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GENERALITES
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La géomorphologie est la science qui étudie les formes du
relief à la surface de la terre, Elle est revendiquée à la fois
par les géologues et par les géographes, Le rôle des
géographes – est néanmoins déterminant.
Une première distinction s’impose. Il faut bien distinguer
la topographie qui est la présentation descriptive des
formes, et la géomorphologie, qui consiste en leur
interprétation. En matière de topographie, on peut
distinguer des plaines, des plateaux, des hautes et de
moyennes montagnes, des escarpements, etc. dont les
éléments respectifs, observés dans leur ensemble,
composent un paysage.
Ce terme englobe également les données de la végétation
et les activités humaines. Réduit à la présentation des
formes, il constitue le point de départ de l’étude
géomorphologique, qui classe et explique les différents
éléments. Un escarpement – terme topographie – peut
être un escarpement de taille, un front de cuesta, un
secteur de contact entre des roches de dureté différente,
voire une ancienne falaise. D’où la nécessité d’un
vocabulaire très précis.
Une seconde distinction est à la faire. On distingue,
traditionnellement, la géomorphologie structurale et la
géomorphologie climatique.
La première correspond dans le relief, à l’expression
directe d’une structure. Ce peut être une couche
dure faiblement inclinée dont le toit a été déblayé
par l’érosion. On parle alors de surface structurale,
de plateau structural. Ce peut être une faille, et on
aura alors un escarpement de faille.
Les formes structurales sont très nombreuses. Il faut
les distinguer des formes en rapport avec un long
travail de l’érosion, agissant à la surface des
continents. On aura alors des surfaces d’érosion, des
talus en rapport avec l’érosion différentielle.
Les formes structurales se distinguent des formes liées à
l’action d’un climat particulier agissant pendant une
longue période. C’est alors qu’on évoque la
géomorphologie climatique. Elle est en rapport avec le
modelé des formes. C’est-à-dire l’aspect particulier de telle
ou telle forme en fonction d’un climat déterminé. Un
escarpement qui évolue sous un climat chaud et humide
ne ressemble pas à un escarpement, dans une structure
identique placé sous un climat froid et sec. C’est ainsi que
les différences de modelé sont considérables entre le
Bassin parisien et les régions méditerranéennes.
Les formes du relief sont en relief sont en évolution
constante. Placées à l’interface entre l’atmosphère, les
continents, l’hydrosphère, elles subissent des influences
variées. La tectonique, en fonction de la dynamique des
masses continentales, crée constamment des volumes de
relief, dont les hautes montagnes constituent l’aspect le
plus significatif. L’érosion attaque ces volumes dès leur
genèse. C’est en fonction du rapport tectonique/érosion
que s’élaborent les formes du relief, objets d’étude de la
géomorphologie. Dès maintenant, on peut poser le
principe de base dont les grandes lignes ont été formulées
par P. Birot:
Toute région élevée correspond à un ensemble de
roches dure, ou récemment soulevé par la
tectonique. Toute région basse correspond à un
domaine de roches tendres, ou tectoniquement
abaissé (subsidence).
La création de reliefs, comme leur destruction, se
poursuit actuellement. La surrection du massif du
Mont-Blanc, comme de l’ensemble des Alpes et de
l’Himalaya, se poursuit à une vitesse de plusieurs
millimètres par an.
Les séismes affectent les secteurs fragiles des
continents et des océans (en rapport avec la
tectonique des plaques). Les coulées de boues, le
travail des torrents affectent de nombreuses régions
de montagne. Compte tenu de ces données, que
chacun peut observer de nos jours, il est clair que la
géomorphologie, loin d’être une science coupée des
préoccupations de l’Homme actuel, a une
importance de premier ordre dans l’aménagement
de la surface des continents,
SPECIFICITES DE LA GEOMORPHOLOGIE TROPICALE
Géomorphologie = description et explication des formes
du relief terrestre. La question qui vient en général à
l’esprit est comment ? Et comment dans le cadre tropical ?
La description du relief
Se fait sous forme de description topographique =
géomorphologie descriptive, basée sur la construction
de cartes, leur lecture, leur commentaire, leur exploitation.
C’est une partie essentielle, mais souvent négligée par les
géomorphologues. Ils préfèrent, à tort, d’abord expliquer :
en général, dans les ouvrages spécialisés, une faible partie
est réservée à la description.
Résultat, la description reste un exercice mal exécuté,
même par des spécialistes. La description est au cœur
de la géomorphologie tropicale.
En fait, la difficulté de la description réside à deux niveaux
: décrire quoi ? Comment ?
a) décrire quoi ? Il s’agit ici de définir l’unité de
description. Le géomorphologue tropical reste flou dans
ce domaine ; or, il est nécessaire de s’appuyer sur un
espace limité, sur la recherche de limites spatiales : il faut
délimiter les unités géomorphologiques décrites.
b) comment ? Pose le problème du vocabulaire, car
la naissance et l’attribution d’une notion, d’un
concept est un moment important dans toute
science. En effet, le concept doit faire l’unanimité
de la communauté scientifique concernée.
En géomorphologie, surtout dans les régions
tropicales, on se trouve confronté à un problème
de vocabulaire. La raison : le vocabulaire actuel
n’est pas spécifique, à la fois, de la
géomorphologie en général, et de
géomorphologie tropicale en particulier.
L’absence de consensus tient de l’idéologie propre
aux géomorphologues des différentes régions du
monde. Cela signifie qu’il n’y a pas de vocabulaire
universel spécifique.
Exemple : un interfluve peut correspondre à la
fois à un plateau et à une plaine ; un talus est
différent d’un versant. Mais, physionomiquement et
géométriquement, ils sont identiques.
comment ? Il s’agit ici de définir les critères de
description ; on inclure l’idée de mesure par la
morphométrie (mesure du relief) et l’hydrométrie
(mesure du réseau hydrographique)
L’explication du relief
Le passage de la description à l’explication
nécessite la recherche de facteurs pour expliquer
l’existence (mise en place et évolution) des unités
de relief. Les facteurs sont de deux ordres :
internes et externes.
On peut avoir recours à la géologie, aux données
géologiques : on fait de la géomorphologie
structurale. Par exemple, au niveau d’une unité
géomorphologique comme le talus, intervention des
facteurs internes (= facteurs de construction
comme la tectonique) et de facteurs externes (=
facteurs de destruction et d’évolution comme
l’érosion). Généralement, l’érosion est un facteur
négatif, mais ce n’est pas toujours le cas ; elle peut
être le départ d’une transformation, le départ d’une
création nouvelle.
La rencontre de la tectonique et de l’érosion
permet d’expliquer les processus d’évolution de la
plupart des formes structurales. Car il y a une
corrélation entre la nature des roches et la nature
des formes : à première vue, le géomorphologue se
pose des questions devant une forme structurale, et
il trouve des réponses liées à la géologie.
Un deuxième type de géomorphologie se base sur les
différents types d’érosion. Car, il existe bien une
différence entre par exemple une forme d’érosion
littorale et une forme d’érosion des régions arides.
Ici apparait la notion de système d’érosion : elle
fait appel à des facteurs d’origine climatique et
d’origine biologique, les deux étant par ailleurs assez
liés.
A un système d’érosion donné correspondent des
modelés spécifiques : exemple, on parle de
modelé dunaire, modelé littoral ou de modelé
morphopédologique (qui dépend de la nature du sol
et du climat ; figure 1).
Par exemple, un talus peut s’expliquer
différemment selon le système morphoclimatique
dans lequel il se trouve : la gélivation, dans le
système périglaciaire, l’érosion différentielle dans le
système tempéré, ou l’altération chimique en
système tropical (figure 2).

Figure 1 : Modelé et nature du sol


Figure 2 : Système morphoclimatique et forme du relief
Quelquefois, on souligne le cas des retouches : des
formes structurales liées à des conditions géologiques
vont être retouchées par des systèmes
morphoclimatiques.
A l’échelle du globe, on retient 4-5 systèmes
morphoclimatiques :
- système morphoclimatique glaciaire (rôle de la glace,
système peu étendu, Islande, Suisse…)
- système morphoclimatique périglaciaire (rôle du froid,
hautes latitudes : Sibérie, Scandinavie…)
- système morphoclimatique tempéré (aux moyennes
latitudes : France, Allemagne…)
système morphoclimatique aride ou sec (lié à
l’absence/rareté de l’eau ; dans les déserts chauds du
Sahara, Namib, Takla-Makan…)
- système morphoclimatique tropical (rôle d’une
pluviosité permanente et abondante, suffisante
pour la végétation, chaleur constante)
Ainsi, il y a une opposition entre géomorphologie
structurale et géomorphologie climatique.
Un troisième type de géomorphologie existe, qui,
au-delà des formes considérées comme
simplement des lieux où s’exercent les systèmes
d’érosion, étudie les systèmes d’érosion eux-
mêmes comme objet de recherche : l’accent est mis
sur l’action et les processus d’érosion. On parle alors
de géomorphologie dynamique.
Ainsi, au niveau de l’explication, on retient deux types
d’arguments :
- explication génétique : explication de la mise en
place des formes ; apporte une réponse au
comment s’est effectuée la mise en place. Il
s’agit de recherche historique, s’appuyant sur la
recherche d’indices relatifs aux traces d’érosion pour
reconstituer la chaine génétique de mise en place
(par déduction à partir des dépôts corrélatifs)
- explication fonctionnelle : recherche des causes de
la formation ; une grande part est réservée à
l’observation, à la mesure et même à
l’expérimentation (CGA Strasbourg, Russie…)
En géomorphologie tropicale, au-delà des formes, ce
sont les systèmes morphoclimatiques qu’il faut
comprendre, expliquer, retrouver, c’est-à-dire les
conditions, les processus de façonnement et
d’évolution des formes du relief.
Chapitre 1 : les processus de l’érosion
I. Les mécanismes principaux de l’érosion
Au cours même de sa genèse, un relief est
attaqué par l’érosion. Mais les phénomènes liés à
l’érosion sont complexes. Même si l’on se borne à
observer l’évolution du petit bassin-versant d’un
torrent alpin, on distingue aisément les zones
d’attaque du matériel rocheux, limitées par les
crêtes sommitales, puis un chenal d’écoulement
qui assure le transport des débris, et finalement
un cône d’accumulation où sont concentrés les
produits de l’érosion (croquis 4).
Erosion, transport, accumulation, sont parfois
désignés sous le terme contestable «d’érosion » au
sens large et il est nécessaire de bien individualiser
les différentes composantes. Dans ce chapitre, c’est
l’érosion, au sens précis de la destruction des
volumes de relief, qui sera étudiée. Très
schématiquement, on peut distinguer l’érosion
mécanique et l’altération chimique. Dans certaines
régions, comme les zones de latitudes moyennes, les
deux peuvent coexister.
Il est à signaler que le terme « d’érosion normale »
employé par certains auteurs anciens, est à éviter.
Dans les régions semi-arides chaudes, l’érosion est
aussi « normale » que dans les régions de climat
tempéré océanique.

