Vous êtes sur la page 1sur 30

Support de Cours « Procédure pénale ». (S6 Droit Privé) 1ère PARTIE Pr. A.

ELAABD
---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
1ère Séance : Le concept de la procédure pénale
Plan de cours :

Introduction

Chapitre 1. Le concept de la procédure pénale


A. La définition de la procédure pénale
B. L’évolution de la procédure pénale
C. La relation entre la procédure pénale et la procédure civile
D. Le compromis entre procédure accusatoire et procédure inquisitoire

Références :
▪ Mourad BOUSSETTA, « Principes élémentaires de la procédure pénale marocaine ». 2ème édition. 2017
▪ Corinne RENAULT-BRAHINSKY, « L’essentiel de la procédure pénale », 12ème édition. 2013
▪ Thierry GARE et Catherine GINESTET, « Droit pénal Procédure pénale », 7ème édition. 2012
▪ Éric MATHIAS, « Procédure pénale », 2ème édition Lexi-Fac, 2005.
▪ Code de la procédure pénale marocaine

À retenir :

▪ Le cadre juridique et l’aperçu historique


▪ Lois pénales de forme et de procédure
▪ Le système procédural mixte

À voir :

▪ https://www.youtube.com/watch?v=yBjM4JvIpC8
▪ https://www.youtube.com/watch?v=kgHX6zdb1AA

Devoir à faire :

▪ Lisez le préambule du CPP et faites une courte synthèse.

1
Support de Cours « Procédure pénale ». (S6 Droit Privé) 1ère PARTIE Pr. A. ELAABD
---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

Introduction :
En droit civil, le procès est un accident, c’est-à-dire que la grande majorité des règles
de droit civil s’appliquent sans procès : les règles de contrat, par exemple, s'applique sans
procès.
En droit pénal, les choses sont fondamentalement différentes parce que les règles
pénales ne peuvent s’appliquer que par un procès. Par ailleurs, les règles de fonds sont
totalement différentes. Les règles civiles, pour l'essentiel d'entre elles, protègent des
intérêts privés. Ainsi, l'individu est libre de mettre en œuvre ces règles selon le moyen de
son choix. Un contractant dont les obligations ne serait pas respectées dans un contrat
peut soit faire un procès civil, soit choisir un règlement amiable : principe « des modes
alternatifs de règlement des conflits ». Exemple : une transaction, une médiation.
Les lois pénales de fonds ne protègent pas des intérêts privés mais l’intérêt public ;
elles servent en effet à définir des intérêts supérieurs qui intéressent l'ensemble de la
société. Le droit pénal n’intéresse pas les rapports entre deux particuliers, mais entre
l’autorité publique et un particulier.
Ce droit a pour fonction de définir les valeurs essentielles d’une société et de frapper
de peines ceux qui portent atteinte à cette valeur-là. Lorsqu’un individu blesse ou tue
autrui, il ne s’agit pas simplement d’un acte entre un auteur et une victime mais d’une
atteinte à une valeur sociale essentielle (la vie humaine) qui explique que la société
introduit un procès. La victime d'une infraction sauf exceptions ne peut pas disposer du
procès pénal.
▪ Sa plainte n'est pas nécessaire pour le procès.
▪ Si la plainte est déposée par la victime, et que celle-ci la retire, cela n'a aucune
influence sur l'influence sur le déroulement du procès pénal.

2
Support de Cours « Procédure pénale ». (S6 Droit Privé) 1ère PARTIE Pr. A. ELAABD
---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
A. La définition de la procédure pénale
La procédure est l’ensemble des règles organisant le jugement par les tribunaux des
litiges nés entre particuliers ou entre l’Etat et les particuliers. Quant à la procédure pénale
elle a pour but la constatation des infractions, le rassemblement des preuves, la
recherche des auteurs et le jugement des délinquants.
Jusqu'à hier, la procédure pénale était définie comme l'ensemble des dispositions
juridiques qui organisent le procès pénal du moment de la commission d'une infraction
au prononcé d'une décision (jugement ou arrêt) qui peut être l'acquittement, la relaxe ou
l'absolution.
Les règles de la procédure pénale s’intéressent également à l'autorité et aux effets des
jugements ainsi qu’aux voies de recours susceptibles d'être exercées contre ces
jugements.
Dans son ouvrage : « La procédure criminelle en général », M. Faustin HELIE l’a
définie comme : « l’ensemble des formes qui constituent la justice criminelle et règlent
son action. Le but de la loi pénale est de donner une sanction au droit ; le but de la
procédure est d’en assurer la complète manifestation. »
Selon le pénaliste J. LARGUIER, la procédure pénale est « la mise en œuvre concrète
du droit pénal, par la recherche des auteurs d’infraction et leur jugement. Elle constitue
le trait d’union entre l’infraction et la peine ».
Du point de vue d'une doctrine unanime, la procédure pénale a pour finalité de limiter
les caprices des parties et des juges et aussi de réduire le risque d'erreur judiciaire.
L'absence de règles de procédure est synonyme d'arbitraire, puisque la procédure
pénale rappelle au juge les cadres de la loi dans lesquels il agit.

3
Support de Cours « Procédure pénale ». (S6 Droit Privé) 1ère PARTIE Pr. A. ELAABD
---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
La procédure pénale est généralement définie comme étant la branche de droit
contenant les dispositions relatives à la poursuite, à l’enquête, à l’instruction, au
jugement et à l’exécution des décisions judiciaires en matière d’infraction pénale.
En peut dire que la procédure pénale constitue donc l’ensemble des règles qui
régissent le procès pénal, c’est une réglementation qui tourne au tour de deux grands
axes :
Dans un 1er axe, les règles de procédure définissent les compétences et pouvoirs des
organes répressifs du procès pénal.
Dans un 2ème axe, le législateur fixe les conditions et les formalités qui doivent être
observés que se soit au niveau de la recherche de la preuve ou au niveau de la précision
de la preuve. Par-là, le législateur définit en quelque sorte les droits et les garanties qui
sont à côté de la personne poursuivie.
Ce statut de matière de forme, en pour la procédure pénale deux règles spécifiques :
En effet, d’abord au niveau de l’application de la loi dans le temps, la jurisprudence
admit que la loi de forme s’applique immédiatement même à des faits a réalisés avant
son entrée en vigueur.
Autrement dit, une nouvelle loi de procédure pénale peut régir un procès n’ayant pas
encore aboutit à des décisions définitives.
Dans le même sens, la jurisprudence valide toute interprétation extensive d’une loi
de procédure lorsque le souci d’une bonne administrative de justice limite en faveur de
cette extension. En cas de doute, l’interprétation doit être toujours favorables à la
personne poursuivie.

