Vous êtes sur la page 1sur 32

Benoît Brouillette

Professeur d’économie à l’École des Hautes Études Commerciales (HEC), Montréal

(1947)

“L'habitat et la
population au
Saguenay”
Un document produit en version numérique par Michel Fortin, bénévole,
Adjoint à la mairie de Ville de Saguenay, province de Québec
Courriel: micfortin@videotron.ca ou micfor@ville.chicoutimi.qc.ca

Dans le cadre de la collection: "Les classiques des sciences sociales"


Site web: http://www.uqac.uquebec.ca/zone30/Classiques_des_sciences_sociales/index.html

Une collection développée en collaboration avec la Bibliothèque


Paul-Émile-Boulet de l'Université du Québec à Chicoutimi
Site web: http://bibliotheque.uqac.uquebec.ca/index.htm
Benoît Brouillette, “ L’habitat et la population au Saguenay ” (1947) 2

Cette édition électronique a été réalisée par Michel Fortin,


bénévole, adjoint à la mairie de Ville de Saguenay, à partir de :

Benoît Brouillette, professeur d’économie à l'École des Hautes Études


commerciales (H.E.C., Montréal).

Benoît Brouillette, “L'habitat et la population au Saguenay”. Un article


publié dans la revue L’Actualité Économique, volume 22, numéro 4, janvier
1947, pp. 646-672. Montréal : HEC.

[Un texte de l'économiste Benoît Brouillette publié dans l'Actualité


Économique de 1947 portant sur la population du Saguenay. Intéressant pour
son contenu et les données compilées de l'époque. Michel Fortin.]

Polices de caractères utilisée :

Pour le texte: Times, 12 points.


Pour les citations : Times 10 points.
Pour les notes de bas de page : Times, 10 points.

Édition électronique réalisée avec le traitement de textes Microsoft Word 2001


pour Macintosh.

Mise en page sur papier format


LETTRE (US letter), 8.5’’ x 11’’)

Édition numérique réalisée le 11 février 2004 et mis en page le


15 octobre 2004 à Chicoutimi, Ville de Saguenay, province de
Québec, Canada.
Benoît Brouillette, “ L’habitat et la population au Saguenay ” (1947) 3

Table des matières


-I-
- II -
- III -

Liste des tableaux

Tableau I Nombre de cantons de la région du Saguenay-Lac-Saint-


Jean
Tableau II Densité de la population rurale du Saguenay-Lac-Saint-
Jean en 1941
Tableau IIII Accroissement de la population au Saguenay, 1851-1945
Tableau IV Fluctuations de la population 1941-1945 et densité en 1941
Tableau V Population active, âgée de 14 ans et plus, dans la région du
Saguenay-Lac-Saint-Jean, au recensement de 1941
Tableau VI Nombre des ouvriers de 14 ans et plus et salaires payés,
1941
Tableau VII Ouvriers et chômeurs dans les principales villes de la
région en 1941
Annexe Tableau de la population de la région du Saguenay-Lac-
Saint-Jean par municipalités civiles, paroisses et bureaux de
poste pour 1941, 1943, 1944 et 1945.
Benoît Brouillette, “ L’habitat et la population au Saguenay ” (1947) 4

Benoît Brouillette
professeur d’économie,
École des Hautes Études commerciales (H.E.C., Montréal).

“L'habitat et la population au Saguenay”.

Un article publié dans la revue L’Actualité Économique, volume 22,


numéro 4, janvier 1947, pp. 646-672. Montréal : HEC.
Benoît Brouillette, “ L’habitat et la population au Saguenay ” (1947) 5

I

Retour à la table des matières

Les modes de vie permettent de distinguer au Saguenay, comme ailleurs


dans la province de Québec, les deux types d’habitats, l’un dispersé, qui
correspond à l’habitat rural des cultivateurs, l’autre aggloméré, soit en villages
et villes, et qui répond aux fonctions commerciales, industrielles et adminis-
tratives.

Le cadastre des comtés que nous étudions partage le sol en cantons, et non
en seigneuries comme en bordure du Saint-Laurent 1. Chaque canton a la
forme d’un carré plus ou moins régulier, selon la topographie, mesurant
environ 3 milles de côté. On compte dans la région 90 cantons auxquels la
Commission géographique de la Province a attribué des noms. De ce nombre,
64 sont subdivisés en rangs et lots soit en totalité soit en partie, et 53 d’entre
eux renferment des territoires organisés en municipalités.

1 Voir les cartes suivantes publiées par le ministère des Terres et Forêts de Québec : Carte
régionale no 3, en deux feuilles, 3 milles au pouce, 1943; plan du cadastre du comté de
Chicoutimi, 4 feuilles, 1 mille au pouce, 1938; Lac-St-Jean, 4 feuilles, même échelle,
1934.
Benoît Brouillette, “ L’habitat et la population au Saguenay ” (1947) 6

Voici le partage du territoire :

Tableau I
Nombre de cantons de la région du SaguenayLac-Saint-Jean

Comtés Arpentés et Subdivisés en rangs Renfermant des


nommés et lots municipalités

Chicoutimi, total 39 25 18
Sud du Saguenay 20 13 8
Nord du Saguenay 19 12 10
Lac-St-Jean, est, total 10 9
Sud du Saguenay 5 5 5
Nord du Saguenay 5 4 3
Lac-St-Jean, ouest, total 37 26
Sud-ouest du lac 17 13 13
Nord-ouest du lac 20 13 11
Saguenay (région 4 4 3
de l’embouchure)
TOTAL 90 64 53

Nous connaissons d’une manière assez exacte la superficie des terres


érigées en municipalités 2. Elle était, en 1941, de 1,870,728 acres, soit environ
2,923 milles carrés, et se partage en municipalités rurales (94 p. c.) et en
municipalités urbaines (cités, villes et villages). Les premières forment l’habi-
tat dispersé, les secondes l’habitat aggloméré.

*
* *

La dispersion de l’habitat rural ne se fait pas au hasard. Les arpenteurs ont


divisé les cantons en rangs, dont le nombre varie de 8 à 13 et qui ont en
général un mille de largeur. Le rang est lui-même subdivisé en lots, tous
parallèles, qui forment les propriétés des cultivateurs. La longueur du lot est
prise sur la largeur du rang, de sorte que chaque cultivateur possède une bande
de terre toute en longueur (large de 3 arpents seulement) et se trouve à habiter
à proximité de ses voisins. On voit les habitations établies le long des routes et
chemins ruraux en rangées parallèles, de part et d’autre.

2 Statistiques municipales, annuaire publié par le ministère du Commerce et de l'industrie,


Québec, dernière édition parue en 1942.
Benoît Brouillette, “ L’habitat et la population au Saguenay ” (1947) 7

Cette habitation est, dit M. Raoul Blanchard, « plus ou moins complexe en


dimensions, vérandas, balcons, étages, bâtiments accolés, suivant que la colo-
nisation est plus ou moins ancienne; de même l’aspect varie, avec l’âge, de
celui d’une cabane de rondins lors du premier établissement, puis celui d’un
simple cube de planches comportant un étage, à celui d’une villa coquette et
blanche. En arrière sont les bâtiments agricoles, I’écurie-grange, le hangar, la
remise. Dimensions et aspect sont en fonction de l’ancienneté et de la
richesse 3.»

La densité de la population rurale est faible. On peut la calculer de deux


manières, comme l’indique le tableau suivant : soit en divisant la population
rurale par la superficie des terres occupées réellement par les cultivateurs, soit
en divisant cette population par la superficie totale des municipalités. Dans le
premier cas, on obtient une densité moyenne de 45.3; dans le second, une
densité de 23.7. L’écart s’explique par le fait que plusieurs paroisses rurales
s’étendent sur de vastes superficies non seulement inoccupées, mais dont les
rangs ne sont quelquefois pas même subdivisés en lots. Ce sont des parties
boisées autres que les lots que possèdent les cultivateurs sur leurs terres.

Tableau II
Densité de la population rurale
du SaguenayLac-Saint-Jean en 1941

Population Terres Terres Territoire municipalisé


rurale occupées occupées
Régions et comtés
Superficie Densité au Superficie Densité au
en acres mille carré en acres mille carré

CHICOUTIMI
Sud-est du Saguenay 9 311 129 867 45.8 283 639 21.0
Sud-ouest du Saguenay 3 150 36 622 55.0 62 362 32.3
Nord du Saguenay 12 487 168 049 47.6 311 041 25.7
Total, comté 24 948 334 538 47.7 657 040 24.3
LAC-ST-JEAN-EST
Sud du Saguenay 8 646 112 456 49.1 114 285 48.4
Nord du Saguenay 3 565 57 900 39.6 108 365 21.0
Total, comté 12 211 170 356 45.9 222 650 35.4
LAC-ST-JEAN-OUEST (Roberval)
Sud-ouest du Lac 10 482 176 280 38.1 394 267 17.0
Nord-ouest du Lac 16 037 239 300 42.9 408 093 25.1
Total, comté 26 519 415 580 40.8 802 360 21.1
SAGUENAY (partie 1 460 30 032 31.0 74 946 12.5
embouchure de la rivière)
TOTAL DE LA RÉGION 65 138 920 506 45.3 1 756 996 23.7

3 Raoul Blanchard, L'est du Canada français, p. 142.


Benoît Brouillette, “ L’habitat et la population au Saguenay ” (1947) 8

À l’intérieur de la région, la densité rurale est inégale. On observe les plus


fortes densités au sud du Saguenay, dans le comté de Chicoutimi et celui de
Lac-Saint-Jean-Est, où elle oscille autour de 50 pour les terres occupées. Elle
est de l’ordre de 40 dans Lac-Saint-jean-Ouest et s’abaisse à 30 aux environs
de Tadoussac. Pour plus de détails, voir en annexe le tableau de la population
de chaque municipalité (pp. 668-71).

