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FISCALITE INTERNATIONALE
F TURQ - Université Paris Descartes
Selon la définition de l'OCDE, les prix de transfert sont "les prix auxquels une entreprise
transfère des biens corporels, des actifs incorporels, ou rend des services à des entreprises
associées".
Ils se définissent plus simplement comme étant les prix des transactions entre sociétés d'un
même groupe et résidentes d'États différents : ils supposent des transactions intragroupes
et le passage d'une frontière.
Les entreprises sont concernées non seulement pour les ventes de biens et de marchandises,
mais également pour toutes les prestations de services intragroupes : partage de certains frais
communs entre plusieurs entreprises du groupe (frais d'administration générale ou de siège),
mise à disposition de personnes ou de biens, redevances de concession de brevets ou de
marques, relations financières, services rendus par une entreprise du groupe aux autres
entreprises…
Les multinationales qui importent des marchandises auprès de parties liées s'exposent à
d’importantes difficultés :
- d’une part, la détermination des prix de transfert et l’évaluation en douane ne sont pas
régies par les mêmes règles
- d'autre part, elles relèvent d’administrations distinctes dans de nombreux pays.
Déterminer un prix de transfert entre entités liées financièrement est un problème complexe,
qui sort du strict champ des impôts directs :
- le prix d’une transaction internationale a également une incidence en matière de droits
de douane et de TVA,
- au-delà du cadre fiscal, les transactions intra groupe doivent relèvent de la stratégie
d’un groupe et de son organisation.
Au Maroc, les prix de transfert font quasi-systématiquement l’objet d’un redressement lors des
contrôles fiscaux de sociétés ou succursales membres de groupes multinationaux. De fait, on
observe que l’administration fiscale a tendance à rehausser les bases taxables des
contribuables pour des montants significatifs. Le paiement de « management fees », le
versement de redevances ou encore le niveau des prix d’achat de marchandises sont ainsi
fréquemment remis en cause par l’administration fiscale dans le cadre des procédures de
vérification de comptabilité.1
1
Marc Veuillot et Cédric Mahéo de CMS Bureau Francis Lefebvre Maroc – L’usine nouvelle
– 05/03/2015
1
1ÈRE PARTIE : PRIX DE TRANSFERT ET BÉNÉFICE
La fixation du prix de transfert des transactions conclues au sein d'entreprises multinationales
ne résulte pas, nécessairement, comme pour les entreprises indépendantes, des règles du
marché.
D'autres considérations internes au groupe peuvent intervenir et influer sur la répartition des
résultats entre les pays concernés par les transactions.
Pour l'administration, il est donc nécessaire d'avoir les moyens, notamment juridiques, pour
apprécier la normalité des prix de transfert.2
FRANCE MAROC
Article 57 CGI Article 213.- Pouvoir d’appréciation de
Pour l'établissement de l'impôt sur le revenu dû l’administration
par les entreprises qui sont sous la dépendance …
ou qui possèdent le contrôle d'entreprises situées II.- Lorsqu’une entreprise a directement ou
hors de France, les bénéfices indirectement indirectement des liens de dépendance avec des
transférés à ces dernières, soit par voie de entreprises situées au Maroc ou hors du Maroc,
majoration ou de diminution des prix d'achat ou les bénéfices indirectement transférés, soit par
de vente, soit par tout autre moyen, sont voie de majoration ou de diminution des prix
incorporés aux résultats accusés par les d’achat ou de vente, soit par tout autre moyen,
comptabilités. Il est procédé de même à l'égard sont rapportés au résultat fiscal et /ou au chiffre
des entreprises qui sont sous la dépendance d'une d’affaires déclarés.
entreprise ou d'un groupe possédant également le En vue de cette rectification, les bénéfices
contrôle d'entreprises situées hors de France. indirectement transférés, comme indiqué ci-
La condition de dépendance ou de contrôle n'est dessus, sont déterminés par comparaison avec
pas exigée lorsque le transfert s'effectue avec des ceux des entreprises similaires ou par voie
entreprises établies dans un Etat étranger ou d’appréciation directe sur la base d’informations
dans un territoire situé hors de France dont le dont dispose l’administration.
régime fiscal est privilégié au sens du deuxième III.- Lorsque l’importance de certaines dépenses
alinéa de l'article 238 A. engagées ou supportées à l’étranger par les
A défaut d'éléments précis pour opérer les entreprises étrangères ayant une activité
redressements prévus à l'alinéa précédent, les permanente au Maroc n’apparaît pas justifiée,
produits imposables sont déterminés par l’administration peut en limiter le montant ou
comparaison avec ceux des entreprises similaires déterminer la base d’imposition de l’entreprise
exploitées normalement. par comparaison avec des entreprises similaires
ou par voie d’appréciation directe sur la base
d’informations dont elle dispose.
…
Article 11
1. Lorsqu'une entreprise de l'un des Etats contractants, du fait de sa participation à la gestion ou au
capital d'une entreprise de l'autre Etat contractant, fait ou impose à cette dernière, dans leurs relations
commerciales ou financières, des conditions différentes de celles qui seraient faites à une tierce
entreprise, tous bénéfices qui auraient dû normalement apparaître dans les comptes de l'une des
entreprises mais qui ont été de la sorte transférés à l'autre entreprise peuvent être incorporés aux
bénéfices imposables de la première entreprise.
2
http://doc.impots.gouv.fr
2
L13B du livre des procédures fiscales. L’entreprise vérifiée doit présenter un document
précisant :
1° La nature des relations entre cette entreprise et une ou plusieurs entreprises exploitées
hors de France ou sociétés ou groupements établis hors de France ;
2° La méthode de détermination des prix des opérations,
3° Les activités exercées par les entreprises,
4° Le traitement fiscal réservé à ces opérations
Pour les entreprises concernées, il convient de signaler le rôle-clé du contrôle interne qui doit
être associé au processus d’élaboration de la documentation en matière de prix de transfert :
- cartographier les flux intragroupe ;
- formaliser les points de contrôle permettant de justifier les montants facturés, l’outil
informatique (ERP par exemple) devant être configuré pour facilement retrouver et
suivre les données relatives aux prix de transfert ;
- définir et communiquer les rôles et responsabilités en matière de prix de transfert ;
- mettre en place des procédures d’identification et de remontée des non conformités au
dispositif de contrôle des prix de transfert ;
- organiser la révision ou l’ajustement de la politique de prix de transfert et de la
documentation en cas de modification du «business model» (restructuration,
acquisition) ou lors de changements significatifs dans l’environnement de l’entreprise.