Croquis 4 : Un bassin torrentiel


1. Erosion mécanique
L’ érosion mécanique se passe sous le seul contrôle
des processus d’ordre physique. On peut
distinguer, en allant des phénomènes les plus
simples vers les plus complexes:
a) Les éboulis
Il s’agit de la chute de cailloux isolés, sous
l’influence de la gravité. La chute de blocs peut
être provoquée par l’affouillement d’une formation
argileuse sous-jacente.
Dans des conditions favorables, les éboulis peuvent
atteindre des dimensions importantes, surtout
lorsqu’il s’agit de blocs délimités par des diaclases
(fissures affectant les bancs rocheux, sans qu’il y ait
déplacement de part et d’autre). Les talus formés
d’éboulis peuvent atteindre des tailles considérables
éboulis de quartzite d’Irlande, de la Sierra Morena
espagnole.
b) Les éboulements
Il s’agit de phénomènes de masse. Dans certaines
conditions (bancs calcaires reposant sur des bancs
argileux saturés d’eau et donc très instables), tout un
versant peut s’ébouler. On connait le cas du mont
Granier, dans les Alpes du Nord, au XIIIᵉ siècle où tout
un versant s’éboula d’un seul coup. De tels
phénomènes sont fréquents dans l’Himalaya. Un
éboulement import peut barrer le cours d’une rivière
et être à l’origine d’un lac temporaire. La rupture de ce
barrage peut être à l’origine de crues dévastatrices
(Himalaya).
c) L’action des avalanches
Une avalanche formée de neige lourde, humide, peut
tout emporter sur son passage (forêts, éléments de
sols).
d) L’action des fleuves et rivières
Les données relatives aux importants problèmes de
l’érosion et du transport des fleuves seront précisées
plus tard.
e) L’action des eaux courantes en surface
Elle peut être également très notable. L’écoulement,
sur les vastes surface planes des régions semi-arides
chaudes, est qualifié d’aréolaire (en surface et non
concentré dans le lit d’une rivière). Ces écoulements
en nappe (« sheet flood »), peuvent avoir un rôle
notable dans la morphogenèse
f) L’action du gel
Un montagne et dans les hautes latitudes est de la
plus grande importance. Le gel est un des agents
destructeurs des roches les plus puissants qui soit.
L’action du gel est appelée cryoclastie (d’après des
racines grecques) ou gélifraction (racines romains).
L’eau s’infiltre dans les fissures de la roche et en
gelant, augmente de volume et la fait éclater.
L’intensité de l’action du gel dépend de plusieurs
facteurs:
• L’intensité du gel et le nombre d’alternance
gel/dégel. Le gel dit « islandais » n’est pas très
intense, mais les alternances gel-dégel sont
nombreuses (plus de 150 par an). Dans ces
conditions, il se produit un effet de « fatigue » des
roches, et certaines d’entre elles très sensibles à ce
type de gel. Le gel dit « sibérien » correspond à
des températures très basses, mais a peu
d’alternances gel/dégel. Il est efficace pour
d’autres types de roches, comme les roches
cristallines diaclasées.
• L’importance et la dimension des pores, par où
l’eau pénètre dans la roche. Certains calcaires sont
très gélifs, comportent de nombreux pores de
dimensions optimales, d’autres le sont beaucoup
moins. Les quartzites sont également très
sensibles à la cryoclastie, car beaucoup sont très
diaclasés, et ces diaclases facilitent la pénétration
de l’eau.
Il est bon de rappeler que de nombreuses régions
des latitudes moyennes (Europe occidentale et
centrale) ont connu des périodes très froides (climat
dit périglaciaire) pendant les grandes glaciations
quaternaires. C’est ainsi que le modelé du Bassin
parisien est en très grande partie hérité de la
morphogenèse des périodes froides du Quaternaire.
g) Autres facteurs
En rapport avec l’érosion mécanique, peuvent avoir
localement une certaine importance. Ce sont:
• La thermoclastie: fragmentation et dislocation des
roches sous l’action des variations de température.
Dans le Sahara central, les températures à la
surface de la roche, peuvent varier de 0°, la nuit, à
70°, l’après-midi. Des observations de terrain ont
confirmé l’importance de la thermoclastie. Ce
mécanisme n’a pas pu être reconstitué en
laboratoire, ce qui ne veut pas dire qu’il n’existe
pas.
• L’haloclastie ou action des sels (chlorure de sodium
CI Na, sulfates des régions désertiques) est bien
connue dans les régions littorales (action des
embruns chargés de sels, qui peuvent altérer
certaines roches et constructions). Par leurs
variations de volume, et aussi par certaines
réactions chimiques, les sels peuvent jouer un rôle
notable, comme dans les regions désertiques à
proximité des lacs salés.
Un ensemble de phénomènes complexes: le transport
des débris sur un versant
Le transport des débris, provenant de l’érosion
mécanique sur un versant, s’effectue suivant des
processus variés. La gravité et la présence de l’eau
sont les facteurs déterminants.
La reptation (ou creeping) concerne les mouvements
affectant les particules individuelles des sols ou de la
couverture détritique des versants.
En fonction des variations de température et
d’humidité, des alternances gel-dégel, de l’action des
animaux fouisseurs, les particules descendent
progressivement le long des versant. Le fait est
démontré, par exemple, par l’inclinaison des poteaux
télégraphiques.
La solifluxion concerne les roches argileuses ou
marneuses, lorsque celle-ci sont saturées d’eau. À
partir d’une certaine limite – limite de liquidité – un
ensemble cohérent peut se comporter comme une
masse.
Il se forme une masse boueuse qui, décollée de son
substratum, glisse sur le versant. D’où l’apparition de
loupes de solifluxion, qui peuvent bosseler les pentes
des versants.
Lorsque le phénomène est très marqué, il se produit
des coulées boueuses, capables de transporter des
blocs de plusiseurs tonnes sur des pentes, même
moyennes.
Le ruissellement diffus, qui se manifeste, lorsque le
sol est saturé d’eau, par de petits filets d’eau, est
capable de transporter des particules fines.
Parvenus à la base du versant, les débris peuvent
être pris en charge par les fleuves et rivières.
Ces différents processus jouent de manière différente
suivant les contextes morphologiques. Un versant en
milieu semi-aride n’évolue pas comme un versant
sous climat périglaciaire humide, d’où des aspects
très variés.
2) L’ALTERATION CHIMIQUE
Le terme d’altération est préférable à celui d’érosion,
car il insiste sur les phénomènes de transformation
des minéraux.
La majorité des minéraux formant les roches magmatiques
et métamorphiques est en équilibre avec les conditions de
milieu régnant en profondeur. C’est le cas des minéraux de
« roches vertes » comme l’olivine. En se trouvant placés
devant les conditions de température et de pression
régnant à la surface, ils se trouvent en état de
déséquilibre. En présence d’eau, leur altération peut être
rapide. Quand les températures, à la surface de la terre,
sont élevées, et en présence d’eau – condition
indispensable – il se produit des phénomènes d’hydrolyse
(destruction de minéraux). À 25°C ou à 30° l’hydrolyse est
très active, alors qu’elle est nulle à 0°.
C’est pourquoi, dans les vieux socles cristallins des régions
tropicales humides, les hydrolyses sont très actives. La
durée des périodes d’altération, qui se compte souvent en
millions d’années, joue également un rôle très notable. Si
l’on prend les minéraux des granites, on peut dès
maintenant indiquer que les éléments solubles (les bases,
calcium, potassium, sodium) seront évacués, et des argiles
de néogèses, de formation nouvelle dans les profils
d’altération, développeront. Des formations argilo-
sableuses (altérites), épaisses de plusieurs dizaines de
mètres, remplaceront à l’hydrolyse les minéraux les plus
résistants, comme l’alumine.
Dans les pays des latitudes moyennes (Europe occidentale)
ces phénomènes ne sont pas absents, mais beaucoup plus
modérés.

3) BIOSTASIE ET RHEXISTASIE, NOTION DE SEUIL


On a noté depuis longtemps (H. Erhart, 1967) l’alternance
de périodes de calme tectonique, où l’érosion est très
modérée, et de courtes périodes où, en fonction de
modifications tectoniques ou climatiques, ou les deux
ensemble, l’érosion est très active. Les périodes de calme,
où la végétation est très imposante et stabilise les
versants, sont qualifiées de périodes de biostasie.
Les périodes d’intense activité de l’érosion sont
qualifiées de rhexistasiques. D’où la théorie de la
« bio-rhexistasie ».
Cette théorie un peu « catastrophiste » n’est pas
toujours valable, lorsque l’on désire la schématiser à
l’extrême, mais elle peut se révéler utile dans
l’évolution des certains reliefs. Certaines crises
rhexistasiques peuvent être bien modestes. Mais il
est important de noter la notion de « seuil », qui
déclenche un processus.
C’est ainsi que, pour qu’un éboulement se produise,
il faut un certain degré d’humidification, et une
couche argileuse peut perdre toute cohérence, ce qui
permet la déstabilisation d’un versant. De même, les
tensions peuvent s’accumuler pendant des
décennies, jusqu’à atteindre un certain seuil, à partir
duquel se déclenchera un séisme. Les processus
d’érosion et de morphogenèse ne sont pas toujours
continus.
Chapitre 2 : dégradation des sols et processus et
facteurs
I. Définition
La dégradation des sols est un processus qui décrit
les phénomènes dus à l’homme et/ou à l’agressivité
climatique qui abaisse la capacité actuelle et/ou
future à supporter la vie humaine. C’est en quelque
sorte une situation où l’équilibre entre l’agressivité
climatique et le potentiel de résistance du sol a été
rompue par l’action de l’homme.
La dégradation des sols a des effets visibles sur
l’environnement physique et des conséquences
socio-économiques négatives.
II. Effets visibles de l’érosion
Parmi les signes et effets physiques visibles de la
dégradation peuvent être cités les éléments ci-
dessous:
. Les griffes, fines rigoles formées par l’eau,
particulièrement en haut des pentes, sur le bord des
pistes ou dans les champs sillonnés par les labours,
elles deviennent des ravines par élargissement dû à
la concentration de ruissellement excessif.
. Les pavages de cailloux et de pierres laissés en
surface, une fois les particules les plus fines du sol
emportées par le ruissellement, observés dans un
grand nombre de champs labourés et de terrains de
pâture.
. Les buttes de sol résiduel, où sont perchées des
touffes d’herbes, signes d’érosion, quand elles n’ont
pas été créées par l’accumulation de détritus foliacés
et d’humus, ou par le fouissage des rongeurs.
. L’accumulation de terre au-dessus des arbres, des
pierres, des palissades et des haies sur terrains en
pente.
. Les racines d’arbres et arbustes, exposées à l’air, ou
mises à nu dans des cours d’eau, résultats d’une
dispersion du sol ou d’un accroissement de
ruissellement suite à la dégradation de bassins
versants.
. Les dépôts de sols sur les pentes douces, ou de
graviers, sables et limons, dans les lits de cours d’eau
résultent d’une érosion en amont.
. Les taches nues dans les herbages et les pacages
signes d’une tendance à la dégradation.
. Le déplacement du sol par piétinement résultant du
pâturage sur les pistes à bétail au long des courbes
de niveau, où les animaux font progressivement
glisser la terre en bas de la pente
. Les mouvements du sol sous l’action du vent, mis en
évidence essentiellement par la formation de dunes.
. Des modifications de la flore (par exemple des
buissons se substituant à l’herbe), survenant après
surpâturage, et accompagnés souvent d’érosion.
. Les atterrissements dans les retenues de barrages,
lacs et étangs.
Du point de vue socio-économique outre les baisses
croissantes de rendements les conséquences
peuvent être citées:
. L’envasement des barrages, retenues d’eau, rivières,
canaux et système de drainage par la terre érodée
des sols dégradés et la réduction des stocks de
poissons à la suite des tels effets;
. Les inondations dues aux eaux de ruissellement par
suite de la réduction de la capacité d’infiltration des
sols dégradés, et la baisse de niveau ou assèchement
des nappes et points d’eau à cause des pertes d’eau
par ruissellement;
. Les problèmes sanitaires et de qualité de la vie: un
environnement dégradé n’offre que de mauvaises
conditions de vie.
. Les besoins accrus de terre et de facteurs de
production agricole.
. Les préjudices à la société et aux générations
futures qu’entraînent les pertes définitives de terre.

