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Sartre, admirateur secret de Proust

Author(s): Young-Rae Ji
Source: L'Esprit Créateur , Winter 2006, Vol. 46, No. 4, Proust en devenir (Winter 2006),
pp. 44-55
Published by: The Johns Hopkins University Press

Stable URL: https://www.jstor.org/stable/26289285

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Sartre, admirateur secret de Proust

Young-Rae Ji

premières versions de « Combray » en 1909, Sartre n'avait que

QUANDpréparer
PROUST, à TRENTE-SEPT ANS, commença à rédiger les
quatre ans ; quand celui-là meurt en 1922, celui-ci était en train de
le concours d'entrée à l'École normale supérieure. Quand
La Nausée paraît en 1938, son auteur avait trente-trois ans. Proust et Sartre :
entre ces deux grands écrivains du siècle dernier qui ont connu leur apogée
avec une génération d'intervalle, quel rapport pourrions-nous établir ? Quelle
influence Proust a-t-il pu exercer sur Sartre ? Ou quelle place a-t-il occupée
chez Sartre ?

Pour repondre a cette question, il faudrait d abord signaler qu il y a deux


Proust chez Sartre : d'un côté, le Proust que Sartre traite sans ménagements
en le considérant, de façon officielle (c'est-à-dire dans les articles et les
ouvrages publiés), comme l'écrivain bourgeois de la génération précédente à
dépasser ; d'un autre, le Proust dont Sartre reconnaît volontairement, mais
d'une manière plus ou moins intime (c'est-à-dire dans plusieurs entretiens ou
dans les carnets de note), l'influence sur lui-même et qu'il admire comme un
des plus grands écrivains dans la littérature française. Entre ces deux Proust
de Sartre, c'est généralement le premier qui est le mieux connu, et l'on con
serve souvent l'image négative d'un Sartre ne respectant pas l'auteur de la
Recherche ou même le calomniant. De sorte que, quand on pense à ces deux
écrivains et à leurs œuvres, on tend à les différencier plutôt qu'à les rapprocher :
« le pessimisme » de l'un contre « l'eudémonisme esthétique » de l'autre, par
exemple. Pourtant, Sartre était un grand admirateur de Proust et il n'a jamais
d'ailleurs caché le fait que Proust est l'écrivain qui l'a le plus influencé, même
si cela est peu connu.
Dans cette étude, nous essayerons de dégager cette face positive de l'atti
tude de Sartre envers Proust. Pour cela, nous rappellerons dans un premier
temps les attitudes offensives de Sartre contre son devancier, en cherchant
leurs causes dans la situation philosophique et historique de Sartre au moment
où il écrivit les textes en question. Puis nous suivrons la trace de Sartre
admirateur de Proust que Sartre a laissée ça et là, d'une manière constante,
dès sa prime jeunesse et jusqu'à la fin de sa vie. Enfin nous examinerons les
parallélismes esthétiques entre ces deux écrivains en comparant surtout la
Recherche avec le dernier ouvrage de Sartre, L'Idiot de la famille.

ι L'Esprit Créateur, Vol. 46, No. 4 (2006), pp. 44-55

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Comme l'on a déjà signalé dans plusieurs articles1, il y a deux attitudes


apparemment contradictoires chez Sartre à l'endroit de Proust : en tant que
philosophe-critique, Sartre prend ses distances vis-à-vis de Proust ; en tant
que romancier, il l'admire. Tandis que Sartre romancier admire Proust assez
discrètement, Sartre philosophe prend ses distances publiquement, d'une
manière « officielle ». En ce qui concerne cette position officielle de Sartre
envers Proust, nous pouvons encore distinguer deux tons assez différents
selon la période, quand nous examinons ses textes publiés : si le ton était
académique à l'époque où Sartre a préparé sa thèse sur l'image et L'Être et
le néant, il devient provocateur, en traversant la Seconde Guerre mondiale,
dans « La Présentation des Temps Modernes » et dans Saint Genet comédien
et martyr.
iviciiic si nuus nuus suuvciiuns suuvciu u UI1 dame se piaisaiu a unenser