En droit français, des exigences particulières et multiples touchent les « grandes entreprises »
qui doivent élaborer une information, sans attendre les demandes de l’administration. Des
obligations multiples en matière d’information en résultent :
- article L13 B du LPF en cas de contrôle fiscal (CA < 400 millions €),
- article 223 quinquies B disponibilité préalable pour les entreprises faisant partie
d’un groupe intégré, dont le CA ou le bilan dépasse 50 millions €,
- article L13 AA du LPF disponibilité préalable pour les entreprises faisant partie
d’un groupe intégré, dont le CA ou le bilan dépasse 400 millions €,
- article 223 quinquies C pour les entreprises dont le CA dépasse 750 millions €
et qui établissent des comptes consolidés (déclaration pays par pays).
Dans ces cas, la documentation dont il faut disposer, même en dehors d’un contrôle fiscal, est
la suivante :
3
- une description générale de l'activité déployée, incluant les
changements intervenus au cours de l'exercice vérifié ;
- une description générale des structures juridiques et opérationnelles
1° Des du groupe d'entreprises associées, comportant une identification des
informations entreprises associées du groupe engagées dans des transactions
générales sur le contrôlées ;
groupe - une description générale des fonctions exercées et des risques
d'entreprises assumés par les entreprises associées dès lors qu'ils affectent
associées : l'entreprise vérifiée ;
- une liste des principaux actifs incorporels détenus, notamment
brevets, marques, noms commerciaux et savoir-faire, en relation avec
l'entreprise vérifiée ;
- une description générale de la politique de prix de transfert du groupe ;
Pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2018, ces entreprises devront tenir à
disposition de l’administration fiscale une documentation des prix de transfert comportant les
informations issues des propositions de l’OCDE et aujourd’hui incluses dans le nouveau
chapitre V des Principes Directeurs de l’OCDE à l’intention des entreprises multinationales.
Le nouveau texte reprend presque in extenso la liste des renseignements requis dans l’Action
13 pour le Master File (Annexe I du chapitre V) et le Local File (Annexe II du chapitre V). Ainsi,
la loi française exige que les informations suivantes figurent dans la documentation des prix
de transfert (liste non exhaustive) :
- la structure organisationnelle de la société,
- une description de la chaine d’approvisionnement des cinq principaux biens et
services offerts par des entreprises du groupe ainsi que tout autre bien et
service représentant plus de 5 % du chiffre d’affaires du groupe,
- les actifs incorporels,
- les activités financières interentreprises du groupe ainsi que les sources de
financement,
- la situation financière et fiscale du groupe,
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- les transactions intragroupe importantes et les conditions de leur réalisation, la
réconciliation des données financières avec les méthodes de prix de transfert
appliquées.
DOCUMENTATION ALLÉGÉE
La loi a étendu son champ d’application en abaissant de 400 M€ à 50 M€ le seuil de chiffre
d’affaires ou d’actif brut au bilan, au-delà duquel les entreprises doivent déposer cette
déclaration (abaissement applicable aux exercices clos à compter du 31 décembre 2016).
En synthèse, cette déclaration contient des informations générales sur le groupe (description
de l’activité, liste des principaux actifs incorporels et état d’implantation des entités juridiques
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propriétaires de ces derniers) et des informations spécifiques concernant l’entreprise
déclarante (description de l’activité, récapitulatif des opérations réalisées avec des entreprises
associées dont le montant excède 100 000 € et présentation des méthodes de détermination
des prix de transfert dans le respect du principe de pleine concurrence).
Cette documentation « allégée » prend la forme d’un formulaire n° 2257-SD qui doit être
déposé dans un délai de 6 mois suivant la date limite de dépôt de la déclaration de résultat de
l’exercice précédent. Pour les sociétés membres d’un groupe fiscal concernées par cette
obligation, la déclaration doit être déposée pour leur compte par la société mère du groupe
intégré.
Depuis 2016 (6), ce formulaire doit être télédéclaré, permettant ainsi une utilisation efficace
par l’administration fiscale française aux fins de programmation des vérifications de
comptabilité.
En effet, l’objet de la documentation prix de transfert est avant tout de produire de l’information
pour l’administration fiscale afin de permettre à celle-ci d’appréhender l’environnement
économique, opérationnel et fiscal de la société.
La documentation prix de transfert ne saurait ainsi soustraire l’administration aux obligations
fondamentales qui pèsent sur elle, et en tout premier lieu la charge de la preuve qui lui
incombe.
… le panel de comparables utilisé par l’administration n’était autre que celui produit dans la
documentation prix de transfert de la société. Le service s’estimait alors légitime à opposer à
la société ses propres analyses sans autres forme de démonstration, ni produire de
recherches de comparables complémentaires.
TA Melun, 3ème ch, n°1502063 14/06/2018
Article 214
II.- L’administration des impôts peut demander communication des informations auprès des
administrations fiscales des États ayant conclu avec le Maroc des conventions tendant à éviter des
doubles imposition s en matière d’impôts sur le revenu.
III.- A.3 Les entreprises ayant des liens de dépendance directe ou indirecte avec des entreprises situées
hors du Maroc … doivent communiquer à l’administration fiscale, par procédé électronique, la
3
Introduit par la loi de finances pour 2019
6
documentation permettant de justifier leur politique de prix de transfert selon les modalités prévues
par voie réglementaire, comportant :
- les informations relatives à l’ensemble des activités des entreprises liées, à la politique globale de
prix de transfert pratiquée et à la répartition des bénéfices et des activités à l'échelle mondiale
- les informations spécifiques aux transactions que l'entreprise vérifiée réalise avec les entreprises
ayant des liens de dépendance précitées
B.-Pour les opérations effectuées avec des entreprises situées hors du Maroc, l’administration des
impôts peut demander à l’entreprise imposable au Maroc communication des informations et
documents relatifs :
1- à la nature des relations liant l’entreprise imposable au Maroc à celle située hors du Maroc ;
2-à la nature des services rendus ou des produits commercialisés ;
3-à la méthode de détermination des prix des opérations réalisées entre lesdites entreprises et les
éléments qui la justifient ;
4-aux régimes et aux taux d’imposition des entreprises situées hors du Maroc.
