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ES RO.IS D·lJ D1-\-MOMEV
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PAR t-:i.::m.'fl!
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Bulletin de l'Institut' Fran . ,çais d'Afrtq.ue fij�ire f\t,� l.,\,'\'1 ri'�
in-.8°, triroêstriel. Str{e A , Sëie_nce$ r-rôt4/�Hes,
Aw»A�e.RE All'A,NOË t"rn:•,n:.i'
abc,>nnement amry�I, 60 N i; m�tr�; Ser.le B-: ,.,, ,\S i'lf�.
SeleoG:èS humaln:es, 3é N fJ mètr.0.
Note.s Af1kaines : Bulleti.!l g�i!'lformatioQ ,et
de correspondance de l'IF'Ali:;I, rn,4�, trim.es­
· el, 10 � F. m�t'rc;i.
triel, abonnement annu
Souscriptions O.\!X périodiqu.e� :, lf!AN, C G. P
CfoRar n• �sx'.200,

SÉRIES S1'NS PÉRIOQIGIJ'É FüŒ


Mémoires de l'Institut Fraoçais d!(A.frique Noirce
Î[l-4°.
loitl_gtions afric·aines, in•-Bo
lnstru)lt· ions �'Ommoires, in-,8Q,
Cat�Lo.gues, iff-'80.
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1 Qccidental�, i-n,,i•.
lcones. Pl.arttarum African·arum, in:;4•

DiffusiQn el(clusive , lîbrairigi e:LAIR,AF�{.QUE.


2, riue Sandinféry, B.. P 2005, Dakar (-Sénégel:),

1962
INSTITUT FRANÇAIS D'AFRIQUE NOIRE

LES RECADES
DES ROIS DU DAHOMEY
PAR ---.....
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ALEXANDRE ADANDE . ?'i:\1JilXAU
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L-ANCIIJN A)oyAUNE 1W ])AHONE.
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INTRODUCTION

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• Au cours d'un stage au Musée de l'Homme à Paris, Mme Denise

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Paulme, chargée du Département de l'Afrique noire, avait bien voulu
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1

m'orienter vers l'étude des récades des rois du Dahomey dont le Musée
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'•, possédait un grand nombre d'exemplaires, hérités de l'ancien Musée
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•,• du Trocadéro et datant, pour la plupart, d'avant et d'aussitôt après
:
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t la conquête du Dahomey.
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L'authenticité de ces pièces ne souffre donc pas de doute.
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? -t" NAGO J'en avais fait l'étude morphologique sur place tandis qu'au cours
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de congés successifs, je m'étais efforcé de recueillir, au Dahomey, et
' � à Abomey notamment, des renseignements sur l'usage sociologique

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Ro!Jt9(Jme \ et, en particulier, sur la signification des symboles de ces attributs
At,omey
� royaux. J'ai, naturellement, étendu le champ de mes études à la col­
:
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Pays ·� • KETOU lection complète des récades du Musée dynastique d'Abomey. La
:A.D.TA
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tâche n'a pas été aisée, car les explications de certains emblèmes ne
1
1
1
•, se ressemblent pas toujours d'un informateur à l'autre. Nous avons
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dû procéder à de nombreux recoupements soit à Abomey même, soit
r dans un autre centre, à Allada notamment. C'est ce qui explique le

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1
retard de la publication de ce travail. Nous croyons, à présent, pou­
• 1
voir livrer le résultat de nos investigations au public en espérant que
• 1

ceux que la question intéresse nous aideront, s'il y a lieu, à combler


• 01<,oc/4n
les insuffisances ou à corriger les erreurs d'interprétation.
D'avance, je leur en exprime mes remerciements.
Je prie Mme Denise Paulme qui a suscité cette étude et tous mes
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informateurs, en particulier, le vieux Sagbadjou Glélé ( 1) pour ce qui
concerne le rôle social et le symbolisme des récades, MM. Ohoundo
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et Gbélidji, chefs d'orchestre de Hùgà, pour ce qui est relatif aux
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I'

� fonctions des tam-tams dans l'ancienne cour dahoméenne et M. Clé­


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\ -� ment da Cruz dont l'aide m'a été précieuse pour compléter mes infor­
"' mations sur les récades du Musée historique d'Abomey, de trouver ici
� l'assurance de mes remerciements reconnaissants.
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(1) Notre principal informateur Sagbadjou est le fils du roi Glélé et le frère
du roi Béhanzin. Il avait environ 87 ans en 1960. Il est gardien du Musée dynas­
tique d'Abomey.
Polygame et père d'au moins 8 enfants en 1947, il fut accesseur du tribunal
indigène. Il est, au surplus, bokono ou devin.
- IO - II -

