Vous êtes sur la page 1sur 22

SARTRE.

UNE ÉCRITURE
CRITIQUE
Jacques Deguy
 Editeur : Presses universitaires du Septentrion

 
 Lieu d’édition : Villeneuve d'Ascq

 
 Année d’édition : 2010

Sartre contre de Gaulle : le


fil de la plume
p. 209-220

NOTE DE L’AUTEUR TEXTE NOTES
NOTE DE L’AUTEUR
« Sartre contre de Gaulle : le fil de la plume », Nord’, n° 14 (« De Gaulle écrivain/de Gaulle
et les écrivains »), décembre 1989, p. 89-101.

« Longtemps j’ai pris ma plume pour une


épée. »
Sartre, Les Mots

 1 « La tribune des Temps Modernes », série de 10 émissions de


Marc Floriot, France-Culture, du 14 au (...)

1France-Culture a rediffusé en août 1989 l’intégralité des


émissions proposées à l’automne 1947 par l’équipe de la
revue  Les Temps Modernes réunie autour de son directeur
Jean-Paul Sartre, une « Tribune » de libre expression qui
consacrait par le médium radiophonique l’importance prise au
lendemain de la guerre par le mouvement existentialiste, et
qui répondait au désir de son fondateur d’« engager »
philosophie et littérature dans les luttes politiques de
l’époque1.
2De la lutte, il va y en avoir dès la première émission, le 27
octobre 1947, qui prend pour cible d’un tir groupé le RPF
récemment formé, et qui la veille avait remporté une nette
victoire au premier tour des élections municipales (près de
40 % des suffrages exprimés). Sur les ondes du « programme
parisien », Sartre et ses amis, déchaînés, vont mêler à
l’analyse proprement politique une série d’attaques contre la
personne de de Gaulle dont le moins qu’on puisse dire est
qu’elles retiennent l’écoute, même après plus de quarante
ans. Inventant une sorte de  Tribunaldes Flagrants
Délires avant la lettre, ils mettent en scène un réquisitoire à
plusieurs voix dont l’accusé principal, absent, se retrouve
défendu… par un comédien habitué des pièces de Sartre que
l’on charge de lire un texte prétendument constitué des
arguments ordinaires des gaullistes et de leur chef. Le
résultat de ce montage est plutôt explosif, le pseudo-gaulliste
ne trouvant rien de plus pertinent par exemple que de
comparer, dans un amalgame explicite, de Gaulle à Pétain :
Maréchal, général, c’est tout un. Tous deux sont de l’armée, de la
Grande Muette ; tous deux sont des orateurs éloquents, tous deux
catholiques, tous deux ont pour principe que la souveraineté vient
d’en haut, tous deux ont fait don de leur personne à la France ;
tous deux haïssent ces mensonges qui nous ont fait tant de mal.

 2 Voir Annie Cohen-Solal, Sartre, Gallimard, 1985, p. 128. On


trouvera un portrait de Bonnafé par Sar (...)

3Et ce n’est qu’un début : Alphonse Bonnafé, ancien collègue


de Sartre au Havre avec lequel il s’entraînait à la boxe dans
les salles de sport de la ville 2 et qui avait obtenu du cabinet
de Ramadier cet accès des  Temps Modernes à la radio,
enchaîne sur d’autres amalgames, ironisant sur les
ressemblances phonétiques entre RPF et PPF. Son passé de
boxeur amateur l’amène à prendre la tête du général
comme  punching-ball lorsqu’il évoque les affiches du RPF
placardées sur les murs de Paris :
Vous l’avez vu ce grand portrait du Général ? […] Ça donne un
choc, je vous assure : cette petite moustache, puis ces paupières
lourdes sur un regard de fer, et cette bouche, et ce cou de
forcené… À part la mèche sur le front, tout y est, je vous dis, tout !
Et tout le monde le dit en passant : « Mais c’est… »
[Sartre] Allons, Bonnafé, vous tenez à le dire !
[Bonnafé] Et vous, vous y tenez à m’empêcher de le dire ?

 3 Voir le dernier chapitre de Qu’est-ce que la littérature ?,


« Situation de l’écrivain en 1947 ».

4Le nom d’Hitler, comme celui du diable, ne sera pas


prononcé. Mais Simone de Beauvoir avait cité auparavant
Franco et Salazar et personne, bien sûr, ne s’y trompa. Ce
coup d’essai médiatique – coup de maître dans le genre,
assez rare, de la provocation, et qui illustrait le désir de Sartre
d’aller vers le public, au-delà de la seule écriture, par les
moyens modernes de communication3 – déchaîna le scandale.
 4 Voir A. Cohen-Solal, op. cit., p. 387-388.

 5 Michel Contat et Michel Rybalka, Les Écrits de Sartre,


Gallimard, 1970, p. 170-171.