Proust d'un ton provocant, il n'est pas exact que Sartre ait été toujours si
virulent en face de Proust, même s'il était rarement d'accord avec la psychol
gie proustienne. Au contraire, pendant longtemps, les œuvres de Proust lu
avaient servi de réservoir d'exemples qu'il a utilisés sans la moindre gêne à
l'appui de ce qu'il avançait. C'est-à-dire qu'il s'agissait, au début, d'un
rapport académique, sans aucune intention provocatrice. Quand Sartre, nor
malien, a présenté son diplôme d'études supérieures intitulé « L'Image dans
la vie psychologique : rôle et nature » en 1927, nous trouvons déjà le nom d
Proust dans la bibliographie abondante de cette thèse, à côté de ceux de Ber
son, Binet, Piaget, Ribot et Freud2. Nous pouvons supposer que les person
nages de Proust y ont fourni divers modèles psychologiques, comme on le
voit plus tard dans L'Imaginaire et dans L'Être et le néant. Pendant cett
période qui va de son diplôme d'études supérieures à L'Être et le néan
(1943), période où les références proustiennes sont les plus nombreuses au
sein de son œuvre, Sartre puise dans la Recherche, tantôt pour étayer ses arg
ments3, tantôt pour illustrer l'état psychique qu'il vient d'expliquer4 ou pour
montrer les limites de la psychologie mécanique qui tente d'analyser ce
état5. Et si Sartre voyait dans les personnages proustiens les types de la pensé
archaïque qui doit être dépassée par les nouvelles idées, c'est surtout parce
qu'il a découvert la phénoménologie husserlienne à Berlin en 1933. Sur l
plan philosophico-critique, la position phénoménologique, qui refuse la dis
tinction entre l'extérieur et l'intérieur, ne peut être compatible, par principe
avec la pensée proustienne qui nous est connue, grâce à Contre Sainte-Beuve
comme reposant sur le dualisme entre le moi profond et le moi social : « un
livre est le produit d'un autre moi que celui que nous manifestons dans nos
habitudes, dans la société, dans nos vices »6. Il va sans dire que Sartre ne peut

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pas admettre cette position proustienne, et nous pouvons lire, dès les pre
mières pages de L'Etre et le néant, les phrases suivantes :

La pensée moderne a réalisé un progrès considérable en réduisant l'existant à la série des appari
tions qui le manifestent. [...] Les apparitions qui manifestent l'existant ne sont ni intérieures ni
extérieures : elles se valent toutes, elles renvoient toutes à d'autres apparitions et aucune d'elles
n'est privilégiée. [...] Le génie de Proust, ce n'est ni l'œuvre considérée isolément, ni le pouvoir
subjectif de la produire : c'est l'œuvre considérée comme ensemble des manifestations de la per
sonne. C'est pourquoi, enfin, nous pouvons également rejeter le dualisme de l'apparence et de
l'essence. L'apparence ne cache pas l'essence, elle la révèle7.

Suivant ce principe phénoménologique, Sartre a écrit L'Imaginaire (dont


le sous-titre est Psychologie phénoménologique de l'imagination) et L'Être et
le néant (dont le sous-titre est Essai d'ontologie phénoménologique). Selon
Sartre, l'homme doit être considéré dans sa totalité, et il n'existe pas une
essence de l'homme, mais seulement la totalité de ce qu'il a fait. Donc il
n'existe pas « un autre moi » qui se sépare du moi extérieur se manifestant
dans les habitudes et dans la société. C'est dans cette perspective que Sartre,
en présentant la phénoménologie de Husserl, avait dit : « Nous voilà délivrés
de Proust. Délivrés en même temps de la 'vie intérieure' »8.
Cependant, en traversant la Guerre, voilà que le ton s'altère. Les critiques
du point de vue académique des premiers temps se teintent d'une hostilité non
déguisée contre la bourgeoisie dans les circonstances liées à la Libération. Sur
les ruines des lendemains de la guerre, la -sensibilité proustienne de la Belle
Époque pouvait sans doute paraître, aux yeux de Sartre, comme un luxe
nuisible. Dans Les Temps modernes, sa nouvelle revue à peine fondée, Sartre
dénonce Proust comme un écrivain représentant l'idéologie bourgeoise fondée
sur l'esprit d'analyse, esprit dont l'unique office est « de troubler la conscience
révolutionnaire et d'isoler les hommes au profit des classes privilégiées »9.
Sartre y accuse Proust, d'un ton assez provocateur, pour sa psychologie
mécanique et intellectualiste qui ramène tous les comportements de ses person
nages à l'idée de la nature humaine, dont l'auteur trouve le modèle en lui-même.

Pédéraste, Proust a cru pouvoir s'aider de son expérience homosexuelle lorsqu'il a voulu dépein
dre l'amour de Swann pour Odette ; bourgeois, il présente ce sentiment d'un bourgeois riche et
oisif pour une femme entretenue comme le prototype de l'amour. [...] Fidèle aux postulats de
l'esprit d'analyse, il n'imagine même pas qu'il puisse y avoir une dialectique des sentiments,
mais seulement un mécanisme. [...] Nous ne croyons plus à la psychologie intellectualiste de
Proust, et nous la tenons pour néfaste l0.

Cette hostilité va se développer sous l'effet de la découverte, à la même


époque, de Jean Genet, poète voyou qui assume toute sa marginalité et qui

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parle de ses désirs invertis avec une franchise éblouissante. Sartre est fasciné
par les œuvres de Genet où l'homosexuel s'affirme dans le crime et dans la
destruction de toutes les valeurs bourgeoises. À côté de ce marginal Genet,
Proust n'est qu'un lâche et un écrivain bourgeois irresponsable :

Proust fonde son irresponsabilité sur un déterminisme psychologique qu'il invente et met au point
pour les besoins de la cause ; les analyses proustiennes, même et surtout lorsqu'elles portent sur
des conduites et sur des sentiments sans relation avec son « vice », sont des plaidoyers".

