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Le surréalisme : une exploration de la folie et de

l’inconscient
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Contrairement à ce qu’on pourrait imaginer, le surréalisme n’est pas la négation du


réalisme. Surréalisme veut dire aller au delà du réalisme, c’est à dire aller au delà des
apparences.

Ce chemin avait déjà été entrepris par Arthur Rimbaud qui se voulait « voyant », puis
prolongé par Apollinaire. Mais les surréalistes du XXe siècle veulent aller encore plus loin
en se libérant de toutes les contraintes.

Comment ?

Les premières contraintes sont la morale et la raison qui nous empêchent d’agir
librement. Pour s’en libérer, les surréalistes explorent les zones mystérieuses de l’homme
qui mènent à ce qu’il y a de plus enfoui en nous: le rêve, la folie, l’inconscient, l’amour
fou…

Viennent ensuite les contraintes des règles d’écriture (constructions syntaxiques,


grammaire, ponctuation, etc). Pour s’en libérer, les surréalistes font preuve d’une grande
liberté formelle dans leurs écrits : absence de ponctuation, collages, associations
d’images surprenantes, écriture automatique…

I – Le contexte historique du surréalisme


Guillaume Apollinaire invente le mot « surréaliste » en 1917 en qualifiant sa pièce Les
Mamelles de Tirésia de « drame surréaliste ». Ce terme sera repris par les futurs
surréalistes, notamment par André Breton dans Manifeste du surréalisme en 1924.

Si l’apogée du surréalisme se situe bien dans l’entre deux-guerres, l’influence de ce


mouvement artistique s’étend bien au delà de la seconde guerre mondiale. Il prendra fin
dans les année 60, après la mort d’André Breton.

Trois évènements sont incontournables pour comprendre la naissance du surréalisme


en 1917 :

◊ La première guerre mondiale


A la fin du 19e siècle, l’esprit scientifique et le rationalisme triomphent. La foi dans le
progrès est immense.

Mais en 1914, la première guerre mondiale éclate.

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La foi dans la raison et les progrès scientifiques se heurtent à la barbarie de la guerre.
N’est-ce pas au nom de la « raison d’Etat » que des centaines de milliers d’hommes sont
sacrifiés dans les tranchées ?

Cette guerre laisse aux jeunes gens un sentiment d’horreur, d’absurdité et de révolte
face aux valeurs occidentales qui ont permis un tel carnage.

Se développe alors un mouvement pacifiste : le surréalisme va développer en littérature


ce culte de la paix et cette esthétique de l’amour.

◊ Le dadaïsme

Le dadaïsme est un mouvement crée en 1916 par Tristan Tzara.

Le dadaïsme veut tout détruire et tout refuser. Il remet en cause les valeurs morales
dominantes et toutes les valeurs culturelles (la bourgeoisie, l’art…).

Tristan Tzara rencontre en 1920 les futurs écrivains surréalistes : Aragon, Eluard et
Breton. Il se désolidarisera d’eux en 1923, année qui marque la fin officielle du dadaïsme.

Mais le dadaïsme influence profondément les futurs surréalistes qui vont garder du
mouvement Dada ce désir de liberté, de provocation et de scandale en essayant de le
dépasser dans un désir de révolution politique et sociale.

◊ Les découvertes psychanalytiques


Au début du XXe siècle, les écrits de Sigmund Freud (comme L’interprétation des rêves
en 1900) changent notre conception de l’homme. La théorie de l’inconscient indique
que nos actes sont motivés par des désirs enfouis dont nous n’avons pas conscience !

Ces découvertes fascinent les surréalistes qui veulent accéder directement à la


pensée, sans passer par le filtre de la morale et de la raison.

Les auteurs surréalistes vont utiliser l’écriture comme une voie d’exploration de
l’inconscient et des profondeurs de l’homme.

II – Les principes du surréalisme

◊ Explorer l’inconscient
Inspirés par la psychanalyse, les surréalistes veulent explorer l’inconscient, fouiller
dans les zones mystérieuses de l’homme.

Ils n’hésitent pas pour cela à utiliser des méthodes innovantes comme l’écriture
automatique. L’écriture automatique consiste à écrire très rapidement, sans se relire,
dans un état presque hypnotique pour obtenir un texte qui échappe au filtre de la
conscience et de la raison.

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Les champs magnétiques (1920) de Breton et Soupault est le premier recueil de textes
écrits en écriture automatique.

◊ Libérer l’imagination

Les surréalistes veulent avant tout libérer l’homme des contraintes de la raison et de la
logique grâce à l’imagination.

Pour cela, ils créent des images insolites et des rapprochements surprenants comme
Paul Eluard qui écrit : « "La terre est bleue comme une orange" ».

Pour stimuler l’imagination, les surréalistes créent des jeux d’écriture tels que le
« cadavre exquis » : les participants composent une phrase en écrivant chacun un mot
sur un papier, sans connaître les termes précédemment marqués par leurs amis.
Exemple de phrases composées lors d’un cadavre exquis :
♦ "L’huître du Sénégal mangera le pain tricolore
♦ La vapeur ailée séduit l’oiseau fermé à clé"

Le jeu du cadavre exquis témoigne aussi de l’importance que les surréalistes accordent
au hasard : c’est la rencontre hasardeuse de deux mots qui n’ont rien à voir ensemble
qui permet de créer une entité nouvelle.