5Michel Contat puis Annie Cohen-Solal racontent comment


les milieux gaullistes s’indignèrent de ce qu’ils ne prirent
point pour le dernier canular d’un normalien célèbre. Henry
Torrès et le général Guillain de Bénouville, en guise de droit
de réponse, insultèrent Sartre venu débattre avec eux à la
radio, en présence de Raymond Aron, médiateur choisi pour
son ancienne amitié avec Sartre, sa participation à la première
équipe des  Temps Modernes (il n’en faisait plus partie en
1947) et son engagement gaulliste : mis dans l’impossibilité
de défendre l’émission incriminée, il vit là les derniers liens se
rompre avec son ancien « petit camarade », qu’il ne
retrouvera à ses côtés qu’un jour de 1979 sur le perron de
l’Élysée pour plaider la cause des  boat-people4. Dans un
article de  Carrefour (29 octobre 1947) l’ancien collaborateur
des  Temps Modernes Albert Ollivier traita les protagonistes
de l’émission de « fascistes virtuels » ; dans le même numéro,
un Paul Claudel fulminant lança ce mot : « M. Sartre s’en
prend au physique du général de Gaulle : est-il si satisfait du
sien ? »5. La polémique ne prenait guère d’envol, et Sartre
subit le sort de l’arroseur arrosé. Il multiplia les déclarations à
la presse, avec un bonheur inégal :
 6 Combat, 27 octobre 1947 ; cité par Contat-Rybalka, op. cit.,
p. 171. On aura une idée de l’affiche (...)

 7 L’Ordre de Paris, 22 octobre 1947 ; cité par A. Cohen-


Solal, op. cit., p. 387.

On prétend que j’ai comparé de Gaulle à Hitler. C’est faux.


J’ai comparé les affiches du RPF avec certaines affiches de
propagande nazie6.
Je n’éprouve aucune haine à l’égard de la personnalité de M. de
Gaulle. Comment le pourrais-je ? Je ne le connais pas7.

6Il aurait pu argumenter sur le déroulement et la nature de


l’émission, avec sa mise en ondes polyphonique et
dramatisée, avec l’artifice du gaulliste fabriqué de toutes
pièces ; insister surtout sur le fait que sa propre voix ne
portait pas les insinuations les plus graves (Sartre s’y livrait
surtout à une critique tout à fait politique de l’attitude de
chantage à la guerre froide qui ressort des positions du RPF).
Avec panache, il assuma au contraire, nous venons de le lire,
son rôle de « directeur » des  Temps Modernes et de bouc
émissaire, utilisant pour répondre une première personne du
singulier qui mérite réflexion.
 
 8 Sur l’hégémonie de Sartre dans les années d’après-guerre, on
lira Anna Boschetti, Sartre et « Les T (...)

 9 Jean-Paul Sartre, La Nausée, in Œuvres romanesques,


Pléiade, p. 110.

7Sans aucun doute, le philosophe éprouva un vif plaisir à ce


scandale médiatique, qui installait l’existentialisme au cœur
de la politique plus sûrement qu’un article, fût-il incendiaire,
dans une revue intellectuelle à la diffusion nécessairement
restreinte8. Un désir ancien d’efficacité et de violence se
réalisait : Pardaillan rencontrait enfin des adversaires à sa
mesure. Porté par l’euphorie du groupe réuni autour du
micro, il se livrait à un éreintement public digne par son excès
des meilleurs happenings surréalistes de l’avant-guerre,
comme le pamphlet rédigé à la mort d’Anatole France (Un
cadavre), ou le procès de Maurice Barrès organisé par Dada
avec A. Breton en accusateur public en mai 1921. Roquentin
rêvait déjà dans  La Nausée : « J’ai fessé Maurice Barrès ». Il
s’agit cette fois de démolir la figure, à tous les sens du mot,
d’un grand homme. Jeu de guignol déjà inscrit lui aussi dans
la scène fameuse du musée de Bouville où Roquentin se laisse
fasciner par le portrait des anciens « chefs » de la cité, dont
Olivier Blévigne (il « portait une petite moustache noire et son
visage olivâtre ressemblait un peu à celui de Maurice
Barrès »9) – avant de se ressaisir à la fin de la visite en lançant
au visage de tous ces notables peints dans leur suffisance un
anarchiste et retentissant « salauds ! ». Récupérée par le
philosophe, l’injure deviendra dans  L’Être et le Néant une
catégorie conceptuelle à part entière, l’étiquette accolée à
ceux en qui le personnage dévore l’authenticité de la
personne.
8L’image de de Gaulle cristallise, pour le malheur de celui-ci,
une série impressionnante de phobies sartriennes, repérables
dans la biographie et dans l’œuvre. Phobie de l’armée : Sartre
combattit dès ses années d’École normale tout ce qui
ressemblait de près ou de loin à la hiérarchie militaire (il
refusa de se plier à la préparation militaire supérieure et mit
son point d’honneur à terminer son service comme 2  classe),
e

à une école militaire (explication trop simple : son père et son


beau-père sortaient tous deux de Polytechnique), à une revue
du 14 Juillet (des manuscrits préparatoires
aux  Mots évoquent en une métaphore crue la virilité dressée
des soldats opposée à la passivité féminine de la foule où se
pâment les gens de lettres). Plus précise encore : la phobie de
la moustache, signe d’une virilité fascisante, qui hante aussi
les cauchemars de Roquentin et que Lucien Fleurier, à la fin
de « L’Enfance d’un chef » décide de se laisser pousser alors
qu’il rejoint un mouvement d’extrême droite mené par le
moustachu et bien-nommé Lemordant.
 
