Vous êtes sur la page 1sur 11

La vision de la femme

par les surréalistes


Ce tumblr a été réalisé dans le cadre des travaux personels encadrés d'une classe
de première littéraire.

INTRODUCTION
Le surréalisme est un mouvement qui apparut au XXème siècle, après la seconde
guerre mondiale. A cette époque, les sociétés sont appauvries, meurtries et
brutalisées par les horreurs vécues lors de cette guerre. Les surréalistes ressentent
alors le besoin d’en venir aux sources mêmes de leur être, en se basant sur la
psychanalyse de Freud, qui consiste à utiliser toutes les forces psychiques
(automatisme, rêve, inconscient) libérées du contrôle de la raison. Ce courant inspiré
du Dadaïsme tend à s’exprimer à travers la création artistique, sans chercher
quelconque logique, ni s’infliger aucune contrainte. Dans son Manifeste des
surréalistes, André Breton dit «Qu'est-ce que la femme? Une étoile dans l'eau.»,
ainsi, celle-ci passionne les surréalistes, chacun ayant une vision différente d’elle:
nymphe sublime, objet sexuel …
Le surréalisme est un sujet absolument passionnant à traiter dans sa globalité, mais
nous avons décidé de nous focaliser plus particulièrement sur la place de la femme,
car celle-ci y tient un rôle prépondérant. Ainsi, notre thème est en adéquation avec
les deux disciplines nous étant imposées : l’histoire-géographie et le français, avec
comme limite spatiale l’occident, l’utilisation de textes littéraires et l’abord de l’histoire
de l’art notamment. Nous pouvons donc nous demander : comment le surréaliste
voit-il la femme dans les sociétés occidentales ? Nous répondrons à cette
problématique en abordant tout d’abord la valorisation, puis la dévalorisation de
celle-ci par les artistes.
 
 

I] La valorisation de la femme dans le


surréalisme :
 
 

1) La muse :
 Un des aspects très importants, néanmoins plutôt méconnu : la vision de la femme
muse par le surréaliste. Parfois amante, parfois idéale de l'artiste, qui apportera
l’inspiration à la création artistique. Malgré tout, chaque artiste possède sa vision
personnelle de la femme muse, il est donc impossible d'en faire une généralité, on ne
peut définir la muse surréaliste qu'avec des exemples.
Une femme très importante pour les artistes surréalistes est Gala, à l'origine femme
de Paul Eluard. Ils se rencontrent alors que l’auteur n'est âgé que de 16 ans, et
commencent ainsi une relation à distance avant de se marier. Il allie alors son amour
fou pour la jeune russe à une profonde remise en question, alimentée d'abord par le
dadaïsme, puis le surréalisme. Gala est pour lui véritable «muse», inspiratrice de
poésie romantique. Elle lui permet de redéfinir l'amour fou, en faisant un thème pour
lui indissociable de la poésie. Cet aspect de son art transparaît dans grand nombre
de ses poèmes, dont La courbe de tes yeux, où il fait un hommage à sa femme.

La Courbe de tes yeux La courbe de tes yeux fait le tour de mon cœur, Un rond de
danse et de douceur, Auréole du temps, berceau nocturne et sûr, Et si je ne sais plus
tout ce que j'ai vécu C'est que tes yeux ne m'ont pas toujours vu. Feuilles de jour et
mousse de rosée, Roseaux du vent, sourires parfumés, Ailes couvrant le monde de
lumière, Bateaux chargés du ciel et de la mer, Chasseurs des bruits et sources des
couleurs, Parfums éclos d'une couvée d'aurores Qui gît toujours sur la paille des
astres, Comme le jour dépend de l'innocence Le monde entier dépend de tes yeux
purs Et tout mon sang coule dans leurs regards.

Sous forme d'un blason des « yeux » de Gala, Eluard, lui en prête qui ne sont pas
vraiment physiques. Ils sont bleus (« mer »), ou vert (« feuilles » « mousse »). Ses
paupières sont tantôt « feuilles », tantôt « ailes ». Ces informations presque confuses
nous empêchent d'imaginer un œil précis. C'est un œil purs, un œil intérieur qu'il
prête à sa femme, duquel elle peut voir le monde entier, et lui, surtout. Ces vers
placent le monde entre les mains de son amour.

