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O. Tanor Dieng
Faculté des sciences économiques et de gestion, université Cheikh Anta Diop, Dakar, Sénégal
Article history: Cet article examine l'influence du profil du dirigeant de PME sur l'utilisation de l'information
Received 12 April 2018 comptable dans le contexte Sénégalais. Les résultats obtenus à partir d'une enquête sur 59
Accepted 23 April 2018 PME mettent en évidence les types d'informations comptables exploitées par cette catégorie
Available online 30 April 2018 d'entreprise. Il s'agit, entre autres, de l'information sur les coûts, les comptes annuels et le
budget. Les données empiriques exploitées confirment que le degré d'utilisation de certaines
Mots clés: informations comptables est influencé par le profil du dirigeant de PME.
Informations comptable © 2018 Holy Spirit University of Kaslik. Publishing services provided by Elsevier B.V. This
Comptabilité is an open access article under the CC BY-NC-ND license (http://creativecommons.org/
Profil du dirigeant licenses/by-nc-nd/4.0/).
Degré d'utilisation
1. Introduction
Les petites et moyennes entreprises (PME) cristallisent l'attention des pouvoirs publics aussi bien dans les pays développés que
dans les pays en développement. Au sein de ce type d'organisation, les auteurs ne manquent pas d'attirer l'attention sur le rôle
prépondérant du dirigeant. Ce dernier influence de façon remarquable le fonctionnement de la PME. Le fait qu'il soit très souvent le
principal stakeholder lui confère la légitimité de s'impliquer dans tous les aspects de la gestion (Julien et Marchesnay, 1988). Au
point que d'aucuns n'hésitent pas à parler de « personnalisation de la gestion de la PME » pour traduire, entre autres aspects, la
forte implication du dirigeant dans le fonctionnement de ce type d'organisation. Candau (1981), identifie ce trait caractéristique
comme un déterminent qui particularise la PME. L'auteur précise qu'au sein des PME, la place et l'importance du dirigeant
demeure l'invariant fondamental. Cet invariant n'est pas sans implications sur les pratiques comptables au sein de la PME
(Ngongang, 2006). Celles-ci dépendent ou peuvent être influencées par le dirigeant acteur-clé de la PME. Au juste, sur quelles
variables « consubstantielles » au dirigent les auteurs s'arrêtent-ils pour saisir son influence sur la gestion de la PME ? Dans les
contributions, la variable « profil » retient assez fortement les attentions. Sans doute du fait que le profil du dirigeant (ses aptitudes,
niveau de formation, expériences etc.) est considéré comme une source d'avantages concurrentiels pour la PME (Ndjambou et
Sassine, 2014). En France, Chapellier (1997) a examiné le rôle du profil du dirigeant sur les pratiques comptables de gestion des PME.
Dans ses conclusions, l'auteur invite à diversifier les contextes d'études en rapport avec cette problématique. Un appel qui a reçu
un écho favorable en Afrique avec les travaux de Ngongang (ibid.) au Tchad, de Lassoued et Abdelmoula (2006) en Tunisie etc. Au
Sénégal, Baidari (2005) a montré suivant une étude descriptive que les entreprises sénégalaises utilisent les données comptables.
Toutefois, l'auteur s'est concentré sur deux facteurs de contingence structurelle à savoir la taille et le contrôle exercé par les
sociétés mères. Il conclut dans ses résultats que ces deux variables « influencent les systèmes comptables adoptés » (p.24). Qu'en-
est-il du profil du dirigeant ? Est-il un determinant? Cette contribution, en se saisissant de cette question, se propose d'analyser les
liens entre cette variable et l'utilisation consacrée aux données comptables dans le champ spécifique de la PME au Sénégal. La
question principale qui structure la réflexion est la suivante:
Dans quelle mesure le profil du dirigeant détermine-t-il l'utilisation des données comptables dans les PME sénégalaises ?
Cette question se décompose comme suit :
quels sont les profils de dirigeants de PME identifiables dans le contexte sénégalais ?
peut-on établir un lien entre le profil de cet acteur central dans l'univers de la PME et l'utilisation des données comptables ?
Ces questions seront examinées dans le contexte du Sénégal où les PME occupent une place importante dans l'économie
nationale. Elles « représentent près de 90 % du tissu des entreprises, 30 % du PIB, 60 % de la population active, 42 % du total des
emplois du secteur moderne et 30 % de la valeur ajoutée des entreprises » (PSE [Plan Sénégal Emergeant], 2014). Une étude récente
de l'ANSD1 a montré que le Sénégal ne tire pas pleinement partie du potentiel de croissance des PME. L'étude pointe du doigt, entre
autres facteurs qui engluent l'essort des PME Sénégalaises, leur faible rentabilité qui limite leur force concurrentielle. Pourtant, ces
dernières années, les autorités sénégalaises ont entrepris des mesures jugées majeurs par d'aucuns (création d'instruments2 de
financements pour accompagner leur expansion; l'érection de structures3 d'appui-conseils, le renforcement du cadre4 législatif et
réglementaire qui régit leur fonctionnement) dans le dessein de muer ces unites économiques en puissant levier de croissance et
de lutte contre la pauvreté. Des mesures qui, dans les faits, tardent à produire les résultats escomptés. En se fiant à l'ADPME5,
« environ 40 % des PME sont défaillantes dans les cinq années suivant le changement de dirigeant ». Selon toujours l'ADPME, rien
qu'en 2012, 300 PME ont cessé d'exister en raison de difficultés de gestion. La lettre de politique sectorielle des PME (2010) avait
d'ailleurs attiré l'attention sur les défis à relever par les PME en matière de bonne gestion. Et pourtant, les PME sénégalaises ont, à
travers le SYSCOHADA6, des méthodes et outils de comptabiliés analytiques et financières supposés répondre à leur besoins de
gestion. Dès lors, c'est moins l'existence de methodes et outils d'analyse des données comptables qui se pose mais le défi pour ces
entités de pouvoir les utiliser efficacement. En consequence, c'est sur l'« utilisation des données comptables » que le présent papier
se concentre pour l'analyser en rapport avec l'influence que le dirigeant de PME peut y avoir.