4
Support de Cours « Procédure pénale ». (S6 Droit Privé) 1ère PARTIE Pr. A. ELAABD
---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
B. L’évolution de la procédure pénale
Le premier code de procédure pénale marocain était celui de 1959, il était largement
inspiré du code français de 1958, lui-même une adaptation aux nouvelles circonstances
de l'après-guerre. Mais il s'inscrit surtout dans la ligne d'évolution du droit pénal
commencé par le code de 18101 et enrichi par une jurisprudence et une doctrine d'un
siècle et demi environ ; chose inexistante pour le code de 1959. En outre le code de 1959
paraissait à maintes égards compliqué, c’est-à-dire, qu'il ne donnait pas la priorité à la
simplicité, à la rapidité et à la collaboration entre les autorités exécutives et judiciaires
dans le respect de la séparation des pouvoirs (ou du moins des autorités). On lui
reprochait également de ne pas donner suffisamment de garanties aux justiciables, de
moyens efficaces pour l'exécution des jugements...etc.
La réforme de 1974, dans son exposé de motifs, semble vouloir répondre à ces
exigences en simplifiant les règles de procédure : abolition du jury, introduction de la
justice populaire dans les affaires simples, limitation du domaine de l'instruction...Mais
il faut remarquer que certaines règles de 1974 étaient transitoires, mais perduraient. Il y
a là un malaise dû certainement aux incertitudes et hésitations des responsables en la
matière quand il ne s’agissait pas d’un simple désintéressement.
Ce malaise et ses hésitations ont pris fin par l’adoption par le législateur marocain
d’un Dahir du 3/10/02 (Loi n°22.01) emportant réforme du code de procédure pénale.
En effet, actuellement la procédure pénale au Maroc est régie par la loi 22.01
constituant le code de procédure pénale, cette loi a été promulguer par le dahir de 3
octobre 2002, elle est entrée en vigueur le 1er octobre 2003 a signalé que cette loi a
consacré automatiquement l’abrogation de tous les textes anciens surtout l’ancien code
de 1959.

1
- qui s’inscrivait dans l’œuvre législative de Napoléon Bonaparte après le fameux code civil de 1804 et celui du
commerce de 1808.

5
Support de Cours « Procédure pénale ». (S6 Droit Privé) 1ère PARTIE Pr. A. ELAABD
---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
Cette codification ne constitue pas une révolution, c’est une simple mise à niveau du
code de 1959 parce que le législateur resté fidèle au système pénal avec la même
architecture au niveau de la fonction, seulement le code a apporté quand même quelque
nouveauté positive. On peut citer par exemple : la consécration de principe de la
présomption innocence à travers le 1er article du code, l’introduction du contrôle
judiciaire comme un substitut de la détention préventive, ou encore l’instauration de
l’institution du juge d’application des peines (JAP).
Il était devenu insupportable que le magistrat qui prononce une sentence ne soit pas
en mesure d’en suivre les effets et l’évolution. Il introduit en outre un nouveau regard sur
ce phénomène inquiétant de la délinquance juvénile, élévation de l’âge de la majorité
pénale, redéfinie les pouvoirs du ministère public et de la police judiciaire et instaure un
double degré d’instruction, permet un deuxième regard des décisions des chambres
criminelles etc.
Ce nouveau code se veut actuel dans la mesure où il prend en considérations les
conventions et traités que le Maroc a signés et intègre – selon ces auteurs – les nouvelles
données sur la criminalité dans un contexte international menacé par ce que plusieurs
appellent le terrorisme.

C. La relation entre la procédure pénale et la procédure civile


L'histoire des deux procédures est commune et l'opposition, d'une manière générale
entre les deux, n'apparaîtra que lors du passage de la procédure accusatoire à la
procédure inquisitoire. Mais il ne faut rien exagérer car les deux procédures gardent plus
d'un lien commun avec cette nuance que la procédure civile a souvent été qualifiée de
« droit commun procédural ».
Si l'on doit chercher la différence ou la raison de cette différence force est d'avouer
qu'elle est assez facile à saisir. Elle réside dans la différence de l'objet du procès. Le procès

6
Support de Cours « Procédure pénale ». (S6 Droit Privé) 1ère PARTIE Pr. A. ELAABD
---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
pénal met en jeu, d'un côté, la paix, l'ordre et la sécurité de la société comme un
ensemble, et d'un autre côté, le patrimoine, l'honneur, la liberté voire la vie de la
personne poursuivie ou accusée. L'individu est opposé à la puissance publique dans un
rapport de force au profit de la deuxième. C'est pour cette raison que des auteurs ont pu
écrire : « On peut dire, sans exagération, que la procédure criminelle est l'exact reflet des
conditions dans lesquelles, dans un pays donné, sont conçues les relations entre l'Etat et
la personne humaine ». La procédure civile, elle, reste dominée par la sauvegarde
d'intérêts privés et égoïstes.
S'agissant des principes communs aux deux procédures, il convient de signaler
l'unité des juridictions civiles et pénales par opposition au principe de la spécialisation
des juridictions. Au Maroc, ce sont les mêmes organes, institués par l'Etat et représentant
l'autorité judiciaire, qui rendent la justice au civil et au pénal.
L'unité des juridictions civiles et pénales signifie que celles-ci relèvent de l'ordre
judiciaire (et non administratif) et qu'elles ont la même composition. Ce sont les mêmes
magistrats qui, par roulement, assurent l'administration de la justice civile et pénale
quand bien même celles-ci n'exigent pas les mêmes aptitudes et les mêmes méthodes.
Cette unité va loin et s'étend au recrutement des magistrats, à l'identité de carrière et
à l'existence d'un fort esprit du corps surtout depuis la création de l'Institut National des
Etudes judiciaires.
Toutefois cette unité, assez compacte au Maroc, ne connaît d'exception qu'à travers
le juge d'instruction, le juge d’application des peines et les juridictions d'exception (dont
ne subsiste que le tribunal permanent des Forces Armées Royales (FAR).
Et si l'unité des juridictions a été critiquée, notamment par les positivistes, la
spécialisation n'a pas non plus échappé aux critiques. On lui a surtout reproché de
comporter l'inconvénient de rendre difficile la délimitation de la compétence ratione