La demande de communication est effectuée dans les formes visées à l’article 219. L’entreprise
concernée dispose d’un délai de trente (30) jours suivant la date de réception de la demande précitée
pour communiquer à l’administration les informations et les documents demandés
On observe que :
- en droit français, l’entreprise doit disposer de l’information, sans attendre la demande
de l’administration ;
- en droit marocain, l’administration peut demander l’information
I - LE LIEN DE DÉPENDANCE
Les dispositions en vigueur visent des transactions entre sociétés liées. La dépendance peut
être juridique ou de fait, l’entreprise pouvant exercer ou subir le contrôle d’une entreprise
étrangère :
Il peut s’agir également d’une transaction entre deux entreprises contrôlées par une même
troisième :
7
La notion de groupe
La notion de groupe suppose l'existence de liens de dépendance entre les différentes
entreprises qui le composent.
4
BOI-BIC-BASE-80-20 n° 60
8
Pour l'application de l'alinéa qui précède, les personnes sont regardées comme soumises à un régime
fiscal privilégié dans l'Etat ou le territoire considéré si elles n'y sont pas imposables ou si elles y sont
assujetties à des impôts sur les bénéfices ou les revenus notablement moins élevés qu'en France.
Entreprises établies dans un pays où elles bénéficient d'un régime fiscal privilégié
En droit français, la dépendance est présumée établie lorsque la transaction concerne une
entreprise française et une entreprise étrangère qui est domiciliée dans un pays où elle
bénéficie d'un régime fiscal privilégié.
À compter du 1er janvier 2006, les bénéficiaires sont regardés comme soumis à un régime
fiscal privilégié dans l'État ou le territoire considéré s'ils n'y sont pas imposables ou s'ils y sont
assujettis à des impôts sur les bénéfices ou les revenus dont le montant est inférieur de plus
de la moitié à celui de l'impôt sur les bénéfices ou sur les revenus dont ils auraient été
redevables dans les conditions de droit commun en France, s’ils y avaient été domiciliés ou
établis.5
5
http://doc.impots.gouv.fr
9
de la conformité de la tarification retenue au prix de pleine concurrence.
A) L'analyse fonctionnelle
L'analyse fonctionnelle consiste pour l'entreprise à s'interroger sur sa place et son rôle
économique au sein du groupe, et à recenser les fonctions exercées, les risques encourus et
les actifs corporels et incorporels utilisés :
- Les risques encourus. L'entreprise peut, par exemple, être exposée aux risques
suivants :
o risques de marché (variation des prix des matières premières)
o risques financiers (variation des taux de change et d'intérêt, risque de crédit)
o risques industriels (défauts de fabrication, fermeture d'usine, coûts de
restructuration).
Analysé du côté marocain, le risque de change, lié à la variation de la parité entre la livre
sterling et le dirham, est supporté par le distributeur marocain. Toute appréciation de la
monnaie britannique aura pour conséquence une diminution de la marge de l'entreprise
marocaine si celle-ci ne peut pas augmenter à due concurrence les prix de vente en dirham
au client final.
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- Les actifs (corporels et incorporels) et les moyens utilisés : l'entreprise doit
recenser les actifs corporels, incorporels et les moyens d'exploitation qu'elle utilise pour
réaliser les fonctions qui lui sont confiées.
Exemple a : une entreprise française d'assemblage de machines achète des pièces détachées
aux entreprises de production du groupe et revend à des entreprises sœurs les machines
montées.
Si l'entreprise française se limite à un simple rôle de façonnier, sa rémunération tiendra compte
des seules charges directes et indirectes liées à la prestation. En revanche, si elle supporte
les risques liés à la manipulation et à la propriété des pièces, leur coût de revient doit être pris
en compte pour le calcul de la rémunération.
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C) La notion d'entrepreneur principal
Ce n'est qu'à l'issue de l’analyse ci-dessus que l'entrepreneur principal peut être identifié. Il
s'agit dans les faits de l'entreprise qui assume les risques principaux (qu'ils se concrétisent ou
non) et qui prend les décisions stratégiques. En général, elle possède également les
immobilisations incorporelles clés (marques, brevets, savoir-faire …) et supporte les dépenses
y afférentes (recherche et développement, gestion des marques et de la publicité).
Cette notion est importante car, au sein d'un groupe, l'entrepreneur principal reçoit la
rémunération résiduelle, c'est-à-dire le bénéfice (ou les pertes) restant une fois que toutes les
entités ont été justement rétribuées.
III - 2 Détermination d’un prix conforme au principe de pleine concurrence
Lorsque l'analyse est réalisée, l'entreprise doit choisir la méthode la plus adaptée pour
rémunérer l'activité.
Pour ne pas courir de risque fiscal, l'entreprise doit s'assurer que ce prix est conforme au prix
de pleine concurrence. Elle doit donc le comparer à celui qui serait conclu pour une transaction
identique réalisée entre des entreprises indépendantes (les comparables).
L'entreprise doit enfin être en mesure de retracer la démarche de détermination de ses prix de
transfert qu'elle mettra à la disposition de l'administration en cas de contrôle (analyse
fonctionnelle, choix de la méthode, tarification, justification de la normalité de la rémunération
par l'analyse de comparabilité).
"[Lorsque] ... deux entreprises [associées] sont, dans leurs relations commerciales ou
financières, liées par des conditions convenues ou imposées qui diffèrent de celles qui seraient
convenues entre des entreprises indépendantes, les bénéfices qui, sans ces conditions,
auraient été́ réalisés par l'une des entreprises mais n'ont pu l'être en fait à̀ cause de ces
conditions, peuvent être inclus dans les bénéfices de cette entreprise et imposés en
conséquence."6
Toute méthode retenue par l'entreprise peut être considérée comme recevable à condition
qu'elle soit justifiée, cohérente avec les fonctions exercées et les risques assumés, et que la
rémunération soit conforme au principe de pleine concurrence.
6
Art. 9 du modèle de convention fiscale de l’OCDE :
12
La façon la plus directe pour s'assurer que les prix intragroupes sont de pleine concurrence
est de les comparer à ceux pratiqués pour des transactions identiques entre des entreprises
indépendantes (ce que l'on appelle "le prix comparable sur le marché libre").