9À la radio, Bonnafé exprime ainsi, dans son agressive rêverie
sur la photo du Général, des schèmes de sensibilité tout à fait
sartriens. Incluant et dépassant le désaccord politique, le
rapport à l’actualité se leste du poids d’un monde intérieur
affectivement structuré. Sans autre forme de procès, de
Gaulle devient un personnage sartrien le temps d’une brève et
joyeuse flambée d’agressivité, personnage-relais entre
d’autres figures de « salauds » dont les derniers avatars
seront le Grand-Père des  Mots et le père Flaubert de  L’Idiot
de la Famille. Lapsus de l’imaginaire dans la politique (mais la
politique évacue-t-elle toujours l’imaginaire, en particulier
dans le cas de de Gaulle ?), que Sartre réitérera en parlant
plus tard de la « gueule abominable de salaud latin » du
général Franco au moment de l’agonie de celui-ci, avec ce
commentaire rétrospectif ambigu :
 10 La formule incriminée se trouve dans une interview
de Libération du 28 octobre 1975. Voir la présen (...)

C’était une erreur – des propos tenus dans le feu d’une


conversation prennent un autre sens quand ils sont transcrits tels
quels – mais c’est une erreur que j’assume entièrement : Franco
avait la gueule qu’il méritait, c’était bel et bien un salaud, et
personne ne niera qu’il fût latin10.

 11 Sartre dira plus tard (1973) : « Le sens de ces émissions,


en définitive, c’était que les socialist (...)

10La « Tribune des Temps Modernes » changera de ton et de


formule dès la deuxième émission, consacrée à une critique
du PCF où les participants ne se paient pas la tête de Maurice
Thorez et laissent en paix les moustaches de Staline.
L’intelligence des analyses n’y compense pas toujours
l’austérité des débats. Six émissions seront diffusées avant la
suppression de la « tribune » lorsque Maurice Schumann
remplace Paul Ramadier à la Présidence du Conseil, le MRP
ayant sans doute moins le sens de l’humour que la SFIO sur le
chapitre du gaullisme11. Première censure dans la longue
histoire des rapports manqués de Sartre avec l’audiovisuel, la
mémoire de ce fameux 20 octobre 1947 n’ayant sans doute
pas fait défaut aux gaullistes « historiques » lorsque que
capota en 1975 le projet de confier à Sartre une série
télévisée sur l’histoire du siècle.
*
11Les choses n’avaient pourtant pas si mal commencé entre
Sartre et les partisans du Général. Pas d’hagiographie, certes :
la personne de de Gaulle a toujours traversé le texte sartrien à
distance respectueuse, comme dans ce reportage sur la
libération de Paris publié dans  Combat où le narrateur joue
les Fabrice à la bataille de Waterloo :
 12 Jean-Paul Sartre, « Un jour de victoire parmi les
balles », Combat, 4 septembre 1944 ; repris dans (...)

Une longue voiture passa très vite, emportant le général de Gaulle


sous les hourras ; puis d’autres voitures filèrent, rasant la foule, et
leurs occupants criaient en passant des avertissements
incompréhensibles. Nous apprîmes, beaucoup plus tard, la raison
de ce brusque désordre : on venait de tirer sur le cortège, aux
Champs-Elysées, à la Concorde. Mais, sur le champ, nous n’y
vîmes qu’une étrangeté supplémentaire, une manifestation
inexplicable et d’autant plus belle de cette vie énorme et puissante
qui animait le défilé12.

12La Mort dans l’âme, roman de la débâcle de juin 1940, ne


réserve pas un sort meilleur à l’appel du 18 juin ; on ne s’en
étonnera pas trop puisqu’il fut écrit en 1947-1948, dans le
climat révélé par la « Tribune ».
13Mais lorsque Sartre arrive à New York en janvier 1945
comme correspondant du  Figaro (oui, Sartre a aussi été un
moment envoyé spécial du  Figaro !) et de  Combat, il est
amené à défendre de Gaulle contre les partisans de Giraud
encore nombreux à cette époque dans l’administration
américaine et la colonie française de la ville. Paraît ainsi sous
sa plume dans  Le Figaro du 25 janvier 1945 un article intitulé
« Victoire du gaullisme ». L’article ne sera pas repris en 1949
dans  Situations III, à la différence de la plupart des reportages
de ce voyage américain. Henry Torrès, celui-là même qui
s’insurgera au lendemain de l’émission scandaleuse,
fondateur à New York de l’association gaulliste « France for
ever », tresse alors des louanges à l’auteur de  La Nausée :
 13 Cité par A. Cohen-Solal, op. cit., p. 307-308, à laquelle
nous renvoyons pour l’ensemble de cet épi (...)