7
Support de Cours « Procédure pénale ». (S6 Droit Privé) 1ère PARTIE Pr. A. ELAABD
---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
materiae ou compétence d'attribution, outre celui d'engendrer des frais plus importants
(augmentation du nombre des juges, de tribunaux, et du personnel d'une manière
générale). Mais force est de reconnaître l'existence d'une spécialisation de fait selon la
nature des affaires (sociales, pénales, civiles…etc.) et sous forme de sections et de
chambres.
Enfin l'unité signifie l'obéissance aux règles de jugement communes à toutes les
juridictions de l'ordre judiciaire comme la publicité des débats, leur oralité, la motivation
des jugements, la consécration du contradictoire, la présence d'un greffier…etc.
Le deuxième principe commun aux deux procédures est la collégialité. Assez récente
pour les tribunaux de 1ère instance, mais existante au niveau de l'appel et de la cassation,
le principe en lui-même consiste à rendre un jugement par un collège de juge.
Théoriquement la collégialité présente des avantages certains : meilleure qualité des
jugements, risque d'erreur moindre…, mais cela reste vrai au niveau simplement
théorique ; la pratique peut enseigner l’inverse.
La collégialité était le principe au Maroc dans les tribunaux régionaux et les
juridictions supérieures (appel - cassation) jusqu'à 1974 où le législateur a consacré le
principe du juge unique.
De nos jours et il y a peu on retrouvait la collégialité à tous les niveaux sauf en ce qui
concerne les tribunaux communaux et d'arrondissement, héritiers, dans une large
mesure, des anciens tribunaux de Sadad. Mais ces juridictions sont tombées en
désuétude et ont fini par être surplombées par le juge de proximité. Mais ni l’un ni l’autre
n’avaient de véritables compétences pénales.
Aussi doit-on souligner que la dernière réforme du code de procédure pénale a
réintroduit le juge unique au niveau du tribunal de 1ère instance pour les infractions

8
Support de Cours « Procédure pénale ». (S6 Droit Privé) 1ère PARTIE Pr. A. ELAABD
---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
dont la sanction ne dépasse pas deux années d’emprisonnement ou une amende
seulement. Cette mesure vise la célérité et peut être opportune ! (Art. 374).
Le troisième principe commun aux deux procédures réside dans l'instauration de
différents degrés de juridictions. Le principe a pour fondement la limitation des erreurs
et la possibilité de leur révision. Le premier et le deuxième degré jugent au fond et l'appel
s'applique même aux décisions prises lors de l'instruction préparatoire. Le troisième
degré est matérialisé par la Cour de cassation (appelé il y a quelques temps Cour
Suprême) qui coiffe toutes les juridictions du royaume, mais elle n'est pas un troisième
degré de juridiction dans la mesure où son rôle consiste dans le contrôle de la conformité
des décisions rendues par les juridictions inférieures à la légalité.
Cela étant, si les deux procédures ont des points communs du fait que l'une est le
rameau de l'autre, il ne reste pas moins vrai que la procédure pénale a des règles propres
à elle. Les plus importantes sont une conception aiguë de la légalité et de l'ordre public.
On peut y ajouter l'intérêt de l'existence ou non d'un élément populaire dans la
composition de la juridiction, les particularités de la preuve et un esprit propre au
domaine pénal d'une manière générale.

D. Le compromis entre procédure accusatoire et procédure inquisitoire


En ce qui concerne la procédure accusatoire, le juge n’intervient pas de façon active.
Il reste un arbitre strictement passif. Ce sont les victimes qui déclenchent le procès et ce
sont les victimes et le suspect qui doivent réunir les éléments de preuve afin que le juge
apprécie ces éléments, écoute les deux parties et se prononce pour le plus convaincant.
C’est une procédure orale, publique et contradictoire (preuves discutées à l'audience).
Si au départ l’accusateur était la victime elle-même, par la suite on voit l’apparition
d’accusateur spécialisé. Petit à petit, dans certains systèmes, il va représenter le pouvoir.
Celui qui représente ainsi le pouvoir a reçu pour cela une procuration.

9
Support de Cours « Procédure pénale ». (S6 Droit Privé) 1ère PARTIE Pr. A. ELAABD
---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
Néanmoins, cette procédure contient des inconvénients : la recherche des preuves
est imparfaite puisqu’elle n’est pas organisée par un juge indépendant.
Quant à la procédure inquisitoire, le juge intervient de manière active, en particulier,
un magistrat déclenche le procès et un juge rassemble les preuves. Ainsi, cette procédure
est écrite, secrète et non contradictoire. Son avantage, c’est son efficacité, et les
inconvénients : sa longueur et sa relative opacité et peu de respect des droits de la
défense.
Traditionnellement, la procédure pénale marocaine (comme la procédure française)
est mixte : la phase d’instruction est plutôt inquisitoire et la phase de jugement est
accusatoire. Ce caractère mixte s’estompe aujourd’hui avec la CESDH qui réclame une
procédure équitable : procédure dans laquelle les magistrats et parties privées ont des
droits équivalents. C’est-à-dire le poursuivant et le poursuivi doivent avoir les mêmes
droits.
En effet, un système procédural équitable devrait tenir compte des traits de deux
modèles extrêmes de procédures, en l'occurrence, la procédure accusatoire et la
procédure inquisitoire.
C'est la procédure idéale au point de vue des criminologues puisqu'elle combine les
caractéristiques des procédures accusatoire et inquisitoire.
En effet, durant la phase de l'instruction préparatoire, c'est le caractère inquisitoire qui
domine dans le but de faciliter la manifestation de la vérité. Cependant, le juge
d'instruction ne peut se saisir lui-même et doit tenir compte des droits de la défense. Il
n'a pas le droit de se prononcer sur la culpabilité du défendeur et il doit instruire aussi
bien à charge qu'à décharge.
Durant le jugement, c'est le caractère accusatoire qui l'emporte avec cette limite que
le juge doit veiller au respect de l'équilibre entre l'accusation et la défense.

10
Support de Cours « Procédure pénale ». (S6 Droit Privé) 1ère PARTIE Pr. A. ELAABD
---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
2ème Séance : La poursuite
Plan de cours :

Introduction

Chapitre 2. La poursuite
A. Les organes de la poursuite pénale
B. Le déclenchement et l’extinction de l’action publique
C. L’exercice de l’action civile

Références :
▪ Mourad BOUSSETTA, « Principes élémentaires de la procédure pénale marocaine ». 2ème édition. 2017
▪ Corinne RENAULT-BRAHINSKY, « L’essentiel de la procédure pénale », 12ème édition. 2013
▪ Thierry GARE et Catherine GINESTET, « Droit pénal Procédure pénale », 7ème édition. 2012
▪ Éric MATHIAS, « Procédure pénale », 2ème édition Lexi-Fac, 2005.
▪ Code de la procédure pénale marocaine

À retenir :

▪ La hiérarchie du ministère public


▪ L’opportunité de la poursuite pénale
▪ Modalités de la poursuite pénale

À voir :

▪ https://www.youtube.com/watch?v=903FzXvOKYk&list=PLF-sWk191ejorT3LN63EqC-
wjWFjLqypB&index=13
▪ https://www.youtube.com/watch?v=FZt89_7166Y

Devoir à faire :