Le prix de pleine concurrence est obtenu en substituant le prix pratiqué pour la transaction
comparable sur le marché libre à celui pratiqué pour la transaction avec l'entreprise associée.
Toutefois, dans certains cas, on ne disposera pas de transactions comparables pour appliquer
cette approche directe et il faudra comparer les transactions contrôlées avec les transactions
sur le marché libre sur la base d'indices moins directs que les prix, comme par exemple les
marges brutes (ou marges commerciales). C'est ce qui sera pratiqué pour les méthodes du
prix de revente et du prix de revient majoré.
Cette méthode est particulièrement adaptée aux entreprises qui commercialisent des
marchandises couramment vendues sur le marché. En revanche, elle est inadaptée aux
transactions portant sur des produits très élaborés ou des biens incorporels (savoir-faire,
brevets).
Le prix de marché peut être obtenu en utilisant un comparable interne ou externe à l'entreprise
:
- interne : l'entreprise concernée ou une autre entreprise du même groupe vend ou
achète à une entreprise indépendante le même type de biens ou de services ;
- externe : une entreprise indépendante vend ou achète le même type de biens ou de
services à une autre entreprise indépendante.
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PRIX COMPARABLE INTERNE
Prix comparable interne : dans l'hypothèse où les conditions d'exploitation sont identiques le
prix de transfert du lave-linge qui doit être appliqué entre le producteur marocain et le
distributeur britannique, appartenant au même groupe A, est de 4 000 D.
Dès lors que les conditions d'exploitation sont similaires à celles qui existent entre les
entreprises indépendantes, le prix de transfert du téléviseur, qui doit être appliqué entre le
producteur et le distributeur du même groupe A, est de 5 000 D.
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tenant compte des fonctions réalisées et des risques assumés. Cette marge brute de pleine
concurrence est obtenue en utilisant un comparable interne ou externe à l'entreprise. Le prix
ainsi obtenu est considéré comme un prix de pleine concurrence.
Elle suppose des transactions et des structures de coûts similaires entre les entreprises
comparées. Elle est particulièrement adaptée pour les opérations de commercialisation,
lorsque le distributeur n'est pas l'entrepreneur principal.
Le prix de 200 € est un prix de marché ou de pleine concurrence car il s'agit du prix de vente
au consommateur final, tiers indépendant par rapport à l'entreprise qui commercialise le
produit (en l'absence de lien de droit ou de fait).
L'entreprise doit ensuite déterminer la marge à attribuer au distributeur. Pour cela, elle peut
utiliser des comparables internes (marge réalisée par des distributeurs indépendants lorsque
l'entreprise ou une autre entreprise du groupe lui vend les mêmes produits ou des produits
comparables) ou externes (marge réalisée pour les mêmes produits ou des produits
comparables par des distributeurs indépendants). Dans l'hypothèse où la marge du
distributeur par produit est de 30 €, le prix de pleine concurrence entre le producteur et le
distributeur est de 170 €. C'est donc ce prix de vente que devra appliquer le producteur.
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Elle nécessite donc de déterminer :
- les coûts de production directs (ex : coût d'achat des matières premières) et indirects
(ex : frais de réparation et d'entretien) ;
- les autres charges d'exploitation (ex : frais de vente, frais généraux et frais
administratifs).
Exemple : une entreprise a déterminé que le coût de production d'une bicyclette est égal à
150 €. Elle doit ensuite définir la marge à appliquer pour rémunérer son activité et fixer ainsi
le prix de vente de la bicyclette au distributeur. Cette marge brute sur coûts de production doit
lui permettre de couvrir les autres charges d'exploitation et de réaliser un bénéfice convenable
compte tenu de ses conditions d'exploitation.
Pour cela, elle peut utiliser des comparables internes (l'entreprise ou une autre entreprise du
groupe fabrique les mêmes produits ou des produits comparables qu'elle vend à des
distributeurs indépendants ou à des donneurs d'ordre indépendants), des comparables
externes (un fabriquant indépendant réalise une transaction identique avec une autre
entreprise indépendante). Dans l'hypothèse où, d'après les comparables, la marge du
producteur est de 10 %, le prix de pleine concurrence entre le producteur et le distributeur est
de 165 € (150 € x 110 %).
Remarque : plus les fonctions exercées, les risques assumés, les actifs et moyens utilisés
sont complexes, plus il est difficile de trouver des données comparables. Par conséquent, les
méthodes du prix de revente et du prix de revient majoré sont généralement celles qui
permettent d'obtenir les résultats les plus fiables lorsque les fonctions exercées
respectivement par le distributeur et par le producteur sont simples et qu'aucune des
entreprises concernées par la transaction ne met en œuvre des actifs incorporels de grande
valeur ou uniques (brevet, savoir-faire).
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la société, la méthode du prix de revient majoré utilisée par la société … ne devait pas être
retenue ; qu'ainsi, la société … est fondée à soutenir que le jugement est irrégulier en ce que
le tribunal n'a pas exposé les motifs pour lesquels il a écarté la méthode du prix de revient
majoré.7
La méthode consiste à déterminer le résultat consolidé pour le groupe sur l'ensemble des
opérations, impliquant différentes entreprises liées, pour le partager ensuite entre ces mêmes
entreprises, en fonction de critères pertinents, afin d'obtenir une allocation des bénéfices
comparable à celle qui aurait été obtenue dans une situation de pleine concurrence, compte
tenu du contexte considéré, des fonctions exercées, des actifs et des moyens utilisés, des
risques supportés…
Exemple :
1ère étape. Détermination du résultat consolidé pour le groupe qui est lié à la production et à
la vente de chaussures.
https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriAdmin.do;jsessionid=AE0CA6CE81A916FD1
F94C7A8E80084ED.tpdila21v_2?oldAction=rechJuriAdmin&idTexte=CETATEXT000
031586269&fastReqId=38801186&fastPos=492
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Le bénéfice consolidé pour le groupe pour la fabrication et la vente de chaussures est de 60
€ (100-10-30).
Avec cette clé de répartition, le résultat revenant à chaque entreprise est le suivant
- producteur : 60 € x 25 % = 15 €
- distributeur : 60 € x 75 % = 45 €.