III. Processus et facteurs de dégradation des sols


A l’état naturel, quand l’homme n’intervient pas, le
sol est normalement couvert de végétation. Les
feuilles et les branches le protègent contre l’impact
de la pluie et l’effet desséchant du soleil et du vent.
Les feuilles mortes et les brindilles cassées forment
une litière superficielle qui le protège
ultérieurement, favorisent et abritent une
importante population de macro et de micro-
organismes. Les racines, en surface et en profondeur,
couvrent le sol mais aussi assurent sa cohésion. La
terre qui a été recouverte d’une végétation naturelle
pendant longtemps présente, en général, une couche
épaisse et bien délimitée de sol de couverture riche
(horizon A).
De couleur foncée en raison de sa forte teneur en
matière organique, elle contient une grande quantité
d’éléments nutritifs des végétaux, possède une
structure stable et bien développée qui lui permet
d’absorber et d’emmagasiner une grande quantité de
pluie.
Si le couvert végétal disparaît, que ce soit pour la
culture ou à la suite de surpâturage, d’incendies ou
d’aléas climatiques, des changements vont subvenir
dans le sol.
La vitesse de ce changement dépend de la
température, de la topographie, des précipitations,
du sol lui-même et du mode d’aménagement.
En général sous climats chauds, surtout quand les
résidus agricoles sont enlevés et que le fumier animal
ne retourne pas à la terre, la teneur en matière
organique tombe au-dessous de 0,5% la structure
des sols et leur fertilité se détériorent, l’eau des
pluies colmate la surface des sols l’infiltration
diminue, le ruissellement et l’érosion démarrent, puis
s’accélèrent.
En fait, la dégradation des sols est généralement un
phénomène complexe, dans lequel peuvent
intervenir plusieurs éléments qui contribuent à la
perte du potentiel agricole: l’érosion et l’enlèvement
du sol par l’eau ou le vent, la perte de fertilité
résultant de modifications chimiques, physiques et
biologiques.
On peut donc noter différents types et différents
facteurs et processus impliqués dans la dégradation
des sols.
Quels sont alors les principaux types de dégradation
des sols?
Le type de dégradation d’un sol se réfère au
processus qui cause la dégradation (déplacement du
matériau sol par l’eau et le vent, détérioration in situ
par des processus physiques, chimiques et
biologiques); on peut en distinguer deux catégories.
1° La dégradation par déplacement du matériau sol
qui comporte:
. L’érosion par l’eau provoquant
. Sur site
+ Perte de la partie supérieure du sol. Perte uniforme par
ruissellement superficiel ou érosion en nappe. Cette forme
d’érosion se rencontre souvent dans les sols à texture
sableuse en surface.
+ Déformation de terrain: déplacement irrégulier des
matériaux caractérisé par de grosses rigoles, des ravins.
. Hors site
+ Sédimentation en aval
+ Inondation avec comblement des lits de rivières, érosion
des berges, dépôt de limon.
. L’érosion par le vent entrainant
. Sur site
+ Perte de la partie supérieure du sol: déplacement
uniforme par déflation. Cette forme d’érosion
concerne par exemple de la partie nord du Burkina
Faso (Barro, 1995).
+ Déformation du terrain ; un déplacement inégal
caractérisé par des grandes dépressions, des buttes
ou des dunes (exemple de la région d’Oursi dans
l’Oudalan au Burkina Faso).
. Hors site
+ Dépôts éoliens tels que recouvrement des
structures : routes, constructions et/ou vent de sable
sur la végétation (exemple du recouvrement
permanent de la route RN1 à la hauteur de Gouré au
Niger).
2° La dégradation par détérioration interne du sol
comprenant
. La détérioration chimique:
+ Perte des éléments nutritifs : conduisant souvent à
une réduction sérieuse de la production (acidification
accélérée des sols ferrugineux sous culture).
+ Pollution et acidification à partir d’industries
biologiques. Apports excessifs d’éléments chimiques.
+ Salinisation due à une roche mère, ou à
l’accumulation par drainage latéral, ou causées par
les activités humaines telles que l’irrigation.
+ Cessation de la fertilisation par les inondations.
* La détérioration physique :
+ Batance et croûte à la surface du sol.
+ Compaction causée par une machine lourde sur un
sol à structure de faible stabilité, ou sur des sols où
d’humus est insuffisant.
+ Engorgement par l’eau : l’hydromorphie du sol due
à l’homme, inondation et submersion (à l’exclusion
des rizières).
+ Aridification: changement dû à l’homme du régime
d’humidité du sol vers un régime aride, changement
causé par exemple par l’abaissement du niveau de la
nappe phréatique locale suite au défrichement au
niveau des bas-fonds.
La détérioration biologique :
+ Déséquilibre de l’activité (micro) biologique de la
partie supérieure du sol par : déforestation, feu de
brousse, surpâturage, excès d’apport d’engrais
chimique, etc.
Il apparaît donc que l’homme et le climat sont les
facteurs causales de la dégradation des sols, la nature
même de ceux-ci conditionnant cependant le degré
et la vitesse de dégradation.
Le degré de dégradation d’un sol se réfère à l’état
présent de la dégradation (léger, modéré, sévère), la
vitesse moyenne de dégradation concerne la rapidité
apparente du processus de dégradation estimée sur
5 à 10 ans (lente, moyenne, rapide).
Des travaux de la FAO (1983) proposent les gammes
de degré de détérioration suivantes pour
l’appréciation de différents types de dégradation
concernés.
IV. EROSION HYDRIQUE

1 - Définition
L’érosion hydrique est composée d’un ensemble
de processus complexes et interdépendants qui
provoquent le détachement et le transport des
particules de sol.
Elle se défini comme la perte de sol due à l’eau qui
arrache et transporte la terre vers un lieu de
dépôt.
2 – Origine et mécanisme
La pluie et le ruissellement superficiel sont à l’origine
de l’arrachage du transport et du dépôt de la terre
enlevée.
L’arrachage est due à la fois aux gouttes d’eau (par
rejaillissement) et aux eaux de ruissellement et le
transport est assuré par ces eaux.
a) Impact de gouttes de pluies sur le sol
Les sols subissent un martèlement considérable
causé par les gouttes de pluie.
Les premières gouttes s’infiltrent dans le sol d’autant
plus aisément qu’il est meuble et que sa porosité est
élevée.
Cette première phase s’accompagne d’un
déplacement des particules et d’un tassement du sol.
Lorsque la couche superficielle s’humidifie, trois
processus se développent simultanément (figure 1) :
- La dégradation de la structure
- La formation d’une pellicule de battance
- L’érosion par splash ou érosion par rejaillissement.
b) Ruissellement
Comme les précipitations, le ruissellement agit sur le
sol par des actions de détachement et de transport
(figure 2).
Selon la nature du sol, la rugosité superficielle et la
pente de terrain, l’une ou l’autre de ces actions est
prépondérante.
D’une manière globale, il est admis que la vitesse de
l’eau est le paramètre prépondérant de l’action
érosive du ruissellement superficiel.
Réduire la vitesse de ruissellement revient à
pratiquer des techniques antiérosives. Il s’agira par
exemple:
- D’aménagement fonciers réduisant la pente de la
parcelle
- De technique améliorant l’infiltration
- Des techniques culturales augmentant la rugosité
de la surface du sol.
3) Les formes d’érosion
a) L’érosion en nappe ou ‘’sheet érosion’’
L’érosion en nappe (figure 3) est liée à 2 mécanismes:
Le détachement des particules de terre causé par le
choc de gouttes des pluies (effet splash).
Le ruissellement lorsque l’intensité devient
supérieure à la vitesse d’infiltration.
Cette forme d’érosion est caractéristique de la
plupart des sommets de bassin versant. Le
martèlement des pluies (splash) détache les
particules et les maintient en suspension par
turbulence.
L’érosion en nappe a un effet érosif maximal au
sommet des versants ou à l’aval d’un obstacle. Au bas
des versants, au contraire, il s’agit d’accumulation.
b) L’érosion linéaire (micro-channel ou rill erosion)
Un micro-filet ou une rigole est une dépression
suffisamment petite pour pouvoir être supprimée par
les façons culturales.
Sur un bassin versant ou une parcelle. L’érosion en
rigole succède à l’érosion en nappe par
concentration du ruissellement dans les creux. A ce
stade, les rigoles ne convergent pas mais forment des
ruisselets parallèles.
c) L’érosion par ravinement (Gully erosion)
La ravine est une rigole approfondie (figure 4) où se
concentrent les filets d’eau.
La rigole se transforme en ravine lorsque sa
profondeur interdit son nivellement par des simples
instruments aratoires.
Le ravinement constitue un stade avancé de
l’érosion. Les ravines peuvent atteindre des
dimensions considérables.
L’approfondissement des ravines remonte du bas vers
le haut de la pente (érosion régressive).
Cette forme d’érosion peut transformer le paysage
en ‘’badlands’’ et explique également la sape
d’ouvrages (ponts, radiers, digues filtrantes…).
Lorsque l’aménagement des ravines n’est pas
prolongé suffisamment en aval.
d) La sédimentation
Les particules arrachées aux terres se déposent entre
le lieu d’origine et les mers en fonction:
- De leur dimension
- De leur densité
- De la capacité de transport du ruissellement ou de
la rivière.
Les particules se déposent dans l’ordre suivant:
- Sable
- Sable fin
- Limon
Les argiles et l’humus colloïdal sont généralement
transportés jusqu’à l’embouchure du cours d’eau où
il se dépose soit après évaporation de l’eau, soit
après floculation.
4. Les facteurs de l’érosion hydrique
Les différents facteurs de l’érosion hydrique sont:
- Le climat et l’hydrologie
- La morphologie du site
- Le sol
- La végétation
- L’homme
V. EROSION EOLIENNE
1. Définition
L’érosion éolienne est le phénomène de
dégradation du sol sous l’action du vent qui
arrache, transporte et dépose des quantités
importantes de terre.
Elle s’installe quand:
- Il existe de vents violents et réguliers durant le
longues périodes dans la même direction (vents
dominants).
- Il s’agit d’un sol à texture grossière, sableux
notamment
- Il existe les reliefs atténués sur des grandes
étendues plates
- Le climat à une longue saison sèche entraînant la
dessiccation des horizons superficiels du sol et la
disparition du couvert végétal.
2. Origines et mécanismes de l’érosion éolienne
Les vents violents tels que définis ci-dessus sont à la
base de cette érosion.
L’arrache, le transport et le dépôt des particules de
sol sont fonction de la vitesse du vent, mais aussi de
la taille et de la densité de ces particules, de
l’humidité du sol et du couvert végétal.
Les facteurs de l’érosion sont donc:
- Facteurs causal: climat (vent, humidité)
- Facteur de conditionnement
. Nature du sol (texture, teneur en M.O)
. Topographie
. Couvert végétal
Du point de vie mécanique, le vent à les cinq modes
d’action suivants:
- La déflation : enlèvement des particules légères et
sables fins du sol ;
- Le transport des matériaux suivant 3 modes selon le
type de matériau (figure 17)
* La reptation: suite de déplacement infimes de
quelques mm de gros grains de sable qui roulent
sous du vent ; elle représente 50 – 80 % du transport
et est le principal déplacement des grands
ensablements dunaires ;
. La saltation: petit saut des grains de sable moyens
ou fins que le vent soulève brutalement et jette à
quelques dm, m ou dam. Elle présente 7 à 25 % du
transport.
. La suspension: transport sous forme de poussière,
même par vent léger sous des grandes distances
(milliers de km)
- La corrosion: creusement d’alvéoles et de gorges
dans les matériaux friables par les grains de sables
projetés par le vent ;
- L’ accumulation: dépôt de poussières et sables
transportés quand le vent perd de la vitesse ou
quand il est trop chargé
- L’évaporation sur la surface du sol.
Il apparaît qu’à la zone d’accumulation est toujours
associée la zone de déflation (figure 18) et la
conséquence est que:
- Une dune mobile avance par le mouvement de ses
propres sables et est à la fois zone d’alimentation et
d’accumulation
-Pour stopper les dunes, il faut traiter dune et zone
d’alimentation ou elles se forment et se mettent en
mouvement.
3. Effets et importance de l’érosion éolienne
Comme l’érosion hydrique, l’érosion éolienne est
néfaste pour le développement économique et
l’avenir de l’environnement de l’homme dans les
zones propices à son installation.
Les dangers sont notamment:
- La baisse de productivité des sols:
. entraînement des éléments fertilisants
Dégradation de la structure
Dessèchement du sol
Dégâts au niveau des plantes
L’ensablement des infrastructures
Réseaux d’irrigation
Parcelles de culture, pâturages
Voies de communication, villages
Etc.
4. Estimation de l’érosion éolienne et méthode de
prévention
L’estimation de l’érosion éolienne
Elle peut se faire directement par mesure qualitative
des effets sur la baisse de productivité des sols ou sur
l’ensablement des infrastructures.
Elle peut se faire également par l’utilisation de
l’équation universelle de l’érosion éolienne:
E=IRKTCADB (t/ha/an)
(1) I = indice d’érodibilité fonction de la texture de la
structure (facilité de dégradation du sol)
(2) R: couverture superficielle (végétation, résidus de
récolte)
(3) K=indice de rugosité du terrain
(4) T=texture
(5) C= indice climat, fonction du vent et de la
température
(6) A: dimension du champ dans la direction
parallèle au vent
(7) D: orientation r/r à la direction des vents
dominants
(8) B: protection artificielle brise-vent, chaumes
Chapitre 3 : influence du climat sur la formation des
reliefs
LES DOMAINES « GLACIAIRES »