▪ Regardez l’affaire « Khalid KELKAL », et commentez juridiquement la poursuite policière


engagée : https://www.youtube.com/watch?v=Hubu1EtITi4

11
Support de Cours « Procédure pénale ». (S6 Droit Privé) 1ère PARTIE Pr. A. ELAABD
---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
Chapitre 2. La poursuite
A. Les organes de la poursuite pénale
1. Le Ministère public
Le ministère public est l'organe étatique auquel la loi a confié le déclenchement des
poursuites et leur contrôle jusqu'au prononcé d'une mesure pénale voire jusqu'à ce que
cette dernière devienne définitive. Il existe dans toutes les juridictions du Royaume,
ordinaires ou d'exception sauf les juridictions de proximités.
Seulement, les membres du ministère public - et contrairement aux autres magistrats-
ont un statut bicéphale qui fait que ses membres sont à la fois des fonctionnaires sous
l'autorité de la présidence du ministère public (loi 33-17) et des magistrats rentrant dans
la composition des juridictions et bénéficiant du statut de la magistrature.
En effet, au sein de la magistrature professionnelle, il existe deux corps de magistrat
qui cohabitent, il y a le corps du siège qui juge et l y a des magistrats du parquet qui au
niveau pénal assurent la fonction de la poursuite ont déclenchants et exerçants l’action
publique.
Le vocable parquet ou le ministère publique renvoie un corps de magistrat public,
c’est un corps qui reçoit d’un mandat général de la part de la société pour parler
ensemble, pour défendre ces intérêts et c’est pourquoi ces magistrats incarnent l’organe
d’acquisition à travers le nom de procès. Ce corps de magistrat se signale par un régime
spécial basé ou fondé sur une contradiction à savoir le fait d’être en même temps des
représentants de l’Etat et des membres à part entiers de l’autorité judiciaire. Dans ce sens,
on peut citer quelques caractéristiques :
Le 1er caractéristique, c’est que le parquet se présente comme un corps homogène
hiérarchisé dominé par la subordination hiérarchique, c'est-à-dire qu’un membre
inférieur doit se soumettre aux instructions émanant de ces supérieurs.

12
Support de Cours « Procédure pénale ». (S6 Droit Privé) 1ère PARTIE Pr. A. ELAABD
---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
Au niveau du tribunal de première instance, le parquet est représenté par un
procureur du roi appuyé par un certain nombre de substituts. Alors qu’au niveau de la
cour d’appel, la mission du parquet le ministère public est exercée par un procureur
général du roi appuyé par un certain nombre de substituts généraux.
Au niveau de la cour de cassation, on trouve un procureur général et des avocats
généraux.
Au sommet de la hiérarchie, on trouve la présidence du ministère public qui a
substituée au ministère de la justice (loi 33-17) qui est selon l’art 51 de C.P.P, veille à
l’application de la politique criminelle étatique et de ce fait, il communique avec les chefs
de parquet à travers des ordres d’injection.
2ème caractéristique de parquet, c’est que le parquet parait comme un corps
indivisible, c'est-à-dire chaque membre du parquet en traitant un dossier par un nom de
tout le corps et c’est pourquoi que tous les membres du parquet sont solidaires, ils
peuvent même se remplacés mutuellement même au niveau d’une même audience.
3ème caractéristique, c’est que le parquet apparaît comme une partie principale et
nécessaire du procès pénal, sa présence ne peut pas être contesté à la différence d’un
magistrat de siège à cause de ces caractéristiques, le magistrat du parquet c’est un
magistrat amovible, interchangeable, irrécusable….
Cependant, presque les magistrats du parquet relèvent aussi de l’autorité judiciaire,
ils bénéficient de deux garanties :
D’abord, une indépendance vis-à-vis des autres magistrats du parquet et une
indépendance vis-à-vis de la victime.
La 2ème garantie, c’est l’irresponsabilité du magistrat du parquet signifie qu’une
personne poursuivie puis acquittée ne peut se retourner comme magistrat de parquet.

13
Support de Cours « Procédure pénale ». (S6 Droit Privé) 1ère PARTIE Pr. A. ELAABD
---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
Ce magistrat bénéficie aussi d’une sorte de d’immunité même en cas d’erreur dans la
pratique de sa fonction ! A titre de détenteur principal, le parquet se révèle comme un
véritable chef du procès pénal depuis les premières constatations jusqu’à l’exécution de
la sentence.
Ainsi, il supervise les enquêtes, il décide quelle suite donner au dossier, et au niveau
de l’instruction, il a un pouvoir de contrôle et de suivi de cette procédure devant le
tribunal de jugement, il présente son acte d’accusation, il exerce les voies de recours
contre les décisions prononcées et il assure même l’exécution de la sentence.

2. La police judiciaire
La police judiciaire joue un rôle capital dans le cadre de la lutte contre les infractions et
la recherche des auteurs.
▪ Les membres de la PJ
La PJ est composée d’officiers supérieurs, d’officier, d’agents et fonctionnaires
assimilés. Les membres de la PJ appartiennent à divers organes. Une partie d’entre eux
sont des magistrats. Les autres dépendent de diverses administrations. Cette diversité
permet à la PJ d’être plus efficace dans la constatation des infractions et leur répression.
A. Les officiers de la PJ

Les officiers de la PJ sont de deux ordres distincts :


Les officiers supérieurs de la PJ :

Sont tous des magistrats, ont qualité d’officier de la PJ, les procureurs généraux et du
Roi, et les juges d’instructions. Ils ont pour fonction de diriger les actes de la PJ. Ils ont
habilité à ordonner l’accomplissement des différentes opérations nécessaire à l’enquête
préliminaire. En cas de flagrance, les officiers de la PJ se dessaisir en leur faveur s’ils
arrivent sur les lieux de l’infraction.

14
Support de Cours « Procédure pénale ». (S6 Droit Privé) 1ère PARTIE Pr. A. ELAABD
---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
Les officiers :

La qualité d’officier de la PJ attribue, aux préfets de police, aux commissaires et


officier de la police, et également au directeur général de la sureté nationale. Les
inspecteurs qui ont passé trois années d’exercice peuvent être désignés par arrêt du
ministre de la justice ou de l’intérieur pour exercer les fonctions d’un officier de la PJ.
Cette qualité est attribuée également aux officiers et gardés de la gendarmerie royale.
Les gendarmeries qui ont passé trois années de service peuvent être nommés officier de
la PJ par arrêt du ministre de la justice et de la direction de la défense nationale.
B. Les agents de la PJ

Les agents de la PJ sont des fonctionnaires de la sureté nationale et les gendarmeries


qui n’ont pas la qualité d’OPJ ainsi que les khalifats les pachas et des caïds. Les agents
sont des auxiliaires des officiers de la PJ. Ils ont pour attribution de collaborer avec eux et
de les assister dans les fonctions qui leurs sont attribuées. Ils ne peuvent pas procéder à
des enquêtes ni dresser de PV ni saisir le procureur et l’informer d’une infraction.
C. Les fonctionnaires assimilés

Ont été assimilés par des lois spéciales aux officiers de la PJ, les ingénieurs chefs de
divisions et les agents techniques des eaux et forêts, les commandant de port, les
inspecteurs. La compétence des fonctionnaires assimilés se limite aux infractions
relatives au service auquel ils appartiennent. Ils peuvent effectuer les constatations,
exercer les poursuites et les surveillances. Mais, ils ne peuvent pas perquisitionner et
visiter les domiciles apparemment aux individus qu’en présence d’un officier de la PJ.
▪ La compétence territoriale des membres de la PJ
La compétence territoriale des membres de la PJ se limite à l’espace géographique
dans lequel ils exercent leurs fonctions. Les officier de la PJ appartenant au central