Cette méthode ne doit être utilisée qu'en dernier recours, ce qui suppose d'avoir démontré que
les autres méthodes ne sont pas pertinentes. Très intuitive, elle est toutefois utile pour valider
a posteriori la cohérence des résultats obtenus à l'aide de la méthode principale utilisée pour
fixer les prix de transfert.
Elle est reprise dans la convention franco-marocaine :
Convention article 10
4. Lorsque les contribuables dont l'activité s'étend sur les territoires des deux États
contractants sont dans l'impossibilité de faire ressortir distinctement et exactement les
bénéfices afférents aux établissement stables situés dans l'un et l'autre État, le bénéfice
respectivement imposable par ces États peut être déterminé en répartissant les résultats
globaux au prorata du chiffre d'affaires réalisé dans chacun d'eux.
18
Exemple :
Si une entreprise de distribution de textile comparable réalise une marge d'exploitation de 10%
(bénéfice d'exploitation/chiffre d'affaires), le prix de pleine concurrence du vêtement vendu par
le producteur indien à son distributeur marocain peut être déterminé comme suit :
Prix de vente (prix de pleine concurrence car pratiqué avec un tiers) : 20 D.
Marge d'exploitation du distributeur issue de l'analyse de comparabilité :
20 x 10% = 2 D.
L'attribution au distributeur d'une marge d'exploitation de 2 D suppose que le total de ses
charges d'exploitation (y compris le prix d'achat des vêtements) soit de : 20-2 = 18 D.
Si le total des charges d'exploitation (hors prix d'achat des vêtements) est de 8 D le prix de
transfert devra être de: 18-8 = 10 D.
Remarque : ce type de méthode, fondée sur une comparaison des marges nettes, s'applique
à tous les biens corporels, incorporels ainsi qu'aux prestations de services. Elle nécessite pour
estimer avec fiabilité un résultat de pleine concurrence, un niveau de comparabilité similaire à
celui qui est requis pour les méthodes du prix de revient majoré et du prix de revente, avec
une étude approfondie des différences fonctionnelles et éventuellement l'application
d'ajustements appropriés.
22. Considérant que pour l'année 2009 dans la mesure où le taux de marge de la société,
déterminé selon la méthode transactionnelle de la marge nette, était de 0,24 % et donc
compris entre les deux valeurs … définissant l'intervalle de pleine concurrence, la société est
fondée à demander la décharge intégrale du redressement mis à sa charge ;
CAA de VERSAILLES. N° 14VE02126 29 décembre 2016
19
Les sociétés d'un même groupe se rendent fréquemment des services d'ordre administratif,
financier, commercial ou technique (avec éventuellement le recours à l'assistance de
prestataires extérieurs). C'est généralement la société mère qui centralise les services
communs et qui les refacture à ses filiales.
Ces services doivent être rémunérés au même prix que s'ils étaient réalisés pour une
entreprise indépendante. L'entreprise prestataire doit donc identifier les services communs
rendus, les bénéficiaires et définir une méthode appropriée pour facturer les prestations. Les
prestations individualisables doivent faire l'objet d'une facturation directe, et pour les autres
prestations les méthodes d'évaluation doivent être suffisamment précises pour que les prix
soient conformes au prix du marché.
Le patrimoine incorporel des entreprises est plus que jamais l'objet de toutes les attentions.
Les entreprises y voient un outil de développement et de stratégie : le montant des actifs
incorporels comptabilisés par les sociétés du Cac 40 s'élevait à 427 milliards d'euros le 31
décembre 2006, soit près d'un tiers de la capitalisation boursière totale de cet indice boursier.
L’administration fiscale y trouve de plus en plus souvent un fondement de redressement,
synonyme de coûts financiers pour les entreprises.8
En outre, pour être facturable et ne pas constituer un acte anormal de gestion, le service rendu
doit répondre à un besoin réel de la société bénéficiaire et la prestation rendue ne doit pas
faire double emploi avec les services qui existent déjà dans la filiale.
La comparabilité est une notion délicate dans la mesure où elle implique de comparer des
biens, des services ou des fonctions similaires (ex : on ne peut pas comparer la fonction de
vente dans le secteur pharmaceutique à la fonction de vente dans le secteur automobile car
les deux activités économiques sont trop différentes).
8
https://www.twobirds.com/fr/news/articles/2008/bb-délicate-evaluation-prix-transfert-
01102008
20
Il existe deux possibilités d'obtention de comparables afin d'apprécier la juste rémunération
des transactions entre entreprises liées :
- interne : l'entreprise concernée ou une autre entreprise du même groupe réalise une
transaction identique ou similaire avec une entreprise indépendante. Le comparable
interne est souvent le comparable le plus adéquat ;
- externe : une entreprise indépendante réalise une transaction identique ou similaire
avec une autre entreprise indépendante.
Remarque : il est important de veiller à ne pas sélectionner soit un trop grand nombre soit un
nombre très limité d'entreprises au risque de diminuer la fiabilité de l'étude. De même, la
pertinence de l'étude de comparabilité repose sur un choix judicieux du ratio de référence.
IV SANCTIONS FISCALES
Deux conséquences résultent de l’article 57 (France) ou de l’article 213 (Maroc) :
- tout d’abord un redressement du bénéfice imposable,
- mais aussi un effet secondaire, l’imposition de la distribution d’un revenu à un
bénéficiaire étranger.
9
https://fr.linkedin.com/pulse/les-prix-de-transfert-se-résument-ils-à-des-terence-wilhelm
21
Bien évidemment, en cas de convention de non double imposition, le problème devrait être
favorablement traité. Toutefois, on sait que la procédure amiable et celle d’arbitrage ne
donnent pas de solution rapide.
En outre, si la convention modèle OCDE contient un dispositif particulier, pour éviter de telles
difficultés, ce dispositif est absent de plusieurs conventions, dont la convention franco-
marocaine.
La situation est d’autant plus critique que les administrations fiscales ont le pouvoir de
procéder par comparaison, sur la base d’une appréciation directe des prix de transfert en
utilisant les informations dont dispose l’administration.
C’est ce pouvoir est considéré comme discrétionnaire par les entreprises lorsqu’il est utilisé.
Le contribuable se trouve désarmé car l’administration ne peut dévoiler ses sources, tenue par
le secret professionnel.
En cas de contentieux, le juge de l’impôt français est cependant particulièrement exigeant sur
la justification de sa position par l’administration fiscale.