1) LES GLACIERS
Ce sont des éléments notables des paysages de
nombreuses régions froides (Alpes, Groënland,
Antarctique). Leur puissance, comme agent de
transport et d’érosion, semble considérable. Plus de
10% de la surface des continents est couverte de
glaciers (Antarctique, Groënland). Leur étude est
l’objet d’une science particulière, la glaciologie.
Un glacier résulte de l’accumulation de glace, qui
provient elle-même d’un véritable métamorphisme
concernant les cristaux de neige:
Neige => Névé =>glace bulleuse => glace pure.
Les cristaux de neige se transforment
progressivement en cristaux de glace,
a) Types de glaciers. Il est possible de se baser sur les
critères morphologiques, les plus intéressants pour le
géographe. On distingue:
. Les glaciers régionaux (inlandsis), de type
groënlandais, qui se présentent sous l’aspect de
vastes coupoles au profil légèrement convexe.
Le glacier antarctique s’étend sur 13 millions de km²,
son altitude maximale est de 4 200 m, il se termine
sur l’océan par une énorme barrière de glace, celle
qui domine la Mer de Ross a 400 m de haut.
D'énormes icebergs se détachent de l’inlandsis
(vêlage des icebergs). La superficie de certains est
comparable à celle de la Corse. Il ne faut pas oublier
que ces icebergs sont formés d’eau douce.
L’épaisseur totale du glacier antarctique dépasserait
2 500 m. des lacs se trouveraient à la base. Ce point
est actuellement en cours d’étude.
Le Groënland est recouvert d’un inlandsis de 1,7
million de km², inlandsis qui a 1 500 m d’épaisseur et
est encadré de hautes montagnes. Des passages
(vallées, cols) existent dans la barrière montagneuse,
et permettent la circulation d’iceströms (fleuves de
glace) jusqu’à la mer.
Cette circulation est accélérée par « l’appel au vide »
des icebergs, et peut atteindre 7 000 m/an, soit 20
m/jour. Mais la masse de l’inlandsis est très peu
mobile.
Au total, le volume d’eau douce stocké dans les
inlandsis serait de 30 millions de km³, ce qui
représente 98% de l’eau douce des continents et 2%
de l’eau totale de l’hydrosphère. La fonte, même
partielle, des inlandsis, pourrait avoir les
conséquences les plus graves (élévation du niveau
des océans).
Les inlandsis sont considérés comme des glaciers
« froids » (température de -40% en profondeur), ils
ne fondent pas, exercent une action érosive assez
faible sur leur soubassement. Parfois, la glace se
« sublime » dans l’air sec (passage direct de l’état
solide à l’état gazeux).
Ils reçoivent de faibles précipitations à peine 100
mm/an, et assurent eux-mêmes le maintien de leur
propre climat froid, par phénomène d’auto-catalyse.
S’ils venaient à disparaitre, ils ne pourraient se
reconstituer, dans les conditions actuelles.
Les glaciers locaux (ou de plateau, comme en
Scandinavie), sont de taille beaucoup plus réduite. Le
plus souvent, il s’agit de glaciers de vallée, de type
« alpin » ou « himalayen », caractéristiques des
hautes montagnes bien arrosées des moyennes
latitudes. Il peut y avoir passage d’un glacier de
plateau à un glacier de vallée. Ces derniers peuvent
atteindre 30 km de long (Aletsch, dans les Alpes)
voire 120 km glaciers du Pamir.
Le profil en long des glaciers de vallée est
remarquable (croquis 26) avec une succession
d’ombilics, secteurs surcreusés, et de verrous, restés
en saillie. De nombreuses crevasses se trouvent à la
surface, crevasses longitudinales lorsque la vallée se
rétrécit, crevasses transversales lors des ruptures de
pente au droit des verrous.
Une langue glaciaire peut en rejoindre une autre et
un glacier unique se constitue de part et d’autre d’un
col. Il y a alors transfluence. Le cas est fréquent dans
les glaciers bien alimentés (Alpes du Nord).
Une langue glaciaire peut se détacher du glacier
principal, vers une vallée secondaire (diffluence).
Cette situation a été fréquente au Quaternaire lors
des périodes glaciaires dans les Alpes et les Pyrénées.
Un glacier bien alimenté peut s’étaler dans les
régions de piémont, en formant de vastes lobes. Ce
fut le cas actuel en Alaska. Lorsque l’alimentation du
glacier est insuffisante, il se forme un glacier de paroi
« cordillière des Andes », faiblement creusés des
versant pyrénéens.
Les glaciers rocheux correspondent à de petits
glaciers très riches en blocs, soudés entre eux par de
la glace, et qui sont coupés de leur source
d’alimentation (névés). Ils se déplacent en fonction
des alternances gel-dégel, qui permettent aux blocs
de progresser. Ils sont nombreux dans les Alpes du
Sud et les montagnes Rocheuses.
B) L’écoulement glaciaire.
C’est encore un sujet controversé. La glace est un
solide relativement plastique et visqueux.
L’écoulement de la glace est un fait certain.
La Mer de Glace, au Montenvers, s’écoule avec une
vitesse de 125 m/an. Les cadavres d’alpinistes disparus
vers 1880 ont été retrouvés près de Chamonix en
1910. En fonction des frottements sur la bordures. Il
en résulte la formation d’ogives très caractéristiques à
la surface du glacier. Chaque ogive correspond à un
élément de glace plus chargé en débris.
Dans ce solide qu’est la glace, les types d’écoulement
s’effectuent en fonction de la pente (l’écoulement est
plus rapide lorsque la pente est forte), et de
l’épaisseur du glacier.
Un glacier de 50 m d’épaisseur se met en
mouvement lorsque la pente dépasse 6°. Les glaciers
plus épais sont plus mobiles, à pente égale.
L’écoulement se fait parfois en régime extensif (sur
les verrous ce qui entraîne des tensions élevées et la
formation de crevasses. Dans les ombilics s’accumule
beaucoup de glace et l’écoulement est rapide dans
les glaciers « alpins », beaucoup plus lent dans les
inlandsis, sauf en ce qui concerne les iceströms.
Il est à signaler que la glace, dans les glaciers alpins,
se trouve au voisinage du point de fusion (0°C).
La base fond et regèle en permanence (observations
des techniciens de l’EDF sous le glacier de
l’Argentière, massif du Mont-Blanc). La glace n’adhère
pas toujours au soubassement rocheux, son
écoulement en est facilité.
Chapitre 4 : les modelés
I. LES RELIEFS DANS LES ROCHES CRISTALLINES,
SOCLES ET MASSIFS ANCIENS
Les socles et massifs anciens occupent de très
vastes régions du globe. Leur étendue est
supérieure à celle des bassins sédimentaires. Ils
sont formés principalement de roches cristallines
et métamorphiques, mais le matériel
sédimentaire n’est pas absent. Les types de
formes que l’on observe dans ces régions sont
très variées. On peut distinguer, à partir des
grands types de structure:
. Les régions de boucliers. Il s’agit de domaines de taille
considérable, de l’ordre de plusieurs millions de km²
(bouclier canadien, Sibérie centrale, Afrique occidentale).
Les reliefs correspondant sont en général de faible
ampleur. Ils ont été peu tectonisés;
. Les régions de massifs anciens. Ils font partie, en Europe,
des domaines calédoniens et hercyniens, de la Bretagne au
massif de Bohême. Leurs dimensions sont plus modestes:
quelques dizaines de milliers de km² (Massif central,
Massif schisteux rhénan). La plupart ont été fracturés et
tectonisés au Tertiaire (Espagne du Sud-Ouest, Vosges,
etc.);
. Des fragments de chaînes récentes (Alpes, Pyrénées)
qui englobent des éléments hercyniens réactivés
(massifs du Mont-Blanc, Pelvoux, Zone axiale
pyrénéenne, repris dans une tectonique récente.
Ces différents éléments peuvent être regroupés sous
la dénomination commode de « socles », formés
principalement de matériel cristallin. Tous ont été
rabotés par une ou plusieurs surfaces
d’aplanissement. Une chaine de plissement granitisée
dont les reliefs ont été aplanis se transforme en socle.
Les granitoïdes forment, fréquemment, les roches les
mieux représentés dans les socles. L’accent sera donc
mis sur les caractères particuliers de ces roches vis-à-
vis de l’érosion. Mais il ne faut pas oublier que
certains socles sont à dominance sédimentaire
(Ardennes).
Dans cette dernière région comme dans le Massif
armoricain ou le Sud-Ouest ibérique, les schistes
jouent un rôle fort important.
1) LE COMPORTEMENT DES GRANITOÏDES FACE A L’EROSION

Relief résiduel de quartzites (Estrémadoure, Espagne)