*
* *

Les villages sont nés sous le signe de la fonction commerciale et admi-


nistrative. L’église, les magasins, la gare ou le quai, parfois de petits établisse-
ments industriels, font se grouper les maisons des villageois : commerçants,
rentiers, surtout journaliers et hommes de métiers. L’emplacement est
conditionné par les facilités de transport. Les villages anciens se sont établis
sur les voies d’eau. Tels sont Grande-Baie et Bagotville, au fond de la baie
Haha, Chicoutimi et Sainte-Anne à la tête de la navigation, Saint-Gédéon,
Saint-Jérôme, Chambord, Roberval, Saint-Prime, etc... autour du lac Saint-
Jean. D’autres sont situés à l’embouchure des rivières principales ou le long
de leurs cours à l’intérieur. Aujourd’hui, la route est devenue pour tous les
villages le facteur le plus important de localisation. Ils s’égrènent le long du
bon réseau des routes de la région.

Leur aspect varie selon le site et le nombre de maisons, selon aussi leur
plus ou moins grande ancienneté. Les maisons s’alignent de chaque côté de la
rue principale près de l’église et de l’école, des magasins (souvent un seul, le
magasin général), des garages. Les plus gros ont en outre une gare, le cas
échéant un hôtel, des maisons de pension, parfois un collège ou un couvent.
C’est le comté du Lac Saint-Jean qui possède le plus de villages : on en
compte 14, dont la moitié renferment 1,000 habitants et plus. Les plus impor-
tants sont Saint-Félicien (1,600), sur la rive droite de la Chamouchouane,
Saint-Jérôme (1,400) et Desbiens (1,000), au sud-est du lac, Chambord
(1,000) et Hébertville (1,000) aux environs, Mistassini (1,300), qui profite de
sa proximité de Dolbeau, enfin Normandin (1,000), situé à l’intérieur au nord-
ouest du lac. Les villages du comté de Chicoutimi sont moins nombreux. Il
n’y en a que cinq qui sont constitués en municipalité, et les trois plus gros
forment les banlieues urbaines de Port-Alfred et Chicoutimi. Ceux de Saint-
Honoré et Saint-Fulgence, au nord du Saguenay, auraient chacun environ
1,000 habitants; mais ils ne sont pas détachés de leurs paroisses rurales.

*
* *

Le développement industriel et commercial de la région est responsable de


la fondation préméditée de certaines agglomérations urbaines ou de l’accrois-
sement d’autres centres fondés depuis plus longtemps. On peut grouper en
Benoît Brouillette, “ L’habitat et la population au Saguenay ” (1947) 9

sept villes différentes les concentrations urbaines de population du district. La


fonction industrielle est prédominante dans cinq d’entre elles et les fonctions
commerciales et administratives, dans les deux autres.

L’agglomération de Jonquière-Kénogami, dont la population est passée de


22,000 à plus de 30,000 en cinq ans, se place désormais au premier rang de la
région, même avant Chicoutimi. Elle s’étend sur 2,600 acres le long de la
rivière aux Sables, près de sa confluence avec le Saguenay, en aval de la
Chute-à-Caron. Jonquière, au sud, renferme les deux-tiers de la population et
est desservie par le chemin de fer. La route de Chicoutimi au lac Saint-Jean
forme la rue principale des villes jumelles sur la rive droite de la rivière.
Jonquière déborde par deux ponts sur la rive opposée, tandis que Kénogami,
plus au nord, est séparée de la rivière par l’emplacement des usines Price.
Elles doivent l’une sa fondation (Kénogami), l’autre son développement aux
papeteries; mais Arvida emploie un plus grand nombre d’ouvriers de cette
agglomération que les usines Price. Le commerce, qui est presque aussi actif
qu’à Chicoutimi, et les transports (chemin de fer et trafic routier) donnent une
part importante du travail des habitants. «Églises, écoles, couvents, bâtiments
publics, animent le paysage urbain que domine au nord le réservoir haut
perché de l’usine géante de Kénogami 4. » Ajoutons que la compagnie Price a
aménagé un joli parc public en bordure du ravin que forme la gorge du
Saguenay. Là, sous les conifères typiques de la région, repose le fondateur de
l’usine, sir William Price, tué accidentellement sous une avalanche de billots.

Nous avons décrit Arvida (environ 9,000 h.) précédemment 5. C’est la


deuxième ville industrielle de la région par le chiffre de sa population. «L’œil,
écrit M. Blanchard, y est attiré d’abord par les constructions massives de
l’énorme fabrique et ne s’arrête qu’ensuite à l’écart, sur les rues géométriques
où sont dispersées au large les petites maisons blanches» (elles ont varié leurs
teintes aujourd’hui) «aux toits verts, rouges, violets, gris, et l’église trapue de
briques. L’impression est celle de vide 6...» C’est encore un peu cela mainte-
nant, mais le géographe de Grenoble, s’il y revenait, devrait trouver un
superlatif pour qualifier l’usine et verrait que l’espace vide tend à se remplir.
Avec le centre sportif, son quartier des affaires et le Saguenay Inn, le meilleur
hôtel de la région, Arvida s’anime davantage, mais sans rien perdre de sa
dignité.

Plus à l’ouest, l’agglomération formée par Alma et Riverbend, auxquels il


faut joindre Isle-Maligne, rassemble entre 9,000 et 10,000 habitants. Nous
sommes ici à la source du Saguenay, qui se partage à sa sortie du lac Saint-
Jean en deux bras : la Petite-Décharge au sud, la Grande-Décharge au nord.
Alma est situé sur la rive droite de la première, Riverbend sur la rive gauche et
Isle-Maligne sur les deux rives de la seconde. Ces deux dernières villes sont
uniquement industrielles; Riverbend fut établie pour la papeterie Price et Isle-

4 Raoul Blanchard, op. cit., p.146.


5 Cf. «L'aluminium au Saguenay», L'Actualité Économique, octobre, 1946.
6 Raoul Blanchard, op. cit., p. 147.
Benoît Brouillette, “ L’habitat et la population au Saguenay ” (1947) 10

Mafigne pour le barrage de Saguenay Power et l’aluminerie récemment


établie. Alma, en plus d’être le domicile d’un bon nombre d’ouvriers, est plus
commerçante. Ses rues, «quelques monuments, l’animation des passants, en
font une vraie ville pittoresque d’ouvriers, de marchands, de cultivateurs
retirés, dominée d’ailleurs, comme par une cathédrale, par la masse et les
tours aux formes assez harmonieuses de la papeterie de Riverbend 7.»

Située à l’extrémité orientale de la région, l’agglomération formée par


Port-Alfred et Bagotville possède aussi une fonction industrielle importante, à
cause de la fabrique de pâte et papier de la Consolidated Paper. Bagotville
s’étend à angle droit sur la rive gauche de la Rivière-à-Mars et sur le rivage de
la baie Haha. Port-Alfred est sur la rive droite, reliée à la précédente par un
pont, mais séparée de la rive par les installations portuaires du Saguenay
Terminals (aluminium) et des usines de la Consolidated. Tapi à l’embouchure
de la rivière Haha, le village de Saint-Alexis-de-Grande-Baie complète le
groupement d’allure urbaine. La fonction industrielle est partagée avec celle
des transports; on y trouve, en effet, le meilleur port océanique de la région,
comme nous verrons plus loin. «Il y a là., tout au fond de la baie, une ligne
dense de population étagée pittoresquement sur les terrasses, mi-rurale, mi-
urbaine 8.» De 9,000 à 10,000 âmes. À 5 milles vers l’ouest, sur une terrasse
de 500 pieds, se trouve le seul aéroport commercial du comté de Chicoutimi.
Il est utilisé par les Canadian Pacific Air Lines.

La ville de Dolbeau enfin, située à l’extrémité, nord-ouest de la région, au


confluent des rivières Mistassini et Mistassibi, est également une création de
l’industrie du papier, avec la construction, en 1926, de la Lake St-John Power
and Paper Co. C’est le terminus de la voie ferrée et un relais important sur la
route de ceinture du lac Saint-Jean. L’usine est construite sur la rive gauche de
la Mistassini et la ville s’élève en trois gradins. «L’usine en bas, au-dessus le
personnel des bureaux, en haut la ville toute neuve» (plus maintenant) «où la
largeur invraisemblable des rues est rachetée par l’aspect avenant des mai-
sons; le site ne manque pas de grandeur, avec les gradins de terrasses, la
végétation puissante, les grosses rivières aux flots roux bondissants de rapide
en rapide, enjambées par les longs ponts couverts, teints de pourpre 9.» Avec
le village de Mistassini, en face sur l’autre rive, l’agglomération a de nouveau
rejoint son chiffre initial de population (4,000).