Le plan de redaction retenu suit une structuration classique. Une revue de la littérature est d'abord élaborée pour préciser les
variables d'intérêt et leurs relations d'après les travaux précurseurs. Ensuite la démarche méthodologique qui a orienté la réflexion
est explicitée. Les résultats sont présentés et interprétés en troisième et dernier temps.
Ce premier point trace les contours de l'information comptable et examine la manière dont elle peut être influencée par le
dirigeant de PME.
La comptabilité, vue lato sensu, est une technique de bonne administration. Suivant cette représentation, c'est l'importance de la
comptabilité en tant que système d'information clé pour les décideurs qui retient particulièrement l'attention. Cet aspect ressort
chez Cerrada, De Rongé, De Wolf, & Gatz (2014) qui indiquent que l'objectif de la comptabilité, en tant qu'outil d'information, est
atteint lorsqu'elle livre les informations aptes à satisfaire les besoins des décideurs. Daval, Deschamps & Geindre (2004) relèvent,
avec un ton presque péremptoire, que sans ces informations, l'entreprise ne pourrait maîtriser son fonctionnement même si elle
prenait de bonnes décisions de gestion. À ce propos, Chapellier (1997) suggère que soient différenciées données comptables (soit
les données de la comptabilité générale, du système de calcul de coûts, du système budgétaire et du système de suivi) et
informations comptables (soit l'utilisation dont ces même données font l'objet). En effet, l'utilité des données réside dans
1
Rapport de l'enquête nationale sur les petites et moyennes entreprises, octobre 2014. Rapport réalisé par l'ANSD (Agence nationale de
la statistique et de la démographie) à la demande de la direction des petites et moyennes entreprises dans le cadre de la l'application de la
lettre de politique sectorielle sur les PME.
2
Parmi ces instruments il y a le FONGIP (Fonds de garantie des investissements prioritaires) et le FONSIS (Fonds souverain d'inves-
tisement stratégique).
3
L'ADPME (Agence de Développement et d'Encadrement des Petites et Moyennes Entreprises), l'une des plus importantes structures
d'appui-conseil, assiste les PME pour la mise en place d'outils de gestion adaptés à leurs besoins.
4
Exemple de la loi d'orientation relative à la promotion et au dévelopement des PME adoptee en 2008 qui, entre autres, définit les PME,
les avantages à leur accorder et les obligations qu'elles doivent respecter.
5
http://www.enqueteplus.com/content/gestion-des-entreprises-au-s%C3%A9n%C3%A9gal%C2%A0-300-pme-ont-disparu-en-2012.
6
Le Système comptable OHADA (SYSCOHADA) est le réfentiel comptable commun au 17 pays de l'Organisation pour l'harmonisation en
Afrique du droit des affaires (OHADA).
46 la revue gestion et organisation 10 (2018) 44–61
l'information qu'elles véhiculent et ses impacts sur la gestion (Haouet, 2008). Sur ce point, les travaux précurseurs de Mélèse (1995)
ont souligné la complexité des relations entre les données, l'individu (qui les manipule) et son contexte d'action. Dans le cadre
posé par l'auteur, l'information s'appréhende au moins sur une relation avec deux autres éléments: les données qui en constituent
l'intrant et l'utilisation dont ces mêmes données font l'objet. C'est seulement lorsque les données comptables sont (interprétées)
utilisées pour la prise de décision qu'elles se muent en informations (Lebraty, 2001; Baidari, 2005). Même si l'on accepte l'idée que
les données sont « objectives » au sens de Lebraty (op.cit.), il demeure que leurs utilisations, guidées par des mécanismes
interprétatifs, laissent une bonne place à la subjectivité. Chapellier (1997) consacre cette subjectivité lorsqu'il analyse
l'information comptable. L'auteur définit les pourtours de l'information comptable sous le registre de l'« utilisation dédiée à ces
données ». Il s'agit des données à base comptable (soit des données « élaborées en totalité ou en partie sur la base de la comptabilité
» [Ibid. p.13]). Partant, seront considérées comme information comptable pour les besoins de cette étude les seules données
comptables utilisées par le dirigeant dans sa gestion. Ce qui n'est pas sans rappeler l'approche relative de l'information au sens de
Davis (1986). Suivant cette approche, ce qui apparaît être comme une information significative pour une personne peut ne pas
l'être pour une autre. En écho à cette idée, Marciniak et Rowe (2005 p.6) notent que « l'information dépend de l'individu qui la reçoit.
Elle n'existe pas en soi, elle est conditionnée par la représentation d'un sujet ». Ce sujet dont font allusion ces auteurs est incarné
dans l'étude-ci par le dirigeant de la PME.
L'influence du dirigeant de PME sur le système de gestion de cette catégorie d'entreprise peut s'appréhender à travers les traits
caractéristiques de cet acteur central. Dans les contributions, les facteurs tels que l'âge du dirigeant, son niveau d'étude, sa
formation et son expérience retiennent particulièrement l'attention. Leur influence sur le système d'information comptable de la
PME est confirmée par certains travaux (Tableau 1).