Cependant, cette période d'hostilité ne dure pas longtemps. Après la paru


tion de Saint Genet en 1952, Sartre évoque rarement la Recherche et son
auteur dans les textes publiés. En revanche, dans les sources officieuses,
surtout dans plusieurs entretiens, Sartre parle souvent de Proust avec beau
coup d'estime, et nous trouvons ici les traces qui prouvent que Sartre a con
tinué à le respecter en tant que romancier, et ce même à l'époque où il l'avait
attaqué avec le ton le plus violent.

Comme nous l'avons déjà dit, Sartre n'a jamais caché le fait que Proust
soit l'écrivain qui l'ait le plus influencé. Même avant qu'il ait fait remarquer,
dans son film biographique tourné en 1972, l'influence de Proust dans sa
jeunesse12, il affirmait déjà, chaque fois que l'occasion se présentait, l'impor
tance de Proust dans sa vie.

Lors du voyage au Japon en 1966, par exemple, Sartre avait répondu,


interrogé sur les écrivains qui l'ont marqué, que ni Gide ni Valéry n'avaient
eu d'influence sur lui, mais que celle de Proust avait été en revanche impor
tante13. Plus tôt, dès 195114, dans un entretien où on l'interrogeait sur sa
jeunesse, Sartre, après avoir évoqué sa vie lycéenne à La Rochelle, avait parlé
de son apprentissage de la littérature en ces termes :

— Tout cela explique que je suis venu tard à la littérature moderne [...]. Quand je retrouvai Paul
Nizan et mes autres camarades d'Henri-IV à Paris, en 1920, je constatai qu'ils avaient pris sur
moi une avance considérable. Alors qu'ils en étaient à Gide, à Giraudoux, moi, je me bourrais
encore de Claude Farrère et d'Anatole France. Je me méfiais des auteurs « dans le mouvement »
et je ne voulais pas me laisser prendre malgré moi.
— Et quel fut le premier de ceux-ci qui vous « prit » ?
— Proust. Et ce fut, je crois bien, parce qu'on découvrait alors les personnages d'À la recherche
du temps perdu comme des êtres vivants, au fur et à mesure que sortaient les volumes.
— Et Gide ?

— Il n'a eu sur moi aucune influence. Les Nourritures m'agacèrent. [...] Valéry, rationaliste
comme nous, m'atteignit bien davantage. Et Alain, indirectement15.

Comme il l'a confirmé dans plusieurs entretiens, c'est en classe de pre


mière au lycée Henri-IV que Sartre à quinze ans a découvert Proust. Le Proust

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qu'il a lu durant cette année scolaire 1920-1921, ce n'était évidemment pas le


même Proust que nous connaissons aujourd'hui : Sartre lisait Proust en tant
qu'un des écrivains immédiatement contemporains, tout au plus, en tant
qu'écrivain couronné récemment (en 1919) du prix Goncourt pour un roman
intitulé À l'ombre des jeunes filles en fleurs. Effectivement, ce n'est qu'à cette
saison 1920-1921 que les deux tomes du Côté de Guermantes et le premier
volet de Sodome et Gomorrhe ont été publiés.
Sartre aurait pu poursuivre sa lecture de Proust pendant sa préparation du
concours d'entrée à l'École normale supérieure, c'est-à-dire entre 1922 et
1924, période pendant laquelle la publication de la Recherche s'est accomplie
jusqu'à sa cinquième section La Prisonnière (1923). Nous avons la preuve
que cette lecture était captivante pour Sartre à cette époque : dans son « Carnet
de Midy »16, rempli principalement au cours des premiers mois de l'année
1924, nous trouvons des citations tirées du Côté de Guermantes]1, une
transcription d'un poème de Paul Morand intitulé « Ode à Marcel Proust »18,
et surtout une note qui témoigne de la chaleureuse affection du futur nor
malien, âgé de dix-neuf ans, à l'endroit de l'auteur de la Recherche. Sous la
rubrique intitulée « Proust », Sartre a noté les phrases suivantes :

Je n'aime pas seulement Marcel Proust comme un grand auteur, je l'aime encore comme un tonique,
un excitant. Il insère en moi sa méthode, l'ayant lu je pense tout le jour comme lui. Je suis indul
gent à ses fautes, je les aime. Lorsque je rencontre une phrase où manque le verbe, ou une
puérilité, je l'aime autant que les grandes beautés de l'œuvre, comme on aime sur le cou de son
amie un poil follet ou un grain de beauté. Ce que j'aime aussi en lui c'est la teinte générale de son
œuvre : mer calme au soleil d'un matin de mars, teinte qui se perd dans So[dome] et Go[morrhe]
III et la tragique Prisonnière. Ayant lu chacun d'eux à de longs intervalles de distance, le dernier
que je lisais m'a toujours paru le meilleur parce que j'étais toujours stupéfié d'être transporté de la
médiocrité de la vie ou de la littérature, dans son royaume. Et chaque lecture m'était une initiation19.