Nous conservons à l’égard d’un grand écrivain le préjugé très


favorable que nous avions avant son arrivée : dans la pire des
situations d’oppression il a donné des preuves de sa foi dans les
démocraties anglo-saxonnes, mettant en danger sa liberté et sa
vie13.

14« Première et dernière image de Sartre dans un rôle


purement gaulliste » dit Annie Cohen-Solal dans sa
biographie.
*
15Le retour au pouvoir du général de Gaulle fait reprendre les
armes à Sartre dans les colonnes de   L’Express en mai 1958. Il
le peint en dictateur virtuel, fossoyeur de la IV  République,e

cette démocratie malade, en « prétendant » :


 14 Jean-Paul Sartre : « Le Prétendant », L’Express, 22 mai
1958 ; repris dans Situations V, Gallimard, (...)

De Gaulle attendait. Cette montagne de silence tirait sa force de


nos faiblesses, c’était le lieu géométrique de nos impuissances, de
toutes nos contradictions14.

16Malgré les apaisements donnés lors de la conférence de


presse où, répondant à ce genre d’inquiétudes, le Général
déclara être trop âgé pour commencer une carrière de
dictateur, le philosophe de la liberté lui rétorque par
l’argument déterministe de l’impuissance des individus
devant les structures :
 15 Id., p. 96

Quand il affirmait en toute bonne foi qu’il n’allait pas s’aviser à


soixante-sept ans d’exercer la dictature, il ne lui restait que cette
alternative : renoncer au pouvoir (ou ne pas être sollicité de le
prendre) ou devenir dictateur. Car la situation décide 15.

17Contre-exemple vivant de la théorie de  L’Être et le


néant selon laquelle il n’est pas de situation sans issue pour
la liberté du sujet, « le chef de la France libre » (c’est une des
rares occurrences de cette périphrase laudative sous la plume
de Sartre) verra ses intentions, louables, hypothéquées par les
forces qui le portent au pouvoir :
 16 Id., p. 97-98.

De fait, son honnêteté, son patriotisme et sa fierté lui interdisent


de sacrifier la France à ses colonies : c’est bien  l’unité qu’il veut. Et
dans l’intérêt des deux parties. Mais qu’importe ce qu’il veut ? […]
Le jeu des institutions démocratiques est radicalement faussé 16.

18On doit certes du « respect » à de Gaulle, mais le risque que


court la démocratie française est grand :
 17 Id., p. 100.

La solitude de cet homme enfermé dans sa grandeur lui interdit,


en tout état de cause, de devenir le chef d’un État républicain. Ou,
ce qui revient au même, interdit à l’État dont il sera le chef de
demeurer une République17.

19Le 11 septembre 1958, dans un nouvel article   de L’Express,


Sartre s’insurge contre la constitution proposée aux Français
par voie de référendum. Rappelant que « le général de Gaulle
a été porté au pouvoir par les colonels d’Alger », qu’il doit
son mandat à un « pronunciamento », il dénonce le dilemme
imposé par le vote :
 18 Jean-Paul Sartre, « La Constitution du mépris », repris
dans Situations V, p. 103

C’est tout ou rien ; tout : le roi Charles XI. Rien : le retour à cette
Quatrième dont personne ne veut plus18.

20« Le roi Charles XI » : la formule renvoie à une autre phobie


fondamentale de Sartre : le XIX  siècle français qu’il poursuit
e

et pourfend en particulier à travers la figure de Flaubert, sur


laquelle il se remet à écrire à la fin de ces années cinquante.
Charles X et Napoléon III (Sartre se réfère ainsi à l’étude de
Marx sur la prise du pouvoir par ce dernier) se superposent
pour éclairer la figure de de Gaulle :
 19 Id., p. 106.

Cette charte est un portrait. Portrait de l’artiste par lui-même.


Le prince-président qui règne et qui n’est responsable que devant
Dieu, qui est-ce, sinon de Gaulle en personne ?19.

21Un autre texte en gestation dans les années cinquante, où


le XIX  siècle apparaît aussi comme repoussoir, est à évoquer :
e

les dernières campagnes d’écriture des  Mots se situent


chronologiquement dans ces années d’installation de la
V  République et de guerre d’Algérie et cette concomitance
e

n’est pas sans effet sur les textes directement politiques de


Sartre que nous lisons ici. Sous sa plume, l’image de de
Gaulle se charge de nouveau d’une aura affective dont le
signe stylistique est le recours à la mythologie :
 20 Id., p. 107.