Les deux derniers auteurs cités dans le Tableau 1 ci-dessus sont de ceux qui ont traduit dans leurs recherches l'idée de Rich
(1992) qui suggère, dans les études sur différents facteurs pouvant caractériser un objet ou sujet (exemple des caractéristiques âge,
expérience etc. du dirigeant), que soit mise à profit l'analyse typologique. Ngongang (2006) a distingué dans son cadre théorique sur
l'analyse du système d'information comptable (SIC) des PME Tchadienne trois dimensions dans le profil du dirigeant: le profil
psychologique où il inclut la formation, le profil comportemental où il inclut l'expérience et le profil socio-démographique où il
prend en compte l'âge et le niveau de formation du dirigeant. Toutefois, l'auteur dans l'exposé de ses résultats s'est plutôt contenté
d'analyser l'influence des variables (âge, formation,) considérées chacune induviduellement sur le systême d'information
comptable au détriment d'une analyse distinguant des « profils types » (des tupos) et leurs relations éventuelles avec le SIC. C'est
véritablement chez Chapellier (1997) (en France), Chapellier et Hamadi (2013) (en Tunisie) où l'on note un effort consacré à
l'analyse des liens entre les profils des dirigeants de PME et l'utilisation des données comptables (ou leur système comptable). Le
corpus théorique mobilisé par ces dernier s'adosse, entre autres, sur les réflexions pionnières de Smith (1965)7 en la matière.
L'auteur établit une distinction entre deux « tupos » ou profils de créateurs d'entreprise: les artisans (averses au risque, faiblement
formés, préférant la stabilité) et les opportunistes (crédités d'un niveau de formation supérieur, plus outillés sur les pratiques de
7
Smith (Smith et al., 1992) a par la suite enrichi sa première typologie en distinguant à côté de l'opportuniste et de l'artisan deux autres
profils : le manager et l'innovateur.
la revue gestion et organisation 10 (2018) 44–61 47
gestion, orientés vers le futur et le changement). Ces deux « tupos », rapprochés des contributions plus récentes [opposant
manager-innovateur et artisan (Laufer, 1975), prospecteur-innovateur et suiveur-reacteur (Miles et Snow, 1978), dirigeant PIC et
dirigeant CAP (Julien et Marchesnay, 1996), dirigeant ambitieux et conservateur ancien (Chapellier, 1997)] laissent poindre (hors
considération des efforts d'affinements plus notables dans certaines typologies que dans d'autres) une propension à toujours
opposer deux profils: le dirigeant traditionnel et le dirigeant innovateur (Daval et al., 1999). Au regard de l'approche subjective, ces
profils ne sont pas sans influences sur les pratiques comptables des entreprises (Mbumba et Mbaka, 2014). Chapellier (1997)8 a
étudié cette influence dans ses travaux sur la PME. L'auteur montre que le profil des dirigeants influence l'intensité d'utilisation de
l'information comptable. S'interessant aux données budgétaires, Chapellier et Hamadi (op. cit.) en sont arrivés à la conclusion que
des dirigeants de PME de profils différents affichent des attitudes différentes en matières d'innovations budgétaires. Forts de ces
considérations et de l'idée force qui donne sens à l'approche subjective susmentionnée, l'hypothèse que nous tentons d'éprouver
est la suivante :le profil du dirigeant de PME influence l'utilisation de l'information comptable dans cette catégorie d'entreprise.
Cette hypothèse se décompose comme suit :
H1. Il existe une typologie de profil de dirigeant de PME dans le contexte Sénégalais ;
H2. Le degré d'utilisation de l'information comptable est influencé par le profil du dirigeant.
3. Choix méthodologiques
Ce point présente la démarche d'échantillonnage, l'instrument utilisé pour la collecte de données et les caractéristiques des
unitées enquêtées.
L'échantillon étudié dans cette recherche est extrait de la base de données de la chambre de commerce d'industrie et d'agriculture
de Dakar (capitale du Sénégal). Cette base recence les entreprises réparties sur le territoire national (avec des indications sur leurs
adresses, numéro de telephone, chiffre d'affaires, prénom et non du dirigeant etc.). Le processus d'échantillonnage a d'abord
consisté à délimiter sur la base les entreprises relevant de la catégorie des PME (cible de l'étude). Là-dessus, le projet de loi portant
sur le développement des PME et de la modernisation de l'économie au Sénégal a servi d'instrument filtre. Cet instrument filtre est
considéré comme PME par le projet de loi susmentionné toute entité réalisant un chiffre d'affaires hors taxe annuel n'excédant pas
deux milliards de FCFA. Quatre-vingt (80) entreprises dans ce groupe dont le chiffre d'affaires ne dépasse pas la limite des deux
milliards de FCFA ont été contactées pour prendre part à l'étude. Un tirage aléatoire simple a permis de constituer cet échantillon
de Quatre-vingt (80) PME. Dans ce total sollicité pour prendre prendre part à l'étude, cinquante-neuf (59) ont répondu
favorablement. Soit un taux de participation de près de 74 % (un taux acceptable dans le contexte9 de l'étude).
La collecte de données s'est faite par le bais d'un questionnaire10 inspiré de Chapellier (1997). Nous avons privilégié
l'administration en face à face pour maîtriser les omisions de réponses non-volontaires de la part des répondants d'une part ett,
d'autre part, s'assurer que les items sur lesquels sont interpellés les enquêtés ne sont pas compris de travers.
Les premiers items du questionnaire sont destinés à recueillir des informations globales sur l'entreprise (chiffre d'affaires,
effectifs, secteur d'activité, année de création de l'entreprise, statut juridique). Le second groupe d'items vise à mesurer le degré
d'utilisation de l'information comptable. Au total, 15 items décrivant des degrés d'utilisation différents de l'information comptable
ont été employés. Le troisième et dernier groupe d'items de l'instrument de collecte totalise neuf questions autour des traits
personnels du dirigeant (âge, formation, expérience, niveau d'études, buts poursuivis). Les variables manipulées dans ce troisième
bloc d'items ont servi à caractériser les profils des dirigeants enquêtés. Il s'agit, à l'exception de la formation (où l'enquêté devait
préciser s'il a suivi une formation « gestionnaire » ou « non gestionnaire ») de variables de types ordinal. La variable « but poursuivi
par le dirigeant » est mesurée en évaluant le degré d'importance accordé par le dirigeant à l'indépendance, la pérennité/stabilité, la
recherche de profit, la recherche de croissance. L'échelle de Likert utilisée demandait aux répondants de s'exprimer sur le degré
d'importance (mesuré à travers les modalités possibles de réponses: négligeable, moyen, important) qu'ils accordent à chacun des
buts sus indiqués.
