) 0,8 (1) – – Q
Alliage G-30 N06030 2.4603 43 30 15 2 5,5 1,5 (1) 0,03 (1) 0,8 (1) – –
Alliage 718 N07718 2.4668 52,5 19 18,5 0,2 3 0,2 0,04 0,2 0,5 0,9
(1) maximum.
Alliage B-2 N10665 2.4617 69 1 (1) 2 (1) 0,5 (1) 28 1 (1) 0,01 (1) 0,1 (1) – –
Alliage B-3 N10675 2.4600 65 (2) 1,5 1,5 0,5 (1) 28,5 3 (1) 0,01 (1) 0,1 (1) – –
(1) maximum.
(2) minimum.
QY
Q
RP
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corSRP
RQ
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corSRP
Q
piqûres, est illustré. Les limites de l’utilisation du titane sont également présen-
tées, elles concernent principalement les milieux fluorés.
Les caractéristiques du titane permettent donc une utilisation très écono-
mique dans le milieu de l’eau de mer, pour les échangeurs des centrales
nucléaires de bord de mer, les usines de dessalement d’eau de mer qui se
développent dans les pays du golfe Persique et plus généralement pour le
matériel embarqué sur bateau et plate-forme off-shore.
Le titane est également très apprécié pour les appareils de l’industrie de pro-
cédés chimiques sous forme d’échangeurs à plaques ou à tubes, ainsi qu’en
configuration plaqué sur acier : blanchiment de pâte à papier, fabrication
d’engrais, pétrochimie, production d’acides organiques, traitement de mine-
rais, traitement de déchets...
Par ailleurs, les conséquences de la pollution atmosphérique et des cours
d’eau feront que le titane sera une solution économique pour garantir la durée
de vie des installations.
RR
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corSRP
Q
I Grade 2 R50400 2 Oui Ti 0,12O 275 345
I Grade 3 R50550 3 Non Ti 0,20O 380 450
I Grade 4 R50700 4 Non Ti 0,30O 483 550
II Grade 2 Pd R52400 7 Non Ti 0,12O 0,15Pd 275 345
II Grade 1 Pd R52250 11 Non Ti 0,06O 0,15Pd 138 240
II Grade 2 low Pd R52402 16 Non Ti 0,12O 0,05Pd 275 345
II Grade 1 low Pd R52252 17 Non Ti 0,06O 0,05Pd 138 240
III Ti 5 2.5 R54520 6 Non Ti 5Al 2,5Sn 793 828
III Ti 3 2.5 R56320 9 Non Ti 3Al 2,5V 483 620
III Grade 12 R53400 12 Oui Ti 0,3Mo 0,8Ni 345 483
III Ti 3 2.5 low Pd R56322 18 Non Ti 3Al 2,5V 0,05Pd 483 620
III Ti 3 2.5 Ru R56323 28 Oui Ti 3Al 2,5V 0,1Ru 483 620
III Ti 5111 R55111 32 Non Ti 5Al 1Sn 1Zr 1V 0,8Mo 586 689
IV Ti 6 4 R56400 5 Non Ti 6Al 4V 828 895
IV Ti 6 4 ELI R56407 23 Non Ti 6Al 4V 0,13Omax 759 828
IV Ti 6 4 ELI Ru R56404 29 Oui Ti 6Al 4V 0,1Ru 0,13Omax 759 828
V Beta C R58640 19 Oui Ti 3Al 8V 6Cr 4Zr 4Mo 759 793
V Beta C Pd R58645 20 Non Ti 3Al 8V 6Cr 4Zr 4Mo 0,05Pd 759 793
V Beta 21S R58210 21 Non Ti 15Mo 3Al 2,7Nb 0,25Si 759 793
V Ti 6246 R56260 Oui Ti 6Al 2Sn 4Zr 6Mo 1 103 1 172
assure la tenue en milieu corrosif et c’est l’acier ordinaire ou à forte utilisé pour des applications cryogéniques. L’addition de nickel et de
caractéristique mécanique qui assure la tenue mécanique en pres- molybdène pour le grade 12 permet également d’améliorer la résis-
sion. Le grade 2 est le matériau le plus communément employé et tance en milieu acide en plus des caractéristiques mécaniques.
représente la majorité du tonnage utilisé pour les applications chi-
miques du fait de son prix, de la facilité de sa mise en forme (à froid ■ Le groupe IV liste les alliages de type ␣- . Il comprend le
et par soudage), de ses caractéristiques mécaniques et du grand célèbre TA6V (Ti-6 % Al-4 % V) qui est l’alliage le plus utilisé en
choix de fournisseurs. L’amélioration des caractéristiques mécani- aéronautique ; les caractéristiques mécaniques sont élevées mais
ques pour les grades 3 et 4 est obtenue par l’augmentation de la la mise en forme se fait à chaud et le prix est plus que doublé par
teneur en oxygène au détriment, toutefois, de la ductilité. rapport au grade 2. La variante ELI (Extra Low Interstitial,
c’est-à-dire bas oxygène) du TA6V permet d’obtenir une meilleure
■ Le groupe II correspond à une variante des alliages du groupe I, ténacité, ductilité et résistance en corrosion sous contrainte ; elle
la tenue à la corrosion dans des milieux plus réducteurs et acides est par ailleurs très utilisée pour les prothèses de hanche.
étant améliorée par un ajout de palladium. Une faible addition de
métal noble tel que le palladium ou le ruthénium permet en effet ■ Le groupe V liste les alliages  , fortement chargés en éléments
de renforcer la passivité du titane. Ce type d’addition triple le prix d’addition et capables d’être durcis par traitement thermique. Les
par rapport au grade 2. Ces alliages ne sont donc réservés qu’aux éléments d’addition améliorent également la tenue à la corrosion
parties les plus exposées des appareils. Par ailleurs la disponibilité dans certains milieux (par exemple de l’huile hydraulique à 300 oC
des différentes formes de produits (plaques, tôles, tubes, barres) pour le Ti21S) et certains de ces alliages peuvent être mis en
est souvent limitée compte tenu de l’immobilisation financière. forme à froid ou à tiède (par exemple Ti21S).
Nota : de nouvelles variantes du grade 2 ont été créées pour traduire les meilleures Certains alliages sont approuvés NACE (à l’origine National
caractéristiques mécaniques habituellement obtenues. Elles sont appelées « 2 H », Association of Corrosion Engineers, devenue NACE International)
« 7 H », et « 16 H » dans les spécifications ASTM (American Society for Testing and Mate- pour l’utilisation selon la spécification MR0175 dans le secteur du
rials) et dans le code ASME section VIII (American Society of Mechanical Engineers, code
repris dans le CODAP français, Code de construction des appareils à pression) et corres- pétrole. Ces alliages ont une bonne tenue dans un milieu test
pondent à une augmentation de 16 % de la résistance mécanique utilisable pour les aqueux composé d’eau désaérée, de 3 000 ppm d’H2S dissous, 5 %
calculs. de NaCl et 0,5 % d’acide acétique (pH = 3,5).
■ Le groupe III correspond aux alliages dits « ␣ » ; les caractéris- À noter que le grade 25 (Ti 6Al 4V 0,5Ni 0,005Pd ; référence UNS
tiques mécaniques sont plus élevées et ils offrent un bon R56403) est également approuvé NACE mais n’est pas mentionné
compromis ductilité-résistance-ténacité-soudabilité. Le grade 6 est dans le tableau 1 car d’utilisation peu courante.
RS
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corSRP
2,0
TiO32H2O? HTiO4 –? TiO24–?
1,6
Corrosion
?
? ?
1,2
0,8
Oxydation de l'eau
TiO2 passif
0,4
Ti3+
– 0,4
Réduction de l'eau ou H–
Corrosion
– 0,8
Ti2+
Ti2O3
– 1,2
– 1,6
TiH2 passif
– 2,0
–2 0 2 4 6 8 10 12 14 16
pH
RT
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
mTUTQ
Aciers inoxydables
Propriétés. Résistance à la corrosion
Q
par Pierre-Jean CUNAT
Directeur technique EURO-INOX
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
© Techniques de l’Ingénieur, traité Matériaux métalliques M 4 541 − 1
RU
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
mTUTQ
Q
L’étude complète du sujet comprend les articles :
— M 4 540-Aciers inoxydables. Critères de choix et structure ;
— M 4 541-Aciers inoxydables. Propriétés. Résistance à la corrosion (le pré-
sent article) ;
— M 4 542-Aciers inoxydables. Mise en œuvre ;
— M 4 543-Aciers inoxydables. Fabrication ;
— Doc. M 4 544-Aciers inoxydables.
Notations et Symboles
Ac3 température à laquelle la ferrite achève de se transformer im densité de courant d’activité maximale
en austénite au cours du chauffage
EK potentiel d’équilibre cathodique LDR rapport limite d’emboutissage ou limiting drawing ratio
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
M 4 541 − 2 © Techniques de l’Ingénieur, traité Matériaux métalliques
RV
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
mTUTQ
Q
dans la mesure où il constitue la base du mécanisme de résistance nance du substrat, vont être associées des molécules d’eau prove-
à la corrosion des aciers inoxydables. Le phénomène de passivité se nant de la solution. Certaines molécules d’eau ayant perdu des
caractérise par la présence d’un film très mince (épaisseur de l’ordre protons H+, de manière à équilibrer la présence des cations métalli-
de 10 à 20 nm), appelé film passif ou couche passive, à la surface de ques donnent naissance à des ions OH– et O2–, constitutifs de
l’alliage métallique qui rend sa vitesse de corrosion négligeable. Le l’hydroxyde ou de l’oxyde [34]. Le film passif des aciers inoxydables
film passif, fortement solidaire du substrat métallique, empêche ou est de type « bicouche ». La couche interne, en contact direct avec le
rend insignifiant le contact entre l’alliage et les agents plus ou moins substrat métallique, est formée d’oxydes de type (Fe, Cr)2O3 et la
agressifs du milieu environnant. couche externe est essentiellement constituée par des hydroxydes
Pour que le phénomène de passivité puisse s’établir, et se main- de type Cr(OH)3 n H2O. La représentation schématique de ce modèle
tenir, il est nécessaire que l’alliage fer-chrome ait une teneur mini- bicouche est donnée à la figure 2.
male en chrome de l’ordre de 11 %. Autrement dit, il existe un effet
de seuil au-delà duquel le phénomène de passivité peut exister et
au-dessous duquel il est impossible. De plus, si la couche passive 1.2 Interprétation électrochimique
devait être détruite localement par suite d’un endommagement acci-
dentel (rayure par exemple), elle possède la propriété de pouvoir se
reconstituer dans un grand nombre de milieux, ce qui traduit la En milieux aqueux, la corrosion est un phénomène électro-
propriété d’autopassivation de l’alliage métallique dans ce milieu. chimique qui met en présence un alliage métallique et un électrolyte,
c’est-à-dire un milieux liquide capable de conduire l’électricité. Elle se
traduit par le passage d’ions métalliques en solution.
O M OH2 O M OH2
La nature électrochimique de la corrosion en milieux aqueux d’un
métal M de valence z qui se corrode est le siège de deux réactions
O OH O OH simultanées :
O M OH2 O M OH2 — la réaction anodique d’oxydation qui correspond à la dissolu-
tion du métal dans la solution ou électrolyte avec libération
OH2 OH2 OH OH H+ d’électrons :
Alliage
Alliage
– z+
e MOH+ (H2O) OH M OH2 M→M + ze –
+
OH2 OH2 OH OH H — la réaction cathodique de réduction d’un oxydant dissous dans
la solution s’écrit de manière générale :
O M OH2 O M OH2
n+ –
O OH O OH Ox + n e → Red
O M OH2 O M OH2 dans le cas du fer, il s’agit de la réduction de l’ion métallique Fe3+ en
un ion métallique Fe2+ de valence inférieure
a film partiellement formé b film consolidé 3+ – 2+
Fe + e → Fe
Figure 1 – Représentation schématique du film passif des aciers La corrosion d’un métal tel que le fer nécessite la présence d’un
inoxydables, selon Okamoto et Shibata [33] oxydant dans la solution car la réaction de réduction utilise les élec-
trons produits lors de la réaction de dissolution du métal.
Comme dans toute réaction électrochimique, les réactions
anodique d’oxydation et cathodique de réduction ont un potentiel
d’équilibre noté :
— EK pour la réaction cathodique ;
Milieu aqueux (électrolyte) — EA pour la réaction anodique d’oxydation.
Le potentiel d’équilibre EK correspond au potentiel que prend un
métal inattaquable dans une solution qui contient un système
(e = 10 à 20 nm)
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
© Techniques de l’Ingénieur, traité Matériaux métalliques M 4 541 − 3
RW
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
mTUTQ
des courbes individuelles de polarisation relatives à l’oxydation et à Lorsqu’on s’éloigne du potentiel de corrosion EC en imposant une
la réduction (figure 3). La valeur absolue de la densité de courant différence de potentiel positive E – EC > 0, la réaction de dissolution
d’échange varie avec le métal ou l’alliage, son état de surface, la ou réaction anodique d’oxydation l’emporte et la densité de courant
concentration des espèces Oxn + et Red, et également avec la anodique iA augmente.
température.
Pour certaines caractéristiques de la solution, la courbe de polari-
Le potentiel d’équilibre EA de la réaction de dissolution anodique sation anodique i = f (E) des alliages métalliques a la forme caracté-
représente le potentiel pris par le métal ou l’alliage par rapport à la ristique de la figure 5. Elle présente un maximum pour E = Ep. Pour
Q
solution. Pour qu’un métal ou alliage puisse se corroder, il faut qu’il Eth < E < Ep, il y a dissolution selon la réaction :
existe dans la solution un oxydant tel que le potentiel d’équilibre EK
de sa réaction cathodique de réduction soit plus élevé que le poten- z+
M→M + ze –
tiel d’équilibre de la réaction anodique de dissolution, c’est-à-dire
que EK > EA. Dans le cas contraire (EK < EA), un processus de corro- Pour Ep < E < Epp ; (Epp représentant le potentiel de passivation),
sion ne peut s’établir (figure 4). Le raisonnement basé sur les deux on observe la réaction :
potentiels d’équilibre EA et EK reste théorique, car la complexité des
alliages métalliques et des solutions ne permet pas un accès direct + –
à ces potentiels ou aux courbes de polarisation individuelles. Par 2 M + z H2 O → M2 Oz + 2 z H + 2 z e
contre, la courbe globale, qui est la résultante des courbes indivi-
duelles, peut être déterminée expérimentalement (figure 3). Le qui se produit simultanément avec la précédente. La formation de
point EC pour lequel la densité de courant totale est nulle (iA = – iK) l’oxyde M2Oz freine la dissolution du substrat métallique et on note
est dit potentiel de corrosion dans le milieu considéré. La densité du corrélativement une diminution de la densité de courant.
courant de corrosion au point EC est : Pour Epp < E < Etp ; (Etp représentant le potentiel de transpassiva-
iC = iA = iK tion), la densité de courant reste constante, ce qui signifie que
l’alliage métallique se passive spontanément dans le milieu consi-
déré. Dans cet état stationnaire, les réactions se déroulant à l’inter-
face substrat métallique/couche passive sont identiques aux deux
précédentes et à l’interface couche passive/solution, la réaction
i |iK | = – iK iA traduisant la dissolution de la couche passive est de type :
+ 2+
iC M2 Oz + 2 z H → 2 M + z H2 O
+i ip
+i
iA
EK EC EK ir
0 0
EA E EA E Eth Ep Epp Etp E
Activité Passivité Transpassivité
iK Prépassivité
–i –i
Eth potentiel d'équilibre ou thermodynamique
a EA > EK : corrosion impossible b EK > EA Ep potentiel critique de passivation
EC : potentiel de corrosion Epp potentiel de passivation
iC = iA = – iK : densité du Etp potentiel de transpassivation
courant de corrosion
Figure 4 – Courbes de polarisation individuelles de la réaction Figure 5 – Courbe anodique de polarisation d’un acier inoxydable
anodique iA = f (E) et de la réaction cathodique iK = g (E) en milieu acide (acide sulfurique : H2SO4) : iA = f (E), d’après [34]
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
M 4 541 − 4 © Techniques de l’Ingénieur, traité Matériaux métalliques
RX
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
mTUTQ
a ) Le potentiel de corrosion EC (figure 6 a), est défini par l’inter- L’interprétation électrochimique du phénomène de corrosion
section de la courbe anodique et de la courbe cathodique de polari- permet notamment d’expliquer la corrosion et la résistance à la
sation. Si le métal est plongé dans la solution, la densité du courant corrosion uniforme des métaux purs et des alliages métalliques se
de corrosion est iC. Dans ce cas, le film passif préalablement formé présentant sous la forme de solutions solides homogènes. En effet,
va être détruit car un état passif stable ne peut être maintenu. chaque point de la surface métallique joue alternativement le rôle
d’anode (corrosion ou dissolution du métal) et le rôle de cathode
b ) Au potentiel critique de passivation Ep, la densité du courant (réduction de l’espèce oxydante présente dans la solution). L’enlève-
cathodique est supérieure à la densité du courant critique de passi- ment de métal est alors réparti uniformément sur la surface. C’est le
Q
vation ip (figure 6 b). Le métal ou l’alliage métallique se passive phénomène de corrosion uniforme.
spontanément (autopassivation) dans le milieu considéré. On est en
présence d’un état passif stable. C’est le cas des aciers inoxydables En pratique, un alliage métallique n’est pas, en toute rigueur, assi-
dans un grand nombre de solutions. milable à une solution solide homogène. L’alliage métallique
présente des hétérogénéités physiques (joints de grains) et chimi-
c ) Le pouvoir oxydant de la solution joue également un rôle ques (ségrégations, inclusions et précipités).
important. Dans le cas d’un alliage métallique passivable, tel qu’un Les caractéristiques électrochimiques de ces hétérogénéités ,
acier inoxydable (figure 7), l’accroissement de la teneur en oxydant notamment leur potentiel d’équilibre EA (figure 4), sont différentes
augmente d’abord la densité du courant de corrosion à l’état actif de celles du substrat métallique de base. Il s’ensuit la création de
(courbe cathodique K1), puis la rend négligeable à l’état passif piles locales entraînant la formation de microanodes lorsque EK est
(courbe cathodique K2). Par contre, si la concentration de l’oxydant supérieur à EA (EK > EA) et de microcathodes lorsque EA est supé-
augmente encore (courbe cathodique K3), le point de fonctionne- rieur à EK (EA > EK). Les microanodes sont le siège d’une dissolution
ment se trouve dans le domaine transpassif et on observe alors une (anodique) de l’alliage métallique et les microcathodes sont le siège
rupture localisée de la couche passive. d’une réduction (cathodique) de l’espèce oxydante présente dans la
solution. Si les hétérogénéités sont suffisamment petites et quasi
uniformément réparties, la corrosion est statistiquement uniforme.
Dans le cas des alliages métalliques industriels, la conception d’un
i (µA/cm2) appareil, les conditions de mise en œuvre et de service peuvent
donner naissance à des surfaces cathodiques et anodiques de plus ou
moins grandes dimensions et engendrer des phénomènes de corro-
sion localisée. L’origine de ces phénomènes peut être multiple. Les
Symétrique de la courbe individuelle phénomènes de corrosion caverneuse résultent le plus souvent de la
de polarisation cathodique création d’un espace confiné dès la conception d’un appareil. Les
phénomènes de corrosion sous contrainte peuvent être évités par un
choix judicieux de la nuance d’acier inoxydable en fonction de la solu-
ip tion avec laquelle elle sera en contact. La démarche est similaire en ce
Courbe anodique
qui concerne la corrosion intergranulaire qui peut être évitée en
de polarisation s’abstenant de tout traitement thermique dit « sensibilisant » ou, s’il
iC n’est pas possible de s’en affranchir, de choisir un acier inoxydable
austénitique à bas carbone ou un acier inoxydable ferritique stabilisé.
EC Potentiel métal/solution
i (µA/cm2)
Eth Ep Epp Etp
Symétriques des courbes individuelles
K3
de polarisation cathodique
EC : potentiel de corrosion ou de dissolution
a état actif K2
Cl –
i (µA/cm2) K1
Symétrique de la courbe ip A1
individuelle de polarisation cathodique A2 Courbes anodiques
de polarisation
ir
ip Potentiel métal/solution
Figure 6 – Points de fonctionnement d’un métal Figure 7 – Points de fonctionnement d’un acier inoxydable
ou d’un alliage métallique en milieu acide chloruré et non chloruré
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
© Techniques de l’Ingénieur, traité Matériaux métalliques M 4 541 − 5
RY
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
mTUTQ
En conclusion, on peut affirmer que l’interprétation et donc la Enfin, il faut insister sur le fait que, en plus de ces caractéristiques
compréhension des phénomènes de corrosion est grandement faci- chimiques, les caractéristiques physiques de la solution ou milieu
litée en faisant appel à l’électrochimie. D’autre part, si la composi- corrosif sont de première importance. En général, l’augmentation
tion chimique des alliages métalliques joue un rôle important dans de la température est un facteur aggravant. En l’absence de phéno-
leur aptitude à résister à la corrosion (résistance de la couche mènes d’érosion, de cavitation et d’abrasion, la circulation du fluide
passive), leur histoire métallurgique (inclusions, précipités, écrouis- corrosif a un effet bénéfique.
sage, etc.) joue également un rôle déterminant.
Q
1.3.2 Influence des éléments d’alliage
1.3 Résistance à la corrosion uniforme Le premier élément d’alliage à considérer est le chrome. C’est lui
qui, à une teneur minimale de l’ordre de 11 %, permet la passivité
(cf. (§ 1.1)). Plus la teneur en chrome est élevée, et plus le domaine
1.3.1 Généralités passif va s’élargir. Dans le même temps, la densité du courant
anodique à l’état actif (pic de corrosion) va diminuer. Ceci est obtenu
grâce à la présence d’un film passif que l’on trouve sous la forme
La corrosion uniforme constitue la dissolution quasi uniforme de
d’oxyde complexe de type (Fe, Cr)2O3 et d’hydroxyde Cr(OH)3nH2O
tous les points constitutifs de la surface d’un matériau qui sont atta-
dans le film passif (figure 2).
qués sensiblement à la même vitesse par le milieu corrosif. La
conséquence de la corrosion uniforme est une diminution régulière Le molybdène améliore la résistance à la corrosion dans les
de l’épaisseur par opposition aux différentes formes de corrosion milieux acides réducteurs ou neutres en renforçant la stabilité de
localisée que nous examinerons dans les paragraphes suivants. couche passive et en favorisant la repassivation. Plutôt que sous la
La corrosion uniforme se rencontre le plus fréquemment lorsque forme d’oxyde MoO3 , on admet aujourd’hui que le molybdène agit
l’alliage métallique est en contact avec des acides tels que : l’acide à l’interface film passif-solution sous la forme d’espèces hydratées
sulfurique, l’acide nitrique, l’acide phosphorique, etc. complexes de type H4(12 MoO3 , SiO4)nH2O.
Avec ce type de corrosion, on peut exprimer la corrosion par la Le nickel n’a pas d’influence directe sur la couche passive bien
perte de masse m (g) en fonction du temps sous la forme de la que l’on constate un effet favorable notamment en milieu sulfu-
relation : rique.
Le cuivre améliore la résistance à la corrosion en milieu acide
m ( g ) = Ai C t ⁄ zF grâce à la formation, à la surface de la couche passive, d’un film
métallique obtenu à partir des cations Cu+ et Cu2+ passés en
avec A la masse atomique du métal de valence z,
solution.
t (en s) le temps,
Enfin, le silicium peut avoir un effet favorable dans certains
F le faraday qui est égal à 96 500 C, milieux acides et fortement oxydants comme l’acide nitrique
iC (enA/cm2) la densité du courant de corrosion, concentré et l’acide sulfurique concentré chaud. Au sens strict du
terme, le silicium ne peut cependant pas être considéré comme un
m (en g) la perte de masse pour un échantillon dont la
élément d’alliage car sa teneur est toujours limitée dans les aciers
surface est de 1 cm2.
inoxydables.
Si l’on connaît la masse volumique ρ (g/cm2) du matériau, on peut
en déduire la réduction d’épaisseur appelée aussi vitesse de corro-
sion ∆e (mm/an) par la formule : 1.3.3 Caractéristiques chimiques principales
des solutions corrosives
∆ e (mm/an) = Km / S ρ t
Elles agissent directement sur la stabilité du film passif et déter-
avec K une constante qui avec les unités choisies vaut minent donc la résistance à la corrosion. Il s’agit principalement du
sensiblement 8,76 × 10 ,
4 pH et du potentiel d’oxydoréduction qui conditionnent le potentiel
métal-solution. En plus des caractéristiques bien connues et dont
S (en cm2)la surface exposée. les effets sont bien maîtrisés, il faut insister sur le rôle de certaines
En milieu acide fort, la courbe anodique polarisation a l’allure de impuretés ou espèces chimiques car même lorsqu’elles ne sont
celle indiquée à la figure 5. Elle délimite quatre domaines dont présentes qu’à de faibles teneurs, elles sont de nature à modifier
l’importance est fondamentale. À gauche du potentiel d’équilibre l’équilibre métal-solution. Aux chlorures Cl – et aux sulfures HS –
Eth, l’alliage métallique est thermodynamiquement stable et ne se souvent cités, il faut ajouter certains ions métalliques (Fe, Ni) qui,
dissout donc pas. C’est le domaine dit de « stabilité ». Entre Eth et dans certaines conditions, sont capables de former des espèces
Ep, l’alliage métallique se dissout à une vitesse relativement élevée. solubles pouvant déstabiliser la couche passive. Ces quelques
Elle peut atteindre plusieurs millimètres pas an. C’est le domaine dit considérations montrent la nécessité de connaître précisément la
d’« activité ». Entre Epp et Etp, l’alliage métallique ne se dissout composition de la solution corrosive et donc de ne pas se contenter
pratiquement pas. Si l’on devait parler de réduction d’épaisseur, elle d’une désignation générique. Lorsque la composition chimique
ne serait que de l’ordre du micromètre par an. Au-delà de Etp, il précise est connue, deux cas peuvent se présenter. Dans le premier,
s’agit du domaine transpassif qui n’est à considérer que dans le cas il s’agit d’une solution « standard » pour laquelle le choix de la
de milieux très oxydants. nuance d’acier inoxydable peut se faire à l’aide de tables de corro-
Tout l’art de la lutte contre la corrosion sera de choisir un couple sion. Dans le second, la présence d’impuretés interdit d’avoir
alliage métallique-solution de manière à ce que la nuance retenue recours aux tables de corrosion. Il faudra alors utiliser un système
se trouve à l’état passif dans le milieu considéré. Compte tenu de la expert qui, parce qu’il intègre une part d’expérience, permet
grande variété des nuances, les aciers inoxydables sont, en général, souvent de trouver le meilleur compromis.
capables de résoudre ce problème.
Cependant, il faudra que la solution ait un pouvoir oxydant suffi- 1.3.4 Milieux acides
samment élevé pour que le point de fonctionnement représenté par
l’intersection de la courbe anodique de polarisation et le symétrique 1.3.4.1 Acide sulfurique (H2SO4)
de la courbe individuelle de polarisation cathodique ne se trouve
pas dans le domaine actif (figure 6 a) mais dans le domaine passif Les solutions à base d’acide sulfurique [31] [35] sont des milieux
(figure 6 b). complexes. Jusqu’à environ 50 % en concentration, le milieu est
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
M 4 541 − 6 © Techniques de l’Ingénieur, traité Matériaux métalliques
SP
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
mTUTQ
plutôt réducteur. Au contraire, au-dessus d’environ 80 %, le milieu intergranulaire sur toute la surface du matériau (indépendamment
devient oxydant. Par ailleurs, son degré d’ionisation présente un de toute zone sensibilisée et donc de la microstructure du maté-
maximum à une concentration de l’ordre de 30 % tandis que la solu- riau). La meilleure façon de combattre ce type de corrosion est
bilité de l’oxygène est minimale à une concentration d’environ 70 %. d’utiliser une nuance austénitique à bas carbone contenant environ
Ces considérations permettant d’expliquer la très forte agressivité 4 % de silicium : X1CrNiSi18-15-4/1.4361 en sachant cependant
des solutions dont la concentration est comprise entre 30 et 80 %. qu’une corrosion uniforme « stricto sensu », un peu supérieure à
Les alliages fer-chrome, qu’ils soient martensiques ou ferritiques, 0,1 mm/an, ne pourra pas être évitée.
résistent mal aux milieux sulfuriques.
Dans les solutions très concentrées, c’est-à-dire titrant plus de
80 %, on peut utiliser l’acier inoxydable X2CrNi19-11/1.4306. Sa
résistance à la corrosion est bonne dans des solutions concentrées à
1.3.4.3 Acide phosphorique (H3PO4)
Bien que les solutions d’acide phosphorique [31] [35] pures soient
Q
93 % jusqu’à 40 °C et dans des solutions concentrées à 98 % jusqu’à peu agressives, les nuances ferritiques X6Cr17/1.4016 et austéni-
70 °C. L’addition de molybdène dans les nuances austéni-tiques tiques X2CrNi18-9/1.4307 n’offrent pas une sécurité suffisante au
permet d’améliorer significativement la résistance à la corrosion. Les regard du procédé de fabrication. Alors que la nuance austénitique
nuances couramment utilisées sont les suivantes ([M 4 540], X2CrNi 18-9 est limitée à des solutions à 30 % de H3PO4, un ajout
figure 15) : X2CrNiMo17-12-2/1.4404 et surtout : X2CrNiMo18-15- d’un peu plus de 2 % de molybdène (acier X2CrNiMo17-12-2/1.4404)
4/1.4438. Aux températures supérieures à 70 °C, il est recommandé est satisfaisant dans les solutions très concentrées jusqu’à leur
d’utiliser des nuances austénitiques qui, en plus du molybdène, température d’ébullition.
contiennent environ 5 % de silicium.