On dit qu’Ulysse seul avait la force de tendre son arc ; aussi le


général de Gaulle a seul au monde l’orgueil nécessaire pour entrer
dans le rôle de président providentiel. Je ne crois pas en Dieu,
mais si dans ce plébiscite je devais choisir entre lui et le
prétendant actuel, je voterais plutôt pour Dieu : Il est plus
modeste20.

22Même énoncée de façon ironique, cette identification à Dieu


ne nous renvoie-t-elle pas à un autre Charles pourfendu par
l’écrivain : le grand-père Schweitzer, lui-même pourfendeur
de Napoléon III, ce « vieux républicain d’Empire » qui se
prenait pour Victor Hugo, l’opposant radical, l’exilé
volontaire ? Si de Gaulle réincarne Badinguet, Sartre ne
retrouve-t-il pas le souffle des  Châtiments tant aimés du
Grand-père ? « Ce serait farce »… Il n’empêche que certains
thèmes orchestrés dans l’autobiographie se retrouvent dans
les textes politiques de 1958, comme cette mise en garde des
Français contre la régression qui les guette :
 21 Id., p. 110-111.

Non ce n’est pas notre soutien que le général nous demande, c’est
notre obéissance, sans plus. Et pourquoi donc lui obéiriez-vous ? Il
y a cent cinquante ans que la France est adulte. Qu’a-t-elle besoin
d’un père ? Prenez garde, nous aurons tôt fait de retomber dans
les niaiseries de l’enfance ; les adultes n’y sont que trop portés21.

23On comprend mieux peut-être, en lisant ces lignes, la


théorie du « lien de paternité », « qui est pourri », exposée
dans  Les Mots :
 22 Jean-Paul Sartre, Les Mots, Gallimard, éd. Folio, p. 20.

Je ne suis pas un chef, ni n’aspire à le devenir. Commander, obéir,


c’est tout un. Le plus autoritaire commande au nom d’un autre,
d’un parasite sacré – son père, transmet les abstraites violences
qu’il subit. De ma vie je n’ai donné d’ordre sans rire, sans faire
rire ; c’est que je ne suis pas rongé par le chancre du pouvoir : on
ne m’a pas appris l’obéissance22

 23 Id., p. 19. Sur l’importance de ce mythe dans l’imaginaire


sartrien, voir Josette Pacaly, Sartre au (...)
24Ce passage était déjà rédigé en 1953, mais lors des
réécritures du récit d’enfance, de Gaulle et la situation
politique réactivent sous la plume de Sartre des thèmes qui
passent d’un genre à l’autre. Ainsi en va-t-il des images de la
paternité et du pouvoir, de l’oppression du fils par le père,
incarnée dans  Les Mots par le mythe d’Anchise écrasant Énée
de son poids23. On remarquera surtout à quel point la
conclusion du livre prend l’exact contrepied de la théorie de
l’homme supérieur s’élevant au-dessus de la masse que de
Gaulle développe dans ses écrits d’avant-guerre :
 24 Les Mots, p. 213.

Ce que j’aime en ma folie, c’est qu’elle m’a protégé, du premier


jour, contre les séductions de « l’élite » […] ma pure option ne
m’élevait au-dessus de personne […]. Si je range l’impossible Salut
au magasin des accessoires, que reste-t-il ? Tout un homme, fait
de tous les hommes et qui les vaut tous et que vaut n’importe
qui24.

25Cette conclusion des  Mots en 1963 oppose au mythe de


l’homme supérieur le mythe du « n’importe qui » : elle nous
semble avoir une dimension d’actualité immédiate, un parfum
de contestation de la V  République, de son chef et de ses
e

valeurs que ne renierait sûrement pas le théoricien de la


littérature engagée.
 
26En 1958, les électeurs, et même nombre de lecteurs
de  L’Express, suivirent moins Sartre que de Gaulle qui
recueillit, on le sait, 80 % des suffrages sur la nouvelle
constitution. Au référendum sur l’autodétermination en
Algérie, en janvier 1961, même succès gaulliste, malgré de
nouvelles philippiques sartriennes à la formulation
expéditive :
 25 Interview à L’Express du 4 janvier 1961, repris
dans Situations V, p. 159.

On en a assez d’être mystifié depuis deux ans par ce


bonhomme25.

 26 Sur cette période, voir A. Cohen-Solal, op. cit., p. 345 sq.

27Mais c’est en 1960, « année-clef » dans la vie Sartre pour


Annie Cohen-Solal26, que le philosophe va attirer sur lui la
colère des ultras, avec sa déposition écrite au procès du
réseau Jeanson et sa signature au bas du « Manifeste des
121 » appelant à l’insoumission des appelés en Algérie. Trait
de tolérance et de sagesse politique, de Gaulle se refusa à
faire « emprisonner Voltaire » : les inculpations s’arrêtèrent
net le jour où Sartre, de retour du Brésil, revint à Paris.
28Au lendemain du cessez-le-feu en Algérie (février 1962), le
directeur des  Temps Modernes résumera à sa façon l’action
du général depuis 1958 :
 27 Jean-Paul Sartre, « Les Somnambules », Les Temps
Modernes, avril 1962, repris dans Situations V, p. (...)