Les granitoïdes sont généralement considérés
comme des roches dures, ce qui est en grande partie
exact dans les pays frais ou froids. Mais cette
indication est à nuancer. Les granites corses sont très
durs, tandis que ceux d’Estrémadoure (Espagne) sont
peu résistants par rapport aux calcaires et aux
quartzites.
Le problème de la résistance des granitoïdes est un
des problèmes majeurs de la morphologie. On peut
estimer que la tenue de ces roches vis-à-vis de
l’érosion dépend de tout un ensemble de facteurs:
a) La fracturation
Tous les granites sont diaclasés, mais la densité et
la réparation des diaclases sont très variables. Le
granite de Guéret (Limousin) est très peu diaclasé.
D’autre part, la répartition des diaclases
principales à un rôle dans l’organisation du réseau
hydrographique. Le tracé des rivières peut se
calquer sur le réseau de diaclases (Nord du
Portugal) et prend alors un dispositif
géométrique, le cours des rivières et de leurs
affluents se recoupant suivant des angles droits.
Il peut exister de nombreuses fissures au niveau des
cristaux qui forment les granites, principalement en
ce qui concerne les cristaux de quartz. Cette micro-
fissuration, bien visible au microscope peut
gravement diminuer la résistance de l’ensemble
cristallin, en accélérant l’importance des hydrolyses.
Certains granites sont broyés par des efforts
tectoniques importants, et n’offrent aucune
résistance à l’érosion. Les roches broyées (mylonites)
peuvent néanmoins recristalliser, leur résistance
s’accroît alors.
b) La composition minéralogique
A toujours été considéré comme un facteur important.
Rappelons que les granites les plus répandus sont les
granites calco-alcalins, qui comportent des cristaux de
quartz, de feldspaths (orthose, ou feldspath potassique, et
plagioclases, ou feldspaths calcosodiques), et de micas
(mica noir ou biotite, blanc ou muscovite). Tous ces
minéraux se comportent de façon différente devant les
hydrolyses. Les quartz résistent très bien, mais les
plagioclases sont en général fragiles, sinon très fragiles.
A partir de l’altération des feldspaths se forment des
minéraux argileux, par exemple de la kaolinite dans
les milieux tropicaux humides. L’altération chimique
en climat frais est beaucoup plus modeste, de type
« ménagé », avec faible production de minéraux
argileux. Le mica noir est beaucoup moins résistant,
et son altération entraîne l’apparition de minéraux
argileux gonflants (smectites), qui en absorbant l’eau,
développent des pressions considérables à l’intérieur
des granites, ce qui est un facteur d’afaiblissement.
c) D’une manière générale, la résistance des roches
cristallines est en rapport avec leur porosité.
Certains granites sont très poreux (Espagne du
Sud-Ouest, où la porosité de certains échantillons
atteint 4%) alors que d’autres le sont très peu
(moins de 1%). Cela pourrait expliquer la résistance
des roches vertes, où la porosité est très faible,
bien que les minéraux dont elles sont formées
(amphiboles, olivine) soient, en théorie, vite
altérés à l’air libre.
La dureté des granitoïdes est donc très variable. Les
granites peu fissurés, riches en quartz, sont très
résistants (Aiguilles de Bevella, Corse). Les leuco-
granites (riches en éléments blancs comme la
muscovite) sont dans ce cas. Mais les granites poreux
et très diaclasés, riches en biotite et en plagioclases,
sont très fragiles, surtout sous certains climats. Déjà,
dans le contexte méditerranéen, le granite du Plan de
la Tour (près de Saint-Tropez) n’est pas très résistant.
Toutes ces considérations ont une valeur pratique
notable, car de nombreux barrages sont construits
sur un soubassement de granitoïdes. La résistance à
l’altération, la répartition des zones de broyage,
l’importance des diaclases, ont alors une grande
importance.
II. LES FORMES DANS LES GRANITOÏDES
Elles ont la plus grande variété.
a) Formes en relief
Dans les granites les plus durs, les plus massifs, on
peut observer (domaine alpin) des aiguilles, comme
celles du Midi, dépassant de plus de 2 000 m les
vallées voisines. Ces granites sont seulement
attaqués par la cryoclastie. La roche, très saine, est
appréciée des alpinistes. Légèrement
métamorphisée, elle prend une couleur verdâtre, liée
à la présence de chlorite, minéral de cette couleur.
Ce granite est parfois baptisé du nom de
« protogine », à l’étymologie discutable. L’érosion, à
la base des versants amène la formation d’éboulis
constitués de gros blocs. Parfois – c’est le cas du
Mont-Blanc stricto sensu - ,on observe la formation
de coupoles aux formes assez lourds, aux versants
incisés par les glaciers.
b) Les pains de sucre ( croquis 19a) apparaissent dans
les régions tropicales humides (celui de Rio-de-
Janeiro est le plus célèbre), mais dans des latitudes
différentes, certains reliefs en sont proches.
En réalité, il s’agit bien d’une forme structurale, en
rapport avec un système de diaclases courbes. À
partir de ces diaclases peuvent se détacher des
écailles de roches épaisses de quelques cm. Il s’agit
du phénomène d’exfoliation, à distinguer de la
desquamation, qui concerne des éléments de roches
beaucoup plus minces. L’exfoliation s’explique par la
pénétration de l’eau à la faveur des diaclases, puis
par l’argilisation de la roche granitique, peut se
produire lors du creusement de tunnels, il est alors
dû à des phénomènes de détente:
le creusement des galeries libère des contraintes, à
l’intérieur de la roche, qui peuvent être
considérables.
Avec leurs parois lisses, où la végétation est réduite
aux lichens, leurs pentes convexes, les pains de sucre
constituent une forme très caractéristique, et assez
fréquente, des reliefs granitiques, en milieu humide
intertropical.
Croquis : Les reliefs en roches cristallines
Les reliefs résiduels (ou inselbergs) caractérisent certaines
surfaces d’aplanissement sur granites. Tous les inselbergs
ne sont pas granitiques, mais c’est le cas de la majorité
d’entre eux. Le plus souvent, ces reliefs proéminents sont
formés de granites résistants (Afrique occidentale,
Dekkan), et ils constituent un des éléments les plus
notables du modelé des régions intertropicales. Ainsi les
granites à mica blanc, faiblement diaclasés, sont favorables
à la genèse de ces formes, tandis que les granites calco-
alcalins fissurés correspondent aux plaines d’érosion
voisines.
C’est le cas pour l’Assekrem, relief résiduel de
résistance du Hoggar, entouré de régions basses
entaillées dans des granitoïdes peu résistants.
Un inselberg: la Sierra de Montanchez (Espagne)
c) Les plateaux granitiques. Ils sont particulièrement
nets dans les massifs anciens de l’Europe
occidentale, le Canada, La Sibérie. Leur modelé est
original. Il existe une opposition entre les horizons
doucement vallonés, qui évoquent une
« pénéplaine » au sens de Davis, régions drainées
par de modestes cours d’eau à pente faible, et les
grandes vallées profondément incisées.
Les plateaux dérivent de surfaces d’aplanissement
tertiaires.
Leur surface est recouverte d’arènes, formation
meuble de cristaux de quartz et de feldspaths, qui
dérive de la désagrégation granulaire des roches
cristallines, sans altération chimique notable.
Parfois, des blocs plus résistants forment les chaos
granitiques des tors (croquis 19b) (Sud-Ouest
britannique), des compayrés (Sidobre). Certains
blocs, dégagés des arènes, prennent un aspect
curieux, ils sont en équilibre les uns sur les autres
(« Pierre à la Sorcière » de nombreuses régions
françaises).
Ces blocs ont été mis en place à partir d’un réseau de
diaclases, parfois encore reconnaissables, la
désagrégation a donné lieu à la formation d’arènes,
ensuite déblayées par le ruissellement. Les boules de
granites, isolées, peuvent atteindre 10 ou 20 m de
haut, et sont fréquentes dans maintes régions
(Mesetas ibérique et marocaine).
Chaos de granitiques (Espagne méridionale)
Les grandes vallées sont étroites, elles prennent une
forme en V, elles forment des sites très adaptés à la
construction de barrages (la Dordogne en Limousin).
En effet, les plateaux dans de nombreux cas, ont été
soulevés énergiquement au Plio-Quaternaire, et le
creusement des vallées a été rapide.
d) Les dépressions (alvéoles) dans les granites. Il s’agit
d’un des aspects les plus déconcertants de certaines
régions de socle. Les granites sont en creux par
rapport aux autres roches.
C’est ainsi que dans l’Ouest de la Normandie le granite de
Flamanville est nettement en creux par rapport aux roches
métamorphiques qui l’encadrent ( le batholite de
Flamanville est entouré d’une auréole de métamorphisme
de contact). La mise en creux a eu lieu au Tertiaire et au
Quaternaire. Les alvéoles sont fréquents dans le Massif
central, et prennent parfois des formes complexes, en
« amibes ». Ils sont également fréquents dans le monde
méditerranéen (Meseta ibérique), et les granites calco-
alcalins ont souvent un comportement de roches tendres
vis-à-vis des quartzites, des grés métamorphiques, et des
calcaires.
Même situation en Afrique occidentale, où les plates-
formes à soubassement granitique sont dominées par des
escarpements lies aux grès durs. Même là où le dispositif
des alvéoles n’est pas net, le modelé granitique est
original. En climat tropical humide, les reliefs « fondent »
littéralement, et apparaît un paysage de « meias laranjas »
- demi-oranges – typique de certaines régions du Brésil.
Les granites sont altérés sur plusieurs dizaines de mètres
de profondeur (croquis 19c). Les altérites, riches en argiles,
peuvent être déblayées au bulldozer. En effet, les
hydrolyses sont très actives en milieu chaud et humide.
Chapitre 5 : caractères de la géomorphologie tropicale
I- Influence de la chaleur et de l’humidité

La chaleur constante et l’humidité ont, à la surface


du sol, des conséquences biologiques et physico-
chimiques importantes sur les conditions de la
morphogenèse et de la pédogenèse tropicales.
La chaleur influence les mécanismes biochimiques
à l’origine de la formation de la matière organique,
l’accumulation de cette matière sur le sol (humus)
et sa minéralisation.
L’humidité joue aussi un rôle dans la décomposition
de la litière, en fournissant des produits actifs à la
pédogenèse pour l’altération des roches. L’humus,
dans les milieux tropicaux cimente les
agrégats du sol, favorise la porosité superficielle
(infiltration élevée) et est impliqué dans la
migration des oxydes de fer.
II- Rôle de la végétation
Le développement des végétaux favorise la mise
en place d’un circuit entre le sol et l’atmosphère ;
les processus qui en découlent intéressent la partie
superficielle du sol. Néanmoins, ils contribuent aux
phénomènes d’altération profonde.
La forêt dense protège la surface du sol ; celle-
ci est ainsi soustraite aux effets des variations
de température et à la dessiccation.
En maintenant une humidité constante, tout
durcissement des horizons superficiels est ainsi évité ;
ce qui atténue les conséquences immédiates de la
chute des pluies : les apports au soi sont étalés dans le
temps par le phénomène de « ressuyage » au niveau des
feuillages et des troncs des arbres, les refus à
l’infiltration sont modestes (5 à 20% de la lame
écoulée). Donc, en, forêt, l’eau qui parvient au sol est une
eau qui imbibe ; cette eau, qui n’est pas immédiatement
restituée aux rivières, gouverne la morphogenèse par
une altération profonde et rapide,
un lent déplacement des débris sur les versants, une
activité moindre de l’érosion fluviale.
En savane, la phénologie différenciée des herbes et
des arbres, associée aux alternances de périodes
humides et de périodes sèches, créent des traits
morphogénétiques particuliers : l’altération est
moins profonde et le manteau d’altérites est
moins épais ; les processus sont dominés par le
concrétionnement et le cuirassement ; le
ruissellement diffus est exalté.
Ce processus atteint son intensité maximale au
début de la saison humide avant l’épanouissement
des herbes ; cela se traduit par une dispersion des
agrégats de la surface du sol, par son « glaçage » dès
les premières pluies qui alimentent rapidement un
important écoulement superficiel.
III- Exemple de dynamique superficielle des versants
sous forêt
Sous forêt dense, l’érosion est relativement faible,
le sol demeurant longtemps humide. Il n’y a pas de
phénomène de dessiccation et le coefficient de
ruissellement reste faible. Cette remarque reste
valable sous forêt artificielle (plantations) ainsi que
dans une forêt secondaire et sous friches (KOLI BI,
1981 ; ROUGERIE, 1960).
Par contre, il y a un risque d’érosion élevé
notamment en cas de défrichement, où le sol n’est pas
protégé.
Sur les versants, les phénomènes les plus fréquents
sont les glissements, variables selon le type d’altération
et la façon dont se fait le contact roche/sol ; le glissement
est important quand le sol est argileux. Il offre la possibilité
de transformation en boue après infiltration par de petits
ravins, les phénomènes de reptation sont déclenchés par
tous les petits phénomènes d’érosion qui affectent les
premiers centimètres du sol en dehors du
ruissellement, comme les impulsions des gouttes de
Autre phénomène fréquent, le ruissellement ; il en
existe deux types, le ruissellement diffus et le
ruissellement concentré. Le ruissellement diffus se réalise
par de petits filets d’eau qui fonctionnent sur quelques
mètres au maximum pendant les pluies ; il prend
naissance au niveau des gouttières et se subdivise en
plusieurs filets ; ainsi toute la surface du versant est
balayée par ces filets. Lorsque la pente s’élève,
l’écoulement est plus rapide. On parle de ruissellement
concentré. Le ruissellement concentré se forme par de
petits talwegs qui collectent chaque fois les eaux de pluies.
Il existe des seuils où l’on passe du ruissellement
diffus au ruissellement concentré, les paramètres de
passage sont la végétation (abondante à faible), la
perméabilité du sol (importante à faible) et la pente
(de 2 à 3% jusqu’à 10%).
Dans tous les cas, c’est le manteau d’altérites qui
se trouve aux prises avec les processus
d’évolution des versants et plus précisément, sa
partie superficielle, eu égard au caractère
fondamentalement discontinu et localisé des
glissements de terrain.
Dans l’échelle d’efficacité des processus morphogéniques,
il semble que la première place soit prise par les
déplacements lents de particules sous l’effet de multiples
impulsions (impacts des grosses gouttes de pluie,
bénéficiant du rôle de gouttière joué par les feuilles, chute
des arbres, activité des animaux dans le sol qui assurent
un incessant brassage…). Bien que le ruissellement diffus
contribue également au colluvionnement, les transports
solides à la surface du sol demeurent extrêmement
réduits (quelques dizaines à quelques centaines de
kg/ha/an), quelle que soit l’inclinaison des versants.
Les cours d’eau assurent aisément l’évacuation
des produits, essentiellement argilo-limoneux, en
provenance des versants : cette charge donne
une couleur jaunâtre ou rougeâtre aux fleuves ;
cependant, elle ne permet pas l’érosion rapide des
seuils rocheux (les rapides sur les fleuves) qui
parsèment souvent les cours d’eau forestiers (comme
la partie méridionale du fleuve Sassandra, en Côte
d’Ivoire occidentale).
Ainsi, que ce soit en forêt ou en savane, dans les
milieux tropicaux, les processus morphogénétiques
mécaniques (glissements et mouvements de
masse profonds et superficiels, reptations,
ruissellements diffus) ou chimiques (cuirassement,
processus infra pédologiques...) interviennent sur un
matériel pédologique de nature variée. C'est donc
par de voies indirectes que les influences
lithologiques et climatiques se répercutent sur les
formes de reliefs.
Chapitre 6 : les modelés des forêts tropicales
I- Considérations générales
Les oscillations climatiques qui ont influencé très
probablement l’évolution des formes de relief ont surtout
laissé des traces dans les sols, faisant de ceux-ci des
éléments de reconstitution géomorphologiques
importants. Dès lors, dans le monde tropical, on
observe l’existence d'un manteau très épais (3 ou 4 m en
général, parfois plus) de matériaux issus de l'altération de
la roche ou d'apports latéraux (par comparaison les
sols des pays arides font quelques centimètres
d'épaisseur tandis que ceux des pays froids, quelques
décimètres).
En dehors de leur importante épaisseur les sols
tropicaux possèdent des caractères propres aux
géosystèmes tropicaux : matériaux pédologiques
spécifiques comme la cuirasse ferrugineuse qui sont
capables de figer les formes de reliefs.
En dehors de quelques reliefs structuraux (reliefs
pseudo-appalachiens, plateaux gréseux, monadnocks
tectoniques ou résiduels, chaînes de collines
volcaniques, plaines d'épandage) l'essentiel du relief
tropical se répartit entre des modelés de dissection
façonnés dans un matériel pédologique très ancien et
très varié.
Ces modelés, que l'on retrouve sur les vastes
pénéplaines précambriennes, portent aussi bien
les marques récentes de la morphogenèse
actuelle (système morphoclimatique tropical actuel
favorisant l’existence de graviers sous berge, de
colluvions et alluvions sableux...) que des
héritages d'une morphogenèse ancienne (stone-
lines, gravillons ferrugineux issus de systèmes
morpho climatiques passés, rôle des paléoclimats).
Cependant, on observe bien l’existence de
modelés franchement hérités comme les modelés
cuirassés (portant une cuirasse ferrugineuse) et de
modelés franchement liés à une morphogenèse
actuelle comme les modelés convexes ou demi-
oranges de forêt. Aussi, des différences existent-
elles entre les modelés du domaine forêt et les
modelés du domaine de la savane, bien sûr en
dehors de quelques traits communs.
Car les processus morphogénétiques sont différents d'un
domaine à un autre : Dans le domaine forestier humide,
les versants sont constamment imbibés ; ils évoluent et
reculent sans avoir besoin des rivières qui n'entraînent que
des solutions. Du point vu morphologique, les versants
sont courts, en pente forte, sans concavité nette de
raccordement à des vallées larges à fond plat ; Les
modelés cuirassés et les formes qui en dérivent existent
sous climat guinéen. La mise en place de ces modelés est
très ancienne (12 à 10 000 ans BP au minimum) alors que
le climat soudanien, dans ses manifestations actuelles,
est plus récent. On parle de modelés hérités. Les
modelés cuirassés se regroupent en deux ou trois
séries : les glacis cuirassés, correspondant à des
hautes formes topographiques de plateaux tabulaires
ou inclinées, recouvertes d'une cuirasse bauxitique
ou ferrugineuse et dominées par des reliefs
rocheux importants, les versants cuirassés
entourant des chaînons en roches volcaniques
(dolérites, amphibolites, roches vertes... ),
les plateaux cuirassés et croupes dérivées qui sont
des formes topographiques tabulaires ou
légèrement convexes et recouverts d'une cuirasse
ferrugineuse ou de gravillons ferrugineux ; les points
communs entre ces différents modelés sont leur
surface à pente régulière et leur situation
topographique de sommet, la cuirasse se
comportant, dans le système d'érosion soudanien
comme une roche dure et non plus comme un
matériau pédologique.
Ainsi, que ce soit en forêt ou en savane, les processus
morphogénétiques mécaniques (glissements et
mouvements de masse profonds et superficiels,
reptations, ruissellements diffus) ou chimiques
(cuirassement... ) interviennent sur un matériel
pédologique de nature variée. C'est donc par de
voies indirectes que les influences lithologiques et
climatiques se répercutent sur les formes de
reliefs.
II- Types de modelés dans les régions forestières