Cependant, le procédé de fabrication le plus courant de l’acide
Dans les solutions intermédiaires, dont la concentration d’acide phosphorique est un procédé humide qui consiste à attaquer le
sulfurique est comprise entre 30 et 80 %, les aciers inoxydables se matériau brut [phosphate tricalcique : Ca3(PO4)2] par l’acide sulfu-
corrodent rapidement. Par contre, la présence de certaines impu- rique entraînant la formation d’acides contaminés par des sulfates,
retés oxydantes favorise l’établissement et le maintien de la passi- des fluorures et des chlorures. Par contre, la présence d’oxydants
vité. C’est le cas des ions cuivriques, de l’acide arsénieux (0,1 % tels que Fe3+ ou Cu2+ est de nature à renforcer la passivité. Compte
As2O3) et de quelques dizaines de p.p.m. d’acide nitrique. En plus du tenu de l’agressivité des polluants, on utilise soit des nuances ferri-
molybdène, des additions de l’ordre de 1,5 % de cuivre améliorent tiques à bas carbone à teneur élevée en chrome (21 à 30 %), à teneur
encore la résistance à la corrosion. C’est le cas de la nuance élevée en molybdène (4 à 8 %) stabilisées, soit des nuances austé-
« superausténitique » X1NiCrMoCu25-20-5/1.4539 et de la nuance noferritiques de type X2CrNiMoCu25-6-3/1.4505 ou des nuances
austénoferritique X2CrNiMoCuN25-6-3/1.4507. « superausténitiques » dérivées de la nuance X1NiCrMoCu25-20-
Entre 0 et 30 % d’acide sulfurique, les nuances austénitiques ne 5/1.4539.
peuvent être utilisées que si la solution est suffisamment aérée et la Ces dernières considérations ne s’appliquent qu’au processus de
température limitée. Par exemple, la nuance X5CrNiMo17-12- fabrication. Pour le stockage et le transport de l’acide phosphorique
2/1.4401 peut être utilisée au contact d’une solution à 25 % d’acide pur, c’est-à-dire en l’absence de contaminants, la situation est diffé-
sulfurique à la température de 50 °C. Ses performances sont encore rente.
suffisantes à la même température dans une solution à seulement
5 % d’acide sulfurique si elle est aérée en permanence (15 p.p.m. Dans les solutions bouillantes dont la teneur en H3PO4 est limitée
d’oxygène dissous). à 35 %, on peut cependant utiliser les nuances austénitiques de type
X2CrNiMo17-12-2/1.4404 ou mieux X2CrNiMo18-15-4/1.4438. Dans
les solutions bouillantes dont la teneur en H3PO4 est de l’ordre de
1.3.4.2 Acide nitrique (HNO3) 85 %, le nickel améliore significativement la situation en réduisant la
L’acide nitrique étant un puissant oxydant [31] [35], la résistance à vitesse de corrosion d’un facteur 10 lorsqu’on passe d’une nuance
la corrosion des aciers inoxydables sera directement fonction de austénitique à 12 % de nickel (X2CrNiMo17-12-2/1.4404) à un alliage
leur teneur en chrome. Ceci entraîne que, quelle que soit la nuance contenant 62 % de nickel (alliage 625).
envisagée (ferritique ou austénitique), il faudra être certain qu’elle
n’a pas été sensibilisée par une opération de mise en œuvre. De ce 1.3.4.4 Acide chlorhydrique (HCl)
point de vue, l’opération de soudage est la plus risquée. En effet,
avec certaines nuances, le soudage peut provoquer une sensibilisa- L’acide chlorhydrique [31], [35] pose un problème spécifique de
tion, c’est-à-dire la précipitation de carbures de chrome intergranu- corrosion uniforme dans la mesure où les courbes de polarisation
laires, dont la conséquence est un risque fort de corrosion cathodique sont situées vers les bas potentiels et de ce fait coupent
intergranulaire ou intercristalline. la courbe anodique de polarisation au niveau de son pic d’activité
(figure 8). La présence d’oxydants, en particulier d’oxygène, a pour
Avec les solutions contenant jusqu’à 50 % d’acide nitrique et effet de déplacer les courbes de polarisation cathodique vers la
jusqu’à la température d’ébullition, il est possible d’utiliser soit une droite et d’augmenter la densité du courant de corrosion (figure 8).
nuance ferritique à 17 % de chrome à bas carbone et stabilisée de
type X3CrTi17/1.4510, soit une nuance austénitique à bas carbone
de type X2CrNi18-9/1.4307.
Avec les solutions contenant jusqu’à 70 % d’acide nitrique, il faut Courbe cathodique en milieu oxydant :
recourir à des nuances ferritiques contenant au moins 26 % de H Cl + (O2 + ...)
Densité de courant
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
© Techniques de l’Ingénieur, traité Matériaux métalliques M 4 541 − 7
SQ
Q
SR
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corSRU
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
© Techniques de l’Ingénieur COR 325 − 1
SS
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corSRU
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
COR 325 − 2 © Techniques de l’Ingénieur
ST
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corSRU
(0)
Q
5049, 5052, 5454
5754, 5086, 5083
6082, 6061
Applications mécaniques Caractéristiques mécaniques 2618A, 2024, 2017A, 2014, Les 2030, 2011, 6012 et 6262 sont
Usinabilité 2214, 2030, 2011 des alliages pour le décolletage
5086, 5083
6005A, 6082, 6061,
6012, 6262,
7075, 7049A, Fortal
Plasturgie Caractéristiques mécaniques 2017A
Usinabilité 5083
Conductivité thermique 6061
7075
Fortal, Alumold
Construction aéronautique Légèreté 2618A, 2024, 2014
et spatiale Caractéristiques mécaniques 2214, 2219
Mise en forme 7020, 7075, 7175,
Usinage 7475, 7050, 7010
Aptitude aux traitements de surface
Tenue à la corrosion
Automobile Mise en forme 5251, 5754, 5182 Pour les échangeurs brasés : 3003
Caractéristiques mécaniques 5083 et 3005 plaqués
Aspect après peinture 6060, 6005A, 6106
Tenue à la corrosion 6082, 6016
Véhicules industriels Mise en forme 3003, 3004 En bandes larges :
Assemblage (soudage) 5052, 5454, 5754, 5086, 3003, 5052, 5754
Fonctionnalités des demi-produits 5083 En tôles relief :
Esthétique 6005A, 6082 3003, 5052, 5754, 5086
Tenue à la corrosion
Construction navale Mise en forme 5754, 5086, 5383, 5083, Tôles relief en 5086
Soudage 6005A, 6082
Tenue à la corrosion
Bâtiment Mise en forme 1050A Bandes prélaquées : 1050A,
Assemblage 3105, 3003, 3005, 3105, 3003, 3005, 5052
Aptitude à l’anodisation, au laquage 5005, 5052 Bandes préanodisées : 5005
Tenue à la corrosion 6060, 6005A, 6106
Luminaires, décoration Aspect de surface 1199, 1198, 1095 1090, Il s’agit de « Qualités spéciales »
Aptitude aux traitements de surface 1085, 1080
5005, 5657
Équipement du territoire, Mise en forme 3003 En tôles relief :
mobilier urbain Assemblage (soudage) 5052, 5086, 5083 3003, 5754, 5086
Fonctionnalités sur demi-produits 6005A, 6082,
Esthétique 6060, 6106
Tenue à la corrosion
Échangeurs thermiques Conductivité thermique 1050A, 1100, Pour les échangeurs brasés :
Mise en forme 3003, 3005, 3003 et 3005 plaqués
Assemblage (brasage) 6060, 6063,
Tenue à la corrosion 8011
Conducteurs électriques Résistivité électrique 1050A, 1350, 1370
6101
Emballage Légèreté 1200
Mise en forme 3000
Aptitude à la décoration 3104, 3004
Effet barrière 5052, 5154A, 5182
Compatibilité alimentaire
Articles culinaires Emboutissabilité 1050A, 3003, 3004 Les 4006 et 4007 sont des alliages
Aptitude aux traitements de surface 4006, 4007, pour émaillage
5052, 5754
Fil Caractéristiques mécaniques 5051, 5052, 5754, 5056 Fil soudage
Tenue à la corrosion 6101 4043
5754, 5356, 5183
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
© Techniques de l’Ingénieur COR 325 − 3
SU
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corSRU
La résistance à la corrosion est une propriété importante, mais ce ■ Création d’obstacles comme des précipités
n’est qu’une des propriétés prises en compte ou non dans ces choix intermétalliques
[5] [6]. Ils vont piéger les dislocations figure 1.
■ Préambule pour la corrosion de l’aluminium
Contrairement à l’acier non allié, l’aluminium non allié présente Le durcissement maximal est obtenu avec un maximum de
une très bonne résistance à la corrosion en milieux naturels, mais il précipités cohérents répartis de façon homogène et uniforme
a des caractéristiques mécaniques très faibles. dans la matrice aluminium.
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
COR 325 − 4 © Techniques de l’Ingénieur
SV
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
mTWXU
Propriétés du zirconium
et du hafnium
Q
par Pierre BARBERIS
Ingénieur de recherche
AREVA NP, Centre de recherche, Ugine, France
Note de l’éditeur
Cet article est la réédition actualisée de l’article [M 560] intitulé « Propriétés du zirconium
et du hafnium », paru en 1985, rédigé par Daniel Charquet et de l’article [M 4 785] intitulé
« Propriétés du zirconium et du hafnium » paru en 2009, rédigé par Pierre Barberis.
SW
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
mTWXU
Q
et pour certaines applications médicales (prothèses).
Cet article présente les principales propriétés physiques, la résistance à la cor-
rosion, les propriétés mécaniques (significativement anisotropes), ainsi que les
principaux alliages et leur mise en œuvre.
Température de transformation Par hafnium très pur, on entend un métal contenant très peu
863 C 1 734 C d’impuretés (généralement inférieures à 100 parties par millions
allotropique a - b
en masse) comme l’oxygène, le fer, et la plupart des autres élé-
(1) 1 barn = 10–28 m2 ments, à l’exception du zirconium dont la teneur est toujours de
plusieurs pourcents, souvent de l’ordre de 4 %.
SX
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corSWX
SY
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corSWX
CORROSION PAR LES GAZ À HAUTE TEMPÉRATURE DES MÉTAUX ET ALLIAGES RÉFRACTAIRES ____________________________________________________
non, pendant des durées plus ou moins longues, mais chaque fois détermi-
nantes pour le succès des opérations en cause.
On peut citer à cet égard la nécessité d’augmenter, autant que faire se peut, la
température maximale de fonctionnement des moteurs d’avions. Le principe de
Carnot stipule, en effet, que le rendement d’un moteur thermique est d’autant
plus élevé que la différence entre la température de la source chaude et celle de
Q
la source froide est importante. La mise au point de matériaux pouvant répondre
à cet impératif a fait l’objet depuis une cinquantaine d’années de très nombreux
travaux de recherche et de développement couronnés de réels succès. Ainsi, on
a vu la température des moteurs d’avions passer de 650-750 oC, vers la fin de la
Seconde Guerre mondiale, à 1 250-1 350 oC (ou plus...) pour les parties chaudes
des turboréacteurs actuels... Cela représente un gain moyen d’environ 10 oC par
an !... Résultat absolument remarquable.
De telles températures élevées et alternées d’utilisation doivent être atteintes
et maintenues pour des durées pouvant aller de quelques heures pour les
avions de chasse, jusqu’à quelques dizaines d’heures dans le cas des avions
long-courriers d’aujourd’hui. Les cycles thermiques doivent être, en outre,
répétés un grand nombre de fois pendant la durée de vie du moteur de l’avion.
Cet impératif d’augmentation des rendements thermodynamiques, qui
demeure un objectif permanent, peut cependant être appliqué dans des
conditions d’usage fort différentes. Ainsi, on peut avoir affaire à d’énormes
moteurs tels que les turbines terrestres de production d’énergie, aux très
longues durées d’utilisation, mais en conditions quasi isothermes... ou, au
contraire, à des moteurs de tailles réduites qui, eux, doivent être très fiables
pendant des durées assez courtes (de quelques dizaines de secondes à quel-
ques dizaines de minutes), comme dans le cas des chambres de combustion
d’ergols, avec des mélanges de gaz oxygène/hydrogène, pour les moteurs
Vulcain et Vinci assurant la propulsion des fusées Ariane, par exemple.
En dehors des cas précédents relatifs aux moteurs thermiques, nombreux sont
les domaines d’activités industrielles qui impliquent l’utilisation de matériaux
devant supporter de hautes températures. II s’agit, par exemple, des outils de
mise en forme des métaux et alliages (par forgeage, estampage, extrusion, tré-
filage, laminage...), ou bien ceux nécessaires aux installations de traitements
thermiques (résistances électriques des fours). De hautes températures sont
aussi requises dans les procédés qu’on peut rencontrer dans diverses industries
comme celles des ciments, des verres et des céramiques, ou bien celle de l’inci-
nération des ordures et déchets ménagers ou industriels, et pour la combustion
ou la transformation du charbon (gazéification, liquéfaction).
TP
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corSWX
____________________________________________________ CORROSION PAR LES GAZ À HAUTE TEMPÉRATURE DES MÉTAUX ET ALLIAGES RÉFRACTAIRES
Tableau 1 – Quelques durées de vie typiques en fonction des températures d’usage [1]
Températures maximales
Durée de vie typique Application des matériaux
(oC)
Moteurs de fusées 2 400
Quelques minutes
10 à 20 h
Boucliers thermiques de vaisseaux spatiaux
Revêtements superficiels, navette spatiale
1 650
1 750 Q
100 à 200 h Lingotières d’aciérie 1 350 à 1 500
1 000 h Filaments de lampes à incandescence 2 500
2 000 à 3 000 h Moteurs à essence (automobile) 600 à 800
Moteurs diesels (camions) 800 à 900
10 000 à 20 000 h Résistances électriques de fours industriels 1 300 à 1 600
Réacteurs d’avions civils 1 050 à 1 100
Turbines à vapeur 650
300 000 h
Réacteurs nucléaires haute température 850 à 900
De manière similaire, il n’est pas non plus facile de répondre à la 2.1 Approche thermodynamique
question : « Qu’est-ce qu’un matériau réfractaire ? ». Différentes
définitions sont proposées selon les dictionnaires consultés : À part l’or seul métal parfaitement stable à l’air, les métaux
– matériau qu’il est difficile ou impossible de fondre ou usuels n’existent dans la croûte terrestre qu’à l’état combiné avec
d’attaquer (Quillet et Flammarion) ; l’oxygène, le carbone, le phosphore, le soufre ou encore l’azote.
Ainsi existent-ils dans la nature de nombreux minéraux métal-
– matériau qui résiste à diverses actions physiques ou chimiques
liques, plus ou moins riches, qui sont, par exemple, des oxydes,
(Littré) ;
des sulfures, des phosphates, des sulfates, des carbonates, des
– matériau qui résiste à de très hautes températures (Petit chlorures, des nitrates, etc. On peut toutefois trouver des métaux à
Larousse et Petit Robert). l’état natif mais dans des conditions très particulières. Leurs
On voit bien que ces définitions, elles aussi, laissent une concentrations sont faibles et ne peuvent donner lieu à une exploi-
certaine latitude quant aux matériaux à considérer. A-t-on affaire à tation industrielle ; c’est le cas du cuivre, du manganèse, de
des céramiques traditionnelles (de type argilo-siliceux), à des l’argent, du plomb, du platine, du cadmium et même du mercure.
céramiques techniques ou dites « avancées » (oxydes, carbures, Ces combinaisons d’éléments chimiques, comme un métal avec
borures, nitrures...), à des métaux aux très hautes températures de l’oxygène (ou le soufre, le phosphore, ou le carbone, ou l’azote,
fusion, à des alliages très spéciaux, à des cermets... ? Dans ce etc.), constituent des composés minéraux particulièrement stables.
document nous traiterons principalement des superalliages, La tâche de l’industrie métallurgique extractive consiste donc à
matériaux qui supportent des températures d’usage dépassant « traiter » ces minéraux, en dissociant les constituants afin de récu-
550 oC jusqu’à 1 250 oC environ, des métaux et alliages à haut pérer l’élément métal.
point de fusion appelés parfois « ultraréfractaires », ainsi que de Pour réaliser l’opération de réduction du métal, il est nécessaire
métaux dits « exotiques » qui leur sont pour certains apparentés. de mettre en jeu de l’énergie et/ou de la matière. Cela correspond
Nous ne traiterons pas des céramiques massives proprement au fait que la réaction inverse, qui est celle de la corrosion, est
dites, c’est-à-dire ni des réfractaires argilo-siliceux utilisés pourtant spontanée ; elle se produit à une vitesse finie (figure 1). De plus, si
dans les procédés d’élaboration des métaux à partir de leurs on veut s’opposer donc ralentir ou, dans le meilleur des cas,
minerais (revêtements des hauts fourneaux, des fours de bloquer la réaction de corrosion, il faut consacrer soit de la
coulée...), ni des céramiques techniques. Cependant, nous présen- matière, soit de l’énergie ; en corrosion à haute température, c’est
terons brièvement quelques systèmes de revêtements des métaux le premier type d’action qui sera pratiqué.
et alliages par des couches protectrices de type céramiques afin
que l’on puisse atteindre des températures encore plus élevées. Prenons le cas de l’oxydation qui nous intéresse particulière-
ment, à savoir la réaction d’un métal avec l’oxygène, cette
tendance spontanée de la réaction de la corrosion :
TQ
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corSWX
CORROSION PAR LES GAZ À HAUTE TEMPÉRATURE DES MÉTAUX ET ALLIAGES RÉFRACTAIRES ____________________________________________________
Q
Mz+ Mo telle que A = – ∆G ; ainsi, dire que l’affinité est positive (∆G < 0)
revient à considérer que l’oxydation peut se produire en donnant
(minerai) (métal) un oxyde stable. À l’inverse si l’affinité est négative (∆G > 0),
l’oxydation ne peut avoir lieu et le métal restera en l’état. C’est le
Corrosion
cas de l’or (à pression atmosphérique et à température ordinaire)
qui est stable alors que son oxyde Au2O3 ne l’est pas.
À l’équilibre, ∆G = 0 avec :
Tableau 2 – Valeurs des variations d’enthalpie et d’entropie pour quelques métaux et oxydes [3]
Métaux nobles Métaux à faible affinité
Métal Oxyde ⌬H ⌬G Métal Oxyde ⌬H ⌬G
Au Au2O2 – 0,6 12,4 Cu Cu2O 80,8 70,0
Ag Ag2O 14,4 5,0 Bi Bi2O3 92,0 79,0
Ir IrO2 40,0 28,0 Pb PbO 104,0 90,1
Hg HgO 43,4 28,0 As As2O3 104,6 91,8
Pd PdO 45,8 23,6 Sb Sb2O2 112,3 99,4
Co CoO 114,0 103,2
Ni NiO 114,6 101,2
Cd CdO 124,4 110,2
Fe FeO 127,6 117,5
Métaux à forte affinité Métaux à très forte affinité
Métal Oxyde ⌬H ⌬G Métal Oxyde ⌬H ⌬G
Mo MoO2 132,5 121,5 B B 2 O3 203,5 199,9
W WO2 137,0 124,6 Si SiO2 209,9 196,9
Sn SnO2 138,8 124,2 Ti TiO2 247,8 232,8
Zn ZnO 166,5 142,2 Zr ZrO2 261,5 247,7
K K2O 172,8 152,6 Al Al2O3 266,4 258,2
Cr Cr2O3 131,8 168,8 Ba BaO 267,0 253,0
Mn MnO 184,1 173,5 Sr SrO 282,2 268,0
V V 2 O3 197,3 184,6 Li Li2O 284,8 267,6
Na Na2O 198,8 179,8 Be BeO 286,2 272,1
Mg MgO 287,6 272,2
Th ThO2 293,2 279,2
Ca CaO 301,3 286,5
o o
∆H et ∆G représentent respectivement ∆H 273 K et ∆G273 K en kcal mole O2 .
TR
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corSWX
____________________________________________________ CORROSION PAR LES GAZ À HAUTE TEMPÉRATURE DES MÉTAUX ET ALLIAGES RÉFRACTAIRES
10–2
O 0 1
O3
Fe 2
Q
=6 1
2
+O
– 100 O4 M C O2
=2 10–2
Fe 3 CoO
4
M M =2 + O2
O2 O
2Co+ 2C 1
O
= 2H 2
– 200 + O2
u 2O
= 2C NiO M 2H 2 10–4
+ O2 =2
4Cu i+
O2
2N
– 300 102
10–6
C + O2 = CO2
102
– 400
M
ZnO 10–8
∆Go = RT lnpO2 (kJ/mole O2)
=2 B 2C
+O
H – 500 2 +O
n 2 =2
104
2Z 2 Cr2O 3 C O
= 3
C 4 Cr + O2
M 3 M B 10–10
– 600
104
iO 2
=S
O2
– 700 Si + 10–12
106
– 800
2 Al 2O
3
10–14
= 3 106
O2
4 Al +
– 900 3 B
M gO B 10–16
M =2 O 108
Ca
O 2 =2
g+ O2
2M a+
– 1 000 2C
M Changement d'état Élément Oxyde 10–18
M
Point de fusion M M 108
– 1 100 Point de vaporisation B B
1010
10–20
– 1 200
0 200 400 600 800 1 000 1 200 1 400 1 600 1 800 2 000 2 200 2 400
Température (oC)
1014 1012 1010 10–22
Rapport CO/CO2
Rapport H2/H2O
0K
10–200 10–100 10–70 10–60 10–50 10–42 10–38 10–34 10–30 10–28 10–26 10–24
pO2
Ainsi, pour un système métal/oxyde donné, en l’absence de les sulfures. Ces diagrammes permettent de connaître à une tem-
changements de phases, ∆Go varie linéairement avec la tempéra- pérature donnée la pression d’équilibre entre un métal et son
ture. Des diagrammes de stabilités des oxydes peuvent ainsi être oxyde ; de même il est possible de connaître, pour une pression
tracés en fonction de la température et de la pression d’oxygène. d’oxygène fixée, la température d’équilibre entre un métal et son
Différents auteurs ont établis de tels diagrammes. Les plus oxyde.
connus sont ceux d’Ellingham (figures 2 et 3) et de Richardson ; On voit donc que de tels diagrammes sont des outils de prévi-
en France ils ont été tracés par Olette et Ancey-Moret non seule- sion pour savoir si, dans des conditions données (température et
ment pour les oxydes mais aussi pour les carbures, les nitrures et pression du gaz réactif), un métal va être corrodé ou non.
TS
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corSWX
CORROSION PAR LES GAZ À HAUTE TEMPÉRATURE DES MÉTAUX ET ALLIAGES RÉFRACTAIRES ____________________________________________________
10–2
1
O3
Fe 2
Q
=6 1
2
+O
100 O4 M 10–2
4F
e 3 CoO
M M =2
O2
2C o+ 1
200
u 2O
= 2C NiO M 10–4
+ O2 =2
4Cu i + O2
2N 2FeO
Enthalpie libre standard de formation des oxydes ∆Go = RT lnpO2 (kJ · mol–1 O2)
= 102
300 M + O2
2Fe
10–6
102
400
M
O O M 10–8
2Z
n B Mn M
H 500 =
O2 104
n+
2Z 2 Cr2O 3 M
M = 3
C + O2
4 Cr M B 10–10
600 3 nO
= 2M
+ O2
n iO 2
2M =S
i + O2
700 2 S 10–12
TiO 2 106
=2
O 2
i+
2T
800
10–14
2 Al 2O
3
= 3 106
O2
4 Al +
900 B
3
M gO B 10–16
M 108
=2 Ca
O
+O
2 =2
g O2
1 000 2M a+
2C
M Changement d'état Élément Oxyde 10–18
M
Point de fusion M M 108
1 100 Point de vaporisation B B
1010
10–20
1 200
0 200 400 600 800 1 000 1 200 1 400 1 600 1 800 2 000 2 200 2 400
Température (oC)
1014 1012 1010 10–22
Rapport CO/CO2
Rapport H2/H2O
0K
10–200 10–100 10–70 10–60 10–50 10–42 10–38 10–34 10–30 10–28 10–26 10–24
pO 2
Certaines atmosphères oxydantes sont assurées par des Les métaux peuvent être classés, selon leurs affinités pour
mélanges comme CO/CO2 ou H2/H2O, mélanges dits « oxydo- l’oxygène, en quatre catégories :
réducteurs ». La pression partielle d’oxygène est alors calculée à – les métaux nobles, très faiblement avides d’oxygène et dont
partir des rapports pCO /pCO 2 ou pH2 /pH2O . les oxydes – très peu stables – sont dissociés simplement par
chauffage (tels que l’argent, le platine, l’or...) ;
On peut – grâce à des courbes établies de façon similaire – pré- – les métaux de faible affinité pour l’oxygène dont les oxydes
ciser les valeurs critiques des pressions partielles d’oxygène entre peuvent être dissociés directement par l’hydrogène (par exemple
oxydation d’un métal ou dissociation de son oxyde [5]. cuivre, cobalt, plomb, fer, nickel, etc.) ;
TT
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corSWX
____________________________________________________ CORROSION PAR LES GAZ À HAUTE TEMPÉRATURE DES MÉTAUX ET ALLIAGES RÉFRACTAIRES
TU
Q
TV
Matériaux : résistance à la corrosion et au vieillissement
(Réf. Internet 42373)
1– Matériaux métalliques R
2– Matériaux non métalliques Réf. Internet page
Altération par l'eau des verres borosilicatés. Exemple des verres nucléaires COR450 69
Sur www.techniques-ingenieur.fr
• Saisissez la référence Internet pour accéder directement aux contenus en ligne
• Retrouvez la liste complète des ressources documentaires
TW
R
TX
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corTPQ
R
Professeur à l’université de Limoges
et Stéphane VALETTE
Maître de conférences à l’université de Limoges
TY
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corTPQ
R d’autre part, des liquides : métaux, sels ou oxydes fondus. Le mode de dégra-
dation diffère très sensiblement dans ces deux sortes de milieux, et cela justifie
leur traitement séparé dans la suite de ce dossier.
De façon pratique, la corrosion des céramiques est un problème auquel sont
confrontés de nombreux ingénieurs qui cherchent à fabriquer des produits à
durée de vie la plus longue possible, et au meilleur coût. En production par
exemple, la corrosion pèse sur les coûts au travers de la part « investis-
sement » qui est l’une des composantes de leur prix de revient final : le coût
des investissements répercuté sur le prix des productions est d’autant plus
faible que la durée de vie du dispositif de production est plus longue. Cela
conduit l’ingénieur à rechercher des matériaux ayant une sensibilité à la corro-
sion la plus faible possible. Pour les céramiques, l’échelle de temps est
extrêmement large : la durée de vie d’un poussoir de tuyère de réacteur de
fusée ou de missile s’évalue en minutes, tandis que celle des réfractaires en
verrerie ou sidérurgie (hauts fourneaux) se mesure souvent en décennies.
Au vu de ces deux exemples, le lecteur peut imaginer la très grande variété
des usages des matériaux céramiques concernés par la corrosion, et, naturelle-
ment, la très grande gamme de composition de ces solides (oxydes, carbures,
nitrures, borures...), produits massifs ou revêtements.
Heureusement, la problématique se simplifie car, quelles que soient l’échelle
du temps et la nature des matériaux céramiques, les mécanismes réactionnels
de la corrosion sont relativement semblables et en nombre limité. L’ingénieur
qui connaît bien ces mécanismes au plan théorique est donc à même de
résoudre plus facilement les cas concrets qui se présentent à lui. C’est dans
cette logique que l’on s’attache, dans la suite de ce dossier, à présenter les
principaux concepts théoriques associés à la corrosion des céramiques, en les
illustrant autant que possible d’exemples précis.
UP
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corTPQ
propulsion, mais également pour réaliser les revêtements exté- – les données acquises à l’échelle du laboratoire par des essais
rieurs des engins spatiaux, afin de les protéger lors de la rentrée représentatifs permettant d’identifier les paramètres clés et d’en
dans l’atmosphère. déduire les cinétiques réactionnelles.
L’étude de la corrosion des céramiques à haute température L’association des méthodes expérimentales et des outils numéri-
nécessite : ques est très utile pour aborder ces problématiques avec un
– une approche dite « multi-échelle » (macro, méso, microsco- regard nouveau, donnant naissance à des approches en rupture
pique). À chacune de ces échelles correspondent des phénomènes par rapport aux approches empiriques traditionnelles. Le talon
différents ; d’Achille est sans nul doute la difficulté d’accès aux données
– et une approche appelée « multiphysique » avec éventuel- concernant le comportement des matériaux en température. Les
lement des couplages entre paramètres thermiques, chimiques ou données thermodynamiques et les coefficients des lois cinétiques
mécaniques. (le coefficient de diffusion et l’énergie d’activation pour la diffu-
De nombreuses réactions peuvent contribuer à la corrosion des sion, la perméabilité pour le transport en milieu poreux) font sou-
R
céramiques à haute température. Ces réactions, le plus souvent vent défaut.
hétérogènes, mettent en jeu des phases solides, liquides et
gazeuses :
– lorsque l’une des phases est liquide, la corrosion est généra- 1.3 Aspects thermodynamiques
lement due à des réactions de dissolution (avec ou sans précipi-
tation), à des réactions d’oxydoréduction (par exemple, entre des On a vu en introduction combien la notion de durabilité des
oxydes solides et des éléments métalliques liquides), matériaux céramiques en conditions d’usage est importante dans
d’oxo-basicité (mettant en jeu des sels fondus), de carboréduction les systèmes de production ou pour les machines en exploitation.
ou à des mécanismes réactionnels plus complexes conduisant à la Dès lors qu’il veut concevoir un nouveau procédé, en améliorer un
formation de nouveaux composés ; ancien ou modifier tout ou partie d’un appareillage, l’ingénieur
– lorsque la corrosion implique une phase gazeuse, les méca- procède à une recherche bibliographique approfondie, et/ou à
nismes mis en jeu correspondent à des réactions d’oxydation, de l’étude expérimentale exhaustive du comportement des matériaux
réduction, de dissociation, de volatilisation. candidats, en les plaçant dans les conditions supposées de leur
Dans certaines conditions de corrosion, les céramiques sem- fonctionnement.
blent perdre leur réactivité chimique et devenir inertes. Cette passi- Concernant leur corrosion, la tentation de l’étude thermodyna-
vité résulte de la formation d’une couche stable qui les protège mique, évoquée au paragraphe précédent, est grande car, même si
contre toute corrosion ultérieure. Cela s’observe par exemple avec les banques de données comportent encore quelques insuffisan-
le carbure de silicium (SiC) qui connaît deux modes d’oxydation. ces ou quelques erreurs (cf. fin du § 1.3.1), des logiciels de calcul
Sous pression partielle d’oxygène élevée et température relative- faciles d’accès (Thermocalc [1], T&T Winner [2], Factsage [3]...)
ment faible, il présente l’avantage de se recouvrir d’une couche de fournissent en très peu de temps la nature des produits formés à
silice qui le protège en limitant sa corrosion (cf. § 2.3.1) : le terme haute température sur un matériau céramique donné en fonction
d’oxydation passivante est alors parfois utilisé. En revanche, porté des conditions d’utilisation (température, pression et environ-
à très haute température sous faible pression partielle d’oxygène, nement chimique) lorsque la réaction parvient à son terme.
le SiC est rapidement consommé (régime d’oxydation active) car
tous les oxydes formés sont à l’état gazeux. Un type de représentation thermodynamique très utilisé, obtenu
grâce à ces logiciels, est le diagramme composition-température.