Avant d'entrer dans le vif du sujet, nous pensons que la con­ même mère) trouve probablement sa signification dans les anciennes
naissance du cadre géographique des migrations et un aperçu histo­ règles d'union endogamique violées par l'ancêtre royale : kpo, pan­
rique du peuple dahoméen nous aidera à mieux saisir, entre autres thère mâle.
choses, sa psychologie. Quant à la quadruple naissance faisant suite au mariage d'Adowi
On appelait Danhoménou ou Dahoméens, les seuls habitants du avec le roi de Tado, elle signifiait, vraisemblablement, l'héritage com­
plateau d'Abomey, les sujets du Roi. plexe des multiples prescriptions et tabous coutumiers qui résultaient,
Le royaume comprenait, à l'origine, le quadrilatère formé par pour les fils d'Adowi, d'une quadruple descendance ancestrale.
l'Ouémé à l'Ouest, le cours supérieur du Koufo à l'Est, les marais de Lorsque Agassou, cet être mi-homme, mi-animal et fils illégitime,
la Lama au Sud et les Mahis au Nord. au regard de la loi endogamique, fut devenu grand, aucune fille de
Par des conquêtes successives, il s'étendit de la mer jusqu'au pays Tado ne voulut l'épouser. Sa mère fut obligée de lui donner en mariage
Mahi. En effet, les royaumes de Juda, capitale Savi, d'Ardres (Allada), une de ses propres tantes. De cette union, Agassou eut une nombreuse
de Jakin (Godomé), de Cana, et les pays Mahi furent absorbés les uns progéniture.
après les autres. Lors de la succession au trône du roi de Tado une violente que­
Mais, d'où viennent les Fon, actuels habitants d'Abomey ? relle éclata entre les descendants légitimes des rois et les descendants
Selon une légende rapportée par le R. P. Bertho ( 1) « Une femme d'Agassou. Ceu x -ci triomphèrent de ceux-là en tuant l'héritier pré­
de Yakaki (village situé près de Tori) nommée Adowi se réfugia à somptif. Mais redoutant une sanglante répression des partisans de leur
· Tado avec son fils aîné Agbota qu'elle avait eu avec un homme de son victime, ils résolurent de s'enfuir. Leur chef de file, dans un accès de
village natal. Elle devint femme du roi de Tado. colère, brisa une calebasse sur le sol en proférant:« Je ne boirai jamais
Un jour qu'elle allait ramasser du bois de chauffage dans la forêt, plus dans une calebasse coupée à la mode des Adja n, c'est-à-dire sui­
elle se trouva en présence d'une panthère mâle qui sauta sur elle et vant la ligne des pôles. Ce serment est encore respecté de nos jours par
elle conçut de ses œuvres. Au terme de la grossesse Adowi accoucha les membres des familles princières d'Abomey.
r 0 d'une véritable petite panthère qui s'enfuit aussitôt dans la brousse, La tradition signale qu'en quittant Tado, les, fugitifs empor­
2° d'un petit être semi-humain, semi-fauve qui reçut le nom d'Agas­ tèrent les deux têtes des serpents sacrés, protecteurs du pays. Serait-ce
sou; 3° d'un petit garçon normalement constitué, prénommé Goun; une vengeance sacrilège ? Il faut plutôt croire, à notre avis, que ces
4° d'une paire de colombes blanches dont la possession fut gardée deux têtes de serpents représentent, symboliquement, les crânes des
secrète par les descendants d'Agassou et dont l'héritage devait devenir J. ancêtres des descendants d'Agassou du côté maternel. En effet leur
plus tard la garantie de la validité de la succession au trône d'Abomey. grand-mère est de Tori, dont elle est Houéda, c'est-à-dire adoratrice
Cette union, qui, au prime abord, apparaît monstrueuse, signi­ du Dangbé ou petit pithon ; leurs partisans, descendants des « pla »,
fiait, en réalité, une simple violation d'un interdit matrimonial par le vénèrent le gros pithon (Doglo fensou), Ici encore, il n'est point dou­
roi de Tado représenté par la panthère mâle. Nous sommes, sans nul teux que par-delà le culte des serpents nous ne soyons, en réalité, en
doute, en plein symbolisme. En effet, dans une société sans écriture, présence du culte des ancêtres ; par ailleurs, Aïsoun ou cérémonie pour
le nom d'un ancêtre célèbre risquait d'être oublié et inconnu de la honorer les crânes des morts prend une grande place dans les rites
postérité en raison des déplacements nécessaires ou des séparations ·funéraires pratiqués par les goun descendants d'Agassou.
inattendues et lointaines, sources des variations du langage; afin de Les rebelles s'enfuirent en direction du SE et allèrent s'établir
mieux conserver le souvenir de cet ancêtre, on lui impose un surnom à l'orée d'une forêt, au pays des Aïda, du nom de l'ancêtre divinisé
merveilleux ; généralement ce sera le nom d'un animal et ce choix sera du lieu. C'est Allada de nos jours, le royaume d'Ardres connu des
déterminé par la ressemblance physique ou morale de l'aïeul avec Français au xv1e siècle.
l'animal. Ce dernier devient dès lors l'emblème symbolique de l'an­ Là, au bout de quelques générations, les descendants d'Agassou
cêtre comme de toute la collectivité familiale et ce sont les marques réussirent à s'imposer à tous leurs voisins et, dès qu'ils se sentirent
caractéristiques de l'animal totem qui serviront de motifs aux ta­ sùffisamment forts ils accaparèrent le pouvoir et la direction des
touages des membres de cette collectivité. Telle est l'explication des affaires du pays. Ils divinisèrent l'ancêtre prestigieux qui guida leur
4 mouchetures rappelant les griffes de la panthère qui ornent les exode Adja Allada sous l'appellation d'Adjahouto. Mais vers 1610,
tempes des princes d'Abomey. dit l'histoire moderne, à la mort du roi Kokpon ses 3 fils se dispu­
Le privilège du libre choix de leur mari dont jouissent les princesses tèrent le trône. Le second défit ses frères et prit la succession, l'aîné
de cette région (elles peuvent se marier avec leur frère non issu de la .; Téagbalin se réfugia au pays de sa mère avec ses partisans Goun et
fonda Hogbonou, Adjachè des Yoruba et, plus tard, Porto-Novo des
(r) Agbo�i (alias BERTHO R. P.). La légende d'Agassou et son interpréta­ Portugais. Le plus jeune, Dogbagri, remonta vers le Nord en tra­
tion, Afrique Nouvelle, 1949. versant les marais de la Lama et, avec ses partisans, atteignit le pla-
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teau où devait s'élever la célèbre capitale Abomey (dans la forteresse Plus que la crainte de châtiments, les faveurs que le roi attachait
ou ville forte). Là, Agri puis Dan concédèrent aux émigrants de vastes à l'exercice des arts et l'espoir aussi de grandes récompenses - dons
terrains. A une nouvelle demande de terrain, formulée par Ouég­ de fiefs, puis des esclaves pour cultiver, chasser, pêcher ou tisser pour
badja, leur chef à cette époque, Dan refusa : << Voulez-vous, lui répliqua­ eux, gratuité des guérisseurs choisis pour soigner leurs familles, ano­
t-il, vous établir jusque dans mon ventre ? l> Ouégbadja prit cette blissement par le mariage avec des princesses, tous ces privilèges
réponse pour une entorse à la loi de l'hospitalité. Il fit tuer Dan et royaux avaient eu pour conséquences heureuses de faire refleurir les
j eta sa dépouille dans les fondations du palais qu'il dénomma Dan­ arts du royaume tout en développant chez les artisans une habileté
homé : (Dans le ventre de Dan). Ce fut d'après la tradition locale et une conscience professionnelle hors de pair.
l'origine du nom du Royaume et de ses habitants >> ( 1). Mais, créé par la volonté des princes et des rois et par eux seuls,
Fortement établis sur le plateau d'Abomey, les Alladahonou se l'art qui se pratiquait au sein de ces différentes corporations fut essen­
rendirent définitivement maîtres du pays. Déjà, sous le gouvernement tiellement officiel. Les artistes - car ici, on ne peut pas séparer l'art
habile et fort des rois, le pays s'était rapidement agrandi. Ceux-ci de l'artisanat - travaillaient à une inspiration commune. Et cela
réussirent à donner aux royaumes unifiés, défendus par une armée explique pourquoi l'art local, que ce soit les productions du sculpteur,
permanente forte et dont la puissance s'augmentait sans cesse, une celles du brodeur ou du bijoutier, traduit exactement l'esprit, le goût
organisation solidement charpentée et une administration hiérarchisée. et le caractère dominants des dynasties royales, · et aussi pourquoi cet
Les rois vivaient dans le faste et l'opulence des palais qui s'étendaient art a exercé son action dans des l imites étroites.
sur plus de 40 hectares. Ils y entretenaient une foule d'artisans exclu­ Tous ces premiers artisans furent les maîtres incontestés du style
sivement chargés de fabriquer les objets d'apparat qui firent la splen­ particulier de l'art dahoméen. Mais, de même qu'Ifé, métropole reli­
deur de la cour. Chaque métier était exercé par des spécialistes et se gieuse et artistique Yoruba inspira le magnifique art du Bénin, de
transmettait de père en fils. même, il est impossible de ne pas percevoir l'influence d'Ifé sur l'art
Les Yémadjè confectionnaient les costumes royaux, passaient des dahoméen. Le mérite des artisans d'Abomey est d'assimiler et non de
journées entières à historier de leurs mains les franges des grands para­ subir l'influence bienfaisante d'Ifé, au point de parvenir à imprimer
sols et les pagnes destinés à l'usage du « maître de l'aurore ». à leurs productions un cachet personnel qui fait précisément l'origi­
Les Jinflou et Zankan tissaient de magnifiques étoffes pour les nalité de leur art.
cérémonies religieuses. Les Jotowou confectionnaient des sandales, Parmi les nombreuses manifestations de cet art, notre étude est
insignes royaux, des coussins, des sacoches, habillaient les amulettes axée sur l'une d'entre elles, qui, si elle n'en est pas la plus représenta­
ou les corbeilles de cuir brodé. tive, demeure du moins un type d'art profane (mais fonctionnel), carac­
Les Hountondji fabriquaient des bijoux de bronze, d'argent et tère qui paraît rare dans l'art négro-africain, généralement considéré
d'or, les Attoja, les grelots de cuivre pour l'ornement des tambours, comme étant d'inspiration religieuse.
les Agbozo ciselaient ou pyrogravaient de grandes calebasses qui ren­ Pour un peuple sans écriture, l'intérêt de ces pièces, les récades,
fermaient les mets et les boissons pour le service des hauts dignitaires réside en ce qu'elles constituent, dans une certaine mesure, un abrégé
ou des Blancs qui visitaient le royaume ; les « Alagbé >, fixaient sur de l'histoire du pays, qu'elles permettent, grâce à leurs images et à leur
des bâtons de commandement, les allégories; tout comme eux, les· symbolisme, d'imaginer, aujourd'hui, ce que fut la vie de la cour avant
« Assogbakpé » modelaient des bas-reliefs et donnaient à leurs images l'occupation française, et qu'elles nous renseignent sur quelques
un langage mystérieux seulement pour le commun des Dahoméens. aspects de la mentalité de nos ancêtres : c'est donc un accès de l'âme
africaine que nous livrent ces productions. Chaque attribut étant un
idéogramme ou l'expression allégorique d'une idée, d'un fait ou d'un
(1) Malgré le côté ingénieux de cette légende l'honnêteté historique nous événement important, il devient une forme originale de fixation et de
oblige à signaler que plus d'un siècle avant l'avènement de Ouégbadj a (1650-
80) cette appellation figurait dans les documents anciens écrits. En effet, Léon transmission de la pensée ou des sentiments. Et, ce mode d'expression
l'Africain qui parcourut le Soudan vers 1507 mentionna le royaume de Dauma était profondément entré dans les mœurs puisque aussi bien nous en
dans ses récits. Thevet, dans sa cosmographie universelle, mentionna la ville et retrouvons la preuve dans les motifs de décorations des bagues, cale­
le royaume de Dauma dès 1575 ; de plus, la carte intitulée « Guinea » de Joann�s basses, tentures, sandales, bonnets, oreillers, parasols, pagnes, bas­
Jansenius publiée à Anvers en 1627 porte le nom de la ville et du royaume de
Dauma ou (Dahouma) au N d'Arda et à l'E de la Volta, c'est-à-dire à l'empla­ reliefs, et dans tous les objets royaux d'usage courant. Sur certains de
cement du Dahomey actuel. ces objets on peut deviner le costume, les attitudes et les apparences
Mais nous sommes à nous demander sur quoi s'était-on basé pour fixer l a " des gens du Dahomey en remontant jusqu'au xvn e siècle.
date d e l'exode des 3 princes d'Allada en 1610 ? Car toute l a chronologie du Les récades nous livrent également sous une forme imagée les
règne des rois du Dahomey est basée sur cette précision. L'énigme, quant à devises des rois.
nous, reste en.tière. Et, faute de documents locaux écrits, nous ne pouvons que
formuler des réserves. Mais qu' est-ce qu'une récade ? Le mot vient du portugais : recados
- r4 - - 15 -

