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Jacques Lacan

séminaire X
L’angoisse dans le filet des
signifiants chap. 2 p18-23 L’angoisse
« Inhibition, symptôme, angoisse » « 2023

On a vu dans le chapître précédent que l’angoisse a une fonction. Elle est ce qui permet de nous orienter en lien avec les moments de son
apparition. Le psychanalyste étudie sa fonction et permet, ou peut permettre au sujet de se frayer un chemin vers le désir.1. L’angoisse, ça ne
passerait pas par l’individu mais par l’intime comme le dit Freud, l’Heimlich, mettant à l’épreuve le non-intime de l’individu, dit effrayant,
pour surmonter la peur de vivre.Lacan évoque aussi l’affect, ce qui affecte le corps est difficile à appréhender : il faut aller dessiner les
contours de cet affect, aller de : - “ ce qui trompe ” à “ ce qui ne trompe pas ”
- “ du significant ” au “ reel ”

2. L’angoisse se traduit invévitablement dans une inscription dans le corps ; “il faut alors la déshabiller de l’imaginaire qui l’enrobe pour en
trouver l’ossature : que soutient-elle ? qu’autorise-t-elle ? “
L’angoisse est là, présente dès la mise au monde du sujet.
Freud : “ la mort universelle, partagée de tous, et pourtant intimement unique (Jankélévitch in “la Mort”) … et un peu plus loin “ instant de
désêtre qui emporte les mots sur son passage, qui suspend dans un moment figé de la parole et qui renvoie à un vide”

3. C’est Freud en 1926 in “ Inhibition, symptôme, angoisse “ p 53 (l’angoisse de la castration chap. 10) : “ la situation à laquelle le moi réagit
est l’abandon par le sur-moi protecteur- et par les puissances du destin- abandon qui le laisse sans défense devant tous les dangers “.
Et Lacan de dire : “ s’agissant de l’angoisse, chaque maille, si je puis dire, n’a de sens qu’à laisser le vide dans lequel il y a l’angoisse”
L’angoisse se décline en deux versions :
a) les points d’angoisse comme points de nouage : ligne horizontale du tableau qui va suivre, la diachronie
b) les moments d’apparition, permettant de s’orienter : ligne verticale du tableau, la synchronie

“L’inhibition écrit Freud en 1926, est une limitation que le moi s’impose pour ne pas éveiller le symptôme d’angoisse. Le moi est bien le lieu
où se subissent ces mouvements et pressions.”
Lacan en fait une matrice avec une articulation logique pour approcher le réel.
Pour Freud
L’inhibition est liée à la fonction dont la mise en oeuvre engender l’angoisse (moi en conflit avec le ça) d’où la limitation fonctionnelle du
moi.
Le symptôme est pathologique. C’est le “signe, substitute d’une satisfaction pulsionnelle qui n’a pas lieu, étranger au moi, isolé” écrit Freud,
les symptômes sont formés afin d’éviter la situation de danger signalée par le développement de l’angoisse”.
“la douleur est la réaction proper à la perte de l’objet, l’angoisse, la reaction au danger que comporte cette perte et, au terme d’un
déplacement supplémentaire, la reaction au danger de la perte de l’objet elle-même”.

Pour Lacan
Lacan poursuit ce travail de questionnement de l’affect. Il parle de filet entre les mailles duquel va se loger l’angoisse, délimitant le vide dans
lequel elle se niche :

Inhibition, symptôme, angoisse sont en cascade comme le montre le tableau :


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Diachronie 
( difficultés et arrêt du
mouvement vers la Inhibition Empêcher Embarras
jouissance ) Impedicare Imbaricare

Synchronie 
( c’est la place Emotion Symptôme X
du vide, sa
délimitation)

Emoi X Angoisse

Impedicare = être pris au piège. Le sujet est empêché. C’est le piège de la capture narcissique, l’empêchement du sujet. L’empêchement
symbolique est appelé castration. C’est l’empêchement du mouvement vers la jouissance, la jouissance étant ce qu’il y a, ce qui est le plus
loin de lui, sujet.
Imbaricare = bara, ne plus savoir que faire de soi, chercher de quoi se remparder : experience de la barre du S.

Récapitulatif
La diachronie ou la dimension horizontale de la difficulté et l’arrêt du mouvement vers la jouissance où l’embarras est la forme légère de
l’angoisse
Dimension verticale, celle du mouvement : “la ceinture synchronique est plus cachée, et c’est elle qui nous porte à l’origine. Elle ne tient pas
compte du temps. On passe du signe au signifiant.