L'ensemble des données recueillies auprès des dirigeants de PME enquêtées ont fait l'objet de traitements statistiques sur
SPSS 21.
8
L'auteur identifie dans sa typologie trois catégories : manager ambitieux – conservateurs anciens – débutants incertains.
9
Nous avons dû faire avec des dirigeants de PME (choisis comme cible dans l'étude) très peu enclins à participer à des enquêtes sur des
informations financières !
10
Il convient de préciser que le questionnaire utilisé avait également pour projet d'appréhender l'instrumentation des outils de contrôle
de gestion au sein des PME sénégalaises. Cette partie n'est pas présentée ici.
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Les 59 entreprises effectivement enquêtées dans l'étude évoluent dans les secteurs de l'industrie (30,5 %), du commerce (39 %) et
des services (30,5 %). Près de 70 % des PME de l'étude sont des sociétés à responsabilites limités (SARL). Les sociétés anonymes (SA)
dont les conditions requises pour leur création sont un peu plus difficiles que les autres formes juridiques ne représentent que
8,5 %. La plus part des PME de l'échantillon (71,2 %) ont au plus vingt (20) ans d'existence (Tableau 2).
4. Résultats et interprétations
L'objet dans ce point est double. IL s'agit d'abord de caractériser les « tupos » ou profils de dirigeants de PME identifiés dans
l'échantillon. Ensuite il est question d'appréhender les liens entre profil et utilisation de l'information comptable.
Les variables qui ont retenu l'attention dans l'analyse du profil sont l'âge du dirigeant, son niveau d'étude, le type de formation
qu'il a suivie, l'importance qu'il accorde à la recherche de croissance, à la recherche de profit, à la recherche d'indépendance, à la
recherche de stabilité/pérennité et son expérience au poste de dirigeant. Nous avons procédé à une première analyse en
composante principale sur l'ensemble de ces variables (au nombre de huit en tout) pour détecter des groupes susceptibles d'être
distingués. Les résultats de cette première ACP ont conduit à l'élimination de la variable recherche de stabilité/pérennité qui
présente une faible qualité de représentation car inférieure à 0, 5 (Annexe 1). L'indice de KMO (0,537) de cette première ACP est
également très faible. La seconde ACP faites sur les sept (07) variables restantes a produit une qualité de représentation supérieure
à 0,5 pour l'ensemble des variables et fait émerger trois axes factoriels qui expliquent 70 % de l'inertie totale du nuage. Avec deux
limites qui sont associées à ces résultats. D'une part, le KMO (0,549) reste toujours très faible. D'autre part, la matrice des
composantes après rotation fait apparaître une position ambiguë de la variable « Expérience du dirigeant » qui sature sur deux axes
en même temps (Annexe 2). La troisième ACP sans cette variable « expérience du dirigeant » améliore la variance expliquée par les
trois axes factoriels (73, 795 %). Toutefois, la matrice des composantes produite par cette ACP affiche une variable « âge » à la fois
corrélée sur les axes 2 et 3 avec des valeurs très voisines (Annexe 3). Ce qui ne facilite pas le choix du facteur auquel il convient de la
rattacher. Nous avons alors convenu de relancer une nouvelle ACP sans cette variable « âge ». Cette ACP en question concerne cinq
(5) variables associées au profil du dirigeant (importance du profit, importance de la croissance, importance de l'indépendance,
type de formation et niveau d'études). Les résultats livrés par cette dernière ACP donnent un indice KMO acceptable et le test de
sphéricité de Bartlett est significatif (Tableau 3).
la revue gestion et organisation 10 (2018) 44–61 49
L'ACP ainsi réalisée sur ces cinq variables fait apparaître deux axes factoriels expliquant respectivement 39, 819 % et 24, 924 %
de la variance de l'inertie totale du nuage. Ce qui représente un cumul acceptable de 64, 743 % (Annexe 4).
Les variables « importances accordées à la recherche de profit », « importance de la recherche d'indépendance », « importance
accordée à la croissance » sont très positivement corrélées au premier axe. Le niveau de formation et le type de formation sont
très corrélés (négativement et positivement respectivement) avec l'axe 2. Le diagramme de composante dans l'espace après
rotation sur ces deux axes suggère la présence de deux groupes (classes) de dirigeants (Annexe 5). La méthode des nuées
dynamiques a alors été appliquée pour une confirmation de ces deux groupes ou classes (Annexe 6). Les résultats mettent en
évidence deux groupes (classes) distincts de dirigeants de PME avec des proportions d'observations indiquées ci-dessous
(Tableau 4).
4.1.1. Groupe 1
Il comprend un effectif de 20 dirigeants correspondant à une proportion de 33, 9 % dans l'échantillon étudié qui est de 59. Plus de la
moitié dans ce groupe est constituée de dirigeants disposant d'une formation de niveau Bac plus 3 au plus (Tableau 5 ci-dessous).
Dans ce groupe, un dirigeant sur trois (plus exactement 35 % cf. tableau ci-dessous) ont construit leurs parcours dans l'autodidaxie
jusqu'à arriver au poste de direction de l'entreprise qu'il pilote. Plus de la moitié dans ce groupe 1 est constituée de dirigeants qui
ont suivi une formation dans un domaine différent des sciences de gestion. La recherche de profit chez ces dirigeants est un
objectif important (95 %). Il en est de même de l'objectif de croissance (85 %) et de la recherche d'indépendance (70 %).
