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Les grandes décisions de la COP 27


Par Fidèle DJIMADJA 23 novembre 2022  222

Les décisions prises à la COP 27 de Charm el-Cheikh ont rendu justice aux pays vulnérables, mais ralenti la lutte contre le changement
climatique.

Charm el-Cheikh a abrité pendant deux semaines la 27e Conférence des


parties sur les changements climatiques (COP 27). Les négociations
censées prendre fin le vendredi 18 novembre ont été prolongées
jusqu’au dimanche 20 dans l’objectif de parvenir à un accord accepté de
tous.

La question abordée durant ce sommet en Égypte a été le financement des


pays affectés par le changement climatique. Malgré la réticence de certains
au départ, les négociations ont abouti à un accord définitif approuvé à
l’unanimité par les différentes parties présentes.

Le texte annoncé par le président de la COP 27, Sameh Shoukry, le dimanche


matin est considéré par les experts comme un tournant historique dans la
lutte contre le changement climatique. Pour une première fois, les
principales victimes des catastrophes naturelles dues aux émissions de gaz à
effet de serre (GES) seront dédommagées par les nations riches.

Lire aussi : COP 27 : Un fonds sera créé pour les pays affectés par le
changement climatique

La création d’un fonds dédié aux pertes et


dommages climatiques


Sameh Shoukry, président de la COP 27.

La plus grande décision de la Conférence de Charm el-Cheikh a été


l’approbation de la création d’un fonds pour les pertes et préjudices. Ce
véhicule fournira des compensations aux pays pauvres affectés par le
réchauffement climatique. Les plus grands bénéficiaires seront les États
ayant été touchés par les catastrophes naturelles dont les causes résident
dans l’augmentation des émissions de GES liées à l’activité humaine.

Les contributeurs au fonds seront identifiés au cours des prochains mois. Un


« comité de transition » sera créé et aura pour mission de formuler les
recommandations sur la manière de rendre opérationnel ce nouveau
véhicule. Les travaux de cette équipe seront menés et achevés avant la COP
28 de Dubaï. Une première réunion devrait avoir lieu avant fin mars 2023.

Lire aussi : L’Afrique dispose de 200 milliards $ de projets climatiques


finançables (Boston Consulting Group)

De nouveaux mécanismes de financements au profit


des pays pauvres
Outre le fonds de compensation, les États ont validé la mise en place de
nouveaux modes de financement pour aider les pays en développement à
faire face aux effets du changement climatique. Le Réseau de Santiago sera
bientôt mis en service. Il permettra d’apporter une assistance technique aux
pays subissant des dégâts irréparables liés au phénomène.

L’accord de la COP 27 recommande aux nations riches de tenir, enfin, leur


promesse de verser chaque année une aide de 100 milliards $ pour

l’adaptation climatique dans les pays pauvres. Un nouveau Fonds
d’adaptation a été créé au cours de la conférence pour renforcer la résilience
des communautés vulnérables aux effets du changement climatique. Il a
enregistré des promesses de dons de 230 millions $.

Lire aussi : La BEI approuve 11 milliards $ pour accélérer la transition


verte en Afrique et dans le monde

Les financements collectifs annoncés


Certaines parties réunies à Charm el-Cheikh ou hors du territoire égyptien,
en marge de la COP 27, ont promis de nouveaux financements pour la lutte
contre le changement climatique. Le G7 a lancé un plan intitulé « Global
Shield Financing Facility » pour fournir des fonds aux pays victimes de
catastrophes climatiques. Le G20 a quant à lui annoncé un nouveau
partenariat visant à mobiliser 20 milliards $ au cours des trois ou cinq
prochaines années. Cette enveloppe permettra d’accélérer la transition
énergétique.

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professionnelle

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d’industrialisation sur les 11 dernières années

Un pool de pays, dont le Danemark, la Suède, l’Allemagne, la Suisse et la


Slovénie, ont promis 105,6 millions $ pour soutenir le Fonds pour
l’environnement mondial. Ce financement vise à répondre aux besoins
immédiats d’adaptation au climat dans les pays à faible altitude et à faible
revenu. Le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, a par ailleurs
annoncé un plan de 3,1 milliards $ pour garantir la protection de chaque
habitant de la planète grâce aux systèmes d’alerte précoce. Les fonds seront
mobilisés au cours des 5 prochaines années.