Avec ces villes industrielles, il y a les centres commerciaux et adminis-


tratifs.

Roberval, au sud-ouest du lac Saint-Jean, fut créé par la navigation,


aujourd’hui disparue sur le lac. Lieu bien choisi pour promouvoir l’expansion
vers l’ouest de la région. Il garde encore ce rôle. C’est le marché de toutes les
paroisses de la rive et de l’intérieur. Cette ville est devenue le principal centre

7 Raoul Blanchard, op. cit., p. 146.


8 Raoul Blanchard, op. cit., p. 147.
9 Raoul Blanchard, op. cit., p. 146.
Benoît Brouillette, “ L’habitat et la population au Saguenay ” (1947) 11

administratif du comté. Elle renferme environ 5,000 habitants, qui se parta-


gent entre deux paroisses religieuses. Avec un commerce actif et quelques
petits établissements industriels, elle tient surtout un rôle de capitale régionale
à cause de son centre judiciaire, son hôpital, son académie commerciale, sa
grande école normale de jeunes filles et le noyau de professionnels de sa
population, qui a presque doublé en dix ans. Roberval possède le second
aéroport de la région, qui dessert la région minière de Chibougameau et le lac
Mistassini. La ville profitera sans doute de la mise en valeur de ces régions
septentrionales.

Chicoutimi est, parmi les centres urbains, la ville qui fait meilleure figure
de toutes. On lui attribue, en 1946, environ 27,000 âmes, avec ses banlieues de
Rivière-du-Moufin et de Sainte-Anne, située en face, sur la rive gauche du
Saguenay. Elle est, sans contredit, la ville la plus pittoresque. Voyons d’abord
les éléments de son site. Elle longe la rive droite du Saguenay entre l’embou-
chure de la rivière Chicoutimi, à l’ouest, et celle de la rivière du Moulin, à
l’est. La majeure partie des habitations s’étagent en amphithéâtre autour du
bassin (rivière Chicoutimi) et le long de la rive assez escarpée du Saguenay.
Les terrasses s’accrochent à un verrou glaciaire entre les altitudes 50 et 200
pieds. «Des hauteurs d’amont, la vallée (rivière Chicoutimi) aux méandres
larges et profonds, les falaises de roches dures, les escarpements de terrasses,
la ville étagée, font penser aux défilés du Rhin 10.»

Quels sont les aspects des divers quartiers de la ville? Lorsqu’on entre à
Chicoutimi par la route de Port-Alfred, on descend d’une terrasse de 300 à
400 pieds d’altitude pour traverser la banlieue de Rivière-du-Moulin, habitée
surtout par une population ouvrière; puis on pénètre dans le quartier ouest de
la ville par la rue Racine, qui longe d’abord la rive du Saguenay au niveau de
la rivière. Puis il y a une bifurcation, en face un petit parc. En quittant la rue
Racine sur la droite, on s’engage par la route du bas qui conduit à la gare et au
port. Si l’on poursuit sa route par la rue Racine, on s’élève sur la deuxième
terrasse et, après avoir longé la propriété garnie d’arbres de l’évêché, on se
trouve en face de la cathédrale, beau monument religieux, très vaste, à deux
clochers, qui nous annonce la fonction essentielle du quartier environnant.
L’Hôtel-Dieu, le séminaire, l’école normale, plusieurs couvents, s’étagent en
hauteur en arrière de la cathédrale, au milieu d’un quartier domiciliaire
élégant. Plus à l’est, la rue Racine devient une artère commerciale. On y voit
le bureau de poste, le principal hôtel de Chicoutimi, qui loge les bureaux de la
compagnie d’aviation, la gare centrale des autobus urbains et régionaux, des
bureaux de professionnels, des restaurants et surtout de beaux magasins (le
plus vaste ne le cède en rien par son élégance à ceux de Montréal).

On s’achemine peu à peu dans le quartier central, où la rue Racine redes-


cend sur la terrasse inférieure à son passage à niveau de la voie ferrée. Pas
fameux un passage à niveau sans barrières en plein cœur d’une ville! En
tournant à droite sur l’avenue Lafontaine, on gagne le quartier du port. Ce

10 Raoul Blanchard, op. cit., p. 148.


Benoît Brouillette, “ L’habitat et la population au Saguenay ” (1947) 12

dernier est administré par le Conseil des Ports nationaux. Il est desservi par
plusieurs rues et une voie ferrée. Près de la gare sont des entrepôts de grossis-
tes (Côté et Boivin, Itée, par exemple). Revenus dans la rue Racine, plus à
l’ouest, on trouve encore de nombreux établissements commerciaux, puis
l’hôtel de ville, solide monument de granit foncé de la région. Plus loin, angle
de la rue Morin, ce sont l’académie commerciale, l’école technique, l’aréna.
Mais dans ce quartier central, la ville s’élargit en profondeur, car on se rappro-
che du Bassin. On compte une dizaine de rues parallèles à la rue Racine, au
lieu de deux comme autour de la cathédrale. C’est le quartier ouvrier qui s’est
établi dans ces parages. Une rue commerciale, la rue Sainte-Anne, recoupe à
angle droit la rue Racine, avant de se prolonger par un pont métallique, peint
de couleur aluminium, qui traverse le Saguenay. Il relie la ville à Sainte-Anne,
devenue une banlieue.

On arrive enfin par la rue Racine sur la rive du Bassin, où il faut tourner à
gauche à angle droit dans l’avenue Montcalm pour atteindre le quartier ouest.
Ce bassin est une large pièce d’eau au pied de la chute de la Chicoutimi. Il
formerait un abri naturel magnifique s’il était creusé car, à marée basse, il est
sans profondeur. On l’a déjà utilisé, car on voit d’anciens quais de bois sur la
rive gauche et une voie ferrée désaffectée sur la rive droite. Cette voie, qui fut
autrefois électrifiée, reliait le Bassin aux usines de pâte fondées par M. A.
Dubuc. Quelques usines subsistent dans ce quartier, qui eut auparavant une
fonction industrielle plus marquée. Les principales sont la manufacture de
meubles Smith, rue Racine, la Filature du Saguenay,. Avenue Savard, la
centrale électrique Price (11,000 c.v.), la grosse scierie de cette compagnie et
la fabrique de canots en aluminium Bélanger, établie dans l’ancien atelier des
usines de pâte. Le quartier ouest, qui forme la paroisse du Sacré-Coeur,
distincte de celle de la cathédrale, est surtout habité par des ouvriers et des
commerçants. On remarque cependant sur la rue Price, qui contourne le
Bassin en demi-cercle, quelques jolies demeures et, au delà du pont sur la
rivière Chicoutimi près de la centrale électrique, les bureaux et ateliers de la
compagnie Price.

Au sud de ce quartier, sur les hautes terrasses, la ville s’est étendue


récemment par l’addition de deux nouveaux quartiers de part et d’autre d’un
ravin qu’on appelle la Grande-Coulée. Celui de la rive gauche de ce ruisseau
s’est établi le long du chemin Saint-Paul entre la rue Dubuc au nord et celle du
cimetière (Sacré-Cœur) au sud. Sur l’autre versant du ravin, c’est le quartier
construit par le gouvernement fédéral (Wartime Housing) avec toutes ses
petites maisons semblables qui s’étendent de la rue Dubuc jusqu’au terrain de
l’exposition. La ville s’est agrandie en outre sur la rive gauche de la, rivière
Chicoutimi. Si l’on traverse cette rivière par le pont Bélisle, qui prolonge la
rue Dubuc, on arrive au pied de deux rues qui gravissent en pente vertigineuse
le rebord de la terrasse de 250 pieds. Ce sont les côtes Saint-Ange et Fortin,
garnies d’anciennes maisons ouvrières. Il y a une longue rue habitée assez
pauvrement, du moins vers l’intérieur, au sommet de la terrasse : c’est la côte
de la Réserve, qui sert de route facultative pour gagner Arvida et Jonquière.
Benoît Brouillette, “ L’habitat et la population au Saguenay ” (1947) 13

Dès 1861, Chicoutimi était devenu le centre le plus important de la région.


Il en devint la capitale administrative. Ce fut alors la plus grosse agglomé-
ration industrielle avec les scieries Price et, plus tard, avec l’usine de pâte de
M. Dubuc. La venue du chemin de fer (1893) et l’amélioration du port
contribuèrent à son développement industriel et commercial. Aujourd’hui, son
rôle industriel est mince (guère plus de 400 employés d’usines en 1943). Le
port a été victorieusement concurrencé par celui de Port-Alfred.

Mais cette capitale a pris sa revanche en assurant sa prédominance


commerciale et administrative. Chicoutimi fait la majeure partie du commerce
de gros et de détail de la région. Elle en est le centre ecclésiastique, le centre
d’éducation (ses couvents, écoles) et le centre judiciaire. On veut, à bon droit,
en faire un centre touristique.