Les calculs sont basés sur la minimisation de l’enthalpie libre des
1.2 Concepts réactions selon la température et la pression. Même pour des sys-
tèmes réactifs simples, ils font appel à des équations souvent
Quel que soit le mécanisme mis en jeu, l’identification et la nombreuses, interdépendantes et non linéaires, si bien que la
compréhension des processus de la corrosion sont le plus souvent résolution de tels systèmes n’a été rendue possible que depuis
délicates : quelques décennies à peine, grâce à l’extension des capacités du
calcul informatique [4] [5].
– les caractérisations effectuées à température ambiante ne sont
pas toujours représentatives de l’état du matériau corrodé à haute
température ; 1.3.1 Diagrammes composition-température
– les dégradations dépendent d’un grand nombre de
paramètres ; Il suffit de fournir au logiciel choisi la quantité et la composition
– l’observation à différentes échelles se révèle indispensable, du solide initial, celles des solides, gaz ou matériaux fondus
mais la mise en cohérence des observations microscopiques et auxquels il est exposé, et la gamme des températures et pressions
macroscopiques est souvent difficile. utiles, pour obtenir un diagramme composition-température four-
Pour identifier les mécanismes, prévoir les dégradations dans un nissant l’état final du système dans un réacteur clos. En particulier,
environnement donné et proposer des solutions, il est nécessaire on peut ainsi savoir à partir de quelle température va se dégrader
d’avoir plusieurs approches simultanées : une céramique donnée, placée dans un milieu hostile connu.
– la pratique de la thermodynamique, au travers des dia- La figure 1 présente, à titre d’exemple, le diagramme
grammes de phase binaires, ternaires..., les diagrammes composition-température du nitrure de titane mis en présence
d’Ellingham, de volatilité et le calcul numérique avec des pro- d’oxygène. Par hypothèse, on a pris comme état initial deux moles
grammes ad hoc, afin de prédire la nature des phases susceptibles de nitrure de titane et deux moles de dioxygène, placées dans un
de se former à l’équilibre ; réacteur clos entre 300 et 1 500 K.
– la mise en œuvre d’études cinétiques, liées au caractère transi-
toire des réactions mises en jeu, pour apprécier les facteurs sus- On constate que la réaction commence à relativement basse
ceptibles d’accélérer ou de ralentir la corrosion ; température (vers 350 K, soit moins de 100 oC), et que le nitrure se
– la prise en compte des microstructures et des caractéristiques dégrade pour donner le dioxyde de titane TiO2 , sans qu’appa-
propres aux céramiques qui sont des matériaux souvent poreux et raissent quantitativement les sous-oxydes (TiO, Ti2O3...), ce qui
polyphasés. correspond à la réaction :
Cette démarche doit également intégrer :
2 TiN(s) + 2 O2(g) = 2 TiO2(s) + N2(g) (1)
– les observations recueillies en conditions d’utilisation réelle ;
UQ
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corTPQ
R 0
0 300 600 900 1 200 1 500
Température (K)
Figure 3 – Schéma en coupe d’un film mince de produit solide
formé par réaction entre une céramique et un milieu hostile
environnant
Figure 1 – Diagramme composition-température du système TiN/O2
donc aux alentours de 100 oC, elle fait barrière entre le gaz réactif
(l’oxygène) et la céramique attaquée (le nitrure de titane), comme
illustré à la figure 3.
∆m/S (mg · cm–2)
UR
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corTPQ
3,5
x y
Al2O3 (s)
Al4C3 (s) 1
10 Al4C3 (s) Al2O3 (s)
3
3
2
Al 2
O
(g
)
2,5
R
0 Al2O (g)
Al (g)
– 10 AlO (g)
1,5
3,5 4 4,5 5
– 10 0 10 20 30
Log PCO (Pa) Log PCO (Pa)
Figure 4 – Diagramme de volatilité de l’alumine en présence de carbone à 2 100 K illustrant les deux mécanismes possibles de formation
du carbure Al4C3 (flèches 1 et 2)
2 Al2O3(s) + 9 C(s) = Al4C3(s) + 6 CO(g) (2) Au-dessus de 1 200 oC, l’oxyde de fer Fe1-xO réagit avec la silice
pour former une solution liquide constituée d’oxydes silico-fer-
ou bien en deux étapes, à des pressions de monoxyde de carbone reux. La composition de la phase liquide est donnée par l’inter-
inférieures à 4,36 Pa, en suivant la flèche 2, soit donc en passant section de la courbe de liquidus du diagramme et de l’isotherme
par l’intermédiaire de la phase gazeuse Al2O, suivant les de température. En théorie, la dissolution devrait s’arrêter une fois
réactions (3) et (4) : que l’équilibre est atteint. À travers cet exemple, on constatera
combien la lecture des diagrammes d’équilibre de phases est riche
d’enseignements utiles qui permettent de dresser des
2 Al2O3(s) + 4 C(s) = 2 Al2O(g) + 4 CO(g) (3)
garde-fous [10].
US
R
UT
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corTPR
Pierres de construction
Natures et mécanismes d’altération
par
et
Gilles MARTINET
Directeur général du Lerm, laboratoire d’études et de recherches sur les matériaux
Bernard QUÉNÉE
R
Directeur général du Lerm, laboratoire d’études et de recherches sur les matériaux
’est écrit dans la pierre... Cette expression dit à elle seule combien, dans
C l’imaginaire, la pierre est un matériau durable par excellence. Sa dureté,
sa résistance viennent apporter, aux écrits, aux lois, aux pensées humaines, le
petit morceau d’éternité dont ils ont besoin. Matériau durable, la pierre l’est
certainement. La pierre d’œuvre, paradoxalement, n’est pas fournie par la
nature. Elle est extraite et façonnée de main d’homme à partir de la roche.
L’extraction de la roche de son milieu d’origine la soumet à une décompres-
sion générale, à un changement d’humidité, de température, d’équilibre
p。イオエゥッョ@Z@ェオゥョ@RPPX@M@d・イョゥ│イ・@カ。ャゥ、。エゥッョ@Z@ェオゥョ@RPQU
UU
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corTPR
UV
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corTPR
R
Figure 3 – Grès en œuvre – Vulcania (Source Pierre Actual)
UW
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corTPR
R
– du point de vue minéralogique, elles sont composées de miné-
raux silicatés, qui sont, pour 80 %, du quartz et des feldspaths, soit
potassiques (orthose...), soit calco-sodiques (plagioclases...). Les
autres minéraux sont très souvent des micas, plus rarement des
amphiboles et des pyroxènes ;
– du point de vue physique, il n’y a pas de vide laissé entre les
cristaux. Leur porosité est donc souvent très faible, voire négli-
geable. La bonne cohésion due à l’engrenage des cristaux induit
également une grande résistance mécanique et une forte durabi-
Figure 5 – Granite en œuvre – Église de La Souterraine (Source Lerm) lité, ainsi que la possibilité de prendre le poli.
UX
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corTPR
sels...). Les améliorations récentes des outils d’extraction de ces Extraites de leur milieu primitif et placées dans un nouvel envi-
roches dures, mais résistantes aux agressions du temps, ont per- ronnement, les pierres subissent ainsi un bouleversement de
mis de développer leur utilisation en marbrerie. l’équilibre physico-chimique dans lequel elles sont placées et qui
assure leur conservation, à l’image d’une cave de vigneron qui
Il est important, à ce propos, de noter que bon nombre de permet le vieillissement du bon vin. Exposées à l’air libre, elles
roches ornementales et de construction portent l’appellation de subissent un ensemble d’actions et de contraintes nouvelles, tant
granit (sans e) en raison de leurs hautes performances méca- environnementales et fonctionnelles, qu’anthropiques, qui peuvent
niques. aboutir à terme à leur destruction rapide.
Mais, il ne s’agit pas forcément de granites au sens géolo- • Il est possible de classer ces actions suivant leurs origines :
gique du terme. – physiques (effets des agents météoriques, tels que l’action du
vent, des pluies battantes, du soleil (ultra-violets, dilatation ther-
Même si cette remarque peut paraître anecdotique, il est impor- mique), de la température (chocs thermiques, gel, etc.) ;
tant de savoir que des inadéquations de définitions existent selon
la source dont elles proviennent : scientifique ou industrielle. Pour
exemple, le petit granit, pierre très renommée en Belgique, est
– chimiques (action des sels, de la pollution atmosphérique, ou
des terrains...) ;
– biologiques, par l’action des bactéries, micro-organismes
R
géologiquement parlant un calcaire dense et compact. divers, végétaux, mousses, lichens... ;
Sur ce même sujet, l’appellation industrielle de marbre concerne – fonctionnelles (exposition, contraintes mécaniques, usure,
tous types de pierres susceptibles d’être polies, alors que pétrogra- effets de parois) ;
phiquement, les marbres correspondent exclusivement à des – anthropiques (actions de l’homme).
roches métamorphiques calcaires.
• Les bâtisseurs de l’antiquité en ont mesuré les conséquences,
puisque des édifices anciens révèlent des actions de remplace-
UY
R
VP
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corTPT
Pierres de construction
Utilisation, études et diagnostics
par Gilles MARTINET
R
Directeur général du LERM, laboratoire d’études et de recherches sur les matériaux
et Bernard QUÉNÉE
Directeur général du LERM, laboratoire d’études et de recherches sur les matériaux
VQ
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corTPT
1. Utilisation des pierres d’emploi déterminés par la fonction de la pierre dans l’ouvrage, et
par la localisation géographique (altitude, périodicité et ampleur
dans la construction des cycles de gel/dégel) de l’ouvrage lui-même.
■ Construire en pierre, s’inscrit parallèlement dans une démarche
■ Le découpage des bassins d’exploitation de la pierre, en France, de développement durable. La pierre est un matériau par nature
est généralement indépendant des unités géographiques ou géolo- écologique. Une part d’énergie minime, est, en effet, nécessaire à
giques. Ainsi, une même région ou un même département peu- son extraction, et non pas à sa fabrication qui, elle, est naturelle.
vent être composés de plusieurs unités géologiques et, à l’inverse, Les déchets de carrière sont le plus souvent retraités et utilisés
une même strate ou un même gisement de pierres peuvent se en granulats. L’eau nécessaire à sa transformation est recyclée, et
retrouver dans plusieurs communes, départements, ou régions. certaines boues récupérées sont utilisées pour les amendements
Des pierres peuvent ainsi avoir des caractéristiques pétro- agricoles. Même dans le cas d’une déconstruction, un bâti en
graphiques similaires ou comparables, mais des noms différents pierre pourrait être recyclé totalement.
Figure 1 – Carrière de pierre calcaire – Pierre des Estaillades – Figure 2 – Front de taille de la carrière de grès de Carcassonne
Oppède (Source Lerm) (Source Lerm)
VR
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corTPT
Figure 3 – Pierre de façade (Source Pierre Actual) Figure 5 – Escalier en pierre (Source Pierre Actual)
VS
R
VT
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corTQU
R
Chargé de recherche au Centre de recherche de Lafarge, Saint Quentin-Fallavier
a réactivité des surfaces de béton est un sujet complexe que l’on peut
L définir par les interactions à l’interface entre la microstructure d’un maté-
riau à base de liant hydraulique et le monde extérieur, celui-ci pouvant être
constitué de différents gaz (CO2 , NO2), d’eau liquide (plus ou moins chargée
en sels), d’agents ou de résidus de décoffrage et d’autres agents agresseurs
(micro-organismes…).
Ainsi, cet article vise à décrire la variabilité des réactions possibles entre la
surface du béton et son environnement immédiat, que ce soit durant son
hydratation et son durcissement ou lors de sa carbonatation et de son vieillis-
sement. Divers exemples seront ainsi décrits dans cet article afin d’expliciter le
type de réaction ayant lieu en surface. Nous avons choisi de séparer ces inte-
ractions en trois types :
– celles résultant des réactions avec l’eau liquide ou avec des ions présents
en solution : phénomènes d’hydratation au jeune âge, de formation d’efflores-
cence après décoffrage, de lixiviation et de décalcification suite à des
expositions récurrentes à l’eau, attaque sulfatique et pénétration des ions
chlorures ;
p。イオエゥッョ@Z@ェオゥョ@RPQT
VU
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corTQU
– celles résultant des interactions avec les éléments du coffrage, comme les
moules et les agents de décoffrage : influences des huiles de décoffrage,
contamination et fonctionnalisation avec certains moules, croissance de port-
landite favorisée par certains tensioactifs ;
– celles résultant des interactions avec l’environnement : carbonatation en
présence de CO2 , dépollution de certains gaz irritants ou toxiques, croissance
de micro-organismes, comme les algues ou les champignons.
Enfin, le dernier chapitre décrira les fonctionnalités apportées par les divers
types de revêtements de protection potentiellement applicables sur le béton.
VV
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corTQU
Figure 1 – Hydratation d’un grain de C3S après quelques heures, la portlandite (plaquettes minces de forme hexagonale) et les C-S-H (fibrilles
buissonnantes très fines) sont visibles au MEB, notamment à fort grossissement (image de droite)
La portlandite (Ca(OH)2) représente, quant à elle, 15 à 20 % du Les mécanismes de formation peuvent être séparés en trois
volume solide d’un béton traditionnel. La portlandite est cristalline phases (figure 2b) :
et précipite essentiellement sous forme de plaquettes hexagonales,
de quelques µm à quelques dizaines de µm de longueur. – Phase 1 : dissolution des ions. La pâte de ciment hydratée
contient des phases minérales ayant une faible mais significative
capacité à se dissoudre dans l’eau. Celle-ci peut ainsi pénétrer
dans le réseau poreux du béton qui va alors se dissoudre partiel-
2.2 Efflorescences à base de carbonate lement.
de calcium
– Phase 2 : migration des ions vers la surface. Lorsque la surface
extérieure est exposée à un air sec, la solution capillaire contenant
Les efflorescences sont des dépôts minéraux de couleur des ions en solution migre vers la surface avant de s’évaporer,
blanchâtre (carbonate de calcium) qui apparaissent à la surface laissant alors les ions s’accumuler graduellement.
d’éléments en béton (cf. image MEB, figure 2a). Les défauts – Phase 3 : précipitation du carbonate de calcium. À l’extrême
occasionnés sont d’ordre esthétique, sans atteinte particulière surface de la peau de béton, le dioxyde de carbone de
de la macrostructure, et sont liés à la présence de chaux libre l’atmosphère se dissout dans la solution capillaire. Le CO2 va
dans la solution interstitielle, aux mouvements d’eau vers la réagir avec les ions calcium et des cristaux de CaCO3 vont alors
surface et aux conditions de séchage [8] [9] [10]. précipiter.
VW
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corTQU
Air Air
Séchage ⇒
CO2 (gaz) précipitation
Ca2+ + CO32–
Film
CO32–,
d’eau → CaCO3 (s)
R
Ca2+ , OH–
Na+ , K+
Ca2+ , OH–
Béton Béton
a b
Figure 2 – (a) Image MEB de cristaux de carbonate de calcium en surface d’un béton et (b) schéma de formation des efflorescences
Efflorescences
de CaCO3
Revêtement
perméable à l’eau
Zone du béton
décalcifiée
100 µm 100 µm
a b
Figure 3 – (a) Images MEB et (b) cartographie en microanalyse X du calcium d’une section polie d’une surface de béton recouverte d’un revête-
ment relativement perméable à l’eau : la précipitation des cristaux de carbonate de calcium est visible en surface du revêtement alors que la
couche externe du béton est clairement décalcifiée
Pour expliciter ces mécanismes, nous pouvons prendre 2.3 Lixiviation et décalcification
l’exemple où un revêtement, relativement perméable à l’eau,
exacerbe les mécanismes responsables des efflorescences après
des surfaces de béton par l’eau
plusieurs mois d’exposition en extérieur (multiples cycles
d’humidification par la pluie/séchage au soleil). La lixiviation des surfaces de béton intervient lors de leur expo-
sition à l’eau de pluie mais aussi lors d’immersions répétées dans
La figure 3 présente ainsi une image MEB en électrons l’eau (bord de mer, bassin de décantation, etc.). Cette lixiviation de
secondaires et une cartographie EDS du calcium ; les observations la peau du béton a pour effet de décalcifier les hydrates (par disso-
montrent clairement les efflorescences à base de carbonate de lution des ions calcium) et d’augmenter la porosité de la zone pré-
calcium qui ont cristallisé en surface du revêtement alors que la sente sous la surface, tout en favorisant la précipitation de
couche externe du béton, située sous la couche de peinture, est cristaux de carbonate de calcium à l’extrême surface (ce dernier
significativement décalcifiée. phénomène s’apparentant aux efflorescences, cf. figure 3).
VX
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corTUP
VY
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corTUP
R fier l’évolution à très long terme des capacités de confinement des produits de
fission dans la matrice vitreuse a conduit à développer une bonne
connaissance des mécanismes d’altération de ces verres malgré la difficulté
inhérente à la quantification expérimentale de très faibles vitesses d’altération.
Après avoir rappelé quelques caractéristiques de base des verres, et en par-
ticulier les verres borosilicatés dont la composition est adaptée au
conditionnement des déchets nucléaires, cet article présente donc la phénomé-
nologie générale observée lors de l’altération à long terme de verres
borosilicatés par des eaux naturelles, puis détaille les mécanismes d’altération
par l’eau de ces verres en soulignant l’influence des différents paramètres
(température, pH, variations de composition des verres et des solutions alté-
rantes) sur ces mécanismes. Il explique enfin comment la compétition entre
les divers mécanismes d’altération conduit à des cinétiques d’altération diffé-
rentes et représentatives des taux de renouvellement des solutions. Sont
également présentées les méthodes expérimentales utilisables pour caracté-
riser les mécanismes et quantifier les cinétiques d’altération des verres.
WP
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corTUP
R
ZnO 2,53 Y 2 O3 0,20 Pr2O3 0,46 duelle d’altération Vr . Pour le verre SON68, elle est très faible, de
4 ordres de grandeur inférieure à la vitesse initiale à 90 oC (environ
ZrO2 2,75 MnO2 0,39 Nd2O3 2,04 20 µm/1000 ans ou encore 1,5 × 10–4 g · m–2 · j–1). À 50 oC, elle est
Fe2O3 3,03 Ag2O 0,03 d’environ 8 µm/1000 ans, soit 6 × 10–5 g · m–2 · j–1.
Ce régime d’altération est considéré comme étant contrôlé par
deux mécanismes concomitants : d’une part la diffusion réactive
technologiques d’élaboration du verre (viscosité de la fonte de l’eau et des éléments mobiles au sein d’une couche constituant
vitreuse) et les qualités fondamentales du matériau (homogénéité, un frein à cette diffusion (verre hydraté et gel plus ou moins
stabilité thermique et cristallisation, durabilité chimique) imposent poreux), d’autre part, la néoformation de phases secondaires pou-
également les proportions de certains de ses constituants. Ces dif- vant se faire au détriment du gel et de son rôle passivant. Le pre-
férentes raisons expliquent que les verres de confinement de pro- mier mécanisme a tendance à induire des cinétiques d’altération
duits de fission se caractérisent par des plages de composition. décroissant en fonction de la racine du temps, le deuxième peut
Selon les compositions des solutions de produits de fission à imposer des cinétiques d’altération constantes ne décroissant pas
confiner, les verres nucléaires peuvent être de type SON (les avec le temps.
quatre éléments majeurs sont les oxydes de base de la matrice Dans le cas où une précipitation importante de phases
borosilicate (SiO2 , Na2O et B2O3) et les oxydes de produits de secondaires intervient, précipitation liée à l’atteinte de conditions
fission) (tableau 1), de type SAN (les quatre éléments majeurs sont de concentrations en solution ou de pH favorables, on peut obser-
alors SiO2 , Al2O3 , Na2O et B2O3) ou de type UMo (les quatre ver un phénomène dit « de reprise d’altération » qui se maintient
éléments majeurs sont alors SiO2 , P2O5 , Na2O ou B2O3 , MoO3). tant que les conditions favorables à ces précipitations prévalent
(conditions extrêmes de pH, de température et/ou de confi-
nement). C’est le cas pour des verres très alcalins ou pour des
2. Phénoménologie générale milieux où des pH très élevés sont maintenus constants du fait de
l’altération des différents matériaux en présence (verres très sodi-
de l’altération des verres ques, bétons et ciments...). C’est le cas aussi pour des verres
riches en Al, dont la stœchiométrie Si/Al est proche de celle de
par l’eau phases secondaires de type zéolithe qui se formeront au détriment
de la formation d’un gel passivant.
WQ
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corTUP
La figure 1 représente les processus qui contrôlent la cinétique Le coefficient de diffusion dépend du pH, de la température, de
d’altération ; ceux-ci se produisent en série ou en parallèle et sont la composition du verre, de la composition de la solution
étroitement couplés. Les blocs bleus représentent les processus altérante : le processus de diffusion est favorisé à pH acide, à tem-
gouvernant le relâchement sélectif des ions, les blocs jaunes repré- pérature élevée, pour des verres riches en alcalins, et, en fonction
sentent les mécanismes d’altération de la matrice vitreuse [2]. Les de la composition du verre, pour des solutions peu chargées en
valeurs de vitesses sont données à titre d’illustration et correspon- alcalins.
dent à celles mesurées pour le verre SON68 à 90 oC. Ce schéma
peut être interprété comme un circuit électrique avec ses résistan- Pour le verre SON68, il a été défini pour des valeurs de pH allant
ces et ses capacités. Dans le cas de mécanismes ayant lieu en de 6 à 10,5 et pour des températures allant de 30 à 90 oC [7]. Il est
parallèle, c’est la vitesse du mécanisme le plus rapide (plus petite donné par l’équation :
résistance) qui contrôle les autres vitesses. Pour les mécanismes
intervenant en série, c’est l’étape la plus lente qui contrôle la
Ea
vitesse globale d’altération. La capacité appelée « saturation de la −
DIRP = D0 [OH− ]n e RT (1)
solution » entraîne une annulation de la voie correspondante
quand la saturation est atteinte.
avec DIRP coefficient de diffusion de l’eau dans l’interphase
réactive passivante (IRP),
3.1 Hydratation du verre n coefficient de dépendance en pH (n = 0,65 ± 0,1),
L’hydratation du verre correspond à la pénétration de l’eau dans Ea énergie d’activation (Ea = 94,7 ± 2 kJ · mol–1),
le réseau silicaté vitreux. Ce mécanisme est étroitement associé au
mécanisme d’interdiffusion et il est rarement étudié comme un D0 constante d’interdiffusion (avec ln (D0 (m2 · s–1)) =
mécanisme à part entière [3]. – 24 ± 1).
WR
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corTUP
R
1,5 1E-2
e = 1 µm
15 min
2,5 h 1E-3
e = 10 µm
1
10 j 1E-4
100 j
1 000 j Épaisseurs 1E-5
d’interdiffusion
1E-6
Figure 2 – Ordre de grandeur du temps d’atteinte de l’état stationnaire en fonction du coefficient de diffusion et de la vitesse d’hydrolyse de la
matrice (d’après [9])
WS
R
WT
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
reRTR
RECHERCHE
Résumé : Les verres peu durables des vitraux du Moyen Âge du Nord de l’Europe
présentent souvent un mauvais état de conservation. Afin de les préserver, une stra-
tégie de recherche, prenant en compte l’environnement atmosphérique et le matériau,
a été mise en place pour comprendre leur altération. La comparaison de verres de
vitraux du Moyen Âge et de verres modèles a été menée. Les principaux résultats mon-
trent qu’à cause des pluies, de la condensation et des polluants, les verres subissent
des modifications structurales qui provoquent leur écaillage et leur fissuration. Après
avoir introduit l’état de l’art dans cet article, les techniques de caractérisation y seront
détaillées, puis seront présentés les résultats principaux. Enfin, seront abordées les
démarches en conservation-restauration.
WU
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
reRTR
RECHERCHE
Points clés
Domaine : corrosion atmosphérique, technique d’analyse
Degré de diffusion de la technologie : Émergence/Croissance/Maturité
Technologies impliquées : microscopies électroniques, spectroscopie, diffrac-
tion des rayons X
Domaine d’application : science de l’environnement, corrosion, conserva-
R tion-restauration
Principaux acteurs français :
• Pôle de compétitivité : université, CNRS, ministère de la Culture
• Centre de compétence : formation des restaurateurs de vitraux (MASTER
CRBC, Sorbonne, Paris 1), formation des restaurateurs et des conservateurs à
l’Institut national du patrimoine (INP), formation des architectes du patrimoine
(école de Chaillot, Paris), CERFAV
• Industriels : verrerie de Saint-Just, groupe Saint-Gobain
Autres acteurs dans la monde : universités, centre de formation des restaura-
teurs (Institut of fine art New York University, University of Antwerp…)
WV
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
reRTR
RECHERCHE
Les objectifs principaux de ces nouvelles recherches sont 3.1 Altération en milieu aqueux
donc de mieux comprendre les mécanismes d’altération se
mettant en place en milieu atmosphérique. En particulier, il est L’altération des verres résulte de réactions de dissolution ;
important de comprendre les premières étapes de l’altération, trois modes sont possibles [21] :
puis son évolution. Cela implique une description détaillée et la – la dissolution congruente a lieu quand tous les élé-
plus précise possible, à différentes échelles, des produits de ments (modificateurs et formateurs) qui composent le verre
corrosion afin de mieux comprendre les mécanismes en jeu et passent en solution (dissolution stœchiométrique) ;
d’identifier le rôle spécifique de chaque paramètre environne- – la dissolution incongruente correspond également à
R
mental. Il est aussi important de comprendre si les produits de une dissolution totale du matériau. Toutefois, le rapport des
corrosion, tels que les phases cristallines, agissent comme éléments en solution diffère de celui du verre en raison de la
agent d’altération en facilitant un développement ultérieur. condensation et la précipitation de phases secondaires, on
La démarche expérimentale adoptée dans cette recherche parle de dissolution/précipitation [22] [23]. Pour les verres
repose sur l’étude comparée des états d’altération de verres riches en silice, ces minéraux seront des alumino-silicates,
de vitraux anciens des XIIIe et XIVe siècles (altération à long généralement des phyllosilicates, smectites et
terme) et de verres modèles (court terme) afin de retracer la palagonites [23] [24] [25] [26] [27] ;
chronologie des différents processus. Les verres modèles ont – la dissolution sélective est caractérisée par une extrac-
été exposés soit in situ, en atmosphère urbaine réelle, soit en tion préférentielle de certains éléments, les modificateurs pos-
laboratoire, dans des enceintes à température et hygrométrie sédant en général les liaisons les plus faibles au sein du
contrôlées. La caractérisation de l’état d’altération de ce cor- réseau. On parle également de processus de lixiviation ou
pus d’échantillons nécessite une approche multi-instrumentale d’interdiffusion.
à différentes échelles (macro-, micro-, nano-échelle) visant à Pour les verres silicatés, les mécanismes de lixiviation et de
décrire les modifications morphologiques, chimiques et struc- dissolution incongruente sont prédominants. La mise en place
turales ayant lieu, à différentes profondeurs, dans la matrice de l’un de ces deux processus dépend principalement du pH
vitreuse. En effet, si l’on considère que les processus d’altéra- de la solution altérante [8] [28] [29] [30] [31] [32].
tion se mettent en place au niveau du réseau à courte dis-
tance (~ 10 Å autour d’un tétraèdre de silice), la La dissolution congruente du verre a lieu en milieu basique
caractérisation à micro-échelle traditionnellement adoptée et est effective sur tous les verres indépendamment de leurs
pour l’étude des verres anciens ne sera pas la mieux adaptée compositions. Ce processus opère directement sur la structure
pour rendre compte finement des processus et des morpholo- vitreuse, lorsque les groupements OH– viennent rompre les
gies d’altération. L’apport de l’étude à nano-échelle permettra liaisons entre les oxygènes pontants et le silicium. Le résultat
entre autre de mettre en évidence les hétérogénéités de est la destruction du réseau vitreux qui peut se manifester,
composition locales inhérentes au verre (présentes au dans le cas des verres de vitraux, par l’apparition de cratères
moment de sa fabrication) ou induites par l’altération, mais et piqûres à la surface du verre.
aussi de mettre en évidence l’influence de l’état de surface La lixiviation ou interdiffusion se met en place préférentiel-
(nano-rugosité). lement en milieu acide. Les cations modificateurs sont peu à
peu extraits de la matrice vitreuse et substitués par les ions
H+ ou H3O+ diffusant depuis la surface du verre [8] [11] [33]
3. Mécanismes d’altération [34] [35]. La lixiviation affecte les verres à forte teneur en
alcalins et alcalino-terreux. Elle entraîne la formation d’une
couche de verre hydraté et désalcalinisé. Toutefois, en milieu
§ Qu’est-ce qu’un verre ? aqueux lorsque l’épaisseur de la couche lixiviée atteint des
valeurs trop importantes, l’interdiffusion des cations peut être
Le verre est un solide non cristallin formé par l’enchaîne- freinée et on observe un ralentissement du processus de
ment tridimensionnel d’unités de base : les tétraèdres de lixiviation [36] [37].
silice. Le silicium est considéré comme un élément forma-
teur ou vitrifiant. En plus du silicium, l’aluminium, le La lixiviation entraîne une modification du pH de la solution
bore, le phosphore, le fer ou encore l’arsenic peuvent agir altérante qui peut mener à la précipitation de phases secon-
comme formateurs du réseau vitreux. daires (des éléments dissous du verre et des éléments de la
solution). Ces trois mécanismes (interdiffusion, dissolution et
Des oxydes d’éléments alcalins ou d’alcalino-terreux, dits précipitation de phases secondaires) sont communs à l’ensem-
modificateurs ou fondants, sont ajoutés lors de la fabri- ble des verres silicatés en contact avec un milieu aqueux [27].
cation du verre afin d’abaisser la température de fusion de
la silice de 1 700-2 000 oC à 1 200-1 500 oC. Leur intro-
duction induit la rupture des liaisons entre tétraèdres et 3.2 Spécificité du milieu atmosphérique
diminue la viscosité du liquide.
L’altération des verres a été principalement étudiée en
La durabilité d’un verre dépend de sa composition
milieu aqueux ; or, les verres de vitraux se situent en milieu
chimique ; en première approximation, celle-ci diminue lors
atmosphérique qui se caractérise par l’alternance de phases
de l’ajout des modificateurs. Pour les alcalins, la réactivité
sèches et humides et de cycle de température.
des verres augmente selon l’ordre suivant : Cs, Rb, K, Na, Li.