Lire aussi : L’Afrique pourrait éviter plus de 800 000 décès par an en
prenant des mesures contre la pollution atmosphérique

Les actions phares…


Les États ont convenu d’intensifier leurs plans nationaux d’atténuation des
effets du changement climatique. Ils ont été invités à renforcer leurs efforts
pour la réduction progressive de l’énergie produite à partir du charbon. Ils
ont également été exhortés à supprimer les subventions inefficaces aux
combustibles fossiles.

Un programme de travail sur l’atténuation a été lancé pendant la COP 27. Ses
travaux débuteront immédiatement après le sommet et se poursuivront
jusqu’en 2030. Deux dialogues mondiaux seront organisés chaque année
pour faire le point des avancées. Un « sommet sur l’ambition climatique » se
tiendra en 2023 pour renforcer l’ambition des différentes parties pour
l’atteinte des objectifs de l’Accord de Paris.

Des pays, représentant plus de la moitié du PIB mondial, se sont alliés pour
lancer un plan de 25 nouvelles actions à mettre en œuvre avant la COP 28 de
Dubaï. Ce programme ciblera les domaines de l’électricité, du transport
routier, de l’acier, de l’hydrogène et de l’agriculture. Les 5 secteurs
représentent plus de 50 % des émissions mondiales de GES. Les 25 actions
prévues dans le plan visent à les décarboner et à réduire leurs émissions.
Elles permettront également de diminuer les coûts de l’énergie à l’échelle
mondiale, d’améliorer la sécurité alimentaire et de développer une
agriculture durable.

Les nations ont, par ailleurs, été appelées à protéger les espaces verts qui
constituent des puits de carbone pour la planète. Un Partenariat a été lancé
à l’initiative des États-Unis, de la France et d’autres pays dont le Gabon pour
unir les efforts des gouvernements, des entreprises et des responsables
communautaires pour mettre un terme à la déforestation et à la dégradation
des terres d’ici 2030. Un sommet sur la forêt est prévu pour début 2023 à
Libreville.

Insatisfaction, frustration et déception dans le rang


des défenseurs de l’environnement


Sherry Rehman, ministre pakistanaise du changement climatique à la COP 27.

Les acteurs intervenant dans la lutte contre le changement climatique ont


été unanimes sur l’appréciation de la décision relative à la création d’un
fonds dédié aux pertes et dommages climatiques. Tous ont salué la «
justice » faite aux pays pauvres victimes du changement climatique. Il s’agit
selon Sherry Rehman, ministre pakistanaise du changement climatique et
présidente en exercice du groupe de négociation G77+Chine, citée par Ouest
France, d’un « acompte sur l’investissement à plus long terme dans notre
avenir commun et un investissement dans la justice climatique ». Le
Pakistan, rappelons-le, a connu cet été des inondations catastrophiques qui
ont tué plus de 1700 personnes.

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Certains défenseurs de l’environnement ont toutefois exprimé des réserves


concernant l’atteinte de l’objectif de ce fonds. Ils doutent de la bonne
volonté de certains pays riches à y contribuer, d’autant plus qu’ils n’ont pas
pu tenir la promesse de fournir 100 milliards $ par an aux nations pauvres
pour leur adaptation climatique. « Cela a été une longue lutte pour les pays
développés afin d’obtenir ce fonds, le diable sera dans les détails et il faut
encore que de l’argent y soit versé » a déclaré l’ONG Christian Aid. L’ONG
Oxfam demande à ce que ce fonds devienne « fonctionnel au plus vite » en
raison de l’urgence climatique. « (…) Les pays riches, principalement
responsables du réchauffement de notre planète, doivent mobiliser dès
maintenant d’importantes ressources pour aider les pays vulnérables » a
indiqué l’organisation.