15
Support de Cours « Procédure pénale ». (S6 Droit Privé) 1ère PARTIE Pr. A. ELAABD
---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
peuvent exercer leurs fonctions sur l’ensemble du territoire national. C’est le même cas
pour les gendarmeries appartenant à la direction de la gendarmerie royale.
▪ Distinction entre la police judiciaire et la police administrative
Le pouvoir de police au sens large est le pouvoir reconnu à une autorité publique
d'imposer des règles pour tous les actes de la vie courante ou pour l'exercice d'une
activité déterminée. Le rôle des services de police est d'assurer le respect des dispositions
législatives, règlementaires ou individuelles de police. Ce rôle recouvre d'une part la
police administrative et d'autre part la police judiciaire.
La police administrative a pour mission de prévenir les infractions, elle a donc un rôle
préventif de surveillance et de contrôle des citoyens afin d'éviter la commission
d'infractions. Elle donc empêcher que l'ordre soit troublé et s'il l'a été, elle doit le rétablir.
Elle doit faire respecter les lois et règlements. Elle est placée sous le contrôle de l'autorité
administrative. Elle a concrètement 4 missions :

• Veiller au respect des prescriptions générales de police édictées par les autorités
compétentes : le Gouvernement, les préfets et les maires
• Surveiller l'activité des individus et des groupements pour prévenir la violation des
prescriptions édictées par les autorités
• Exécuter les mesures de police à caractère général ou individuel ordonnées par les
autorités compétentes
• Porter assistance aux citoyens en difficulté sur un plan individuel ou sur un plan
général.
Au contraire, la police judiciaire intervient dès qu'une infraction a été commise. Elle
entre en action lorsque la police administrative a échoué dans la prévention de
l'infraction. La police judiciaire est sous contrôle de l'autorité judiciaire. Cependant, ce
sont les mêmes personnes qui exercent ces activités.

16
Support de Cours « Procédure pénale ». (S6 Droit Privé) 1ère PARTIE Pr. A. ELAABD
---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
La distinction pose un problème vis à vis des autorités de contrôle. Le critère qui a été
trouvé est le but de l'opération de police. Si le personnel a agi en fonction d'une infraction
déterminée, cela relève de la police judiciaire. Si le personnel de police a agi pour prévenir
une infraction sur le point d'être commise, et même si elle n'est pas commise finalement,
cela relève aussi de la police judiciaire car dans ce cas, l'action de la police était en rapport
avec une infraction déterminée.
De manière plus large, on admet être dans le cadre de la police judiciaire lorsque le
personnel a agi en pensant qu'il y avait infraction, même s'il s'avère qu'aucune infraction
n'a été commise. Dans tous les autres cas, on est dans le cadre de la police administrative.

B. Le déclenchement et l’extinction de l’action publique


1. Le déclenchement de l’action publique :

Parler de l’exercice de l’action publique c’est évoquer la procédure par laquelle une
juridiction répressive est saisie dans le but de prononcer une mesure pénale. L'action
publique suppose l'existence de parties qui l'exercent et contre lesquelles elle s'exerce.
Elle ne s'arrête pas au déclenchement des poursuites, mais dure autant que nécessaire,
c'est-à-dire jusqu'à ce que le jugement soit devenu définitif après, éventuellement,
l'épuisement des voies de recours.
Bien plus le ministère public et le juge d’application des peines veillent à l’exécution
des décisions judiciaires. Mais tout ce travail doit se faire selon des modalités et avec des
moyens à même d’assurer son aboutissement. L'action publique doit être objective et
impartiale et ne peut être arrêtée ou interrompue par désistement ou transaction sauf les
cas spécifiés par la loi. Autrement dit, seules certaines situations lui mettent fin.

17
Support de Cours « Procédure pénale ». (S6 Droit Privé) 1ère PARTIE Pr. A. ELAABD
---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
I. Les parties à l'action publique.

Si le parquet apparaît comme le dépositaire de l'action publique qui s'exerce contre le


responsable de l'infraction (ou son complice), la réalité judiciaire et juridique fait
apparaître qu'il y a plusieurs sujets actifs et passifs dans une action publique.

• Les demandeurs à l'action publique :

Les personnes ou institutions auxquelles la loi a confié le déclenchement et la


poursuite des auteurs d’infractions devant les tribunaux répressifs sont en premier lieu
et dans la quasi-totalité des cas le ministère public et en deuxièmes lieu certaines
personnes et institutions désignées par la loi.
A- Le Ministère public.

Le ministère public est l'organe étatique auquel la loi a confié le déclenchement des
poursuites et leur contrôle jusqu'au prononcé d'une mesure pénale voire jusqu'à ce que
cette dernière devienne définitive. Il existe dans toutes les juridictions du Royaume,
ordinaires ou d'exception sauf au niveau des tribunaux communaux et
d'arrondissement.
Seulement, les membres du ministère public - et contrairement aux autres
magistrats- ont un statut bicéphale qui fait que ses membres sont à la fois des
fonctionnaires sous l'autorité du ministre de la justice et des magistrats rentrant dans la
composition des juridictions et bénéficiant du statut de la magistrature.
B- Autres sujets actifs de l'action publique.

Il va de soi que l'infraction pénale a lieu au détriment d'une victime. Celle-ci garde le
droit de déclencher l'action publique et, très souvent, elle se trouve du côté du ministère
public même si leurs intérêts ne sont pas complètement et toujours les mêmes.

18
Support de Cours « Procédure pénale ». (S6 Droit Privé) 1ère PARTIE Pr. A. ELAABD
---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
Les tribunaux d'audience, on l'avait dit, ont également ce monopole pour toutes les
infractions touchant la police des audiences. Mais parmi ces sujets actifs l'administration
des douanes, des impôts et des eaux et forêts apparaissent comme ayant un pouvoir
exorbitant. Non seulement elles peuvent déclencher l'action publique, mais elles
peuvent exceptionnellement l'exercer sans recours obligatoire au ministère public. Ces
pouvoirs reconnus à ses administrations s'expliquent par des considérations techniques.
L'exercice concomitant de l'action publique par le ministère public et
l'administration a lieu chaque fois que la peine encourue est l'emprisonnement et
l'amende. Mais attendu que l'administration ne réclamera très souvent que la réparation
(le ministère public demandera lui très souvent l'application totale de la peine), le C.P.P
prévoit la possibilité d'une transaction susceptible de produire un effet total sur l'action
publique en la faisant tomber. Le caractère artificiel de ces infractions et l'intérêt
économique expliquent cette orientation.
En revanche, l'administration peut toute seule exercer l'action publique dans le cas
où seule une peine d'amende ou la confiscation est prévue. Le ministère public sera
toujours présent. La transaction peut avoir lieu, mais si l'administration perd le procès
elle supporte les frais de celui-ci.