Pour en savoir plus sur le verre et sa formulation, le lecteur En période humide, lors d’événements pluvieux, leur alté-
pourra consulter l’article [J 2 296] et les références [19] [20]. ration est vraisemblablement contrôlée principalement par les
réactions de surface décrites précédemment. Ainsi, les proces-
§ Qu’est-ce qu’un verre modèle ? sus d’altération rencontrés semblent être similaires : lixivia-
Un verre modèle est un verre formulé à partir de compo- tion, dissolution avec précipitation de phases secondaires. En
sitions chimiques de verres de vitraux anciens, légèrement atmosphère, l’apport d’eau se fait aussi par le biais de la
modifiées pour une meilleure réactivité en un temps limité. condensation, qui est donc un vecteur d’altération spécifique
du milieu atmosphérique. Les études [13] [38] [39] [40] ont
Ces verres sont fabriqués en laboratoire dans des
démontré que l’augmentation de l’humidité entraîne une
conditions contrôlées et reproductibles.
augmentation de l’altération. Il reste toujours à prouver que
WW
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
reRTR
RECHERCHE
R
[45] et de précipitation de phases secondaires XIVe siècle et collectés sur trois édifices français : l’église
cristallines [43]. D’autre part, ces alternances de phases Saint-Ouen de Rouen (Ou), la cathédrale Notre-Dame
sèches et humides et les cycles de température pourraient d’Évreux (Ev) et l’église Saint-Pierre de Chartres (SP) (cf.
entraîner des stress supplémentaires au sein de la matrice détails dans [65] [66]). En général, pour chaque pièce de
vitreuse et des produits d’altération en favorisant, par verre, deux morceaux différents (a et b) ont été analysés. Les
exemple, l’écaillage. La question reste ouverte à ce jour. verres modèles (VM), de composition similaire aux précé-
dents, fabriqués à la Stazione Sperimentale del Vetro de
Concrètement, l’altération des verres de verrière se traduit Murano (Italie), ont été exposés pendant quatre ans à
par des perturbations des surfaces externe et interne des l’atmosphère urbaine, ou altérés en laboratoire [42] [68].
verres (figure 1) [4] [5] [14] [46] [47] [48] [49] [50] [51].
Le premier stade d’altération correspond, semble-t-il, à la for- L’analyse par MEB-EDS réalisée sur les verres anciens
mation, en surface, d’une couche hydratée et dé-alcalini- (résultats complets présentés dans [65]) montre que les
sée. Les changements des valeurs de l’indice de réfraction, teneurs en SiO2 sont inférieures à 60 %. Les deux cations
notamment, confèrent à cette couche un aspect irisé (Bettem- modificateurs principaux sont le CaO et le K2O. À l’exception
bourg 1989). Le changement de structure du verre au sein de de l’échantillon Ou1a, plus pauvre en K2O (5,1 %) et riche en
cette couche modifiée est parfois considéré comme la mise en CaO (21,5 %), pour tous les verres anciens analysés, les
place d’un gel de silice [52] [53] [54] [55]. Cependant, à pro- concentrations de ces deux éléments sont similaires et
prement parler, le gel se forme soit par recombinaison ou comprises entre 10 et 20 %. En plus des trois cations princi-
re-condensation in situ des éléments hydratés du verre, soit paux, les verres anciens contiennent des quantités non négli-
par précipitation lorsque la solution a atteint la saturation [52] geables d’autres éléments tels que MgO (3 à 8,3 %), Na2O
[55]. Des analyses de ce gel par spectrométrie infrarouge (1,5 à 3,6 %) et P2O5 (0,7 à 4,9 %). Enfin, des plus faibles
montrent la présence de deux types de molécules d’eau : l’un quantités d’Al2O3 (0,7 à 3,5 %) et de MnO (0,5 à 1,6 %) ont
fortement lié au réseau et l’autre libre de migrer [52] [56]. été détectées, ainsi que des traces de Fe2O3 et SO3 (< 1 %).
Des micro-fractures au sein du gel sont observées systéma- Afin de mettre en évidence les relations existantes entre les
tiquement. Du fait de sa structure plus ouverte, permettant le différents éléments constitutifs et également effectuer une clas-
passage de l’eau et des ions, et de la présence de micro-frac- sification des échantillons, une analyse en composantes princi-
tures, la solution altérante peut atteindre directement le cœur pales (ACP) a été réalisée (figure 2) à l’aide du logiciel XLStats
du verre et ainsi le processus d’altération peut se poursuivre. d’Addinsoft. Celle-ci confirme que les éléments les plus caracté-
En plus des fissures, des piqûres et des cratères peuvent se ristiques de ces verres sont K et Ca, car K2O et CaO possèdent
former dans cette couche. Il s’agit de trous hémisphériques tous deux les valeurs de corrélation les plus proches de 1
dont le diamètre varie de moins de 0,2 mm (piqûres) à plus (valeur représentée par le cercle dans la figure 2a). Il existe
de 4 mm (très larges cratères) [48] [49] [51]. une forte corrélation entre la concentration en CaO et celle en
Al2O3 , ce qui semble indiquer que leur présence au sein du
La formation de néocristallisations et d’encroûtements verre est interdépendante. D’autre part, une anti-corrélation
découlent de la migration vers la surface des cations de la entre les concentrations de ces deux éléments et les
matrice lors du phénomène de lixiviation. Des sels (néocristalli- concentrations de MgO et de P2O5 a été mise en évidence. Cela
sations) y sont formés par réaction entre ces cations et les s’explique par le fait que le MgO pourrait remplacer le CaO
anions apportés par les gaz atmosphériques [42] [57] [58] [59] (comme modificateur) et le P2O5 remplacer Al2O3 au sein du
[60]. Ces phases peuvent aussi précipiter au sein des fissures. verre (en qualité de formateur). CaO et Al2O3 sont interdépen-
Il s’agit principalement des carbonates et des sulfates et parfois dants pour les verres du corpus et on leur associe l’axe F1.
des phosphates ou des sulfites [3] [44] [61] [62]. La croissance L’axe F2 est, pour sa part, associé au K2O et au SiO2 dont les
de produits cristallins néoformés en surface peut progresser concentrations sont fortement dépendantes et anti-corrélées.
jusqu’à la formation d’un encroûtement [59] [60]. L’encroûte- La concentration en Na2O semble fortement anti-corrélée au
ment représente un dépôt à la surface du verre. Il s’agit très K2O et CaO. Les oxydes métalliques tels que le MnO et le Fe2O3
souvent de produits d’altération formés par la pollution sont associés à un troisième axe F3.
atmosphérique [5] [46]. À noter que, pour certains auteurs, le
L’ACP permet de classer les vitraux du corpus en trois caté-
terme « encroûtement » ou « croûte d’altération » recouvre à
gories en fonction de leur composition (figure 2b) :
la fois la couche de verre altéré et les produits cristallisés [4]
[5] [50]. Les croûtes superficielles sont surtout observées sur la – des verres silico-calco-potassiques (Ou1) très enrichis en
face extérieure des verrières [50] [63] qu’elles recouvrent par- CaO et en SiO2 ;
fois entièrement [4]. Ces croûtes sont d’épaisseur variable – des verres silico-potasso-calciques (encerclés en vert)
(jusqu’à quelques micromètres), de différentes couleurs et plus enrichis en K2O ;
ou moins cohérentes [48]. D’un point de vue minéralogique, – et finalement des verres possédant des concentrations
ces encroûtements ont la même composition que les phases similaires pour CaO et K2O (rectangle).
néoformées, à savoir des sulfates et de carbonates [4] [5] [6] Cette méthode analytique permet également de rassembler
[14] [50] [64]. On peut observer des phases accessoires : les échantillons provenant des mêmes vitraux (échantillons a et
quartz, feldspaths, silicates de plomb, oxalates de calcium et b) et permet donc une meilleure discrimination des échantillons
apatite [3] [6] [50]. Des particules atmosphériques (suies, cen- en montrant la variabilité de composition au sein d’un même
dres volantes...), ainsi que des éléments provenant de l’envi- verre. Par exemple, le verre Ou2 et le verre Ev2 présentent tous
ronnement immédiat du verre (poussières, fragments de deux une forte variabilité des concentrations de K2O et CaO
maçonnerie...) sont piégés au sein des encroûtements [63]. conjointement, alors que Ev3 ne montre pas une telle variabilité.
WX
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
reRTR
RECHERCHE
a b
c d
La face interne est photographiée en lumière transmise a et en lumière réfléchie b . La face externe est photographiée en
lumière réfléchie c . L’ensemble de ces clichés permet de visualiser l’ampleur des altérations sur les deux faces. Le panneau
9 (XIIIe siècle) présente une altération par cratère en face externe d . Les pièces de restauration sont identifiées par la
présence d’une peinture marron, simulant l’aspect des cratères sur la face externe. Les verres bleus, composant le fond de la
scène, présentent des rayures et des produits d’altération ponctuels.
Figure 1 – Clichés photographiques, effectués suivant une méthodologie détaillée, de la baie 6 du chœur Légende de l’enfant de
Bourges et miracle de Théophile, cathédrale Saint-Julien du Mans (Sarthe)
WY
R
XP
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
amSQUQ
R
Maître de Conférences au laboratoire de Procédés et Ingénierie en Mécanique et Matériaux
Arts et Métiers ParisTech
Jacques VERDU
Professeur Emérite
Laboratoire de Procédés et Ingénierie en Mécanique et Matériaux
Arts et Métiers ParisTech
XQ
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
amSQUQ
XR
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
amSQUQ
Sports Loisirs *
Nous appellons « lent » tout phénomène qui ne peut être appré-
hendé dans une échelle de temps compatible avec les contraintes
Agriculture * *
R
technico-économiques tableau 1 qui nécessite donc le recours à
des essais de vieillissement accéléré et à un modèle permettant Électroménager * *
d’extrapoler les résultats de ces derniers.
Deux catégories de vieillissement peuvent être distinguées : Automobile * *
– le vieillissement physique ;
– le vieillissement chimique. Santé * *
Adduction d’eau *
Nous englobons dans cette catégorie tous les processus de
vieillissement dans lesquels la structure chimique des macro- Aéronautique * *
molécules est préservée.
Nucléaire *
Thermique * *
Photochimique * * *
Radiolytique * *
Radio-oxydant * * *
Hydrolytique * * * (1)
Biochimique * (3) * *
XS
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
amSQUQ
XT
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
amSQUR
Vieillissement chimique
des polymères
Cinétique de dégradation
Par Emmanuel RICHAUD
Docteur Ingénieur
Maître de Conférences au laboratoire de Procédés et Ingénierie en Mécanique et Matériaux
Arts et Métiers ParisTech
R
Jacques VERDU
Professeur Emérite
Laboratoire de Procédés et Ingénierie en Mécanique et Matériaux
Arts et Métiers ParisTech
XU
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
amSQUR
XV
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
amSQUR
O O
On sait que la fragilisation se produit à faible taux de conversion
(s << [E]0). On peut donc utiliser l’approximation classique condui-
sent à :
R C N R' + H2O R C NH2 + HO R'
(3)
R
H
Les équations ci-dessus valent pour tout polymère.
§ Considérons maintenant le cas des polymères linéaires.
Figure 1 – Mécanisme général d’hydrolyse des polyesters et des
polyamides Rappelons que :
(4)
La réaction d’hydrolyse est équilibrée, la réaction inverse étant la 0
polycondensation. Cependant, hydrolyse et polycondensation pré-
dominent dans des domaines de température et de concentration avec MN et MN0 (kg.mol–1) masses molaires en nombre à t et
d’eau différents. On verra que, dans les conditions d’utilisation, la à t = 0,
polycondensation est pratiquement négligeable pour certains poly- ρ(kg.l–1) masse volumique.
mères, comme le PET ou le PC par exemple, alors qu’elle joue un
rôle important pour d’autres polymères, comme le PA11 par exem- et que le nombre de coupures à la fragilisation par chaîne
ple. Un paragraphe est consacré pour chaque cas et un troisième moyenne en nombre initial est :
paragraphe à la cinétique contrôlée par la diffusion de l’eau.
(5)
H2 O H H H
O +O O O
H3 O+ H2O
C O C O +C O C O
+O
H H
H H H
O O O
+
C + O C + O C O
H2O +
O H O H O H
H3O+ H H
XW
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
amSQUR
On voit que la durée de vie est le produit de trois termes : La masse molaire à l’équilibre est donc donnée par :
– (1/kH) est exclusivement fonction de la température ;
– (1/[W]) dépend de l’humidité ou de l’activité de l’eau et à un
degré moindre de la température ;
– le troisième est exclusivement fonction de la structure du poly- (14)
mère.
§ En ce qui concerne le cas des polymères tridimensionnels, on se
contente de considérer le cas de réseaux quasi idéaux à faible taux
de conversion, pour lesquels chaque acte d’hydrolyse entraîne la La résolution complète de l’équation (11) sort du cadre de ce
disparition d’une chaîne élastiquement active (CEA). Soit νA la dossier mais peut être consultée par exemple dans la revue Poly-
concentration en CEA : mer [1].
R
(7) MNe devrait varier avec la température selon la loi d’Arrhenius,
son énergie d’activation apparente étant :
avec ξ =3 dans le cas de nœuds de réseau trifonctionnels,
ξ =1 pour tout autre type de réseau. (15)
On a donc :
(8) avec ER, EH et EW énergies d’activation respectivement de
kR, kH et [W].
En prenant comme critère de fin de vie νA = ν F pour la densité de
réticulation, on obtient : Notons que si la masse molaire d’équilibre MNe est supérieure à
la masse molaire à fragilisation MF, la durée de vie (liée à l’hydro-
lyse) devrait être infinie.
Dans le cas du PA11 par exemple, EH et ER sont de l’ordre de 90
(9) à 100 kJ.mol–1 et EMNe est de l’ordre de 6 500 J.mol–1 [1], autre-
ment dit MNe augmente lentement lorsque la température dimi-
nue. La concentration d’eau à l’équilibre est proportionnelle à
νA0 peut être déterminée par des méthodes physiques (élasticité l’activité a de l’eau :
caoutchoutique…). La démarche est donc la même que pour les [W] = S a
polymères linéaires, mais la définition du critère de fin de vie νF
peut poser des problèmes. avec S coefficient de solubilité de l’eau dans le
polymère.
1.1.3 Hydrolyse réversible Il existe donc une activité limite al telle que, selon l’équation (14) :
D’où : (18)
(12)
Dans le cas de l’hydrolyse non réversible, ([E] ≈ [E]0 = cons-
tante), on peut écrire r(W) = K[W] (pseudo-premier ordre). Dans ce
Dans le cas du PA11 : se << [E]0 et ~AH et HO-B~ sont les seules cas, l’épaisseur de la couche dégradée est quasi-constante et de
extrémités de chaînes, de sorte que : l’ordre de KD telle que [2] :
(13) (19)
XX
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
amSQUS
Vieillissement chimique
des polymères
Physicochimie de la stabilisation
R
par Emmanuel RICHAUD
Docteur Ingénieur
Maître de conférences au Laboratoire de procédés et ingénierie en mécanique et matériaux
Arts et métiers Paris Tech
et Jacques VERDU
Professeur Émérite
Laboratoire de procédés et ingénierie en mécanique et matériaux
Arts et métiers Paris Tech
XY
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
amSQUS
modélisation cinétique permettant de prédire la durée de vie par une voie non
empirique [AM 3 152]. Il se trouve que la plupart des matériaux polymères de
grande diffusion sont relativement instables en présence de rayonnements,
d’agents environnementaux comme l’oxygène ou l’eau, et se dégradent trop
vite pour pouvoir conserver leurs propriétés fonctionnelles pendant une durée
suffisamment longue pour les applications industrielles visées. On leur ajoute
donc des stabilisants dont le rôle est de ralentir les processus de dégradation
pendant la mise en œuvre puis l’utilisation. On peut remarquer que l’utilisation
industrielle de ces polymères n’est devenue possible qu’avec l’emploi de ces
molécules [1]. Lors du développement d’une pièce, on soumet en général plu-
sieurs formulations de polymères stabilisés à un vieillissement accéléré en
On appelle stabilisation toute modification d’un matériau Exemple : les absorbeurs UV pour le vieillissement photochimi-
destinée à augmenter sa stabilité chimique dans des conditions que, les « antirads » pour le vieillissement radiochimique.
données. La stabilisation peut être :
– interne, c’est la structure même du polymère qui est modi- – d’un polymère ;
fiée par copolymérisation, greffage, substitution, etc. ;
– externe ; elle est apportée par des adjuvants généralement Exemple : les savons métalliques ou les organostanniques
incorporés lors de la mise en forme, éventuellement sous pour inhiber la déshydrochloruration du PVC.
forme de mélange maître.
– polyfonctionnels ; il peut s’agir de mélanges de stabilisants
aux fonctions différentes ou de molécules capables d’assumer plu-
La stabilisation interne est essentiellement utilisée pour ralentir sieurs fonctions.
ou inhiber la dégradation thermique des polymères se décompo-
sant par réactions en chaîne. Exemple : le noir de carbone qui agit à la fois comme antioxy-
dant et comme absorbeur UV.
Exemple : de la dépolymérisation (cf. § 2.2 Interrupteurs de
dépolymérisation) .
Les mélanges de stabilisants peuvent être recherchés pour la
Pour les autres cas de figure, même si une grande variété de pro- complémentarité des fonctions, mais également pour d’éventuels
cédés de stabilisation interne a été brevetée, on préfère générale- effets synergiques. Soient deux stabilisants S1 et S2 qui, par
ment la stabilisation externe, plus facile à mettre en œuvre dans le exemple, en même fraction massique x, produisent un effet traduit
contexte industriel. Outre ses propriétés fonctionnelles, un stabili- par les durées de vie respectives t1 et t2 . Soit le mélange S1 + S2
sant externe doit : (à la même fraction massique globale x = x1 + x2), conduisant à la
durée de vie t :
– être suffisamment soluble (miscible) dans le polymère ;
– être efficace en concentration assez faible pour ne pas altérer Il y a synergie si :
les propriétés physiques du polymère ;
– être compatible avec les contraintes économiques ; t > x1t1 + x 2 t 2
YP
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
amSQUS
La synergie peut être exploitée pour l’amélioration de la durabi- Exemple : des acrylates dans le cas du PMMA ou le dioxolane
lité des polymères ou parce qu’elle permet de réaliser des écono- dans le cas du POM [5].
mies en utilisant des quantités plus faibles de stabilisants sans
mettre en cause la durabilité. Ce dernier mécanisme de stabilisation peut alors être schéma-
tisé de la façon suivante.
Dans le cas d’un processus par stades (par exemple, l’hydro-
lyse), chaque acte chimique est indépendant des autres. Il est donc
difficile de stabiliser un polymère par un stabilisant qui serait Dépolymérisation :
consommé dans l’acte de stabilisation car il faudrait autant de
fonctions stabilisantes que de groupements réactifs dans le poly-
R
— (A) p —Ao → — (A) p −1— (A) p −1—Ao + A′
mère. La stabilisation de processus de dégradation par stades ne
peut donc s’envisager que si le stabilisant n’est pas consommé par
Stabilisation :
l’acte de stabilisation ou agit, non sur le motif monomère mais sur
une espèce plus rare jouant par exemple un rôle catalytique
important. — B—(A)p —B—(A)i — A o →
Dans le cas d’un processus en chaîne, dont la longueur de — B—(A)p —Bo (produit stable) + (i + 1) A′ (i étapes)
chaîne cinétique est Λ, tout acte de stabilisation interrompant la
chaîne ou inhibant l’amorçage va bloquer schématiquement Λ
actes chimiques de dégradation. Si Λ est grand, alors le stabilisant
est très efficace. La stabilisation est effective si p (nombre moyen de motifs A)
dans la séquence entre 2 motifs B est tel que :
p << ΛA
YQ
R
YR
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corQPX
Vieillissement physique
des matériaux polymères
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
© Techniques de l’Ingénieur COR 108 − 1
YS
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corQPX
R
E physico-chimiques mécanique + physico-chimie
vieillissement I
Vieillissement Relaxation structurale IP1 « Stress-cracking » en
physique Absorption de solvants EP2 Extraction d’adjuvant en milieu solvant IMi + EP2
(P) milieu liquide IP2 + EP2
Migration d’adjuvants IP2 Chocs hygrothermiques IMi + EP2
Thermo-oxydation Vieillissement
Vieillissement photochimique EC2 chimique
Couplage fissuration
Vieillissement radiochimique EC3 avec perte de oxydation IMi + ECi
Vieillissement
Vieillissement Vieillissementen milieu réactif EC4 de stabilisants IP2 + ECi Vieillissement sous contrainte
chimique
thermique anaérobie IC1 Vieillissement biochimique EC5
(C)
Vieillissement Couplage fissuration
chimique + plastifica- vieillissement chimique IMi + EC4
tion
Vieillissement Fluage/relaxation IM1
mécanique Fatigue IM2
(M) Usure IM3
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
COR 108 − 2 © Techniques de l’Ingénieur
YT
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corQPX
R
On pourra alors déterminer la durée de vie tF telle que lorsque que deviennent alors trop lents pour que cet équilibre puisse être
t = tF, x = 0, c’est-à-dire P = PF : atteint dans l’échelle de temps imposée par la vitesse de refroidisse-
ment. Le matériau se fige alors dans un état métastable que l’on
tF = f −1(0) où f −1 est la fonction réciproque de f. peut schématiser par la figure 1.
Cependant, lorsque tF dépasse quelques années, elle est hors À la température d’utilisation Tu, le matériau se trouve donc hors
d’atteinte des déterminations expérimentales directes, il faut alors de l’équilibre. S’il est le siège d’une certaine mobilité résiduelle,
avoir recours au vieillissement accéléré. Bien entendu se poseront celle-ci va lui permettre d’évoluer lentement vers l’équilibre (repré-
alors les problèmes de la représentativité des conditions de vieillis- senté par la droite ∆ sur la figure 1). C’est ce phénomène d’évolu-
sement accéléré, de la pertinence des lois cinétiques choisis, de leur tion, représenté par le vecteur v sur la figure 1 que nous
domaine de validité, etc. Quoiqu’il en soit, il est question ici d’extra- appellerons vieillissement par relaxation structurale. On en connaît
polation, ce qui exclut l’utilisation de recettes empiriques valables, au moins trois variantes :
seulement, à des fins d’interpolation. — la relaxation d’orientation lorsque le matériau a été figé à l’état
La question de savoir si le vieillissement mécanique appartient au orienté, les conséquences principales étant d’ordre dimensionnel
domaine du vieillissement ou à celui du comportement mécanique (retraits anisotropes) ;
des matériaux ne peut être tranchée de façon totalement satisfai- — la « post-cristallisation », lorsque le matériau a été figé avant
sante sur le plan logique. Dans les cas (par exemple, fluage viscoé- que sa cristallisation ne soit complète, les conséquences étant
lastique) où le comportement à long terme peut être prédit par des d’ordre dimensionnel (retrait) et éventuellement mécanique (aug-
modèles « mécaniques » établis pour décrire le comportement à mentation de module et de contrainte au seuil) ;
court terme (utilisation de lois de relaxation quasi universelles [1], — la relaxation structurale isotrope, commune à tous les verres.
mise en œuvre du principe d’équivalence temps-température [2], Ce dernier phénomène, découvert par Kovacs [8] et popularisé par
utilisation de la transformée de Laplace pour passer du domaine des Struik [9] à la fin des années 1970, est le seul à avoir fait l’objet d’étu-
fréquences au domaine des temps, etc.), les mécaniciens sont les des systématiques.
mieux placés pour traiter les problèmes de prédiction de durée de La relaxation structurale dans les verres polymères peut être
vie. Dans certains cas, cependant, les sollicitations mécaniques décrite, à l’échelle moléculaire, comme la transformation progres-
entraînent des ruptures de chaînes macromoléculaires (processus sive des conformations les moins stables en conformations les plus
mécano-chimiques [3]). Certains auteurs, en particulier de l’École stables. Il en résulte un tassement des chaînes, mais qui n’affecte
Soviétique créée par Zhurkov [4], considèrent alors la rupture que la troisième ou quatrième décimale de la densité. Cependant, le
comme un processus chimique, obéissant aux lois de la cinétique volume libre ainsi « collapsé » contribuait fortement à la mobilité
chimique dans lesquelles la contrainte intervient comme l’un des moléculaire. On va donc observer une variation des propriétés
paramètres thermodynamiques, au même titre que la température. dépendant de la mobilité moléculaire.
D’autres phénomènes de défaillance sous chargement statique peu-
vent être dus à un désenchevêtrement des chaînes par reptation [5].
Il est clair que tous ces cas peuvent être traités aussi bien par des
mécaniciens que par des physico-chimistes. Notons que dès lors
qu’il y a germination et croissance de défauts, le recours à la S
mécanique de la rupture est inévitable. 0
Enfin, il faut mentionner les cas, importants en pratique, de cou-
plage entre vieillissement mécanique et vieillissement physico-chi-
mique. L’endommagement de composites par choc hydrique [6], la
tensio-fissuration de verres organiques (« stress-cracking ») en pré-
sence de solvants [7] et toute une série de phénomènes de vieillis-
sement chimique sous contrainte, restent largement inexplorés car
leur analyse nécessite la maîtrise de concepts appartenant aux deux v
cultures : « mécanique » et « vieillissement ».
Ces aspects ne pourront être abordés que très ponctuellement et
très superficiellement dans les paragraphes suivants consacrés ∆
quasi exclusivement au vieillissement physique. Par contre, une
attention particulière sera portée aux conséquences de ces vieillis- Tu Tf T0 T
sements sur les propriétés mécaniques, en particulier à la rupture.
On peut en effet supposer que les propriétés d’utilisation cruciales Lors d'une diminution programmée de la
(optiques, électriques, thermiques, perméabilité, etc.) varient avec température de T0 à Tu, la structure se fige à la
l’application, mais il n’est pas de cas où la perte de l’intégrité géo- température Tf qui dépend de la vitesse de
refroidissement
métrique de l’objet ou de la pièce, liée à sa fracture, ne soit pas
catastrophique. Or, comme on le verra, des modifications subtiles
de la structure des polymères peuvent suffire à les fragiliser. La fra- Figure 1 – Schématisation de la variation avec la température
gilisation est donc le sujet de préoccupation no 1 des spécialistes du d’une variable S structurale ou thermodynamique liée
vieillissement. à la configuration des chaînes
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
© Techniques de l’Ingénieur COR 108 − 3
YU
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corQPX
R
C transition ductile-fragile.
B
b) Le VRS est fortement autoralenti puisque son « moteur » est la
distance à l’équilibre thermodynamique et son effet est de se rappro-
cher de cet équilibre. En fait, ce dernier ne peut être atteint qu’au-des-
sus de Tg = 50 K. Au-dessous de cette température, le polymère évolue
Tu Tg T0 T constamment, même dans des échelles de temps géologiques.
c) En ce qui concerne le fluage ou la relaxation, on peut appliquer
a variations d’enthalpie H ou de volume v la règle approximative suivante : une augmentation du temps de
vieillissement d’une décade, entraîne un décalage d’une décade de
temps de la courbe de fluage J = f(t) ou de relaxation E = f(t), vers
Cp ou α les temps élevés (avec J complaisance et E module d’Young).
D
d) Le vieillissement peut être « effacé » (on parle alors de rajeu-
nissement) par l’application de contraintes mécaniques d’intensité
0
voisine de la contrainte au seuil de plasticité. Le vieillissement chi-
mique (par exemple par irradiation) ou l’absorption de solvants
entraînent également un rajeunissement.
G La modélisation cinétique du VRS a fait l’objet d’études théori-
ques approfondies, le modèle le plus connu est le modèle
KAHR [10].
A Le VRS est un mode de vieillissement thermique qui peut se
B superposer à d’autres modes (oxydation, perte d’adjuvants, etc.).
On peut le reconnaître aux caractéristiques suivantes :
— le VRS n’entraîne pas de variations de la masse moléculaire et
de la composition ;
Tu Tg T0 T — le VRS n’entraîne pas de variation de masse ;
— le VRS est indépendant de l’atmosphère.
b variations de chaleur massique Cp ou de coefficient
de dilatation volumique α La relaxation d’orientation se produira préférentiellement à T > Tg
dans la phase amorphe. La post-cristallisation se produit seulement
Cycle comportant : une diminution programmée de dans l’intervalle [Tg-TF], TF étant la température de fusion. Comme
température de T0 à Tu, un séjour isotherme à Tu et une
augmentation programmée de température de Tu à T0 .
pour les verres amorphes, le recuit des semi-cristallins se traduit par
l’apparition d’un endotherme mais à une température généralement
voisine de la température de recuit.
3. Vieillissement
Les conséquences pratiques du vieillissement par relaxation
structurale (VRS) sont essentiellement :
par absorption de solvants
— une diminution de la complaisance en fluage (et une augmen-
tation du module de relaxation) ;
— une augmentation de la contrainte au seuil haut de plasticité et 3.1 Définitions et rappels
surtout, une fragilisation plus ou moins importante du matériau.
La méthode de caractérisation la plus fréquemment utilisée pour
Considérons un échantillon de matériau polymère initialement
détecter et quantifier les effets du VRS est l’analyse thermique diffé-
« pur » d’épaisseur L, placé au temps zéro dans un milieu (gazeux,
rentielle dont le principe est illustré sur la figure 2.
liquide ou solide), comportant une seule espèce E soluble dans le
Lorsque l’échantillon, au terme de son séjour à Tu, est réchauffé, polymère, les autres composants du milieu ayant des solubilités
on s’attend à ce qu’il revienne à l’équilibre, c’est-à-dire à l’état caout- dans ce polymère assez faibles pour que l’on puisse négliger leur
choutique/liquide, au point C. En fait, sa mobilité moléculaire ayant effet. En supposant que la pénétration du solvant dans le matériau
diminué, il ne peut réagir dans l’échelle de temps imposée par la n’entraîne pas de réaction chimique, d’endommagement irréversi-
vitesse de montée en température. Il va donc dépasser le point ble ou de dissolution totale du polymère, on va observer une aug-
d’équilibre et y retourner de façon catastrophique, au point D mentation de masse (c’est-à-dire de concentration de E dans le
lorsqu’il disposera de suffisamment d’énergie thermique. Sur le polymère) de l’échantillon selon une cinétique ayant l’allure de la
thermogramme Cp = f(T), le phénomène se traduit par l’apparition figure 3.