La procédure prévue à l'article L. 62 A du LPF peut être sollicitée après notification des
10
Cf. dossier n° 3 conventions fiscales : procédures amiables
22
rectifications lorsque celles-ci portent sur des transferts de bénéfices à l'étranger au sens de
l’article 57 du code général des impôts (CGI) ou sur la remise en cause de la déductibilité
d'une charge sur le fondement de l'article 238 A du CGI . Elle permet au contribuable de
bénéficier, sous conditions, de la non application de la retenue à la source prélevée sur les
montants transférés à l'étranger et réputés distribués.11
Le site eBay explique avoir passé dans ses comptes une charge fiscale de 3 milliards de
dollars "pour faciliter le rapatriement de 6 milliards de dollars de bénéfices étrangers,
augmentant nos liquidités disponibles aux Etats-Unis et améliorant notre flexibilité financière".
12
Les paradis fiscaux sont passés de fait d’un rôle historique d’évasion fiscale “physique” à la
production à distance de services financiers aux non-résidents : moins exigeants du point de
vue des normes prudentielles, ces paradis permettent de diminuer les coûts d’intermédiation.
L’expression “paradis fiscal” est ainsi fréquemment remplacée par celle de “centre financier
offshore”, où la notion de “offshore” n’a pas de sens géographique mais souligne une distance
par rapport à des normes réglementaires et prudentielles standard.13
De son côté, une société est dite « offshore » lorsqu'elle n'est pas résidente. Pour bénéficier
des avantages fiscaux offerts, une telle société s'interdit de travailler dans le pays dans lequel
elle est installée, et n'utilise pas son économie : le plus souvent, pas de main d'œuvre locale,
pas de financement en provenance d'une banque locale, pas d'aides publiques, etc... La
société offshore, parfois représentée par un correspondant local si nécessaire, est toujours
dirigée de l'extérieur.
11
http://revuefiduciaire.grouperf.com/lien_bofip/index.php?mode=article&id=9928-
PGP&datePlan=2016-02-18&bg=7845&bd=7850&niv=3
12
http://www.latribune.fr/technos-medias/internet/20140430trib000827662/ebay-passe-dans-
le-rouge-malgre-un-benefice-meilleur-que-prevu.html
13
http://www.stopparadisfiscaux.fr/pour-aller-plus-loin/article/glossaire-paradis-fiscaux
23
Il faut noter que les centres off-shore ou paradis fiscaux ne sont pas nécessairement des États
ou des principautés mais peuvent être des zones franches, c'est à dire des enclaves
présentant des règles fiscales et bancaires très spécifiques.
Les entreprises américaines ont ainsi multiplié le nombre de leurs filiales offshore. Plus de la
moitié des entreprises du CAC40 feraient de même.
En raison du principe de territorialité applicable dans la plupart des systèmes fiscaux, le seul
recours d’une administration fiscale est de remettre en cause les prix de transfert entre
sociétés liées ou entre un siège et ses succursales. Dans le cas des États Unis, le processus
est différent : l’imposition s’applique au résultat d’ensemble de la société US,
indépendamment de ses implantations.
Ces dernières années, on observe donc, particulièrement pour les sociétés du secteur
pharmaceutique, à des tentatives de « tax evasion ». Cela consiste, pour une société US, à
sembler se faire acheter par une société étrangère, pour sortir du champ territorial de l’impôt
US sur les sociétés, dont le taux est 35%.
Il y a combinaison des règles de territorialité avec celles des prix de transfert : actuellement,
l’administration fiscale US est impuissante face à ces montages.14
En application des principes de territorialité, tout bénéfice réalisé par une société passible de
l’IS dans un territoire y est imposable.
Il résulte de ce principe qu’on peut installer son siège social dans un pays à fiscalité
intéressante, dès l'instant où l'activité est dématérialisée c'est-à-dire, qui ne nécessite pas de
locaux, boutiques, magasins, bureaux, ateliers, etc. (vente par Internet par exemple) ni une
activité réglementée (exemple : activités touristiques comme agence de voyages, activités
nécessitant un diplôme, etc.). Les activités artisanales ne sont pas possibles non plus
(restaurant, magasin de vente, boucherie, hôtel, activités de transport, etc.).
V - 2 LE FACTORING
A) Factoring direct Commenté [ft11]: DIAPO 31
Ce montage consiste à faire émettre des factures à la société offshore que le client en France
(ou au Maroc) va payer. L'argent arrive sur le compte de la société Offshore, que le titulaire
peut utiliser à son gré.
Si on fait revenir les bénéfices sous la forme de dividendes, on peut envisager de bénéficier
du régime des sociétés mères.
14
http://www.assemblee-nationale.fr/14/rap-info/i1243.asp
24
L’inconvénients que présente ce montage : il est parfois délicat d'expliquer à son client que
l'entreprise facturera par l'intermédiaire d'une société offshore installée. Le client risque
d’autant plus d’être mal à l’aise, que cela lui fait aussi encourir certains risques.
Ces montages aboutissent donc à des situations surprenantes : alors que la concurrence
internationale avait jusqu'à présent conduit à des délocalisations d'unités de production, les «
contrats de façonnage » s'accompagnent, quant à eux, du transfert à l'étranger du siège social
du groupe alors que les usines restent sur le territoire français. Le but de l'opération est alors
simple : les entités en France produisent pour une rémunération très faible, cela au profit d'une
entreprise délocalisée, généralement dans un pays à fiscalité privilégiée. Les bénéfices
demeurant en France sont donc réduits à de simples taux de mark-up, tandis que la plus
grande partie des profits sont déplacés là où la charge fiscale est plus faible.
V - 4 LA HOLDING
25
Les mécanismes précédents ont leurs limites et peuvent faire l'objet parfois de redressements
douloureux. Pour cette raison, les entreprises leur préfèrent parfois la méthode du holding.
C'est d'ailleurs la technique de défiscalisation la plus communément utilisée par les grands
groupes ; elle consiste à faire remonter les dividendes de la société vers des juridictions «
offshore » qui ne taxent pas (ou peu) la distribution de bénéfices. Les bénéficiaires peuvent
se verser alors des dividendes en toute discrétion malgré le caractère illégal de cette pratique.