Velléitaires, puis incertains, puis démissionnaires, nous avons


remis nos pouvoirs à un dictateur pour qu’il décide sans nous
consulter du meilleur moyen pour terminer l’affaire : génocide,
regroupement et partition, intégration, indépendance, nous nous
en lavions les mains, ça le regardait. Le résultat passe nos
espérances : les Algériens ont conquis leur liberté, les Français ont
perdu la leur27.

*
29Dernier épisode spectaculaire de la querelle entre un prix
Nobel et un général-Président : l’affaire du tribunal Russel en
1967. Depuis la Tribune des  Temps Modernes, Sartre semble
avoir gardé le goût des procès médiatiques. En novembre
1966 quelques intellectuels décident de juger les États-Unis
pour leur action au Vietnam, sous le chef d’inculpation de
crimes de guerre. Sartre écrit au Président de la République
pour demander l’autorisation de tenir la seconde session de
ce tribunal à Paris. Lettre officielle articulée sur un point de
droit concernant un membre yougoslave du Tribunal, sans
réflexion de fond sur l’esprit du projet et ses finalités. De
Gaulle répond par retour du courrier : c’est le premier
échange direct (et épistolaire) entre les deux champions :
 28 Charles de Gaulle, lettre du 19 avril 1967, publiée dans Le
Monde du 25 avril 1967 et reprise dans (...)

Mon cher maître,


[…]. Les animateurs du « tribunal Russel » se proposent de
critiquer la politique des États-Unis au Viêt-Nam. Il n’y a rien là
qui puisse porter le gouvernement à restreindre leur liberté
normale de réunion et d’expression. Au demeurant, vous savez ce
que le gouvernement pense de la guerre au Viêt-Nam et ce que
j’en ai dit moi-même publiquement et sans équivoque28.

30Fort astucieusement, de Gaulle rappelle ici implicitement


son discours de Phnom Penh, salué en son temps par Sartre
en termes presque laudatifs :
 29 Interview au Nouvel Observateur du 30 novembre 1966 ;
repris dans Situations VIII, p. 39.

Les Français sont « contre » la guerre du Viêt-Nam, mais ils ne se


sentent pas concernés. Ils ne savent pas qu’ils risquent d’être
entraînés dans un conflit mondial par le développement d’une
lutte qui n’intéresse que les Américains. De Gaulle, lui, le sait. J’ai
été très frappé par la réaction des Japonais au discours de Phnom
Penh. Ils ont dit : « De Gaulle a eu peur ». Ils voulaient dire qu’il
avait tout à coup mesuré le danger de voir son pays détruit pour
quelque chose qui ne le concernait pas. C’était en effet un
discours de peur et, de ce point de vue, un bon discours. Mais un
simple cri d’alarme ne sert pas à grand-chose29.

31Tiers-mondiste et anti-américaine, la politique extérieure


de de Gaulle mettait Sartre cette fois en position non
d’opposant mais de concurrent. Mais l’alliance échoue : de
Gaulle refuse la tenue en France des sessions du « Tribunal
Russel » pour des raisons diplomatiques (l’amitié avec les
États-Unis) et de procédure. La seconde partie de sa réponse
à Sartre enlève les espoirs que faisait naître la première :
 30 Situations VIII, p. 44.

Ce n’est pas à vous que j’apprendrai que toute justice, dans son
principe comme dans son exécution, n’appartient qu’à l’État. Sans
mettre en cause les mobiles qui inspirent lord Russel et ses amis, il
me faut constater qu’ils ne sont investis d’aucun pouvoir ni chargé
d’aucun mandat international, et qu’ils ne sauraient donc
accomplir aucun acte de justice30.

32Le Tribunal ira se tenir à Stockholm, et Sartre saisit


l’occasion de cet échange public pour se confronter
directement à l’homme du 18 juin. Dans une interview
au  Nouvel Observateur il commente, paragraphe après
paragraphe, la réponse présidentielle, unissant dans un même
discours professoral la critique littéraire et la critique
politique. Il ironise d’abord sur la formule d’appel :
 31 Interview au Nouvel Observateur du 26 avril 1967, repris
dans Situations VIII, p. 47

De Gaulle m’appelle « Mon cher maître ». C’est pour bien marquer,


je crois, que c’est à l’écrivain qu’il entend s’adresser, et non au
président d’un tribunal qu’il ne veut pas reconnaître. Je ne suis
« maître » que pour les garçons de café qui savent que j’écris31.