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
COR 108 − 4 © Techniques de l’Ingénieur
YV
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
jSYYP
R
des sciences appliquées de Lyon (INSA)
et Patrick GERMAIN
Professeur des universités
Laboratoire de génie civil et ingénierie environnementale (LGCIE), Institut national
des sciences appliquées de Lyon (INSA)
YW
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
jSYYP
R ment des COVSi (Composés Organiques Volatils du Silicium) dans les biogaz.
Ainsi, après une description des matériaux silicones, le lien entre propriétés phy-
sico-chimiques, applications et répartition dans les filières de traitement des
déchets est établi. Puis, après les processus (biotiques et abiotiques) de dégradation
des silicones dans l’environnement, une attention particulière est portée sur leur
devenir selon les compartiments environnementaux dans lesquels ils se trouvent.
YX
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
jSYYP
M D T Q
Classification Structure Classification
chimique schématique physico-chimique
R R R O
Silicone linéaire
R Si O O Si O O Si O O Si O
R R O O Silicone cyclique
mono- Fluide
difonctionnel trifonctionnel tétrafonctionnel
fonctionnel
YY
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
jSYYP
– les gels, fluides silicones légèrement réticulés de façon à obtenues par hydrolyse de chlorosilanes trifonctionnels (motif T)
former un réseau tridimensionnel cohésif, d’une grande souplesse, comme pour la préparation des huiles. Le haut degré de
mais sans forme ni élasticité définies. réticulation s’obtient sous l’action conjuguée ou non, d’un cataly-
seur et de la chaleur. Carette et Pouchol [A 3 475] donnent des
exemples de structures de résines.
Silicones greffés
Par addition de polymères sur ou en fin de chaîne siloxane, 1.3 Application et marché des silicones
de nombreux copolymères peuvent être synthétisés (poly-
mères greffés ou à blocs). Ce sont des matériaux très utilisés
car ils permettent de conserver certaines propriétés exception- 1.3.1 Propriétés exceptionnelles
nelles des silicones, tout en apportant de nouvelles caractéris-
tiques physico-chimiques et thermomécaniques. Par exemple,
R
Les propriétés exceptionnelles des silicones en font des maté-
le copolymère PDMS – PEG (polyéthylène glycol) est un riaux de choix dans de très nombreuses applications industrielles
tensio-actif très utilisé dans l’industrie. Il fait partie de la et domestiques (tableau 1). Ces propriétés sont évidemment bien
famille des polyétherméthylsiloxanes (PEMS). différentes pour une huile non réactive ou un élastomère, mais il
existe des traits généraux dus au squelette riche en silicium et aux
enchaînements Si—O. Les caractéristiques structurales des
1.2.2 Élastomères chaînes siloxanes se situent à trois niveaux [4] :
La vulcanisation correspond à la formation d’un réseau par – au niveau atomique, le groupement Si—O possède une éner-
création de liaisons covalentes ou ioniques (par réticulation) suite gie de liaison plus forte que celles habituellement rencontrées
à l’ajout d’un agent chimique. Les structures vulcanisées sont dans les molécules organiques (liaisons C—C ou C—O). La liaison
généralement préparées à partir de prépolymères linéaires ou Si—O est également très polarisée, du fait de la faible électronéga-
ramifiés de faible masse molaire (issus d’une polymérisation tivité de l’atome de silicium. Ces deux propriétés engendrent une
partielle), en présence d’un catalyseur et parfois sous l’action de la très bonne stabilité thermique et une résistance au vieillissement
chaleur. Ils sont souvent classés en fonction de leur température (UV, O3...) des silicones. En revanche, elles impliquent une sensibi-
de réticulation : les élastomères vulcanisables à froid (EVF) et ceux lité aux attaques acides et basiques ;
vulcanisables à chaud (EVC). – au niveau moléculaire, les silicones se révèlent être une
combinaison inhabituelle d’une chaîne inorganique similaire aux
1.2.3 Résines silicates associée principalement à des groupements apolaires et
hydrophobes (comme les méthyles). Cela leur confère une
Les résines sont des polycondensats présentant, à un degré plus absence de cohésion intermoléculaire et une incompatibilité avec
ou moins avancé, une structure tridimensionnelle. Elles sont les surfaces ou produits hydrophiles ;
QPP
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corQQR
R
Spécialiste « Matériaux »
Délégation Générale pour l’Armement (DGA)
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
© Techniques de l’Ingénieur COR 112 − 1
QPQ
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corQQR
1. Composites à matrice Pour évaluer le comportement à long terme d’une structure CMO
et établir des lois de comportement fiables, il est nécessaire de
organique s’intéresser à chacun de ses composants de manière séparée et de
manière conjointe, sans oublier ses conditions de mise en œuvre.
Cela nécessite de coupler les résultats d’analyse physico-chimique
avec les résultats d’analyse mécanique, et de quantifier les évolu-
La conception et la réalisation de pièces composites à matrice tions des propriétés au cours du temps.
organique (CMO), en particulier de pièces structurales ou de grandes
dimensions, sont un enjeu majeur dans de nombreux secteurs
industriels : transports, génie civil, bâtiment, aéronautique, construc-
tion navale. Les gains potentiels apportés par ces matériaux sont
connus et nombreux : réduction de la masse, intégration de fonc- 2. Vieillissement
tions, réduction des coûts. Or, ils doivent également répondre à des
critères de durabilité sur du long terme et leur utilisation optimale,
des composites
dans des conditions extrêmes d’environnement (température, humi-
dité, pollutions éventuelles) et de sollicitations (chargements statique
à matrice organique
et dynamique), nécessite de se doter d’une méthodologie validée de
caractérisation et de prévision des comportements en utilisation.
Les mécanismes de vieillissement des composites à matrice orga-
Le comportement à long terme des CMO dépend de leur compo- nique (CMO) sont très divers et varient en fonction du polymère, des
sition (matrice, renfort), des additifs (stabilisants, anti-UV, charges conditions de vieillissement comme la température, l’humidité, la
minérales), de la pureté, de la masse moléculaire des monomères, pression d’oxygène, mais aussi en fonction de l’état de référence
de la nature des renforts et de l’orientation des fibres. Pour les maté- (cycle de cuisson, vitesse de refroidissement, contraintes internes),
riaux thermodurcissables, il dépend de la qualité des monomères, des conditions de mise en œuvre [injection, contact, RTM (Resin
du degré de polymérisation ; pour les matériaux thermoplastiques, Transfer Molding…)], de la structure des matériaux (géométrie). Ils
le taux de cristallinité, la morphologie de la matrice influeront sur le n’impliquent pas forcément une dégradation des propriétés
comportement. mécaniques, bien que dans le cas des matériaux composites pour
des applications structurales ce soit ces propriétés qui servent à
définir le dimensionnement pour la certification en service et pour
Le vieillissement peut agir sur chacun des constituants de limiter la durée d’emploi.
manière individuelle ou combinée, mais également à l’interface Des données pour aborder le comportement à long terme des
entre les fibres et la matrice qui est très souvent un lieu privilé- structures monolithiques sont disponibles, mais le problème
gié de dégradation. se complexifie avec le développement de nouvelles matrices
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
COR 112 − 2 © Techniques de l’Ingénieur
QPR
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corQQR
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
© Techniques de l’Ingénieur COR 112 − 3
QPS
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corQQR
2.4 Sites d’action du vieillissement Le comportement au vieillissement des CMO à renfort verre est
amélioré par une optimisation des interfaces (nature des silanes,
introduction de fonctions chimiques permettant d’augmenter la
2.4.1 Vieillissement de la matrice compatibilité avec la matrice, procédé de dépose et de fixation sur la
fibre).
Les mécanismes de dégradation de la matrice sont contrôlés par Les fibres de verre sont sensibles aux environnements acide ou
la nature chimique du matériau, par ses propriétés et par l’agression basique et la nature du verre utilisé doit être choisie en fonction du
à laquelle elle est soumise. Les articles de J. Verdu dans cette collec- milieu d’emploi du CMO. Elles peuvent être sujets à une rupture de
tion des TI [AM 3 151] Vieillissement chimique des plastiques : type fragile : ce phénomène, appelé stress corrosion cracking, pro-
aspects généraux, [AM 3 152] Différents types de vieillissement chi- vient d’une accumulation diffuse de rupture des monofilaments puis
mique des plastiques, [AM 3 165] Action de l’eau sur les plastiques) de la création d’une zone critique se propageant de façon rectiligne.
apportent des renseignements complémentaires sur ce point. La dégradation sous contrainte des CMO à fibres de verre corres-
R Les matrices thermodurcissables (70 % en volume de part de mar- pond en premier lieu à un phénomène de rupture des fibres. L’effet
ché, dont 40 % pour les polyesters et 15 % pour les époxydes [1]) sont combiné des contraintes de traction et de l’humidité conduit à une
des matériaux sensibles aux chocs, ce qui nuit à leur durabilité. Leur rupture différée des fibres par propagation des défauts préexistant à
fragilité est d’autant plus forte que la densité de réticulation est la surface du verre.
importante, et cette dernière augmente avec la thermostabilité du Les fibres de carbone sont surtout sensibles à l’oxydation qui,
matériau nécessitant l’incorporation d’additifs (dopants élastomères, sans protection, intervient pour des températures de 250 à 350 ˚C.
nanomatériaux) pour limiter les contraintes internes et les propaga- À ces températures, une perte des propriétés mécaniques à la rup-
tions de fissures. ture (10 à 30 %) proportionnelle à la perte de masse est constatée.
Cette perte de masse est fonction du titre, du nombre de filaments…
Les matrices thermoplastiques (30 % en volume de part de mar-
des fibres de carbone.
ché, dont 13 % pour les polyamides et 7 % pour le polypropylène
[1]) sont des matériaux qui, au sens de leur durabilité, ont l’inconvé- Les fibres de carbone à haut module (HM) sont moins sensibles à
nient de fluer et d’avoir une tenue au feu limitée. Elles permettent cette oxydation que les fibres à haute ténacité (HR) et présentent
d’obtenir des composites avec une bonne résistance en cisaillement une faible chute de leurs propriétés mécaniques lors de leur
et en fatigue, un bon comportement vis-à-vis de l’environnement vieillissement thermique. Les fibres de carbone de module intermé-
(humidité, milieu agressif) et sont intéressantes du point de vu de la diaire (IM) présentent une stabilité à l’oxydation moyenne.
résistance aux chocs. Dans le cas de vieillissement thermiques des CMO à renfort
carbone, le vieillissement de la fibre (acceptable pour des
températures < 250 ˚C) est négligé dans les modèles de prévision
2.4.2 Vieillissement des fibres du comportement à long terme du composite structural [2].
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
COR 112 − 4 © Techniques de l’Ingénieur
QPT
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corQQR
(balsa) ou en nid d’abeille (aluminium ou organique – Nomex). Les and fabrication development), des effets d’accélération du vieillisse-
peaux supportent les contraintes de flexion, de traction et de ment non négligeables pouvant se produire sous ce type de
compression alors que l’âme supporte les contraintes de cisaille- sollicitation.
ment. Ce sont les types de contraintes appliquées, ainsi que leur
intensité, qui déterminent le mode de rupture des panneaux Une démarche pyramidale d’essai de certification des matériaux
sandwiches, ainsi que leur tenue dans le temps. Les caractéristiques (figure 1) permet non seulement de valider un comportement initial
spécifiques de rigidité et de résistance en flexion de ces structures mais également un comportement à long terme. Elle a pour but de
sont particulièrement élevées. démontrer la maîtrise des outils de dimensionnement au niveau de
l’analyse des contraintes et de la prévision de la rupture, en prenant
Pour une meilleure tenue à l’impact de la structure, une âme en en compte les effets de l’environnement, la variabilité des propriétés
mousse est privilégiée tandis qu’une âme en nid d’abeille est choisi des matériaux, les tolérances de fabrication, les conditions d’exploi-
pour des questions de gain de masse ; dans le domaine de la tation. La certification d’un matériau, et la validation de son
construction navale, des âmes en balsa sont également employées comportement à long terme, n’est acquise qu’après justification des
R
du fait de la très faible densité de ce matériau. caractéristiques en statique, en fatigue et en tolérance aux
La ruine des structures sandwiches est très souvent liée à un dommages.
décollement des peaux. Pour tester leur adhérence sur l’âme et
caractériser la qualité de l’interface, des essais spécifiques de pelage Dans le domaine des satellites, la certification repose sur des
ont été développés. Les industriels de la formulation travaillent modèles qui s’appuient sur des valeurs A de calcul (valeurs au-
actuellement à optimiser les films d’adhésifs permettant de rappor- dessous desquelles on s’attend, avec une confiance de 99 %, à la
ter par cocuisson les peaux sur l’âme, et pour développer des rupture d’au plus 10 % des éléments de la population), et ce sont
résines autoadhésives permettant de limiter le nombre d’interfaces principalement les essais en traction perpendiculaire et en compres-
entre les différents matériaux (peaux d’épaisseur inférieure à sion qui sont dimensionnants. Elle se base également sur une
10 plis), d’homogénéiser la nature de la matrice dans tout le compo- recherche des défauts acceptables (non-propagation lors des sollici-
site et de simplifier les procédures de mise en œuvre. Malheureuse- tations susceptibles d’être rencontrées) dans les structures.
ment ces résines autoadhésives introduisent dans leur formulation Dans le domaine des constructions navales, le dimensionnement
des plastifiants qui réagissent avec les monomères et les durcis- des structures des navires de plaisance est principalement basé sur
seurs des résines, ce qui présente l’inconvénient de diminuer la den- le retour d’expérience (norme NF EN 12215), l’objectif final étant de
sité de réticulation et d’abaisser la température de transition garantir l’étanchéité et l’intégrité de la structure marine quelles que
vitreuse de la matrice, réduisant de ce fait les propriétés et la dura- soient les conditions d’emploi. Dans ce domaine, il est très difficile
bilité lors d’une utilisation en température. de connaître précisément les chargements et le dimensionnement
est basé sur l’expérience. Pour les sous-marins, la structure étant
sollicitée par la pression hydrostatique, c’est son influence sur le
comportement qui est prise en compte et la rupture en flambement
2.5 Vieillissement et dimensionnement qui devient dimensionnante. Une normalisation des procédures au
des structures sein de commissions internationales est actuellement en cours,
mais il est à noter la très grande importance des effets d’échelle qui
complique la problématique de certification et de validation du com-
Les matrices organiques sont des matériaux sensibles à la portement à long terme des CMO.
température et à l’humidité, paramètres qui conditionnent les carac-
téristiques mécaniques à l’état initial, mais également au cours du
vieillissement. Ces caractéristiques mécaniques sont utilisées, ainsi
que leur évolution au cours du temps, dans le dimensionnement des
structures. 3. Méthodologie d’étude
En aéronautique, le dimensionnement des structures lors de la
conception repose sur :
du comportement
— les valeurs de calcul et les valeurs admissibles de à long terme
dimensionnement générées en tenant compte des conditions les
plus sévères de l’environnement (valeurs B de calcul dans une loi de
probabilité normale définies comme étant les valeurs au-dessous La méthode employée vise à définir au mieux les paramètres
desquelles on s’attend, avec une confiance de 95 %, à la rupture pertinents caractérisant l’état vieilli pour établir un lien entre l’évolu-
d’au plus 10 % des éléments de la population) ; tion des propriétés mécaniques et les modifications éventuelles de
— les démonstrations en fatigue communément réalisées sur la matrice dans le composite identifiées par des méthodes physico-
une structure représentative d’un état vieilli (exemple : 60 % du taux chimiques. Le choix de ces paramètres constitue une étape essen-
objectif d’humidité absorbée en fin de service dans certaines certifi- tielle dans la prise en compte des phénomènes couplés.
cations avion).
La prévision du comportement se fait principalement en réalisant
En plus d’une étude statistique des valeurs obtenues, des des essais de vieillissements accélérés qui doivent être aussi
coefficients de sécurité liés aux charges de service (charges limites), réalistes que possible, et en combinant des expositions en tempéra-
aux charges extrêmes, au vieillissement… sont appliquées ; dans le ture avec de l’humidité et des sollicitations mécaniques censées
cadre de la certification des structures aéronautique, les exigences représenter au mieux les sollicitations qui sont rencontrées par le
réglementaires de la JAA (Join aviation authorities) en Europe ou de CMO en utilisation. La propriété qui est suivie plus particulièrement
la FAA aux États-Unis imposent de prendre en compte les conditions est celle qui conditionne son dimensionnement et son utilisation.
d’environnement (température et l’humidité) rencontrées en service
(JAR 25-603 materials). Les conditions d’exposition les plus contrai- La certification en utilisation des CMO nécessite :
gnantes doivent être identifiées et les effets de l’environnement
doivent être évalués sur les propriétés mécaniques en statique, en — de réaliser successivement une caractérisation chimique,
fatigue et sur les raideurs des matériaux à partir d’essais soit accélé- physico-chimique, une étude de la technologie de mise en œuvre en
rés, soit par des retours d’expérience en service (essais naturels) s’appuyant sur la simulation pour qualifier le procédé ;
dans la mesure où les matériaux expérimentés sont représentatifs — de s’intéresser à l’assemblage, à l’analyse de la répartition des
de ceux à tester. Les propriétés lors d’essais de cyclage environne- contraintes et de leur faire subir un ensemble d’essais mécaniques
mental doivent également être évaluées (ACJ 25-603, §4 material susceptible d’aller de l’éprouvette jusqu’à la structure.
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
© Techniques de l’Ingénieur COR 112 − 5
QPU
R
QPV
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corQQS
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
© Techniques de l’Ingénieur COR 113 − 1
QPW
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corQQS
1. Comportement à long terme Une méthodologie d’étude complète et rigoureuse doit être
adoptée pour identifier les plus critiques et mettre en place la pro-
cédure d’essais adéquate (voir article [COR 112]).
La prévision du comportement est très complexe du fait de la Les essais sont menés en ayant recours à des concepts de vieillis-
multitude des matériaux qui existent, de leur combinaison et des sement accélérés (environnement, mécanique), dans des conditions
conditions de mise en œuvre qui contrôlent leur qualité initiale et plus sévères que celles rencontrées en utilisation mais ne modifiant
leur évolution en service (voir article [COR 112]). Ce n’est que par pas les mécanismes d’endommagement, qui permettent de simuler
la connaissance et l’identification précise des défauts présents des comportements sur de très longues durées en les réduisant à
après mise en œuvre ou générés au cours du vieillissement, ainsi quelques mois. Cette approche permet de certifier et d’autoriser
que sur leurs modes de propagation, qu’il est possible de bâtir des l’utilisation d’un nouveau CMO dans un temps raisonnable.
modèles de prévision robustes.
Selon les données disponibles et l’état des connaissances
Le vieillissement d’un matériau, composite ou non, est une acquises, une démarche empirique ou une démarche physique
combinaison d’une multitude de processus, en interaction ou indé- peuvent être adoptées. Toutefois, pour être fiables, les prévisions
pendant, intervenant dans le même temps ou de manière doivent obligatoirement prendre en compte les aspects chimiques
séquentielle. L’évolution d’un COM est très souvent décrite comme et physiques de la dégradation. Cela est particulièrement vrai dès
un ensemble d’actes élémentaires régis par un seul mécanisme. La que les prévisions sont à effectuer sur du très long terme ou dès
connaissance des interactions entre tous ces paramètres est un qu’elles correspondent à des expositions réelles éloignées des
point clé pour la précision des modèles de prévision du comporte- conditions de modélisation.
ment (voir article [Doc. COR 114]).
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
COR 113 − 2 © Techniques de l’Ingénieur
QPX
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corQQS
vieillissement chimique des plastiques et [AM 3 153] Vieillissement jours évalués en première approche. Le troisième paramètre qui va
chimique : modélisation cinétique. influer sur le comportement à long terme des CMO est lié aux
Dans le cas d’une démarche empirique, l’hypothèse que deux contraintes mécaniques appliquées et à leur effet de synergie lors
matériaux ont la même loi cinétique est faite. La loi d’évolution d’une combinaison avec la température ou la présence d’humidité.
s’exprime par des relations simples : La dégradation du CMO, en modifiant la structure de la matrice,
tb2/tb1 = ta2/ta1 en dégradant les interfaces, entraîne une modification des pro-
priétés mécaniques. C’est cet effet qui limite la durée d’utilisation
Une loi mathématique aussi ajustée que possible aux données des structures et qui est pris en compte pour la certification en
expérimentales est recherchée, sans se soucier de la signification service des matériaux structuraux.
physique, et des extrapolations sont réalisées pour prévoir le Les effets de fissuration sous contrainte existent dans les
comportement à long terme. polymères, mais sont exacerbés et de complexité accrue dans le
Dans le cas d’une démarche physique, les phénomènes pré- cas des CMO du fait du caractère hétérogène de leur structure [1]
dominants qui gouvernent le vieillissement sont identifiés et on
s’inspire des lois cinétiques d’évolution pour bâtir un modèle aussi
proche que possible de la réalité. Une loi d’Arrhenius traduira
[2] [3].
R
l’influence de la température sur un mécanisme donné, une loi de 1.5 Comportement mécanique
Fick traduira l’influence de la diffusivité d’un solvant sur la dégra-
dation (voir § 5, article [COR 112]). Les théories de Flory, qui peuvent et durée de vie en service
être reliées à l’état caoutchoutique des matériaux, permettront de
modéliser l’évolution de la structure des réseaux des matériaux. La prévision du comportement, quelle que soit l’application
Vis-à-vis de l’évolution des caractéristiques mécaniques, des lois (aéronautique, marine, automobile, génie civil...) se base sur :
d’évolution des propriétés en fatigue (courbes de Wöhler), de résis-
— l’identification des modes de rupture ;
tance et de propagation des endommagements sont employées.
— la connaissance des contraintes limites et extrêmes qui sont
Pour obtenir des modèles de prévision du comportement à long appliquées ainsi que des contraintes résiduelles au cours du cycle
terme des CMO fiables, il est nécessaire de confronter les résultats de vie ;
avec le retour d’expérience qui doit absolument être capitalisé et
mis en commun. — le comportement en fatigue du CMO.
Pour pouvoir modéliser le comportement à long terme d’un
matériau en considérant l’évolution de ses propriétés mécaniques,
1.3 Incidence du vieillissement il est nécessaire de savoir identifier et caractériser un délaminage,
une rupture de fibre, des contraintes internes qui sont les facteurs
sur les propriétés qui vont conditionner les caractéristiques mécaniques du CMO.
La modélisation et la prévision du comportement sont très Les modes de défaillance doivent être bien identifiés, en parti-
souvent basées sur des évolutions de propriétés mécaniques, ces culier pour les zones avec des concentrations de contraintes
propriétés correspondant aux critères retenus par les industriels et (jonctions, trous...), et la prévision de la rupture est basée sur des
conditionnant, dans de nombreux cas de CMO structuraux, les modèles avec une approche soit globale, soit locale. Une bonne
limites d’utilisation des matériaux. Ce sont ces caractéristiques compréhension de la perte de performance suite à la présence de
mécaniques qui entrent dans le dimensionnement des structures et défauts (tolérance aux dommages) doit être obtenue.
dans leur certification. Dans certains cas, l’aspect (dégradation de
Selon le type de sollicitation mécanique appliqué, les résultats
surface) ou la fonctionnalité (conduction électrique...) peuvent être
sur la dégradation du CMO sont différents ; malheureusement, il
des facteurs limitatifs d’utilisation majeurs.
n’est pas toujours aisé pour une pièce en service de connaître
Il est nécessaire, en plus des propriétés mécaniques, de modéliser précisément les sollicitations qui lui sont appliquées (présence de
le comportement « physico-chimique » celui-ci permettant d’expli- contraintes internes, sollicitations mixtes...), leur intensité et leur
quer les phénomènes observés et étant corrélable à une évolution fréquence.
physique ou chimique du matériau. C’est à partir de la connaissance
de ces évolutions qu’il est ensuite possible d’affiner les modèles et Lors d’essais en température et en immersion dans de l’eau, il a
de donner un sens physique aux dégradations constatées. été montré que la tenue à l’hydrolyse de composites verre/vinylester
était excellente. Toutefois, lors d’essais combinés en appliquant des
Une bonne prévision du comportement à long terme des CMO, contraintes mécaniques, soit à déformation imposée soit à
ainsi que l’élaboration d’un modèle permettant des prévisions contrainte imposée, même faibles, il a également été montré que
fiables, ne peut exister que dans la mesure où une compréhension ces CMO peuvent se dégrader prématurément du fait d’une fissu-
des phénomènes et des mécanismes de dégradation a été faite. ration sous contrainte et conduire à des ruptures catastrophiques
difficilement prévisibles.
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
© Techniques de l’Ingénieur COR 113 − 3
QPY
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corQQS
R
–7
échantillons représentatifs du matériau et de ses conditions de
mise en œuvre. Il peut s’effectuer directement sur des plaques de –8
plus grandes dimensions qui seront utilisées après vieillissement 0 100 200 300 400 500 600 700 800
pour l’usinage des éprouvettes d’essai mécanique. Temps (h)
a courbe de variation de masse en sortie d’immersion (m1 – m0)
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
COR 113 − 4 © Techniques de l’Ingénieur
QQP
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corQQS
Eau
lg vitesse hydrolyse
Gelcoat
5
Premier mat
DEG Deuxième mat
4 DPG Plis suivants
PG du stratifié
NPG
3 Produit hydrolyse
sous pression osmotique
Les produits d’hydrolyse formés (petites molécules organiques)
R
2
s'accumulent dans les défauts de structure et entre les nœuds de
réticulation du réseau. Vis-à-vis de l'extérieur, la matrice forme une
1 membrane semi-perméable qui va permettre le passage de l'eau qui va
diluer les molécules emprisonnées; cette accumulation d'eau va faire
gonfler le défaut conduisant à la formation d'une cloque.
0
Figure 3 – Phénomène d’osmose dans un CMO polyester insaturé
–1
Les CMO à base d’acide isophtalique présentent une meilleure
–2 résistance à l’hydrolyse que les CMO à base d’acide orthophtalique ;
0,0025 0,0030 0,0035 de même le néopentylglycol en tant que diol de condensation
100 °C 70 °C 20 °C permet d’améliorer les performances par rapport à d’autres glycols
1/T (K –1) (propylèneglycol, diéthylèneglycol).
Les CMO de type vinylester à base époxyde présentent une résis-
tance à l’hydrolyse nettement meilleure [5], le phénomène
Matrice ISO/MAA/PG Matrice ISO/MAA/DPG d’osmose n’étant dans ce cas pratiquement plus présent. La vitesse
Matrice ISO/MAA/DEG Matrice ISO/MAA/NPG d’hydrolyse des fonctions ester (méthacrylate plus stable
qu’acrylate) est alors inférieure à la vitesse d’extraction des
Une relation linéaire étant obtenue dans l'intervalle 20 - 100 °C, les molécules formées, et la structure du réseau obtenu est différente
constantes d'hydrolyse peuvent être interpolées dans cet intervalle (réticulation en extrémité de chaîne permettant de limiter les
pour prévoir la dégradation du réseau du CMO polyester insaturé. chaînes pendantes ; réticulation par le styrène conduisant à une
(ISO = acide isophtalique ; MAA = anhydride maléique ; structure plus homogène que dans le cas des polyesters insaturés).
PG = propylèneglycol ; NPG = néopentylglycol ;
DEG = diéthylèneglycol ; DPG = dipropylèneglycol). La corrélation des données gravimétriques avec une analyse
physico-chimique poussée du CMO permet d’établir des modèles de
prévision du comportement relativement fiables, en sélectionnant
Figure 2 – Influence de la température sur la vitesse d’hydrolyse les paramètres du réseau thermodurcissable les plus critiques
vis-à-vis de l’eau (vitesse d’hydrolyse des fonctions ester, vitesse
d’extraction des produits d’hydrolyse).
vitreux), le gonflement par l’eau abaissant la température de
transition vitreuse ; les mécanismes de dégradation ne sont pas 2.1.2 Vieillissement thermique
identiques à l’état vitreux et à l’état caoutchoutique.
La perte de masse en fonction du temps est enregistrée pour des
De manière à établir une prévision de durée de vie des maté- vieillissements effectués en isotherme à différentes températures.
riaux, la vitesse de perte de masse v en fonction du temps est Dans le choix des températures, il faut veiller à ne pas tester le
modélisée en utilisant une loi d’Arrhenius (figure 2) : CMO avec des états de la matrice différents. Une attention parti-
culière au facteur de forme de l’éprouvette doit être apportée,
– Ea
冢
v = A exp -----------
RT
- 冣 celui-ci ayant une importance prépondérante sur la cinétique de
dégradation (voir § 4.1.4 et § 5.1.4, article [COR 112]).
∆m
avec v = -----------
m0 2.1.2.1 Vitesses de dégradation
Les vieillissements accélérés en isotherme sont réalisés en étuve
2.1.1.2 CMO à fonctions chimiques hydrolysables : ventilée. Pour chaque température, une courbe de perte de masse
phénomènes d’osmose en fonction de la durée d’exposition est tracée et permet de
Le vieillissement en milieu humide des CMO, susceptible de modéliser le comportement. La perte de masse ((m 1 – m 0 )/ m 0 )
libérer rapidement des petites molécules dans sa matrice, peut doit résulter de la moyenne sur au moins trois échantillons
conduire à des phénomènes de dégradation dramatiques. Par prélevés simultanément (figure 4).
exemple, les polyesters insaturés possèdent dans leur structure En général, les matériaux thermostables sont particulièrement
macromoléculaire des fonctions esters qui sont susceptibles, en sensibles à l’humidité et demandent à être conditionnés en étuve
présence d’eau, de s’hydrolyser. Cela conduit non seulement à des jusqu’à désorption complète avant d’être soumis au vieillissement
coupures du réseau thermodurcissable, mais également à la libé- thermique. Dans le cas contraire, les résultats obtenus sont non
ration de molécules solubles (glycols, extrémités de chaînes) dans reproductibles et difficilement interprétables, et les échantillons
le matériau conduisant à des phénomènes d’osmose. Le CMO sous risquent de subir des contraintes internes fortes conduisant à des
l’effet de la pression osmotique développe des cloques ce qui délaminages lors de leur exposition en vieillissement. Ce phéno-
conduit à des phénomènes de délaminages du composite mène est particulièrement marqué dans le vieillissement des
(figure 3) [4]. résines polyimide [6].
