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Marguerite Angrand
Philopsis : Revue numérique
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INTRODUCTION
RÉEL ET RÉALITÉ
I. La réalité
1
Le Séminaire, livre IV. La relation d’objet, Seuil, 1994, p. 31.
2
Le Séminaire, livre III. Les psychoses, Seuil, 1981, p. 296
3
Le Séminaire, livre III, p. 210
II. Le réel
partout. C'est, comme est l’amibe, [...] immortel. Puisque ça survit à toute
division, puisque ça subsiste à toute intervention scissipare. Et ça court. Eh
bien ! Ça n'est pas rassurant. Supposez seulement que ça vienne vous
envelopper le visage pendant que vous dormez tranquillement »6.
La lamelle est indivisible, indestructible et immortelle (au sens de :
non morte) : elle n'existe pas, elle « insiste » ; irréelle, elle revêt de multiples
apparences qui enveloppent un vide central.
La lamelle, c'est bien sûr une image mais à la limite du représentable.
Elle figure le réel sous un aspect effrayant : « abîme primordial » dit Lacan,
qui avale tout et dissout toutes les identités. Il dit aussi « chose
terrifiante informe », et encore « le leurre ultime »7.
Nous allons voir maintenant comment cet étrange concept de réel
comme l'ultime terrifiant a été pour Lacan psychanalyste, d'une extrême
fécondité dans son exploration du psychisme humain et de ses troubles
(psychoses, névroses).
Nous comprendrons alors pourquoi il l'a figuré sous l'aspect d'un
monstre effrayant.
I. Position du sujet
6
Le Séminaire livre XI. Les quatre concepts fondamentaux de la
psychanalyse, Seuil, 1973, p. 221. Voir aussi Ecrits, « Position de l’inconscient », pp
829-850
7
Idem
8
Le Séminaire livre XX. Encore, Seuil, 1975, p. 25
11
Ecrits, p. 374 ; voir aussi p. 832.
Cette formule signifie que dans le discours, le sujet n'est présent que
comme un signifiant « Je » ou « Moi » dans une chaîne parlée. Ces
signifiants le représentent mais ne le présentent pas.
Dans ce même séminaire, nous lisons la formule suivante : « un signe
est ce qui représente quelque chose pour quelqu'un ».
Expliquons : le signe est construit par l'association signifiant-signifié.
Le sens d'un signe dépend de l'ensemble des autres signes de la chaîne. Celui
qui écoute se représente cette construction comme due à l'intervention d'un
sujet. Pour l'autre, le Je qui parle est représenté comme le sujet énonciateur
mais non présenté.
Le sujet réel véritable est ainsi exclu du symbolique.
Lacan a dit que le sujet (réel) est dans l'Autre « en exclusion
interne ».
Ou encore : « le drame du sujet dans le verbe, c'est qu'il y fait
l'épreuve de son manque à être » (Ecrits, p. 655).
Le sujet installé dans l'ordre symbolique est « barré » à lui-même par
« le mur du langage » comme le sont ceux auxquels il s'adresse.
Aussi la communication est-elle toujours ratée quand elle s'opère entre
deux parlêtres.
Lacan dit dans le Séminaire II (p. 285) : « Nous nous adressons de fait
à des A1A2 qui sont ce que nous ne connaissons pas, de véritables Autres,
de vrais sujets, ils sont de l'autre côté du mur du langage, là où en principe,
je ne les atteins jamais. Fondamentalement ce sont eux que je vise chaque
fois que je prononce une vraie parole mais j'atteins toujours a, a' par
réflexion. Je vise toujours les vrais sujets et il me faut me contenter des
ombres. Le sujet est séparé des Autres, les vrais, par le mur du langage ».
L’idée est reprise dans le Séminaire III sur Les psychoses : quand nous
parlons à un autre, c'est que nous le reconnaissons comme un sujet véritable,
comme un Autre, implicitement ; nous en posons l'existence comme
fondement au-delà de sa parole.
Mais reconnaître, ce n'est pas connaître.
D'où l’étrange sujet réel qui est bien présent dans le dire (l'acte
d'énonciation) mais masqué, seulement représenté dans le dit (sur ce thème,
voir « Fonction et champ de la parole et du langage en psychanalyse »,
Ecrits, p. 293)
L'ordre du signifiant a instauré la division du sujet : le sujet est
« coupure » : sujet du dire et sujet qui dit.
La « forclusion » du véritable sujet réel au bénéfice du sujet des
énoncés est particulièrement frappante dans le discours scientifique.
Le sujet connaissant ou sujet de la connaissance n'est qu'un « sujet
supposé savoir ». C'est un tenant lieu du sujet réel mais privilégié parce
qu'on le considère comme la manifestation du sujet Transcendantal.
Lacan rappelle le cogito cartésien (dans les Méditations
métaphysiques) : le je qui pense (l'ego) se saisit dans l'acte de penser comme
res cogitans (substance pensante). Il est alors habilité à énoncer le vrai et à
légiférer sur lui-même et sur toutes choses.
V. Le sujet de l'inconscient
Nous venons de voir que selon Lacan, le sujet réel, ce n'est pas le sujet
qui dit Je ou Moi dans l'énoncé, c'est le sujet de l'énonciation.
Il dit que le sujet de l'énonciation, c'est aussi le sujet de l'inconscient :
« la présence de l'inconscient pour se situer au lieu de l'Autre est à chercher
en tout discours dans son énonciation » (Ecrits p. 16 sqq).
Qu'est-ce donc que l'inconscient ?
Lacan répond : ce n'est pas une réalité qui existerait cachée dans le
moi profond (comme le pensait Freud), il n'est pas dans le sujet comme un
réservoir de pulsions. Il est le dire du sujet véritable et c'est par lui que ce
sujet réel est dit.
Cf Ecrits : « le sujet donc, on ne lui parle pas, ça parle de lui et c'est là
qu'il s'appréhende » (p. 835).
Quant aux pulsions, elles ne sont autres que « l'écho dans le corps du
fait qu'il y a un dire », (Cf « Le sinthome », in Ornicar, n° 8).
Voyons de plus près la relation entre inconscient et sujet de
l'inconscient.
Lacan dit dans les Écrits (p. 830) : « l'inconscient est un concept forgé
sur la trace de ce qui opère pour constituer le sujet ».
12
Voir Séminaire III, p. 167, Séminaire XI, p. 28, Ecrits, p. 829.
Conclusion
BIBLIOGRAPHIE
Écrits
Séminaires VII, L'éthique de la psychanalyse, VIII, Le transfert, XI
Les quatre concepts fondamentaux de la psychanalyse, XX Encore.