 II 

Retour à la table des matières

Il y a un siècle, les premiers colons arrivaient dans la région du


SaguenayLac-Saint-Jean. Un missionnaire estime leur nombre a quelques
3,000. Aujourd’hui, la région est peuplée d’environ 165,000 habitants. Beau
résultat, quand on songe qu’on est parti de zéro un siècle auparavant. Voici le
rythme de l’augmentation à chaque recensement et depuis 1941 :
Benoît Brouillette, “ L’habitat et la population au Saguenay ” (1947) 14

Tableau III
Accroissement de la population au Saguenay, 1851-1945

Année Population Augmentation


1851 6 458
1861 11 136 72 % en dix ans
1871 18 258 65 % en dix ans
1881 26 488 45 % en dix ans
1891 31 166 18 % en dix ans
1901 39 685 28 % en dix ans
1911 53 002 33 % en dix ans
1921 75 007 41 % en dix ans
1931 108 336 44 % en dix ans
1941 146 179 35 % en dix ans
1943 11 174 300 20 % en deux ans
1944 12 164 700 5 % diminution en un an
1945 165 000 13 % en quatre ans

Comment s'explique cet accroissement prodigieux? Notons d'abord qu'il


n'a pas toujours la même allure. Il s'abaisse durant les vingt dernières années
du XIXe siècle. C'est le moment où l'industrie du bois languit; où l'agriculture,
manquant de marchés et de voies de communication, est peu florissante. M. R.
Blanchard dit qu'au moins 4,280 habitants ont quitté la régions 13. Mais au
tournant du siècle, l'accroissement de la population reprit avec vigueur, avec
l'avènement des industries de pâte et de papier, et plus tard de l'aluminium, à
l'approche de la guerre de 1939 et durant les hostilités.

*
* *

Les progrès sont dus à l’immigration d'abord. Les taux du début (72 p. c.,
65 p. c., 45 p. c.) le prouvent. Il y a aussi immigration au XXe siècle, avec des
taux supérieurs à 30 p. c. par période décennale, car l'augmentation naturelle
est de l'ordre de 30 p. c. Nous savons d'où venaient les premiers colons.
Demandons-nous quelle est l'origine des immigrants de l'époque récente et
actuelle. On s'aperçoit en considérant l'origine de la population au recense-
ment de 1941 que I'immense majorité est canadienne-française, dans la
proportion de 96 p. c. Ces derniers sont au nombre de plus de 140,000; les
11 Estimé par la distribution des carnets de rationnement.
12 Estimé par les visites paroissiales de MM. les curés.
13 Raoul Blanchard, op. cit., p. 149.
Benoît Brouillette, “ L’habitat et la population au Saguenay ” (1947) 15

Britanniques, environ 3,800 et les immigrants cosmopolites, environ 1,200. Il


reste 400 indigènes et quelques centaines dont l'origine est indéterminée. De
la main-d’œuvre cosmopolite (Scandinaves, Russes, Tchécoslovaques et
Finlandais) venus pour les travaux de construction, il reste à peine quelques
familles. Les Britanniques ou Américains sont les dirigeants des entreprises
nouvelles, personnel supérieur des usines et ouvriers spécialisés. La majeure
partie des immigrants sont donc des Canadiens français venus des villes et
d'autres régions de la Province, des comtés voisins, de la rive sud de l'estuaire
et de la Gaspésie. Quelques autres viennent aussi des Cantons de l’Est des
Laurentides et même des îles de la Madeleine.

On arrive à savoir d'une façon très approximative le nombre des immi-


grants dans la région. Car l'augmentation totale pour la période de 1901 à
1941 est de 106,500 et si l'on prolonge la période jusqu'à 1945, de 125,000.
On peut évaluer l'augmentation naturelle à 31 pour 1,000 par année. Le calcul
nous montre que l'augmentation naturelle pour la première période est de
95,000 et la seconde, de 112,000. Donc l'immigration totale serait de 11,500
dans le premier cas et de 13,000 dans le second.

Pourtant les nouveaux venus doivent être encore plus nombreux, car la
population est à peine enracinée. Elle se déplace tantôt à l’intérieur, tantôt à
l’extérieur. M. Blanchard a constaté dans ses enquêtes que plusieurs familles
avaient pris le chemin des États-Unis depuis 1920; d'autres sont allées dans les
villes ou ailleurs dans les usines de papier. La crise en a ramené plusieurs. Il
estime que 2,000 personnes ont quitté la région en dix ans (1920-30).

*
* *

Le facteur principal d'accroissement est, sans aucun doute, la forte natalité.


En considérant l'ensemble des trois comtés, c'est la plus forte de la Province.
En 1941, l'accroissement naturel s'établissait comme suit :

Natalité Mortalité Accroissement

Chicoutimi 40,7% 10,4% 30,3%


Lac-St-Jean-Est 37,7% 7,3% 30,4%
Lac-St-Jean-Ouest 40,0% 9,6% 30,4%
Ensemble 40,0% 9,6% 30,4%

Seul le comté de Témiscouata dépassait ce chiffre (42.5). Matapédia et


Témiscouata sont sur un pied d'égalité avec la région. C'est presque le double
du taux d'accroissement de la Province, qui était en 1941 de 16.5 pour mille.
Tel est le mouvement général de la population durant les quarante premières
années du siècle actuel.
Benoît Brouillette, “ L’habitat et la population au Saguenay ” (1947) 16

Mais les travaux occasionnés par la guerre de 1939 ont accéléré encore le
phénomène. En deux ans, le chiffre de la population s'est gonflé à 174,300,
soit 20 p. c. de plus qu'en 1941, puis s'est abaissé à 165,000 en 1945. Ce qui
montre quand même 13 p. c. d'augmentation en 4 ans. Le rythme des périodes
décennales précédentes n'est donc pas brisé.

*
* *

Tâchons maintenant de nous rendre compte des mouvements de popula-


tion survenus depuis le dernier recensement. Tous nos informateurs furent
d'accord pour nous assurer que la population a beaucoup augmenté dans la
région, qu'il y eut un va-et-vient considérable. Nous l'avons constaté précé-
demment en étudiant l'industrie. Disons comment nous avons pu obtenir
certaines précisions statistiques. Chacun sait qu'il est difficile de connaître
exactement le chiffre de la population pour les années intermédiaires entre les
recensements fédéraux. Nous avons d'abord utilisé les résultats des visites
paroissiales que font chaque année messieurs les curés. En général, c'est la
source la plus sûre, hors des villes qui ne font pas de dénombrement annuel.
Mais ce relevé est forcément incomplet, puisqu'il ne tient compte que de la
population catholique et que, dans le cas qui nous occupe, la population
flottante, même catholique, n'est pas entièrement connue des desservants de
paroisses, surtout dans les villes.

Nous avons eu accès à une autre source, qui nous fut d'un grand secours
pour les années 1941 et 1944, au moment où la population a touché son plus
haut sommet. C'est le service régional du rationnement en temps de guerre,
organisé par le gouvernement fédéral. Le chef de ce service, M. J.-L. Martel,
eut l'obligeance de nous communiquer un relevé du nombre des carnets émis
pour tous les habitants des trois comtés par bureaux de poste.

C'est à l'aide de ces renseignements que nous avons pu établir le grand


tableau de la population qui accompagne notre travail (voir l'annexe). En
partant de la base solide qu'est le recensement de 1941, nous avons montré la
population de chaque localité pour 1941, 1943, 1944 et 1945. Ayant observé
que les fluctuations les plus marquées eurent eu dans les villes, nous avons
extrait la population des sept groupes urbains du tableau général en annexe
pour en faire mieux ressortir les changements. C'est ce que nous montrons
dans le petit tableau suivant (tableau IV). Il ne faudrait pas s'étonner des
différences qu'on voit entre les chiffres de population pour une même ville
d'un tableau à l'autre. Dans ce dernier nous n'avons pris que la population
réellement urbaine, estimée au meilleur de notre connaissance.

*
* *
Benoît Brouillette, “ L’habitat et la population au Saguenay ” (1947) 17

La population de ces sept villes, partie de 67,950 en 1941, s'est gonflée à


93,900 en 1940 et est revenue à un peu moins de 84,000 en 1945. La popula-
tion rurale au contraire n'a fait qu'osciller autour de 80,000. Cette dernière est,
nous le savons, le réservoir naturel où puisent les villes qui requièrent la main-
d’œuvre. « L'accroissement de la population de nos villes, » nous disait M.
l'abbé J.-C. Gauthier, secrétaire de Mgr l'Évêque, « s'est fait principalement
par l'apport de la population rurale de la région. » Il est peu vraisemblable, en
effet, que cette population soit demeurée durant cinq ans au même chiffre,
lorsqu'elle s'accroît de plus de 30 pour mille par année. L'agglomération urbai-
ne qui semble en avoir le plus profité est celle de Jonquière-Kénogami, dont le
chiffre est passé de 21,000 à 30,000 et se maintient à 28,000 tandis que
Chicoutimi, qui a touché 27,000, est revenu à 22,000. Arvida, qui avait dépas-
sé 12,000, en avait moins de 10,000 en 1940 et encore moins aujourd'hui.

