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DES EAUX
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SOMMAIRE
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Les problèmes de rareté et d’accessibilité ont fait que l’insuffisance d’eau douce
constitue un problème mondial de plus en plus critique. D’où la nécessité de dégager
des nouvelles ressources en eau.
En effet, les besoins en eau présents et futurs ne peuvent être couverts et satisfaits
que si des ressources non conventionnelles (recyclage et dessalement de l’eau) sont
utilisées. Le dessalement en l’occurrence pourrait être la solution clé !
Le présent chapitre s’inscrit concerne le dessalement des eaux salées. Après une
introduction par les généralités correspondantes, ce chapitre présente les différents
procédés de dessalement les plus usuels, et quelques notions sur leur
consommation énergétique. On présente ensuite une comparaison des différentes
technologies de dessalement. Dans une troisième partie, on donne un aperçu sur
l’expérience du Maroc au niveau du dessalement de l’eau de mer.
Cette eau douce produite est susceptible à la consommation : eau potable ou très
rarement utilisable pour l'irrigation en raison du coût. Sa potabilisation est ensuite
rendue possible par l’ajout de produits chimiques appropriés.
Il est beaucoup plus facile et avantageux d'extraire l'eau plutôt que le sel : on peut en
effet choisir de ne retirer qu’une partie d’eau ou presque sa totalité ; alors qu’il
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faudrait extraire tout le sel pour obtenir ne serait-ce qu’une goutte d’eau douce. En
plus, il est très difficile de débarrasser l’eau du sel en solution.
En pratique, pour éviter d’avoir à gérer les 35 kilogrammes de sel contenus dans
chaque mètre cube d'eau de mer traitée, on n'extrait pas toute l'eau douce : on
préfère concentrer l'eau de mer, d'un facteur environ égal à 2. Ainsi, pour chaque
mètre cube d'eau de mer traité - soit 1000 litres - on produira 500 litres d'eau pure et
on rejettera une saumure de 500 litres d’eau très salée (contenant 70 grammes par
litre de sel).
Energie
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Figure 2.2 : Cycle naturel de l’eau
L’eau de mer ainsi que les eaux saumâtres concernées par le dessalement se
différencient par leur concentration en sels dissous et par leur composition.
Le terme d’eau de mer regroupe l’eau salée des mers et des océans à la surface de
la terre. Elles occupent un volume estimé à 1 340 millions de km³; ce qui représente
97% de la capacité totale des grands réservoirs d'eau à la surface de la terre.
Sel Concentration %
NaCl 27,2 g/l 78%
MgCl2 3,8 g/l 11%
MgSO4 1,7 g/l 5%
CaSO4 1,26 g/l 3,5%
K2SO4 0,86 g/l 2,4%
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La salinité moyenne des eaux des mers et océans est de l’ordre de 35g/l dont 78%
de NaCl. En plus, l'eau de mer est un milieu légèrement basique ; soit un pH entre
7,5 et 8,4.
Il est clair que la salinité est très variable selon les régions et les saisons. Pour le cas
de mers fermées, les différentes salinités sont :
On appelle eau saumâtre une eau salée non potable de salinité inférieure à celle de
l'eau de mer.
Les eaux saumâtres ont une composition très diverse. La concentration totale est
très inférieure à celle de la plupart des mers avec une salinité en général inférieure à
10 grammes par litre. Ce sont parfois des eaux de surface ; mais, le plus souvent des
eaux souterraines qui se sont chargées en sels en traversant les sols. Leur
composition dépend donc de la nature des sols traversés. Les principaux sels
dissous sont le CaCO3, le CaSO4, le MgCO3 et le NaCl.