qui veut dire messager. En effet, les récades sont des emblèmes d'auto­ par des ovations de la foule qui se prosterne et se couvre la tête de
rité servant à authentifier un récadère, porteur de la récade ou mes­ poussière pour marquer le respect qui est désormais dû au bâton royal.
sager . On pourrait la comparer au massier du moyen âge ; mais tandis A partir de ce moment, la récade royale, caractérisée par un
que les masses procédaient de la massue antique, la récade dérive emblème généralement en ivoire ciselé et exclusivement réservée à
d'un bois coudé qui fut la houe primitive. Avec le trône, le grand para­ Sa Majesté, devient un objet de vénération dont aucun commun des
sol, les sandales, la récade constitue un sceptre, un insigne de comman­ mortels ne doit se servir. Seul le prince présomptif peut en hériter.
dement et d'autorité, un attribut royal. Elle porte les armoiries de son Le roi la porte généralement sur l'épaule gauche, la hache tournée vers
éminent propriétaire, quelquefois représentées par un animal ou par le sol, lorsqu'il apparaît en public. Il la tient ou la brandit de la main
un véritable rébus. droite au cours des danses royales pour marquer le rythme.
Sous le règne de Ouégbadja (1650-80 ?) les guerriers avaient pour
arme un bâton légèrement recourbé, à l'une de ses extrémités enflée
RÔLE SOCIAL DE LA RÉCADE.
et garnie d'un anneau de fer. Au temps du même· roi, des cultivateurs,
affectés au service du souverain maître furent surpris en plein tra­
vaux champêtres par des ennemis en nombre. Pour se défendre, les Les récades ordinaires, celles à armoiries d'argent, de cuivre ou
cultivateurs retirèrent le fer de houe, engagèrent le combat et réus­ simplement en bois sculpté, tout d'une pièce, servent à conférer au
sirent à mettre les envahisseurs en déroute rien qu'en se battant avec représentant ou au messager du roi, le récadère, une mission impor­
cette arme improvisée, le manche de houe. A partir de cette victoire tante ou une autorité considérable. La présence de la récade équi­
historique, cet outil fut inclus dans la série des armes de guerre du valait à celle du roi lui-même.
royaume. Il semblerait que c'est à partir de cette époque qu'on ima­ L'abbé Bouche, dans son ouvrage << La Côte des Esclaves et le
gina de sculpter ou de fixer sur un bâton plus ou moins coudé à l'un des Dahomey >> publié en 1885, écrit à propos de la récade : << Le Noir de
bouts (à l'imitation d'un manche de houe) des allégories, armoiries ou la Côte des Esclaves emploie le bâton comme carte de visite pour
emblèmes pour commémorer les faits saillants. saluer ses amis, il en fait une lettre de créance pour recommander ses
Le bois employé à cet usage est choisi en raison de sa dureté et délégués, le remet à son fondé de pouvoir comme titre authentique de
de son imputrescibilité; généralement c'est « kaké », bois rouge, extrê­ sa procuration, au voyageur comme sauf-conduit et garantie. Le bâton
mement dur qui a la préférence des sculpteurs. Il n'est travaillé qu'une vaut plus qu'une signature ; il en tient lieu, et de plus, il est la person­
fois mort et sec car, à cet état, il ne se fendille plus. On utilise éga­ nification de celui qui l'a remis. A la signature on accorde une auto­
lement d'autres bois, tels que Iroko, ou Caïcédrat, bois blanc dit Péti. rité morale que l'on peut souvent contester ; au bâton on est obligé,
Parfois, après le travail du sculpteur, la récade est remise à un for­ en tout cas, d'accorder les marques extérieures du respect que l'on
geron ou à un bijoutier (famille Hountondji) qui l'orne de motifs doit à la personne du Maître. >>
d'ivoire, plaques, pièces, garnitures en filet d'argent ou de cuivre; L'obligation d'envoyer plusieurs commissions ou ordres à la fois,
ces motifs sont exécutés suivant les indications du roi. C'est généra­ commande d'avoir une série de récades pour messagers du même roi.
lement sur le métal forgé quand ils ne sont pas exécutés dans la masse Entre rois, il n'est pas d'usage d'échanger des << récadères » ou
du bois, que sont gravés les symboles ou allégories qui ont un double porte-bâton de commandement. Il existait des ministres chargés d'en­
but : expression de sentiments et ornementations. Sans tarder, des tretenir les relations entre des royaumes déterminés. Ce sont eux
influences européennes apparaissent dans le choix de certains éléments seuls qui transmettent les messages d'un roi à un autre. Pour le
décoratifs, tels que rosaces, croix, ancre de bateau, casques, costume, royaume de Porto-Novo c'était Agbassagan qui jouait ce rôle sous le
etc... règne de Toffa.
Une fois la récade terminée, l'artisan s'assure que les détails de Au début de l'installation française, le gouvernement recevait
l'ornementation comme ceux des symboles sont bien agencés pour des récadères qui venaient de très loin pour traiter des affaires impor­
répondre à l'expression de la pensée ou de la devise royale. Ce contrôle tantes ou lui exposer des demandes ou des réclamations, solliciter sa
opéré, il enveloppe soigneusement son ouvrage dans un tissu avant de protection ou lui donner des renseignements confidentiels, parfois
le présenter au roi. Méhou, ministre des Affaires étrangères, chargé lui présenter des hommages ou des promesses d'amitié de la part des
de la sécurité du royaume, ordonne à l'artisan de s'accrocher la récade rois dont les territoires étaient situés au-delà des frontières. Le gou­
autour du cou, à l'épaule, devant lui, afin de s'assurer que son ouvrage vernement savait qu'il pouvait au « récadère n répondre en toute sécu­
n'est pas empoisonné. Cette épreuve passée, l'objet est consacré. Le rité et que ses paroles seraient fidèlement transmises sans qu'aucune in­
roi, averti, se porte alors devant son peuple réuni pour la circonstance. discrétion soit jamais redoutée. Cette méthode qui consiste à remplacer
Il brandit la récade en l'air de la main droite, en proclame l'authenti­ le message écrit par le dialogue verbal épargne beaucoup de temps,
cité et donne ie sens des allégories. La fin de l'explication est accueillie beaucoup d'encre et offre sur les correspondances des avantages au
- 16 -
f"'
- 17 -

