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Université de Bordeaux

Faculté de droit et science politique


Institut droit et économie de Périgueux

Cours de droit des contrats spéciaux


M. BARDET

Travaux dirigés
K. M. AMOUZOU

Séance n° 1
La qualification juridique

I. Rappels méthodologiques : le commentaire d’arrêt

A. Définition du commentaire d’arrêt

Attention : un commentaire n’est :


- ni une dissertation
- ni une paraphrase de la décision
- ni un développement purement descriptif ou encore un rappel de cours.

Le commentaire d’arrêt consiste à étudier une question juridique soulevée à l’occasion d’un
litige particulier. L’objectif est de déterminer le problème posé et la façon dont il a été résolu.

B. Préparation du commentaire

La préparation du commentaire consiste à identifier (1), analyser (2) et apprécier (3) l’arrêt.

1. L’identification de l’arrêt

Deux informations permettent d’identifier l’arrêt :


- La date de l’arrêt : cette information vous permettra de situer l’arrêt dans son
contexte : s’agit-il d’une d’un revirement de jurisprudence ? La solution a-t-elle été
depuis consacrée par le législateur ? Ou, au contraire, a-t-elle été démentie ?
- La juridiction qui a rendu l’arrêt : cette information vous renseigne sur l’importance
qu’il convient de donner à celui-ci au sein de la jurisprudence

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2. L’analyse de l’arrêt

Il s’agit ici d’établir la fiche de l’arrêt à commenter. A cet effet, vous devez présenter
succinctement :

- les faits
- la procédure
- les arguments des parties
- le problème juridique
- la solution

3. L’appréciation de l’arrêt

L’analyse de l’arrêt consiste à en déterminer le sens (a), la valeur (b) et la portée (c).

a) Le sens de l’arrêt :

Il faut ici démontrer que vous avez compris la décision, ce qui suppose :

o de la situer dans son contexte juridique en faisant appel à vos connaissances pour
la rattacher à un problème connu (ex : problème de qualification des contrats),
o de rechercher les règles et les textes dont les juges ont fait application,
o démontrer comment, à partir de la règle générale et abstraite applicable, le juge
a résolu le problème concret et particulier qui lui a été posé ; comment les juges
ont qualifié juridiquement les faits qui lui étaient soumis (contrat d’entreprise
ou contrat de vente, par exemple) ; comment le juge a interprété la règle
applicable.

A ce stade, il faut donc vous poser les questions suivantes : qu’est-ce que les juges ont décidé ?
Qu’ont-ils déclaré ? Qu’ont-ils répondu aux parties ? Ont-ils approuvé ou sanctionné la
décision de la cour d’appel ou du tribunal ?

b) La valeur de l’arrêt

Pour déterminer la valeur de l’arrêt, il faut :


o rechercher les motifs qui ont conduit le juge à choisir l’interprétation qu’il a
retenue,
o rechercher la conformité ou la non-conformité de la décision au droit positif
(textes et jurisprudence),
o apprécier objectivement la solution à l’aide d’arguments de droit puis de fait
(logiques, humains, sociaux). L’exposé des arguments doit se terminer par votre
opinion sur l’arrêt, exprimée de façon mesurée et justifiée.

A ce stade, il faut donc vous poser les questions suivantes : pourquoi les juges ont-ils pris cette
décision ? Pouvaient-ils juger autrement ? Quelles règles ont-ils appliqués ? Etait-ce
prévisible ? Est-ce un revirement de jurisprudence, une décision isolée ?

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c) La portée de l’arrêt

Il s’agit ici de situer l’arrêt dans le droit positif : si la décision est ancienne, il faut rechercher
l’évolution postérieure du droit positif (modification des textes ou de la jurisprudence) ; si la
décision est récente, il faut rechercher l’évolution du droit positif qu’elle semble annoncer.