Lesdits bénéficiaires, personnes physiques, devraient en effet déclarer ces dividendes venus
de l'étranger, mais en pratique, l'administration n'a hélas que très peu de moyens pour
connaître l'existence de cette société de complaisance implantée dans une zone off-shore non
coopérative. Les bénéficiaires personnes morales pourraient faire jouer le régime des sociétés
mères, fiscalement avantageux.
C’est en 1999 qu’une instruction (4-A-8-99) a institué en France une procédure s’inspirant des
pratiques de certains pays étrangers (APA : Advance Pricing Agreement, aux USA et en
Grande Bretagne). La justification de ces règles est simple : selon l’OCDE, 60% du commerce
mondial résulteraient de transactions au sein de groupes multinationaux.
The Advance Pricing Agreement (APA) program allows the taxpayer and the tax authority to
avoid future transfer pricing disputes by entering into a prospective agreement, generally
covering at least five tax years, regarding the taxpayer's transfer prices.15
Cette procédure n’a pas qu’une portée fiscale. Ces accords concernent également l’Office des
changes. Il n’était pas rare que le fisc et l’Office des changes aient chacun leur propre
évaluation des prix de transfert exposant ainsi les entreprises à une double peine.
15
http://www.ey.com/gl/en/services/tax/international-tax/guide-to-advance-pricing-
agreements--apa----apas--the-basic-elements
26
Une obligation de fourniture de tout type d’informations pèse sur le contribuable. L’entreprise
doit à la fois :
- ouvrir ses livres à l’administration fiscale,
- lui apporter toute précision supplémentaire que cette dernière jugera nécessaire.
En décembre 2018, la Direction générale des impôts a publié une circulaire de mise en œuvre
de la procédure d’APP.
La demande de l’entreprise peut être précédée par des rencontres préliminaires avec
l’administration.
La demande doit être déposée six mois au moins avant l’ouverture du 1er exercice visé par
l’accord. La demande doit préciser :
- les entreprises associées en relation avec l’entreprise demanderesse,
- les opérations objet de l’accord,
- les exercices visés par l’accord,
- la méthode de détermination des prix de transfert proposée et ses hypothèses de base.
Contenu de l’accord
- Période couverte et date d’entrée en vigueur
- Description précise des opérations objet de l’accord
- Description de la méthode retenue pour la détermination du prix de transfert
- Dispositif de suivi de l’accord ainsi que les renseignements et informations à porter
dans le rapport annuel de suivi
27
- Hypothèses de base pour la détermination du prix de transfert
- Cas de révision et d’annulation de l’accord
Rapport de suivi
Un rapport de suivi annuel doit être déposé par l’entreprise dont le contenu minimum est :
- État détaillé du calcul des prix de transfert prévus par l’accord
- État récapitulatif des modifications éventuelles apportées aux conditions d’exercice
concernant les transactions visées par l’accord
- Copie de la structure organisationnelle de l’ensemble des entreprises associées et
éventuelles modifications
- Copie du rapport annuel d’activité des entreprises associées
VI - 1 ÉTENDUE DE L’ACCORD
Dans l’Union Européenne, le groupe AIRBUS bénéficie d’un accord multilatéral : Allemagne,
France, Espagne, Royaume Uni.
Aux États Unis, l’entreprise doit fournir une étude conduite par un expert indépendant. Il lui
faut cependant, informer l’administration fiscale de l’état des négociations avec l’administration
de l’autre État et lui fournir un double de la documentation remise.
Accord unilatéral
Dans le cas le plus simple, susceptible d’intéresser en priorité les PME, l’accord est unilatéral
entre l’entreprise et son administration fiscale nationale.
Une instruction de juin 2005 a introduit en France l’accord unilatéral, c’est à dire un accord
entre :
- l’administration fiscale nationale
- et une entreprise
28
Pour ce qui concerne l’accord unilatéral, l’avantage est qu’il correspond à une procédure
accélérée et allégée, la négociation bilatérale entre les deux administrations disparaissant.
L’obligation de documentation est identique à celle de l’accord bilatéral.
Un inconvénient important est attaché à cette procédure allégée : le risque de double
imposition persiste, puisque seule l’administration d’un état est engagée.
Les recommandations de l’OCDE sur ces procédures comportent une recommandation pour
permettre la participation de l’entreprise aux négociations entre les deux administrations
fiscales.
VI - 4 APPLICATION DE L’ACCORD
Selon les recommandations de l’OCDE, la durée est comprise entre trois et cinq ans. Le Maroc
a retenu une durée de 4 ans.
L’accord peut devenir caduc lorsque :
- les informations fournies étaient erronées ou incomplètes,
- l’entreprise ne respecte pas les clauses de l’accord
29
VI - 5 LA METHODE DE FIXATION DES PRIX POUR LES TRANSACTIONS
Au Maroc, comme en France, l’accord porte sur la méthode à retenir et non pas sur le prix en
tant que tel. Il peut être applicable à l’ensemble des transactions internationales ou ne
concerner qu’un segment d’activité, une fonction, voire un seul produit ou type de transaction.
La réglementation marocaine, comme celle en vigueur dans d’autres pays, oblige donc
l’entreprise à fournir les informations permettant à l’administration de valider une méthode. La
demande doit être accompagnée des documents permettant l’analyse de la demande d’accord
préalable. La demande doit être présentée six mois au moins avant l'ouverture du premier
exercice de la période concernée par ladite demande
30
2ÈME PARTIE : PRIX DE TRANSFERT, DOUANE ET TVA
Pour l’administration des impôts directs, la maximisation de la base imposable, à l’occasion
d’opérations transfrontalières, résulte :
- soit de prix d’achat réduits,
- soit de prix de vente élevés
Les administrations des douanes et des impôts indirects, auront au contraire comme
préoccupation de vérifier que les prix d’achat, pour ces mêmes opérations transfrontalières,
sont suffisamment élevés.
Au Maroc, l’office des changes est également partie prenante dans le processus.
Ces objectifs contradictoires, combinés à une structure, à des règles et à des mesures
d’application distinctes, suscitent une frustration croissante chez les sociétés qui font du
commerce international et transfrontalier. C’est pourquoi l’Organisation de coopération et de
développement économiques (OCDE) et l’Organisation mondiale du commerce (OMC) ont
parrainé des conférences conjointes pour discuter d’une convergence possible de la
détermination des prix de transfert et de l’évaluation en douane.