À la lumière de ce descriptif, nous catégorisons le groupe 1 sous l'étiquette « dirigeants ambitieux » en quête d'une pluralité de
buts ayant visiblement tous un statut de priorité! Chapellier (1997) souligne d'ailleurs les risques de conflits entre les buts lorsqu'ils
sont ciblés de manière obsessionnelle.
4.1.2. Groupe 2
Cette classe enregistre un effectif de 31 dirigeants représentant une proportion de 52,5 % dans l'échantillon d'étude. Elle comprend
des dirigeants d'un niveau d'étude un peu plus élevé comparé à la classe 1. 38,7 % dans ce groupe ont au moins la Maîtrise (ou ont
étudié jusqu'au niveau Master 1). Dans cette classe, 2 dirigeants sur trois (plus exactement 67,7 %) ont suivi une formation de type
gestionnaire. Egalement, à la différence du premier groupe, cette classe accorde une importance moyenne à l'objectif de recherche
d'indépendance et de recherche de profit. La croissance ressort dans la plus part des dirigeants de ce groupe (77,4 %) comme un but
auquel est attachée une grande importance (Tableau 6).
À la lumière de ce descriptif, le groupe 2 est étiqueté « gestionnaires en quête de croissance » pour leur unité économique.
Ces résultats valident l'hypothèse H1 qui stipulait l'existence d'une typologie de profil de dirigeants de PME identifiable dans
l'échantillon objet d'étude.
Le degré d'utilisation de l'information comptable est mesuré à travers la fréquence et l'intensité d'utilisation.
La fréquence d'utilisation est appréhendée à travers une échelle de likert comprenant cinq items inspirés des travaux de
Chapellier (1997). Pour chaque item les modalités de réponse vont de 1 (l'information est utilisée toutes les semaines) à 7
(l'information n'est jamais utilisée). Le test de fiabilité confirme une bonne qualité de l'échelle (l'alpha de Cronbach est de 0,794) et
50 la revue gestion et organisation 10 (2018) 44–61
Données d'enquêtes.
- : négligeable ; : moyen ; + : important.
Fréquence n % n % n % n % n %
Jamais 3 5,1 – – – – 11 18,6 6 10,2
Uniquement quand un problème se pose 8 13,6 17 28,8 6 10,2 14 23,7 29 49,2
Une fois par an 29 49,2 23 39,0 10 16,9 14 23,7 11 18,6
Tous les semestres 7 11,9 7 11,9 15 25,4 7 11,9 2 3,4
Tous les trimestres 2 3,4 2 3,4 3 5,1 1 1,7 1 1,7
Tous les mois 9 15,3 2 3,4 18 30,5 6 10,2 9 15,3
Toutes les semaines 1 1,7 2 3,4 2 3,4 5 8,5 1 1,7
Enquêtes.
autorise la possibilité d'y réaliser des traitements statistiques. Les données recueillies avec l'instrument puis dépouillées ont livré
le Tableau 7 suivant.
Au regard du tableau ci-dessus, un noyau parmi les PME n'utilise pas le bilan et le compte de résultat (5,1 %), se dispense de
toute utilisation de l'information sur les écarts entre prévisions et réalisation (18,6 %), n'exploite pas non plus les informations
relatives à l'étude de la rentabilité de leur activité (10,2 %). En face de ces PME qui n'exploitent pas du tout les informations
comptables susmentionnées il y'a les PME (largement plus nombreuses) qui exploitent l'information comptable avec une
périodique qui va de ponctuel (l'information est utilisée uniquement quand un problème se propose) à hebdomadaire
(l'information est mobilisée toutes les semaines). Un tel résultat amène à relativiser l'affirmation considérant que dans le cadre de
leur gestion, les PME se désintéressent des données comptables pour se suffire des données orales ou des données basées sur
l'intuition. Chapellier et Mohammed (2010) ont sur ce point confirmé le caractère décalé de cette vision en contexte Syrien. Dans
leur étude, seuls 3, 3 % des PME enquêtés n'utilisent pas les informations comptables dans leur gestion.
la revue gestion et organisation 10 (2018) 44–61 51
n % n %
Fréquence d'utilisation comptes annuels < 1 an 8 53,3 13 50
1 an 7 46,7 13 50
(Bilan et Compte de résultat) Total 15 100 26 100
< 1 an 10 71,4 13 56,5
Fréquence d'utilisation coût 1 an 4 28,6 10 43,5
Total 14 100 23 100
Fréquence d'utilisation budget < 1 an 12 85,7 22 84,6
1 an 2 14,3 4 15,4
Total 14 100 26 100
Fréquence d'utilisation < 1 an 10 83,3 17 73,9
Écart prévision/réalisation 1 an 2 16,7 6 26,1
Total 12 100 23 100
< 1 an 13 86,7 17 70,8
Fréquence d'utilisation information sur la rentabilité 1 an 2 13,3 7 29,2
Total 15 100 24 100
Enquête.
Aussi surprenant que cela puisse paraître, une proportion non négligeable parmi les PME (49,2 %) utilise l'information
comptable relative à la rentabilité de leur activité uniquement quand elles rencontrent un problème (Tableau 8). Nous avons
essayé d'en savoir sur les informations que ces PME collectent en conséquence. Alors les variables « fréquence d'utilisation de
l'information sur la rentabilité » et quatre (04) situations d'analyse de la rentabilité ont été croisées. Ce qui a livré le Tableau 8
suivant.
Les données du tableau ci-dessus montrent que les PME en question (à la recherche de solutions à leurs difficultés) privilégient
en général une analyse globale de leur rentabilité (18/29) sur une analyse détaillée de la rentabilité (10/29) et n'hésitent pas pour la
plupart à se comparer aux entreprises dont elles peuvent se mesurer (15/29).