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
© Techniques de l’Ingénieur COR 113 − 5
QQQ
R
QQR
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
amUSRR
Outils de modélisation
R
par Marco GIGLIOTTI
Ingénieur de l’Université de Pise (Italie)
Docteur en Mécanique du Solide de Nationale Supérieure des Mines de Saint-Éienne
Maître de Conférences (HDR), Université de Poitiers et ISAE-ENSMA Poitiers
Jean-Claude GRANDIDIER
Docteur en Mécanique de l’Université de Metz
Professeur, ISAE-ENSMA Poitiers
Marie Christine LAFARIE-FRENOT
Docteur ès Sciences Physiques de l’Université de Poitiers
Professeur, Université de Poitiers et ISAE-ENSMA Poitiers
1. Contexte..................................................................................................... AM 5 322 - 3
2. Outils de modélisation du vieillissement des CMO....................... — 4
2.1 Présentation de la modélisation ................................................................ — 4
2.1.1 Généralités sur la modélisation ........................................................ — 4
2.1.2 Hypothèses et échelles de modélisation.......................................... — 5
2.1.3 Domaine d’application....................................................................... — 5
2.2 Équations de bilan ...................................................................................... — 6
2.2.1 Définition d’un système évoluant dans le temps ............................ — 6
2.2.2 Évolution temporelle de la propriété d’un système........................ — 7
2.2.3 Évolution temporelle de la masse volumique d’un système
et bilans mécaniques .................................................................................. — 8
2.3 Cadre thermodynamique : thermodynamique
des processus irréversibles TIP ................................................................. — 10
2.3.1 Proche équilibre.
Thermodynamique des processus irréversibles TIP................................ — 10
2.3.2 Approche hors équilibre. Thermodynamique
à variables internes TIV .............................................................................. — 11
2.3.3 Systèmes soumis à des réactions chimiques
et à des processus de diffusion ................................................................. — 12
2.3.4 Conclusion .......................................................................................... — 13
2.4 Limites de la présente approche et approches alternatives.................... — 14
3. Conclusion................................................................................................. — 15
Pour en savoir plus .......................................................................................... Doc. AM 5 322
QQS
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
amUSRR
QQT
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
amUSRR
dαl /dt
1/s
vitesse de variation de la variable
interne l
Un matériau composite à matrice organique (CMO) peut être
considéré comme un matériau/structure : il devient donc primor-
R
potentiels (ou fonctions) de dissi- dial de pouvoir prévoir ou certifier la durabilité des CMO en fonc-
D, D* J/(m3.s)
pation tion du vieillissement de leurs matériaux constitutifs (matrices
e J/kg densité massique d’énergie interne polymères, fibres, interphases,…).
Les difficultés liées à la caractérisation expérimentale des phéno-
– tenseur de déformation mènes de vieillissement (type d’essai, type de conditionnement,
type d’éprouvette), à la détermination de conditions d’accélération
E J énergie interne
de ces essais et à la « mesure » des durées de vie des CMO contri-
– gradient de la transformation buent ultérieurement à complexifier les travaux de recherche dans
ce domaine. Les organismes de certification européens (JAA) ou
J – Jacobien volumique américains (FAA) ont imposé des normes pour le dimensionne-
Mi ment des structures en CMO permettant de prendre en compte les
kg/mol masse molaire de l’espèce i
conditions environnementales de service et fixant les conditions
ni – titre massique de l’espèce i d’accélération des essais de vieillissement (norme JAR 25 – 603,
[AM5320]) : la plupart de ces normes sont pragmatiques, basées
J/(m2.s) flux de chaleur sur le retour d’expérience, et il est clair qu’une compréhension fine
des mécanismes ayant lieu pendant les processus de vieillisse-
q J/(m3.s) source de chaleur
ment est nécessaire pour pouvoir les élargir et les compléter.
s J/(kg.K) densité massique d’entropie L’exemple du vieillissement humide est très significatif, l’absorp-
S J/K entropie tion d’eau, souvent réversible, induisant une baisse des propriétés
mécaniques des CMO. Partant du principe qu’un CMO exposé à un
T K température environnement humide atteint souvent un état de saturation et que
la baisse de ses propriétés peut être assez bien caractérisée, les
N/m2 tenseur des contraintes (de Cauchy)
normes suggèrent de prendre en compte directement dans le
dimensionnement la chute des propriétés à saturation. Cette pro-
u m vecteur déplacement cédure ignore ouvertement les phases transitoires (ou cycliques)
du conditionnement et les mécanismes de dégradation qui ont lieu
v m/s vecteur vitesse pendant ces phases [4], en particulier le développement de gra-
dients de contraintes et de propriétés, normalement absents dans
V m3 volume
un état dit saturé, qui peuvent interagir de façon complexe avec les
wj mol/(m3.s) vitesse de la réaction j sollicitations mécaniques. La maîtrise des phénomènes de dégra-
dation associés à ces conditions d’utilisation nécessite la mise en
ρ kg/m3 masse volumique
place d’approches multiphysiques et multi-échelles, à la fois expé-
ρi kg/m3 masse volumique de l’espèce i rimentales et théoriques, et soulève des questions scientifiques,
ψ J/kg énergie libre spécifique (d’Helmoltz) autres que technologiques, de grande ampleur et complexité.
µi J/kg potentiel chimique de l’espèce i Un point de départ pour aborder le sujet consiste en l’énuméra-
tion des phénomènes de vieillissement ayant lieu dans les CMO.
En suivant la schématisation adoptée par Fayolle et Verdu
[AM3150], trois principaux types de vieillissement peuvent être
identifiés pour un CMO :
1. Contexte – le vieillissement physique, pendant lequel il n’y a « pas d’alté-
ration de la structure chimique des macromolécules, seule la confi-
guration spatiale ou la composition du matériau sont affectés »
D’après Fayolle et Verdu [AM3150], on appelle vieillissement [AM3150]. A ce type de vieillissement peuvent se ramener (même
tout phénomène d’évolution lente et irréversible de la micros-
si ce n’est pas toujours le cas) les phénomènes d’absorption et
tructure et/ou de la composition d’un matériau sous l’effet de
désorption d’humidité dans les résines polymères ;
son instabilité propre, de l’interaction avec l’environnement, de
sollicitations mécaniques ou de la combinaison de plusieurs de – le vieillissement chimique pendant lequel une « modification
ces causes (on parle alors de couplages). de la structure chimique des macromolécules » [AM3150] a lieu. À
ce type de vieillissement appartiennent des phénomènes tels que
Selon Mortaigne [AM5320], la durée de vie est le temps pen- la thermo-oxydation des matrices organiques, l’hydrolyse et la
dant lequel le matériau, ou plus précisément une de ses pro- post-réticulation des résines polymères ;
priétés, va conserver sa fonctionnalité dans des conditions bien
– le vieillissement mécanique, comprenant les phénomènes de
définies.
fluage-relaxation et de fatigue.
QQU
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
amUSRR
Pour l’interprétation de ces essais et pour la compréhension des La définition de modèle donnée dans la référence [6] devrait
phénomènes en jeu, des modèles doivent être mis en place, aux être une guide pour le modélisateur : « un modèle représente
échelles correspondantes : pour le développement de ces modèles, une tentative de décrire un phénomène par abstraction en met-
plusieurs niveaux de complexité peuvent être envisagés. tant de coté les détails inessentiels dans le but d’illustrer mais
– Des approches ingénieurs, parfois des simples « régressions » aussi de prédire. Dans la mesure du possible, un modèle doit
de données expérimentales, peuvent dans certains cas permettre être réaliste, cohérent, simple, pas en conflit avec les phénomè-
l’extrapolation du comportement du matériau à des situations qui nes et non auto-contradictoire ».
n’ont pas été testées et la proposition d’essais de dégradation
accélérés : il s’agit d’approches souvent valables pour un seul type
de matériau et pour un seul cas d’essai. En principe, un modèle doit permettre la prédiction de nouveaux
– Si une compréhension plus fine est souhaitée, qui soit facile- phénomènes et la mise en place de nouvelles solutions à des pro-
ment généralisable à différents types de matériau et de vieillisse- blématiques données (nouveaux matériaux, structures…). En
ment, et qui puisse permettre des véritables prédictions, des d’autres termes, un modèle devrait être suffisamment complexe
approches plus sophistiquées doivent être envisagées. La pour pouvoir représenter correctement la réalité des phénomènes
modélisation dite « physico-chimique » privilégie une interpréta- observés et – en même temps – suffisamment simple et maniable
tion cinétique/mécanistique des phénomènes de vieillissement, en pour permettre son emploi dans la conception et l’optimisation. Un
décrivant en détail les réactions chimiques ayant lieu pendant les bon modèle devrait également être assez général pour assurer la
processus de dégradation et les équations cinétiques associées. description d’une pluralité de phénomènes, apparemment diffé-
Plusieurs modèles mécanistiques ont été proposés dans la littéra- rents.
ture (voir, entre autres [AM3150]) pour décrire le vieillissement En effet, plusieurs niveaux de modélisation sont possibles.
QQV
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
amUSRS
Vieillissement de matériaux
composites à matrice organique
Cas d’études
R
par Marco GIGLIOTTI
Ingénieur de l’Université de Pise
Docteur en Mécanique du solide de l’École Nationale Supérieure des Mines de Saint-Étienne
Maître de conférences (HDR), Université de Poitiers et ISAE-ENSMA
Jean-Claude GRANDIDIER
Docteur en mécanique de l’Université de Metz
Professeur à ISAE-ENSMA Poitiers
et Marie Christine LAFARIE-FRENOT
Docteur ès sciences physiques de l’Université de Poitiers
Professeur, Université de Poitiers et ISAE-ENSMA Poitiers
QQW
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
amUSRS
R
Si l’on écarte les composites à fibres végétales, c’est surtout pour
Glossaire
les matrices et pour les zones interface/interphase qu’il est opportun
Vieillissement Modifications structurales diminuant de développer des outils de caractérisation, à différentes échelles.
progressivement l’aptitude d’un matériau, L’aspect physico-chimique doit être pris en compte lors de ces
d’un composant caractérisations et des véritables approches multi-physiques doi-
à assurer ses fonctions. vent être mises en place. Il ne faudra pas oublier que, en présence
de phénomènes de diffusion de substances au sein d’un matériau,
Durée de vie Temps au bout duquel une ou plusieurs des gradients (de concentration, de propriétés physiques et
propriétés ou fonctionnalités sont conservées mécaniques) ont tendance à se développer à partir des surfaces
exposées à l’environnement vers le cœur du matériau.
Durabilité Pour certains, synonyme de durée de vie. Définit
la période d’utilisation d’une structure, en général Parmi les moyens de caractérisation les plus intéressants pour le
imposée par le maître d’œuvre. La durabilité suivi de la dégradation des matériaux composites, on peut citer les
d’une « structure composite » dépendra de essais de gravimétrie. Il s’agit d’une technique peu coûteuse qui
l’environnement dans lequel elle se trouve, du permet de détecter facilement tous les phénomènes de prise ou de
niveau et des évolutions au cours du temps, de perte de masse associés au vieillissement, et liés à l’absorption et la
son chargement mécanique, de la façon dont elle désorption de substances (liquides, gaz...), aux réactions chimiques,
a été réalisée et des matériaux utilisés aux phénomènes d’érosion, de dégazage. Expérimentalement, les
échantillons sont initialement séchés puis exposés à un environne-
Matériau Matériau hétérogène formé d’au moins deux ment contrôlé, et l’évolution de leur masse est suivie au cours du
composite constituants non miscibles, disposés selon une temps. Dans certains cas, les vitesses de prise ou de perte de masse
à matrice organisation géométrique particulière : des suivent une loi de type Arrhenius du fait de leur activation
organique renforts, prenant généralement la forme de fibres thermique : dans ces cas, la température devient le paramètre pilo-
ou de particules, qui assurent l’essentiel des tant l’accélération des essais de vieillissement. Les essais de gravi-
propriétés mécaniques du composite ; une métrie donnent accès à des informations moyennes concernant la
matrice polymère (thermodurcissable ou diffusion/réaction de substances au sein d’un matériau.
thermoplastique) dans laquelle sont noyés les Les moyens spectroscopiques (infrarouge, résonance magnéti-
renforts, permettant la cohésion de l’ensemble et que nucléaire, Raman) permettent l’analyse de la structure chimi-
le transfert des efforts que à la fois des produits de départ (monomères) et des réticulats :
le suivi de ces structures donne accès aux mécanismes de dégra-
dations physico-chimiques ayant lieu pendant le vieillissement, à
l’échelle du réseau polymère, et peut dans certains cas permettre
1. Contexte la détermination des profils de concentrations des solvants et de
leurs gradients.
Mortaigne [AM 5 320] et [COR 113] présente les méthodes de Les moyens d’analyse thermique (analyse enthalpique différen-
caractérisation et les démarches de modélisation pour le vieillisse- tielle, analyse thermomécanique et thermogravimétrique) permet-
ment, la dégradation et le comportement à long terme des CMO, tent la caractérisation des propriétés physiques (phénomènes de
en soulignant qu’une prévision satisfaisante de ce comportement relaxation, températures de transition) d’un échantillon de maté-
(ainsi que le développement d’une modélisation pertinente et fia- riau, à une échelle qui est donc assez macroscopique par rapport à
ble) ne peut pas avoir lieu que « dans la mesure où la l’ordre de grandeur des chaînes macromoléculaires.
compréhension des mécanismes de dégradation a été faite ». En Les moyens optiques et microscopiques (MEB, MET, microsco-
particulier il a été constaté que : pie optique...) permettent de caractériser la dégradation des rési-
– les fibres (à l’exception des fibres organiques) sont générale- nes ou des composites, par exemple, à travers une observation
ment peu concernées par les mécanismes de vieillissement ; les directe des mécanismes de fissuration (longueur, type de fissure)
fibres de carbone, utilisées dans l’aéronautique, sont sensibles à et d’endommagement ayant lieu dans les endroits les plus sensi-
l’oxydation, pour des températures supérieures à environ 300 oC ; bles à l’action du vieillissement (interfaces fibre/matrice...). La
– les matrices (thermodurcissables et thermoplastiques) sont microscopie confocale interférométrique – basée sur les principes
généralement le siège de l’attaque du milieu environnant et peu- de l’interférométrie de Michelson – donne accès à la mesure quan-
vent subir des phénomènes de dégradation assez conséquents, titative des gonflements ou des retraits locaux (à l’échelle micros-
même aux basses températures. Les interfaces fibre/matrice et les copique) associés aux réactions chimiques ayant lieu pendant la
éventuelles zones interphases (à proximité des fibres) sont égale- dégradation (hydrolyse, départ de substances volatiles...).
ment sensibles aux agressions extérieures et peuvent constituer Les essais mécaniques permettent de caractériser les principales
les sites d’amorçage des premiers endommagements (décohé- propriétés du matériau et leur évolution au cours du vieillissement.
sions à l’interface fibre/matrice, microfissures...). Généralement, ces essais ont lieu à l’échelle d’un échantillon de
QQX
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
amUSRS
matière – échelle essentiellement macroscopique – et sont donc pérature que de vols. Un autre exemple est celui de cyclage ther-
capables de capter les effets moyens (ou « moyennés ») de la mique induit par le passage de vol subsonique à supersonique. Un
dégradation sur le comportement mécanique du matériau, sans cyclage thermique induit donc dans un matériau composite strati-
pouvoir accéder à la mesure de gradients. On pourra citer, entre fié, des contraintes thermomécaniques cycliques analogues à cel-
autres, les essais de fatigue, de microfissuration, de fluage/relaxa- les d’une « fatigue thermomécanique » [3] [4] [5] [6].
tion, de cisaillement interlaminaire (RCIL), d’impact.
Pour les CMO, l’emploi de stratifiés modèles (plaques [0/90]s
croisées, plaques [0/90] asymétriques) permet de caractériser 2.1 Caractérisation expérimentale
l’impact du vieillissement sur la réponse mécanique de la structure
composite mais peut également donner accès – à travers la modé- Les méthodes expérimentales pour la détermination des
lisation – au comportement intrinsèque du matériau. contraintes résiduelles d’origine thermique sont peu nombreuses,
et difficiles à mettre en œuvre. De plus, elles sont réalisées sur des
Les essais de nano ou ultra-micro indentation permettent de
« éprouvettes » modèles qui ne sont pas toujours représentatives
R
caractériser le comportement in situ du matériau, à l’échelle de
des histoires thermiques que verront les pièces composites lors de
quelques micromètres (la taille d’une empreinte d’indentation) : à
leur consolidation. On trouvera une revue très documentée des dif-
une échelle comparable se situent les essais de taping et de micro-
férentes méthodes expérimentales dans [7].
fissuration.
Pour l’interprétation de ces essais et pour la compréhension des Pour les stratifiés composites à fibres continues, on trouve
phénomènes en jeu, des modèles doivent être mis en place, aux essentiellement deux méthodes :
échelles correspondantes. Des modèles simplifiés (approches – la méthode du trou incrémental [8] [9] [10] [11] ;
« ingénieurs ») peuvent être employés, mais si une compréhension – la mesure de flèches de stratifiés asymétriques [12] [13] [14]
plus fine est souhaitée, qui soit facilement généralisable à diffé- [15].
rents types de matériau et de vieillissement, et qui puisse permet-
tre de véritables prévisions, des approches plus sophistiquées
doivent être développées. En particulier, lorsque l’on souhaite 2.2 Modélisation
appréhender tous les couplages ayant lieu pendant le vieillisse-
ment, et gérer de façon raisonnable la présence simultanée de Le point de départ pour la description du couplage thermoméca-
nombreux champs physiques assez différents, une modélisation nique est représenté par le bilan local de l’énergie interne, en
mécanique/thermodynamique doit être privilégiée, car elle permet l’absence de sources (cf. équation (34) dans [AM 5 322]) :
une vision synthétique de ces couplages, tout en imposant le res-
pect d’un certain nombre de principes fondamentaux (admissibilité de
thermodynamique, stabilité...) pour les processus en jeu. ρ + ∇ · jcond [E ] = 0 (1)
dt
L’étude des couplages thermomécanique, diffuso-mécanique,
thermo-chimico-mécanique des CMO est abordée aux jcond [E ] = q
paragraphes 2, 3 et 4 de cet article : pour chaque type de couplage
les étapes de caractérisation expérimentale, modélisation, identifi- La signification des symboles utilisés est précisée dans
cation et simulation sont présentées, en s’appuyant sur les référen- [AM 5 322].
ces bibliographiques existantes et, en partie, sur les travaux de Il a été noté que, en règle générale, la dissipation peut dépendre
recherche conduits par les auteurs. des gradients de température, des variables internes (dissipation
mécanique), des affinités (par exemple dans le cas de réactions
chimiques). Si, par hypothèse, la dissipation est liée uniquement
aux gradients thermiques
2. Couplage
1
thermomécanique D * = D *(−∇T ) = (− ∇T ) · BT (−∇T )
2
(2)
Dans le domaine aéronautique, l’utilisation de stratifiés le flux jcond[S ] peut être exprimé par (cf. équation (49)
composites constitués de plis unidirectionnels de fibres continues dans [AM 5 322]) :
et de résine polymère est très répandue, de par leurs bonnes pro-
priétés mécaniques spécifiques et leur excellente résistance à la q ∂D *
jcond [S ] = = = − BT (∇T ) → q = − T BT (∇T ) = − L (∇T ) (3)
fatigue. Cependant, les fibres et la matrice d’une part, les plis uni- T ∂ (− ∇T )
directionnels d’autre part, présentent des valeurs de caractéristi-
ques thermoélastiques très différentes et fortement anisotropes. Cette relation exprime la loi de Fourier et L est le tenseur de
De ce fait, des variations de température induisent, par dilatations conductivité thermique, en général dépendant de la température.
thermiques différentielles empêchées, des contraintes, intra et Dans le cas où e = cVT, cV étant la chaleur spécifique à volume
inter-laminaires qui peuvent être importantes. La première constant, l’équation (1) devient :
conséquence de ce couplage thermomécanique est la création de
contraintes résiduelles d’origine thermique lors du refroidissement dT
des pièces à partir de leur température de consolidation, ρc v = ∇ · [L (∇T )] (4)
dt
contraintes résiduelles que les élaborateurs cherchent à minimiser,
en particulier par l’optimisation des cycles de fabrication. Ces qui est une forme simple de l’équation de la chaleur. Dans le cadre
contraintes seront d’autant plus grandes que la température de des petites perturbations et dans l’hypothèse que le comportement
cuisson sera élevée, ce qui est le cas pour certains thermo- du matériau est purement élastique (éventuellement dépendant de
plastiques hautes performances [1] [2]. Le deuxième cas où ce cou- la température), le potentiel thermodynamique ψ peut être vu
plage thermomécanique s’exprime est celui d’un « cyclage comme une fonction des variables d’état (E, T ), et peut être
thermique » : par exemple, la température de certaines pièces de exprimé par (cf. l’équation (62) dans [AM 5 322]) :
structures d’aéronefs peut varier entre des valeurs très basses en
altitude (typiquement – 55 oC, – 60 oC) et des valeurs plus élevées 1 1 1
sur le tarmac... (dépendantes de la localisation, du climat etc.). ψ = ψ (E, T ) = E : ⺓ E − aT 2 − G (tr E )T (5)
Dans ce cas, le matériau constitutif subit autant de cycles de tem- ρ 2 2
QQY
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
amUSRS
dans lequel ⺓ est un tenseur d’ordre 4 (tenseur d’élasticité), a et G où αL et αT sont, respectivement, les coefficients d’expansion ther-
sont des paramètres matériaux à identifier. En particulier G repré- mique longitudinale et transverse du pli composite. Les
sente un paramètre (scalaire) de couplage, qui décrit l’interaction équations (9) (10) mettent en évidence l’anisotropie du
entre les champs mécaniques et les champs thermiques. En accord comportement thermomécanique du pli composite, à l’échelle
avec la Thermodynamiques des Processus Irréversibles (TIP), le mésoscopique.
potentiel thermodynamique est postulé fonction de degré deux (au
plus) des variables d’état : le terme de couplage (il s’agit d’un cou- Il est essentiel de noter que la mise en place d’une équation
plage d’état) a une forme simple, impliquant deux quantités scalai- constitutive thermomécanique pour le pli composite –
res directement liées aux variables d’état (T et trE ). La contrainte équations (8) (10) – est en générale complexe et nécessite des
de Cauchy, T, et l’entropie, s, peuvent être calculées à partir de outils d’homogénéisation parfois sophistiqués. Pour des maté-
l’équation (5) en utilisant l’équation (63) dans [AM 5 322] : riaux composites à fibres longues, l’emploi de simples « lois de
mélanges » [16] est dans la plupart des cas suffisant pour le calcul
de ⺡ et ET, du moins dans un cadre purement élastique. Pour les
∂ψ
R
T=ρ = ⺓E − ρGT I (6) modules de rigidité les équations semi-empiriques de Halpin et
∂E Tsai [17] sont souvent utilisées. Dans ce cas :
∂ψ E LL = E f Vf + E m (1− Vf ) (11)
s=− = aT + G (tr E)
∂T
νLT = ν f Vf + νm (1− Vf )
Généralement, le terme ρGT I est identifié par le terme ⺓ET , qui
permet d’exprimer l’équation (6) sous la forme plus classique : 1+ ξ1η1Vf
E TT = E m
1− η1Vf
T = ⺓ (E − ET ) (7) 1+ ξ2 η2Vf
GLT = Gm
1− η2Vf
dans laquelle ET= α∆T I représente la déformation libre d’origine
thermique, α est le coefficient d’expansion thermique, ∆T la diffé- Dans ces expressions, les indices f et m concernent, respecti-
rence de température (T – T0) par rapport à une température de vement, la fibre et la matrice, Vf représente la fraction volumique
référence, T0, « sans contrainte ». Le comportement thermo- de fibres, η1 et η2 sont donnés par :
mécanique du matériau polymère seul peut être simulé et identifié
à partir des équations (1) (7), qui caractérisent les matériaux
homogènes et isotropes. E f /E m − 1
η1 = (12)
E f /E m + ξ1
Dans le cadre de la théorie des stratifiés, le comportement du pli
composite est décrit par :
E f /E m − 1
η2 =
T = ⺡ (E − ET ) (8) E f /E m + ξ2
où ⺡ est le tenseur d’élasticité dans un état de contraintes tandis que ξ1 et ξ2 sont des paramètres
planes, dont la matrice associée pour un pli composite élémentaire « semi-empiriques » [17].
orthotrope est [16] :
La littérature fournit des expressions explicites des coefficients
QLL QLT 0 d’expansion thermique du pli composite, αL et αT [18] :
⺡ = QLT Q TT 0 (9)
E f α f Vf + E m αm (1− Vf )
0 0 QSS αL = (13)
E f Vf + E m (1− Vf )
avec :
α T ≈ (1+ νm) αm (1− Vf ) + (1+ ν f ) α f Vf − αL νLT
E LL et des conductivités thermiques longitudinale (le long des fibres),
QLL =
1− νLT ν TL LL, et transverse (perpendiculaire aux fibres), LT [19] :
νLT E TT ν E
QLT = = TL LL LL = Lf Vf + Lm (1− Vf ) (14)
1− νLT ν TL 1− νLT ν TL
E TT
Q TT =
1− νLT ν TL 1 4 1− (B 2Vf /π)1/2
LT = Lm [1− 2 (Vf /π)1/2 ] + π − tan−1
QSS = GLT B [1− (B 2Vf /π)]1/2 1+ (B 2Vf /π)1/2
L
et dans lesquels l’indice L signale la direction longitudinale (dans B ≡ 2 m − 1
Lf
le sens des fibres) et l’indice T la direction transverse (orthogonale
aux fibres), ELL, ETT, GLT GLT et νLT et νLT représentent, respective-
ment, le module longitudinal, le module transverse, le module de en fonction de celles des constituants élémentaires, fibres et
cisaillement (dans le plan du pli) et les coefficients de Poisson matrice.
(dans le plan du pli). Ces équations ne sont pas valables pour des composites tissés,
Les tenseurs E et ET, dans un état de contraintes planes, peuvent et cela à cause de la morphologie de ces matériaux, intrinsèque-
être représentés sous la forme vectorielle suivante : ment complexe : plus de détails sur les techniques d’homogénéi-
sation pour ces matériaux peuvent être trouvés, entre autres,
dans [20].
E ≡ (E xx , E yy , E xy ) (10)
La théorie classique des plaques stratifiées (TCPS, Classical
ET ≡ (αL ∆T , α T ∆T , 0) Lamination Theory, CLT, dans la littérature anglo-saxonne) est
QRP
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
amUSRS
caractérisée par l’imposition a priori des champs de déformation, conditions transitoires/cycliques – même complexes. Bien entendu,
de la forme (modèle de plaque de Kirchhoff) : le champ de contraintes internes ne peut pas être mesuré directe-
ment mais il peut être inféré à travers une modélisation robuste
E = E0 + z K (15) du comportement matériel et structurel de ces plaques.
dans laquelle E0
représente le vecteur des déformations dans le Afin d’exploiter ces types d’expériences, il est nécessaire de
plan du pli composite et K le vecteur des courbures, définis respec- modéliser correctement le comportement des plaques composites
tivement par : asymétriques déformées sous l´effet des champs hygrothermi-
ques. Pour cela, un modèle variationnel approché (méthode de
Rayleigh-Ritz) géométriquement non-linéaire de plaque (petites
∂u ∂v 1 ∂u ∂v
E0 ≡ (E xx
0 , E0 , E0 ) =
yy xy + (16) déformations, rotations modérées) peut être employé, permettant
∂x ′ ∂y ′ 2 ∂y ∂x d’obtenir de façon approchée les configurations d’équilibre des
plaques déformées. En effet, à chaque instant du conditionnement
R
∂2 w ∂2 w ∂2 w transitoire ou cyclique, dont l’évolution est fixée par un potentiel
K ≡ (K xx , K yy , K xy ) = de dissipation du type équation (2) et par le flux phénoménologi-
∂x 2' ∂y 2' ∂x ∂y que équation (3), dans des conditions proches de l’équilibre,
l’énergie, E, de la plaque admet un extremum local. Cet équilibre
Les intégrales :
est stable lorsque E admet un minimum :
N = ∫ T dz , M = ∫ Tz dz (17)
e e δE = 0 pour l’équilibre (22)
qui définissent, respectivement, la force et le moment résultants δ 2E > 0 pour l’équilibre stable
appliqués au stratifié, permettent de définir la loi constitutive pour
le stratifié composite, à savoir : L’énergie, E, de la plaque peut s’écrire :
N = ⺑E0 + ⺒K − NT (18) 1
E = ∫ E · ⺡E − α∆T · ⺡E dV (23)
2
V
M = ⺒E0 + ⺔K − MT
pour laquelle : Le problème variationnel peut être difficile à résoudre dans le
cas général, mais il peut être résolu numériquement en utilisant la
méthode de Rayleigh-Ritz, de Galerkin ou des éléments finis.
⺑ = ∫ ⺡ dz , ⺒ = ∫ ⺡z dz , ⺔ = ∫ ⺡z 2 dz (19)
e e e
La méthode de Rayleigh-Ritz consiste à chercher des solutions
approchées uR (x, y, z ) de u (x, y, z ) dans le sous-espace des q
et : fonctions de base χi (x, y, z ) (i = 1 ... q) :
La solution d´un problème thermomécanique (élastique) dans le où χi (x, y, z ) sont des fonctions choisies a priori, qui doivent satis-
cadre de la TCPS implique l’utilisation de champs thermiques faire des conditions aux limites de type cinématique (champ ciné-
approchés par des fonctions linéaires par morceaux, à savoir : matiquement admissible). Des fonctions polynomiales,
trigonométriques, de Tchebychev constituent des fonctions de
T (z ) = ak z + bk (21) base admissibles. En utilisant un champ approché, l’énergie appro-
chée ER prend la forme
Tk − Tk −1 T − Tk −1
ak = , bk = Tk −1 − k z k −1 E R [uR (x , y , z )] = E R (ai) (25)
ek ek
dans laquelle ek représente l’épaisseur de chaque morceau. Les q conditions d’équilibre sont exprimées par :
Encore une fois, ces expressions ne sont pas valables pour des
composites tissés : plus de détails sur des techniques de calcul des ∂E R
= 0, i = 1 ... q (26)
contraintes « de pli » pour ces matériaux peuvent être trouvés, ∂ai
entre autres, dans [20] [21].
qui représentent q équations non linéaires. Ces équations peuvent
être résolues, sinon explicitement, par la méthode de New-
2.3 Identification et simulations ton-Raphson, par exemple.
La stabilité de l’équilibre a lieu lorsque :
Les effets d’un chargement thermomécanique, que ce soit
monotone ou cyclique, sur les mécanismes d’endommagement et
de dégradation de matériaux ou de structures composites, peuvent ∂2 E R
>0 (27)
être appréhendés à travers l’emploi de stratifiés modèles (par ∂ai ∂ai
exemple, [0/90]s).