• Les défenseurs à l'action publique :

Ce sont les auteurs, coauteurs et complices des infractions. L’article trois du nouveau
code a estimé nécessaire de le rappeler quand il stipule que l’action publique s’exerce
contre l’auteur principal, les coauteurs et les complices d’une infraction à la loi pénale.
Les principes de l'individualisation de la responsabilité pénale et de la personnalité des
peines sont clairs à ce sujet. Toutefois, le droit pénal marocain reconnaît, dans des limites,
la responsabilité pénale du fait d'autrui et, avec des nuances, celles des personnes
morales.

19
Support de Cours « Procédure pénale ». (S6 Droit Privé) 1ère PARTIE Pr. A. ELAABD
---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
La responsabilité du fait d'autrui vise la protection de l'individu, et au même titre voire
plus celle de la société notamment dans les cas d'auteurs plus ou moins directs. Il en est
ainsi des chefs d'entreprise en matière de fraude dans les transports, hausse illicite des
prix, fraude alimentaire...etc.
L'intérêt de la collectivité exige que la sanction frappe le responsable bénéficiaire de
l'activité incriminée. L'action publique s'exerce contre des défendeurs déterminés et
pénalement responsables. Elle ne s'exerce pas contre l'auteur d'un délit civil où la victime
ne demande que réparation suite à un trouble privé. Elle ne s'exerce pas non plus contre
les tiers civilement responsables du prévenu, ses débiteurs ou ses héritiers. Les premiers
et les derniers n'interviennent que dans la phase de la réparation civile du dommage
privé.
Quant aux personnes morales, elles peuvent être aisément des acteurs passifs d'une
action publique. Quand elles sont des personnes morales de droit privé, leur
responsabilité ou celle de leurs dirigeants peut être engagée et des sanctions appropriées
sont prévues à cet effet : fermeture d'établissement, liquidation, amende et même
emprisonnement pour les dirigeants...etc.
Le problème se pose autrement pour les personnes morales de droit public (Etat,
collectivités locales, établissements publics...). Leur nature s'oppose, théoriquement, à
l'idée d'une action publique pour la simple raison qu'elles émanent de l'Etat, symbole de
la société et "réalité intellectuelle et sociale". L'Etat c'est la société et une action publique
contre cette dernière est inconcevable car il est inconcevable qu'elle se trouble elle-
même.
Cette fiction juridique ne doit pas être confondue avec le cas du fonctionnaire
pénalement responsable d'infractions commises dans l'exercice de ses fonctions ? Le
fonctionnaire même le plus élevé dans la hiérarchie est potentiellement passible des
poursuites pénales. Mais l'Etat ou ses démembrements peuvent-ils être civilement

20
Support de Cours « Procédure pénale ». (S6 Droit Privé) 1ère PARTIE Pr. A. ELAABD
---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
responsables ? Certes, le droit administratif prévoit l'hypothèse de la responsabilité
subsidiaire de l'Etat, mais notre question reste sans réponse d'un point de vue strictement
pénal. Toutefois, la logique veut qu'une faute consciente du fonctionnaire n'entraîne pas
la responsabilité civile de l'Etat et pour éviter tout risque d'insolvabilité du fonctionnaire
fautif, il faudra peut-être penser à créer un fonds de garantie ou une institution de ce
genre.
2. Les modalités de poursuite ou d’exercice de l’action publique

Elles se ramènent à la citation directe et au réquisitoire introductif d'instance ; la


constitution de partie civile étant beaucoup plus proche des cas de saisine du juge
d'instruction ou du juge de fond (de jugement. Il convient donc de voir la citation directe
et le réquisitoire introductif d'instance et dire un mot sur la constitution de partie civile.
A. La citation directe :

Employée dans les cas où une instruction préparatoire n'est pas engagée, elle réalise
une économie de temps et de moyens et rend inutile bien des formalités.
La citation directe est un acte solennel établi par le ministère public et notifié au
délinquant pour lui demander d'assister à l'audience du jugement le concernant. Vu son
importance, elle est soumise à un formalisme strict ayant force d'un acte d'ordre public
et produisant par conséquent des conséquences importantes.
1- Le formalisme de la citation directe.

La citation directe doit comporter clairement la détermination du jour, l'heure et le


lieu de l'audience. Elle doit énoncer le genre d'infraction, le lieu de sa commission et les
textes applicables. Est nulle toute citation qui omet une ou plusieurs mentions ci-dessus.
La citation doit être notifiée à la personne concernée suivant les règles de la
procédure civile : envoi par les services des plis et notifications des juridictions au
domicile du délinquant ou à celui de son mandataire (avocat).

21
Support de Cours « Procédure pénale ». (S6 Droit Privé) 1ère PARTIE Pr. A. ELAABD
---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
La date de l'audience doit respecter les délais minimums nécessaires au déplacement
et à la préparation de la défense : 15 jours pour les résidents au Maroc ; 2 mois pour ceux
qui résident en Algérie, Tunisie ou dans un pays d'Europe, 3 mois pour ceux qui résident
dans un pays autre d'Afrique ou dans un Etat d'Amérique ou d'Asie ; 4 mois pour les
résidents en Océanie. Ces délais sont illogiques et correspondent plus à un pays
d'Europe.
2- Conséquence de la citation directe :

C’est la saisine du tribunal afin de se prononcer sur la responsabilité d'un prévenu.


Elle impose la présence du prévenu à l'audience et à défaut de cette présence, le
jugement sera prononcé par défaut. Une absence non justifiée confère au jugement la
valeur d'un jugement réputé contradictoire et par conséquent non susceptible
d'opposition. La même règle s'applique en cas de présence du prévenu à un jugement
préparatoire ou d'une question incidente en déclarant qu'il entend être considéré
comme absent dans l'avenir.
B- Le réquisitoire introductif d'instance (ou afin d'informer).

Il est l'acte par lequel un membre du ministère public saisit le juge d'instruction afin
d'informer dans les cas de crime ou délits soumis à instruction.
La réglementation du réquisitoire introductif d'instance résulte des principes
généraux et des impératifs pratiques de la procédure pénale qui en font un dossier écrit
contenant des renseignements sur la (ou les) personne et les faits incriminés. Ce dossier
comporte obligatoirement une qualification juridique des faits reprochés au prévenu et
ceci pour des raisons de compétence et de procédure. La désignation expresse du
prévenu n'est pas obligatoire. Il doit être signé et daté afin de déterminer son authenticité
et faire courir le délai de prescription.