Emotion = jeter dehors. L’émotion se réfère au mouvement (cf Goldstein), c’est jeter dehors, ex, hors de la ligne du mouvement. C’est le
mouvement qui se désagrège, c’est la reaction qu’on appelle catastrophique et l’appel au désordre (colère, crise hystérique…)

Emoi = ce qui effraie, trouble, écrase, et tout aussi bien dans le sens de se troubler soi ; au sens aussi de ce qui déchoit de sa puissance.

Cette matrice est le cadre de l’angoisse dont Lacan dira : “l’angoisse, c’est ce qui ne trompe pas, le hors doute”. (le doute naissant pour éviter
“ce qui dans l’angoisse se tient d’affreuse certitude”).
Il y a la matrice et les barres, accrochant le regard, éclipsant ce qui l’entoure, cachant ce qu’il y a derrière, c’est à dire l’Autre scène,
escamotant la fenêtre, la lucarne s’ouvrant sur le réel :
“quel que soit le charme de ce qui est peint sur la toile, precise Lacan, il s’agit de ne pas voir ce qui se voit par la fenêtre”. On ne voit plus
l’autour de soi :
Faire voir l’en-dedans avec l’autour de soi.

“ Il s’agit de ne pas voir ce qui se voit par la fenêtre “. C’est la portée de cette phrase qui m’a fait réagir et m’orienter vers les artistes
peintres.

Les mouvements artistiques tells que l’expressionnisme et le surréalisme ont exploré l’angoisse dans leurs oeuvres.
Les artistes expressionnistes cherchaient à exprimer les émotions intérieures intenses à travers leurs peintures tandis que les surréalistes
exploitaient l’inconscient et les rêves pour représenter des scènes étranges et perturbantes.

Les surréalistes :
Mouvement pour se libérer de la perception traditionnelle. Dans le premier numéro de la revue “Révolution surréaliste” André Breton
précise qu’il s’agit tout d’abord de répondre à un modèle purement intérieur. La perception habituelle de l’objet extérieur est considérée
comme limitante. Il s’agit de casser cette perception, de faire surgir des éléments et des perceptions nouvelles (collage, méthode
paranoïaque-critique de Dali…).
En fait, c’est le paysage mental.
Dali et Lacan se sont rencontrés. Lacan a demandé un rdv au peintre. Ils ont partagé des moments ensemble.

L’influence de Dali sur la paranoÏa semble incontestable, toile exposée à New York “l’âne pourri” en 1973.
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Ainsi, Magritte a fait malicieusement surgir un hiatus entre le dessin et sa légende et présenter ainsi l’aporie de la désignation (aporie =
difficulté logique insoluble).
Dans la “lecture défendue”’, Magritte écrit un mot sur le plancher. Un index traverse l’écriture de “sirène”. Ainsi le doigt simule-t-il le “i” et
à la fois il le cache.

“Et pour qui croirait trouver dans la désignation un maître mot, Magritte ne manque pas de mettre les points sur les “I”, rappelant la vanité
d’un doigt qui saurait ce qu’il montre”. Le doigt pointe vers un énigmatique petit objet sphérique fendu. Ce grelot, recurrent dans l’oeuvre du
peintre, ne serait-il pas l’exposant muet de l’index, insistant sur l’intransitif de ce qu’il montre “levé vers une absence dont l’est-ce n’a rien à
dire, sinon qu’elle est de là où ça parle dirait Lacan. Car qui pourrait se prévaloir de montrer du doigt ce qui n’a ni forme, ni nom ?

Dans son mouvement surréaliste Magritte détourne la réalité dans ses oeuvres (toile “Magie Noire” ci-dessous) tout en valorisant une
peinture mentale, au contraire des artistes parisiens qui préféraient une peinture plus psychique.
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Le tableau de Magritte est à chaque fois très explicite. Il n’est jamais aussi complexe qu’un tableau de Dali par exemple mais présente des
compositions bien plus épurées.
Chaque tableau de Magritte porte un message.
L’artiste se sert des objets de la réalité pour créer un mystère.
Il utilise les images pour nous laisser à des réflexions, explorer les énigmes de la vie comme dans la toile très connue “Ceci n’est pas une
pipe”.

C’est le miroir de la réalité que lui, Magritte, s’est imaginé intérieurement et qui nous interpelle.

Sources :
Carré d’artistes,
ChatGPT,
Thèse de doctorat université Toulouse Marie Jean “l’angoisse dans la Clinique de Freud à Lacan” 2011

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