À l'École normale, Sartre a sans doute continué à lire la Recherche dont


la publication s'achèvera en 1927 (l'année où lui-même, on s'en souvient, a
présenté sa thèse sur l'image). Proust semble avoir été à la mode, du moins
chez les Normaliens. La preuve en est que, au printemps de 1926, Sartre a
joué le rôle de Gustave Lanson, directeur de l'École à l'époque, dans une
revue satirique, organisée par le Théâtre des Folies-Normaliennes, au titre
proustien d'« À l'ombre des vieilles billes en fleurs ». Il a tellement bien joué
son rôle que, le lendemain, il eut les honneurs de la presse20.
Dès lors, Sartre a commencé, comme nous l'avons rappelé plus haut, à
prendre ses distances envers l'auteur de la Recherche sur le plan
philosophique. En revanche, sur le plan littéraire, il continuait à écrire tout en
ayant toujours Proust à l'esprit, de sorte que nous sentons la présence de

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Proust non seulement dans ses romans, mais aussi dans ses divers essais. On
a souvent signalé les ressemblances entre La Nausée et la Recherche en com
parant surtout le jazz de Roquentin et la sonate de Vinteuil21. On rapproche
également la fameuse scène de la racine de marronnier dans La Nausée de
celle de la madeleine dans la Recherche22. Ou on trouve une similarité entre
un long passage entièrement éliminé par Sartre dans le manuscrit de Melan
cholia23 et la première scène de Combray24. L'un compare certains passages
de L'Age de raison de Sartre avec La Prisonnière25, alors que l'autre souligne
la ressemblance entre l'enfance décrite dans Les Mots (ou dans L'Enfance
d'un chef) et l'enfance du Narrateur de Proust26.
Dans les essais de Sartre, nous pouvons également déceler l'ombre de
Proust. Quand l'essayiste distingue, par exemple, le travail du poète de celui
du prosateur dans Qu 'est-ce que la littérature ?, il semble évoquer le style de
Proust tantôt en mentionnant « le tintement de la cuiller sur la soucoupe »27
qui se réfère à la fameuse scène du Temps retrouvé où le narrateur éprouve la
félicité au moment du précieux souvenir involontaire28, tantôt en évoquant les
multiples sens du mot « Florence »29, ce qui fait écho aux passages de Du côté
de chez Swann où le narrateur déploie son imagination à partir du nom de la
ville italienne30. Quand Sartre compare le monde du rêve avec celui de la lec
ture d'un roman en disant : « Nous sommes hantées par les aventures des per
sonnages rêvés comme par celles des héros de roman »31, nous nous souvenons
de la définition de l'entreprise romanesque donnée par Proust : « C'est un peu
le même genre d'effort prudent, docile, hardi, nécessaire à quelqu'un qui, dor
mant encore, voudrait examiner son sommeil avec l'intelligence, sans que
cette intervention amenât le réveil »32.
On pourrait multiplier cette sorte de comparaison en fouillant les textes de
ces deux écrivains. Pourtant, nous pensons que l'influence de Proust sur
Sartre est plus profonde que ce qu'on peut déceler dans ces similitudes par
tielles du texte. Il nous semble que Sartre est marqué par Proust de façon plus
générale et plus durable. Surtout quand on lit L'Idiot de la famille, le dernier
ouvrage de Sartre, nous trouvons que son projet littéraire tout entier est assez
similaire à celui de Proust. Plus précisément, nous pouvons rapprocher Sartre
de l'auteur de la Recherche dans son projet autobiographique d'écrire et dans
la découverte de sa vocation d'écrivain qu'il a racontée au travers du cas de
Flaubert. Examinons-le de plus près.

L'Idiot de la famille est un ouvrage ambitieux où Sartre a voulu disséquer


l'homme Flaubert en rassemblant tous ses projets et toutes ses méthodes qu'il
avait entrepris auparavant. A partir de la question anthropologique « Que

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peut-on savoir d'un homme, aujourd'hui ? »33, Sartre a voulu atteindre à une
vérité de l'homme par un cas concret, en l'occurrence, Gustave Flaubert.
Cependant, pour Sartre, cette étude de l'apparence biographique n'est qu'un
aboutissement de son projet autobiographique, qui est la ligne fondamentale
de tous ses écrits.