22
Support de Cours « Procédure pénale ». (S6 Droit Privé) 1ère PARTIE Pr. A. ELAABD
---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
Le juge d'instruction informe à propos des faits et y limite ses investigations. Il peut
aboutir à l'inculpation, au mal fondé du réquisitoire voire à la découverte de ou d’autres
personnes impliquées dans l'infraction. Dans ce dernier cas, ces personnes découvertes
doivent être impliquées par le réquisitoire. Autrement dit, le juge d'instruction doit
communiquer les informations au parquet et attendre la décision d'opportunité. Un
réquisitoire distinct ou complémentaire, selon les cas, peut intervenir.
C- Constitution de partie civile :

La victime peut déclencher l'action publique en se constituant partie civile. Celle-ci


est l'acte par lequel, la victime saisit le juge d'instruction ou la juridiction du jugement en
exposant les faits préjudiciables, les éléments de preuve, les témoins et en réclamant
réparation. Elle peut être formulée contre une personne déterminée ou inconnue. Elle
peut être formulée à tout moment de l’instruction - ou du jugement- quelle que soit la
nature de l’infraction. Seulement la constitution de partie civile devant la juridiction du
jugement suppose que l’action publique a été déclenchée par un autre moyen.
La plainte avec constitution de partie civile est à distinguer de la simple plainte et de
la demande de réparation. Si la première ne déclenche pas automatiquement l'action
publique, la deuxième ne fait aucune allusion au fondement criminel de la demande.
Le juge d'instruction saisi communique le dossier au parquet pour présenter ses
réquisitions. A ce niveau plusieurs « scénarios » peuvent se présenter. D’abord le
ministère public ne peut requérir du juge de ne pas instruire sauf si la poursuite n’est pas
exigée légalement pour des raisons liées à l’action publique (prescription par exemple),
si les faits ne sont pas de ceux susceptibles d’instruction ou si les faits ne sont susceptibles
d’aucune qualification pénale (art. 92-3).
Ensuite et si le juge d’instruction prend une position différente de celle du parquet, il
doit prendre une ordonnance motivée. Mais le parquet peut tout simplement demander

23
Support de Cours « Procédure pénale ». (S6 Droit Privé) 1ère PARTIE Pr. A. ELAABD
---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
l’ouverture d’une instruction provisoire en cas de plainte non appuyée de motifs ou de
documents suffisants. Dans ce cas, le juge d’instruction peut entendre toute personne
mais comme témoins en attendant que des accusations leurs soient adressées
expressément.
Et si le parquet poursuit, il peut le faire par citation directe ou par réquisitoire
introductif d'instance quand une instruction est obligatoire. Rappelons que la victime
d'une infraction pénale peut procéder par citation directe devant la juridiction répressive,
ce qui équivaut à sa constitution de partie civile devant cette même juridiction.
Enfin la recevabilité définitive d'une constitution de partie civile reste soumise à deux
conditions : dépôt d'une caution pour couvrir les frais du procès et élection d'un domicile
dans le ressort de compétence du juge d'instruction. Dans le premier cas, c’est le juge qui
décide de la somme au regard des moyens matériels du plaignant qui peut tout
simplement bénéficier de l’aide judiciaire. Dans le deuxième cas et en cas de non-élection
d’un domicile, la partie civile ne pourra pas invoquer la non-notification comme moyen
de défense.
Notons enfin que la partie civile, le parquet ou l’accusé peuvent contester toute autre
demande de partie civile et que le juge d’instruction qui s’aperçoit de son incompétence
doit, après les réquisitions du ministère public, rendre une ordonnance de renvoi de
l’intéressé devant la juridiction compétente.
3. L’extinction de l’action publique :

La naissance de l'action publique survient avec l'événement de l'infraction. On parle


de la disparition, d'anéantissement de l'action publique lorsque le parquet, à cause de
certains éléments, n'a plus le droit de mettre en mouvement cette action. Autrement dit,
une cause d'extinction va produire un effet définitif, permanent négatif. Il s’ensuit malgré
l'effectivité d'une infraction, le délinquant ne peut être poursuivi pénalement. Le

24
Support de Cours « Procédure pénale ». (S6 Droit Privé) 1ère PARTIE Pr. A. ELAABD
---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
législateur marocain fixe ses causes d'extinction à travers les arts 4 à 6 du code de
procédure pénale. En schématisant, nous pouvons avancer qu'il y a deux catégories de
causes d'abord :
1. Les causes principales générales :
La volonté du législateur d'éteindre l'action publique se manifeste à travers trois
mécanismes :
A. Il y a d'abord l'amnésie ou la grâce totale. Au Maroc, l'amnésie selon la constitution
marocaine est une attribution du Roi mais aussi une attribution du parlement marocain
seulement on constate que ce dernier n'a jamais voté une loi d'amnésie laissant le Roi
l'unique auteur de l'amnésie. Dans ce sens, le Dahir du 8 octobre 1977 relatif à la grâce
royale fait de la grâce totale une cause d'extinction non pas uniquement de la peine mais
aussi une cause d'extinction de l'action publique lorsque cette grâce survient avant une
condamnation.
L'amnésie est la grâce totale et générale, elle neutralise en quelque sorte la
qualification pénale. C’est un symbole d'oubli et de pardon concernant une infraction
commise dans le passé et de ce fait l'infraction est effacée.
B. Ensuite, c’est le mécanisme d'abrogation d'une loi pénale d'incrimination. Au
niveau pénal, l'abrogation d'une loi signifie une opération de s’incrimination de
dépénalisation, autrement dit, un acte qui s'était réprimé auparavant devient un acte
licite.
C. Le troisième mécanisme est la prescription de l'action publique : C'est l'extinction
de l'action publique par l'effet du temps, on dit que la prescription est accomplie
lorsqu'un certain délai s'est écoulé depuis la commission de l'infraction sans que l'action
publique soit intentée, ce qui provoque l'extinction de l'action publique. Le délai est
variable selon la gravité de l'infraction, 15 ans pour les crimes, 4 ans pour les délits et 1

25
Support de Cours « Procédure pénale ». (S6 Droit Privé) 1ère PARTIE Pr. A. ELAABD
---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
année pour les contraventions sauf dérogation prévue par la loi (art. 5). Ce délai
commence à courir le lendemain de la commission. Il y a des exceptions concernant cette
prescription, sur le plan international, les conventions annoncent l'imprescriptibilité des
crimes contre l'humanité (crime de guerre et torture). L'art 5 du CPP à introduit une
dérogation concernant les agressions contre un mineur en déclarant qu'un nouveau
délai de prescription commence à courir à partir de 18 ans pour la victime.
La dernière cause principale de l'extinction de l'action publique relève de
l'intervention du juge, c'est ce qu'on appelle la chose jugée. C'est l'hypothèse d'une
extinction ou fin naturelle de l'action publique, le scénario selon lequel cette action
publique a été exercé jusqu'au bout, survient donc une décision qui a épuisé toutes les
voies de recours ou une décision qui ne peut être attaqué par expiration des voies de
recours.
Il importe de noter que la chose jugée implique qu'il n'est plus possible d'intenter un
second procès pour faire juger une seconde fois le même délinquant pour les mêmes
faits.
2- Les causes d'exceptions :
Parmi ces causes d’exception, on peut en citer :
A. La mort du délinquant :
C'est une cause définitive d'extinction si la poursuite n'a pas été entamé, si le décès
survient après le déclenchement de l'action publique, la procédure sera arrêtée, éteinte
que ce soit au stade d'instruction ou au niveau du jugement. Il importe de noter que les
principes classiques du droit pénal à savoir la responsabilité individuelle et la
personnalité des peines impliquent l'impossibilité d'intenter une nouvelle action
publique contre les héritiers du défunt.