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Les eaux salées possèdent un potentiel chimique plus élevé que celui des eaux
douces, car elles diffèrent de celles-ci par l’énergie libre de dilution des sels, selon
l’équation (2.1) :
Où
L’énergie minimale qui doit être alors fournie à l’eau salée, dans le cas d’une
transformation idéale réversible, est représentée par la différence des deux potentiels
chimiques. Elle est appelée « dépense énergétique minimale » ou « travail minimal »
et est exprimée par la relation suivante :
E= RT Ln p/p0 (2. 2)
avec :
Cette expression représente le travail minimal à fournir à l’eau salée pour obtenir une
mole d’eau pure ; et ce, quel que soit le procédé de séparation utilisé. A titre
d’exemple, soit un échantillon représentatif d’eau océanique à 25 °C, pour lequel la
pression de vapeur de la saumure est de 2 % inférieure à celle de l’eau pure. Cette
énergie minimale vaut 13 calories/mole, soit 3kJ/kg, qui semble être une valeur
faible.
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rendements thermodynamiques faibles et des pertes au niveau des différentes
installations du procédé.
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Les procédés de distillation et les procédés membranaires constituent les deux
grandes familles de procédés utilisés aujourd’hui à l’échelle industrielle pour le
dessalement d’eau de mer. D’autres méthodes ont pu voir le jour ; mais, elles sont
encore au stade du laboratoire ou en cours de développement et rien ne garanti
qu’elles seront compétitives par rapport aux procédés déjà bien implantés.
Pour les procédés thermiques, il y a la distillation flash multiple effets désignée par
l’abréviation MSF, la distillation à effets multiples MED avec leurs variantes, la
compression de la vapeur désignée par VC, et les méthodes de congélation.
Environ la moitié de l’eau dessalée dans le monde est produite au moyen de chaleur
servant à distiller de l’eau douce à partir de l’eau de mer.
Les procédés thermiques de distillation sont mis en œuvre depuis longtemps sur les
navires en utilisant la chaleur récupérée sur les gaz d'échappement des moteurs
diesel ou des chaudières.
Dans l’usine, l’eau est chauffée jusqu’à ébullition pour produire la quantité maximale
de vapeur. Pour que le procédé soit économiquement rentable, la pression appliquée
sur l’eau à bouillir est ajustée pour maîtriser le point d’ébullition.
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Ce type de distillation est un procédé très énergivore en raison de la valeur
importante de la chaleur latente de vaporisation de l'eau (quantité de chaleur
nécessaire pour transformer un kg d'eau liquide en vapeur à la même température
lors d’un changement d'état). Celle-ci est d’environ 2250 kilojoules à une température
de 100°C. Pour réduire la consommation d'énergie importante nécessaire à la
distillation industrielle, des procédés à multiples effets permettant de réutiliser
l'énergie libérée lors de la condensation ont été mis au point.
Dans ce procédé de distillation par détentes successives ou flash (MSF), l’eau salée
est portée sous pression à une température de 120°C. Elle est introduite dans une
enceinte (ou étage) où règne une pression inférieure. L’introduction soudaine de
l’eau chauffée déclenche son évaporation instantanée par détente appelée Flash
(figure 2.4). Une partie de cette eau qui s’évapore va se condenser sur les tubes
condenseurs placés en haut de l'enceinte, et l'eau liquide est recueillie dans des
réceptacles en dessous des tubes. L’eau qui a fourni de l’énergie pour la
vaporisation cesse de bouillir pour se mettre en équilibre avec la pression de vapeur
régnant dans l’enceinte. Elle passe ensuite dans une deuxième enceinte où la
pression ambiante est encore plus faible. Il se produit encore un nouveau flash, une
nouvelle condensation et donc une nouvelle enceinte où la pression est encore plus
faible, etc.
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Figure 2.4 : Diagramme du procédé de distillation à détentes en 3 étages (MSF)
La vaporisation de l'eau est ainsi réalisée par détentes successives dans une série
d'étages où règnent des pressions de plus en plus réduites. On peut trouver jusqu'à
40 étages successifs dans une unité MSF industrielle.
Le concept de distillation de l’eau dans des étages successifs dont chacun est
maintenu à la pression inférieure à la pression saturante correspondant à la
température de l’eau dans l’étage, n’est pas nouveau et est appliqué depuis plus
d’un siècle.
L’eau de mer circule à l’intérieur des condenseurs de la cellule la plus froide vers la
plus chaude. En traversant les n cellules, sa température s’élève de t0 à (t0 + nΔt). Un
réchauffeur porte ensuite sa température à (t + nΔt). Elle est alors admise dans la
cellule la plus chaude, où règne la température t. Cela provoque la première détente.