Sur la base des résultats livrés par le tableau précédent, nous avons essayé d'examiner si le profil du dirigeant peut expliquer les
différences de fréquence d'utilisation de l'information comptable notées. Pour ce faire, l'échelle de Likert a été recodée autour de
deux modalités en prenant l'année comme référentiel discriminant. Ainsi, nous avons regroupé les fréquences mois, semaine,
trimestre, semestre qui ont en commun d'être des périodes de temps plus courte que l'année (< 1 an). Les valeurs enregistrées
dans ce regroupement sont par la suite comparées aux effectifs des fréquences d'utilisation coïncidant avec l'année (1 an). Le
dépouillement à l'issue de ce recodage a livré le Tableau 9 suivant.
Au regard des indications ci-dessus, l'on remarque qu'au sein des « dirigeants ambitieux », la proportion qui exploite
l'information comptable au moins deux fois par an (au moins semestriellement11) est plus élevée que celle qui diffère leur
exploitation en fin d'exercice (au moment de l'établissement des comptes annuels). Chez les dirigeants de profil 2 représentés par
les « gestionnaires en quête de croissance » on semble moins insister sur l'information comptable livrée par les comptes globaux
que sont le bilan et le compte de résultat. La fréquence d'utilisation de ces supports (une fois par an) coïncide avec leur délai
obligatoire de production chez 50 % de cette classe dirigeante. A contrario, une légère majorité parmi les « dirigeants ambitieux »
(53,3 %) exploitent les informations relatives au bilan et au compte de résultat avant qu'ils ne soient établis en fin d'année
conformément aux normes fixées par la règlementation comptable (cf. tableau supra). Une lecture globale et comparative de
11
Autour des fréquences de temps < 1 an, le semestre est la modalité la plus faible et la semaine la modalité la plus élevée (ou la plus
forte).
52 la revue gestion et organisation 10 (2018) 44–61
l'ensemble des données du tableau ci-dessus montre que les dirigeants ambitieux, comparés aux gestionnaires en quête de
croissance, utilisent en général plus fréquemment l'information comptable relative :
au bilan et compte de résultat (53,3 % contre 50 % respectivement);
aux coûts (71,4 % contre 56,5 % respectivement);
aux écarts entre prévisions et réalisations (83,3 % contre 73,9 % respectivement);
à la rentabilité (86,7 % contre 70,8 % respectivement).
Nous avons procédé à des tests de Khi2 pour rechercher l'existence d'un lien statistique entre le profil et les fréquences
d'utilisation de l'information comptable. Les résultats obtenus ne sont pas concluants. Les valeurs des probabilités sont toutes
supérieures à 5 %. La valeur de la probabilité la plus faible est de 0,230 avec un Khi2 faible de 1,304. Les travaux de Chapellier (1997)
réalisés en France n'ont pas également permis de confirmer une relation statistique significative entre le profil du dirigeant et la
fréquence d'utilisation des données comptables. Lassoued et Abdelmoula (2006) ont examiné l'influence de certaines
caractéristiques du dirigeant de PME (âge, expérience, niveau de formation) sur l'utilisation des données comptables en Tunisie.
Globalement, les tests statistiques qu'ils ont effectués n'ont pas permis de confirmer les effets statistiques attendus de ces
variables sur l'utilisation des données comptables.
En examinant, à l'aide de SPSS, les moyennes des fréquences d'utilisation des informations comptables selon le profil, nous
obtenons le tableau de contingence ci-après Tableau 10.
Les tests t de Student de comparaison de moyenne (Annexe 7) sont significatifs au seuil de 5 % pour les variables « fréquences
utilisation information budget » (t = 2,058 et p = 0,046 < 0,05) et « fréquence utilisation information écart » (t = 3,127 et p = 0,004).
Alors, nous pouvons retenir qu'en moyenne les « dirigeants ambitieux » utilisent plus fréquemment l'information sur le budget et
le calcul des écartes entre prévisions et réalisations que les « gestionnaires en quête de croissance ». Ce résultat va dans le sens de
l'hypothèse H2 qui prévoyait un rapport de dépendance entre le profil et l'utilisation de l'information comptable.
L'intensité d'utilisation est la seconde dimension retenue dans cette étude pour mesurer le degré d'utilisation de l'information
comptable au sein des entreprises de l'échantillon. À ce niveau, une échelle de Likert de 10 items inspirés de Chapellier (1997) a été
utilisée. Les modalités dans chaque item vont de 1 (utilisation nulle) à 5 (utilisation très importante). La fidélité de l'échelle ainsi
élaborée est acceptable (l'alpha de Cronbach est de 0,831) et permet alors de rendre compte de la dimension intensité. Le schéma
ci-après offre une première vue complète sur les tendances des réponses au sein de l'échantillon (Fig. 1).
Comme le suggère le schéma ci-dessus, l'intensité d'utilisation des informations comptables est une grandeur variable. À des
fins d'analyse statistiques des variations de l'intensité d'utilisation ressorties par le schéma, le Tableau 11 ci-après est élaboré. Il
résume les paramètres de tendances centrales et de dispersion.
L'information comptable est en moyenne utilisée de manière importante par les PME (tout profil confondu) pour contrôler le
niveau de la trésorerie (4,1695), connaître le dû fournisseur et le dû client (4,1017), contrôler le niveau de la performance de
l'entreprise (4,0517) et surveiller son évolution par rapport à celle des concurrents (4,0517).
Sur un autre aspect, les données ci-dessus laissent poindre que l'information comptable n'est pas intensément utilisée pour la
cause d'un accès plus facile au financement bancaire. L'intensité moyenne d'utilisation de l'information comptable pour
convaincre le banquier en cas de demande de crédit est de 3,4576 en valeur exacte (Tableau 11). Ce qui n'est pas très loin de la
modalité 3 qui correspond à une utilisation nulle dans l'échelle de Likert utilisée. Cette propension des PME à quelque peu sous
utiliser l'information comptable dans leur relation avec le banquier rend difficile, pour ce dernier, la possibilité d'apprécier leur
capacité de remboursement (Lefilleur, 2008).