Tableau IV
Fluctuations de la population 1941-1945 et densité en 1941

Recensement de 1941 Estimés de la population


Superficie Population Densité au 1943 1944 1945
en acres mille carré
Agglomérations urbaines
Chicoutimi (Rivière-du-Moulin et 3 000 20 000 4 300 27 000 24 000 22 000
Village de Ste-Anne)
Jonquière, Kénogami 2 600 21 000 5 200 30 000 28 500 28 000
Bagotville, Port-Alfred, Grande-Baie 2 000 8 800 2 800 9 600 9 000 9 200
Alma, Riverbend, Isle-Maligne 2 800 7 200 1 650 8 100 8 000 8 000
Arvida 8 000 4 600 370 12 300 12 000 9 700
Roberval 650 3 300 3 250 3 600 3 500 3 500
Dolbeau 800 2 850 2 280 3 300 3 600 3 500
Total des sept villes 19 850 67 750 2 200 93 900 86 600 83 900
Villages et paroisses Terres occupées 937 000 53,6
78 429 80 411 78 100 81 100
Municipalités 1 773 300 38,4
Total Terres occupées 960 000 97,5
146 179 174 311 164 700 165 000
Municipalités 1 800 000 52,0

Le sommet de 174,300 pour la région, en 1943, ne saurait s'expliquer


cependant que par le mouvement extérieur. Il y eut plusieurs sortes d'immi-
grants. Nous connaissons déjà l'origine des manœuvres qui se sont employés
aux travaux de construction (Shipshaw) 14. Ceux-ci sont, pour la plupart,
retournés dans leurs foyers, principalement s'ils venaient des villes. Les
immigrants qui se sont le mieux adaptés sont les ruraux. Un de nos informa-
teurs a estimé à 8,000 le nombre des nouveaux venus qui se sont établis d'une
façon plus ou moins permanente dans la région. Selon lui, 40 p. c. seraient

14 Cf. «L’aluminium au Saguenay», L’Actualité Économique, octobre 1946.


Benoît Brouillette, “ L’habitat et la population au Saguenay ” (1947) 18

originaires de la rive sud de l'estuaire : Rivière-du-Loup, Rimouski, Mata-


pédia et Gaspésie 15. Environ 15 p. c. viendraient du Nouveau-Brunswick,
autant de la région de Québec et des comtés voisins. Les services d'autobus
qui traversent Charlevoix, via Baie-Saint-Paul, et Saint-Siméon ont attirés des
cultivateurs et des journaliers des paroisses échelonnées sur ces routes. Ils
firent d'abord une immigration temporaire, revenant dans leurs foyers le
samedi; plus tard ils transportèrent leurs pénates dans la région, dès qu'ils
trouvèrent où se loger. Ce sont de tels gens qui s'entassent dans les agglomé-
rations miteuses des banlieues urbaines. On nous a aussi parlé de substitutions
d'habitants ruraux: des cultivateurs venus de l'extérieur remplaçant certains
cultivateurs de la région qui se sont engagés dans les villes.

*
* *

Le tableau des pages précédentes nous amène à parler enfin des densités.
Les villes ont des densités variant de 2,000 à 5,000 habitants au mille carré, à
l'exception d'Arvida, qui s'étend trois fois plus que les autres, parce que la
compagnie d'aluminium est propriétaire du terrain. Les villes sont cependant
congestionnées, du moins dans leurs quartiers commerciaux. Elles se sont
agrandies brusquement, sans pouvoir se payer le luxe d'un plan d'urbanisme
comme celui d'Arvida. Quant à la densité d'ensemble, elle s'établit à 100 ou 50
au mille carré, selon que l'on considère les terres occupées ou la superficie
totale des municipalités. Nous avons parlé précédemment des densités rurales.
Disons qu'une telle densité moyenne se compare favorablement à celles des
autres régions du Québec. Qu'elle soit faible aux yeux d'un Européen, comme
le dit M. Blanchard, il n'y a pas de doute. Mais rappelons nous qu'en Améri-
que les conditions de vie sont différentes : longueur de la période de
végétation, mécanisation des modes de vie ruraux, niveau de vie. Il n'en reste
pas moins que les excédents de population s’accumulent rapidement au pays
de Québec, que l'expansion du territoire est limitée, qu'il faut améliorer les
techniques d'exploitation si l'on veut conserver sur place une population aussi
vigoureuse.

15 Une observation fortuite que nous avons faite en juin 1945 confirme cette hypothèse.
Nous traversions un vendredi soir de Saint-Siméon à Rivière-du-Loup et nous avons
remarqué l'arrivée de plusieurs autobus de Chicoutimi transportant des travailleurs qui
allaient en week-end dans leurs familles.
Benoît Brouillette, “ L’habitat et la population au Saguenay ” (1947) 19

 III 

Retour à la table des matières

Pour le moment, le marché du travail subit des fluctuations dans la région


SaguenayLac-Saint-Jean comme dans plusieurs régions de la Province et du
Canada. Mais ces fluctuations sont plus grandes là qu'ailleurs, parce que la
région ne possède qu'un nombre restreint d'industries et que ses deux
principales, celles qui absorbent le plus de main-d’œuvre, dépendent du com-
merce extérieur du Canada : l'aluminium dans une proportion supérieure à 90
p. c. et le papier, dans une proportion de 75 p. c. Ce problème vital fut un des
premiers auxquels s'est intéressé le Conseil d'Orientation économique du
Saguenay, fondé à Chicoutimi en septembre 1945. Ce conseil est formé d'un
groupe nombreux d'hommes d'affaires de la région qui y représentent les
chambres de commerce, les conseils municipaux, des associations économi-
ques régionales et les industries. Son objet est vaste; on peut le résumer ainsi:
«Orienter et favoriser le développement économique de la région dans le sens
de ses destinées et en fonction de ses ressources naturelles, de sa situation
géographique et de son facteur humain, afin de lui assurer une prospérité
réelle et durable 16.»

Plusieurs études ont déjà été soumises aux assemblées des membres et
discutées. Deux de ces études vont retenir notre attention et concernent
l'embauchage: celle de M. J.-G. Lamontagne, publiciste de Chicoutimi (24
novembre 1945) et celle de M. Philippe Grenier, directeur de la Commission
de l'Assurance-Chômage à Chicoutimi (22 avril 1946). Nous utiliserons
d'autres statistiques, que M. Grenier nous a en outre fournies très obligeam-
ment.

Afin de mieux nous rendre compte des fluctuations considérables qui se


sont produites dans l'embauchage de la région, examinons d'abord les occupa-
tions telles qu'elles étaient lors du dernier recensement du Canada en 1941. Le
tableau suivant nous renseigne :

16 Règlement no 1, adopté le 27 septembre 1945, texte communiqué par M. L.-.A. Dussault,


secrétaire-trésorier, Chicoutimi.
Benoît Brouillette, “ L’habitat et la population au Saguenay ” (1947) 20

Tableau V
Population active, âgée de 14 ans et plus, dans la région
du SaguenayLac-St-Jean, au recensement de 1941

Popula- Forêt,
Toutes mines, Comm. Commis
tion Agricul- Manu- Cons- Trans- Service Jour-
Comtés occupa- pêche, et de
totale 14 ture factures truction ports s naliers
tions chasse, finance bureau
ans et plus etc
Chicoutimi 47 101 24 891 4 451 1 411 4 572 2 083 1 391 1 622 3 895 1 053 4 274
Lac-St-Jean-Est 14 459 7 209 2 588 714 936 422 301 431 976 174 649
Lac-St-Jean-Ouest 12 472 11 213 5 662 1 118 752 307 450 521 1 407 202 685
Total 74 032 43 313 12 701 3 243 6 260 2 872 2 142 2 574 6 278 1 429 5 608

Remarquons que sur une population totale de 143,200, il y avait 74,000


personnes en état de travailler parce qu'âgées de 14 ans et plus. De ce nombre,
environ 43,300 étaient effectivement considérées comme des travailleurs et se
répartissaient entre les emplois suivants : l'agriculture, 29.5 p. c., les industries
manufacturières, 14.0 p. c., les services, 14.5 p. c., les travaux de manœuvres
(journaliers), 13.0 p. c., l'exploitation des ressources naturelles autres que
l'agriculture (forêts, mines, pêcheries, etc.), 7.5 p. c., la construction, 6.0 p. c.,
le commerce, 6.0 p. c., les transports, 5.0 p. c. et les commis de bureau, 3.3 p.
c. La majeure partie de ces travailleurs sont des ouvriers; en effet, sur 43,000,
il y en a près de 27,000. La différence est composée principalement de culti-
vateurs, de patrons d'entreprises et de leurs employés supérieurs. Il est utile,
afin de mieux se rendre compte du niveau de vie de cette classe prolétarienne,
de savoir ce qu'elle gagne par année, quels sont les salaires moyens de la
main-d’œuvre masculine et féminine et les divers niveaux de salaires. C'est ce
que montre le tableau suivant .