La vision de la femme variant d'un surréaliste à un autre, le peintre Salvador Dali en


a une différente de sa femme. Il épouse Gala, en 1952, après un coup de foudre
réciproque. Dès lors, la femme russe devient une de ses uniques sources
d'inspiration. Il n'aura de cesse de la magnifier et de la sublimer, dans grand nombre
de ces tableaux. Quant à elle, elle prend en main les affaires de son mari et les fait
fructifier. Il déclare « J'astiquais Gala pour la faire briller, la rendant la plus heureuse
possible, la soignant mieux encore que moi-même, car sans elle tout était fini. ». Ils
resteront ensemble jusqu'à la fin, et s'aimeront « jusqu'à la mort ».

Il y a cependant un point sur laquelle tous les Surréalistes s'entendent lorsqu'il est
question d'Amour. Qu'il s'agisse de Dali ou d'Eluard, de Nusch ou de Gala, c'est
contre tous les interdits que le Surréaliste exprime son amour. Il le cultive et le
magnifie. L'amour inspiré des muses, portant des similitudes avec l'amour courtois,
n'est plus un simple sentiment ; il est une grande force salvatrice et supérieure à tout
autre chose que l'on trouverait sur Terre. Aussi, dans les poèmes surréalistes, la
femme est investie d'un pouvoir de rédemption ; elle est la bonté, le pardon et
l'amour réunis, et incarne le bonheur auquel l'homme aspire.
 
 
“Gala nue regardant la mer qui à 18 mètres apparaît le président Lincoln”, de
Salvador Dali

“Ma femme nue regardant son propre corps”, de Salvador Dali


 
 

2) L'amour fou, l’érotisme :


Après une sorte de traumatisme du à la violence de guerre, l'esprit de révolte et
l'aspiration à la liberté animent  les membres du mouvement surréaliste. Ils agissent
dans la provocation et recherchent le scandale.
«Amour, seul amour qui soit, amour charnel, je t'adore, je n'ai jamais cessé d'adorer
ton ombre vénéneuse, ton ombre mortelle.» telle est la définition de «l'amour fou»
par André Breton. Cette notion apparaît dans les principaux thèmes du surréalisme
avec la femme, et l'érotisme auquel elle aspire.
Le surréalisme est un mouvement anticonformiste, l’érotisme n’est donc pas perçu
comme un tabou ni dans l’art, ni dans la vie en général des surréalistes.
Aimer est considéré comme une activité surréaliste dans la mesure où «l'amour fou»
permet d'atteindre la sur-réalité. Il correspond non seulement à un sentiment mais
aussi à une sensation absolue. A ce sujet, on peut préciser que pour Breton il s'agit
seulement d'un amour de la femme car il condamne l'homosexualité.
Il est intéressant d’évoquer cet aspect paradoxal des surréalistes sur la sexualité. Ils
ont toujours été anti-traditionalistes, pourtant l’homosexualité est considérée comme
« anormale », notamment pour le chef de file du mouvement. Les surréalistes ont
donc épousé des préjugés sexuels. André Breton était un grand admirateur de
Rimbaud, mais  lui reprochait son aventure avec Verlaine. Selon lui c’est un déficit
moral et mental qui ne doit pas être toléré par la société. Mais, l’homosexualité
féminine est moins réprimandée.
Pourquoi ? Parce qu’elle est encore une fois attribuée au fantasme masculin et à
l’inspiration qu’elle provoque.
D'après les Surréalistes, la femme est médiatrice entre l'homme (plus
particulièrement le poète) et le monde; l'amour constitue un lieu d'extase et de
création poétique.
 