1) Caractéristiques générales

Les formes caractéristiques des modelés en milieu


forestier sont l'expression d'une dynamique liée à
l'ensemble des conditions bioclimatiques ambiantes.
Les bas-pays se signalent par la netteté des
modelés multi-convexes sculptés dans les altérites
comme une succession des collines hémisphériques
(les demi-oranges du Brésil tropical),
hautes de quelques dizaines de mètres, séparées par un
enchevêtrement de vallons parfois élargis en cuvettes
marécageuses (aux sols hydromorphes marqués par la
présence d'argiles gonflantes de type montmorillonite,
saturées en bases). La concavité peu marquée à la base
de ces formes traduit la faiblesse du colluvionnement sur
les pentes, tandis que la restitution des eaux infiltrées
permettant l'exportation massive d'éléments dissous (60 à
80% des matières sont transportées sous forêt, contre 20 à
40% sous savane) est assurée par des sourcins
responsables d'un soutirage au pied du versant; la
convexité du versant est ainsi entretenue.
En dehors de ces formes et des grands reliefs du
socle, des formes atypiques existent: petits
inselbergs ou « pains de sucre », crêtes quartzitiques,
plateaux gréseux, reliefs tabulaires cuirassés. qui
introduisent au milieu des résultats de la
morphogenèse actuelle, le témoignage d'héritages
anciens qui ont! Pu se maintenir jusqu'aujourd'hui.
Ainsi, le domaine forestier tropical présente en général des
reliefs particulièrement, monotones: les formes
fréquentes sont des formes de collines. Quelques
reliefs résistants émergent quelquefois, façonnés dans
des roches saines et qui parfois affleurent ; certaines
formes comme les pains de sucre appartiennent à
l'ensemble des inselbergs. Par exemple Duékoué, Divo en
Côte d'Ivoire et Rio au Brésil présentent des types
d'inselbergs s'assimilant aux pains de sucre. Les roches
affleurent aussi dans les vallées telles que celles des
fleuves Sassandra et Bandama en Côte d'Ivoire :
Ces roches sont mises à jour par érosion linéaire
provoquant par endroits des cascades et des
chutes. Partout ailleurs, on a entre la surface du
sol et la roche saine, les altérites qui sont
soumis à la dissection par les cours d'eau.
En gros, on observe de deux ou trois types de
modelés selon l'origine des altérites, les modelés de
dissection dans les altérations granitiques, modelés
de dissection dans les altérations schisteuses, et les
modelés dans les sables argileux.
2) Dans les altérations granitiques ou gneissiques
Sur roches granitiques ou gneissiques, les altérations
sont épaisses; elles atteignent 40 à 50 m
d'épaisseur; riches en matériaux sableux (à cause du
quartz), ces altérites sont poreux. Dans un sol poreux, le
ruissellement est très limité et l'infiltration qui est
importante maintient la continuation de l'altération. La
place est prise par des déplacements lents de
particules sous l'effet de multiples impulsions (chute
des arbres, activité des animaux fouisseurs, impact des
gouttes de pluies, ... ). On assiste alors à un
colluvionnement et à quelques transports solides.
Un modelé très particulier est créé, le modelé en demi-
orange; dans un modelé multi-convexe hémisphérique
aux flancs très convexes, la hauteur atteint quelques
dizaines de mètres. Le contact avec le bas-fond est une
rupture de pente bien visible (figure 12).
On peut remarquer sur cette forme l'insignifiance de
la concavité basale, la faiblesse du colluvionnement sur
les pentes et la restitution des eaux infiltrées permettant
l'exportation massive d’éléments dissous. C'est au Gabon
et au Brésil que l'on a décrit des demi-oranges typiques,
c'est-à dire avec un angle de contact versant /bas-fond net.
2) Dans les altérations schisteuses
Les schistes proviennent du métamorphisme
des argiles. Les caractéristiques des altérations
schisteuses sont un pourcentage élevé d'argile et
un pourcentage faible de sables. Aussi, l'infiltration
est-elle faible, alors que le ruissellement est fort en
surface. Cet important ruissellement fait évoluer
les versants dans le sens d'un adoucissement des
pentes et d'un abaissement des hauteurs; et
comme peu d'eau est infiltrée, les altérites sont
peu épaisses (environ 10 m).
Cela se traduit par un développement de plateaux
à interfluve allongé avec une plus grande densité de
drainage par des axes orthogonaux.

Figure 12: Genèse d’un versant sur granite en milieu


III- Les modelés dans les sables argileux

Les matériaux concernés sont des formations


sablo-argileuses d'origine sédimentaire. En
Afrique, ces modelés datent du Miocène et du
Pliocène (fin Tertiaire) ; ils se localisent dans le
Continental terminal, c’est-à-dire dans des
formations sédimentaires d'origine continentale.
En Côte d'Ivoire, elles se sont mises en place
sous un climat semi-aride à partir d'une
ancienne altération sur le socle (figure 13) :
l'épaisseur des sédiments varie entre 100 et 200 m
avec en gros 70 à 75% de sables, 20 à 25% d'argiles
et quelquefois des grès. Dans ces formations, deux
types de modelés sont observables. Ce sont des
modelés intérieurs et des modelés de voisinage des
lagunes.
Le modelé intérieur est un plateau à vallées très
larges dont les versants sont en pentes relativement
faibles (2 à 3%); l'interfluve est plus ou moins
convexe avec une densité faible de vallées car les sols
sont meubles.
Le modelé prè s des lagunes (à proximité du
niveau de base de l'érosion) est constitué par une
succession de plateaux en pentes faibles, avec des
vallées aux versants raides et à fond plat et un
interfluve plan.

Figure 13: Modelé sur sables dans le sud de la Côte d’Ivoire


1- Processus géomorphologiques particuliers sous
forêt
Les processus sont liés à la profonde personnalité du
domaine forestier.
La forêt crée un micro-milieu particulier à la
surface du sol, bien différent de celui qui, dans
les mêmes régions, existe à la surface du sol nu.
C’est pourquoi la destruction de la forêt modifie
radicalement l’équilibre pédogénétique et
morphogénétique.
La forêt est en effet un puissant écran, un
véritable filtre climatique, mais elle joue aussi le
rôle d’écran pour les eaux de pluie, et semble
avoir un rôle régulateur, atténuant les
conséquences immédiates des chutes de pluies. En
effet, La végétation forestière constitue un écran très
efficace qui se place entre l'atmosphère et la
surface du sol, et qui modifie ainsi le
phénomène de météorisation : le climat
géomorphologique est ainsi un véritable climat
original, un bioclimat.
Un des premiers résultats de cet écran est la modification
de l'état hygrométrique de l'air. Des études ont montré sur
le Centre ORSTOM d'Adiopodoumé et dans la forêt du
Banco près d'Abidjan, que l'humidité relative restait
voisine de 90 % sous forêt, alors qu'elle n'était plus
que de 70% au sommet des arbres par beau temps.
Cette humidité constante dans l'atmosphère feutrée du
sous-bois permet au sol de ne pas se dessécher, et
entretient l'altération. Mais il y a aussi une modification
des variations de température au sol et dans le sol.
On peut citer les chiffres suivants recueillis à Kiendi,
près de Bondoukou dans une région de limite forêt-
savane (tableau 2) :
8 h 30 10 h 30 12 h 30 14 h 30
Sous cuirasse nue 29°8 44° 3 52° 4 43° 2
Sous couvert Herbacé 27° 4 37°4 40°6 36°8
Sous forêt 25° 26° 8 28° 8 28° 2
L'amplitude maximale (entre 8 h 30 et 12 h 30) est
ainsi de 13°2 sous savane alors qu'elle n'est que de
3°8 sous forêt.
Là encore cette régularité, sous forêt, permet le
développement constant des processus d'altération.
L'écran forestier est le premier obstacle que
rencontre la pluie dans sa chute vers le sol. Les
feuilles brisent d'abord l'énergie cinétique des
gouttes ; à vrai dire elles la transforment, au bout de
très peu de temps on a affaire à de très grosses
gouttes, sinon à des filets, qui tombent d'une voûte
de 15 à 30 m de hauteur, au lieu de gouttes plus fines
venues de nuages situés à quelques centaines de
mètres.
Mais les voûtes jouent un autre rôle comme écran à
la pluie : elles retiennent une certaine quantité qui
peut s'évaporer directement.
Il y a un deuxième aspect non négligeable : après les
pluies, l'eau qui ruisselle encore le long des troncs et
qui s'égoutte de la voûte, prolonge le rôle de la pluie
et favorise l'infiltration.
Les conditions microclimatiques du sous-bois
orientent les processus morphogénétiques vers la
prédominance des actions biochimiques. Les
mécanismes physiques sont inhibés par la faible
ampleur des variations de température et
d'humidité. Ces quelques mots définissent les
caractères généraux de l’évolution sous forêt, et
expliquent en définitive l’importance des
phénomènes d’altération chimique.
- Fourniture, mais aussi rapide décomposition de la
matière organique.
- Persistance d’une certaine teneur en humus
favorisant l’infiltration (structure favorable, porosité
- Conservation d’une humidité suffisante en
surface, mais aussi horizon sous-jacent .
- Lenteur du développement des altérites, mais aussi
leur protection par la forêt, etc.
L’altération chimique ne doit pas être confondue avec
la dissolution. Cette action d’altération joue sur des
réactions, se traduit par des transformations, pas
forcément par des soustractions. Des substances
peuvent être déplacées au cours des processus
chimiques, on n’a pas le droit de postuler leur
disparition.
L’expression juste est celle « d’altération chimique »
et c’est la pédogenèse. Que cette altération soit
extraordinairement profonde, primordiale au
point d’orienter toute la morphogenèse, c’est là
notre thèse ; mais nous nous sommes toujours
refusé à la confondre avec une perte généralisée de
substance, des agrégats, etc.). Des variations
hydriques peuvent se produire (horizon de
concrétionement).
2) Les processus mécaniques

Les processus chimiques, plus intenses, sont à l’avant


garde et façonnent un contact entre altérites et roches
saines, à des profondeurs de plusieurs dizaines de
mètres, parfois plus d’une centaine de mètres. Par
contre, les processus mécaniques ne s’exercent que
superficiellement dans les sols et produits d’altération.
Ces processus mécaniques n’en revêtent pas moins une
relative importance.
Là encore, il faut partir des conditions d’accès de l’eau au
sol.
Arrivée de l’eau sur le sol forestier

L’écran forestier modifie l’arrivée de l’eau sur le sol.