En fait, chez Sartre, toute l'entreprise philosophique et littéraire est pro


fondément liée à la démarche autobiographique. On peut dire que toutes ses
œuvres philosophiques et littéraires peuvent aussi être lues comme une entre
prise autobiographique à la fois éclatée et recentrée de façon répétitive autour
des mêmes angoisses et obsessions. Comme dit Michel Contât, en expliquant
le projet sartrien de lier roman et autobiographie, « l'existentialisme, avant
d'être un humanisme, est un autobiographisme, parce qu'il demande à l'être
humain de se situer comme sujet dans la perception qu'il a du monde et de ses
entourages et dans l'action qu'il exerce sur le monde, sur les autres »34.
Depuis que Sartre avait commencé sa carrière d'écrivain, il n'avait jamais
cessé de parler de lui-même dans ses textes littéraires. Son tout premier roman
« Jésus la Chouette, professeur de province »35, rédigé à l'âge de dix-sept ans,
est déjà écrit à partir de sa propre vie avec l'intention d'en rendre compte au
plus vrai. De ce premier roman de jeunesse jusqu'aux Chemins de la liberté
en passant par La Nausée, Sartre a sans cesse livré sa propre expérience dans
ses œuvres romanesques. Pourtant, après la guerre, Sartre a renoncé à racon
ter sa vie sous forme de roman. À cause de la difficulté narrative due princi
palement au décalage temporel entre l'événement et l'écriture, il a abandonné,
vers les années 1950, la rédaction des Chemins de la liberté. Depuis, il a
trouvé de quoi satisfaire son désir d'écrire au moyen du discours biographique
ou autobiographique qui se substituera totalement à la pratique du roman sur
le plan de la narration. Sartre, qui avait voulu jusqu'à ce moment rendre
compte littérairement de sa vie en recourant à la fiction, veut désormais pour
suivre la même entreprise, mais en écrivant son autobiographie ou encore en
parlant de soi-même dans la biographie des autres.
Si Sartre a decide, vers cette epoque, c est-a-dire au debut des années
cinquante, d'écrire son autobiographie, c'est qu'intervient chez lui un grand
changement de perspective concernant l'activité littéraire. Étant donné que le
rapprochement opéré alors avec les communistes le faisait douter de la valeur
de la littérature et de son propre choix d'écrire, il a d'abord voulu se connaître
lui-même : « Pourquoi suis-je devenu écrivain ? ». Et, pour mieux se con
naître, il a eu besoin d'élargir son champ de vision et de trouver la méthode
appropriée en parlant d'un autre, plus précisément d'un autre écrivain. Ainsi
a commencé la rédaction de son autobiographie vers 1954, et celle d'une

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biographie de Flaubert vers 1955. Ce sont deux ouvrages de longue haleine.


Après la parution des Mots en 1964, Sartre ne s'est préoccupé que de la rédac
tion de son Flaubert, dont les deux premiers tomes paraîtront enfin en 1971,
après une quinzaine d'années de travail.
Apparemment, L Idiot de la famille est une etude biographique, avec le
sous-titre qui précise son objet : « Gustave Flaubert de 1821 à 1857 ». Mais
Sartre nous invite, dans plusieurs entretiens, à le lire comme « un roman »36,
et on y trouve effectivement bien des éléments fictifs qui ne correspondent pas
aux faits historiques de Flaubert. Il s'agit donc d'une biographie romancée.
En même temps, L'Idiot de la famille est aussi, en allant plus loin, un
roman autobiographique. Avec l'attitude de Y empathie que Sartre considérait
comme « seule attitude requise pour comprendre Gustave Flaubert »37, il
interprète Flaubert à la lumière de sa propre expérience, de sorte qu'il nous
pousse à lire L'Idiot de la famille, non comme une étude biographique sur
Flaubert, mais comme une autobiographie déguisée de Sartre lui-même. De
Baudelaire jusqu'à L'Idiot de la famille, dans chacune de ces études sur la vie
d'écrivains illustres (Baudelaire, Mallarmé, Jean Genet, Flaubert), Sartre a
toujours essayé d'élucider, en remontant à l'enfance et en fouillant dans
l'expérience psychologique conflictuelle, les sources d'une vocation littéraire,
l'origine de leur choix de devenir écrivain. Dans chacune de ces études
biographiques, la démarche de Sartre est la même : une démarche empathique,
une identification fusionnante avec ses personnages. Sartre se projette dans la
peau des personnages de sa biographie, se livre lui-même à travers eux autant
qu'il veut les comprendre, et opère ainsi un va-et-vient vertigineux entre le Je
et l'Autre, à la frontière du réel et l'imaginaire.
Nous constatons de fait qu'une multitude de liens relient la vraie auto
biographie de Sartre à son récit sur Flaubert. Conçus presque à la même
époque, Les Mots et L'Idiot de la famille offrent beaucoup de ressemblances
dans la description de leurs héros, Poulou et Gustave. Surtout, dans les deux
cas, la naissance d'une vocation d'écrivain est le résultat d'une fuite dans
l'imaginaire comme moyen de se sauver de leur angoisse devant la réalité
existentielle. Ces coïncidences dans l'expérience enfantine des deux écrivains
suggèrent le fait suivant : Flaubert représente une voie d'existence qui s'est
effectivement ouverte devant Sartre lui-même et qu'il a consciemment
refusée, sans pouvoir cependant éviter un grand combat intérieur. Ainsi se
confirme le principe avancé par Alain Buisine : « L'Idiot de la famille con
cerne moins Flaubert que l'auteur des Mots »38.
Ainsi, chez Sartre, le projet autobiographique et le projet biographique se
voient dialectiquement liés, et ils ont tous les deux pour but de répondre à la