point de vue des résultats pratiques immédiats puisque le récadère est mariage, guerre ou paix. L'activité de ces envoyés revêt un caractère
1 officiel, leur choix est important, car ils doivent être respectables,
investi de plein pouvoir, les questions et les réponses, les objections
et les répliques peuvent s'échanger en l'espace de peu de temps. jouir de l'estime générale, être des hommes de savoir et d'éloquence,
Il y a d'autres avantages attachés à la récade royale. Exemple : capables de s'exprimer dans les dialectes étrangers.
vous êtes en voyage et vous vous êtes aventuré, sans escorte, dahs une « Ces délégués ont déjà dans la société primitive un statut par­
région encore peu fréquentée. Vous courez le risque d'être reçu non ticulier qui consacre l'immunité et souvent le caractère sacré de leur
seulement avec défiance mais peut-être avec hostilité et vous vous personne. Des objets divers, le fameux bâton de messa ger, par exemple,
rendez compte que le moindre incident, la plus petite maladresse vous couverts de signes conventionnels ou symboliques, authentifient le
mettra en péril sérieux. Obtenez que le roi ou le chef vous fasse accom­ message transmis verbalement, mais servent surtout de passeport,
pagner par son << porte-bâton ,>. Cela suffira pour que toutes les portes de lettre de créance au porteur. >>
des cases vous soient ouvertes, pour que tous les sourires vous accueil­ « La paix est désirée par l'instinct social:- l'établissement de
lent enfin, pour que vous soyez considéré comme un ami au lieu d'être conventions destinées à maintenir l'ordre et l'application des règles
regardé de travers comme un suspect. internationales ont exigé des hommes une œuvre de patiente et lente
Ne voilà-t-il pas une institution utile et efficace ? Combien supé­ élaboration, mais les bases sont connues dès la vie la plus primitive.
rieure, serait-on tenté de penser, « aux notes diplomatiques, aux pas­ Les racines de la diplomatie se trouvent donc, non en Orîent ou en
seports et aux feuilles de route ». Méditerranée, comme il a été trop souvent affirmé, mais aussi chez
L'ouvrage de M. Paul Hazoumé, intitulé Doguicimi, rapporte des les peuples d'Australie, d'Afrique ou des rives du Pacifique. L'envoi
épisodes émouvants de la guerre de Kinglo, entreprise par le roi Ghézo de messager, le règlement des disputes, les traités, les unions appa­
pour venger le personnel européen d'une mission anglaise assassiné par raissent dès le début de la culture. ,>
les Mahi malgré l'escorte du récadère d'Abomey : tout affront à une « Les mêmes institutions, les mêmes tendances, se retrouvent
récade est considéré comme un défi que le propriétaire doit tenir à chez les peuples qui apparaissent à l'aube de l'histoire. »
honneur de relever immédiatement. Dans un chapitre final Numelin Ragnar résume l'évolution de la
diplomatie antique et moderne, puis l'apparition d'un système de rela­
* ** tions internationales constantes : le passage des envoyés temporaires
d'autrefois, aux ambassades permanentes. Il rappelle les efforts des
Des considérations qui précèdent, il ressort que l'usage des récades hommes depuis la recherche primitive d'une organisation · intertri­
dans les relations intertribales, révèle chez nos rois, un sens de la tech­ bale, jusqu'aux tentatives contemporaines, pour élaborer un système
nique diplomatique, la diplomatie étant entendue comme moyen paci­ de règlement des affaires internationales qui permettent d'éviter des
fique de résoudre les disputes entre peuples autonomes. conflits sanglants.
C'est ce que démontre Numalin Ragnar dans son important Cette étude qui émane d'un sociologue de renommée prouve,
ouvrage : « The beginning of the Diplomacy. A sociological study of encore une fois, que les institutions sociales initiales puisent leur
intertribal and international relations. ,> « L'organisation politique source dans . un fonds spirituel commun qui reste celui de la race
existe, précise l'auteur, lorsqu'il y a une union organisée d'individus humaine.
dans un territoire délimité qui se sentent unis par leurs coutumes, ou
leurs institutions. ,, ** *
L'auteur passe de l'examen de la coutume, à l'étude des diverses
formes du droit privé et des débuts du droit international, et par Le récadère ou messager de la cour (Huî-sagu) du roi Ghézo s'ap­
conséquent de la << diplomatie qui apparaît dans les relations inter­ pelle Sèlinoho. Quand il arrive à destination, il s'accroupit devant
tribales ». « En effet, dit-il, si le terme « droit international » a été uti­ celui qui reçoit le message, retire la récade de son étui de tissu et le
lisé en premier lieu par Bentham, la chose remonte loin et apparaît présente respectueusemen.t. A l'emblème de la récade, l'interlocuteur
dès qu'il y a contact entre deux tribus indépendantes. L'absence d'un reconnaît l'envoyeur ; aussitôt lui aussi s'accroupit en signe de défé­
système coordonné de lois internationales n'exclut pas l'existence de rence et écoute attentivement le message du roi.
certaines règles de cèmduite qui régissent la condition de l'individu Avant le retour du récadère, l'interlocuteur peut faire des dons
en tant qu'étranger et hôte et s'étend rapidement aux questions à la récade (volailles, pagne de valeur, caisse de gin ou d'autres bois­
intertribales, la guerre, la paix, la religion, le commerce, etc. sons, etc.) que le messager aura pour mission de rapporter a:u roi.
« Le souci de maintenir des rapports de bon voisinage prédomine Ces dons sont reçus à l'arrivée par Méhou, spécialement chargé de
en beaucoup d'endroits. Aussi les premiers diplomates furent-ils les transmettre les commissions au roi.
envoyés oc·casionnels chargés de discuter les affaires tribales: chasses, Mais si les coursiers aztèques, tantôt fournissaient à la cour de
T ..� 0,1_,,.,1,.A
- 18 - · - 19 -