A ce stade, il faut vous poser les questions suivantes : quelles vont être les conséquences de
l’arrêt ? Que va-t-il se passer pour les prochaines affaires similaires ? Les parties sont-elles
mieux protégées ? Plus libres ? Quelle va être la réaction du législateur ? La jurisprudence
risque-t-elle de changer ?

d) L’élaboration du plan

L’objectif du plan est de présenter clairement vos idées, de permettre à votre lecteur de
comprendre votre raisonnement, voire d’adhérer à votre démonstration.

Le plan doit être divisé en deux parties et deux sous-parties.


Il faut faire des chapeaux introductifs pour introduire votre A et B

Les intitulés doivent être formulés de façon à révéler l’idée majeure de l’arrêt. Les solutions
doivent apparaître clairement.
Les titres doivent être brefs.

Il n’existe pas de plan type. Toutefois, il est souvent possible d’adopter l’une des présentations
suivantes (il ne s’agit ici en rien d’une liste exhaustive mais de simples exemples)

- Conditions / effets
- Conditions/ sanctions
- Principes / limites
- Principe/ exception
- Nature (ce que c’est juridiquement) / régime (comment s’applique la règle) ….

4. La rédaction du commentaire d’arrêt

a) L’introduction

L’introduction doit débuter par une phrase d’accroche permettant de situer la décision par
rapport à la matière (ex : « Le présent arrêt de la …chambre de la Cour de cassation, en date
du…. Apporte une importante contribution à la question si discutée de la nature juridique
de…. »)

Viennent ensuite les informations contenues dans la fiche d’arrêt : faits, procédure et motifs de
la solution, arguments des parties, problème juridique, solution adoptée par les juges.

Elle se termine par l’annonce du plan, seulement les deux parties avec les intitulés exacts.

b) Le corps du commentaire

Rédiger le commentaire consiste à ordonner les remarques inscrites sur votre brouillon et à les
insérer dans votre plan, en enchaînant vos propos.

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Les intitulés de votre plan doivent être précis, de préférence courts, sans verbe conjugué et
correspondre parfaitement au contenu de la partie ou de la sous-partie.

Votre commentaire doit contenir des chapeaux sous vos parties (I/II) pour annoncer les sous
parties (A/B) et la transition entre les deux grandes parties (I/II).

Faites des phrases courtes et simples comprenant sujet, verbe, complément.


Adoptez un style direct, clair, précis, neutre, objectif, impersonnel, distant, fluide et élégant si
possible.

c) La conclusion

Le commentaire n’appelle pas de conclusion.


Vous pouvez éventuellement terminer par une phrase qui « boucle » le devoir et donne
l’impression à votre correcteur que votre est terminé.

II. Exercices :

A. Rechercher et lire les doctrines suivantes pour saisir les enjeux de la qualification :

- N. Balat, « Le régime du contrat de déménagement : droit commercial, droit civil, droit de la


consommation ? » D. 2017, p. 51.
- G. Pignarre, « Le contrat de dépôt éclairé par le prisme de l’opération de qualification », AJ
contrat 2016, p. 508

B. Recherchez les arrêts suivants et réalisez la fiche d’arrêt pour chacun d’eux :

- Civ. 1re, 19 oct. 1999, no 97-13.525 ; RTD Com. 2000 obs. B Bouloc, p. 438 ; RDI 2000, p.
96, obs. F. Collard-Dutilleul
- Civ. 1re, 3 juill. 2001, n° 99-12.859
- Civ. 2è, 23 sept. 2004, n° 03-12.330, inédit
- Cass. com., 11 oct. 2005, n° 03-10.975, Bull. civ. IV, n°206 ; D. 2005. AJ 2869, obs.
X. Delpech ; JCP 2006. I. 111, n°13, obs. Ph. Stoffel-Munck
- Cass., com., 6 juillet 2010, n°09-14661

C. Après avoir dégagé le sens, la valeur et la portée de l’arrêt suivant, vous en


rédigerez l’introduction (avec l’annonce du I et II)

Civ. 1re, 4 nov. 2015, n° 14-19.981 (D. 2015. 2325; D. 2016, p. 1045, obs. H. Gaudement-
Tallon et F. Jault-Seseke, et D. 2016, p. 2025, obs. S. Bollée)

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