33Le plan de la lettre ensuite :


 32 Situations VIII, p. 48.

Elle est construite, comme souvent ses discours, en deux parties :


de Gaulle commence par dire « mais oui naturellement » pour
conclure ensuite « évidemment non »32.

34Commenter la rhétorique gaullienne met en verve l’auteur


des  Mots. Il se sert de ce document pour dénoncer la
dialectique ambiguë du Général dans son rapport aux États-
Unis, la pression de fait de l’économie américaine sur la
France, qui limite les velléités d’indépendance à de beaux et
vains discours. Sur l’accord entre le Président et les opposants
à la guerre, il reprend le réquisitoire contre la solitude du chef
qui refuse le soutien du peuple :
 33 Id., p. 51.

Tout le gaullisme est là : le chef a ses idées sur le Viêt-Nam, il les
exprime à l’occasion dans des discours – tout en ajoutant qu’il est
incapable, pour le moment, de faire quoi que ce soit d’efficace –
mais il ne veut surtout pas que son point de vue soit populaire,
soutenu par les masses, parce que cela le lierait à elles, ce qui est
la chose dont il a, au fond, le plus horreur 33.

35Quant au point de droit qui motive le refus, Sartre lui


oppose sa vision de la justice gaullienne :
 34 Ibid.

L’État existe d’abord, puis il se donne des institutions et choisit


des hommes pour les faire fonctionner. Le juge devient donc un
représentant du pouvoir et l’État peut, comme on l’a vu dans
l’affaire Ben Barka et dans beaucoup d’autres, exercer sur lui une
pression directe. Cela conduit à une soumission complète de la
magistrature à l’État34.

36Irréconciliable, Sartre, vis-à-vis d’un de Gaulle à qui il


reproche de chercher « à se poser en champion du Tiers
Monde », domaine où lui-même exerçait un magistère
reconnu depuis ses voyages en Chine, à Cuba, au Brésil, ses
préfaces aux  Damnés de la Terre de Frantz Fanon et
aux  Discours de Patrice Lumumba.
*
37En 1964, après son prix Nobel refusé, l’auteur
des  Mots déclare :
 35 Jean-Paul Sartre, « L’Alibi », repris dans Situations Vlll,
p. 142-143

Personnellement, je me reproche d’avoir été, dans mes articles,


beaucoup trop respectueux pour de Gaulle. Il ne fallait pas tenir
compte du fait qu’il était respecté par un grand nombre de
Français et marquer du respect pour ce respect. Il fallait l’attaquer
ouvertement comme un personnage nuisible35.

 36 « Refusons le chantage » ; « Achever la gauche ou la


guérir ? » ; « Le choc en retour ».

 37 Situations Vlll, p. 206-207.

 38 Id., p. 226 à 232.

 39 II n’y eut donc aucune rencontre directe entre Sartre et de


Gaulle, lacune irritante de l’histoire (...)

38Le lecteur des textes dont nous avons cité des extraits
jugera de l’étendue et des limites de ce « respect », depuis
l’explosive Tribune des  Temps Modernes jusqu’à l’échange
épistolaire de 1967. Nous n’avons pas évoqué, faute de place,
les interviews de Sartre en 1965 à propos de l’élection
présidentielle. On les lira dans  Situations
VIII36. Elles
n’apportent rien de bien nouveau à la polémique, et la
critique ne se pare pas de la verve des grands textes
antérieurs. En 1968, Sartre n’épargne pas le régime contesté
par les étudiants. De Gaulle est renvoyé derechef au
XIX  siècle, aux modèles de Napoléon III et de Louis-
e

Philippe37. Il proclame en novembre à la Mutualité : « il n’y a


pas de bon gaullisme… »38. Mais la tonalité de ces attaques,
et leur fréquence marquent comme un apaisement. Sartre
reconnaît que de Gaulle a vieilli, et il réserve ses flèches les
plus acérées à Gaston Defferre, à Raymond Aron puis aux
communistes, sans parler de la méfiance affichée envers
François Mitterrand. Le départ puis la disparition de de Gaulle
ne seront pas commentés. Sartre s’installera hors de la
politique officielle de la V  République, rompant les ponts avec
e

ce que ses camarades gauchistes appellent la démocratie


bourgeoise. « Élections, piège à cons ! » : le philosophe ne
dissertera plus des mérites et des défauts des nouveaux
« prétendants »39.
NOTES
1 « La tribune des Temps Modernes », série de 10 émissions de
Marc Floriot, France-Culture, du 14 au 25 août 1989 (Archives de
l’INA). Une première diffusion partielle de la tribune consacrée au
gaullisme avait eu lieu sur la même chaîne le 6 décembre 1987
dans l’émission d’Antoine Perraud « Rétro ». Les extraits cités sont
retranscrits par moi.

2 Voir Annie Cohen-Solal, Sartre, Gallimard, 1985, p. 128. On


trouvera un portrait de Bonnafé par Sartre dans les  Lettres au
Castor, t. 1, p. 196-197 (lettre de juillet 1938).