Montezma des mets variés, tantôt apportaient les nouvelles des vic­ �'un des bataillons de guerre le plus valeureux du roi Glélé a
toires ou des défaites, certains messagers des rois du Dahomey étaient nom Sa Se dô ku. Ses chefs sont Atàsoko et Chabi. La récade, insigne
spécialement chargés d'espionner les voisins, de reconnaître les forces de ce bataillon, porte comme motif de décoration un oiseau au bec
dont dispose l'ennemi, l'importance démographique des régions visi­ puissant.
tées et dont ils avaient, quelquefois, pour mission de dresser la
carte. Récade insigne du dieu Hèbiosso ou dieu de la Foudre (Tonnerre) ( 1) .
Un nouvel adepte du Dieu de la Foudre, après avoir achevé le
stage initiatique dans le couvent, reçoit obligatoirement avant sa
AUTRES SORTES DE RÉGADES. sortie, l'emblème deson « patron » » (cf. M. H. n° 27.8.10). Le dieu peut
choisir indistinctement un vieux ou un jeune comme néophyte, mais
Récades insignes des armées. Certaines récades sont des insignes la récade varie selon l'âge et le grade dans la hiérarchie des prêtres.
distinctifs des bataillons. Les caractérisant, elles rappellent un fait La récade portant comme motif décoratif un zigzag en cuivre sym­
saillant, généralement des exploits guerriers de chaque bataillon. Le bolisant l'éclair se porte en exclusivité par les hùbono, c'est-à-dire les
jour où le roi paraît avec une récade désignant un bataillon donné, chefs de culte de chaque clan ou dieu de la Foudre (cf. M. H. n° 34.104.1
tous les soldats de ce bataillon lèvent leur fusil en l'air : il sera de ser­ et Ab 45.2.80). Hèbioso ou Tsàgo en yoruba est un dieu d'impor­
vice ce jour-là. tation au Dahomey. Il serait venu d'Abéokuta, importé par les devins
ou grands chefs de culte de ce pays faits prisonniers au cours des
guerres contre les Yoruba. De tels prisonniers sont entretenus par le
roi à Abomey à cause de leur grand savoir. (Le feu Guédégbé, l'un des
devins qui a vécu jusqu'à nous, en est un exemple typique). Chez les
Yoruba, l'insigne de prêtre de Tsàgo s'appelle osè.
� De nos j ours, le commun des mortels porte une récade en
guise de bâton de parade. Chacun peut se la faire fabriquer en pré­
cisant au sculpteur ou au forgeron les symboles ou allégories de son
choix. Il n'est pas superflu de faire remarquer que les artisans actuels
n'y apportent pas autant de fini que ceux de jadis.
Ces récades portent le nom de Aglokpo. Aglokpo est porté sur
l'épaule gauche, la partie coudée tournée vers le sol. Brandie en l'air
ou tenue de la main droite elle sert à marquer le rythme au cours des
danses.

QUELQUES BATONS AUTRES QUE LES RÉGADES.

Kpota est un bâton utilisé par Migan, ministre des grandes œuvres
comme assommoir. Ce mode de massacre est réservé à ceux qui ont
enfreint la règle de moralité établie ou qui ont commis une faute
grave susceptible de jeter le discrédit sur le royaume (meurtre, adul­
tère, etc.)
On encercle la demeure du coupable. Devant l'entrée, un homme,

(1) Dans la théogonie dahoméenne, la Foudre (confondue avec le Tonnerre)


est une divinité. Elle est figurée généralement par un bélier fantastique assis sur
son train de derrière et tenant en sa gueule une hachette en forme de croissant
représentant les éclairs. cc La Foudre n'est autre chose que le }:>élier qui répand
Prêtre de Hêbiosso ses furies dans le ciel en crachant du feu (les éclairs) . »
tenant de la main gauche l'attribut du dieu tonnerre. Les haches de pierre polie du néolithique sont appelées pierres à foudre,
et on croit qu'elles tombent du ciel après le grondement du Tonnerre et un incen­
Photo P. Verger, cliché !FAN. die dû à la foudre.
- 20 - - 2I -

dos tourné à la porte, jette par-dessus la tête le kpota dans la maison. Bakpo, est un bâton employé pour la chasse au gibier.
Dès la chute de ce bâton avertisseur de malheur, prise de panique, la A glokpo, est uniquement utilisé pour danser hûga (tam-tam-chef).
maisonnée s'alarme tandis que ceux qui l'entourent y pénètrent et Pendant la danse il est, à volonté, tenu de l'une ou de l'autre main,
procèdent à l'enlèvement de tout le monde : père, mère, enfants... alternativement, ou brandi en l'air:
Kpogué. Comme signe de leur mission funèbre, certains messagers Makpo ( 1) ou Aligokpo. Sous le règne de Ghézo, manche de houe
portaient un bâton, kpogué, dont l'une des extrémités, à demi-recour­ qui permit de mettre en déroute les Nago qui vinrent réclamer le

��-™
bée, était cerclée de z anneaux en fer et cravatée de noir. tribut que les rois du Dahomey payaient depuis plus de 2 siècles au
royaume Nago et que Ghézo n'accepta pas de payer.
Aligokpo. Elle tire son nom d'Aligo, résidence de Ghézo. On l'ap­
pelle aussi makpo. Toute récade peut être appelée makpo ( 2) (bâton
de la fureur) mais aligokpo est le makpo par excellence. Elle évoque
Ma ou Guma, une des puissances du groupe GU que l'on peut s'at­
tacher rituellement pour obtenir la victoire.

* **"
Au Soudan, la crosse en bois rappelant la récade est une arme
masculine et symbolise la force. Elle surmonte le toit des temples
de la divinité BINU. Chaque famille avait son BINU, espèce animale
à laquelle elle voue un respect particulier en mémoire d'une alliance
autrefois conclue entre l'animal de cette espèce et l'ancêtre de la
famille.
Il existe en Haute Volta des bâtons de parade qui rappellent
étrangement les récades dahoméennes ( 3) . De même au Congo belge,
il y a des herminettes de chefs qui ressemblent du point de vue de la
morphologie aux récades des rois d'Abomey. Ces herminettes portent
le nom de Nkwele ou Kandu, on les considère également comme houe
�1 de cérémonie ou comme insigne de chef de terre (•).
cc La Nkweti, pour Johnston, est un peu le symbole de l'historique
de l'instrument agricole utilisé au Congo ». Selon cet ethnographe,
Hache de parade en cuivre Senoufo ancien :da houe n'était en réalité à l'origine qu'un morceau de branche d'arbre
trouvée à Sokoro, Korhogo, Ferkessédougou (Côte d'Ivoire) fourchue dont une extrémité était taillée en biseau et quand l'usage
(cf. N. A., n° 48, p. 5 1 ) . du fer fut introduit par les immigrants hima, à une époque extrê­
Photo Coche/eux, cliché [FAN. mement reculée, une lamelle de fer fut substituée àla spatule de bois ( 5) . >i
Il est à noter que cet historique de Nkwete diffère fort peu de
celui que nous a donné notre informateur au sujet de la récade daho­
La directrice du tam-tam Zîlihû se tient au centre de l'orchestre méenne.
portant un bâton dont l'extrémité recourbée est cerclée d'anneaux *
en fer et cravatée d'un mouchoir blanc. C'est le signe distinctif du * *
tam-tam mortuaire. Chaque chanteuse le reçoit de la main de la direc­ Brandie en l'air ou tenue à la main au cours des danses royales,
trice au moment où elle se lève pour lancer son couplet de chant qui la récade sert à marquer le rythme.
est repris en chœur.
Hlakpo. Après une bataille, avant de rentrer en son palais, le roi (r) Cf. P.VERGER et A. ADANDÉ, N. A . , n° 58, avril 1953, p. 41-46.
s'accoude sur un bâton à 2 fourches et rend compte à son peuple de (2) VERGER et ADANDÉ, N. A . , n ° 58, avril 1953, p. 41-46, cf. Mercier,
ses exploits et rarement de ses revers. Lorsqu'il a fini, il lève le hlakpo p. 54 ill.
(3) CLAMENS et ADANDÉ, N. A., n° 58, avril 1953, p. 49-51, il!.
en l'air donnant ainsi le signal au tambourinaire de battre le tam-tam (4) Les Arts et Métiers indigènes dans la Province de Léopold ville, fasc. 3
et à la foule d'entonner les chants de la victoire. Le roi danse alors nov. 1937.
tenant de la main droite levée le hlapko. (5) Ibidem, p. 2 (Kandu ou Nkwete) .
- 22 - - 23 -

