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La stratégie nationale contre la pauvreté peine à donner des résultats

Le ministère des Solidarités et de la Santé a présenté vendredi les premiers éléments d’évaluation de sa
stratégie nationale de lutte contre la pauvreté. Force est de constater que beaucoup reste à faire,
notamment sur l’accès aux informations et aux démarches.

publié le 2 avril 2021 à 20h45

En septembre 2018, le président de la République Emmanuel Macron présentait la Stratégie nationale de


prévention et de lutte contre la pauvreté. Deux ans après, il est évident que la crise du Covid-19 retardera
les avancées tant attendues, et ce, notamment en matière d’accès aux droits sociaux.

France Stratégie, chargé du Comité d’évaluation de ce plan d’action, estime dans un rapport publié
vendredi que parmi les 35 mesures de prévention et de lutte contre la pauvreté définies, seules quatre ont
été intégralement mises en œuvre. Il s’agit de la revalorisation de la prime d’activité, de la mise en œuvre
et du renouvellement de la complémentaire santé solidaire pour les allocataires du RSA, et du
déploiement de 400 points conseils budget.

Etat d’avancement très inégal

Deux des 35 mesures ont quant à elles été abandonnées : le soutien des collectivités à soixante quartiers
prioritaires (avec deux adultes par classe de maternelle), et les expérimentations relatives à l’utilisation
de la Garantie jeunes (accompagnement pour les 16 à 25 ans en situation de grande précarité vers
l’emploi ou la formation). Enfin, les 29 mesures restantes présentent un état d’avancement très inégal.

Faute d’indicateurs pertinents clairement identifiés, il est encore tôt pour évaluer les effets des diverses
mesures. «La lutte contre la pauvreté est un effort de longue haleine et les mesures doivent s’inscrire
dans la continuité. Ainsi, elles ne produiront pas toutes leurs effets à l’horizon 2022», explique Louis
Schweitzer, président du comité d’évaluation.

L’action du gouvernement en la matière s’articule autour de cinq piliers : la petite enfance et l’éducation,
la santé, l’accompagnement à la formation et l’emploi, le logement et la valorisation des droits sociaux.
Toutefois, France Stratégie suggère de faire du «non-recours aux droits sociaux» un point d’attention
particulier. En effet, aujourd’hui, une personne sur trois éligibles à l’octroi de prestations sociales n’en
bénéficie pas faute de les solliciter. Pour Louis Schweitzer, «ce non-recours est lié à la complexité, à la
multitude et à la lourdeur des démarches, à l’heure où la fracture numérique n’arrange rien».

Difficultés à trouver des informations

Ce problème persistant auquel font face de potentiels ayants droit suffit à mettre en lumière les failles des
politiques publiques de lutte contre la pauvreté. «En 2020, nous avons reçu 26 013 personnes sur nos six
sites sur Paris avec 56 777 demandes différentes», détaille Paula Harker, directrice de l’association des
Points information médiation multi services de Paris (Pimms). Ces centres destinés à faciliter les
relations entre les Parisiens et l’administration accueillent principalement une population âgée de 25 à 40
ans «qui a du mal à trouver l’information sur ses droits ou du mal à s’exprimer correctement, ajoute
notre interlocutrice. Nous accueillons de nombreuses personnes découragées par la complexité des
démarches ou par les erreurs d’appréciation de leur situation de la part de l’administration.» Celles-ci
font

rarement recours des décisions car elles ne se sentent pas légitimes. «Les principales demandes
d’assistance que nous recevons sont celles liées à l’Assurance maladie, aux allocations familiales, et aux
démarches auprès du ministère de l’Intérieur», confie aussi Paula Harker.

Pour avancer dans les objectifs de la stratégie, France Stratégie prône l’automatisation des démarches
pour la délivrance des prestations sociales. De même pour la généralisation du datamining, une méthode
qui analyse les données des personnes précaires afin de repérer les personnes éligibles et de les contacter.
Enfin, dans cette même logique, France Stratégie encourage à étendre sur l’ensemble de l’Hexagone des
initiatives telles que les «Territoires zéro non-recours», lancées d’abord à Bastia (Haute-Corse) en
janvier, puis à Paris en mars.

Pour la directrice des Pimms, l’objectif «zéro non-recours» annoncé dans le cadre de la stratégie
gouvernementale de lutte contre la pauvreté devra résolument être vu comme un processus et non comme
un acquis pour 2022,

et ce, d’autant plus avec l’arrivée de la crise du Covid-19. «En 2020, avec le premier confinement, nos
services ont été bouleversés. On doit aujourd’hui respecter le protocole sanitaire, ce n’est donc plus
possible d’accueillir toutes les personnes, d’où une diminution de 44 % du taux de fréquentation de nos
Pimms entre 2019 et 2020», regrette-t-elle.

https://www.liberation.fr/societe/familles/la-strategie-nationale-contre-la-pauvrete-peine-a-donner-des-
resultats-20210402_LU7PQYAJCNCI3CLZOVKWSML3WI/

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