Nous observons d'abord que le salaire moyen des hommes n'est que de
841 dollars par année et celui des femmes, inférieur à 250 dollars. Plus de la
moitié des hommes gagnent moins de 1 000 dollars par an et 95 p. c. moins de
2,000, et 85 p. c. des femmes moins de 500 dollars. La durée de leur travail
s'étend sur les quatre-cinquièmes de l'année.

Enfin, notre dernier tableau montre que le chômage était minime pour les
ouvriers des 18 villes et villages recensés. Il n'était que de l'ordre de 4 p.c.
Cependant, la liste suivante est utile pour indiquer l'ordre de grandeur de
l'embauchage dans ces agglomérations.
Benoît Brouillette, “ L’habitat et la population au Saguenay ” (1947) 21

Tableau VI
Nombre des ouvriers de 14 ans et plus et salaires payés, 1941

Moyenne Répartition des ouvriers


Total des selon les salaires annuels en $
Nombre Salaires des
Comtés salaires
d’ouvriers moyens semaines Moins 450- 950- 1950- Plus de
(en $)
de travail de 450 949 1949 2 949 2 950
Chicoutimi 18 281 163 364 H. 996.00 41,91 3 071 4 539 7 170 729 193
F. 300.00 39,40 1 870 393 80 4 0
Lac-St-Jean-Est 3 902 29 660 H. 882.00 38,85 1 063 868 1 031 155 70
F. 234.00 41,17 613 42 11 0 0
Lac-St-Jean-Ouest 4 655 25 825 H. 646.00 35,83 1 657 1 282 608 78 37
F. 209.00 38,47 798 47 9 0 1
Total 26 838 218 849 H. 841.00 38,86 5 791 6 689 8 869 962 300
F. 247.00 40,00 3 281 100 100 4 1

Tableau VII
Ouvriers et chômeurs dans les principales villes de la région en 1941

Villes Nombre d’ouvriers Chômeurs


Jonquière-Kénogami 8 710 306
Chicoutimi,Rivière-du-Moulin, Ste-Anne 5 229 215
Arvida 1 953 18
St-Joseph d’Alma 1 451 69
Port-Alfred, Bagotville, Grande-Baie 2 108 117
Dolbeau 727 27
Roberval 688 48
Saint-Jérome 322 26
Saint-Félicien 316 12
Mistassini 311
Chambord 213 2
Normandin 181 9
Hébertville 188 23
Total 21 407 872

Examinons maintenant la situation du marché du travail durant la période


de guerre. II semble que les fonctionnaires chargés d'estimer le nombre des
travailleurs sont partis d'une base différente de celle du recensement car, en
septembre 1942, selon les informations de M. Philippe Grenier, il y avait dans
la seule région de Chicoutimi-Arvida (y compris les municipalités rurales
voisines) environ 47,000 travailleurs. Le total comprend les cultivateurs, les
Benoît Brouillette, “ L’habitat et la population au Saguenay ” (1947) 22

bûcherons et une main-d’œuvre féminine dont le recensement n'a pas tenu


compte. On y comptait plus de 12 000 employés venus de l'extérieur et
principalement occupés dans les constructions de Shipshaw et d'Arvida. Un an
plus tard, il y en avait 10,000 de moins. Les travaux du barrage étaient
terminés. Nous connaissons déjà l'origine de temporaire. Le va-et-vient (turn-
over) des ouvriers dans la région fut beaucoup plus considérable que ne le
laissent voir les moyennes de 12,000 arrivées et de 10,000 départs; car la
période d'embauchage de chacun était inférieure à l'année entière. Le bureau
du service sélectif a reçu, entre septembre 1942 et septembre 1943, environ
50,000 avis de séparation donnés par les employeurs et les employés. Ce
chiffre représente le nombre de personnes qui ont changé d'emploi. De ce
nombre, 26 000 permis furent émis dans la région, donc à des ressortissants
locaux.

En septembre 1943, M. Grenier estime qu'il y a dans la région 53,000


hommes en état de travailler (16 à 60 ans), auxquels il faut ajouter les 12,000
originaires de l'extérieur. Ce total comprend 18,000 personnes affectées aux
travaux de l'agriculture, ce qui laisse pour l'industrie, le commerce, la
construction, le transport, etc., environ 47,000 travailleurs. On en connaît la
répartition géographique qui est la suivante:

Arvida 16 205 17
Jonquière-Kénogami 7 913
Chicoutimi et ses environs 6 766
Saint-Joseph d’Alma 3 345
Port-Alfred 2 601
Roberval 2 134
Dolbeau 1 634
Total 40 598

Les 6 500 autres se répartissent ailleurs dans la région et comprennent une


partie des bûcherons. Ces derniers à eux seuls étaient au nombre de 15 500
vers la fin de 1943. Ce groupe de travailleurs est composé du plus grand
nombre de gens étrangers à la région après celui des employés dans la
construction. Voici leurs lieux d'origine, selon le domicile qu'ils ont déclaré:

17 Ce chiffre englobe les employés de l'usine (12 000) et ceux de l'entreprise de construction
qui exécutaient des travaux à Arvida et à Shipshaw.
Benoît Brouillette, “ L’habitat et la population au Saguenay ” (1947) 23

Région du Saguenay-Lac-St-Jean 9 550 soit 62%


Région des Cantons de l’Est 2 475 soit 16%
Région de la Gaspésie et Rive-Sud 1 392 soit 9%
Région de Québec et du Saint-Maurice 1 083 soit 7%
Régions diverses 939 soit 6%
Total 15 469

A la même époque, il y avait 952 bûcherons originaires de la région qui


travaillaient ailleurs.

En janvier 1946, on signale une réduction sensible de l'embauchage par


rapport à 1943. L'industrie de l'aluminium n'emploie que 3 500 personnes au
lieu de 12 000; la construction, 5 000 au lieu de 12 000. Seule l'industrie du
papier emploie plus d'ouvriers, soit 2 500 au lieu de 2 000. Il y a en outre de 8
000 à 10 000 hommes en forêt et ce nombre était insuffisant, car les
employeurs en réclamaient 5 000 de plus au 5 janvier et encore 1 500 au 17
février.

Au cours de l'année 1945, on vit réapparaître le chômage dans la région,


malgré le fait que la plupart des nouveaux venus l'eussent quittée. En novem-
bre, il y avait 2 800 personnes en quête d'emploi et 3 600 fin janvier 1946. Ces
derniers se répartissaient ainsi:

Chicoutimi-Arvida 1 457
Jonquière-Kénogami 1 390
Saint-Joseph d’Alma 295
Port-Alfred, Bagotville 290
Roberval 115
Dolbeau 58
Total 3 605

Tous ces chômeurs n'étaient pas aptes à répondre à l'appel de chantiers.


Plusieurs y seront sans doute allés; mais dès la saison de coupe et de flottage
terminée, des milliers de sans-travail reflueront vers les villes et les
campagnes de la région. M. Lamontagne estime que durant l'été de 1946, il
devait y avoir cinq cents chômeurs dans toute la région. En face de cette
situation, il jette le cri d'alarme. «Tous les esprits avertis, dit-il, savaient à
l'avance que le gigantesque éléphant gris qui a tant contribué au développe-
ment et à la prospérité passagère du Saguenay, nous conduisait directement au
Benoît Brouillette, “ L’habitat et la population au Saguenay ” (1947) 24

chômage 18.» Il réclame la création d'industries nouvelles plus variées et


recommande des mesures de longue portée et d'autres immédiates. Parmi les
premières, signalons un inventaire industriel et commercial de la région, une
politique progressive et audacieuses en vue de l'industrie nouvelle, une
campagne d'éducation populaire en faveur de la petite et la moyenne industrie,
une meilleure préparation de la jeunesse aux carrières industrielles, la recher-
che des capitaux nécessaires, une organisation financière (banque) favorisant
l'industrie, le développement du tourisme par une meilleure publicité, l'ex-
pansion de l'agriculture pour satisfaire le marché régional, un mode de
colonisation forestière.

Comme mesures immédiates, il suggère un programme de travaux publics:


amélioration du système ferroviaire et de la voirie, des installations portuaires
et de la navigation en général, des voies de communication en forêt, création
de nouveaux aéroports, l'électrification rurale et l'expansion du téléphone, le
drainage, nouveaux édifices publics, etc. Il estime que 55 industries nouvelles
employant 200 personnes chacune ramèneraient l'industrie de la région au
niveau de 1943. M. Philippe Grenier, dans son mémoire du 22 avril 1946,
précise davantage en énumérant 44 établissements qui trouveraient avantage à
venir s'établir dans la région. Elles donneraient du travail à 1 600 personnes,
qui en retireraient un salaire annuel de 1,600,000 dollars. Elles exigeraient une
mise de capital de 7,800,000 dollars et donneraient pour 10,650, 000 dollars
de produits.

Tels sont les remèdes que proposent des personnes qui ont réfléchi au
problème que pose la transformation de l'économie de la région à son rajus-
tement à la période normale de paix. Il est difficile pour nous de porter un
jugement sur le détail de ces projets; mais, chose certaine, il est urgent que de
nouveaux horizons de travail s'ouvrent pour répondre à l'accroissement rapide
de la population.