Tam-tams royaux qui se dansent avec la récade dite « A glokpo >> :


pour rappeler la traversée de ces deux fleuves avant d'arriver à Hund­
jroto chez les Mahi. En vérité, ce tam-tam est une imitation du tam­
A gbadia. Ce tam-tam fut institué par le roi Tégbessou pour célé­ tam Mahi Akoto transformé au Dahomey en Hûgà.
brer les victoires des armées dahoméennes, glorifier les hauts faits Le premier Hûgà était fabriqué avec le bois Hugo (arbre à karité)
des dynasties régnantes. et offert à Ghézo. Ses restes existent encore. Ils sont gardés comme
A sa résonance, les Homési (1) tiennent à la main droite leur reliques devant lesquelles tous les nouveaux Hûgà reçoivent obliga­
aglopkpo (M. H. 78.16.9-10; M. H. 89.ror.1) et dansent en chantant toirement leur consécration. Jadis, nul ne pouvait de sa propre initia­
les exploits des rois. Kpaligan (•) entre également dans le cercle de la tive fabriquer un Hûgà. Seul le roi pouvait en offrir à ses sujets. Il
danse et égrène la généalogie des rois, rappelle ce que chaque roi doit n'en est plus ainsi actuellement, peut fabriquer Hûgà qui veut.
faire pour maintenir l'honneur et le prestige du royaume en suivant Hûgà est fait avec la peau de bœuf tendue. Sauf lors de l'acces­
les règles de vie tracées par les augustes ancêtres. sion au trône de Glélé la membrane du Hûgà était en fine peau de
Dogba. Ce tam-tam vient du village Wéda, Dégoè. Il fut introduit l'oreille d'éléphant.
à Abomey sous le règne du roi Agadja et le tambourinaire était Adjado. Les tambours secondaires et accessoires accompagnant Hûgà
Des cérémonies périodiques se font en l'honneur de ce tam-tam. sont les suivants
Il repose sur des crânes humains quand il est en position d'être battu.
Il est accompagné d'autres tambours plus petits et d'olifans. Chaque Zonîhû : z Kpo kpoï : z
roi avait le sien propre et nommait un chef d'orchestre. Sohû r Kî : 8
Dogba était battu pour annoncer l'apparition du roi au peuple Kotoklo : I gàsu 4
et aussi la mort du roi. Actuellement il n'est battu que lors des céré­ Dugba r Alotaga 2
monies commémoratives des anciens rois. Hayé (gourdes revêtues de vertèbres
Avant la sortie du roi, un coup de feu (aoutu), est tiré de la pre­ de serpents ou de cauris)
mière cour du palais pour annoncer l'apparition du roi sur la place du nombre variable.
Palais. Aussitôt, Dogba résonne, accompagné des tams-tams secon­
daires et des hurlements des olifans ; suit le concert ou le gazouil­ Hûgà est battu à l'aide de u agida n fait en bois choisi en raison
lement de ce qu'il est convenu d'appeler des « oiseaux du roi " et qui de sa dureté comme le bois surnommé Kisé kisé kpo. Les tambours
n'étaient que des jeunes filles pubères Wéda qui, par des cris spé­ secondaires sont battus à la main. A chaque chef d'orchestre sont
ciaux, annonçaient également la sortie du roi. affectés r5 ou 20 élèves recrutés parmi les fils d'anciens chefs d'or­
Dès que celui-ci apparaissait, les Dahoméens se jetaient face chestre ou de chefs de village afin que ces élèves apprennent le manie­
contre terre et se couvraient la tête de poussière en formant des vœux ment pour mieux perpétuer les traditions du tam-tam. L'éducation
pour la santé, la longévité, la puissance du roi et la victoire des armées et l'entretien de toutes ces jeunes recrues sont à la charge du roi.
dahoméennes. A la fin de leur initiation, le chef en avertit le roi qui envoie son
expert examiner et apprécier le talent des élèves. A partir de ce
moment, ils peuvent, sans considération d'âge, battre le hûgà.
LANGAGE DU TAM-TAM DoGBA. Aucune cérémonie particulière ne précède la sortie de ce tam-tam.
Le chef d'orchestre est vêtu d'un costume appelé kasau, les autres
Kpo z6 go de mé - bis. portent un pagne attaché autour des reins. Au cours des déplacements
Panthère, marche, pavaner lentement. le hûgà est porté horizontalement sur la tête d'un homme tandis que
le batteur continue son œuvre. En stationnement, le hûgà, déposé
Roi panthère, marche en se pavanant, lentement - bis. sur le sol, est retenu par une corde qui le relie au tambourinaire ;
Hûgà, ou tam-tam chef, est originaire d'Abomey. Il fut un don du celui-ci tient de la main droite l'agida et de la main gauche bat à
roi Agonglo (3) à Ghézo son successeur après la victoire sur les Mahi à pleine main la peau tendue. Le hûgà se danse nécessairement en tenant
Hundjroto. Hûgà répète souvent Zou (fleuve) gbo (couper) gli (fleuve) dans la main soit une récade soit un fusil.
Souvent, les chansons déterminent le choix des récades dont il
(r) Homési signifie littéralement : femme de chambre, d'intérieur. Ce sont faut se munir pour danser. Quand le tam-tam magnifie un fait parti­
des amazones, généralement d'origine étrangère et qui, enfermées dans le palais, culier, il faut que le symbole ou la récade corresponde autant que pos­
n'en sortent jamais. sible à ce haut fait.
(z) C'est l'historiographe de la cour.
(3) Parti.cule terminale de la phrase : So jè dé bagonglo, L'ananas qui Les occasions de battre le hûgà sont :
se rit de la foudre qui abat le palmier-rônier. - A l'occasion d'un événement heureux.
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- A l'occasion de la visite d'une personnalité importante. A la fin de ce chant, préambule à la danse royale, les servants
- Pour rendre visite à un chef ami. dégagent rapidement le passage afin que le roi puisse entrer librement
- Au retour d'une guerre victorieuse. dans le cercle de la danse. Celui-ci s'avance majestueusement, décroche
Tout le monde peut assister à ce tam-tam, comme tout le monde sa récade de l'épaule gauche, la brandit en l'air et la ressaisit de la
peut le danser. Les pas de danse exécutés par le roi sont dits pas de main droite. Aussitôt la foule se prosterne tandis que les ministres,
panthère. L'on débute toujours par le chant composé par le roi Glélé agenouillés, battent la mesure des mains.
lui-même en hommage à son auguste père Ghézo, fils d'Agonglo
La figure de danse royale résonne. Le tam-tam dit :
Dada Sègbo ma wa nu de bo yc
Père Tout-Puissant négation faire chose quelque que on Awli anô kèkè zo de mè
Wi na ho kpétè hi't nâ (bis)
nà wa a Jeunes vierges aux seins fermes
(marque l'habitude) faire (interrogation) Nous nous y mettrons avec entrain (bis).
Gbé nu de ni wa bo wa Sèmè vo
vie chose quelque être faire que faire monde vaste Sans fatiguer le roi, le tambourinaire change de figure de danse
en battant : gà go to hû to, pour inviter les ministres à venir, chacun
So Jè de vi agon glo wè na avec sa récade, relayer le roi à la danse.
Foudre tomber ronier enfant ananas résister qui donner Pour chanter, les griots tiennent leur récade spéciale appuyée
sur le sol.
wâ tu mi ni ma
guerre fusil moi je négation
fâsiwu gè
jalouser ne pas ***
Danse des amazones. - Équipées comme pour la guerre les ama­
agida lo to 'Ytî tôwi zones dansent en courant par groupes j usqu'à une cinquantaine de pas
bâton pour battre le tam-tam ce père mOI appartenir
n' ka so bodo ho hû na
je (marque l'action) prendre pour battre tam-tam (habitude)
Zofôlôyîyî do Ji ta mè nu wè ni zo lo
Luciole dire que tête dans chose que être feu ce
Gbè nu de ni wa bo wa Sèmè vo
vie chose quelque être faire que faire monde vaste

EXPLICATION LITTÉRAIRE.