La vapeur produite est transférée dans la cellule voisine, où se produit la deuxième
détente. Ce processus se reproduit jusqu’à la cellule la plus froide. À la sortie de
celle-ci, on obtient une saumure à la température t et un distillat à la même
température (figure 2.5).
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Figure 2.5 : Processus de distillation à détentes étagées (MSF)
Lors du phénomène du flash, des gouttelettes d'eau salée peuvent être entraînées
avec la vapeur. Pour les séparer, un dévésiculeur est utilisé. Celui-ci est constitué
par une sorte de grillage limitant le passage de ces gouttelettes qui retombent ainsi
au fond de l'enceinte.
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Figure 2.6 : Diagramme du procédé de distillation à multiple effet (MED)
Ainsi, seule l'énergie nécessaire à l'évaporation dans le premier effet est d'origine
externe. La multiplication du nombre d'effets permet donc de réduire la
consommation spécifique (énergie/m3 d'eau douce produite).
La distillation à multiple effet (MED) comporte donc une série de cellules fonctionnant
à des pressions et des températures décroissantes. Les pertes de chaleur sont
inférieures et le rendement meilleur. Il peut être augmenté s'il y a compression de la
vapeur. Les coûts énergétiques sont importants : de l'ordre de 15 kWh par m3.
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Figure 2.7 : Le procédé de distillation à multiples effets (MED)
Les évaporateurs multiples effets à tubes horizontaux arrosés sont les plus
utilisés actuellement et sont constitués d’une enceinte cylindrique ou calandre et d’un
faisceau de tubes. Le fluide de chauffage s'écoule dans les tubes horizontaux de ces
appareils ; tandis que l'eau de mer à évaporer est arrosée de façon à s'écouler sous
forme de film le plus uniforme possible sur l'extérieur des tubes. La vapeur produite
dans la calandre est ensuite envoyée dans les tubes de l'effet suivant où elle cède
son énergie de condensation. Ces évaporateurs ont un très bon coefficient
d'échange grâce à l'écoulement en film de l'eau de mer. C'est pourquoi ils
remplacent actuellement les plus anciens évaporateurs à faisceau de tubes noyés
dans lesquels les tubes étaient plongés dans l'eau de mer.
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placées des plaques métallique. L'eau de mer à évaporer s'écoule alors sous forme
de film le long d'une mince plaque métallique chauffée par la vapeur provenant de
l'effet précédent. Celle-ci s'écoule le long de l'autre face de la plaque métallique. De
nombreuses plaques entre lesquelles s'écoulent alternativement l'eau de mer et la
vapeur de chauffage sont associées en parallèle pour constituer un effet. La vapeur
produite est recueillie dans la calandre et est ensuite envoyée dans le deuxième effet
et ainsi de suite.
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Figure 1.5 : La compression mécanique de vapeur (IB)
Le procédé de distillation par compression de vapeur (VC) est utilisé pour des
installations de dessalement de petite ou moyenne capacité. Les unités VC sont
souvent utilisées pour les stations de villégiature, les zones industrielles et de forage
ne pouvant avoir un accès facile à de l’eau douce. Leur simplicité et facilité
d’exploitation se prêtent bien à de petites installations. Les unités mécaniques VC
ont une capacité variable de quelques litres à 3 000m3/jour.
La réfrigération est une méthode fondée sur la différence entre les points de
congélation de l'eau douce et de l'eau salée. Cette méthode de dessalement fait
intervenir trois étapes principales :
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En refroidissant une eau de mer jusqu’à environ -2°C (point de congélation), les sels
dissous sont naturellement éliminés lors de la formation de cristaux de glace. Cette
dernière est constituée d’eau douce puisque les sels dissouts sont éjectés à la
surface des cristaux formés. On procède à un lavage avec de l’eau douce pour
éliminer ces sels, suivi de la fonte de la glace.
La production d’eau douce dans ces bassins est de l’ordre de 40 à 50 l/m2.j, lorsque
la température de l’air est de -5°C, et de 120 à 160 l/m2.j lorsque cette dernière est
de -20°C.