Les dérivées secondes de ER par rapport aux q vecteurs ai –
Des plaques asymétriques de type [0/90] peuvent être
calculées à l’équilibre – représentent les composantes d’un tenseur
employées pour la caractérisation du comportement thermo-
⺛ dont la matrice associée doit être définie positive pour
mécanique de matériaux composites et la « mesure » des
l’équilibre.
contraintes internes d’origine thermomécanique, à l’échelle du
pli [22] [23]. En fait, suite à un relâchement d’une partie de ces La recherche des fonctions décrivant les champs de déplace-
contraintes, les plaques asymétriques, selon leur séquence d’empi- ment approchés passe par une étude de la distorsion de la
lement, développent des déformations résiduelles et des distor- plaque [24] et l’emploi de solutions analytiques disponibles dans la
sions qui peuvent être suivies au cours du temps, dans des littérature, dans des cas simples [25].
QRQ
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
amUSRS
Une première approche consiste à utiliser les champs de dépla- « sans contrainte », la théorie prédit une seule forme stable type
cement dérivant directement de la théorie linéaire et impliquant un selle de cheval, le seul minimum de l’énergie thermoélastique.
nombre limité de paramètres [26], ces champs sont inappropriés Cette transition, confirmée expérimentalement, représente une
dans certains cas spécifiques (plaques rectangulaires...). bifurcation de la solution et dépend de l’intensité de la sollicitation
Un choix convenable des fonctions de déplacement dans le plan thermique et de la géométrie de la plaque. Ces paramètres peu-
[u (x, y), v (x, y)] et hors plan [w (x, y)] est représenté par les vent être optimisés pour améliorer la sensibilité de la méthode.
expressions suivantes [27] : On note que, par cette technique, on peut aisément identifier :
– les valeurs des températures sans contrainte (dans le cas de
2 8 8 12
u (x , y ) = c 7 x − c 12 x 3 − c 1c 3 x 5 − c 32 x 7 − c 1c 5 x 7 (28) figure 2, la température sans contrainte (proche de la température
3 5 7 7 de transition vitreuse, Tg) est de l’ordre de 120 oC). La connais-
sance de ces températures est essentielle pour la simulation cor-
8 18 recte des champs de contraintes internes thermomécaniques dans
− c 3 c5 x 9 − c52 x 11 + c 9 xy 2 + c11 xy 4
R 3 11
2
3
8
5
8
7
12
v (x , y ) = c 8 y − c22 y 3 – c2 c 4 y 5 − c 42 y 7 − c2 c 6 y 7
7
les matériaux composites, à l’échelle du pli (équations (8) et (10)) ;
– les valeurs des coefficients d’expansion thermique des plis, αL
et αT, eux aussi indispensables pour le calcul des contraintes inter-
8 18 nes thermomécaniques (équations (8) et (10)).
− c 4 c 6 y 9 − c 62 y 11 + c10 x 2 y + c12 x 4 y Dans le cas de plaques à fort rapport d’aspect (AR = Lx /Ly ,
3 11
w (x , y ) = c1 x 2 + c2 y 2 + c 3 x 4 + c 4 y 4 + c5 x 6 + c 6 y 6 caractérisant les plaques rectangulaires, Lx et Ly étant, respective-
ment, la longueur et la largeur de la plaque) il peut être
dans lesquelles c1, ..., c12 représentent 12 paramètres indépen- montré [27] que la procédure d’identification est encore plus
dants à déterminer en utilisant le système d’équations (non aisée : en fait, dans ce cas, l’effet des non-linéarités géométriques
linéaires) (26). Les solutions stables doivent ensuite satisfaire la est négligeable dans une large plage de températures, selon les
condition de l’équation (27). Plus de détails concernant le choix de dimensions des plaques et les niveaux de chargement en jeu, et la
ces fonctions et l’identification des états d’équilibre de plaques théorie classique des plaques stratifiées peut être employée. Dans
déformées par des chargements thermomécaniques peuvent être le contexte de la TCPS, la courbure, Kxx = – Kyy , de plaques [0/90]
trouvés dans [27]. asymétriques est simplement exprimée par :
QRR
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
amUSRS
Four + plaque
Caméra CCD
R
a b
c d
Figure 1 – Technique de projection de franges pour le suivi de la distorsion de plaques composites [0/90] asymétriques soumises
à des chargements thermomécaniques transitoires et cycliques : a), b) quelques détails du montage expérimental, c) déformée
« en selle de cheval », d) déformée cylindrique
peut être formulé. Cela consiste à affirmer, en toute analogie avec Dans le contexte de la fracture fragile, un principe de dissipation
la modélisation de la plasticité, que : maximale du type :
dA
dA
∈∂ϕ (G ) (32) (G − G*) > 0 ∀ G* ∈C (34)
dt dt
QRS
R
QRT
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corUPP
Résistance chimique
et à la corrosion des composites
par Philippe COGNARD
Ingénieur ESPCI
R
Expert près les tribunaux
Ancien Directeur marketing ATO Findley
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
© Techniques de l’Ingénieur COR 500 − 1
QRU
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corUPP
1. Modes de corrosion
et de dégradation
des matériaux traditionnels
■ Corrosion des métaux
Elle peut revêtir plusieurs aspects :
— corrosion externe (des bâtiments, des ouvrages d’art, des
coques de navires, des dessous de caisses d’automobile...), sous
l’action de l’eau, de l’air humide, de l’environnement, de l’eau de
mer...
R
— corrosion interne des tuyauteries, égouts, réservoirs sous
l’action des produits chimiques, liquides ou gazeux, véhiculés ou
stockés.
Tous les métaux usuels s’oxydent à l’air surtout à l’air humide,
mais les problèmes les plus graves se rencontrent avec les aciers
et le fer car, la rouille étant poreuse, la corrosion se poursuivra
continuellement, sauf si on protège ces métaux par un revêtement
ou une peinture adéquats. Figure 1 – Réalisation d’une capacité résistant
à la pression, réalisée par enroulement filamentaire
Les métaux sont également attaqués par les acides, surtout les
aciers ordinaires et, en génie chimique, on est obligé d’utiliser
l’acier inoxydable, d’un coût plus élevé et aussi plus onéreux à
mettre en œuvre (soudures délicates...). doivent être mis en forme par travail ou enlèvement de la matière.
Les pièces de révolution sont réalisées par enroulement filamen-
Nous étudierons donc en détail la possibilité de remplacement de taire principalement, ce qui donne des pièces très résistantes
structures métalliques par des composites résistant à la corrosion. mécaniquement et à la pression. Un exemple d’application est pré-
■ Corrosion des bétons armés senté sur la figure 1. Les coûts de fabrication sont réduits si les
séries sont suffisamment importantes. Les profilés sont fabriqués
Le béton lui-même est peu sensible à la corrosion (bien qu’il sup-
de façon économique en série par pultrusion.
porte mal l’acidité, même faible), mais il est en général toujours
renforcé par des armatures en acier, et celles-ci se corrodent si Le coût d’une chaudronnerie en plastique renforcé de fibres de
elles sont en contact, accidentellement (par exemple suite à l’écla- verre est bien inférieur à celui d’une chaudronnerie en acier inoxy-
tement du béton à cause du gel, ou de fissurations) avec des dable, surtout lorsque l’on a des formes complexes beaucoup plus
milieux agressifs : air humide, air marin, produits chimiques, eaux faciles à réaliser en plastique renforcé.
usées véhiculées par les égouts. Il est difficile de dire a priori quelle est la technique de fabrication
On peut donc, dans le bâtiment et le génie civil, utiliser des plas- dont le coût est le moins élevé, entre les plastiques renforcés et les
tiques renforcés pour remplacer certaines structures en béton, telles matériaux traditionnels, car ce coût dépend :
que des tuyaux d’égouts, des caniveaux, des panneaux de façades
— de la technique particulière utilisée ;
et des structures en bord de mer, des poteaux téléphoniques...
— de l’équipement existant chez le transformateur : par exemple
■ Dégradation du bois lorsqu’un fabricant d’automobiles a déjà lourdement investi en
Longtemps on a utilisé le bois pour la construction extérieure et la presses d’emboutissage, en matériel de soudage des pièces métal-
construction navale, en le protégeant par des vernis ou peintures et liques, en matériel de mise en forme des métaux, etc., il peut hési-
des agents antimoisissures et anti-insectes, parce que c’est un maté- ter à reconvertir partiellement son usine pour faire des pièces
riau très répandu dans tous les pays, peu onéreux et très décoratif. composites ;
Cependant, en extérieur il a une durée de vie limitée à quelques — du nombre de pièces à produire annuellement, dont dépen-
dizaines d’années, car il peut pourrir lentement, et il est combustible. dra l’amortissement des moules et de l’équipement.
Il tend donc à être remplacé, en extérieur par d’autres matériaux Par contre, une fois qu’une entreprise a choisi de travailler avec
plus durables : métaux, béton et maintenant aussi par des des matériaux composites et qu’elle s’est équipée, la facilité de
plastiques renforcés. mise en forme des pièces en composites milite en leur faveur.
Nota : pour comparer les techniques de mise en forme et leurs coûts, le lecteur dispose
dans les Techniques de l’Ingénieur de nombreux articles auxquels il pourra utilement se
reporter ([18] à [24]).
2. Propriétés et avantages ■ Durée de durcissement
des plastiques renforcés Nous indiquons au paragraphe 4 les conditions de durcissement
et des composites vis-à-vis des matériaux composites. Les durées de durcissement ou de mou-
lage (séjour dans le moule) sont très variables, allant de quelques
de la corrosion minutes pour l’injection RIM jusqu’à 15 heures pour le moulage au
contact de grandes pièces (coques de bateau par exemple).
Pour déterminer les durées de durcissement, on mesure le gel
2.1 Mise en œuvre et durcissement, time qui est la durée au bout de laquelle le mélange résine + dur-
coût de transformation cisseur et catalyseur commence à prendre en gel selon les normes
ISO 10364 et NFT 51-512.
■ Techniques et coûts de fabrication On peut durcir les pièces à chaud, par exemple en enroulement
Les plastiques renforcés et les matériaux composites sont mis en filamentaire, afin de ne pas immobiliser les moules. On peut durcir
forme directement par moulage ou injection ou par d’autres tech- à chaud des composites verre-époxyde en 15 min à 120 oC en
niques, alors que les autres matériaux traditionnels (métaux, bois) étuve. (0)
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
COR 500 − 2 © Techniques de l’Ingénieur
QRV
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corUPP
Tableau 1 – Résistances aux produits chimiques comparées de divers matériaux utilisés en génie chimique
(à température ambiante)
H2SO4 H2SO4 NaHSO3 HCl HNO3 HNO3 NaOH
HCl dilué HF 50 % Paraffines Cétones Amines Alcools Aromatiques
concentré dilué solution concentré concentré dilué 50 %
Métaux
Hastelloy B E B M E B N N B E
Acier inox 316 B B B N N E E M E
Acier inox 304 M M M N N E E N E
Acier au carbone
Bronze
B
N
N
M
N
M
N
N
N
N
N
N
N
N
N
N M
E R
Cuivre M B B N M N N B B
Aluminium M M B N N M N N N
Plastiques
Polyéthylène E E E E E B E E E B M M E M
Polypropylène E E E E E E E N E E B B E M
PVC E E E E E B E E E E M M E N
Fibres verre/Polyester M E E E E M E N B B N N E N
Fibres verre/Époxy M E E E E M E M E E M E E
Fibres verre/Vinylester B E E E E M E N E B N N E N
Fibres verre/Furane M E E E E N M N E E E E E E
Époxyde M E E E E M E B E E M E E
Téflon E E E E E E E E E E E E E E
Élastomères
Néoprène N M E N M N M B B B N B E M
Buna N N M E N M N M M B E N N B M
Éthylène Propylène B E M E M B B E B E B E B
Silicone M E N N N M N B N N B E B
Il y a donc maintenant de très nombreuses possibilités de fabri- — la polymérisation est conduite jusqu’à l’obtention du maxi-
cation, adaptées à toutes sortes de pièces. mum de densité des liaisons du système ;
Afin d’obtenir un durcissement optimal et les propriétés méca- — la quantité des liaisons non réactives dans le système est
niques attendues, il est essentiel de vérifier le degré de polyméri- réduite.
sation du composite fini.
Cela entraîne une amélioration de la résistance chimique et des
Le duromètre Barcol 934-1 ne donne qu’une indication sur l’état propriétés physiques. Par ailleurs, une post-cuisson totale sur une
de polymérisation. Une méthode de test plus fiable pour la vérifi- période de temps importante et à des températures élevées peut
cation du degré de durcissement consiste à mesurer le taux rési- réduire le risque de tension dans le stratifié pendant la phase ini-
duel de styrène, dans le cas des résines polyesters et vinylesters, tiale de polymérisation et réduit également les risques de déforma-
conformément à la norme ISO 4901-85. tion encourus durant les cycles thermiques.
Le taux de styrène recommandé devra être au maximum de 2 % Pour une efficacité maximale, une post-cuisson à plus de 70 oC
de la quantité de résine. doit démarrer dès que possible après la gélification du stratifié,
une fois le pic exothermique dépassé. En pratique, il peut être dif-
■ Post-cuisson (exemple : résines polyesters et vinylesters)
ficile de procéder à la post-cuisson, surtout sur les pièces de gran-
La résistance chimique et les performances des composites peu- des dimensions, et la température la plus élevée possible doit être
vent être améliorées en faisant une post-cuisson du produit fini à obtenue le plus tôt possible après la fin de la fabrication du strati-
une température élevée. Post-cuire un matériau composite apporte fié. On peut recommander les valeurs suivantes pour une post-
deux avantages : cuisson : 24 h à 60 oC ou 48 h à 50 oC.
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
© Techniques de l’Ingénieur COR 500 − 3
QRW
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corUPP
2.2 Résistances aux produits chimiques La perte des propriétés mécaniques sur une période d’un an
peut servir à prévoir la résistance dans le long terme.
et à divers agents agressifs
Ce paragraphe est le plus important de cet article consacré aux En résumé
composites anticorrosion. Les meilleures résistances chimiques sont obtenues avec
■ Résistance aux produits chimiques deux familles de résines :
● Pour une première approche, le tableau 1 fournit les résistances — les résines époxydes à un ou deux composants ;
aux produits chimiques comparées de divers matériaux utilisés en — les résines vinylesters.
génie chimiques (métaux, plastiques, composites et élastomères). Ce sont ces deux familles qui sont utilisées principalement
Il montre que les polyesters, les époxydes et les vinylesters pour la construction de matériel de génie chimique.
renforcés de fibres de verre résistent bien aux acides alors que les Cependant les polyesters classiques présentent déjà de
R métaux usuels n’y résistent pas ; seul l’acier inoxydable y résiste. bonnes résistances chimiques qui leur permettent d’être utilisés
● Le tableau 1 en [COR 501] va beaucoup plus dans le détail en
pour des applications déjà sévères telles que la construction
fournissant les résistances à quelque 200 produits chimiques cou- navale ou les citernes de stockage de produits divers y compris
rants, pour les principaux types de plastiques renforcés ou composi- les carburants, un bon nombre de solvants, etc.
tes : verre-polyester, verre-vinylester, verre-époxyde, etc., afin que le
lecteur qui a un problème précis puisse choisir la résine adaptée.
Dans l’industrie, on rencontre des environnements chimiques
Le tableau 1 en [COR 501] précise jusqu’à quelles températures différents. Certains milieux nécessitent que l’on porte une attention
les résines peuvent résister à un produit chimique donné. particulière à la fabrication des plastiques renforcés. Nous étudions
Nota : la société Reichhold, qui fabrique les résines polyesters et vinylesters de marque ci-dessous deux cas rencontrés fréquemment.
Norpol (tableau 1 [COR 501]), et la société DSM Composites fournissent les résistances chi-
miques de leurs résines à plus de 1 000 produits chimiques [1] [2]. Exemples de résistance aux produits chimiques
On peut aussi consulter les tableaux des résistances chimiques des résines polyesters
de Cray Valley/Total [3] et des résines époxydes de Vantico [4]. ■ Hypochlorite de sodium
La norme américaine ASTM C 581 permet de déterminer s’il y a C’est une substance instable qui se décompose. Ses produits de
détérioration d’une résine thermodurcissable lorsque le stratifié est décomposition attaquent rapidement le composite par oxydation de
immergé dans un milieu corrosif, à une certaine température. surface. La décomposition de l’hypochlorite de sodium peut venir
L’exposition dans le long terme et l’expérience de l’industrie d’une température excessive, d’un pH bas et/ou de radiations UV.
confirment les données obtenues au cours des tests effectués en Également, certaines impuretés sur la surface du stratifié peuvent
laboratoire en conformité avec la norme ASTM C 581. provoquer cette décomposition. Pour une stabilité optimale, les solu-
Citons également la norme NF M 88-550 qui permet aussi de tions d’hypochlorite de sodium devraient être maintenues à une tem-
tester les compatibilités chimiques des plastiques et composites. pérature inférieure à 50 oC et un pH ⭓ 10,5.
● À la différence des métaux, les époxydes, les polyesters, les Des températures plus élevées ou un pH plus bas provoqueront
vinylesters et vinylesters modifiés uréthane et polyesters bisphénol une décomposition graduelle de l’hypochlorite de sodium et une atta-
fumarate ne se corrodent pas et ne perdent pas de leur épaisseur que de la structure superficielle du composite.
par corrosion électrolytique. Cependant, une exposition continue du Les résines polyesters peuvent résister à des solutions d’hypochlo-
stratifié aux produits chimiques peut provoquer une réduction des rite de sodium à des températures supérieures à 50 oC et à un pH infé-
propriétés mécaniques. La vitesse à laquelle les propriétés méca- rieur à 10,5 mais une réduction de leur durée de vie devra être attendue.
niques se réduisent décroît avec le temps, approximativement selon
une fonction presque logarithmique. Une fois les premières Une surchloration pendant la production de l’hypochlorite de sodium
données de diminution enregistrées, une ligne droite peut être entraînera une solution qui sera très agressive envers ces composites.
tracée pour établir un pronostic sur l’avenir des propriétés méca- Lorsqu’une surchloration se produit, la température et le pH sont diffi-
niques dans le temps (figure 2). ciles à contrôler, ce qui a pour effet de réduire considérablement la
durée de vie de l’hypochlorite et donc d’attaquer le plastique renforcé.
L’exposition aux UV décompose l’hypochlorite de soude et les pièces
installées en extérieur doivent donc être opaques.
100 Les agents thixotropes basés sur la silice ne devront jamais être uti-
Maintien des propriétés (%)
Acceptable Bon
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
COR 500 − 4 © Techniques de l’Ingénieur
QRX
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corUPQ
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
© Techniques de l’Ingénieur COR 501 − 1
QRY
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corUPQ
RÉSISTAN CE CHIM IQUE ET À LA CORROSION DES COM POSITES. GUIDE DE CHOIX __________________________________________________________________
(0)
Bisphénol époxyvinylester
bisphénolfumarate 6694
Polyester téréphtalique
Polyester isophtalique
Polyester isophtalique
Polyester ISO/NPG
Vinylester Novolac
Vinylester modifié
Produit chimique
de liaisons 9700
uréthane 9800
R
époxy, 9400
Polyester
série 480
série 680
série 720
640-000
250-000
A Acétaldéhyde 100 NR NR NR NR NR NR NR NR NR NR
Acétate d’amyle toutes NR NR NR NR NR NR 50 NR NR
Acétate de baryum toutes 80 80 80 80 80
Acétate de butyle 100 NR NR NR NR NR NR NR 27 NR NR
Acétate de cuivre toutes 30 120 100 100 100
Acétate de vinyle toutes NR NR NR NR NR NR NR 20 NR
Acétate d’éthyle 100 NR NR NR NR NR NR NR NR NR NR
Acétone 10 NR NR NR NR NR 80 80 80 80 80
Acétone 100 NR NR NR NR NR NR NR NR NR NR
Acétonitrile 100 NR NR NR NR NR NR NR NR NR NR
Acide alkylbenzène sulfonique 92 65 50 50 50
Acide caprylique (ou octanoïque) toutes 100 80 100 100 80
Acide chloroacétique 50 NR 65 40 60
Acide chloroacétique 100 NR NR NR NR NR NR NR NR NR NR
Acide acétique 25-50 NR 25 50 30 25 80 80 80 80 80
Acide acétique 50-75 NR NR 25 NR NR 60 60 60 60 60
Acide acétique glacial 100 NR NR NR NR NR NR NR NR NR NR
Acide acrylique 0-25 45 40 40 45 40
Acide arsénique 80 45 45 40 45
Acide benzoïque toutes 25 40 60 60 40 120 100 100 100 100
Acide borique toutes 40 50 60 60 50 120 100 100 100 100
Acide bromhydrique 48 75 65 65 90 70
Acide butyrique 50 NR NR 25 NR NR 100 100 100 100 100
Acide caprique toutes 100 80 100 100 80
Acide chlorhydrique 10 30 40 70 50 40 100 100 120 100 90
Acide chlorhydrique 37 NR NR 25 NR NR 45 45 45 60 45
Acide chlorosulfurique 100 NR NR NR NR NR NR NR NR NR
Acide chromique 20 NR NR NR NR NR 40 NR 50 45 NR
Acide citrique toutes 25 50 60 60 50 120 100 120 100 100
Acide cyanhydrique 10 25 100 80 80 80 90
NR - Non recommandé
(1) DMA/BPO système de polymérisation recommandé
(2) 2 couches voiles synthétiques recommandées dans la couche intérieure
(3) 2 couches voiles verre C recommandées dans la couche intérieure
(4) Voile verre C et revêtement anticorrosion 5 mm recommandés
(5) Les séries Norpol DION 9100 ou Norpol DION 6694 sont préférables
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
COR 501 − 2 © Techniques de l’Ingénieur
QSP
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corUPQ
__________________________________________________________________ RÉSISTAN CE CHIM IQUE ET À LA CORROSION DES COM POSITES. GUIDE DE CHOIX
Bisphénol époxyvinylester
bisphénolfumarate 6694
Polyester téréphtalique
Polyester isophtalique
Polyester isophtalique
Polyester ISO/NPG
Vinylester Novolac
Vinylester modifié
Produit chimique
de liaisons 9700
uréthane 9800
R
époxy, 9400
Polyester
série 480
série 680
série 720
640-000
250-000
Acide éthylènediaminetétraacétique (EDTA) 100 45 40 40 45
Acide fluorhydrique (2) 10 NR NR NR NR NR 50 50 50 65 50
Acide fluorhydrique (2) 20 NR NR NR NR NR 40 40 40 40 40
Acide fluoroborique (2) 10 25 120 100 120 100 80
Acide fluorosilicique (2) 10 65 65 65 65 65
Acide fluorosilicique (2) 35 40 40 40 40 40
Acide formique 10 NR NR 30 NR 65 80 80 65 65
Acide formique 50 NR NR NR NR 45 40 40 40 45
Acide gluconique 50 30 80 80 80 80 80
Acide glutarique (acide pentanoïque) 50 50 50 50 50
Acide glycolique (acide hydroxy-acétique) 10 40 90 80 90 90
Acide glycolique (acide hydroxy-acétique) 70 40 27 40 40
Acide hydrofluorosilique (2) 35 NR 40 40 40 40 40
Acide itaconique toutes 50 50 50 50
Acide lactique toutes 25 30 40 30 30 120 100 100 100 100
Acide laurique toutes 100 100 100 90
Acide maléique toutes 50 100 90 120 90
Acide monochloracétique 80 NR NR 25 NR NR NR NR NR NR NR
Acide myristique toutes 100 100 100 90
Acide nitrique 5 NR NR 30 NR NR 80 65 70 80
Acide nitrique 35 NR NR NR NR NR 60 40 50
Acide nitrique 50 NR NR NR NR NR 45 NR 27 NR 45
Acide nitrique fumées 80 80 80
Acide octanoïque (ou caprylique) toutes 100 80 100 100 80
Acide oléique toutes 40 50 60 50 50 120 100 100 100 90
Acide oxalique 100 NR 30 50 40 30 120 100 100 90
Acide palmitique 100 60 120 100 120 120 90
Acide paratoluène sulfonique toutes 25 120 100 100 100 90
Acide perchlorique 30 NR NR NR NR NR 40 40 40 40
Acide phosphorique 80 NR NR 30 NR NR 100 100 100 100 90
NR - Non recommandé
(1) DMA/BPO système de polymérisation recommandé
(2) 2 couches voiles synthétiques recommandées dans la couche intérieure
(3) 2 couches voiles verre C recommandées dans la couche intérieure
(4) Voile verre C et revêtement anticorrosion 5 mm recommandés
(5) Les séries Norpol DION 9100 ou Norpol DION 6694 sont préférables
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
© Techniques de l’Ingénieur COR 501 − 3
QSQ
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corUPQ
RÉSISTAN CE CHIM IQUE ET À LA CORROSION DES COM POSITES. GUIDE DE CHOIX __________________________________________________________________
Bisphénol époxyvinylester
bisphénolfumarate 6694
Polyester téréphtalique
Polyester isophtalique
Polyester isophtalique
Polyester ISO/NPG
Vinylester Novolac
Vinylester modifié
Produit chimique
de liaisons 9700
uréthane 9800
R
époxy, 9400
Polyester
série 480
série 680
série 720
640-000
250-000
Acide phtalique 100 60 100 100 100 100 90
Acide picrique (en solution alcoolique) 10 25 45 45 45
Acide propionique 50 80 80 80 80 70
Acide salicylique toutes 25 65 60 70 65
Acide silicique ou silice hydratée toutes 40 120 120 120
Acide stéarique toutes 25 40 70 55 40 120 100 100 100 90
Acide sulfamique 25 25 65 65 65 65
Acide sulfurique 0-25 25 45 70 60 45 120 100 100 100 90
Acide sulfurique 51-70 NR NR 30 NR NR 80 80 80 80 90
Acide sulfurique 76-93 NR NR NR NR NR NR NR NR NR NR
Acide tannique toutes 35 40 70 60 40 120 100 100 100 90
Acide tartrique toutes 60 120 100 100 100 90
Acide trichloroacétique 50 25 120 100 100 100 90
Acides aminés toutes NR 40 40 40 40
Acides gras toutes 25 50 70 60 50 120 100 120 100 100
Acrylate de butyle 100 NR NR NR NR NR NR NR 27 NR
Acrylate d’éthyle 100 NR NR NR NR NR NR NR NR NR NR
Acrylonitrile 100 NR NR NR NR NR NR NR NR NR NR
Alcool allylique 100 NR NR NR NR NR NR NR NR NR
Alcool amylique toutes NR 25 30 30 25 100 50 90 80 65
Alcool benzylique toutes 25 40 NR 40 NR
Alcool dodécylique/alcool laurique 100 30 80 65 80 70
Alcool éthylique (éthanol) 10 25 30 40 25 65 50 65 65 60
Alcool éthylique (éthanol) 95-100 NR 25 40 30 25 50 27 40 27
Alcool isoamylique 100 25 25 50 50 50 50
Alcool isobutylique toutes 25 25 50 50 50 50
Alcool isooctylique 100 25 35 30 25 65 60 40
Alcool isopropylique toutes NR 25 35 30 25 50 50 50 50 45
Alcool méthylique (méthanol) 100 NR NR NR NR NR 45 NR 30 27 27
Aldéhyde benzoïque/benzaldéhyde 100 NR NR NR NR NR NR NR NR NR
NR - Non recommandé
(1) DMA/BPO système de polymérisation recommandé
(2) 2 couches voiles synthétiques recommandées dans la couche intérieure
(3) 2 couches voiles verre C recommandées dans la couche intérieure
(4) Voile verre C et revêtement anticorrosion 5 mm recommandés
(5) Les séries Norpol DION 9100 ou Norpol DION 6694 sont préférables
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
COR 501 − 4 © Techniques de l’Ingénieur
QSR
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corUPR
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
© Techniques de l’Ingénieur COR 502 − 1
QSS
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corUPR
Pour chaque application, nous indiquerons les avantages des diverses résines
et formules, les techniques utilisées ou utilisables dans l’avenir, ainsi que les
possibilités et développements nouveaux.
Nous renverrons souvent le lecteur à l’article [COR 500]. Résistance chimique
et à la corrosion des matériaux composites, ainsi qu’aux tableaux de
l’article [COR 501].
1.1.1 Fabrication
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
COR 502 − 2 © Techniques de l’Ingénieur
QST
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corUPR
Plinéaire
R
Mandrin de polymérisation
Roving coupé
Figure 5 – Comportement d’un tube en matériau composite
mis sous pression interne croissante
Résine
jusqu’à 120 ˚C, selon les formulations. On contrôle cette résistance à
Moule
la pression par un test dans lequel on ne doit constater aucun per-
Renfort lage (le perlage est l’apparition de gouttelettes ou de jets fins de
fibre de verre liquide lorsqu’on met en pression un tube). La courbe de la figure 5
montre ce qui se produit lors de cette mise en pression. Au moment
du perlage, un réseau de microfissures cheminant à l’interface entre
fibres et matrice ou dans la matrice apparaît.
Figure 4 – Fabrication d’un tuyau par centrifugation Le perlage apparaît en général bien avant l’éclatement du tube, la
pression de perlage n’est souvent que de 30 % de la pression d’écla-
■ Fabrication par centrifugation tement.
Une autre technique de fabrication est la centrifugation (figure 4), La pression admissible de service d’une tuyauterie est donc égale
dans laquelle les fibres de renfort et la résine sont introduites simul- à la pression de perlage diminuée d’un facteur de sécurité. Par
tanément dans un moule tournant. La résine imprègne le renfort exemple, la norme américaine ASTM D 2992-01 indique comment
sous l’effet de la force centrifuge, puis l’ensemble est étuvé pour obtenir, par extrapolation d’essais d’une durée de 10 000 h, la pres-
polymériser la résine. sion hydrostatique admissible pour une durée d’utilisation de plu-
sieurs dizaines d’années.
On fabrique ainsi des tubes ou pièces cylindriques de grands dia-
mètres (jusqu’à 5 m), avec des parois très compactes et une bonne Pour une étude détaillée du perlage des canalisations en compo-
régularité d’épaisseur, en raison de la force centrifuge, ce qui donne sites, nous prions le lecteur de se reporter à l’article [AM 5 551] dans
des performances supérieures à l’enroulement filamentaire. les Techniques de l’Ingénieur.