Ces modifications entraînent certaines formes
d’érosion ; en effet :
- les gouttes tombant des arbres sont souvent plus
grosses que celles provenant directement de la
pluie, et leur nocivité est accentuée d’une part
par l’effet « splash », d’autre part par leur
concentration au même endroit.
- le ruissellement le long des troncs, s’il a été souvent
exagéré, n’en est pas moins une réalité. Il concentre
les eaux en des drains qui profitent au sol des
systèmes racinaires.
- Enfin, le retard dû au ressuyage de la voûte
forestière, permet à une quantité importante d’eau
d’être étalée dans le temps : il en résulte une
augmentation de l’infiltration qui se produit au
détriment du ruissellement.
Types de ruissellement

Il a paru très longtemps étonnant de parler de


ruissellement en forêt, car les études trop
théoriques ont négligé la réalité. Pourtant, le
phénomène existe et il est général dans les forêts
de Côte d’Ivoire.
Ruissellement diffus et ruissellement concentré
ont été largement décrits dans son ouvrage sur le
façonnement actuel des modelés en Côte d’Ivoire
forestière.
Le ruissellement diffus se réalise par de petits filets
d'eau qui fonctionnent sur quelques mètres au
maximum pendant les pluies ; il prend naissance
au niveau des gouttières et se subdivise en
plusieurs filets ; ainsi toute la surface du versant est
balayée par ces filets. Lorsque la pente s'élève,
l'écoulement est plus rapide. On parle de
ruissellement concentré. Le ruissellement
concentré se forme par de petits talwegs qui
collectent chaque fois les eaux de pluies.
c) Il existe des seuils où l'on passe du ruissellement
diffus au ruissellement concentré, les
paramètres de passage sont la végétation
(abondante à faible), la perméabilité du sol
(importante à faible) et la pente (de 2 à 3% jusqu'à
10%).
Conséquences
Sous forêt dense, l'érosion est relativement faible,
le sol demeurant longtemps humide. Il n'y a pas de
phénomène de dessiccation et le coefficient de
ruissellement reste faible.
faible.Cette remarque reste valable sous forêt
artificielle (plantations) ainsi que dans une forêt
secondaire et sous friches. Par contre, il y a un
risque d'érosion élevé notamment en cas de
défrichement, car le sol n'est pas protégé.
Sur les versants, les phénomènes les plus
fréquents sont les glissements, variables selon le
types d'altération et la façon dont se fait le contact
roche/sol ; le glissement est important quand le sol
est argileux.
il offre la possibilité de transformation en boue après
infiltration par de petits ravins, les phénomènes de
reptation sont déclenchés par tous les petits
phénomènes d'érosion qui affectent les premiers
centimètres du sol en dehors du ruissellement,
comme les impulsions des gouttes de pluies, les
mobilisations par des animaux (déjections).
Sous forêt dense, l'érosion est relativement faible, le
sol demeurant longtemps humide. Il n'y a pas de
phénomène de dessiccation et le coefficient de
ruissellement reste faible.
Cette remarque reste valable sous forêt artificielle
(plantations) ainsi que dans une forêt secondaire et
sous friches. Par contre, il y a un risque d'érosion
élevé notamment en cas de défrichement, car le
sol n'est pas protégé.
Sur les versants, les phénomènes les plus
fréquents sont !es glissements, variables selon le
types d'altération et la façon dont se fait le contact
roche/sol ; le glissement est important quand le sol
est argileux.
. Il offre la possibilité de transformation en boue
après infiltration par de petits ravins, les phénomène
de reptation sont déclenchés par tous les petits
phénomènes d'érosion qui affectent les premiers
centimètres du sol en dehors du ruissellement,
comme les impulsions des gouttes de pluies, les
mobilisations par des animaux (déjections).
Chapitre 7 : les modelés en savane et les phénomènes
de cuirassement
I- Processus géomorphologiques généraux en savane

En savane, le comportement phénologique


différencié des herbes et des arbres associé aux
alternances de périodes humides et de périodes
sèches créent des traits morphogenétiques
particuliers: l'altération est moins profonde et le
manteau d'altérites est moins épais; les processus
sont dominés par le concrétionnement et le
cuirassement; le ruissellement diffus est exalté.
Ce processus atteint son intensité maximale au début de la
saison humide avant l'épanouissement des herbes; cela se
traduit par une dispersion des agrégats de la surface du
sol, par son « glaçage » dès les premières pluies qui
déclenche rapidernent un important écoulement
superficiel.
Dans le domaine de la savane, au niveau des processus
morphogenétiques, les actions chimiques ne manquent
pas (carapaces ferrugineuses liées à une libération
d'oxydes métalliques); mais l’érosion pluviale retrouve une
certaine vigueur; elle modèle les versants actifs couronnés
par des corniches formées par des cuirasses.
Les modelés cuirassés et les formes qui en dérivent
sont de loin les modelés les plus fréquents. Ils se
localisent dans les secteurs correspondant au climat
soudanien, bien qu'il en existe sous climat guinéen.
La mise en place de ces modelés est très ancienne
(12 à 10 000 ans BP au minimum) alors que la climat
soudanien, dans ses manifestations actuelles, est
plus récent. On parle de modelés hérités.
En général, dans les milieux tropicaux de savane,
les processus morphogénétiques mécaniques
(glissements et mouvements de masse profonds et
superficiels, reptations, ruissellements diffus) ou
chimiques (cuirassement...) interviennent sur un
matériel pédologique de nature variée. C'est donc
par de voies indirectes que les influences
lithologiques et climatiques se répercutent sur les
formes de reliefs.
II- Types de modelés dans les savanes

On rencontre en savane deux grands types de


modelés, ceux influencés par les matériaux
ferrugineux (modelés cuirassés et gravillonnaires)
et ceux influencés par la roche en place. Ces
modelés différents car les matériaux dans
lesquels ils sont façonnés résistent différemment
à l'érosion.
a)Les modelés cuirassés

Ils sont influencés par la présence d'une cuirasse


en sommet d'interfluve. Il en existe trois variantes :
- les modelés des vieilles surfaces cuirassées sont
représentés par de hauts plateaux ou des glacis
autour de grands massifs montagneux en roches
mélanocrates (roches d'origine volcanique, riche
en oxydes métalliques). Un glacis est une surface
topographique à pente régulière et uniforme;
il peut se situer soit en position de piémont par
rapport à des massifs rocheux avoisinants, soit en
position de buttes isolées séparées des massifs
montagneux par des vallées ou des dépressions
périphériques (figure 13).
Figure 13 : Etapes de formation d’un glacis cuirassé
Généralement, les superficies occupées par cette
topographie sont importantes, alors que les
chaînons sont très localisés. On peut citer
l'exemple des glacis de la région de Labé (en
Guinée) autour du Fouta Djalon, ou autour des
chaînes birrimiennes en Côte d'Ivoire centrale
(Orumbo boka) qui culminent à environ 1200 m.
Du point de vue mise en place et évolution, ces
modelés doivent leur cuirassement à la migration et
à la redistribution du fer dans le paysage
(glaciplanation) suivies d'une longue séquence
d'induration-érosion (figure 14). C'est la théorie
allochtoniste
Figure 14 : Evolution des glacis en surfaces cuirassées
(Selon la théorie allochtoniste)
- les plateaux et croupes cuirassés (figure 16) sont les
formes d'interfluve les plus fréquentes (environ 80%). Ils
ont un sommet relativement plan, quelquefois convexe ou
légèrement concave.
Le sommet du plateau porte une cuirasse discontinue
affleurant par endroits et sur les bordures (sur le rebord).
Figure 15: Un exemple de plateau cuirassé
(Ici le sommet)
La mise en place de ces plateaux est différent de
celle des glacis. Elle s'appuie d'abord sur une
relation nature de la roche/teneur en fer/épaisseur
de la cuirasse ; les cuirasses sont plus importantes et
plus épaisses sur les roches riches en fer, par contre
leur épaisseur diminue sur les roches de la famille
des granites. Ensuite, les interfluves ne sont pas
étagés comme dest le cas des glacis; les altitudes
restent sensiblement les mêmes dans une région
donnée.
Par exemple, en Côte d'Ivoire, entre le 9 èmeet le
8ème parallèle, elles vont de 400 à 450 m
Pour expliquer ces caractères, la théorie allochtoniste
est inopérante; on est amené à élaborer une autre
théorie qui fait appel à une redistribution du fer
et à son induration in-situ. C'est la théorie
autochtoniste. La forme du départ est une croupe
convexe ou un plateau altéritique (figure 16).
Figure 16 : Un exemple de croupe convexe altéritique

L'ambiance climatique dans laquelle le système


évolue est variable, alternant un pôle humide et un
pôle plus contrasté ; 4 étapes sont possibles :
d'abord la formation d'un rétichron, puis l'induration
en carapace après changement du niveau de la
nappe phréatique, ensuite la mise en affleurement
de la carapace et son induration en cuirasse (figure
18). L'aspect tabulaire de ces plateaux traduirait la
régularité de la surface de la nappe phréatique.
Figure 17 : Evolution de la croupe vers un cuirassement
Du point de vue évolution, on distingue deux
situations : la première se situe dans le temps;
l'érosion croissante peut donner des croupes
gravillonnaires par disparition totale de la cuirasse et
son démantèlement sous forme de gravillons par
érosion régressive (figure 19). Les étapes
morphologiques intermédiaires peuvent être de
petits plateaux, des buttes puis des croupes
(dégradation de la cuirasse et de son rebord,
adoucissement de la corniche ...)
Figure 17 : détails de l’érosion régressive dans les corniches
cuirassées
La seconde se fait sur place par l'exploitation de
zones de faiblesse dans la masse de la cuirasse
(Fissures, fentes de retrait, cassures) exploitées par la
pédofaune pour la construction d'édifices et qui, en
s'effondrant, recouvrent la cuirasse de terre meuble
par la suite colonisée par la végétation (figure 18)
- les croupes gravillonnaires sont des croupes
convexes ou plan-convexes portant des gravillons
ferrugineux (ovoïdes). Leur formation est dérivée
de l'évolution des plateaux cuirassés: dans le
temps, le cuirasse sommitale se fractionne par
thermoclastie et par rupture de gravité au niveau de
la corniche (figure 19) ; elle se débite alors en
blocs et se fractionne sous forme de gravillons
(figure 20).
Figure 18 : Pédofaune et processus d’enfouissement progressif de la cuirasse

Figure 19 : Formation d’une croupe gravillonnaire par érosion superficielle d’un plateau cuirassé