Le point de désaccord général de ce sommet a été l’absence de progrès vers


la réduction des émissions de GES. Aucune clause contraignante n’a été
incluse dans l’accord de la COP 27 pour atteindre cet objectif. Le document
ne comporte d’ailleurs pas les termes « gaz » et « pétrole » alors que de
nouveaux projets d’hydrocarbures voient le jour un peu partout dans le
monde. Il ne fait qu’indiquer la nécessité de diminuer de 45% les émissions
de GES d’ici 2030 pour limiter le réchauffement de la planète à 1,5°C.

« C’est une vraie déception » selon Agnès Pannier-Runacher, ministre


française de la Transition énergétique. « Nous devons drastiquement réduire
les émissions maintenant et c’est une question à laquelle cette COP n’a pas
répondu » a déploré le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres. « Le
monde ne peut pas se permettre de répéter une nouvelle COP comme celle-
ci, qui ne parvient pas à accroître l’ambition, le financement et la crédibilité. 
(…) Les dirigeants ont laissé passer l’occasion d’accélérer l’élimination des
combustibles fossiles, nous maintenant sur la voie de la catastrophe
climatique » a commenté le Fonds mondial pour la nature (WWF). « C’est
aberrant. Si nous n’abandonnons pas rapidement toutes les énergies
fossiles, nous dépasserons le seuil critique de 1,5 °C et aucune somme
d’argent ne pourra couvrir le coût des pertes et des préjudices de la crise
climatique » a indiqué Greenpeace.

Lire aussi : Les forêts africaines sont menacées par de nombreux projets
d’exploration pétrolière et gazière (étude)

La bonne nouvelle pour les pays africains


La création d’un fonds dédié aux pertes et dommages climatiques profitera
notamment à l’Afrique. La région ne représente que 4 % des émissions
mondiales de GES, mais subit gravement les effets dévastateurs du
changement climatique. Selon la Banque africaine de développement (BAD),
l’Afrique compte 90 % des pays les plus vulnérables au changement
climatique. Ceux-ci ont pendant longtemps demandé à ce que les nations
riches leur fournissent les financements nécessaires pour leur adaptation
climatique.

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Oman

Le nouveau fonds devrait leur apporter de la satisfaction. Il profitera


notamment à des pays comme le Nigeria en Afrique de l’Ouest. L’État
anglophone est actuellement confronté à la montée du niveau des eaux
dans plusieurs de ses États. Les inondations causées par les pluies de cette
année ont tué plus de 600 personnes et blessé 2776 autres. Plus de 120 000
maisons ont été dévastées et 392 000 hectares de terres agricoles ravagées.
1,5 million de Nigérians se sont déplacés à l’intérieur du pays pour trouver
un abri hors des eaux. Au Niger voisin, 263 000 personnes sont actuellement
sinistrées à cause des inondations. Les eaux de pluie massives ont entraîné
la mort d’environ 200 personnes et ont dévasté 30 000 maisons, 232 greniers
à céréales et 6 centres de santé.

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unique.

Les pays de la Corne de l’Afrique devraient aussi bénéficier du fonds


nouvellement créé. Ils sont confrontés depuis plusieurs mois à la pire
sécheresse de ces 40 dernières années. Les pluies sont extrêmement rares,
entraînant des pertes massives de production agricole. En 2022, plus de 9,2

millions de têtes de bétail ont perdu la vie dans la région. 22 millions de
personnes sont désormais en situation d’insécurité alimentaire en Afrique
de l’Est selon le rapport publié mardi par le Programme alimentaire mondial
(PAM). 

En Afrique australe, le Mozambique devrait être le pays le plus éligible au


fonds.  Il a été classé au premier rang des États les plus vulnérables au
changement climatique en 2021 selon l’indice annuel de l’ONG
GermanWatch. À ses côtés, on retrouve le Malawi et le Zimbabwe. Ces
nations ont récemment été frappées par de violents cyclones qui ont
dévasté leurs infrastructures et ravagé leurs cultures. Le cyclone ayant sévi
en mars 2019 a fait 600 morts et mis 2,5 millions de personnes dans le besoin
au Mozambique. En 2022, le pays a été touché par 5 cyclones et tempêtes
tropicales. Celui de Gombe en mars dernier a tué plus de 60 personnes et
affecté 736 000 autres.

Lire aussi : La probabilité des inondations meurtrières en Afrique de


l’Ouest a été multipliée par 80 à cause du réchauffement climatique

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