On obtient deux faces lisses, ce qui empêche toute incrustation de Des tuyaux très spéciaux à base de résine époxyde peuvent
dépôts, la face extérieure de la pièce finie est plus renforcée que la résister à des pressions de 250 bar, leur prix étant sensiblement
face interne en fibres de verre et, donc, la face interne, en contact supérieur à celui des tuyaux en polyester/verre classiques. Ils sont le
avec les produits véhiculés, est plus riche en résine ce qui convient plus souvent à base de résines époxydes qui offrent des performan-
parfaitement pour les tuyaux ou cuves devant résister à la corro- ces mécaniques supérieures.
sion. On peut faire varier aussi la composition avec la technique
MOBAS dans laquelle on réalise plusieurs couches successives de ■ Les diamètres peuvent aller de 30 mm à plusieurs mètres, la
composition variable, certaines pouvant même être chargées au figure 6 montre des éléments de cheminée d’usine de très grand
sable en plus des fibres de renfort. diamètre, réalisés par centrifugation.
■ Normes concernant les tuyauteries et les méthodes ■ Dans certains cas on peut fretter des tuyaux en PVC ou en Téflon
d’essais ou d’autres plastiques sélectionnés pour leurs caractéristiques chi-
De nombreuses normes européennes, ISO, ASTM, ASME... con- miques particulières (polyéthylène...), ou même des tuyaux en acier,
cernent les tuyauteries. avec un enroulement de polyester renforcé qui apportera un
complément de résistance mécanique ou une protection extérieure.
Se reporter au tableau 2 et au Pour en savoir plus, L’ensemble, s’il a une épaisseur suffisante, peut alors résister à de
[Doc. COR 500], ainsi qu’au paragraphe 1.1.3. très hautes pressions, par exemple jusqu’à 250 bar pour l’acier.
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
© Techniques de l’Ingénieur COR 502 − 3
QSU
R
QSV
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corUQP
Dégradation, durabilité
des peintures
QSW
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corUQP
En revanche, le présent dossier n’a pas pour objet de décrire les problèmes et
pathologies initiaux qui apparaissent au cours de l’application des peintures ou
dans les heures qui la suivent. En effet, les anomalies de ce type sont traitées
dans le dossier « Protection et décoration par peinture » [M 1 505]. Remarquons
que le traitement de telles anomalies peut généralement être assuré par le per-
sonnel qualifié dans l’utilisation du matériel d’application (par exemple les opé-
rateurs certifiés exécutants) ou bien, s’il s’agit plutôt des précautions de
préparation des produits, de l’état des subjectiles ou des conditions atmosphéri-
ques, par un opérateur de niveau adéquat (voir le § 1.4.2 Certification des systè-
mes de peinture et des intervenants).
Le présent dossier n’a pas, non plus, pour objet d’établir avec précision les
R causes des différentes dégradations des revêtements de peinture. En effet, pour
chaque affaire, l’établissement des causes précises demande l’expertise de
contrôleurs ou d’inspecteurs compétents qui seront informés des données du
problème. En fait, des dégradations d’apparence équivalente, ou proche, peu-
vent trouver leur origine dans des phénomènes assez différents.
Pourquoi adopter un plan basé sur les principaux types de matériaux consti-
tuant le support du revêtement de peinture ?
La raison en est très simple. Un tel revêtement possède une épaisseur propre
généralement inférieure à un millimètre. Par ailleurs, une de ses principales quali-
tés est d’être suffisamment adhérent à son support (le support du revêtement est
désigné, de préférence, par le terme de « subjectile »). Il est donc pratiquement
automatique que des anomalies du subjectile se transmettent au revêtement.
C’est souvent le cas pour des déformations du support, telles que des fissures,
des microfissures vivantes, qui changent de largeur selon les mouvements :
— d’origine thermique entre périodes chaudes et périodes froides (cas des
maçonneries et bétons) ;
— ou dues à des variations du taux d’humidité (cas des matériaux ligneux).
De telles ouvertures, de même que des porosités excessives ou des orifices
apportent fréquemment des dégradations qui reproduisent leur forme, c’est-à-
dire des craquelages au droit des fissures du subjectile.
D’autres substrats poreux contiennent certains composés chimiques, ordinai-
res ou accidentels, répartis ou, au contraire, concentrés sur des zones limitées,
qui peuvent conduire à d’autres types de dégradations.
La compréhension des dégradations des peintures demande donc de connaî-
tre quel est le subjectile sur lequel elle a été appliquée, et certains phénomènes
se retrouvent fréquemment sur les mêmes types de matériaux.
1. Vocabulaire et définitions durabilité ne constitue pas une « durée de garantie ». C’est une
notion technique qui peut aider le maître d’ouvrage à établir un pro-
gramme d’entretien. » (NF EN ISO 12 944-1).
■ Dégradations Cette dernière définition, particulièrement adaptée aux peintures,
est le résultat du travail d’un groupe d’experts chargés de la rédac-
Pour préciser les types de dégradations concernant les revête- tion des normes internationales touchant à la protection, par pein-
ments de peinture, les spécialistes utilisent de plus en plus la collec- ture, contre la corrosion des ouvrages en acier non allié (série des
tion des normes internationales EN ISO 4628. En effet, chaque normes NF EN ISO 12 944-1 à NF EN ISO 12 944-8).
norme de ce groupe donne une définition précise et quantifiée des
divers types de dégradation (voir ci-après le § 1.1).
■ Durabilité 1.1 Repérage normalisé des dégradations
Le terme de « durabilité » correspond à une notion dont les défini- des revêtements de peinture
tions sont nombreuses. Dans le domaine des revêtements, on en
trouve plusieurs. Citons-en deux qui sont inscrites dans des normes :
— « Capacité d’un revêtement à résister aux effets nocifs de son Les dégradations des peintures concernent de nombreux utilisa-
environnement » (NF EN ISO 2810) ; teurs dans la plupart des pays du monde. Pour permettre à ces utili-
— « Durée de vie escomptée d’un système de peinture jusqu’à la sateurs de mieux se comprendre entre eux, les comités européens
première application importante de peintures d’entretien ». « La de normalisation, conjointement avec les comités techniques de
QSX
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corUQP
l’ISO, ont mis au point des normes européennes pour repérer avec 1.3 Niveau d’exigence et catégories
précision les dégradations des surfaces peintes. D’une façon géné-
rale, ces normes appartiennent au domaine des peintures et vernis. de travaux
Sauf pour la norme EN ISO 4628-3 qui a trait au degré d’enrouille-
ment, la série des normes énumérées ci-après est indépendante de
la nature du subjectile, autrement dit du support du revêtement de 1.3.1 Logique de choix d’exigence
peinture. Elles sont toutes basées sur l’aspect visuel des dégra-
dations. Les dégradations actuellement visées par ces normes sont : Dès la conception ou la décision de principe d’effectuer des tra-
vaux de peinture sur un ouvrage déterminé, il est normal que le maî-
— le degré de cloquage : EN ISO 4628-2 ; tre de cet ouvrage, ou l’organisme délégué, choisisse les niveaux de
— le degré d’enrouillement : EN ISO 4628-3 ; dégradation qui pourront entraîner des travaux d’entretien.
— le degré de craquelage : EN ISO 4628-4 ; Il est nécessaire, d’abord, que le maître d’ouvrage tienne compte
R
des particularités de constitution de certains éléments. En effet, cer-
— le degré d’écaillage : EN ISO 4628-5 ; tains matériaux, neufs ou anciens, présentent fréquemment des
— le degré de farinage : EN ISO 4628-6 et 4628-7 ; défauts avant même leur mise en peinture. L’application de certains
revêtements ou peintures permet souvent d’y remédier, mais pas
— le degré de corrosion filiforme : EN ISO 4628-10. dans tous les cas.
La plupart des normes de la liste ci-dessus ont été enregistrées en
tant que normes françaises homologuées et peuvent être désignées 1.3.1.1 Modulation de certaines exigences en fonction
des matériaux subjectiles
comme telles : par exemple la première de la série, qui concerne le
cloquage, doit être désignée, pour des marchés français, De nombreux matériaux de construction peuvent comporter des
NF EN ISO 4628-2. fissures ou des microfissures vivantes. C’est le cas de nombreux
éléments en béton, qu’il s’agisse de béton banché ou de fissures
Chacune de ces normes est basée sur la comparaison de la surface entre éléments de béton préfabriqués. Les peintures de qualité cou-
examinée avec des étalons illustrés. Par exemple NF EN ISO 4628-2 rante, mais aussi, par exemple, les « peintures microporeuses pour
fournit une collection d’étalons de cloques de dimensions 2, 3, 4 et 5, façades » (cf. § 3.1.1), n’ont pas la possibilité de résister à des micro-
avec, pour chacune de ces dimensions, cinq clichés correspondant fissures, et encore moins à des fissures. Particulièrement sur un
chacun à des quantités croissantes de défauts. ouvrage en béton banché, il faut s’attendre à la présence de tels
défauts qui déclenchent généralement un craquelage plus ou moins
développé des peintures, qui peut être repéré selon la norme
NF EN ISO 4628-4. Concernant un tel ouvrage neuf, on doit donc
1.2 Méthodes d’évaluation moduler ou réduire toute exigence concernant le craquelage des
des dégradations peintures : c’est ici un défaut qui n’est pas imputable au revêtement
de peinture, mais au support lui-même.
Il en est de même des peintures appliquées sur certains subjecti-
On doit distinguer deux domaines principaux qui demandent des les ligneux, en particulier dans le cas de bois massifs. Certains bois
évaluations des défauts et dégradations des surfaces peintes : sont connus pour être particulièrement « nerveux ».
En Europe, c’est le cas des différentes espèces de chêne. C’est la
— d’une part, les essais de recherche ou de contrôle de revête- raison pour laquelle, il est hautement souhaitable, si l’on peint des
ments, réalisés sur des échantillons ou des éprouvettes ; fenêtres en chêne qui se trouvent régulièrement exposées au soleil,
— d’autre part, les évaluations concernant des ouvrages fixes ou de choisir une couleur claire, de façon à éviter un échauffement lors
mobiles existants et appartenant à des domaines aussi variés que le des périodes d’exposition. En effet, l’augmentation de la tempéra-
bâtiment, le génie civil ou les transports, par exemple. ture d’un élément en bois de chêne peint dans une couleur foncée
entraîne sa dessication et une fissuration plus marquée que s’il était
Dans le premier cas, il s’agit d’essais réalisés en laboratoire ou en peint dans une teinte pastel ou en blanc. D’autres essences ligneu-
vieillissement naturel. De tels essais ont pour but, par exemple, ses sont moins nerveuses, et donc moins sujettes à ces défauts. Il
d’évaluer le comportement de différents systèmes de peintures est aussi très avantageux d’utiliser des éléments de bois améliorés,
lorsqu’ils sont exposés aux intempéries. Les intervenants dans ce spécialement conçus pour l’exposition aux intempéries, à condition
type d’étude s’accordent généralement pour faire appliquer les sys- qu’ils soient effectivement destinés à être mis en peinture.
tèmes de peinture à étudier sur des éprouvettes que l’on fixe sur des
châssis exposés aux intempéries. Il est alors souhaitable d’organiser 1.3.1.2 Modulation des exigences en fonction
ces essais en conformité avec des règles reconnues, et, de préfé- de la destination ou de l’usage de l’ouvrage
rence, en conformité avec la norme française homologuée
NF EN ISO 2810 « Vieillissement naturel des revêtements – Exposi- De nombreux éléments d’équipements industriels ne nécessitent
tion et évaluation ». Dans cette norme, l’évaluation des propriétés pas systématiquement une durabilité d’aspect aussi longue que les
est basée sur l’utilisation d’un ensemble de normes qui ont pour autres.
numéro : NF EN ISO 2813, la série NF EN ISO 7724-1 à Prenons un exemple d’ouvrage qui, a priori, ne nécessite pas une
NF EN ISO 7724-3, NF EN ISO 3668 ainsi que la série des normes durabilité maximale de son aspect.
énumérées au paragraphe 1.1.
Pour le revêtement de protection de l’extérieur d’une conduite for-
En revanche, s’il s’agit d’évaluer des dégradations des revête- cée, par exemple, des modifications de la couleur du revêtement, ou
ments sur des ouvrages existants, de plus ou moins grandes dimen- bien un cloquage modéré de sa couche de finition, peuvent être
sions, et constitués de matériaux précis, il est souhaitable de trouver considérés comme des altérations acceptables après plusieurs
quelles règles d’évaluation du résultat devraient permettre l’accord années de service, particulièrement si cette conduite n’est que peu ou
entre les intervenants. Cet accord est d’autant plus nécessaire que pas visible, parce qu’installée à l’intérieur d’une galerie de montagne.
les ouvrages concernés sont plus nombreux ou de dimensions Une économie sur la qualité de la couche de finition, donc sur son
importantes. Un exemple est donné au sujet des ouvrages d’art, tels prix, peut avoir lieu, dans ce cas, sans modifier la durabilité de la pro-
que des ponts en acier, à la fin du paragraphe 1.3.2.2 « Travaux tection (encadré 1 « Repères sur la conception des ouvrages »). La
ressortissant du domaine du génie civil ou des industries ». rédaction adéquate du cahier des charges suffit.
QSY
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
corUQP
QTP
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
afVXRU
e papier n’a jamais cessé d’être, quelles que soient les époques, un véhicule
L privilégié de l’expression artistique, de l’acquisition et de la dissémination de
la connaissance et de la culture ; il est le support matériel d’une part importante
de la mémoire de l’humanité. C’est un matériau extrêmement durable puisque
quantité d’œuvres et ouvrages sur papier ont perduré pendant plusieurs siècles
pour nous parvenir souvent en bon état de conservation.
Les propriétés chimiques et physiques du papier varient selon les matières
premières et les modes de production utilisés au cours des différentes
périodes historiques. La technologie de fabrication, apparue en Chine vraisem-
blablement au II e siècle avant notre ère, a évolué au fur et à mesure de son
expansion progressive d’abord au Moyen-Orient à partir du VIII e siècle, puis
vers l’Occident. Cependant ce sont les innovations papetières occidentales au
XIX e siècle qui ont le plus radicalement modifié la composition du matériau et
les modes de fabrication. La transformation d’un mode de production artisanal
vers une papeterie industrielle moderne a eu un impact socio-économique et
culturel considérable mais des conséquences néfastes sur la stabilité et la
durabilité du matériau. Le remplacement par le bois des sources utilisées
p。イオエゥッョ@Z@ェ。ョカゥ・イ@RPQV
QTQ
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
afVXRU
QTR
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
afVXRU
1. Propriétés physico-
chimiques du papier OH O Liaisons hydrogène
intrafeuillets
CH O Liaisons hydrogène interfeuillets
et de van der Waals
0,39 nm
1.1 Structure moléculaire et
morphologique de la cellulose
3,12-3,15 nm
Le papier est un matériau fibreux, chaque fibre étant composée
de plusieurs centaines de microfibrilles, regroupant quelques cen-
taines de molécules de cellulose. Une fibre de coton fait en
moyenne 30 mm de longueur et 10 μm de diamètre [1]. Une fibre de
bois de conifères, appelée trachéide, a une longueur moyenne de 2
à 4 mm ; une fibre de bois de feuillu est deux à trois fois plus courte
(longueur moyenne 1 mm) et fait de 50 à 100 μm de largeur [2].
R
La cellulose est un homopolymère linéaire polydispersé com-
posé exclusivement de monomères de D-glucopyranose (appelés
unités anhydroglucose, AGU) reliés par des liaisons β-1,4 glycosi- 2,45-2,46 nm
diques. Chaque unité anhydroglucose adopte une configuration 4,90-4,93 nm
chaise avec les groupes hydroxyles en position équatoriale et les 5,30-5,34 nm
atomes d’hydrogène en position axiale (figure 1).
Selon la source végétale, une molécule de cellulose native peut Figure 2 – Section transversale dans une microfibrille de 36 molé-
contenir jusqu’à 20 000 unités anhydroglucose, sa masse molaire cules de cellulose organisées en motif hexagonal (d’après [4])
peut donc être supérieure à 3 × 106 g.mol–1. La dimension d’une
unité anhydroglucose étant de 0,515 nm (5,15 Å) en longueur, une
molécule de cellulose native peut donc dépasser les 10 μm [3].
coton et de 44-47 % pour la ramie. Il peut dépasser 70 % pour les
Les propriétés physico-chimiques du papier découlent directe-
celluloses bactériennes.
ment de la structure fibrillaire de la cellulose, des propriétés phy-
sico-chimiques de la cellulose et des fibres et du degré La cellulose native dans les microfibrilles des plantes supé-
d’interaction des macromolécules de cellulose. Ces interactions rieures utilisées pour la fabrication du papier est cristallisée sous
sont maximales dans les zones fibreuses cristallines où les molé- la forme de l’allomorphe I dont il existe deux conformations
cules sont organisées en feuillets parallèles (figure 2). stables : la cellulose Iα et la cellulose Iβ. Les proportions en sous-
allomorphes Iα et Iβ dépendent de l’espèce végétale [8]. Elles se
Le modèle le plus récent, bien que non confirmé, de cristallite
distinguent par le degré de liaisons hydrogène et de compaction
de cellulose est le modèle 6 × 6, proposant une structure compre-
de la cristallite, la forme Iβ étant la plus abondante dans les
nant 36 chaînes de cellulose (figure 2). Dans les microfibrilles, ces
plantes supérieures.
domaines cristallins sont intercalés avec des régions moins
ordonnées, aussi dites amorphes, où le degré de liaison entre les
molécules de cellulose est moins dense (figure 3a). La cohésion
interne de la microfibrille se fait grâce aux molécules de cellulose 1.2 Les liaisons mises en jeu
qui rejoignent les différentes régions, une même molécule pou- dans les fibres
vant traverser successivement plusieurs régions. L’interprétation
courante de cette structure se fait actuellement par le modèle La résistance du papier fait intervenir la résistance des fibres et
biphase “fringed fibril” [5]. La figure 3b illustre la structure celles des liaisons entre fibres. Plusieurs mécanismes permettent
interne d’une microfibrille selon ce modèle [6]. L’alternance des aux fibres de se lier entre elles lors de la mise en feuille :
régions amorphes et cristallines est un facteur important dans les (a) L’interdiffusion des molécules de cellulose de surface entre
propriétés de résistance mécanique du papier. deux fibres adjacentes qui est rendue possible par le gonflement
Le degré de cristallinité, le plus souvent mesuré par diffraction des fibres dans l’eau lors de la mise en pâte, état qui forme une
de rayons X permet de quantifier les proportions relatives des couche d’hydrogel superficielle. La force des liaisons interfibres
domaines cristallins et amorphes. Ce degré de cristallinité varie est ainsi augmentée grâce à l’augmentation de la surface de
selon l’espèce végétale, étant par exemple de 56-65 % pour le contact ;
(b) L’emboitement mécanique se dit de l’enchevêtrement entre
les fibrilles externes de surface de la fibre se rapprochant lors du
séchage de la feuille depuis la suspension diluée de pâte. Il ne
met pas en jeu de forces d’adhésion ;
OH OH
(c) Les forces capillaires qui se développent également lors du
OH OH séchage de la feuille. Elles reposent sur la formation d’un
HO O O OH
O HO ménisque mettant en jeu des forces de Laplace qui maintiennent
O
HO O HO les deux surfaces de fibres adjacentes ensemble ;
O O
HO OH OH (d) Les forces électrostatiques qui s’expliquent principalement par
OH OH n les charges carboxyliques (acides uroniques) présentes surtout dans
les hémicelluloses, bien que la cellulose possède elle aussi quelques
Extrémité Unité anhydroglucose Extrémité fonctions acides carboxyliques formées au cours de certains traite-
non réductrice (AGU) réductrice ments papetiers. Les fonctions carboxyliques peuvent se dissocier et
des liaisons avec les cations sodium et calcium dans l’eau peuvent
Les atomes d’hydrogène ne sont pas représentés pour plus de clarté. se créer lors de la formation de la feuille ;
(e) Les liaisons hydrogène qui sont désignées de manière consen-
Figure 1 – La molécule de cellulose (d’après [1]) suelle comme celles sur lesquelles repose le plus largement l’édifice
QTS
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
afVXRU
R
15,0 nm
Figure 3 – Architecture des microfibrilles de cellulose et structure interne d’une microfibrille (d’après [6] [7])
(f) Les liaisons de van der Waals qui sont le plus souvent
décrites comme intervenant principalement dans la stabilisation
o o de la structure cristalline entre les feuillets, dans le troisième plan
(plan b). Cependant un modèle récent attribue aux liaisons de van
O O
o o der Waals un rôle prépondérant au détriment des liaisons hydro-
6 gène [9]. Selon ce modèle, quand les surfaces sont proches la
o o6
o
3
o force des liaisons de van der Waals est plus importante que celles
o o des liaisons –OH électrostatiques interfeuillets bien que l’énergie
O O de liaison de ces dernières soit plus grande.
2
6
o2 6 o Tous ces mécanismes sont mis en jeu en solution aqueuse lors
o o
du séchage de la feuille. Le papier étant un matériau hygrosco-
o o
o o 3 pique, l’eau résiduelle présente à l’état « sec », c’est-à-dire à l’état
d’équilibre en conditions hygrothermiques ambiantes, est donc un
2 o O 2
o O facteur primordial de la résistance du matériau.
6 6
o 3 o Les énergies de liaison interfibres les plus élevées au sein des
3 o o
microfibrilles de cellulose, tel que proposé par Hirn & Schennach
o o
dans [9] seraient les liaisons de van der Waals et les forces élec-
O
o 2
O 2
o
trostatiques (Coulomb), avec une grande marge d’erreur sur ces
dernières.
o o
o o
o o
1.3 Isotherme de sorption
Figure 4 – Liaisons hydrogène intramoléculaires (-OH(C6) –OH(C2)
et –OH(C3) O(5)cyclique) et intermoléculaires (–OH(C3) –OH(C6)) Nous avons vu que l’eau joue un rôle très important dans la
de la cellulose résistance mécanique du papier. Selon son âge, le type de pâte,
son degré de raffinage ou de blanchiment et selon les additifs
papetiers (charges, encollages), le papier peut contenir entre 4 %
semi-cristallin. Sur la base des fonctions hydroxyles (–OH) et des et 8 % d’eau à l’équilibre à 20 °C et 50 % d’humidité relative (Hr).
atomes d’oxygène pyranosique et glycosidique, un système Cette eau correspond à l’humidité résiduelle à l’équilibre. Elle peut
ordonné de liaisons hydrogène permet de former différents types de être évaluée par la mesure du taux de siccité par pesée avant et
structures supramoléculaires. Ces liaisons s’établissent au sein après séchage dans une étuve à 105 °C (normes ISO 287:2009 et
d’une même molécule de cellulose entre –OH(C6) et –OH(C2) et entre TAPPI T 412 om-02). Les molécules d’eau s’intercalent entre les
–OH(C3) et O(5)cyclique (plan c) (liaisons intramoléculaires) et entre molécules de cellulose dans les régions amorphes et se lient par
deux molécules de cellulose, entre –OH(C3) et –OH(C6) (plan a) (liai- des liaisons hydrogène aux hydroxyles cellulosiques. En
sons intermoléculaires). Elles se forment à l’intérieur des feuillets, revanche, la forte densité de liaisons hydrogène dans les régions
les premières étant responsables de la conformation et de la rigidité cristallines rend celles-ci totalement inaccessibles sauf dans leur
des chaînes simples et les secondes de la structure en feuillets du zone superficielle interfaciale.
polymère natif (figure 4). Entre les feuillets des liaisons hydrogène Entre l’état sec et la saturation en eau, le diamètre des fibres
CH–O plus faibles se forment également [4] ; cellulosiques augmente de 15 à 20 %. À Hr = 100 %, un papier de
QTT
r←ヲ←イ・ョ」・@iョエ・イョ・エ
afVXRU
R
sionnelle de la feuille plus importante dans la direction perpendi- 10
culaire au sens machine, dit « sens travers ». Cette caractéristique 8
peut poser problème lors des traitements de nettoyage en solu- 6
tion aqueuse des objets culturels cellulosiques où des modifica-
tions dimensionnelles peuvent survenir. 4
2
La sorption d’eau par une fibre de cellulose en fonction de
l’humidité relative ambiante, à température constante, n’est pas 0
une relation linéaire mais elle suit une courbe sigmoïde appelée 0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100
isotherme de sorption. L’isotherme de sorption représente la
Humidité relative (%)
quantité d’eau contenue dans les fibres à l’équilibre en fonction
de Hr à une température donnée (figure 5).
Figure 5 – Isotherme de sorption – désorption de la cellulose de
Les isothermes peuvent être représentées par des fonctions coton à 24,6 °C (d’après [10])
mathématiques. Deux mécanismes théoriques principaux sont
proposés pour expliquer la sorption d’humidité par les matériaux
fibreux comme le papier. Ce sont l’adsorption de surface et la
condensation capillaire. À très faible Hr, les molécules d’eau
s’intercalent entre les molécules de cellulose dans les régions
1.4 Mesure des propriétés mécaniques
amorphes et forment des liaisons hydrogène d’abord avec les du papier
hydroxyles cellulosiques, en couche monomoléculaire puis, pro-
gressivement entre elles, formant une couche mutimoléculaire au La résistance sous contrainte imposée est une propriété impor-
fur et à mesure de la sorption. Cette théorie sert de base aux tante du papier. Elle dépend de façon complexe de facteurs tels
modèles d’isothermes de sorption Brunauer, Emmett and Teller que le grammage, la formation de la feuille, les additifs, et non
(BET) et Guggeheim, Anderson and de Boar (GAB). des moindres, l’humidité résiduelle (donc l’humidité relative) ainsi
que le vieillissement. Un facteur important est également le sens
L’accumulation progressive d’eau quand Hr augmente se fait du papier dans lequel est découpé l’éprouvette, la plupart des pro-
donc d’abord entre les molécules de cellulose dans les zones priétés de résistance mécanique sont remarquablement plus
désordonnées et interfaciales, puis aux fortes Hr (> 80 %) l’eau est importantes dans le sens marche que dans le sens travers. Par
absorbée directement dans les pores et capillaires formés par la exemple, le module d’élasticité et l’indice de rupture, paramètres
structure fibreuse, par un mécanisme de condensation capillaire qui sont définis ci-dessous, sont 2 à 4 fois supérieurs dans le sens
selon l’équation de Kelvin. La distribution et la taille des pores machine que dans le sens travers. Au contraire, les valeurs de
déterminent alors l’humidité résiduelle dans le papier. l’allongement à la rupture dans le sens machine sont 0,25 à
Pour un même échantillon de papier les isothermes de sorption 0,5 fois celles dans le sens travers [11].
et de désorption ne sont pas superposables. Cette caractéristique, Comme de nombreux polymères le papier est un matériau vis-
importante dans le comportement du papier vis-à-vis de l’eau et coélastique plastique. La résistance mécanique des fibres de cellu-
qui est observable sur de nombreux systèmes physiques et lose reflète la chimie du matériau (par exemple elle augmente
chimiques soumis à différents types de contraintes, est le phéno- avec le DP), la structure du réseau fibreux, la morphologie et la
mène d’hystérésis. La définition physique de l’hystérésis est la structure des fibres (par exemple elle augmente avec la cristalli-
persistance d’un phénomène quand cesse la cause qui l’a produit. nité, et l’acuité de l’angle d’orientation des microfibrilles par rap-
L’hystérésis représente donc la dépendance temporelle d’un résul- port à l’axe principal de la fibre) [12]. Les propriétés mécaniques
tat, les données passées influençant les données présentes. Pour peuvent se mesurer par des essais normalisés dont les principaux
certains papiers, on observe jusqu’à 5 % de différence dans sont détaillés ici. Ces essais, à charge imposée, sont largement
l’humidité résiduelle selon la direction, croissante ou décrois- utilisés dans l’industrie et dans les laboratoires de recherche,
sante, du transfert d’humidité, surtout dans les régions de notamment dans l’évaluation des effets du vieillissement sur le
moyenne-forte Hr (figure 5). Ce phénomène permet aussi d’expli- papier.
quer que l’historique de multiples séquences successives de sorp-
tion et désorption d’eau influence l’aptitude globale de sorption 1.4.1 La résistance au pliage
de la cellulose. Cela a des conséquences dans tous les domaines
d’application du papier et en particulier celui de la conservation Il existe deux méthodes de mesure de la résistance au pliage.
des œuvres et objets culturels cellulosiques. Un papier ayant subi La méthode MIT est réputée mieux représenter la contrainte appli-
successivement plusieurs phases de mouillage et de séchage ou quée à une feuille de livre lors de l’action répétée d’ouverture et
des conditions de Hr fluctuant sur une large plage de façon répé- de fermeture et donc la détérioration au vieillissement que la
tée au cours de sa vie peut voir sa capacité de sorption d’eau pro- méthode Schopper [11]. Elle est déterminée par les normes TAPPI
gressivement diminuer. Ceci peut éventuellement modifier T 511 om-02 et ISO 5626:1993 et donne une information sur les
l’efficacité de certains traitements de restauration lorsque l’humi- contraintes spécifiques que le papier subit lorsqu’il est plié (flexi-
dité est utilisée pour véhiculer des molécules actives à l’intérieur bilité, plasticité). Le double – pli est une oscillation complète de
des fibres. l’éprouvette, au cours de laquelle elle est pliée dans un sens puis
QTU
GAGNEZ DU TEMPS ET SÉCURISEZ VOS PROJETS
EN UTILISANT UNE SOURCE ACTUALISÉE ET FIABLE
RÉDIGÉE ET VALIDÉE MISE À JOUR 100 % COMPATIBLE SERVICES INCLUS
PAR DES EXPERTS PERMANENTE SUR TOUS SUPPORTS DANS CHAQUE OFFRE
NUMÉRIQUES
www.techniques-ingenieur.fr
CONTACT : Tél. : + 33 (0)1 53 35 20 20 - Fax : +33 (0)1 53 26 79 18 - E-mail : infos.clients@teching.com
LES AVANTAGES ET SERVICES
compris dans les offres Techniques de l’Ingénieur
ACCÈS
SERVICES ET OUTILS PRATIQUES
Archives Impression à la demande Alertes actualisations
Technologies anciennes et versions Commandez les éditions papier Recevez par email toutes les nouveautés
antérieures des articles de vos ressources documentaires de vos ressources documentaires
*Questions aux experts est un service réservé aux entreprises, non proposé dans les offres écoles, universités ou pour tout autre organisme de formation.
www.techniques-ingenieur.fr
CONTACT : Tél. : + 33 (0)1 53 35 20 20 - Fax : +33 (0)1 53 26 79 18 - E-mail : infos.clients@teching.com