Une lecture globale du tableau montre que l'information comptable est en moyenne faiblement utilisée pour des décisions de
type choix d'un mode de financement et gestion des emprunts. La moyenne d'utilisation de l'information comptable est inférieure
à 3 concernant chacune de ces décisions. Pour rappel, la valeur 3 correspond au niveau de l'échelle à une situation d'utilisation très
la revue gestion et organisation 10 (2018) 44–61 53
faible. Nous nous sommes employés à comparer les intensités moyennes d'utilisation de l'information comptable suivant le profil
du dirigeant de PME. Les résultats sont synthétisés dans le Tableau 12 suivant.
En conséquence, les gestionnaires en quête de croissance (profil 2) utilisent en moyenne plus intensément l'information
comptable pour gérer les emprunts et convaincre les banquiers. Ce qui est cohérent au regard de l'importance du financement
vu comme un instrument de taille pour la PME qui veut relever le défi de la croissance. Dufourcq (2014) souligne à ce propos que
la poursuite par la PME d'un objectif de croissance peut souffrir des difficultés de financement du besoin en fonds de
roulement. L'auteur souligne en conséquence l'importance pour les PME qui aspirent croître et se développer de disposer
« d'une gamme de financement complète en haut et bas de bilan et répondant aux différentes phases du cycle de vie de
l'entreprise » (p. 50).
a
Pour chaque item, la moyenne est calculée à partir des réponses qui peuvent prendre comme valeur 1: utilisation nulle, 2: utilisation très
faible, 3: utilisation faible, 4: utilisation importante et 5: utilisation très importante.
54 la revue gestion et organisation 10 (2018) 44–61
Enquêtes.
À l'observation, l'intensité moyenne d'utilisation de l'information comptable est assez comparable d'un profil de dirigeant à l'autre. Les tests t
de Student (Annexe 8) effectués en appoint pour déceler des différences de moyennes nous poussent à nous arrêter sur deux variables en
particulier. Il s'agit de l'intensité moyenne d'utilisation de l'information comptable pour gérer les emprunts qui est supérieure chez les
dirigeants de profil 2 (3,1481 > 2,1765). Le test est significatif (P = 0,005 <5 %). Un résultat qui va dans le sens de l'hypothèse H2. Laquelle
préfigurait une différence d'utilisation de l'information comptable entre profil de dirigeants différents. L'intensité moyenne d'utilisation de
l'information comptable pour convaincre les banquiers qui est également supérieure chez les dirigeants de profil 2 (3,7037 > 2,7059). Le test est
significatif ( p = 0,023 < 5 %). Ce résultat donne également vie à l'hypothèse H2.
5. Conclusion
L'objet dans cette contribution était d'appréhender l'utilisation de l'information comptable en contexte PME. S'inspirant des
travaux de Chapellier (1997) en particulier, la variable « utilisation de l'information comptable » a été appréhendée sous les volets
fréquence et intensité. Le dirigeant, acteur central dans cette catégorie d'entreprise, nous a semblé être une porte d'entrée
pertinente pour examiner son empreinte sur chacune des composante « fréquence d'utilisation de l'information comptable » et
« intensité d'utilisation de l'information comptable ».
Entre autres résultats mis en exergue par l'étude figure l'identification des types d'informations manipulées par les PME. En
l'occurrence, les coûts, les comptes bilan et tableau de résultat, le budget etc. sont ressortis de l'étude comme des sources
d'information exploitées par les PME dans le cadre de leur gestion. Un résultat qui suggère que soit relativisée la vision selon
laquelle le modèle de gestion dans la PME est un modèle au « jugé », basé uniquement sur l'intuition.
L'analyse typologique effectuée sur les données d'enquêtes a ressorti deux profils de dirigeants de PME dans l'échantillon (les
dirigeants ambitieux et les gestionnaires en quête de croissance) dont nous avons essayé de voir les rapports avec l'utilisation de
l'information comptable. Les tests statistiques confirment que les « dirigeants ambitieux » utilisent en moyenne plus
fréquemment l'information sur le budget et le calcul des écarts entre prévisions et réalisations que les « gestionnaires en quête de
croissance ». D'un autre côté, les tests confirment que les gestionnaires en quête de croissance utilisent en moyenne plus
intensément l'information comptable pour gérer les emprunts et convaincre les banquiers.
Somme toute, ces résultats viennent compléter les travaux précurseurs de Baidari (2005) réalisée dans le contexte sénégalais.
Lesquels avaient permis à l'auteur de confirmer que les entreprises sénégalaises utilisent les données comptables de gestion.
Toutefois, cette recherche précurseur dans le contexte sénégalais n'avait pas pris en compte l'influence que pouvait
éventuellement exercer le dirigeant. S'y ajoute que son étude portait moins sur les PME sénégalaises (seules 16 PME Sénégalaises
ont concerné son étude qui, au total, a porté sur un échantillon assez modeste de 39 entreprises).
Il convient de relever que cette contribution n'est pas sans limite. Si l'analyse typologique réalisée a l'avantage de livrer une
connaissance synthétique sur les profils de dirigeants de PME, elle n'offre qu'une vue simplifiée de la réalité sur le terrain. En outre,
la revue gestion et organisation 10 (2018) 44–61 55
les aspects psychologiques de la personnalité du dirigeant (attitude face au risque, à l'incertitude, sa créativité etc.) pourraient être
prises en compte dans l'étude des profils. Même si nous jugeons la taille de l'échantillon de cette étude assez satisfaisant en raison
de la difficulté de faire participer les dirigeants de PME Sénégalaises à des enquêtes de recherche, il demeure que son élargissement
participerait à accroitre en conséquence la validité des observations.