Benoît Brouillette,
professeur à l’École des Hautes
Études commerciales (Montréal)

Ce texte est la reproduction électronique d’un article de Benoît Brouillette


publié dans la revue L’Actualité Économique, janvier 1947, numéro 4, page
646 à 671.

18 J.-G. Lamontagne, Le problème du travail au Saguenay, rapport présenté au Conseil


d'orientation économique, 24 novembre 1945.
Benoît Brouillette, “ L’habitat et la population au Saguenay ” (1947) 25

Annexe
Tableau de la population de la région du SaguenayLac-St-Jean
par municipalités civiles, paroisses et bureaux de poste pour 1941- 1943 - 1944 et 1945

Superficie Population Population


Municipalités (acres) Population estimée selon les
Municipalités Terres catholique carnets de
Totale Paroisses religieuses Bureaux de poste
civiles occupées recensement
Rurales Urbaines 1941
(1941)
1941 1945 1943 1944
(acres) (acres) (acres)
(1) (2) (3) (4) (5) (6) (7) (8) (9) (10) (11)

CHICOUTIMI Pop.
Région du sud-est rurale
Chicoutimi (cité) 1 700 Pop. 16 040 Sacré-Cœur-de-Jésus 6 107 6 538 Chicoutimi 28 576 25 394
Rivière-du-Moulin 313 urbaine 1 561 St-François-Xavier 14 000 17 000 Haha-Baie 308 843
(village) (Total)
Chicoutimi (rural) 29 381 29 825 -- 3 214
Laterrière (village) -- -- 675 512 N-D-de-Laterrière 1 332 1 400 Laterrière 1 088 1 210
Laterrière (rural) 19 687 27 050 -- 840
Port-Alfred (ville) -- -- 672 3 243 St-Édouard 3 023 3 275 Port-Alfred 3 761 3 844
Bagotville (ville) -- -- 682 3 248
Bagotville nord- 18 645 29 929 -- 890 St-Alphonse-de-Liguori 4 400 4 466 Bagotville 4 756 4 298
ouest (rural)
Grande-Baie -- -- 600 2 230 St-Alexis-de-Grande-Baie 3 045 3 264 Grande-Baie 2 927 2 770
(village)
Grande-Baie 18 445 29 835 -- 836
(rural)
Otis (rural) 14 740 60 000 -- 703 St-Félix-Otis 700 1 025 Otis, Anse-aux- 684 585
Érables
Anse-St-Jean 8 545 30 000 -- 919 St-Jean-Baptiste 1 016 1 109 Anse-St-Jean 991 1 000
(rural)
Dumas (Petit 10 424 77 000 -- 823 St-François-d’Assise 800 881 Petit-Saguenay et 901 831
Saguenay (rural) St-Étienne-
Canton Hébert 10 000 -- -- 345 Mission Rivière-Éternité -- -- Hébert 339 334
Canton Ferland -- -- -- 392 St-Gabriel-de-Ferland 543 669 Berthe 376 600
Benoît Brouillette, “ L’habitat et la population au Saguenay ” (1947) 26

Superficie Population Population


Municipalités (acres) Population estimée selon les
Municipalités Terres catholique carnets de
Totale Paroisses religieuses Bureaux de poste
civiles occupées recensement
Rurales Urbaines 1941
(1941)
1941 1945 1943 1944
(acres) (acres) (acres)
(1) (2) (3) (4) (5) (6) (7) (8) (9) (10) (11)

Canton Boileau -- -- -- 262 Miss. Ste-Bernadette Ste-Bernadette et 237 --


Boileau
Canton Périgny -- -- -- 87
Totaux 129 867 283 639 4 632 9 311
26 834
36 145 (Total) 34 966 39 627 (Total) 44 944 41 699
Région du sud-
ouest
Arvida (cité) -- -- 8 000 4 753 Ste-Thérèse 2 902 3 468 Arvida 9 517 10 218
St-Jacques (1942) -- 3 388 Chute-à-Caron 175 175
2 070
Kénogami (ville) -- -- 806 6 579 Ste-Famille de Kénogami 7 754 10 719 Kénogami 10 563 9 935
Jonquière (ville) -- -- 1 798 13 769 St-Laurent de Jonq. St- 2 540 4 717 Jonquière 23 103 20 034
Pop.
Georges 3 426 3 856
rurale
St-Dominique 9 809 10 306
Pop.
Jonquière (rural) 17 547 23 560 -- 2 088
urbaine
Larouche (rural) 14 502 38 800 -- (Total) 874 St-Gérard-de-Magella 633 675 Larouche 564 634
St-Cyriac et 4 573 -- -- 188 St-Cyriac et Pibrac 186 --
Rivière Écorces
3 150
Totaux 36 622 62 360 10 604 25 101
28 251 27 064 39 199 44 108 40 996

RÉGION NORD-
SAGUENAY
Ste-Anne-de- Pop.
Chicoutimi -- -- 1 034 rurale 1 540
Ste-Anne-de-Chicoutimi 3 203 3 821 Ste-Anne 3 723 3 020
(village) Pop.
Tremblay (rural) 15 185 20 285 -- urbaine 1 442
St-Fulgence (rural) 24 851 35 950 -- 1 996 St-Fulgence 1 616 1 657 St-Fulgence 1 661 1 600
Benoît Brouillette, “ L’habitat et la population au Saguenay ” (1947) 27

Superficie Population Population


Municipalités (acres) Population estimée selon les
Municipalités Terres catholique carnets de
Totale Paroisses religieuses Bureaux de poste
civiles occupées recensement
Rurales Urbaines 1941
(1941)
1941 1945 1943 1944
(acres) (acres) (acres)
(1) (2) (3) (4) (5) (6) (7) (8) (9) (10) (11)

Ste-Rose-du-Nord Pop. Ste-Rose 344 381 Ste-Rose-du-Nord 320 336


(rural) ou Descente -- 16 415 -- rurale 44 Mission Tableau -- -- Tableau 16 --
des femmes Pop.
St-Honoré (rural) 23 890 53 600 -- urbaine St-Honoré 1 405 1 556 Martel 1 472 1 217
1 989
St-David 627 760 Falardeau 667 654
Shipshaw (rural) 8 925 17 000 -- 782 St-Jean-Vianney 730 991 Chute-Shipshaw 1 122 805
St-Ambroise -- -- 2 560- 458
(village)
St-Ambroise 1 553 1 750 St-Ambroise 1 679 1 675
St-Ambroise 24 264 37 760 -- 1 101
(rural)
Bourget (rural) 9 917 11 431 -- 760 St-Charles-Boromée 911 1 044 La-Décharge 894 856
Bégin (rural) 13 195 48 000 -- 883 St-Jean-l’Évangéliste 878 957 Bégin 875 886
Taché (rural) 22 022 20 000 -- 1 677 St-Nazaire 1 313 1 387 St-Nazaire 1 224 1 215
Labrecque (rural) 14 771 50 600 -- 1 218 St-Léon 1 091 996 St-Léon 1 016 925
Lac-des-Habitants 11 029 -- -- 290 N-D-du-Rosaire 415 404 Lamarche 382 412
Camps : Péribonka -- -- -- 305
Totaux 168 049 311 041 3 594 12 487
1 998
14 885 14 086 15 704 15 051 13 601
Comté Chicoutimi 334 538 657 040 18 830 24 948
53 933
Total 78 881 76 116 94 530 104 163 96 296
LAC-ST-JEAN-
EST
Région Sud- Pop.
Saguenay rurale
St-Joseph d’Alma -- -- 845 Pop. 6 449
(ville) urbaine
St-Joseph d’Alma 8 130 9 072 St-Joseph d’Alma 8 918 8 808
St-Joseph d’Alma 18 591 23 226 -- 1 909
(rural)
Benoît Brouillette, “ L’habitat et la population au Saguenay ” (1947) 28

Superficie Population Population


Municipalités (acres) Population estimée selon les
Municipalités Terres catholique carnets de
Totale Paroisses religieuses Bureaux de poste
civiles occupées recensement
Rurales Urbaines 1941
(1941)
1941 1945 1943 1944
(acres) (acres) (acres)
(1) (2) (3) (4) (5) (6) (7) (8) (9) (10) (11)