Par ailleurs, le froid nécessaire à la congélation doit être produit par une machine
frigorifique qui consomme une énergie noble, électrique (groupe frigorifique) ou
thermique à température moyenne (machine à absorption). Quoi qu’il en soit, même
ramené à une source d’énergie primaire, le bilan énergétique reste très en faveur de
la congélation. Le froid, stocké sous forme de glace, peut être utilisé pour des
usages de climatisation de locaux.
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Toutefois, les problèmes de corrosion et d’entartrage sont moins importants lorsque
la température est basse. Aussi, l’eau produite par congélation est directement
utilisée pour la consommation : elle est fraîche, minéralisée à point et relativement
bien oxygénée.
Dans les années 60, quelques installations pilotes ont été réalisées aux USA, en
Israël et au Royaume-Uni. Malheureusement, il n’y a pas eu de suite en raison des
performances finalement médiocres et des problèmes de pureté de l’eau produite.
Ainsi, ce procédé n’existe pas encore à l’échelle industrielle, car produire du froid
coûte plus cher que produire de la chaleur.
Dans la nature, les membranes jouent un rôle important pour séparer les sels. Aussi,
des processus de dialyse et d’osmose se produisent dans les organismes vivants.
Sous l’action d’un gradient de concentration, le transfert de l’eau, à travers une paroi
semi-perméable, se fait naturellement de la solution la moins concentrée vers la plus
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concentrée. Ce gradient de concentration correspond à la pression osmotique
(pression d’équilibre).
L’osmose inverse est l’application sur le liquide concentré d’une pression supérieure
à la pression osmotique. Cette fois-ci un flux d’eau douce dessalée passe dans
l’autre sens c.à.d. le solvant va migrer de la solution concentrée à la solution diluée.
Il est à noter que pour le traitement de l'eau de mer, la pression à appliquer est de
l’ordre de 54 à 80 bars. Ce procédé fonctionne à température ambiante et n'implique
pas de changement de phase. Aussi, les membranes polymères utilisées laissent
passer les molécules d'eau et empêchent le passage de particules sels dissoutes et
de molécules organiques de taille d’environ 10-7 mm. La teneur en sels dans l'eau
produite est de l'ordre de 0,5 g.l -1.
En pratique, l’eau d'alimentation est pompée dans une cuve étanche où elle
pressurée contre la membrane. À mesure qu’une fraction de l’eau diffuse à travers la
membrane, la teneur en sels de la fraction restante augmente. En même temps, une
partie de cette eau d’alimentation est rejetée, sans diffuser à travers la membrane.
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Figure 2.6 : fonction de la membrane d’OI
Les dernières années ont été marquées par l’essor du procédé OI. Bien que le
concept de ce dernier n’ait pas fondamentalement changé, il a donné lieu à des
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améliorations constantes en ce qui concerne l’efficacité des membranes, la
récupération d’énergie, le contrôle des opérations sur membrane et les
enseignements tirés de l’exploitation, ce qui a permis une réduction globale du coût
de l’eau produite par ce procédé.
L’électrodialyse utilise donc la mobilité des ions d’un électrolyte soumis à un champ
électrique appliqué entre deux électrodes (cathode et anode) trempant dans le
liquide. Ce qui permet la migration des ions (positifs et négatifs) à travers ces
membranes. Ainsi, les ions positifs passent à travers les membranes cationiques
attirés par l’anode et les ions négatifs passent à travers les membranes anioniques
attirés par la cathode. L’eau douce est alors récupérée entre les membranes. En
effet, les membranes utilisées en électrodialyse laissent passer les ions ; mais, sont
imperméables à l’eau. C’est exactement l’inverse pour les membranes utilisées en
osmose inverse.
figure 2.8.
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Figure 2.8 : Principe de l’électrodialyse
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L’électrodialyse est un système très rentable pour les faibles salinités ou
concentrations (eaux saumâtres), mais prohibitif pour l’eau de mer.
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Références Bibliographiques
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21. BANDELIER Philippe, Le dessalement d’eau de mer et des eaux saumâtres,
Article : 121, Usages de l'énergie, encyclopédie de l’énergie, 2017
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