 
“La main de Dali retirant la toison d'or en forme de nuage pour montrer à Gala
l'aurore toute nue, très très loin derrière le soleil”, de Salvador Dali                              

“Venusquez”, de Marcel Mariën,


 
 

II] La dévalorisation de la femme


chez les Surréalistes :
 
 

1) La femme objet sexuel :


La femme, symbole d’amour, de poésie et de magnificence n’est pas unanime. En
effet, certains surréalistes sont en désaccord avec cette vision charmante de la
femme, et préfèrent la dévaloriser. Ainsi ceux-ci s’inspirent fortement de la
psychanalyse de Freud et nous dressent un portrait scandaleux de la femme.D’un
surréaliste à l’autre, la vision de la femme est très différente et subjective. Elle
dépend de chacun mais certains ne la voyaient uniquement qu’en un objet sexuel.
Les femmes étaient représentées dans des positions subjectives, ou étant
vulgarisées comme dans « Parfois, je crache par plaisir sur le portrait de ma mère»,
de Dali, dans « Femme » de Magritte, ou même dans le court métrage mis en scène
par Merret Openheim se servant de son oeuvre « Das Frühlingsfest» montrant le
mannequin représentant une femme nue recouverte de nourriture, les artistes se
nourrissent tous en même temps sur cette femme artificielle.

Revenons en à la base même du surréalisme qui est : la psychanalyse de Freud,


ayant lui-même sa manière de voir la femme: elle qui nourrit l’homme, lui qui la
protégera. La femme serait réduite à l’état d’objet se pliant au désir de l’autre et non
au sien. Dans « Les Violons d’Ingres » de Man Ray, la femme est vue comme un
instrument se pliant aux gestes de l’homme, elle doit être belle.

La femme est donc la célébration du désir, de la jouissance, de la féminité qui est


indispensable dans l’inspiration du surréaliste. Un désir étant représenté très
différemment selon l’artiste. Ainsi, Hans Bellmer nous représente celui-ci comme
monstrueux, transformant la femme en un être difforme dans son œuvre « La
poupée ».La femme est un être suscitant la fascination. Son désir est à la fois
animal, bestial et mystère, puis engendre aussi la jalousie et l’amour. Les
surréalistes n’abordent que très rarement l’intellect féminin, le plus important pour
eux étant son apparence physique.
 
 

Étude de document:
LES VIOLONS D ‘INGRES, Man Ray (1924)

Auteur:
Man Ray, un peintre, photographe et réalisateur Américain du XIXe siècle, est l’un
des artistes précurseurs du Dadaïsme, à New York avec son ami proche Marcel
Duchamp. Il est principalement connu pour la photographie que nous allons étudier,
et pour sa collaboration avec le poète Paul Eluard, dans le recueil de poème « Les
mains libres » (poèmes de Paul Eluard, illustrés par Man Ray). Sur cette photo « Les
Violons d’Ingres », l’actrice Kiki de Montparnasse a posé pour lui, celle-ci au départ
ne voulait pas, puisqu’à cette époque, poser nu pour les photographes était
redondant aux prostitués. Les ouïes ont été rajoutées à l’encre de chine sur la
photographie une fois que la photographie a été tirée.
Description:
Cette photographie en noir et blanc représente une femme sur fond neutre, le dos
nu, et les fesses légèrement recouvertes d’un voile, sa tête est légèrement tournée
vers la gauche, on aperçoit peu de son visage elle porte des boucles d’oreilles et ses
cheveux sont couverts d’un tissu de style ethnique. Au milieu de son dos se trouve
des ouïes de violon.
Analyse:
Kiki de Montparnasse pose au centre de la photo, avec un font neutre pour que l’on
se concentre sur elle, la lumière éclaire parfaitement son corps pour que ses courbes
se révèlent, sa longue nuque est mise en valeur par des boucles d’oreilles et ses
cheveux sont cachés derrière un voile, ce qui laisse a cette femme une part de
mystère. Les ouïes de violon dans son dos, donne à cette femme l’air d’un objet, un
instrument avec lequel on peut jouer. Man Ray veut ainsi dire que selon lui, la femme
est un objet que l’on peut manipuler, ainsi que l’objet des fantasmes de l’homme. Le
titre « Les Violons d’Ingres » reprend la passion d’Ingres pour les violons, comme si
pour Man Ray, la femme était sa passion.
 