26
Support de Cours « Procédure pénale ». (S6 Droit Privé) 1ère PARTIE Pr. A. ELAABD
---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
Cependant, cette cause d'extinction laisse subsister l'action civile. Ce qui veut dire
que la personne lésée a toujours la possibilité de demander réparation du dommage en
exerçant une action civile contre les héritiers du délinquant décédé, contre une personne
civilement responsable.
B. La transaction pénale :
Annoncée par l'art 4 du CPP c'est l'hypothèse d'un compromis conclu entre une
administration titulaire de l'action publique et un délinquant, un arrangement qui
consiste à payer une somme d'argent en contrepartie d'une renonciation à l'action
publique par l'administration. (art. 41 et ss du CPP)
B. Le retrait de la plainte de la victime :
Pour certaines infractions, il importe de noter que la plainte est un simple mécanisme
de renvoi de l'affaire vers les autorités judiciaires. Le dépôt d'une plainte n'a aucun effet
sur l'autorité du parquet concernant l'action publique. Cependant exceptionnellement,
à l'occasion de certaines infractions, le dépôt d'une plainte par la victime constitue une
condition nécessaire pour déclencher l'action publique, c'est-à-dire que le parquet est
obligé d'attendre le dépôt de cette plainte de la part de la victime, c'est l'exemple de
l'adultère, l'abondant de famille, le vol entre proches parent...
Par conséquent, pour ces infractions, le désistement de la victime concrétisée par le
retrait de la plainte après son dépôt entraîne l'extinction de l'action publique.
C. L’exercice de l’action civile

Elle est la procédure de saisine d'une juridiction répressive en vue d'obtenir la


réparation du dommage privé résultant d'une infraction pénale. Etant civile, elle pose le
problème de savoir si elle est un droit patrimonial susceptible d'appartenir à d'autres
personnes que son titulaire ou un droit extra-patrimonial réservé à son auteur ou, enfin,
si elle est un droit patrimonial réservé à certaines personnes nommément limitées. Ce

27
Support de Cours « Procédure pénale ». (S6 Droit Privé) 1ère PARTIE Pr. A. ELAABD
---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
problème revient, en définitive à celui de savoir quelles sont les personnes actives et
passives de cette action.
Elle doit être distinguée de l'action civile classique et de l'action à fin civile ; ce qui
revient à poser le problème de l'éclaircissement de sa signification, de sa finalité et des
personnes intervenantes et celui de ses modalités.
I- Sens de l'action civile.
Pour saisir la signification de l'action civile, il va falloir s'enquérir de sa finalité et de
son objet et des sujets susceptibles d'être englobés dans cette action.
▪ Finalité et objet de l'action civile.
Ces deux points permettront de la distinguer de l'action civile proprement dite c'est-
à-dire celle exercée devant le « juge naturel » de l'action civile (juge civil) et de l'action à
fin civile.
A. Finalité de l'action civile.
Techniquement elle a pour but la réparation d'un préjudice privé ayant pour cause et
pour fondement une infraction pénale. Elle se démarque de l'action civile au sens
classique et de l'action à fin civile.
Dans la première action, le dommage a un autre fondement : violation d'une
obligation contractuelle, quasi-contractuelle, inobservation d'une obligation légale
civile, délit civil ou quasi-délit.... Dans ces cas il n'y a pas d'infraction au sens pénal. Il est
vrai qu'une confusion peut exister entre le délit pénal et le délit civil, mais dans ce cas on
peut prévoir éventuellement deux actions. Le cas pouvant servir d'exemple est celui des
coups et blessures provenant d'une mauvaise manipulation d'un engin ou d'une
machine ; on aura une action techniquement civile en réparation du dommage résultant
des coups et une action purement civile en réparation du fait de la chose.

28
Support de Cours « Procédure pénale ». (S6 Droit Privé) 1ère PARTIE Pr. A. ELAABD
---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
L'action à fin civile peut avoir une origine pénale, mais elle a pour but l'exécution forcée
d'une obligation légale ou conventionnelle ou la résiliation d'une convention. Ces
actions existent notamment en matière de statut personnel et familial comme l'action en
vue d'obtenir un divorce judiciaire à la suite d’un adultère ou un abandon de domicile
conjugal ou coups et blessures...
L'action qui nous intéresse peut-être exercée en même temps que l'action publique voire
servir au déclenchement de cette dernière.
B- Objet de l'action civile.
Il revient à la réparation du dommage privé occasionné par l'infraction qu'il ne faut pas
confondre avec les dommages-intérêts qui sont une indemnisation par équivalent
pécuniaire.
Mais pour qu'il y ait réparation il faut :

• Un préjudice privé qui revient à la violation d'un intérêt légitime de la victime. Ce


préjudice peut être moral (atteinte à l'honneur et à la réputation), matériel (atteinte aux
biens de la victime) ou physique ou corporel. Il peut être moral et physique voir se
matérialiser dans les trois formes. Ce préjudice doit avoir un caractère personnel, certain
et direct (article 7 C.P.P.).
• L'infraction doit exister car elle conditionne la recevabilité de la demande. Elle ne pose
de problème que quand elle est d'habitude et il faut alors démontrer cette habitude.
Seule compte la condamnation et pas forcément l'exécution de la peine. La tentative et
les actes préparatoires n'empêchent pas l'action civile. Bien plus, la participation même
de la victime n'est pas un obstacle à l'action civile comme dans le cas de l'acceptation
d'un chèque sans provision.
• Il faut, enfin, une relation causale entre le préjudice privé et l'infraction.

29
Support de Cours « Procédure pénale ». (S6 Droit Privé) 1ère PARTIE Pr. A. ELAABD
---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
La réparation du préjudice privé peut prendre la forme d'une réparation en nature ou par
équivalent. la première prend souvent la forme de restitution qui sont des applications
de la remise en l'état antérieur à l'infraction prévues à l'art. 106 et suiv. du C.P. et qui
prend la forme de remise à leurs propriétaires légitimes des objets, sommes, effets
mobiliers...sous la main de la justice ou de publication du jugement pratiquée souvent
en matière de diffamation, d'injures ou de dénonciation calomnieuse. La deuxième
forme consiste à attribuer à la victime de l'infraction l'équivalent des pertes que lui a
occasionné l'infraction. Elle a lieu généralement dans les cas où les choses en question
sont fongibles ou ont disparu.

30

Vous aimerez peut-être aussi