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même question : « Comment devient-on écrivain ? », ou plutôt « Comment


deviens-je écrivain ? ». En ce sens, on peut rapprocher l'entreprise de Sartre
de celle de Proust. Comme Les Mots et L'Idiot de la famille, qui envisagent
de montrer comment on en arrive à décider d'écrire, la Recherche est aussi
l'histoire de la naissance d'une vocation d'écrivain. Comme Gustave et

Poulou qui trouvent leur salut dans l'imaginaire, Marcel se sent comme sauv
au moment du précieux souvenir involontaire qui est l'équivalent de l'imaginai
dans la mesure où ce moment privilégié lui permet de vivre « en dehors du
temps » en lui épargnant l'angoisse de la réalité, et plus précisément l'anxié
devant la mort. « Mes inquiétudes au sujet de ma mort eussent cessé au
moment où j'avais reconnu inconsciemment le goût de la petite madelein
puisqu'à ce moment-là l'être que j'avais été était un être extratemporel, par
conséquent insoucieux des vicissitudes de l'avenir »39.
Selon Sartre, l'écrivain est celui qui, « contre le réel qui l'écrase », décide
de se faire « le Prince de l'Imaginaire »40. Si l'enfant Sartre se sent sauvé en
fuyant dans le monde imaginaire, c'est parce que Y imaginaire est un mond
sûr : contrairement au réel qui est le monde « toujours nouveau, toujou
imprévisible » où il y a constamment « quelque chose qui nous dépasse
l'imaginaire est le monde où il ne se passe rien d'imprévisible. Dans c
monde irréel qui ne précède jamais notre intention, les actions mêmes que
nous projetons n'ont que les conséquences que nous voulons bien leur
donner : « Si je frappe en image mon ennemi, le sang ne coulera pas ou bien
il coulera juste autant que je le voudrai ». Pour cette raison, l'enfant Sartre,
ainsi que l'enfant Flaubert vu par Sartre, se sentaient rassurés dans ce monde
imaginaire, et tous les deux s'y précipitèrent, pour s'échapper de leur angoiss
existentielle causée par la réalité débordante, en déclarant que « le réel n'est
jamais beau »41. Dans ce monde irréel, ils peuvent justifier leur propre exis
tence en en excluant tous les éléments contingents et en transformant une v
flottant au hasard en vie de sûreté et de constance. Ainsi choisissent-ils de
devenir écrivain.

De ce point de vue sartrien, nous pourrions dire la même chose pour le


narrateur de la Recherche, bien que la terminologie soit un peu différente.
Comme Poulou tente de trouver dans le monde imaginaire le moyen de lutter
contre l'angoisse existentielle, Marcel trouve dans le monde passé le moyen
de se défendre contre l'anxiété de la mort : « Si l'idée de la mort dans c
temps-là m'avait, on l'a vu, assombri l'amour, depuis longtemps déjà d
souvenir de l'amour m'aidait à ne pas craindre la mort »42. Autrement dit,
souvenir chez Proust équivaut à l'imaginaire chez Sartre. Si le narrateur de
Recherche se sent rassuré en se penchant sur sa vie passée, c'est probablemen