Figure 20 : Evolution d’un plateau cuirassé vers une croupe gravillonnaire convexe
En fait, on peut relever deux possibilités d'évolution,
soit par érosion régressive ou par érosion aréolaire en
même temps que la topographie s'abaisse d' environ 10-15
m sur une période de 2-10 millions d'années).
On pense que la « mise en profondeur » ou
enfouissement des gravillons est liée à l'action de
construction de la pédofaune par recouvrement en surface
ou par effondrement du sol par suite de l'effondrement
des galeries et cavités créées par les animaux. Cependant,
la présence de patine (sel d'oxyde de couleur noire) sur
des gravillons à 2-3 m de profondeur, découlerait d'une
évolution à l'air libre.
b) Les reliefs rocheux et formes associées
- Les inselbergs
Inselberg est un terme allemand qui signifie «
montagne-île »; c'est une forme de relief rocheux
d'allure montagneuse ou collinaire. Les termes équivalents
sont dôme rocheux, pain de sucre, morne rocheux. D'une
façon générale, c'est une petite montagne (sans crête ni
chaînon) où la roche affleure ou est située à très faible
profondeur. Sur une carte topographique, le dessin
présente un ensemble de courbes de niveaux amiboides
ou arrondies.
Les localisations les plus fréquentes sont les régions
de savane (dôme), en forêt (pain de sucre ou morne
rocheux), dans les géosystèmes arides (où le
terme est plus utilisé et plus adapté au contexte).
Les inselbergs ont une répartition irrégulière dans les
géosystèmes tropicaux; ils sont beaucoup plus
fréquents en savane qu'en forêt sans aucun
déterminisme. En Côte d'Ivoire par exemple, ils
sont nombreux à partir du 9ème de latitude nord, plus
dans les régions de savane, qu'en forêt :
- en savane, dans le secteur Odienné-Boundiali, sur
100 à 200 km, on observe une succession de dômes
rocheux; autour de Korhogo, on a un alignement
de dômes très isolés les uns des autres (Mont
Korhogo...) ; dans le secteur Dabakala-Katiola, il
existe des dômes rocheux isolés et épars (le Niangbo)
; le secteur Séguela-Mankono est caractérisé par
la présence d'un champ de dômes de taille et
formes variées;
en forêt, dans le secteur Soubré-Taï, Guiglo-Man et
Tabou, on observe des dômes très isolés et nus (le
Niénekoué, le Trokoi...).
En général, les inselbergs se présentent de façon
isolée ou en champ, adoptant des formes en dôme à
sommets isolés et bases soudées, en petits massifs à
sommets coalescents.
Fréquemment, on y distingue deux types de facettes
topographiques, le sommet et le versant ; les
facettes de bas de versant sont peu fréquents et les
talwegs sont de petits ruisseaux.
. Le contact entre les deux facettes se fait de deux
manières : soit contact direct par un angle droit net appelé
knick dans les régions arides, soit contact par
l'intermédiaire d'une pente progressive concave à la base
et souvent ennoyée par des accumulations d'éboulis (cas
plus fréquent en forêt).
Du point de vue genèse, on oppose 2 grandes
théories développées surtout par les géographes
allemands, une selon laquelle les inselbergs seraient
aussi bien des formes de résistance que de position, et
l'autre dans laquelle les inselbergs seraient des formes
résiduelles :
- les inselbergs de position ou tectoniques: au départ, on a
un dôme écrasé, l'individualisation d'un interfluve aux
pentes accentuées se fait par érosions successives. Ce
type d'évolution s'adapte parfaitement aux inselbergs en
position de ligne de faîte, de ligne de partage des eaux; par
contre, il explique mai la permanence de ces dômes dans
le paysage. Par exemple les champs d'inselbergs de
Madinani (nord-ouest de la Côte d'Ivoire) se situent en
moyenne entre 530 et 540 m d'altitude ; leur dénivelée
totale s'accroît à la périphérie et diminuent largement
au centre;
on pense ici à des inselbergs de dissection par érosion
régressive qui nettoierait toute la zone granitique.
- les inselbergs de résistance ou résiduels: ces
inselbergs existeraient par suite de la résistance à
l'altération chimique de la roche par rapport aux
autres secteurs. Par exemple, sur une carte, une plage
géologique entièrement granitique peut montrer des
secteurs en inselbergs et des secteurs sans; la nature
pétrographique n'influence pas la résistance; par
contre, la microstructure (c'est-à-dire la taille et la
disposition des grains, des minéraux)
jouerait un grand rôle. On a dans ce cas des
inselbergs d'origine lithologique, résultant d'une
érosion différentielle liée à la structure fine de la
roche.
En fait, plusieurs facteurs peuvent être évoqués pour
expliquer la formation des inselbergs :
- le degré d'altérabilité de certains minéraux: les
minéraux noirs ou verts (biotite, olivine...) riches en
ferro-magnésiens et en silicates basiques sont
plus altérables que les minéraux clairs
(quartz, muscovite) riches en silicates alcalins.
Ainsi, l'abondance des uns par rapport aux autres
expliquerait en partie la résistance des roches ;
- la microstructure concerne la taille des grains
des minéraux; les roches à petits grains ont une
porosité plus faible, donc sont moins facilement
altérées et susceptibles de dégager des dômes
rocheux; à l'inverse, les roches à gros grains ont
une porosité plus importante, donc sont plus
facilement altérées et sujettes à donner des croupes
molles.
- la macrostructure concerne le type de fragmentation de
l'ensemble de la roche; la géométrie des diaclases de la
roche joue un grand rôle dans son altération ; selon le type
de diaclase (courbe ou verticale), la vitesse de
l'altération change: dans les diaclases courbes, l'eau
pénètre superficiellement, la roche résiste mieux et on
observe peu de ou pas de sol ; dans les diaclases
verticales, l'eau pénètre dans la masse de la roche,
l'altération est plus rapide et plus facile et on observe
la formation d'un sol arénacé meuble et plus ou moins
argileux (figure 21).
Figure 21 : Rôle de la macrostructure de la roche
Ainsi, au fur et à mesure, il se développe une érosion qui
fait diminuer la topographie du côté des
diaclases verticales alors que sur les diaclases courbes,
s'installe un ruissellement superficiel peu efficace. Dès
lors un dôme « sort », son pourtour « s'abaisse » ; par
ailleurs, si la vitesse de l'érosion est supérieure à celle de
l'altération, on obtient des sols minces, tronqués, toujours
sableux.
Le facteur essentiel ici est l'efficacité de l'érosion qui
entraîne le départ des matériaux meubles libérés par
l'altération ;
puis vient la tectonique, dans le cas des structures
tectoniques héritées comme les filons, les zones de
broyage...
Du point de vue évolution, originellement, l'inselberg
se rencontre dans le domaine de l'érosion mécanique
(zone sèche caractérisée par une végétation xérophile
et une rareté de l'eau, donc des actions chimiques).
Son évolution revêt plusieurs formes: le mécanisme le
plus important est la 50 thermoclastie ;
elle se produit sur les surfaces où il existe les plus
fortes variations de température dans la journée,
35 à 40° de différence; ce qui produit une
désagrégation granulaire; un autre mécanisme non
négligeable est l'haloclastie ; toutes les roches
contiennent des sels qui gonflent lorsqu'ils
absorbent de l'eau ; cela se produit surtout au
niveau des fissures des diaclases; les ouvertures
s'agrandissent et la roche se débite en écailles
(desquamation).
Le facteur macrostructure est important pour expliquer la
plupart des inselbergs des géosystèmes tropicaux (Côte
d'Ivoire en particulier), augmenté de l'efficacité de
l'érosion. Ce dernier facteur permet de comprendre les
formes associées aux inselbergs.
- Les formes associées aux inselbergs
On peut retenir trois grands types de formes
associées: les inselbergs régolitiques, les croupes
régolitiques (qui dérivent directement de l'inselberg
orthique), les croupes et plateaux altéritiques (qui sont
taillées dans les altérites).
Les inselbergs régolitiques présentent un volume
topographique réduit, des versants raides, des
sommets convexes irréguliers et un pédiment de
nature variée. Cependant, le pédiment peut être une
unité de relief bien individualisée dans ce cas, le
contact (zone qui reçoit la majeure partie des eaux
venant de l'acroèdre) est une entaille
fonctionnant comme une gouttière dont le
creusement, progressif par ruissellement concentré,
accompagne une altération en profondeur (figure
22).
Les croupes régolitiques présentent un acroèdre
faiblement dénivelé, des chaos et blocs de roche qui
alternent avec des dos de baleine.
Les croupes et plateaux altéritiques : les croupes
altéritiques dérivent d'une dissection par un chevelu
hydrographique important dans un environnement de
roche leucocrate peu riche en oxydes de fer, d'où une
forte arénisation des sols; les plateaux altéritiques
bénéficient d'un léger apport d'oxydes de fer, qui avec
un ciment altéritique donnent une carapace réticuIée
et mal durcie; les formes fréquentes sont de petits
plateaux à corniche peu marquée (figure 23).
Figure 22 : Formes directement associées aux inselbergs

Figure 25 : Croupes et plateaux altéritiques liés aux altérites


III- LE PHENOMENE DU CUIRASSEMENT
En régions tropicales, la réunion de certaines
conditions pédogénétiques provoque une
évolution particulière des sols. Elle se traduit par
la mise en place dans leur profil d'un horizon
d'accumulation, plus ou moins induré, d'oxydes et
d'hydroxydes de fer et d'alumine, avec souvent du
manganèse et parfois du titane. La position de cet
horizon, son épaisseur, sa morphologie ne sont pas
des constantes spécifiques.
En Côte d’Ivoire, ce processus d'évolution se
retrouve, à peu près sans discontinuité, du sud
au nord, aussi bien en forêt qu’en savane, bien sûr
avec des degrés et des intensités différentes. Les
cuirasses observées sont parfois à un stade sénile
de leur évolution. Elles reflètent un milieu
pédogénétique actuellement disparu. Mais ces
processus se poursuivent encore activement de nos
jours, et il parait exister d'étroites relations entre les
phénomènes passés et présents.
L'étendue des sols cuirassés et cuirasses en
affleurements fait des savanes du nord un terrain
d'études particulièrement fructueux. Le pays montre
les traces de processus de cuirassement extrêmement
poussés au cours des périodes passées. Il reste
actuellement un centre de cuirassement intense. La
variété du milieu naturel offre des possibilités de
confrontation nombreuses entre les facteurs et les
processus de cuirassement. L'observation des faits a
ainsi amené à séparer ces derniers phénomènes de ceux
de la ferrallitisation.
1- Définition

Le cuirassement d'un sol est donc l'ensemble des


processus pédogénétiques qui provoque la
formation d'horizons indurés, par accumulation de
différents oxydes de fer, d'alumine et parfois de
manganèse. De tels horizons sont appelés: horizons
cuirassés.
Les cuirasses ont plus spécifiquement les niveaux
indurés amenés en affleurement. Suivant le degré
d'induration, les pédologues français ont l'habitude
de distinguer:
- les cuirasses « sensu stricto », fortement
durcies, qui se cassent difficilement. Tout en
pouvant être façonnées au marteau;
- les carapaces, qui marquent un degré moindre de
l'induration, et qui se coupent facilement à la pioche.
Les difficultés à donner des critères plus précis
de distinction entre ces deux termes, amènent à
n'employer, au cours de cette étude, que celui
de cuirasse, tout en signalant les différents
degrés d'induration. Tous les intermédiaires entre
horizons fortement et peu durcis étant observables.
En fait, l'hétérogénéité du matériau complique
considérablement la notion d'induration. Celle-ci
doit être appliquée à l'ensemble de la formation et
(ou) à des niveaux bien individualisés.
A la base de l'échelle, le début de l'induration est lié
à la cohérence et à la stabilité du matériau. Sur le
terrain, l'appréciation reste empirique, et varie d'un
observateur à l'autre, suivant que l'on étudie
l'échantillon sec ou humide. Un horizon est considéré
induré lorsque la cohérence devient sensible et se
maintient en milieu humide. Cette notion peut être
reprise au laboratoire où la résistance au délitage
dans l'eau, bien qu'imparfaite. Reste un des
meilleurs tests pour apprécier le début
d'induration.
Une concrétion est un noyau induré, formé « in situ
», de forme et de taille variables. La forme est
généralement arrondie, et dépasse rarement 5
cm dans la plus grande longueur. L'acception est
pédogénétique.
L'horizon concrétionné est un niveau du sol où
s'individualisent et se développent des concrétions,
qui deviennent parfois les constituants dominants,
suivant deux lignes d'évolution:
- dans le sens de l'individualisation et de l'induration;
- dans le sens du pourcentage par rapport à la terre totale.
Leur cimentation provoque la formation d'horizons
concrétionnés cuirassés.
Aux concrétions s'opposent les gravillons qui sont des
matériaux indurés, très durs, arrondis, remaniés,
d'origine soit résiduelle, soit détritique. Les
gravillons sont parfois nourris secondairement, et
présentent alors un cortex. On observe des gravillons
ferrugineux, les plus communs, des gravillons
manganifères assez fréquents, des gravillons alumineux
plus rares.
L'accumulation mécanique de ces produits donne
naissance à des niveaux gravillonnaires. Leur
cimentation provoque la formation d'horizons
cuirassés.
2- Processus
Le cuirassement de certains horizons dans les
sols tropicaux est surtout un phénomène
beaucoup plus particulier qui intéresse
essentiellement le dynamisme des hydroxydes. En
milieu tropical et équatorial, les hydroxydes qui
peuvent se mobiliser assez facilement, sont entraînés
par les eaux de percolation, se concentrent à certains
niveaux dans les sols et provoquent souvent leur
induration.
On observe deux types d’accumulation :
- une accumulation absolue où une quantité de
sesquioxydes est importée dans le système ;
- une accumulation relative où la quantité absolue de
sesquioxydes reste constante, mais une partie des
éléments d’accompagnement est exportée.

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