Lorsque le Tout-Puissant ou le Destm n'a rien ordonné, nul ne


peut le faire.
Y a-t-il rien en ce monde qui se fasse sans qu'il soit décrété par
le Destin ?
C'est le Fils d'Agonglo, - l'ananas qui s'est ri de la foudre qui a
abattu le ronier,
Qui m'a donné le fusil de guerre,
Je n'en ai frustré personne.
Le bâton appartenait à mon père,
Et je m'en suis servi pour battre le tam-tam. Chef fou exécutant une danse.
La luciole dit : « le feu est mon essence... » Il tient de la main droite une récade comme bâton de rythme. Abomey .
Y a-t-il rien au monde qui se fait sans l'ordre du Destin ? PIiot� P. Vergir, clicll:! !FA N.
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sur des ennemis imaginaires. En quelques enjambées, elles reviennent qu'il assaillit par surprise. La tactique lui réussit et la ville fut conquise
face à l'orchestre ; leur main droite tenant une récade dont elles le 5 mars 1863. Entre autres prisonniers de guerre illustres faits dans
sabrent l'air dans un mouvement d'ensemble ; brusquement, elles cette région, se trouva le roi d'Ichaga. Il fut décapité et sa tête fut
tournent le dos au tam-tam, foncent derechef sur les ennemis fictifs portée en collier par son propre cheval qui marchait devant l'armée
puis, reviennent sur leurs pas en chantant fort. La main droite tenant dahoméenne victorieuse jusqu'à Abomey. Ce fut au retour de cette
la récade levée, le bras gauche tendu à la hauteur des épaules, les guerre heureuse que Glélé prit la devise symbolisée par la récade
mains ouvertes, paumes en dessous, elles font le geste de trancher net · n° M. H. 21.rr.59 : Basagla j i gu hôlô ma dô (Le dieu de la guerre étant
avec la récade tout ce qui s'opposerait à leurs mouvements. Quelque­ né toutes les vengeances seront assouvies).
fois, au fort de la danse, elles dédaignent leur récade, dégainent leur Indépendamment d'un bas-relief qui fixa le souvenir de cette
sabre et le brandissent dans un geste menaçant. Elles rengainent leur guerre victorieuse (Cheval portant un collier de tête humaine) une
sabre, s'emparent de leur fusil, font volte-face et visent des ennemis chanso_n fut composée pour la commémorer
imaginaires tout en s'excitant à la bataille par des chansons viriles.
Le refrain d'un de ces chants dit : Awâ Sè ma hitè / Saga gba gbe / bis
A boël�uta 1x1è awâ se gbagbè
« Nous sommes créées pour défendre A nagonu emi desu wî ba wâ lo- su
Le Dahomè, ce pot de miel, Awâ Se ma huè Saga gbagbè
Objet de convoitise. A bèokuta wè so wâ huè
Le pays où fleurit tant de courage A nago nu emi de su wè ba wii lo
Peut-il abandonner ses richesses aux étrangers ? A duta mè wè guda Jè Se
Nous, vivantes, bien fou le peuple Ba anagonu e ka jè nu babaji
Qui essayerait de lui imposer sa loi. » Ba Glélé Mazo la va d' awâ to
A u:ii yalo Matro
Bo diho yalo ahui gbamè
* ** Awâ yalo Gawu kpo d'anagonit
Ta ta no do sa konu
Les rois entretenaient des chanteurs-chroniqueurs qui jouaient A tikli Mazo wâ wè ka wa me so
le rôle d'historiographes du Palais. Ce sont eux qui fixaient à travers
des mélopées parfois d'une émouvante vigueur, les hauts faits du Tradi1,ction littéraire.
royaume : guerres victorieuses, exploits guerriers des princes, soldats Mon armée n'allait pas détruire Ichaga
ou amazones, afin d'en perpétuer le souvenir. C'était également par Abéokouta était. son objectif
les chants que l'on transmettait la sagesse, les règles de vie sociale et Nago, c'est vous qui avez provoqué mon armée
qu'on inculquait à la j eunesse le respect dû aux Anciens. Mon armée n'allait pas détruire Ichaga
Pour encourager lès chroniqueurs-chanteurs, les rois les grati­ Abéokouta était son objectif
fiaient de distinctions honorifiques et les comblaient de fortes récom­ Nago, c'est vous-même qui avez provoqué mon armée
penses. C'est ainsi que l'histoire des principaux événements du royaume L'oiseau puissant était perché près du fleuve Aduta
est recueillie et a pu être conservée jusqu'à nous. C'était avec des Et les Nago le provoquèrent
paroles enflammées que les compositeurs de chants de la cour du Glélé, l'invincible, arrêta la marche de son armée,
Dahomey excitaient les soldats contre les ennemis du royaume. Fit rassembler Matro, Gawu et Kposu
L'on sait que les Yoruba, peuple du Nigeria, furent cons­ Qu'arriva-t-il ?
tamment les ennemis du royaume du Dahomey. En accédant au trône, La tête du Nago fut portée en collier par son cheval
Glélé ( 1) fit le serment de venger les outrages subis par ses prédéces­ Voilà l'exploit accompli par l'armée de Glélé.
seurs du fait des Yoruba. Il nourrissait le secret désir de conquérir
Ichaga, ville du Nigeria ; mais n'en souffla mot à personne. Il décida *
brusquement d'une bataille contre les ennemis séculaires du royaume * *
et feignit de marcher sur Abéokouta. Ayant fait parcourir une dis­
tance suffisante à sa troupe, il la fit tourner « impromptu » sur Ichaga Une autre chanson commémore la victoire dahoméenne sur les
Nago à Atakpamè (ville située dans le moyen Togo). Grâce à cette
(1) 10• roi du Dahomey (1858-1889). chanson, est conservé un des mille faits de l'héroïsme des amazones.
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Au cours des batailles engagées dans la région d'Atakpamè, l'armée Traduction littéraire.
des hommes fléchit sous l'ardeur foudroyante des troupes ennemies.
Les amazones s'engagèrent dans la mêlée avec fureur, se battirent Seul le roi est le Seigneur de cette forêt,
comme des buffles, - dont elles portaient le nom - et, sans leur Seul le roi est le Seigneur de cette forêt.
héroïsme et leur bravoure, les armées dahoméennes eussent enregistré Feu ardent, toi seul es maître de cette forêt
une cuisante défaite, la seconde devant Atakpamè. Mais la situation Aucun fauve ne peut imiter la démarche du lion, roi de la forêt.
fut, in extremis, renversée à l'avantage des armées dahoméennes dont
l'arrivée fut accueillie en triomphe à Abomey. Seul le roi est le Seigneur de cette forêt,
Seul le roi est le Seigneur de cette forêt
La chanson ci-après fixe cette victoire : Ghézo, le Tout-Puissant, est maître de cette forêt
Aucun fauve ne peut imiter la démarche du -lion, roi de la forêt.
Aho wè ni gbé é nô lo
Aho wè ni gbè é nô Le roi s'est emparé de son fusil de guerre
Adato zobada hui wè ni gbé é no Et il fondit sur Atakpamè.
Kalî fo de mo no de kini fo Le Seigneur tout-Puissant s'est emparé de son fusil de guerre,
Et il fondit sur Atakpamè.
Aho wè ni gbé-é nô lo
Aho wè ni gbé à nô Alors Yégégé, roi d'Atakpamè
Adato Ghezo wè ni gbé nô S'enfuit dans la campagne
Kalî fo de mô nô de kini fo Et dépêcha les Nago, ses sujets
Au-devant des assaillants.
Aho wè so awa tu to lo
Kakadi d'Atakpamé Et le Seigneur tout-Puissant lui fit dire
Adato Gbénô so awti tu tô lo Dès l'aube Atakpamè ne t'appartiendra plus.
<<