C’est l’Accord sur la mise en œuvre de l’article VII de l’Accord général sur les tarifs douaniers
et le commerce de 1994 qui régit l’évaluation en douane des marchandises importées. Ce
document de l’OMC prévoit l'application d’un régime uniforme de détermination de la valeur
en douane sur la base d’une hiérarchie de méthodes établies.
I - L'EVALUATION EN DOUANE
La détermination de la valeur en douane des marchandises importées sert essentiellement à
appliquer les droits ad valorem. La valeur en douane constitue la base d’imposition des droits
de douane. Il s'agit également d'un élément essentiel pour établir les statistiques
commerciales, contrôler les restrictions de nature quantitative, percevoir les taxes intérieures
à l'échelon national.
a) La valeur en douane des marchandises importées devrait être fondée sur la valeur
réelle de la marchandise importée à laquelle s’applique le droit ou d’une
marchandise similaire et ne devrait pas être fondée sur la valeur de produits d’origine
nationale ou sur des valeurs arbitraires ou fictives.
b) La "valeur réelle" devrait être le prix auquel, en des temps et lieu déterminés par la
législation du pays d’importation, les marchandises importées ou des marchandises
similaires sont vendues ou offertes à la vente à l’occasion d’opérations
commerciales normales effectuées dans des conditions de pleine concurrence.
…
c) Dans le cas où il serait impossible de déterminer la valeur réelle en se conformant
aux termes de l’alinéa b) du présent paragraphe, la valeur en douane devrait être
fondée sur l’équivalence vérifiable la plus proche possible de cette valeur.16
Dans bien des cas, le contribuable peut appliquer des méthodes d’établissement des prix de
transfert qui auront une incidence indésirable sur la valeur en douane de marchandises
importées.
Dans certains pays, comme les États-Unis, il est courant de voir l’administration des douanes
participer au processus d’APP (Accord Préalable sur les Prix). En outre, à la lumière des
consultations entre l’OMC et l’OCDE, il semble qu’un mouvement visant à accroître la certitude
16
http://www.wcoomd.org/files/1.%20Public%20files/french/valuation/arti7_gen_agreemt_fr.pdf
31
des montants et, dans la mesure du possible, à favoriser une convergence des deux régimes,
se dessine à l’échelle mondiale.
DOUANE
France
La valeur en douane des marchandises à l'importation doit être déterminée aux fins de
perception des droits et taxes
A l'importation, la valeur en douane des marchandises généralement retenue est leur valeur
transactionnelle, c'est-à-dire le prix effectivement payé ou à payer, mais elle peut être
majorée ou minorée de certains éléments limitativement énumérés par le code des douanes
communautaire
Article 20 (Maroc)
– 1°…, la valeur en douane des marchandises importées est la valeur transactionnelle,
c’est-à-dire le prix effectivement payé ou à payer pour les marchandises …
II - LA TVA
L’OCDE a étendu son champ de réflexion, car la TVA est une des problématiques en matière
d’échanges internationaux.
Les systèmes de TVA s’appuient sur un large éventail d’indicateurs de substitution pour
déterminer le lieu d’imposition des services, comme :
- le lieu d’exécution du service,
- le lieu où est situé l’établissement du fournisseur ou le lieu où celui-ci se trouve
réellement,
- le lieu de résidence du consommateur ou le lieu où celui-ci se trouve réellement
- et le lieu où se trouve le bien corporel (pour les services liés à un bien corporel, tels
que les services de réparation).
L’OCDE recommande que les droits d’imposition sur les fournitures interentreprises de
services et de biens incorporels faisant l’objet d’échanges internationaux soient attribués à la
juridiction où le client a établi son établissement d’affaires et que les entreprises clientes soient
tenues de déterminer par auto liquidation le montant de la TVA due sur les services ou biens
incorporels acquis à distance auprès de vendeurs à l’étranger, en appliquant les règles de la
juridiction dans laquelle elles sont implantées.
Elle recommande également, qu’en cas de fourniture à une entreprise établie dans plusieurs
juridictions, les droits d’imposition reviennent à la juridiction où se trouve l’établissement du
client (succursale) qui utilise le service ou le bien incorporel.
Les échanges internationaux de biens, services et produits incorporels (qui incluent les
téléchargements de produits numériques aux fins de la TVA) soulèvent des défis pour les
systèmes de TVA, en particulier lorsque des consommateurs privés achètent des produits
auprès de vendeurs situés à l’étranger.
Biens :
Dans les pays ayant adopté une TVA, la taxe sur les biens importés est perçue auprès de
l’importateur lors du passage en douane du produit. Nombre de pays appliquent une
exonération de TVA aux importations de biens de faible valeur, estimant que les coûts
administratifs de recouvrement pourraient dépasser le montant de la taxe ainsi collectée.
Services :
Les pays ont institué l’obligation pour les vendeurs non-résidents de s’enregistrer à la TVA. Le
respect de cette obligation repose principalement sur une mise en conformité volontaire de la
part des entreprises, les pays disposant de moyens limités pour la faire respecter par les
32
vendeurs non-résidents. Dans les pays qui ont adopté cette approche, il semble qu’un nombre
important de vendeurs s’acquittent de cette obligation, soit en s’enregistrant à la TVA dans la
juridiction concernée, qu’ils collectent et payent localement, soit en établissant une présence
physique dans ce pays et en devenant, de fait, un vendeur « national ». Les opérateurs les
plus en vue, qui représentent une part très importante du marché, souhaitent afficher le respect
de leurs obligations fiscales, notamment pour préserver leur image.
TVA
ARTICLE 266 (France)
1. La base d'imposition est constituée :
Pour les livraisons de biens, les prestations de services et les acquisitions
intracommunautaires, par toutes les sommes, valeurs, biens ou services reçus ou à recevoir
par le fournisseur ou le prestataire en contrepartie de ces opérations, de la part de
l'acheteur, du preneur ou d'un tiers, y compris les subventions directement liées au prix de
ces opérations ;
…
d) Pour les achats, par le prix d'achat majoré, le cas échéant, des impôts à la
charge de la marchandise ;
…
Article 96 (Maroc)
Détermination de la base imposable
… le chiffre d’affaires imposable comprend le prix des marchandises, des travaux ou des
services et les recettes accessoires qui s’y rapportent, ainsi que les frais, droits et taxes y
afférents à l’exception de la taxe sur la valeur ajoutée.
33