3 Voir le dernier chapitre de Qu’est-ce que la littérature  ?,


« Situation de l’écrivain en 1947 ».

4 Voir A. Cohen-Solal, op.  cit., p. 387-388.

5 Michel Contat et Michel Rybalka, Les Écrits de Sartre, Gallimard,


1970, p. 170-171.
6 Combat, 27 octobre 1947 ; cité par Contat-Rybalka, op.  cit.,
p. 171. On aura une idée de l’affiche en question en se reportant
aux illustrations (non paginées) de : Jean-Pierre Guichard,  De
Gaulle et les mass média/L’image du Général, éd. France-Empire,
1985 – qui reproduit une affiche du RPF présentée comme datant
de 1948 mais qui correspond bien aux éléments décrits par
Bonnafé à la radio.

7 L’Ordre de Paris, 22 octobre 1947 ; cité par A. Cohen-


Solal, op.  cit., p. 387.

8 Sur l’hégémonie de Sartre dans les années d’après-guerre, on


lira Anna Boschetti, Sartre et «  Les Temps Modernes  », Éd. de
Minuit, 1985. La « tribune » radiophonique est évoquée p. 245.

9 Jean-Paul Sartre, La Nausée, in Œuvres romanesques, Pléiade,


p. 110.

10 La formule incriminée se trouve dans une interview


de Libération du 28 octobre 1975. Voir la présentation de Michel
Contat dans  Obliques, « Sartre », 1979, p. 340.

11 Sartre dira plus tard (1973) : « Le sens de ces émissions, en


définitive, c’était que les socialistes voulaient lâcher contre les
communistes un groupe d’intellectuels connus » (Pléiade, p. LXV).

12 Jean-Paul Sartre, « Un jour de victoire parmi les


balles », Combat, 4 septembre 1944 ; repris dans  Le Monde, 26 &
27 août 1984. S. de Beauvoir a collaboré à ces reportages

13 Cité par A. Cohen-Solal, op.  cit., p. 307-308, à laquelle nous


renvoyons pour l’ensemble de cet épisode new-yorkais.

14 Jean-Paul Sartre : « Le Prétendant », L’Express, 22 mai 1958 ;


repris dans Situations V, Gallimard, 1964, p. 95.

15 Id., p. 96

16 Id., p. 97-98.
17 Id., p. 100.

18 Jean-Paul Sartre, « La Constitution du mépris », repris


dans Situations V, p. 103

19 Id., p. 106.

20 Id., p. 107.

21 Id., p. 110-111.

22 Jean-Paul Sartre, Les Mots, Gallimard, éd. Folio, p. 20.

23 Id., p. 19. Sur l’importance de ce mythe dans l’imaginaire


sartrien, voir Josette Pacaly,  Sartre au miroir, Klincksieck, 1980.

24 Les Mots, p. 213.

25 Interview à L’Express du 4 janvier 1961, repris dans Situations


V, p. 159.

26 Sur cette période, voir A. Cohen-Solal, op.  cit., p. 345 sq.

27 Jean-Paul Sartre, « Les Somnambules », Les Temps Modernes,


avril 1962, repris dans  Situations V, p. 164.

28 Charles de Gaulle, lettre du 19 avril 1967, publiée dans Le


Monde du 25 avril 1967 et reprise dans  Situations VIII, Gallimard,
1972, p. 44.

29 Interview au Nouvel Observateur du 30 novembre 1966 ; repris


dans Situations VIII, p. 39.

30 Situations VIII, p. 44.

31 Interview au Nouvel Observateur du 26 avril 1967, repris


dans Situations VIII, p. 47

32 Situations VIII, p. 48.

33 Id., p. 51.
34 Ibid.

35 Jean-Paul Sartre, « L’Alibi », repris dans Situations Vlll, p. 142-


143

36 « Refusons le chantage » ; « Achever la gauche ou la guérir ? » ;


« Le choc en retour ».

37 Situations Vlll, p. 206-207.

38 Id., p. 226 à 232.

39 II n’y eut donc aucune rencontre directe entre Sartre et de


Gaulle, lacune irritante de l’histoire que l’imagination d’un jeune
romancier philosophe vient de combler en reconstruisant un
dialogue fictif, un jour de 1969, entre le « petit homme » et le
président déchu dans son exil irlandais : Bernard
Fauconnier,  L’Être et le Géant, éd. Régine Desforges, 1989. Michel
Contat en donne un compte rendu laudatif et alléchant dans   Le
Monde des livres du 22 septembre 1989 : « Voici donc  Les Chênes
qu’on abat, version Sartre, beaucoup plus amusante et, en
définitive, plus profonde que la version Malraux où, à vrai dire,
comme le dit sans révérence l’auteur, c’était plutôt « les fraises
qu’on sucre ».

© Presses universitaires du Septentrion, 2010

Vous aimerez peut-être aussi