Riverbend (ville) -- -- 2 000 275 Ste-Marie-Isle-Maligne 722 824 Riverbend 397 303
Isle-Maligne -- -- -- 455
(ville) Isle-Maligne 831 913
St-Bruno (village) -- -- 1 560 491
St-Bruno (rural) 17 521 15 710 -- 1 234 St-Bruno 1 475 1 450 St-Bruno, Labarre 1 733 1 530
Hébertville-Station -- -- 800 950 St-Wilbrod 1 348 1 221
(village)
Hébertville -- -- 293 1 025 N-D-Hébertville 2 363 2 386 Hébertville 3 697 3 615
(village)
Hébertville (rural) 31 368 30 700 -- 1 653
St-Gédéon -- -- 700 696
(village) St-Gédéon 1 580 1 510 St-Gédéon 1 489 1 422
St-Gédéon (rural) 13 543 15 599 -- 900
Lac-Ste-Croix 11 076 10 000 -- 1 113 Ste-Croix 1 144 1 156 Lac-Ste-Croix 1 050 1 090
(rural)
Métabetchouan -- -- 251 1 469
(village)
St-Jérome 2 820 2 750 Métabetchouan 2 689 2 553
Métabetchouan 20 357 19 050 -- 1 382
(rural)
Desbiens (village) -- -- 120 1 018 St-Émilien 1 023 1 163 Desbiens 1 207 1 326
TOTAUX 112 456 114 285 8 646
6 569 12 373
Total 21 019 20 605 21 532 22 006 21 560
NORD DU
SAGUENAY
St-Cœur-de-Marie -- -- 554 Pop. 661
(village) rurale St-Cœur-de-Marie 1 806 1 794 Delisle 1 700 1 750
Delisle (rural) 19 380 20 770 -- Pop. 1 223
L’Ascension 14 817 31 276 -- urbaine 912 L’Ascension de N.S 910 975 Langlois 948 932
(rural)
Benoît Brouillette, “ L’habitat et la population au Saguenay ” (1947) 29

Superficie Population Population


Municipalités (acres) Population estimée selon les
Municipalités Terres catholique carnets de
Totale Paroisses religieuses Bureaux de poste
civiles occupées recensement
Rurales Urbaines 1941
(1941)
1941 1945 1943 1944
(acres) (acres) (acres)
(1) (2) (3) (4) (5) (6) (7) (8) (9) (10) (11)

St-Henri-de- 12 019 15 619 -- 740 St-Henri 732 775 Taillon 634 704
Taillon (rural)
Ste-Monique 11 684 40 700 -- 690 Ste-Monique 727 804 Ste-Monique 766 800
(rural)
TOTAUX 57 900 108 365 3 565
554 661
4 226 4 175 4 348 4 048 4 186
LAC-ST-JEAN-
OUEST
(Roberval)
Sud-ouest du Lac Pop.
St-André (rural) 11 388 29 000 -- rurale 815 St-André-du-Lac-St-J 783 765 St-André-du-Lac 595 709
Chambord -- -- 1 290 Pop. 1 029
(village) urbaine St-Louis-Chambord 1 791 1 781 Chambord 1 661 1 463
Chambord (rural) 17 406 28 789 -- 799
Dequen (rural) 15 270 24 137 -- 1 085 St-François-de-Sales 1 000 1 075 Dequin 1 100 1 085
Lac-Bouchette -- -- 845 624
(village)
St-Thomas-d’Aquin 1 482 1 424 Lac-Bouchette 1 354 1 325
St-Thomas- 16 224 103 064 -- 888
d’Aquin (rural)
Val-Jalbert -- -- 1 700 29 Val-Jalbert 57 84
(village)
Roberval (ville) -- -- 643 3 220 St-Jean-Brébeuf 2 140 2 269 St-Jean-Brébeuf 626 252
Roberval (rural) 22 831 28 111 -- 1 342 N-Dame-de-Roberval 2 131 2 385 Roberval 5 075 5 229
Pointe-Bleue 2 656 -- -- St-Chales-Pointe-Bleue 669 588 Pointe-Bleue 625 565
(réserve indienne)
Ste-Hedwidge 13 036 74 000 -- 850 Ste-Hedwidge 885 896 Ste-Hedwidge 823 826
(rural)
St-Prime (village) -- -- 499 441
St-Prime 1 786 1 850 St-Prime 1 768 1 772
St-Prime (rural) 23 470 37 841 -- 1 397
Benoît Brouillette, “ L’habitat et la population au Saguenay ” (1947) 30

Superficie Population Population


Municipalités (acres) Population estimée selon les
Municipalités Terres catholique carnets de
Totale Paroisses religieuses Bureaux de poste
civiles occupées recensement
Rurales Urbaines 1941
(1941)
1941 1945 1943 1944
(acres) (acres) (acres)
(1) (2) (3) (4) (5) (6) (7) (8) (9) (10) (11)

St-Félicien -- -- 467 1 603


(village) St-Félicien 3 740 3 951 St-Félicien 3 811 3 840
St-Félicien (rural) 26 707 29 853 -- 2 005
La-Doré (rural) 17 386 39 472 -- 1 301 N-D-de-la-Doré 1 320 1 432 Rivière-au-Doré 1 265 1 383
Autres parties 9 906 -- -- --
TOTAUX 176 280 394 267 10 482
5 444 6 946
17 428 17 727 18 420 18 778 18 533
Région nord-ouest
du Lac
St-Méthode Pop.
(Tokouapé) (rural) 25 618 43 400 -- rurale 1 350 St-Méthode 1 350 1 354 Tocouapé 1 274 1 071
Normandin Pop.
(village) -- -- 176 urbaine 1 029
St-Cyrille 2 878 3 125 Normandin 3 267 3 074
(rural)
Normandin (rural) 36 370 47 369 -- 2 071
St-Thomas-
Didyme (rural) 14 676 43 200 -- 903 St-Thomas 985 1 050 Didyme 1 023 1 000
St-Edmond-des- 11 321 11 580 -- 724 St-Edmond 687 797 St-Edmond-des- 724 725
Plaines (rural) Plaines
Albanel (village) -- -- 89 1 426
Ste-Lucie d’Albanel 2 100 2 300 Albanel 2 000 1 800
Albanel (rural) 26 880 47 828 -- 1 625
Girardville (rural) 18 029 29 074 -- 966 N.-D. de Lourdes 902 1 150 Girardville 1 052 1 092
Dolbeau (ville) -- -- 442 2 847 Ste-Thérèse-d’Avila 2 902 3 300 Dolbeau 3 330 4 042
Mistassini (village) -- -- -- 1 294
(rural) St-Michel-de-Mistassini 2 230 2 500 Mistassini 2 857 2 382
Mistassini (rural) 23 085 53 682 -- 1 227
St-Eugène (rural) 11 966 19 194 -- 945 St-Eugène 950 950 Argentenay 975 950
Canton Pelletier -- -- -- 499 Canton Pelletier 466 466
N.D. de Lorette 510 500
Canton Antoine -- -- -- -- St-Antoine-du-Lac 256 0
Benoît Brouillette, “ L’habitat et la population au Saguenay ” (1947) 31

Superficie Population Population


Municipalités (acres) Population estimée selon les
Municipalités Terres catholique carnets de
Totale Paroisses religieuses Bureaux de poste
civiles occupées recensement
Rurales Urbaines 1941
(1941)
1941 1945 1943 1944
(acres) (acres) (acres)
(1) (2) (3) (4) (5) (6) (7) (8) (9) (10) (11)

St-Stanislas (rural) 15 893 22 753 -- 869 St-Stanislas 830 898 St-Stanislas 812 798
Ste-Jeanne-d’Arc 21 350 38 924 -- 1 369 Ste-Jeanne-d’Arc 1 309 1 361 Boulanger 1 370 1 284
Canton Proulx -- -- -- 283 Ste-Élisabeth-de-P 326 558 Manigouche 483 430
Péribonka (rural) 12 493 26 590 -- 674 St-Édouard 625 664 Péribonka 670 598
Dalmas (rural) 11 649 24 499 -- 796 St-Augustin 843 840 Dalmas 808 730
Canton Milot 10 000 -- -- 673 St-Ludger-de-Milot 646 775 Milot 709 693
Canton Hudon -- -- -- 54
Canton Dumais -- -- -- 96
Canton Bourbon -- -- -- 27
Rivières et lacs -- -- -- 97 Passes-Dangereuses 300 --
TOTAUX 239 300 408 093 16 037
1 507 5 596
21 633 20 073 22 122 22 376 21 135
Comtés du 585 936 1 025 010 14 074 38 730
Lac-St-Jean 25 576
64 306 62 580 66 422 67 208 65 414
COMTÉ
SAGUENAY
(embouchure de la
rivière)
Tadoussac -- -- 640 766
(village) 5 035 7 989 -- 176 Ste-Croix-de-Tadoussac 957 886
Pop.rurale
Tadoussac (rural)
Pop.
Sacré-Cœur-de-
urbaine
Jésus (village) -- -- 2 632 766 Sacré-Coeur-du-Saguenay 1 158 1 207
S.C de J (rural) 19 453 21 957 -- --
St-Firmin (rural) 5 544 45 000 -- 401 St-Firmin 417 390
TOTAUX 30 032 74 946 1 460
GRAND TOTAL 920 506 1 756 996 3 272 1 532
TOTAL 2 992 2 802 2 753 3 000 3 000
Benoît Brouillette, “ L’habitat et la population au Saguenay ” (1947) 32

Superficie Population Population


Municipalités (acres) Population estimée selon les
Municipalités Terres catholique carnets de
Totale Paroisses religieuses Bureaux de poste
civiles occupées recensement
Rurales Urbaines 1941
(1941)
1941 1945 1943 1944
(acres) (acres) (acres)
(1) (2) (3) (4) (5) (6) (7) (8) (9) (10) (11)

36 176 65 138
81 041
146 179 141 498 163 705 174 311 164 700

Fin du texte

Vous aimerez peut-être aussi