◊ L’amour
L’amour est plus qu’un thème de prédilection des surréalistes : c’est une expérience
totale et mystique dans laquelle l’écrivain s’abandonne.

C’est l’amour qui, par la réconciliation des contraires, permet l’unité de l’homme.

Pour les surréalistes, l’amour c’est aussi l’amour des mots. Le recueil de Paul Eluard
l’Amour la poésie montre ce lien indestructible entre l’amour et les mots.

◊ L’engagement politique
Pour les surréalistes, l’art est un moyen de « "changer la vie "» comme l’écrivait
Rimbaud et même de « "transformer le monde" » comme le disait Karl Marx.

De nombreux auteurs surréalistes se sont engagés en politique notamment au Parti


communiste français (André Breton, Louis Aragon). Le surréalisme est un mouvement
qui se veut antibourgeois, antinationaliste et révolutionnaire. Pour les surréalistes, il doit
mener à une libération sociale.

III – Figures de style dominantes du surréalisme

◊ L’oxymore ou l’antithèse
Les surréalistes recherchent les associations contraires et utilisent donc souvent
l’antithèse et l‘oxymore susceptibles de faire surgir des images inattendues.

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L’antithèse et l’oxymore sont aussi emblématiques d’une attitude d’opposition à l’ordre
établi.

Par exemple, l’antithèse dans ces vers de Paul Eluard :

"De la femme qui s’ennuyait


Les mains à terre
Sous un nuage"

◊ Le vers libre

En poésie, le vers traditionnel respecte des règles de versification (un certain nombre de
mètres par vers, présence de rimes, un certain nombre de vers par strophes etc).

Le vers libre ne se soucie plus de ces règles : la poésie en vers libre ne contient pas
le même nombre de syllabes dans chaque vers; les vers ne riment pas toujours; etc.

Les poètes surréalistes utilisent souvent le vers libre qui leur permet d’exprimer leur goût
pour la liberté.

◊ L’écriture automatique
L’écriture automatique permet aux auteurs surréalistes d’écrire ce qui leur vient à
l’esprit, sans filtre et sans se relire.

Cette méthode d’écriture leur permet d’explorer l’inconscient et le rêve. Elle fait naître des
associations de mots fondées sur la surprise. Par exemple :

♦ « "La terre est bleue comme une orange" » (Paul Eluard)


♦ « "Ma femme à la taille de loutre" » dans « Union libre » d’André BRETON

IV – Principaux auteurs et œuvres surréalistes

◊ Essai : Manifeste du surréalisme de Breton


André Breton écrit le Manifeste du surréalisme en 1924 pour donner une définition
du surréalisme.

La publication de cet ouvrage marque l’avènement du mouvement surréaliste dont Breton


sera vu comme le chef de file.

Breton définit le surréalisme de façon académique :

" « Automatisme psychique pur par lequel on se propose d’exprimer, soit verbalement,
soit par écrit, soit de toute autre manière, le fonctionnement réel de la pensée. Dictée de
la pensée, en l’absence de tout contrôle exercé par la raison, en dehors de toute
préoccupation esthétique ou morale. »"

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A travers cette définition, Breton rend hommage à l’imagination et pose les principes de
l’écriture automatique.

◊ Roman: Nadja de Breton


Le roman Nadja d’André Breton est très représentatif du l’esprit surréaliste.

En effet, la rencontre avec Nadja, une femme imprévisible, mystérieuse, qui sera
internée dans un hôpital psychiatrique à la fin du roman, incarne pour Breton l’expérience
surréaliste.

Nadja représente l’imaginaire qui résiste aux codes imposés par la société.

Le roman en lui-même est inclassable : il mêle récit de la rencontre avec Nadja,


réflexions théoriques et photographies prises par Breton pour illustrer les lieux et les
objets décrits.

◊ Poésie: Eluard et Aragon


On retiendra particulièrement deux grands poètes surréalistes : Paul Eluard et Louis
Aragon.

Dans L’Amour la poésie (1929), Paul Eluard fait naître un monde nouveau qui naît d’un
choc de mots qui se rencontrent. Par exemple, le célèbre vers « "la terre est bleue
comme une orange "» illustre cette rencontre inattendue de deux mots « bleue » /
« orange ».

Les yeux d’Elsa (1942) de Louis Aragon est de facture plus classique mais Aragon
dessine une femme aimée qui contient en elle le cosmos (le monde). On retrouve cette
divinisation de la femme aimée dans des recueils ultérieurs comme Roman inachevé
(1956) et Fou d’Elsa (1963).

◊ Peinture et cinéma
Le surréalisme dépasse le cadre de la littérature et s’exprime notamment en peinture et
au cinéma. Les peintres surréalistes sont nombreux : Magritte, Salvador Dali, Max
Ernst, Man Ray, Giorgio Chirico…

Le réalisateur Luis Buñuel fait des films surréalistes.

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