Kako lo j'Atakpamè Dès le lendemain matin


Je serai maître d'Atakpamè »
Ba Atakpamè hosu yégégé lo
A ho lo ho yi géléta Le devin du roi d'Atakpamè
Lobo wayi so nagonu lè Décida de consulter l'oracle
Bo lé bé sé d' Atakpamè Celui-ci consulté,
Prédit la défaite.
Bo Adato Gbonô do ni do
Zazatî wè ko kâ la kpo eka na Gb'Atakp(!mè Et ses gens de s'écrier : quel malheur,
Gbadam /ô j' ayino gbe lo Notre pays sera donc conquis !
Kpo ekti na Gb'A takpamè Tandis que tous nos tam-tams,
Dans la ville étaient abandonnés.
Atakpamè hosu bakonô lo
Bokono fi fô fagbedfi Seul le roi, tout-puissant, est le Seigneur de cette forêt
Bokonô wili fa naka Aucun fauve de peut imiter la démarche du lion, roi de la forêt.
Ba fa bo wi d'Ayogblomè

Ba awago ayonu do guwa ! CONCLUSION.


Toé dié gbaloé
KPo do boû boû ena nu no ho le Le bâton paraît avoir été de tout temps l'insigne de comman­
Bi wè dô d'ayo gblémè dement. Les textes anciens comme les monuments parvenus jusqu'à
nous l'attestent. Il ne subsiste aucun doute à cet égard.
Adâto Ghezo hui wè ni gbe e no L'autorité administrative et l'autorité militaire firent usage du
Ka li de mô nô de kini fo ! bâton en Égypte ainsi qu'en Grèce. On retrouve le bâton, sous la
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MORGENSTERN (Laure), Esthétiques d'orient et d'occident, p. 267.
forme la plus haute, comme insigne dans le sceptre, symbole de l'au­
NuMELIN (Ragnard) , The beginnings of diplomacy. A sociological stu<ly o:
torité souveraine.
intertribal and international relations. Oxfcrd, University Press, 1950
On sait que le bâton de maréchal fut institué dans l'actuelle
France sous Philippe Auguste. Il est toujours l'attribut du comman­ 372 p.
di.:
dement en chef de l'armée. On raconte qu'au xvne siècle, Condé lança PAULME (Denise) , Récades du Dahomey au Musée d'Ethnographie
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HAZOUMÉ (Paul) , Dognicimi. Paris, Larose, 1937, 3n p.
LAFORET (Auguste), Le bâton. Étude historique et littéraire. Marseille,
Olive, 1876 à 79.
(Les pages concernant les bâtons récades sont dues à M. Roulland,
agent à la côte des Esclaves.)
LE HÉRISSÉ (A.), L'ancien royaume du Dahomey. Paris, Larose, 19n.
MAÈS et LAVACHERY, L'Art nègre à l'Exposltion du Palais des Beaux-Arts,
du 15 novembre au 31 décembre 1930. Bruxelles, Paris, Librairie
nationale d'Art et d'Histoire, 1930, 32 p., 48 pl. h. t.
M.\IRE (Capitaine), Le Dahomey , rre partie : Abomey, La dynastie daho­
méenne, le palais et ses bas-reliefs ; ze partie : Souvenirs d' Abomey.
Besançon, Abel, Cauriage, 1905.
MACQUET (M.), L'herminette de chef dans le district du Kwango. Arts et
métiers indigènes, 3, l /3, 1937.
MERWART (Gouverneur), L'art dahoméen, p. II.
MIMANDÈ (Paul), L'héritage de Béhanzin, Paris, Perrin et Cie, 1898.
- 36 - - 37 - ·
Le tableau comparatif de la répartition des récades du Musée de - par roi
l'Homme et du Musée d'Abomey par roi et par autres catégories de - par catégories sociales dans la cour royale.
propriétaires appelle les remarques suivantes : a) reine
I 0 Le plus grand nombre de bâtons-messagers a été dédié au roi b) princes et princesses
Glélé (I858-I889). Cette constatation confirme la réputation faite à c) · amazones
ce roi selon laquelle cc aucun roi n'excelle comme Glélé en allégorie ». d) blu ou guerriers
23 récades de la collection du Musée de l'Homme et IO du Musée e) wesi, homesi ou femmes d'intérieurs
d'Abomey lui sont attribuées. - par inspiration religieuse : (dieu Tonnerre).
Après Glélé, vient Ghézo, son père, auquel sont dédiées I9 récades Le système adopté, parce qu'il correspond au classement des
du Musée de l'Homme et 10 du Musée d'Abomey. fiches muséographiques et à celui par matière et ordre chronologique
2° Si chacun des IO rois du Dahomey s'était vu dédier plusieurs, dans la réserve du Musée, a l'avantage de faciliter les recherches.
ou tout au moins, une récade dans la collection du Musée de l'Homme,
il n'en est pas de même dans celle d'Abomey. En effet, les rois Dako,
Akaba et Tégbessou n'y comptent aucune récade qui leur soit attribuée.
3° Tandis que la collection du Musée de l'Homme renferme 20 STRUCTURE DE LA RÉCADE..
exemplaires de récades dédiées aux « Blu i> ou guerriers et 18 aux
« Wesi n (femmes d'intérieur), la collection du Musée d'Abomey pour
les premiers ne compte qu'une récade et pour les secondes 2.
4° Aucune récade à usage exclusif du roi' n'existe dans la col­
lection du Musée d'Abomey, tandis que le Musée de l'Homme possède
la série complète des récades ayant appartenu en exclusivité à chacun
des 10 rois du Dahomey (Cf. Coll. Le Hérissé).
Dans cet ordre d'idées, il est remarquable de noter que la récade
originale à symbolisme de lion en ivoire sculpté, ayant appartenu
en propre à Glélé, a été achetée à Londres, puis déposée au Musée de
l'Homme (Cf. Coll. G. R. Rivière). 1-1.-,�sve,
De ces constatations, on peut déduire que : la collection des
récades du Musée de l'Homme est plus complète, plus riche, et ren­
ferme des pièces plus anciennes que celles du Musée d'Abomey.
Aujourd'hui, on ne peut pas faire une étude sérieuse sur ce sujet sans
av.oir recours à cette collection.

** *
Le classement des récades adopté pour cette étude obéit au sys­
tème d'enregistrement des collections par ordre d'arrivée au Musée de
l'Homme. De ce système découle la cote portée en haut de la fiche
descriptive de chaque pièce. Elle comprend 3 chiffres précédés des ini­
tiales M. H.
a) les deux derniers chiffres de l'année
b) le numéro de la collection dans l'année
c) le numéro de l'objet dans la collection
par exemple : M. H. 89.101.100 est le rnoe objet de la 101e collection
de l'année 1889. Les initiales : M. H. Musée de l'Homme ; Ab : Abomey.
Il était possible d'envisager d'autres mode3 de classement des
récad�s. par exemple les grouper
__;__ par ancienneté · ·
., DAKO
vers 1610
-- - - >
., H
OUÉGBADJA
1650-80 t,j
--
AKABA
'-" ()
1680-1708 0
-
>
., AGADJA
1708-28 >
-
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., TEGBESSOU
1728-1775 0
-- --
>
H ., KPENGLA
1775- 89
- >
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AGONGLO
1789-97
-
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ADANZAN
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p" �- 1797-18 18
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BÉHANZIN
1889--94
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., AGOLIAGBO
1894--98
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<.>.> ., REINES
OU PRINCES t,j,

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(guerriers)
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