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parce que, dans ce monde passé, tout est déjà connu, donc digéré et maîtrisé
par l'auteur, et qu'il n'y a rien de d'imprévisible, susceptible de lui causer de
l'inquiétude. Le monde qu'il a constitué en essayant d'extraire la généralité
des moindres épisodes de sa vie passée, c'est un monde utopique et extratem
porel, délivré de tout le poids présent de la réalité. Et le précieux souvenir
involontaire qui permet au narrateur d'entrer dans ce monde constitue le
moment privilégié : « Comme un aviateur qui a jusque-là péniblement roulé
à terre, 'décollant' brusquement, je m'élevais lentement vers les hauteurs
silencieuses du souvenir». Dans « cette fuite loin de notre propre vie », le
narrateur trouve le moyen de résister à la force destructive du Temps et il se
sent comme sauvé en décidant d'écrire sa vie gaspillé : « La vraie vie, la vie
enfin d'couverte et éclaircie, la seule vie par conséquent pleinement vécue,
c'est la littérature »43. Ainsi Marcel devient-il écrivain.
Dans cette perspective, L'Idiot de la famille est la Recherche du temps
perdu de Sartre. Et nous pourrions même considérer Les Mots de Sartre comme
son Temps retrouvé, si nous le considérons dans l'ensemble de son projet auto
biographique. Les deux écrivains parlent de leur vocation d'écrivain, avec
même passion, avec même amplitude, mais chacun à sa façon. Si Proust avait
écrit son œuvre monumentale en rassemblant toutes les connaissances cul
turelles et philosophiques de son époque, Sartre l'a fait autant en y rassemblant
toutes les méthodes disponibles dans son époque pour réaliser ses trois projets
(auto)biographique, romanesque et philosophique. Michel Contât définit le
projet sartrien entrepris dans L'Idiot de la famille comme « un projet où il serait
à la fois Proust, Marx et Freud, un projet qui serait un grand roman, une
analyse socio-historique, et une psychanalyse existentielle »u.
tsrer, Sartre a toujours Proust à l'esprit tout au long de sa carrière
d'écrivain. Selon le témoignage de son entourage, jusqu'à sa perte de la vue,
en 1973, il lui arrivait très souvent de prendre au hasard un des volumes de la
Recherche et d'en lire des passages, pour le plaisir, avant de se mettre au
travail45. Depuis que Sartre a découvert Proust à l'âge de quinze ans, celui-ci
est devenu l'un des écrivains les plus importants pour lui. Bien que Sartre
n'ait pas fait, pour Proust, ce qu'il fit pour Baudelaire, Genet ou Flaubert,
l'auteur de la Recherche est l'écrivain qui l'a le plus influencé. Cependant, il
serait absurde d'espérer que Sartre ait suivi fidèlement la voie tracée par
Proust. Le temps connaît une progression, les héros de l'époque se succèdent.
En dépassant les maîtres de l'époque précédente, des nouveaux maîtres
émergent dans la génération nouvelle. Dans l'histoire du roman français, si
Proust forme le sommet d'une vaste chaîne littéraire, Sartre lui succède en
formant à son tour un nouveau sommet, selon le terme de Michel Raimond46.

Vol. 46, No. 4 53

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L'Esprit Créateur

Chaque génération esthétique s'élève sur la négation de la précédente, tout


héritant de ses expériences, avant de vivre douloureusement les siennes. S
Proust, peut-être le Sartre que nous connaissons aujourd'hui n'existerait-il p
non plus. Comme Proust devient Proust en faisant des pastiches de Balzac
de Flaubert pour surmonter ces écrivains, Sartre devient Sartre en tenant t
jours Proust dans son champ de vision pour le surmonter à son tour.

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Notes

1. On lira en particulier Pauline Newman-Gordon, « Sartre lecteur de Proust ou le paradoxe


de La Nausée », Bulletin de la Société des Amis de Marcel Proust et des Amis de Combray,
29 (1979): 103-14 ; Jacques Deguy, « Sartre lecteur de Proust », dans Claude Burgelin, dir.,
Lectures de Sartre (Lyon: Presses Universitaires de Lyon, 1986), 199-216.
2. Cf. « Chronologie », dans Jean-Paul Sartre, Œuvres romanesques (Paris: Gallimard, 1981),
xliii.
3. Par exemple, on voit dans L'Imaginaire : « Proust a bien montré cet abîme qui sépare
l'imaginaire du réel, il a bien fait voir qu'on ne peut trouver de passage de l'un à l'autre et
que le réel s'accompagne toujours de l'écroulement de l'imaginaire, même s'il n'y a pas de
contraction entre eux, parce que l'incompatibilité vient de leur nature et non de leur con
tenu », Jean-Paul Sartre, L'Imaginaire (1940; Paris: Gallimard, 1964), 188. Dans L'Être et
le néant, on lit aussi : « Pareillement Stendhal, malgré ses attaches avec les idéologues,
Proust, malgré ses tendances intellectualistes et analytiques, n'ont-ils pas montré que
l'amour, la jalousie ne sauraient se réduire au strict désir de posséder une femme, mais
qu'ils visent à s'emparer à travers la femme du monde tout entier ». Jean-Paul Sartre, L'Être
et le néant (1943; Paris: Gallimard. 1973), 649.
4. Par exemple, dans L'Être et le néant, on lit : « Il y a des périodes d'intermittence pour un
amour vivant, pendant lesquelles nous savons que nous aimons mais nous ne le sentons
point. Ces 'intermittences du cœur' ont été fort bien décrites par Proust », 211. Voir aussi 434.
5. Voir L'Être et le néant, 216-17 et 517.
6. Marcel Proust, Contre Sainte-Beuve (1954; Paris: Gallimard, 1987), 127.
7. Sartre, L'Être et le néant, 12-13.
8. « Une idée fondamentale de la phénoménologie de Husserl : l'intentionnalité », dans Jean
Paul Sartre, Situations, I (1947; Paris: Gallimard, 1984), 32.
9. « Présentation des Temps modernes », dans Jean-Paul Sartre, Situations, II (1948; Paris:
Gallimard, 1987), 20.
10. Situations, 11,20-21.
11. Jean-Paul Sartre, Saint Genet comédien et martyr (1952; Paris: Gallimard, 1996), 258.
12. Sartre: un film réalisé par Alexandre Astruc et Michel Contât, texte intégral (Paris: Galli
mard, 1977), 30.
13. Asabuki Tomiko, Vingt-huit jours au Japon avec Jean-Paul Sartre et Simone de Beauvoir
(Paris: L'Asiatèque, 1996), 105.
14. Rappelons que c'est l'époque où Sartre a écrit Saint Genet.
15. « Rencontre avec Jean-Paul Sartre », entretien réalisé par Gabriel d'Aubarède, Les Nou
velles littéraires, artistiques et scientifiques (1er février 1951 ): 1.
16. Il s'agit d'un carnet dans lequel Sartre avait entrepris de noter par ordre alphabétique un
grand nombre de citations et de ses pensées. C'était un carnet publicitaire médical, portant
la mention en bas « Suppositoires Midy », que Sartre avait ramassé dans le métro et rempli
au cours du premier trimestre de l'année 1924. Voir la notice de Michel Sicard dans Jean
Paul Sartre, « Carnet Midy », Écrits de jeunesse, Michel Contât et Michel Rybalka, éd.
(Paris: Gallimard, 1990), 437-42.

