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Alors que cette COP 28 avait lieu dans l’un des plus grands pays producteurs
d’hydrocarbures et que les projecteurs étaient fortement braqués sur le sujet des
énergies fossiles, cette COP a débouché, au terme d’âpres négociations, sur
un engagement historique des Etats à “opérer une transition en dehors des
énergies fossiles”.
Aussi incongru que cela puisse paraître, c’est la première fois que les énergies fossiles,
dont la production et la consommation sont la principale cause du dérèglement
climatique, sont mentionnées explicitement avec l’objectif de s’en passer. Il s’agit donc
d’un signal politique et économique inédit, qui acte le début de la fin des énergies
fossiles. La preuve que la mobilisation de la société civile et de nombreux Etats
commence à payer.
Peut-être encore plus significatif : les Etats se sont entendus à cette COP sur un objectif
mondial de triplement des capacités d’énergies renouvelables et de doublement
des gains en efficacité énergétique d’ici à 2030. Des mesures nécessaires pour
faciliter la transition hors des énergies fossiles et permettre aux 700 millions de
personnes encore privées d’électricité à travers le monde d’obtenir un accès à l’énergie.
Par ailleurs, il n’est fait presque aucune mention de la manière dont les pays du Nord
vont soutenir financièrement les pays du Sud dans leur transition énergétique,
alors que celle-ci va leur coûter extrêmement cher. L’Agence Internationale de l’Énergie
estime par exemple que les investissements dans la transition coûteront environ 1900
milliards de dollars par an aux pays en développement, même lorsqu’on ne compte
pas la Chine.
La COP s’est ouverte avec un accord positif sur la mise en place du Fonds pour les
pertes et dommages, qui permettra d’aider les communautés les plus vulnérables à se
remettre de catastrophes climatiques. Celui-ci a été accompagné de premières
promesses de financements, notamment de la part de la France ou des Emirats Arabes
Unis. Mais avec seulement 700 millions de dollars promis au total alors que les besoins
pourraient atteindre 500 milliards par an, le montant de ces premières contributions
est dérisoire.
Par ailleurs, les Etats se sont entendus à la COP 28 sur un Objectif Mondial pour
l’Adaptation, un texte énonçant les principales mesures à prendre pour adapter nos
systèmes agricoles, de gestion de l’eau ou encore nos infrastructures au changement
climatique, en incitant à mettre en œuvre des plans d’action appropriés.
Financements pour les pays du Sud, plans de transition : les grands enjeux à venir
Après cette COP 28 en demi-teinte, de grands chantiers s’annoncent pour avancer dans
la transition hors des énergies fossiles et la réponse aux impacts du changement
climatique.
Maintenant que le signal est envoyé, charge aux Etats de mettre en œuvre concrètement
cette transition hors des énergies fossiles, et ce dans une logique d’équité entre pays du
Nord et pays du Sud. Les Etats devraient ainsi développer des trajectoires comprenant
des dates claires de sortie des énergies fossiles, avec des échéances encore plus
rapprochées pour les pays riches. Ils devraient intégrer ces trajectoires de sortie dans
leurs prochaines contributions déterminées au niveau national, qui sont les plans de
réduction de gaz à effet de serre que les Etats devront remettre d’ici la COP 30 au Brésil
en 2025.
Par ailleurs, la question des financements climatiques pour les pays du Sud sera un
sujet essentiel dès la COP 29, l’an prochain en Azerbaïdjan, où sera négocié le Nouvel
Objectif Collectif Quantifié. Derrière ce nom un peu barbare se cache notamment le
soutien financier que les pays riches s’engageront à fournir aux pays du Sud dans les
prochaines années. Alors que les pays du Nord n’ont toujours pas tenu leur vieil
engagement de fournir 100 milliards de dollars par an aux pays du Sud, il s’agira
de revoir à la hausse le niveau de soutien au regard des besoins réels de ces
Etats, qui pourraient atteindre 3000 milliards de dollars par an vers 2030.
Dans la continuité du Sommet pour un Nouveau Pacte Financier qui s’est tenu à Paris
en juin dernier, les Etats vont discuter durant les prochains mois des mesures permettant
d’augmenter les financements à destination des pays du Sud, par exemple via un
meilleur accès aux capitaux ou encore la réforme des banques de développement. Si
certaines initiatives sont pertinentes, à l’image de la taskforce lancée par la France et
le Kenya à la COP 28 pour financer l’action climatique via des taxes
internationales, il faudra s’assurer que ces différentes mesures ne renforcent pas
l’endettement des pays du Sud et ne dédouanent pas les pays riches de leur
devoir d’augmenter significativement leurs contributions, au maximum sous forme
de dons.