Qualité de représentation
Initial Extraction
Âge en échelle de trois groupes 1,000 ,678
expérience du dirigeant 1,000 ,696
niveau de formation du dirigeant 1,000 ,789
importance de la recherche d'indépendance pour le dirigeant 1,000 ,612
importance croissance pour le dirigeant 1,000 ,638
importance profit maximal pour le dirigeant 1,000 ,568
vous avez suivi quel type de formation 1,000 ,738
importance pérennité/stabilité pour le dirigeant 1,000 ,414
Méthode d'extraction : Analyse en composantes principales.
Composante
Importance de la recherche d'indépendance pour le dirigeant 1 2 3
Importance profit maximal pour le dirigeant ,807
importance croissance pour le dirigeant ,804
Age en échelle de trois groupes ,776
niveau de formation en échelle ,830
vous avez suivi quel type de formation ,797 ,352
expérience définie sur échelle ,885
importance de la recherche d'indépendance pour le dirigeant ,542 ,594
Méthode d'extraction: Analyse en composantes principales.
Composante
1 2 3
Importance de la recherche d'indépendance pour le dirigeant ,779
Importance profit maximal pour le dirigeant ,755
Importance croissance pour le dirigeant ,751
Niveau de formation en échelle ,372 ,798
Age en échelle de trois groupes ,665 ,614
vous avez suivi quel type de formation ,406 ,809
Composante Valeurs propres initiales Extraction Sommes des carrés Somme des carrés des facteurs
des facteurs retenus retenus pour la rotation
Appartenance à la classe
Appartenance à la classe
InférieureSupérieure
fréquence d'utilisation du HVE 1,233 ,274 ,471 39 ,640 ,21282 ,45148 ,70039 1,12603
bilan et du compte de
résultat
HVI ,442 24,158 ,662 ,21282 ,48116 ,77991 1,20555
fréquence utilisation HVE ,179 ,675 ,431 35 ,669 ,16026 ,37161 ,59415 ,91467
information coût
HVI ,425 23,659 ,675 ,16026 ,37744 ,61933 ,93985
fréquence utilisation HVE ,087 ,770 2,058 38 ,046 ,95055 ,46182 ,01564 1,88546
information budget
HVI 2,172 31,090 ,038 ,95055 ,43756 ,05825 1,84285
fréquence utilisation HVE 2,904 ,098 3,127 31 ,004 1,68045 ,53733 ,58455 2,77635
information écart
HVI 3,046 25,194 ,005 1,68045 ,55174 ,54457 2,81633
fréquence utilisation HVE ,176 ,677 1,238 39 ,223 ,74103 ,59870 ,46995 1,95200
information rentabilité
HVI 1,265 31,341 ,215 ,74103 ,58563 ,45285 1,93490
HVE (pour Hypothèse de Variance Egale)
HVI (pour Hypothèse de Variance Inégale
60 la revue gestion et organisation 10 (2018) 44–61
Inférieure Supérieure
utilisat8 info comptable pour HVE 4,006 ,052 1,622 42 ,112 ,66885 ,41234 1,50097 ,16328
prévoir situat8 semaine à
venir
HVI 1,514 26,901 ,142 ,66885 ,44174 1,57537 ,23768
utilisat8 info comptable pour HVE 5,128 ,029 1,288 42 ,205 ,54248 ,42119 1,39248 ,30751
décisions de type fixat8
prix, marge, élaborat8 devis
HVI 1,203 26,999 ,239 ,54248 ,45076 1,46737 ,38240
utilisat8 info comptable pour HVE 9,143 ,004 2,112 42 ,041 ,77124 ,36519 1,50822 ,03426
fixer des objectifs, suivre les
réalisations, prendre
mesures correctives
HVI 1,880 22,872 ,073 ,77124 ,41022 1,62011 ,07763
utilisat8 info comptable pour HVE 10,226 ,003 1,625 42 ,112 ,45098 ,27760 1,01121 ,10925
connaitre l'évolut8 de la
trésorerie pour éviter de
trop gros découvert
HVI 1,384 19,904 ,182 ,45098 ,32576 1,13071 ,22875
utilisat8 info comptable pour HVE 3,512 ,068 ,317 42 ,752 ,07407 ,23332 ,54494 ,39679
connaitre le dû
fournisseurs et le dû client
HVI ,300 28,060 ,766 ,07407 ,24698 ,57995 ,43180
utilisat8 info comptable pour HVE 2,957 ,093 ,232 42 ,818 ,07190 ,31034 ,69818 ,55439
choisir un mode de
financement
HVI ,214 25,845 ,832 ,07190 ,33630 ,76337 ,61957
utilisat8 info comptable pour HVE 1,070 ,307 2,939 42 ,005 ,97168 ,33057 1,63879 ,30456
gérer les emprunts en cours
HVI 3,131 40,445 ,003 ,97168 ,31030 1,59860 ,34475
utilisat8 info comptable pour HVE 11,419 ,002 2,715 42 ,010 ,99782 ,36746 1,73938 ,25626
convaincre les banquierq
HVI 2,429 23,231 ,023 ,99782 ,41084 1,84724 ,14841
utilisat8 info comptable pour HVE ,809 ,374 ,347 40 ,730 ,09615 ,27693 ,46355 ,65586
connaitre la performance
HVI ,362 36,164 ,719 ,09615 ,26533 ,44187 ,63418
utilisat8 info comptable pour HVE ,273 ,604 1,800 42 ,079 ,59041 ,32808 1,25250 ,07168
se comparer aux
concurrents
HVI 1,736 30,209 ,093 ,59041 ,34009 1,28477 ,10394
HVE (pour Hypothèse de Variance Egale).
HVI (pour Hypothèse de Variance Inégale.
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