 

2) Le feminisme dans le surréalisme


Dans le surréalisme, la place de la femme est très importante. Sujet favori des
surréalistes elle est souvent représentée telle une muse, mais aussi comme un objet
sexuel. Ainsi, nous pouvons nous demander ce que pensent les femmes de ce
mouvement et comment elles réagissent face à cette considération des hommes à
leur égard.

Les féministes ont beaucoup critiqué le mouvement surréaliste. En effet ce


mouvement est  masculin, peu ouvert aux femmes. Les féministes sont donc
activement contre ces pratiques dites «machistes» et «dégradantes» pour leur sexe,
car elles exigent d'être reconnues en tant que personne à part entière, ayant une
âme, plutôt que comme un objet, comme par exemple dans le «Le cabinet
anthropomorphique 1936» de Salvador Dali. Dans ce tableau nous pouvons
constater que la femme est représentée comme une vulgaire commode où l'on range
ses affaires.

Les féministes et les surréalistes ne peuvent s'entendre. En effet ce sont deux


thèmes qui s'opposent. L'un défend les valeurs de son propre sexe, et l'autre le
«banalise». Ils n'ont pas ou peu de considération pour leur personnalité, mais
uniquement pour leur apparence et ce qu'elle leur évoque (désir sexuel). La chair, le
corps et l'anatomie passent avant la personne et son âme, pas digne d’intérêt pour
les surréalistes à représenter, mais très importante à défendre pour les féministes.
Ainsi, Simone de Beauvoir, une des féministes les plus connues, écrivit «Le
deuxième sexe», qui est un essai existentialiste, féministe et philosophique. C'est
l’œuvre majeure de l'auteur. Elle y dénonce la place de la femme, sa condition dans
la société, la vision de l'homme à son égard, l'endoctrinement perpétuel que l'on
donne aux jeunes filles dès l'enfance, pour les intégrer dans une société déjà inégale
et  leur faire subir un rabaissement face aux hommes, supérieurs. Cependant,
Simone de Beauvoir atténue son propos en nous révélant que le mouvement
surréaliste permet d'une certaine manière de magnifier les femmes, de les
métaphoriser en changeant les formes de leurs corps en les rendant parfois plus
belles, de les mythifier comme des déesses, mais à travers seulement leur corps,et
non à travers leur âme .

Ce courant est donc controversé. Certaines œuvres attisent un mouvement


féministe, car ces femmes désapprouvent leur images à travers celles-ci, alors que
d'autres sont tolérées, voir appréciées. A l'image de la réflexion de Simone de
Beauvoir,  certaines œuvres valorisent la femme et d'autres la dégrade. Les
féministes se battent contre ces diffamations à leurs égards. Mais ce courant, moins
en vogue aujourd'hui attisent moins les débats.Ainsi, nous avons vu que les
féministes étaient opposées à certains sujets du surréalisme, notamment ceux qui
visent à les dévaloriser, ou les réduire à l'état d'objets sexuels. Paradoxalement,
certaines femmes font partie intégrante de ce mouvement, malgré le fait que ce soit
un courant masculin, et les acceptes grâce à leur talent. Par exemple, Peggy
Guggenheim, organisa en 1942 une exposition de peintures surréalistes, à laquelle
31 femmes participèrent. Cet événement était exceptionnel, et cela souligne aussi le
fait que les femmes pourtant d'habitude contre le surréalisme peuvent parfois
s'accorder avec le style.
 

 
“Le dîner en fourrure”, de Meret Oppenheim

“Le cabinet anthropomorphique”, de Salvador Dali


 
 

CONCLUSION
Pour clore ce TPE, nous avons démontré que le courant surréaliste peut aussi bien
valoriser que dévaloriser la femme, tantôt muse et amour fou, tantôt objet sexuel,
suscitant la controverse. Chaque surréaliste exprime et cultive sa vision de la femme
de différentes manières, aussi bien par la peinture, la littérature, la sculpture que le
cinéma, suscitant la polémique dans les populations occidentales.

Nous pouvons nous demander si dans le Pop Art, le mouvement succédant au


surréalisme, la femme est représenté de la même manière, puisqu'en effet, nous
pouvons noter que celle-ci tient également une place prépondérante dans ce
mouvement.

Vous aimerez peut-être aussi