54 Winter 2006

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Young-Rae Ji

Sartre, Écrits de jeunesse, 494-95.


Sartre, Écrits de jeunesse, 473-75.
Sartre, Écrits de jeunesse, 480.
Cf. Annie Cohen-Solal, Sartre, 1905-1980 (Paris: Gallimard. 1985), 97.
On lira particulièrement Pierre Bost, « Proust devant une sonate, Sartre devant un air de
jazz, entendent une seule voix ... », Le Figaro littéraire (8 janvier 1949), 1 et 3; Henry A.
Grubbs, « Sartre's Recapturing of Lost Time », Modern Language Notes, 73:7 (1958): 515
22; Albert Mingelgriin, « L'Air de jazz dans La Nausée·, un cheminement proustien », Revue
de l'Université de Bruxelles, 1 (1972):55-68.
Georges Poulet, Études sur le temps humain, vol. 3 (1964; Paris: Pion, 1989), 229.
« Notes et variantes de La Nausée », dans Sartre, Œuvres romanesques, 1732-39.
Sandra Teroni Menzella, « Sartre lecteur de Proust: sensation et mémoire dans La Nausée »,
Studi francesi, 27:1 (1983), 51.
Reinhard Kuhn, « Proust and Sartre: The Heritage of Romanticism », Symposium, 18:4
(1964), 294-95.
J. Barbara Bucknall, « Lecteurs de nous-mêmes », Bulletin de la Société des Amis de Marcel
Proust, 29 (1979), 53-54; Jacques Deguy, « Sartre lecteur de Proust », 212.
Sartre, Situations, II, 60.
Marcel Proust, Le Temps retrouvé (Paris: Gallimard, 1990), 174-75.
Sartre, Situations, II, 66-67.
Marcel Proust, Du côté de chez Swann, (Paris: Gallimard, 1988), 380-81.
Sartre, L'Imaginaire, 218.
Marcel Proust, « [Réponse à une enquête des Annales (Les Annales politiques et littéraires
du 26 février 1922)] » dans Essais et articles (Paris: Gallimard, 1994), 337.
Jean-Paul Sartre, L'idiot de la famille, I (Paris: Gallimard, 1988), 7.
Michel Contât, « Une autobiographie politique ? », Pourquoi et comment Sartre a écrit
« Les Mots » (Paris: PUF, 1996), 2.
Repris dans Sartre. Écrits de jeunesse, 60-135.
Jean-Paul Sartre, Situations, IX (Paris: Gallimard, 1972), 123; Situations, X (Paris: Galli
mard, 1976), 94.
Sartre, L'Idiot de la famille, 1:8.
Alain Buisine, « Sartre-Flaubert: le dialogue des morts », Magazine littéraire, 250 (fév.
1988), 54.
Proust, Le Temps retrouvé, 178.
Sartre, L'Idiot de la famille, 1:451.
L'Imaginaire, 190, 187, 188, 245.
Proust, Le Temps retrouvé, 343.
Le Temps retrouvé, 165, 198, 202.
Michel Contât, « Le Continent Sartre », Magazine littéraire. 282 (nov. 1990), 24.
Sartre, Écrits de jeunesse, 526.
Cf. Michel Raimond, Le Roman depuis la révolution, 4e ed. (Paris: Armand Colin 1971)
210-11.

Vol. 46, No. 4 55

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